Débats du Sénat (Hansard)
Débats du Sénat (hansard)
3e Session, 37e Législature,
Volume 141, Numéro 9
Le lundi 16 février 2004
L'honorable Dan Hays, Président
- DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
- AFFAIRES COURANTES
- PÉRIODE DES QUESTIONS
- ORDRE DU JOUR
- projet de Loi sur la représentation électorale de 2003
- Projet de loi sur la Bibliothèque et les Archives du Canada
- Le discours du Trône
- Les langues officielles
- Le Code criminel
- Affaires étrangères
- L'étude sur l'application de la Loi sur les langues officielles, les règlements, les instructions et les rapports pertinents
- Règlement, procédure et droits du Parlement
- Peuples autochtones
- La culture du gouvernement libéral
- Agriculture et forêts
- Finances nationales
- Énergie, environnement et ressources naturelles
LE SÉNAT
Le lundi 16 février 2004
La séance est ouverte à 20 heures, le Président étant au fauteuil.
Prière.
[Traduction]
DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
LES EAST COAST MUSIC AWARDS DE 2004
L'honorable Ethel Cochrane: Honorables sénateurs, je félicite tous ceux qui ont participé, au cours du week-end, à la conférence de l'Association de la musique de la côte est de 2004 et à son gala de remise annuelle des prix. Les festivités ont eu lieu à St. John's, à Terre-Neuve- et-Labrador. Elles ont commencé jeudi dernier et ont pris fin hier soir par un spectacle endiablé animé par les humoristes Shawn Majumder et Mark Critch.
Depuis leur création en 1989, les East Coast Music Awards mettent en valeur chaque année le grand talent musical des artistes du Canada atlantique. Comme ont pu le constater les 5 400 spectateurs entassés au Mile One Stadium, ou tous ceux qui ont regardé le spectacle diffusé sur le réseau anglais de Radio-Canada, la région regorge de talents. Nous avons eu droit à d'excellentes prestations de la part d'artistes de renom, comme Jimmy Rankin, Melanie Doane et Crush.
L'événement a connu, aux yeux des gens de ma province, un succès retentissant, car non seulement la remise des prix a eu lieu sur nos rives, mais 21 artistes et groupes de ma province ont été mis en candidature. À la clôture du gala hier soir, dix artistes de la province hôte avaient remporté un prix. Rappelons les gagnants de ma province: le groupe rock Crush a été la formation la plus honorée hier soir, remportant cinq prix, dont le prix du groupe de l'année et de l'artiste de l'année. Damhnait Doyle et Ron Hynes ont chacun obtenu deux prix, et les Ennis Sisters en ont remporté un. Le clou de la soirée a probablement été les retrouvailles de la formation Ryan's Fancy, à qui a été décerné le Dr. Helen Creighton Lifetime Achievement Award pour les nombreuses années pendant lesquelles elle a fait connaître la musique traditionnelle de Terre- Neuve.
Honorables sénateurs, permettez-moi de féliciter les artistes, les organisateurs et les hôtes de la conférence et du gala de remise des prix de l'Association de la musique de la côte est de 2004. Grâce à cet événement, l'association a offert à l'industrie musicale de la région l'occasion exceptionnelle de promouvoir son développement commercial et professionnel. La remise des prix a également donné lieu à l'un des spectacles les plus fabuleux et excitants de la scène musicale du Canada.
[Français]
LE DÉCÈS DE M. GUY PROVOST, C.Q., O.C.
L'honorable Viola Léger: Honorables sénateurs, c'est avec admiration et respect que je rends hommage à un de nos plus grands artistes des arts de la scène, M. Guy Provost.
Depuis plus de soixante ans, Guy Provost a écrit plusieurs pages de l'histoire culturelle du Québec. Grand homme de théâtre et acteur prolifique, il a foulé les planches et illuminé les plateaux à travers des centaines de rôles, incarnant des personnages universels de Bertolt Brecht, Eugene O'Neil, Arthur Miller, John Steinbeck, Bernard Shaw, Michel Tremblay ou Antonine Maillet. Avec sa voix profonde et sa prestance attachante, il a aussi marqué l'histoire de Radio-Canada et de la télévision québécoise, surtout avec le fameux rôle d'Alexis dans le programme populaire Les Belles Histoires des pays d'en haut.
