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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

2e Session, 36e Législature,
Volume 139, Numéro 4

Le mardi 2 novembre 1999
L'honorable Gildas L. Molgat, Président


LE SÉNAT

Le mardi 2 novembre 1999

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

Visiteurs de marque

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, avant de passer aux déclarations de sénateurs, je voudrais vous signaler la présence à notre tribune de quelques visiteurs de marque. Il y a d'abord une délégation de l'Assemblée nationale de la République de Slovénie, dirigée par M. Janez Podobnik, président de l'Assemblée nationale, et accompagnée par Son Excellence M. Bozo Cerar, ambassadeur de la République de Slovénie au Canada.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix: Bravo!

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, l'autre visiteur de marque à notre tribune aujourd'hui est le sénateur John Watson d'Australie, président du Comité sénatorial spécial sur les pensions de retraite.

Vous êtes le bienvenu au Sénat canadien, sénateur Watson.

Des voix: Bravo!


(1410)

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Le décès de Greg Moore

Hommage

L'honorable Ross Fitzpatrick: Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour rendre hommage à Greg Moore, le coureur automobile de 24 ans qui est mort dimanche après avoir eu un accident avec sa voiture lors d'une course en Californie.

Greg est né et a grandi à Maple Ridge, en Colombie-Britannique, et il était un des meilleurs pilotes de la série CART ou du circuit automobile Indy. En 1997, à l'âge de 22 ans, il a été le plus jeune pilote à remporter une course en série CART. Malheureusement, bien d'autres perspectives s'offraient à lui.

Greg offrait plus que ses exploits sur la piste en donnant beaucoup à sa communauté. Il participait à de nombreuses manifestations de bienfaisance et il était un brillant défenseur de diverses causes. Son enthousiasme dans l'entraide était véritable. Un fonds portant son nom continuera de venir en aide aux oeuvres qu'il soutenait.

En 1996, ma femme Linda et moi avons eu le plaisir de participer avec Greg au bal organisé par Molson Indy afin de recueillir des fonds pour la Société Alzheimer de la Colombie-Britannique. Le thème de l'événement prend maintenant une connotation triste mais néanmoins appropriée puisque c'était «Forget me not». Honorables sénateurs, les Canadiens ne sont pas prêts d'oublier Greg Moore.

Le décès de Mwalimu Julius K. Nyerere, Ancien président de la République Unie de Tanzanie

Hommage

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, en 1966, on m'avait offert le poste de vice-doyen de l'école de droit de Dar es-Salaam, en Tanzanie. J'avais refusé l'offre, préférant rester au Canada où je suis devenu associé au sein du plus grand cabinet d'avocats de la région atlantique. Si j'avais accepté le poste en Tanzanie, j'aurais été le témoin privilégié du miracle démocratique orchestré par Julius Nyerere, qui a mené son pays à l'indépendance en l'affranchissant de l'Angleterre en 1961, et qui fut le premier président de la Tanzanie, de 1962 à 1985.

M. Nyerere est décédé le jeudi 14 octobre d'un accident cérébrovasculaire. Il avait 77 ans. Il se trouvait dans un hôpital londonien où il suivait un traitement contre la leucémie. M. Nyerere était aimé et vénéré partout dans le monde pour son intégrité, sa modestie et son intelligence. Il était considéré comme l'un des plus grands hommes d'État de l'Afrique, au même titre que Nelson Mandela, et il compte parmi les plus importants leaders du XXe siècle.

M. Julius Nyerere avait une formation d'enseignant. Il est arrivé en politique en 1954 et il fonda le TANU, soit l'union nationale africaine du Tanganyika. Il est devenu ministre en chef lorsque le TANU remporta les élections de 1960. M. Nyerere devint premier ministre lorsque le Tanganyika accéda à l'indépendance, en 1961, mais il démissionna dès 1962 pour se concentrer sur la restructuration du TANU et sur le rôle qu'il allait jouer par la suite. Il devint président d'une république après les élections de 1962.

En 1964, suite à une révolution sur l'île de Zanzibar, dominée par les Arabes, et à une mutinerie au sein de son armée, M. Nyerere créa une union des deux pays dont il devint le président. Étant donné que M. Nyerere souhaitait la libération des États africains, la Tanzanie servit de refuge aux membres du Congrès national d'Afrique et à de nombreux autres groupes dirigés par des rebelles du Zimbabwe, du Mozambique, de l'Angola et de l'Ouganda. En 1978, sous le leadership de M. Nyerere, les troupes tanzaniennes entraient en Ouganda et déposaient le dictateur Idi Amin.

Nyerere était un ardent défenseur de la culture africaine locale, et sa réalisation la plus miraculeuse fut de donner à la Tanzanie l'union ethnique. À l'occasion d'un hommage à Nyerere dans le cadre de l'émission «As It Happens», Stephen Lewis, qui a servi avec les Nations Unies en Afrique et qui était un ami de l'ancien président, s'est dit émerveillé de la façon dont Nyerere a pris un pays divisé selon l'appartenance tribale et a fait de tous des «Tanzaniens».

Il y est arrivé en établissant de solides systèmes d'éducation et de santé et en imposant une langue commune.

«La situation au Rwanda lui a brisé le coeur», a déclaré M. Lewis pendant l'hommage de l'émission «As It Happens». Il était atterré par les conséquences de la division ethnique: les massacres et la destruction d'une population et d'un pays. Lorsque Nyerere parlait du Rwanda et offrait de l'aide à sa population, il manifestait «beaucoup d'émotion, de douleur et de compréhension». N'eût été de sa vision et de son leadership, la Tanzanie aurait pu connaître des horreurs semblables.

Le 20 octobre, des centaines de milliers de Tanzaniens ont commencé à affluer à l'aube dans les rues de la capitale Dar es-Salaam afin de rendre un dernier hommage à un homme que l'on appelait partout en Tanzanie l'«enseignant.» Des foules énormes, mais néanmoins pacifiques, bordaient la route menant de l'aéroport à la résidence de M. Nyerere située dans la banlieue et gémissaient au passage de son cercueil.

Julius Nyerere a eu droit à des funérailles d'État en Tanzanie le jeudi 21 octobre. C'était un homme à la vision et aux principes remarquables qui manquera à de nombreuses personnes.

Honorables sénateurs, Mary Lou Findley a bien résumé la situation à la fin de l'hommage rendu par la radio anglaise de Radio-Canada en disant que si Nyerere venait d'un petit pays, ce n'était certes pas un petit personnage. J'appuie la dernière remarque de Stephen Lewis, qui a dit que Julius Nyerere était «un homme tout à fait agréable».

[Français]

Le mois de l'histoire des femmes

L'honorable Lucie Pépin: Honorables sénateurs, octobre est le Mois de l'histoire des femmes. C'est une excellente occasion de saluer les progrès accomplis et d'envisager les obstacles qu'il nous reste à surmonter.

[Traduction]

Le mois d'octobre a été retenu afin de célébrer le jugement rendu en octobre 1929 par le comité judiciaire du Conseil privé. Il a alors déclaré que le mot «personne» figurant dans l'AANB comprenait les femmes et que ces dernières étaient admissibles au poste de sénateur. Nous sommes très redevables aux «Famous Five» qui ont mené une longue et dure lutte en vue de rendre notre présence à la Chambre possible.

Honorables sénateurs, nous tenons la présence des femmes pour acquise dans la présente Chambre et à l'autre endroit. Pourtant, ce n'est que tout récemment que notre représentation a franchi ici le cap des 30 p. 100. C'est en grande partie attribuable à une forte volonté politique.

Il y a maintenant 70 ans que nous avons acquis le droit d'être considérées comme des personnes. Bien que je ne m'arrête pas à ce que l'on pensait que nous étions avant que nous devenions des personnes, je sais cependant qu'être une personne n'a pas encore le même poids qu'être un homme.

[Français]

Le nombre de femmes présentes dans cette Chambre et dans l'autre endroit est pour moi une source de reconnaissance et d'encouragement. Leur détermination, leur volonté, leur intelligence et leur esprit constituent des apports immenses pour notre pays. Pourtant, comment oublier que nous sommes encore si peu? Dans cette Chambre, nos collègues masculins continuent de nous dépasser en nombre, à raison de deux pour une. Tout en nous réjouissant du fait que le Sénat du Canada soit le cinquième du monde pour ce qui est de la représentation féminine, nous ne pouvons certainement pas nous contenter de l'état actuel des choses.

Il reste de nombreux obstacles à la participation des femmes dans de si nombreuses facettes de notre vie économique et politique. J'ai évoqué de multiples fois, dans cette Chambre et ailleurs, les difficultés auxquelles les femmes sont confrontées lorsqu'elles se lancent en politique. Pourtant, sans une représentation adéquate des femmes et des autres groupes dans nos institutions politiques, comment pouvons-nous nous targuer de démocratie?

Donc, au moment où nous célébrons cette réussite essentielle qu'a été l'affaire «personne» et tout ce qu'elle a signifié pour des générations de Canadiens, sachons que nous n'avons pas encore atteint le but. Si les cinq célèbres militantes étaient avec nous, elles continueraient de se battre pour l'égalité. Parce que, aujourd'hui encore, nous faisons des différences entre les personnes: entre les hommes et les femmes, entre les riches et les pauvres, entre les jeunes et les vieux, entre la majorité et les minorités. Et les chiffres concernant les membres de cette Chambre et ceux de l'autre endroit continueront de traduire ces distinctions, jusqu'au jour où nous accepterons le fait qu'une personne est une personne et rien d'autre, ni plus ni moins.

[Traduction]

La politique de l'impôt sur le revenu applicable aux propriétaires de lots boisés

L'honorable Erminie J. Cohen: Honorables sénateurs, je voudrais attirer votre attention sur les préoccupations des propriétaires canadiens de lots boisés à l'égard de la politique de l'impôt sur le revenu et sur la nécessité, dans leur intérêt, d'apporter dans les meilleurs délais les changements appropriés à la loi.

Dans ma province, le Nouveau-Brunswick, une famille sur six est propriétaire d'un lot boisé. Environ 425 000 lots boisés au Canada appartiennent à des familles. Dans beaucoup de provinces, c'est de ces lots que provient une partie importante des matières premières nécessaires pour faire tourner les scieries et les usines de pâte à papier.

La plupart des propriétaires de ces lots respectent leur terre dont ils prennent soin non seulement parce qu'elle contribue à embellir le paysage et à servir d'habitat aux espèces sauvages, mais aussi parce qu'elle fournit du bois à l'industrie et assure des emplois dans les petites collectivités rurales.

Prendre soin de ces lots boisés est un travail monumental. Faire pousser un arbre à partir d'un plant prend énormément de temps, au moins 40 ans dans la plupart des régions de ce pays. L'une des façons dont le gouvernement fédéral peut encourager la promotion et le renforcement des activités d'aménagement forestier est d'appliquer une bonne politique d'impôt sur le revenu.

Quand les Canadiens dépensent de l'argent pour monter une nouvelle affaire, ils peuvent les premières années déduire les pertes de leurs autres sources de revenus dans la mesure où ils peuvent prouver à Revenu Canada qu'ils s'attendent à des «profits raisonnables» de leur nouvelle entreprise. Les propriétaires de lots boisés, eux, ne peuvent pas le faire.

Quand une exploitation agricole passe d'une génération à une autre, l'impôt sur le gain en capital est reporté tant que la famille exploite la ferme. Quand un lot boisé passe d'un propriétaire à un autre, l'impôt à payer est souvent énorme. Si le nouveau propriétaire ne dispose pas de revenu pour payer l'impôt en question, il peut être forcé de tirer l'argent nécessaire du lot, ce qui bien souvent signifie qu'il doit couper les arbres.

(1420)

Pourquoi réserver aux propriétaires de lots boisés un traitement différent de celui auquel ont droit les autres Canadiens? La chose s'explique, me semble-t-il, par le fait que le libellé de la Loi de l'impôt sur le revenu est tel qu'une entreprise qui mettrait jusqu'à 40 ans pour réaliser des bénéfices passerait simplement entre les mailles du filet. De par son libellé actuel, la Loi de l'impôt sur le revenu ne peut pas tenir compte des réalités des pratiques de la gestion forestière et des délais nécessaires pour qu'une exploitation puisse réaliser des bénéfices.

Les associations de propriétaires de lots boisés étudient la question depuis 1988. Ils affirment que la résistance au changement à laquelle ils ont été confrontés lors des premières années a fait place, au ministère des Finances et au ministère du Revenu national, à une compréhension raisonnable du problème. La question a été dûment examinée par différents comités de la Chambre des communes, par la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie et, dernièrement, par notre propre sous-comité chargé d'étudier la forêt boréale.

Honorables sénateurs, il nous faut obtenir la coopération des propriétaires de lots boisés si nous voulons, d'une part, respecter les engagements que nous avons pris dans le Protocole de Kyoto et dans le projet annoncé de législation sur les espèces en péril au Canada, et, d'autre part, donner à ces propriétaires une politique fiscale fondée, qui les encourage à reboiser leurs terrains et à redoubler d'efforts pour bien gérer leurs terres.

Il est grand temps que nous réglions ce problème. Je demande instamment au ministre des Finances de mener à bien ce projet.

[Français]

Le décès de Claude Masson

Hommage

L'honorable Fernand Roberge: Honorables sénateurs, je désire offrir mes condoléances à la famille et aux collègues de travail de Claude Masson. M. Masson et son épouse, Jeannine Bourdages, sont décédés lors du terrible accident du vol d'EgyptAir. Claude était un homme simple, bien dans sa peau, toujours de bonne humeur et respecté par ses pairs. Il était aussi un homme de foi, engagé socialement, un professionnel, bref, un homme exemplaire. Son départ est une grande perte pour La Presse et le milieu journalistique québécois, ainsi que pour la société en général. Nous offrons nos condoléances à sa famille et aux familles des autres disparus dans ce terrible accident.

[Traduction]

La défense nationale

La reconnaissance des missions de maintien de la paix à l'étranger

L'honorable Douglas Roche: Honorables sénateurs, j'ai trouvé étrange que, lors de sa première visite officielle au Canada, lord George Robertson, le nouveau secrétaire général de l'OTAN, critique les dépenses militaires du Canada alors qu'il ignorait apparemment que les troupes canadiennes qui servent les intérêts de la paix dans le monde sont maintenant plus nombreuses qu'elles ne l'ont été depuis la guerre de Corée.

Les forces canadiennes de maintien de la paix comptent parmi les plus prééminentes et les plus efficaces au monde. Alors que la population canadienne représente moins de 1 p. 100 de la population mondiale, la contribution du Canada au maintien de la paix dans le monde est de plus de 10 p. 100. Les Canadiens sont reconnaissants envers les 4 410 hommes et femmes déployés dans le monde dans le cadre de 22 missions de paix différentes.

En ce mois de novembre, profitons-en pour rendre hommage en particulier aux 108 Canadiens qui ont perdu la vie en servant la sécurité et la paix internationales au cours des 40 dernières années. Leur contribution au soulagement de la souffrance humaine est inestimable.

Les Canadiens savent que le maintien de la paix est une caractéristique marquante de notre pays. Nous devons bien comprendre que nos forces armées jouent un rôle important dans la promotion de nos intérêts à l'étranger, quelle que soit la façon dont nous les définissons. Travaillant dans des conditions astreignantes dépassant tout ce qu'on peut s'imaginer et éloignés de leur famille pendant de très longues périodes, les membres des forces canadiennes de maintien de la paix sont déployés en vue de changer vraiment les choses et de veiller à la promotion et au maintien d'une réelle sécurité.

Des Canadiens se sont battus et sont morts pour défendre la sécurité et la liberté. Nos efforts continuels en vue d'assurer la sécurité dans le monde constituent un hommage à leur sacrifice et confirment cette noble tradition. Nos forces de maintien de la paix ne méritent pas moins.

Honorables sénateurs, pour ce qui est des fonds consacrés à la reconstruction dans les Balkans, où la guerre n'a laissé que ruines, et dans d'autres régions du monde, qui doivent se remettre des conséquences de la guerre, le Canada n'a à recevoir de leçons de personnes. Dans les opérations de combat, ce n'est pas que le Canada dépense trop peu, c'est que les autres pays, y compris les principaux pays de l'OTAN, dépensent trop.

[Français]

Les langues officielles

Report de la date du dépôt du rapport annuel du commissaire

L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, le 4 octobre dernier, la commissaire aux langues officielles exprimait, dans une lettre adressée à notre président, son intention de reporter le dépôt de son rapport annuel, de manière à couvrir dorénavant la période correspondant à l'année fiscale plutôt qu'à l'année civile.

La Loi sur les langues officielles n'est pas claire sur les modalités du dépôt de ce rapport annuel. Cependant, l'article 37 de la Loi d'interprétation déclare que la notion d'année s'étend sur toute période de 12 mois. Le rapport du Commissariat des langues officielles pour les 12 mois de 1999 ne sera pas publié comme à l'habitude, le prochain rapport de la commissaire couvrira une période de 15 mois ou plus et sera rendu public en septembre de l'an 2000 seulement.

Cette décision privera les communautés linguistiques minoritaires et le comité mixte permanent des langues officielles de la Chambre des communes et du Sénat d'un rapport et d'un outil très précieux et très important.

[Traduction]

Le crime de trafic d'êtres humains

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, partout dans le monde, des personnes se font enlever, contraindre, attraper et vendre dans le cadre de ce qu'on appelle populairement la «traite mondiale des esclaves». Les victimes sont habituellement des femmes, des filles et des garçons qui sont forcés de vivre dans des situations d'exploitation sexuelle et économique au profit de recruteurs, de trafiquants et d'organisations criminelles. En 1997, l'ONU évaluait à 4 millions le nombre des personnes qui étaient victimes d'un pareil trafic à l'échelle mondiale, dont le bénéfice net pouvait atteindre 7 milliards de dollars par année. Le Canada n'est pas à l'abri de telles activités. L'automne dernier, on a découvert à Toronto un réseau de prostitution, entre autres, constitué de femmes asiatiques.

Le trafic d'êtres humains, de même que les nombreuses activités dont s'accompagne ce genre de crime, comme la prostitution, la séquestration et l'agression, sont toutes des activités illégales au Canada. Malgré les conventions internationales interdisant la traite des esclaves humains, ce genre d'activité criminelle est en hausse. Cela s'explique en partie parce qu'il est relativement facile de faire le trafic d'êtres humains. Souvent, les personnes faisant l'objet de trafic ne se rendent pas compte qu'elles sont en danger et traversent volontairement la frontière pour entrer dans un autre pays. Il est moins probable que les agents de la paix fassent des arrestations dans les cas de trafic d'êtres humains que dans les cas de contrebande de drogue et d'armes à feu. Il est tragique de constater que l'intérêt que certains portent aux jeunes assure une demande constante pour faire de nouvelles recrues chez les femmes plus jeunes et les enfants.

Le trafic d'êtres humains présente un risque pour la sécurité, car les bénéfices réalisés grâce à l'exploitation d'êtres humains servent souvent à financer les organisations criminelles. En Asie, dans la région du Mékong, le trafic des êtres humains rivalise maintenant d'intérêt avec le trafic de drogue aux yeux du crime organisé. De même, dans d'autres régions instables, comme dans l'ancienne Union soviétique, les femmes et les enfants sont particulièrement vulnérables à cet égard. Le Canada doit travailler à empêcher certaines organisations de se servir du Canada comme d'un lieu de collecte de fonds pour le financement d'activités criminelles.

En 1949, l'Assemblée générale des Nations Unies approuvait la Convention pour la répression et l'abolition de la traite des êtres humains et de l'exploitation de la prostitution d'autrui. Le Canada n'a toujours pas ratifié cette convention en dépit du fait qu'elle soit entrée en vigueur en 1949.

En juin 2000, on célébrera le cinquième anniversaire de la Déclaration de Beijing. L'un des objectifs stratégiques du Programme d'action de Beijing est d'éliminer la traite des femmes et d'aider les victimes de la violence due à la prostitution et à la traite. Il est essentiel que le Canada envisage de ratifier et d'appliquer cette convention internationale. Faute de quoi, le Canada manquerait à ses engagements à l'égard des Nations Unies et, qui plus est, manquerait à ses engagements à l'égard de ces millions de personnes qui sont en danger. J'exhorte le gouvernement du Canada et les sénateurs à voir à ce que le Canada ratifie cette convention avant le cinquième anniversaire de la Déclaration de Beijing.

(1430)

Le Mois de l'ostéoporose

L'honorable Vivienne Poy: Honorables sénateurs, novembre est le Mois de l'ostéoporose au Canada. L'ostéoporose est une maladie débilitante caractérisée par une faible masse osseuse, qui entraîne une plus grande fragilité des os et des risques de fractures. Le fait que cette maladie soit courante chez les personnes âgées a des conséquences graves pour notre pays. Environ 1,4 million de Canadiens souffrent actuellement d'ostéoporose et 2 millions de plus risquent d'en être atteints un jour. L'ostéoporose frappe une femme sur quatre de plus de 50 ans et un homme sur huit dans ce même groupe d'âge. Le traitement de l'ostéoporose coûte 1,3 milliard de dollars par an au Canada.

