Débats du Sénat (Hansard)
Débats du Sénat (hansard)
1re Session, 36e Législature
Volume 137, Numéro 77
Le mardi 22 septembre 1998
L'honorable Gildas L. Molgat, Président
- DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
- AFFAIRES
COURANTES
- L'état du système financier
- Régie interne, budgets et administration
- L'ajournement
- L'Association
parlementaire canadienne de l'OTAN
- Réunion conjointe de comités de l'Assemblée de l'Atlantique Nord, à Bruxelles, en Belgique-Dépôt du rapport de la délégation canadienne
- Réunion
de la Commission permanente et des secrétaires
des délégations nationales de l'Assemblée de l'Atlantique Nord, à Madère, au Portugal-Dépôt du rapport de la délégation canadienne
- Le droit comparé
- Projet de loi privé
- PÉRIODE
DES QUESTIONS
- La
justice
- Le coût d'établissement d'un système d'enregistrement des armes à feu-La date d'entrée en vigueur des augmentations de droits pour les propriétaires d'armes à feu-La position du gouvernement
- Les retards dans l'établissement du système d'enregistrement des armes à feu-La position du gouvernement
- Les retards dans l'établissement du système d'enregistrement des armes à feu-L'escalade des coûts supportés par les forces policières-La position du gouvernement
- Le
Solliciteur général
- La commission d'enquête sur le traitement infligé par les agents de la GRC aux manifestants lors de la conférence de l'APEC-La position du gouvernement
- La commission d'enquête sur le traitement réservé par la GRC aux manifestants à la conférence de l'APEC-Le témoignage éventuel du premier ministre-La position du gouvernement
- La commission d'enquête sur le traitement réservé par la GRC aux manifestants à la conférence de l'APEC-Les paramètres de l'enquête-La position du gouvernement
- L'agriculture
- La défense nationale
- Réponses différées à des questions orales
- Le développement des ressources humaines
- L'éducation postsecondaire
- L'éducation postsecondaire
- L'exploitation forestière
- Les pêches et les océans
- Dépôt
de réponsess à des questions au Feuilleton
- Le ministère de l'Industrie-Le respect de la Loi sur les carburants de remplacement
- La défense nationale-L'octroi d'un contrat à la Western Star pour la mise au point d'un véhicule utilitaire militaire
- La défense nationale-L'administration du médicament méfloquine/lariam
- La Banque de développement du Canada-La date de nomination et la rémunération de l'actuel président et de son prédécesseur
- Le règlement des réclamations des tierces parties concernant les aérogares I et II de l'aéroport Pearson
- La défense nationale-L'enquête sur le déploiement des Forces canadiennes en Somalie-Le statut des témoins ayant comparu devant la commission
- Le ministère de la Justice-Le respect de la Loi sur les carburants de remplacement
- Le ministère de la Santé-Le respect de la Loi sur les carburants de remplacement
- Le ministère du Développement régional (Québec)-Le respect de la loi sur les carburants de remplacement
- L'Environnement-Les émissions de gaz à effet de serre
- L'Agriculture-Les produits laitiers-Restrictions concernant l'importation de produits contenant l'hormone de croissance recombinante bovine
- L'Équipe Canada-La visite en Asie-Le nombre de marchés commerciaux garantis par le gouvernement canadien
- La Société de développement de Shearwater-Le financement par l'État
- La défense nationale-L'égalité pour les minorités visibles
- Les transports-Les membres du conseil d'administration de Marine Atlantique
- La défense nationale-La prolongation de la durée de vie des Aurora
- La défense nationale-Le Programme d'hélicoptère canadien de recherche et de sauvetage
- Les transports-La modernisation de l'aéroport international de Halifax
- Les transports-Le développement de Halifax en superport
- La défense nationale-Le remplacement des hélicoptères Sea King
- La défense nationale-La détection de sous-marins intrus
- La défense nationale-L'état de la flotte des CF-18 du Commandement aérien
- La
justice
- ORDRE DU JOUR
LE SÉNAT
Le mardi 22 septembre 1998
Prière.
[Traduction]
NOUVEAUX SÉNATEURS
Son Honneur le Président informe le Sénat que le greffier a reçu du registraire général du Canada les certificats établissant que les personnes suivantes ont été appelées au Sénat:Douglas James Roche
Joan Thorne Fraser
Aurélien Gill
Présentation
Son Honneur le Président informe le Sénat que des sénateurs attendent à la porte pour être présentés.Les honorables sénateurs suivants sont présentés, puis remettent les brefs de Sa Majesté les appelant au Sénat. Les sénateurs, en présence du greffier, prêtent le serment prescrit et prennent leur siège.
L'honorable Douglas James Roche, d'Edmonton (Alberta), présenté par l'honorable B. Alasdair Graham, c.p., et l'honorable Lois M. Wilson.
L'honorable Joan Thorne Fraser, de Montréal (Québec), est présentée par l'honorable B. Alasdair Graham, c.p., et l'honorable Joyce Fairbairn.
L'honorable Aurélien Gill, de Mashteuiatsh (Pointe-Bleue) (Québec), est présenté par l'honorable B. Alasdair Graham, c.p., et l'honorable Lise Bacon.
Son Honneur le Président informe le Sénat que chacun des honorables sénateurs susmentionnés a fait et signé la déclaration d'aptitude prescrite par la Loi constitutionnelle de 1867, en présence du greffier du Sénat, commissaire chargé de recevoir et d'attester cette déclaration.
(1420)
L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le monde n'oubliera jamais ces mots du capitaine Robert Lewis, membre de l'U.S. Army Air Corps et copilote de l'Enola Gay:
Alors que la bombe tombait sur Hiroshima et explosait, nous avons vu une ville tout entière disparaître. Dans mon journal de bord, j'ai écrit ces mots: «Mon Dieu, qu'avons-nous fait?»
L'année dernière, le maire d'Hiroshima a publié une lettre ouverte où il disait ceci:
Nous, citoyens d'Hiroshima, qui avons subi un bombardement nucléaire, croyons profondément que la mise au point et la possession d'armes nucléaires constituent un crime contre l'humanité et que armes nucléaires et humanité ne sauraient coexister.
Il évoquait ensuite la décision historique que la Cour internationale de justice a rendue en juillet 1996 et qui a déclaré illégitimes les armes nucléaires comme armes de guerre concevables. Il terminait par un émouvant plaidoyer pour que le désir d'un monde dénucléarisé se transforme en un vaste mouvement en faveur de l'établissement d'une paix mondiale éternelle dans un très proche avenir.
Le sénateur Douglas Roche a consacré une bonne partie de sa brillante carrière à lutter contre les armes que le maire qualifiait à juste titre de «crimes contre l'humanité». Dans son plus récent livre intitulé: The Ultimate Evil: The Moral Case Against Nuclear Weapons, le sénateur Roche nous rappelle à tous que le problème des armes nucléaires est toujours aussi présent et que, pour reprendre l'expression de Walter Mondale, «Il n'y aura pas d'anciens combattants de la Troisième Guerre mondiale».
Comme parlementaire, auteur et diplomate, le sénateur Roche a présenté à l'opinion mondiale un aperçu de ce qui est réalisable si la communauté internationale se mobilise. Il a poursuivi l'idée et l'idéal du désarmement avec passion et rigueur intellectuelle à titre d'ambassadeur canadien du désarmement, de conférencier et président de Global Security Consultants, de participant au projet Ploughshares, où il a réalisé des merveilles, ainsi qu'à titre d'écrivain, ayant rédigé, seul ou en collaboration, plus d'une vingtaine de livres.
Le sénateur Roche est président du Groupe canadien Pugwash et conseiller spécial auprès de la délégation du Saint-Siège à l'Assemblée générale des Nations Unies. Il a été nommé président du comité canadien pour le 50e anniversaire des Nations Unies. Il a reçu quatre doctorats honorifiques. En 1992, il a reçu le prix de la Thakore Foundation en reconnaissance de son travail en matière de désarmement. La même année, il a été nommé officier de l'Ordre du Canada et, en 1995, Sa Sainteté le pape Jean-Paul II l'a fait chevalier commandeur de l'Ordre de Saint-Grégoire-le-Grand.
Les honorables sénateurs qui ont visité les Nations Unies ont admiré la statue de Saint-George tuant le dragon nucléaire. Cette statue symbolisant la victoire du bien contre le mal a été fabriquée au moyen de débris de missiles américains et soviétiques détruits.
Le sénateur Douglas Roche est l'un des grands meneurs de la lutte pour enrayer le mal dans le monde. Grâce à son leadership, bon nombre d'entre nous avons une idée de ce qui est possible: un monde où l'on se souviendra de l'affreuse mission de l'Enola Gay comme d'un épisode tragique d'une époque noire.
Le maire de Hiroshima a exprimé l'espoir qu'un jour, les nations du monde entier comprendront que les armes nucléaires et l'humanité ne peuvent coexister. C'est là l'une des missions entreprises par le sénateur Roche.
Sénateur Douglas Roche, c'est pour nous un honneur de vous accueillir officiellement au Sénat.
Des voix: Bravo!
Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, le grand John Henry Newman a évoqué un jour l'urgence de compter sur des personnes raisonnables, modérées, sensées, au jugement sûr, pour nous guider à travers les dangers de positions extrêmes. Il a évoqué cette urgence dans le contexte des débats politiques de son temps, mais ses paroles continuent d'éveiller des résonances dans l'évolution de sociétés civiles équitables.
Cette urgence ne s'est pas fait sentir plus profondément, les voix de la modération ne se sont pas imposées davantage que dans le débat incessant sur le rôle du Québec au sein du Canada.
Madame le sénateur Joan Fraser a pris fait et cause pour notre pays depuis 1965, lorsqu'elle s'est jointe à la Gazette en tant que jeune journaliste. Après avoir été directrice de l'information et éditorialiste en chef du Financial Times pendant 11 ans, elle est retournée à la Gazette en 1978, à titre d'éditorialiste en chef, et a été nommée rédactrice en chef en 1993, poste qu'elle a occupé jusqu'en 1996.
Au fil des ans, cette fière Montréalaise diplômée de l'Université McGill a gardé un rêve vivant. Elle a conservé la vision et le rêve d'une grande fédération reposant sur la tolérance, la justice, la collaboration et le compromis. Elle s'est employée dans ses articles - même aux heures les plus sombres - à maintenir l'espoir vivant, à chasser la rhétorique, à insister sur le positif et à aspirer constamment au renouvellement du Canada pour tous les Canadiens.
Elle a lutté, ligne après ligne, contre les campagnes de mensonge et de tromperie menées par des extrémistes au sujet du sens véritable de notre pays. Elle a rejeté les forces qui fragilisent et affaiblissent la détermination d'être Canadien. Elle s'est battue pour la préservation d'une société civile qui comprend les craintes et les besoins légitimes des deux camps dans le débat linguistique.
Le 14 août 1996, juste avant de quitter la Gazette pour assumer ses nouvelles fonctions de directrice générale du Centre de recherche et d'information sur le Canada - une division du Conseil pour l'unité canadienne - elle a rédigé un article sur le compromis honorable. Elle a cité les paroles de sir Wilfrid Laurier et évoqué les immenses ramifications de son leadership, un leadership qui a inspiré ses concitoyens à aller au-delà de leur identité de Français ou de Britanniques et à se voir comme des Canadiens. Elle a repris ces paroles de Laurier:
Je suis Canadien. Le Canada est l'inspiration de ma vie. J'ai sous les yeux, colonne de feu la nuit, colonne de nuées le jour, une politique de vrai canadianisme, de modération, de conciliation.
Sénateur Fraser, vous qui possédez une vaste connaissance de la radiodiffusion en anglais et en français, qui avez remporté deux prix décernés par des quotidiens nationaux et reçu quatre mentions honorables de journaux nationaux, vous apporterez, nous en sommes convaincus, votre grande perspicacité au Sénat, un endroit qui, comme vous l'avez si bien fait remarquer, joue le rôle d'une deuxième paire d'yeux dans notre régime parlementaire canadien.
[Français]
Excellente journaliste et pilier de l'information, vous avez toujours su garder votre intégrité et votre honnêteté dans le milieu des communications. C'est avec honneur que nous vous accueillons au Sénat.
[Traduction]
Des voix: Bravo!
Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, quelqu'un a dit un jour que, pour accomplir de grandes choses, il fallait non seulement agir, mais encore rêver; non seulement rêver, mais encore croire. Le sénateur Aurélien Gill a travaillé toute sa vie à inciter son peuple à comprendre qu'il pouvait réaliser ses ambitions, quelles qu'elles soient, qu'il pouvait aspirer à l'excellence.
[Français]
Né au Québec, dans la région de Pointe-Bleue, au Lac Saint-Jean, le sénateur Gill a terminé son baccalauréat en pédagogie à l'Université Laval de Québec.
[Traduction]
Il a commencé sa carrière dans l'enseignement, une carrière qu'il a, d'une foule de manières importantes, poursuivi toute sa vie en aidant son peuple à lutter contre les iniquités du passé et à se préparer à assumer les droits et responsabilités de citoyens à part entière. Il a travaillé sans relâche à offrir une tribune aux Premières nations du Canada.
Ainsi, il a été un défenseur passionné du renforcement de l'autonomie d'un peuple qui, à bien des égards, représente la clé de notre grande identité nationale - nos Premières nations qui ont navigué sur les eaux des régions sauvages et qui ont connu les tourments des portages, qui constituent notre lien spécial avec les grandes distances, l'aventure, la solitude et les mystères des grandes régions sauvages canadiennes.
Ancien directeur général du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, le sénateur Gill a été président fondateur du Conseil Attikamek-Montagnais et chef de la bande Mashteuiatsh Montagnaise de 1975 à 1982 et de 1987 à 1989. Il a par la suite joué des rôles importants au sein du Conseil de la police amérindienne, de la Confédération des Indiens du Québec, de la Fraternité des indiens du Canada, l'ancêtre de l'Assemblée des Premières nations et des comités consultatifs autochtones provinciaux et national. Aurélien Gill a été décoré de l'Ordre national du Québec en 1991.
Plus récemment, il a contribué à garantir des services aux entreprises et de l'aide aux nouveaux entrepreneurs autochtones, à assurer leur développement, leur compétitivité et leur succès tant sur le marché canadien que sur les marchés mondiaux, à l'émergence de nouveaux modèles servant d'inspiration aux nouvelles générations d'entrepreneurs pour qu'ils exploitent leur économie locale selon les valeurs traditionnelles.
Dans toutes ces entreprises, le sénateur Gill s'est engagé à édifier un monde meilleur pour son peuple, un monde fait de respect et de dignité, un monde où son peuple assume la responsabilité de ses propres affaires, un monde où les Premières nations ont le droit d'espérer et de rêver et, par-dessus tout, le droit de grandir en tant qu'égaux.
Dans tout cela, il a compris le véritable sens du mot leadership. Il a appris que la marque d'un grand chef, c'est quand les gens disent, une fois qu'il a fait son travail: «Nous avons fait ceci par nous-mêmes.»
Voilà la marque d'un vrai chef.
Par votre détermination, votre engagement et votre exemple personnel, vous avez montré que, pour aspirer à de grandes choses, les autochtones doivent non seulement agir, mais aussi rêver, non seulement rêver, mais aussi croire.
Sénateur Gill, le Sénat du Canada se considère privilégié de vous avoir en son sein, car la grande réalité de tout ce qui est canadien est que notre pays ne nous sera rendu que par les Premières nations qui en possèdent la clé.
Des voix: Bravo!
L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, le Sénat du Canada est le seul organe législatif canadien que je connaisse où le porte-parole de l'opposition accueille les nouveaux membres avec autant d'enthousiasme - disons presque autant d'enthousiasme - que le leader du gouvernement.
C'est dû à un certain nombre de raisons, la moindre n'étant pas que, ici, la civilité et la courtoisie l'emportent sur l'esprit partisan. Les qualités des nouveaux membres sont plus importantes pour nous que leur affiliation politique. Voilà un des attributs positifs de cette Chambre nommée que l'on trouve rarement dans une Chambre élue où l'on note les départs, mais où les nouveaux arrivants sont reçus dans l'indifférence.
