Débats du Sénat (Hansard)
Débats du Sénat (hansard)
1re Session, 36e Législature,
Volume 137, Numéro 33
Le mardi 16 décembre 1997
L'honorable Gildas L. Molgat, Président
- DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
- AFFAIRES COURANTES
- PÉRIODE
DES QUESTIONS
- La
défense nationale
- Programme de remplacement des hélicoptères de recherche et de sauvetage-À quand l'adjudication du contrat-La position du gouvernement
- Le programme de remplacement des hélicoptères de recherche et de sauvetage-L'abandon possible du projet-La position du gouvernement
- Le Manitoba-L'écrasement d'un avion de Sowind Air à Little Grand Rapids-La non-disponibilité d'équipement de recherche et de sauvetage posté stratégiquement-La position du gouvernement
- L'environnement
- La santé
- Le Conseil du Trésor
- L'énergie
- La santé
- Le commerce international
- Réponse différée à des questions orales
- L'agriculture
- Les travaux du Sénat
- La
défense nationale
- ORDRE
DU JOUR
- La Loi sur la marine marchande du Canada
- La Loi électorale du Canada
- Le
Code criminel
La Loi d'interprétation - Projet de loi sur l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada
- La Loi canadienne sur les coopératives
- Enseignement postsecondaire
- Terre-Neuve
- Régie interne, budgets et administration
- Les travaux du Sénat
- L'état actuel et les perspectives d'avenir de l'agriculture
- L'état actuel et les perspectives d'avenir des forêts
- La fondation Famous Five
- Le Sénat
- Les travaux du Sénat
- Enseignement postsecondaire
LE SÉNAT
Le mardi 16 décembre 1997
La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.Prière.
[Traduction]
L'honorable William J. Petten
L'honorable M. Lorne Bonnell
Hommages à l'occasion de leur départ à la retraite
L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, tout au long de son éminente carrière, le sénateur Bill Petten s'est fait connaître de tous comme «le whip», puisqu'il a rempli deux mandats comme whip du gouvernement et deux autres comme whip de l'opposition.Les honorables sénateurs savent peut-être que cette expression, qui nous vient de la pratique parlementaire britannique, est dérivée du mot «whippers-in» (piqueur) dont le rôle consistait à garder les chiens à l'intérieur de la meute durant la chasse au renard.
Vous savez sans doute aussi que le mot «whip» peut désigner une convocation envoyée aux parlementaires, le nombre de soulignements sous le titre correspondant à l'urgence de l'affaire à l'étude. Dans An Encyclopaedia of Parliament, on donne l'explication suivante: une convocation avec un soulignement signifiait que la présence du parlementaire était souhaitable; une convocation avec un double soulignement signifiait que sa présence était demandée; le triple soulignement signifiait que sa présence était exigée et un quadruple soulignement signifiait que le parlementaire qui s'absenterait le ferait à ses risques et périls. Les whips d'aujourd'hui seraient peut-être tentés d'avoir recours à cette pratique.
J'ai envie de faire un mauvais jeu de mot et de dire que le sénateur Petten n'était pas connu pour exercer son leadership sur la meute le fouet à la main. Je ne me souviens pas non plus qu'il ait envoyé aux parlementaires une note de convocation les informant que s'ils s'absentaient, ce serait à leurs risques et périls. Il faisait plutôt usage de plaisanteries et de douce persuasion, s'en remettant au bon sens, à son remarquable entregent et à une très grande patience, qualités qui lui ont permis de contribuer grandement à l'efficacité des travaux du Sénat et d'assurer l'ordre et la discipline dans les rangs du parti, notamment à l'occasion des votes.
Je me souviens d'une anecdote au sujet du général Dwight D. Eisenhower, qui aimait démontrer l'art de diriger à l'aide d'une simple ficelle. Il la plaçait sur la table en disant: «Si vous tirez la ficelle, elle vous suivra n'importe où, si vous la poussez, elle n'ira nulle part. Mener des hommes est exactement la même chose.»
C'était le style du sénateur Petten. Il ne s'est jamais préoccupé de savoir à qui le mérite était attribué, l'important pour lui étant de mener la tâche à bien.
Terre-Neuvien jusqu'au plus profond de lui-même, il a bien retenu les dures leçons de l'histoire de sa province. Il en savait long sur la tolérance et le partage, sur la justice et la coopération. En fait, le sénateur Petten fait partie de ceux qui, en 1949, ont voté en faveur de l'union avec le Canada; il est Canadien par choix.
Bien sûr, la question de savoir, comme l'avait un jour si justement fait remarquer Joey Smallwood, s'il était historiquement et constitutionnellement exact de dire que Terre-Neuve avait absorbé, ou conquis, le Canada, ou si c'était le Canada qui avait absorbé Terre-Neuve n'a toujours pas été réglée. Ce n'est sans doute pas le moment d'essayer de le faire.
Quelle que soit la réponse, ces fiers Terre-Neuviens qui, comme le sénateur Petten, ont voté «oui» il y a presque 50 ans, ceux qui, à l'époque, se considéraient citoyens d'une nation petite, mais néanmoins importante, descendants de marins européens des plus aventureux qui, plusieurs siècles auparavant, s'étaient établis sur ce rivage - une nation ancrée dans sa propre histoire - oui, ceux-là même qui ont voté en faveur de l'union avec le Canada, ce pays en devenir qu'est toujours notre chère patrie, sont encore animés par l'esprit de renouveau caractéristique de notre grande nation. Cet esprit de renouveau a été la marque du sénateur Bill Petten, qui l'a mis au service de son pays en tant que néo-Canadien, titre qu'il s'est fièrement donné à maintes reprises, et au service de sa magnifique province.
(1410)
Que ce soit à titre de leader adjoint suppléant du gouvernement au Sénat ou de membre de nombreux comités, comme les comités de la régie interne, des moyens de communication de masse, des affaires juridiques et constitutionnelles, de l'agriculture, des transports ou du comité mixte spécial sur la Constitution du Canada ou encore du comité des pêches, auquel il a consacré de très longues heures au nom des pêcheurs et des collectivités de Terre-Neuve, il a toujours oeuvré au Sénat avec sensibilité et cordialité. Membre assidu de l'Association parlementaire canadienne pendant plus de 25 ans, il a dirigé des délégations canadiennes un peu partout dans le monde, faisant profiter la communauté internationale toute entière de son grand sentiment de compassion et de son dévouement.
Sénateur Bill, vous serez toujours pour nous «le whip», un whip qui, au fil des ans, a réussi avec énormément d'adresse à mater la meute. Nous vous invitons à venir nous rendre visite très souvent.
Honorables sénateurs, je souligne son titre de «whip», sachant très bien qu'il comprendra mon message mieux que quiconque: c'est un rendez-vous, sinon, ce sera à vos risques et périls!
Des voix: Bravo!
Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, tous ceux d'entre nous qui ont connu le sénateur Lorne Bonnell au fil des ans vous diront qu'il n'a jamais été du genre timide ou réservé, qu'il n'a jamais pu accepter le statu quo et qu'il n'a jamais concocté de petits projets. En fait, le sénateur Bonnell a toujours su éblouir ses observateurs par sa modestie.
Permettez-moi de nuancer ces propos en rappelant que Mark Twain a déjà dit qu'il était modeste, pas partout, mais en certains endroits. En homme modeste, mais pas partout, le sénateur Bonnell a toujours esquissé de grands projets, convaincu que les petits projets, comme il l'a déjà déclaré, n'avaient rien pour réveiller l'enthousiasme des hommes.
Il a toujours été combatif; il a consacré sa carrière à la vie politique, provinciale d'abord, à titre de ministre, et fédérale ensuite, à titre de sénateur. Il a rugi comme un lion pour sa province. Il a rugi comme un lion sur la scène nationale pour obtenir des politiques de transport équitables et, au fil des ans, a attiré l'attention sur l'isolement que causaient les systèmes de transport et de communications de l'Île-du-Prince-Édouard.
Pendant de nombreuses années, il a toujours cru fermement à la construction d'un pont-jetée, d'un lien fixe, à condition que le traversier de Wood Island demeure en fonction. À bien des égards, il était en avant de son temps. Il caressait un rêve, il avait une vision qui est devenue réalité.
Il nous a donné l'exemple quant à l'utilisation efficace du rôle du Sénat pour promouvoir certains droits régionaux, que ce soit pour obtenir de l'aide fédérale pour les inspecteurs de pommes de terre ou pour les producteurs. À l'époque, il avait présenté à l'un de mes prédécesseurs, fort surpris d'ailleurs, un sac de cinq livres de pommes de terre de l'Île-du-Prince-Édouard pour symboliser le sort déplorable des producteurs de l'île. Le sénateur Bonnell a toujours défendu les plus vulnérables; il s'est battu pour les chômeurs et pour que les bureaux fédéraux soient transférés vers sa province afin de fournir de l'emploi aux gens de l'île. Il a toujours placé les gens au premier plan.
Le sénateur Bonnell a toujours cru que, peu importe les insécurités et les dangers endémiques qui menaçaient l'économie du Canada atlantique, notre plus grande richesse naturelle était nos gens. Comme nous le savons tous, il est médecin et il a toujours été propulsé par son engagement à améliorer la situation des humains sur terre. Durant toute sa carrière, médicale comme politique, la santé de sa collectivité très spéciale d'insulaires et de la grande mosaïque canadienne a toujours été sa priorité.
Il a passionnément défendu l'assurance-maladie contre tous ceux qui l'attaquaient, parce qu'il comprenait que ce régime est l'âme véritable de notre nation. Il a consacré une grande partie de sa vie à se battre pour les membres les plus impuissants de notre société. Pendant des décennies, il a sans cesse dénoncé le fléau de la pauvreté chez les enfants et, avec la même ténacité, a demandé une intervention nationale en faveur des aînés.
Au cours de la dernière législature, le sénateur Bonnell a présidé le comité sénatorial spécial de l'enseignement postsecondaire, qui avait pour énorme tâche d'examiner ses objectifs et son importance en cette ère de l'économie basée sur le savoir. Même si ses travaux ont été interrompus par la dissolution du Parlement, le comité spécial a fait ressortir la nécessité de maintenir une forte présence fédérale dans l'enseignement supérieur. Le comité fera rapport au Parlement avant que le sénateur Bonnell nous quitte, plus tard cette semaine. Comme il l'a signalé récemment au Sénat, la coopération entre les intervenants dans l'enseignement postsecondaire n'a jamais été aussi essentielle.
Sénateur Bonnell, vous avez vraiment fait une différence. Vous avez fait une différence au Sénat. Vous avez fait une différence également dans votre très belle province. Vous avez aussi joué un rôle de premier plan dans la santé et le bien-être de la société canadienne.
Au fil des décennies, vous vous êtes révélé être un homme dégageant une très grande force et très attaché à son pays, à sa province, un homme avec beaucoup de coeur. Vous allez beaucoup nous manquer dans les jours à venir.
Des voix: Bravo!
L'honorable Orville H. Phillips: Honorables sénateurs, je veux moi aussi rendre hommage à mes collègues qui prennent leur retraite, deux insulaires, l'un venant de l'Île avec un «I» majuscule et l'autre, de l'«autre» île.
Je vais tout d'abord parler du sénateur Lorne Bonnell, qui vient de la même île que moi.
J'ai eu le privilège d'aller au collègue préuniversitaire avec ses frères. Toute la famille s'est distinguée d'une façon ou d'une autre. Cependant, toutes les familles ont aussi leur mouton noir et le sénateur Bonnell était celui-là. Il est entré en politique après avoir obtenu son diplôme de l'école de médecine.
Le sénateur Bonnell a fait carrière sur la scène politique provinciale. Il a été candidat à la direction du Parti libéral une fois. Je pense que les Partis libéral et conservateur ont au moins une chose en commun: ils commettent souvent des erreurs lors des congrès à la direction. Le sénateur Bonnell a perdu, mais nous avons eu la chance qu'il soit nommé au Sénat.
Je suis très fier du fait que lorsque j'ai présenté le projet de loi sur ce qu'on appelait alors le lien fixe, et qu'on appelle maintenant le pont de la Confédération, le sénateur Bonnell, qui siégeait dans l'opposition, m'a appuyé. Nous travaillons souvent ensemble à des projets communs. Nous mettons de côté nos allégeances politiques. Nous étions des insulaires travaillant pour le bien de l'Île.
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En plus de s'acquitter de ses nombreuses fonctions ici, il continue de pratiquer la médecine. À ce titre, il a écrit de nombreuses lettres au nom d'anciens combattants et de handicapés. Il y a un an environ, j'ai vu avec plaisir que ceux qu'il avait traités organisaient un souper pour l'honorer et le remercier de ses nombreuses contributions humanitaires.
Je dois dire que je ne pense pas qu'il ait toujours été un honnête lutteur dans cette Chambre. Je me souviens d'une fois où nous n'étions pas d'accord sur un projet de loi, je crois qu'il s'agissait de la Loi sur les médicaments brevetés. Je notais l'honnêteté du sénateur Bonnell, et je crois bien lui avoir donné une note aux alentours de 5 - pas plus que le strict nécessaire. Quand est venu le moment de répondre, je m'attendais à ce qu'il me donne une note inférieure, et ma réponse était toute prête. Au lieu de cela, il m'a donné une note supérieure. Alors que nous quittions cette enceinte, je lui ai demandé: «Pourquoi n'apprenez-vous pas à vous battre loyalement?». Il m'a répondu «J'ai arrêté de me battre, je peux dorénavant être juste envers vous.»
Je voudrais maintenant faire un instant référence au sénateur Petten. Quand j'étais whip du gouvernement - et quiconque a été whip sait combien c'est facile - le sénateur Petten avait l'habitude de venir me voir. Chaque fois qu'il me faisait des compliments sur le thé, je savais qu'il voulait quelque chose. Certains jours, il se contentait de dire que le thé était chaud, mais je savais qu'il voulait quelque chose. Il avait toujours ensuite une histoire à raconter. Il ne le sait pas, mais j'ai noté par écrit toutes ces histoires. Quand je serai à la retraite, je les publierai sous le titre Ce que Willy le whip a dit. Cela devrait avoir pas mal de succès. Il n'y a jamais eu d'animosité entre nous. Ensemble, nous avons réglé un bon nombre de problèmes. J'appréciais son avis et son aide.
Honorables sénateurs, ces deux sénateurs - de même que mon ami le sénateur Finlay MacDonald, qui prendra sa retraite le même jour que le sénateur Bonnell - travaillaient dur. Ils étudiaient les mesures législatives et ils siégeaient aux comités, souvent tard la nuit. Étrangement, il n'a jamais été question, que je sache, dans la presse canadienne, pas même dans le Ottawa Citizen, de leur travail assidu et de la contribution qu'ils ont faite.
Des voix: Bravo!
Le sénateur Phillips: Maintenant que tout le monde nous critique à cause de l'absentéisme d'un sénateur, il convient de rappeler que tous les sénateurs ne brillent pas par leur absence. La preuve, ces trois sénateurs.
Ils vont nous manquer à tous en tant que collègues sénateurs, mais encore plus en tant qu'amis. Comme je sais qu'ils sont d'origine irlandaise, je tiens à lire officiellement la bénédiction irlandaise, qui se lit comme ceci:
Que la route aille à votre rencontre,
Que le vent vous soit favorable,
Que le soleil illumine votre visage,
Que la pluie tombe doucement sur vos champs,
et, d'ici à ce que nous nous revoyions,
Que Dieu vous garde dans le creux de sa main.
L'honorable Raymond J. Perrault: Honorables sénateurs, nous perdons d'excellents sénateurs. Je le regrette beaucoup.
Lorsque j'étais leader du gouvernement au Sénat, Bill Petten m'a été d'un secours inestimable. Nous n'avons jamais perdu un vote et il ralliait les troupes avec sa bonne humeur contagieuse. Il a été un des whips les plus compétents que le Sénat ait jamais connus. Bill va nous manquer à tous terriblement. Il était un whip compétent et à l'humeur agréable, et il a joué un rôle essentiel au Parlement.
Lorne Bonnell est le champion des grandes causes humanitaires. Le gros de son travail, comme une bonne partie du travail qui est accompli au Sénat, n'est pas honoré ni loué. Comme cadeau de Noël aux médias, nous devrions donner à tous les journalistes une carte de la route à suivre pour venir au Sénat, car la plupart ne sont jamais venus ici, ces spécialistes qui prétendent avoir une opinion sur l'avenir de cet endroit. Lorne Bonnell fut un défenseur exceptionnel des grandes causes. Le rapport du comité sénatorial spécial de l'enseignement postsecondaire, qui est sur le point de sortir, est un autre exemple de son magnifique travail. Il se préoccupe des jeunes, des pauvres, des personnes âgées et de ceux et celles qui veulent s'instruire.
Quelqu'un a dit que le temps des miracles n'est pas chose du passé. Quand j'étais leader du gouvernement au Sénat, un sénateur qui devait quitter cette enceinte deux semaines plus tard est venu me voir et m'a dit: «Ray, un miracle s'est produit. Je ne vois pas d'autre mot pour qualifier ce qui m'arrive. Une très vieille dame, qui avait été ma bonne d'enfants, est venue me voir et m'a dit qu'en fait, j'avais un an de moins que ne l'indiquent les registres. N'est-ce pas là un miracle?». J'ai répondu: «Je le pense bien. Avez-vous des preuves?» Il a répondu qu'elle était prête à affirmer sous serment qu'il avait un an de moins que ne l'indiquaient les registres. Il a alors exhibé un document quelconque et a été en mesure d'établir, à la satisfaction des autorités du Sénat, qu'il avait un an de moins, si bien qu'un sursis lui a été accordé. J'espère qu'il se trouvera dans les parages une autre nounou d'âge canonique, ou même plusieurs, qui déclarera sous serment que le sénateur Bonnell et mon bon ami, le sénateur Petten, ont un ou deux ans de moins que ne l'indiquent les registres. Ne serait-ce pas merveilleux si un miracle de la sorte se produisait?
Ils nous manqueront tous les deux énormément. Ils ont apporté une telle qualité à cette enceinte. Joey Smallwood a dit que la Colombie-Britannique et Terre-Neuve étaient les deux serre-livres servant à maintenir ce pays. Terre-Neuvien dévoué, Bill Petten a été un ardent défenseur de toutes les bonnes causes, y compris l'unité nationale, et Lorne Bonnell est à ranger dans la même catégorie.
Nous sommes désolés de les voir partir. Peut-être devrions-nous créer le poste de sénateur émérite pour pouvoir continuer de profiter de leur savoir, de leurs compétences et de leurs idées. Nous y gagnerions tous considérablement.
L'honorable C. William Doody: Honorables sénateurs, je veux me joindre à mes collègues pour rendre hommage à nos deux confrères qui s'en vont aujourd'hui.
Je dois commencer par dire à quel point le sénateur Bonnell nous manquera, celui qu'on appelle Bon'l à Terre-Neuve, où toute sa famille a des racines profondes à Lawn, dans la péninsule Burin. On me demande parfois là-bas comment va Lorne Bon'l, et je réponds toujours qu'il va très bien.
Vous nous manquerez, monsieur. Votre aide et votre assistance étaient toujours appréciées, et nous garderons un bon souvenir de votre contribution aux travaux du Sénat. Il y a eu des moments où je n'étais pas aussi chaud en votre faveur, mais ce furent justement des occasions de renforcer nos liens.
Je suis sûr que les sénateurs comprendront tout à fait que je tienne particulièrement, aujourd'hui, à rendre ouvertement hommage à mon collègue et grand ami Bill Petten. Je connaissais Bill Petten bien avant d'être nommé sénateur. En fait, je le connaissais même bien avant qu'il soit nommé sénateur. Je l'ai toujours considéré comme un ami, et je suis heureux d'avoir l'occasion de le dire en public. Le sénateur Petten est un homme pour qui le mot «honneur» veut dire beaucoup. Je sais d'expérience que ce mot est sacré pour lui. Sa loyauté à son parti, à sa province et à son pays ne fait aucun doute.
(1430)
Il a travaillé sans relâche et avec beaucoup de dévouement au bénéfice du Sénat et de Terre-Neuve, sans jamais faire de concessions, et pourtant sans jamais blesser personne. C'est tout un bilan, après une aussi longue carrière publique.
Avec son père, le regretté sénateur Ray Petten, Bill Petten a collaboré assidûment, dès le début, à la campagne de M. Smallwood pour obtenir que Terre-Neuve se joigne à la Confédération. À partir de ce moment et jusqu'à maintenant, il n'y a pas eu une seule campagne ou organisation du Parti libéral à laquelle il n'ait participé. Il travaillait sans faire de bruit, efficacement et de bonne grâce.
Je suis rarement d'accord avec les politiques défendues par Bill Petten, mais je n'ai jamais pu trouver à redire à son genre ni à ses intentions. Beaucoup d'entre nous se rappellent bien les nombreuses années durant lesquelles il a exercé les fonctions de whip du Parti libéral au Sénat, lorsque lui et Orville Phillips, pour notre côté, dirigeaient les activités du Sénat. Ils ont régné suprêmement et sans conteste; ils ne toléraient d'ailleurs aucune contestation.
Le sénateur Lynch-Staunton: Comme c'est vrai!
Le sénateur Doody: J'ai été souvent envié par les collègues de l'autre côté parce qu'ils pensaient que leur whip était plus aimable, plus gentil, que celui que nous avions à endurer.
Je remercie Bill Petten de sa sagesse et des conseils qu'il m'a donnés au cours des 18 années et plus depuis que je siège ici. Son aide a été particulièrement précieuse quand il a prodigué ses conseils, fait office d'avocat et semé des allusions à l'époque difficile de l'étude de la TPS et lors d'autres moments de notre histoire quand j'exerçais une tâche plus onéreuse et plus exigeante que celle qui m'est actuellement dévolue. Je l'en remercie.
Honorables sénateurs, parler de Bill Petten dans n'importe quel contexte - à propos de sa vie privée, de sa merveilleuse famille, de son travail au Sénat, de ses activités politiques, de ses oeuvres de bienfaisance ou de son implication dans les oeuvres de sa paroisse à Terre-Neuve, de sa carrière dans les affaires -, tout cela ne voudrait pas dire grand-chose si l'on ne mentionnait pas Bernice, sa femme. C'était une équipe sans pareille, d'après mon expérience. Bill et Bernice - Bernice et Bill - formaient une équipe qui fonctionnait merveilleusement. J'espère qu'ils continueront de le faire encore de nombreuses années. Ils ont été inséparables, et je sais qu'ils le resteront.
Je les remercie des grandes contributions qu'ils ont apportées à Terre-Neuve et au Canada. Je les remercie de leur amitié. Doreen et moi apprécions énormément leur amitié et espérons les voir beaucoup plus souvent dans les années à venir, dans leur «retraite», bien que le terme ne soit pas bien approprié dans leur cas. Nous espérons les revoir de temps à autre.
Profitez bien de votre retraite, mon ami. Que la houle de l'arrière aille dans votre direction! Bon vent! Bon voyage! Merci.
L'honorable Bill Rompkey: Honorables sénateurs, je voudrais m'associer plus particulièrement aux observations du sénateur Doody.
Je dirai tout d'abord à notre collègue Lorne Bonnell qu'il nous manquera, et je lui rends hommage pour les longues années de service qu'il a données à sa province et au Sénat. Je me souviens que, jeune député en visite à l'Île-du-Prince-Édouard, j'ai séjourné chez lui. Il ouvrait ainsi aux autres sa maison, située sur une plage splendide. Il a admirablement servi cette province où il a été, tout comme au Sénat, une force politique qui compte. On a déjà fait allusion au rapport sur l'enseignement postsecondaire qui doit venir sous peu. Il s'agit d'un des rapports les plus importants qui seront présentés au Sénat.
Je me dois toutefois de réserver une place spéciale à Bill Petten dans mes observations. Je tiens à souligner ce qu'a dit le sénateur Doody. Bill Petten a été le représentant de notre province, et il a pris ce rôle très au sérieux et cela, non seulement en participant à l'étude des mesures législatives et aux caucus ou congrès de parti, mais aussi en faisant de sa maison un nouveau foyer pour nous, Terre-Neuviens loin de Terre-Neuve.
Lorsque je suis arrivé à Ottawa, je crois que c'est Bill Petten qui est venu me prendre à l'aéroport. Mais ce n'est pas tout. Il nous a aussi aidés à nous loger. Année après année, sa maison nous a été ouverte à moi et à d'autres parlementaires de Terre-Neuve, et je crois qu'elle le demeure.
Je rends hommage à Bernice qui, comme le sénateur Doody l'a fait remarquer, a été un membre de cette équipe. Cette équipe estimait que son devoir ne se limitait pas à l'étude des lois et au travail pour le parti, mais était aussi de servir les Terre-Neuviens.
Bernice a été présidente de l'Association des conjoints des parlementaires, une présidente hors du commun dont les services laisseront un souvenir durable.
On a déjà parlé du rôle de whip qui a été confié à Bill. Puisque c'était avant mon arrivée au Sénat, je vais m'abstenir de tout commentaire, mais je ne mets aucunement en doute la parole de ceux qui ont fait son éloge dans l'exercice de ces fonctions.
Bill Petten a mérité la confiance des premiers ministres qui, au fil des ans, se sont fiés à ses conseils.
Le sénateur Doody a aussi mentionné son père, Ray Petten. Ce dernier a été l'un des dirigeants du groupe que Joey Smallwood a formé pour défendre la cause de la Confédération. L'adhésion de notre province à la Confédération ne s'est pas faite automatiquement et n'a pas été facile. Elle a donné lieu à un débat orageux. La Confédération l'a emporté par une majorité très mince. Ceux qui se sont ralliés de bonne heure à Smallwood ont été les dirigeants de ce qui est devenu le mouvement pour la Confédération et, plus tard, le Parti libéral de Terre-Neuve et du Labrador. Ray Petten était l'un de ces dirigeants. Il a servi fidèlement et bien. Son fils a suivi son exemple.