L'éducation et la prévention peuvent faire une différence profonde en ce qui concerne l'ostéoporose. En raison du manque de sensibilisation et d'éducation publiques, beaucoup de personnes apprennent qu'elles sont atteintes d'ostéoporose quand il est déjà trop tard. La diminution de la densité osseuse se produit silencieusement au fil des ans, bien avant de devenir apparente. Quand une fracture se produit, le mal est déjà avancé et peut se traduire par des lésions à la colonne vertébrale, à la hanche ou au poignet. L'ostéoporose est presque toujours irréversible. Les fractures ostéoporotiques sont généralement débilitantes et diminuent grandement la qualité de vie des personnes touchées.

Aujourd'hui, nous en connaissons plus que jamais sur la prévention de l'ostéoporose, une maladie considérée dans le monde entier comme un important problème de santé. Nous constituer des os solides dès les premières années de la vie est une des choses les plus importantes que nous puissions faire. Il est également important de nous assurer d'avoir suffisamment de calcium dans notre régime alimentaire, de même que de faire régulièrement de l'exercice, surtout des sports de mise en charge comme la marche, la course, le tennis et le badminton. Il existe maintenant des tests qui permettent un dépistage précoce des personnes à risque. Nous pouvons réduire considérablement le nombre de personnes qui développeront l'ostéoporose si nous prenons des mesures de prévention et de sensibilisation.

Le Canada doit faire preuve de leadership en élaborant un cadre exhaustif de prévention, de diagnostic et de traitement de cette maladie incapacitante. Le genre de leadership dont je parle est conforme à la stratégie, énoncée dans le discours du Trône le mois dernier, qui prévoit la création d'instituts canadiens de recherche en santé. Ces instituts visent à réunir des chercheurs qui s'intéressent à la santé et à établir des priorités en matière de recherche conjointe.

L'ostéoporose doit compter parmi nos priorités en matière de recherche en santé si nous voulons rehausser la qualité de vie des Canadiens, étant donné surtout le vieillissement de la population au cours des prochaines décennies. Le taux d'ostéoporose peut être considérablement réduit si nous envisageons des mesures de prévention à long terme.

Honorables sénateurs, afin d'accroître la sensibilisation à cette importante question de santé, je vous convie tous, ainsi que nos collègues de la Chambre, à prendre le thé avec moi et les représentants de la Société de l'ostéoporose du Canada, demain après-midi, entre 16 heures et 18 heures, dans la salle 237-C de l'édifice du Centre.


AFFAIRES COURANTES

Le commissaire à la protection de la vie privée

Dépôt du rapport annuel

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel du commissaire à la protection de la vie privée pour la période se terminant le 31 mars 1999.

Le greffier du Sénat

Dépôt des comptes annuels

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de vous informer que, conformément à l'article 133 du Règlement du Sénat, le greffier du Sénat a déposé sur le Bureau un état détaillé de ses recettes et de ses paiements pour l'exercice financier 1998-1999.

Affaires étrangères

Dépôt du premier rapport du comité

L'honorable John B. Stewart: Honorables sénateurs, conformément à l'article 104 du Règlement du Sénat du Canada, j'ai l'honneur de déposer le premier rapport du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères. Il porte sur les dépenses engagées par le comité au cours de la première session de la 36e législature.

(Le texte du rapport figure aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui.)

Les conséquences de l'Union monétaire européenne

Présentation du rapport du comité des affaires étrangères demandant l'autorisation d'engager du personnel

L'honorable John B. Stewart, président du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères, présente le rapport suivant:

Le mardi 2 novembre 1999

Le comité sénatorial permanent des affaires étrangères a l'honneur de présenter son

DEUXIÈME RAPPORT

Votre comité, qui a été autorisé par le Sénat le jeudi 14 octobre 1999, conformément à l'article 86 (1)h) du Règlement, à étudier et à faire rapport sur les conséquences pour le Canada de l'émergence de l'Union monétaire européenne et sur d'autres sujets connexes en matière de commerce et d'investissement demande respectueusement que le comité soit autorisé à retenir les services d'avocats, de conseillers techniques et de tout autre personnel jugé nécessaire aux fins de son enquête.

Conformément à l'article 2:07 des Directives régissant le financement des Comités du Sénat, le budget présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration ainsi que le rapport s'y rapportant sont annexés au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,
JOHN B. STEWART

(Le texte de l'annexe figure aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, annexe «A», p. 72)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Stewart, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

Affaires étrangères

La modification du mandat de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord-Présentation du rapport budgétaire du comité concernant l'étude

L'honorable John B. Stewart, président du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères, présente le rapport suivant:

Le mardi 2 novembre 1999

Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères a l'honneur de présenter son

TROISIÈME RAPPORT

Votre comité, qui a été autorisé par le Sénat le jeudi 14 octobre 1999, conformément à l'article 86 (1)h) du Règlement, à examiner pour en faire rapport les ramifications pour le Canada:
  1. de la modification apportée au mandat de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) et au rôle du Canada dans l'OTAN depuis la dissolution du pacte de Varsovie, de la fin de la guerre froide et de l'entrée récente dans l'OTAN de la Hongrie, de la Pologne et de la République tchèque; et
  2. du maintien de la paix, surtout la capacité du Canada d'y participer sous les auspices de n'importe quel organisme international dont le Canada fait partie, demande respectueusement que le comité soit autorisé à retenir les services d'avocats, de conseillers techniques de tout autre personnel jugé nécessaire, et à se déplacer à travers le Canada et à l'étranger aux fins de son enquête.
Conformément à l'article 2:07 des Directives régissant le financement des Comités du Sénat, le budget présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration ainsi que le rapport s'y rapportant sont annexés au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,
JOHN B. STEWART

(Le texte de l'annexe figure aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, annexe «B», p. 78)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Stewart, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

Le Comité de sélection

Présentation du troisième rapport

L'honorable Léonce Mercier, président du Comité de sélection, présente le rapport suivant:

Le mardi 2 novembre 1999

Le Comité de sélection a l'honneur de présenter son

TROISIÈME RAPPORT

Conformément à l'alinéa 85(1)a) et au paragraphe 85(2) du Règlement du Sénat, votre Comité informe le Sénat qu'il s'est réuni pour discuter de la nomination d'un sénateur au poste de Président à titre temporaire.

Votre comité n'a pas pris de décision à ce sujet et il fera rapport au Sénat ultérieurement.

Respectueusement soumis,

Le président,
LÉONCE MERCIER

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Mercier, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Traduction]

Le greffier du Sénat

Renvoi des comptes annuels au comité de la régie interne, des budgets et de l'administration

L'honorable Dan Hays (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)f) du Règlement, je propose: Que les comptes du greffier soient renvoyés au comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

L'ajournement

L'honorable Dan Hays (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)h) du Règlement, je propose:

Que, lorsque le Sénat ajournera aujourd'hui, il demeure ajourné jusqu'à demain, le mercredi 3 novembre 1999, à 13 h 30.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

(1440)

Le discours du Trône

L'adresse en réponse-La fin du débat le huitième jour de séance-Avis de motion

L'honorable Dan Hays (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je donne avis que demain, le mercredi 3 novembre 1999, je proposerai:

Que les délibérations à l'ordre du jour pour la reprise du débat sur la motion tendant à l'adoption d'une Adresse en réponse au discours du Trône, prononcé par Son Excellence la Gouverneure générale devant les deux Chambres du Parlement, se terminent le huitième jour de séance où l'ordre aura été débattu.

La loi sur le casier judiciaire

Projet de loi modificatif-Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-7, Loi modifiant la Loi sur le casier judiciaire et une autre loi en conséquence.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Hays, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour du jeudi 4 novembre 1999.)

Projet de loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques

Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-6, Loi visant à faciliter et à promouvoir le commerce électronique en protégeant les renseignements personnels recueillis, utilisés ou communiqués dans certaines circonstances, en prévoyant l'utilisation de moyens électroniques pour communiquer ou enregistrer de l'information et des transactions et en modifiant la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur les textes réglementaires et la Loi sur la révision des lois

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Hays, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour du jeudi 4 novembre 1999.)

Projet de loi de 1999 pour la mise en oeuvre de conventions fiscales

Première lecture

L'honorable Dan Hays (leader adjoint du gouvernement) présente le projet de loi S-3, Loi mettant en oeuvre un accord, des conventions et des protocoles conclus entre le Canada et le Kyrghizistan, le Liban, l'Algérie, la Bulgarie, le Portugal, l'Ouzbékistan, la Jordanie, le Japon et le Luxembourg, en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Hays, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour du jeudi 4 novembre 1999.)

[Français]

Projet de loi sur les perquisitions et les saisies internationales

Première lecture

L'honorable Pierre Claude Nolin présente le projet de loi S-4, Loi instituant l'autorisation judiciaire préalable aux demandes de perquisitions ou de saisies à l'extérieur du Canada devant être présentées à une organisation ou autorité étrangère ou internationale.

(Le projet de loi est lu une première fois)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Nolin, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour du jeudi 4 novembre 1999.)

[Traduction]

La Loi sur le Parlement du Canada

Projet de loi modificatif-Première lecture

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein présente le projet de loi S-5, Loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada (poète officiel du Parlement).

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Grafstein, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour du jeudi 4 novembre 1999.)

Le Code criminel

Projet de loi modificatif-Première lecture

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de présenter, à l'étape de la première lecture, le projet de loi S-6, Loi modifiant le Code criminel relativement au harcèlement criminel et à d'autres sujets connexes. Ce projet de loi est identique au projet de loi S-17 qui est mort au Feuilleton à la fin de la dernière session parlementaire.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

Le sénateur Oliver: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 57(1)f) du Règlement, je propose que la deuxième lecture du projet de loi soit inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance du Sénat.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, la permission est-elle accordée?

L'honorable Anne C. Cools: Non. Pourrais-je savoir pourquoi il faut demander la permission?

Son Honneur le Président: La permission n'est pas accordée.

Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, je suis curieuse. Je suis prête à donner la permission si je peux savoir pourquoi. Lorsque les parrains d'un projet de loi demandent la permission du Sénat, les sénateurs devraient savoir pourquoi ils le font.

Son Honneur le Président: Honorable sénateur Cools, je regrette, mais il ne peut pas y avoir de débat sur la motion. Toutefois, si c'est une question d'information, c'est tout à fait légitime, si le Sénat est d'accord. Nous avons déjà eu des situations où un sénateur demandait la permission et un autre sénateur voulait savoir pourquoi.

Honorables sénateurs, souhaitez-vous que la question soit posée?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Oliver: Honorables sénateurs, ce projet de loi était inscrit au Feuilleton au cours de la dernière session du Parlement. Il a été renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. On a entendu un certain nombre de témoins et on a consigné des témoignages. Je voudrais être en mesure de parler de cela, de dire si oui ou non on peut considérer que ces témoignages ont déjà été entendus dans le cadre de l'étude du projet de loi que je viens de présenter. Je voudrais faire cela demain.

Le sénateur Cools: D'accord.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(Sur la motion du sénateur Oliver, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 57(1)f) du Règlement, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

Projet de loi sur la sanction royale

Première lecture

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition) présente le projet de loi S-7, Loi relative aux modalités d'octroi par la Gouverneure générale, au nom de Sa Majesté, de la sanction royale aux projets de loi adoptés par les Chambres du Parlement.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Lynch-Staunton, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance du jeudi 4 novembre 1999.)

La Loi sur l'immigration

Projet de loi modificatif-Première lecture

L'honorable Ron Ghitter présente le projet de loi S-8, Loi modifiant la Loi sur l'immigration.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Ghitter, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance du jeudi 4 novembre 1999).

Le Code criminel
La Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition

Projet de loi modificatif-Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-247, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (peines consécutives).

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Cools, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance du mardi 9 novembre 1999.)

(1450)

Le Sénat

Dépôt du rapport de la délégation du Sénat en République Kirghize

L'honorable Nicholas W. Taylor: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la réunion de la délégation du Sénat qui a visité la République kirghize, au mois d'octobre 1998. La délégation était formée des sénateurs Molgat, Andreychuk et Taylor.

Affaires étrangères

Avis de motion visant à autoriser le comité à engager du personnel

L'honorable John B. Stewart: Honorables sénateurs, je donne avis que demain, le mercredi 3 novembre 1999, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères soit habilité à retenir les services de conseillers, techniciens, employés de bureau ou autres éléments nécessaires pour examiner les projets de loi, la teneur des projets de loi et les prévisions budgétaires qui lui ont été renvoyés.

Avis de motion visant à autoriser le comité à permettre la diffusion électronique de ses travaux

L'honorable John B. Stewart: Honorables sénateurs, je donne avis que demain, le mercredi 3 novembre 1999, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères soit habilité à permettre le reportage de ses délibérations publiques par les médias d'information électroniques, en dérangeant le moins possible ses travaux.

[Français]

Examen de la politique canadienne antidrogues

Avis de motion autorisant la formation d'un comité sénatorial spécial

L'honorable Pierre Claude Nolin: Honorables sénateurs, je donne avis que, le jeudi 4 novembre 1999, je proposerai:

Qu'un comité spécial du Sénat soit formé afin de réévaluer les lois et les politiques canadiennes antidrogues, de consulter abondamment la population canadienne pour déterminer les besoins spécifiques des différentes régions du pays plus particulièrement là où les problèmes sociaux liés au trafic et à l'usage des drogues illicites sont les plus manifestes, d'élaborer des propositions pour diffuser toute information relative à la politique canadienne antidrogues et, enfin, de produire des recommandations pour en arriver à l'adoption d'une stratégie antidrogues mise au point par et pour les Canadiens encourageant tous les paliers de gouvernement à travailler en étroite collaboration à la réduction des méfaits liés à la consommation de drogues illicites.

Sans que ce qui suit ait pour effet de restreindre son mandat, que le comité soit autorisé à:

- réexaminer l'approche adoptée par le gouvernement fédéral pour combattre la consommation de drogues illicites au Canada, son efficacité comme moyen de réduire les effets de la consommation de stupéfiants et la mesure dans laquelle son application est juste;

- élaborer une politique nationale de réduction des méfaits afin d'atténuer les impacts négatifs de la consommation de drogues illicites au Canada et faire des recommandations sur la façon d'appliquer cette politique, notamment la possibilité de considérer avant tout l'usage et l'abus de drogues comme un problème socio-sanitaire;

- étudier les modèles de réduction des méfaits adoptés par d'autres pays et déterminer s'il y aurait lieu de les appliquer partiellement ou intégralement, au Canada;

- examiner le rôle et les obligations internationales qui incombent au Canada en vertu des conventions des Nations Unies sur les stupéfiants, de la Déclaration universelle des droits de l'homme et d'autres traités connexes afin de déterminer si ces traités l'autorisent à prendre des mesures autres que les poursuites criminelles et la pénalisation des contrevenants à l'échelle internationale;

- explorer les effets du cannabis sur la santé et étudier la question de savoir si l'emploi de politiques alternatives au sujet de l'usage du cannabis conduirait à une augmentation de l'usage et de l'abus à court et à long terme;

- étudier la possibilité que le gouvernement use du pouvoir de réglementation que lui confère la Loi sur les contraventions comme moyen supplémentaire d'appliquer une politique de réduction des méfaits comme il est d'usage dans d'autres juridictions;

- étudier toute autre question relative à la politique canadienne antidrogues que le comité juge appropriée pour accomplir son mandat.

Que le comité spécial soit composé de cinq sénateurs et que le quorum soit de trois membres;

Que le comité ait le pouvoir de faire comparaître des personnes et de produire des documents, d'entendre des témoins, de faire rapport de temps à autre et de faire imprimer au jour le jour documents, mémoires et témoignages selon les instructions du comité;

Que les mémoires reçus et les témoignages entendus lors de l'examen du projet de loi C-8, Loi portant sur la réglementation de certaines drogues et de leurs précurseurs ainsi que d'autres substances, par le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles durant la deuxième session de la trente-cinquième législature, soient déférés au comité;

Que le comité soit habilité à autoriser, s'il le juge opportun, la radiodiffusion, la télédiffusion et la diffusion par le biais des médias électroniques de la totalité ou d'une partie de ses délibérations et des informations qu'il détient;

Que le comité soit autorisé à siéger pendant les ajournements du Sénat en vertu du paragraphe 95(2) du Règlement du Sénat;

Que le comité présente son rapport final au plus tard trois ans après la date de sa création.

Le fédéralisme et la mondialisation

Avis d'interpellation

L'honorable Gérald-A. Beaudoin: Honorables sénateurs, je donne avis que, le mardi 9 novembre 1999, je porterai à l'attention du Sénat, à la lumière des débats qui ont eu lieu à l'occasion du Forum des fédérations, les grands principes du fédéralisme moderne. J'intitule cette interpellation: le fédéralisme et la mondialisation.

[Traduction]

Examen de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement

Avis de motion

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, je donne avis que, le jeudi 4 novembre 1999, je proposerai:

Que le Sénat exhorte le gouvernement à entreprendre sur-le-champ son examen de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement et à confier la première étape de cet examen au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles.

Bureau de salubrité de l'environnement pour les enfants

Avis de motion constitutive

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, je donne avis que, le mercredi 3 novembre 1999, je proposerai:

Que le Sénat exhorte le gouvernement à instituer un bureau de salubrité de l'environnement pour les enfants, soit un organisme autonome chargé de promouvoir la protection des enfants contre les risques environnementaux.

La défense nationale

Avis de motion portant création d'un comité sénatorial spécial chargé d'examiner la conduite du personnel au cours de la mission en Somalie et la destruction de dossiers médicaux du personnel en mission en Croatie

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, je donne avis que, le mardi 16 novembre 1999, je proposerai:

Qu'un comité spécial du Sénat soit constitué afin d'enquêter et de faire rapport sur deux questions importantes qui touchent la conduite de la chaîne de commandement des Forces canadiennes, autant dans les opérations sur le théâtre qu'au quartier général de la Défense nationale: c'est-à-dire sa réaction aux problèmes opérationnels, décisionnels et administratifs qui se sont manifestés au cours du déploiement de forces en Somalie, dans la mesure où ces questions n'ont pas été approfondies par la Commission d'enquête sur le déploiement des Forces canadiennes en Somalie; et les allégations selon lesquelles des troupes canadiennes ont été exposées à des substances toxiques en Croatie entre 1993 et 1995 de même que les allégations de destruction des dossiers médicaux de militaires envoyés en Croatie;

(1500)

Que le comité, dans l'examen des questions précédentes, soit habilité à interroger des témoins qui, selon lui, pourraient contribuer au déroulement de l'enquête, notamment, mais non exclusivement:

  1.  l'actuel ministre de la Défense, quant aux deux questions spécifiées;
  2. d'anciens ministres de la Défense, quant aux deux questions spécifiées;
  3. le sous-ministre de la Défense nationale à l'époque, quant aux deux questions spécifiées;
  4. le chef de cabinet par intérim du ministre de la Défense nationale à l'époque, quant aux incidents survenus en Somalie;
  5. le conseiller spécial du ministre de la Défense nationale à l'époque (M. Campbell), quant aux incidents survenus en Somalie;
  6. le conseiller spécial du ministre de la Défense nationale à l'époque (J. Dixon), quant aux incidents survenus en Somalie;
  7. les personnes ayant occupé le poste de juge-avocat général pendant la période concernée, quant aux incidents survenus en Somalie;
  8. le juge-avocat général adjoint-Litiges à l'époque, quant aux incidents survenus en Somalie; et
  9. le chef d'état-major de la Défense et le sous-chef d'état-major de la Défense à l'époque, quant aux deux questions spécifiées.
Que sept sénateurs nommés par le comité de sélection remplissent les fonctions de membres du comité spécial, et que trois constituent le quorum;

Que le comité soit autorisé à convoquer des personnes, à faire produire des documents et des dossiers, à entendre des témoins assermentés, à faire rapport de temps à autre et à faire imprimer au jour le jour documents et témoignages selon les instructions du comité;

Que le comité soit habilité à autoriser, s'il le juge opportun, la radiodiffusion et la télédiffusion de la totalité ou d'une partie de ses délibérations;

Que le comité soit autorisé à retenir les services de conseillers, professionnels, techniciens, employés de bureau ou d'autres personnes nécessaires, pour l'aider à mener son étude;

Que les partis politiques représentés au comité spécial reçoivent une allocation pour la contribution de spécialistes aux travaux du comité;

Que le comité soit autorisé à voyager à l'intérieur et à l'extérieur du Canada;

Que le comité soit autorisé à siéger pendant les séances et les congés du Sénat;

Que le comité soumette son rapport un an au plus après sa formation et que, si le Sénat ne siège pas au moment où le rapport est déposé, celui-ci soit considéré comme ayant été déposé le jour où il est remis au greffier du Sénat.

Le financement de l'enseignement postsecondaire

Avis d'interpellation

L'honorable Norman K. Atkins: Honorables sénateurs, je donne avis que, le jeudi 4 novembre 1999, j'attirerai l'attention du Sénat sur le financement de l'enseignement postsecondaire au Canada, particulièrement la partie du financement que supportent les étudiants, en vue d'élaborer des politiques qui viseront à amoindrir le fardeau des dettes des étudiants au niveau postsecondaire au Canada.

La Conférence sur l'égalité des femmes et leur participation à la vie publique

Avis d'interpellation

L'honorable Lorna Milne: Honorables sénateurs, je donne avis que, le jeudi 4 novembre 1999, j'attirerai l'attention du Sénat sur ma participation récente au 70e anniversaire de l'affaire «personne», dans le cadre de la Conférence sur l'égalité des femmes et leur participation à la vie publique au Canada et au Royaume-Uni, qui s'est tenue les 21 et 22 octobre 1999, à Londres, en Angleterre.