Cela ne veut pas dire que la promotion de nos tendances politiques cesse chez nos collègues. Le sénateur Roche, par exemple, a représenté Edmonton-Strathcona avec distinction pendant 12 ans sous la bannière du Parti progressiste-conservateur. Ses années à l'autre endroit et sa connaissance du contrôle des armements nous seront utiles. Il s'est déclaré indépendant et seul le temps nous dira si nous saurons le convaincre de se déssaisir de cette identité difficile pour revenir au caucus où il a autrefois si bien travaillé.
[Français]
Il est regrettable que lorsque l'on parle des autochtones au Québec, c'est plus souvent de ceux qui, pour exprimer leur désaccord avec une politique fédérale, provinciale ou municipale, prennent les grands moyens, comme la fermeture de routes et l'érection de barricades. La vérité veut que la vaste majorité des autochtones du Québec dénonce la confrontation et croit plutôt que quel que soit le bien-fondé de ses doléances, les solutions se trouvent plus souvent qu'autrement dans le franc-parler et la négociation. La communauté montagnaise est un exemple frappant de cette approche. Le sénateur Gill 9uvre depuis des années pour la cause de tous les autochtones, non seulement pour celle de sa communauté. Il nous apporte une expérience et une connaissance dans cette ligne de pensée qui nous aideront tous à mieux apprécier les vrais besoins de ses concitoyens et nos responsabilités envers eux.
Fait à noter en passant, le Sénat compte quatre autochtones parmi ses 104 membres, tandis que la Chambre élue, donc supposément plus représentative avec ses 301 membres, croyez-le ou non, en compte moins.
[Traduction]
La biographie de madame le sénateur Fraser, distribuée par le Cabinet du premier ministre, ne mentionne pas le fait que deux jours à peine avant l'annonce de sa nomination, elle était conférencière invitée au caucus d'été du Parti progressiste-conservateur à Sherbrooke.
Il ne fait aucun doute que les vues qu'elle a exprimées à cette assemblée sur l'attitude des Québécois en rapport avec certaines questions d'intérêt national et provincial ont été portées à l'attention du premier ministre, qui n'a pas hésité alors à confirmer sa nomination au Sénat.
Se pourrait-il alors que l'on puisse croire que son acceptation à se joindre au Sénat aussi vite après la rencontre des conservateurs pourrait signifier qu'elle désire maintenant en savoir davantage sur notre caucus?
Elle pourrait aussi vouloir renforcer au plus vite certaines des opinions exprimées dans l'éditorial de la Gazette du 14 juillet 1993, alors qu'elle était rédactrice en chef de ce journal. En parlant du Sénat, elle a dit ceci:
[...] c'est une Chambre du Parlement, l'organe législatif du pays. La Constitution dispose que les lois doivent être adoptées au Sénat comme aux Communes. En fait, les sénateurs ont le temps et les compétences nécessaires pour corriger de nombreuses erreurs d'ordre technique ou autre. À quelques mémorables exceptions près [...] les sénateurs en donnent aux Canadiens pour leur argent.Je suis sûr, honorables sénateurs, que madame le sénateur Fraser et les autres nouveaux sénateurs en donneront aux Canadiens pour leur argent. J'espère seulement qu'elle aura plus de succès que certains d'entre nous à faire publier ses lettres ou ses opinions dans les pages de la Gazette pour faire connaître les réalisations du Sénat alors qu'auparavant, elle considérait que de tels envois ne valaient pas la peine d'être communiqués aux lecteurs de ce journal.
Tous les sénateurs de ce côté de la Chambre se joignent à moi pour souhaiter la meilleure des chances à nos trois nouveaux collègues.
Visiteurs de marque
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, avant de passer aux déclarations de sénateurs, je voudrais saluer la présence à notre tribune du sergent Keith Mitchell et du caporal-chef Brian Pierce.Le sergent Mitchell et le caporal-chef Pierce viennent de recevoir la Croix de la Vaillance, la plus haute distinction accordée par le Canada pour souligner les actes de bravoure en temps de paix.
Le 12 novembre 1996, ils ont fait un saut en parachute sans précédent, la nuit, d'un appareil Hercules dans les eaux glacées de l'Arctique pour porter des secours médicaux à un pêcheur gravement malade à bord d'un chalutier danois situé près de l'île Resolution, dans les Territoires du Nord-Ouest.
Sergent Mitchell et caporal-chef Pierce, le Sénat est heureux de vous accueillir.
Des voix: Bravo!
DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
L'enceinte du Parlement
La restauration de peintures de la claire-voie du Sénat par le personnel du Musée de la guerre
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue, après le congé d'été, et vous souhaite à tous une excellente session très fructueuse.Je voudrais attirer votre attention sur les huit peintures qui ornent la salle du Sénat. Les honorables sénateurs savent que ces tableaux n'appartiennent pas au Sénat, mais au Musée canadien de la guerre. Vous vous rappellerez que l'an dernier, l'honorable sénateur Forrestall a soulevé la question de l'état de ces peintures. Pour donner suite à son intervention, nous avons communiqué avec le Musée de la guerre et le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux. Des spécialistes sont venus examiner les peintures. Pendant le congé estival, ils les ont descendues du mur et les ont réparées ou restaurées ici même, sur le parquet du Sénat. Elles sont maintenant en bon état et bien préservées pour de longues années. Elles risquaient effectivement de se détériorer gravement.
Je remercie le sénateur Forrestall d'avoir signalé ce problème. Je remercie également le Musée canadien de la guerre et le ministère des Travaux publics qui ont fait du bon travail avec une remarquable célérité, et, dois-je ajouter, sans qu'il n'en coûte rien au Sénat.
La Nouvelle-Écosse
L'accident du vol 111 de la Swissair au large de Peggy's Cove-Hommage à la réaction de la collectivité
L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, nous avons tous lu avec angoisse les détails des derniers moments du vol 111 de la Swissair et déploré la collision finale des quelque 230 tonnes de tôle, 215 passagers et 14 membres d'équipage avec le mur de béton constitué par l'océan Atlantique. Nous connaissons l'horreur de la tragédie survenue dans le secteur de Peggy's Cove, à sept milles du site de l'écrasement, dont la beauté nous laissera dorénavant songeurs, ainsi que la valeur et le courage dont nous avons été témoins.Tout cela est très présent à ma mémoire aujourd'hui. Je pense au site de l'écrasement couvert de débris et à la lumière fantomatique sur une mer agitée qui a connu d'autres désastres. Je pense aux opérations de sauvetage et à la douleur des plongeurs, qui ratissaient sans relâche le secteur pour récupérer les dépouilles des victimes et apporter ainsi un peu de consolation à leurs proches. Je pense à tous ces gens dont la vie ne sera plus jamais la même.
Je pense à Indian Harbour et au service funèbre qui y a été célébré. Je pense à Claire Mortimer, qui a remercié les gens de la région pour leur commisération avec les familles et qui, malgré son propre deuil, se souciait du gagne-pain des pêcheurs, qui s'étaient d'ailleurs immédiatement rendus sur le site de la tragédie. C'est ce que font les gens de la Nouvelle-Écosse devant le malheur. Je pense à cette terrible tristesse qu'il est impossible d'exprimer.
Je pense aux agents de bord debout en cercle sur la plage, à Baywater, où ils s'étaient réunis pour rendre hommage à leurs collègues disparus, collègues qu'ils n'avaient jamais rencontrés. Je pense aux fleurs qu'on jetait à la mer. Je pense à la lecture des noms des victimes au service funèbre - à leurs rêves et aspirations, à leurs talents et à leurs triomphes. Je pense au passage de l'hélicoptère Sea King, qui a jeté une couronne de fleurs, et à la simplicité de la chorale d'enfants.
Aujourd'hui, je pense à l'honneur et au privilège que j'ai d'être un Canadien de la Nouvelle-Écosse. Je pense à la réaction immédiate des collectivités de la Nouvelle-Écosse pour venir en aide aux familles des victimes. Dans ces milieux, le partage et l'assistance à autrui constituent un mode de vie. Je pense au travail du Centre de recherche et sauvetage de la marine, des militaires des forces armées, de la Garde côtière, de la GRC ainsi que des pompiers et policiers de la région. Je pense au système de recherche et de sauvetage bénévole de la Nouvelle-Écosse, qui est sans pareil. Je pense aux hôpitaux et au personnel médical, qui étaient prêts à soigner des survivants qui ne sont jamais arrivés. Je pense au rôle extraordinaire qu'ont joué les ministres du culte et les conseillers.
Je pense au personnel du Bureau de la sécurité des transports du Canada, qui s'efforce résolument et soigneusement de remettre tous les morceaux en place. Je pense au docteur John Butt, médecin légiste en chef de la Nouvelle-Écosse et à son équipe médicale, qui devront effectuer pendant plusieurs semaines la difficile identification des corps.
Je pense aux communautés de pêcheurs, pour qui le sauvetage est devenu une seconde nature, à ce nouveau chapitre de leur relation courageuse et turbulente avec la mer et à la façon dont ils ont réagi aux 5 000 naufrages et plus survenus au cours d'une période de cinq siècles. Pendant l'un des pires naufrages survenus, celui du paquebot de ligne SS Atlantic, le 1er avril 1873, des pêcheurs ont rescapé 400 survivants, au risque de leur propre vie. Tous les bateaux des villages situés autour de Peggy's Cove avaient alors été mis à contribution. Les corps des personnes retrouvées sont enterrés dans un cimetière qui a récemment été restauré et que les communautés de pêcheurs de Prospect continuent d'entretenir.
Lorsque le vol 111 de la Swissair s'est abîmé dans l'océan au cours de ce fatidique mercredi soir, plus d'une douzaine de bateaux se sont rendus sur les lieux de l'accident. Prévoyant y recueillir des survivants, les gens avaient apporté des couvertures et de la nourriture. Fait très émouvant, quelqu'un avait même apporté un canot de sauvetage.
Honorables sénateurs, voilà qui dépeint la force de l'esprit communautaire propre aux gens de ma région, ainsi que la puissance des valeurs et traditions anciennes, le courage et l'humanité des gens qui vivent près de la mer. Les Canadiens doivent se souvenir que c'est grâce à des gens comme eux que notre pays a été conçu et façonné.
Aujourd'hui, alors que nous rendons hommage aux victimes du vol 111 et au courage sans égal des personnes qui sont intervenues sur les lieux de ce désastre aérien, le second en gravité dans l'histoire de notre pays, je pense au phare dressé sur les rochers de Peggy's Cove, ce phare qui symbolisait l'espoir face à une situation désespérée et à une cruelle catastrophe, mais je pense surtout à l'esprit des habitants de la Nouvelle-Écosse et à notre pays magnifique et compatissant dont ils sont une précieuse composante.
L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, je joins ma voix à celle du leader du gouvernement pour exprimer les condoléances du Sénat aux familles des personnes qui ont récemment péri dans la tragédie survenue au large des côtes de la Nouvelle-Écosse.
Lorsque, le 2 septembre 1998, le vol 111 de la Swissair s'est abîmé dans l'océan au large de Peggy's Cove, un des endroits les plus prisés et admirés de ma province, des centaines d'habitants de la Nouvelle-Écosse se sont dirigés vers le lieu de l'accident pour tenter de sauver des vies. Ils l'ont fait de façon spontanée et conformément à notre tradition. Certains s'y sont rendus volontairement parce que c'était leur travail ou leur devoir, un devoir dont ils se sont acquittés avec honneur et diligence; d'autres l'ont fait simplement pour aider leurs semblables. Ambulanciers, pompiers bénévoles, médecins, infirmières, auxiliaires de la Garde côtière, ils se sont tous rendus à leur lieu de travail ou sur les lieux de l'accident dans l'espoir de sauver des vies. Malheureusement, il n'y a eu aucun survivant. Ces personnes, qui sont intervenues rapidement dans un esprit d'altruisme, méritent nos remerciements.
(1450)
Honorables sénateurs, la Gendarmerie royale du Canada a envoyé des centaines d'agents de différents endroits de notre magnifique pays dans cette région pour entreprendre la tâche très pénible d'aider les familles des victimes, enquêter sur l'écrasement, identifier les restes humains et maintenir l'ordre. Honorables sénateurs, par leur délicatesse et leur professionnalisme, ils constituent un exemple pour tous les Canadiens, et nous pouvons tous être fiers de leur comportement au vu de cette tragédie.
La Garde côtière canadienne a aussi affecté des centaines de professionnels à cet accident, depuis les opérations de recherche du début à la phase de récupération de cette énorme tâche. Souvent oubliée et peu connue à l'extérieur du Canada, et en particulier des localités côtières, la Garde côtière canadienne continue d'offrir un service en or à notre pays et à toute personne dans le besoin. Ses membres méritent d'être félicités pour leurs actions et leur service désintéressé.
Je suis aussi très fier de nos marins, soldats et aviateurs des Forces armées canadiennes, des professionnels qui sont souvent oubliés, très calomniés et peu compris. Des centaines de militaires font leur travail dans les plus horribles, les plus désagréables et les plus cauchemardesques des conditions. Des soldats du RCR et du 4e Régiment d'artillerie antiaérienne ont fourni des équipes de recherche pour les recherches au sol, d'abord de survivants puis de restes humains - non pas de cadavres, honorables sénateurs, mais de restes humains. Ils ont été assistés dans cette pénible tâche par des réservistes des régiments les plus anciens et les plus fiers de la Nouvelle-Écosse. Des infirmiers et des médecins de réserve travaillent encore à la morgue de la BFC Shearwater.
Les marins font aussi leur part dans toute cette horreur. La morgue sur place avait d'abord été établie à bord du NCSM Preserver. Toutefois, les NCSM Halifax, Kingston, Okanagan, Anticosti et Moncton, entre autres, ont aussi contribué à ce travail horrible qui change une vie. Les équipages des Sea King, Griffon et Aurora se sont dévoués sur le lieu de l'écrasement avec la même diligence et la même conscience professionnelle que nos autres marins et soldats.
Enfin, on ne peut qu'être impressionné par les équipes de plongeurs. Il est déjà très dur physiquement et psychologiquement de descendre plusieurs douzaines de mètres sous l'eau. Qu'est-ce que cela doit être, honorables sénateurs, d'aller chercher sous l'eau les restes d'autres êtres humains? Cela change une vie, comme je l'ai dit.
Au nom de tous les honorables sénateurs, je tiens à dire à tous ceux qui ont servi avec application et professionnalisme en tant que membres de la Gendarmerie royale du Canada, de la Garde côtière canadienne et des forces canadiennes, ainsi qu'aux habitants de la Nouvelle-Écosse qui ont travaillé bénévolement au cours de cette tragédie, que nous sommes très fiers d'eux.
Honorables sénateurs, à ces grands Canadiens dont j'ai parlé et à ceux que j'ai pu oublier, je dis ceci: dans ce monde imparfait, vous ne recevrez jamais les remerciements qui vous sont vraiment dus, mais, du fond du coeur, nous vous rendons hommage aujourd'hui.
Son Honneur le Président: Si aucun autre sénateur ne souhaite intervenir sur ce sujet, j'invite les honorables sénateurs à se lever et à observer avec moi une minute de silence.
(Les honorables sénateurs observent une minute de silence.)
L'enregistrement des armes à feu
L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, je remercie les deux derniers sénateurs de leurs propos des plus éloquents. Je voudrais formuler quelques réserves concernant le registre universel des armes à feu, tel qu'il est prévu dans les dernières modifications apportées aux lois sur le contrôle des armes à feu du Canada.Quand le Parlement s'est penché sur la loi créant un registre universel d'armes à feu, il est apparu clairement que l'établissement de ce registre serait une entreprise importante et fort coûteuse. L'opinion publique en faveur du registre a été et est toujours citée comme une raison suffisante pour imposer ce registre, mais il faut se demander s'il serait efficace.
Un régime d'enregistrement permettrait de retracer le propriétaire initial d'une arme à feu, ce qui pourrait se révéler utile dans un petit nombre d'enquêtes criminelles, pourvu qu'il n'y soit pas question d'armes à feu passées en contrebande ou acquises illégalement.