Je ne peux lui rendre un meilleur hommage qu'en le qualifiant de Terre-Neuvien remarquable et de représentant exceptionnel de notre province.
Je dois ajouter que sa famille s'intéresse toujours à la vie politique. Sa fille Shari, qui est à la tribune aujourd'hui, a travaillé à mon bureau à la Chambre des communes et travaille aujourd'hui pour Herb Gray. Pendant des générations, la famille Petten a servi notre province de façon exemplaire, peut-être même incomparable. Il est tout à fait approprié de lui rendre hommage aujourd'hui.
J'ai hâte de savoir comment le sénateur Phillips décrira le sens de l'humour de Bill Petten. J'aurais voulu me rappeler toutes les histoires que j'ai entendues au cours de mes nombreuses visites chez les Petten. J'espère, ou plutôt je sais qu'il ne les oublie jamais.
Je termine par un hommage typique de Terre-Neuve. Nous avons entendu un hommage irlandais et celui du sénateur Doody. Il y en a un autre qui est courant à Terre-Neuve. Il y est question du foc, soit la voile avant qui guide le navire. Bill et Bernice Petten, que votre grand foc vous mène longtemps!
L'honorable Richard J. Stanbury: Honorables sénateurs, après ces hommages bien étoffés et bien mérités, je vais être bref. Ces deux gentilshommes, si je puis employer cette expression, sont des amis de longue date.
Margaret et moi sommes des amis de Bill Petten et de sa femme Bernice depuis au moins 30 ans. Quelle amitié! Notre amitié s'est poursuivie malgré le fait que, il y a plusieurs années, la veille de notre départ pour un congrès international libéral à Helsinki, où devaient être présentés des discours et des stratégies de développement du commerce, le sénateur Petten m'a téléphoné. J'ai lui demandé: «Monsieur le whip, pourquoi m'appelez-vous aussi tardivement?» Bill me répondit que le projet de loi sur la TPS allait arriver au Sénat la semaine suivante et qu'il avait été décidé que personne ne pouvait quitter le pays.
Nous sommes restés à la maison et nous avons essayé d'échanger les devises exotiques que nous avions achetées pour le voyage. Toutefois, les roubles que nous avions payés 500 $ valaient très peu, de sorte que je les ai envoyés à notre ambassadeur, afin qu'il les donne à un hôpital d'enfants de Moscou. Malgré cet épisode, les Petten sont demeurés nos amis.
(1440)
Bill Petten a été l'âme du Sénat pendant 30 ans. Il a été son comité d'accueil, son whip, sa conscience, son écoutant réceptif aux problèmes, son représentant international et son infatigable participant aux séances de comité. Le Sénat ne sera plus le même sans lui mais, comme je le connais, Bill saura trouver d'autres activités. S'il ne le fait pas, Bernice s'en chargera.
Lorne Bonnell - voilà tout un défi! Lorne Bonnell est un personnage plus grand que nature. Il est physiquement impressionnant. Sa voix est forte, tout comme son orgueil et son amour pour l'Île-du-Prince-Édouard. Il a rendu des services énormes aux gens de l'Île-du-Prince-Édouard, et il continue de le faire. Son humour, l'amour qu'il voue à sa famille et sa capacité de se faire des amis, tout est grand chez lui. J'ai eu le bonheur de compter parmi ses amis, comme nombre de nos collègues.
Le sénateur Bonnell a été un sénateur dynamique, consciencieux et efficace. Je lui souhaite de profiter de tous les petits plaisirs de la retraite: santé, grande prospérité, la chance de continuer à servir la population de l'Île-du-Prince-Édouard et du Canada, et la présence chaleureuse de famille et amis.
L'honorable Ethel Cochrane: Honorables sénateurs, je souhaite moi aussi témoigner respect et reconnaissance aux deux sénateurs, qui ont consacré la majeure partie de leur vie adulte au service public. J'aimerais ajouter quelques mots au sujet de mon ami, le sénateur Petten.
Le sénateur Petten a rempli ses nombreuses fonctions de bon gré et toujours avec le sourire aux lèvres. Il est de cette race rare de politiciens qui se font une foule d'amis et très peu d'ennemis, voire aucun.
Le sénateur Petten a longtemps été le whip de son parti au Sénat. Il a occupé le poste de leader adjoint suppléant du gouvernement. Il a consacré d'innombrables heures à travailler au sein des comités du Sénat, dont celui de la régie interne, des budgets et de l'administration et celui des privilèges, du Règlement et de la procédure. Toutes ces tâches qui passent généralement inaperçues du public et de la presse, mais que nous savons combien indispensables au bon fonctionnement de notre institution.
Le sénateur Petten a également consacré beaucoup de temps et d'énergie à établir et à entretenir pour nous des rapports avec des législateurs d'autres pays en participant aux activités d'organismes interparlementaires, notamment l'Association parlementaire du Commonwealth. Son épouse Bernice a, elle aussi, joué un rôle actif durant de nombreuses années à titre de membre d'associations regroupant des conjointes de parlementaires. Le couple est connu et admiré dans toute la communauté parlementaire internationale. Un grand nombre de parlementaires de passage au Canada ont profité avec plaisir de la politique de la porte ouverte qu'ils pratiquaient ainsi que de leur hospitalité.
Le sénateur Petten nous manquera. La province de Terre-Neuve et du Labrador perd un digne représentant et un représentant très respecté en cette Chambre. Je vous souhaite à tous les deux, Bill et Bernice, de belles, longues années de retraite bien méritée.
L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, en cette occasion aigre-douce où nos collègues Bill Petten et Lorne Bonnell quittent le Sénat, je n'avais pas l'intention de prendre la parole jusqu'à ce que j'entende les discours de nos collègues des régions maritimes, les sénateurs Graham, Phillips et Rompkey. Je ne voulais pas que Bill et Lorne quittent le Sénat en croyant que nous, les Ontariens, n'avons aucune culture.
Je prends donc la liberté d'adresser à Lorne et à Bill ces quelques mots tirés de ce qui est peut-être la plus grande de toutes les pièces de théâtre irlandaises, le magnifique Juno and the Paycock, de Sean O'Casey.
Venez le soir,
Venez le matin,
Venez invités,
Venez quand vous voulez.
Vous êtes deux hommes adorables.
Vous nous manquerez tous deux.
L'honorable Eymard G. Corbin: Honorables sénateurs, en tant que sénateur du Nouveau-Brunswick, une des quatre provinces de la région de l'Atlantique, je voudrais me joindre à mes collègues qui ont exprimé leur sentiment sincère à l'occasion du départ de nos deux collègues, le sénateur Petten et le sénateur Bonnell.
Nous avons, au cours des ans, comme représentants de cette région de l'Atlantique, travaillé ensemble à bien des dossiers. Ce fut un privilège d'être associé à ces deux personnes.
L'honorable Bill Petten a toujours dit que c'est bénévolement et en toute sincérité qu'il a décidé de se joindre au Canada. Le Canada devrait être reconnaissant d'avoir eu à son service un sénateur dévoué, loyal et infatigable comme le sénateur Petten.
Le sénateur Bonnell est aussi un compatriote de la région de l'Atlantique. Maintenant qu'un pont relie nos deux provinces, il est devenu un voisin immédiat. Au cours de mon association heureuse avec le sénateur Bonnell, je n'ai eu à lui reprocher qu'une seule chose. J'aimerais bien qu'il parvienne à se corriger une fois pour toutes: cesser de prétendre que les pommes de terre de l'Île-du-Prince-Édouard sont meilleures que les pommes de terre du Nouveau-Brunswick, parce que c'est le contraire qui est vrai.
Je souhaite une agréable retraite à ces deux collègues, qui sont d'authentiques gentilshommes et des partisans loyaux. J'espère qu'il nous feront le plaisir de nous visiter encore longtemps au Sénat du Canada.
[Traduction]
L'honorable Joyce Fairbairn: Honorables sénateurs, je voudrais moi aussi dire au revoir, en des termes sénatoriaux, à deux amis très spéciaux.
En écoutant les discours d'aujourd'hui, je me suis dit que c'était dommage qu'il n'y ait pas de tableau d'honneur au Sénat, parce que la feuille de route de ces deux sénateurs dans cette institution de même que dans leurs provinces constituerait sûrement un exemple très visuel de combattants s'étant battus au nom des Canadiens avec dignité, courage et un dévouement jamais démenti envers ceux qu'ils ont servi.
Le sénateur Bonnell, le docteur Bonnell, un bon docteur, est un sénateur vraiment moderne. Sa feuille de route, que j'ai consultée ce matin, remonte à l'Île-du-Prince-Édouard, où il s'est chargé de divers portefeuilles au sein du gouvernement, y compris la santé, le bien-être social et le logement. En venant au Sénat, il a emporté avec lui sa préoccupation pour les humains, notamment ceux qui sont les plus vulnérables.
Au Sénat, quels sujets poursuivait-il? Mentionnons, entre autres, les enfants à risque - un sujet confié à un comité qui a produit un rapport très essentiel au moment où personne n'osait parler de questions de ce genre. En outre, il s'est porté à la défense des anciens combattants. Il a travaillé pour les personnes âgées. Il a travaillé pour faire baisser les prix des médicaments. Tout dernièrement - au moment où il aurait dû ralentir -, il a entrepris une étude gigantesque sous les auspices du sous-comité sénatorial de l'enseignement postsecondaire.
J'ai oeuvré pendant de nombreuses années à l'autre bout de l'échelle scolaire. J'admire beaucoup le sénateur Bonnell de s'être penché sur une question dont il est parfois très difficile de discuter dans les milieux fédéraux et provinciaux. Avec d'autres sénateurs, il a étudié une question à laquelle, à mon avis, personne n'avait osé se colleter, une question qui mènera notre pays et nos jeunes à l'aube du prochain millénaire.
(1450)
Je vous félicite, sénateur Bonnell, d'avoir eu la prévoyance et le bon sens de faire une étude de cette question, étude dont bénéficieront non seulement les sénateurs, mais aussi les jeunes pendant des années à venir.
Quant au sénateur Petten, c'est l'expression «véritable gentleman» qui me vient à l'esprit lorsque je pense à lui. Mon amitié avec le sénateur Petten date de bien avant ma nomination au Sénat. Il est devenu pour moi un conseiller en matière sénatoriale. Il ne sait peut-être même pas à quel point j'ai appris de lui.
Lorsqu'il était whip et que je travaillais à l'autre endroit avec le premier ministre et le leader à la Chambre, nous avons déterminé qu'il devait bien y avoir une façon d'améliorer les relations entre la Chambre et le Sénat. Nous avons organisé des rencontres hebdomadaires. C'était à l'époque où l'honorable Mitchell Sharp était le leader du gouvernement à la Chambre. C'est le sénateur Petten qui avait été désigné pour assister à ces réunions. Il nous a tout d'abord démontré le sérieux avec lequel le Sénat s'acquittait de ses responsabilités ainsi que ce qui le différenciait de la Chambre des communes et il nous a expliqué pourquoi les deux Chambres devaient travailler en collaboration. Discrètement, à l'arrière-scène, comme il travaille souvent, le sénateur Petten a grandement contribué à faciliter la compréhension entre les deux Chambres du Parlement du Canada. Je tenais à le mentionner, car peu de gens savaient cela à l'époque.
Le sénateur Petten a été whip pendant 17 ans. Tout un record! Je doute qu'il soit jamais égalé, et si jamais il l'est, ce ne sera certainement pas selon la manière et le style du sénateur Petten.
Lorsque je suis arrivée au Sénat, honorables sénateurs, l'endroit était dirigé par les sénateurs Petten et Phillips. Cela ne faisait pas l'ombre d'un doute. Le sénateur Petten était peut-être un whip plus doux et gentil. Je lui trouvais certainement ces qualités. Cependant, malgré cette douceur et cette gentillesse, il insistait rigoureusement pour que nous ayons du respect, non pas pour lui, mais pour ce qu'il tentait de faire, au nom de son parti, au Sénat du Canada.
Pour le sénateur Phillips, toutefois, j'étais une résidente du cinquième étage à ce moment-là. On ne pouvait vraiment rien faire au cinquième étage sans consulter le sénateur Phillips, car c'est lui qui menait la barque.
Honorables sénateurs, les hommages adressés au sénateur Bill Petten brossent un tableau coloré d'une longue carrière. Beaucoup de gens décident de faire de la politique pour différentes raisons: parfois pour des raisons personnelles, parfois pour des raisons strictement partisanes, parfois parce qu'ils veulent régler certains problèmes. Le sénateur Petten est ici parce qu'il représente les habitants de Terre-Neuve et du Labrador, dont il a parlé et au nom de qui il a parlé chaque fois que l'occasion se présentait. Il a donc joué un rôle des plus importants.
Honorables sénateurs, je souhaite au sénateur Bonnell et au sénateur Petten de nombreuses années de bonheur durant leur retraite. Je suis certaine que tous deux veulent continuer de contribuer, chacun à sa façon, à la prospérité du Canada.
Enfin, en regardant du côté de la tribune, je ne peux m'empêcher de penser qu'il est absolument vrai que là où Bill était, Bernice y était aussi. Ils forment une équipe, et je leur offre à tous deux mon affection et mes félicitations.
L'honorable Catherine S. Callbeck: Honorables sénateurs, je veux tout d'abord souligner la contribution que le sénateur Bill Petten a apportée à cette institution et reconnaître publiquement la gentillesse dont il a fait preuve à mon endroit en tant que nouvelle venue. Par ailleurs, comme je viens de l'Île-du-Prince-Édouard, je ne peux pas laisser filer cette occasion sans dire quelques mots au sujet de mon ami, le sénateur Bonnell.
J'ai connu le sénateur Bonnell à la fin des années 60. Même avant cela, je connaissais sa réputation d'homme coloré, énergique, inventif et, oui, parfois direct. Comme le sénateur Graham l'a signalé, le sénateur Bonnell n'était pas connu pour sa timidité et son humilité.
Le sénateur Bonnell a siégé à l'assemblée législative provinciale pendant 20 ans. Durant cette période, il a fait de l'excellent travail aux nombreux postes qu'il a occupés. Il trouvait toujours un moyen de faire la manchette.
Dans notre province, nous avons deux journaux dont l'un, The Guardian, est aussi répandu que la rosée dans l'île. Le sénateur Bonnell savait s'y prendre pour faire la une des journaux, et il l'a faite pendant 20 ans dans notre province.
Comme le faisait remarquer le sénateur Fairbairn, le sénateur Bonnell a détenu plusieurs portefeuilles et, chaque fois, il a excellé dans ses fonctions.
Les habitants de l'île se sont réjouis de la nomination du sénateur Bonnell au Sénat en 1971 car ils savaient qu'il saurait représenter leurs intérêts et faire entendre leur point de vue. C'est précisément ce qu'il a fait.
Pour reprendre les mots du sénateur Graham, le sénateur Bonnell rugissait comme un lion quand il s'agissait de défendre ses concitoyens. On peut dire qu'il a été une source d'inspiration pour tous les habitants de l'Île-du-Prince-Édouard. Sa présence a fait une nette différence. Le sénateur a laissé sa marque, tant à la législature provinciale qu'au Sénat. Il nous manquera.
Sénateur Bonnell, je tiens à vous remercier publiquement pour la gentillesse que vous m'avez témoignée à la législature de l'Île-du-Prince-Édouard, et maintenant en tant que nouveau sénateur.
Je souhaite au sénateur Bonnell et au sénateur Petten de nombreuses années de santé et de bonheur.
L'honorable Colin Kenny: Honorables sénateurs, l'inconvénient, lorsqu'on prend la parole en dernier, c'est que tous les compliments ont été faits et qu'il ne reste plus que des critiques à formuler!
Aussi incroyable que cela paraisse, nous avons parmi nous deux insulaires très populaires et respectés.
Lorne était celui qui savait mettre du piquant dans nos travaux et dire des extravagances, tout en y mettant de l'humour.
Bill, lui, assurait la cohésion. Lorsqu'il a été whip, il a obtenu de bons résultats parce que ses troupes l'aimaient et que personne ne voulait le laisser tomber.
Votre départ nous appauvrira. Vous me manquerez et vous nous manquerez à tous. Que Dieu soit avec vous. Je vous souhaite une retraite longue et agréable.
L'honorable William J. Petten: Honorables sénateurs, je me permettrai de nommer individuellement chaque sénateur qui a pris la parole.
Sénateurs Graham, Phillips, Perrault, Doody, Rompkey, Stanbury, Cochrane, Grafstein, Corbin, Fairbairn, Callbeck et Kenny, je vous remercie beaucoup de vos aimables paroles.
Vos observations concernant mon épouse et mon père étaient justifiées. Quant à savoir si je méritais ce que vous avez dit à mon sujet, c'est une autre affaire, mais je vous en remercie.
(1500)
Quand le regretté premier ministre Lester B. Pearson m'a nommé sénateur, le 8 avril 1968, il s'est réveillé le lendemain en se demandant: «Mon Dieu, qu'est-ce que j'ai fait?» Ensuite, il a démissionné.
Une voix: C'est tout à fait cela.
Le sénateur Petten: J'aimerais dire quelques mots au sujet de mon affectation au comité des médias du sénateur Keith Davey. C'est là que j'ai pu connaître davantage mon mentor, Charles McElman. C'était un dur professeur, et il savait me mettre au pas.
Je tiens à exprimer publiquement ma reconnaissance au sénateur Keith Davey pour m'avoir nommé whip de ce comité. C'était la formation dont j'avais besoin pour devenir whip de notre caucus.
Le sénateur Jacques Hébert m'a remplacé au poste de whip de ce comité. Environ deux semaines après sa nomination, il a envoyé une note de service. Au bas de la note, on pouvait lire: «P.S. Je ne comprends pas pourquoi le sénateur Petten a gardé cet emploi si longtemps.» Keith Davey, le Rainmaker, lui a répondu: «Nous savons pourquoi Petten l'a gardé si longtemps. Il est fou!»
Quant à moi, j'ai connu beaucoup de bons et de mauvais moments au Sénat. L'époque où j'ai siégé au comité spécial mixte chargé de la Constitution, présidé par Jean Chrétien, alors ministre et aujourd'hui premier ministre, a été un grand moment. Il y en a eu beaucoup d'autres. Je me souviens particulièrement de la fois où j'ai eu le privilège de présenter et parrainer le projet de loi C-29 au Sénat. C'est le ministre des Pêches, Brian Tobin, maintenant premier ministre de ma province, Terre-Neuve, qui l'avait présenté à l'autre endroit. Avec ses conseils et l'aide de mes collègues des deux côtés de cette Chambre, nous avons réussi à adopter ce projet de loi en une journée, comme il avait été adopté en une journée à la Chambre des communes. Nous étions parvenus à adopter en deux jours un projet de loi très important pour la région de l'Atlantique et surtout pour Terre-Neuve.
Je veux maintenant remercier les gens qui m'ont aidé à m'acquitter de ma tâche au fil des ans. Je dois d'abord remercier celle qui fut ma secrétaire pendant 23 ans, Shirley Tink. Après 23 ans, ne pouvant plus me supporter, elle a pris sa retraite. Beverly l'a remplacée, et je dois dire qu'elle arrive très bien à me mettre au pas.
Ma famille, Bernice, Sharon, ma fille qui se trouve à la tribune, Robin, Raylene et Bill, ont tous joué un rôle précieux dans ma vie; ils m'ont encouragé à poursuivre mon travail. Il m'est arrivé parfois de me dire: «C'est assez. Je vais ralentir un peu.» Chaque fois, la direction du parti et ma famille m'ont empêché de le faire.
Je vous remercie tous de vos aimables paroles. J'aimerais avoir plus de temps, mais je n'ai jamais été porté sur les longs discours. Je préférerais vous remercier un à un individuellement, mais je devrai me limiter à vous dire ceci. À tous les membres du comité, au personnel du bureau, aux agents de sécurité et aux gens des services d'entretien, à tous ceux qui, au fil des années, m'ont aidé avec tant de bienveillance, je dis: «Merci, et que Dieu vous protège».
Des voix: Bravo!
L'honorable M. Lorne Bonnell: Honorables sénateurs, je ne voulais pas intervenir. J'attendais que d'autres sénateurs se lèvent pour dire tant de bonnes choses à mon sujet. Tout ce que vous avez dit est vrai. Pour la première fois de vos vies, vous avez dit la vérité. J'aurais pu vous souffler bien d'autres idées si vous aviez voulu poursuivre ces éloges.
Trève de plaisanteries! Je devrais peut-être vous avouer que, pour moi, le moment le plus mémorable de ma carrière ici remonte à plusieurs années. En effet, j'ai eu le privilège de parrainer la Loi canadienne sur la santé au Sénat du Canada. J'étais le président du comité qui s'est penché sur cette mesure législative.
Pour la première fois dans l'histoire du Sénat, depuis 1867, des représentants de toutes les provinces et de tous les territoires du Canada se sont présentés au comité pour faire connaître leur point de vue sur les soins de santé au Canada. Certains étaient en faveur du projet de loi, d'autres étaient incertains. Cependant, j'ai eu le privilège de parrainer cette mesure législative au Sénat du Canada, et c'est une chose dont je suis fier.
Je vous remercie tous de l'aide que vous m'avez apportée au cours des années.
Je profite de l'occasion pour vous parler aussi de mon ami le sénateur Petten, que je connais depuis mon arrivée au Sénat. Son bureau était de l'autre côté du corridor, face au mien. C'était un Terre-Neuvien discret, timide et modeste jusqu'à ce que j'arrive et que je le dérange. Il a cru que je transformerais le Parlement au complet dans la semaine, car je disais à tout moment: «Il faut changer ceci, il faut changer cela.» Il m'écoute depuis cette date, mais maintenant, il tient moins compte de ce que je dis.
Il m'a cependant présenté son épouse et sa famille. Ils ont été si gentils avec moi que je les considère maintenant comme ma famille. Je veux remercier sa femme, Bernice, et ses enfants pour leur gentillesse au fil des ans.
Je remercie de tout coeur tout le personnel du Sénat et du Parlement. Bonne chance. Je vous souhaite un merveilleux Noël et une très bonne année. J'espère que vous pourrez faire fonctionner le Sénat sans moi en 1998.
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, cela est contraire au Règlement, mais l'honorable sénateur Petten demande d'intervenir à nouveau. Devrions-nous passer outre au Règlement?
Des voix: D'accord.
Le sénateur Lynch-Staunton: C'est votre dernière permission.
Le sénateur Petten: Honorables sénateurs, mon honorable collègue, le sénateur Bonnell, et j'utilise l'expression délibérément, s'est tourné vers moi et m'a dit: «Si vous vous abstenez de parler de moi, j'en ferai de même pour vous.» Il m'a trahi.
Je tiens à dire que j'ai beaucoup apprécié son amitié et ses conseils au fil des ans. Nous avons eu parfois des confrontations, mais nous avons toujours réussi à nous entendre par la suite. Dieu vous garde, mon enfant. Prenez soin de vous.
DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
Les travaux du Sénat
Le projet de loi sur l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada-La publication de documents essentiels-Avis de question de privilège
L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, jeudi dernier, le 11 décembre, j'ai avisé le greffier du Sénat de mon intention de soulever la question de privilège. Cela découle de deux actions reliées entre elles du gouvernement du Canada qui, lorsqu'on les prend ensemble, font que le Parlement du Canada et les honorables sénateurs, y compris votre serviteur, ont été induits en erreur en ce qui concerne une question découlant de notre étude du projet de loi C-2.Le 4 décembre 1997, j'ai reçu une réponse différée à une question orale que j'avais posée le 19 novembre 1997. J'avais posé les questions suivantes à ce moment-là: le gouvernement va-t-il faire paraître les formules pour le calcul des retenues sur la paie par les employeurs avant que le Sénat n'ait approuvé le projet de loi C-2? Le gouvernement va-t-il poster les formulaires de déclaration du revenu qui tiennent compte des nouvelles cotisations au RPC pour 1997 avant que le Sénat ait adopté le projet de loi C-2?
La réponse que j'ai reçue dans le cadre des réponses différées à des questions orales dit ce qui suit:
Le gouvernement n'a pas l'intention d'émettre les tables de retenues à la source du RPC ni les déclarations d'impôt sur le revenu des particuliers jusqu'à ce que le Sénat ait dûment terminé l'étude du projet de loi C-2.
Cependant, le 10 décembre 1997, le gouvernement du Canada avait publié sur son site Web les tables de retenues à la source du RPC que j'ai en main.
(1510)
Aux termes de l'article 43 du Règlement du Sénat du Canada, cela constitue clairement:
[...] une question qui porte directement atteinte aux privilèges du Sénat [...]En fait, du comité auquel le projet de loi C-2 a été renvoyé ainsi qu'à mon privilège en tant que sénateur ayant été induit en erreur par le gouvernement du Canada.
Je suis d'avis que cet acte du gouvernement constitue une grave atteinte au privilège parlementaire, et que le seul recours en la circonstance consiste à renvoyer la question, comme étant une atteinte au privilège fondée à première vue, au comité permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure. Si la question de privilège semble fondée à première vue, je suis prêt à présenter une motion pour qu'elle soit renvoyée au comité permanent.