Les Canadiens éminents et leur rôle au Royaume-Uni

Avis d'interpellation

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, conformément aux paragraphes 56(1), 56(2) et 57(2) du Règlement, je donne avis que jeudi prochain, le 4 novembre 1999, j'attirerai l'attention du Sénat sur:

a) les personnes nées au Canada qui ont siégé à la Chambre des communes du Royaume-Uni, y compris le natif de l'Ontario Edward Blake, ministre de la Justice du Canada de 1875 à 1877 et chef du Parti libéral du Canada de 1880 à 1887, le natif du Nouveau-Brunswick le très honorable Bonar Law, premier ministre du Royaume-Uni de 1922 à 1923, et le natif de l'Ontario sir Bryant Irvine, vice-président de la Chambre des communes du Royaume-Uni de 1976 à 1982;

b) les personnes nées au Canada qui ont siégé à la Chambre des lords du Royaume-Uni, y compris le très hon. Richard B. Bennett, premier ministre du Canada de 1930 à 1935, et lord Beaverbrook, ministre du Royaume-Uni en 1918 et de 1940 à 1942;

c) les britanniques de naissance nés au Royaume-Uni ou dans les dominions et colonies qui ont siégé au Sénat et à la Chambre des communes du Canada, y compris le très hon. John Turner, premier ministre en 1984 et chef de l'opposition libérale de 1984 à 1990, et moi-même, sénateur noire en exercice née dans les Antilles britanniques;

d) les personnes de citoyenneté canadienne qui ont fait partie du Conseil privé du Royaume-Uni, y compris les premiers ministres du Canada, les juges en chef de la Cour suprême et certains ministres canadiens dont le leader du gouvernement au Sénat de 1921 à 1930 et de 1935 à 1942, le très hon. sénateur Raoul Dandurand, qui a été nommé au Conseil privé du Royaume-Uni en 1941;

e) la résolution Nickle de 1919, une motion de la Chambre des communes du Canada en vue d'une adresse à Sa Majesté le roi George V, et les propos que le premier ministre R.B. Bennett a tenus en 1934 à son sujet:

«C'était aussi inefficace en droit que possible. Non seulement c'était inefficace, mais c'était aussi, je regrette de le dire, un affront au souverain lui-même. N'importe quel avocat de droit constitutionnel ou quiconque se donne la peine d'étudier cette question s'en rend bien compte.»;

f) les propos que le premier ministre R.B. Bennett a tenus en 1934 dans une lettre au député J.R. MacNicol:

«Tant que je resterai citoyen de l'empire britannique et loyal sujet du roi, j'entends reconnaître au souverain la prérogative de reconnaître les services de ses sujets.»

g) les nombreux distingués Canadiens qui ont depuis 1919 reçu des honneurs du roi ou de la reine du Canada, y compris l'élévation à l'ordre de la chevalerie en 1934 de sir Lyman Duff, juge en chef de la Cour suprême du Canada, en 1935 de sir Ernest MacMillan, musicien, en 1986 de sir Bryant Irvine, parlementaire, en 1994 de sir Neil Shaw, industriel, et en 1994 de sir Conrad Swan, conseiller du premier ministre Pearson au sujet du drapeau national du Canada;

h) les nombreux distingués Canadiens qui ont reçu 646 honneurs et décorations de souverains étrangers non britanniques et non canadiens entre 1919 et février 1929;

i) la position juridique et constitutionnelle des Canadiens de naissance et de citoyenneté concernant leur aptitude ou leur inaptitude à siéger à la Chambre des lords et ou à la Chambre des communes du Royaume-Uni, notamment les Canadiens domiciliés au Royaume-Uni et jouissant de la double citoyenneté du Canada et du Royaume-Uni;

j) la position juridique et constitutionnelle des Canadiens domiciliés au pays ou à l'étranger concernant leur droit de recevoir des honneurs et des distinctions de leur propre souverain, la reine Elizabeth II du Canada, ainsi que leur droit de recevoir des honneurs et des distinctions de souverains autres que le leur, y compris du souverain de la France l'honneur de l'Ordre royal de la Légion d'honneur;

k) les honneurs, les distinctions et les décorations qui ne sont pas héréditaires comme la pairie à vie, l'élévation à l'ordre de la chevalerie et les ordres militaires et de chevalerie;

l) la recommandation par le premier ministre britannique Tony Blair à Sa Majesté la reine Elizabeth II portant de nommer comme membre non héréditaire de la Chambre des lords Conrad Black, un distingué éditeur et entrepreneur canadien et colonel honoraire des Governor General's Foot Guards du Canada.

L'accès aux données du recensement

Présentation de pétitions

L'honorable Lorna Milne: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de présenter une pétition de l'Ontario Genealogical Society qui a été signée par 100 personnes et qui demande en partie ceci:

... les pétitionnaires prient le Parlement d'adopter une loi afin de préserver les données des recensements d'après 1901, de les retirer des Archives nationales et de mettre ces données et celles des recensements ultérieurs à la disposition du public au bout de 92 ans, ce qui est actuellement conforme aux nombreuses dispositions législatives sur la protection des renseignements personnels et aux délais actuellement en vigueur.

Les travaux du Sénat

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je ferai une déclaration plus tard aujourd'hui au sujet du recours au Règlement que le sénateur Lynch-Staunton a soulevé l'autre jour. Cependant, je voudrais saisir cette occasion pour signaler certains problèmes que pose notre Règlement. Aux termes du Règlement, il n'y a qu'une demi-heure de prévue pour les affaires courantes et, normalement, je devrais maintenant me lever et passer immédiatement aux questions inscrites à l'ordre du jour. Cependant, je ne pense pas que ce soit ce que le Sénat souhaite. Je veux simplement signaler qu'il faut corriger ces anomalies dans notre Règlement.

PÉRIODE DES QUESTIONS

L'Agence canadienne des douanes et du revenu

Les modifications de la prestation fiscale nationale pour enfants-Les effets sur les prestataires

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Le printemps dernier, j'ai attiré l'attention du Sénat sur un défaut de structure de la Prestation fiscale nationale pour enfants dans le cas des familles à faible revenu ayant plus de trois enfants. À l'intention du leader du gouvernement, je vais exposer de nouveau le problème.

En 2001, le gouvernement va éliminer progressivement la Prestation fiscale nationale pour enfants selon un taux de récupération de 11 p. 100 pour les familles ayant un enfant, de 19,7 p. 100 pour les familles ayant deux enfants et de 27,6 p. 100 pour les familles de trois enfants ou plus. De cette façon, la prestation devrait avoir été remboursée quand le taux d'imposition d'une famille ayant un revenu imposable de 29 000 $ atteint 26 p. 100. Or, quand une famille compte quatre enfants ou plus, la Prestation nationale pour enfants n'est pas entièrement récupérée quand on atteint le taux d'imposition de 26 p. 100.

(1510)

Voyons ce qui arrivera à une mère chef de famille de quatre enfants qui vit à Halifax, en Nouvelle-Écosse, et dont le revenu familial est de 30 000 $, si elle a la possibilité de gagner 100 $ en faisant des heures supplémentaires, une fois que les derniers changements auront été apportés à la prestation en 2001.

Honorables sénateurs, je vais vous lire quelques chiffres. J'ai déjà remis copie de ces chiffres au leader pour qu'il puisse me suivre. D'abord, la Prestation fiscale nationale pour enfants sera réduite de 27,60 $. Puis, à moins qu'on envisage d'apporter des modifications importantes aux tranches d'imposition, l'impôt fédéral sur le revenu percevra 26 $ de plus. L'impôt sur le revenu de la province de la Nouvelle-Écosse prélèvera à son tour 14,95 $. Les cotisations du Régime de pensions du Canada de 4,30 $ moins le crédit d'impôt du RPC entraîneront une perte d'encore 3,15 $. Si nous formulons l'hypothèse très optimiste que les cotisations d'AE vont baisser à 2 $, soit le montant nécessaire pour financer le programme, on enlèvera encore 1,46 $ du crédit d'impôt d'AE. Il y a ensuite les crédits d'impôt subordonnés au revenu. Du crédit de TPS, on retranchera 5 $ de plus, et encore 5 $ du crédit d'impôt pour enfants. La somme de tous ces chiffres est de 83,16 $ sur les 100 $. Maintenant, si on soustrait cette somme du montant de départ de 100 $, la famille de quatre enfants ayant un revenu de 30 000 $ reçoit 16,84 $ sur les 100 $.

Honorables sénateurs, dans le discours du Trône, le gouvernement a annoncé une bonification de deux milliards de dollars de la Prestation nationale pour enfants, les détails devant être communiqués ultérieurement. Le leader du gouvernement peut-il nous dire si le gouvernement a l'intention d'examiner sérieusement combien totalisent les différents impôts et les sommes récupérées avant de proposer ses dernières modifications à la Prestation nationale pour enfants? Le gouvernement peut-il donner au Sénat l'assurance qu'il réglera cette iniquité particulièrement grave pour les habitants de la Nouvelle-Écosse?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je remercie le sénateur Oliver de m'avoir remis une copie de ces calculs un peu avant mon arrivée au Sénat. Je sais que le sénateur a à coeur l'exemple qu'il a donné.

Je suis heureux que le sénateur ait mentionné l'augmentation annuelle de deux milliards de dollars de la Prestation fiscale nationale pour enfants qui a été prévue dans les derniers budgets, ainsi que l'aide annuelle de près de 7 milliards de dollars dont les familles bénéficieront grâce à cette prestation, à compter de juillet 2000. L'honorable sénateur a reconnu cela, et nous nous entendons tous deux pour dire qu'il s'agit là d'une mesure gouvernementale très importante. Je voudrais aussi ajouter que, pour une famille qui compte deux enfants, la prestation maximale est de 3 750 $, ce qui représente une augmentation de 48 p. 100 par rapport à la prestation maximale de 1996. Je sais que l'honorable sénateur se réjouit des progrès que nous avons accomplis.

Honorables sénateurs, il m'intéressera certes de parler de l'exemple précis. Je suis sûr que le gouvernement tiendra compte de tous les facteurs que le sénateur a mentionnés. Pour ce qui concerne cet exemple particulier, je vais m'enquérir auprès des diverses parties et je puis assurer au sénateur que sa préoccupation sera transmise aux autorités pertinentes.

Le sénateur Oliver: Le ministre conviendra certes avec moi que, lorsqu'une mère de quatre enfants qui essaie de gagner 100 $ de plus se retrouve avec seulement 16,84 $, le gouvernement doit faire quelque chose pour essayer de supprimer des dispositions de récupération.

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, je suis d'accord avec le sénateur. Nous ne voulons certes pas décourager une mère seule de quatre enfants dans cette situation d'essayer de gagner 100 $ de plus.

Dans toutes les retenues qui ont été signalées, je me demande si la cotisation au Régime de pensions du Canada, par exemple, s'applique à tous les niveaux de revenu ou s'il y a un niveau de revenu maximal au-delà duquel elle ne s'applique pas. Comme je ne prétends pas être un spécialiste en la matière, je voudrais pouvoir en discuter avec des personnes averties. J'approuve certes l'esprit de l'observation que présente le sénateur.

Les Nations Unies

Le désarmement nucléaire-La politique du gouvernement face à la résolution de la New Agenda Coalition

L'honorable Douglas Roche: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat, que je félicite pour sa nomination et à qui je souhaite tout le succès possible.

Le 19 avril dernier, dans sa réponse au rapport du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international, le gouvernement du Canada s'engageait à travailler avec la New Agenda Coalition pour atteindre certains objectifs en matière de désarmement nucléaire. Le 26 octobre dernier, la New Agenda Coalition a présenté une résolution à la première commission de l'Assemblée générale des Nations Unies. Elle demande:

... aux États dotés d'armes nucléaires de s'engager sans équivoque à procéder promptement et en totalité à l'élimination de leurs arsenaux nucléaires et d'entreprendre sans tarder des négociations et de les mener à bien rapidement, parvenant ainsi au désarmement nucléaire auquel ils sont tenus conformément à l'article VI du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires.

L'an dernier, le Canada s'est abstenu de se prononcer sur une résolution semblable en déclarant que le gouvernement n'avait pas encore entendu l'avis de son comité parlementaire. Étant donné le désir exprimé par le gouvernement de faire avancer le projet de désarmement nucléaire et compte tenu de la crise que traverse le système de non-prolifération en place, le leader du gouvernement pourrait-il nous confirmer que le Canada appuiera la résolution présentée cette année par la New Agenda Coalition?

Avant que le ministre ne réponde, honorables sénateurs, je voudrais, si vous me le permettez, déposer dans les deux langues officielles la résolution que la New Agenda Coalition a présentée à la première commission de l'Assemblée générale des Nations Unies le 22 octobre 1999.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée pour déposer la déclaration?

Des voix: D'accord.

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je remercie l'honorable sénateur Roche de sa question. Je le remercie également pour ce qu'il a dit auparavant sur le rôle du Canada dans les efforts de maintien de la paix dans le monde. Ces commentaires tombaient particulièrement à point.

En ce qui a trait à la question précise que l'honorable sénateur a posée, je suis sûr que le ministre des Affaires étrangères et du Commerce international examinera soigneusement, en temps et lieu, la position du gouvernement et qu'il la rendra publique en temps voulu. Je serai heureux de la faire connaître alors à l'honorable sénateur.

Le sénateur Roche: Je remercie l'honorable sénateur de sa réponse et je suis heureux que le ministre étudie le dossier. Le ministre peut-il préciser quels sont les mots ou les passages de la résolution qui sont contraires à la politique du gouvernement canadien? En analysant le texte de la résolution, je ne trouve rien qui soit incompatible avec la politique du gouvernement canadien.

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, je me ferai un plaisir de prendre connaissance de la documentation qu'a déposée l'honorable sénateur et de faire part de ses observations aux ministres compétents.

La défense nationale

Le remplacement des hélicoptères Sea King

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, j'ai plusieurs questions à poser au leader du gouvernement au Sénat. Le sénateur Graham me manquera, mais je vous souhaite la bienvenue, monsieur, et vous souhaite bonne chance.

Voilà précisément 1 196 jours que le sénateur Graham m'a promis que «très, très prochainement», «incessamment», «dans les quelques jours à venir», on annoncerait le remplacement des hélicoptères embarqués. Hier, le ministre des Affaires étrangères a qualifié les dépenses accrues en matière de défense d'«ennuyeuses».

Honorables sénateurs, un marin très malade ne pourrait pas être évacué de son navire au large de la côte est de la Nouvelle-Écosse car le Sea King du NCSM Fredericton n'est pas opérationnel, tout comme le Sea King à bord du NCSM Ville de Québec, et qu'il n'y a pas de Sea King à Shearwater.

Le ministre est-il d'accord avec le ministre des Affaires étrangères quand celui-ci qualifie les dépenses de défense d'ennuyeuses? Se préoccupe-t-il du bien-être de nos militaires, qui dépendent d'un matériel sûr et fiable? En fait, il est presque immoral de laisser ces avions voler.

(1520)

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Le sénateur Forrestall soulève la question d'un marin qui s'est trouvé dans une situation difficile. Selon mes sources, ce marin est en train de se rétablir vite à l'hôpital.

Cependant, cela ne répond pas à la question soulevée par l'honorable sénateur. J'ai eu des discussions avec le ministre de la Défense nationale, qui m'a précisé que le remplacement des hélicoptères est une absolue priorité. Je partage certainement ce point de vue avec le ministre de la Défense nationale et je ne ménagerai pas mes efforts pour m'assurer que les mécanismes voulus soient en place afin de remplacer ces hélicoptères.

Le sénateur Forrestall: Honorables sénateurs, je crois comprendre que le leader du gouvernement au Sénat s'est maintenant engagé à consacrer autant de temps à se préoccuper des problèmes auxquels la marine en particulier doit faire face qu'à essayer de redorer le blason libéral dans notre merveilleuse province.

Le West Nova Scotia Regiment-La nomination d'un colonel honoraire

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, je voudrais poser une question sur un sujet qui remonte à presque trois ans. Le West Nova Scotia Regiment attend depuis bien plus de deux ans la nomination d'un nouveau colonel honoraire. Cela fait longtemps que ce régiment très coloré n'a pas de colonel honoraire. Si le ministre n'a pas d'information aujourd'hui, et ce pourrait bien être le cas, ses collaborateurs et lui-même pourraient-ils vérifier si cette nomination peut être faite le plus rapidement possible?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je prends au sérieux les remontrances de l'honorable sénateur qui veut que nous améliorions la situation de la marine sur la côte atlantique. Pour ce qui est de redorer le blason du Parti libéral, cependant, je tiens à lui dire que les deux choses ne sont pas nécessairement contradictoires.

En ce qui a trait au régiment dont parle le sénateur, je ne saurais répondre de façon précise. Je vais donc prendre sa question en note et je lui fournirai des renseignements à ce sujet plus tard. Entre-temps, si le sénateur a des suggestions au sujet d'un colonel honoraire, je serai heureux d'en faire part aux autorités compétentes.

L'agriculture et l'agroalimentaire

La crise agricole au Manitoba et en Saskatchewan-La visite de la délégation à Ottawa-Les anomalies dans les statistiques

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, les premiers ministres du Manitoba et de la Saskatchewan sont venus ici à Ottawa pour demander au gouvernement de venir en aide aux agriculteurs. Notre premier ministre et son gouvernement ont fait savoir que selon les statistiques la situation ne serait pas si mauvaise et qu'il n'est donc pas nécessaire que le gouvernement accorde une aide supplémentaire aux agriculteurs. Toutefois, ces statistiques n'ont pas été communiquées à ceux qui sont venus demander de l'aide. Le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il user de ses bons offices pour s'assurer que le ministre de l'Agriculture rendra publiques les statistiques en cause pour que nous puissions les examiner?

Quand j'ai étudié les statistiques portant sur la Saskatchewan, elles m'ont semblé très claires et je suis persuadée que d'autres seront d'accord avec moi à ce sujet. Comme tous le savent bien, les coûts de production sont deux fois plus élevés que les prix de vente. Le ministre peut-il nous dire si nous pourrons un jour voir ces données fantômes sur lesquelles le premier ministre s'appuie?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le premier ministre et le ministre de l'Agriculture ont rencontré les premiers ministres de la Saskatchewan et du Manitoba ainsi que les délégations qui les accompagnaient. Il semblait y avoir une certaine confusion quant aux chiffres sur lesquels les deux parties s'appuyaient. Nous tentons de rationaliser ces données et je ne peux que présumer que les données rationalisées seront rendues publiques bientôt.

Toutefois, je ne voudrais pas laisser croire que, parce qu'il y avait divergence d'opinions relativement à certains chiffres en cause, le gouvernement n'envisagera pas d'autres mesures. Ce serait là une conclusion beaucoup trop hâtive.

Le sénateur Spivak: Honorables sénateurs, le premier ministre de ma province est rentré amèrement déçu. Je sais qu'un comité se penche sur les chiffres. Toutefois, l'aide demandée par le Manitoba et la Saskatchewan était, comme le ministre le sait parfaitement, de 1,3 milliard de dollars. J'ai déduit des conversations que j'ai eues avec les personnes qui sont venues voir le premier ministre, ainsi que des reportages publiés dans la presse et des documents publiés à la suite d'une fuite dans le National Post, dont nous savons qu'il ne se trompe jamais, que le gouvernement n'envisageait pas d'accorder une aide de cette importance, qu'à son avis, elle n'était pas nécessaire pour régler la crise. En fait, la réponse est un non sans équivoque. Le ministre a-t-il quelque chose à nous dire aujourd'hui qui indiquerait que ce n'est pas là l'attitude du gouvernement?

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, le gouvernement a affecté quelque 900 millions de dollars au programme ACRA. Les provinces ont fait une contribution de 600 millions de dollars. En plus de ce montant, la délégation a demandé une aide supplémentaire de 1,3 milliard de dollars. Je pense que tout le monde est d'accord là-dessus.

La réponse du gouvernement a été qu'il ne pensait pas que l'on pouvait envisager une aide de 1,3 milliard de dollars. Je ne pense pas qu'il ait changé d'avis. Toutefois, il serait prématuré de conclure qu'aucune aide n'est disponible.

La crise agricole au Manitoba et en Saskatchewan-Les doléances présentées au premier ministre

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, je sais parfaitement de quoi parle le ministre. Les agriculteurs sont très mécontents du programme d'aide en cas de catastrophe liée au revenu agricole et de la façon dont les choses sont menées. Je vous transmets leur point de vue. À l'instar d'autres sénateurs, je me suis personnellement entretenue avec plusieurs délégations. Il ne s'agit donc pas de ma propre interprétation des faits. Je suis en train de vous rapporter leur sentiment.

Les Canadiens ont contribué avec joie à la résolution du problème du secteur des pêches, comme ils ont contribué à régler le malheureux problème qui a frappé le Québec. Ils voudraient aujourd'hui que le premier ministre se rende sur place pour constater de visu l'ampleur du problème. Ils l'ont souhaité. Or, jusqu'à présent, rien ne nous permet de croire que ce sera fait.

Le ministre signalera-t-il au premier ministre et à son cabinet que le moral est au plus bas, au Manitoba? Les habitants de la province se croient marginaux et peu dignes de l'attention accordée à toutes les autres régions du pays. Je ne suis pas de leur avis. Le ministre fera-t-il également part du sentiment qui commence à poindre au Manitoba? L'Ouest se sent aliéné, expression que je n'avais pas entendue de longue date et qui n'a pas sa raison d'être dans le cas qui nous occupe.