Il faut aussi penser que le régime mis au point par le gouvernement permettrait difficilement de réduire la criminalité, puisque les criminels enregistrent rarement leurs armes à feu. Les groupes organisés, comme les Hell's Angels ou les Rock Machine, n'enregistrent probablement pas leurs armes à feu.
Un autre argument évoqué par ceux qui préconisent un système d'enregistrement universel, c'est que beaucoup d'accidents mortels et de suicides sont attribuables à la facilité avec laquelle on peut se procurer des armes à feu. En réfutant cet argument, il est essentiel de se rappeler que, même si on peut attribuer un certain nombre de suicides et d'accidents à la facilité d'accès aux armes à feu, on ne connaît pas l'ampleur du problème. L'enregistrement des armes à feu ne remédiera pas à cette situation.
La réglementation en matière d'entreposage pourrait contribuer à réduire le nombre des accidents et des suicides si elle était bien appliquée, mais c'est un grand point d'interrogation. Par exemple, au cours des audiences du comité sénatorial chargé d'étudier le projet de loi C-68, un chef de police a admis volontiers que ses agents n'avaient pas reçu de formation précise quant à l'application de la loi C-17.
En ce qui concerne les suicides, l'enregistrement des armes à feu ne changera rien. Ceux qui sont déterminés à s'enlever la vie recourront à d'autres moyens de le faire, ou iront prendre l'arme à feu dans l'armoire à armes à feu fermée à clé et iront dans l'autre pièce chercher les balles pour mettre leur dessein à exécution.
Il est important de noter que la loi C-17, qui avait précédé la loi C-68, obligeait tous les requérants du permis d'acquisition d'armes à feu à fournir plus de renseignements personnels que ce n'était le cas auparavant. En plus des questions touchant l'existence d'un casier judiciaire ou un passé de maladie mentale, le formulaire établi en vertu de la loi C-17 comportait des questions concernant le traitement de l'alcoolisme ou de la toxicomanie au cours des cinq années précédentes et le divorce ou la perte d'emploi au cours des deux années précédentes.
Un autre argument défendu par ceux qui sont en faveur d'un système d'enregistrement universel, c'est que les crimes sont souvent commis au moyen d'armes à feu perdues ou volées.
Son Honneur le Président: Je regrette de devoir dire à l'honorable sénateur Stratton que son temps de parole est écoulé. A-t-il la permission de poursuivre?
Des voix: D'accord.
(1500)
Le sénateur Stratton: Honorables sénateurs, il n'existe tout simplement aucune donnée sur l'origine des armes à feu utilisées pour commettre des crimes au Canada. S'il était prouvé que la plupart des crimes étaient commis à l'aide d'armes à feu perdues ou égarées, la solution consisterait encore une fois à donner la priorité à l'application de la réglementation en matière d'entreposage.
Les cours sur le maniement sécuritaire des armes à feu n'ont pas commencé avant le milieu de l'année 1994. Les lois et les règlements peuvent être efficaces seulement s'ils sont assortis d'un objectif réalisable et s'ils peuvent être appliqués concrètement. Nous devons résister à la tentation d'adopter des lois sans prendre en considération leurs résultats concrets.
Un dernier argument que font valoir les tenants de l'enregistrement universel, c'est le fait qu'il faut limiter rigoureusement la propriété privée et la possession d'armes à feu. Or, cet argument ne tient pas compte du fait que les armes de poing sont rigoureusement limitées et qu'elles le sont depuis 1935. Les armes à feu doivent être enregistrées et elles ne peuvent être utilisées qu'à certaines fins. Cela me rappelle l'incident avec le poivre de cayenne.
En pratique, les armes à feu ne sont pas autorisées à des fins récréatives sauf pour le tir sur cibles et à titre de pièces de collection. Avant l'adoption du projet de loi C-68, des dispositions rigoureuses régissaient déjà l'entreposage et le transport d'armes de poing, et la réglementation sur l'entreposage sécuritaire était plus détaillée à l'égard des armes à feu à autorisation restreinte.
Les gens qui sont venus manifester sur la colline aujourd'hui ont des arguments fort valables. Le gouvernement serait sage de les prendre en considération.
L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, je prends la parole au nom des citoyens respectueux des lois qui manifestent devant cet édifice aujourd'hui. Nous sommes nombreux à avoir participé au débat sur le projet de loi C-68, celui sur l'enregistrement des armes à feu, et à nous être demandé pourquoi le gouvernement voulait faire adopter ce projet de loi si tôt après la dernière initiative ministérielle présentée à cet égard, le projet de loi C-17. Après tout, certaines dispositions du projet de loi C-17 n'étaient entrées en vigueur qu'en 1994, lorsque les libéraux ont été portés au pouvoir.
Le processus à l'issue duquel le projet de loi C-17 est entré en application a commencé en 1992, et certaines mesures importantes n'ont été mises en oeuvre qu'en 1994. De toute évidence, honorables sénateurs, il n'y a pas suffisamment de temps qui s'est écoulé depuis l'adoption du projet de loi C-17 pour qu'on puisse en évaluer les répercussions.
En 1996, le ministère de la Justice a rendu publique une évaluation des répercussions de la loi de 1977 sur le contrôle des armes à feu. Le ministère a souligné que, pendant l'étude, il est devenu clair que les dispositions législatives de 1991 ne pourraient être évaluées.
Honorables sénateurs, la sécurité du public sera encore plus menacée si ceux qui font appliquer la loi sont contraints de consacrer une part trop importante de leurs ressources à l'administration de nouvelles lois et de règlements sur les armes à feu, y compris celles qui sont possédées légalement et servent à des fins légitimes, avant même que l'on sache si les programmes déjà en place étaient efficaces.
Les mesures de contrôle des armes à feu qui ne sont pas bien appliquées ne serviront qu'à miner le respect de la population pour ces mesures, particulièrement chez les tireurs sportifs, dont le soutien est crucial pour le succès de tout programme de réglementation.
Honorables sénateurs, l'irritation de bien des manifestants est en partie attribuable au fait que le gouvernement a présenté un nouveau projet de loi sans prendre le temps d'évaluer les répercussions du projet de loi de 1991. Personne ne sait combien coûtera le nouveau registre des armes à feu, mais les estimations vont de 50 millions de dollars à un demi milliard de dollars. Aucune évaluation des règlements déjà en vigueur n'a été faite. Qui plus est, rien ne prouve que les nouvelles mesures sont nécessaires pour aider à prévenir le crime.
Le gouvernement actuel doit démontrer clairement que la mesure supplémentaire d'enregistrement des armes contenue dans le projet de loi C-68 permettra de mieux protéger la population. Il faut également démontrer que de telles mesures permettraient mieux de prévenir les crimes avec violence que d'autres mesures auxquelles on consacrerait les mêmes ressources.
Puisque toute mesure gouvernementale demande nécessairement du temps, des investissements sociaux, politiques et monétaires, il incombe au gouvernement d'évaluer les programmes déjà en place afin de déterminer quels problèmes restent à régler et de prendre les mesures pour les régler. Dans le processus suivi par le gouvernement pour présenter et adopter le projet de loi C-68, ces principes fondamentaux de gouvernement n'ont pas été respectés, et c'est pourquoi nous voyons aujourd'hui, devant notre enceinte sacrée, de bons citoyens respectueux des lois manifester contre ces mesures de contrôle et cette loi inutiles.
Le Code régissant la protection des renseignements privés d'ordre médical
L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, il n'y a rien de plus important pour les Canadiens que leur vie privée. L'importance de préserver le caractère confidentiel des renseignements personnels, d'ordre médical particulièrement, ne pourra jamais être exagérée.Les antécédents médicaux sont souvent de nature très délicate et très personnelle et leur publication involontaire peut être la source de souffrances inutiles. C'est pourquoi j'ai été ravi d'apprendre que les délégués à la 131e assemblée générale de l'Association médicale canadienne s'étaient réunis à Whitehorse pour rédiger un code sur la protection des renseignements privés d'ordre médical.
Nous connaissons tous l'ampleur que prend la technologie de pointe à notre époque et l'AMC craint que l'informatisation poussée des renseignements généraux d'ordre médical et les progrès des systèmes d'information en médecine ne menacent le caractère confidentiel des renseignements sur les malades.
Les progrès de la technologie de l'information, spécialement dans le domaine médical, présentent des avantages évidents, mais ces avantages sont assortis de la responsabilité de s'assurer qu'ils servent les intérêts du public et d'éviter qu'ils lui nuisent.
En 1986, Statistique Canada a réagi à la possibilité que l'informatisation des données ne cause des problèmes en élaborant une politique sur le couplage de dossiers. On craignait à l'époque que l'informatique ne permette de comparer des renseignements provenant d'une variété de sources totalement indépendantes, sans que la personne concernée ne soit au courant. L'AMC a également réagi à ces préoccupations. Son code de confidentialité préconisé par les médecins est une première étape admirable vers ce que l'AMC espère voir devenir une norme dans le domaine médical.
Compte tenu des récents changements apportés aux politiques de divulgation de renseignements à des tiers, les responsabilités des médecins en matière de protection des renseignements concernant leurs patients seront plus clairement définies dans ce code. Celui-ci est fondé sur le code modèle de l'Association canadienne des normes pour la protection des renseignements personnels.
Bruce Phillips, commissaire fédéral à la protection de la vie privée, appuie sans réserve ce document qu'il appelle le serment d'Hippocrate de l'ère de l'information. Il a ajouté que c'était:
[...] un document remarquable énonçant clairement les principes fondamentaux qui sont essentiels à la protection de la vie privée du patient et de l'intégrité de la relation entre le médecin et le patient.Toute disposition d'une loi canadienne existante permettant ou exigeant la collecte ou la divulgation de données sur la santé ou encore l'accès à de telles données à l'insu du patient ou sans son consentement ferait l'objet d'un examen. De plus, on examinerait attentivement tous les projets de loi afin de s'assurer qu'ils sont conformes à ce code.
En cette ère où la technologie évolue si rapidement, il est bien reconnu que les organes directeurs doivent répondre aux besoins que créent ces changements. Le conseil général implore les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux de se joindre à lui dans l'adoption de ce code qu'il prévoit mettre en oeuvre graduellement au cours des cinq prochaines années. L'AMC travaillera en étroite collaboration avec la communauté médicale pour trouver des façons de voir à ce que les principes énoncés dans le code deviennent la norme dans l'ensemble du secteur.
Grâce à ce code, les Canadiens pourront être assurés que leur vie privée est à l'abri de toute atteinte et que les renseignements personnels qui les concernent ne peuvent pas être divulgués à leur insu et sans leur consentement.
Visiteurs de marque
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, avant d'appeler le prochain article au Feuilleton, je vous signale la présence de certains visiteurs à notre tribune du côté droit. Ce sont des jeunes Canadiens du Nunavik, dans le nord du Québec, qui participent au Programme des Rangers canadiens, un programme pour les jeunes parrainé par le ministère de la Défense nationale.Nous vous souhaitons la bienvenue au Sénat et vous encourageons à poursuivre votre bon travail.
AFFAIRES COURANTES
L'état du système financier
Dépôt du rapport intérimaire du comité des banques et du commerce
L'honorable Michael Kirby, président du comité sénatorial permanent des banques et du commerce, dépose le rapport suivant:Le mardi 22 septembre 1998
Le comité sénatorial permanent des banques et du commerce a l'honneur de déposer son
QUATORZIÈME RAPPORT
Votre comité, qui a été autorisé par le Sénat le mercredi, 22 octobre 1997 à examiner, pour rapport, l'état du système financier canadien, dépose maintenant un rapport intérimaire intitulé: «La responsabilité proportionnelle modifiée».Respectueusement soumis,
Le président,
MICHAEL KIRBY
(Sur la motion du sénateur Kirby, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)
(1510)
Régie interne, budgets et administration
Présentation du vingt-quatrième rapport
L'honorable Bill Rompkey, président du comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, présente le rapport suivant:Le mardi 22 septembre 1998
Le comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration a l'honneur de présenter son
VINGT-QUATRIÈME RAPPORT
Votre comité a étudié et approuvé les budgets présentés par les comités suivants pour les dépenses projetées desdits comités pour l'exercice se terminant le 31 mars 1999:
Banques et Commerce - Budget supplémentaire (Examen de l'état du système financier canadien):
Services professionnels et autres 84 000 $
Transports et communications 248 268 $
Autres dépenses 22 000 $
TOTAL 354 268 $
comité mixte permanent des langues officielles (portion du Sénat):
Services professionnels et autres 3 720 $
Transports et communications 40 764 $
Autres dépenses 3 300 $
TOTAL 47 784 $
comité spécial sénatorial de la sécurité des transports:
Services professionnels et autres 53 500 $Respectueusement soumis,
Transports et communications 42 500 $
Autres dépenses 1 500 $
TOTAL 97 500 $
Le président,
WILLIAM ROMPKEY
(Sur la motion du sénateur Rompkey, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)
[Français]
L'ajournement
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat, et nonobstant l'article 58(1)h) du Règlement, je propose:Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, il demeure ajourné jusqu'à demain, le mercredi 23 septembre 1998, à 13 h 30.
Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
[Traduction]
L'Association parlementaire canadienne de l'OTAN
Réunion conjointe de comités de l'Assemblée de l'Atlantique Nord, à Bruxelles, en Belgique-Dépôt du rapport de la délégation canadienne
L'honorable Bill Rompkey: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le troisième rapport de la délégation de l'Association parlementaire canadienne de l'OTAN, qui a représenté le Canada lors de la réunion conjointe des comités de l'Assemblée de l'Atlantique Nord sur la défense et la sécurité et sur l'économie et la politique qui s'est tenue à Bruxelles, en Belgique, les 15 et 16 février 1998.
Réunion de la Commission permanente et des secrétaires des délégations nationales de l'Assemblée de l'Atlantique Nord, à Madère, au Portugal-Dépôt du rapport de la délégation canadienne
L'honorable Bill Rompkey: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le quatrième rapport de la délégation de l'Association parlementaire canadienne de l'OTAN, qui a représenté le Canada lors de la réunion de la Commission permanente et des secrétaires des délégations nationales de l'Assemblée de l'Atlantique Nord qui s'est tenue à Madère, au Portugal, du 27 au 29 mars 1998.
Le droit comparé
Conférence à Bristol, en Angleterre-Avis d'interpellation
L'honorable Gérald-A. Beaudoin: Honorables sénateurs, je donne avis que jeudi prochain, le 24 septembre 1998, j'attirerai l'attention du Sénat sur ma participation au XVe congrès international de droit comparé qui s'est tenu la dernière semaine du mois de juillet 1998 à Bristol, en Angleterre. Ma participation était liée au constitutionnalisme au Canada.
Projet de loi privé
La Roman Catholic Episcopal Corporation of Mackenzie-Projet de loi modificatif-Présentation d'une pétition
L'honorable Nicholas W. Taylor: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de présenter une pétition de la Roman Catholic Episcopal Corporation of Mackenzie, du diocèse catholique romain de Markenzie-Fort Smith, dans les Territoires du Nord-Ouest. Les pétitionnaires prient pour l'adoption d'une loi modifiant la loi constituant la Roman Catholic Episcopal Corporation of Mackenzie.
PÉRIODE DES QUESTIONS
La justice
Le coût d'établissement d'un système d'enregistrement des armes à feu-La date d'entrée en vigueur des augmentations de droits pour les propriétaires d'armes à feu-La position du gouvernement
L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. En 1995, le ministre de la Justice a déclaré à de multiples reprises que le coût d'établissement d'un système d'enregistrement des armes à feu serait d'environ 85 millions de dollars répartis sur sept ans et qu'on récupérerait cette somme avec le temps grâce aux droits exigés des propriétaires et des utilisateurs d'armes à feu. Le 26 mai 1998, le leader du gouvernement au Sénat a précisé que le coût avait grimpé à 133 millions de dollars environ. Entre-temps, on a laissé entendre qu'il faudrait compter 250 millions de dollars de plus pour mettre les systèmes informatiques à niveau afin que les policiers puissent avoir un accès adéquat à l'information contenue dans le système d'enregistrement des armes à feu. Pour récupérer les dépenses beaucoup plus élevées qui ont déjà été effectuées, ainsi que les autres coûts auxquels le gouvernement n'avait pas songé, c'est évident, il faudra presque certainement accroître de façon marquée les droits exigés.Le leader du gouvernement pourrait-il nous dire quand le gouvernement entend dire aux propriétaires d'armes à feu à quel moment on procédera à ces hausses de droits? A-t-on déjà établi les nouveaux droits? Dans l'affirmative, à combien s'élèvent-ils?
