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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 36e Législature,
Volume 137, Numéro 42

Le mardi 24 février 1998
L'honorable Gildas L. Molgat, Président


LE SÉNAT

Le mardi 24 février 1998

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Les Jeux olympiques d'hiver

Le souvenir des Jeux de 1998 à Nagano, au Japon

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, alors que la flamme olympique s'éteignait à Nagano, les Canadiens avaient raison d'être fiers.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Graham: C'est Thérèse Brisson, originaire de Montréal, un pilier de l'équipe de hockey féminine canadienne qui a remporté la médaille d'argent, qui a le mieux exprimé les choses, lorsqu'elle a déclaré:

Je pense qu'au cours de ces jeux, nous avons appris à quel point la feuille d'érable est notre passeport pour le monde entier.

Nous nous rappelons tous de grands moments à Nagano. Nous pensons à notre récolte de médailles en patinage de vitesse et à notre équipe féminine de curling qui a remporté l'or. Nous nous rappelons de bobs dévalant la piste à toute vitesse et de compétitions endiablées de surf des neiges, ainsi que de beaucoup de héros locaux. Nous nous rappelons de jeunes femmes filant vers l'or ou l'argent en patinage de vitesse. Nous nous rappelons de ceux qui ont fait des merveilles sur la glace et sur la neige. Nous nous rappelons également de l'audace et du triomphe de nos athlètes, de l'allégresse de certains et de la tristesse de certains autres. Nous n'avons pas oublié le courage d'un homme appelé Elvis ni le cran de Susan Auch.

Nous nous rappelons du grand Gretzky, une inspiration pour tous les jeunes athlètes de notre époque qui ont vu ce millionnaire marcher avec de jeunes athlètes qui avaient à peine un sou. C'est un homme qui connaissait les affres de la défaite, parfois le pire sentiment du monde, qui a fait preuve de la même classe dans la défaite que dans la victoire. On ne l'appelle pas «la Merveille» pour rien. C'est une légende du hockey qui a vécu comme tous les autres athlètes dans le village olympique et qui a vécu avec des gens qui comprenaient que ce qui nous réunit est beaucoup plus fort que ce qui nous sépare.

Nous nous rappelons de ces merveilleux Canadiens qui ont dit adieu aux Jeux d'hiver en déployant un drapeau de 9 mètres sur 18 qu'ils avaient introduit, semble-t-il, de façon subreptice dans les cérémonies de clôture. C'est un drapeau aimé et respecté dans le monde entier et un drapeau qui vaut de l'or, un drapeau porté par nos étoiles à Nagano où tous les membres de l'équipe canadienne étaient des héros.

Ce sont des athlètes aimés et enviés par des millions de gens dans le monde entier, des athlètes arborant la feuille d'érable, des Canadiens qui comprenaient, à la lumière de l'opinion publique, en voyant la réputation enviée que notre nation a dans le monde entier, que le Canada est un endroit rempli d'espoir et de promesses pour des millions de gens de la planète et un endroit qui évoque un monde meilleur.

Ces athlètes ont constaté par eux-mêmes que la feuille d'érable nous ouvre le monde, que notre force vient de notre respect mutuel et de notre tolérance, que nous sommes considérés dans l'opinion mondiale comme un endroit spécial, une société compatissante et libre, une vaste fédération qui est un microcosme d'une planète dont tous les pays sont liés les uns aux autres, une planète qui s'est rassemblée sur les pentes enneigées de Nagano dans le cadre de la trêve olympique.

[Français]

Honorables sénateurs, nous célébrons aujourd'hui les heures magiques et les victoires des Jeux d'hiver. Aux habitants de Nagano, qui retrouvent la tranquillité de leur ville, nous disons merci.

[Traduction]

(1410)

Aucun d'entre nous n'oubliera les images des lutteurs de sumo frappant le sol de toutes leurs forces pour chasser les démons avant que les jeux commencent, de la magnifique Ode à la joie et de ces choeurs du monde entier, des cérémonies de clôture sous un ciel étoilé et avec des chevaux couverts de fleurs, de l'extinction des projecteurs pour faire place aux milliers de lanternes de papier qui formaient une mer de lumière.

Plus que tout, honorables sénateurs, il y avait les enfants: les enfants dispersant des pétales de fleurs et formant des chorales, les milliers d'enfants, hurlant et riant, qui venaient assister aux épreuves de ces derniers jeux du millénaire, annonciateurs des prochains. Là-bas, sous l'oeil des esprits des siècles passés, s'étaient réunis les enfants d'un nouveau Japon. Ils ont regardé, ils ont ri, ils ont applaudi les athlètes. Ils ont appris ce qu'étaient l'endurance, le courage et la souffrance. Ils ont connu les meilleurs des concurrents des Jeux olympiques d'hiver et l'ancien esprit de l'homme, l'humilité de faire partie de la grande joie que l'on éprouve à gagner, la noblesse et la grâce de faire partie de l'agonie que l'on ressent dans la défaite.

Alors que les chants s'éteignaient dans le stade rempli de petites lumières, on s'est rendu compte que l'or véritable de Nagano était la promesse d'un monde meilleur et les enfants qui nous y conduiront.

Des voix: Bravo!

Le conseil international de réadaption pour les victimes de torture

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour parler de l'autre aspect de l'humanité, de la question des victimes de torture. Même si l'on doit féliciter le ministre des Affaires étrangères pour la contribution du Canada au traité d'interdiction des mines antipersonnel et pour le succès rencontré par le Canada lorsqu'il s'agissait d'attirer l'attention sur les victimes civiles de la guerre, il faut mentionner que le ministre ne s'est préoccupé que d'un aspect du problème des civils; l'autre aspect, l'aspect invisible, est celui de la torture.

En novembre dernier, le sénateur Angus recevait, ici à Ottawa, une délégation danoise du Conseil internationale de réadaptation pour les victimes de torture, laquelle a rencontré un certain nombre de ministères et de parlementaires, dont j'étais.

Le CIRT est un organisme multilatéral présent dans une centaine de pays et qui est financé par le Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les victimes de la torture. Le Canada a aussi des organisations nationales qui aident ces victimes. C'est même l'un des premiers pays où de tels services ont été mis sur pied. Le premier service de ce genre a été fondé à Toronto, en 1983. On en trouve maintenant dans 11 localités et dans la plupart des provinces. Le Canada a participé à la création du Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les victimes de la torture, en 1981. C'est un groupe dont j'ai eu l'honneur de faire partie à la fin des années 80.

Il y a un besoin croissant de financement international pour les activités d'assistance aux victimes de torture. Toutefois, la contribution du Canada a été minime. Elle est loin d'égaler celles de certains autres pays, notamment les États-Unis.

Jusqu'à récemment, la contribution des États-Unis était de l'ordre de 100 000 $ US par année. Dernièrement, ce pays a beaucoup augmenté sa contribution annuelle, pour la porter à 1,5 million de dollars US, et on s'attend à ce qu'il hausse encore cette somme à 3 millions pour 1998. La contribution annuelle du Canada est d'environ 18 000 $ US. C'est gênant, mais c'est une contribution semblable à celle de pays comme la Corée du Sud et l'Afrique du Sud, alors que des pays plus petits comme la Suède donnent 388 000 $ US.

Dans une lettre au sénateur Angus, datée du 9 janvier 1998, le ministre des Affaires étrangères affirme ceci:

 

Jusqu'à maintenant, le Canada n'a fait qu'une contribution négligeable au Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les victimes de la torture. En dépit des réductions budgétaires et des restrictions financières, le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international considère ce fonds comme prioritaire et cherche activement d'autres sources de financement. J'ai communiqué avec ma collègue, l'honorable Diane Marleau, ministre de la Coopération internationale et ministre responsable de la Francophonie, pour réclamer que l'Agence canadienne de développement international examine la possibilité de contribuer à ce fonds.
Honorables sénateurs, l'intention est bonne, les paroles sont rassurantes, mais rien n'a encore été fait. Le Canada doit considérer le problème de la torture comme une question urgente si nous voulons regagner notre réputation sur la question des droits de la personne. Le Canada doit faire une contribution plus importante pour aider les personnes qui sont victimes de torture dans le monde, notmment dans les pays où il s'occupe déjà de promouvoir activement les droits de la personne.

Son Honneur le Président: Honorable sénateur, je regrette de vous interrompre, mais vos trois minutes sont écoulées. Le sénateur a-t-il la permission de poursuivre?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Andreychuk: Je demande à tous les sénateurs d'aider ces victimes en exhortant le gouvernement à augmenter considérablement son financement, de façon multilatérale et bilatérale.

Les Jeux olympiques d'hiver

La fin des Jeux de 1998 à Nagano-Les félicitations aux athlètes canadiens

L'honorable Raymond J. Perrault: Honorables sénateurs, je remercie le leader du gouvernement au Sénat pour son très éloquent discours sur les Jeux olympiques. En tant qu'ancien ministre du Sport, je l'ai écouté très attentivement.

De nombreuses personnes méritent des remerciements pour notre réussite, qui est attribuable non pas à un énorme appareil gouvernemental, mais aux mères et aux pères canadiens qui ont donné leur temps sans compter pour amener les jeunes dans les piscines et autres installations sportives. Les succès que nous avons remportés n'auraient pas été possibles sans la contribution énorme de ces bénévoles dans toutes les provinces canadiennes.

Quelqu'un me disait l'autre jour, au sujet d'un athlète, qu'il n'avait obtenu qu'une sixième place. Une sixième place à l'échelle mondiale? C'est une réussite magnifique, pas un échec. Même ceux qui n'ont pas obtenu de médaille ont apporté une contribution énorme à notre pays. On peut en dire autant de ceux qui n'ont pas pu faire partie de l'équipe olympique et qui sont restés au Canada, malgré des milliers et des milliers d'heures de travail et d'entraînement et de cours de natation suivis aux petites heures du jour.

La meilleure performance de l'histoire olympique canadienne est le fruit du travail des mères, des pères, des entraîneurs, des bénévoles et de tous les autres Canadiens qui ont superbement servi leur pays.

Le très honorable Brian Mulroney, c.p.

Hommages

L'honorable Marjory LeBreton: Honorables sénateurs, il y a cinq ans aujourd'hui, le premier ministre Brian Mulroney faisait l'annonce de sa démission à titre de premier ministre et de chef du Parti progressiste-conservateur.

Il est indubitable que cet homme et le gouvernement qu'il a dirigé ont profondément modifié le cours de l'histoire du Canada. Notre pays a subi des changements radicaux sous la gouverne de M. Mulroney. L'histoire reconnaîtra, comme il se doit, le courage et la clairvoyance dont lui-même et son gouvernement ont fait preuve, notamment par l'adoption de mesures comme le libre-échange avec les États-Unis, l'ALENA, l'abolition de la taxe de 13,5 p. 100 sur les ventes des fabricants et l'adoption de la TPS de 7 p. 100, une taxe à la consommation visant à stimuler les exportations. Le gouvernement de M. Mulroney a également éliminé l'Agence d'examen de l'investissement étranger, il a aboli le Programme énergétique national, privatisé des sociétés d'État comme Teleglobe, Air Canada, Canadair/de Havilland et a entamé le processus de privatisation de Petro-Canada. La nouvelle loi sur les brevets a renforcé l'industrie pharmaceutique et attiré de nouveaux investissements au Canada. Ce ne sont là que quelques-unes des réalisations du gouvernement de M. Mulroney.

Sur le plan financier, le taux de croissance moyen des dépenses de programmes a été réduit de 70 p. 100. Les dépenses du gouvernement au chapitre des programmes étaient passées de 1,23 $ pour chaque dollar de revenu à 0,97 cents, lorsque M. Mulroney est parti en 1993. Le déficit de fonctionnement, qui se chiffrait à 16 milliards de dollars par année, a été remplacé par un surplus de 6,6 milliards. Le déficit fédéral a été réduit de près de moitié, passant de 8,7 p. 100 du PIB en 1984 à 4,6 p. 100 en 1990-1991. La récession mondiale a porté un dur coup à ce redressement, mais M. Mulroney et son gouvernement ont laissé une situation financière beaucoup plus saine que celle dont ils avaient hérité à leur arrivée au pouvoir.

Lorsque M. Mulroney a démissionné en juin 1993, le nombre d'emplois au Canada avait augmenté de 1,4 million par rapport à septembre 1984. Le taux préférentiel était, à 6 p. 100, le plus bas en 20 ans et le taux d'inflation, à 1,5 p. 100, le plus faible en 30 ans. Les Nations Unies venaient de classer le Canada au premier rang des pays du monde pour la qualité de vie de ses citoyens. C'est ce pays que Brian Mulroney a légué à ses successeurs il y a près de cinq ans.

(1420)

Je tiens à souligner que ces politiques, qu'il s'agisse du libre-échange ou de la gestion financière, n'étaient pas une fin en elles-mêmes. Elles étaient le moyen d'arriver à une fin qui visait de plus nombreux débouchés, des salaires plus élevés et une meilleure qualité de vie pour les Canadiens.

En ce jour du cinquième anniversaire de l'annonce de sa démission, qui coïncide avec le jour de la présentation du budget de Paul Martin de 1998, je voudrais, pour terminer, féliciter le gouvernement actuel pour avoir maintenu en place toutes ces politiques dont nous on nous dira et dont nous verrons plus tard, j'en suis sûre, les résultats qu'elles ont donnés.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'informe le Sénat que la période de 15 minutes réservée aux déclarations de sénateurs a expiré. Permission est-elle donnée de continuer?

Des voix: D'accord.

[Français]

Le décès de Madame Kathleen Shannon

Hommages

L'honorable Lucie Pépin: Honorables sénateurs, c'est avec un grand regret et une profonde tristesse que nous avons appris, en janvier dernier, le décès de Kathleen Shannon des suites d'un cancer du poumon. Mme Shannon, une des premières cinéastes de l'Office national du film, est la fondatrice du réputé Studio D. Elle a toujours été reconnue par ses amies et ses collègues comme une visionnaire dotée d'un tempérament de chef, une cinéaste et féministe de premier plan, une personne qui a guidé ses contemporains avec un esprit aiguisé ainsi qu'un engagement profond et constant par rapport au rôle des femmes dans la société.

Dans le communiqué de l'Office national du film, il est écrit:

Kathleen Shannon a commencé toute jeune à exercer son métier de cinéaste; après son arrivée à l'ONF en 1956, elle a poursuivi sa carrière comme monteuse son, monteuse image, réalisatrice et productrice. Elle avait des idées très arrêtées sur le féminisme bien avant que le mouvement féministe se fasse connaître. En 1974, elle a mis sur pied le Studio D, le studio des femmes qui avait comme mandat de faire des films par, pour et sur les femmes. Selon la cinéaste Terra Nash (Si cette planète vous tient à c9ur):

Si la porte d'en avant était fermée aux femmes cinéastes, elle nous laissait entrer par celle d'en arrière. Si celle-ci aussi était fermée, elle nous faisait passer par la fenêtre.

[Traduction]

Kathleen a dirigé ce studio tout à fait innovateur pendant 12 ans et supervisé la production d'une centaine de films, dont les courts métrages primés par des oscars: Je trouverai un moyen, Si cette planète vous tient à coeur, et Flamenco à 5 h 15. Les films réalisés dans ce studio ont pénétré les coeurs et les esprits d'un vaste éventail d'auditoires et influencé la société à plusieurs niveaux. Les titres tels que Speaking our Peace, sur le désarmement, Not a Love Story, sur la pornographie, To a Safer Place, sur l'exploitation sexuelle des enfants, L'avortement - Histoire secrète, sur le droit de procréation, et Behind the Veil - Nuns, sur l'histoire des femmes, ont atteint un auditoire qui dépassait largement le mouvement féministe.

Barbara James, directrice générale de la programmation anglaise de l'Office national du film a fait remarquer que «Kathleen avait un énorme impact sur les femmes dans le domaine de la production cinématographique, à l'intérieur et à l'extérieur de l'ONF. Elle avait une foi inébranlable dans le caractère unique des expériences que vivent les femmes et était déterminée à faire ressortir ces expériences à l'écran. Le fait qu'un grand nombre de causes qu'elle a défendues sont maintenant acceptées et évidentes est la preuve de sa réussite.»

[Français]

Le gouvernement canadien a reconnu le mérite de Kathleen Shannon en la nommant membre de l'Ordre du Canada en 1986. Afin que nous puissions réaliser l'héritage idéologique légué par cette grande cinéaste, la cinéaste Gerry Rogers et la productrice Signe Johansson ont récemment fait un film intitulé Kathleen Shannon: On Film, Feminism & Other Dreams.

Au nom de toutes les femmes du Canada, je voudrais lui rendre hommage pour l'héritage qu'elle nous a laissé et pour avoir eu le courage de dévoiler la violence, l'injustice et l'inégalité des femmes dans ce pays. À sa famille, à ses amies et amis, nos sympathies et toute notre reconnaissance.

[Traduction]

Le mois de l'Histoire des noirs

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, je signale aux honorables sénateurs que février est le Mois de l'histoire des Noirs, au Canada.

C'est en 1926 qu'aux États-Unis, le célèbre éducateur noir Carter G. Woodson a proposé de désigner une Semaine de l'histoire des Noirs. Il était d'avis que les manuels d'histoire de l'enseignement régulier ne tenaient pas compte des réalisations des Afro-Américains et que, pour célébrer leur riche culture, il fallait absolument aller au-delà du programme régulier. Cet objectif a été atteint grâce à la tenue d'événements spéciaux visant à mettre en valeur l'histoire des Noirs aux États-Unis. En 1976, la Semaine de l'histoire des Noirs est devenue le Mois de l'histoire des Noirs.

Au Canada, nous célébrons le Mois de l'histoire des Noirs depuis 1970. Dès le début, cette célébration a donné aux membres de notre communauté l'occasion de se rencontrer chaque année pour échanger leurs visions de la société. Février a été désigné le Mois de l'histoire des Noirs, parce que c'est le mois de la naissance de Fredrick Douglass, abolitionniste de l'esclavage et grand orateur, et celle d'Abraham Lincoln.

Au Canada, la communauté noire a souffert aussi qu'on ne la reconnaisse pas dans les manuels et les programmes scolaires, et les anthologies, par exemple. Les réalisations de cette communauté ont effectivement été peu reconnues, sinon pas du tout. Les noms de personnalités telles que Thomas Peters, James Robinson Johnston, Anne Packwood, Richard Preston, Harry Gairey et Don Moore restent inconnus, non seulement des membres de la communauté noire, mais aussi de la plupart des Canadiens.

Le mois qui s'achève a été dynamique. En dépit du lourd programme des déplacements au Canada et à l'étranger du comité des banques, j'ai eu l'honneur de participer à de nombreuses célébrations partout au Canada, y compris à l'école secondaire de Sackville et à l'école Sir John A. Macdonald de Sackville, en Nouvelle-Écosse. J'ai alors pu échanger avec des élèves, apprendre directement toutes les répercussions qu'exercent les démons jumeaux du racisme et du sectarisme sur les individus et les collectivités. J'ai donné à ces jeunes, qui arrivent à l'âge adulte, un message d'espoir en un monde meilleur, en un meilleur Canada - un Canada libéré du racisme.

Samedi dernier, j'ai accompagné le maire de Nepean, Mme Mary Pitt, à l'inauguration officielle de la Semaine de l'histoire africaine de cette ville, une première. J'ai souligné l'importance que cette manifestation revêtait pour les Canadiens d'origine africaine de la région d'Ottawa-Carleton. J'ai insisté sur l'importance que tous les Canadiens doivent accorder à la conservation des traditions humanistes chères au Canada. Je crains aujourd'hui que cette réputation ne soit menacée quand je vois des politiciens réagir aux attaques des médias contre les nouveaux immigrants et réfugiés en multipliant les règlements, qui sont de plus en plus rigoureux.

Dimanche, à Montréal, j'ai été le conférencier invité à la cérémonie organisée par le Centre for Research Action on Race Relations et le Congrès des femmes noires du Canada. J'ai souligné l'importance de protéger, de conserver et de promouvoir l'histoire et la culture des Noirs, et j'ai proposé comme modèle à suivre dans la région de Montréal la Society for the Preservation of Black Culture, un organisme de la Nouvelle-Écosse.

J'ai également souligné l'importance de prendre conscience des piètres résultats dont fait état le dernier rapport sur l'équité en matière d'emploi dans la fonction publique fédérale, et de mettre en oeuvre des moyens pour remédier à la situation. J'ai également touché un mot sur les recommandations récemment formulées en vue de la réforme de la Loi sur l'immigration et sur les nombreuses dispositions de celle-ci qui ont un effet négatif sur les minorités visibles au Canada.

Lundi de cette semaine, j'ai eu l'honneur de prendre la parole devant trois classes d'étudiants de l'école secondaire d'Outremont, à Montréal. J'ai souligné entre autres l'importance des modèles de rôle de Noirs pour notre communauté et l'ensemble des Canadiens. Mon message se résumait à ceci: vous êtes l'espoir de demain, l'objectif de l'égalité pour tous est toujours d'actualité et, malgré les progrès accomplis, le racisme est loin d'avoir disparu.

On m'a demandé de m'entrenir le mois prochain avec les étudiants de l'Université Simon Fraser au sujet de l'expérience des Noirs au Canada.

Aujourd'hui, j'invite tous les Canadiens à se joindre à nous pour célébrer le Mois de l'histoire des noirs. Puissent la connaissance et la compréhension triompher de l'ignorance et de l'intolérance. Contribuons à bâtir des ponts pour rapprocher nos communautés. C'est ainsi que le Canada deviendra encore davantage un pays où il fait bon vivre.


AFFAIRES COURANTES

Les travaux du Sénat

L'ajournement

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)h) du Règlement, je propose:

Que, lorsque le Sénat ajournera aujourd'hui, il demeure ajourné jusqu'à demain, mercredi 25 février 1998, à 13 h 30.

(1430)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, la permission est-elle accordée?

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, avec ce genre d'avis de motion concernant l'heure de la séance mercredi, les sénateurs libéraux verraient-ils un inconvénient à ce que, demain, en début de séance, la Chambre adopte un ordre précisant que, à 15 h 15, Son Honneur se lèvera et déclarera que cette motion nous a été présentée d'office? Autrement dit, à 15 h 15, Son Honneur se lèvera et dira: «Le Sénat est maintenant saisi de la motion d'ajournement». Cela pourrait régler le problème que nous avons tous les mercredis depuis un certain temps.

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, de ce côté-ci, nous serions ravis si nous pouvions avoir un ordre mettant un peu de rigueur dans nos travaux de façon à ce que les audiences des comités puissent débuter à 15 h 15, comme prévu.

L'honorable John B. Stewart: Honorables sénateurs, le sénateur Kinsella pourrait-il expliquer sa suggestion?