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je garantis personnellement à l'honorable sénateur que ses remarques seront rapportées au premier ministre à la première occasion.

Bien qu'on ait alloué à l'ACRA une somme d'argent importante, soit quelque 1,5 milliard de dollars, et bien que 36 000 demandes aient été reçues dans le cadre de ce programme, il y a eu des plaintes quant au fait que cet argent n'a pas été débloqué comme il l'aurait dû pour répondre efficacement aux besoins. Des préoccupations ont également été exprimées quant au fait que le montant alloué à ce programme pourrait ne pas être suffisant. Toutes ces remarques sont prises au sérieux. Le gouvernement les examine avec attention.

La crise agricole au Manitoba et en Saskatchewan-L'efficacité du programme d'aide en cas de catastrophe liée au revenu agricole

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, le leader du gouvernement au Sénat a indiqué que l'ACRA fonctionne bien. Le message que nous envoient les agriculteurs de l'ouest du Canada est qu'il se peut qu'il fonctionne bien ailleurs, mais qu'il ne convient pas pour régler les problèmes que connaissent la Saskatchewan et le Manitoba. Ce message a été transmis au premier ministre fédéral par l'un des deux premiers ministres provinciaux au moins. Pourquoi le gouvernement continue-t-il de dire que l'ACRA fonctionne bien? Si ce programme fonctionne bien ailleurs, peut-être devrait-il être réservé à d'autres.

Pourquoi la demande de remanier l'ACRA présentée par le Manitoba et la Saskatchewan n'a-t-elle pas été reçue favorablement? Pourquoi a-t-on fait espérer aux premiers ministres de ces provinces qu'il y aurait du nouveau? Pourquoi ont-ils été attirés à Ottawa pour se faire dire une fois de plus que le gouvernement allait étudier l'affaire? Après des mois de tergiversations, est-ce là une façon de faire traîner les choses pour qu'il ne reste plus une seule famille d'agriculteurs? Est-ce là le plan secret du gouvernement?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, pour la gouverne de l'honorable sénateur, je n'ai pas dit que l'ACRA fonctionnait merveilleusement bien et n'avait pas besoin d'améliorations. Ce que j'ai dit, c'est que c'était un programme important de 1,5 milliard de dollars. Quelque 36 000 agriculteurs y ont souscrit en soumettant une demande. Au moins, ils y ont cru à un moment donné.

Je pense que tout le monde reconnaît que l'argent dispensé par le biais de ce programme n'a pas été distribué aussi efficacement qu'il aurait pu l'être. Le premier ministre et le ministre de l'Agriculture prennent la question au sérieux. Les entretiens qu'ils ont eus avec les premiers ministres provinciaux ont confirmé ce qu'ils savaient déjà. J'espère que des améliorations pourront être apportées aux programmes existants et qu'on pourra trouver d'autres formes d'aide.

Le sénateur Andreychuk: Honorables sénateurs, j'ai reçu des appels d'agriculteurs qui ont fait une demande dans le cadre d'ACRA. Ils m'ont dit que cela pouvait prendre jusqu'à six mois pour avoir une réponse. Comment le gouvernement peut-il savoir si le programme fonctionne bien si la réponse que les agriculteurs attendent désespérément arrive six mois en retard? Certains de ceux qui ont fait une demande en avril ou en mai ne reçoivent qu'aujourd'hui notification qu'ils ne sont pas admissibles.

D'où vient la confiance que le gouvernement a dans l'ACRA? Après consultation, les premiers ministres de la Saskatchewan et du Manitoba sont venus à Ottawa convaincus que leur problème serait pris au sérieux, au lieu de faire l'objet d'études supplémentaires. Ils s'attendaient à ce que les exploitations qui sont au bord de la faillite soient sauvées. Une fois que les agriculteurs seront partis, ils ne reviendront pas. Ce n'est pas une ressource renouvelable. Quand ils quittent la ferme familiale, ils quittent la Saskatchewan. Cela détruit la base. Nous ne jouissons pas de la même diversité que certaines autres provinces, y compris celle du leader du gouvernement. Nous dépendons de l'agriculture, du moins pour le moment.

Quand examinera-t-on le programme ACRA du point de vue de la Saskatchewan et du Manitoba, plutôt que d'un point de vue mondial? Il n'y a plus de temps à perdre. D'autres études ne sont plus nécessaires. Le premier ministre devrait aller écouter certains agriculteurs qui restent encore sur leur exploitation, car les autres sont partis. Je me demande où ils s'en vont et ce qu'ils font, étant donné que tous leurs moyens de subsistance reposaient sur l'agriculture. On peut certes établir ici un parallèle avec la pêche, ce que le ministre devrait comprendre. On ne peut plus attendre. Le problème est critique.

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, madame le sénateur sera heureuse si je puis l'assurer qu'un tel examen a lieu en ce moment.

Le sénateur Andreychuk: Nous n'avons pas besoin d'examen.

Le sénateur Boudreau: Selon madame le sénateur, et elle n'est probablement pas la seule à avoir cette opinion, le programme n'a pas fonctionné aussi bien qu'il le pourrait. Le sénateur a parlé de retards dans le traitement des demandes. Le gouvernement a pris cette question au sérieux. Espérons que les résultats de ce sérieux examen seront rendus publics très bientôt.

La crise agricole au Manitoba et en Saskatchewan-La visite d'une délégation à Ottawa-Les anomalies dans les statistiques

L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Nous parlons de bien des choses dont nous ne sommes pas beaucoup au courant. Cependant, une chose que nous savons, c'est que les agriculteurs de l'ouest du Canada comptent parmi les agriculteurs les plus productifs, les plus efficaces et les plus innovateurs au monde. Ils cultivent des produits de la plus haute qualité. Pourtant, sans qu'ils y soient pour quelque chose, ils font faillite. Cela, nous le savons. Ils sont acculés à la faillite et certains se suicident. Nous savons également que l'aide fédérale à l'agriculture a été réduite de 60 p. 100 depuis 1993. Voilà le même gouvernement libéral qui a dit dans son livre rouge qu'il accroîtrait la viabilité de l'agriculture au Canada.

Les sénateurs Sparrow, Gustafson, Spivak et Andreychuk parlent de ce problème depuis l'automne 1998. Nous en avons parlé aussi en février, tout comme nous l'avons fait en mars, en avril et en juin. Les premiers ministres de ces deux provinces sont ensuite venus rendre visite au gouvernement. Quel mois sommes-nous? Nous sommes en novembre. Ils sont arrivés ici juste avant l'Halloween, ce qui est dommage. Ils ont reçu des chiffres du premier ministre et du ministre de l'Agriculture. Lorsqu'ils ont demandé d'où venaient ces chiffres, on leur a dit qu'ils ne pouvaient pas le dire.

Je suis un gars simple des Prairies. Peut-être le ministre peut-il me dire comment son gouvernement peut expliquer de façon raisonnable aux sénateurs qu'il a statué sur un problème dont il connaît l'existence depuis deux ans en communiquant à deux premiers ministres de l'ouest du Canada des chiffres accompagnés de la remarque «Nous ne sommes pas sûrs, mais nous allons les rendre publics.» Je ne crois pas que cela suffise. À mon avis, le ministre doit nous dire quand ces chiffres seront rendus publics et comment cette situation a pu se produire. D'où venaient ces chiffres? Des excuses devraient être présentées aux deux premiers ministres.

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, il y a manifestement une divergence de vues en ce qui concerne les chiffres auxquels se sont fiés les deux premiers ministres provinciaux et le premier ministre. Je ne crois pas que ce problème ait été résolu jusqu'à maintenant. Tous les efforts voulus seront consentis en vue de rapprocher ces chiffres et de rendre publique la façon qu'un accord a été conclu.

La crise dans le secteur de l'agriculture en Saskatchewan et au Manitoba a fait l'objet de beaucoup d'attention de la part du premier ministre et du ministre de l'Agriculture, qui sont très préoccupés par la situation et qui continuent de chercher une solution. C'est un très vaste problème, comme le sait l'honorable sénateur.

Le sénateur Tkachuk: Honorables sénateurs, les premiers ministres ont déclaré que tous leurs chiffres correspondent aux données de Statistique Canada et du ministère fédéral de l'Agriculture ainsi qu'aux données que le gouvernement fédéral a communiquées au grand public. Lorsque l'on a demandé au gouvernement fédéral d'expliquer les chiffres aux premiers ministres, il n'a pas été en mesure de le faire. Il ne suffit pas de dire qu'il y a eu une divergence de vues. Ça n'a pas été le cas. Les premiers ministres provinciaux ont exposé un problème. Ils ont utilisé les statistiques et les chiffres que leur a fournis le gouvernement du Canada. Le gouvernement du Canada a ensuite dit: «Nous avons d'autres chiffres, mais nous ne vous dirons pas d'où ils viennent.»

(1540)

Roy Romanow était très fâché, tout comme moi. Je ne partage pas ses idées politiques, mais, Dieu soit loué, il a fini par être en colère contre M. Chrétien, ce qui ne lui était pas arrivé depuis 1981. C'était un grand pas pour lui.

Je pense que le gouvernement du Canada devrait présenter des excuses aux deux premiers ministres et se dépêcher de nous dire quand il déposera ces chiffres et leur source à la Chambre des communes et au Sénat.

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, je transmettrai le point de vue du sénateur au ministre de l'Agriculture et au premier ministre. Plus précisément, je crois que le ministre de l'Agriculture fournira une explication. D'après les discussions que j'ai eues avec lui, je m'attends à ce qu'il le fasse directement.

La crise agricole au Manitoba et en Saskatchewan-Les répercussions économiques de la chute du revenu agricole

L'honorable Leonard J. Gustafson: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement à la Chambre. Les prévisions du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire pour 1999 chiffraient le revenu agricole net en Saskatchewan à moins 48 millions de dollars, soit le niveau le plus faible qu'il ait atteint depuis 1933, et cela inclut les paiements provenant de l'assurance-récolte, du Compte de stabilisation du revenu net et du Programme d'aide en cas de catastrophe liée au revenu agricole. Les prévisions pour le Manitoba se chiffraient à moins 100 millions de dollars, le niveau le plus faible jamais atteint au cours du siècle, encore plus faible que dans les années 30.

La déception des agriculteurs et des deux premiers ministres provinciaux est énorme. Je suis un agriculteur et je vis parmi eux. J'ai entendu les slogans «Séparation de l'Ouest» et «Unissons-nous aux États-Unis; ils s'occupent de leurs agriculteurs». Nous ne pouvons pas nous en sortir. Il faut faire quelque chose.

La situation aura de graves répercussions nationales pour l'ensemble du Canada. Nous formons une industrie très productive. Il n'y a pas de producteurs plus efficaces au monde que les producteurs de grain de l'ouest du Canada.

Le leader du gouvernement au Sénat, les membres du Cabinet et le premier ministre ne se rendent-ils pas compte que cela aura de graves répercussions nationales, non seulement en termes de tentations de séparation ou d'union aux États-Unis, mais en termes économiques pour le Canada? Les denrées agricoles produites par nos agriculteurs contribuent pour une bonne part à notre balance commerciale.

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je puis assurer l'honorable sénateur que le premier ministre comprend l'importance du secteur agricole pour l'ensemble de l'économie canadienne. À peine deux semaines avant mon entrée en fonction dans cette enceinte respectée, j'ai eu l'occasion d'aller avec la Banque du Canada en Saskatchewan pour y rencontrer des agriculteurs et entendre leurs doléances. J'y ai aussi fait une visite dans une exploitation agricole et j'admire sincèrement les activités, l'efficacité et la productivité des agriculteurs des Prairies.

Au cours de cette visite, je me suis rendu compte toutefois de l'ampleur du problème. Ce problème nécessite plus qu'une aide gouvernementale à court terme. Il faut que les agriculteurs soient sur un pied d'égalité avec leurs concurrents partout dans le monde et nous devons nous efforcer pour qu'ils aient des chances égales. Ils ont prouvé dans le passé, et ils le feront dans l'avenir, que s'ils ont des chances égales, ils peuvent fort bien réussir.

Je signale très clairement à l'honorable sénateur que le premier ministre, le ministre de l'Agriculture et moi-même sommes conscients de l'importance du secteur agricole de l'Ouest pour le pays tout entier.

La crise agricole au Manitoba et en Saskatchewan-La possibilité d'un programme de crédit agricole

L'honorable Leonard J. Gustafson: Honorables sénateurs, le leader du gouvernement au Sénat envisagerait-il la présentation au Cabinet d'une disposition visant à alléger la dette à la Société du crédit agricole? Le gouvernement pourrait le faire, puisque les agriculteurs acquitteront leurs factures s'ils ont l'argent.

Comme on le sait, on invite les agriculteurs à ne pas acquitter leurs impôts. Neuf municipalités ont décidé au moyen d'un vote de ne pas payer leurs impôts. J'ai parlé au préfet de la municipalité de Wellington. Selon lui, ce n'est pas que les agriculteurs refusent d'acquitter leurs impôts, mais bien qu'ils sont incapables de le faire. Ils ne peuvent verser de l'argent qu'ils n'ont pas.

Le leader du gouvernement au Sénat accepterait-il de transmettre au Cabinet et au premier ministre la suggestion qu'ils ont prise au sérieux pour régler d'une façon ou d'une autre le problème de la dette à la Société de crédit agricole?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, sans violer la confidentialité du Cabinet, je peux affirmer que cette question figure actuellement au programme du Cabinet. Cela ne surprend guère l'honorable sénateur, qui est d'ailleurs fort respecté notamment au sein de la communauté agricole. Je n'aurai aucune difficulté à transmettre ses doléances à mes collègues au sein du Cabinet.


Bibliothèque du Parlement
Langues officielles
Examen de la réglementation

Les comités mixtes permanents-Message des Communes

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes le message suivant:

Il est ordonné - Que les comités mixtes permanents de la Chambre soient composés des députés dont les noms figurent ci-après:

Bibliothèque du Parlement

Membres: Assad, Bailey, Catterall, Cloutier, Finlay, Grey (Edmonton-Nord), Harb, Karygiannis, Lavigne, Lill, Limoges, Mayfield, Mercier, Plamondon, Price, Redman-(16)

Membres associés: Davies, Dumas, Tremblay (Rimouski-Mitis)

Langues officielles

Membres: Bélanger, Bellemare, Chamberlain, de Savoye, Folco, Godin (Acadie-Bathurst), Hill (Macleod), Kilger, Lavigne, Mark, McTeague, McWhinney, Meredith, Muise, Plamondon, Serré-(16)

Membres associés: Dumas, Mercier, Nystrom, Tremblay (Rimouski-Mitis), Turp

Examen de la réglementation

Membres: Assad, Bonwick, Bryden, Casey, Comuzzi, DeVillers, Epp, Grewal, Lebel, Murray, Nystrom, Pankiw, Pillitteri, Saada, Venne, Wappel, White (North Vancouver)-(17)

Membres associés: Bellehumeur, Dockrill, Guimond, Tremblay (Rimouski-Mitis)

Qu'un message soit transmis au Sénat afin d'informer les honorables sénateurs des noms des députés qui représenteront la Chambre aux comités mixtes permanents.

ATTESTÉ:

Le greffier de la Chambre des communes,
ROBERT MARLEAU


Les travaux du Sénat

La déclaration du Président sur l'octroi d'une permission au cours des affaires courantes et sur l'événement du 14 octobre 1999

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, êtes-vous d'accord pour que je fasse maintenant la déclaration que le sénateur Lynch-Staunton m'a demandé de faire au sujet des affaires courantes lors de la dernière séance?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Le 14 octobre, pendant les affaires courantes, le sénateur Hays a demandé la permission de présenter, à l'étape des avis de motions du gouvernement, une motion en vue de prolonger l'ajournement du Sénat. La permission lui a été accordée, mais dès que la question a été mise en discussion, il y a eu une certaine confusion quant à la procédure à suivre. D'après un sénateur, la motion était encore à l'étape du préavis, alors que d'autres ont prétendu qu'elle ne pouvait faire l'objet d'un débat et que le débat n'était pas permis durant les affaires courantes. À la fin, la motion prolongeant l'ajournement de deux semaines a été adoptée et le Sénat est passé à autre chose. Néanmoins, lorsque l'ordre du jour a été appelé, le sénateur Lynch-Staunton a demandé au Président de clarifier la question afin d'éviter toute confusion à l'avenir.

[Français]

Je remercie beaucoup le sénateur Lynch-Staunton d'avoir soulevé la question, je crois que c'est important. Suite à cette demande, j'ai bien réfléchi à la question et je suis maintenant prêt à me prononcer sur mon interprétation de l'application des règles et usages du Sénat.

Pour rédiger la présente déclaration, je me suis efforcé d'examiner le plus de cas possible, mais je ne suis pas sûr d'avoir couvert toutes les éventualités. En outre, cet examen aura permis de relever certaines lacunes et incohérences dans le Règlement, sur lesquelles le Comité permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure devrait se pencher.

[Traduction]

La formule actuelle des affaires courantes fait partie de la procédure du Sénat depuis 1991. Cette année-là, le Règlement du Sénat a été modifié pour fixer l'ordre dans lequel les questions des affaires courantes seraient appelées à la suite des déclarations de sénateurs. Cet ordre est établi au paragraphe 23(6). L'article dispose par ailleurs que les questions de privilège et les rappels au Règlement sont irrecevables à l'étape des affaires courantes et que tout vote par appel nominal demandé est reporté à 17 h 30, sauf en cas de motion sans débat faite sans préavis.

D'autres dispositions de l'article prévoient l'heure à laquelle se tiendra la période des questions et l'heure à laquelle l'ordre du jour sera appelé si le temps prévu pour les affaires courantes est prolongé.

[Français]

La période des affaires courantes comprend la présentation de rapports de comités permanents ou spéciaux, les avis de motions du gouvernement, ainsi que les avis de motions présentés par d'autres sénateurs. Habituellement, les présidents font simplement présenter leur rapport et les sénateurs donnent avis de la motion. Mais à l'occasion, la permission est demandée de procéder sur-le-champ, ou plus tard au cours de la journée, à la discussion du rapport d'un comité.

De même, à l'étape des avis de motions, le président d'un comité demandera la permission de présenter une motion pour permettre à son comité de se réunir à un moment où le Sénat pourrait être en séance. Ces dernières années, tous les mardis que le Sénat siège, le leader adjoint du gouvernement demande presque invariablement la permission de présenter une motion pour que le Sénat se réunisse à 13 h 30 le mercredi plutôt qu'à 14 heures.

[Traduction]

(1550)

Chaque fois qu'il est demandé de déroger à la procédure des affaires courantes, il s'agit d'un avis en application des articles 57 ou 58. La permission est accordée si aucun sénateur présent dans la salle ne s'y oppose. Si un seul s'y oppose, la question ne peut être discutée avant la fin du délai applicable. En outre, si la permission est accordée, l'adoption du rapport ou de la motion est proposée sur-le-champ, sauf si la demande propose d'en reporter l'examen à plus tard au cours de la journée.

[Français]

Lorsque la question relative au rapport ou à la motion est mise aux voix, elle est sujette à débat. Le fait que ces questions nécessitent un préavis indique clairement qu'elles sont sujettes à débat. Aucun rapport de comité ou motion de fond qui est mis aux voix n'est soustrait à la possibilité d'un débat. Le fait que les motions présentées avec la permission du Sénat à l'étape des affaires courantes ne sont rarement ou jamais débattues ne signifie pas qu'elles ne puissent pas l'être. Seules les motions présentées sans préavis ne peuvent être débattues.

[Traduction]

Une fois le débat en cours, toutes les règles régissant les débats sont applicables, y compris la possibilité d'un rappel au Règlement. Cela tient au fait qu'en acceptant que la question soit mise aux voix, le Sénat s'est de ce fait écarté des affaires courantes pour la durée du débat, jusqu'à ce qu'il soit tranché ou ajourné. À mon sens, la restriction du paragraphe 23(1), excluant les rappels au Règlement ou les questions de privilège à l'étape des affaires courantes, ne s'applique pas au débat, étant donné que le Sénat n'est justement plus à l'étape des affaires courantes.

Si, par ailleurs, une demande de vote par appel nominal est faite à la fin du débat, le paragraphe 23(3) dispose qu'il sera reporté à 17 h 30 ce jour-là, sauf, bien entendu, si la permission est accordée de le tenir à un autre moment.

Une autre disposition de l'article 23 s'applique même si un débat est en cours. Le paragraphe 23(7) prévoit qu'au plus tard 30 minutes après l'appel du premier point des affaires courantes, le Sénat doit passer à la période des questions. Il est donc possible que l'examen des affaires courantes ou un débat en cours sur un point des affaires courantes soit interrompu par la période des questions. De fait, c'est ce qui s'est produit le 6 mai 1993 lorsque le débat en troisième lecture du projet de loi C-114, modifiant la Loi électorale du Canada, a été demandé immédiatement après la présentation du rapport sur le projet de loi, sans amendement, par le comité des affaires juridiques et constitutionnelles. À cette occasion, le projet de loi avait franchi l'étape de la troisième lecture avant la fin du délai de trente minutes pour les affaires courantes précédant la période des questions. La procédure comportait aussi un vote par appel nominal qui, si je comprends bien le paragraphe 23(3), aurait dû être reporté à 17 h 30. Rien n'indique que la permission de tenir le vote sur-le-champ ait été implicite, étant donné qu'il était prévu que la sanction royale aurait lieu au cours de l'après-midi. Le Sénat est ensuite passé à l'examen de l'ordre du jour sans revenir aux affaires courantes.