L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je pense que l'information que j'ai fournie avant notre ajournement au printemps était exacte en ce qui concerne les coûts. En ce qui a trait à toute autre escalade des coûts, je devrai me renseigner et soumettre les renseignements voulus à mes honorables collègues.
Le sénateur Stratton: Honorables sénateurs, le leader du gouvernement dit-il que ce qu'il a déclaré au printemps est toujours vrai en ce qui concerne les coûts et qu'il est toujours question de 133 millions de dollars?
Le sénateur Graham: Je dis que c'était un chiffre exact à l'époque. J'ignore à combien s'élève le chiffre à l'heure actuelle, mais je suis prêt à me renseigner et à donner cette information.
Les retards dans l'établissement du système d'enregistrement des armes à feu-La position du gouvernement
L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, je voudrais poser une question complémentaire. Le ministre pensait également que le processus d'enregistrement serait simple et qu'il commencerait le 1er janvier 1998. Comme nous le savons tous, le système d'enregistrement n'était pas prêt alors et on a dû reporter la mise en oeuvre au 1er octobre, mais je note qu'encore hier, on a annoncé qu'un autre report de deux mois serait nécessaire.Le 26 mai, le leader du gouvernement au Sénat a signalé que les négociations se poursuivaient avec les provinces pour parvenir à une entente sur l'application et qu'il espérait que la question serait réglée d'ici l'automne.
Alors que nous sommes à la veille de l'automne, le leader du gouvernement pourrait-il nous dire quels progrès ont été réalisés dans les négociations jusqu'à maintenant et si oui ou non nous pouvons nous attendre à ce que ces discussions aboutissent dans un avenir rapproché?
L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le système est prêt en ce qui concerne le gouvernement, mais le gouvernement reçoit les instances d'organismes d'application de la loi, surtout en Ontario, qui demandent un délai supplémentaire avant que la Loi sur le contrôle des armes à feu n'entre en vigueur. Le temps additionnel servira, naturellement, à permettre l'établissement d'un plus grand niveau de sécurité publique à travers tout le pays. L'ancienne date était le 1er octobre, et j'ai compris que la nouvelle date est le 1er décembre.
Les retards dans l'établissement du système d'enregistrement des armes à feu-L'escalade des coûts supportés par les forces policières-La position du gouvernement
L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et porte sur le même sujet. Est-ce que les retards concernent seulement la province de l'Ontario ou seraient-ils dus au jugement qui est attendu dans l'action en déclaration d'inconstitutionnalité intentée par l'Alberta avec l'appui, je crois, du Manitoba, de la Saskatchewan, du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest? Est-ce que ce jugement joue un rôle dans ces retards ou est-ce qu'il s'agit strictement de l'Ontario, comme le leader l'a laissé entendre?L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ignore s'il y a une demande spéciale de la province de l'Alberta. Je ne sais pas non plus si l'affaire que le sénateur St. Germain a mentionnée y est pour quelque chose dans les retards. Je sais, comme je l'ai dit, que l'Association ontarienne des chefs de police a demandé que la date de mise en oeuvre soit reportée au 1er décembre.
Le sénateur St. Germain: Honorables sénateurs, ma question complémentaire porte sur les coûts mentionnés par le sénateur Stratton. Ils sont passés de 50 millions de dollars à un chiffre de 75 millions de dollars, qu'à un moment donné le ministre Rock affirmait comme étant le coût définitif, puis à un chiffre confirmé d'environ 130 millions de dollars, en sus du chiffre de 200 millions de dollars mentionné par l'Association canadienne des policiers. Ces coûts atteindront un jour un niveau tout à fait déraisonnable.
Y a-t-il un niveau déterminé auquel le gouvernement réexaminerait sa position? Les propriétaires responsables d'armes à feu et les sportifs de ce pays qui s'opposent à cette loi s'inquiètent beaucoup. Le gouvernement ne songe qu'à recouvrer les coûts. Je ne suis pas contre le recouvrement des coûts lorsque c'est logique, mais cette loi pourrait échapper à tout contrôle. Si le chiffre actuel se situe autour de 400 millions de dollars selon certains, on pourrait finir par atteindre le niveau d'un milliard.
Est-ce qu'il y a une limite où le gouvernement dira: «Assez. Cela coûte trop cher. Il nous faut réexaminer notre position»?
Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, tous mes collègues d'en face savent que le projet de loi C-17 portait sur les autorisations d'acquisition d'armes à feu. Le souci principal du gouvernement, dans le cas du projet de loi C-68, c'est la sécurité publique. Je ne crois pas qu'on puisse fixer un prix à la sécurité des Canadiens.
Comme j'ai déjà dit au sénateur Stratton, je suis tout à fait disposé à demander aux responsables de fournir une estimation à jour des coûts de l'enregistrement.
Le sénateur St. Germain: Honorables sénateurs, je ne crois pas que la sécurité occupe une si large place dans ce projet de loi, parce que les criminels n'enregistreront pas leurs armes à feu. Si la sécurité est si fondamentale, pourquoi le gouvernement retarde-t-il l'adoption de cette mesure? Si un avion ou un règlement du Bureau de la sécurité aérienne fonctionnait de travers, on légiférerait sans tarder pour corriger la situation. Une vie est-elle plus menacée par un avion qui fonctionne mal que par des armes à feu?
Honorables sénateurs, le gouvernement ne s'est pas rendu compte de ce qu'il faisait quand il a présenté ce projet de loi. Ce projet de loi n'a pas été étudié à fond. On ne s'est pas arrêté aux coûts qu'il entraînerait et dont le contrôle échappe maintenant au gouvernement.
Si la sécurité est primordiale, pourquoi n'a-t-on pas réglé la question hier? Pourquoi l'a-t-on reportée de deux mois?
Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, les principaux arguments à l'appui des reports ont été la sécurité publique, comme je l'ai dit, et la nécessité de terminer d'abord la formation du personnel. Ces reports ont fait suite à une demande de l'Association des policiers de l'Ontario.
Pour ce qui est de la sécurité publique, le principal problème est la saisie des données venant des 280 services de police partout au Canada afin de permettre la vérification de l'admissibilité, comme l'exige l'article 5 de la loi. La saisie des données s'est révélée plus difficile que prévue, mais, je le répète, tout devrait être prêt le 1er décembre prochain.
En passant, je souligne que le report permet de terminer, avant la date d'entrée en vigueur, la formation du personnel, dont des policiers, des agents de douane, des avocats de la Couronne et des membres de la magistrature.
Le Solliciteur général
La commission d'enquête sur le traitement infligé par les agents de la GRC aux manifestants lors de la conférence de l'APEC-La position du gouvernement
L'honorable Marjory LeBreton: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et a trait à l'incident maintenant tristement célèbre de l'utilisation d'un neutralisant en aérosol à base de poivre survenu lors de la conférence de l'APEC de novembre dernier à Vancouver.Il est clair que le premier ministre et le ministre des Affaires étrangères ont participé activement, s'ils ne l'ont pas dirigée, à la tentative de suppression des droits démocratiques des Canadiens à la liberté de réunion et de parole. Jamais dans l'histoire du Canada notre police fédérale n'a été aussi politisée et aussi manipulée. La GRC a assumé le blâme pour l'étranglement d'un manifestant par le premier ministre à Hull, pour l'entrée par effraction au 24, rue Sussex, pour le voyage de ski du premier ministre en hélicoptère et pour la nouvelle route menant à la maison de campagne du premier ministre dans sa circonscription. Elle a été chargée de faire enquête sur des fuites sans gravité de documents du Cabinet et, bien sûr, nous ne pouvons pas oublier qu'elle a également assumé le blâme pour l'effondrement du dossier du gouvernement dans l'affaire des Airbus. Le premier ministre voudrait maintenant nous faire croire que la GRC a agi seule dans son intervention au sommet de l'APEC.
Le gouvernement mettra-t-il sur pied une commission indépendante pour faire une enquête complète sur cette violation sans précédent des droits des citoyens canadiens afin que toutes les parties puissent jouir d'une audition impartiale?
L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je remercie l'honorable sénateur LeBreton de sa question, car elle me donne l'occasion de souligner qu'une enquête indépendante est déjà en cours. Toutes ces questions font l'objet d'une enquête de la part de la Commission des plaintes du public de la GRC. Je le dis en toute déférence, je crois que l'honorable sénateur LeBreton rend un très mauvais service à la Gendarmerie royale du Canada, qui a servi les Canadiens avec tant d'honneur depuis sa création. Ce corps de police rend tous les jours, toutes les semaines, tous les mois et tous les ans de grands services à notre pays.
Le sénateur LeBreton: Honorables sénateurs, je ne mets pas en doute le rôle important que joue la GRC au Canada. Je me demande pourquoi elle accepte maintenant pareille ingérence.
Le sénateur Graham: Sauf le respect que je dois à madame le sénateur, je pense qu'elle devrait adresser sa question à la Gendarmerie royale du Canada.
La commission d'enquête sur le traitement réservé par la GRC aux manifestants à la conférence de l'APEC-Le témoignage éventuel du premier ministre-La position du gouvernement
L'honorable Marjory LeBreton: La GRC devra certainement fournir des réponses. Les sénateurs d'en face sont cependant un peu susceptibles lorsqu'on aborde ce sujet, n'est-ce pas?Le premier ministre suivra-t-il les conseils de son solliciteur général et comparaîtra-t-il devant la commission d'enquête pour expliquer le rôle que lui et son personnel ont joué dans cette affaire des plus troublantes?
L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, il s'agit de toute évidence d'une question hypothétique. Le premier ministre n'a pas été invité à témoigner devant la commission, et c'est cette dernière qui décidera qui elle doit convoquer à mesure que ses audiences progresseront.
La commission d'enquête sur le traitement réservé par la GRC aux manifestants à la conférence de l'APEC-Les paramètres de l'enquête-La position du gouvernement
L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, le leader du gouvernement au Sénat veut-il dire que la commission d'enquête actuellement chargée d'étudier les plaintes doit être mandatée pour examiner la question politique des rapports qu'entretient le cabinet du premier ministre avec la Gendarmerie royale du Canada?L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le sénateur LeBreton a demandé si le premier ministre témoignerait devant la Commission des plaintes. J'ai dit qu'il s'agissait d'une question hypothétique, car c'est à la commission qu'il appartient de décider qui témoignera.
Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, c'est une très grave question que celle qui porte sur le lien entre le cabinet du premier ministre et la GRC, un corps de police indépendant. Le sénateur LeBreton veut savoir s'il y aura une enquête indépendante. Le leader du gouvernement au Sénat nous a ensuite dit que la Commission des plaintes de la GRC se penchait sur la question. Nous voulons savoir si cette commission aura pour mandat d'examiner si le cabinet du premier ministre est intervenu dans les activités quotidiennes de la GRC.
Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, j'estime que c'est une bonne question et qu'elle devrait être transmise à la Commission des plaintes.
L'agriculture
Le blocage par des agriculteurs du Dakota du Sud de l'importation de grain et de bétail canadiens-La position du gouvernement
L'honorable Leonard J. Gustafson: Honorables sénateurs, je voudrais attirer l'attention des sénateurs sur les problèmes qu'éprouvent des agriculteurs canadiens avec l'expédition de grain et de bétail de l'autre côté de la frontière. Pas plus tard qu'hier, un train a été arrêté à North Portal, en Saskatchewan, par un tracteur placé en travers de la voie. Des camions ont également été arrêtés.La situation s'aggrave. À la décharge du gouvernement, le ministre de l'Agriculture, Lyle Vanclief, a officiellement protesté auprès de son homologue Dan Glickman et l'ambassadeur du Canada, Raymond Chrétien, a adressé une lettre de plainte à la secrétaire d'État américaine, Madeleine Albright.
(1530)
Je vis juste à la frontière américaine, près de la ligne SOO, où de longs trains chargés de machines américaines entrent au Canada, des trains remplis d'engrais entrent au Canada et des trains remplis d'engrais d'Esterhazy, en Saskatchewan, prennent la direction des États-Unis pour fertiliser les champs américains. Il faudrait faire quelque chose pour informer les agriculteurs des deux côtés de la frontière et résoudre ce différend commercial.
Je félicite le gouvernement pour ce qu'il a fait, mais la tâche n'est pas terminée. Que fait le gouvernement pour remédier à cette grave situation?
L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, comme je l'ai déclaré au sénateur Gustafson, qui s'y connaît très bien dans le domaine, le ministre de l'Agriculture, M. Vanclief, s'est entretenu à deux reprises avec la secrétaire d'État pour exprimer les doléances du Canada devant cette situation inacceptable. Nous demandons au gouvernement des États-Unis d'intervenir pour mettre fin à ces pratiques commerciales déloyales. En plus du ministre Vanclief, les ministres Marchi et Goodale ont émis des communiqués de presse condamnant les mesures prises par le Dakota du Sud. Ils ont tenu des conférences de presse, mais les fonctionnaires américains ont donné l'assurance au Canada que les fonctionnaires des États n'avaient pas les pouvoirs nécessaires pour inspecter les céréales et le bétail canadiens. Cependant, comme vous l'avez fait remarquer, ces derniers peuvent invoquer différents prétextes, comme la sécurité des véhicules, pour bloquer les expéditions.
Ce matin, lorsque j'ai discuté de la question avec mes collègues du Cabinet, ils m'ont donné l'assurance qu'ils prenaient des mesures et qu'ils porteraient leurs préoccupations à l'attention des autorités compétentes au sein de l'administration américaine.
La défense nationale
La pénurie d'articles de première nécessité pour l'équipage d'un navire en zone de guerre-La position du gouvernement
L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, récemment, lorsque le NCSM Toronto a été envoyé dans le golfe, on a constaté qu'une pénurie d'articles de première nécessité, en plus de rendre la vie plus pénible à l'équipage, avait des répercussions plus graves. L'équipage a été privé d'articles de base comme des chemises d'été, des médicaments, des passeports, des munitions d'entraînement pour les canons du navire, des lubrifiants adaptés à la chaleur tropicale et des articles de toilette de base - sans mentionner un hélicoptère maritime moderne.Je ferais remarquer que 146 jours se sont écoulés depuis que le leader du gouvernement au Sénat nous a dit que cette question serait bientôt réglée. Nous continuerons de compter les jours cet hiver.
Le gouvernement dit souvent à ses détracteurs que nous, les contribuables canadiens, n'avons pas les moyens d'acheter des articles de luxe, des articles coûteux pour nos forces armées. Le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il nous dire lequel de ces articles est un luxe pour un bateau et un équipage dans une zone de guerre? Peut-être le papier hygiénique?
L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, mon honorable collègue est bien informé sur ces questions. J'admire sa liste détaillée de ce qui ne va pas sur le NCSM Toronto.
Que je sache, ces lacunes sont survenues parce qu'il était important d'amener ce navire dans la zone de guerre aussi rapidement que possible. C'est un des risques auxquels s'exposent les membres des forces armées.
Je tiens toutefois à assurer à mon honorable ami que la sécurité du personnel était d'une importance primordiale pour ceux qui ont dépêché et commandé le navire. Je crois comprendre que la plupart des problèmes ont été réglés.
Le sénateur Forrestall: Honorables sénateurs, le problème est que cela pourrait bien être le résultat de l'absence de financement adéquat pour subvenir aux besoins de ce navire quel que soit son environnement, même s'il faut reconnaître qu'il est passé d'eaux relativement froides lorsqu'il participait aux manoeuvres et aux tâches de la flotte permanente de l'OTAN à un climat beaucoup plus chaud. Malgré cela, ce navire aurait dû être équipé de façon à pouvoir se rendre n'importe où dans le monde après un court préavis. Or, il ne l'était pas.