Si je ne me trompe, nous nous réunissons à 13 h 30 le mercredi afin que les comités puissent se réunir à 15 h 15. Autrement dit, l'heure à laquelle nous devrions lever la séance n'est pas 15 h 15, mais plutôt 15 heures. Mon honorable collègue serait-il prêt à porter l'heure limite à 15 heures au lieu de 15 h 15?

Deuxièmement, si je comprends bien sa proposition, à une heure donnée, il a mentionné 15 h 15, le Président mettra la motion d'ajournement aux voix. Dans de telles circonstances, la motion ferait l'objet d'un débat. Ainsi, on peut supposer que, selon ce que nous arriverions à introduire dans le débat, celui-ci pourrait durer une heure, voire même une heure et demie. Je pense qu'il ne s'agirait pas d'une motion ordinaire, qui serait exemptée du débat, mais bien d'une motion pouvant faire l'objet d'un débat. Et j'ai bien l'impression que ce n'est pas là l'intention de l'honorable sénateur, n'est-ce pas?

Le sénateur Kinsella: J'essayais de trouver une solution aux problèmes que nous avons tous les mercredis. Je n'ai pas étudié la question aussi en détail que j'aurais dû le faire pour savoir si cette technique serait appropriée. Par conséquent, j'en fais part à titre d'indication de la bonne volonté qui existe de ce côté-ci et de notre désir de poursuivre un objectif commum à tous, je crois. Nous pouvons y réfléchir et peut-être suggérer d'autres solutions.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

Projet de loi sur les lettres et billets de dépôt

Rapport du comité

Permission ayant été accordée de revenir à la présentation de rapports de comités permanents ou de comités spéciaux:

L'honorable Catherine S. Callbeck, au nom de l'honorable Michael Kirby, président du comité sénatorial permanent des banques et du commerce, présente le rapport suivant:

Le mardi 24 février 1998

Le comité sénatorial permanent des banques et du commerce a l'honneur de présenter son

SEPTIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été déféré le projet de loi S-9, Loi concernant les lettres de dépôt et les billets de dépôt et modifiant la Loi sur la gestion des finances publiques, a, conformément à l'ordre de renvoi du vendredi 12 décembre 1997, étudié ledit projet de loi et en fait maintenant rapport avec l'amendement suivant:

Page 5, article 17: substitution, aux lignes 36 et 37, de ce qui suit:

«articles 11 à 15 et qui effectue un paiement final et irrévocable, à la date ou aux dates prévues, des montants nécessaires à la»

Respectueusement soumis,

Le président,
MICHAEL KIRBY

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur Callbeck, au nom du sénateur Kirby, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

Projet de loi canadien sur les coopératives

Rapport du comité

L'honorable Catherine S. Callbeck, au nom de l'honorable Michael Kirby, président du comité sénatorial permanent des banques et du commerce, présente le rapport suivant:

Le mardi 24 février 1998

Le comité sénatorial permanent des banques et du commerce a l'honneur de présenter son

HUITIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été déféré le projet de loi C-5, Loi régissant les coopératives, a, conformément à l'ordre de renvoi du mardi 16 décembre 1997, étudié ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.

Respectueusement soumis,

Le président,
MICHAEL KIRBY

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, si j'ai bien compris, selon la procédure établie pour le dépôt des documents des comités, les rapports doivent être présentés par le président ou le vice-président du comité. Je peux me tromper, mais je crois avoir vu le président et je sais que le vice-président est présent. Pourquoi alors ce rapport n'est-il pas présenté par le président ou le vice-président du comité?

Le sénateur Callbeck: Honorables sénateurs, le sénateur Kirby ne pouvait être présent cet après-midi et il m'a demandé de déposer ces rapports.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, en l'absence du président, il revient automatiquement au vice-président d'un comité permanent du Sénat de présenter le rapport. Je ne voudrais pas que ce qui s'est passé aujourd'hui devienne un précédent. Toutefois, nous accepterons la manière dont le rapport est déposé aujourd'hui.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Callbeck, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)


Le Programme d'échange de pages avec la Chambre des communes

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, avant de passer au prochain article à l'ordre du jour, j'aimerais vous présenter les pages qui seront ici avec nous dans le cadre du programme d'échange de pages avec la Chambre des communes.

Nous avons aujourd'hui parmi nous Katherine Telford, qui étudie à la faculté des sciences sociales de l'Université d'Ottawa. Elle se spécialise en sciences politiques. Katherine est de Toronto.

[Français]

Honorables sénateurs, Craig Rice, de Maple Ridge, en Colombie-Britannique, étudie à la faculté des lettres de l'Université d'Ottawa.

[Traduction]

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite, à vous deux, la bienvenue au Sénat.


(1430)

PÉRIODE DES QUESTIONS

La santé

Les compressions de dépenses visant l'assurance-maladie-La réponse du ministre aux critiques-La position du gouvernement

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, le 19 février dernier, en réponse à une députée qui lui demandait si le gouvernement libéral se portera à la défense des soins de santé et s'il veillera à ce qu'il n'y ait plus de décès attribuables à l'engorgement des salles d'urgence et aux compressions dans les hôpitaux, le ministre de la Santé a déclaré:

 

Si la députée s'intéressait plus aux faits qu'aux discours typiquement creux du NPD, ce serait un progrès énorme.
Le leader du gouvernement au Sénat peut-il nous préciser si le ministre est d'avis que tous ceux qui font connaître leur opposition à la crise que traversent les soins de santé au Canada tiennent des discours creux?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je ne qualifierais aucune déclaration de discours creux, à moins probablement d'être en pleine campagne électorale. Je ne le ferais certainement pas ici.

Il reste cependant que les dépenses au titre des soins de santé dans notre province, la Nouvelle-Écosse, ont augmenté et qu'elles continueront de croître, comme l'a précisé le premier ministre de la province.

Le sénateur Oliver: Le leader du gouvernement admettra-t-il que, à cause des réductions des paiements de transfert au titre de la santé qu'a imposées le gouvernement libéral, les patients du Canada paient très cher les efforts d'Ottawa visant à équilibrer le budget?

Un peu plus tôt aujourd'hui, j'ai reçu un appel d'une personne âgée de la Nouvelle-Écosse qui se plaignait d'avoir reçu son congé de l'hôpital, à cause de la pénurie des services. Que faut-il faire?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, le gouvernement fédéral et tous les autres paliers de gouvernement de chaque province cherchent une façon de dépenser plus efficacement l'argent des contribuables consacré aux soins de santé. Je suis conscient des inquiétudes des Canadiens. Il n'y a rien de plus important, du moins certainement aux yeux des Canadiens, qu'un bon régime de soins de santé universel et équitable.

La promesse d'indemnisation des victimes de l'hépatite C-La position du gouvernement

L'honorable Norman K. Atkins: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. La semaine dernière, le 20 février, on a demandé au ministre de la Santé si le gouvernement fédéral agirait de façon unilatérale pour régler le dossier de l'indemnisation des victimes de l'hépatite C. En réponse à la question, le ministre a déclaré:

 

[...] personne ne serait plus heureux que moi de pouvoir enfin proposer un programme d'indemnisation aux personnes atteintes de l'hépatite C qui sont les innocentes victimes de cette tragédie.
Il ajoutait:

 

[...] je suis prêt à affirmer que notre gouvernement ne se dérobera pas et qu'il assumera ses responsabilités dans ce dossier.
Au moins 30 000 de nos concitoyens sont atteints de l'hépatite C. Le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il dire aux Canadiens si le gouvernement est maintenant prêt à les indemniser de façon unilatérale?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, comme mon honorable collègue le sait, des réunions se tiennent depuis dix jours à Toronto entre le ministre fédéral de la Santé et ses homologues provinciaux. Ce dossier fait partie des discussions. On n'a pas encore pris de décision finale, bien que l'on ait fait état de progrès. Je crois savoir que des négociations se poursuivent.

Le sénateur Atkins: Si le gouvernement n'est pas disposé à agir de façon unilatérale pour le moment, le sénateur Graham pourrait-il nous dire quand il considérera qu'une telle initiative relève de sa responsabilité envers les Canadiens, et pourquoi il continue à atermoyer dans sa résolution de régler ce dossier urgent?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je ne crois pas avoir dit que le gouvernement avait écarté la possibilité d'agir de façon unilatérale, mais, dans tous les cas, il suivra certainement la voie de la négociation qui, espérons-le, devrait se révéler la plus fructueuse pour tous les Canadiens de toutes les provinces.

La réduction des paiements de transfert aux provinces-L'effet sur le public-La position du gouvernement

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Un article de journal paru à la une du Winnipeg Sun du 17 février comportait les sous-titres suivants:

 

Des patients séjournent parfois jusqu'à une semaine dans les couloirs des salles d'urgence de nombreux hôpitaux de la ville.
On attribue le manque criant de lits disponibles aux compressions dans les soins de santé.
Des hôpitaux renvoient souvent des ambulances vers d'autres établissements hospitaliers pour résoudre le problème d'engorgement.
Une femme qui attendait dans un couloir n'a obtenu un lit aux soins intensifs qu'après avoir subi un arrêt cardiaque.
À cause des compressions importantes et draconiennes que le gouvernement a faites dans les transferts aux provinces au titre des soins de santé, les Canadiens souffrent comme jamais auparavant. Alors que les compressions dans le secteur des soins de santé commencent à ébranler sérieusement les Canadiens, le gouvernement fédéral continue de dire à la population que la situation s'améliore. «Ne vous inquiétez pas, soyez heureux.»

Ce n'est tout simplement pas le cas, honorables sénateurs. La situation à Winnipeg n'est pas un incident isolé. Elle est symptomatique de ce qui se produit dans les hôpitaux de St. John's à Victoria. Les gens souffrent du manque de fonds fédéraux dans les soins de santé.

L'honorable leader du gouvernement au Sénat pourrait-il dire aux contribuables canadiens à quel moment le gouvernement reconnaîtra sa responsabilité financière et mettra un terme à la crise dans le secteur des soins de santé?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, j'espère que le sénateur Stratton posera également cette question au gouvernement du Manitoba.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Graham: Je crois savoir que le gouvernement du Manitoba, et c'est tout à son honneur, a réalisé un excédent budgétaire qu'il a toutefois décidé de ne pas affecter à l'amélioration des établissements de santé de cette province. Il préfère le garder en réserve pour les jours plus sombres, ce qui, en soit, est parfaitement louable. Par la même occasion, je pense que nous devrions examiner qui est responsable de la situation et conclure que c'est le gouvernement du Manitoba.

Le sénateur Stratton: Honorables sénateurs, est-ce que c'est cela se renvoyer la balle? Qui va assumer la responsabilité? Est-ce le leader et son gouvernement? L'honorable sénateur sait que ce n'est pas vrai. Le sénateur ne peut prétendre le contraire.

Le sénateur Carstairs: C'est vrai.

Le sénateur Stratton: Le leader peut-il me dire pourquoi, malgré la nouvelle manne de 12,5 milliards de dollars au titre du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, les transferts au Manitoba pour la santé, l'éducation et l'aide sociale diminueront encore de 12 millions de dollars au cours des cinq années à venir?

Le sénateur Graham: Cela est tout à fait inexact.

Le sénateur Stratton: Si le leader dit non, peut-il au moins m'expliquer pourquoi et me donner des détails?

Répondra-t-il à cette question: à titre de leader du gouvernement au Sénat et de représentant de sa province, la Nouvelle-Écosse, au Cabinet, peut-il m'expliquer pourquoi les paiements de transfert à la Nouvelle-Écosse pour la santé, l'éducation et l'aide sociale vont diminuer encore de 14 millions de dollars sur cinq ans?

Le sénateur Graham: Le sénateur sait que les transferts au titre de la santé ont été portés à 12,5 milliards de dollars et que cela se traduira par une hausse de plusieurs milliards de dollars pour chacune des provinces au cours des prochaines années.

Le sénateur Stratton: Je ne vous crois pas.

La réduction des paiements de transfert aux provinces-La baisse de qualité des services de dépistage du cancer du sein-La position du gouvernement

L'honorable Marjory LeBreton: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Selon un article de la Presse canadienne paru dans The Toronto Star le 23 février, une tendance troublante semble balayer le pays: des femmes annulent leur rendez-vous de mammographie. Les établissements de santé ont durement souffert des réductions des transferts aux provinces imposées par le gouvernement fédéral. Selon ce rapport, la moitié des 338 cliniques ne satisfont pas aux normes. Le problème, c'est que le sondage ne précise pas quelles cliniques ne sont pas conformes aux normes. Les femmes qui ont communiqué avec la Société canadienne du cancer du sein ont exprimé leur surprise et leur inquiétude en apprenant que ces cliniques ne sont pas régies par des normes de qualité nationales.

Voici ma question: le leader du gouvernement au Sénat dira-t-il aux Canadiennes que le ministre de la Santé s'engagera à établir une série de normes nationales pour garantir qu'il y ait des cliniques de dépistage du cancer du sein de qualité dans tout le Canada?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le sénateur LeBreton a soulevé une question très pertinente. Je suis très heureux que nos vis-à-vis posent autant de questions sur la santé parce qu'elles sont importantes pour tous les Canadiens. Nous devrons tous reconnaître davantage la nécessité d'avoir le meilleur système de santé possible qui soit juste et accessible de façon égale à tous les Canadiens.

(1450)

Pour ce qui est du financement, le plancher de la contribution pécuniaire versée aux provinces au titre du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux est passé de 11 milliards à 12,5 milliards de dollars.

Le sénateur Lynch-Staunton: À combien s'élevait cette contribution pécuniaire il y a trois ans?

Le sénateur Graham: Cela veut dire que les provinces recevront près de 7 milliards de dollars de plus sur six ans pour financer les soins de santé, l'éducation postsecondaire et l'aide sociale.

Le sénateur Lynch-Staunton: Ce n'est pas ce que disent les provinces.

Le sénateur LeBreton: J'espère qu'une partie de cet argent servira à régler le très grave problème du cancer du sein.

La réduction des paiements de transfert aux provinces-L'assurance concernant la sécurité des services de dépistage du cancer du sein-La position du gouvernement

L'honorable Marjory LeBreton: J'ai une question complémentaire à poser. Lorsque ce sondage a été effectué, le gouvernement a utilisé des codes à des fins de confidentialité. Les femmes d'un bout à l'autre du Canada ainsi que les cliniques concernées voudraient bien recevoir l'assurance que les diverses installations sont sécuritaires. Le ministre demandera-t-il à son collègue à l'autre endroit de prendre les mesures nécessaires pour informer les cliniques qui ne satisfaisaient pas aux normes? Déterminera-t-il comment communiquer ces renseignements aux cliniques elles-mêmes ainsi qu'aux femmes qui pourraient avoir besoin des services offerts dans ces cliniques?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, la réduction des dépenses publiques au titre des soins de santé résulte d'une restructuration, comme mes collègues d'en face le savent. Cette restructuration des programmes provinciaux de soins de santé vise à accroître l'efficacité et l'efficience des programmes fédéraux de soins de santé.

J'ai parlé d'une augmentation de la contribution pécuniaire, qui passera à 12,5 milliards de dollars par année en 1997-1998. Je devrais mentionner aussi que, si on additionne la contribution pécuniaire et les points d'impôt, le TCSPS représente actuellement plus 25,2 milliards de dollars par année, et ce montant augmentera en 1998-1999. Nous espérons donc pouvoir compter sur un plan de financement stable et prévisible.

En même temps, je reconnais les points importants soulevés par le sénateur LeBreton et je ne manquerai pas de les signaler aux personnes responsables.

L'énergie

La mise en oeuvre de la Loi sur les carburants de remplacement-Demande de réponses aux questions inscrites au Feuilleton

L'honorable Colin Kenny: Honorables sénateurs, j'ai une question à poser au leader du gouvernement au Sénat. Comme le savent nombre d'entre vous, j'ai fait inscrire toute une série de questions au Feuilleton depuis environ mai 1997. Ces questions ont été inscrites à nouveau au Feuilleton après la présentation du discours du Trône. Il s'agit des questions nos 8, 16, 19, 23, 24, 27, 29, 30, 37, 43, 45, 51 et 53.

Le sénateur Lynch-Staunton: Je sais ce que vous voulez dire.

Le sénateur Kenny: J'ignore combien de temps il faut au gouvernement pour répondre à des questions simples et directes. Ces questions ne sont pas difficiles. Ce ne sont pas des questions compliquées. Elles concernent un projet de loi qui a d'abord été présenté ici. Il s'agit de questions simples telles que celles-ci: les responsables des parcs de véhicules de votre ministère ont-ils déjà eux-mêmes conduit des véhicules à carburant de remplacement? Le ministre utilise-t-il du carburant de remplacement?

Aucune de ces questions n'est difficile. Et pourtant, le gouvernement semble avoir un mal extraordinaire à y répondre. Le leader du gouvernement au Sénat aurait-il l'obligeance de me dire combien de mois devrai-je encore attendre avant d'avoir les réponses à ces 13 questions?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le sénateur fait bien de revenir à la charge. Nous allons prendre des mesures aujourd'hui même. J'ai le plaisir d'annoncer que le leader adjoint du gouvernement déposera bel et bien aujourd'hui les réponses aux questions nos 8, 29 et 30. J'espère que d'autres viendront dans le courant de la semaine.

Les droits de la personne

L'aide aux victimes de la torture-La possibilité d'accroître le financement-La position du gouvernement

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Concernant le sujet que j'ai signalé tout à l'heure dans ma déclaration, le Canada a contribué à créer, en 1981, le Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les victimes de la torture, mais la contribution canadienne est tristement faible et loin de satisfaire aux besoins croissants du Fonds international d'aide aux victimes de la torture. Toutefois, d'autres pays commencent à contribuer au fonds.

Le ministre des Affaires étrangères semble avoir reconnu la nécessité d'accorder la priorité au financement de l'aide aux victimes de la torture et paraît chercher activement de nouvelles ressources par l'intermédiaire de la ministre de la Coopération internationale.

Le leader du gouvernement expliquera-t-il aux sénateurs pourquoi le Cabinet ne semble pas avoir pris une décision sur cette question et pourquoi le premier ministre ne se prononce pas sur cette importante question de droits humains?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je reconnais que c'est une question de droits de la personne d'importance. Le ministre des Affaires étrangères est un ardent défenseur de ces causes. En fait, il les a soulevées à maintes reprises. Il est très sensible aux problèmes auxquels sont exposés les plus démunis de la terre, particulièrement les victimes de torture et d'intimidation. Le sénateur peut avoir l'assurance que je porterai la question à l'attention de mes collègues, particulièrement du premier ministre et du ministre des Affaires étrangères.

Le sénateur Andreychuk: J'ai une question complémentaire. Le comité des droits de l'homme des Nations Unies se réunira bientôt. Certains segments de la société canadienne ont de plus en plus l'impression que le travail de ce comité ne reçoit pas toute l'attention qu'il recevait auparavant de la part du Cabinet et du premier ministre.

Le gouvernement, comme suite à ce qu'il a fait pour obtenir l'interdiction des mines terrestres, s'engagera-t-il à augmenter sa contribution financière au comité en signe de soutien au travail de grande valeur qui est accompli à Genève au nom des victimes de la torture?

Le sénateur Graham: Je pense que le sénateur Andreychuk exprime ses doléances à un moment on ne peut plus propice. Il ne fait aucun doute que le compte rendu de la réunion annuelle du comité des droits de l'homme sera pris très au sérieux. Je ferai part des préoccupations du sénateur aux responsables en usant de toute la persuasion dont je suis capable.

Le patrimoine canadien

La possibilité de célébrations pour les athlètes olympiques-La position du gouvernement

L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, j'ai raté la période des déclarations de sénateurs, mais j'ai une question à poser au leader du gouvernement au Sénat à propos de sa déclaration fort éloquente et opportune au sujet de la performance de nos athlètes aux Jeux olympiques d'hiver, au Japon.

Tout comme le sénateur Perrault, je rends hommage à ces Canadiens qui ont fait notre fierté. Sans rien vouloir enlever aux médaillés, je voudrais mentionner d'une façon spéciale la présence de «la Merveille», car il était là, malgré la défaite de notre équipe. Il représentait fièrement le Canada et faisait partie de l'équipe.

Des voix: Bravo!

Le sénateur St. Germain: Je suis conscient des difficultés causées par la diversité de notre grand pays et l'immensité du territoire, mais le gouvernement prévoit-il une fête qui réunirait tous ces athlètes afin de permettre à tous les Canadiens de profiter de ce bel épisode et des réalisations de tous ces Canadiens extraordinaires pour renforcer l'unité de notre pays?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Je dois reconnaître au sénateur St. Germain une remarquable adresse, puisqu'il a réussi à glisser dans ses propos un hommage à celui qu'on appelle «la Merveille».

J'espère que le gouvernement du Canada fera quelque chose au moment opportun. Je ne suis au courant d'aucune proposition précise, mais je présume que nos athlètes olympiques seront honorés comme il se doit à un moment bien choisi. Nous pouvons espérer voir Wayne Gretzky au nombre des athlètes ainsi honorés. Le prochain affrontement entre les Rangers de New York et les Sénateurs d'Ottawa pourrait être une bonne occasion.

(1500)

Il y a eu tellement d'étoiles à Nagano qui ont impressionné tous les Canadiens. Il ya a eu d'incroyable moments de fierté pour les Canadiens, une fierté inspirée par nos athlètes et tous ceux qui ont soutenu leurs efforts. Comme le sénateur Perrault nous l'a rappelé à juste titre, les parents de ces athlètes ont consenti de lourds sacrifices. Il faisait chaud au coeur de voir tant de parents des athlètes sur les lieux regarder leurs enfants livrer compétition. Le sénateur Callbeck a parlé de M. MacEachern, de l'Île-du-Prince-Édouard, et de la magnifique conversation, si chaleureuse, qu'il a eue avec sa mère que, de Nagano, il rejoignait dans son île au moyen de la télévision par satellite. Ce sont ces choses qui nous rapprochent et qui font que nous sommes si fiers d'être Canadiens.

Des voix: Bravo!

L'Iraq

La prévention de la crise grâce à l'accord intervenu avec le secrétaire général des Nations Unies-La position du gouvernement

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, le mardi 17 février, le sénateur Grafstein nous avait invités à exprimer notre avis sur la politique canadienne à l'égard de la crise en Iraq. C'est avec un grand honneur et un grand plaisir que je le ferai le moment venu. Toutefois, je voudrais tout d'abord dire que tous les sénateurs, j'en suis sûr, se réjouissent du succès, jusqu'ici, de la mission du secrétaire général des Nations Unies qui a réussi à éviter une terrible crise au Moyen-Orient.