Son magnétisme, sa voix profonde et sa grande écoute en ont fait un partenaire de jeu recherché. J'ai personnellement eu le bonheur de partager la scène au théâtre et au cinéma aux côtés de Guy Provost. Travailler et jouer avec Guy a toujours été un privilège pour moi. Quelle chaleur, quelle générosité, quelle patience! Son départ laissera un grand vide au sein de la colonie artistique.
La carrière de Guy Provost est considérée comme un roc dans le milieu culturel, et il a été couronné par de nombreux prix, entre autres, Chevalier de l'Ordre national du Québec et Officier de l'Ordre du Canada.
En terminant, j'aimerais redire à Guy les paroles qu'Évangéline Deusse lui disait, alors que lui jouait le personnage du Breton, et moi, celui du personnage d'Évangéline. Voici ce qu'Évangéline disait à son Breton:
Vous sarez, à ce temps-là, que l'age a point d'age: que la plus belle des mains c'est c'telle-là qu'a sa vie et son pays gravés dans la paume; que les pus beaux yeux sont ceuses-là qu'avont regardé le monde en face durant toute une vie; et que l'âme d'une parsoune ratatine point, comme sa peau, que ça se ride point, et vieillzit point, et mourra point, non plus.
Merci Guy, et salut!
(2010)
[Traduction]
L'EXPOSITION CANINE WESTMINSTER
LE PRIX DU MEILLEUR PARTICIPANT ATTRIBUÉ À UN TERRE-NEUVE
L'honorable Francis William Mahovlich: Honorables sénateurs, je signale aux sénateurs que, le week-end dernier, à New York, à l'exposition canine Westminster — une exposition canine qui a lieu depuis plus de 128 ans, presque aussi longtemps que le Kentucky Derby — le prix du meilleur participant de 2004 a été décerné à un terre-neuve.
LA RESPONSABILITÉ PARLEMENTAIRE, GOUVERNEMENTALE ET BUREAUCRATIQUE
L'honorable Douglas Roche: Honorables sénateurs, il est évident que le gouvernement, qui est plongé dans une crise profonde en raison des infractions à la loi et du gaspillage, dans le programme de commandites, de millions de dollars provenant de l'argent des contribuables, tentera de trouver les coupables. Le Comité des comptes publics et une commission judiciaire enquêteront sans doute sur cette affaire, qui a scandalisé les Canadiens. Cependant, à mon avis, le système ne changera pas tant que l'attitude de ceux qui occupent des postes de responsabilité ne changera pas.
Les fonctions parlementaires, gouvernementales et bureaucratiques ne sont pas celles d'un club privé. Tous ceux qui font partie de l'administration publique ont une responsabilité à assumer. Les Canadiens nous ont confié la responsabilité de veiller à leurs intérêts — leurs intérêts étant le maintien de l'ordre public, une bonne sécurité, la satisfaction des besoins en santé et en éducation, et une foule d'autres sujets qui concourent au bien-être des Canadiens.
Chaque dollar mal dépensé dans une combine ou une autre est un dollar que le système de santé ne reçoit pas. Chaque dollar empoché par un initié est un dollar que les forces armées ne reçoivent pas pour se doter de matériel convenable. Chaque dollar qui est soutiré aux fins d'enrichissement personnel est un dollar qui n'est pas consacré à l'éducation, à l'environnement, aux sans-abri, à la pauvreté des enfants et à d'autres services sociaux destinés aux plus pauvres.
Le système fédéral ne peut tout simplement pas fonctionner sans cette responsabilité. Il est impossible d'avoir un système de surveillance à toute épreuve pour chaque dollar que renferme le budget fédéral. Oui, il faut renforcer le règlement, mais, en fin de compte, tous ceux qui font partie du système fédéral doivent assumer une responsabilité morale pour protéger l'argent des contribuables.