L'État d'avancement des projets concernant les hélicoptères maritimes et la flotte de surface-La position du gouvernement
L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, étant donné que notre temps est limité, je voudrais maintenant poser une question sur nos hélicoptères. Nous savons l'épreuve à laquelle ont été soumis les Sea King ces dernières semaines au large de Peggy's Cove. Nous savons aussi ce qu'il en coûte de faire voler ces engins pendant une heure. Peut-on raisonnablement s'attendre à ce que le gouvernement donne suite à son projet d'acheter de nouveaux hélicoptères avant la fin de l'exercice financier?L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je suis un optimiste. Le sénateur Forrestall a posé de nombreuses questions sur les sous-marins et sur notre flotte d'hélicoptères. Je peux vous assurer qu'il ne se passe pas de semaine sans que je rappelle au ministre de la Défense nationale mes inquiétudes, qui sont également les siennes. Malheureusement, je n'ai pu le faire aujourd'hui, car le ministre Eggleton était auprès de sa fille qui a été blessée dans un accident au cours de la fin de semaine.
Je peux toutefois affirmer au sénateur que le projet d'hélicoptères maritimes est toujours un projet central du ministère. De toute évidence, la marine de surface canadienne est conçue pour avoir l'appui d'hélicoptères embarqués. Les capacités de surveillance et de contrôle des hélicoptères font partie intégrante de la capacité des navires à se protéger et à assurer la surveillance bien au-delà de la portée de leurs détecteurs et de leurs armes propres. Le gouvernement est toujours résolu à donner aux Forces armées canadiennes l'équipement dont elles ont besoin pour effectuer leurs importantes missions au pays et à l'étranger. De plus, je peux dire au sénateur Forrestall que la stratégie d'achat pour remplacer les Sea King vieillissants fait actuellement l'objet d'intenses discussions.
Le sénateur Forrestall: C'est cela le problème, on discute, mais on ne donne pas de réponse.
Réponses différées à des questions orales
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai une réponse à la question posée au Sénat le 3 juin 1998 par les sénateurs David Tkachuk et Donald Oliver, concernant les changements apportés au Régime de pensions du Canada - le retard dans la nomination des administrateurs de l'Office d'investissement - et l'approbation des candidats proposés par le comité des candidatures; à la question posée le 8 juin 1998 par le sénateur Jean-Claude Rivest au sujet de la Fondation canadienne des bourses d'études du millénaire - les études définissant les priorités du gouvernement; à la question posée le 9 juin 1998 par le sénateur Jean-Claude Rivest au sujet de la Fondation canadienne des bourses d'études du millénaire - l'état des négociations entre le gouvernement du Québec et celui du Canada; à la question posée le 10 juin 1998 par le sénateur Gerry St. Germain au sujet du règlement du conflit du bois d'oeuvre - l'échec du système de contingents - le contrôle du secteur industriel par des intérêts américains; et enfin à la question posée le 10 juin 1998 par le sénateur J. Michael Forrestall au sujet de la redondance au niveau des phares automatisés sur la côte de la Colombie-Britannique.
Le développement des ressources humaines
Les changements apportés au Régime de pensions du Canada-Le retard dans la nomination des administrateurs de l'Office d'investissement-L'approbation des candidats proposés par le comitédes candidatures-La position du gouvernement
(Réponse à la question posée par l'honorable David Tkachuk et l'honorable Donald H. Oliver le 3 juin 1998)Le processus de nomination des membres du conseil d'administration de l'Office d'investissement du RPC tire à sa fin.
Le comité de nomination des administrateurs de l'Office d'investissement du RPC a envoyé une liste de candidats compétents aux ministres des Finances en avril dernier, après que le comité sénatorial des banques eut terminé son examen de la loi et du projet de règlement. Les administrateurs de l'Office d'investissement qui seront nommés figureront sur la liste du comité de nomination.
La Loi constituant l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada, qui est entrée en vigueur le 1er avril 1998, exige que le ministre des Finances du gouvernement fédéral consulte ses homologues provinciaux avant la nomination des administrateurs. Ce processus de consultation est en cours, mais n'est pas encore terminé.
Dès que les consultations seront terminées, le gouvernement annoncera la composition du conseil, y compris son président.
L'éducation postsecondaire
La Fondation canadienne des bourses d'études du millénaire-Les études définissant les priorités du gouvernement-Demande du dépôt des résultats des études
(Réponse à la question posée par l'honorable Jean-Claude Rivest le 8 juin 1998)En demandant sur quelles études le gouvernement du Canada s'est appuyé pour décider de mettre sur pied le programme des bourses du millénaire, on laisse entendre que le gouvernement du Canada, tout à coup, sans consultation, a décidé d'intervenir dans ce domaine.
Rien n'est plus faux.
Tel que mentionné dans un communiqué daté du 23 septembre 1997, le Conseil des ministres de l'Éducation (CMEC) a demandé au gouvernement du Canada d'instaurer aussi vite que possible des subventions pour les étudiants ayant des personnes à charge. Le Conseil a indiqué que chaque province et territoire dispose déjà de mesures pour aider à éviter ou à réduire l'endettement des étudiants, et que le gouvernement du Canada doit aussi assumer sa juste part de responsabilités à cet égard.
Lors de la réunion des premiers ministres, qui s'est tenue à Ottawa, les 11 et 12 décembre derniers, les premiers ministres se sont entendus sur un certain nombre de priorités dont la dette étudiante. Voici un extrait du communiqué final qui a trait à cette question: «Les premiers ministres se sont entendus sur l'importance de diminuer le fardeau financier des étudiants. Ils ont également accepté que le ministre des Finances et le ministre du Développement des ressources humaines travaillent de façon accélérée et de concert avec les ministres de l'Éducation des provinces et des territoires de sorte que le ministre des Finances puisse prendre en considération ce travail dans le prochain budget du gouvernement du Canada.» Notamment, dans ce communiqué, le Québec s'est dissocié des positions prises par l'ensemble des autres premiers ministres canadiens à deux exceptions près: la dette étudiante et les changements climatiques.
On peut donc affirmer haut et fort que la dette étudiante constitue une priorité pour tous les gouvernements au pays incluant celui du Québec. La dette étudiante est une priorité à laquelle le gouvernement fédéral a décidé de s'attaquer comme le lui ont demandé tous les gouvernements provinciaux. C'est pourquoi le gouvernement a annoncé, dans le dernier budget fédéral, qu'une somme de 2,5 milliards de dollars serait consacrée pour favoriser l'accès aux études postsecondaires pour les étudiants et étudiantes.
L'éducation postsecondaire
La Fondation canadienne des bourses d'Études du millénaire-L'état des négociations entre le gouvernement du Canada et celui du Québec-La position du gouvernement
(Réponse à la question posée par l'honorable Jean-Claude Rivest le 9 juin 1998)La question qui a été posée est celle de savoir s'il y a des demandes formelles des provinces, du Québec en particulier, qui permettent de justifier la décision du gouvernement du Canada de mettre sur pied le programme des bourses du millénaire.
Comme il est dit dans un communiqué du 23 septembre 1997, le Conseil des ministres de l'Éducation (CMEC) a demandé au gouvernement du Canada d'instaurer aussi vite que possible des subventions pour les étudiants ayant des personnes à charge. Le Conseil a précisé que les provinces et territoires ont déjà pris des mesures visant à éviter ou à réduire l'endettement des étudiants, et que le gouvernement du Canada doit aussi assumer sa juste part de responsabilités à cet égard.
Au cours de la réunion des premiers ministres, qui s'est tenue à Ottawa, les 11 et 12 décembre derniers, les premiers ministres se sont entendus sur un certain nombre de priorités, dont la dette étudiante.
Le communiqué final se lisait en substance comme suit: «Les premiers ministres se sont entendus sur l'importance de diminuer le fardeau financier des étudiants. Ils ont également accepté que le ministre des Finances et le ministre du Développement des ressources humaines travaillent de façon accélérée et de concert avec les ministres de l'Éducation des provinces et des territoires pour que le ministre des Finances puisse prendre en considération ce travail dans le prochain budget du gouvernement du Canada.» Dans ce communiqué, entre autres choses, le Québec s'est dissocié des positions prises par l'ensemble des autres premiers ministres canadiens, à deux exceptions près: la dette étudiante et les changements climatiques.
C'est sans doute le meilleur exemple qu'on puisse trouver de ce qu'on appelle une «demande» de la part des provinces.
C'est la Fondation canadienne des bourses d'études du millénaire qui gérera le programme. La Fondation est un organisme indépendant qui attribuera les bourses et qui gérera les 2,5 milliards de dollars que le gouvernement a affectés à cette initiative. La Fondation travaillera en étroite collaboration avec les provinces afin d'éviter le double emploi.
Le gouvernement du Canada souhaite également s'assurer que les bourses soient accordées aux étudiants à revenus modestes ou faibles faisant preuve d'un certain potentiel et à ceux qui souhaitent étudier dans une autre province.
Le programme des bourses du millénaire est une initiative nationale, une façon pour le Canada de célébrer le millénaire en investissant dans son avenir. Tous les étudiants canadiens doivent y avoir accès.
L'exploitation forestière
Le règlement du conflit du bois d'oeuvre-L'échec du système de contingents-Le contrôle du secteur industriel par des intérêts américains-La position du gouvernement
(Réponse à la question posée par l'honorable Gerry St. Germain le 10 juin 1998)Des préoccupations ont été exprimées à l'égard des restrictions imposées aux exportations de bois d'oeuvre destinées aux États-Unis provenant de l'Alberta, de la Colombie-Britannique, de l'Ontario et du Québec en vertu de l'Accord canado-américain sur le bois d'oeuvre résineux de 1996. La situation a beaucoup changé récemment.
Poteaux préforés en bois d'oeuvre résineux: Depuis le 10 juin, des négociations en cours visaient à déterminer si des parts de contingents d'exportation devaient être attribuées en vertu de l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux dans le cas des poteaux préforés pour recevoir des fils électriques et des tuyaux. Il est regrettable que le Service américain des douanes ait rendu, le 26 juin 1998, une décision définitive qui est entrée en vigueur le 1er juillet 1998 et qui reclassifie ce produit sous la position tarifaire HS 44.07, laquelle est visée par l'Accord. Cette mesure a des répercussions négatives sur l'industrie canadienne du bois d'oeuvre résineux déjà touchée par la baisse de la demande de bois d'oeuvre en Asie.
Comme première démarche pour faire renverser la décision des Douanes américaines, le Canada a demandé la tenue de consultations en vertu de l'article V(1) de l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux pour le motif que, en élargissant unilatéralement la portée de l'Accord, les États-Unis ne respectent pas leurs obligations. Une première série de consultations a eu lieu à Washington le 23 juillet.
Le gouvernment continue de discuter de la question avec les autorités américaines et les représentants de l'industrie canadienne et des gouvernements provinciaux. En outre, certains membres du secteur canadien de la retransformation du bois d'oeuvre, ainsi que l'Association américaine des constructeurs d'habitations, ont contesté la reclassification effectuée par les Douanes auprès de la Cour américaine du commerce international. Un jugement sommaire pourrait être rendu dès octobre 1998.
Le Canada a, au même moment, mis cette question à l'ordre du jour de la réunion du comité du système harmonisé de l'Organisation mondiale des douanes, qui se déroulera du 28 octobre au 13 novembre. On a demandé à cet organisme d'examiner la validité de la mesure américaine de reclassification.
Réduction des droits de coupe en Colombie-Britannique: Une allusion a été faite aux longues discussions entre les représentants des États-Unis, du Canada et de la Colombie-Britannique qui ont précédé l'annonce d'une réduction des droits de coupe à partir du 1er juin 1998 faite par le premier ministre Clark le 28 mai 1998. Les représentants américains avaient signalé que toute réduction des droits de coupe pourrait être considérée comme contraire à l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux et ont demandé, le 22 juin, la tenue de consultations en vertu de l'Accord. Ces consultations n'ayant pas permis de régler la question, les États-Unis ont demandé un recours à l'arbitrage le 28 juillet. Le gouvernement a entrepris le processus de constitution d'un groupe spécial indépendant qui sera chargé d'étudier la question. Nous poursuivons en même temps des discussions informelles dans l'espoir d'en arriver à un règlement négocié.
Répercussions sur l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux: L'Accord fonctionne bien en général. Il bénéficie du vaste appui de l'industrie et des gouvernements de part et d'autre de la frontière. L'Accord prévoit en outre une procédure de règlement des différends, élément qui revêt de l'importance pour le Canada étant donné le harcèlement pratiqué de longue date par le secteur américain du bois d'oeuvre. Nous avons de plus constaté, dans le cas des différends relatifs aux poteaux préforés et aux droits de coupe en Colombie-Britannique, que le fait de demander la tenue de consultations ou le recours à l'arbitrage n'exclut pas la poursuite des efforts visant à négocier un règlement acceptable pour tous. En ce qui concerne l'avenir de l'Accord, nous disposons d'amplement de temps d'ici la date d'expiration du 31 mars 2001 pour élaborer des options. Le gouvernement poursuivra, à cette fin, ses consultations avec l'industrie et les provinces touchées.
Les pêches et les océans
La redondance au niveau des phares automatisés sur la côte de la Colombie-Britannique-La position du gouvernement
(Réponse à la question posée par l'honorable J. Michael Forrestall le 10 juin 1998)Pour respecter la politique nationale et relever ses défis financiers, la Garde côtière passe en revue et apporte des changements à l'ensemble du réseau d'aides à la navigation dans tout le Canada, notamment aux aides fixes et aux aides flottantes. Cet examen est réalisé dans le cadre du programme de modernisation des aides qui vise à établir un service plus équitable, plus sûr, plus efficace en termes de coût et plus soucieux de l'environnement, répondant aux besoins actuels des marins.
Les travaux qui sont maintenant effectués à certains phares font partie de la modernisation du réseau d'aides à la navigation. Les feux et les cornes de brume ont été automatisés il y a de cela plusieurs années et ils sont maintenant remplacés, lorsque la chose est possible, par du matériel moderne très efficace et très fiable, de façon à atteindre les objectifs de modernisation des aides.
La Garde côtière a cessé d'installer des stations météorologiques automatisées et télécommandées aux emplacements où cet équipement ferait double emploi compte tenu de la présence constante d'un gardien de phare.
Nombre de particuliers et d'organisations ont demandé au ministre Anderson et à ses collègues de maintenir une présence humaine aux phares. Le gouvernement fédéral a tenu compte de ces préoccupations et suggestions et reconnu que les Canadiens démontrent un très grand intérêt relativement aux phares, qui constituent une part importante du patrimoine canadien.