Les sénateurs sont silencieux et je suis sûr qu'ils sont d'accord. En tout cas, je n'entends pas de protestation.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Prudhomme: Puisque le président Clinton a appelé pour demander au premier ministre Chrétien, au nom du Canada, de participer à l'effort, la question que je me pose est la suivante: le président Clinton a-t-il consulté le gouvernement canadien avant d'annoncer qu'il accepterait l'avis du secrétaire général, selon lequel on était en train de parvenir à une entente?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je sais que le ministre des Affaires étrangères, M. Axworthy, a parlé au secrétaire d'État américain Albright hier, et qu'il devait s'entretenir avec les ministres des Affaires étrangères du Royaume-Uni et de la France. J'ignore s'il l'a fait.

Comme les honorables sénateurs le savent, le secrétaire général Annan a tenu ce matin une séance d'information à l'intention du Conseil de sécurité des Nations Unies. Nous sommes tous au courant de l'entente qui assurerait à la CSNU l'accès sans restriction et sans condition à tous les sites en Iraq, y compris aux sites présidentiels. Toutefois, d'autres ententes doivent être clarifiées et le seront probablement plus tard au cours de la journée.

Garde et droit de visite des enfants

La représentation du Sénat au comité directeur du comité mixte spécial-Question au coprésident

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au coprésident du comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants. La représentation et la participation du Sénat au processus décisionnel des comités parlementaires mixtes préoccupent beaucoup le Sénat et les sénateurs. Voici ma question: combien de personnes siègent au comité directeur du comité parlementaire mixte, et sur ce nombre, combien y a-t-il de sénateurs?

L'honorable Landon Pearson: Honorables sénateurs, le comité directeur, qui a été créé par le comité plénier, est censé représenter tous les partis et le Sénat. En règle générale, un ou deux sénateurs y siègent. Cela dépend de la façon dont les partis ont choisi d'être représentés au comité directeur. C'est ainsi qu'il a été constitué. Ce n'est pas l'instance décisionnelle du comité. C'est tout simplement un groupe qui se réunit pour formuler des suggestions au comité plénier au sein duquel siègent sept sénateurs et seize députés.

Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, je pense que le sénateur m'a mal comprise. La question est la suivante: combien de personnes siègent au comité directeur, et sur ce nombre, combien y a-t-il de sénateurs?

Le sénateur Pearson: À l'heure actuelle, en moyenne sept personnes assistent aux séances du comité directeur et, en règle générale, deux sénateurs y sont présents.

Le sénateur Cools: Les deux sénateurs sont-ils membres du comité?

Le sénateur Pearson: Oui.

Le sénateur Cools: Ma question est simple: combien de personnes siègent au comité directeur, et sur ce nombre, combien y a-t-il de sénateurs?

Le sénateur Pearson: Toutes les fois que les sénateurs sont là, ils sont membres du comité.

Le sénateur Cools: Donc, le comité directeur n'a pas d'effectif fixe? Si le nombre de membres du comité directeur n'est pas fixe, je pourrais en devenir membre demain si je me présentais à la réunion?

Le sénateur Pearson: Le nombre de membres du comité directeur a été fixé à sept en comité plénier.

Le sénateur Cools: Et, de ce nombre, combien sont sénateurs?

Le sénateur Pearson: Parfois un et parfois deux.

L'embauche d'un recherchiste pour le comité mixte spécial-Demande de renseignements sur les compétences du titulaire-Question au coprésident

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, c'est extraordinaire. Hier, en réunion, on a annoncé au comité qu'un autre recherchiste avait été engagé à un salaire de 550 $ par jour pour 90 jours. J'ai d'autres renseignements à demander au coprésident du comité. Quel a été le processus de sélection appliqué pour l'embauche de cette personne? Combien de candidatures ont été étudiées? Pourquoi le curriculum vitae de cette personne n'a-t-il pas été distribué aux membres du comité? Enfin, quelles sont les compétences et les qualifications de cette personne?

L'honorable Landon Pearson: Honorables sénateurs, c'est une question plutôt complexe à laquelle je ne suis pas en mesure de répondre. Il faudrait que je la prenne en note. Les coprésidents avaient été autorisés par le comité plénier à engager le personnel nécessaire.

Réponses différées à des questions orales

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai la réponse à une question que l'honorable sénateur Marjory LeBreton a posée au Sénat le 10 février 1998 au sujet de la possibilité d'un report des dates limites de l'impôt sur le revenu pour les victimes de la tempête de verglas, et la réponse à une question que l'honorable sénateur Mira Spivak a posée au Sénat le 12 février 1998 au sujet de la destruction des silos-élévateurs abandonnés des Prairies.

Revenu Canada

la Possibilité d'un report des dates limites de l'impôt sur le revenu pour les victimes de la tempête de verglas-La position du gouvernement

(Réponse à la question posée par l'honorable Marjory LeBreton le 10 février 1998)

Le Gouvernement est très au fait des divers fardeaux financiers que la tempête de verglas a créés.

Permettez-moi de réitérer l'engagement du Gouvernement à prêter assistance aux Canadiens qui résident dans les régions les plus touchées par la tempête de verglas. Je souligne qu'une considération spéciale sera accordée en cas de retard à se conformer aux obligations découlant des ententes de paiement par acomptes provisionnels mensuels ou trimestriels. On tiendra également compte des retards de versement en rapport avec la TPS et les retenues sur la paye et du paiement tardif de l'impôt exigible que ce sinistre a occasionnés. En effet, le Ministre du Revenu national a émis un communiqué à cet égard, le 18 février 1998. Ce communiqué a été déposé au Sénat.

Bien que le Ministère du Revenu national n'ait pu stopper le calcul des intérêts pour les clients des régions les plus touchées, le Ministre a invité toutes les personnes qui ont reçu ou recevront par la poste un état ou un avis signalant des frais d'intérêts à communiquer avec le bureau local de Revenu Canada ou, encore, avec le centre d'information sur la tempête de verglas en composant le numéro sans frais prévu à cette fin. Le Ministère s'est engagé à étudier chaque demande et à opérer les redressements nécessaires, s'il y a lieu.

Le Gouvernement se fait un plaisir d'offrir ces mesures d'assistance pour aider les personnes les plus touchées par la tempête de verglas à rétablir leur situation.

L'agriculture

La destruction des silos abandonnés dans les Prairies-La perte de capacité d'entreposage-Les répercussions sur les municipalités rurales-La position du gouvernement

(Réponse à la question posée par l'honorable Mira Spivak le 12 février 1998)

Le gouvernement fédéral comprend la frustration que ressentent beaucoup de producteurs à l'égard du regroupement du système de manutention des grains dans les Prairies. Il importe toutefois de signaler que la décision de construire ou de regrouper le système des silos-élévateurs au Canada n'est prise par aucun palier de gouvernement mais par les entreprises en cause. Le regroupement résulte des exigences du marché, qui veut trouver des façons plus efficientes et plus rentables de transporter le grain des Prairies jusqu'au consommateur. Outre les silos plus gros à capacité plus élevée que diverses entreprises céréalières sont soit en train de construire soit de planifier, les producteurs se sont également regroupés pour construire leurs propres installations à débit élevé dans toute la Saskatchewan. Cependant, l'expropriation de propriétés privées, comme certains le suggèrent, n'est sûrement pas la façon la plus efficace de traiter ce dossier.

Ceci étant dit, l'une des façons de régler le problème du dépeuplement des régions rurales consisterait à créer un contexte économique au sein duquel l'on pourrait lancer des projets à valeur ajoutée créant des emplois pour les jeunes. L'impact économique des installations à valeur ajoutée peut absorber la perte d'infrastructure dans le système de manutention des grains. Un système de manutention des grains plus efficient représente en outre un élément important car il fournit aux agriculteurs les ressources nécessaires pour poursuivre des activités à valeur ajoutée qui renforceront nos collectivités rurales.

Le gouvernement fédéral est conscient des préoccupations sociales et économiques des Canadiens des régions rurales et continuera de travailler en collaboration avec eux et avec d'autres intervenants du secteur pour trouver des solutions.

Dépôt de réponses à des questions au Feuilleton

L'énergie-La Société canadienne des ports-Le respect de la Loi sur les carburants de remplacement

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 8 inscrite au Feuilleton par le sénateur Kenny.

L'énergie-Marine Atlantique Inc.-Le respect de la Loi sur les carburants de remplacement

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 29 inscrite au Feuilleton par le sénateur Kenny.

L'énergie-La Société du port de Montréal-Le respect de la Loi sur les carburants de remplacement

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 30 inscrite au Feuilleton par le sénateur Kenny.

Projet de loi sur l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada

La question de privilège-Décision de la Présidence

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, avant d'appeler l'ordre du jour, je voudrais vous faire part d'une décision qui est en suspens depuis quelque temps. Il y en a des exemplaires. Je demande aux pages de les distribuer à tous les sénateurs.

Le jeudi 17 décembre, le sénateur Tkachuk d'abord, puis le sénateur Kinsella ont affirmé qu'il s'était produit une atteinte au privilège du fait de la diffusion prématurée de certains renseignements relatifs au projet de loi C-2, Loi constituant l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada, alors que celui-ci était encore en discussion au Sénat. Comme je l'ai dit à ce moment-là, étant donné que les deux questions de privilège portent sur le même sujet, j'ai décidé de les traiter ensemble.

Le premier à soulever la question, le sénateur Tkachuk a dit que le gouvernement avait commis un outrage envers le Parlement dans son ensemble, et le Sénat en particulier, en diffusant sur son site Web les tables des retenues à la source des cotisations au RPC dès le 10 décembre, donc avant même l'adoption du projet de loi C-2. Et cela, en dépit du fait que le sénateur Tkachuk ait reçu une déclaration du gouvernement, sous la forme d'une réponse différée donnée le 4 décembre, portant que le gouvernement n'avait pas l'intention de diffuser ces renseignements tant que le Sénat n'aurait pas terminé l'étude du projet de loi.

[Français]

Honorables sénateurs, en présentant ses arguments, le sénateur Tkachuk a reconnu qu'il était probable que le document en question avait été diffusé par inadvertance. Il a dit estimer néanmoins que cela constituait une atteinte grave au privilège, s'appuyant sur plusieurs ouvrages faisant autorité en matière parlementaire de même que sur certaines décisions du Président de l'autre endroit. Le sénateur Tkachuk a exprimé l'essentiel de sa position dans les termes suivants, et je cite:

 

[...] être délibérément induit en erreur par le gouvernement du Canada relativement à un projet de loi que nous sommes en train d'étudier est une entrave à mes fonctions parlementaires et porte atteinte à mes droits et aux droits de tous les sénateurs de nous acquitter de nos fonctions en tant que membres du Sénat.
Dans la même veine, le sénateur Kinsella, s'appuyant sur des passages similaires d'ouvrages parlementaires et sur des décisions de Présidents, a affirmé que, en publiant le document avant la promulgation du projet de loi C-2, le gouvernement avait préjugé de l'issue des travaux du Sénat et de ses comités, ce qui constituait à son avis un grave outrage au Parlement et au Sénat du Canada.

Après la déclaration du sénateur Tkachuk, le sénateur Carstairs a déclaré que ni le ministère des Finances, ni le ministère du Revenu n'avaient publié ou diffusé, sous forme imprimée, les tables révisées des retenues à la source, mais elle a cependant dit qu'elles avaient paru brièvement sur le site Internet de Revenu Canada. Le sénateur est d'avis qu'on n'avait aucunement l'intention de diffuser ce document et qu'il s'agissait d'une simple erreur. Elle a aussi précisé que Revenu Canada avait corrigé son erreur et s'en était excusé. Pour ce qui est de l'information qui demeure sur le site Internet, le sénateur Carstairs a indiqué qu'elle était maintenant accompagnée d'une mise en garde précisant que les modifications proposées ne deviendront loi que si le projet de loi est adopté par le Parlement. Le sénateur Carstairs a alors déposé une lettre d'un haut fonctionnaire de Revenu Canada contenant le texte de la mise en garde.

[Traduction]

(1510)

Dans une seconde intervention suivant la déclaration du sénateur Kinsella, le sénateur Carstairs a ajouté que les tables provisoires avaient été préparées avec l'autorisation du ministre du Revenu national en vue de l'adoption éventuelle du projet de loi C-2. Elle a répété qu'il aurait été impropre de publier une version imprimée de l'information en question avant que la loi ne soit promulguée. Le sénateur Carstairs était aussi d'avis que l'information n'aurait pas dû être diffusée sur le site Internet sans la mise en garde qui a été ajoutée par la suite.

À ce moment-là, le sénateur Taylor a lui aussi formulé quelques commentaires. Admettant qu'il était contrariant que son consentement soit tenu pour acquis, il a demandé s'il existait un recours véritable dans le cas qui nous occupe. Citant l'article 47 du Règlement du Sénat, il a dit qu'il serait futile de faire de cette question une question de privilège si le Sénat n'a pas le pouvoir de corriger la situation. Après avoir lu des extraits du Beauchesne, il a ensuite soulevé la question de l'intention, à savoir si le gouvernement avait en l'occurrence délibérément mal agi et trompé les sénateurs.

[Français]

La discussion a ensuite porté sur la question de savoir si la présence des documents sur un site Internet constituait une publication. Le sénateur Tkachuk était d'avis que cela en était une, et le sénateur Lynch-Staunton aussi. En ce qui concerne la mise en garde, le chef de l'opposition a expliqué qu'elle et je cite:

 

[...] n'a été ajoutée à la hâte qu'après qu'on s'est aperçu que la publication était irrégulière et prématurée, et constituait un outrage au Parlement.
Il a soutenu que cette action portait atteinte aux droits et privilèges de tous les sénateurs et députés. Selon lui, et je cite:

 

Des information comme celles-là ne devraient pas être diffusées et présentées, même comme des instructions avant que le projet de loi ne reçoive la sanction royale.
[Traduction]

Je tiens à remercier tous les sénateurs pour leur participation à ce débat, qui m'a donné beaucoup à réfléchir pendant le congé.

Premièrement, je tiens à préciser que, même si les avis relatifs à ces questions de privilège ont été donnés le 11 décembre et que les arguments n'ont pas été présentés avant le 17 décembre, le Sénat était convenu de les différer pendant plusieurs jours. Par conséquent, je ne m'occuperai pas de déterminer si les questions de privilège ont été soulevées à la première occasion comme le veut l'article 43 du Règlement. Je pose en hypothèse qu'elles l'ont effectivement été.

En outre, le fait que le projet de loi C-2 ait été adopté par le Sénat sans amendement le 18 décembre 1997 et promulgué le même jour est sans effet sur ces questions de privilège. À mon avis, ces actions ultérieures ne diminuent en rien les affirmations des sénateurs Tkachuk et Kinsella. En prenant ma décision, je me suis borné aux arguments qui ont été invoqués et à la situation telle qu'elle se présentait alors en ce qui concerne l'étude du projet de loi C-2 par le Sénat.

Mon rôle en tant que Président consiste à déterminer si la question de privilège est suffisamment fondée à première vue pour justifier le dépôt immédiat d'une motion à débattre portant renvoi de la question au comité permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure.

Dans le cas qui nous occupe, l'action reprochée, à savoir la diffusion prématurée des tables des retenues à la source des cotisations au RPC, constitue davantage un outrage au Sénat qu'une violation d'un privilège parlementaire comme la liberté de parole, l'immunité d'arrestation ou d'entrave. La notion d'outrage n'est pas aussi nettement définie que le privilège, mais la faute est néanmoins sérieuse car elle peut porter atteinte à l'autorité du Parlement ou aux droits des parlementaires de s'acquitter de leurs fonctions. C'est bien de cela que se plaignent les sénateurs Tkachuk et Kinsella.

[Français]

En ce qui concerne la question de savoir si ces tables des retenues à la source constituent une publication quand elles ne figurent que sur un site Internet, je crois que la réponse va de soi. Il s'agit effectivement d'une publication. S'il est vrai que les documents en question n'ont pas paru sous forme imprimée, il est impossible de faire abstraction de l'impact de la technologie informatique qui donne un très large accès à l'information. Force est d'admettre qu'en affichant les tables des retenues à la source sur un site Internet accessible au public, on a, de fait, publié et distribué ces tables.

[Traduction]

Au-delà de la simple publication de l'information, il est une question encore plus importante, c'est-à-dire la question de l'intention, qu'a soulevée le sénateur Taylor. Pour que je statue, en tant que Président, que la question de privilège est fondée à première vue, je dois être raisonnablement convaincu que Revenu Canada a délibérément et sciemment manqué de respect au Parlement et au Sénat dans l'affaire qui nous occupe. Il faudrait aussi que des éléments donnent à croire que cette action avait pour but de tromper le Sénat ou de l'induire en erreur durant sa discussion du projet de loi C-2. Enfin, il faudrait aussi montrer que cette action a compromis le travail des sénateurs. Or, aucun élément probant ne vient confirmer ces trois points.

Lorsqu'il a présenté ses arguments, le sénateur Tkachuk a admis à deux reprises que la diffusion prématurée des tables des retenues à la source des cotisations au RPC s'était probablement produite par inadvertance. Plus important encore sans doute, Revenu Canada a reconnu son erreur et, d'après la lettre déposée par le leader adjoint du gouvernement, a pris des mesures pour corriger la situation. Dans la lettre portant le tampon du 16 décembre, M. Burpee, sous-ministre adjoint à Revenu Canada, a expliqué pourquoi les tables étaient préparées à l'avance. Il a aussi signalé qu'une mise en garde avait par la suite été jointe aux tables, précisant que le projet de loi était en discussion au Sénat et ne deviendrait loi que s'il était adopté. Ces éléments d'information montrent que le ministère n'a pas délibérément tenté de tromper le Parlement ou de l'empêcher de faire son travail. D'ailleurs, si le Sénat avait décidé d'apporter des amendements importants au projet de loi, Revenu Canada aurait dû modifier les tables des retenues en conséquence.

Cela dit, je rappelle aux honorables sénateurs les paroles du sénateur Carstairs, selon laquelle cet épisode était une erreur qui n'aurait jamais dû se produire. C'est un fait qu'une loi ne peut pas être promulguée tant qu'elle n'a pas été adoptée par les deux Chambres. S'il est légitime que les ministères du gouvernement estiment de leur devoir d'informer les citoyens des changements apportés aux lois, ce devoir ne doit jamais compromettre ou sembler compromettre l'exercice des responsabilités constitutionnelles supérieures du Parlement. Les fonctionnaires du gouvernement ne devraient jamais perdre ce principe de vue lorsqu'ils se proposent d'informer nos concitoyens des changements qu'on envisage d'apporter à la loi. Ce qui s'est passé est d'autant plus répréhensible que Revenu Canada avait confirmé par écrit qu'il ne diffuserait aucune information tant que le projet de loi ne serait pas promulgué. Certes, il n'apparaît pas en l'occurrence qu'on ait commis un outrage au Sénat, mais je trouve néanmoins la conduite du ministère inexcusable.

Quoi qu'il en soit, à en juger par les arguments qui m'ont été présentés le 17 décembre, j'estime que la question de privilège n'est pas fondée à première vue.

[Français]

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, j'aimerais soulever un rappel au Règlement. Je pense que c'est le moment approprié.

Son Honneur le Président: Les décisions de la présidence sont sans appel.

Le sénateur Prud'homme: Non, jamais je ne ferais un rappel au Règlement sur la décision du Président.

Son Honneur le Président: Vous pouvez faire appel mais les décisions ne sont pas sujettes à discussion.

[Traduction]

Le sénateur Prud'homme: Honorables sénateurs, c'est peut-être un point mineur, mais je le considère important. Les Canadiens, en anglais surtout, nous appellent souvent «membres de la Chambre des communes» et «membres du Sénat». J'ai même entendu dans les délibérations d'aujourd'hui, en anglais, «y assistaient plusieurs membres du Parlement et deux ou trois sénateurs.» Je me suis toujours opposé à cela, le Parlement est constitué de la Chambre des communes et du Sénat. Nous sommes tous des membres du Parlement.

(1520)

La presse répète constamment ce que, parfois, nous disons nous-mêmes. Il y a deux groupes à considérer: les députés et les sénateurs.

Je me souviens d'avoir voyagé avec une délégation constituée de dix «membres du Parlement» et de trois sénateurs. Ce n'était pas correct. On devrait toujours dire tant de membres de la Chambre des communes et tant de membres du Sénat. Autrement, nous nous faisons du tort à nous-mêmes, car le public se fera une fausse idée du Parlement. Je dis cela pour que l'on résiste. Je proteste. Je suis membre du Parlement et je suis fier de siéger au Sénat.

Des voix: Bravo!


ORDRE DU JOUR

La Loi sur la Commission canadienne du blé

Projet de loi modificatif-Deuxième lecture-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Taylor, appuyé par l'honorable sénateur Pépin, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé et d'autres lois en conséquence.

L'honorable Leonard J. Gustafson: Honorables sénateurs, je suis heureux de prendre la parole sur ce projet de loi, non pas parce qu'il soulève beaucoup de controverses, mais parce que c'est un projet de loi très important pour l'Ouest du Canada, en particulier les provinces des Prairies et une petite partie de l'ouest de l'Ontario.

Comme les sénateurs le savent, l'agriculture a beaucoup contribué à la santé économique de ce pays et il importe que nous ne jetions pas à terre les piliers de cette agriculture. Sir Leonard Tilley a dit un jour: «Tuez les fermes et l'herbe poussera dans les rues de toutes les villes du monde.» Au cours des dernières années, de nombreuses décisions ont été prises qui ont sapé l'agriculture. Il existe de nombreux domaines dans lesquels des changements sont nécessaires.

Je n'ai jamais vu une telle controverse autour d'un projet de loi depuis le débat sur le fameux tarif du Nid-du-Corbeau. Ce fut le plus long débat à la Chambre des communes, à l'exception du débat sur les pêches, en 1918.

Pourquoi une telle controverse autour de ce projet de loi? Tout d'abord, il faut voir ce qui se passe dans l'agriculture. Je vais vous donner un ou deux exemples. En 1972, un baril de pétrole valait 2 $; aujourd'hui, il en vaut 16, bien que les prix aient quelque peu fléchi ces derniers mois. Par contre, un boisseau de blé valait 2 $ en 1972; aujourd'hui, il ne vaut même pas 3 $. Si les agriculteurs pouvaient obtenir 16 $ le boisseau, ils pourraient payer leurs tracteurs à 200 000 $ pièce; ils pourraient même payer leurs moissonneuses à 200 000 $ pièce. Il y a eu comme un glissement de terrain.

La question qu'il faut se poser est la suivante: sommes-nous, en tant que Canadiens, responsables de la situation dans laquelle se trouve l'agriculture dans notre pays?