En examinant cette question, il importe de se demander ce qu'il faut entendre par privilège au Sénat. Il n'y a pas meilleure explication du privilège des parlementaires que celle que l'on trouve à la page 69 de la 21e édition d'Erskine May, Parliamentary Practice, qui stipule:
Le privilège parlementaire est la somme des droits particuliers à chaque Chambre, collectivement, parlant en tant que parties constitutives de la Haute Cour qu'est le Parlement et aux membres de chaque Chambre individuellement, faute desquels il leur serait impossible de s'acquitter de leurs fonctions. Ces droits dépassent ceux dont sont investis d'autres organismes ou particuliers. On est donc fondé à affirmer que, bien qu'il s'insère dans l'ensemble des lois, le privilège n'en constitue pas moins, en quelque sorte, une dérogation au droit commun. Certains droits et immunités, comme l'immunité d'arrestation et la liberté de parole, appartiennent principalement à chaque parlementaire et existent parce que la Chambre ne pourrait s'acquitter de ses fonctions sans l'utilisation sans entraves des services de ses membres. D'autres droits et immunités, comme le pouvoir de sanctionner l'outrage et celui de réglementer sa propre constitution appartiennent principalement à chaque Chambre collectivement, aux fins de la protection de ses membres et de la défense de son autorité et de sa dignité propres. Fondamentalement, toutefois, ce n'est que pour l'exercice efficace des fonctions collectives de la Chambre que ses membres jouissent du privilège.
Quand l'un de ces droits ou l'une de ces immunités font l'objet d'une atteinte, il s'agit d'une atteinte au privilège qui est punissable en vertu de la Loi sur le Parlement.
Honorables sénateurs, quand nous débattrons cette question, je soulèverai un certain nombre de points qui sont importants non seulement pour moi, mais encore pour nous tous.
C'est déjà arrivé à la Chambre des communes. Dans les années 80, le gouvernement conservateur a publié des renseignements sur la TPS, disant que c'était seulement à des fins d'information. Le Président Fraser a été très ferme dans sa condamnation de cet acte.
Ce qui est important pour nous tous, c'est que j'ai été induit en erreur, mais je connais aussi les sénateurs, et je sais d'où est venue la réponse. Je sais que personne n'a eu l'intention délibérée de m'induire en erreur, mais la bureaucratie et l'exécutif du gouvernement du Canada sont allés de l'avant et ont publié les renseignements comme si le Parlement n'existait pas, et comme si seulement l'exécutif avait des pouvoirs. Si nous n'avons pas encore adopté un projet de loi, mais que le gouvernement du Canada fait comme si ce dernier l'avait été, nous avons un vrai problème, qui doit être réglé.
J'espère, honorables sénateurs et Votre Honneur, que nous discuterons de cette question rapidement pour qu'elle soit renvoyée au comité permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure.
L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, conformément au paragraphe 43(7) du Règlement, je me lève pour donner avis oral de la question de privilège au sujet de laquelle j'ai donné préavis par écrit, conformément au paragraphe 43(3) du Règlement, portant que les privilèges du Sénat ont été violés par la publication du document T4127(E), Formules pour le calcul informatisé des retenues sur la paie, à compter du 1er janvier 1998.
Ce document a été rendu public avant que le projet de loi C-2 ne soit adopté par le Sénat et ne devienne loi. En agissant ainsi, le gouvernement du Canada a méprisé l'autorité du Parlement. Au moyen de cette publication, le gouvernement a expressément incité les Canadiens à croire que le Sénat ne joue aucun rôle dans l'adoption de ce projet de loi et porté atteinte aux futurs travaux du Sénat et du comité chargé d'étudier cette mesure législative.
Honorables sénateurs, je serai disposé à proposer une motion de renvoi de cette affaire d'outrage au Sénat au comité sénatorial permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure en temps voulu. Je ferai appel à des précédents pour défendre cette question devant la Chambre. Outre le Règlement du Sénat, j'invoquerai des précédents et des textes parlementaires tels que celui qui figure sous la rubrique traitant des outrages, à la page 115 de la vingt et unième édition du Erskine May. Je citerai également Le privilège parlementaire au Canada de Maingot.
Je rappellerai un précédent établi au Parlement dans la décision rendue à l'autre endroit, le 10 octobre 1989, par le Président Fraser sur une affaire du même genre. Même si le Président Fraser n'a pas jugé qu'il y avait dans cette affaire une prétention établie à première vue d'outrage, comme on peut le constater à la page 4461 du hansard de l'autre endroit, il a notamment déclaré ce qui suit:
Je veux toutefois que la Chambre comprenne très clairement que si jamais le Président est appelé à examiner de nouveau une situation comme celle-ci, la présidence ne sera pas aussi généreuse. À mon avis, c'est une situation qui ne devrait jamais se reproduire. Je m'attends à ce que le ministère des Finances et les autres ministères étudient cette décision avec soin et je rappelle à tous, dans la fonction publique, que nous sommes une démocratie parlementaire et non une démocratie de type exécutif ou de type administratif.
Honorables sénateurs, en temps voulu, je fournirai les détails là-dessus. Pour l'instant, mon objet est de donner avis oral.
AFFAIRES COURANTES
L'ajournement
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)h) du Règlement, je propose:Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, ce soit à demain, le 17 décembre 1997, à 13 h 30.
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, la permission est-elle accordée?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
Le Groupe interparlementaire Canada-Japon
Visite de la délégation parlementaire du Sénat au Japon-Dépôt du rapport
L'honorable Dan Hays: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la délégation qu'a dirigée notre Président, le sénateur Molgat, concernant les réunions qu'elle a tenues au Japon du 23 au 30 mars 1997 et qui s'inscrivaient dans le cadre d'une visite officielle faite par le Président et la délégation, visite qui faisait suite à une visite du Président de la Chambre des conseillers de la Diète japonaise, M. Juro Saito.(1520)
La visite du Président en Mongolie
Dépôt du rapport
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'ai le plaisir de déposer le rapport de la visite faite par le Président du Sénat au Grand Khoural de Mongolie du 31 mars au 4 avril 1997.[Français]
L'énergie
Le projet Sable Island Gas-Avis de motion autorisant le comité de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles à étudier cette question
L'honorable Jean-Maurice Simard: Honorables sénateurs, je donne avis que, le mercredi 17 décembre 1997, je proposerai:Que le Sénat presse le gouverneur en conseil de ne pas donner l'approbation finale à la proposition soumise par le consortium qui a soumis le projet de Maritime and Northeast Pipeline jusqu'à ce que le gouvernement du Canada ait rempli son obligation de tenir des audiences complètes et équitables sur les propositions soumises par toutes les parties intéressées, notamment celle de TransMaritime Pipeline, attendu:
a) que les ressources naturelles du Canada appartiennent à tous les Canadiens;
b) qu'il y a lieu de tenir compte avant tout des besoins et des intérêts des Canadiens dans l'exploitation, le développement et l'utilisation des ressources naturelles qui leur appartiennent;
c) que la proposition retenue de Maritime and Northeast Pipeline place les intérêts des Américains loin devant ceux des Canadiens en dirigeant 83 % du gaz naturel tiré du projet Sable Offshore Energy vers les États-Unis, alors que seulement 17 p. 100 sera alloué à deux provinces canadiennes seulement, soit la Nouvelle-Écosse et le sud du Nouveau-Brunswick;
d) que la proposition de TransMaritime donne priorité aux intérêts des Canadiens en distribuant 64 % du gaz naturel du projet Sable Offshore à quatre provinces canadiennes, dont 34 % à la Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick, par opposition à un volume total de seulement 36 % aux États-Unis;
e) que selon la proposition que TransMaritime, les provinces de l'Ontario et du Québec bénéficieront aussi du gaz naturel produit par le projet Sable Offshore Energy;
f) que la proposition TransMaritime encourage l'industrie canadienne, favorise la sécurité de l'approvisionnement d'énergie du centre du Canada et offre aux Canadiens un approvisionnement plus important de gaz naturel à un prix plus bas;
g) que la proposition de TransMaritime fournirait des meilleures possibilités d'emplois et générerait des avantages à long terme plus importants pour le nord du Nouveau-Brunswick qui est désavantagé;
h) que la proposition de TransMaritime favorise l'unité du Canada en envoyant aux Canadiens de quatre provinces, notamment les Acadiens, les Québécois et les Franco-Ontariens, un message positif d'inclusion, de sécurité, de perspective d'avenir et de partage au sein de la Confédération;
i) que le refus de la Commission d'examen public conjointe des projets gaziers de l'Île de Sable et de l'Office national de l'énergie d'entendre la proposition de TransMaritime pourrait porter gravement atteinte aux droits des Canadiens, au développement et à l'utilisation de leurs ressources énergétiques et miner la souveraineté du Canada sur ses ressources;
j) que le développement d'un pipeline plutôt que de l'autre n'amènera pas de gain important de temps;
k) que prendre une décision sur ce sujet sans examiner toutes les possibilités pourrait être plus dommageable que le retard relativement mineur qui résulterait d'une révision plus juste et plus complète;
que la question de l'opération par laquelle la Commission d'examen public conjointe des projets gaziers de l'Île de Sable et l'Office nationale de l'énergie sont arrivés à recommander que le projet Maritime and Northeast Pipeline soit autorisé à aller de l'avant, soit déférée au comité permanent du Sénat de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles avec instructions à ce comité d'examiner cette question et de faire rapport de cet examen;
que le comité présente son rapport final au Sénat au plus tard le 28 février 1998.
[Traduction]
PÉRIODE DES QUESTIONS
La défense nationale
Programme de remplacement des hélicoptères de recherche et de sauvetage-À quand l'adjudication du contrat-La position du gouvernement
L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et concerne la date d'adjudication du contrat pour le remplacement de nos hélicoptères de recherche et de sauvetage.Les Canadiens se perdent en conjectures sur la date à laquelle un appel d'offres sera lancé pour le remplacement de nos hélicoptères de recherche et de sauvetage. Aujourd'hui, par exemple, cela fait 70 jours que le ministre a dit que ce sera «bientôt». Comme le ministre le sait, cela fait des années que ça dure.
Aujourd'hui, la conjecture veut que l'équipe de sélection du Cabinet, apparemment démise de ses fonctions il y a à peu près une semaine par le premier ministre dans un accès de colère légitime, a maintenant été reconstituée pour étudier les options qui s'offrent au gouvernement.
Comme nous le savons, les trois options sont: ou bien acheter les Chinook, ou bien acheter les EH-101, ou bien laisser aller les soumissions jusqu'au 5 janvier et retirer l'appel d'offres.
Même si la décision que prendra le gouvernement m'intéresse, il m'intéresse encore plus de savoir aujourd'hui si le comité de sélection s'est réuni. Dans la négative, le ministre pourrait-il nous dire s'il va se réunir avant que nous n'ajournions, ou bien s'il va attendre que nous ayons ajourné? Dans ce cas, quand le Cabinet va-t-il se réunir au complet pour examiner les recommandations du comité de sélection?
L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je voudrais pouvoir vous en dire plus long. Toutefois, il serait inapproprié de ma part de commenter le programme ou les discussions qu'a eues le Cabinet ou un comité du Cabinet.
Que mon collègue se rassure, toutes les options sont à l'étude. Espérons que la décision sera connue bientôt.
Le sénateur Forrestall: Honorables sénateurs, nous jouons avec la vie des gens. Si le premier ministre craint que je ne me lève à la Chambre et ne me mette à le critiquer pour avoir choisi le Cormorant ou l'EH-101, je prierais le leader du gouvernement de bien vouloir l'informer que je n'en ferai rien. Bien au contraire, je l'appuierai. Oui, je l'appuierai, quelle que soit la décision prise ou peu s'en faut.
Je ne suis pas sûr de l'intervalle exact qui s'est écoulé entre la décision que le Cabinet a prise d'acheter des hélicoptères et la livraison du premier appareil, mais je pense que cela avoisine les cinq ou six ans.
Peut-on obtenir une réponse plus précise? Nous sommes sur le point d'ajourner pour les Fêtes, et le premier ministre pourra avoir la conscience tranquille au cours des six ou huit prochaines semaines. Mais, entre-temps, nos pilotes doivent aller en mission sur des appareils peu fiables. Ne peut-on pas leur faire part d'une bonne nouvelle? Peut-on espérer que la décision sera prise d'ici le printemps prochain?
(1530)
Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je dirais que c'est certainement une possibilité. Je tiens à assurer mon collègue que le fait que même lui soit prêt à appuyer un soumissionnaire donné sera très réconfortant pour le premier ministre.
Je tiens également à assurer tous les honorables sénateurs que le processus est très transparent et très objectif. Les responsables font tout pour choisir le meilleur produit qui servira au mieux les intérêts des contribuables canadiens. Je comprends parfaitement les inquiétudes du sénateur Forrestall au sujet de ces formidables équipages qui doivent piloter ces appareils.
Le sénateur Forrestall: Est-ce qu'il a été question au Cabinet de l'interopérabilité du matériel?
Le sénateur Graham: Comme le sait mon honorable collègue, il serait tout à fait inapproprié de ma part, de répondre à une telle question.
Le programme de remplacement des hélicoptères de recherche et de sauvetage-L'abandon possible du projet-La position du gouvernement
L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, ma question, qui s'adresse au leader du gouvernement au Sénat, fait suite aux questions posées par mon docte collègue, le sénateur Forrestall.Les médias ont rapporté une déclaration troublante au sujet de processus en cours relatif au choix de ces hélicoptères. Le docte sénateur Graham sait que les hélicoptères de recherche et de sauvetage ont pour objet de sauver des vies, mais il semblerait que la politique joue un rôle si important dans le choix des hélicoptères qu'elle soit sur le point d'avoir préséance sur l'objet même de ces appareils.
Selon les médias, certains des conseillers supérieurs de M. Chrétien l'exhorteraient à abandonner complètement le processus, et ce, sur l'avis des avocats du ministère de la Justice qui affirment que le seul moyen d'éviter une bataille juridique coûteuse est de ne choisir aucun des concurrents et de laisser tomber le projet.
L'honorable leader du gouvernement au Sénat peut-il confirmer que c'est en fait le cas?
L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je ne ferai rien de la sorte et je n'ai eu vent d'aucun conseil de ce genre.
Le sénateur Oliver: Les articles de journaux ajoutent que des avocats fédéraux ont dit que rejeter le bénéficiaire de l'adjudication en faveur d'un autre pourrait exposer le gouvernement à un procès coûteux, compte tenu surtout des assurances que l'ancien ministre de la Défense avait données par écrit à ses homologues anglais et italiens pour leur assurer que la candidature du groupe fabriquant le EH-101 Cormoran ferait l'objet d'un examen objectif.
L'honorable leader du gouvernement au Sénat pourrait-il déposer ces assurances écrites de la part de l'ancien ministre, afin que les sénateurs puissent avoir l'occasion de les lire et de les examiner?
Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, si de telles assurances écrites existent, je tâcherai d'établir s'il est convenable de déposer un tel échange de correspondance. Si elles n'existent pas, mon honorable collègue reconnaîtra qu'il ne serait pas convenable de ma part d'en déposer.
Le sénateur Oliver: Étant donné l'imminence de l'ajournement des Fêtes, si l'honorable sénateur est en mesure de déposer ces assurances, pourrait-il le faire demain afin que nous puissions en prendre connaissance avant l'ajournement du Sénat?
Le sénateur Graham: Si cela était convenable, oui. Je vais tâcher d'agir aussi rapidement que possible à cet égard.
Le Manitoba-L'écrasement d'un avion de Sowind Air à Little Grand Rapids-La non-disponibilité d'équipement de recherche et de sauvetage posté stratégiquement-La position du gouvernement
L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Doit-on conclure de l'écrasement d'avion de mardi dernier au Manitoba que le gouvernement aurait dû acheter de nouveaux hélicoptères en 1993?L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je ne voudrais pas faire de lien entre une telle tragédie et la question de savoir quand ou comment des hélicoptères ont été achetés au Canada.
Le sénateur Stratton: C'est une question que l'on posait samedi dans un journal de Winnipeg. Cinq personnes sur six étaient carrément d'accord.
Voici mon autre question: pourquoi faut-il que des gens meurent pour démontrer la nécessité de poster des hélicoptères au Manitoba?
Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, moi non plus, je ne veux pas faire de lien avec la tragédie qui s'est produite. Je sais que cette catastrophe a eu de terribles répercussions sur la vie des Manitobains. Je suis conscient aussi de la bravoure dont ont fait preuve les militaires et les civils qui se sont portés au secours des victimes grièvement blessées. Je les en félicite.
Je le répète, je ne veux pas faire de lien entre la situation actuelle et l'horrible tragédie qui s'est produite au Manitoba.
Le sénateur Stratton: Honorables sénateurs, je ne voudrais pas faire de lien entre les deux, moi non plus. Toutefois, il y a, au Manitoba, 22 terrains d'atterrissage semblables à celui de Little Grand Rapids. Le temps peut parfois être très mauvais et les Forces armées canadiennes ont fait tout ce qu'elles pouvaient faire avec l'équipement qu'elles avaient à leur disposition, c'est-à-dire un Hercules.
On sait que de telles situations se produisent, donc, dans ces circonstances, pourquoi n'avons-nous pas d'hélicoptère nous permettant d'aider les gens en détresse? L'hélicoptère n'a pas besoin d'appartenir aux forces armées. Il peut même être affrété. À l'heure actuelle, les hélicoptères sont plutôt basés le long des côtes et dans la région des Grands Lacs, mais pas dans les Prairies.
Je me pose donc la question suivante: pourquoi ces gens ont-ils enduré inutilement des souffrances pendant si longtemps, faute d'équipement?
Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, il s'agit d'une question légitime. Il y a deux volets à la question et certainement au problème qu'aborde le sénateur Stratton.
Le premier touche à l'état de ces 22 terrains d'atterrissage et à l'emplacement des installations et des terrains d'atterrissage où doivent se poser les appareils. Le deuxième traite du lieu stratégique où sont basés les hélicoptères de recherche et de sauvetage dans certaines régions du pays. C'est peut-être là la question à examiner de plus près.
Je ferai certainement part des observations et des préoccupations de mon honorable collègue aux personnes responsables.
L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, je détiens une licence de pilote professionnel valide et je survole régulièrement la Colombie-Britannique. Seuls ceux d'entre nous qui volent dans ces régions sauvages connaissent vraiment la valeur d'une opération immédiate de recherche et de sauvetage dans le cas d'un écrasement.
En ce qui concerne la tragédie récente, au Manitoba, je ne veux faire aucune conjecture. Toutefois, je sais ceci: si nous n'avons pas un bon matériel de recherche et de sauvetage au Canada, nous allons continuer à perdre inutilement des vies.
Ce que je suis en train de vous dire, honorables sénateurs, c'est que c'est fondamentalement une question de bon sens. Comme je survole régulièrement ces régions isolées, je vous demande, monsieur le ministre, de bien vouloir dire au premier ministre et au Cabinet qu'il est urgent que nous ayons un bon équipement.
Le sénateur Forrestall a soulevé cette question tous les jours depuis que je siège ici. Le gouvernement a annulé un contrat d'hélicoptères qui aurait répondu aux besoins de la plupart des opérations de recherche et de sauvetage au Canada, tant sur la côte qu'à l'intérieur des terres.
C'est honteux que le gouvernement ait fait de cette question une affaire politique - si c'est bien ce qu'il a fait. Je demande à mon collègue de transmettre haut et clair ce message au premier ministre. Les personnes qui, comme moi, sont des pilotes actifs ont besoin d'un appui de ce genre. Si vous ne voulez pas me sauver moi, sauvez les autres, s'il vous plaît.
Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je reconnais les nombreuses qualités et compétences du sénateur St. Germain. Je sais qu'il possède une licence de pilote et qu'il parle d'expérience. Le sénateur Forrestall a une grande connaissance des forces armées et des questions de transport en général.
Je conviens qu'il s'agit ici d'une question de bon sens et d'extrême urgence.
Le sénateur Lynch-Staunton: Eh bien, qu'attendez-vous?
Le sénateur Graham: Je vais certes porter à nouveau avec force et vigueur vos instances à l'attention des personnes responsables.
(1540)
L'environnement
La réduction des émissions de gaz à effet de serre- La ratification de l'accord de Kyoto- L'engagement lié à la position des États-Unis- La position du gouvernement
L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, nous avons sérieusement besoin d'éclaircissements sur la position adoptée par le gouvernement au sujet de l'accord de Kyoto. J'attends la réponse à une question que j'ai posée l'autre jour au sujet des engagements, s'il y en a, qui ont été pris par le premier ministre Chrétien envers le premier ministre Klein ou d'autres personnes, au sujet de la possibilité que le Canada modifie sa position.Ce matin, j'ai entendu une déclaration attribuée à la ministre de l'Environnement, l'honorable Christine Stewart, qui aurait dit qu'il ne fallait pas tenir pour acquis que le Canada ratifiera l'accord de Kyoto, et que nous attendrons de voir ce que font les États-Unis avant de bouger.
Est-il possible que ce soit là la position du Canada? Avons-nous signé l'accord à Kyoto? Nous sommes-nous engagés inconditionnellement à le ratifier? Ce sont là des questions auxquelles on peut répondre par un seul mot et j'espère obtenir des réponses avant vendredi.
L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le premier ministre a discuté de changements climatiques avec les premiers ministres lors de leur rencontre de la semaine dernière. Ils ont reconnu que le changement climatique était une question mondiale très sérieuse et que le Canada devait faire ce qu'il pouvait pour qu'aucune région n'ait à porter un fardeau déraisonnable.
Je comprends les préoccupations exprimées. Je devrai prendre connaissance des derniers renseignements concernant les déclarations de la ministre Stewart au sujet de la ratification. Cependant, je sais qu'il y aura des consultations avec les provinces du Canada, bien sûr, et aussi avec nos interlocuteurs dans le monde.
Le sénateur Murray: Le ministre pourrait-il dire si, en signant l'accord de Kyoto, nous nous sommes engagés inconditionnellement à le ratifier? Quelle position avons-nous adoptée face aux autres pays du monde qui ont aussi signé cet accord?
Le sénateur Graham: J'ignore si le fait de signer l'accord engage inconditionnellement le Canada à le ratifier, car il y a de nombreux intervenants, notamment l'industrie et les provinces.
Le sénateur Murray: Avons-nous assorti notre signature d'une condition? Y avait-il, à côté de notre nom, un astérisque renvoyant à une note en bas de page?
Le sénateur Graham: Oui, la signature et la ratification sont deux choses différentes. Je vais demander des précisions à ma collègue et faire connaître la réponse.
La santé
Les griefs présentés par des scientifiques travaillant pour le gouvernement-L'homologation possible de médicaments à usage vétérinaire controversé- La position du gouvernement
L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, j'ai été bouleversée par une nouvelle révélation. D'après le Toronto Star, six chercheurs de Santé Canada accusent leurs gestionnaires de faire pression sur eux pour qu'ils approuvent des médicaments dont l'innocuité est douteuse. Ces scientifiques, qui travaillent au Bureau des drogues vétérinaires de Santé Canada, ont déposé trois griefs demandant que leurs allégations fassent l'objet d'une enquête externe. Les faits reprochés sont notamment les suivants: coercition, conspiration, menaces, intimidation, libelle diffamatoire et diffamation des plaignants.Les chercheurs disent ne pas être convaincus de l'innocuité à long terme de plusieurs médicaments à usage vétérinaire contenant des hormones de croissance. Ces médicaments sont administrés aux bovins pour accroître leur masse pondérale ou leur production de lait. La question en litige est de savoir si des résidus d'hormones de croissance peuvent être transmis aux êtres humains par la viande de boeuf et le lait, ce qui pourrait hâter l'arrivée de la puberté. L'Union européenne, comme nous le savons tous, a interdit l'importation de ces produits. Je ne sais pas, cependant, si l'interdiction tient toujours. La position officielle, à Santé Canada, semble être que les médicaments tels que la STbr sont tout à fait inoffensifs, même si les gens en ingèrent des résidus. Les chercheurs ne sont pas d'accord.
Honorables sénateurs, j'ai une impression de déjà-vu. La même chose s'est produite dans le domaine des pêches quand des scientifiques se sont vu ordonner de ne pas publier leurs conclusions pour certaines raisons.
Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Le gouvernement est-il prêt à homologuer ces médicaments, malgré le geste posé par les chercheurs de Santé Canada à propos de la STbr, en particulier, laquelle fait en sorte que les vaches produisent plus de lait?
L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai lu le même article dans le Toronto Star. Je vais m'efforcer d'obtenir de plus amples renseignements pour mon amie.
Le Conseil du Trésor
Le phénomène informatique du millénaire- Répercussions sur les ordinateurs du gouvernement-La position du gouvernement
L'honorable Fernand Roberge: Honorables sénateurs, ma question a trait au problème informatique de l'an 2000, communément appelé le problème du millénaire.En octobre, le vérificateur général a critiqué la lenteur des efforts du gouvernement pour s'occuper problème du millénaire en ce qui a trait aux systèmes qui soutiennent des services gouvernementaux. Le vérificateur général a demandé que des mesures soient prises de façon plus rapide et plus énergique, étant donné qu'il est probable que les efforts actuels pour régler ce problème sont trop lents pour que les systèmes gouvernementaux, y compris ceux qui sont nécessaires au soutien de programmes et services essentiels, soient prêts à temps.
Dans sa réponse aux critiques formulées par le vérificateur général, le Secrétariat du Conseil du Trésor a dit que le gouvernement accélérait la prise de mesures face à ce défi particulier et qu'il continuerait de le faire.
Le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il faire le point sur les efforts faits par le gouvernement pour accélérer la prise de mesures correctives dans ce dossier?
L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je sais que la situation et sa solution possible font l'objet d'une évaluation très étroite. Je fournirai une réponse dès que possible.
Le sénateur Roberge: Avant l'an 2000, j'espère.
Ma deuxième question a trait aux efforts du gouvernement pour aider les entreprises individuelles et les autres paliers de gouvernement qui sont responsables de systèmes informatiques ne relevant pas du gouvernement fédéral. Ceux-ci représentent 90 p. 100 de l'ensemble des systèmes qui pourraient être touchés au Canada.