[Français]

Voilà donc en gros ce qui peut se passer lorsque le Sénat accepte d'accueillir une motion à l'étape des affaires courantes. J'espère que ces précisions vous permettront de mieux comprendre cet aspect de nos procédures. Ce qui s'est passé le jeudi 14 octobre dernier, lorsque le sénateur Hays a demandé la permission de présenter une motion visant à prolonger l'ajournement du Sénat, était donc conforme à nos règles et usages.


[Traduction]

ORDRE DU JOUR

Le discours du Trône

Motion d'adoption de l'Adresse en réponse-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Kroft, appuyé par l'honorable sénateur Furey, tendant à l'adoption d'une Adresse à Son Excellence la Gouverneure générale en réponse au discours qu'Elle a prononcé lors de l'ouverture de la deuxième session de la trente-sixième législature. (1er jour de la reprise du débat)

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, avant toutes choses, je tiens aujourd'hui à remercier mon prédécesseur, ami et compatriote de la Nouvelle-Écosse, le sénateur Graham, de l'excellent leadership qu'il a assuré au Sénat au cours des deux dernières années.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Boudreau: Je lui suis reconnaissant de l'aide et du soutien généreux qu'il m'a accordés ces dernières semaines, depuis ma nomination, pendant lesquelles j'ai eu énormément de choses à apprendre. J'entends abuser sans vergogne de l'aide qu'il a si généreusement proposé de continuer à me donner.

Honorables sénateurs, je saisis également l'occasion de remercier le sénateur Carstairs de l'excellent travail qu'elle a accompli pendant ces deux années au poste de leader adjoint.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Boudreau: J'espère également profiter de ses vastes connaissances et de sa riche expérience, au moment où nous entamons une nouvelle session de la législature.

Le sénateur Hays a été bien franc en me disant qu'il serait fort difficile de satisfaire aux normes exigeantes imposées par le sénateur Carstairs. Tous deux, nous ferons largement appel à ses lumières dans les jours à venir.

Je tiens à féliciter les sénateurs Kroft et Furey des excellents discours qu'ils ont prononcés pour proposer et appuyer l'Adresse en réponse au discours du Trône.

Je m'en voudrais de ne pas ajouter mes félicitations aux nombreuses autres qu'a reçues notre nouvelle Gouverneure générale. Sa nomination prouve que le rêve canadien n'est pas seulement un rêve; il s'est réalisé. Peu importe ses origines, sa fortune familiale ou ses relations, on peut réaliser son rêve lorsqu'on a le talent, la détermination et la persévérance qu'il faut. On peut s'élever jusqu'aux plus hauts postes au pays et contribuer de façon très significative à notre vision collective du Canada.

Quelle est cette vision? Le premier ministre l'a décrite ainsi dans sa réponse au discours du Trône:

Notre vision du Canada du XXIe siècle est claire: une société de l'excellence déterminée à réussir, un pays fort et uni, une économie dynamique, une population apte à créer et à innover, une société caractérisée par la diversité et la cohésion, où la prospérité, plutôt que de profiter seulement à quelques-uns, est partagée par le plus grand nombre. C'est un Canada où chaque enfant est assuré d'un bon départ dans la vie, où les jeunes ont la possibilité de s'épanouir et de réaliser leur potentiel dans le domaine de leur choix, où les citoyens ont accès aux connaissances et aux compétences dont ils ont besoin pour exceller. C'est un Canada où les citoyens, quel que soit leur revenu, reçoivent des soins de santé de qualité, où les familles vivent en sécurité dans un milieu sain, où nous travaillons de concert avec d'autres pays à promouvoir la paix, la diversité culturelle et les bienfaits de la nouvelle économie mondialisée... C'est un Canada qui est un leader et un modèle dont le monde entier puisse s'inspirer.

Les sceptiques diront peut-être que ce sont là de belles paroles et ils s'interrogeront peut-être sur leur signification véritable. Heureusement, ces paroles ont une très importante signification. Le gouvernement réalise cette vision grâce à la stratégie qui est énoncée dans le discours du Trône et aux termes de laquelle il s'engage à travailler en collaboration avec les provinces et les territoires pour mettre au point le Programme national d'action pour les enfants. Il réalise cette vision en établissant un plan d'action national en matière de compétences et d'apprentissage pour le XXIe siècle. Il la réalise par le biais d'initiatives visant à accroître l'accès des entreprises canadiennes aux marchés mondiaux. Il la réalise grâce à des programmes qui visent à améliorer l'infrastructure du savoir du Canada, notamment par la création des instituts canadiens de recherche en santé, et en soutenant davantage la recherche de pointe. Il la réalise en adoptant des mesures qui rendront notre infrastructure de l'information incomparable. Il réalise cette vision en prenant des initiatives pour améliorer notre environnement.

Honorables sénateurs, cette vision du Canada est enthousiasmante et elle peut devenir réalité.

(1600)

Notre pays a franchi un tournant. Nous avons mis de l'ordre dans nos finances, notre budget est équilibré et il le restera. Comme la Gouverneure générale nous l'a dit dans le discours du Trône:

Le gouvernement est résolu à poursuivre une politique de gestion financière prudente. Plus jamais il ne permettra que l'on perde le contrôle des finances de l'État. Il fera en sorte que la dette diminue constamment par rapport au produit intérieur brut. Il respectera l'engagement pris au début de cette législature de consacrer la moitié de l'excédent budgétaire au remboursement de la dette et à l'allégement des impôts, et l'autre moitié aux investissements destinés à répondre aux besoins sociaux et économiques des Canadiens.

Honorables sénateurs, il y a toutefois d'autres réalités dans notre pays qui exigent notre attention.

Le sénateur Kroft a parlé éloquemment des points de vue différents des Canadiens qui vivent à l'extérieur des grands centres des médias et des affaires de l'Ontario et du Québec. Je viens d'une petite province qui a connu plus que sa part de difficultés économiques. Je viens d'une région qui, pendant de nombreuses années, a souffert de son éloignement du siège du pouvoir économique et politique du pays. Le Canada est certes florissant, et promet de l'être encore davantage dans l'avenir, mais, honorables sénateurs, cette prospérité ne profite pas à tous les Canadiens. Certaines régions se sentent loin derrière.

Le Cap-Breton, à titre d'exemple, doit transformer complètement son économie. Compte tenu de ce que recelait son sous-sol, le Cap-Breton a vu son économie reposer pendant des générations sur l'extraction de minerais qui ne sont plus exploitables de façon rentable à grande échelle, du moins pas comme ils l'ont été dans le passé, et sur l'industrie de l'acier qui semble maintenant avoir perdu sa raison d'être économique. En raison de cet accident géographique, le Cap-Breton ne s'est jamais doté d'une masse critique d'industries de fabrication ni d'industries de services sophistiquées pour échapper à la dépendance de ces industries traditionnelles fondées sur les ressources minérales.

La plupart des régions ont eu plusieurs décennies pour s'adapter aux nouvelles réalités économiques, mais le temps est un luxe que n'a pas le Cap-Breton. Il doit se transformer radicalement. Il doit faire un grand bond en avant dans son développement économique. Il doit se propulser, presque du jour au lendemain, dans le nouvel âge post-industriel.

Je crois que le discours du Trône contient un message d'espoir pour le Cap-Breton et pour les autres régions semblables de notre grand pays. Je crois que la direction prise par le gouvernement est très claire: ces régions ne sont pas et ne peuvent pas devenir «orphelines», elles font partie de la famille canadienne, au même titre que Québec, Toronto ou Vancouver.

Dans son discours, le sénateur Furey a parlé des rajustements qui sont en train de s'opérer dans sa province, Terre-Neuve et le Labrador. Il a dit:

Aujourd'hui, Terre-Neuve et le Labrador se retrouvent dans la tourmente des grands changements technologiques et économiques qui balayent le monde. Les gens de cette région ne se laissent toutefois pas emporter; ils font appel à leurs compétences et à leurs acquis de longue date pour faire face aux réalités du changement rapide. Grâce à leur créativité, leur ressort, leur solidarité, leur détermination et leur acharnement au travail, ils réalisent leurs rêves et poussent vers l'avant leur province et leur pays.

Il y a de nouvelles possibilités pour tous aujourd'hui. L'ère de l'information promet d'être l'ère par excellence de l'égalité des chances. Les ordinateurs et l'Internet peuvent égaliser les chances entre la ville et la campagne, entre le centre du Canada et les provinces atlantiques, entre les riches et les pauvres. Récemment, j'ai entendu parler d'une personne qui vit à Mount Pearl, à Terre-Neuve, et qui télétravaille pour une entreprise d'animation de Los Angeles. L'endroit où vit ce travailleur importe peu pour son employeur. Tout ce qui compte, c'est son talent et son branchement Internet.

La population de ma province, la Nouvelle-Écosse, le sait parfaitement bien. Dans tous les coins de la province, il y a des douzaines d'entreprises en technologie de l'information qui sont prêtes à se lancer sur l'autoroute de l'information. Les Néo-Écossais sont déjà sur cette autoroute et certains foncent à toute vitesse vers le succès.

Le premier ministre du Canada a fixé l'objectif: faire du Canada un leader mondial dans l'utilisation intelligente de l'électronique pour faire des affaires et encourager l'expansion rapide du commerce électronique au Canada.

Honorables sénateurs, les habitants de la Nouvelle-Écosse sont les premiers au Canada pour ce qui est de l'achat et de la vente de produits par Internet. Nous avons rapidement compris les possibilités de l'Internet et nous en profitons. Je vais vous donner un exemple.

En 1995, quand le marché immobilier battait de l'aile, la direction de deux tours à bureaux jumelles dans le centre-ville d'Halifax a connu de sérieux problèmes. Ces édifices, qui représentaient le sixième des locaux à bureaux du centre-ville d'Halifax, étaient gravement sous-utilisés. La direction a alors décidé de prendre de grands risques. Elle a installé les câbles nécessaires à un accès rapide et de pointe à Internet. Ainsi, en novembre 1998, les édifices de Purdy's Wharf ont marqué l'histoire en devenant le premier complexe au Canada fournisseur de services Internet.

C'est une vision, une initiative et un investissement qui ont rapporté. En effet, Purdy's Wharf qui comptait huit entreprises de technologie de l'information occupant 35 000 pieds carrés en 1995 accueille maintenant 40 entreprises semblables, qui occupent une superficie de 120 000 pieds carrés. Parmi ses locataires, on trouve AT&T Canada, Clear Picture Corporation, Fonorola, Fundy Communications, IBM Canada, iStar Internet, Knowledge Navigators International, Nova Knowledge, Sprint Canada et Xerox Canada, pour n'en nommer que quelques-uns. Relié par un réseau de fibres optiques, un puissant circuit de données est mis à la disposition de tous les locataires, leur assurant 24 heures par jour un accès à Internet à peu près 100 fois plus rapide que les modems conventionnels. On a aussi installé l'intranet pour permettre le réseautage entre les locataires. Autrement dit, le propriétaire a transformé un marché immobilier moribond en occasion d'affaires, occasion qui a créé un centre de technologie au coeur de la ville d'Halifax.

Les initiatives de ce genre, tant publiques que privées, donnent de bons résultats. À Halifax, le taux de chômage pour le mois de septembre était de 6,2 p. 100, soit le taux le plus bas depuis la Seconde Guerre mondiale. Ce taux est le même que celui de Toronto et il est inférieur à la moyenne nationale de 7,5 p. 100 pour septembre.

Honorables sénateurs, nous avons le talent nécessaire, et le gouvernement s'efforce de faire en sorte que tous les Canadiens, peu importe où ils vivent au pays, disposent des outils dont ils ont besoin pour réaliser leur potentiel. Le premier ministre a été très clair dans son discours en réponse au discours du Trône lorsqu'il a dit:

Brancher les Canadiens - entre eux, avec les écoles et les bibliothèques, avec la culture, avec l'administration publique, avec le commerce et avec le monde - est l'un des principaux moyens de hisser le Canada au rang de grande économie mondiale et de continuer à en faire un pays aux possibilités sans limites. Nous devons viser à devenir le pays le plus branché au monde.

Encore une fois, le gouvernement a fixé des buts très concrets pour atteindre cet objectif:

D'ici le 31 mars 2001, 6 000 nouveaux sites d'accès communautaires seront créés dans les zones urbaines et rurales du Canada. Grâce à ces sites, l'accès au réseau Internet deviendra abordable pour tous les Canadiens, où qu'ils habitent. Et pour les aider à maîtriser l'usage des nouvelles technologies de l'information, nous recruterons jusqu'à 10 000 jeunes Canadiens qui donneront de la formation aux citoyens de tous les âges.

(1610)

Honorables sénateurs, les compétences et la formation sont essentielles si l'on veut pouvoir profiter de ces nouvelles possibilités. Le gouvernement a annoncé qu'il formera des partenariats avec les autres gouvernements, les organismes publics et privés ainsi qu'avec les Canadiens et les Canadiennes, afin d'établir un plan d'action national en matière de compétences et d'apprentissage pour le XXIe siècle. Ce plan mettra l'accent sur l'apprentissage continu, s'attaquera au problème de la faible alphabétisation chez les adultes et fournira aux citoyens l'information dont ils ont besoin pour prendre des décisions éclairées en vue de parfaire leurs compétences.

Le gouvernement est en train d'utiliser à profit le pouvoir et les possibilités qu'offre cette nouvelle ère de l'information, de façon à étendre à tous les Canadiens qui vivent dans notre grand pays diversifié les possibilités offertes par les nouvelles industries postindustrielles. Permettez-moi de vous citer un autre extrait du discours du trône:

Notre économie à base de savoir représente plus que des sociétés de haute technologie. C'est une économie au sein de laquelle tous les secteurs s'efforcent d'utiliser des technologies et des procédés de pointe. C'est une économie où les vieux obstacles sur les plans de l'accès ou de la distance importent moins qu'auparavant, où les technologies permettent aux collectivités urbaines et rurales de l'Atlantique en passant par celles de l'ouest et du nord du pays d'être compétitives à l'échelle internationale et où la technologie ouvre de nouvelles portes à tous les Canadiens. C'est une économie au sein de laquelle le Canada rural bénéficie de l'activité à valeur ajoutée, d'une gestion des terres judicieuse sur le plan de l'environnement ainsi que de nouvelles compétences professionnelles et de nouveaux débouchés. C'est une économie qui comprend déjà des grappes de développement technologique dans de petites collectivités partout au Canada. En réalité, c'est une économie au sein de laquelle la technologie peut aboutir à une plus grande stabilité économique dans les régions principalement rurales dans lesquelles les industries d'exploitation des ressources cycliques - agriculture, pêches, forêts, mines et tourisme - constituent les principales sources de richesse. Le gouvernement favorisera le développement et l'adoption de nouvelles technologies dans tous les secteurs.

Revenons-en à ma propre province. Comment la Nouvelle-Écosse en profitera-t-elle? Je vous dis de nouveau qu'elle en tirera des avantages très concrets, honorables sénateurs. Le secteur de l'énergie est fort prometteur pour le Canada atlantique. J'ai personnellement très bon espoir qu'il offrira à la région de nouveaux secteurs stimulants de recherche et de développement qui, à leur tour, pourraient se traduire par des possibilités et des applications fascinantes à l'extérieur du Canada atlantique. Le nouveau Centre d'excellence en matière de développement et d'éducation dans le secteur du pétrole, établi au Collège universitaire du Cap-Breton, pourrait servir de tremplin à ces activités de recherche et de développement. J'ai récemment eu l'occasion d'annoncer l'établissement de l'Institut du pétrole du Canada atlantique à l'Université Dalhousie à Halifax. Ces établissements travaillent déjà ensemble et concoctent effectivement des alliances avec de grands établissements de l'industrie du pétrole ailleurs dans le monde. Les défis que posent sur les plans techniques et environnementaux les projets liés aux réserves pétrolières marines se reflètent dans les occasions qu'ils présentent. C'est une période très exaltante.

L'univers a beaucoup changé depuis 20 ans. De nos jours, les exploitations agricoles ressemblent souvent à des usines complexes caractérisées par une croissance manipulée et des récoltes non saisonnières à grande échelle. Les industries traditionnelles d'exploitation des ressources, comme celles des forêts et des mines, subissent l'influence de la recherche en biotechnologie. Il et fréquent d'être assis derrière un bureau permettant d'observer le rivage dans le comté de Lunenburg, puis de cliquer sur le bouton d'une souris et d'échanger des renseignements et des idées avec des gens situés de l'autre côté de la planète.

Honorables sénateurs, il ne suffit pas de montrer à nos jeunes à se servir d'un ordinateur ou à programmer un logiciel. Nous devons ouvrir leurs yeux et leurs esprits au potentiel du monde qui nous entoure. Le gouvernement reconnaît ce fait. Dans le discours du Trône, le gouvernement annonce qu'il permettra aux jeunes Canadiens d'utiliser leur énergie et leurs talents outre-mer en participant à des programmes internationaux de stages et en aidant les pays en voie de développement à se brancher sur Internet.

Ces expériences peuvent être d'une grande valeur, comme la formation concrète et directe qu'elles offrent; les connaissances acquises dans d'autres pays et auprès d'autres peuples; la prise de conscience que le monde est grand mais que la distance ne doit pas nous empêcher de travailler ensemble. Ce sont là des leçons importantes qui rendront nos jeunes, les dirigeants de demain, aptes à faire pénétrer nos collectivités et notre pays dans le XXIe siècle. Ce sont là des initiatives qui peuvent aider tant les petites collectivités que les grands centres urbains.

J'ai beaucoup confiance dans les Canadiens, et ils ont de plus en plus confiance en eux-mêmes. Qu'ils vivent au milieu de nos grands centres urbains ou dans un petit village isolé de l'Atlantique ou encore en pleine forêt de la Colombie-Britannique, le message du discours du Trône est que la distance n'a jamais été aussi peu importante dans notre histoire. Le gouvernement fera en sorte que les Canadiens, où qu'ils vivent, aient accès aux outils dont ils ont besoin pour réussir dans ce nouvel âge post-industriel.

Cela sera-t-il facile? Ce n'est jamais facile. Bâtir ce pays n'a, certes, pas été facile. Nos ancêtres ont fondé ce pays en dépit d'un climat très rigoureux, des vastes distances à parcourir, et de profondes différences linguistiques, culturelles et religieuses. Quelles étaient les chances de succès? Ils n'acceptaient pas d'être vaincus par ces difficultés. Nous devons à ces pionniers qui ont imaginé ce pays et l'ont réalisé de faire un rêve pour le siècle qui vient. Les nouveaux pionniers sont bien portants et vivent dans la région de l'Atlantique ou partout ailleurs au Canada. Ces nouveaux pionniers, qui forment le rêve du XXIe siècle, ne toléreront pas les prophètes de malheurs.

Honorables sénateurs, notre Gouverneure générale a prononcé un discours inspiré à cette Chambre quand elle a assumé sa nouvelle fonction. Elle a dit ceci:

Nous ne devons pas nous voir comme un peuple qui réagit aux tendances, mais comme un peuple qui les lance. Nous ne devons pas nous voir comme un peuple qui réagit, mais comme un peuple qui agit.

Le gouvernement a déclaré son intention de voir ce pays fier et prospère conduire le monde dans le prochain millénaire et au-delà. Nous devrions tous être honorés d'être en mesure, en tant que parlementaires, de faire en sorte que cela se réalise.

Des voix: Bravo!

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, je tiens à féliciter la Gouverneure générale récemment nommée et à lui souhaiter tout le succès voulu dans ses nouvelles fonctions de représentant du chef de l'État canadien. Mme Clarkson succède à l'un de nos anciens collègues qui a apporté une touche personnelle à une charge ingrate et souvent peu appréciée à sa juste valeur. Puissent M. Roméo LeBlanc et sa gracieuse épouse, Diana, couler une longue retraite heureuse sur les rives du détroit de Northumberland.

La politique peut être aussi cruelle que grisante, et pas seulement après des élections. Les rapports entre les différents acteurs, souvent dénaturés par les ambitions personnelles, nous mettent souvent rudement à l'épreuve. Le succès d'un parti politique, et assurément de son chef, quels que soient les déconvenues ou les problèmes personnels, est inexorablement tributaire de la loyauté des partisans.

Honorables sénateurs, ces observations me viennent à l'esprit à la suite du retrait soudain du sénateur Graham de ses fonctions de leader du gouvernement au Sénat. Pendant son mandat, l'engagement du sénateur à l'égard de notre institution et de la Nouvelle-Écosse n'a jamais fait défaut chaque fois qu'il s'est agi pour lui de défendre les objectifs du gouvernement et de son parti. Ses qualités d'homme d'honneur et de principes n'ont jamais autant été mises à l'épreuve que le mois dernier, et sa conduite exemplaire depuis en apporte une nouvelle fois la preuve. Qu'il me soit permis d'emprunter la pensée de Edmund Burke pour exprimer ma réaction au limogeage si cavalier du sénateur Graham. La magnanimité en politique est souvent l'unique voie de la sagesse et la grandeur d'un parti politique est desservie par les esprits mesquins.