J'ai assisté à un dîner informel très intéressant avec Alvin Hamilton, qui est un ardent supporter de l'agriculture depuis des années. Il avait invité un conférencier à une table ronde à l'édifice du Centre, un docteur autrichien. Quand la question des subventions a été soulevée, il a dit: «Vous, les Américains...», ils nous a appelés des Américains, «...vous ne comprenez pas ce que sont la faim et la nourriture». Il a ajouté: «Trois fois dans ma vie, j'ai vu ce qu'était la faim, et vous tenez la nourriture pour acquise». Peut-être que nous tenons notre nourriture pour acquise.

En ce qui concerne la situation internationale, on peut se demander si, en tant que pays producteur, nous avons une responsabilité à l'égard du reste du monde. Pour ma part, je le crois. Je suis de très près le travail de la Banque de céréales vivrières du Canada, qui fournit des céréales aux pays du monde qui en manquent. C'est un excellent programme - l'un des meilleurs. Pour chaque boisseau de blé que donne un agriculteur, le gouvernement en donne deux. Nous avons une responsabilité à l'égard des agriculteurs de ces pays et envers l'agriculture.

Pourquoi tant de controverse? Depuis le débat sur le tarif du Nid-de-Corbeau et le débat sur le commerce, l'agriculture a complètement changé dans l'Ouest. On parle maintenant d'environ le tiers du prix d'un boisseau de blé pour transporter ce boisseau à Vancouver ou à Thunder Bay. C'est une augmentation incroyable.

Que se passe-t-il dans les Prairies? L'industrie de l'alimentation animale change. Les gouvernements provinciaux ont de gros problèmes au niveau des routes, des autoroutes et du transport et ils n'arrivent pas à relever ces défis.

Certains sénateurs se souviendront de Charlie Mayer. Je ne veux pas tomber dans la politique, mais j'aimerais rappeler que Charlie Mayer avait dit que cela prendrait 7,6 milliards de dollars pour effectuer la transition au niveau des taux de transport pour les agriculteurs et les municipalités. Qu'avons-nous eu? Nous avons eu 1,6 milliard. Cette transition a causé de nombreux problèmes et autant de frustrations. L'une des principales raisons est que le prix du grain, du blé en particulier, est faible en raison de l'augmentation des coûts de transport. À cause des taux de transport, on a décidé qu'on devait nourrir davantage de porcs, de poulets et de bovins dans les Prairies.

Vous savez peut-être ce qui se passe à Brandon. Les Aliments Maple Leaf déménagent une installation à Brandon. Je crois savoir qu'il y a une quinzaine de gros éleveurs de porcs dans la région de Brandon. Ce sont là des changements importants - et rapides.

Les éleveurs de bovins de l'Iowa ont acheté Lakeside. Ils produisaient 40 000 bêtes et ils en nourrissent maintenant 80 000. On engraisse des bovins venant des États-Unis dans les parcs d'engraissement de Lethbridge à cause de la situation sur le plan de l'alimentation animale et de l'évolution des taux. Il y a des changements importants.

Je pourrais élaborer davantage sur les coûts de production. J'étais chez moi en fin de semaine, et j'ai téléphoné à Weyburn en Saskatchewan pour obtenir un moyeu pour une charrue à disques. La réparation m'a coûté 400 $. J'ai demandé combien il m'en coûterait pour me procurer un nouveau moyeu et un essieu, une petite pièce. L'essieu coûte 812 $ et le moyeu, 400 $. Il faudrait une cargaison de 300 boisseaux de blé pour payer un petit moyeu pour ma charrue à disques. Qu'est-ce qu'on fait dans une telle situation? On essaie bien sûr de trouver des pièces usagées quelque part et de rafistoler son équipement, parce que ce n'a aucun sens de devoir donner tant de boisseaux de blé pour une petite réparation si on peut s'arranger autrement.

Pourquoi toute cette polémique pour un projet de loi comme celui-ci? Eh bien, un projet de loi de ce genre est très important.

(1530)

Je voudrais parler de certains aspects du projet de loi qui préoccupent grandement les agriculteurs. Premièrement, la Commission canadienne du blé, qui était une société d'État, devient une simple société. À mon avis, cela ne pose pas de grand problème. Il est important de modifier le statut de la commission pour qu'elle devienne une société en mesure de faire face à la situation commerciale internationale actuelle et pour que nous puissions peut-être obtenir une meilleure coopération de nos voisins américains à cet égard.

Certains groupes s'opposent farouchement à ce changement. Ils disent que le gouvernement sonne le glas de la Commission canadienne du blé. Il y a des gens dans les deux camps et personne n'appuie complètement le projet de loi à l'étude. Bon nombre - non seulement des agriculteurs, mais aussi des organisations agricoles - sont contre le projet de loi pour diverses raisons. La coalition contre le projet de loi C-4, qui est composée de différents groupes, s'oppose farouchement à la disposition d'inclusion.

En quoi consiste au juste la disposition d'inclusion? Cette disposition signifie que la Commission canadienne du blé pourrait, si les agriculteurs l'y autorisaient à l'issue d'un scrutin, inclure tous les autres grains sauf ceux qui sont déjà assujettis à la commission, soit, le blé, l'orge et le blé dur. Ces dernières années, les agriculteurs se sont tournés vers des cultures particulières - notamment les oléagineux comme le canola, la graine de l'alpiste des Canaries, le lin, les lentilles et d'autres produits - parce que ce sont des cultures commerciales lucratives. Les prix sont excellents pour ces produits. Le canola vaut actuellement 9 $ le boisseau. On peut arriver en cultivant du canola à 9 $ le boisseau, mais pas en cultivant du blé à 3 $.

Bon nombre d'agriculteurs craignent que la Commission canadienne du blé ne réussisse pas à avoir le prix qu'ils obtiennent en vendant directement leur produit aux États-Unis ou à d'autres entreprises qui exportent au Japon ou ailleurs. On conçoit aisément pourquoi cela les inquiète. Personnellement, j'ai certaines réserves à ce sujet. Je pense que la disposition concernant l'inclusion est importante.

Certains diront que la disposition concernant l'inclusion apporte un certain équilibre, qu'il y a une disposition concernant l'exclusion et une autre concernant l'inclusion, et que les agriculteurs se prononcent sur cette question par le biais d'un scrutin. Que dire du scrutin? Comment la question sera-t-elle formulée? Qui a le droit de voter? N'y a-t-il que ceux qui, par exemple, produisent du canola depuis cinq ans qui ont le droit de voter ou est-ce que tout le monde peut le faire?

Les dispositions concernant l'inclusion et l'exclusion sont une source de vive préoccupation. Cette question est probablement la plus controversée du projet de loi.

En toute équité, il faut dire que le ministre a présenté, à la dernière minute, un amendement qui pourrait apporter des éclaircissements à cet égard. Le comité sénatorial pourrait peut-être se pencher sur cette question. Je serais en faveur de cela, mais il faut réfléchir au facteur d'inclusion.

Honorables sénateurs, il y a aussi la question des rachats en argent comptant. Je vais essayer de vous expliquer de quoi il s'agit, même si je ne suis pas certain de tout comprendre. La commission du blé peut acheter 25 000 boisseaux de grain d'un agriculteur et les vendre à une usine de fabrication de pâtes qui pourrait être construite, par exemple, à Crosby, dans le Dakota du Nord. Des agriculteurs canadiens envisagent d'y construire une usine et une autre à Swift Current. Ils pourraient faire un rachat individuel. Bien des gens s'opposent à cela. Pourquoi? Ils disent que cela détruit les effets de la mise en commun et que c'est le début d'un double système de commercialisation.

Encore une fois, nous sommes confrontés à un monde en transformation. La mondialisation de l'économie soulève toute la question d'autres offices de commercialisation. La Saskatchewan, par exemple, possède moins de 3 p. 100 des quotas canadiens pour la production de poulet. C'est même un peu moins. Nous avons de grandes quantités de grain de provende en raison des taux du fret. Mais comment donner ce grain à des poulets que nous n'avons pas le droit de produire et nous imposer sur les marchés mondiaux? C'est impossible. Il faut qu'il y ait des changements.

Le gouvernement de la Saskatchewan envisage de se prononcer en faveur d'un retrait. J'ai appris cela du bureau du ministre. Apparemment, toute province peut se retirer d'un office de commercialisation ou s'y inscrire. La Saskatchewan pourrait bien se retirer afin d'avoir de meilleures chances d'accéder aux marchés mondiaux. Ce serait logique. On ne peut pas élever uniquement le nombre de poulets que la population de la Saskatchewan peut consommer. Nous sommes environ 900 000 habitants dans cette province.

Ce que je veux dire, c'est que le monde est en pleine transformation et qu'il doit y avoir des changements au Canada. J'avoue honnêtement que le ministre a tenté de répondre à certaines préoccupations, mais personne, peu importe l'allégeance politique, n'aime ce qui se passe. Voilà pour le rachat.

Beaucoup craignent que les coopératives se disloquent, particulièrement le conseil consultatif de la Commission canadienne du blé. Ils affirment que si on commence à exempter un certain groupe ou que l'on permet de soustraire certaines quantités de grain, tout le système pourrait bien s'effondrer. Par contre, il est important de disposer d'une certaine souplesse. Comme je le disais, des agriculteurs de ma région veulent construire une usine à Crosby, au Dakota du Nord, pour avoir accès au vaste marché des pâtes. Je suppose que la commission du blé examine la situation et cherche le moyen de faire marcher les choses.

Laissez-moi vous donner un exemple de ce qui se passe dans la réalité. La grêle a frappé nos exploitations agricoles de telle sorte que nous n'avons plus de semences de blé dur. J'ai téléphoné à la Commission canadienne du blé pour savoir si je pouvais racheter des semences entreposées à l'élévateur de Macoun ou d'Estevan et à quel prix. Le blé dur auquel je pensais était de catégorie 2, sans protéines. Il n'est pas nécessaire d'avoir un fort contenu en protéines pour obtenir une bonne germination. Ces semences étaient vendues 4,71 $ le boisseau à l'élévateur Pioneer d'Estevan. La Commission canadienne du blé voulait me revendre ce blé 7,17 $ le boisseau. En plus de cela, il me fallait le nettoyer, ce qui coûtait 30 cents le boisseau. Il me fallait en éliminer au moins 15 p. 100 pour obtenir des semences propres. Autant m'adresser aux vendeurs de semences certifiées et payer 9 $ le boisseau. Cela revient au même.

C'est là le genre de problèmes auxquels nous sommes exposés. Les agriculteurs qui essaient de monter des opérations de transformation dans différentes régions se heurtent à un véritable problème lorsqu'ils veulent racheter le grain de la Commission canadienne du blé. Ils ne peuvent même pas traiter leur propre récolte. Cela nous renvoie directement à la question du monopole. Ce monopole est-il rigide au point d'empêcher les agriculteurs de donner de l'expansion à leurs propres activités de façon raisonnable et sensée? Ce qu'il faut faire, c'est débattre et examiner sérieusement ce projet de loi, grâce auquel nous pourrons commencer à régler une partie de ces problèmes. C'est un projet de loi complexe. Il n'est pas facile d'obtenir l'accord des agriculteurs sur des choses semblables.

(1540)

Nombre d'agriculteurs se préoccupent du fonds de réserve que prévoit le projet de loi C-4. Je ne veux pas offusquer les sénateurs, mais, dans le passé, en cas de baisse des ventes, le gouvernement comblait la différence. S'il y avait des gains, il est à espérer que les agriculteurs en profitaient un peu. Il y a mésentente quant à l'importance des pertes. Dans les Prairies, cet hiver, on a parlé de montants allant jusqu'à 20 milliards de dollars, mais le chiffre de 6 milliards de dollars a aussi été avancé. Des intérêts ont également été versés sur le grain que les agriculteurs ont vendu, ce dont les agriculteurs ont profité.

Si on constitue un fonds de réserve avec l'argent des agriculteurs, quelles en seront les limites? Le gouvernement s'en tire-t-il à cet égard? Ce fonds de réserve soulève, à juste titre, des questions. Le gouvernement dit-il qu'il souhaite qu'on lui fiche la paix? Certains diraient oui. D'autres diraient que le gouvernement a des responsabilités en matière d'agriculture et qu'il doit maintenir de solides bases agricoles.

Certains estiment que le rôle du vérificateur général devrait être modifié de manière que les activités de la commission du blé soient vérifiées annuellement. Le vérificateur général demande ce changement depuis des années, mais il n'a pas encore été accepté. Il ne figure d'ailleurs pas dans ce projet de loi.

Un autre secteur qui inquiète vraiment les agriculteurs concerne le conseil d'administration. Le projet de loi prévoit que le conseil d'administration serait composé de 15 membres, dont 10 seraient des agriculteurs élus, les quatre autres et le président étant nommés par le ministre. Cette composition soulève des inquiétudes.

Le conseil consultatif, notamment, et les groupes d'agriculteurs voudraient que les agriculteurs aient le droit d'élire leur propre président. D'autre part, si le gouvernement veut continuer de financer les ventes, entre autres choses, il devrait exercer une certaine responsabilité. Il y a des problèmes des deux côtés.

Une autre préoccupation concerne les pouvoirs du conseil. Quels sont les pouvoirs du conseil? Des choses sont précisées dans le projet de loi. D'autres dispositions du projet de loi concernant les pouvoirs du conseil ne sont pas claires, surtout pour ce qui est d'engager et de licencier les personnes chargées de faire le travail de commercialisation internationale pour la Commission canadienne du blé.

Honorables sénateurs, le comité directeur a fait savoir qu'il souhaite se déplacer pour entendre non seulement des groupes agricoles, mais aussi des agriculteurs et en particulier ceux des Prairies. On a proposé que le comité se rende à Winnipeg, à Regina, à Saskatoon et à Edmonton ou à Red Deer. Il faut que les agriculteurs nous fassent part de leurs préoccupations. Il s'agit d'un projet de loi important. Il faut qu'il réponde aux besoins des agriculteurs et qu'il tienne compte de l'évolution du secteur.

Je tiens à soulever la question du commerce. Il y a deux mois environ, le président Clinton a signalé que le commerce ferait l'objet d'une procédure accélérée. Nous avons convoqué des spécialistes du commerce devant le comité afin de mieux comprendre ce que cela signifie. Nous ne sommes toujours pas sûrs des faits, mais le président Clinton a présenté des déclarations très dures au sujet de l'agriculture au Canada. Par conséquent, il importe beaucoup que ce projet de loi règle la situation commerciale et ses nombreuses facettes.

Honorables sénateurs, nous avons un bon comité. Des sénateurs des deux côtés du Sénat ont une bonne expérience de l'agriculture. J'espère que ce projet de loi pourra être amélioré grâce à des amendements afin de profiter à tout le secteur agricole du Canada.

L'honorable Herbert O. Sparrow: J'ai deux questions, honorables sénateurs. Le sénateur Gustafson a parlé de l'achat et de la vente de blé dur. Il a fait savoir qu'un boisseau se vendait 4 $ et quelques cents et se revendait à 7 $. Le prix de vente initial était de 4 $, n'est-ce pas? Le blé était revendu à un prix qu'on supposait pouvoir obtenir. Il ne s'agissait pas vraiment de la majoration de 100 p. 100 dont parlait le sénateur, n'est-ce pas?

Le sénateur Berntson: Plus les frais d'élévateur.

Le sénateur Gustafson: C'est exact, sénateur Sparrow.

Les sénateurs comprendront qu'il y a un prix initial et un prix provisoire qui est versé à l'agriculteur. Les agriculteurs espèrent peut-être obtenir 6 $. D'autres frais de manutention s'ajoutent à ce montant pour en arriver à un prix de 7,17 $.

Le sénateur Sparrow: Je remercie l'honorable sénateur de son aide. Je veux préciser clairement que la Commission canadienne du blé ne prenait pas une marge indue sur le produit. Le producteur aurait partagé avec la Commission les 7 $ au moment du paiement final. C'est ce que l'honorable sénateur me dit.

Je ne veux pas forcer le sénateur à entrer dans les détails, vu que ni lui ni moi n'avons eu l'occasion d'examiner ou d'étudier le projet de loi. Toutefois, en ce qui concerne la vérification, on a mentionné que la Commission canadienne du blé n'est plus une société d'État et est devenue une entreprise privée. L'honorable sénateur pourrait peut-être nous expliquer ceci.

Je crois comprendre que le vérificateur général aurait et devrait avoir le pouvoir de vérifier les livres de la Commission en tant que société d'État. Si elle devient une société privée, le vérificateur général n'aura plus ce pouvoir. Si je ne m'abuse, quelqu'un au ministère, le ministre ou quelqu'un d'autre, a déclaré que si la Commission souhaitait que le vérificateur général procède à une vérification de ses livres, elle pourrait le lui demander. Si la Commission est une société privée, le vérificateur général aurait-il le pouvoir de procéder à des vérifications?

Le sénateur Gustafson: À ma connaissance, le vérificateur général n'aurait pas ce pouvoir à moins qu'on n'apporte un amendement au projet de loi. Je peux me tromper.

Pour en revenir à la première question de l'honorable sénateur, nous ne connaîtrons pas les coûts exacts jusqu'à ce que le paiement final soit reçu pour le blé dur. Il y a probablement une différence de 1,25 $ de plus le boisseau qui sera versé pour racheter des semences.

Le sénateur Sparrow: Il s'agirait simplement des coûts administratifs de manutention, n'est-ce pas? Ainsi, ce n'est pas un chiffre déraisonnable, n'est-il pas vrai?

(1550)

Le sénateur Gustafson: J'ai pris des renseignements à Crosby, au Dakota du Nord, sur les frais de manutention du grain demandés là-bas. Chez nous, à Macoun, en Saskatchewan, les frais d'élévateur sont de 22 cents le boisseau. Cela ne tient pas compte du transport. À Crosby, au Dakota du Nord, ils sont de 7 cents le boisseau; on compare donc 22 cents à 7 cents.

Franchement, si cette mesure fait des gagnants, ce seront probablement les sociétés céréalières.

Le sénateur Sparrow: Ce n'est pas nouveau.

Le sénateur Gustafson: Vous l'avez dit, honorable sénateur. Il ne fait aucun doute, à mon avis, que les grandes gagnantes sont les sociétés céréalières.

Pendant que j'ai la parole, j'aimerais mentionner un autre important facteur de transformation qui touche l'industrie céréalière tout entière. J'ai récemment assisté à l'ouverture d'une nouvelle usine. ConAgra a bâti, à Corinne, en Saskatchewan, un élévateur capable de charger 45 000 boisseaux à l'heure. Cela représente huit wagons. Il est ainsi possible de charger un train de 100 wagons en huit heures. Chacune des cellules à grains, et il y en a plusieurs, a une capacité de 45 000 boisseaux. ConAgra est en train de construire une usine semblable à Yorkton, au sud de Regina, et une autre dans le nord de Dafoe ou dans ce coin-là.

Je vous le dis, l'industrie céréalière évolue, et vite. Le transport du grain et les tarifs marchandises sont appelés à changer. Il en résultera un stress considérable sur les routes, et il faudra trouver le moyen de se pencher sur cette question.

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, je suis heureuse de participer au débat sur le projet de loi C-4. Étant donné que je viens du Manitoba, j'ai pleinement conscience de l'importance du rôle que la Commission canadienne du blé a joué et continue de jouer au Manitoba comme dans l'ensemble des Prairies. Aujourd'hui, les producteurs de grains s'inquiètent de la Commission parce qu'ils ne se préoccupent guère de ce qui se passe hors des limites de leur exploitation agricole. Peu de choses en effet, hormis le temps et les chemins de fer, peuvent avoir autant d'incidence sur leur gagne-pain et, indirectement, sur la vie de milliers de Canadiens de l'Ouest.

Quelque 130 000 familles de l'Ouest canadien seront touchées par ce projet de loi. Environ 2 000 entreprises agroalimentaires de l'Alberta, de la Saskatchewan et du Manitoba, qui sont membres de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, sont très préoccupées par cette mesure législative. Plus de 100 000 membres sont propriétaires de Prairie Pools Inc., la plus importante entreprise de manutention de grain de l'Ouest canadien, qui possède des élévateurs et des terminaux de Thunder Bay à Vancouver. Tous veulent que la réforme soit faite de la bonne façon, mais il existe encore un profond désaccord quant à savoir qu'elle est cette bonne façon.

Comme nous l'ont rappelé les sénateurs Gustafson et Taylor, compte tenu qu'elle a un chiffre d'affaires annuel de six milliards de dollars, la Commission canadienne du blé est l'une des entités canadiennes qui rapportent le plus de devises étrangères. La Commission est importante pour l'économie canadienne et pour les Canadiens qui vivent loin des Prairies, le grenier du monde. Elle est importante aussi pour les populations de quelque 70 pays qui comptent sur le blé et l'orge canadiens. Il faut garder tout cela présent à l'esprit lorsque nous étudions le projet de loi C-4.

Aux yeux de la plupart des Canadiens de l'Ouest, la Commission est une institution qui existe depuis longtemps. Elle a été créée par le Parlement en 1935, et, comme toute autre institution, elle doit parfois faire l'objet de changements, dans ce cas-ci afin de continuer à servir les agriculteurs dans un contexte qui n'est plus celui d'il y a des décennies. Le sénateur Gustafson a très bien expliqué cet aspect.

Au début, la Commission était une fédération bénévole qui s'occupait du blé. Lorsque le gouvernement a mis un terme à la vente sur le marché libre, en 1943, le Canada était en guerre et les prix étaient assujettis à des contrôles. Quelques années plus tard, le gouvernement donna à la Commission le pouvoir de s'occuper de l'orge. C'est depuis ce temps que l'on discute passionnément de la stratégie de commercialisation de la CCB, qui est fondée sur le principe selon lequel l'union fait la force. L'adoption du projet de loi ne va sans doute pas mettre un terme au débat.

Les partisans de la Commission font valoir des arguments solides portant que cette stratégie fondée sur le nombre fait gagner aux agriculteurs des millions de dollars de plus qu'ils n'en auraient dans un marché libre. Les auteurs d'une étude économique à long terme - l'étude Kraft, si je ne m'abuse - estiment que les bénéfices annuels se situent entre 265 et 800 millions de dollars. Sauf erreur, ces personnes ont eu accès à tous les renseignements financiers de la Commission.

Dans son livre intitulé Merchants of Grain, Dan Morgan décrit la Commission canadienne du blé comme l'office de commercialisation le plus puissant et le plus prestigieux au monde. Les détracteurs de la Commission lui reprochent d'être trop coûteuse, de ne pas rendre suffisamment de comptes aux agriculteurs, mais l'argument qui revient le plus souvent, et auquel je ne souscris évidemment pas, c'est que le monopole de la Commission canadienne du blé brime les droits et libertés des agriculteurs. Ce n'est sans doute pas le cas des sociétés privées.