On peut adopter un code de déontologie, mais il ne sera pleinement appliqué que lorsque l'attitude de tous ceux qui occupent des postes de responsabilité changera. Le système fédéral ne regagnera la confiance des contribuables que lorsqu'il montrera sans exception qu'il mérite cette confiance.
[Français]
AFFAIRES COURANTES
LES LANGUES OFFICIELLES
LE STATUT BILINGUE DE LA VILLE D'OTTAWA—PRÉSENTATION DE PÉTITIONS
L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, conformément au paragraphe 4h) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer en cette Chambre les pétitions de 1 000 autres signataires, pour un total de 26 840, demandant de déclarer Ottawa, la capitale du Canada, ville bilingue, reflétant la dualité linguistique du pays. Les pétitionnaires prient le Parlement de considérer les points suivants:
Que la Constitution du Canada reconnaît le français et l'anglais comme les deux langues officielles de notre pays, ayant un statut et des droits et privilèges égaux quant à leur usage dans les institutions du gouvernement du Canada;
Que l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867 désigne la ville d'Ottawa comme le siège du gouvernement du Canada;
Que les citoyens ont le droit, dans la capitale nationale, d'avoir accès aux services offerts par les institutions du gouvernement du Canada dans la langue officielle de leur choix, soit en français, soit en anglais;
Que la capitale du Canada doit être le reflet de la dualité linguistique qui est au cœur de notre identité collective et qui caractérise la nature même de notre pays;
Par conséquent, les pétitionnaires demandent au Parlement de confirmer dans la Constitution du Canada qu'Ottawa, la capitale du Canada, doit être déclarée officiellement bilingue en vertu de l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867 à 1982.
[Traduction]
PÉRIODE DES QUESTIONS
LES FINANCES
LE RAPPORT DE LA VÉRIFICATRICE GÉNÉRALE—LE PROGRAMME DE COMMANDITES—LA PUBLICATION DES RAPPORTS DE RECHERCHE SUR L'OPINION PUBLIQUE
L'honorable W. David Angus: Honorables sénateurs, comme c'était la Saint-Valentin samedi dernier, nous sommes tous envahis par un sentiment d'amour. Cependant, ce sentiment que j'éprouvais s'est quelque peu évaporé ce matin lorsque j'ai lu que notre premier ministre actuel, du temps où il était ministre des Finances, a conclu d'autres ententes secrètes avec des amis, nommément le groupe Earnscliffe d'Ottawa. Les murmures et chuchotements échangés entre ces deux partenaires, semble-t-il, n'ont pas beaucoup profité aux Canadiens.
Je me reporte au rapport de la vérificatrice générale qui précise dans le chapitre portant sur la gestion de la recherche sur l'opinion publique que les recherches n'ont pas toutes été rendues publiques. En particulier, honorables sénateurs, le paragraphe 5.17 dit ceci:
Les représentants de Communication Canada nous ont expliqué que Communication Canada n'avait pas pu diffuser les résultats de quelques projets de recherche menés pour le compte du ministère des Finances Canada parce que ce dernier a affirmé n'avoir reçu que des rapports verbaux et aucun rapport écrit sur ces projets.
Honorables sénateurs, vu les nombreuses transactions de ce genre qui ont été révélées récemment dans le cadre du scandale des commandites et la nature manifestement irrégulière des transactions qui ont été effectuées dans le cadre de ces programmes, le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il nous expliquer pourquoi ces rapports préparés à l'intention du ministère des Finances du Canada l'ont été de façon tellement secrète et si le gouvernement a l'intention de rendre publics les détails de ces tractations verbales cachées, d'autant plus que le premier ministre a affirmé son intention de faire preuve d'une grande transparence à l'égard des Canadiens?
L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, j'aimerais tout d'abord dire quelques mots sur l'expérience amoureuse qu'a vécue le sénateur Angus la fin de semaine dernière. À entendre ses questions, je commence à comprendre le sens de l'expression «qui aime bien châtie bien».