Jusqu'à maintenant, les efforts du gouvernement relativement aux systèmes qui ne sont pas de son ressort ont consisté à nommer un groupe de travail, à faire des études et à diffuser de l'information.
Le leader du gouvernement au Sénat aurait-il l'obligeance de faire le point sur les efforts et les activités du gouvernement visant à prévenir les préjudices qui peuvent découler du problème de la fin du millénaire sur les systèmes qui ne sont pas de la responsabilité immédiate du gouvernement du Canada?
Le sénateur Graham: Oui, c'est un dossier dont s'occupent non seulement les gouvernements, mais aussi le secteur et l'industrie privés. Je vais faire le point, avant l'an 2000, je l'espère.
L'énergie
Les projets gaziers de l'île de Sable-La possibilité de subventions pour la construction d'embranchements vers d'autres régions des Maritimes-La position du gouvernement
L'honorable Eymard G. Corbin: Honorables sénateurs, ma question fait suite à celle que j'ai posée au leader du gouvernement au Sénat vendredi dernier au sujet du gaz de l'île de Sable. Je sais gré au leader du gouvernement de la réponse qu'il m'a alors donnée, mais je voudrais revenir sur cette affaire.Dans ce cas, est-ce que l'Est du Canada pourrait avoir le même traitement que celui qui a été accordé à l'Ouest lorsqu'on a acheminé le gaz des gisements de cette région vers le Canada central? Je crois comprendre que, à l'époque, le gouvernement a accordé de généreuses subventions pour permettre la construction d'embranchements vers diverses localités de l'Ouest, notamment au Manitoba. Les Canadiens de l'Est demandent à être reliés à cette importante ressource nationale de la manière la plus économique et la plus rentable pour tous les intéressés. Après toutes ces années de promesses, le facteur important est que le projet se réalise enfin.
J'espère que le leader du gouvernement au Sénat transmettra ce nouveau message au Cabinet avant qu'une décision finale ne soit prise, pour peu que la question n'ait pas encore été tranchée.
L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, à ce que je sache, il n'a pas été question de généreuses subventions, mais je sais fort bien moi aussi ce qui s'est fait dans d'autres régions du pays à une autre époque.
(1550)
Je sais qu'il y a eu des discussions générales au sujet des conduites secondaires dans diverses régions de l'Est du Canada. Je tenterai d'obtenir, pour mon honorable collègue, une réponse qui soit plus à jour.
La santé
Le rapport de la Commission d'enquête sur le système d'approvisionnement en sang au Canada-L'indemnisation des victimes de l'hépatite C-Demande de réponse
L'honorable Stanley Haidasz: Honorables sénateurs, je voudrais revenir sur une question que j'ai posée au leader du gouvernement au Sénat il y a environ deux semaines.Le gouvernement fédéral annoncera-t-il avant Noël qu'il va indemniser les victimes du sang contaminé, notamment celles qui ont contracté l'hépatite C?
L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je crois savoir que les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux examinent actuellement le rapport du juge Krever et ses observations concernant une indemnisation.
Les ministres de la Santé fédéral, provinciaux et territoriaux discuteront de cette question lors d'une rencontre qui, sauf erreur, doit avoir lieu en janvier. Je suis certain qu'ils se pencheront alors sur la question soulevée par le sénateur Haidasz.
L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, quelle est la position du gouvernement fédéral? Est-il en faveur de convier les provinces à élaborer avec lui une formule d'indemnisation et qui viserait-elle?
Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je sais que le sénateur s'enquiert de la position du gouvernement du Canada. Je sais toutefois que le gouvernement de la Saskatchewan envisage d'indemniser les victimes de l'hépatite C. Le gouvernement du Canada étudie actuellement la question.
Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, ma question est la suivante: quelle est la position du gouvernement du Canada? Celui-ci est-il en faveur ou non d'une indemnisation, aussi limitée soit-elle, qui serait versée en collaboration avec les provinces ou par lui seul? Quelle est sa position?
Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je suis certain que le gouvernement du Canada a beaucoup de compassion pour les victimes, mais je ne pense pas qu'une annonce sera faite avant la réunion qui doit avoir lieu en janvier.
Le commerce international
La politique commerciale, les droits de la personne et le concept du choix éthique des fournisseurs de produits importés-Avis d'interpellation
Permission ayant été accordée de revenir aux avis d'interpellation:L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, je donne avis que, jeudi prochain, le 17 décembre 1997, j'attirerai l'attention du Sénat sur la politique commerciale du Canada, les droits de la personne et le concept du choix éthique des fournisseurs de produits importés.
Réponse différée à des questions orales
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai la réponse différée à la question que l'honorable sénateur Stratton a posée le 2 décembre 1997 au sujet du rapport du vérificateur général et de la Loi sur la protection du revenu agricole.
L'agriculture
Le rapport du vérificateur général-La loi sur la protection du revenu agricole-L'absence de décrets autorisant les programmes- La position du gouvernement
(Réponse à la question posée par l'honorable Terry Stratton le 2 décembre 1997)Le gouvernement est tenu en vertu de l'article 12(7) de la Loi sur la protection du revenu agricole de soumettre tous les décrets relatifs aux différents accords négociés au titre de l'article 12(5). Agriculture et Agroalimentaire Canada a négocié et mis en oeuvre ces ententes dans le cadre d'une vaste stratégie en trois volets de protection du revenu agricole.
Les deux premiers volets de la stratégie sont le Compte de stabilisation du revenu net (CSRN) et l'Assurance-récolte. Le troisième volet prend la forme d'une série de programmes d'envergure provinciale dits programmes complémentaires. Ces programmes sont censés répondre aux besoins régionaux pendant que le secteur s'adapte au nouveau système qui repose sur des programmes couvrant l'ensemble des activités de l'exploitation agricole comme, par exemple, le CSRN. Les programmes complémentaires sont actuellement mis en oeuvre sinon en négociation.
L'intention du gouvernement était de soumettre au Parlement toutes les ententes pour les programmes complémentaires afin de lui brosser un tableau complet du régime de protection du revenu. Cependant, à la lumière des préoccupations exprimées par le bureau du Vérificateur général du Canada, un processus a été entrepris afin de déposés, dans les plus brefs délais, les décrets existants. Les prochains décrets visant les ententes actuellement en préparation ou en négociation seront présentés dès que possible après leur ratification.
Les travaux du Sénat
la réponse à une question au Feuilleton- La situation de la réponse
L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, puis-je demander au leader adjoint du gouvernement au Sénat quand je peux m'attendre à avoir une réponse à la question que j'ai posée le 30 septembre? Je vois qu'on répond à des questions qui ont été posées en octobre, en novembre et même au début de décembre, pourtant cette question, qui exige une réponse fondée sur des faits et non sur des opinions ou des arguments, reste sans réponse. Quelle est la situation en ce qui concerne la réponse à cette question?L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, tout ce que je peux faire, c'est assurer aux sénateurs que je leur communique les réponses dès que je les reçois.
L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, il conviendrait de préciser de quelle question parle le sénateur Lynch-Staunton exactement. S'il est possible de trouver la réponse, nous ferons tout ce que nous pouvons pour lui donner cette réponse avant le congé.
Le sénateur Lynch-Staunton: Ce qu'on me dit, c'est que je dois, près de trois mois après avoir inscrit une question au Feuilleton, rappeler au gouvernement qu'il est censé me répondre.
Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je dis simplement que je n'ai pas une mémoire encyclopédique comme mon collègue. Je ne me rappelle pas de toutes les questions que pose le chef de l'opposition au Sénat.
Nous tenterons de trouver cette question que le sénateur a posée. J'admets qu'elle est sans réponse depuis longtemps. Nous tenterons d'y répondre rapidement.
ORDRE DU JOUR
La Loi sur la marine marchande du Canada
Projet de loi modificatif-Troisième lecture
L'honorable Wilfred P. Moore propose: Que le projet de loi S-4, Loi modifiant la Loi sur la marine marchande du Canada (responsabilité en matière maritime), soit lu une troisième fois.- Honorables sénateurs, je suis heureux de prendre la parole à l'étape de la troisième lecture du projet de loi S-4, Loi modifiant la Loi sur la marine marchande du Canada relativement à la responsabilité en matière maritime.
Je suis sûr que les sénateurs seront d'accord avec moi pour dire que ce projet de loi améliorera nos régimes de responsabilité en matière de créances maritimes, en général, et plus particulièrement en ce qui a trait aux dommages dus à la pollution.
La loi proposée consiste en deux séries de modifications, ayant trait, d'une part, à la limitation de la responsabilité en matière de créances maritimes, prévue à la partie IX de la Loi sur la marine marchande, et, d'autre part, à la responsabilité pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, prévue à la partie XVI de la même loi. Dans les deux cas, ces modifications assurent la mise en oeuvre de conventions internationales auxquelles le Canada compte adhérer.
Les changements apportés aux parties IX et XVI dans le projet de loi S-4 sont d'une extrême importance pour les milieux maritimes au Canada. Les règles actuelles concernant la limitation de responsabilité en matière de créances maritimes et figurant à la partie IX de la Loi sur la marine marchande du Canada sont fondées sur une convention internationale adoptée en 1957. Comme les honorables sénateurs peuvent facilement l'imaginer, les limites de responsabilité établies dans cette convention et, de ce fait, dans notre loi, sont très faibles. Cela n'aide ni les demandeurs, ni les propriétaires de navire.
Les limites actuelles sont tellement faibles que, la plupart du temps, les demandeurs ont dû intenter une action en justice pour essayer de déroger à ces limites et d'obtenir une indemnisation adéquate. Il s'ensuit de longs procès dont ni les demandeurs, ni les propriétaires de navire ne peuvent être sûrs des résultats.
Il ne faut pas oublier que ce régime de limitation de responsabilité en matière de créances maritimes introduit un certain sens de la réalité dans les opérations des propriétaires de navire. En l'absence de ce régime, leur responsabilité serait totalement imprévisible et serait fonction de nombreuses variables.
En vertu du régime actuel et des limites inadéquates, les tribunaux se sont montrés très sévères envers les propriétaires de navire qui, eux, veulent maintenir ces limites. Ainsi, il est très difficile pour un propriétaire de navire d'évaluer sa responsabilité potentielle.
Avec les limites de responsabilité plus élevées et plus réalistes proposés dans le projet de loi S-4, il sera beaucoup plus facile pour les parties concernées de régler les créances à l'amiable. Les demandeurs n'auront plus à consacrer autant d'efforts et d'énergie à essayer de déroger aux limites, et les propriétaires seront en mesure d'évaluer clairement leur responsabilité potentielle.
Honorables sénateurs, le nouveau régime de limitation de responsabilité en matière de créances maritimes est fondé sur une convention internationale adoptée en 1976 et sur son protocole adopté en 1996. Le protocole de 1996 à la convention prévoit une nouvelle procédure pour modifier à l'avenir les limites de responsabilité en réponse aux préoccupations soulevées par le passé au sujet de la lourdeur et du coût de la méthode de révision des limites. Il sera maintenant plus facile de modifier les limites prévues dans la convention internationale.
L'esprit de cette disposition innovatrice a été incorporé au projet de loi S-4 pour faire en sorte que la responsabilité prévue dans la Loi sur la marine marchande du Canada conserve tout son poids au fil des ans. Il sera maintenant possible de relever, par décret, la limite de responsabilité prévue dans la loi pour la faire correspondre aux nouvelles limites calculées selon le protocole de 1996.
Les honorables sénateurs savent probablement que le Canada a signé le protocole de 1996 en septembre dernier. Ce protocole constitue une étape majeure dans la modernisation du droit maritime international et nous pouvons dire avec fierté que le Canada est l'un des auteurs de cette mesure. Une fois que le projet de loi S-4 aura été adopté, nous pourrons ratifier officiellement cet important traité.
Avant de passer au second volet du projet de loi S-4, soit la révision du régime de responsabilité et d'indemnisation pour les dommages causés par la pollution, je signale que le régime de limitation de la responsabilité en matière de créances maritimes s'applique à tous les navires, y compris les bateaux de plaisance. La navigation de plaisance accuse, et de loin, le taux le plus élevé d'accidents causant des blessures graves et des pertes de vie. Il est donc important d'adopter le projet de loi S-4 le plus rapidement possible pour pouvoir adopter la règle de la responsabilité dans les cas de demandes d'indemnisation consécutives à des accidents maritimes, plus particulièrement dans les cas d'accidents impliquant des bateaux de plaisance où des personnes ont été blessées ou tuées.
(1600)
Le projet de loi S-4 relèvera la limite de responsabilité des propriétaires de bateaux de plaisance et améliorera donc considérablement la situation des victimes dans l'avenir.
Dans le cas des accidents impliquant des bateaux de plaisance, le projet de loi porte de 140 000 $ à 1,5 million de dollars la limite de la responsabilité en cas de perte de vie ou de blessures corporelles. Cette nouvelle limite sera plus conforme à celle qui est déjà en vigueur depuis longtemps à l'égard des accidents de la route.
Honorables sénateurs, comme je le disais à l'étape de la deuxième lecture, les nouvelles limites ne devraient pas provoquer de hausses importantes des primes d'assurances pour les bateaux de plaisance, pas plus que pour les bateaux commerciaux. Les représentants de compagnies d'assurances qui ont comparu devant le comité sénatorial permanent des transports et des communications ont clairement dit que l'adoption du projet de loi S-4 n'entraînerait pas de hausses marquées des primes d'assurances pour les propriétaires de bateaux au Canada.
Le second volet du projet de loi S-4 porte révision du présent régime de responsabilité des propriétaires de bateaux pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures. La dernière révision de ce régime remonte à 1989, lorsque le Canada a mis en oeuvre la Convention internationale de 1969 sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures et la Convention internationale de 1971 portant création d'un fonds international d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures. Le Canada était alors devenu participant au régime international d'indemnisation et de responsabilité pour les dommages dus à la pollution causée par des pétroliers.
La convention de 1969 établit la responsabilité des propriétaires de pétroliers chargés pour les dommages dus à la pollution par des hydrocarbures, tandis que la convention de 1971 prévoit une indemnisation complémentaire applicable aux cas où la protection assurée par la convention de 1969 se révèle insuffisante.
Les conventions de 1969 et de 1971 ont été mises à jour en 1992 lorsque les protocoles ont été adoptés sous les auspices de l'Organisation maritime internationale. Aux termes des protocoles de 1992, le montant d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les pétroliers est passé de 120 millions de dollars par incident à environ 270 millions par incident.
Plusieurs autres modifications ont été apportées par l'intermédiaire des protocoles de 1992 pour améliorer les conventions originales. Les propriétaires de navires sont maintenant responsables du coût de mesures raisonnables pour remettre en état l'environnement endommagé par un déversement d'hydrocarbures. Le champ d'application géographique de la convention inclura désormais la zone économique exclusive du Canada, qui s'étend à 200 milles nautiques de la côte. Les protocoles incluent dans la convention les créances relatives aux mesures préventives prises avant un déversement pour empêcher ou minimiser les dommages dus à la pollution. En outre, les protocoles prévoient une nouvelle procédure simplifiée pour modifier les limites de la responsabilité. Enfin, la convention, qui s'appliquera maintenant aussi aux pétroliers vides, renferme des dispositions visant plus particulièrement le voyage suivant le voyage pendant lequel un pétrolier transportait des hydrocarbures.
La nouvelle mesure législative mettra en oeuvre les dispositions des protocoles de 1992, ce qui augmentera l'indemnité des créanciers canadiens, qu'ils soient privés ou publics, pour les dommages futurs dus à la pollution par les hydrocarbures. Comme pour le régime de limitation de la responsabilité en matière de créances maritimes prévu dans la partie IX de la Loi sur la marine marchande du Canada, il sera désormais possible d'accroître par décret les limites de la responsabilité pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures.
L'adoption du projet de loi S-4 permettra au Canada de suivre l'exemple de nombreux autres pays qui ont adopté rapidement le régime de 1992 et qui, par conséquent, ont décidé en mai 1997 de se retirer de l'ancien régime, décision qui entrera en vigueur en mai 1998.
Il est donc crucial pour nous d'adopter le projet de loi S-4 sans plus tarder. Au mois de mai prochain, le Canada deviendra l'un des principaux membres de l'ancien régime. Sans avoir droit à des indemnités plus élevées, nous pourrions voir nos cotisations au fonds international augmenter, en raison du nombre réduit d'adhérents à l'ancien régime.
Honorables sénateurs, le projet de loi S-4 représente une étape importante vers la modernisation de notre législation. Il nous permettra de veiller à respecter les exigences du Canada dans le domaine de la responsabilité des propriétaires de navires, en particulier pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures.
Au nom du gouvernement, je remercie sincèrement le comité sénatorial permanent des transports et des communications. Pendant les audiences que le comité a tenues au sujet du projet de loi S-4, des groupes industriels ont exprimé leur appui général à la mesure législative. Le comité a également tenu compte des préoccupations formulées par l'industrie et a proposé un amendement qui rend le projet de loi S-4 acceptable aux yeux de toutes les parties intéressées.
Nous sommes donc saisis d'un projet de loi qui augmentera considérablement la somme des indemnités que pourront toucher les créanciers canadiens, qu'ils soient privés ou publics, pour les créances maritimes en général et plus spécifiquement pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures. J'exhorte tous les honorables sénateurs à appuyer le projet de loi avec les amendements proposés par le comité sénatorial permanent des transports et des communications.
Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
(La motion est adoptée et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)
La Loi électorale du Canada
Dépôt du rapport du comité des affaires juridiques et constitutionnelles sur l'examen des projets de règlements en conformité avec la Loi référendaire
Permission ayant été accordée de revenir à la présentation de rapports de comités permanents ou spéciaux:L'honorable Lorna Milne, présidente du comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, dépose le cinquième rapport du comité concernant les projets de règlements conformément aux paragraphes 7(6) et 7(7) de la Loi référendaire.
Le Code criminel
La Loi d'interprétation
Projet de loi modificatif-Rapport du comité
L'honorable Lorna Milne, présidente du comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, présente le rapport suivant:Le mardi 16 décembre 1997
Le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a l'honneur de présenter son
SIXIÈME RAPPORT
Votre comité, auquel a été déféré le projet de loi C-16, Loi modifiant le Code criminel et la Loi d'interprétation (arrestation et entrée dans les habitations), a, conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 11 décembre 1997, étudié ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.
Respectueusement soumis,
La présidente,
LORNA MILNE
(Sur la motion du sénateur Carstairs, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)
Projet de loi sur l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada
Deuxième lecture
L'ordre du jour appelle:Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Kirby, appuyé par l'honorable sénateur Joyal, c.p., tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-2 constituant l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada et modifiant le Régime de pensions du Canada, la Loi sur la sécurité de la vieillesse et d'autres lois en conséquence.
L'honorable Erminie J. Cohen: Honorables sénateurs, j'interviens aujourd'hui pour participer au débat sur le projet de loi C-2. Étant donné que j'ai consacré la majeure partie des deux dernières années à travailler pour les gens pauvres et défavorisés du pays et à me renseigner à ce sujet, je ne peux m'empêcher de vous faire part de mes craintes quant aux changements proposés visant l'un des principaux volets de notre filet de sécurité sociale, notre cher régime de pensions public.
Depuis leur création dans les années 20, les régimes de pensions publics, comme le Régime de pensions du Canada et la Sécurité de la vieillesse, ont joué un rôle fondamental dans la vie des Canadiens. Au cours des années, ils se sont améliorés, la couverture s'est étendue et les prestations ont augmenté. Ce régime est le seul qui soit pleinement indexé, assurant ainsi que les prestations suivront le rythme d'augmentation du coût de la vie.
(1610)
Honorables sénateurs, le projet de loi dont nous sommes saisis réduira les prestations des futurs retraités tout en accroissant les cotisations que les Canadiens doivent verser. Le projet de loi C-2 sera à son tour suivi l'an prochain d'une mesure législative visant à remplacer la Sécurité de la vieillesse et le Supplément de revenu garanti par la nouvelle prestation aux aînés.
Les deux mesures toucheront durement les femmes en particulier. La plupart des femmes qui sont sur le marché du travail gagnent un tiers de moins que les hommes. Alors que l'ensemble des travailleurs seront durement touchés par l'augmentation des cotisations au Régime de pensions du Canada, ceux qui gagnent moins le seront encore plus durement.
Prenons le cas de Marie, une mère seule de deux enfants qui gagne 30 000 $. Malgré tous les efforts que les divers organismes gouvernementaux déploient pour percevoir la pension alimentaire que lui doit son ex-mari, elle a du mal à joindre les deux bouts. Elle n'a donc pas de quoi payer les 530 $ de plus par année au titre du RPC qu'elle devra absorber d'ici l'an 2003 à cause de ce projet de loi. Honorables sénateurs, ce montant de 530 $, c'est à peu près ce qu'elle doit consacrer chaque automne à l'achat de vêtements et de chaussures pour la rentrée scolaire, ainsi que des habits d'hiver et des bottes. Le fait est que les femmes survivent aux hommes. C'est précisément cela qui explique que bien des femmes finissent leurs jours dans la pauvreté.
Au cours des huit prochaines années, les modifications apportées à la façon de calculer la prestation au survivant se traduiront par un manque à gagner d'environ 200 $. Dans le cas des femmes qui touchent la prestation au survivant et une pension, ces modifications signifieront pour elles 500 $ en moins.
Les femmes qui travaillent à domicile sont moins nombreuses à être dotées d'un autre régime de retraite que le RPC. En effet, 57 p. 100 des femmes n'ont pas d'autre régime de retraite, tandis que ce n'est le cas que de 50 p. 100 des hommes. Les femmes comptent donc sur le RPC, honorables sénateurs. Or, la réduction proposée des prestations aura des effets très négatifs sur elles.
Un grand nombre de femmes finissent leurs vieux jours dans la pauvreté. Tantôt, c'est parce qu'elles ont gagné moins que les hommes leur vie durant; d'autres fois, c'est parce qu'elles ont perdu leur pension au décès de leur mari. En 1995, 472 000 femmes âgées vivaient au-dessous du seuil de pauvreté. La réduction des prestations versées au titre du RPC ne fera pas baisser ces chiffres, pas plus que la réduction prévue de la prestation de décès de 3 800 $ à 2 500 $, alors que les veuves auront moins d'argent au moment même où elles en ont le plus besoin.
Pour de nombreuses femmes âgées mariées, la prestation de Sécurité de la vieillesse constitue le seul chèque qu'elles reçoivent à leur nom. Elles n'ont pas travaillé sur le marché du travail et n'ont pas de Régime de pensions du Canada. Le chèque de Sécurité de la vieillesse est bien à elles. Il donne à de nombreuses femmes une certaine indépendance qu'elles n'auraient pas autrement. Si la prestation aux aînés entre en vigueur comme proposé, de nombreuses femmes n'auront plus droit à cette prestation mensuelle.
De nombreux aspects de ce projet de loi vont avoir des répercussions négatives injustes sur les pauvres. À l'heure actuelle, les travailleurs ne paient pas de cotisations sur la première tranche de 3 500 $ de gains. Jusqu'à cette année, le montant était indexé et montait avec le salaire moyen. Le projet de loi propose de désindexer ce montant et ainsi, dorénavant, pour toujours, seuls les premiers 3 500 $ de rémunération ne seront pas assujettis aux cotisations du RPC.
On a calculé que mettre fin à l'indexation de cette exemption de base revient à faire passer le taux de cotisation non pas à 9,9 p. 100, mais à 11,3 p. 100. Si les salaires augmentaient au même rythme qu'a prévu l'actuaire en chef lorsqu'il a conseillé le gouvernement au sujet des taux de cotisation, cette exemption serait alors de 5 300 $ en l'an 2006. Le coût du gel de cette exemption est d'environ 90 $ par année, ce qui n'est pas une grosse somme pour vous et moi, mais en est une pour un Canadien à faible revenu.
Honorables sénateurs, la phase I des modifications au Régime de pensions du Canada n'est que la pointe de l'iceberg. La phase II viendra l'année prochaine, lorsque le gouvernement présentera enfin son projet de loi sur la prestation aux aînés. À moins qu'il ne soit fondamentalement modifié avant d'être présenté au Parlement, le débat sur les modifications au Régime de pensions du Canada ne sera rien par rapport à celui qui aura lieu sur la prestation aux aînés.
Chaque camp établit déjà ses positions, alors que les experts et des associations allant de l'Institut canadien des actuaires à l'Association canadienne des retraités expriment des réserves. Dans une analyse publiée en juin dernier, l'Association canadienne des retraités a souligné plusieurs problèmes que posait la proposition. Tout d'abord, on a signalé que, même s'ils décident de demeurer dans le présent régime, les pensionnés actuels pourraient perdre jusqu'à 2 000 $ par année à la suite de l'élimination de leurs crédits d'impôt sur le revenu au titre de l'âge et du revenu de pension. Deuxièmement, il est à peu près impossible pour les personnes âgées seules, plus particulièrement les femmes, d'échapper à la pauvreté en raison de la nouvelle structure de récupération.
Le troisième point se rapporte aux nouvelles politiques fiscales. J'estime que, dans le système fiscal canadien, les pauvres doivent déjà verser une part injuste de leurs revenus en impôt. Le nouveau système viendra alourdir ce fardeau et pénaliser davantage les aînés pauvres ou à revenu moyen. Dans son rapport, l'Association canadienne des individus retraités fait valoir ce qui suit:
À cause de la récupération, ils perdent un revenu qui est exempt d'impôt, mais ils continuent à être imposés sur tout revenu gagné. Dans la vraie vie, cela s'appelle de la double imposition, même si cela ne correspond pas jusque dans les moindres détails à la définition technique formulée par le ministère des Finances.