Dans les années 40 et 50, les compagnies de grain privées américaines fulminaient contre la Commission canadienne du blé. Durant les années 60, certains sénateurs américains reprochaient au Canada de s'allier à l'ennemi et de nuire directement à la politique étrangère américaine parce que nous vendions du blé à l'Union soviétique.

Durant la majeure partie de la présente décennie, les attaques contre la Commission canadienne du blé sont venues d'une minorité d'agriculteurs canadiens qui croient qu'ils pourraient mieux se tirer d'affaire sans elle, et de l'industrie qui prône la création d'un libre marché du blé à la grandeur de l'Amérique du Nord. Il y a deux ans, au cours d'un congrès de la National Wheat Growers Association, l'industrie américaine a donné son appui aux agriculteurs canadiens qui tentent de mettre fin au monopole de la commission sur la vente du blé. Les Américains veulent un système de commercialisation plus près du leur. C'est typique des Américains, qui veulent la même chose dans le domaine de la culture. Les grandes compagnies alimentaires américaines auraient évidemment intérêt à pouvoir accéder directement au blé canadien, car elles pourraient espérer réduire leurs prix à long terme.

Les groupes canadiens, dont la National Citizens Coalition, sont descendus dans l'arène pour appuyer une centaine d'agriculteurs de l'Ouest canadien accusés d'avoir exporté du blé aux États-Unis sans permis d'exportation. La semaine dernière encore, à Winnipeg, un juge de la Cour du banc de la Reine du Manitoba a rendu sa décision dans une affaire où un agriculteur de la Saskatchewan faisait valoir que le monopole exercé par la Commission est inconstitutionnel. Le tribunal a statué que la loi, que modifierait le projet de loi C-4, relève des pouvoirs constitutionnels du gouvernement fédéral en matière de réglementation du commerce. L'agriculteur de la Saskatchewan Dave Bryan a été condamné à une amende de 9 000 $ et à une peine d'emprisonnement avec sursis de deux ans. M. Bryan a déclaré qu'il fera appel et il ne fait aucun doute que cette affaire se rendra jusqu'en Cour suprême.

En fait, les activités de la Commission canadienne du blé prêtent à controverse. Elles ont toujours été contestées et continueront vraisemblablement de l'être. Les modifications proposées dans le projet de loi C-4 connaîtront sans doute le même sort.

Je félicite le sénateur Taylor pour avoir clairement exposé les principaux éléments de la réforme proposée par le gouvernement. Je n'y reviendrai pas. Comme le disait le sénateur, le gouvernement, en proposant de remplacer les commissaires, qui sont nommés par le gouvernement, par un conseil d'administration de 15 membres, veut permettre aux producteurs de grain d'exercer plus d'influence sur les activités de la commission. Dix des administrateurs seront élus par les producteurs et les cinq autres, dont le président du conseil et le président directeur général, seront nommés par le gouvernement. Cela contribuera certainement à rendre la commission plus démocratique et plus responsable envers les agriculteurs. Quant à savoir si la formule choisie est la bonne, si elle va suffisamment loin et si ses moyens d'exécution sont les meilleurs, ces questions pourront encore faire l'objet de désaccords légitimes et j'ai hâte de voir ce qui ressortira des discussions du comité à ce sujet.

(1600)

Le conseil d'administration aura accès à toutes les données concernant les ventes et l'information financière de la Commission canadienne du blé et il appartiendra aux membres du conseil de décider quels renseignements divulguer aux titulaires de permis. C'est peut-être un pas vers une plus grande divulgation des activités de la Commission. Cela reste à voir et le point concernant le vérificateur général, ainsi que le type de commission que nous auront, sont des questions que nous devrions examiner très soigneusement en comité. Toutefois, il faut faire remarquer que l'obligation de divulguer des informations commerciales confidentielles met la Commission dans une position désavantageuse lorsqu'elle négocie des contrats avec des acheteurs étrangers. Il faut aussi faire remarquer que d'autres organismes gouvernementaux, comme la Société d'expansion des exportations, qui est aussi un organisme commercial traitant avec l'étranger, ne sont pas assujettis à la Loi sur l'accès à l'information.

Pour plus de flexibilité, la Commission se verrait accorder de nouveaux outils: la capacité d'acheter du blé ou de l'orge au comptant, de rajuster rapidement les paiements initiaux et de permettre aux agriculteurs d'obtenir des paiements anticipés avant la fin de la campagne agricole. À titre de garantie contre les pertes auxquelles pourraient donner lieu ces décisions, le projet de loi propose la création d'un fonds de réserve, tout à fait distinct des garanties des paiements initiaux, des ventes à crédit et des prêts accordées par le gouvernement. Beaucoup de producteurs n'aiment pas cette disposition. Ils savent qu'il paient déjà un prix excessif pour les décisions et les opérations de la Commission, plus de 42 milliards de dollars selon les chiffres vérifiés pour la campagne agricole de 1995. Si le gouvernement refuse catégoriquement d'aider au financement du fonds de réserve, ils veulent que le montant que l'on peut exiger des agriculteurs à titre de garantie contre les mauvaises décisions et les pertes soit plafonné.

Le fonds de réserve reste sujet à controverse, de même que les garanties gouvernementales plus limitées, et je peux comprendre pourquoi. Il semble très étrange que le gouvernement fédéral puisse risquer des prêts de plusieurs milliards de dollars pour la construction d'un réacteur CANDU en Chine et qu'il ne puisse pas aider au financement d'un fonds de réserve pour la Commission canadienne du blé.

Les dispositions sur l'inclusion et sur l'exclusion sont peut-être les réformes qui sont le plus sujettes à controverse. D'un côté, certains voient dans la disposition sur l'inclusion un nouveau pouvoir. La commercialisation du colza, de l'avoine, du lin et du seigle pourrait théoriquement relever d'un monopole. Cela pourrait donner lieu entre autres à une contestation des investisseurs étrangers en vertu du chapitre 11 de l'ALENA. D'un autre côté, on craint que la disposition sur l'exclusion ne mène peu à peu au démantèlement de la Commission. Dans les deux cas, on exagère.

Je ne sais vraiment pas de quel côté pencher, car nous n'avons pas entendu tous les arguments, mais je sais que les producteurs de denrées biologiques voudraient bien être inclus - et c'est peut-être un des aspects positifs de cette mesure.

Je sais très bien que les réformes proposées sont le résultat de presque trois ans de consultations et de débats intenses. L'ancien ministre de l'Agriculture, Ralph Goodale, a commencé le processus en juillet 1995, lorsqu'il a nommé les membres du groupe de travail sur la commercialisation du grain de l'Ouest. Depuis lors, il y a eu des audiences publiques, le groupe a remis son rapport et le gouvernement a présenté le projet de loi C-72, qui a été étudié au comité des Communes, lequel a tenu des audiences et apporté des amendements. Enfin, c'est devenu le projet de loi C-4, qui a aussi fait l'objet d'audiences à l'autre endroit.

Bien des gens attendent du Sénat qu'il amende ce projet de loi, et cela pour des raisons entièrement opposées. L'expérience et la sagesse collectives de cette Chambre, particulièrement parmi mes collègues du comité de l'agriculture, devraient être appliquées au projet de loi C-4. Nous devons entendre les arguments pour nous assurer que ce projet de loi n'aura pas des conséquences imprévues, et pour tenir compte des recommandations d'amélioration. Nous devons procéder à un examen en profondeur avant de laisser partir cette mesure.

Franchement, vu l'importance de cette mesure législative pour les gens des Prairies, pour l'économie du Canada et pour ceux dans le monde qui dépendent de nos grains, nous serions négligents en faisant moins que cela.

(Sur la motion du sénateur Berntson, le débat est ajourné.)

La Loi sur les télécommunications
La Loi sur la réorganisation et l'aliénation de Téléglobe Canada

Projet de loi modificatif-Deuxième lecture

L'Ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Poulin, appuyée par l'honorable sénateur Losier-Cool, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-17, Loi modifiant la Loi sur les télécommunications et la Loi sur la réorganisation et l'aliénation de Téléglobe Canada.

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, les Nations Unies ont plus d'une fois affirmé que le Canada est le meilleur pays du monde où vivre. Je serai très heureux lorsqu'on pourra rajouter que c'est aussi le meilleur pays du monde où faire des affaires.

Les plus importants obstacles à ce chapitre sont les forts taux d'imposition et la réglementation excessive qui tue la concurrence et nous empêche de retirer tous les avantages du marché libre. Dans le secteur des services financiers par exemple, il n'y a aucune raison valable d'empêcher les banques de vendre des assurances dans leurs succursales ou encore les compagnies d'assurance d'accepter des dépôts. Il y a beaucoup de discussions en vue de permettre la concurrence sur le marché monopolistique de la location automobile à long terme dans le but d'aider à faire baisser les prix. Notre capacité d'accumuler de la richesse est également sérieusement gênée par les règles qui restreignent les investissements étrangers et ne servent qu'à accroître le coût du capital.

Ces commentaires valent également pour les télécommunications. Le Canada a bâti l'un des meilleurs réseaux de télécommunications au monde. Nous voulons être les premiers à mettre au point une économie numérique et nous voulons être le chef de file dans les opérations basées sur la connaissance, mais il y a d'innombrables règlements dans ce domaine.

La doctrine de l'abstention - c'est-à-dire l'abstention de réglementer - et de l'ouverture des marchés à la concurrence réelle devrait être à la base même de la législation sur les télécommunications.

Nous avons devant nous le projet de loi C-17, Loi modifiant la Loi sur les télécommunications et la Loi sur la réorganisation et l'aliénation de Téléglobe Canada. Ce projet de loi vise en essence à donner au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes ou CRTC le pouvoir de gérer la concurrence, grâce à un nouveau régime de permis extraordinaire. À mon avis, il n'y a rien de mal à être battu, mais encore, il y a suffisamment de protection à cet égard dans la Loi sur la concurrence ou dans tous les règlements actuels du CRTC, soit des décisions, des recueils de tarifs, des instructions, etc.

Le projet de loi C-17 constitue la réponse du gouvernement du Canada à l'Accord sur les télécommunications de base conclu en vertu de l'Accord général sur le commerce des services, l'AGCS, et ratifié par 69 pays de l'Organisation mondiale du commerce en avril de l'année dernière. À toutes fins utiles, cet accord couvre plus de 90 p. 100 du marché mondial des télécommunications estimé à 880 milliards de dollars en 1996.

Bien que le projet de loi C-17 porte principalement sur l'octroi de pouvoirs au CRTC, il renferme également des mesures concernant la décision du gouvernement du Canada d'ouvrir les marchés des services téléphoniques locaux à la concurrence.

Il va sans dire que tant la signature de l'AGCS que la décision de demander au CRTC de s'abstenir d'exercer certains de ses pouvoirs de réglementation, ce qui permet d'étendre la concurrence du marché des communications interurbaines aux marchés locaux et internationaux, constituent de nouvelles mesures importantes. Ces mesures, je dois le souligner, ont débuté avec les décisions du gouvernement précédent de laisser les exploitants des communications sans fil concurrencer le marché local de la téléphonie câblée, et les exploitants et les revendeurs locaux concurrencer le marché des communications interurbaines. Ainsi, à l'heure actuelle, plus de six millions de Canadiens sont abonnés à des services de téléphonie sans fil. Les consommateurs ont également le choix entre des douzaines d'entreprises de communications interurbaines, comme Sprint Canada, AT&T Canada, Fonorola ACC et d'autres, qui ont réussi à s'emparer d'une part de marché représentant environ 40 p. 100 du marché national des communications interurbaines, marché qui était autrefois contrôlé entièrement par les entreprises Stentor.

En outre, la concurrence sur le marché des communications interurbaines est apparue beaucoup plus rapidement, et a rejoint une clientèle beaucoup plus vaste au Canada que dans pratiquement tous les autres pays du monde. En fait, les concurrents se sont emparés de cette part du marché en seulement cinq ans, deux fois plus rapidement que cela ne s'est produit aux États-Unis.

Tous ces progrès ont été rendus possibles en partie grâce au remaniement de la Loi sur les chemins de fer et à la présentation de la Loi sur les télécommunications de 1993, documents dont le comité sénatorial des transports et des communications a fait l'étude, sur lesquels il a délibéré et qu'il a modifié considérablement à l'étape de son étude préalable au Sénat.

En tant que président du comité sénatorial à cette époque-là, je puis vous assurer que tous ceux qui ont rédigé cette loi et qui ont influé sur son contenu ont délibérément écarté le principe de l'octroi de licences à des fournisseurs et des revendeurs de services internationaux. Les comités de la Chambre des communes et du Sénat ont jugé cela tout simplement inutile. Je reviendrai à ce thème courant.

(1610)

Le projet de loi C-17 comporte 23 articles regroupés en cinq parties portant sur: premièrement, les licences pour les services de télécommunication internationale; deuxièmement, la libéralisation des restrictions sur la propriété étrangère applicables aux sociétés de communication par satellite et par câbles sous-marins; troisièmement, l'administration par un tiers du numérotage téléphonique; quatrièmement, la certification des appareils de télécommunication; cinquièmement, l'abrogation des restrictions de propriété touchant Téléglobe Canada Inc., afin que tous les fournisseurs de services de télécommunication au Canada soient sur un pied d'égalité.

Honorables sénateurs, ce sont les articles 1, 3 et 7 qui font problème. Ces dispositions confèrent au CRTC le pouvoir de mettre en place un nouveau régime de licences pour les fournisseurs de services de télécommunication internationale, y compris les propriétaires d'infrastructures à intégration verticale et les revendeurs. Même si le projet de loi a été sensiblement modifié lors de son étude par le comité permanent de l'industrie de la Chambre des communes qui a, entre autres, restreint son application aux fournisseurs de services internationaux - le projet de loi, à l'origine, concernait aussi les fournisseurs de services nationaux -, le pouvoir conféré au CRTC demeure trop étendu et trop vague.

Industrie Canada et le CRTC soutiennent que cette réglementation par l'octroi de licences est nécessaire si l'on veut accorder des chances égales aux éventuels intervenants internationaux. Ils prétendent que la fixation de prix abusifs par les filiales canadiennes de monopoles étrangers et la possibilité d'établir des communications internes au Canada en passant par les États-Unis poseraient des problèmes.

Arrêtons-nous d'abord à la deuxième affirmation. Trois cas peuvent se présenter: premièrement, l'infrastructure de télécommunications canadienne est plus coûteuse que celle des États-Unis; deuxièmement, elle est aussi coûteuse; troisièmement, elle est moins coûteuse.

Le contournement de l'infrastructure canadienne n'a de sens que dans le premier cas; il serait ridicule en effet de craindre l'éventualité d'un contournement dans les deuxième et troisième cas. Or, Industrie Canada et le CRTC savent pertinemment que les installations de Stentor sont environ 10 p. 100 plus économiques que toute autre infrastructure américaine. Ainsi donc, l'établissement de communications internes en passant par l'étranger est fort improbable à l'heure actuelle et ne peut, au mieux, qu'être envisagé comme une lointaine possibilité - donc trop faible pour susciter de l'inquiétude et beaucoup trop coûteuse pour que le gouvernement puisse songer à se doter de moyens pour contrôler et faire appliquer des restrictions concernant l'acheminement des appels.

Certes, le meilleur moyen pour le gouvernement d'éliminer les avantages du recours aux pratiques des télécommunications internes passant par un autre pays consisterait à adopter une loi qui soit conforme à la fourniture de services de télécommunications efficaces, soit l'adoption de la doctrine de l'abstention telle qu'énoncée dans la Loi sur les télécommunications. En fait, le régime de délivrance de licences envisagé pourrait nuire à l'efficacité des télécommunications internationales puisque l'incertitude qu'il cause pour les investisseurs éventuels pourrait constituer un important obstacle à l'entrée. Par conséquent, le projet de loi C-17 favorise le recours aux pratiques de contournement, car il pourrait neutraliser les effets correctifs d'une concurrence ouverte et totale.

Quant au problème de l'établissement de prix abusifs qui pourrait survenir dans l'avenir, c'est également une lointaine possibilité - une possibilité de plus en plus improbable, compte tenu de la libéralisation des marchés des télécommunications national et international ainsi que de la signature de l'AGCS. Autrement dit, il y aura de moins en moins de monopoles étrangers qui s'adonneront à des pratiques d'établissement de prix abusifs dans l'avenir par suite de la mise en oeuvre de l'AGCS.

D'ailleurs, le CRTC a eu affaire à un cas semblable récemment. La société Hong Kong Tel aurait offert ses services à un prix plus bas que celui de Téléglobe sur le marché de la C.-B., visant son ancienne clientèle qui habite maintenant dans la région de Vancouver. Le CRTC a fini par ordonner à BC Tel, la société louant la ligne de Téléglobe, de déconnecter Hong Kong Tel. J'ai en main une copie de la décision du CRTC. Il s'agit de la décision no 96-2352. Le fait est que le CRTC a déjà le pouvoir de lutter contre la pratique de l'établissement de prix abusifs.

Le gouvernement du Canada dispose d'autres outils pour mettre un terme à cette pratique. L'établissement de prix abusifs est une infraction, aux termes de la Loi sur la concurrence. D'autres activités abusives sont régies par les dispositions de la même loi sur l'usage abusif d'une position dominante. Ces mécanismes se sont révélés de bons outils pour régir la conduite des sociétés dans les marchés non réglementés. C'est tout ce dont a besoin le marché des télécommunications internationales du Canada.

Le ministère de l'Industrie et le CRTC font allusion à d'autres pays, comme les États-Unis et la Communauté européenne, qui sont en train de mettre en oeuvre un régime de délivrance de licences - s'ils en ont un, nous devrions en avoir un. Cependant, ces pays ne disposent pas d'un cadre réglementaire comme celui du Canada pour régler les problèmes et ne possèdent pas d'installations de télécommunications aussi efficaces que celles du Canada. Leur marché bien plus grand et leurs installations relativement inefficaces font d'eux des proies idéales pour les pratiques d'établissement de prix abusifs.

De plus, comme M. Courtois, de Bell Canada, l'a fait remarquer devant le comité de la Chambre des communes quand il a dit:

 

Par contraste, l'approche de l'octroi de licences au Royaume- Uni a entraîné des retards considérables et de l'inaction parce que les conditions propres à cette méthode ne permettent pas de s'adapter aussi bien aux changements.[...] Dans le cas de la Nouvelle-Zélande, le régime d'octroi de licences a causé des conflits sur l'interconnexion de base qui ont été débattus devant les tribunaux - jusqu'au comité judiciaire du Conseil privé - pendant 10 ans, pour aboutir au renvoi des parties à la table des négociations.
D'autres, notamment Call-Net Enterprises et AT&T Canada, soutiennent qu'une réglementation indirecte des propriétaires d'installations est inefficace et qu'il est préférable de contrôler directement le prétendu prédateur en ayant recours à l'octroi de licences. La réglementation directe offre au CRTC la possibilité d'appliquer des types de solutions intermédiaires pour régler ces problèmes, plutôt que de devoir adopter des mesures radicales, comme celle qui consiste à éliminer Hong Kong Tel.

Cependant, ce qu'on dit rarement, mais qu'on laisse entendre souvent, c'est que ces solutions intermédiaires sont synonymes de règlements tarifaires. Dans ce cas, le CRTC pourrait exiger des prix ou des taux tarifaires plus élevés d'une partie prétendue contrevenante au moyen de sa licence. Ce pouvoir, je le répète, est contraire à la doctrine de l'abstention - l'abstention de réglementer. Il est contraire à la volonté que le Parlement a exprimée quand, sur l'avis de ses deux Chambres, il a adopté la Loi sur les télécommunications du Canada. Je me permets d'ailleurs de rappeler ce que M. Nick Mulder, de Stentor, a déclaré au comité de la Chambre des communes qui s'est penché sur le projet de loi C-17. Il a déclaré:

Même s'il s'agit d'un concept très répandu sur la planète, l'attribution de licences n'a jamais été le mode de fonctionnement privilégié au Canada. Il est vrai que, dans sa première version déposée à la Chambre des communes en 1992, l'avant-projet de la Loi sur les télécommunications envisageait un régime d'attribution des licences. Mais la Chambre des communes et le Sénat ont eu la sagesse de retirer ces dispositions du projet de loi [...] le concept d'attribution de licences en ce qui a trait aux services internationaux est, depuis la conclusion heureuse des négociations de l'OMC à Genève, plus tôt cette année, considéré comme souhaitable, même s'il n'est pas essentiel sur le plan juridique pour permettre l'harmonisation du régime réglementaire canadien avec celui de la majorité de nos principaux partenaires commerciaux. Les États-Unis, par exemple, attribuent des licences aux télécommunicateurs qui offrent leurs services à l'échelle internationale, mais ils ne le font pas sur le marché intérieur. Toutefois, à notre avis, il n'est pas essentiel de surimposer l'attribution de licences à la Loi sur les télécommunications.

Devant le comité de la Chambre des communes chargé d'étudier le projet de loi, l'Association du Barreau canadien a également déclaré ce qui suit:

 

[...] le régime d'octroi de licences initialement prévu dans la Loi sur les télécommunications a été supprimé [...] À cette époque, [nous ne le jugions] pas indispensable et nous craignions que ce régime n'impose un fardeau supplémentaire à tous ceux qui souhaitaient proposer des services de télécommunication au Canada.[...] Malheureusement, les dispositions du projet de loi C-17 concernant l'octroi de licences nous inspirent les mêmes réserves. Ce régime peut être lourd de conséquences, et sa mise en place quatre ans après l'adoption de la loi va faire naître une incertitude pour l'industrie.
Donc, le projet de loi C-17 propose de donner au CRTC le pouvoir de gérer la concurrence par l'attribution de licences. Nous ne pouvons donc pas nous attendre à un régime de concurrence sur le marché des télécommunications internationales, mais à un régime de gestion de la concurrence. La gestion de la concurrence, ce n'est pas un vrai régime de concurrence. Ce sont deux situations fondamentalement différentes.

Un régime de concurrence assurerait des services de télécommunication efficaces, meilleurs et plus variés, des prix à l'avenant et des technologies, des produits et des services innovateurs. Un régime de gestion de la concurrence ne nous donne rien de tout cela.

Comme l'a écrit John Milton dans Tenure of Kings and Magistrates, en 1649:

Seuls les hommes bons peuvent aimer vraiment la liberté; les autres n'aiment pas la liberté, mais la licence.