Comme les sénateurs le savent — et comme le gouvernement l'a expliqué — la recherche sur l'opinion publique dont la vérificatrice générale a parlé dans son rapport et qui a été effectuée par la société Earnscliffe s'est servie de renseignements recueillis par des tiers pour produire une analyse stratégique. C'est-à-dire que d'autres ont recueilli les données, mais le travail accompli a fait l'objet de rapports verbaux au ministère des Finances et ne se présente donc pas sous la forme de rapports écrits.
(2020)
Le sénateur Angus: Honorables sénateurs, je ne suis pas surpris par la réponse du leader du gouvernement. Comme la vérificatrice générale l'a ajouté, les représentants de Communication Canada nous ont expliqué que le ministère disait n'avoir reçu que des rapports verbaux et aucun rapport écrit sur ces projets.
Le leader du gouvernement pourrait-il nous dire si le ministère des Finances était le seul à avoir ces accords secrets sans support papier? D'autres ministères ont-ils également reçu seulement des rapports verbaux et, dans l'affirmative, peut-on nous donner des détails et les montants des marchés passés avec ces ministères?
Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, dans la mesure où il m'est possible d'obtenir cette information, je serais heureux de la dévoiler. Je ne suis pas certain que la meilleure tribune pour répondre à la question de l'honorable sénateur soit la période des questions. Il serait peut-être plus approprié de soumettre une question écrite. Je pourrais alors la transmettre aux ministères compétents.
Le sénateur Angus: Honorables sénateurs, si je comprends bien, le leader et le gouvernement affirment qu'aucun rapport écrit n'a été remis au groupe Earnscliffe. En quoi les transactions entre le ministère des Finances, sous la direction de l'actuel premier ministre, et les braves gens de Earnscliffe diffèrent des transactions entre le gouvernement et l'entreprise Groupaction dans le cas des rapports qui n'ont jamais été soumis ou du travail qui n'a jamais été effectué? Quelle preuve la population canadienne a-t-elle que du travail a été effectué pour 178 000 $? Il se peut que le gouvernement juge ce montant négligeable comparativement aux 250 millions de dollars.
Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, la réponse est si évidente que je suis surpris que la question ait été posée. Dans le cas du ministère des Finances, des séances d'information ont eu lieu; l'avis stratégique a été donné; le ministère en a eu pour son argent.
Le sénateur Kinsella: Comment le savons-nous?
Le sénateur Angus: Honorables sénateurs, il y a un nouveau phénomène au Québec en ce moment. Je ne suis pas certain que tout le monde connaisse encore ce terme, mais il deviendra familier pour tout le monde. Il s'agit de la bougonmanie, en l'honneur d'une nouvelle émission de télévision très populaire appelée Les Bougon, qui passe au Québec. Les personnages sont des parasites qui passent leur temps à essayer de trouver des façons de contourner le système au Québec. Les Québécois adorent cette émission et les cotes d'écoute montent en flèche.
Ma question au leader du gouvernement est la suivante: est-ce en raison de la grande popularité de cette émission, qui met en scène des transactions douteuses, que le gouvernement a l'intention de déclencher des élections en mai?
LES TRAVAUX PUBLICS ET LES SERVICES GOUVERNEMENTAUX
LE PROGRAMME DE COMMANDITES—LES MARCHÉS ACCORDÉS À L'AGENCE GOSSELIN COMMUNICATIONS
L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, toujours au sujet du scandale de la corruption, qui fait maintenant partie de notre culture, j'ai une question pour le leader du gouvernement. Le premier ministre a dit qu'il retrouverait les agences de publicité libérales qui ont escroqué les contribuables pour un quart de milliard de dollars, et les obligerait à rendre une partie de l'argent. La société Gosselin est l'une de ces agences. L'an dernier, elle s'est adressée aux tribunaux pour récupérer 323 000 $ qu'elle réclamait du gouvernement pour des services rendus. Gosselin a eu gain de cause le 9 décembre, alors que Jean Chrétien était à la tête du gouvernement. En janvier, sous la direction de Paul Martin, le gouvernement a signé un chèque à la société Gosselin. Le leader du gouvernement peut-il dire au Sénat pourquoi le gouvernement Martin a choisi de ne pas en appeler de cette décision judiciaire?