Honorables sénateurs, la majoration proposée de 10 $ par mois, ou 120 $ par année, des prestations aux aînés ne serait de presque aucune utilité pour les retraités pauvres. Elle permettrait cependant au gouvernement de déclarer que 75 p. 100 des personnes âgées vivant seules ou en couple vont recevoir le même montant ou un montant plus élevé. C'est honteux quand on songe que le gouvernement sait pertinemment que de nombreux pensionnés continueront de vivre bien en deçà du seuil de pauvreté.
Par-dessus le marché, l'Association canadienne des individus retraités a calculé que, sous l'effet combiné des changements touchant le RPC et la prestation pour aînés, les aînés vont se retrouver non pas 10 $ plus riches à la fin du mois, mais 2 $ plus pauvres qu'ils ne le sont actuellement.
Honorables sénateurs, le gouvernement essaie de faire passer la prestation pour aînés pour une amélioration par rapport au système actuel, mais l'organisme qui représente les aînés, l'Association canadienne des individus retraités, affirme que celui-ci laisse foncièrement à désirer en ce sens qu'il viendra ajouter aux difficultés actuelles des plus pauvres d'entre nos aînés. L'association réclame à la fois une prestation de base plus généreuse et la récupération d'un montant moindre. Quand nous verrons enfin le projet de loi, l'an prochain, nous verrons si le gouvernement est à l'écoute.
Honorables sénateurs, l'Association canadienne des individus retraités n'est pas la seule à exprimer des inquiétudes. En juillet dernier, Fred Thompson, Malcolm Hamilton et Robert Brown, de l'Institut canadien des actuaires, ont tenu à Toronto un briefing média pour attirer l'attention sur ce qui n'allait pas avec la prestation pour aînés. Ils ont fait valoir qu'une lacune importante que présente le projet est le fait qu'il découragera les Canadiens à revenu moyen ou faible d'épargner en prévision de la retraite puisque toute somme mise de côté sera déduite de l'assistance gouvernementale.
Quand nous parlons de modifier les prestations versées à nos aînés, nous devons aussi penser aux jeunes d'aujourd'hui, parce qu'ils seront les aînés de demain. Les modifications qui seront apportées, si nous adoptons ce projet de loi, élimineront tout incitatif pour les jeunes Canadiens d'épargner en vue de leur retraite et risqueront même de détruire le REER actuel.
Robert Brown a déclaré ce qui suit:
La prestation aux aînés obligera les Canadiens de la classe moyenne à prendre une décision difficile. Vont-ils épargner en vue de la retraite et se rendre inadmissibles à l'aide gouvernementale, ou se dispenser d'épargner en vue de la retraite et se fier au gouvernement?
Malcolm Hamilton a ajouté:
[...] si mon revenu familial était inférieur à 45 000 $, et en toute honnêteté, même s'il atteignait 60 000 $, je n'investirais pas dans un REER si la prestation pour aînés devait entrer en vigueur.Honorables sénateurs, l'Association canadienne de l'immeuble a joint les adversaires à la prestation des aînés qui est proposée. Ses représentants ont exprimé des préoccupations que ressentent non seulement leurs membres, mais tous les Canadiens qui préparent leur retraite en investissant dans des REER et d'autres systèmes privés. Dans une analyse rédigée une fois que les détails ont été rendus publics, ils ont fait remarquer que la prestation pour aînés:
[...] aura des répercussions profondes sur les Canadiens qui ont économisé en vue de leur retraite. Elle aura pour effet de lever un taux effectif d'imposition très élevé aux aînés qui touchent un revenu autre que la prestation pour aînés.Avant de terminer, je voudrais mentionner d'autres moyens par lesquels le gouvernement a miné les régimes enregistrés d'épargne-retraite. Il a d'abord gelé les cotisations aux REER à un bas niveau, puis il a abaissé l'âge auquel les Canadiens doivent convertir leurs REER, le faisant passer de 71 à 69 ans.
Le projet de loi C-2 m'inquiète profondément. En tant que gouvernement, nous devrions encourager les Canadiens à préparer leur retraite, pas les décourager ni leur mettre des bâtons dans les roues. J'ai trouvé excitant d'entendre le gouvernement dire qu'avec cette nouvelle initiative, peu de nos chers aînés finiront leur vie dans la pauvreté. Mon excitation a été de courte durée. Je crains que les modifications proposées ne soient pas ce qu'elles semblent, puisque la plupart d'entre nous payerons beaucoup plus pour beaucoup moins.
(1620)
L'honorable Marjory LeBreton: Honorables sénateurs, les Canadiens se préoccupent naturellement du Régime de pensions du Canada, étant donné surtout que le moment approche rapidement où les membres de la génération dite du «baby-boom» atteindront l'âge de la retraite. Je tiens à dire bien clairement que nous, de ce côté-ci du Sénat, et le Parti progressiste-conservateur estimons que le Régime de pensions du Canada est un élément fondamental du filet de sécurité sociale.
Il importe que chaque parti politique propose des choix clairs et compréhensibles aux Canadiens. Il ne suffit pas de s'opposer pour le plaisir de s'opposer, de se contenter de dire que nous nous opposons à telle ou telle disposition. La mesure à l'étude aura une telle incidence sur la vie des Canadiens que nous devons faire connaître clairement notre position à l'égard du projet de loi.
Nous représentons au Sénat, dans ce débat, une opposition solide à certains aspects du projet de loi - pas une opposition obstructionniste, mais plutôt une opposition constructive.
Lorsque le projet de loi a été présenté à l'autre endroit, notre chef et notre caucus ont consenti de bonne foi à ce qu'il soit approuvé en deuxième lecture et renvoyé au comité pour qu'on en examine soigneusement le pour et le contre et pour que des témoins puissent se faire entendre devant le comité des Communes afin que l'on comprenne bien l'impact de cette mesure. On supposait que le gouvernement écouterait - vous savez tous à quel point on peut être déçu quand on suppose quelque chose. Nous avions tort. Le gouvernement n'a pas écouté. Il ne s'en est pas donné la peine. Il n'a même pas fait attention.
Il faut que les Canadiens sachent que le gouvernement est en train de faire accepter cette mesure de force au Parlement, en se fichant des conséquences.
On pourrait raisonnablement se demander pourquoi. Il y a une raison à cela, qui correspond parfaitement à la façon dont le gouvernement mène ses affaires. C'est qu'il essaie de faire adopter cette mesure avant que les Canadiens ne se rendent vraiment compte de ce qui les a frappés. Le gouvernement a imposé la clôture à deux reprises au débat sur ce projet de loi à l'autre endroit et a tenté d'en faire autant ici au Sénat. Voilà ce qu'on appelle de la démocratie. Voilà ce qu'on appelle de la transparence. Voilà ce qu'on appelle de la responsabilité. Voilà ce qu'on appelle de l'honnêteté et de l'intégrité.
Pour les Canadiens, cette mesure représente une ponction de 11 milliards de dollars au sein de notre économie. En l'espace de six petites années, le gouvernement aura littéralement subtilisé 11 milliards de dollars dans l'économie canadienne, tout simplement en augmentant les charges sociales, c'est-à-dire en haussant les cotisations de 73 p. 100. Or, notre économie est déjà privée de 12 à 13 milliards de dollars, par le biais des charges sociales et des cotisations à l'assurance-emploi.
Dans une démocratie comme la nôtre, il importe que chaque parti politique fasse connaître sa position. On aurait pensé que le Parti réformiste, à titre d'opposition officielle dans l'autre endroit, se serait senti obligé non seulement de s'opposer à cette mesure législative, mais aussi d'exposer ses propres idées. C'est ce qu'une opposition efficace est censée faire. Pourtant, ce que les réformistes ont fait valoir n'avait rien d'une véritable politique et ne reflétait absolument pas les besoins des Canadiens.
Les réformistes ont parlé d'avoir recours à des dispositions spéciales. Toutefois, ils ont oublié un problème important. Il y a maintenant un passif de 600 milliards de dollars dans le RPC. La solution des réformistes est d'éliminer le RPC, de l'oublier. Quelle belle politique! Ils voudraient que l'on oublie les Canadiens qui sont vieux et malades et qu'on leur retire le droit à des prestations, même s'ils ont versé de l'argent dans le régime. Bel exemple d'idéologie poussée jusqu'à l'absurde. C'est cela l'opposition officielle dans l'autre endroit. En fait, la position du Parti réformiste sur le RPC a miné le débat. Les réformistes n'ont joué aucun rôle. Pire encore, ils n'ont offert aucune solution de rechange.
Mon parti, le Parti progressiste-conservateur, est de toute évidence préoccupé par cette mesure législative. Je répète que nous, de ce côté-ci, convenons que le RPC doit être modifié de façon à continuer d'exister. Il faut faire en sorte que ce régime repose sur des bases solides. Nous convenons aussi, bien qu'à regret, qu'il est nécessaire d'augmenter les cotisations. Toutefois, notre position diffère de celle du gouvernement en ce sens que cette importante hausse des cotisations devrait s'accompagner de réductions fiscales compensatoires, particulièrement à l'égard d'autres charges sociales telles que les cotisations à l'assurance-emploi. Le RPC doit obtenir le financement nécessaire sans alourdir le fardeau fiscal personnel des Canadiens. Nous ne pouvons continuer à alourdir ce fardeau. Les Canadiens sont en train d'être écrasés par les impôts.
Il y a un point important qu'il convient de garder présent à l'esprit relativement aux charges sociales. Celles-ci représentent la forme d'imposition la plus préjudiciable pour les emplois, particulièrement dans le cas des plus vulnérables dans notre société, c'est-à-dire les femmes, les Canadiens à faible revenu et les jeunes. Ce sont eux qui sont les plus touchés par la hausse des charges sociales, qu'il s'agisse des cotisations au RPC ou à l'assurance-emploi.
Nous proposons également une modification de l'exemption annuelle de base. Le gouvernement gèle cette exemption à 3 500 $, au détriment encore une fois des plus vulnérables de la société. Qui sont ceux qui sont les plus touchés par ce gel? Les travailleurs à temps partiel, les étudiants, les femmes, les travailleurs à faible revenu.
Mes collègues de l'autre endroit ont demandé une révision de cette exemption. Le gouvernement les a-t-il écoutés? Non, il a rejeté cette modification très constructive qui aurait constitué un allégement pour les travailleurs à faible revenu.
C'est une ponction fiscale, purement et simplement. Nous avons proposé au gouvernement de compenser la hausse des cotisations au RPC en réduisant les cotisations à l'assurance-emploi au cours des trois prochaines années. Nous avons obtenu la même réponse: non.
L'actuaire en chef du fonds d'assurance-emploi du Canada a dit que le fonds pourrait fort bien être maintenu si les cotisations se situaient entre 2 $ et 2,20 $ au lieu d'être ramenées à 2,70 $, la réduction fort modeste qui vient tout juste d'être annoncée.
Nous avons également proposé un autre amendement qui forcerait le gouvernement à rappeler le Parlement si les cotisations passaient à 10,25 p. 100. Ces dernières devraient maintenant augmenter de 9,9 p. 100. Le gouvernement nous a-t-il écoutés? Veut-il qu'il y ait un débat? Non. Encore une fois, c'est non.
Notre parti a proposé de plus de supprimer la règle sur les investissements étrangers. Le Canada représente environ 3 p. 100 du marché boursier mondial. Le gouvernement plafonne à 20 p. 100 les investissements étrangers. Il s'agit ici de l'argent des Canadiens. Ces derniers devraient pouvoir obtenir le meilleur rendement possible sur leurs investissements.
Qu'en est-il du RPC? Dans 15 ans, ce fonds, selon la plupart des estimations, disposera de quelque 150 milliards de dollars à investir. Comment obtiendrons-nous le meilleur rendement sur ces investissements si les investisseurs ne peuvent placer leur argent là où le rendement est le plus élevé?
Bien sûr, des changements très importants s'imposent pour ce qui est de la responsabilité et de la transparence. Ce sont là des questions très importantes. Pour que la crédibilité soit rehaussée, pour que les personnes chargées d'administrer le fonds aient de la crédibilité auprès de la population canadienne, il importe que ce fonds soit transparent. Il faut créer un fonds d'investissement qui soit indépendant du gouvernement, comme cela se fait ailleurs. Le Régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l'Ontario est un modèle à suivre.
Nous avons été constants sur tous ces points qui faisaient partie de notre programme au cours des dernières élections. Il faut manifestement hausser les cotisations, mais il faut aussi compenser ces hausses par des baisses de l'impôt et des cotisations à l'assurance-emploi. Nous estimons qu'il faut créer un office indépendant pour l'investissement des fonds qui soit vraiment indépendant et transparent. Il ne faut pas créer une nouvelle ponction fiscale de 11 milliards de dollars, un tueur d'emplois dans notre économie. J'exhorte le gouvernement à ne pas perdre de vue le fait que 9,1 p. 100 des Canadiens sont sans emploi, y compris beaucoup de jeunes.
L'honorable Ethel Cochrane: Honorables sénateurs, je tiens à présenter quelques observations au sujet du projet de loi C-2. Comme la plupart des Canadiens, je veux bien reconnaître qu'il faut s'assurer que le Régime de pensions du Canada repose sur un fondement financier solide, mais je ne suis pas persuadée que les mesures proposées dans ce projet de loi constituent la meilleure façon d'y arriver.
Les sénateurs connaissent bien les nombreuses critiques dont ce projet de loi a fait l'objet. Il va imposer des hausses rapides des charges sociales aux employeurs et aux employés au cours des prochaines années. Comme nous, de ce côté-ci du Sénat, l'avons dit maintes fois, cela devrait être compensé par des réductions importantes des cotisations à l'assurance-emploi. Le fardeau sera particulièrement lourd pour les travailleurs autonomes, qui représentent une proportion de plus en plus grande de la main-d'oeuvre active.
Vous savez que ces questions, notamment, préoccupent beaucoup tous les Canadiens. Je ne vais pas insister là-dessus. Je suis fermement persuadée qu'il serait dans l'intérêt supérieur du gouvernement et du peuple canadiens qu'on accorde une certaine attention aux nombreuses propositions constructives qui ont été faites de ce côté-ci du Sénat.
Nous ne cherchons pas simplement à nuire aux délibérations sur ce projet de loi. Nous nous efforçons d'améliorer le projet de loi C-2 et l'administration du Régime de pensions du Canada.
(1630)
Dans le temps qu'il me reste, je voudrais faire remarquer aux sénateurs deux autres problèmes inhérents au projet de loi C-2 et auxquels on a accordé fort peu d'attention. Le premier problème, ce sont les dispositions du projet de loi sur l'exemption annuelle de base et le maximum des gains ouvrant droit à pension. L'exemption de base sera bloquée à son niveau actuel, 3 500 $, tandis que le maximum des gains ouvrant droit à pension, qui est maintenant de 35 800 $, continuera de progresser avec le salaire moyen. Cela veut dire qu'une proportion encore plus forte de nos revenus donnera lieu au versement de cotisations au RPC. Les plus pénalisés seront les travailleurs à faible revenu, car, tandis que leurs gains demeureront inférieurs au maximum, la valeur de leur exemption sera grugée par l'inflation. Il me semble évident que si le maximum des gains donnant lieu au versement de cotisations continue d'augmenter, l'exemption de base doit être relevée au même rythme.
Le deuxième problème que je voudrais signaler est la réduction proposée de la prestation de décès. Actuellement, son maximum est de 3 580 $, mais le projet de loi C-2 la ramène à 2 500 $.
Honorables sénateurs, cela vous semble peut-être un détail, mais je puis vous dire que cela compte beaucoup, au contraire. Cet argent qui est versé à la succession d'un prestataire du RPC pour payer les frais funéraires et autres est la seule source de revenu qui permet à beaucoup de familles à faible revenu de payer ces frais. J'ai vu cela de mes propres yeux.
Le projet de loi C-2 augmente le coût du régime pour les travailleurs et réduit les prestations de retraite. N'est-ce pas déjà assez cruel sans ajouter à cela une menace au bien-être des familles après le décès du prestataire?
Cette disposition du projet de loi C-2 équivaut également à une lourde ponction fédérale qui durera jusque dans le prochain siècle. Encore une fois, 1 000 $, ce n'est peut-être pas grand-chose, mais considérez qu'il y a une trentaine de millions de Canadiens. Évidemment, tous ne font pas partie de la population active. Ils sont bien trop nombreux, surtout dans ma province, ceux qui sont réduits au chômage. Il y a aussi beaucoup d'enfants. Cependant, le gouvernement dit au moins qu'il essaie de stimuler la création d'emplois, et nous pouvons raisonnablement supposer que la plupart, sinon la totalité des enfants actuels grandiront et deviendront les travailleurs de demain.
Dans l'avenir, ces jeunes s'intégreront à la population active et verseront des cotisations au Régime de pensions du Canada. La réduction de la prestation de décès représentera 1 080 $ de moins dans la succession de tout homme, femme ou enfant canadien. Il s'agit, honorables sénateurs, d'une ponction de 30 milliards de dollars qui est enterrée - vous me pardonnerez l'expression - dans la disposition du projet de loi C-2 prévue à cet égard.
Honorables sénateurs, le ministre des Finances ne se contente pas d'augmenter considérablement les charges sociales. Il veut aussi piller nos tombes.
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je dois informer le Sénat que si l'honorable sénateur Kirby prend maintenant la parole, son discours aura pour effet de clore le débat sur ce projet de loi à l'étape de la deuxième lecture.
L'honorable Michael Kirby: Honorables sénateurs, je prends la parole pour répondre aux observations que les sénateurs d'en face ont faites au sujet du projet de loi C-2. Les sénateurs conservateurs ont essentiellement fait valoir trois arguments par rapport au projet de loi, et je pense qu'il serait utile que je parle brièvement des trois.
Le premier argument est celui selon lequel le projet de loi C-2 constitue une ponction fiscale. Selon le deuxième argument, le projet de loi accable très lourdement les générations futures ou, si vous préférez, il permet un énorme transfert de fonds entre générations, de Canadiens qui sont actuellement jeunes à d'autres qui ont déjà plus de 65 ans ou qui les auront sous peu. Le troisième argument concerne les dispositions liées à la gestion et l'obligation de rendre compte de l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada dont le projet de loi C-2 prévoit la création.
Permettez-moi d'abord de parler de l'argument selon lequel le projet de loi constitue - comme l'ont dit quelques intervenants cet après-midi et plusieurs à la fin de la semaine dernière - une ponction fiscale massive. Précisons que, contrairement à ce qu'ont prétendu les sénateurs d'en face, les cotisations au RPC ne sont pas une charge sociale. De toute évidence, elles ne sont absolument pas un impôt. En fait, elles sont une cotisation à un régime de pension. Dire qu'une cotisation au RPC est une forme d'impôt, c'est dire que toute cotisation à un régime de pension est un impôt. C'est une façon tout à fait erronée de décrire les cotisations à des régimes de pension.
En ce qui a trait aux taux de cotisation, nos vis-à-vis ont très soigneusement pris garde de ne pas tenir compte du fait que le RPC dans sa forme actuelle ne peut survivre selon tous les calculs actuariels. Il est clair qu'il ne peut pas continuer d'exister dans sa forme actuelle et au taux actuel des cotisations. Il fallait modifier les taux de cotisation.
Comme les témoignages entendus par le Sénat l'ont révélé, le Régime de pensions du Canada a un déficit actuariel de 600 milliards de dollars. Cela signifie que, si nous ne changeons pas le taux des cotisations et continuons de payer les prestations dues aux prestataires, le régime accumulera un sérieux déficit avec le temps.
Nos vis-à-vis n'ont pas essayé d'expliquer comment il fallait régler le problème. Ils n'ont pas non plus mentionné le fait que les défauts du régime existent depuis longtemps. En fait, pendant neuf ans, le gouvernement conservateur a refusé de s'attaquer au problème. Plusieurs centaines de milliards de dollars se sont ajoutés au déficit actuariel du RPC pendant le gouvernement Mulroney.
Cela ne veut pas dire qu'aucun déficit ne s'est accumulé sous une administration libérale. Il y en a eu, bien sûr. Tout ce que je dis, c'est que, lorsque l'on parle d'un problème de fonds publics, il faut avoir la décence d'admettre qu'il y a un problème et qu'il faut y apporter une solution. Il faut reconnaître en outre que l'on ne peut pas faire porter à un gouvernement en particulier, ni au gouvernement actuel, ni aux gouvernements précédents, l'entière responsabilité de ce problème.
Quelle conclusion dois-je tirer du refus de mes vis-à-vis de s'attaquer au problème des 600 milliards de dollars qui nous assaillira inévitablement un jour? La seule conclusion raisonnable, c'est que mes vis-à-vis croient que, le jour où la caisse manquera d'argent, il faudra couper les pensions de vieillesse. C'est la seule interprétation plausible que je peux donner à leur refus d'apporter une solution à la situation financière lamentable dans laquelle se trouve le régime aujourd'hui.
La dernière chose que Robert Stanfield - un conservateur de gauche bien connu de ma région - aurait faite, c'est de soutenir que le Régime de pensions du Canada devrait cesser de payer des pensions de vieillesse. La dernière chose que voudraient les vrais conservateurs de gauche, c'est éliminer certaines des prestations qui sont les plus utiles aux Canadiens dans le besoin. Il me semble plutôt, honorables sénateurs, que les sénateurs progressistes-conservateurs d'en face sont clairement devenus le «Parti réformiste-conservateur». Ils ne se préoccupent vraiment plus des Canadiens qui ont le plus besoin d'aide.
(1640)
Un des principes sur lesquels est fondé notre pays a toujours été la volonté des Canadiens de redistribuer le revenu des mieux nantis à ceux qui le sont moins, à la fois sur le plan régional et sur le plan individuel. Le refus total des sénateurs d'en face de s'attaquer au problème du déficit actuariel et le fait qu'ils parlent d'une razzia fiscale montrent bien qu'ils ont clairement abandonné le principe selon lequel les Canadiens qui ont un revenu devraient verser une partie de ce revenu pour aider ceux qui n'en ont pas.
C'est triste de penser que les sénateurs d'en face et leur parti en sont là, mais je crois que c'est la seule interprétation possible de la position qu'ils ont adoptée à l'égard de cette question.
La deuxième préoccupation des sénateurs d'en face porte sur ce que j'appellerais la question du transfert intergénérationnel. Les sénateurs d'en face estiment que les pensions des personnes âgées devront être payées par les Canadiens plus jeunes, ce qui semble être un désastre.
Honorables sénateurs, depuis que le Régime de pensions du Canada a vu le jour en 1967, les pensions des Canadiens plus âgés ont toujours été payées par les Canadiens qui travaillent. Le revenu gagné par ces derniers a toujours servi à financer les prestations du RPC versées aux personnes âgées. Il n'y a rien de nouveau dans cela. Le RPC est structuré de cette façon depuis qu'il a été institué il y a 30 ans. Je ne comprends vraiment pas pourquoi cela est soudainement devenu si dramatique.
Encore une fois, on ne peut que conclure que les sénateurs d'en face ont décidé qu'ils ne sont plus prêts à appuyer le principe selon lequel les Canadiens qui travaillent doivent soutenir les Canadiens plus âgés au moment de la retraite, après la contribution que ces derniers ont apportée à leur pays. Cette position n'avait jamais été appuyée par un parti politique reconnu dans notre pays jusqu'à ce que l'opposition à l'autre endroit adopte récemment la position selon laquelle il ne devrait pas y avoir une forme de redistribution du revenu des Canadiens qui travaillent à ceux qui sont à la retraite.
Il est tragique que le Parti conservateur ait embrassé la position exprimée par le Parti réformiste, soit que la redistribution n'est pas une bonne chose, que chaque Canadien devrait assurer lui-même sa sécurité financière au moment de la retraite.
Je suis surpris que les conservateurs n'aient pas fait valoir l'idée du REER privé préconisée par le Parti réformiste. Je suppose qu'ils ne voulaient pas le faire parce que c'était une idée des réformistes, mais leurs arguments allaient quand même dans le même sens que ceux des réformistes.
Il est regrettable que le parti que j'ai toujours considéré comme l'autre grand parti politique au Canada s'écarte de la notion selon laquelle le RPC devrait prévoir une certaine redistribution du revenu des jeunes qui travaillent à l'heure actuelle à leurs concitoyens plus âgés. C'est ainsi que le système a toujours fonctionné et c'est ainsi qu'il devrait fonctionner.
La troisième grande plainte des sénateurs d'en face au sujet de ce projet de loi porte sur les dispositions touchant la régie de l'Office d'investissement du RPC. Les honorables sénateurs seront peut-être surpris d'apprendre que je suis tout à fait d'accord avec la plupart des points soulevés par mes vis-à-vis à ce sujet. Je suis d'accord avec le communiqué de presse publié aujourd'hui par le chef de l'opposition, l'honorable sénateur Lynch-Staunton, dans lequel il parle des questions de régie et d'obligation de rendre des comptes. Il n'a pas parlé de façon explicite des règles touchant l'investissement étranger dans son communiqué, mais j'aurais été d'accord avec lui là-dessus aussi s'il l'avait fait.
Comment s'assurer qu'un fonds qui va passer à plus de 100 milliards de dollars en cinq ans est comptable envers le public canadien? Ce fonds doit être régi de façon vraiment objective et indépendante et sans ingérence politique.
Je suis très heureux que nos vis-à-vis aient participé aux discussions qui ont amené le ministre des Finances à retarder l'entrée en vigueur des articles 1 à 57 jusqu'à ce que le comité sénatorial permanent des banques et du commerce ait eu l'occasion de les étudier, ainsi que les règlements régissant la politique d'investissement.
Tout cela constitue un progrès important dans le cas de ce projet de loi par rapport à là où nous en étions il y a une semaine. Je félicite mes vis-à-vis pour la position qu'ils ont adoptée là-dessus. J'aurais simplement souhaité qu'ils soient aussi progressistes en ce qui concerne les principes fondamentaux du RPC. Au Canada, on part du principe qu'on va utiliser le revenu des travailleurs canadiens pour aider ceux qui sont plus âgés, qui sont à la retraite et qui ont besoin d'aide. Votre serviteur et d'autres de ce côté-ci n'ont absolument aucun mal à accepter ce principe.