Comment le gouvernement peut-il justifier qu'on oblige les entreprises internationales de télécommunications à obtenir une licence? On ne peut qu'en venir à la conclusion que cela ne se justifie pas. Les fournisseurs de services internationaux se feront réserver un «traitement national» et le statut de «nation la plus favorisée» en vertu de l'AGCS. C'est assez pour que le marché produise naturellement ce qu'on appelle des règles du jeu équitables. L'Association du Barreau canadien a aussi affirmé:

Nous reconnaissons qu'un certain nombre de dispositions sont nécessaires pour concrétiser les engagements pris par le Canada dans le cadre de l'Accord général sur le commerce des services de l'Organisation mondiale du commerce, mais nous craignons que certaines dispositions n'aillent au-delà du strict nécessaire. Il s'agit de dispositions non limitatives, qui risquent d'imposer des conditions et des obstacles réglementaires... il n'est pas certain, à notre avis, qu'un régime d'octroi de licences soit indispensable pour concrétiser le principe du traitement national...

Le système équitable que je propose n'est pas nouveau. En fait, on en voit les manifestations tous les jours. Cela se trouve pratiquement dans tous les marchés déréglementés de l'économie canadienne. Il est fondé sur le concept de la prestation efficace des produits et services. La survie d'une entreprise n'est alors assurée que lorsque son plan d'entreprise en assure l'efficacité. Les entreprises qui s'écartent trop de ce principe s'exposent à une réorganisation, à la faillite ou à l'échec. La marge d'erreur est nettement plus étroite sous un régime franchement concurrentiel que sous un régime de gestion de la concurrence par l'octroi de licences.

Il est intéressant de signaler que, aux audiences du comité permanent de l'industrie de la Chambre des communes, la seule compagnie de téléphone à proposer une nouvelle entrée sur le marché des télécommunications internationales, GeoReach Telecommunications Inc., disait que l'on n'avait absolument pas besoin d'un régime d'octroi de licences. La société GeoReach a manifestement le plus à perdre de la pratique de prix abusifs et pourtant, elle trouve que le projet de loi C-17 établit une réglementation excessive et inutile et le reconnaît en ces termes:

GeoReach n'a aucune raison de croire que les actuels pouvoirs de réglementation du conseil ne sont pas suffisants à cette fin. Par exemple, un certain nombre de décisions du conseil qui... imposent diverses protections des consommateurs et de la compétitivité aux fournisseurs de services en titre, sont fondées sur la disposition de mise en oeuvre prévue dans la Loi sur les télécommunications. En même temps, le marché de la concurrence continue de croître. Autrement dit, l'innovation, la baisse des prix et le choix à la consommation qu'ont permis l'apparition et l'évolution de la concurrence conformément au cadre législatif et réglementaire établi jusqu'à maintenant par le conseil dans divers segments du marché prouvent amplement que les actuels pouvoirs de réglementation du conseil sont suffisants.

Les compagnies de téléphone en titre, par contre, semblent préférer l'octroi de licences dans la période de transition entre le monopole et la concurrence et proposent une disposition de temporarisation au 1er mars 2000. Mais c'est considéré au mieux comme une disposition de compromis. De toute manière, elles comprennent aussi que les régimes d'octroi de licences tendent à devenir inutiles.

Le projet de loi C-17 suscite aussi d'autres préoccupations. Le projet de loi concerne les télécommunications de base et définit comme «fournisseur de services de télécommunication» la personne qui fournit des services de télécommunication de base, y compris au moyen d'un appareil de transmission exclu. On aurait parfaitement raison d'interpréter le mot «appareil» comme renvoyant aux ordinateurs. Étant donné que la Loi sur les télécommunications exclut à l'heure actuelle les ordinateurs de cette définition, je dois convenir avec l'Association canadienne des fournisseurs Internet qu'il y a, subtilement caché dans le projet de loi C-17, un risque imminent d'expansion énorme de la réglementation.

L'Internet et de nombreux réseaux de télécommunication assistée par ordinateur doivent demeurer non réglementés, car ce n'est qu'à cette condition que les communications continueront d'évoluer et de s'améliorer autant au Canada qu'ailleurs dans le monde. Un régime d'octroi de licences ne peut que freiner la croissance des services informatiques au Canada par rapport au reste du monde. Il ne faut pas que cela arrive.

En conclusion, le projet de loi C-17 représente une énorme déviation sur le chemin de la libéralisation sur lequel s'est engagé le Parlement lorsqu'il a adopté la Loi sur les télécommunications en réaction à la prolifération des techniques de transmissions numériques. Le régime de licences pour les télécommunications internationales que propose le gouvernement représente une réglementation excessive. En fait, la meilleure façon de décrire l'octroi de licences comme forme de réglementation est de dire que c'est une solution à la recherche d'un problème.

Honorables sénateurs, j'espère que lorsque le projet de loi C-17 sera renvoyé en comité, vous envisagerez des amendements visant à supprimer le régime de licences proposé aux articles 1, 3 et 7. L'étude détaillée qui y sera faite du sujet vous permettra de conclure immédiatement qu'il n'existe aucun motif d'ordre public justifiant la réglementation des télécommunications internationales par l'intermédiaire d'un régime de licences.

Honorables sénateurs, notre devoir est clair. Nous devons supprimer les articles 1, 3 et 7 afin que le reste du projet de loi C-17 puisse recevoir rapidement la sanction royale.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu une deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Poulin, le projet de loi est renvoyé au comité permanent des transports et des communications.)

La fonction gouvernementale autochtone

Étude du rapport du comité des peuples autochtones demandant l'autorisation de se déplacer et d'engager du personnel-Ajournement du débat

Le Sénat entreprend l'étude du second rapport du comité sénatorial permanent des peuples autochtones (budget-étude sur la fonction gouvernementale autochtone), présenté au Sénat le 18 février 1998.

L'honorable Charlie Watt: Honorables sénateurs, je propose l'adoption du rapport.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, l'honorable sénateur pourrait-il décrire en quelques mots l'objectif de l'étude?

Le sénateur Watt: Honorables sénateurs, je vais tenter de préciser l'ampleur de cette étude.

Le ministère des Affaires indiennes est fiduciaire pour les peuples autochtones. Je m'explique. Lorsque je dis «peuples autochtones», je fais allusion aux Indiens inscrits qui vivent dans des réserves. La ministre est responsable de ces peuples et de leurs terres.

Les autres peuples autochtones, soit les Métis et les Inuits, n'entrent pas dans la catégorie visée à l'article 91.24 de la Loi constitutionnelle de 1867.

En 1982, au moment du rapatriement de la Constitution, lorsque Pierre Elliott Trudeau était encore premier ministre du Canada, il a offert certains accommodements aux peuples autochtones - les Indiens, les Inuits et les Métis. Il s'agit de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Depuis, il n'y a pas eu d'initiatives politiques concernant les autochtones à l'exception de certaines dispositions de l'Accord de Charlottetown et de l'Accord du lac Meech, lorsque Brian Mulroney était premier ministre.

Les peuples autochtones ont encore l'impression qu'il est possible de construire une société autochtone en formant leur propre gouvernement. L'article 91.24 de la Loi constitutionnelle de 1867 confie au ministre des Affaires indiennes une responsabilité envers les peuples autochtones. Le ministre ne peut aborder le concept du gouvernement autochtone que dans le cadre d'un gouvernement ethnique. La population voit là un gouvernement raciste parce qu'il ne régira que les personnes qui vivent dans les réserves.

Personnellement, je participe depuis 20 ans aux efforts visant à définir des structures pratiques, notamment dans le cadre de négociations directes avec le gouvernement du Québec et le gouvernement du Canada. La question du gouvernement autochtone comporte un élément qui n'entre normalement pas en ligne de compte dans une administration publique, soit la composante ethnique.

Je précise.

Nous devons examiner l'idée d'une composante ethnique dans les structures de gouvernement des Autochtones afin de déterminer s'ils ont vraiment besoin d'un troisième palier de gouvernement. Les sénateurs connaissent bien le sujet. Il en a déjà été question. Peut-être pourrait-on trouver d'autres formes de structures pour répondre aux besoins des Autochtones, mais sans mettre de côté la composante ethnique et en procédant secteur par secteur. J'aimerais que le comité mette l'accent là-dessus. Nous devons bien cela aux Autochtones et aux citoyens du Canada. Ils doivent savoir une fois pour toutes quel genre de structure le gouvernement mettra en place. Nous ne le savons pas encore. Dans ce domaine, j'essaie de définir un moyen de fixer les objectifs du comité.

Nous devons examiner une question très vaste. Par exemple, si des administrations autochtones et des municipalités se côtoient dans la même collectivité, quel genre de relations entretiendront-elles? Il y a diverses solutions à examiner.

Il faut aussi prévoir d'autres relations, celles avec le gouvernement régional. Nous devons également examiner la compétence des provinces conformément à l'article 92. Comment réglerons-nous le problème du chevauchement entre deux paliers de compétence? Comment amènerons-nous les deux paliers de compétences à s'entendre? L'autre palier est celui d'ordre national. Il est question d'un parlement à l'intérieur d'un parlement.

Mon interprétation du rapport de la commission royale, c'est qu'il y a énormément de travail à faire. Voilà l'ampleur de la responsabilité qui incombe au comité, si le comité l'accepte.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, si le Sénat approuve ce budget aujourd'hui, couvre-t-il les travaux accomplis jusqu'à la fin du présent exercice ou est-il censé couvrir ceux de l'exercice actuel et même d'une partie du prochain exercice? Pour quelle période demande-t-on ces sommes et quand seront-elles versées?

Le sénateur Watt: Le budget approuvé par le comité de la régie interne est très limité. Il couvre la période qui va jusqu'au début d'avril ou à la fin de mars.

Si vous me demandez quel sera le budget global pour toute la durée de l'étude - disons, pour 18 mois - il sera d'environ un million de dollars. Si l'on ramène ce montant sur un an, il représente un peu plus de 600 000 $.

J'ai examiné les sommes dépensées par les autres comités. Le comité des transports est le comité dont le budget se rapproche le plus de celui-ci, avec un budget d'environ 400 000 $.

Je sais qu'il s'agit d'une somme importante. Cependant, si nous voulons vraiment consulter les Autochtones de la base, nous avons besoin de personnes-ressources qui mettront le comité en rapport avec les organisations autochtones. Pour cette raison, il nous faut retenir les services de trois Autochtones - un Inuit, un Métis et un Indien. Nous avons aussi besoin d'un coordonnateur et d'un adjoint administratif au coordonnateur, parce qu'il faut coordonner le travail. C'est peut-être inhabituel au Sénat. Vous pensez peut-être que le ministère de Affaires indiennes devrait nous fournir du personnel à cette fin. C'est ce que je pensais au début des discussions sur cette question, mais comme le Sénat n'a pas dépensé beaucoup d'argent pour les Autochtones, j'ai pensé que c'était une excellente occasion de formuler ces suggestions.

Au cours des sept dernières années, le comité sénatorial permanent des peuples autochtones a dépensé environ 42 000 $.

(1640)

Le sénateur Kinsella: L'honorable sénateur peut-il nous aider à comprendre la proposition dont nous sommes saisis? Comme on le précise dans les Journaux du Sénat du 18 février 1998, le montant total en question est de 27 200 $. Sous la rubrique des services professionnels, ce budget prévoit une dépense de 7 000 $ pour un coordonnateur de l'étude spéciale.

Ma question est celle-ci: a-t-on engagé ce coordonnateur?

Le sénateur Watt: Honorables sénateurs, on n'a encore engagé personne. Je ne peux engager qui que ce soit à moins d'avoir l'approbation du comité.

Le sénateur Kinsella: Étant donné que nous sommes à cinq semaines de la fin de l'exercice, si on approuve ceci aujourd'hui, envisage-t-on de verser ces 7 000 $ au coordonnateur de l'étude spéciale à partir de demain jusqu'au 31 mars?

Le sénateur Watt: Honorables sénateurs, je ne suis pas certain d'avoir compris la question.

Le sénateur Kinsella: On nous demande d'approuver un crédit de 7 000 $ à verser à un coordonnateur de l'étude spéciale à raison de 350 $ par jour pour une période de 20 jours. Ma question est celle-ci: étant donné qu'il ne reste plus que 20 jours ouvrables environ, va-t-on utiliser cet argent?

Le sénateur Watt: Nous l'aurions utilisé si nous avions pu prendre rapidement des décisions au comité directeur. Je peux vous répondre que le temps risque de nous manquer. Si on ne dépense pas cet argent, eh bien soit. Nous n'avançons pas à l'heure actuelle, car le comité étudie encore toute la question.

Honorables sénateurs, je ne suis pas habitué à m'occuper de choses comme celle-ci, mais au fil des ans, j'ai remarqué une chose que je trouve plutôt inhabituelle. On adopte une motion, on adopte un ordre de renvoi, et le budget vient en dernier. Depuis mon arrivée au Sénat, j'ai toujours trouvé cela inhabituel et c'est l'un des premiers points que j'ai soulevés. J'ai demandé comment nous pouvions approuver une motion sans savoir ce qu'il en coûterait. Je pense que les règles dans ce domaine doivent être modifiées. Je ne pensais pas être la victime de cela alors que je suivais la procédure du Sénat.

Le sénateur Kinsella: Si le Sénat approuve ce budget pour terminer cette étude discrète, pouvez-vous affirmer, ainsi que le comité, que le Sénat ne s'engage d'aucune façon à procéder à cette étude plus longue de plus d'un million de dollars dont on a parlé tout à l'heure? Est-ce clair dans l'esprit de l'honorable sénateur? Nous ne nous engageons à rien d'autre que ce qu'on soumet ici.

Le sénateur Watt: Honorables sénateurs, je comprends parfaitement cela. C'est l'une des raisons pour lesquelles je dois revenir devant le comité principal demain, à 17 h 15. Pourquoi devrais-je entreprendre quelque chose qui sera interrompu avant même que ce ne soit terminé? Je peux aussi bien soumettre cette question à d'autres instances. Je devrai peut-être recueillir de l'argent ailleurs si le Sénat n'est pas disposé à financer le projet. C'est important. Le rapport de la commission royale est loin d'être applicable si on n'y consacre pas beaucoup plus de travail.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, à la lumière de ce que le sénateur Watt nous dit, il nous semble que cela fait partie d'une étude plus longue. Si ce comité se réunit demain pour réexaminer la question plus large, peut-être que la chose la plus sage pour nous consiste à reporter l'étude de cette question jusqu'à ce que cette réunion ait eu lieu.

(Sur la motion du sénateur Kinsella, le débat est ajourné.)

Le Sénat

Les préoccupations des Albertains-Interpellation-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Ghitter, attirant l'attention du Sénat sur les préoccupations des Albertains à l'égard du Sénat en tant qu'institution, à savoir: son efficacité, son utilité et sa pérennité; d'autres modes de sélection de ses membres; la nature de sa représentation régionale et, plus particulièrement, le désir que toutes les provinces soient représentées par un nombre égal de sénateurs; la durée du mandat de sénateur; le rôle qu'un Sénat réformé pourrait jouer au plan national; les pouvoirs qu'il conviendrait qu'il exerce, en harmonie avec la Chambre des communes.-(L'honorable sénateur Gigantès)

L'honorable Richard J. Doyle: Honorables sénateurs, le 10 février dernier, le sénateur Ron Ghitter a fait part de son intention de poser la sempiternelle devinette à savoir où va le Sénat. Bien avant que ne soient promulgués les instruments de la Confédération, sir John A. Macdonald et ses joyeux compères discutaient déjà de l'avenir du second examen objectif.

Bien des montagnes ont été créées par les études officielles sur l'endroit. N'empêche qu'y ont retenti les préoccupations réelles de nombreux sénateurs dévoués, depuis le sénateur George Brown qui, d'un côté, défendait le pouvoir du Sénat, jusqu'au sénateur Grattan O'Leary qui, de l'autre côté, livrait un vibrant discours contre le veto suspensif et l'ingérence dans les affaires provinciales. Il ne voyait aucune utilité à mener des enquêtes à la Croll. Il a dit: «C'est Disraeli, je crois, qui disait que les commissions royales d'enquête trouvaient ce que tout le monde savait déjà.» Pourquoi faire perdre son temps au Sénat?

(1650)

Rarement nous a-t-on rappelé que si le Sénat n'avait pas fait certaines choses de la bonne façon, il n'aurait pas survécu durant plus de 130 ans.

Au cours de mon séjour bref et fortuit ici, j'en suis venu à la conclusion que le Sénat, au gré des bonnes et des mauvaises expériences, se réforme lui-même. Si nous en venons à réformer la Chambre haute de façon officielle, la tâche sera plus facile en raison de nos réalisations et de nos erreurs des quelque douze dernières années, au cours desquelles nous avons profité du fait que Lester Pearson avait fixé une limite d'âge.

Je vais maintenant discuter de quelques importants bons et mauvais coups du Sénat dans sa façon de s'acquitter de ses fonctions. Le premier point important, j'en suis convaincu, qui est aussi, je le crains, une erreur, fut la décision du Parti libéral d'abolir l'étude préalable que le Sénat faisait des mesures législatives lorsque celles-ci étaient encore à la Chambre des communes. Des changements législatifs qui étaient auparavant faits en douceur, de façon informelle et rapide, sont maintenant perçus comme des modifications intempestives, des remises en question de la sagesse du ministre, et des empiétements sur le terrain des parlementaires élus. Le Sénat continue d'améliorer les projets de loi de façon extrêmement lente, alors qu'il pourrait le faire avec beaucoup plus de célérité.

Deuxièmement, il faut examiner de façon plus poussée la possibilité que le Sénat se penche sur les manifestations hostiles qui ont été organisées pour mobiliser l'attention du public lors du combat mené contre l'adoption de la taxe sur les produits et services. Voici ce que j'avais écrit dans le numéro de janvier 1991 du Idler Magazine:

Le coût de la décision de Allan J. MacEachen de compromettre l'avenir du Sénat canadien dans une tentative scandaleuse de rétablir les libéraux comme le parti dirigeant naturel de la nation n'a pas encore été évalué.

Aujourd'hui, les historiens qui écrivent dans les publications universitaires et dans les pages en regard des éditoriaux font habituellement allusion aux mirlitons, aux sifflets et aux autres instruments d'obstruction systématique pour dissimuler et cacher la laideur des cris de «misérables bâtards», des simulacres de charges contre le fauteuil du Président, des menaces proférées le poing brandi que l'on trouve décrits dans les comptes rendus contemporains des chicanes de procédure et des séances qui duraient 24 heures d'affilée qui ont plongé le Sénat dans le chaos du 9 octobre au 14 décembre 1990. Ceux qui ont écouté les délibérations y ont entendu le dernier souffle des anciens gentlemen du Sénat canadien. Ceux qui ont suivi les travaux dans les médias ont été gênés d'entendre le leader adjoint au Sénat mentionner par leur nom huit jolies journalistes de la tribune de la presse parlementaire et les féliciter de faire très consciencieusement le compte rendu de ces séances où l'histoire était en train de se faire.

Une série de règles destinées à empêcher toute répétition de l'épisode de l'étude de la TPS ont été élaborées à la faveur d'une révolte menée par les sénateurs Brenda Robertson, Normand Grimard et un comité de conservateurs - avec pour témoin un seul libéral silencieux qui représentait ses collègues qui boycottaient les travaux du comité. Fait révélateur, aucune initiative visant à supprimer ces nouvelles règles n'a été entreprise au cours des six années subséquentes.

Troisièmement, personne ne devrait se méprendre sur l'épisode accablant de l'aéroport Pearson, que l'on pourrait considérer comme l'illustration déterminante d'un changement d'attitude du Sénat à l'égard du fonctionnement du Parlement. Personne n'a défendu le dossier Pearson de façon plus dramatique que le sénateur Lynch-Staunton l'a fait le 5 juillet 1994 au comité sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles:

Le projet de loi C-22, dans sa forme actuelle, est inacceptable en ce qu'il prive les intéressés d'un droit fondamental dont jouissent tous les Canadiens, à savoir le droit d'en appeler devant les tribunaux. Toute personne au Canada qui commet une infraction criminelle ou d'ordre civil, qu'il s'agisse de meurtres en série, de détournement de fonds, de mauvais traitements infligés à un enfant ou d'une infraction au code de la route, a droit à un procès.

Les personnes visées par le projet de loi C-22 n'ont pas été accusées de quoi que ce soit. Personne, même le plus grand défenseur de ce projet de loi, n'a parlé, de façon directe ou indirecte, d'illégalités qui auraient été commises pendant les quatre années de discussions qui ont abouti à la conclusion des accords concernant l'aéroport Pearson. Or, dans ce projet de loi plutôt insolite, le gouvernement interdit l'accès aux tribunaux et, en quelques mots, non seulement annule les accords mais déclare qu'ils n'ont jamais existé.

Nous tenons à préciser que nous ne cherchons pas à indemniser qui que ce soit. Les dommages-intérêts, peu importe leur nature, ne nous intéressent guère. Nous ne présumons même pas que les tribunaux trancheront en faveur des requérants. En toute honnêteté, l'issue de toute poursuite en justice nous laisse indifférents.

En mars 1997, près de trois ans après le début de la lutte à ce sujet, l'éditorialiste du Globe and Mail écrivait:

 

Le projet de loi constituait non seulement un affront à la Constitution (comme l'Association du Barreau canadien l'avait soutenu dans son témoignage) mais aussi un affront à la justice naturelle, à l'équité et à l'intelligence du public.
(1700)

Comme si de rien n'était, l'éditorialiste du Globe and Mail poursuit sa campagne contre le pouvoir que détiennent des non-élus. Il a récemment commencé à réclamer, et je cite:

 

[...] l'abolition totale sans renoncer au renouvellement du Sénat.
Il écrit de façon approbative, et je cite à nouveau:

 

Nous disposons maintenant d'un nouvel outil de contrôle puissant sur les Communes, la Cour suprême du Canada.
Il ne mentionne pas que, avec la cour, il n'en reste pas moins le problème de la nomination. Dans d'autres encycliques, le rédacteur confère aux 150 compagnons de l'Ordre du Canada, tous élus, la responsabilité de décider des nominations à un niveau élevé, de choisir le prochain Gouverneur général, qui succéderait à la Reine.

Le Sénat persévère malgré tout à répondre au public qui veut savoir ce qui se passe dans les affaires nationales, comme dans le cas de la clause 17 des Conditions de l'union de Terre-Neuve, à titre de reconnaissance des minorités négligées et des droits régionaux, dans une autre sage mesure, il a persuadé le ministre des Finances de faire son travail et de comparaître devant le comité plénier pour discuter de la structure financière du Régime de pensions proposé.