(1620)

Cela dit, au nom des membres de notre caucus et de moi-même, je souhaite bonne chance au sénateur Boudreau au poste de leader du gouvernement. Toutefois, son admission qu'il est ici principalement pour redorer le blason de son parti en Nouvelle-Écosse, ce qu'il a fait de façon extraordinaire dans le discours qu'il a prononcé il y a quelques instants, est troublante car elle soulève des questions sur le passage dans cette Chambre non élue en attendant une charge publique élective. Le sénateur Boudreau a dit sans ambages qu'il avait l'intention d'être candidat à la Chambre des communes aux prochaines élections. C'est à mon avis comme si un joueur de la Ligue nationale de hockey désirait ardemment se faire renvoyer dans une ligue mineure. J'espère que le sénateur Boudreau apprendra vite à apprécier l'importance et les réalisations du Sénat et qu'il se rendra compte que c'est dans cette Chambre que les projets de loi sont le mieux étudiés, où l'esprit de parti n'est jamais trop prononcé et où les partisans du gouvernement, les ministres et les sénateurs de second plan sont tous traités comme des individus et non comme des automates, et qu'ils se comportent en conséquence, libres des contraintes imposées à nos collègues dans l'autre endroit.

Les sénateurs Kroft et Furey, qui ont proposé et appuyé la motion relative à l'Adresse en réponse au discours du Trône, se sont acquittés avec grande distinction et éloquence de leur rôle. Il ne faudra toutefois pas chercher dans leurs propos autre chose qu'une vague référence au discours qui a tellement pesé à Son Excellence et qui présentait un contraste frappant avec celui qu'elle a prononcé après son assermentation. Le sénateur Kroft en a fait peu de cas, ne lui consacrant que quelques courts paragraphes, et nous a donné une indication de son engagement profond envers son pays et le gouvernement, ce qu'a fait le sénateur Furey.

En fait, ils n'avaient pas le choix devant un discours dont on attendait tant et qui est immédiatement devenu un non-événement. Ce qui aurait dû être une vision pour le siècle à venir s'est transformé en une litanie de platitudes. Le sentiment d'anticipation reposait sur l'attente généralisée de propositions concrètes pour résoudre les graves problèmes que nous vivons actuellement. Or, à la grande surprise de tous, le discours du Trône a passé sous silence l'agriculture de l'Ouest, qui traverse la pire crise depuis les années 30, les pêches, qui sont en proie à de sérieuses difficultés, l'immigration illégale, qui trahit les failles de la législation canadienne, les difficultés des compagnies aériennes que, même aujourd'hui, le gouvernement préfère que quelque chose appelé les «forces du marché» règle, et la réduction des impôts qui, si on déchiffre les quelques mots qui y sont consacrés, sera abordée juste avant les prochaines élections. La pauvreté et le sort des sans-abri n'ont guère été mentionnés. Toutefois, il y a deux sujets qui ont été abordés dans le discours du Trône et dont j'aimerais parler.

Le premier concerne la déclaration selon laquelle le gouvernement ne permettra plus jamais que l'on perde le contrôle des finances de l'État. Il est rassurant de voir que ceux-là même qui étaient là à l'époque et qui ont délibérément laissé les finances de la nation aller à la dérive ont fini par comprendre, même si ça n'a pas été facile. Je pense en particulier au premier ministre qui, en tant que président du Conseil du Trésor et ministre des Finances dans les années 70, a beaucoup contribué à l'accroissement du déficit budgétaire, qui a sextuplé, et de la dette publique nette, qui a doublé. Ce que le gouvernement ne reconnaît pas, mais dont tout le monde se rend de plus en plus compte, c'est que les bons résultats obtenus aux plans budgétaire et monétaire sont dus au fait que l'on a continué d'appliquer les politiques adoptées par les gouvernements Mulroney, auxquelles les libéraux étaient opposés à l'époque, à savoir la réduction des dépenses de programmes conformément aux besoins nationaux réels, la création d'un excédent de fonctionnement, la réduction des taux d'intérêt et une réduction du taux d'inflation. Ces résultats, qui n'auraient jamais pu être atteints sous les anciens libéraux, et le libre-échange - auxquels s'opposaient vivement ces mêmes députés dépensiers - sont maintenant à la base des politiques actuelles du gouvernement, un gouvernement qui tait effrontément les efforts extraordinaires accomplis par les gouvernements Mulroney, qui est embarrassé par la vive opposition qu'il a manifestée contre ces mesures lorsqu'elles ont été introduites, notamment la taxe sur les produits et services. En septembre 1990, le chef du Parti libéral avait dit que:

... la position du parti est claire. Nous nous opposons à la TPS et ne voulons pas de sa mise en oeuvre.

Récemment, le premier ministre a fait l'éloge de cette taxe et écarté toute tentative de l'éliminer, et ce même sur le matériel de lecture, ainsi qu'en a témoigné un vote tenu ici en septembre.

[Français]

Le deuxième point qui attire mon attention dans le discours est plus inquiétant car il porte sur l'avenir de notre pays.

Le gouvernement du Canada réaffirme donc l'engagement qu'il a pris envers les Québécois et tous les autres Canadiens, à savoir que le principe de clarté énoncé par la Cour suprême du Canada sera respecté.

Ajouté à certains commentaires moins nuancés de certains porte-parole du gouvernement, ceci laisse entendre qu'en cas d'un référendum, le gouvernement libéral a l'intention d'interpréter à sa façon l'opinion de la Cour suprême sur la question d'un vote favorable à la souveraineté!

Je dis opinion car ce n'est pas une décision, mais bien une opinion que la Cour suprême a rendue. Rien dans cette opinion ne lie qui que ce soit. Quant à moi, la cour est allée trop loin en dépassant les trois questions qu'elle était appelée à trancher et, ce faisant, elle participe à un débat politique qui n'est pas de son ressort. Pourquoi? Parce qu'en suggérant le processus à suivre avant et après un référendum favorable à une sécession, la Cour suprême a en effet légitimisé le désir d'une province de se détacher de la fédération canadienne: question claire, majorité forte, négociations à suivre, conseille la cour, mais sans donner de précisions. Le gouvernement fédéral interprète cette opinion comme lui donnant droit de s'arroger unilatéralement cet avis: comment, autrement, interpréter son engagement de voir «à ce que le principe de clarté énoncé par la Cour suprême du Canada sera respecté», pour citer le discours du Trône?

Autant je crois que la Cour suprême est allée trop loin dans ses énoncés, autant je suis désolé que le gouvernement fédéral se dise prêt à participer à un référendum, non seulement avant qu'il ne se tienne, mais même avant qu'il ne soit connu! La priorité primordiale de tout gouvernement national est l'unité du pays, et jamais il ne devrait poser un geste qui irait à l'encontre de celle-ci. En interprétant à sa façon une série de conditions vagues et confuses de la Cour suprême, le gouvernement risque en effet de se trouver partenaire dans une aventure qui pourrait coûter cher à tous les Canadiens.

[Traduction]

Je voudrais conclure en parlant d'une vive préoccupation partagée par beaucoup, c'est-à-dire le fait que le Parlement, et surtout la Chambre des communes, est de plus en plus déphasé.

Je n'ai jamais caché mon admiration pour la forme de gouvernement des États-Unis, parce que leur régime repose sur un système de contrepoids qui limite les excès auquel l'un des pouvoirs peut se livrer seul. Le plus souvent, le président et le Congrès sont constamment à la recherche de compromis, car tous les deux sont les principaux artisans de l'élaboration et de l'adoption définitive des lois. Les erreurs de l'exécutif et les camouflages ne passent pas inaperçus bien longtemps, car, au moindre soupçon, le Congrès fait enquête. Il arrive souvent, il est vrai, que le pouvoir législatif exploite exagérément l'avantage qu'il possède pour retarder indéfiniment une nomination présidentielle ou quelque autre initiative de l'exécutif, mais cela n'enlève rien au fait que les deux pouvoirs sont plus ou moins sur un pied d'égalité et peuvent rarement réussir l'un sans l'autre.

Honorables sénateurs, comparez ces relations saines aux relations anémiques que nous observons chez nous. L'exécutif, c'est-à-dire, en droit, le gouverneur en conseil, mais en réalité le cabinet du premier ministre, bouscule les députés, sans épargner ceux de la majorité, qui courbent l'échine devant les ordres du CPM, sans quoi ils risquent la déchéance.

La Chambre ne siégeait que depuis quelques jours lorsque le gouvernement a imposé la clôture pour mettre fin au débat sur le projet de loi C-6. Il a menacé d'en faire autant pour le projet de loi sur l'accord définitif nisga'a. Pourquoi? Simplement parce ces projets de loi, nous dit-on, ont été débattus ailleurs, et qu'une étude plus poussée aux Communes n'ajouterait rien de neuf. Peut-on exprimer plus clairement son mépris pour la démocratie parlementaire?

Malheureusement, le Sénat a été traité à peu près de la même manière lorsqu'il a été rappelé pour débattre le projet de loi C-32, sur l'environnement, et le projet de loi C-78, sur les pensions. Sitôt en poste, le nouveau ministre de l'Environnement a annoncé que le projet de loi C-32 avait été assez longuement débattu et qu'aucun amendement ne serait accepté. Au comité, la majorité a imposé la clôture, puis un rapport unanime a été remis au Sénat disant que le projet de loi était entaché de tellement d'imperfections qu'une révision devrait débuter immédiatement après son adoption. La clôture a été imposée à la troisième lecture, les sénateurs ministériels soutenant que, même si le projet de loi avait de nombreux défauts, il restait supérieur à la loi existante.

(1630)

En adoptant le projet de loi C-32, la majorité au Sénat a en fait consciemment appuyé un projet de loi tout en sachant qu'il aurait dû faire l'objet d'un examen plus approfondi, selon le rôle traditionnel du Sénat. Ce n'est pas là l'une de ses meilleures réalisations.

Le projet de loi sur les pensions a été repoussé du mois de juin au mois de septembre pour donner au Conseil du Trésor et à l'Alliance de la Fonction publique la chance de se rencontrer au cours de l'été pour tenter de corriger certains malentendus, tout particulièrement en ce qui touchait les sommes excédentaires. Le Conseil du Trésor a refusé de rencontrer le syndicat pour discuter de la question, alléguant que ces sommes appartenaient au gouvernement. La nouvelle présidente du Conseil du Trésor s'est montrée aussi inflexible. On n'a donc tenu aucun compte du jugement unanime du Sénat. Au cours du débat de troisième lecture, on nous a fait savoir que si le syndicat voulait faire avancer ses revendications relativement au partage de l'excédent, il devrait intenter une poursuite en justice.

Là encore, le Sénat a abandonné ses responsabilités traditionnelles au chapitre de l'examen attentif afin de respecter une instruction venue de l'extérieur voulant que le projet de loi soit adopté malgré ses faiblesses. Dans le cas présent, l'indécence de cet empressement est venu s'ajouter au fait que nous étions conscients que cet important litige allait être réglé par les tribunaux et non par le Parlement. Il est bien certain que face à une décision judiciaire qui ne leur plaît pas, ces mêmes parlementaires seront les premiers à se plaindre de l'ingérence de la magistrature.

J'ai souligné plus tôt que le nouveau leader du gouvernement au Sénat avait été impressionné de la somme de travail que nous accomplissons ici par rapport à ce qui se fait à l'autre endroit. Je suis d'avis que ce qui s'est produit en septembre est dû davantage à l'impatience qui précède une prorogation qu'à un effort volontaire en vue de réduire les contributions du Sénat au processus parlementaire et je suis persuadé qu'au cours de cette nouvelle session, nous reprendrons nos responsabilités traditionnelles, tout en étant toujours bien au fait des désirs de la Chambre élue.

Je crois bien également que les rumeurs persistantes voulant qu'on retire à l'opposition toutes les présidences de comité qu'elle occupe sauf une ne sont pas fondées. N'importe quel observateur indépendant ne pourra que reconnaître que les présidences de comité occupées par des collègues de mon parti au cours de la première session de la présente législature ont été exercées avec distinction et à l'honneur du Sénat. Toute tentative de réduire sans justification la contribution de non-partisans du gouvernement au système des comités se heurtera à une vigoureuse résistance, non pas par égoïsme mesquin mais parce que la grande valeur de notre institution repose sur un fondement de coopération et non d'hostilité mutuelle.

À l'époque où nous étions majoritaires du côté de l'opposition, nous avons résisté plusieurs fois - bien qu'avec difficulté, je l'avoue - à l'envie de faire de l'obstruction pour le plaisir de faire de l'obstruction, ce qui a été le cas durant une bonne partie des années 80 et en 1990 quand les rôles étaient renversés. Nous avons travaillé délibérément au rejet de deux projets de loi, concernant l'aéroport Pearson et concernant le réaménagement de la carte électorale, car ils étaient clairement anticonstitutionnels. Nous gardons toujours à l'esprit que la volonté des représentants élus doit être respectée, pourvu qu'elle s'exprime dans les limites de la Constitution.

Honorables sénateurs, le succès du Sénat se mesure non pas par l'exploitation d'une majorité pour faire adopter des projets de loi à la vapeur, mais plutôt par la contribution de tous les sénateurs à l'amélioration des mesures législatives qui nous parviennent de l'autre endroit. N'accorder à l'opposition qu'un rôle insignifiant dans ce processus, ce serait transformer le Sénat en une image fidèle de la Chambre des communes et donner encore plus de munitions à ceux qui cherchent à faire abolir notre institution.

On peut toujours accepter que le nouveau leader du gouvernement cherche, grâce à ses responsabilités ministérielles, à obtenir des avantages politiques pour sa province, mais ce serait une insulte à l'égard de notre institution et une provocation inutile qu'il puisse chercher à réduire l'opposition à l'état de nuisance sans importance et de quantité négligeable à cause de son infériorité numérique. Une telle attitude pourrait facilement détruire l'esprit actuel de coopération et d'harmonie qui, il est ironique de le constater, n'est pas étranger au respect de l'opposition pour le Sénat, un respect que la majorité, je l'espère, continuera de partager.

(Sur la motion du sénateur Hays, le débat est ajourné.)

Projet de loi facilitant la prise de certaines décisions médicales

Deuxième lecture-Ajournement du débat

L'honorable Sharon Carstairs propose: Que le projet de loi S-2, facilitant la prise de décisions médicales légitimes relativement aux traitements de survie et au traitement de la douleur, soit lu une deuxième fois.

- Honorables sénateurs, le projet de loi S-2 a pour objet de faciliter la prise de décisions médicales par des patients en protégeant contre toute responsabilité pénale les soignants qui respectent les souhaits de leurs patients. Plus précisément, le projet de loi clarifie les lois en protégeant les soignants qui s'abstiennent d'administrer un traitement de survie à la demande du patient ou en interrompent l'administration, ou qui administrent des médicaments afin de soulager de fortes douleurs physiques.

Ce projet de loi prévoit également que le ministre de la Santé peut établir des lignes directrices nationales et promouvoir la sensibilisation et la formation relativement à l'abstention d'administrer des traitements de survie, de traiter la douleur et d'administrer des soins palliatifs ou à leur interruption.

Le projet de loi S-2, dont le titre abrégé est Loi facilitant la prise de certaines décisions médicales, est le troisième projet de loi de ce genre à être présenté dans cette Chambre ces dernières années.

Honorables sénateurs, le 27 novembre 1996, j'ai présenté le projet de loi S-13, visant à modifier le Code criminel (protection des soignants). Ce projet de loi est resté en plan lors du déclenchement des élections fédérales en mai 1997.

Au cours de la dernière session de la présente législature, le sénateur Thérèse Lavoie-Roux a présenté le projet de loi S-29, qui avait le même objectif général que le projet de loi S-13, la protection des patients et des soignants. Le projet de loi S-29 est mort au Feuilleton lors de la prorogation du Parlement en septembre.

À mon avis, le projet de loi S-2, Loi facilitant la prise de certaines décisions médicales, intègre le meilleur des projets de loi S-13 et S-29. Cependant, je veux qu'il soit bien clair pour tous les sénateurs que je ne considère pas ce projet de loi comme le mien. Je le considère comme le projet de loi du Comité spécial du Sénat sur l'euthanasie et l'aide au suicide. Il est le fruit du travail de l'ancien sénateur Joan Neiman, des sénateurs Lavoie-Roux, Corbin, Beaudoin, DeWare, Keon et moi-même, puisque j'ai siégé au comité, moi aussi.

Si je devais dédier ce projet de loi à quelqu'un, ce serait au regretté sénateur Noël Desmarais, qui, même s'il n'était pas membre à part entière du comité, a remplacé madame le sénateur DeWare plusieurs mois, pendant qu'elle soignait son mari malade, et qui a continué de dialoguer avec nous jusqu'à ce qu'il soit lui-même aux prises avec une maladie terminale. Sa contribution a été très précieuse. Nous ne devons jamais l'oublier.

Les honorables sénateurs constateront que le projet de loi S-2 commence par un préambule. Le 23 février 1994, le Comité sénatorial spécial sur l'euthanasie et l'aide au suicide a été formé pour examiner les aspects juridique, social et éthique de l'euthanasie et de l'aide au suicide. Les membres du comité se sont vite aperçus qu'ils ne pouvaient pas trancher seuls les questions de l'euthanasie et de l'aide au suicide. C'est pourquoi bon nombre des chapitres de ce rapport n'ont rien à voir avec l'euthanasie et l'aide au suicide. Ils ont trait aux soins palliatifs et au refus de recevoir un traitement destiné à maintenir les fonctions vitales ou à l'arrêt de ce type de traitement. Ils ont trait à la maîtrise de la douleur.

Le 6 juin 1995, le comité a soumis au Sénat son rapport intitulé: «De la vie et de la mort». Selon moi, le préambule de ce projet de loi est essentiel pour donner au Sénat le mérite qui lui revient de plein droit. Certains rédacteurs de lois n'aiment pas les préambules. Cependant, dans le cas présent, il n'est pas seulement positif, mais il rend justice au comité, qui a travaillé très dur.

J'aimerais maintenant parler de points spécifiques du projet de loi S-2. L'article 2 du projet de loi prévoit qu'aucun fournisseur de soins de santé ne peut être reconnu coupable d'une infraction en vertu du Code criminel pour avoir administré à une personne des médicaments avec l'intention de soulager ou de faire disparaître sa souffrance physique, à des doses pouvant abréger sa vie.

(1640)

Dans son rapport intitulé: «De la vie et de la mort», le comité sénatorial spécial reconnaît que la pratique qui consiste à traiter le patient de manière à soulager ses souffrances, même si elle peut abréger la vie du patient, est actuellement légale.

Le Code criminel n'interdit pas les soins palliatifs, même si cela peut abréger la vie du patient, en autant que les soins sont dispensés de façon conforme aux pratiques médicales généralement reconnues. Toutefois, un certain nombre de témoins ont déclaré au comité que les médecins hésitaient souvent à administrer suffisamment de médicaments antidouleur si cela risquait d'abréger la vie des patients, de crainte d'être tenus criminellement responsables du décès de leurs patients. C'est la grande tragédie qui se vit chaque jour dans notre pays. À cause de cette peur qu'entretiennent les médecins, des patients ne reçoivent pas toujours tous les soins palliatifs, tous les médicaments antidouleur dont ils ont besoin.

De très nombreux témoins lui ayant décrit la confusion qui règne tant chez les professionnels de la santé qu'au sein de la population en général quant à la légalité de la pratique, le comité sénatorial spécial a recommandé à l'unanimité que les dispositions pertinentes du Code criminel soient clarifiées.

Nombreux sont les médecins se spécialisant dans les soins palliatifs qui soutiennent que le traitement de la douleur n'abrège jamais la vie du patient. Selon certains témoignages recueillis, lorsque la concentration des médicaments est bien réglée, les patients s'adaptent simplement à la dose accrue des médicaments administrés. Toutefois, nous n'en avons aucune preuve et, à mon avis, là n'est pas la vraie question. Tous autant que nous sommes, nous devrions veiller à ce que les patients au Canada souffrent le moins possible.

Le comité sénatorial n'est pas le seul à réclamer qu'on clarifie les dispositions du Code criminel qui portent sur la possibilité d'administrer un traitement qui, tout en atténuant la douleur, risque d'abréger la vie du patient. La Commission de réforme du droit avait formulé la même recommandation dans un rapport qu'elle a diffusé en 1983. De plus, l'Association médicale canadienne réclame la clarification de la loi dans ce domaine depuis 1992.

Le comité sénatorial spécial utilisait l'expression plus générale de «traitement destiné à soulager la souffrance», mais l'article 2 du projet de loi est formulé de façon à exclure les situations où des médicaments sont administrés pour soulager des souffrances émotionnelles ou psychologiques. À mon avis, il faut user de prudence et rien dans ce projet de loi ne devrait susciter la controverse, et pourtant nous savons tous que le traitement de la souffrance émotionnelle ou psychologique prête à la controverse. L'article 2 ne protège pas les soignants dans les cas où il pourrait y avoir un autre genre de responsabilité pénale, comme la négligence criminelle.

Honorables sénateurs, comprenez-moi bien: l'article 2 ne s'applique absolument pas aux cas où il y a intention de causer la mort. Il ne s'applique que dans les cas où l'on veut soulager les souffrances physiques du patient. Il est très important de le souligner. Nul ne devrait échapper à sa responsabilité criminelle si son intention est de tuer quelqu'un.

Le paragraphe 3(1) du projet de loi S-2 prévoit que le soignant n'est pas coupable d'une infraction prévue par le Code criminel du seul fait qu'à la demande d'une personne capable, il s'abstient de lui administrer un traitement de survie ou en interrompt l'administration.