Ainsi, je suis très heureux de proposer la deuxième lecture de ce projet de loi en fonction du principe que nous devons nous assurer que le Régime de pensions du Canada est stable financièrement pour que les générations futures qui ont besoin de ce revenu au moment de leur retraite puissent compter là-dessus. C'est le principe que nous défendons avec ce projet de loi. C'est pourquoi je suis très heureux de demander l'appui de tous les sénateurs à l'étape de la deuxième lecture de ce projet de loi.
L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, l'honorable sénateur accepterait-il de répondre à une question?
Le sénateur Kirby: Bien sûr.
Le sénateur Grafstein: Le comité sénatorial permanent des banques et du commerce peut-il alors examiner la taille du fonds de pension lui-même et voir si on pourrait le diviser en cinq ou six parties régionales?
Le sénateur Kirby: En ce qui concerne la taille du fonds, la réponse est non. La taille cumulative du fonds est établie par les taux de cotisation.
En ce qui concerne la façon de gérer le fonds et la possibilité d'avoir quatre ou cinq gestionnaires pour faire jouer la concurrence, je suppose que toutes ces questions peuvent être étudiées par le comité et feront, en fait, l'objet des audiences du comité au début de la nouvelle année.
[Français]
L'honorable Roch Bolduc: Honorables sénateurs, le sénateur Kirby a fait un brillant discours. Dans la deuxième partie de son discours, il a dit qu'il était normal que ses enfants et les miens nous paient une retraite à partir du fonds auquel nous avons relativement peu contribué et qu'ils en mettent davantage pour s'en procurer une. Est-ce que cela lui paraît correct que nos enfants contribuent non seulement à nous donner une retraite, mais qu'ils contribuent aussi afin que leur retraite soit raisonnable? Ne trouve-t-il pas que la nôtre est trop généreuse par rapport à ce que nous allons demander à nos enfants?
[Traduction]
Le sénateur Kirby: Honorables sénateurs, la question est très intéressante, car elle touche au coeur du problème qui me tracasse.
Lorsque le RPC a été créé, il y avait environ huit travailleurs canadiens pour chaque prestataire du RPC. Nous avions une main-d'oeuvre abondante et un nombre relativement faible de retraités.
Les premières personnes qui ont reçu des prestations du RPC n'avaient rien versé au régime. De façon impartiale, notre pays a décidé que nous allions tenter d'assurer à long terme la sécurité du revenu des Canadiens âgés, qu'ils aient ou non cotisé au fonds. Voilà comment le régime a démarré.
(1650)
En posant sa question, le sénateur Bolduc laisse entendre que ce qu'il était correct de faire en 1967, lorsque le fonds a été créé, et encore en 1987, lorsque son parti était au pouvoir, ne l'est pas en 1997. J'ai du mal à accepter cela. Soit qu'on approuve le principe que les Canadiens âgés recevront l'aide de leurs concitoyens qui travaillent, soit qu'on le rejette. L'honorable sénateur a contribué au revenu de ma mère âgée de 86 ans qui reçoit des prestations du RPC. Il l'a fait pendant toute sa vie active. Je lui en suis reconnaissant. Quelle est la raison pour décider soudainement, en 1997, que nous devons rejeter le principe qui sous-tend le généreux soutien qu'il a accordé à ma mère? Son argumentation va à l'encontre de tous les principes qui sous-tendent le RPC. Voilà pourquoi j'ai du mal à accepter sa position. Ce n'est pas ainsi que fonctionne le RPC. Ce n'est pas ainsi non plus que fonctionne la société canadienne.
[Français]
Le sénateur Bolduc: Il y a une différence entre nos parents et nous. Nos parents ont connu la crise alors qu'il n'y avait pas de sécurité sociale, tandis que nous avons pu bénéficier, par l'entremise de l'État-providence, de la sécurité sociale, de l'éducation et des soins de santé.
[Traduction]
Le sénateur Kirby: Honorables sénateurs, j'adorerais me lancer dans un débat plus long avec le sénateur Bolduc sur la politique sociale et sur l'effet de redistribution. Toutefois, il est en train d'essayer de transformer la discussion en un débat plus large sur la politique sociale, et ce n'est pas le moment. Il pourra sans doute le faire quand le Sénat sera saisi de la question de la prestation aux personnes âgées, au début de l'année prochaine. Je débattrai volontiers de la question à ce moment-là.
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, les deux côtés se sont entendus pour que, si le sénateur Pitfield veut commenter le projet de loi C-2 avant le vote à l'étape de la deuxième lecture, il puisse le faire. Je sais, honorables sénateurs, que c'est hautement inhabituel, mais si le sénateur Pitfield veut commenter le projet de loi C-2 à l'étape de la deuxième lecture, sa seule occasion de le faire est maintenant.
Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?
Des voix: D'accord.
L'honorable P. Michael Pitfield: Honorables sénateurs, je ne suis pas prêt, mais si le Sénat l'accepte, je me ferai un plaisir de le faire.
Honorables sénateurs, puis-je me permettre de dire d'entrée de jeu qu'au milieu des chardons politiques pousse la fleur de l'amitié? Je suis touché par la bonne volonté du Sénat qui accepte d'écouter mes commentaires.
Je tenais à parler de ce projet de loi parce que, dans l'excellent discours qu'il a fait l'autre jour, le sénateur Bolduc nous a rappelé que nous étions en train de créer l'une des institutions les plus importantes et les plus puissantes que ce pays ait jamais connue. Le Sénat n'est pas sans expérience en la matière. Il n'y a pas si longtemps, plusieurs d'entre nous, dont le sénateur Kirby, sous la présidence du sénateur Austin, ont passé pas mal de temps sous un autre gouvernement à essayer de décider s'il fallait privatiser ou démanteler des hordes jusqu'alors innombrables d'organismes, de commissions et de sociétés d'État dont ce gouvernement avait hérité des gouvernements précédents.
Je dois avouer que cette expérience m'a convaincu que ces sociétés étaient beaucoup plus difficiles à administrer qu'il n'était généralement admis, qu'elles étaient en fait très coûteuses et, une fois arrivées à la deuxième génération et aux générations suivantes, d'une instabilité inhérente.
Bref, cette étude réussie et instructive nous fait bien comprendre qu'un gouvernement doit toujours bien savoir ce qu'il veut lorsqu'il s'engage dans cette voie et qu'il devrait toujours respecter rigoureusement les principes de la Constitution applicables à ce type d'organisation. Ce genre d'organisme est caractérisé par une fluidité exceptionnelle, qui permet d'échapper aux systèmes normaux de gouvernement et constitue donc inévitablement une source de graves malentendus et erreurs.
La mise en garde qui ressort de cette étude est valable pour au moins quatre raisons: premièrement, la grandeur et la puissance de l'institution en cause; deuxièmement, l'importance du Régime de pensions pour notre bien-être collectif et individuel; troisièmement, la nouveauté et la portée des règles qui s'écartent implicitement du régime de réclamation normal; et quatrièmement, les résultats obtenus par les gouvernements canadiens successifs avec ce type d'organisme, en particulier lorsqu'ils atteignent les deuxième et troisième générations.
Chacune de ces raisons suffit, en soi, à nous mettre en garde, mais j'ajouterai qu'une fois que le projet de loi aura été adopté il sera à toutes fins utiles impossible de le modifier. Le ministre actuel sera depuis longtemps parti. Les engagements pris se perdront dans la complexité des circonstances. L'incontournable expérience du passé nous apprend que tôt ou tard l'office se dissimulera derrière le secret et qu'à partir du moment de sa création, il se vouera entièrement à sa propre protection.
Certains diront que ce qui compte avant tout, c'est l'indépendance. Ce n'est pas le cas. L'indépendance est justifiée lorsqu'elle est nécessaire, mais ce doit être le cas le moins souvent possible. Le reste du temps, le fonctionnement du gouvernement doit être sans faille et toujours servir la population.
Je crois que nous manquerions à nos obligations si nous n'examinions pas de près le régime proposé par le gouvernement. La question doit être examinée sous deux angles: le premier est la politique proposée, et le second la façon dont elle sera appliquée.
Je ne suis pas un spécialiste de la politique. Toutefois, après avoir lu les documents du ministre et les comptes rendus des débats qui ont eu lieu ici et dans l'autre endroit, je constate que les objectifs de la politique sous-jacente au projet de loi sont très souhaitables et je les appuie dans leur forme actuelle. J'aurais cependant souhaité qu'ils aillent beaucoup plus loin. Je constate que les fonctionnaires ont eu ici l'occasion de faire preuve d'imagination mais qu'ils ne l'ont malheureusement pas fait.
D'autres États et régimes d'épargne ont tracé la voie. Le gouvernement aurait pu laisser aux gens, dans les limites de son plan d'action, une plus grande liberté pour gérer eux-mêmes leur régime de retraite. Cela aurait permis de réduire l'interventionnisme et la responsabilité de l'État tout en laissant plus de latitude aux simples citoyens. Hélas, cette façon de voir les choses dépasse souvent les fonctionnaires. Ce projet de loi le montre clairement. L'attitude générale est que les fonds qui se trouvent dans le régime de pensions n'appartiennent pas vraiment aux cotisants, mais au gouvernement. En règle générale, on estime que le citoyen doit être protégé contre lui-même; les fonctionnaires ont beaucoup de mal à envisager de permettre à un citoyen de courir le risque d'être libre.
(1700)
Ceci dit, est-ce que, au fond, je préfère ce projet de loi, ou pas de projet de loi du tout? Je préfère certes ce projet de loi. Il vaut mieux faire des progrès que ne pas en faire du tout.
Mis à part le principe, le projet de loi lui-même soulève d'importantes questions. C'est une importante mesure. Le sénateur a calculé que, dans dix ans, cette institution aura des actifs de 150 milliards de dollars. Elle sera très importante sur le plan économique et social. Sa portée pourrait dépasser celle de la Banque du Canada et elle pourrait toucher à un plus grand nombre de domaines. Dans un sens, c'est presque un gouvernement que nous sommes en train de créer. Il n'y a qu'à regarder ce qui se passe dans le cas de la Caisse de dépôt et placement pour deviner ce qui nous attend.
Le sénateur Bolduc nous a prévenus de l'énormité de la tâche que représente, en matière de prise de décision et de gestion, cette nouvelle institution que nous sommes en train de créer. Réaliser ces objectifs ne sera certes pas facile. Il est un peu inquiétant de constater à quel point les députés et les commentateurs politiques ont eu tendance à passer sous silence l'importance de la tâche que représente d'abord la création de cette nouvelle institution, ensuite le fait de la faire fonctionner. Je répète que, dans l'un et l'autre cas, la tâche ne va pas être facile, contrairement à ce que les gouvernements, les commentateurs politiques, les conseillers professionnels, les bureaucrates et les politiciens veulent le faire croire.
Par ailleurs, ce que nous appelons cotisations dans le projet de loi C-2 ne sont rien d'autre que des impôts. Le projet de loi C-2 est une importante mesure d'imposition, et cela nous amène à nous demander s'il est vrai que pouvoir de gouverner signifie pouvoir de lever des impôts. Étant donné la façon dont le gouvernement a organisé son travail, ce sera au Sénat de déterminer les répercussions de toute cette affaire.
De même, l'analyse des incidences des autres éléments du projet de loi sera pertinente. Il faudra, avant tout, tenir compte du fait que le projet de loi renferme certains éléments du droit pénal. Cette mesure tient du droit criminel.
Puisqu'il s'agit d'une mesure à la fois fiscale et pénale, et surtout, d'une mesure de contrôle de la bureaucratie de notre système gouvernemental, il me semble important que le comité puisse examiner le projet de loi en détail. Je laisserai donc au comité la tâche d'étudier à fond l'aspect pénal et le volet fiscal du projet de loi et je m'intéresserai pendant un moment au contrôle de la bureaucratie.
Bien que les deux autres volets soient très importants, ce qui m'inquiète avant tout, c'est que le projet de loi dont nous sommes saisis semble proposer un système de reddition de comptes extraordinairement limité et confus. Si tel est le cas, cette lacune est beaucoup plus fondamentale que toutes les autres réunies.
Je ne prétends pas être un expert en matière de droit et de pratique de la reddition de comptes, mais j'ai eu l'occasion de m'intéresser à ce sujet au cours de ma carrière. En fait, de toutes les idées qui sous-tendent les grandes institutions de notre société, je crois, et j'ai constaté, qu'aucune n'est plus cruciale que la responsabilité.
L'obligation de rendre des comptes est un ingrédient essentiel de tous nos systèmes de gouvernement - la gestion, la justice et la démocratie elle-même. Supprimez l'obligation de rendre compte et il ne reste rien qu'une charpente vide, rien que l'espoir, que le rêve de ce qui aurait pu exister.
L'obligation de rendre compte est aussi vitale en affaires qu'au sein du gouvernement. Elle instaure, dans ces deux secteurs, la discipline nécessaire, l'incontournable nécessité de faire face à la réalité, de voir que nos gestes comptent, que les résultats sont importants, que la vérité est essentielle, que l'excellence triomphe et que tout ce qui n'est pas conforme à ces valeurs est intolérable.
Je ne pratique plus le droit dans ce domaine, mais j'aborde cette question parce que, en lisant les dispositions du projet de loi, j'ai été troublé de voir si peu d'intérêt pour la responsabilité. À qui pourra-t-on s'adresser lorsque cette bête que nous créons commencera à gronder? Quel ministre est responsable et quelles mesures seront prises? Que saura le Parlement et que pourra-t-il dire? Est-ce que quelqu'un écoutera? Lisez le projet de loi. Réfléchissez à ces questions.
Cet office ne sera pas mandataire de la Couronne. Ses employés ne feront pas partie de la fonction publique. Ses frais d'administration pourront être payés sur le Trésor. L'office aura la capacité d'une personne physique. Autrement dit, c'est une organisation très indépendante ayant des pouvoirs extraordinaires, et sa mission est tout aussi vaste. Elle consiste simplement à effectuer des placements.
Les administrateurs seront nommés au moyen d'un processus de consultation qui permet la participation provinciale. Ils sont à leur tour consultés sur la nomination du président. Les dirigeants, y compris le premier dirigeant, le cas échéant, peuvent être nommés par le conseil d'administration. Le fait que les administrateurs soient choisis de façon représentative et que le président a un statut spécial a pour effet que chacun apportera une contribution bien distincte.
Finalement, ce n'est vraiment pas clair que les administrateurs relèveront du ministre ni que le ministre assumera la responsabilité de l'office devant le Cabinet ou le Parlement. On doit se demander suivant quelle filière cette organisation rendra des comptes. La structure classique semble inexistante, intrinsèquement incompatible ou assez confuse, ce qui a pour résultat que le ministre ne peut s'acquitter de ses fonctions obligatoires.
Honorables sénateurs, les 30 dernières années nous ont montré clairement que les institutions, même brillamment conçues et bien dirigées, ne peuvent être laissées sans contrôle vigoureux; que le mélange des valeurs, des cultures et des systèmes doit se faire avec beaucoup de prudence et de vigilance et que l'élaboration des politiques doit vraiment être confiée au ministre. Les personnes en position d'autorité doivent être en contact direct les unes avec les autres et échanger toute l'information pertinente.
(1710)
J'ai lu ce projet de loi très attentivement. Je ne dis pas que c'est un mauvais projet de loi; je dis plutôt que c'est un projet de loi difficile à comprendre. Notamment en ce qui concerne l'obligation de rendre des comptes, il laisse bien des questions sans réponse. J'espère que le comité aura tout le loisir de se pencher sur ces questions et de formuler des recommandations au Sénat à cet égard. S'il décide que les paramètres nécessaires à la reddition de comptes font défaut, ce n'est pas la catastrophe. Le Sénat lui-même, ou le gouvernement, peuvent charger un organisme d'élaborer un cadre de responsabilité qui convienne.
La loi n'est pas une chose inerte. On peut s'en servir pour créer de nouvelles institutions. Tel est l'objet du débat d'aujourd'hui. Il nous faudra peut-être faire preuve d'innovation, prendre quelques risques et consacrer un peu de notre temps pour y parvenir, mais l'élaboration d'une structure de responsabilité, qui satisfasse aux exigences de cette mesure législative et soit à la hauteur du grand dessein de ceux qui l'ont proposée, s'impose et est à notre portée.
(La motion est adoptée, et le projet de loi est lu une deuxième fois.)
Renvoi au comité plénier
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une troisième fois?L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je propose, appuyée par l'honorable sénateur Kirby:
Que le projet de loi soit déféré à un comité plénier devant siéger à 14 h 15 demain, le mercredi 17 décembre 1997; et que tous les articles alors inscrits au Feuilleton et au Feuilleton des avis soient reportés jusqu'à ce que le comité plénier ait fait rapport.
Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
Motion tendant à autoriser la couverture électronique des travaux du comité plénier
Permission ayant été accordée de revenir aux avis de motion:L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement):
Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)f) du Règlement, je propose:
Que la Chaîne d'affaires publiques par câble (CPAC) soit autorisée à apporter des caméras de télévision à la Chambre afin de diffuser les délibérations du comité plénier relativement au projet de loi C-2, Loi constituant l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada et modifiant le Régime de pensions du Canada, la Loi sur la sécurité de la vieillesse et d'autres lois en conséquence, demain, le mercredi 17 décembre 1997, en dérangeant le moins possible ses travaux.
(La motion est adoptée.)
La Loi canadienne sur les coopératives
Deuxième lecture
L'ordre du jour appelle:Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Callbeck, appuyée par l'honorable sénateur Bacon, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-5, Loi régissant les coopératives.
L'honorable J. Trevor Eyton: Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi C-5. Celui-ci remanie les règles et règlements régissant les coopératives non financières de régime fédéral. Il ne s'applique pas aux coopératives de crédit ni aux caisses populaires, lesquelles relèvent de la compétence exclusive des provinces. En effet, ces coopératives financières ont déjà fait l'objet d'un projet de loi, la Loi sur les associations coopératives de crédit, durant la dernière législature.
Le mouvement coopératif fait partie du décor, surtout dans le secteur de l'agriculture, depuis plus d'un siècle. Dans l'esprit de bien des gens, les deux vont de pair. Toutefois, le mouvement coopératif s'étend bien au-delà de ce secteur. Il est également présent dans l'industrie forestière et des industries comme le commerce de détail, les pêches et le logement. Il existe des coopératives de soins de santé, des garderies coopératives, des coopératives de consommateurs et des coopératives autochtones.
On compte actuellement au Canada 10 000 coopératives qui emploient 135 000 personnes. Environ 7 000 de ces coopératives sont non financières; 14 millions de Canadiens sont membres d'une coopérative, d'une coopérative de crédit ou d'une caisse populaire, dont 4,5 millions dans le secteur non financier.
Honorables sénateurs, je n'ai pas l'intention d'intervenir sur le fond du projet de loi, d'autant que le sénateur Callbeck en a expliqué les dispositions principales l'autre jour. Notons cependant que le projet de loi C-5 constitue le tout premier remaniement de la Loi sur les associations coopératives du Canada en 27 ans, c'est-à-dire depuis son adoption en 1970. Cette loi était la première à viser expressément les coopératives et elle s'inspirait dans une grande mesure de la Loi sur les corporations canadiennes qui régissait alors les entreprises canadiennes. Depuis, le droit des sociétés a évolué en fonction des besoins du monde des affaires. On ne peut pas en dire autant du droit des coopératives. Le projet de loi C-5 se faisait donc attendre depuis longtemps.
Le projet de loi dont nous sommes saisis renferme un certain nombre de modifications visant à simplifier et à moderniser le secteur coopératif du Canada. La proposition la plus importante sans doute est celle qui permettrait aux coopératives de vendre des actions au public. C'est un changement radical par rapport à la politique traditionnelle des coopératives, où celles-ci s'en remettaient aux membres et aux emprunts pour financer leur exploitation. C'est un changement important. Il procurera aux coopératives une plus grande flexibilité en matière de financement, ce qui les aidera à mieux soutenir la concurrence tant à l'intérieur du pays que dans l'économie mondiale.
Je parle d'économie mondiale parce que les gens oublient que les coopératives sont de grandes entreprises. Les ventes annuelles du Saskatchewan Wheat Pool et des Federated Cooperatives, également de la Saskatchewan, s'élèvent à des milliards de dollars.
Il y a une série d'autres propositions parmi lesquelles, brièvement, on compte des procédures simplifiées pour la constitution en société, la possibilité que le tiers des administrateurs ne soient pas des membres de la coopérative, la clarification et la limitation des responsabilités des administrateurs ainsi que de nouvelles options pour les coopératives souhaitant se restructurer comme des sociétés par actions.
Honorables sénateurs, il n'y a pas grand-chose à ajouter. Le projet de loi C-5 semble s'être fait attendre depuis longtemps, c'est une mesure sensée et appropriée. Il donne aux coopératives les outils dont elles ont besoin pour s'adapter aux réalités économiques changeantes et soutenir efficacement la concurrence. Par ailleurs, il leur permet de maintenir les principes en vertu desquels elles ont été établies et continuent d'exercer leur activité aujourd'hui.
Je n'ai aucune raison de m'opposer à ce projet de loi. Ses dispositions ont été approuvées, voire largement proposées par les principaux intervenants, y compris la Canadian Cooperative Association et son pendant francophone, le Conseil canadien de la coopération. Selon le porte-parole de ce groupe, le projet de loi C-5 favorisera l'expansion des coopératives au sein de l'économie canadienne et soutiendra une formule de rechange de participation économique qui met l'accent sur les principes démocratiques et l'auto-assistance.
En outre, tous les partis à Ottawa appuient le projet de loi, tout comme le comité permanent de l'industrie de l'autre endroit, qui n'a apporté que des modifications mineures à seulement six articles. Compte tenu de tout cela, je propose que le projet de loi soit lu une deuxième fois et renvoyé au comité.
(1720)
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée et le projet de loi est lu une deuxième fois.)
Renvoi au comité
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une troisième fois?(Sur la motion du sénateur Carstairs, le projet de loi est renvoyé au comité permanent des banques et du commerce.)
Enseignement postsecondaire
Dépôt du rapport final du comité
Permission ayant été accordée de revenir à la présentation des rapports des comités permanents ou spéciaux:L'honorable M. Lorne Bonnell, président du comité sénatorial spécial de l'enseignement postsecondaire, dépose le rapport final du comité.
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?
L'honorable M. Lorne Bonnell: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant le paragraphe 97(3) du Règlement, je propose que nous étudions le rapport maintenant pour que je puisse dire quelques mots.
L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, ce temps de l'année nous invite certes à la générosité, mais nous sommes en train de chambarder l'ordre de nos travaux. Certains sénateurs prévoient d'intervenir sur certains articles prévus à l'ordre du jour. Soudain, sans le moindre avertissement, on demande à étudier ce rapport. C'est à tout le moins contraire à nos usages.
Si l'honorable sénateur Bonnell accepte d'intervenir sur cet article à la fin de nos travaux aujourd'hui, je serais d'accord. Cependant, nous avons d'autres articles à traiter.
Nous sommes déjà revenus sur trois articles inscrits au Feuilleton. Voici maintenant que l'honorable sénateur Bonnell veut parler du rapport de son comité. Nous discuterons de ce rapport, mais pourquoi devrions-nous le faire à ce moment-ci? Nous avons d'autres obligations sur lesquelles nous établissons l'horaire de nos travaux.
Son Honneur le Président: La permission n'est pas accordée.
Le sénateur Lynch-Staunton: Si je suis le seul sénateur qui s'oppose à ce que l'on passe à l'étude de cette question à ce moment-ci, je ne vais pas empêcher qu'on le fasse. Bien franchement, je trouve cela très irrégulier. On passe complètement outre à l'ordre du jour établi. Cela dit, je ne veux pas être le seul à protester.
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, il n'est pas correct que le sénateur Lynch-Staunton se retrouve dans cette position. J'avais conclu une entente avec le sénateur Kinsella, portant que nous allions autoriser le dépôt du rapport. Je ne savais pas que l'on demanderait au Sénat d'accorder au sénateur Bonnell la permission de parler maintenant. Je lui demande d'attendre à demain pour formuler ses observations.
Le sénateur Lynch-Staunton: Non. S'il existe une entente entre les leaders adjoints, je vais la respecter.
L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Nous avions uniquement convenu de déposer le rapport.
Le sénateur Lynch-Staunton: Dans ce cas, honorables sénateurs, j'ai dit ce que j'avais à dire.
Le sénateur Bonnell: Honorables sénateurs, demain matin, à sept heures, je dois me rendre à Toronto avec le sénateur Phillips, vice-président du sous-comité des affaires des anciens combattants, pour amorcer notre étude de l'état des soins de santé aux anciens combattants de notre pays. Nous nous rendrons ensuite à Montréal et à Charlottetown. J'ai pensé que si je pouvais parler du rapport ce soir, nous pourrions ensuite ajourner le débat, et les sénateurs pourraient discuter de cet excellent rapport au cours des trois prochains jours.
Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, je pense que nous pouvons en arriver à un compromis en abordant cette question une fois que nous en aurons terminé avec les points qui figurent au Feuilleton. Nous sommes disposés à demander à madame le leader adjoint du gouvernement de soulever ce point lorsqu'on en aura terminé avec les autres affaires émanant du gouvernement.
Le sénateur Bonnell: Honorables sénateurs, cela me convient.
Le sénateur Carstairs: Si je comprends bien, nous traiterons de cette question lorsque nous en aurons terminé avec les points qui figurent au Feuilleton?
Son Honneur le Président: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?