Ainsi, en reconnaissant les erreurs et en y trouvant des solutions, le Sénat démontre bien sa capacité à se renouveler. Il a encore des réformes à entreprendre. Je dirais même qu'il a désespérément besoin de nominations ou d'élections qui permettraient de mieux tenir compte des réalités politiques du pays. On devrait revoir le Règlement pour assurer la transparence des travaux des comités et le respect des responsabilités de la Chambre d'approuver ou de rejeter les initiatives des comités. On devrait voir à ce que tous les comités du Sénat, y compris le comité qui régit l'économie interne et les opérations du Sénat, favorisent la présence des médias, sauf dans quelques rares cas d'exception prévus dans le Règlement.

Le sénateur Ghitter continue de croire que la Chambre haute continuera de changer au fur et à mesure que son enquête se poursuivra. Une chose est certaine. On disposera bientôt du rapport du comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles et de son étude du projet de loi C-220. L'étude en est à l'étape finale et elle a permis de démontrer que les Communes ont besoin d'un second examen objectif. Il ne faut pas oublier le projet de loi C-220, celui qui doit enlever aux meurtriers les profits qu'ils pourraient tirer de leurs crimes, le projet de loi Wappel, qui s'avère inconstitutionnel, un obstacle aux Marshall, Milgaard et Morin qui tentent de prouver leur innocence, et il reviendra au Sénat de rappeler au public que le projet de loi Wappel a été adopté au cours d'un vote unanime, non pas une fois, mais deux.

L'honorable John B. Stewart: Honorables sénateurs, si vous me le permettez, j'aurais une question à poser au sénateur Doyle.

Honorables sénateurs, une grande partie de l'intervention du sénateur Doyle ne faisait que traduire son opinion, donc, je ne m'y attarderai pas. Le premier point qu'il a fait valoir, si j'ai bien compris, portait sur l'étude préalable. Si j'ai bien saisi son propos, il soutenait que la pratique actuelle, qui consiste à étudier les projets de loi qui nous sont soumis après avoir été lus pour la troisième fois à la Chambre des communes, représente un défi aux ministres s'ils ont eux-mêmes proposé les mesures législatives en question. Le sénateur semblait insinuer que le nombre d'amendements a diminué, que nous craignons de froisser les ministres et que, par conséquent, nous ne proposons plus autant d'amendements à leurs projets de loi.

Le sénateur a-t-il calculé le nombre d'amendements proposés par le Sénat aux projets de loi qui nous sont soumis par l'autre endroit, comme le laisse entendre son discours?

Le sénateur Doyle: Je suis toujours content de répondre à une question du sénateur Stewart. Après avoir écouté sa question, je comprends pourquoi il ne s'oppose pas à ce que des opinions soient exprimées au Sénat. Je n'ai pas effectué une étude approfondie du nombre d'amendements, parce que je n'ai jamais trouvé utile de calculer le nombre de changements proposés. Un seul grand amendement peut changer toute la portée d'un projet de loi. Un autre amendement peut ne pas même faire une différence de 50 cents dans les dépenses publiques.

Je sais une chose pourtant. Depuis que le sénateur MacEachen a prononcé son discours, je n'ai siégé à aucun comité qui a effectué une étude préalable sur une question particulière. Peu importe le nombre de questions soumises aux comités, pas une seule n'a fait l'objet d'une étude préalable. Les comités auxquels j'ai siégé ont plutôt eu tendance soit à retarder l'adoption d'un projet de loi, soit à en signaler les lacunes et imperfections aux sénateurs réunis.

Le sénateur Stewart: Je me rends compte que le nombre d'amendements ne reflète pas nécessairement leur importance, mais je dois dire au sénateur Doyle que, comme je participe moi-même aux travaux du comité sénatorial permanent des banques et du commerce, et le sénateur Oliver y a aussi participé, je suis très impressionné par le nombre d'amendements que le comité a proposé d'apporter à des projets de loi gouvernementaux et par l'empressement des ministres à essayer de comprendre le but de ces amendements.

(1710)

Si certains ministres ou députés sont offusqués, d'autres semblent tout à fait prêts à accepter des propositions d'amendement bien réfléchies à leurs mesures législatives.

Le sénateur Doyle ne pense-t-il pas que l'ancienne pratique, qui consistait à aller voir le ministre avec les propositions d'amendement et à lui dire - je crois d'ailleurs qu'un certain sénateur était bien connu pour cela -: «Si vous n'apportez pas cette modification, je vous assure que votre projet de loi sera rejeté au Sénat», est en réalité une forme de mesure législative déguisée? En cette ère de transparence, ne devrions-nous pas proposer ouvertement des amendements aux projets de loi plutôt qu'employer l'ancienne méthode, celle qui consistait à le faire en coulisses?

Le sénateur Doyle: Honorables sénateurs, je sais que l'on a parfois procédé d'une façon un peu clandestine, mais je me souviens aussi d'une fois où un ministre - je crois que c'était M. Hockin - a reconnu d'emblée, dans le cadre du débat sur un projet de loi financier qu'il renvoyait au Sénat, que les modifications qui venaient d'être faites avaient été proposées au Sénat et qu'elles étaient justifiées. J'en suis presque tombé de mon siège. Toutefois, on était généralement conscient dans cet endroit que, d'une façon ou d'une autre, on pouvait en une soirée régler de légers problèmes. Tout le monde s'entendait pour dire que oui, ce changement serait apporté, et c'était fait. On ne faisait pas toute une histoire chaque fois qu'il fallait faire preuve de bon sens pour modifier un projet de loi.

Le sénateur Stewart: Mais vous ne voulez sûrement pas dire que ce sera dorénavant un moment de vérité toutes les fois que nous proposerons un amendement?

Le sénateur Doyle: Je ressens souvent beaucoup d'hostilité quand nous amendons les projets de loi qui nous sont présentés.

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, j'ai deux questions à poser au sénateur Doyle. Vous dites que le Sénat, et je suis entièrement d'accord avec vous, devrait représenter tous les points de vue qui sont débattus dans toutes les régions du Canada. Pensez-vous, d'abord, que les sénateurs ayant décidé, pour toutes sortes de raisons, de siéger comme indépendants ont un rôle à jouer au Sénat? Dans mon cas, comme vous le savez, on ne trouve pas moyen, après cinq ans, de me nommer membre d'un comité, même si, selon le Globe and Mail, j'ai déjà présidé les plus difficiles comités de la Chambre des communes pendant 15 ou 20 ans. Voici que j'arrive au Sénat et que l'on n'arrive pas à modifier le Règlement, lequel est pourtant si simple. Y a-t-il un rôle pour les indépendants?

Ensuite, seriez-vous d'accord avec mon point de vue - sinon, je voudrais en discuter avec vous parce que vous êtes un homme réfléchi - voulant que puisque le premier ministre du Canada a toujours promu des femmes à la Chambre des communes, même s'il est difficile d'imposer les meilleures candidates d'un bout à l'autre du pays, et comme il en a la possibilité - selon l'expression très célèbre -, ne devrait-il pas songer à annoncer que son projet pour l'an 2000 et les années suivantes serait d'atteindre l'objectif d'une représentation égale pour les hommes et les femmes au Sénat? C'est un objectif qui peut être atteint. Tout ce qu'il faut, c'est la décision du premier ministre de recommander et de choisir ces sénateurs dans les domaines où un besoin se fait sentir. J'ai toujours dit à tous les premiers ministres de choisir, à l'avance, des sénateurs ayant de l'expertise dans les domaines auxquels s'intéressent des sénateurs qui nous quittent. Dans votre cas, par exemple, vous êtes un brillant journaliste.

N'est-il pas temps d'atteindre cette parité?

Le sénateur Doyle: Honorables sénateurs, je pense que mesdames les sénateurs seraient les premières à s'opposer à la parité, car elles cherchent actuellement à atteindre une proportion de 65/35 en leur faveur.

En ce qui concerne les sénateurs indépendants, j'ai toujours pensé que cette catégorie de sénateurs avaient le plus d'influence au Sénat. On recherchait leur avis, on leur offrait des voyages, des faveurs pour qu'ils votent pour ou contre un projet de loi donné.

Le sénateur Stewart: C'était dans l'ancien temps.

Le sénateur Doyle: Je ne comprends pas pourquoi vous renonceriez à cela pour devenir un sénateur ordinaire, masculin de surcroît.

Sérieusement, je pense que l'on a toujours tort d'établir des pourcentages particuliers. Mais je ne plaisantais pas quand je parlais des avantages d'être sénateur indépendant.

Le sénateur Prud'homme: Il y a déjà eu des sénateurs indépendants, certains ont même présidé des comités. Le sénateur Pitfield a été un excellent président. C'est facile. Il suffit d'ajouter un membre du comité, dans la mesure où le gouvernement reste majoritaire et, en cas d'égalité des voix, le président se prononce. Il suffit d'ajouter seulement un membre. L'attente dure depuis des années. On m'a dit: «Votez avec nous et vous pourrez faire partie du comité.» Si j'avais fait cela, je ne serais plus indépendant. Il reste que le gouvernement a le droit de s'attendre à jouir d'une majorité. Ce serait très facile. Quand une règle prescrit 12 maintenant, elle prescrirait 13. Si, par hasard, il vous arrivait de voter contre le gouvernement, il y aurait six voix contre six et le président n'aurait qu'à se prononcer en tant que septième membre.

Si nous ne pouvons trouver une solution à cette impasse, comment pouvons-nous entreprendre une réforme du Sénat? Je suis très patient, mais un jour je bloquerai tous les travaux du Sénat pour montrer que nous pouvons dire non. Je ne veux pas ennuyer tous les sénateurs seulement pour manifester mon mécontentement - je ne suis pas mécontent -, mais c'est une solution possible. Je pense que nous pouvons régler ce problème. Tout le monde vient me voir en blâmant les autres. Je voudrais éviter un affrontement avec des collègues.

(1720)

Le sénateur Doyle: Je veux simplement rappeler au sénateur Prud'homme que j'ai dit durant mon discours que je croyais qu'il était temps d'en revenir au Règlement et de peser soigneusement le pour et le contre. Cependant, je suis persuadé qu'il y aura encore certaines choses qui sembleront injustes.

En ce qui concerne les sénateurs indépendants, nous en avons plusieurs au sein de notre caucus que nous pouvons vous recommander.

L'honorable Herbert O. Sparrow: Honorables sénateurs, je voudrais poser une question au sénateur Doyle. Il a raison de dire que durant l'ère de Salter Hayden, on a effectué un grand nombre d'études préalables. Je ne suis pas en faveur de ce type d'études, sauf dans des circonstances bien spéciales. Lorsqu'on effectuait ces études préalables, les projets de loi étaient adoptés en deux ou trois jours au Sénat sous prétexte qu'on les avait étudiés. On nous accusait d'approuver sans discussion, car la population ne comprenait pas qu'on avait effectué une étude préalable.

Comme le sénateur Stewart l'a déclaré, on concluait à l'époque certaines ententes. Le Sénat dans son ensemble ne connaissait pas vraiment les dispositions de ces projets de loi, car il n'en était pas saisi. Ces projets de loi étaient étudiés au comité et les sénateurs ne siégeant pas aux comités en question ne savaient pas, bien des fois, ce qui s'était produit. Tout à coup, le projet de loi était adopté. Lorsque le Sénat se prononce sur un projet de loi, il est important que tous les sénateurs connaissent le plus possible ses dispositions. Bien entendu, l'étude préalable empêchait cela dans bien des cas.

Le comité du Sénat n'apprenait rien de plus que celui de la Chambre des communes étudiant le projet de loi, car les témoins comparaissaient le même jour devant les deux comités. Aucun des deux ne connaissait tous les tenants et aboutissants d'une question.

Un autre danger des études préalables, c'est que des présidents puissants pourraient négocier avec divers secteurs et conclure des ententes.

Cela étant dit, l'honorable sénateur pense-t-il que si nous procédions à des études préalables, nous risquerions d'être accusés d'approuver sans discussion, encore plus qu'à l'heure actuelle?

Le sénateur Doyle: Si le Sénat croit que cela risque de se produire, lorsqu'il aura officialisé son intention d'en revenir à ce processus, il établira sûrement des mécanismes de protection.

Lorsque je suis arrivé ici, c'est l'une des choses dont se vantaient les libéraux. Ils disaient être à l'origine de tout ceci et ils affirmaient que le Sénat était un endroit terrible avant cela. Nous devrions peut-être reformuler certaines dispositions car rien n'est exactement pareil de nos jours. Cependant, nous ne devrions certes pas encourager des ministres à venir nous dire qu'ils ont présenté un projet de loi parfait. J'ai entendu des ministres dire cela à plus d'une occasion et d'une façon qui, selon moi, a intimidé le président du comité.

(Sur la motion du sénateur Gigantès, le débat est ajourné.)

[Français]

L'Iraq

La politique du Canada relative à la crise actuelle-Interpellation-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Grafstein, attirant l'attention du Sénat sur la politique du Canada relative à la crise en Iraq.-(L'honorable sénateur Kinsella).

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, j'aimerais prendre la parole dans ce débat sur l'interpellation du sénateur Grafstein attirant l'attention du Sénat sur la politique du Canada relativement à la crise en Iraq.

Honorables sénateurs, le compte à rebours est arrêté. L'heure du bombardement de l'Iraq est reportée pour quelques jours, quelques semaines, quelques mois ou même quelques années. Qui sait? Le secrétaire général des Nations Unies fait part aujourd'hui de l'entente conclue en fin de semaine au Conseil de sécurité. Nous devons le remercier de ses efforts.

Dans son discours de la semaine dernière, le sénateur Grafstein a soulevé des questions importantes et pertinentes. Il est vrai, comme il le mentionnait, que la politique du gouvernement du Canada, et je cite:

 

[...] semble plus opaque que transparente.
D'ailleurs, le discours du ministre des Affaires étrangères, lors d'un débat spécial tenu à la Chambre des communes, m'a semblé beaucoup plus une attaque contre d'autres parlementaires qu'une déclaration donnant à tous les Canadiens les raisons qui justifient la position canadienne. Et cela, c'est malheureux.

Dans de telles circonstances, comment ne pas mettre en doute la position du Canada? Le premier ministre Chrétien a-t-il fait tous les efforts nécessaires au niveau diplomatique ou a-t-il répondu oui, immédiatement, à l'appel de son ami, le président des États-Unis?

Pourquoi le premier ministre Chrétien n'a-t-il pas suivi l'exemple du président français et appuyé activement les efforts du secrétaire général Kofi Annan? Pourquoi ne pas avoir fait preuve de plus de leadership au lieu d'être à la remorque des États-Unis?

Honorables sénateurs, comme vous le savez, l'état des Forces armées canadiennes et sa préparation face à la crise iraquienne ont suscité beaucoup de questions de la part de mes collègues de ce côté du Sénat.

La semaine dernière, nous avons soulevé la question suivante: comment un vaccin qui prend six semaines à agir, selon le fabricant, peut-il être efficace alors qu'il a été donné il y a deux semaines à peine? Ce vaccin provient des États-Unis. Savons-nous s'il est efficace? Les réponses du gouvernement contredisent les données du fabricant du vaccin. Pourquoi nier l'évidence? Pourquoi cacher ces faits?

Je sais que la situation iraquienne n'est pas simple, pas du tout. Il y a toujours deux côtés à une médaille. Je ne vous cacherai pas que j'ignore la solution miracle à ce problème, mais voilà, a-t-on évalué toute la situation? Une guerre avec l'Iraq, certes, mais quelles seront les répercussions au Moyen-Orient? Quelle sera l'impact sur le processus de paix israélo-arabe? Nous savons que les extrémistes islamistes ont repris du poil de la bête. Ils jouent sur plusieurs fronts à la fois: les souffrances du peuple iraquien, les frustrations des Palestiniens et l'omniprésence américaine dans le Golfe. Un faux pas et tout cela pourra dégénérer dans une situation incontrôlable.

(1730)

Selon le ministre des Affaires étrangères, qui a maintenant pris l'habitude de dire la même chose que les Américains, les États-Unis peuvent attaquer l'Iraq parce que Bagdad n'a pas respecté les conditions de la résolution 687 de cessez-le-feu. Mais plusieurs experts contestent ce point de vue.

C'est le cas, par exemple, du professeur Weller de l'Université de Cambridge. Selon lui, une attaque contre l'Iraq ne se justifie que dans le contexte d'autodéfense. Compte tenu que l'Iraq n'a pas initié une attaque armée ou menacé directement d'attaquer, cela met en doute une attaque basée sur le principe d'autodéfense sans avoir obtenu un mandat du Conseil de sécurité des Nations Unies.

De plus, la résolution vieille de sept ans ne peut pas être utilisée pour autoriser une action militaire puisque l'Iraq a respecté plusieurs parties de cette résolution. Le professeur rappelle que des États, contrairement au Conseil, ne peuvent pas déclarer simplement qu'ils ont le droit d'utiliser la force en réponse à des violations. Je vous le demande: n'y aurait-il pas lieu de procéder à un autre vote au Conseil de sécurité avant le bombardement de l'Iraq?

Honorables sénateurs, cette impression de précipitation en faveur d'une action militaire me laisse songeur. Les États qui déclarent la guerre à un autre pays ne prennent pas la chose à la légère. Les stratèges militaires se fixent des objectifs, préparent des scénarios et évaluent les risques.

Je vous le demande: est-ce que dans cette Chambre quelqu'un connaît la réponse du point de vue canadien à ces questions et, un coup parti, est-ce que quelqu'un connaît les réponses du point de vue américain?

L'auteur Tom Clancy soulevait d'excellentes questions dans un article publié dans le New York Times et repris par Le Monde. Il y disait qu'il était désolant de voir le peu d'intérêt accordé aux méthodes et aux conséquences probables d'une attaque contre l'Iraq. Une bombe d'une tonne sèmera la mort dans un rayon de plusieurs centaines de mètres et ses éclats ne feront pas de différence entre les hommes et les femmes, les jeunes et les vieux. Il sera donc essentiel, on le comprendra, de savoir quelle cible on vise et si cette cible est suffisamment importante pour que soit pris le risque de tuer ou de blesser toutes les personnes que le hasard aura mises à sa portée.

Quelle est donc la mission que l'on se fixe? Si elle est de supprimer les armes de destruction massive et les installations qui permettent de les fabriquer, alors il faut savoir où tout cela se trouve. Or, le savons-nous? Une guerre strictement aérienne, aussi chirurgicale que l'on voudra, n'a aucune chance de détruire des stocks disséminés dans des lieux secrets.

Qui a localisé la cible à frapper? Qui a préparé le monde et nous-mêmes aux désagréables contrecoups d'une offensive, même réussie? Quelle est la probabilité d'échecs et quelles en seraient les conséquences? Quand devrons-nous déclarer victoire?

A-t-on seulement répondu à ces questions, suffisamment pour que soient sauvegardées des vies humaines? Bombarder l'Iraq ne mettra pas fin à ces problèmes d'armement, d'autant plus que des informations laissent sous-entendre qu'une partie de l'arsenal chimique serait déjà en pays étranger, soit au Soudan et en Libye, par exemple.

Saddam Hussein semble déterminé à placer ses propres concitoyens sur les éventuelles cibles de bombardement, ce qui rend inévitable la mort d'innocents, même en cas d'attaque légitime. Qui a donné son accord pour que soient tués des femmes et des enfants?

Un autre point sur lequel je désire attirer votre attention, honorables sénateurs, c'est la condition du peuple iraquien. Les Nations Unies ont imposé des sanctions économiques à l'Iraq au mois d'août 1991. En avril 1995, la résolution 986 des Nations Unies permettait la vente de pétrole contre nourriture mais avec restriction. Cette résolution est appliquée en mai 1997. Selon la presse, Kofi Annan demandera au Nations Unies de permettre une augmentation de la vente de pétrole iraquien.

Ce n'est pas une surprise. Plusieurs rapports d'organismes liés aux Nations Unies ont fait un portrait de la situation. Même le secrétaire général a remis un rapport au Conseil de sécurité sur la situation le 1er février dernier. Voici ce qu'on connaît de la situation du point de vue humanitaire. Le constat est limpide. Les sanctions économiques fonctionnent très bien. La situation est alarmante chez les enfants. Le taux de mortalité infantile a augmenté, passant à un taux de 25 par mille naissances avant la guerre à un taux de 92 par mille naissances en 1994.

Le 26 novembre 1997, l'UNICEF a dénombré près d'un million d'enfants qui souffrent de malnutrition en Iraq. Le secrétaire général demande de créer 1 500 centres communautaires pour les soins aux enfants. Il demande aussi qu'une alimentation d'appoint soit fournie à une population cible minimum de près de deux millions de personnes comprenant les enfants de moins de cinq ans souffrant de malnutrition chronique, les femmes enceintes, les mères qui allaitent, les personnes déplacées à l'intérieur du pays, les rapatriés et les malades hospitalisés.

Je ne m'étendrai pas sur le sujet, mais la dégradation du système de traitement et d'adduction de l'eau potable fait que la situation est terrifiante.

De plus, il faudrait environ 870 millions de dollars américains pour s'attaquer aux besoins immédiats concernant la remise en état et l'entretien de l'infrastructure de production, de transport et de distribution de l'électricité. Le montant total de l'ensemble des projets à mettre en oeuvre pour régler les problèmes de fonctionnement de ce secteur dépassent sept milliards de dollars américains.

Il est vrai que les souffrances, honorables sénateurs, des Iraquiens ne proviennent pas seulement des sanctions économiques mais également des politiques de Saddam Hussein. Encore une fois, des victimes sont prises en otage.

(1740)

Honorables sénateurs, je suis particulièrement troublé par la possibilité que ces bombardements sur des sites contenant des produits chimiques et bactériologiques contreviennent à la Convention de Genève. Si nous savons où sont entreposées ces armes et que nous bombardons ces lieux et que les éléments chimiques et bactériologiques se propagent dans l'atmosphère et que nous tuons des individus, ne sommes-nous pas coupables d'avoir enfreint la Convention de Genève? Certains, tout spécialement les généraux et les colonels, feront passer les victimes dans la colonne des «dommages collatéraux». Je ne suis pas de ceux-là. Cette question est sérieuse et mérite que le gouvernement y réfléchisse sérieusement.

Ne croyez pas que je donne raison à Saddam Hussein, pas du tout. Il a tort sur plusieurs points. Ce n'est pas brillant de tester des produits chimiques sur sa propre population. Ce n'est pas plus brillant de les laisser crever. Tout comme ce n'est pas contraire à la dignité nationale, ce n'est pas humiliant de se soumettre à des inspections de la part des Nations Unies. Tous les pays dans le monde qui souscrivent à des accords de désarmement s'engagent à accepter des inspections et des contrôles. Les Américains ont admis que les missions de contrôle des Nations Unies avaient éliminé infiniment plus de potentiel militaire iraquien que la guerre de 1991 elle-même.