L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je pourrais évidemment demander au ministère de la Justice de nous fournir ses raisons, mais cette décision ne serait pas prise au niveau politique. Elle relève des conseillers juridiques du ministère de la Justice.
De toute évidence, si les tribunaux concluent à l'existence d'une obligation, peu importe que ce soit sous le gouvernement Mulroney, sous le gouvernement Chrétien ou sous l'actuel gouvernement: si les tribunaux jugent que des fonds sont dus, je suis certain que s'il y réfléchit un instant, le sénateur Tkachuk arrivera à la conclusion qu'il faut se conformer à cette décision.
Le sénateur Tkachuk: Honorables sénateurs, cette somme de 323 000 $ rentre-t-elle dans les 142 000 $ que le gouvernement a payés à la société Gosselin au titre de sa commission de 12 p. 100 pour le transfert des fonds du programme de commandites à la société L'Information essentielle pour la production de la série télévisée sur Maurice Richard? Ou dans les 141 000 $ qu'elle a reçus du gouvernement au titre de sa commission de 12 p. 100 pour le transfert de fonds à la GRC? Ou dans les 114 000 $ qu'elle a encaissés au titre des frais de production associés à la commandite gouvernementale de la GRC?
Le sénateur Austin: Pourquoi ne laissons-nous pas le Comité des comptes publics de l'autre endroit et l'enquête judiciaire répondre à ces questions?
LE PROGRAMME DE COMMANDITES—LES MARCHÉS ACCORDÉS À L'AGENCE LAFLEUR COMMUNICATION MARKETING
L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, un procès a également été intenté contre le gouvernement par une autre agence de publicité libérale, en l'occurrence la société Lafleur Communication Marketing, pour une somme de 211 000 $. Le leader du gouvernement pourrait-il indiquer au Sénat si ce procès est lié à la commission de 12 p. 100 revenant à la société Lafleur pour avoir transféré de l'argent à diverses sociétés d'État? Ce procès est-il également lié aux 142 000 $ que Lafleur Communication Marketing a aussi obtenus à titre de commission de 12 p. 100 pour avoir transféré de l'argent à la série télévisée sur Maurice Richard? A-t-il un lien avec les 30 000 $ que Lafleur a reçus pour transférer de l'argent à la série télévisée Le Canada du Millénaire? A-t-il aussi quelque chose à voir avec les 180 000 $ que cette même société a obtenus pour l'achat d'un écran géant pour le Vieux-Port de Montréal?
L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je donne à l'honorable sénateur la même réponse claire et succincte que j'ai donnée à la dernière question.
Le sénateur Tkachuk: Quelle était cette réponse?
Le sénateur Austin: Si l'honorable sénateur n'arrive pas à remonter jusque-là dans ses souvenirs, je répète ma réponse qui est la suivante: les processus mis en oeuvre par le Comité des comptes publics de l'autre endroit et l'enquête judiciaire ont pour objet de fournir des réponses à ces questions et le feront certainement, en temps et lieu.
Le sénateur Tkachuk: Nous demandions simplement...
Le sénateur Austin: Pourquoi ne seriez-vous pas courtois? Ce n'est pas là une réaction courtoise.
Le sénateur Tkachuk: Cette affaire fait la manchette des journaux depuis les dernières semaines. En fait, à bien y penser, elle fait la manchette depuis quelques années. La vérificatrice générale a soulevé cette question dans des rapports antérieurs. En outre, on en a parlé à la période des questions dans l'autre endroit. La vérificatrice générale a maintenant présenté ses conclusions sur la question dans le rapport qu'elle a déposé la semaine dernière, pour que l'ensemble des Canadiens puissent comprendre de quoi il retourne. Pourtant, vous me dites, après tout ce temps, qu'aucun de vos ministres et que personne d'autre dans les ministères, ni vous- même n'êtes au courant de quoi que ce soit à cet égard et que personne n'a pris la peine de faire enquête sur ces faits afin de faire un rapport à la Chambre des communes, qui est l'autorité compétente en la matière?
Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, avec tout le respect que je dois au sénateur Tkachuk, je lui réponds qu'il est de toute évidence mieux informé sur ces questions que d'autres personnes dans cette enceinte. J'ajoute néanmoins que l'information la plus pertinente viendra des processus dont j'ai fait mention précédemment.
LE PARLEMENT
LA CONFIANCE DANS LES INSTITUTIONS GOUVERNEMENTALES
L'honorable Laurier L. LaPierre: Honorables sénateurs, ma question n'est pas d'ordre politique; elle concerne l'intérêt et les préoccupations profondes des Canadiens. La démocratie canadienne est mal en point. Ce profond malaise s'explique en partie par le manque de participation. La capacité d'influencer est inexistante. En outre, chaque jour un scandale quelconque éclate et fait la une des journaux. De tels scandales amènent le public à avoir une mauvaise opinion de ceux qui siègent ici et à l'autre endroit. Honorables sénateurs, il faudra, tôt ou tard, trouver une façon de rétablir la confiance des Canadiens dans les institutions qu'ils élisent ou qui les gouvernent.
(2030)
Je signale au leader du gouvernement de mon parti au Sénat, à titre de membre du gouvernement canadien que j'appuie, que le temps est venu de réfléchir sérieusement à ce que nous pouvons faire pour combler ce manque de confiance. Je suggère, de façon très humble, au leader du gouvernement, qu'à mon retour d'Angleterre, après avoir admiré les somptueux symboles de la royauté...
Son Honneur le Président: Je rappelle aux honorables sénateurs que le préambule de leurs questions doit être bref, tout comme les questions et les réponses.
Sénateur LaPierre, vous voulez bien poser votre question?
Le sénateur LaPierre: Je fais remarquer que les conservateurs posent également des questions extrêmement longues.
Ma question est la suivante: comment pouvons-nous aborder cette question et comment pouvons-nous ranimer la confiance des Canadiens à l'égard de leurs institutions gouvernementales?
L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le sénateur LaPierre souligne un point fondamental: tous les rouages de notre système de gouvernement reposent sur la confiance. Dans les présentes circonstances, alors qu'il semble qu'on ait dérogé aux règles du gouvernement sur la passation de contrats et la dépense des fonds publics, il est essentiel que le gouvernement soit ouvert et cherche par tous les moyens à aller au fond des choses. C'est exactement ce que nous faisons en demandant une enquête judiciaire parlementaire pour que la population sache que tous les faits seront mis au jour, que l'enquête sera menée sur tous les fronts et même sur les points soulevés par le sénateur Tkachuk. Nous voulons tout savoir et la population du Canada veut aussi tout savoir.
Le premier ministre Martin a déclaré que les responsables et ceux qui ont commis un crime payeront le prix approprié, qu'ils subiront la peine correspondant à leur inconduite.
LA VÉRIFICATRICE GÉNÉRALE
LE RAPPORT SUR LE PROGRAMME DE COMMANDITES—LA PARTICIPATION DES SOCIÉTÉS D'ÉTAT
L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, le premier ministre a critiqué, avec raison, la réaction de certaines sociétés d'État au rapport de la vérificatrice générale. Les faits entourant la participation de ces sociétés d'État ont été présentés de manière très détaillée dans le rapport de la vérificatrice générale et la question suivante s'impose: le gouvernement songe-t-il à apporter des changements à la direction de ces sociétés d'État ou les changements devront-ils attendre la présentation du rapport de l'enquête judiciaire?
Autrement dit, le Parlement et le pays ont le droit de savoir si les cadres supérieurs de VIA Rail et de Postes Canada ont toujours la confiance du gouvernement. Quelle est la réponse à cette question?
L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, la réponse est que pour le moment, ces gens demeurent en poste parce qu'aucun fait n'a été établi qui nous permettrait d'adopter une autre ligne de conduite.