Dépôt de réponses à des questions au Feuilleton
Le ministère de l'Industrie-Le respect de la Loi sur les carburants de remplacement
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 23 inscrite au Feuilleton par le sénateur Kenny.La défense nationale-L'octroi d'un contrat à la Western Star pour la mise au point d'un véhicule utilitaire militaire
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 74 inscrite au Feuilleton par le sénateur Forrestall.La défense nationale-L'administration du médicament méfloquine/lariam
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 75 inscrite au Feuilleton par le sénateur Forrestall.La Banque de développement du Canada-La date de nomination et la rémunération de l'actuel président et de son prédécesseur
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 81 inscrite au Feuilleton par le sénateur LeBreton.Le règlement des réclamations des tierces parties concernant les aérogares I et II de l'aéroport Pearson
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 85 inscrite au Feuilleton par le sénateur Lynch-Staunton.La défense nationale-L'enquête sur le déploiement des Forces canadiennes en Somalie-Le statut des témoins ayant comparu devant la commission
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 94 inscrite au Feuilleton par le sénateur Lynch-Staunton.Le ministère de la Justice-Le respect de la Loi sur les carburants de remplacement
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 98 inscrite au Feuilleton par le sénateur Kenny.Le ministère de la Santé-Le respect de la Loi sur les carburants de remplacement
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 105 inscrite au Feuilleton par le sénateur Kenny.Le ministère du Développement régional (Québec)-Le respect de la loi sur les carburants de remplacement
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 106 inscrite au Feuilleton par le sénateur Kenny.L'Environnement-Les émissions de gaz à effet de serre
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 107 inscrite au Feuilleton par le sénateur Spivak.L'Agriculture-Les produits laitiers-Restrictions concernant l'importation de produits contenant l'hormone de croissance recombinante bovine
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 108 inscrite au Feuilleton par le sénateur Spivak.L'Équipe Canada-La visite en Asie-Le nombre de marchés commerciaux garantis par le gouvernement canadien
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 110 inscrite au Feuilleton par le sénateur Forrestall.La Société de développement de Shearwater-Le financement par l'État
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 111 inscrite au Feuilleton par le sénateur Forrestall.La défense nationale-L'égalité pour les minorités visibles
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 119 inscrite au Feuilleton par le sénateur Oliver.Les transports-Les membres du conseil d'administration de Marine Atlantique
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 120 inscrite au Feuilleton par le sénateur Oliver.La défense nationale-La prolongation de la durée de vie des Aurora
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 122 inscrite au Feuilleton par le sénateur Forrestall.La défense nationale-Le Programme d'hélicoptère canadien de recherche et de sauvetage
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 123 inscrite au Feuilleton par le sénateur Forrestall.Les transports-La modernisation de l'aéroport international de Halifax
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 125 inscrite au Feuilleton par le sénateur Forrestall.Les transports-Le développement de Halifax en superport
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 127 inscrite au Feuilleton par le sénateur Forrestall.La défense nationale-Le remplacement des hélicoptères Sea King
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 128 inscrite au Feuilleton par le sénateur Forrestall.La défense nationale-La détection de sous-marins intrus
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 130 inscrite au Feuilleton par le sénateur Forrestall.La défense nationale-L'état de la flotte des CF-18 du Commandement aérien
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 132 inscrite au Feuilleton par le sénateur Forrestall.
ORDRE DU JOUR
La Loi sur les juges
Projet de loi modificatif-Deuxième lecture
L'ordre du jour appelle:Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Moore, appuyée par l'honorable sénateur Ferretti Barth, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur les juges et d'autres lois en conséquence.
L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, je désire traiter du projet de loi C-37 en deuxième lecture.
Honorables sénateurs, nous devrions noter que seul un article, l'article 5 de ce projet de loi qui en renferme 21, porte sur l'augmentation du traitement des juges nommés en vertu de l'article 96 de la Loi constitutionnelle du Canada. Les autres 20 articles ne traitent pas de l'augmentation de leur traitement. Je ne vois aucune objection à cette augmentation du traitement des juges. Je suis fière de siéger dans un Parlement qui a toujours veillé à ce que les juges soient bien rémunérés et bien protégés. Selon notre pratique parlementaire, les projets de loi sur l'augmentation du traitement des juges devraient être étudiés au Parlement sans controverse et être adoptés sans difficultés à la Chambre.
Je ne conteste pas l'article 5, mais je conteste les dispositions de ce projet de loi qui ne portent pas sur les augmentations du traitement, ou qui ne sont même pas nécessaires à ces augmentations, mais qui portent plutôt directement sur d'autres questions de politique publique, notamment l'obligation de rendre compte au Parlement de tout ce qui concerne le Trésor public. Le fait que la ministre de la Justice ait évoqué cette augmentation du traitement des juges au milieu d'une foule d'articles prêtant à controverse rend ce projet de loi C-37 inquiétant, car il met en cause nos usages et nos coutumes parlementaires.
Honorables sénateurs, je passe maintenant aux articles 1, 9, 10 et 11. Dans le Ottawa Citizen du 12 septembre 1998, on pouvait lire un article intitulé: «Un droit de la famille bien à eux: pourquoi le juge Willard Estey dit-il que la nouvelle loi créera un harem-maison pour les juges canadiens?» L'auteur, Glen McGregor, écrivait:
L'ancien juge de la Cour suprême Willard (Bud) Estey dit que les propositions de modification de la Loi sur les juges donneront à ses anciens collègues sur le banc le droit à un genre de harem-maison.
L'ancien juge Estey a déclaré:
En vertu de la Constitution, la province est la mieux placée pour former le mariage - en faire la célébration, si vous voulez [...] Il est étrange de constater que le projet de loi a pour objet de permettre au Parlement fédéral de redéfinir ce qu'est un conjoint.
Il a également déclaré:
Pourquoi un juge aurait-il ce privilège alors que personne d'autre ne l'a? Si on lui accorde un avantage et un privilège que d'autres ne peuvent avoir, cela crée un ressentiment entre la population que le juge doit servir et le juge lui-même. C'est déplorable.
Ces articles créeraient en droit un régime permettant à un juge d'avoir deux épouses et encourageraient ce juge à ne pas divorcer de son épouse mariée et à ne pas conclure de règlement financier avec elle.
L'article 11 stipule:
L'article 46.1 de la loi est remplacé par ce qui suit:
46.1 Est versé au conjoint survivant du juge décédé en exercice une somme forfaitaire égale au sixième du traitement annuel que le juge recevait au moment de son décès. Si deux conjoints survivent au juge, la somme est versée à celui qui vit avec lui le jour du décès.Honorables sénateurs, cet article indélicat a de quoi susciter la réprobation du public. Ces articles choquent puisqu'ils remplaceraient tous les accords de séparation et de divorce des juges, au point même de rendre le divorce inutile. Cette loi destinée uniquement aux juges représente une atteinte au droit familial provincial. Je m'oppose à ces articles.
Honorables sénateurs, une des raisons pour lesquelles les juges ont toujours eu des pensions très élevées, c'est que le Parlement désirait protéger leurs épouses. J'ai rencontré des épouses de juges, des femmes séparées mais non divorcées, qui verront leur situation se détériorer à cause de ces articles. Lorsqu'elles m'ont parlé de ces dispositions, et uniquement de ces dispositions, ces épouses de juges ont fait preuve de discrétion, conscientes du caractère délicat de leur situation et des fonctions exercées par leurs époux. Je remercie ces femmes de la discrétion dont elles ont fait preuve.
Honorables sénateurs, tous les humains, les juges aussi, connaissent des tribulations dans leur vie personnelle. La vie privée est privée. Toutefois, aucune question de nature privée ne doit devenir publique du simple fait que certaines personnes occupent une place déterminante dans les mécanismes législatifs du pays et peuvent façonner la loi pour qu'elle réponde à leurs besoins personnels. En somme, tous les humains, les juges aussi, sont des pécheurs mais peu peuvent donner force de loi à leurs péchés. Je crois que lorsque certains y arrivent, les lois qui en résultent sont mauvaises et ne servent pas l'intérêt public. J'ai parlé de l'alliance impie entre certains juges et les ingénieurs parlementaires du ministère de la Justice. Cette alliance impie, ce mariage entre le ministère de la Justice et certains juges, mérite correction. Ce ministère nous envoie souvent des projets de loi décrits comme étant de nature administrative et simple, mais en fait ils ne le sont pas. Le projet de loi C-37 ne porte pas sur les hausses de traitement des juges.
Les honorables sénateurs n'ignorent pas le malaise qui court actuellement au sein de l'opinion publique au sujet de certaines activités des juges, en particulier leur politisation. Les déclarations publiques faites à Terre-Neuve, le 23 août 1998, par le juge en chef de la Cour suprême, Antonio Lamer, ont donné lieu à une pléthore d'articles critiques. Cette politisation du pouvoir judiciaire est une question politique de grande importance qui retient l'attention publique. On trouve, parmi les articles, des titres comme: «Il faut mater les godzillas du pouvoir judiciaire». John Crosbie, qui a été ministre de la Justice de 1984 à 1986, déclarait ce qui suit dans un discours devant l'Association du Barreau canadien, publié sous ce titre dans le Ottawa Citizen du 27 août 1998:
Au Canada, les juges sont devenus les godzillas du gouvernement et les organes législatifs et exécutifs ses Mickey Mouse.
Honorables sénateurs, je me tourne maintenant vers l'article 6 de ce projet de loi, qui tire ses origines de la décision rendue par la Cour suprême du Canada, en 1997, au sujet de la Rémunération des juges de la Cour provinciale de l'Î.P.É. [1997] 3 R.C.S. Il modifie l'article 26 de la Loi sur les juges pour établir une commission d'examen de la rémunération des juges fédéraux en tant que commission permanente. Il s'agit d'une tentative subreptice faite pour modifier, pour contourner l'article 100 de la Loi constitutionnelle de 1867 qui dit notamment:
Les salaires, allocations et pensions des juges. seront fixés et payés par le Parlement du Canada.
L'article 6 diminuerait le rôle du Parlement dans les dépenses publiques et dans l'établissement des traitements des juges.
Honorables sénateurs, le problème historique des juges a été le contrôle exercé par le souverain sur eux, surtout lorsqu'ils plaisaient ou déplaisaient au souverain. Au Royaume-Uni, l'Act of Settlement de 1701 cherchait à rassurer les juges en faisant en sorte que l'assemblée des représentants du peuple, le Parlement, assure leur protection, surtout en ce qui concerne leur mandat et leur traitement. Avant la Confédération, au Canada, le développement de la position actuelle des juges a suivi le développement d'un gouvernement responsable et cela a conduit aux articles 99 et 100 de la Loi constitutionnelle de 1867.
Après la Confédération, le Parlement a choisi de mettre en oeuvre l'article 100 pour fixer et payer la rémunération des juges non pas en suivant le processus annuel financier habituel du Parlement - le budget des dépenses - mais par l'entremise d'une imputation directe au Trésor public. En jargon parlementaire, il s'agit d'une dépense légale. Le Parlement a choisi des dépenses légales exceptionnelles plutôt que l'inscription dans le Budget des dépenses principal pour éviter que la rémunération des juges ne fasse l'objet de votes de censure et n'entraîne la chute d'un gouvernement, la résignation d'un ministre ou le déclenchement d'élections. Ainsi, on voulait éviter que les élections se jouent sur la question toujours épineuse de la rémunération des juges.
Pouvez-vous imaginer des élections sur ce projet de loi, honorables sénateurs?
Le fondement actuel de cette dépense légale, le paragraphe 53(1) de la Loi sur les juges, ne s'appliquait au départ qu'aux salaires des juges et non à celui de leur personnel ou des bureaucrates, ni à d'autres organismes ou intérêts. Il avait pour intention de fixer la rémunération des juges de façon constitutionnelle, parlementaire et politique. Cependant, le paragraphe 53(1) de la Loi sur les juges est maintenant méconnaissable à cause de certaines tentatives persistantes pour exagérer son utilisation afin de circonvenir la Constitution et le Parlement. Ces tentatives ont été réussies et payantes.
Honorables sénateurs, certains juges intéressés veulent un accès illimité au Trésor public. L'article 6 donne à cette commission d'examen de la rémunération des juges fédéraux le pouvoir de créer sa propre infrastructure et de nommer son propre personnel. C'est un chèque en blanc et un pouvoir illimité qui n'est pas assujetti à l'examen parlementaire voulu. L'article 6 établit une bureaucratie illimitée qui n'est pas assujettie, contrairement à la plupart des bureaucraties, au processus des crédits et des budgets des dépenses annuels. Le paragraphe 53(1) de la Loi sur les juges -- qui est, je le rappelle, l'exception - a été exagéré pour supprimer la pureté de la Loi sur les juges et remettre en question l'intégrité de la Loi constitutionnelle de 1867, ainsi que pour faire en sorte de passer outre au Parlement qui représente l'intérêt public en tant que gardien du Trésor.
(1550)
Honorables sénateurs, la commission proposée est un système non contrôlé qui donnerait à certains juges en chef un accès direct aux sous-ministres et sous-ministres adjoints de la Justice, à l'appareil gouvernemental ainsi qu'au Trésor. Elle annule l'effet de la morale historique et de la pureté politique de l'indépendance judiciaire et abolit le véritable rôle des parlementaires en ce qui a trait à l'établissement du salaire des juges. De plus, elle prive les Canadiens de leur droit constitutionnel incontesté en regard du contrôle exercé par l'assemblée représentative sur les fonds publics en ce qui touche le salaire des juges. Le grand constitutionaliste Peter Hogg a souligné, dans un avis juridique sur la tentative des juges de lier le Parlement aux recommandations des commissions judiciaires par résolution négative présenté en 1989 au Conseil canadien de la magistrature et à la Conférence canadienne des juges et sur les mots «fixed» et «provided», que:
L'inaction du Parlement constitue une participation insuffisante dans le cadre du processus pour permettre de dire que les traitements ont été établis par le Parlement. Il semble plus naturel de dire que les traitements ont été établis par le tribunal et que le Parlement n'y a pas apporté de modification.À l'article 6, la ministre de la Justice présente une demande transmise par certains juges désirant établir leurs propres salaires. Le jugement sur lequel est basé cet article, prononcé par le juge en chef de la Cour suprême, Antonio Lamer, affirme même que si les assemblées législatives décident de suivre leurs recommandations, elles le feront à leurs risques et périls. Il a affirmé:
Les gouvernements sont forcés par la Constitution de suivre le processus de la commission... Néanmoins, même si ces recommandations n'ont pas force obligatoire, elles ne devraient pas être rejetées du revers de la main et si l'administration ou l'assemblée législative décidait de s'en dissocier, elle devrait justifier sa décision, au besoin, devant un tribunal.Honorables sénateurs, non seulement certains juges essaient-ils de nous faire approuver leur harem-maison, mais il semble que les braconniers tentent de nous forcer sous la menace à les autoriser à garder leur butin. Le juge en chef Lamer a souligné que nous pourrions avoir à nous justifier en cour. Les sénateurs devraient y réfléchir. Cela signifie qu'individuellement ou collectivement, nous risquons de nous retrouver un jour en cour, et d'être soumis aux pouvoirs disciplinaires de ces mêmes juges qui exigent que nous leur accordions les salaires qu'ils demandent. Étant donné que le Parlement n'est pas justiciable devant les tribunaux et que seuls les parlementaires le sont à titre individuel, est-ce que le juge en chef veut dire que des sénateurs pourraient se retrouver traduits devant lui, assujettis à son pouvoir de les déclarer coupables d'outrage au tribunal par décision sommaire, pouvoir qui est sans appel, et passibles d'emprisonnement, du seul fait de leur travail en cette enceinte?
Il n'existe aucune obligation constitutionnelle d'appliquer cette disposition douteuse et dont l'intention est clairement antiparlementaire. Cette proposition est tellement antidémocratique et peu représentative, tellement influencée par des intérêts particuliers que c'est une menace insupportable à l'indépendance judiciaire et au Parlement lui-même. Par ailleurs, elle met les juges ordinaires à la merci des juges en chef.
Honorables sénateurs, le jugement du juge Lamer, qui sous-tend l'article 6, est sans parallèle en ce qu'il constitue un saut dans le domaine de la politique, c'est de l'activisme pur et simple qui n'a rien à voir avec le droit et qui est contraire à la tradition parlementaire et constitutionnelle du Canada. Le jugement dissident du juge Gerard La Forest, qu'il a rendu peu de temps avant de prendre sa retraite, est à cet égard cinglant. Il y dit:
[...] je ne puis souscrire à sa conclusion selon laquelle l'al. 11d) interdit aux gouvernements de modifier la rémunération des juges sans d'abord recourir aux «commissions de la rémunération des juges» qu'il décrit.Affirmant que l'accusé et non les juges bénéficiaient de la protection de la Charte en vertu de l'alinéa 11d), il dit:
Les personnes inculpées sont les uniques bénéficiaires des droits garantis par l'al. 11d).La Charte protège les droits des citoyens et non ceux des juges. Au sujet de l'alinéa 11d), il dit encore:
Il n'oblige toutefois pas les législatures à établir ce qui, à certains égards, équivaut pratiquement à un quatrième organe du gouvernement pour surveiller l'interaction entre les organes politiques et le pouvoir judiciaire.Le juge La Forest parle en termes très forts de cette «entorse injustifiée à la jurisprudence établie» et de ses «sérieuses réserves quant à l'opportunité de l'examen de cette question par la Cour». Il ajoute: «Je ne partage toutefois pas l'avis du juge en chef...». Il parle de notion «historiquement fausses» et de «subvertir le fondement démocratique du contrôle judiciaire». Il dit encore que «... l'approche adoptée par le juge en chef méconnaît, selon moi, la nature de la Loi constitutionnelle de 1867» et que la position du juge en chef «déforme sérieusement la façon dont les traitements des juges sont fixés».