Je doute, honorables sénateurs, que le gouvernement du Canada réponde à mes interrogations, tout comme je doute qu'il répondra aux bonnes questions de notre collègue le sénateur Grafstein. Je terminerai en vous lisant un extrait de l'éditorial du journal français Libération publié lundi dernier. Je cite:

Si la guerre paraît de trop, c'est aussi parce que ses buts sont aussi flous que les moyens mis en oeuvre pour les atteindre sont inadaptés. Dans le doute, il est logique de s'abstenir. Ce qui n'est pas une raison suffisante pour oublier que la non prolifération des armes de destruction massive, ces bombes atomiques du pauvre, notamment en version bactériologique, restera un enjeu décisif des années à venir. La fin de la guerre froide a ouvert pour l'humanité la possibilité d'un avenir qui en soit plus placé sous l'éventualité d'une apocalypse finale. On ne peut laisser cet acquis aux mains de quelques mégalomanes tarés. Les querelles assez ridicules sur l'inspection des «sites présidentiels» recèlent un enjeu de la plus haute importance: comment traduire concrètement le consensus international contre la terreur?

En tranchant de manière trop unilatérale, les États-Unis s'ouvrent au soupçon d'être à la fois juge et partie. Pourtant, si l'engrenage guerrier s'enraye cette fois-ci, la leçon en sera au moins double. La force militaire et la dissuasion qui en découle sont susceptibles d'obtenir des résultats sur un sujet aussi crucial que l'interdiction des vecteurs d'anéantissement massif. Mais si les États-Unis sont les seuls à avoir le pouvoir, la manière discrétionnaire dont ils peuvent l'exercer place le reste de la planète en porte-à-faux. Un beau sujet de réflexion pour un temps de paix prolongée.

(Sur la motion du sénateur Gigantès, le débat est ajourné)

[Traduction]

La Loi de l'impôt sur le revenu

l'augmentation de la proportion de biens étrangers des régimes de revenu différé-Motion d'amendement-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Meighen, appuyé par l'honorable sénateur Kirby:

Que le Sénat presse le gouvernement de proposer, dans le budget de février 1998, une modification à la Loi de l'impôt sur le revenu, tendant à porter à 30 p. 100, par augmentations de 2 p. 100 par année sur cinq ans, le plafond de la proportion de biens étrangers des régimes de revenu différé (régimes de pension, régimes enregistrés d'épargne retraite, régimes de pension agréés) comme cela a été fait entre 1990 et 1995, alors que le plafond de biens étrangers des régimes de revenu différé a été porté de 10 p. 100 à 20 p. 100:

 

a) parce que les Canadiens devraient avoir la possibilité de tirer avantage de meilleurs rendements sur leurs investissements dans d'autres marchés, ce qui aurait pour effet d'augmenter la valeur des avoirs financiers qu'ils détiennent en prévision de la retraite, de réduire le montant de supplément du revenu de sources gouvernementales dont les Canadiens pourraient avoir besoin et d'augmenter les recettes fiscales que le gouvernement tire des revenus de retraite;
b) parce que les Canadiens devraient avoir plus de flexibilité au moment d'investir les épargnes qu'ils accumulent en prévision de leur retraite tout en réduisant les risques que comportent ces placements grâce à la diversification;
c) parce qu'une amélioration de l'accès aux marchés boursiers mondiaux permettrait aux Canadiens de participer tant aux économies qu'aux secteurs industriels à plus forte croissance;
d) parce que le plafond actuel de 20 p. 100 est devenu artificiel depuis que les particuliers et les régimes de pension disposant de grandes ressources peuvent le contourner en ayant recours, par exemple, à des décisions stratégiques en matière d'investissement et à des produits dérivés;
e) parce que les problèmes de liquidité des gestionnaires de fonds de pension, qui constatent maintenant qu'ils doivent acquérir une participation significative dans une seule société pour satisfaire à l'obligation de détenir 80 p. 100 de biens canadiens, se trouveraient atténués.-(L'honorable sénateur Kirby)
L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, je suis heureux d'appuyer la motion présentée par les honorables sénateurs Meighen et Kirby, qui invitent le Sénat à presser le gouvernement de proposer une modification à la Loi de l'impôt sur le revenu, tendant à porter à 30 p. 100, par augmentations de 2 p. 100 par année sur cinq ans, le plafond de la proportion de biens étrangers des régimes de revenu différé, c'est-à-dire les régimes de pension, régimes enregistrés d'épargne-retraite et régimes de pension agréés.

(1740)

Je suis heureux que le sénateur Gigantès soit ici aujourd'hui. Je tenterai de répondre à certaines des questions qu'il a posées au sénateur Meighen durant son exposé.

J'appuie cette motion parce que je suis convaincu qu'il est important d'appuyer des mesures visant à stimuler le débat de questions d'intérêt public, afin d'améliorer les perspectives économiques pour tous les Canadiens.

Au cours des cinq dernières années, la plupart des Canadiens ayant des épargnes de plus de 10 000 $ les ont investies dans des REER ou des régimes de pension agréés. Toute mesure visant à accroître la valeur nette de ces régimes pour les Canadiens est, selon moi du moins, conforme à l'intérêt public.

Le 17 décembre dernier, le sénateur Meighen a fait une excellente analyse professionnelle de la nécessité d'assouplir la règle limitant la propriété étrangère, de manière à donner aux Canadiens moyens toutes les possibilités d'accroître la valeur de leurs épargnes de retraite. La motion et les explications fournies par le sénateur m'ont convaincu et j'encourage tous les honorables sénateurs à lire le hansard du 17 décembre dernier.

Il semble y avoir un consensus national parmi les investisseurs et autres praticiens de l'investissement sur l'opportunité de porter la limite d'investissement à 30 p. 100. Lorsqu'il a comparu devant le comité des banques en 1996, pour parler de son étude de la Régie des sociétés, le président de la Caisse de retraite des employés municipaux de l'Ontario, M. Dale Richmond, a appuyé une hausse de la limite de participation étrangère pour les raisons suivantes:

 

[...] nous devons investir 80 p. 100 de nos avoirs sur le marché canadien et nous pouvons investir seulement 20 p. 100 à l'extérieur du Canada. Le marché canadien ne représente que 3 p. 100 du marché mondial des capitaux et nous avons l'obligation fiduciaire de présenter des rapports financiers. Or, nous n'avons accès qu'à une faible partie du capital d'investissement mondial. La règle limitant la participation étrangère détourne nos investissements des objectifs qui nous sont fixés par le droit fiduciaire et les règles législatives qui régissent nos activités, et cela pour des raisons tout à fait étrangères à des motifs de prudence ou de sécurité de la gestion des régimes de pension.
Je partage son opinion. Certains de mes collègues, cependant, ont soutenu au Sénat des arguments contraires que je tâcherai de réfuter aujourd'hui. Cependant, avant d'aborder les points particuliers soulevés par mes collègues, je voudrais parler de façon générale de la nécessité de porter de 20 à 30 p. 100 le plafond de l'investissement dans les placements étrangers.

Comme tous les honorables sénateurs le savent, la firme Ernst & Young a publié en octobre dernier une étude sur l'effet que la hausse du plafond de l'investissement dans ces placements pourrait avoir sur les bénéfices des investisseurs. L'étude concluait solidement que si on avait haussé à 30 p. 100 la limite imposée aux investissements dans les placements étrangers, les Canadiens ordinaires auraient réalisé des bénéfices plus élevés, dont 1,6 p. 100 de plus sur leur épargne-retraite. Il s'agit-là d'une constatation importante pour les 5,2 millions de Canadiens qui cotisent à des REER.

Certains honorables sénateurs ne sont peut-être pas troublés outre mesure par la perspective d'une augmentation des taux de rendement de l'ordre de 1 ou 2 p. 100. Or, une augmentation de l'ordre de 1 p. 100 des taux de rendement peut, au moment de la retraite, représenter une augmentation de l'ordre de 20 p. 100 des avoirs financiers. En d'autres mots, si le plafond de la proportion de biens étrangers avait été porté au niveau que prévoit cette motion, le portefeuille moyen du retraité serait 20 p. 100 supérieur aujourd'hui.

Toutefois, je m'empresse d'ajouter - et je voudrais bien me faire comprendre - que ça ne prouve pas que le passé soit parfaitement garant de l'avenir. Si nous estimons que les Canadiens peuvent de façon réaliste espérer des taux réels de rendement de l'ordre de 4 à 6 p. 100 seulement, il est encore beaucoup plus important de faire en sorte qu'ils ne soient pas brimés par une politique publique peu judidicieuse.

On demande aux Canadiens de participer davantage à la planification de leur retraite. Les raisons en sont par trop évidentes: l'évolution démographique, les perspectives économiques, la taille de la dette nationale, voilà autant de facteurs qui incitent à réduire les dépenses gouvernementales et autres engagements financiers.

Exiger des citoyens qu'ils fassent davantage preuve d'initiative personnelle en matière d'épargne-retraite, tout en restreignant les taux de rendement, c'est contraire au bon sens et à une bonne politique publique. Voilà pourquoi je souscris à la motion dont nous sommes saisis car, entre autres, elle offre aux Canadiens un peu plus de flexibilité à l'égard des investissements au titre de l'épargne-retraite, tout en réduisant, grâce à une plus grande diversification, les risques que présentent ces mêmes investissements.

Chose sûre, honorables sénateurs, le fait que la plupart des Canadiens savent si peu que faire de leur épargne-retraite devrait constituer un motif d'inquiétude pour tous les législateurs.

(1750)

La méconnaissance, notamment de la restriction imposée sur les biens étrangers dont on discute actuellement, peut se résumer en quatre points: une méconnaissance des possibilités de placement, une méconnaissance des avantages à long terme de la diversification internationale, une perception que les placements à l'étranger sont trop risqués, et une méconnaissance des possibilités qu'offre le marché mondial.

Honorables sénateurs, je m'attarderai maintenant sur les observations qu'ont faites des sénateurs en réaction au discours du sénateur Meighen.

Pour passer à l'argument qu'a fait valoir le sénateur Gigantès, à savoir que toute modification envisagée dans le cas qui nous occupe n'aidera que les plus riches du pays, je tiens à souligner que cet argument semble foncièrement erroné. Il m'est apparu très clairement, au cours de la dernière semaine, lorsque le comité des banques et du commerce a entrepris, à la demande du ministre des Finances, son étude de l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada, que la règle sur les biens étrangers limitera indûment le rendement du fonds d'investissement. En raison des limites imposées aux prestations et aux cotisations du RPC, les restrictions toucheront de façon démesurée les Canadiens à faible ou à moyen revenu.

Les témoignages qu'a entendus le comité des banques et du commerce sont peut-être le mieux résumés dans celui qu'a présenté un témoin à Vancouver, il y a cinq jours:

 

Si l'absence d'ingérence politique suppose la liberté d'investir sans restrictions dans un contenu étranger [...] En devant renoncer aux possibilités de diversification qu'offrent les avoirs étrangers, les investisseurs sont obligés d'accepter soit un rendement moins élevé avec le même risque de rendement, soit un risque plus élevé avec le même risque de rendement. Il n'est pas logique d'imposer de tels coûts à un énorme fonds d'investissement détenu par l'ensemble de la population canadienne [...] de pareilles restrictions ne contribuent en rien à diminuer les coûts intérieurs des capitaux ou à réduire l'endettement net du pays à l'étranger.
Plusieurs témoins de Toronto, de Calgary et de Vancouver ont recommandé fortement de ne pas limiter la capacité du fonds d'investir dans des biens étrangers.

Les témoignages sur les travaux du comité des banques n'ont pas été limités aux seuls témoins. Les médias ont aussi souvent commenté la nécessité de relever le seuil des avoirs étrangers. Vendredi dernier encore, le journal The Globe and Mail commentait les travaux du comité dans son éditorial:

 

Les plans visant à neutraliser ce pouvoir sur le marché en rendant passifs investissements sur le marché intérieur sont mal inspirés et impossibles à appliquer. D'après les experts, les investissements passifs sont une impossibilité pour un fonds de cette importance sur le marché canadien. Ces problèmes disparaîtraient si la règle absurde des 80 p. 100 était abolie.
Indéniablement, honorables sénateurs, le fonds du RPC doit assurer la retraite du Canadien moyen. Permettez-moi cependant de traiter encore plus directement des conséquences de la règle sur la propriété étrangère pour le Canadien moyen.

La principale conclusion d'une étude récente du Conference Board du Canada intitulée Maximizing Choice - Economic Impacts of Increasing the Foreign Property Rule est que les fonds assujettis à la règle sur la propriété étrangère ne représentent que 24 p. 100 des investissements totaux, ce qui peut se traduire par des conséquences disproportionnées pour les Canadiens à revenu moyen dont les principaux modes d'épargne sont le REER et les caisses de retraite.

Il convient de souligner trois choses.

Premièrement, il me semble qu'au fur et à mesure que le revenu d'un particulier augmente, ses investissements en dehors d'un régime d'épargne enregistré augmentent et ne sont donc pas soumis à la restriction qui touche les biens étrangers; deuxièmement, la moitié des 5,2 millions de Canadiens qui contribuent à un REER gagnent moins de 40 000 $ par an; et, troisièmement, pour la plupart, les Canadiens s'en remettent à des professionnels pour placer et gérer leur épargne-retraite et ces derniers sont tous en faveur d'une augmentation du plafond de biens étrangers tel que proposé dans la motion dont nous sommes saisis.

Honorables sénateurs, plus de 8 millions de Canadiens participent à un régime de pension offert par leur employeur ou investissent dans un REER en prévision de leur retraite. Pour tous ces Canadiens, le taux de rendement de leurs investissements est limité directement ou indirectement par la règle concernant les investissements à l'étranger. Par conséquent, cette règle impose un coût pécuniaire véritable aux Canadiens - coût qui n'est ressenti que lorsque le particulier prend sa retraite et qu'il n'est probablement plus en mesure de combler le manque à gagner.

Le sénateur Gigantès a demandé que l'on explique en termes simples la règle énoncée par le sénateur Meighen. Je vais essayer. En investissant dans des biens étrangers, les Canadiens peuvent participer à des industries qui n'existent pas au Canada, comme certains secteurs de la technologie ou de la santé. Les Canadiens peuvent aussi faire des investissements cycliques ou sur des marchés qui sont à des stades différents d'évolution, maximisant ainsi le potentiel de croissance. Tout cela montre qu'il est possible d'avoir de meilleurs rendements en diversifiant davantage et donc avec moins de risques.

En bref, sénateur Gigantès, cette motion est relative à de vraies personnes - les Canadiens moyens qui cherchent à se faire leur propre pension et qui ne savent peut-être pas qu'une mauvaise politique publique conduit à des rendements inférieurs et donc à des sommes accumulées moindre au moment de la retraite.

Je voudrais maintenant parler de ce que disait le sénateur Taylor et dans une moindre mesure le sénateur Gustafson. Le sénateur Taylor disait que l'argent des régimes enregistrés devait rester au Canada, qu'il devait être dépensé au Canada et mis à la disposition des capitalistes canadiens. C'est ce que l'on pourrait appeler une position de nationaliste économique. J'espère que le sénateur Taylor ne dira pas que je suis un requin financier parce que je pense que les marchés des capitaux devraient être - et sont par nature - internationaux. En guise d'avant-propos, je dirai que si le Canada veut connaître la prospérité au cours du XXIe siècle, il doit apprendre à fonctionner dans la nouvelle économie mondiale. Pour cette raison, un consensus s'est établi entre les spécialistes des marchés de capitaux, consensus selon lequel la règle sur les biens étrangers est préjudiciable et ne fait que fausser les placements.

Permettez-moi de répondre aux nationalistes économiques dans une perspective d'intérêt public, puisque la règle sur les biens étrangers soulève deux questions d'intérêt public. Premièrement, c'est au gouvernement et à ceux qui appuient pareille restriction qu'il incombe de prouver que les dispositions visant à limiter le potentiel de gain des Canadiens désireux d'économiser en vue de leur retraite peuvent être justifiées par les avantages que la règle sur les biens étrangers procurent à l'ensemble du Canada. Jusqu'à maintenant, nous n'avons vu aucune preuve à cet égard. Deuxièmement, si de tels avantages existent, il faudrait prouver qu'il est équitable que ces restrictions ne s'appliquent qu'aux Canadiens qui se prévalent d'instruments d'épargne en vue de la retraite et non pas à tous les investisseurs canadiens.

D'une façon plus générale, le Conference Board du Canada a constaté qu'une hausse de la limite de la règle sur les biens étrangers n'augmentera pas la dette étrangère nette du Canada, qu'elle se traduit actuellement par un coût réel pour les Canadiens et qu'elle crée une inefficacité sur les marchés financiers en restreignant la libre circulation des capitaux.

Honorables sénateurs, il n'y a pas de preuve que le fait d'intervenir dans le fonctionnement normal des forces du marché crée une plus grande activité économique ou plus d'emplois permanents à grande valeur ajoutée. Il me semble, d'après l'expérience du Canada, que ce serait plutôt le contraire. Les expériences canadiennes qui visaient à accroître les dépenses de R-D et le capital de risque des petites et moyennes entreprises, principe que défend le sénateur Taylor, n'ont pas été efficaces et ont plutôt, dans une large mesure, été avantageuses pour les intermédiaires et non les cibles visées par ces initiatives.

Comme l'a indiqué le Conference Board du Canada, la justification première de la règle limitant la propriété étrangère remonte à une époque où le gouvernement s'occupait plus activement de fournir les ressources à des secteurs choisis de l'économie canadienne et où la capacité des gouvernements et des sociétés du Canada de s'assurer un accès suffisant à des capitaux était source d'inquiétude. Toutefois, depuis lors, la mondialisation a donné aux institutions canadiennes un accès illimité aux marchés des capitaux mondiaux. C'est pour cette raison que les gouvernements ont des programmes qui les amènent à conclure des accords d'échanges bilatéraux, régionaux et multilatéraux plutôt que des programmes favorisant des marchés intérieurs et fermés.

Comme les sénateurs le savent, l'Accord de libre-échange nord-américain est le premier accord commercial au monde qui comporte un chapitre entier sur le droit de la concurrence. Selon moi, la prochaine série de négociations entraînera un étoffement de ce chapitre. Comme l'ALENA est fondé sur la libre circulation des capitaux dans les économies nord-américaines et comme ce principe est perçu comme un objectif souhaitable, l'abolition de la règle sur la propriété étrangère doit logiquement constituer la prochaine étape.

Son Honneur le Président: Je regrette d'interrompre le sénateur Oliver, mais, comme il est 18 heures, les sénateurs sont-ils d'accord pour que je ne voie pas l'horloge?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Sénateur Oliver, je regrette par ailleurs de vous informer que votre temps d'intervention de 15 minutes est écoulé.

Les sénateurs autorisent-ils le sénateur à continuer?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Oliver: Honorables sénateurs, avant de terminer, je voudrais répondre aux inquiétudes exprimées par le sénateur Taylor, qui prétend que l'augmentation de la propriété étrangère est le résultat de pressions exercées par les conseillers en investissement.

Honorables sénateurs, ceux qui sont les plus préoccupés par les restrictions sont les professionnels qui gèrent le gros des économies de retraite au Canada, c'est-à-dire les caisses de retraite et les fonds communs de placement. Ils ont pour responsabilité d'assurer la richesse économique future des Canadiens et beaucoup croient qu'ils ne peuvent pas bien s'acquitter de cette fonction de fiduciaire parce qu'ils sont de plus en plus limités par la règle de propriété étrangère, particulièrement dans un contexte de saturation croissante du marché canadien des capitaux.

En conclusion, honorables sénateurs, je dirai que les craintes exprimées par le sénateur Taylor au sujet des investissements dans des actions risquées ne constituent pas un argument en faveur du maintien de la règle sur la propriété étrangère, mais plutôt un argument en faveur de l'adoucissement de ces restrictions, voire de leur élimination, pour permettre une plus grande diversification des investissements partout dans le monde.

J'exhorte tous les sénateurs à appuyer la motion.

(Sur la motion du sénateur Gigantès, le débat est ajourné.)

Affaires juridiques et constitutionnelles

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

L'honorable Lorna Milne, conformément à l'avis du 19 février, 1998, propose:

Que le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit autorisé à siéger à 15 h 15, le mercredi 25 février 1998, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

L'honorable John B. Stewart: Honorables sénateurs, j'aimerais que le sénateur Milne explique pourquoi elle estime souhaitable que le Sénat adopte sa motion. Nous avons discuté de cette question à maintes reprises déjà. Nous savons tous qu'il est entendu que, lorsque nous nous réunissons à 13 h 30 le mercredi, c'est pour que le Sénat puisse s'ajourner vers 15 heures afin de laisser aux comités la possibilité de planifier leurs travaux pour le reste de l'après-midi, plus particulièrement pour qu'ils puissent commencer leurs réunions à 15 h 15.

Je crois comprendre pourquoi madame le sénateur Milne propose cette motion. Elle ne croit pas qu'on respectera cette entente et elle a pour cela de bonnes raisons. C'est arrivé encore et encore. Je me demande si, en proposant cette motion, elle ne crée pas ce que l'on appelle dans les milieux d'affaires un risque moral. En adoptant la motion, nous souscrivons en un sens à l'avis connu de certains sénateurs que, même si nous nous sommes réunis à 13 h 30, nous devrions siéger jusque bien après 15 heures.

Madame le sénateur Milne verra peut-être à dissiper les craintes que sa motion a suscitées.

Le sénateur Milne: Honorables sénateurs, je ne peux pas les dissiper; je peux seulement les reconnaître. En fait, c'est justement pour cette raison que je propose cette motion.

Compte tenu de la collaboration de l'autre côté que le sénateur Kinsella nous a offerte plus tôt, cet après-midi, et faute jusqu'à maintenant d'une méthode non discutable permettant au Sénat de prévoir ajourner ses travaux tous les mercredis à 15 heures ou à 15 h 15, je propose aujourd'hui cette motion. Le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles entendra demain des témoins de l'Association du Barreau canadien dont au moins un, me dit-on, ne peut pas se libérer d'engagements futurs. Compte tenu de ce qui s'est passé récemment au Sénat, je demande que cette motion soit adoptée.

L'honorable Colin Kenny: Honorables sénateurs, j'appuierais normalement une motion de ce genre, mais je crains que nous ne rendions les délibérations du Sénat beaucoup moins excitantes si nous adoptons une motion prévoyant leur donner un certain caractère inévitable. Madame le sénateur Milne a-t-elle quelque chose à dire là-dessus?

Le sénateur Milne: Non, si ce n'est que cet endroit est déjà assez excitant à mon goût.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 25 février 1998, à 13 h 30.)


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