La vérificatrice générale a présenté des rapports. Les sociétés d'État n'ont pas fourni de réponses publiques sauf celles qui sont dévoilées dans le rapport de la vérificatrice générale. Le président du Conseil du Trésor, au nom du gouvernement, a dit très clairement qu'il tiendrait des discussions et ferait enquête auprès de ces sociétés d'État.
Une fois ces discussions terminées, le gouvernement aura peut- être d'autres déclarations à faire.
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
LE RAPPORT DE LA VÉRIFICATRICE GÉNÉRALE—LE PROGRAMME DE COMMANDITES—LE RAPPEL DE L'AMBASSADEUR DU CANADA AU DANEMARK
L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): J'apprécie la considération accordée aux dirigeants des sociétés d'État en attendant leur version, et c'est très bien de faire ainsi. Pourquoi ne pas accorder la même considération à l'ambassadeur Gagliano?
L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai répondu à cette question à maintes reprises, c'est-à- dire que...
Le sénateur Lynch-Staunton: Non, vous ne l'avez pas fait.
Le sénateur Austin: ... l'ambassadeur est nommé à titre amovible et que, compte tenu des allégations contenues dans le rapport de la vérificatrice générale qui, bien que ne mentionnant pas nommément M. Gagliano, y fait référence par ses fonctions, il a semblé approprié que le gouvernement le démette de ses fonctions. M. Gagliano ne pouvait plus exercer efficacement ses fonctions d'ambassadeur du Canada sous la pression d'allégations internes. Il a donc été rappelé.
Le sénateur Lynch-Staunton: Les mêmes allégations concernant M. Gagliano avaient été faites avant sa nomination. Pourquoi estimait- on alors qu'il avait les qualités requises pour être ambassadeur en dépit de ces allégations et pourquoi estime-t-on maintenant qu'il ne les a plus en raison d'allégations semblables? Je ne comprends pas la logique de ce raisonnement.
Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, je ne peux dire pourquoi l'ambassadeur Gagliano a été nommé ambassadeur au Danemark. Cette nomination n'a pas été faite par le gouvernement actuel et je n'appartenais pas à ce ministère. J'ai expliqué pourquoi il a été rappelé.
LE PARLEMENT
LE PROGRAMME D'ENREGISTREMENT DES ARMES À FEU—LA POSSIBILITÉ D'UN VOTE LIBRE SUR SON BUDGET ET SON AVENIR
L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, le premier ministre a déclaré hier aux auditeurs de l'émission Cross Country Checkup, du réseau anglais de la SRC, que le vrai problème du programme de commandites était que le Parlement n'avait plus la capacité d'examiner les dépenses du gouvernement. Il a également dit que les parlementaires devraient avoir la capacité de remettre en cause tout article de dépense.
Je pose donc la question suivante au ministre: la nouvelle transparence va-t-elle s'appliquer également au budget du registre des armes à feu? Les députés pourront-ils remettre en cause le budget du registre des armes à feu et voter à ce sujet à l'abri du whip? Autrement dit, y aura-t-il un jour un vote libre sur le budget du registre des armes à feu?
L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Le sénateur Comeau pourrait-il nous dire s'il nous pose une question au sujet de la procédure de l'autre endroit?
Le sénateur Comeau: C'est bien ça.
Le Sénateur Austin: Honorables sénateurs, je ne puis pour le moment donner une réponse sur la procédure de l'autre endroit.
Le sénateur Comeau: Honorables sénateurs, permettez-moi de reformuler ma question. Les sénateurs pourront-ils voter librement, sans consigne, sur les estimations du registre des armes à feu, lorsque pareilles estimations seront présentées au Sénat?
Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, je devrai consulter mes collègues de ce côté-ci avant de répondre à cette question.
Le sénateur Comeau: Honorables sénateurs, je soulève cette question parce que le premier ministre a crié sur tous les toits que les choses allaient changer. J'ai écouté attentivement ses propos hier quand il a dit que nous entrons dans une ère nouvelle. C'est un tout nouveau gouvernement — je vois les mêmes figures en face, mais je vais leur donner le bénéfice du doute —, c'est une nouvelle équipe qui est en place, et on nous a dit que les choses allaient changer.