Le paragraphe 3(2) clarifie les circonstances dans lesquelles une demande est considérée valable aux fins du paragraphe 3(1). Des instructions écrites préalables, conformes aux lois d'une province, auront toujours préséance. La plupart des provinces ont déjà adopté des dispositions législatives sur les instructions préalables. L'Alberta est la dernière province à avoir adopté une loi à ce sujet; en effet, la Personal Directives Act a été proclamée et est entrée en vigueur le 1er décembre 1997. Le Manitoba, Terre-Neuve, la Nouvelle-Écosse, l'Ontario et le Québec ont aussi légalisé la rédaction de ce que l'on appelle, dans le jargon, les testaments biologiques. La Colombie-Britannique et l'Île-du-Prince-Édouard ont adopté des lois en cette matière, mais celles-ci ne sont pas encore en vigueur.

À défaut d'instructions écrites données préalablement conformément aux lois d'une province, des directives écrites non officielles ou une demande faite verbalement ou par signes, en présence d'au moins un témoin, constituent une demande valable.

Le paragraphe 3(3) prévoit qu'une autre demande peut être faite par un mandataire, un représentant légal ou un conjoint, mais seulement si le patient n'a pas la capacité de le faire ou si, pendant qu'il en était capable, il n'a pas fait de demande valable.

Dans son rapport intitulé: «De la vie et de la mort», le comité sénatorial spécial a défini l'abstention de traitement de survie comme étant le fait de ne pas amorcer un traitement susceptible de maintenir le patient en vie, par exemple ne pas tenter la réanimation cardiorespiratoire (RCR), ne pas donner une transfusion sanguine, ne pas administrer d'antibiotiques ou ne pas assurer l'alimentation et l'hydratation artificielles. Il a défini l'interruption comme le fait de cesser un traitement susceptible de maintenir le patient en vie, par exemple débrancher le respirateur.

Le comité sénatorial spécial a souligné que les tribunaux canadiens ont reconnu aux patients le droit en common law de refuser un traitement médical ou d'exiger qu'un traitement, une fois commencé, soit interrompu. Dans des affaires comme Malette c. Schulman, en 1990, Nancy B. c. Hôtel-Dieu de Québec, en 1992 et dans l'affaire Rodriguez, en 1993, les tribunaux ont expressément reconnu ce droit, même si la conséquence de cette abstention ou de cette interruption de traitement de survie est la mort.

Je pense qu'il est important de revenir sur certaines de ces causes avec vous.

Dans l'affaire Mallette c. Schulman, en 1990, la Cour d'appel de l'Ontario a déclaré que les instructions sur les transfusions sanguines données pendant qu'une patiente en était capable devaient être suivies, même si elle n'avait pas la capacité de prendre une décision. La cour a jugé que le médecin devait respecter les instructions écrites d'un témoin de Jéhovah qui refuse toute transfusion sanguine, même dans une situation d'urgence où la patiente ne pouvait donner son consentement.

Aux termes de la décision qu'elle a rendue en janvier 1992 dans l'affaire Nancy B., la Cour supérieure du Québec a jugé que la patiente adulte capable, atteinte d'une maladie incurable et alitée jusqu'à la fin de ses jours, avait le droit de demander que son médecin débranche le respirateur qui la maintenait en vie. En rendant sa décision, le juge Dufour a cité les articles du Code civil du Québec selon lesquels la personne humaine est inviolable et nul ne peut être forcé de subir un traitement sans son consentement.

Cette affaire traitait également de la responsabilité criminelle du médecin qui devait, à la demande de Nancy B., débrancher le respirateur. Après s'être reporté aux articles 216, 217, 45 et 219 du Code criminel, ainsi qu'aux dispositions sur l'homicide, le juge a conclu qu'un médecin ne faisait pas preuve d'une conduite déraisonnable, gratuite ou insouciante en débranchant le respirateur d'une patiente à la demande de celle-ci et en laissant la maladie de la patiente suivre son cours naturel. Il est aussi arrivé à la conclusion que le médecin n'aiderait pas la patiente à commettre un suicide ou ne commettrait pas un homicide, puisque la mort de Nancy B. serait due à la maladie sous-jacente.

En 1993, M. le juge Sopinka, de la Cour suprême du Canada, qui a rédigé la décision majoritaire dans l'affaire Rodriguez, a également reconnu le droit des patients de ne pas consentir à un traitement ou de demander que le traitement soit interrompu, même si la mort devait en résulter. Il est important de se rappeler que, dans ce cas, la majorité n'était pas en faveur de l'euthanasie et de l'aide au suicide. Elle était cependant en faveur du droit à l'abstention ou à l'interruption du traitement, droit qui est l'objet du projet de loi à l'étude.

Toutefois, honorables sénateurs, des témoins ont dit devant le comité spécial du Sénat que, dans certains cas, on n'avait pas respecté le voeu des patients parce que le Code criminel n'était pas clair et que les soignants craignaient d'être tenus responsables. À cause de ces témoignages sur la confusion qui existe parmi les soignants et la population en général, le comité sénatorial spécial a recommandé à nouveau à l'unanimité que la common law en vigueur soit codifiée de façon à clarifier les circonstances dans lesquelles il est légalement acceptable de ne pas fournir ou d'interrompre un traitement de survie.

Encore là, le comité sénatorial n'était pas le premier à recommander que le droit soit clarifié dans ce domaine.

(1650)

En 1983, la Commission de réforme du droit du Canada avait recommandé elle aussi que le Code criminel soit clarifié à cet égard. Depuis 1992, l'Association médicale canadienne préconise que le Code criminel soit clarifié en ce qui concerne le droit légal de mettre fin à un traitement afin de mettre les soignants à l'abri des poursuites.

Honorables sénateurs, l'article 6 du projet de loi S-2 est le plus bel exemple du fusionnement de mon projet de loi original, le S-13, et du projet de loi du sénateur Lavoie-Roux, le S-29. Le projet de loi S-29 prévoyait l'établissement de lignes directrices pour le traitement de la douleur et pour l'abstention et l'interruption de traitements de survie.

L'article 6 du présent projet de loi prévoit que le ministre de la Santé établisse, en collaboration avec les autorités provinciales et les associations des professionnels de la santé, des lignes directrices nationales relativement à l'abstention et à l'interruption de traitements de survie, au traitement de la douleur et aux soins palliatifs. Le projet de loi permet au ministre de la Santé de promouvoir et d'encourager l'éducation du grand public et la formation des professionnels de la santé concernant le traitement de la douleur et les soins palliatifs. Le projet de loi prévoit aussi que l'on surveille le nombre de fois qu'il y aura eu abstention ou interruption des traitements de survie et que l'on mène des enquêtes et que l'on fasse des recherches à cet effet.

Dans son rapport intitulé: «De la vie et de la mort», le comité spécial du Sénat a reconnu l'importance de lignes directrices nationales dans ces domaines. De nombreux témoins qui sont venus devant le comité ont recommandé qu'on donne davantage d'information et de formation aux fournisseurs de soins de santé sur les soins palliatifs et le contrôle de la douleur. Presque tous les témoins qui ont comparu devant le comité spécial du Sénat s'accordaient à dire que des recherches plus poussées étaient nécessaires dans ces domaines.

Honorables sénateurs, le projet de loi S-2 est le résultat direct du travail du Comité spécial du Sénat sur l'euthanasie et l'aide au suicide. À mon avis, il réunit les meilleurs éléments des deux projets de loi précédents qui ont été présentés au Sénat. Il vise à clarifier le droit pénal en codifiant la common law existante et en la rendant accessible et compréhensible pour tous les Canadiens, afin de protéger les patients et leurs fournisseurs de soins de santé.

J'attends avec impatience le débat sur ce projet de loi. Ce qui est plus important encore, j'attends avec impatience l'étude en comité, où on examinera et débattra cette mesure de façon plus approfondie. Je suis particulièrement heureuse de la participation du sénateur Lavoie-Roux, qui, comme moi, veut que les recommandations du comité spécial du Sénat deviennent loi. Ce projet de loi n'est peut-être pas encore exactement ce qu'il faut. Malheureusement, en tant qu'êtres humains, nous ne sommes pas parfaits. J'espère que le Comité sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles examinera ce projet de loi attentivement afin de s'assurer qu'il répond aux besoins des Canadiens et qu'il y apportera des amendements pour l'améliorer au besoin.

Je veux que ce projet de loi soit aussi bon qu'il puisse l'être, et je sais que c'est aussi là le désir du sénateur Lavoie-Roux et des autres membres du comité spécial du Sénat. J'espère que nous pourrons renvoyer ce projet de loi rapidement au comité afin que son étude, qui, de par sa nature, prendra beaucoup de temps, puisse commencer sans tarder, avant que le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, reconnu pour ses longues heures et son horaire chargé, ne soit aux prises avec la lourde charge des mesures législatives d'initiative ministérielle.

Honorables sénateurs, je vous invite à examiner le projet de loi S-2 et je vous exhorte à l'appuyer.

L'honorable Douglas Roche: Madame le sénateur accepterait-elle de répondre à une question?

Le sénateur Carstairs: Certainement.

Le sénateur Roche: Merci. Je veux d'abord exprimer ma reconnaissance au sénateur Carstairs pour la délicatesse dont elle a fait preuve en présentant son projet de loi. J'espère qu'il y aura un débat approfondi sur cette importante question et qu'on ne cherchera pas à se débarrasser de ce projet de loi à la hâte, afin qu'on ait amplement l'occasion, tant à l'étape de la deuxième lecture au Sénat qu'à l'étape de l'étude en comité, d'en faire l'examen qu'il mérite.

En guise de préparation à ma contribution au débat de ce soir, je voudrais poser deux questions au sénateur Carstairs, si elle le veut bien. D'abord, le sénateur Carstairs a dit sans équivoque que le projet de loi visait à atténuer la douleur et non à écourter la vie, mais comme le fait d'atténuer la douleur peut avoir pour effet d'écourter la vie, le sénateur Carstairs craint-elle que cela puisse ouvrir la porte au suicide assisté? Elle a dit très clairement que des traitements extraordinaires pour prolonger la vie ne sont pas nécessaires d'un point de vue déontologique, mais, dans le traitement des patients en phase terminale, n'y a-t-il pas un danger que les diverses pressions s'exerçant puissent aboutir à une forme d'encouragement ou de pression en faveur de l'utilisation de médicaments atténuant la douleur à des fins secrètes, ou à des fins non déclarées ouvertement, qui consistent en fait à écourter la vie?

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, je remercie le sénateur de sa question, parce que tel est véritablement l'élément essentiel de tout le débat. C'est pourquoi nous devons avoir des lignes directrices et des moyens de contrôle.

Je renverrais le sénateur au catéchisme de l'Église catholique, notamment à l'article 2279, parce que la différence y est assez clairement énoncée. Le catéchisme dit ceci:

Même si la mort est considérée comme imminente, les soins ordinairement dus à une personne malade ne peuvent être légitimement interrompus. L'usage des analgésiques pour alléger les souffrances du moribond, même au risque d'abréger ses jours, peut être moralement conforme à la dignité humaine si la mort n'est pas voulue, ni comme fin ni comme moyen, mais seulement prévue et tolérée comme inévitable. Les soins palliatifs constituent une forme privilégiée de la chartié désintéressée. À ce titre ils doivent être encouragés.

Pour moi, ce genre de clarification est si nécessaire que si le projet de loi ne la contient pas, nous devons nous assurer qu'elle y figure. Je pense que c'est déjà le cas, mais sinon, modifions-le pour que ce soit absolument clair.

Le sénateur Roche: Je remercie l'honorable sénateur. La réponse est certainement utile à l'essentiel du débat.

Ma deuxième question porte sur le Code criminel. Je ne vois pas très bien pourquoi le projet de loi cherche à codifier la common law existante ou à autoriser certains actes qui pourraient effectivement être considérés comme des actes criminels sans avoir à modifier le Code criminel lui-même. Pourquoi veut-on éviter de modifier le Code criminel en adoptant le projet de loi?

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, encore une fois, je remercie l'honorable sénateur de sa question. Il est intéressant de souligner que, dans le premier projet de loi que j'ai présenté, il y avait une modification du Code criminel. Cependant, au cours du débat et des discussions au Sénat, et également par la suite, dans le projet de loi du sénateur Lavoie-Roux, il est devenu évident que nous voulions davantage qu'une modification du Code criminel. Nous tentions également d'établir des lignes directrices nationales et de mettre en place des mesures de contrôle et de faire faire des expériences et des travaux de recherche sur le contrôle de la douleur. Par conséquent, j'ai suivi la voie recommandée par, par exemple, Peter Hogg, un constitutionnaliste qui affirme que le Code criminel peut être modifié par un amendement direct, mais aussi par une loi parallèle. J'ai opté pour la loi parallèle.

(Sur la motion du sénateur DeWare, au nom du sénateur Lavoie-Roux, le débat est ajourné.)

(1700)

La stratégie du logement pour les autochtones

Interpellation-Ajournement du débat

L'honorable Thelma J. Chalifoux, conformément à l'avis donné le 14 octobre 1999:

Qu'elle attirera l'attention du Sénat sur des stratégies visant à répondre aux besoins des autochtones en matière de logement.

- Honorables sénateurs, il est difficile pour la plupart des Canadiens de comprendre pourquoi il persiste des différences entre les conditions de vie et les défis des autochtones et ceux des autres citoyens du Canada. Il est également difficile pour eux de comprendre pourquoi il faut adopter des solutions différentes en raison de la situation, des droits, des valeurs et du potentiel des autochtones. Cela est peut-être difficile à comprendre, mais il est essentiel de le comprendre pour pouvoir progresser en harmonie.

La stratégie du logement vise à déterminer si les récentes décisions du gouvernement fédéral permettront d'améliorer les conditions de logement des familles autochtones et si d'importantes améliorations peuvent être apportées à la stratégie fédérale actuelle. Ce document de travail est destiné à faciliter un véritable dialogue sur les principales caractéristiques d'une stratégie qui nous fera entrer dans le prochain siècle et sur la meilleure façon de la mettre en oeuvre.

Nous avons choisi de nous arrêter sur les forces de tous les peuples au Canada et les sources de ces forces pour en arriver à une stratégie contemporaine. Une source de force parfois oubliée et mise de côté est la volonté et le droit des peuples autochtones - les Métis, les Inuits et les membres des Premières nations - de rechercher et de mettre en oeuvre leurs propres solutions. C'est cette force qui a entraîné le lancement avec succès de centaines d'initiatives venant de la base. Parfois, elles ont été gênées par des tracasseries administratives ou n'ont pu aboutir pour une raison quelconque. D'autres initiatives venant des autochtones eux-mêmes ont entraîné la constitution des réseaux régionaux et ensuite nationaux, ainsi que des institutions importantes sur lesquels nous comptons maintenant. Si nous pouvons mieux combiner les points forts des autochtones et des Canadiens en général et libérer ces forces pour améliorer le logement, nous aurons fait beaucoup plus que quiconque pouvait s'y attendre.

Je vais maintenant me pencher sur la portée et l'objet de la stratégie en matière de logement pour les familles autochtones. Certains peuvent penser que nous n'avons pas besoin d'une autre étude sur les conditions de logement ou une étude sur les façons de modifier les programmes nationaux dans l'espoir que les familles autochtones puissent en tirer certains avantages. Nous sommes d'accord. Trop de ces études ont déjà été effectuées et ont conduit à une faible amélioration des conditions de vie. De plus, nous avons tous pu profiter des conseils et de la recherche sans précédent de la Commission royale sur les peuples autochtones, en 1996. Nous constatons maintenant les premières réalisations de l'initiative «Rassembler nos forces», le plan d'action que le gouvernement fédéral a lancé en janvier 1997.

Nous avions espéré que d'autres partenaires dans la Confédération annonceraient eux aussi leurs plans et leurs priorités. À ce chapitre, nous sommes déçus. Certains progrès sont évidents, mais plusieurs sénateurs et dirigeants autochtones se préoccupent de plus en plus du manque de mesures concrètes prises pour améliorer les conditions de logement des familles autochtones.

Nous voulons relancer un dialogue national sur la nécessité d'établir une stratégie claire et plus dynamique en matière de logement pour les familles autochtones. Nous voulons nous arrêter sur l'orientation future d'une stratégie pour les familles vivant à l'extérieur des réserves et des terres mises de côté pour les peuples autochtones dans le cadre d'ententes sur les revendications territoriales globales. Les familles autochtones vivant sur ces terres ont, aux termes de traités et de la loi, des conditions de logement qui diffèrent beaucoup de celles des familles vivant ailleurs.

Quoi qu'il en soit, toute stratégie en matière de logement doit tenir compte des mouvements de population sur ces terres. Beaucoup de Métis, d'Inuits et de membres des Premières nations vont quitter les communautés ancestrales pour chercher du travail, des occasions prometteuses et des logements convenables dans les grandes et petites villes du Canada. C'est une tendance croissante qui va se poursuivre.

On sait bien aussi que leur taux de natalité est supérieur à la moyenne nationale, tout comme le nombre de leurs jeunes est plus élevé, puisque la population autochtone est 10 ans plus jeune que la population en général. Il y a 50 ans, on dénombrait moins de 200 000 autochtones. Aujourd'hui, il y en a plus de 1 million qui vivent au Canada. Ce chiffre ne comprend pas toutefois la population des Métis du pays.

Beaucoup d'autres autochtones vivent aux États-Unis et peuvent ou non revenir au pays après leurs années de travail. On prévoit que la population autochtone va augmenter de 400 000 personnes au cours de la prochaine génération. Ses conditions sociales et économiques ne connaîtront que de modestes améliorations. Une stratégie en matière de logement raisonnable doit pouvoir répondre aux besoins futurs prévus de la population autochtone et aux nouvelles priorités.

Je vais maintenant expliquer pourquoi les conditions et les problèmes de logement des autochtones sont différents. Une raison importante pour laquelle plus de la moitié des familles autochtones vivent aujourd'hui dans des logements inférieurs aux normes est une grande pauvreté persistante. Beaucoup sont souvent sur le point de se retrouver dans la rue ou d'aller vivre dans des communautés rurales, urbaines et isolées déjà surpeuplées. Les emplois que les autochtones trouvent sont mal rémunérés et ils doivent utiliser au maximum leur chèque de paye pour répondre aux besoins fondamentaux en nourriture et en vêtements de familles plus nombreuses que la moyenne.

On estime que le revenu d'emploi des autochtones correspond au deux tiers de celui de la moyenne nationale. Plus de 40 p. 100 d'entre eux n'avaient pas de revenu d'emploi en 1995. Ils ont peu ou pas de crédit. Qu'arriverait-il si les autochtones devaient obtenir la parité avec les Canadiens moyens en matière d'emploi et de salaire? Évidemment, cela leur assurerait un niveau de vie supérieur et tout le Canada en profiterait.

En 1991, l'ancien ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Thomas Siddon, déclarait que, s'il y avait parité d'ici l'an 2000, le produit national brut du Canada permettrait d'accroître les revenus fiscaux du gouvernement fédéral de 4,3 milliards de dollars et de réduire la dette nationale de 20 milliards de dollars. La commission royale y est allée de sa propre analyse sur ce point. Elle a estimé qu'il en coûterait au Canada 7,5 milliards de dollars annuellement tant que les circonstances économiques et sociales des peuples autochtones demeureraient inférieures à la moyenne nationale. Il importe de noter que ce montant correspond à une perte de revenu net de 2,9 milliards de dollars pour les peuples autochtones, combinée à un coût fiscal de 4,6 milliards de dollars, y compris 2,1 milliards de dollars sous forme de manque à gagner pour le gouvernement.

Malheureusement, une stratégie visant à répondre aux besoins en matière de logement devra composer avec un problème de pauvreté aiguë chez les autochtones, parce que rien n'indique que les disparités économiques et sociales entre la population en général et les autochtones vont bientôt disparaître.

La récente hausse des taux d'alphabétisation et des niveaux d'éducation en général aidera certaines familles, mais les logements adéquats demeureront inabordables pour un bien trop grand nombre d'autochtones. Les écarts économiques ont été réduits beaucoup trop lentement au cours des 20 dernières années pour laisser croire que l'on s'est occupé du problème de la pauvreté chez les autochtones.

Bien entendu, d'autres raisons expliquent les différences au niveau des conditions de logement. Certaines sont plus évidentes que d'autres. Prises ensemble, ces raisons ont causé beaucoup de difficultés. Si nous voulons nous doter d'une stratégie en matière de logement qui repose sur des bases solides, il serait sage d'examiner certaines de ces raisons.

La discrimination sous toutes ses formes demeure l'une des causes qui expliquent la triste situation du logement chez les autochtones.

Une autre raison est le fait que les questions liées à ce dossier reçoivent l'attention du gouvernement beaucoup moins rapidement que les besoins d'autres groupes de la société canadienne. La Société canadienne d'hypothèques et de logement a été formée en 1946 en vue de favoriser la construction de nouvelles maisons, la réparation et la modernisation des maisons existantes ainsi que l'amélioration des conditions de logement et de vie. Elle portait à cette époque l'appellation de Société centrale d'hypothèques et de logement. Près de 30 ans plus tard, le programme de logement rural à l'intention des autochtones a vu le jour. Le Programme de logement des autochtones en milieu urbain a suivi en 1978. Les nouveaux engagements en matière de logement dans le cadre de ces programmes ont pris fin en même temps que le gouvernement fédéral a cessé de prendre des engagements en matière de logement social le 1er janvier 1994. Pendant toute sa durée, le programme de logement des autochtones n'a jamais fait l'objet d'une évaluation.