Des voix: D'accord.
(Sur la motion du sénateur Bonnell, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la présente séance.)
Terre-Neuve
La réforme du système scolaire-Motion de modification de la clause 17 de la Constitution-Ajournement du débat
L'honorable Bill Rompkey, conformément à l'avis du 29 octobre 1997, propose:Attendu: que l'article 43 de la Loi constitutionnelle de 1982 prévoit que la Constitution du Canada peut être modifiée par proclamation du Gouverneur général sous le grand sceau du Canada, autorisée par des résolutions du Sénat, de la Chambre des communes et de l'assemblée législative de chaque province concernée,
Le Sénat a résolu d'autoriser la modification de la Constitution du Canada par la proclamation de Son Excellence le Gouverneur général sous le grand sceau du Canada, en conformité avec l'annexe ci-jointe.
ANNEXE
MODIFICATION DE LA CONSTITUTION DU CANADA
1. La clause 17 des Conditions de l'union de Terre-Neuve avec le Canada figurant à l'annexe de la Loi sur Terre-Neuve est abrogée et remplacée par ce qui suit:
«17.(1) En ce qui concerne la province de Terre-Neuve, la présente clause s'applique au lieu de l'article quatre-vingt-treize de la Loi constitutionnelle de 1867.
(2) Dans la province de Terre-Neuve et pour cette province, la Législature a compétence exclusive pour légiférer en matière d'éducation, mais elle doit prévoir un enseignement religieux qui ne vise pas une religion en particulier.
(3) L'observance d'une religion doit être permise dans une école si les parents le demandent.»
TITRE
2. Titre de la présente modification: Modification constitutionnelle de l'année de la proclamation (Loi sur Terre-Neuve).
- Honorables sénateurs, je prends la parole pour vous demander d'appuyer cette résolution. Je le fais en tant que représentant de la province de Terre-Neuve et en sachant que je parle au nom de la majorité des habitants de la province.
Je tiens à rappeler aux honorables sénateurs que, lors d'un référendum tenu sur cette question dans la province, 73 p. 100 des gens ont voté en faveur de cette résolution, malgré le fait qu'un référendum n'était pas nécessaire dans le processus législatif. Outre le fait que 73 p. 100 de la population a voté pour le oui, tous les députés à l'assemblée législative de Terre-Neuve et du Labrador ont voté en faveur de la résolution, quelque soit le parti ou la religion auxquels ils appartiennent. Tous les députés à l'assemblée législative ont voté en faveur.
Honorables sénateurs, la volonté de la population que je représente est très claire. Je dis à tous ceux en ce pays qui se considèrent démocrates en 1997 que nous devrions tenir compte de la volonté de tous ces gens. Ils se sont adressés à nous en vertu de l'article 43 de la Constitution, comme c'est leur droit, pour nous demander de modifier la Constitution du Canada, comme c'est leur droit. Ils l'ont demandé en leur nom, et au nom de personne d'autre, comme c'est leur droit.
L'article 43 prévoit que lorsqu'une province, avec le consentement du Parlement du Canada, convient de modifier la Constitution à l'égard d'une question qui intéresse uniquement cette province, elle a le droit de le faire. Comme ils ont le droit de le faire, les gens de ma province vous demandent de les aider à faire ce qu'ils veulent faire, soit mettre en place dans leur province un système d'éducation moderne.
Certains disent que les gens ne savaient pas vraiment quelle était la question, qu'il y a eu malentendu, ou qu'un côté avait plus d'argent que l'autre. J'estime que c'est une observation très injuste et malheureuse à propos du jugement des gens de ma province. C'est être paternaliste de laisser entendre que, après dix années de débat exhaustif sur cette question, ces gens, qui connaissent intimement ce système et cela, depuis le milieu du XIXe siècle, ne pouvaient pas maintenant comprendre la question qu'on leur posait. J'estime qu'ils l'ont fort bien comprise et qu'ils ont voté en masse en faveur de la nouvelle clause 17.
Ils savaient que leur système d'éducation est unique au Canada. Aucune autre province n'a un système d'éducation similaire à celui de Terre-Neuve et du Labrador. Le système ne comportait pas des écoles publiques et des écoles catholiques. Le système ne comportait pas des écoles publiques et des écoles protestantes. Depuis 1949, sept confessions chrétiennes avaient droit au pro rata, dans notre province, aux dollars des contribuables pour diriger leurs propres écoles. Ce système n'existait nulle part ailleurs au Canada. Il n'existait pas au Manitoba, en Alberta, au Québec ou en Nouvelle-Écosse. C'était un système unique au Canada.
Depuis 1949, les sept confessions chrétiennes - les anglicans, les catholiques, les disciples de l'Église unie, les adventistes du septième jour, les pentecôtistes et l'Armée du salut - avaient tous droit, conformément à la Constitution, à une partie proportionnelle des dollars des contribuables pour faire fonctionner leurs écoles. À mon avis, ces groupes étaient privilégiés. Les juifs ne pouvaient pas avoir leurs écoles, pas plus que les autochtones, les francophones, les musulmans, les baptistes ou les membres de l'Église apostolique. Aucune autre confession chrétienne ou non chrétienne n'avait le même droit que ces sept groupes confessionnels à un financement de l'État proportionnel à leur nombre. Selon moi, s'il y a discrimination ou injustice, c'est aux termes de l'ancien régime et non du nouveau.
(1730)
On a dit que les minorités ont des droits, et c'est vrai. Cependant, comment déterminer ce qu'est une minorité et qui parle au nom des minorités? Est-ce que ce sont les évêques ou les fidèles qui parlent au nom de l'Église? Est-ce que le président de la Conférence de l'Église unie parle au nom des fidèles de cette Église, ou bien est-ce que ceux-ci expriment eux-mêmes leur opinion? Qu'est-ce qu'une minorité, et qui parle en son nom?
On a dit que la minorité elle-même devait se prononcer avant que ses droits ne soient abolis. Il faut d'abord savoir qui fait partie de la minorité. Deuxièmement, il faut déterminer quel pourcentage du groupe minoritaire doit voter en faveur de l'abolition des droits. Par exemple, y a-t-il une minorité à l'intérieur d'une minorité? Mettons que les baptistes ont des droits à Terre-Neuve, ce qui n'est pas le cas, et qu'on leur demande de voter sur l'abolition de ces droits. Si 25 p. 100 d'entre eux votent contre, auront-ils le droit de conserver leur proportion des deniers publics pour exploiter leurs écoles? La question des minorités est très intéressante. Il faut déterminer ce qu'est une minorité, quels droits elle a et quand ces droits peuvent être abolis.
Une autre question à considérer est l'impact des droits de la minorité sur les droits des autres. Bien sûr, la minorité a des droits, mais seulement dans la mesure où ces droits ne limitent pas les droits des autres. Ce sont des questions importantes à ne pas perdre de vue.
Je crois que des faits donnent à penser que les pentecôtistes n'ont pas voté majoritairement pour renoncer à leurs droits, mais il n'y a aucun moyen de faire cette preuve.
Je pense que, dans l'avenir, il y aura plus d'individus et de groupes qui auront des droits. La nouvelle clause 17 prévoit qu'il y aura un système d'éducation publique à Terre-Neuve et que les gens pourront élire les membres des conseils scolaires. Dans ma province, il n'y a pas eu de scrutin au sujet des conseils scolaires depuis une dizaine d'années. Pour la première fois depuis longtemps, les parents pourront élire ceux qui feront partie des conseils scolaires. Ce scrutin dépend de l'adoption de la résolution à l'étude.
Toute l'organisation de l'éducation à Terre-Neuve et au Labrador, l'an prochain, est aussi en suspens. Nous ne savons pas quels professeurs seront embauchés l'an prochain. Il est impossible de prendre des décisions à ce sujet tant que la résolution à l'étude n'est pas adoptée. Nous ne savons pas quelles écoles seront ouvertes ou fermées l'an prochain. Il est impossible de prendre des décisions à ce sujet tant que la résolution n'est pas adoptée. Nous ne savons pas comment s'organisera le transport scolaire l'an prochain. Il est impossible de prendre des décisions à ce sujet tant que la résolution n'est pas adoptée.
Je ne pense pas exagérer en disant que le système scolaire de ma province est en plein chaos actuellement. Pour venir à bout de cette insécurité et de ce manque d'organisation, il est indispensable de prendre en considération la volonté de la population et de modifier la Constitution de manière à ce que les dispositions législatives nécessaires puissent être adoptées à Terre-Neuve.
Les parents pourront élire les membres des conseils scolaires. Ils pourront faire en sorte que leurs enfants aient un enseignement religieux. Certains ont demandé pourquoi la résolution permettait non seulement l'observance d'une religion, mais aussi l'enseignement religieux dans les écoles de Terre-Neuve. C'est tout simplement parce que c'est là ce que les gens souhaitent. Cela ne correspond peut-être pas à ce que la population souhaite dans d'autres provinces, mais c'est ce que les gens de ma province veulent.
Les résultats du référendum ont démontré clairement que c'est ce que souhaitaient les gens. Ils ont bénéficié d'un système d'enseignement religieux pendant des décennies et ils voulaient s'assurer qu'il y ait un enseignement religieux dans les écoles. Voilà pourquoi cette question a été abordée lors du débat référendaire et pourquoi la résolution dont nous sommes saisis en fait état. Le droit à un enseignement religieux et à l'observance d'une religion est prévu dans la résolution parce que c'est ce que veulent les gens.
Certains disent qu'il est possible de procéder autrement, mais comme je l'ai dit au début, cela traduit expressément la volonté de la population. Je pense que, dans une démocratie, en 1997, nous devons tenir compte de cette volonté.
Les autres peuvent faire ce qu'ils veulent dans les autres provinces, et cette mesure législative ne changera rien à cela. Toutefois, j'estime qu'il est très important que nous adoptions cette résolution le plus rapidement possible. J'attire encore une fois l'attention des sénateurs sur la situation qui existe actuellement dans notre province. Je ne dis pas cela pour faire naître un sentiment de culpabilité chez les sénateurs, car ce ne serait pas correct de faire cela. Je ne fais qu'énoncer un fait. Notre province est désorganisée dans le moment.
Avant de terminer, je vais parler d'un autre droit, et c'est celui des enfants eux-mêmes. Les enfants de ma province - une province qui est pleine de promesses, c'est vrai, mais qui a aussi le revenu par habitant le plus bas et les impôts les plus élevés de tout le pays - ont le droit d'avoir la meilleure éducation que nous puissions leur donner en 1997. Ils ont des droits, et je vous demande aujourd'hui de penser au fait que le système actuel a été perturbé pendant plusieurs années alors que nous débattions de la question. Le nouveau système doit être mis en place pour que ces enfants puissent avoir une éducation adéquate et avoir ainsi les meilleures chances possibles en cette fin de XXe siècle.
L'honorable Nicholas W. Taylor: Honorables sénateurs, j'ai écouté avec un certain intérêt le débat sur la question du Québec et sur la présente résolution depuis mon arrivée ici. J'ai essayé d'être le plus objectif possible. J'ai oeuvré dans le domaine de l'enseignement pendant un certain nombre d'années. J'ai entrepris ma carrière en politique il y a une trentaine d'années en tant que commissaire d'école.
J'ai bien peur d'être un peu plus subjectif sur la question de Terre-Neuve parce que j'ai des petits-enfants qui viennent de déménager dans cette province avec leur famille et qui entreront bientôt dans le système scolaire terre-neuvien. Si les Terre-Neuviens ont quitté leur province en masse à une certaine époque pour aller s'installer en Alberta, c'est maintenant le tour des Albertains d'aller s'installer dans la belle province de Terre-Neuve. Avec deux petits-enfants qui entreront dans le système dans un an ou deux, j'ai pensé que je me devais de participer à ce débat.
Je ne répéterai pas tous les arguments, mais un des arguments qu'on a fait valoir, c'est que la province veut cette modification. J'ai entendu le sénateur Doody et d'autres qui se demandaient si c'est vraiment ce que veut la province, si la question était bien formulée, si on s'est bien assuré qu'il y avait une majorité au sein de la minorité. Je laisse le soin à d'autres d'expliquer cela. Cependant, je fais remarquer à l'honorable sénateur Rompkey, qui faisait comme moi partie du comité et qui connaît certainement la question mieux que moi, que notre système électoral favorise le parti qui obtient le plus grand nombre de sièges. Une des principales plaintes entendues, c'est qu'il y a toujours une minorité qui n'est pas représentée au Parlement après une élection. Je le sais pour avoir perdu de nombreuses élections en Alberta. Après une défaite, je faisais toujours remarquer aux journalistes que j'avais obtenu tel pourcentage des voix, mais que, malheureusement, je n'obtenais pas un pourcentage correspondant des sièges.
(1740)
Attendre l'unanimité ou la quasi-unanimité signifie simplement que vous avez tous les gagnants. Cela ne veut pas dire que vous tenez compte de la minorité.
Mais laissons cela. Au lieu de demander au gouvernement du Canada de modifier la Constitution, on aurait pu choisir d'autres options. Je crains beaucoup que le processus de modification constitutionnel suivi dans le cas du Québec, et surtout dans le cas de Terre-Neuve, soit repris par d'autres provinces. Peut-être s'agira-t-il d'un autre domaine que l'éducation. En d'autres mots, nous revenons au libéralisme du XIXe siècle où la foule ne peut pas se tromper. Personnellement, j'estime que la foule se trompe parfois.
Si Terre-Neuve veut modifier son système - et peut-être ce système a-t-il besoin d'être modifié, je n'en suis pas convaincu - il existe d'autres moyens que la voie constitutionnelle. D'autres provinces viendront bientôt frapper à la porte pour demander des modifications constitutionnelles en s'appuyant sur un vote très largement majoritaire dans leur assemblée législative ou lors d'un référendum. Je ne trouve pas cela réjouissant.
Par-dessus tout, je tiens à m'arrêter à l'idée qui semble admise d'emblée en l'occurrence et selon laquelle l'État, pour une raison ou une autre, saurait mieux que quiconque comment éduquer les enfants - ce qui nous renvoie une fois de plus au libéralisme du XIXe siècle. Par conséquent, toute ingérence, que ce soit par l'Église ou par n'importe qui d'autre, devrait être évacuée pour que nous mettions en place un système qui embauche des enseignants d'un océan à l'autre et fixe les programmes d'études sur tout le territoire canadien.
Honorables sénateurs, je trouve qu'une telle idée est assez déroutante parce que nous avons tenté de tout privatiser. Nous avons privatisé notre société aérienne et bien d'autres sociétés d'État, mais, pour une raison ou une autre, lorsqu'il s'agit d'éducation, nous sommes d'avis que c'est un domaine où le secteur privé ou tout autre organisme non gouvernemental n'a pas un mot à dire. On ne veut pas de l'effet catalyseur que les organismes non gouvernementaux pourraient avoir. Cela semble être la pensée dominante: nous serons plus efficients avec des autobus plus gros et plus rapides qui amènent tous les élèves à la même école, devant le même enseignant, pour y apprendre la même chose.
Cela me préoccupe au plus haut point. Je ne tiens pas particulièrement à ce que les Églises se chargent de l'enseignement, mais nous nous écartons du sujet, qui est de voir comment amener d'autres intervenants dans l'enseignement. Comme dans le domaine de la construction automobile, l'État devrait établir des normes ou fournir les examens, mais pas diriger le système.
Je dirais à mes petits-enfants qui fréquentent le système scolaire de Terre-Neuve que, s'ils apprécient leur bureau de poste, ils seront satisfaits du nouveau système scolaire qui est proposé. D'une frontière à l'autre, tout le monde sera pareil. Cela me préoccupe énormément. Les Églises ont peut-être eu trop de pouvoir, mais j'ai entendu la réponse du sénateur Doody et j'ai vu ailleurs qu'on n'avait jamais refusé qu'un enfant fréquente l'école de son choix, peu importe qu'il appartienne ou non à la religion dont l'école relevait. Si un enfant voulait fréquenter l'école la plus rapprochée, il le pouvait. C'est le genre de système que nous devrions vouloir en place dans de nombreux endroits.
Dans l'Ouest, on déploie aujourd'hui des efforts considérables pour diversifier les systèmes scolaires. On ne se fonde peut-être pas sur la religion, peu importe qu'on soit libre penseur ou adepte de la peinture avec les doigts, mais on peut ouvrir une école. D'ailleurs, l'épouse du chef du Parti réformiste et moi avons inauguré une école à Calgary la semaine dernière, qui sera fondée sur la doctrine chrétienne. En ce qui me concerne, c'est cela la diversification. Dans la mesure où nous souscrivons à l'idée voulant que l'État ait le droit de prescrire des examens et d'établir des normes, c'est bien. Mais l'État n'a pas besoin de diriger le système d'enseignement.
C'est l'une des choses qui me dérange le plus dans ce débat. On entend toujours dire que le nouveau régime sera plus efficace. Il faut se poser la question: l'efficacité est-elle le but visé? S'agit-il de transporter les enfants jusqu'à l'école le plus rapidement possible et de payer les enseignants le moins possible? Ce n'est pas ainsi qu'on mesure le rendement d'un système scolaire. Si c'était cela la norme à établir, le système russe existerait encore. La Russie était l'un des rares endroits du monde à avoir un système scolaire totalement uniforme, avec un programme d'études imposé par la capitale. C'était probablement le système le plus efficace pour transporter les enfants, mais il n'a pas duré.
Les systèmes les plus inefficaces sont probablement en Hollande ou en Suisse. Là-bas, un enfant peut aller à peu près à n'importe quelle école. On y trouve un système de bons en vertu duquel l'État distribue de l'argent aux écoles proportionnellement au nombre d'enfants qui les fréquentent, mais sans avoir aucun pouvoir sur la manière dont l'école est dirigée. Il ne fait que fixer les normes pour les examens. Si l'on étudie les sociétés des cent dernières années, on constate que celles qui ont adopté un système scolaire fondé sur les catalyseurs et la concurrence sont celles qui ont survécu, même aux États-Unis.
Les systèmes qui érigent l'efficacité en monument et qui appliquent ce principe d'un bout à l'autre de la province se serviront de ce prétexte pour dépouiller la province de tout autre mode de pensée ainsi que des échanges et de la concurrence que se livrent les différents systèmes scolaires.
Selon moi, si l'on élimine la concurrence au sein du système scolaire, on le paiera cher à longue échéance.
L'honorable Philippe Deane Gigantès: J'invoque le Règlement, honorables sénateurs. J'aimerais permettre à mon collègue de l'Alberta de corriger l'impression qu'il risque d'avoir laissée qu'une majorité parlementaire est une foule.
Le sénateur Taylor: Je ne suis pas sûr de vouloir corriger cette impression. C'est le sentiment qui prévaut. Dire que la majorité parlementaire a toujours raison est une insulte pour ceux qui ont voté pour la minorité.
Le sénateur Gigantès: Je ne pense tout de même pas que vous devriez dire que c'est une foule et parler de la dictature de la foule.
(Sur la motion du sénateur Kinsella, le débat est ajourné.)
[Français]
(1750)
Régie interne, budgets et administration
recours au règlement-Décision de la présidence- Adoption du septième rapport du comité
L'ordre du jour appelle:Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Rompkey, c.p., appuyée par l'honorable sénateur Whelan, c.p., tendant à l'adoption du septième rapport du comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration (le droit du sénateur Thompson d'utiliser les ressources du Sénat), présenté au Sénat le 9 décembre 1997.-(Décision du Président.)
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, hier, le lundi 15 décembre, l'honorable Eymard Corbin a fait un rappel au Règlement à propos du pouvoir du comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration de présenter son septième rapport, daté et présenté le mardi 9 décembre.
Le sénateur Corbin qualifie de disciplinaires les mesures recommandées dans ce rapport. Par conséquent, il estime que cela implique les privilèges du sénateur Thompson, question qui n'entre pas dans le mandat du comité. Il est d'avis que par ce geste, le comité s'est arrogé le pouvoir exclusif de l'ensemble du Sénat sur une question qui relève essentiellement du privilège. À l'appui de sa position, il invoque l'ordre de renvoi au comité des privilèges qui est prévu par l'article 86(1)f)(ii). En outre, il soutient que le pouvoir du comité de la régie interne de veiller à l'administration du Sénat ne s'étend pas individuellement aux actes des sénateurs.
[Traduction]
Appuyant le rapport et la décision du comité de la régie interne, le sénateur Kenny signale que le comité n'a fait que soumettre des recommandations à l'examen et à l'approbation du Sénat. Il rappelle que le comité de la régie interne possède des pouvoirs qui lui sont conférés par la Loi sur le Parlement du Canada.
[Français]
Le sénateur St. Germain est intervenu pour attirer l'attention sur l'article 43(1), qui précise qu'il incombe à chaque sénateur de préserver les privilèges du Sénat et de tous les sénateurs. Il s'est également dit inquiet que ne se développe une mentalité de préfet de discipline.
Examinant les pouvoirs du comité de la régie interne, le sénateur Bolduc souligne qu'il faut faire la différence entre le pouvoir de gestion du Sénat en tant qu'organisme et son pouvoir de gestion vis-à-vis de chaque sénateur. Il demande si le comité de la régie interne a le droit de juger, de préjuger ou d'évaluer le rendement d'un sénateur en particulier.
[Traduction]
Enfin, le sénateur Carstairs a demandé au Président de rendre sa décision le plus rapidement possible. J'ai bien pesé les commentaires qui ont été faits hier et je suis en mesure de rendre ma décision sur le rappel au Règlement.
Honorables sénateurs, le comité de la régie interne, des budgets et de l'administration est unique parmi les comités du Sénat, et son mandat lui est conféré par une loi. Je n'ai pas à interpréter la loi, mais je dois évidemment en tenir compte. L'article 19.3 de la Loi sur le Parlement du Canada prévoit que le comité peut s'occuper des questions financières et administratives intéressant le Sénat, ses locaux, ses services et son personnel, ainsi que les sénateurs. Ces pouvoirs, toutefois, doivent être exercés selon les règles et sous l'autorité du Sénat, comme le précise le paragraphe 19.1(4).
Aux termes du Règlement du Sénat, le comité a un pouvoir spécial, que seul un autre comité détient, qui est celui d'agir de sa propre initiative. L'autre comité qui détient un pouvoir semblable est le comité des privilèges, du Règlement et de la procédure, qui a été associé à l'examen de cette question, comme il est indiqué dans le rapport. D'après l'article 86(1)g), le comité de la régie interne:
[...] est autorisé à examiner, de sa propre initiative, toutes les questions d'ordre financier ou administratif relatives à la gestion interne du Sénat.[Français]
Le comité de la régie interne a décidé d'user de ce pouvoir d'initiative pour examiner une question donnée. Son rapport se résume à des recommandations qui interdiraient temporairement au sénateur Thompson l'accès aux ressources du Sénat, ce qui est clairement une question d'ordre financier ou administratif. Le rapport ne porte pas de jugement sur le sénateur ou sur sa conduite. Le comité prend bien soin de préserver la capacité du sénateur de se rendre à Ottawa en vue de protéger ses privilèges, soit d'assister aux délibérations du Sénat, de prendre la parole et de voter. Il prend également soin de lui ménager la possibilité d'avoir de nouveau accès aux ressources du Sénat aussitôt qu'il désirera en faire la demande.
[Traduction]
Les recommandations du comité, telles que présentées dans ce rapport, modifient l'application de la politique générale relativement aux ressources mises à la disposition de tous les sénateurs. Il convient toutefois de ne pas oublier que le comité n'a pas agi dans ce cas-ci de sa propre initiative. Il a soumis, comme il le doit, ses recommandations à l'examen de l'ensemble du Sénat. En vertu de cette procédure, la suspension du droit du sénateur Thompson d'avoir accès à ces ressources sera décidée par la même instance qui est chargée de protéger ses privilèges.
Honorables sénateurs, en l'occurrence, il me semble que le comité n'a fait qu'exercer son droit d'initiative et d'examiner une question d'ordre financier ou administratif. Les recommandations semblent se limiter à des questions qui concernent les ressources du Sénat.
[Français]
La seule mention de présence est une allusion neutre et factuelle à un registre public, ce qui peut expliquer qu'une action comme celle qui est proposée soit appropriée. La participation du comité des privilèges, du Règlement et de la procédure ne sert, à mon sens, qu'à souligner le respect manifeste de chaque comité pour le mandat de l'autre dans un domaine où les mandats peuvent se chevaucher.
C'est précisément parce qu'il est essentiellement question de ressources dans le rapport, et non de présences, que j'en conclus qu'il ne s'agit pas d'une question de privilège. Si le rapport avait porté un jugement sur la conduite du sénateur Thompson, cela aurait automatiquement déclenché dans mon esprit la question de privilège invoquée par le sénateur Corbin.
Quant à savoir si les pouvoirs du comité de la régie interne se limitent à l'adoption et à l'application de politiques générales, à l'exclusion de décisions ayant trait aux sénateurs en particulier, je ne connais aucune contrainte semblable. Le cas échéant, j'aurais plutôt tendance à en voir les aspects négatifs, car elle pourrait empêcher le comité d'aider un sénateur en lui fournissant des ressources dans des circonstances données.
À mon avis, le comité est limité, par son mandat, à des questions financières et administratives, qu'elles soient d'application générale ou particulière, et ces paramètres ont été respectés dans le rapport.
Durant son intervention hier, le sénateur St. Germain a attiré l'attention de tous les honorables sénateurs sur leur devoir de préserver les privilèges du Sénat et de tous les sénateurs. Je remercie le sénateur Corbin d'avoir donné aux honorables sénateurs la possibilité de réfléchir à ce que le rapport fait et ne fait pas. Je conclus que le rapport est recevable.
[Traduction]
La motion peut donc faire l'objet d'un débat.
Des voix: Le vote.