Le juge La Forest a traité du contrôle judiciaire, de la compétence législative et du fait que les juges vont au-delà du texte formel de la Constitution, quand il a dit:
Le contrôle judiciaire n'est donc politiquement légitime que dans la mesure où il met en jeu l'interprétation d'un document constitutionnel qui fait autorité...
Toutefois, cette légitimité est compromise lorsque les tribunaux tentent de limiter le pouvoir des législatures sans s'appuyer sur des textes explicites.Il a également déclaré:
Toutefois, le fait d'exiger a priori l'établissement de commissions équivaut à édicter une nouvelle disposition constitutionnelle [...] Selon moi, les juges sont en mesure de garantir leur propre indépendance par l'application appropriée de la Constitution.Honorables sénateurs, l'article 8 propose la «règle de 80», qui permettrait à un juge de se retirer à l'âge de 60 ans avec une pleine pension. Cette règle est apparue par suite de la nomination de juges jeunes, surtout des femmes nommées au milieu de la trentaine, comme l'a été le juge en chef Lamer. Cette disposition privera le pays de la sagesse et de la vigueur qui accompagnent la pleine maturité mentale et émotive des juges. Il semble que ceux qui ont eu la chance d'être nommés lorsqu'ils étaient si jeunes veulent absolument quitter la magistrature à l'âge de60 ans, alors qu'ils sont prospères. C'est d'ailleurs ce que le juge en chef Lamer a publiquement préconisé. Dans un article paru dans le Toronto Star du 2 juillet 1996, dont le titre disait que la retraite constituait une grande préoccupation pour le juge en chef, David Vienneau a écrit ce qui suit:
Le juge Lamer est de ceux qui veulent que la loi soit modifiée pour permettre la règle de 80 [...]Honorables sénateurs, le projet de loi C-37 renverserait le rôle du Parlement et il est motivé par l'arrivisme et l'activisme des juges, bref, par la soif du pouvoir selon saint Augustin et par l'accès aux largesses du ministère de la Justice. De telles largesses, notamment le favoritisme politique, étaient inconnues de tout roi souverain du Royaume-Uni. Les organismes judiciaires subventionnés par le Trésor sont devenus extravagants et impossibles à contrôler. La diffusion de renseignements est presque impossible à cause de l'influence et de la volonté politique qu'exercent quelques juges, qui n'ont aucun compte à rendre à la population et qui, toujours dans le secret, se servent de l'expression «indépendance des juges» comme bouclier. Le projet de loi C-37 ne traite pas de l'indépendance des juges, mais d'une plus grande facilité d'accès aux largesses.
Son Honneur le Président: Je regrette de devoir interrompre l'honorable sénateur Cools, mais la période de 15 minutes qui lui avait été accordée est maintenant terminée.
Le sénateur Cools: Puis-je avoir la permission de continuer, honorables sénateurs?
Son Honneur le Président: Permission accordée, honorables sénateurs?
Des voix: D'accord.
Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, les données de Statistique Canada révèlent que les personnes les mieux payées au Canada, en 1995, ont été les juges de cours supérieures, que les nominations à la magistrature représentent une augmentation de rémunération appréciable dans la plupart des cas, et que plusieurs centaines d'avocats cherchent à se faire nommer. Les faits sont les suivants. Notre Parlement a défendu l'indépendance judiciaire, et il a protégé et défendu les juges pendant 130 ans. Nous avons une tradition d'excellence dans la magistrature, et les juges méritent le respect et une bonne rémunération. Ils méritent que leur augmentation de traitement soit une proposition parlementaire à part, un projet de loi distinct, à l'abri des controverses et des propositions douteuses, en harmonie avec le rôle financier du Parlement et la convention constitutionnelle de l'indépendance judiciaire.
(1600)
Nos juges méritent que l'étude de ce projet de loi qui hausse leur traitement échappe à ce genre de controverse. Le projet de loi C-37 fait bon marché du rôle du Parlement, et plus particulièrement du rôle constitutionnel du Sénat en matière financière, en circonvenant et en faussant le paragraphe 53(1) de la Loi sur les juges.
Le paragraphe 53(1) de la Loi sur les juges, conçu pour que le Parlement représentatif joue son rôle politique d'accorder l'indépendance judiciaire, aura été contourné. L'indépendance des juges découle du régime de gouvernement parlementaire responsable et en est le joyau, c'est le produit d'un pacte de confiance entre les électeurs et les élus et de nos conventions constitutionnelles parlementaires. Les conventions constitutionnelles sont les règles et les notions politiques qui guident les relations politiques entre l'exécutif, la Couronne et le Parlement. Ce ne sont pas des lois, et elles ne relèvent pas des tribunaux. Elles se situent strictement au niveau politique et elles s'appliquent grâce à la manifestation de la volonté politique populaire, comme les élections. Elles rendent possible un gouvernement ministériel responsable. Elle le font fonctionner. Notre tradition d'indépendance judiciaire a été niée, tout comme la courtoisie constitutionnelle, et nous avons à la place une liaison peu édifiante entre l'exécutif et certains juges intéressés.
Honorables sénateurs, le projet de loi C-37 prévoit un gouvernement et des jugements qui se placent au-delà des lois. J'affirme que la primauté du droit est incompatible avec de telles manipulations de la loi qui bouleversent le principe même de la légalité sur lequel repose notre Constitution. Le Parlement et la Constitution n'ont jamais prévu que les juges déterminent eux-mêmes leur salaire. Le projet de loi C-37 est un exemple de l'empire des juges sur les deniers publics. Le projet de loi C-37 n'est pas une question légale. C'est une question constitutionnelle, financière et même une question de confiance.
Honorables sénateurs, le projet de loi C-37 exige une étude et un examen parlementaires sérieux.
L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, je me demande si le sénateur Cools voudrait bien répondre à des questions pour m'aider à mieux comprendre son allocution.
Le sénateur Cools: Avec joie.
Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, au cours de l'allocution du sénateur Cools, cet après-midi, j'ai noté qu'elle a parlé d'une vile alliance entre certains juges et les hauts fonctionnaires du ministère de la Justice. C'est là une accusation très grave qui est portée sous le couvert de l'immunité parlementaire. Madame le sénateur Cools voudrait-elle nous expliquer de quoi on parle ici? Je voudrais savoir de quoi il s'agit.
Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, je tiens d'abord à remercier le sénateur Kinsella pour sa question.
Comme nous le savons, il existe ici une tradition parlementaire. La nécessité de protéger les juges et l'indépendance des juges est telle que les affaires intéressant le salaire des juges, en particulier leur rémunération, devraient avoir l'appui maximal de deux côtés du Sénat. C'est ainsi que, au fil des années, beaucoup de projets de loi concernant les juges ont été adoptés très rapidement, dans l'assurance formidable qu'ils constituent des modifications sans conséquence, des projets de loi administratifs ou de simples questions de formalité.
Je dis ce que je dis parce que, lorsqu'on y regarde de plus près, on trouve très souvent des projets de loi dont des dispositions ou des articles renvoient à un ou deux juges en particulier. Je le dis surtout parce que, en 1996, dans le cas du projet de loi C-42, qui est encore très vif dans mon esprit, les hauts fonctionnaires du ministère m'ont parlé de la modification Lamer, de la modification Strayer et de la modification Arbour.
Je dirai au sénateur que la majorité des juges canadiens sont des citoyens distingués qui font chaque jour le travail qu'ils sont censés faire, c'est-à-dire régler des différends entre des parties. Je dirai au sénateur que le juge moyen n'a aucune idée de ce qu'il faut faire pour qu'une modification visant ses intérêts particuliers soit présentée.
Le langage est peut-être un peu pointu, mais j'essaie simplement de dire que nous sommes parfois saisis de projets de loi dont certaines dispositions ne s'appliquent qu'à une, deux ou trois personnes. Si nous retournons au débat sur le projet de loi C-42, la modification du juge Arbour, j'ai invoqué le Règlement pour dire qu'il s'agissait là d'un projet de loi privé, non pas d'un projet de loi public, et qu'il aurait dû être présenté comme un projet de loi privé. J'espère que cela répond à la question.
Le sénateur Kinsella: Je remercie le sénateur Cools pour cette réponse. Il y a tout un éventail de questions qu'on pourrait soulever à ce sujet, mais je ne veux pas me lancer dans un tel débat cet après-midi. Je vais plutôt aborder deux autres questions.
Le sénateur a mis en relief l'article 100 de la Constitution, qui dit ceci:
Les salaires, allocations et pensions des juges des cours supérieures, de district et de comté [...] et des cours de l'Amirauté, lorsque les juges de ces dernières sont alors salariés, seront fixés et payés par le Parlement du Canada.
Je remarque toutefois qu'il y a un renvoi, soit le renvoi 53, qui dit ceci:
Voir la Loi sur les juges, L.R.C. [1985], chap. J-1.
Si j'ai bien compris votre intervention cet après-midi, ce projet de loi aurait pour effet de modifier cette partie de la Constitution.
Le sénateur Cools: C'est exact.
Le sénateur Kinsella: Mais cet article, en raison de la note en bas de page, parle de la Loi sur les juges dans les Lois révisées de 1985. D'après ce que je comprends, le projet de loi modifierait la Loi sur les juges. Peut-être pourriez-vous clarifier cela.
Le sénateur Cools: Je vais essayer. Comme je l'ai déjà dit, le Parlement dispose de deux mécanismes pour sortir de l'argent du Trésor. Fondamentalement, la plupart des administrations publiques utilisent le processus annuel du budget principal des dépenses et des crédits. Nous connaissons ce processus.
Revenons maintenant en arrière: le Canada possède une importante tradition qui lui est propre pour ce qui est de la façon de traiter les juges. Cette histoire a même des racines plus profondes que la situation qui existe en Angleterre. Elle va jusqu'à l'Acte d'union de 1840. J'essayais de dire que, dans l'article, la disposition qui dit «fixés et payés» a été mise en oeuvre par une série de lois individuelles par les différents parlements depuis la Confédération.
En 1906, le Parlement, dans sa grande sagesse, a décidé d'adopter une loi autonome qui serait appelée la Loi sur les juges. L'article 27 de la Loi sur les juges précise que:
La rémunération et les allocations de retraite ou les rentes des juges doivent être payées par le Trésor public...
Le Parlement a adopté cet article pour que le traitement des juges soit payé par le Trésor.
Si on suit l'évolution de cet article, on constate qu'il reste pratiquement inchangé jusqu'à la Loi sur les juges de 1927. En 1946, cependant, les choses changent. Le mot «juges» disparaît de l'article en question.
Ce que je dis, c'est que notre mécanisme constitutionnel de fixation du traitement des juges a consisté à inclure la disposition dans la Loi sur les juges. Si nous suivons l'évolution de l'article, nous constatons que le mot «juges» disparaît des Lois révisées de 1946.
Si l'on veut exprimer cette loi en termes de 1997, le passage équivalent est le paragraphe 53(1). Cette disposition prévoit le versement des salaires, des allocations et des rentes. Il ne s'agit plus des salaires des juges; il s'agit plutôt des salaires, des allocations et des rentes à verser en vertu de cette loi.
Au cours des dernières années, on a continué à modifier le paragraphe 53(1). Il prévoit maintenant que les montants à verser en vertu du paragraphe 46(1) et de l'article 51 doivent aussi venir du Trésor. On est loin des salaires des juges. Le paragraphe 53(1) ajoute les montants à verser en vertu de ces dispositions de la Loi sur les juges.
Sénateur Kinsella, j'ai beaucoup étudié la question. Je suis heureuse que vous m'ayez donné l'occasion de préciser davantage ma pensée. Le paragraphe 53(1) prévoit que les salaires, les allocations et les rentes à verser en vertu de cette loi et les montants à verser en vertu du paragraphe 46(1) et de l'article 51 soient prélevés sur le Trésor.
Une des choses que j'ai vigoureusement critiquée aujourd'hui est le paragraphe 46(1), qui traite de la somme forfaitaire à payer aux deux conjoints. Cette disposition s'est intégrée au paragraphe 53(1) tout récemment, en 1989. Les honorables sénateurs devraient comprendre que le projet de loi C-37 nous demande de modifier la loi pour verser une somme forfaitaire à un conjoint de fait. Ceci représente une modification à une modification de 1989 qui n'aurait jamais dû être apportée, puisque l'intention de cet article de la Loi sur les juges était d'appliquer une proposition politique et constitutionnelle selon laquelle nous devons garantir les traitements des juges, mais pas celui des fonctionnaires ou de quiconque.
Je réponds spontanément. Je vous dis que le rôle du Parlement a été déjoué et que l'exagération et l'enflure de l'article 53(1) le minent. Voilà exactement mon propos. Si j'ai réagi si vivement à cet article sur le paiement d'une somme forfaitaire, c'est notamment parce que, même en 1989, l'ajout de cette disposition était douteux. On se trouve maintenant en présence d'une modification douteuse qu'on veut apporter à une modification déjà douteuse. Le règle de droit ne tolère pas une telle manipulation rusée et purement mécanique de la loi.
Bon nombre de sénateurs ici ont été nommés récemment, ne connaissent pas le langage et la procédure parlementaires et risquent de se perdre dans les détails techniques. Les honorables sénateurs ont le devoir de veiller à ce que ces détails techniques demeurent des instruments adéquats tels qu'ils avaient été élaborés à l'origine par des gens d'expérience et de bonne foi qui les avaient conçus dans le but de protéger les juges du Canada.
Le Canada a la réputation d'avoir un pouvoir judiciaire incorruptible. Si je m'inscris en faux contre certaines de ces questions, honorables sénateurs, c'est parce que, petite, on m'a enseigné qu'il fallait perpétuer cette tradition. Nombre d'entre nous avons été élevés dans la tradition libérale voulant que la puissance du Parlement soit préservée afin de défendre nos concitoyens, de même que nos juges et leurs familles.
J'espère avoir répondu à vos questions. Je suis un peu émue, vous le comprendrez, puisque je suis libérale. La position libérale est celle d'un Parlement fort. Or, le projet de loi à l'étude nous entraîne dans la direction opposée, car il présuppose, disons-le, que les sénateurs ne font pas preuve de diligence mais plutôt qu'ils sont inattentifs.
Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, la question que soulève le discours que nous a livré le sénateur Cools cet après-midi découle en partie du commentaire qu'elle a formulé, du sujet de préoccupation qu'elle appréhende. Le sénateur Cools a fait allusion à des rapports peu orthodoxes qu'entretiendraient certains éléments du pouvoir exécutif et du pouvoir judiciaire. Ceci est particulièrement troublant en raison de la distinction que nous considérons comme cruciale dans notre démocratie parlementaire de modèle britannique...
Son Honneur le Président: Sénateur Kinsella, j'hésite à vous interrompre, mais j'aimerais savoir si vous posez une autre question ou si vous participez au débat?
Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, l'introduction de mon discours s'inspirait de ce qu'a dit madame le sénateur Cools, et je lui demanderais maintenant de m'expliquer ses propos.
Le sénateur Cools nous a dit beaucoup de choses cet après-midi et elle nous a notamment parlé de ses inquiétudes au sujet des liens existant entre les pouvoirs exécutif et judiciaire. Les explications que je demande à madame le sénateur Cools à ce sujet sont liées directement à l'article 6 du projet de loi, que ma collègue a mis en évidence pour nous, lequel article propose la création de cette nouvelle commission.
Je renvoie les honorables sénateurs à la page 4 du projet de loi, où il est question de la rémuneration.
(1620)
Le paragraphe 26.1(1) dispose que la Commission d'examen de la rémunération des juges fédéraux sera composée de trois personnes. Par qui ces personnes seront-elles nommées? Par le gouverneur en conseil. Qu'est-ce que le gouverneur en conseil? C'est le pouvoir exécutif.