Les disparités tiennent également à la faible priorité accordée aux questions de logement des autochtones. Cette situation pourrait notamment s'expliquer par le manque de représentation autochtone au Parlement du Canada et de participation des autochtones à la fonction publique fédérale. Les arcanes du pouvoir comptent peu d'autochtones pour attirer l'attention sur les problèmes croissants ou sur leurs solutions. De plus, une grande partie du Canada autochtone était invisible pour de nombreux Canadiens. La majorité des familles habitaient en périphérie de villes situées dans des régions nordiques éloignées ou dans des collectivités perdues. Cela permettait beaucoup plus facilement d'oublier les conditions dans lesquelles elles vivaient.

(1710)

Juste au moment où les Canadiens commençaient à être plus conscients des besoins des autochtones, les priorités nationales ont changé. Cette situation malheureuse fait que les conditions de vie améliorées des Canadiens éclipsent la réalité des autochtones. Les gouvernements peuvent croire qu'ils en ont fait assez et ils peuvent penser que leurs politiques et programmes ont donné de bons résultats pour la majorité des Canadiens. Il est très difficile de maintenir l'attention sur les questions de logement autochtone alors que la majorité des Canadiens vivent dans de si bonnes conditions.

Honorables sénateurs, l'idée selon laquelle les problèmes autochtones et les solutions à y apporter ne représentent qu'une version réduite des problèmes existants et des solutions à apporter à l'échelle du Canada est une autre raison qui explique les piètres résultats et réalisations au sein des sociétés autochtones. Rien ne porte à croire qu'une semblable stratégie ait donné de bons résultats au fil des ans. En réalité, c'est un modèle n'ayant plus de crédibilité, et d'importantes études des conditions sociales et économiques, y compris l'étude de décembre 1998 sur la clochardise, recommandent l'adoption de stratégies distinctes pour tenir compte des réalités auxquelles font face les autochtones. Bien que des services aux autochtones soient venus s'ajouter aux programmes de gestion du logement, les politiques et programmes de base sont ceux qui sont conçus pour résoudre les problèmes non autochtones, et les gouvernements fédéral et provinciaux en sont les gestionnaires.

Les problèmes de compétence relatifs au logement des autochtones établis ailleurs que sur les terres réservées à ces populations nous paraissent insurmontables. La plupart des autorités provinciales, territoriales et autochtones s'en remettent essentiellement au gouvernement fédéral. Pourtant, les transferts de fonds, les points d'impôt, les pouvoirs et l'administration accordent davantage de responsabilités aux provinces. Ce transfert de compétences suscite la controverse et freine la progression de ce dossier.

Ce ne sont là que quelques-unes des raisons qui expliquent les différences observées au niveau du logement des autochtones et des difficultés éprouvées à ce titre par ces derniers. Nous les rappelons dans l'espoir qu'elles nous aideront à trouver des solutions futures au problème du logement. Il n'y avait pas de mauvaises intentions au départ.

Les raisons historiques et juridico-politiques à la pauvreté, à l'impuissance et aux préjudices subis par les sociétés autochtones soulèvent un autre problème - dont font état la commission royale d'enquête et les témoignages de nombreux dirigeants autochtones. Il va sans dire que ces raisons prépondérantes pèsent de tout leur poids sur le statut socioéconomique inférieur des autochtones aujourd'hui.

Honorables sénateurs, je voudrais maintenant parler brièvement des conséquences des stratégies fédérales passées. Les stratégies fédérales des 25 dernières années ont été réduites à une succession de subventions pour des remises en état, des réparations d'urgence, un vague programme de construction domiciliaire, un programme précis de construction de logements en milieu urbain, un programme de construction en milieu rural ayant pour objectif un taux d'occupation de 50 p. 100 des logements par des autochtones, des crédits d'impôt, des allocations pour le logement, et des projets d'auto-assistance, notamment d'accession à la propriété, qui ont fait long feu. Les autorités provinciales et municipales ont participé aux dépenses engagées, mais en partie seulement. À titre d'exemple, le programme de logement des autochtones en milieu urbain n'a été financé que par les loyers versés par les autochtones et des subventions fédérales. Des comités tripartites ont été constitués, auxquels participaient dans certains cas des prestataires de services.

Des prévisions de dépenses récentes de la SCHL concernant les autochtones hors réserves faisaient état d'une dépense annuelle de l'ordre de 172,5 millions de dollars au titre du logement. Les programmes plus importants de construction en milieux urbain et rural ont permis à des familles autochtones de vivre dans des logements à prix raisonnable. Quelque 10 700 logements urbains sont loués à des familles autochtones; il s'agit de logements sociaux construits et gérés par une centaine de sociétés sans but lucratif. Quelque 9 100 autres logements construits en milieu rural sont occupés par des familles autochtones. La plupart ont été achetés grâce à des programmes d'aide à l'accession à la propriété. Ces chiffres varient selon la source et sont contestés par de nombreux dirigeants autochtones.

Ce sont là quelques-uns des résultats positifs des stratégies fédérales antérieures. À cela il faut ajouter les résultats positifs de programmes de rénovation, de réparations d'urgences, de recherche et de démonstration, sans oublier les programmes à l'intention des personnes âgées et des personnes handicapées.

En ce qui concerne les conditions de logement des autochtones, la situation est bien différente. Si les stratégies fédérales passées visaient à améliorer ces conditions et à les rendre conformes à celles du reste du Canada, elles ont échoué. Pour ceux et celles qui ne connaîtraient pas les écarts observés dans les conditions de logement, un série de tableaux figure en annexe. Je déposerai la pièce jointe.

Honorables sénateurs, dire que les écarts sont grands ne suffit pas à comprendre la vie difficile que mènent les Métis, les Inuits et les peuples des Premières nations. Une famille autochtone sur trois a un besoin impérieux de logement, comparativement à une famille non autochtone sur dix. Le besoin impérieux de logement est une mesure fondamentale pour déterminer qu'une famille vit dans des conditions inférieures à la normale et n'a pas les moyens de s'offrir une surface habitable adéquate.

Il y a dix ans, environ 63 000 familles autochtones avaient un besoin impérieux de logement. La population a augmenté et le pourcentage des familles ayant un besoin impérieux de logement reste trois fois plus élevé que la moyenne nationale. Le nombre de foyers ne cesse d'augmenter.

Le rapport de décembre 1998 du Groupe de travail du maire sur les sans-abri de Toronto révèle une autre incidence des stratégies qui ont échoué dans ce domaine. En 1996, quelque 4 000 autochtones étaient sans abri dans la seule région de Toronto. Quelque 8 000 autres risquaient de se retrouver dans cette situation, y compris de nombreux enfants. Il est prouvé que la situation qui prévaut à Toronto s'apparente à celle qui a cours dans d'autres villes, notamment les six autres villes canadiennes qui sont densément peuplées d'autochtones. Un autochtone sur cinq vit dans sept zones métropolitaines.

Ce sont là des chiffres terribles, mais il nous faut approfondir davantage les effets des stratégies fédérales passées si nous voulons tirer des leçons des erreurs et des occasions ratées et miser sur les points forts.

Un de ces points forts, c'est l'évolution des sociétés autochtones de logements. Ces sociétés se sont révélées fort utiles et fiables.

Son Honneur le Président: Sénateur Chalifoux, je suis désolé de vous interrompre, mais vos 15 minutes sont écoulées. Demandez-vous l'autorisation de poursuivre?

Le sénateur Chalifoux: Oui.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Chalifoux: Je vous remercie, honorables sénateurs.

Des centaines et des centaines de bénévoles ont consacré de leur temps à ces sociétés alors que la douzaine d'employés dévoués se sont occupés de gérer les travaux de construction, de maintenir le parc de logements et d'offrir des services aux locataires et aux demandeurs. Le dossier urbain à lui seul vaut maintenant plus de 500 millions de dollars. Toute une gamme de services sont offerts par le personnel en poste et d'autres services sont accessibles par l'intermédiaire d'un réseau élaboré établi entre divers organismes de services autochtones, ce qui comprend des programmes comme le Programme d'aide préscolaire aux autochtones, les activités culturelles, la formation et le placement ainsi que les services et activités des centres d'accueil le cas échéant. Des postes sont créés dans le domaine de la construction et de l'entretien, des contrats sont accordés à des entreprises, des taxes foncières et des impôts sont payés, et surtout, des familles ont la chance de se prendre en main et de se lancer sur le marché privé. Certaines sociétés ont même mis sur pied ou tenté de mettre sur pied de petits projets d'accession à la propriété.

Je peux vous parler d'une famille, par exemple. Une mère seule avec six enfants. Nous l'avons inscrite dans un programme de logement autochtone et elle m'a remercié en me disant: «Je vous remercie infiniment. Pour la première fois, je peux acheter des oranges pour mes enfants.»

Ce programme a eu pour avantage notable de permettre à beaucoup d'enfants de vivre en communauté avec d'autres enfants et familles autochtones. Il a contribué à renforcer leur identité métisse, inuite ou indienne dans de meilleurs quartiers que ceux dans lesquels de nombreux autres parents autochtones peuvent se permettre d'habiter. Ils attendent d'en avoir la chance eux aussi. C'est un merveilleux moyen de renforcer leur identité, un moyen essentiel de garder les jeunes autochtones à l'abri des mauvaises situations dans lesquelles se trouvent beaucoup de jeunes, et cela les garde à l'école. Un modeste logement dans de meilleurs quartiers a donné la tranquillité d'esprit et un sentiment de sécurité aux femmes, aux enfants et aux aînés autochtones.

Ces résultats ne font pas les manchettes, mais ils ont rendu la vie meilleure à beaucoup de gens et ils ont créé une capacité et un désir de faire bien davantage.

Les relations restent encore médiocres entre les autochtones et certains gouvernements locaux, mais elles peuvent devenir meilleures avec le temps. Au moins, les problèmes de logement et les sociétés d'habitation ont permis d'amorcer un dialogue, si rien d'autre ne peut les rapprocher.

Les sociétés d'habitation autochtones possèdent également quelque chose de rare. C'est la seule institution qui présente un profil à jour des familles autochtones et qui fournit le moyen de les rejoindre facilement. Leurs listes d'attente, jointes à celles des locataires existants, leur permettent d'en savoir un peu à propos de milliers de familles autochtones et à propos de l'évolution de leurs conditions d'existence. Cela constitue un outil important pour coordonner les services aux plus démunis dans la société autochtone.

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Quels sont les choix pour une future stratégie visant à répondre aux besoins des autochtones en matière de logement et aux nouvelles priorités? Les conditions pitoyables de logement que connaissent les peuples autochtones suffisent à exiger qu'on prenne des mesures. Malgré cela, d'autres priorités se font jour qui requièrent l'attention. Selon des chiffres récents, 46 p. 100 des enfants autochtones de moins de cinq ans qui vivent dans les grandes zones métropolitaines vivent dans des familles monoparentales. Ce taux représente sept fois le taux pour la population en général. Près d'un tiers de tous les enfants autochtones vivent dans des familles monoparentales. La plupart des familles monoparentales ont à leur tête une femme. Il faudra mettre en place une stratégie extrêmement bien coordonnée pour satisfaire aux besoins de ces familles en matière de logement et de santé, pour satisfaire à leurs besoins culturels et économiques et pour satisfaire aux besoins des jeunes enfants.

La tendance démographique fait ressortir le jeune âge de la population autochtone, et cette tendance se poursuivra. Le nombre d'enfants de moins de cinq ans par femme autochtone en âge de procréer est 70 fois plus élevé que le taux pour le total de la population canadienne. Des salaires bas et un taux de chômage élevé sont caractéristiques parmi les jeunes, encore plus parmi les jeunes autochtones.

Depuis qu'il a été mis fin à la construction de nouveaux logements subventionnés en 1994, la liste des autochtones en attente d'un logement s'est allongée. Il est évident que le parc de logements sociaux actuel ne peut accueillir les familles autochtones ou ne les accepte pas. Ces dernières années, les provinces ont réduit leurs engagements ou y ont mis fin et il n'existe pas de chiffre fiable sur le nombre de familles autochtones logées dans des logements sociaux. Il importe de faire remarquer que les logements sociaux sont attribués sur la base de la vérification de la solvabilité et du seuil du revenu, ce qui interdit l'accès des autochtones à des logements subventionnés destinés aux non-autochtones.

La commission royale a estimé qu'il sera nécessaire de construire 17 000 nouveaux logements et de procéder à d'importants travaux de réparation sur 37 000 autres pour pouvoir résorber l'arriéré entre 1996 et 2016. En outre, 21 600 nouveaux foyers dus à la croissance démographique et à la formation de nouvelles familles auront aussi besoin d'aide. Sans aide financière, le niveau de vie de ces gens devrait baisser encore, et le nombre de familles dans le besoin devrait augmenter.

À la suite des décisions prises récemment par le gouvernement fédéral, des fonds pour l'administration des logements sociaux ont été transférés aux provinces qui ont accepté cet arrangement. L'Ontario, le Québec, la Colombie-Britannique et l'Alberta ont maintenant opté pour cette formule. Les accords de transfert couvrent les programmes de logement pour les autochtones dans les zones rurales et urbaines.

Le processus de transfert a provoqué énormément de conflits et de différends entre la SCHL et les fournisseurs de logements autochtones. Notamment, les sociétés urbaines de logement autochtone ont préconisé des transferts directs aux sociétés de logement autochtone par l'intermédiaire d'accords négociés et d'un organisme national de coordination. Cette position est bien connue et est antérieure à la politique de transfert des programmes aux provinces. Ce genre d'arrangement a des précédents notamment dans les centres de formation et d'accueil. Les argumentations contre les transferts fédéraux aux provinces sont historiques, constitutionnels et profondément enracinés dans les objectifs d'autodétermination des peuples autochtones. Elles insistent aussi sur le manque de consultation à l'égard de ces transferts. De véritables consultations constituent un principe précieux dans l'évolution des relations avec les peuples autochtones et un principe appuyé par la Cour suprême du Canada dans des jugements comme le jugement Sparrow.

Il y a aussi des raisons de politique et de fonctionnement quotidien à la contestation des transferts provinciaux. En fait, rien ne prouve que les provinces peuvent mieux administrer des programmes que les sociétés urbaines de logement autochtone. Aucune évaluation indépendante ne l'a jamais révélé non plus. Par contre, on sait que des mesures clés comme l'établissement du loyer en fonction du revenu des locataires peuvent être modifiées unilatéralement au gré des provinces.

La SCHL a tenté d'assurer aux sociétés de logement pour autochtones que leurs intérêts dans leur stock de logements sont protégés dans les accords de transfert et qu'elles ne s'en porteront pas plus mal. Ces assurances ont été très peu convaincantes. Une prémisse fondamentale des sociétés de logement pour autochtones dans les centres urbains veut que le gouvernement fédéral est responsable d'améliorer les conditions de logement. Or, les transferts aux provinces entraînent une réduction de cette responsabilité. Elles croient avoir le droit, bien mérité, de prendre des décisions elles-mêmes. Si elles décident de conclure des accords avec les provinces ou avec les administrations locales par la suite, ce sera leur choix, un choix fondé sur leurs politiques et sur leurs programmes.

La question est de savoir s'il faut annuler le transfert des programmes autochtones et négocier des accords de transfert avec les sociétés de logement pour autochtones qui le désirent ou laisser en place la stratégie fédérale de transfert des responsabilités aux provinces.

De très solides arguments ont été présentés en faveur du remplacement, par un modèle autochtone, du modèle des besoins impérieux qui mesure le caractère abordable, l'adaptation aux besoins et les normes de conformité dans la société canadienne. Pour des raisons évidentes, ce modèle tiendrait compte également de la sécurité de la famille et des pratiques culturelles. Il refléterait mieux la réalité autochtone lorsqu'il s'agit d'évaluer les besoins et d'élaborer des stratégies pour y répondre. Il permettrait de concevoir à l'avenir des stratégies sur le logement pour atteindre des objectifs semblables à ceux que poursuivent déjà des sociétés de logement qui ne sont à peu près pas reconnues par le gouvernement. En poursuivant ces objectifs, on assurera des abris aux autochtones, on tiendra compte des besoins des grands-parents et des aînés, des pratiques spirituelles, de l'accès aux activités culturelles et aux programmes de la petite enfance; les services autochtones devront avoir accès à de l'aide financière et de l'aide en matière d'emploi. La stratégie de logement devrait être plus à même de protéger les familles du crime et de la violence dont elles peuvent être victimes à cause de leur patrimoine autochtone.

Les modifications apportées à la Loi nationale sur l'habitation et à la Loi sur la Société canadienne d'hypothèques et de logement, qui ont reçu la sanction royale le 17 juin 1999, ont donné à la SCHL des outils plus solides pour accorder de l'aide et traiter avec des types plus nombreux d'organisations, si on en croit le témoignage des fonctionnaires de la SCHL, qui ont été entendus par le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie le 9 juin 1999. Ce pouvoir accru facilitera peut-être le transfert de pouvoirs réels et d'un certain contrôle à une nouvelle administration autochtone du logement.

Cette stratégie correspond à la principale recommandation qu'a formulée le Comité permanent des affaires autochtones en 1992 après de longues délibérations et consultations. Le comité, formé de représentants de tous les partis, a entre autres recommandé que le financement des logements autochtones soit administré par l'entremise d'un seul organisme dont le mandat comprendrait l'octroi de prêts, l'assurance, l'élaboration de politiques, la prise de décisions, la gestion de programmes, la recherche, la formation, le développement économique et le financement. Au cours d'un récent congrès sur le logement organisé par l'Assemblée des Premières nations, les leaders ont préconisé une structure similaire pour satisfaire aux besoins des membres des Premières nations.

La nouvelle administration autochtone du logement serait indépendante et aurait la capacité de faire des lois pour les autochtones. Elle aurait aussi le pouvoir de négocier des ententes avec des ministères fédéraux ainsi que de coordonner ou d'offrir à des milliers de familles des services de formation et de placement, des services relatifs au développement des jeunes enfants, des services de santé et d'éducation et de l'aide au développement des entreprises.

Une telle stratégie permettrait également aux sociétés du logement de faire plus avec les ressources financières à leur disposition. La différence entre le taux créditeur fédéral et le taux débiteur fédéral pourrait servir à financer plus de maisons et à appuyer la recherche sur les meilleures initiatives et la gestion. Cela permettrait également d'élaborer de nouveaux services et produits reliés aux emprunts hypothécaires pour aider les familles autochtones. Ces services pourraient englober l'achat et l'entretien de locaux pour les étudiants et les soins de santé, car il serait possible de mieux utiliser les quelque 200 millions de dollars que dépense le gouvernement fédéral pour ces locaux.

Honorables sénateurs, le transfert de ces attributions fédérales peut se faire sans qu'il soit nécessaire d'adopter de nouvelles dispositions législatives. Il faudrait probablement que le premier ministre se prévale des pouvoirs que lui confère la Loi sur les restructurations et les transferts d'attributions dans l'administration publique, et que le tout soit officialisé par des accords de transferts adéquats. À long terme, on pourrait proposer et adopter de nouvelles dispositions législatives visant à reconnaître l'existence d'autorités locales autochtones en matière de logement, autorités dont les pouvoirs, les fonctions et les caractéristiques sur le plan juridique seraient uniques. Ces autorités locales ne seront plus des sociétés sans but lucratif et elles pourraient créer des entreprises et des emplois dans leurs collectivités. Elles seront l'expression de l'autodétermination des autochtones.

C'est aux législateurs qu'il appartient maintenant de mettre en oeuvre une stratégie autochtone globale audacieuse ou de simplement retoucher la stratégie fédérale existante.

Le gouvernement se penche sur les graves circonstances que vivent les familles susceptibles de se retrouver dans la rue, ou qui y sont déjà, y compris les familles autochtones. Nous croyons que, dans les grandes villes, le système qui fournit des services aux sans-abri autochtones est la clé de toute stratégie visant à aider ces sans-abri et que toute injection d'argent neuf devrait se faire au moyen de ce système. La recherche indique de façon convaincante qu'il faut élaborer sans tarder une stratégie et un plan d'action pour mettre en oeuvre des solutions à ce problème urgent. Étant donné que Santé Canada a déclaré qu'un foyer adéquat était déterminant pour la santé, le problème des sans-abri exige que des mesures soient prises dès maintenant. Nous devons étudier sérieusement les recommandations formulées par suite d'études, d'enquêtes et de témoignages afin de présenter des conseils précis. Les recommandations et le plan d'action aideront la ministre responsable des sans-abri.

Cette étude ne doit pas être reléguée aux oubliettes. En tant que Canadiens et parlementaires, nous devons non seulement répondre à ce besoin urgent, mais aussi élaborer un plan d'action qui donnera à toutes les familles autochtones la place qui leur revient dans la société canadienne. Les sociétés de logement pour les autochtones possèdent une expertise. Elles ont seulement besoin d'une occasion et d'un transfert de compétences pour faire leur travail.

Honorables sénateurs, ai-je la permission de déposer la pièce jointe dont j'ai parlé?

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Chalifoux: Merci.

(Sur la motion du sénateur Rompkey, le débat est ajourné.)

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 3 novembre 1999, à 13 h 30.)


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