Son Honneur le Président: Le sénateur Rompkey, appuyé par le sénateur Whelan, c.p., propose que le rapport soit adopté. Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?
(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)
(1800)
Les travaux du Sénat
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, il est maintenant 18 heures. Désirez-vous ne pas en tenir compte?L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): On me dit que nous avons l'autorisation de ne pas tenir compte de l'heure.
Son Honneur le Président: Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs, pour que je ne tienne pas compte de l'heure et que nous continuions?
Des voix: D'accord.
L'état actuel et les perspectives d'avenir de l'agriculture
Adoption du rapport du comité de l'agriculture et des forêts
Le Sénat passe à l'étude du deuxième rapport du comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts (budget-étude de l'état actuel de l'agriculture au Canada), présenté au sénat le 9 décembre 1997.-(L'honorable sénateur Gustafson).L'honorable Leonard J. Gustafson: Honorables sénateurs, je propose: Que le rapport soit adopté.
Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)
L'état actuel et les perspectives d'avenir des forêts
Adoption du rapport du comité de l'agriculture et des forêts
Le Sénat passe à l'étude du troisième rapport du comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts (budget-étude de l'état actuel des forêts au Canada), présenté au sénat le 9 décembre 1997.L'honorable Leonard J. Gustafson: Honorables sénateurs, je propose: Que le rapport, inscrit à mon nom, soit adopté.
Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)
La fondation Famous Five
Motion visant à commémorer les événements en élevant une statue sur la colline du Parlement-Poursuite du débat
L'ordre du jour appelle:Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Fairbain, c.p., appuyée par l'honorable sénateur LeBreton:
Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait prendre en considération la demande de la fondation Famous Five d'honorer la mémoire de Emily Murphy, Nellie McClung, Irene Parlby, Louise McKinney et Henrietta Muir Edwards - les Famous Five - en permettant de commémorer celles-ci par l'installation d'un monument sur la Colline parlementaire.-(L'honorable sénateur Kenny).
L'honorable Erminie J. Cohen: Honorables sénateurs, hier, notre collègue, le sénateur Fairbairn nous a redit avec grande éloquence la lutte et la victoire des «Famous Five» et a proposé une résolution, appuyée par le sénateur LeBreton, afin que soit approuvée l'installation sur la colline parlementaire d'une statue à leur mémoire, ceci en signe d'hommage dûment mérité à ces cinq femmes, Emily Murphy, Nellie McClung, Irene Parlby, Louise McKinney et Henrietta Muir Edwards, qui ont changé le cours de l'histoire des femmes au Canada.
Les monuments servent à éduquer, à commémorer et sont une inspiration. Dans ce cas, c'est d'éducation qu'il s'agit, beaucoup de Canadiens ignorant les contributions et les réalisations importantes de ces cinq femmes. Les Canadiens doivent connaître leurs héros et leurs héroïnes.
Bien que l'affaire «personne» ait été précédée de plusieurs causes semblables, la plupart des femmes et des historiens considèrent la contestation de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique en 1927 comme la mère de toutes ces causes. Cette affaire qui mettait en vedette celles qui devaient devenir les «Famous Five», illustre le courage, la force de conviction et la solidarité de nos aïeules.
(1800)
Lorsque les cinq célèbres protagonistes ont présenté leur appel au plus haut tribunal de l'époque, le comité judiciaire du Conseil privé d'Angleterre, Luckin Johnson, de la Presse canadienne, écrivait ce qui suit en juillet 1929:
Dans une pièce silencieuse, au numéro un de la rue Downing, cinq grands juges, dirigés par le Lord chancelier d'Angleterre et une batterie d'avocats en perruque du Canada et d'Angleterre débattent de la question que les cinq Albertaines leur ont soumise au nom des femmes. Ils examinent et réexaminent des questions de droit constitutionnel profondes et complexes. Le sens précis à donner à certains mots est discuté dans ses moindres nuances. Ce débat va probablement se poursuivre pendant plusieurs jours encore. À la fin des interminables discours, des leçons de l'histoire canadienne et des questions que poseront les cinq grands juges d'Angleterre, il sera sans doute décidé, s'il est permis de faire une prédiction, que les femmes sont indubitablement des personnes. Il n'est sans doute pas exagéré d'affirmer que la chose est déjà claire pour la plupart d'entre nous!
Honorables sénateurs, cette prédiction s'est révélée juste, comme nous l'ont dit hier les orateurs qui ont pris la parole. Le Conseil privé s'est rangé aux arguments des cinq célèbres protagonistes et a statué que les Canadiennes étaient bel et bien des personnes aux termes de l'article 24 de la Constitution et dans tous les autres sens juridiques du terme. Le même soir, le Ottawa Evening Journal appuyait la décision dans son éditorial, qui précisait ce qui suit:
Nous avons toujours su que nous avions raison. Lorsque la Cour suprême a statué, l'an dernier, que les femmes n'étaient pas des personnes, cela nous a rendus furieux. Nous avons fait valoir que, selon nous, une femme était non seulement une personne mais un personnage. Le Conseil privé n'a évidemment pas fait mention de notre point de vue. Il voulait probablement éviter de créer des ressentiments, certaines personnes, et en particulier certains juges, étant terriblement susceptibles.Quatre mois après la décision historique rendue au début de 1930, l'honorable Cairine Wilson devenait la première femme nommée au Sénat. Suite à cette nomination, le conseil des femmes de Saint John, au Nouveau-Brunswick, avait déclaré:
L'action entreprise par les cinq célèbres Albertaines a permis à toutes les Canadiennes de franchir la rivière de l'injustice et de gagner la rive sûre des droits de la personne.Selon l'historienne Valerie Knowles:
La question de savoir si beaucoup de femmes ont convoité un siège au Sénat importe peu. La signification réelle de cette décision réside dans le fait que les Canadiennes sont enfin devenues des personnes devant la loi et qu'un formidable obstacle psychologique à l'égalité politique a ainsi été supprimé.
Il s'agit, honorables collègues, d'un fait important de l'histoire du Canada qui mérite d'être souligné dans la capitale du pays, plus précisément sur la colline du Parlement.
Pour Henrietta Muir Edwards, une des «Famous Five», le défi consistait à faire en sorte que les femmes aient leur place à la table, et pas seulement à la table de la cuisine. À propos du jugement, elle a écrit:
Certes, la femme est la reine du foyer et elle y règne. Malheureusement, les lois qu'elle édicte ne dépassent pas son domaine. Pour que ses lois, écrites ou non écrites, soient respectées à l'extérieur du foyer, elle doit faire son entrée sur la scène politique - et c'est ce qu'elle a fait.Honorables sénateurs, c'est la raison pour laquelle je suis intervenue dans le débat d'aujourd'hui: parce que je le peux.
L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, moi aussi, je suis un ardent partisan de cette résolution visant à installer une statue sur la colline du Parlement pour commémorer les cinq femmes qui ont fait en sorte qu'en 1929, la loi canadienne soit modifiée pour que les femmes puissent être considérées comme des personnes, qu'elles soient traitées comme des égales devant la Constitution du Canada et l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867 et que, par le fait même, elles aient le droit de siéger au Sénat. Cela n'a que trop tardé.
Toujours à propos du passé, on aura sans doute constaté qu'en 1938, une plaque commémorant cet événement a été posée dans le vestibule du Sénat par le premier ministre de l'époque, Mackenzie King. Honorables sénateurs, il arrive quelquefois que le Sénat soit légèrement en avance sur son temps.
Honorables sénateurs, tout en célébrant le travail politique des «Famous Five» qui a permis aux femmes de joindre les rangs des parlementaires et des fonctionnaires, il ne faudrait pas oublier de rendre hommage aux millions de femmes qui, dans l'ombre, ont travaillé dur et qui travaillent encore dur pour faire du Canada le grand pays qu'il est devenu aujourd'hui. Il ne s'agit pas d'un fait nouveau. Tous les sénateurs le savent de par leur expérience personnelle.
Ma grand-mère maternelle est arrivée au Canada avec sa famille en 1908 et elle a travaillé toute sa vie d'adulte afin de subvenir aux besoins de son mari aveugle et de ses deux jeunes filles, jusqu'à ce qu'elle meure prématurément il y a plus de 50 ans - d'avoir trop travaillé, au dire de certains. À son tour, ma mère - qui est née en 1900 et qui, à 97 ans, reste très alerte et dynamique - a travaillé toute sa vie d'adulte pour subvenir aux besoins de ses parents, de sa jeune soeur, puis de notre famille. Lorsque ma défunte tante, la soeur cadette de ma mère, a été en âge de le faire, elle a travaillé toute sa vie d'adulte pour aider ses parents, puis sa famille. Elle a travaillé jusqu'à sa mort survenue il y a quelques années, alors qu'elle avait dans les quatre-vingts ans. Ma regrettée soeur a travaillé toute sa vie d'adulte pour subvenir aux besoins de sa famille, et sa carrière a connu son apogée lorsqu'elle a créé sa propre entreprise qu'elle avait commencée dans sa cuisine et qui est ensuite devenue une entreprise du secteur de l'alimentation d'une portée internationale.
Les femmes que j'ai côtoyées dans tous les aspects de ma vie ont toujours été d'essentielles partenaires pleines de grâce et de force. Elles nous ont enseigné, à moi et à ma famille, que la plus grande dignité, c'est celle que l'on acquiert en travaillant fort.
Je m'en voudrais de ne pas revenir sur un aspect du discours passionné et très informatif que le sénateur Fairbairn a prononcé hier. Elle nous a rappelé qu'elle ne serait pas devenue sénateur si ce n'eût été des efforts déployés par Emily Murphy, Nellie McClung, Irene Parlby, Louise McKinney et Henrietta Muir Edwards, ces cinq femmes célèbres dont il est question dans la résolution que nous appuyons.
Ceux qui me connaissent et qui, par la même occasion, ont suivi ma carrière, savent que je n'aurais pu devenir sénateur sans les efforts des femmes courageuses de ma famille ainsi que de mon épouse et de ma belle-mère, qui ont été et qui demeurent des partenaires égales et actives dans toutes les étapes de ma vie.
Je suis certain, honorables sénateurs, que je parle au nom de millions d'autres Canadiens qui pourraient en dire tout autant des femmes qui ont partagé leur vie.
En conclusion, puis-je souligner les efforts particuliers d'une amie de longue date, Frances Wright, dont la détermination et la ténacité ont permis à cette résolution de voir le jour? Par sa volonté et sa force de caractère, elle me rappelle les nombreuses femmes solides qui - dans ma famille comme dans mon cercle d'amis - m'ont tellement aidé au cours de ma carrière dans les secteurs public et privé.
Je vous dis bravo, Frances. J'espère que la statue qu'on érigera servira de symbole pour toutes les Canadiennes, de toutes les conditions sociales. Je leur dis bravo. Le meilleur est encore à venir.
(Sur la motion du sénateur Kenny, le débat est ajourné.)
Le Sénat
Présence exigée du sénateur Thompson
L'ordre du jour appelle:Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Kenny, appuyée par l'honorable sénateur Nolin,
Qu'il soit ordonné au sénateur Andrew Thompson de prendre place à son fauteuil au Sénat, lorsque les séances reprendront, en février 1998, après l'ajournement de Noël;
que, si le sénateur n'est pas présent, la question de son absence prolongée soit renvoyée au comité permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure, qui déterminera si cette absence constitue un outrage au Sénat;
que, si le comité est obligé d'entreprendre cette étude, il soit autorisé à étudier pour en faire rapport toute question liée à la présence aux séances du Sénat, plus particulièrement en ce qui concerne le sénateur Thompson; et
que le comité fasse rapport de ses conclusions et de ses éventuelles recommandations dans les deux semaines suivant le renvoi de la question. (L'honorable sénateur Carstairs).
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai reporté de quelques jours le débat de cette motion car je trouvais qu'il fallait débattre de la motion du comité de la régie interne avant de passer à cette motion-ci.
(1810)
Je suis persuadée que la motion que nous a proposée le sénateur Kenny est appropriée. Il s'agit d'un moyen par lequel nous pouvons espérer que le sénateur Thompson nous explique pourquoi il a été si longtemps absent du Sénat. J'espère que la motion sera adoptée rapidement.
Son Honneur le Président: Si personne d'autre ne veut prendre la parole, l'honorable sénateur Kenny, appuyé par l'honorable sénateur Nolin, propose:
Qu'il soit ordonné au sénateur Andrew Thompson de prendre place à son fauteuil au Sénat, lorsque les séances reprendront, en février 1998, après l'ajournement de Noël;
que, si le sénateur n'est pas présent, la question de son absence prolongée soit renvoyée au comité permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure, qui déterminera si cette absence constitue un outrage au Sénat;
que, si le comité est obligé d'entreprendre cette étude, il soit autorisé à étudier pour en faire rapport toute question liée à la présence aux séances du Sénat, plus particulièrement en ce qui concerne le sénateur Thompson; et
que le comité fasse rapport de ses conclusions et de ses éventuelles recommandations dans les deux semaines suivant le renvoi de la question.
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
Les travaux du Sénat
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, voilà qui met fin à l'étude des affaires inscrites à l'ordre du jour. Selon le paragraphe 43(8) du Règlement, nous devrions passer maintenant à l'étude des questions de privilège. Toutefois, l'honorable sénateur Kinsella et l'honorable sénateur Tkachuk m'ont informé qu'ils préféreraient reporter l'étude de ces questions à demain, à la même heure, soit dès la fin de l'étude des questions inscrites à l'ordre du jour ou au plus tard à 20 heures.Est-ce d'accord, honorables sénateurs?
Des voix: D'accord.
Enseignement postsecondaire
Étude du rapport final du comité sénatorial spécial-Ajournement du débat
Le Sénat passe à l'étude du rapport final du comité sénatorial spécial de l'enseignement postsecondaire, présenté au Sénat le mardi 16 décembre 1997.L'honorable M. Lorne Bonnell: Honorables sénateurs, je vous remercie de me permettre de prendre la parole sur ce rapport aujourd'hui.
Je voudrais prendre quelques instants pour résumer et souligner certaines des sections et des recommandations les plus importantes du rapport. Mais avant, toutefois, je voudrais remercier un certain nombre de personnes. D'abord et avant tout, je voudrais remercier mes collègues qui m'ont épaulé durant toute cette étude - le sénateur Lavoie-Roux, notre vice-présidente et ancienne présidente de la plus grande commission scolaire publique de tout le Canada; le sénateur Andreychuk, ex-chancelière de l'Université de Regina; le sénateur DeWare, ex-ministre provinciale chargée de l'Éducation supérieure dans la province du Nouveau-Brunswick; le sénateur Forest, ex-chancelière de l'Université de l'Alberta; le sénateur Losier-Cool, ex-enseignante; et le sénateur Perrault, ancien leader du gouvernement au Sénat et champion de la technologie en éducation.
De plus, je voudrais remercier M. Robert Farquhar, notre conseiller spécial, ainsi que le personnel dévoué de la Bibliothèque du Parlement, de la Direction générale des comités et des sénateurs, qui ont travaillé tellement fort pour mener ce projet à terme.
Honorables sénateurs, il y a tellement d'initiatives parlementaires qui sont lancées sans que personne se demande quel en est l'objectif. Je me demande vraiment si, en rédigeant notre Constitution, les pères de la Confédération avaient prévu le système d'éducation supérieure qui existe maintenant au Canada. Tous les ans, plus de 16 milliards de dollars de fonds publics sont consacrés à un système qui produit des milliers de diplômés, des ouvrages universitaires publiés, de la recherche quantitative et qualitative qui se poursuit et des services communautaires. Toutefois, quel objectif voulons-nous donc atteindre en tant que pays, en tant que Canadiens?
Le comité tenait à présenter son idéal - des points de repère réalistes - pour l'enseignement postsecondaire au XXIe siècle. Je cite directement le rapport:
Le secteur de l'enseignement postsecondaire doit apporter au Canada les connaissances et les ressources humaines qui permettront à notre pays de maintenir sa place parmi les grandes nations du monde, et cela tant en relation avec l'étranger qui reconnaît notre dynamisme qu'ici, où nous avons une qualité de vie enviable.Voici donc ce que nous envisageons, honorables sénateurs, dans toute la mesure où les ressources le permettront: un R-D de la plus grande qualité possible; des programmes d'études et de formation postsecondaires dont la qualité n'est surpassée nulle part dans le monde; un vigoureux secteur de l'enseignement postsecondaire capable d'accueillir les personnes qui ont les aptitudes et la détermination voulues pour tirer profit de cet enseignement; un élargissement des talents, des services et des établissements comme ressource à exploiter pour résoudre les problèmes, élaborer des politiques, améliorer les conditions de vie non seulement dans les localités de tout le Canada, mais aussi aux niveaux provincial, national et international.
Honorables sénateurs, ce sont là des principes et des objectifs importants d'après lesquels les générations futures évalueront les réalisations de nos gouvernements et des milieux de l'enseignement supérieur. Ne pas concrétiser cette vision, ne pas faire en sorte que l'enseignement postsecondaire devienne une priorité de tout premier rang dans la politique publique, c'est manquer à nos obligations envers le Canada.
Après avoir esquissé notre vue d'ensemble et le cadre de notre analyse, je voudrais maintenant m'attarder à quelques recommandations du rapport.
Depuis un an ou un an et demi, aucune autre question ne fait l'objet de plus d'attention dans les médias, à l'intérieur du gouvernement et dans notre comité que l'endettement des étudiants. Tout au long de nos audiences, nous avons essayé autant comme autant d'obtenir l'opinion des étudiants sur l'éducation internationale, la mobilité des étudiants ou la qualité de l'enseignement, mais les témoins revenaient sans cesse sur les problèmes de financement des études postsecondaires et leur crainte que leur endettement ne soit pour eux un boulet dont ils n'arriveront jamais à se défaire. Le niveau d'endettement moyen, chez ceux qui empruntent grâce à un programme gouvernemental, est passé de 8 700 $ en 1990 à un montant estimatif de 17 000 $ cette année, et il devrait atteindre les 25 000 $ l'an prochain. Par conséquent, honorables sénateurs, notre comité estime qu'il n'y a pas une solution unique au problème du financement des études supérieures. Il faut encourager les familles qui peuvent se le permettre à mettre de l'argent de côté pour le recyclage des adultes et l'éducation des enfants.
Pour ceux qui ont besoin d'une aide financière, les subventions pour initiatives spéciales prévues dans le cadre du Programme canadien de prêts aux étudiants devraient être élargies pour inclure des subventions aux étudiants de première et de deuxième années très défavorisés. Le gouvernement fédéral devrait mettre en oeuvre un train de mesures pour aider les étudiants lourdement endettés. Il pourrait, par exemple, leur donner une plus grande souplesse pour le remboursement de leurs emprunts; accorder des subventions non renouvelables aux emprunteurs qui éprouvent des difficultés chroniques à rembourser leurs prêts étudiants et qui ont épuisé la période maximale d'allégement des intérêts; permettre aux emprunteurs d'effectuer des travaux communautaires pour rembourser une partie de leurs emprunts; permettre aux emprunteurs de déduire de leur impôt sur le revenu l'intérêt sur leurs prêts étudiants; rendre les crédits d'impôt pour étudiants qui existent en ce moment entièrement remboursables pour que les étudiants en retirent les avantages lorsqu'ils en ont le plus besoin.
La réforme du système de prêts aux étudiants est une priorité du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux, et nos recommandations leur fourniront une base pour amorcer des discussions plus approfondies et instaurer une collaboration sur la question très sérieuse et très pressante de l'endettement des étudiants.
(1820)
Je voudrais maintenant parler de l'internationalisation croissante des études supérieures. Comme vous le savez, les étudiants étrangers pourraient constituer de nouvelles sources de revenus pour nos établissements postsecondaires tout en offrant aux étudiants canadiens un stimulus intellectuel constant et un enrichissement de leurs études. Parallèlement, la circulation internationale des étudiants joue un rôle de plus en plus important dans le commerce du Canada avec l'étranger.
M. Jim Fox, du Bureau canadien de l'éducation internationale, a déclaré ceci à notre comité:
Nous devons faire de l'internationalisation une priorité pour le Canada [...] fixer des objectifs et élaborer des stratégies qui intègrent les questions de diversification commerciale, l'aide officielle au développement, la coopération internationale et la défense, la recherche et le développement, ainsi que l'éducation et la formation [...]
Honorables sénateurs, nous en sommes arrivés à la conclusion que ce qui compromet le plus notre effort, c'est l'absence d'un engagement général et d'un plan coordonné en vue de développer notre rôle dans l'éducation internationale. Le gouvernement fédéral doit développer, de concert avec le Conseil des ministres de l'Éducation du Canada, une stratégie nationale en vue d'intensifier agressivement la participation du gouvernement canadien et d'encourager la participation du secteur privé à tous les aspects de l'éducation internationale.
Ma dernière observation concernant nos recommandations, honorables sénateurs, concerne la recherche et le développement. Les entreprises et les dirigeants politiques du Canada, y compris moi-même, ont souvent fait remarquer que notre avenir en tant que pays commerçant dépend de l'innovation et de la productivité. Toutefois, de nombreux témoins ont dit devant notre comité combien l'effort canadien en matière de recherche et de développement est médiocre comparé à celui des autres pays industrialisés et de nos principaux partenaires commerciaux.
Les universités et les collèges contribuent de façon disproportionnée aux activités canadiennes de recherche et de développement - le quart environ de l'investissement canadien en 1995 - et presque toute la contribution fédérale directe à la recherche faite dans les collèges et les universités est fournie par les trois conseils subventionnaires: le Conseil de recherches médicales, le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie et le Conseil de recherches en sciences humaines.
Après avoir examiné l'état actuel de la recherche et du développement dans nos établissements d'enseignement postsecondaire, notre comité est persuadé que deux principes devraient guider le gouvernement fédéral dans l'établissement de sa politique: d'abord, le Canada ne peut pas se permettre de considérer le financement de la recherche et du développement en général et le financement de la recherche dans les établissements d'enseignement postsecondaire en particulier comme un robinet qu'on peut ouvrir ou fermer à volonté; ensuite, le Canada ne peut pas se permettre d'être en retard sur ses principaux partenaires commerciaux dans ses efforts de recherche et de développement.
Nous avons recommandé que l'on rétablisse le financement du Conseil de recherches médicales, du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie et du Conseil de recherches en sciences humaines aux niveaux de 1993 afin d'aider à hausser l'investissement canadien dans la recherche et le développement à la moyenne des autres pays de l'OCDE d'ici à cinq ans. Honorables sénateurs, ceci ne devrait être qu'une facette d'un engagement stratégique et détaillé à long terme du gouvernement fédéral à financer la recherche et le développement dans les établissements d'enseignement postsecondaire.
Finalement, notre comité n'a pas traité des nouvelles bourses récemment annoncées par le premier ministre, qui seront créées dans le cadre du Fonds de dotation des bourses d'études du millénaire. Comme je l'ai déjà mentionné au Sénat, ce fonds vise à octroyer des milliers de bourses chaque année à compter de l'an 2000; il a été conçu pour être totalement indépendant du gouvernement, pour récompenser l'excellence académique et pour faciliter aux Canadiens à revenu faible ou moyen l'accès aux universités et aux collèges.
On s'attend maintenant à ce que l'investissement initial dans le fonds se situe entre un et trois milliards de dollars. L'intérêt accumulé permettra ensuite d'aider des dizaines de milliers d'étudiants canadiens à chaque année.
Comme je l'ai mentionné dans mon adresse en réponse au discours du Trône, le débat d'orientation auquel fait face le milieu de l'enseignement supérieur avec la création d'un fonds de bourses du millénaire c'est celui qui consiste à trouver un équilibre entre les deux priorités du gouvernement, c'est-à-dire répondre aux besoins financiers et récompenser l'excellence. Ma préoccupation depuis le début est que la plupart des étudiants dans le besoin ne seront pas admissibles à ce programme de bourses, même s'ils font leur possible. Par conséquent, je répète ma recommandation au gouvernement fédéral portant que le programme de bourses du millénaire devrait avoir deux fonds: un pour récompenser le mérite et l'autre pour répondre aux besoins. La bourse fondée sur le mérite, qui viserait à récompenser l'excellence, aiderait quand même certains Canadiens à revenu faible ou moyen à faire des études collégiales ou universitaires. Une deuxième bourse, qui serait fondée sur les besoins, encouragerait l'excellence d'une autre façon, soit en voyant à ce que tous les Canadiens aient la chance de faire leurs preuves dans un établissement d'enseignement postsecondaire.
Certains diront que le partage des fonds disponibles en deux catégories pourrait affaiblir l'impact recherché. Comme on s'attend maintenant à ce que l'investissement soit de l'ordre de 3 milliards de dollars, la création de deux bourses bien dotées semble tout à fait possible. Comme nous l'avons recommandé tout au long de notre rapport, cela ne pourrait que renforcer l'engagement pris par le gouvernement pour ce qui est d'assurer l'accès à l'enseignement supérieur, d'abaisser le niveau d'endettement des étudiants et de promouvoir l'excellence.
En conclusion, honorables sénateurs, ce rapport n'est vraiment que le début. La réalisation de notre vision nécessitera un investissement financier considérable et un degré de collaboration et de coordination peut-être sans précédent entre tous les intervenants du milieu de l'enseignement postsecondaire au Canada. Nous croyons que nos recommandations méritent à la fois un examen et un suivi de la part du gouvernement du Canada, et nous attendons une réponse rapide de ce dernier.
L'honorable Thérèse Lavoie-Roux: Honorables sénateurs, c'étaient là les dernières paroles du sénateur Bonnell au Sénat. Bonne chance, sénateur Bonnell!
(Sur la motion du sénateur Lavoie-Roux, le débat est ajourné.)
(Le Sénat s'ajourne au mercredi 17 décembre 1997, à 13 h 30.)