Madame le sénateur Cools veut-elle donner l'alerte au sujet du lien qui existe entre l'exécutif et le judiciaire? D'après elle, le pouvoir exécutif nommera les membres de la commission chargée d'établir la rémunération des juges. Madame le sénateur pourrait-elle nous donner son point de vue et nous expliquer ce qu'elle voulait dire cet après-midi? Nous de ce côté-ci nous intéressons au rôle de l'exécutif, et surtout aux fonctions exercées par le bureau du premier ministre.
Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, ce que je dis - et j'ai consacré beaucoup d'efforts à mon discours - c'est que l'article 6 essaie de faire disparaître l'examen par le Parlement. J'ai des dizaines de documents ici. J'ai pris la peine d'étudier très attentivement le rapport et les recommandations de la commission de 1995 sur le traitement et les avantages des juges, dirigée par David Scott. Tout honorable sénateur qui lit le projet de loi C-37 verra très rapidement que l'article 6, qui modifie l'article 26 de la Loi sur les juges en le remplaçant, pose un problème. Un article qui comptait peut-être six à dix lignes a maintenant été remplacé par trois pages de verbiage. L'ampleur de ce changement est telle qu'on a remplacé trois ou quatre lignes par un livre.
Cette commission a des mandats très larges. Pourtant, on dit que c'est seulement un petit changement, qu'on ne fait que remplacer une commission triennale par une commission quadriennale. Cependant, on voit très rapidement ce qu'il en est. Oui, la commission sera nommée tous les quatre ans, mais la durée des mandats sera de quatre ans, ce qui signifie que les nominations sont permanentes. De plus, le premier paragraphe précise fondamentalement qu'on donne le pouvoir d'établir la commission.
Honorables sénateurs, en lisant un bon nombre de ces documents, y compris le jugement du juge Lamer, que tous les sénateurs devraient lire du début à la fin, et le rapport de David Scott, on s'aperçoit rapidement qu'on utilise le terme «dépolitiser» très fréquemment. On y dit qu'il faut dépolitiser le processus. En fait, on veut éloigner le Parlement du processus. Honorables sénateurs, je prétends que nous ne vivons pas dans une ère où un ministre ou un député va appeler un juge et lui demander d'acquitter son frère, par exemple, accusé de meurtre. Je prétends que cela ne se produit plus de nos jours. Cependant, je crois également qu'il y a un problème dans le fait que certains juges semblent vouloir être le plus près possible de certaines personnes au ministère de la Justice et essaient de se rapprocher de plus en plus de l'exécutif plutôt que du Parlement.
En d'autres termes, honorables sénateurs, on remet en question 200 ans d'histoire et on nous dit dans cette décision qu'en toute franchise, les juges préfèrent que leur sort soit décidé par l'exécutif plutôt que par le Parlement. C'est un fait plutôt curieux et intéressant.
Il y a à peine quelques jours, je lisais l'un des documents qui fait autorité sur la question de la rémunération des juges. Il s'agit d'un débat qui a eu lieu dans les années 30 à la Chambre des lords, au Royaume-Uni, et je crois que c'est le vicomte Sankey, le lord chancelier, qui a laissé entendre au cours de ce débat qu'une plus grande menace pesait sur l'indépendance judiciaire, soit la possibilité que de grandes augmentations de salaire, au lieu de réductions, soient accordées aux juges avec leur consentement.
Honorables sénateurs, les projets de loi de ce genre sont transmis au Sénat et on s'attend à ce que nous les adoptions sans les étudier, sans leur prêter attention. Ce projet de loi et ces questions méritent notre attention et la population canadienne mérite que nous les étudiions, car le pouvoir judiciaire est une chose très spéciale et les juges ont entre les mains la destinée des Canadiens.
Honorables sénateurs, j'en ai assez dit, je crois. J'espère que le comité convoquera à témoigner certaines des personnes que j'ai nommées. J'espère que le comité entendra l'ex-ministre de la Justice John Crosbie. J'espère que le comité entendra l'ex-juge Estey. J'espère que le comité entendra des gens comme Graham Eglinton et d'autres grands spécialistes canadiens. J'espère que le comité entendra des personnes comme le professeur Peter Hogg, parce que, en bout de ligne, il est question ici du rôle que devrait jouer le Parlement représentatif dans l'établissement des salaires, par rapport à l'adoption d'une série de recommandations internes.
À vrai dire, je compte parmi mes meilleurs amis de nombreux juges et j'estime être le défenseur des droits d'une magistrature indépendante. Je dois vous signaler, en toute honnêteté, que l'administration de la justice suscite énormément d'inquiétudes parmi la population. En toute franchise, honorables sénateurs, nous devrions prendre le taureau par les cornes, examiner ces questions et faire des recommandations très sérieuses.
Comme je l'ai dit dès le départ, je crois sincèrement que la ministre aurait dû nous présenter un projet de loi très simple ne contenant qu'un seul article et qui aurait pu être adopté en quelques heures, parce qu'il aurait alors clairement été un projet de loi d'ordre administratif. Cela m'attriste de voir que le projet de loi C-37 suscite tant de controverse. Nos juges méritent un meilleur sort.
L'honorable John B. Stewart: Honorables sénateurs, quelqu'un a suggéré que le comité entende des personnes faisant autorité dans le domaine et qui ne sont pas à l'emploi du gouvernement ou du Parlement du Canada. Qu'est-ce qui nous garantit que, si le projet de loi est renvoyé au comité, nous entendrons de tels témoins?
Le sénateur Kinsella: C'est une bonne question.
Le sénateur Stewart: Rien.
Le sénateur Cools: Vous me posez la question, sénateur Stewart? Je vous remercie pour votre question. Je crois que votre question est très poignante et très profonde. Je tiens à dire une fois de plus que le Sénat est vraiment honoré d'avoir un homme comme le sénateur Stewart parmi ses membres.
Je répondrai ceci à l'honorable sénateur: je ne suis pas membre du comité. Il pourrait même être difficile pour moi de poser des questions. Cependant, je ne doute pas que, si un consensus se dégage au Sénat pour que certains témoins soient convoqués, nous pourrons nous entendre et donner instruction au comité pour ce faire.
L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, en commençant, je tiens à remercier le sénateur Cools de nous avoir donné à réfléchir sur ce projet de loi cet après-midi. Je remercie également le sénateur Kinsella d'avoir permis d'apporter plus de précisions grâce à ses questions au sénateur Cools.
Honorables sénateurs, lorsque nous avons reçu ce projet de loi, en juin, il était clair que nous étions soumis à des délais serrés en raison de la décision que la Cour suprême du Canada avait rendue. J'ai appris cet après-midi que le ministère de la Justice a demandé une prolongation de délai et que nous avons maintenant jusqu'au 18 novembre.
J'ai fait part de cette information au vice-président du comité, le sénateur Nolin, et je l'ai assuré - puisque moi seule puis le faire parce que le comité lui-même est évidemment sacro-saint et peut faire ce qu'il veut - qu'il n'y avait aucune incitation à se dépêcher de la part du leader du gouvernement; si le comité veut entendre davantage de témoins, il devrait le faire, et il incombe au comité de prendre cette décision dans le cadre de ses délibérations.
Je sais que le comité tiendra ces délibérations car le comité des affaires juridiques et constitutionnelles a toujours étudié avec beaucoup de soin les projets de loi qui lui avaient été confiés.
Honorables sénateurs, j'ai été extrêmement préoccupée en lisant dans le Ottawa Citizen un article citant l'interprétation que faisait un ancien juge de la Cour suprême de ce que nous faisons à l'égard de cette loi. On m'a dit que les modifications que nous apportons à cette loi sont compatibles avec la façon dont nous avons abordé d'autres lois. On a modifié la définition de «conjoint survivant» dans la Loi sur les juges pour l'harmoniser avec la pratique actuelle.
La définition va englober maintenant les conjoints de fait. Ce changement donne directement suite en partie à une recommandation de la commission d'enquête indépendante Scott, mais c'est aussi la définition qui se trouve à l'heure actuelle dans le Régime de pensions du Canada et dans le régime de retraite des parlementaires, qui couvre les sénateurs et les députés.
J'ai été aussi préoccupée par l'observation voulant que cela constitue peut-être une ingérence dans le champ de compétences des provinces parce que le droit de la famille relève essentiellement de la compétence provinciale. Toutefois, comme il s'agit simplement d'une définition visant à déterminer l'admissibilité à la pension dans la loi elle-même, cela n'empiète pas sur la loi provinciale.
La reconnaissance des conjoints de fait entraîne effectivement la possibilité de reconnaître deux conjoints survivants, qui était une des préoccupations soulevées dans l'article. Toutefois, cela est vrai aussi du régime de retraite des parlementaires, du régime de retraite de la fonction publique, du régime de retraite de la GRC et du régime de retraite des Forces armées canadiennes, qui prévoient comme le présent projet de loi la répartition de la pension de survivant.
Je soulève cette question parce que les questions de droit de la famille me préoccupent beaucoup depuis quelque temps, comme, je le sais, elles préoccupent d'autres sénateurs. J'ai lu l'article et j'ai voulu en savoir davantage. Telle est l'information qu'on m'a donnée. Toutefois, j'encourage les membres du comité à poser certaines de ces questions à la ministre de la Justice afin qu'on sache bien ce que fait au juste cette loi et si elle diffère le moindrement d'autres mesures similaires et appropriées.
Son Honneur le Président: Plaît-il aux sénateurs d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée et le projet de loi est lu une deuxième fois.)
Renvoi au comité
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une troisième fois?(Sur la motion du sénateur Carstairs, le projet de loi est renvoyé au comité permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.)
Privilèges, Règlement et procédure
Adoption du sixième rapport du comité
Le Sénat passe à l'étude du sixième rapport du comité permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure (prestations d'invalidité), déposé au Sénat le 18 juin 1998.L'honorable Shirley Maheu: Honorables sénateurs, ce rapport a été déposé le 18 juin de cette année, c'est-à-dire juste avant notre ajournement d'été, dans l'espoir que les sénateurs auraient le temps d'y réfléchir avant la rentrée. J'aimerais remercier tous les membres du comité permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure pour le travail qu'ils ont effectué dans ce dossier, plus particulièrement le sénateur Kenny, le sénateur Joyal et le sénateur Bryden, qui se sont réunis en sous-comité pour rédiger le texte.
Honorables sénateurs, la situation dans laquelle nous nous trouvons est assez unique en ce sens qu'aux termes de la Loi constitutionnelle de 1967, les sénateurs peuvent rester en poste jusqu'à l'âge de 75 ans. Comme pour tout autre employé, il peut nous arriver d'être frappés d'incapacité, que ce soit à la suite d'une maladie ou d'une blessure. Dans le secteur privé et dans la fonction publique, on a prévu des programmes pour compenser ceux qui deviennent incapables de s'acquitter de leurs tâches. Les sénateurs âgés de moins de 65 ans ont déjà droit à l'assurance-invalidité, et il est très important que toute politique en matière d'invalidité s'applique également aux sénateurs âgés de 65 à 75 ans.
On ne trouve pas de fournisseurs prêts à offrir une assurance-invalidité à long terme à ce groupe d'âge. L'industrie ne semble pas vouloir approuver une assurance de ce genre en raison des risques élevés qu'elle comporte et de la taille relativement petite du groupe à assurer.
Il est dans l'intérêt du Sénat de mettre sur pied un système d'assurance-invalidité. Elle donnera aux sénateurs qui veulent y souscrire et qui sont véritablement invalides la possibilité de demander un congé prolongé au Sénat et de continuer à toucher, comme le feraient les employés dans la même situation, une indemnité parlementaire, qui serait toutefois réduite.
Étant donné les difficultés associées à la modification des textes législatifs, votre comité propose que le Sénat se serve de ses pouvoirs existants pour élaborer une politique en matière d'invalidité. L'article 59 de la Loi sur le Parlement du Canada prévoit que:
Le Sénat et la Chambre des communes peuvent, au moyen de règles ou d'ordres, prendre des règlements pour renforcer les exigences de la présente loi relatives à la présence de leurs membres respectifs ou aux déductions à effectuer sur l'indemnité de session.
Par conséquent, le Sénat a la latitude d'adopter les règlements nécessaires à la mise en oeuvre d'une politique qui serait le calque d'un régime privé d'assurance-invalidité. Ainsi, les sénateurs incapables de s'acquitter de leurs devoirs sénatoriaux pour raison de santé pourraient être correctement rémunérés.
[Français]
(1630)
Voici les éléments essentiels d'une politique d'assurance-invalidité.
Premièrement, tous les sénateurs de moins de 64 ans et neuf mois seraient tenus de demander une prestation d'incapacité prolongée offerte par le Conseil du Trésor. Le sénateur à qui cette prestation serait refusée serait traité de la même manière que les sénateurs âgés de 65 à 75 ans, en vertu de la politique.
Deuxièmement, le sénateur dont la maladie se prolonge au-delà du congé occasionnel aurait le choix de demander au comité de la régie interne, des budgets et de l'administration un congé d'incapacité de courte durée à plein salaire pour six mois. Le sénateur serait tenu de présenter un certificat d'un médecin indépendant attestant l'incapacité.
Troisièmement, le sénateur pourrait demander au comité de la régie interne, des budgets et de l'administration, normalement après les six mois de congé d'incapacité de courte durée, de prendre un congé d'incapacité de durée moyenne. La durée maximum de ce congé serait normalement de deux ans et pourrait être prolongée seulement si tout laisse raisonnablement croire à un retour au travail. Un nouveau certificat médical serait exigé tous les six mois et l'indemnité de session brute serait réduite de 30 p. 100. Le sénateur continuerait de cotiser au régime de pension et d'accumuler des droits de pension comme s'il recevait la pleine indemnité de session. La question de l'indemnité de fonction devrait être examinée sur une base individuelle, de manière appropriée, par le comité de la régie interne, étant donné que certains sénateurs souffrant d'une incapacité peuvent avoir besoin d'aide pour exécuter leurs fonctions.
Quatrièmement, à la fin de la période de deux ans, votre comité recommande:
a) Dans le cas d'un sénateur de moins de 65 ans qui reçoit une prestation d'incapacité prolongée offerte par le Conseil du Trésor, l'indemnité de session serait réduite à un montant équivalant à celui de la cotisation au régime de pension;
b) Dans le cas d'un sénateur de 65 à 75 ans qui s'est vu refuser une prestation d'incapacité prolongée offerte par le Conseil du Trésor, le comité de la régie interne aurait le choix de prolonger le congé d'incapacité de courte durée de deux autres années au maximum, pourvu que l'âge de 75 ans ne soit pas dépassé.[Traduction]
Honorables sénateurs, je tiens à souligner que, pendant un congé ou une invalidité temporaire, les sénateurs conserveront le droit constitutionnel de participer à toutes les délibérations du Sénat, de voter, de prendre part aux débats, de proposer des projets de loi ou d'assister à des réunions de comités. Ces sénateurs auront le loisir d'utiliser sans restriction les ressources normalement rattachées à leur bureau.
J'estime que cette proposition répond aux besoins des sénateurs qui sont incapables d'assister régulièrement aux séances du Sénat en raison d'une invalidité. Si les principes généraux semblent acceptables, le comité du Règlement entend déposer ultérieurement au Sénat des dispositions réglementaires précises, avec tous les détails.
L'honorable Mabel M. DeWare: Je me demande s'il n'y aurait pas ici une correction qui s'impose. Lorsque le sénateur a parlé du sous-comité chargé de ce travail, je crois avoir entendu le nom du sénateur Kenny. Il devrait s'agir du sénateur Kelly, n'est-ce pas?
Le sénateur Maheu: Vous avez parfaitement raison, sénateur DeWare, il s'agit des sénateurs Kelly, Joyal et Bryden.
Je vous prie de m'excuser, sénateur Kelly.
L'honorable William M. Kelly: Je vous pardonne, sénateur.
Son Honneur le Président: Si aucun autre sénateur ne souhaite prendre la parole, nous allons nous prononcer sur la motion.
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter le rapport?
(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)
(Le Sénat s'ajourne au mercredi 23 septembre 1998, à 13 h 30.)