Nous apprenons en outre, dans le rapport Hession, qu'un montant supplémentaire de 400 millions de dollars dépensé pour le registre des armes à feu n'avait pas été déclaré. Je crois qu'il s'agissait des logiciels auxquels le premier ministre faisait allusion, hier, en parlant de coûts irrécupérables.
Au cours d'une émission de la CBC diffusée la semaine dernière, si je ne m'abuse, nous avons appris que le coût du registre des armes à feu s'élève maintenant à deux milliards de dollars et que ce n'est pas fini. N'y a-t-il pas lieu de croire que les Canadiens voudront que nous agissions dans ce supposé esprit de coopération et dans cette nouvelle atmosphère parlementaire, en tant que parlementaires maintenant libres de voter contre l'enregistrement des armes à feu et en faveur de l'investissement de l'argent durement gagné des Canadiens là où le besoin s'en fait sentir, soit dans la santé et d'autres secteurs vitaux pour les Canadiens?
Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, je dirai d'abord que j'ai aucune idée d'où viennent les deux milliards de dollars dont il est question dans le journal parce que...
Le sénateur Comeau: La CBC.
Le sénateur Austin: Je ne sais toujours pas sur quoi ce chiffre est fondé.
(2040)
Le sénateur Lynch-Staunton: Pouvez-vous le nier?
Le sénateur Tkachuk: Niez ou démissionnez.
Le sénateur Lynch-Staunton: Il n'était pas membre de ce gouvernement non plus.
Le sénateur Austin: Quant au reste de la question, les honorables sénateurs savent que le premier ministre Martin a nommé un ministre d'État, l'honorable Albina Guarnieri, qui est chargée de revoir tout le programme d'enregistrement des armes à feu et de conseiller ensuite le gouvernement.
LA JUSTICE
L'EXAMEN DU PROGRAMME D'ENREGISTREMENT DES ARMES À FEU
L'honorable Gerald J. Comeau: Je crois comprendre que le premier ministre lui a dit qu'elle pouvait faire cette étude à une condition: il ne fallait pas remettre en cause l'existence du registre. Elle peut envisager toutes les possibilités, sauf l'abandon du registre. Elle peut étudier la question ad vitam aeternam. Le premier ministre a parlé hier d'«un certain coût». Ces coûts ne sont plus là. Si elle ne peut étudier la question du maintien du registre, quel genre d'étude peut- elle faire? Cela ne vaut rien.
L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Au contraire, honorables sénateurs, la majorité des Canadiens souhaitent le maintien du registre. Tous les sondages l'ont démontré.
Dans ce contexte, il y a probablement des milliers de questions à poser sur le fonctionnement du registre, sur sa portée, sur les renseignements à produire, sur l'accès que la police doit y avoir. Il y a aussi les questions plus théoriques, par exemple l'efficacité du registre comme moyen de prévenir le crime ou de démasquer ceux qui ont commis des crimes.
J'estime que cette étude est extrêmement valable. Ce qui me préoccupe, c'est qu'elle risque de prendre plus de temps que je ne le voudrais, à cause de la nature de l'étude et du nombre de questions à aborder. Je crois que les Canadiens voudraient avoir des réponses assez rapides à des questions cruciales.
L'honorable Herbert O. Sparrow: Honorables sénateurs, je ne crois pas que nous ayons reçu une réponse à savoir si le chiffre de deux milliards de dollars est correct. Dans le cadre des demandes d'accès à l'information, la chaîne anglaise de Radio-Canada a indiqué qu'une somme de deux milliards de dollars a été dépensée ou engagée dans le programme fédéral depuis sa mise en place au milieu des années 90. La différence est grande par rapport aux deux millions de dollars considérés d'abord, lorsque l'enregistrement a commencé. Nous avons atteint le milliard de dollars et maintenant, cette somme a grimpé à deux milliards de dollars. J'aimerais savoir si ce chiffre est réaliste. Le leader du gouvernement au Sénat peut-il expliquer si cette somme est réaliste? Peut-il trouver la réponse s'il ne peut nous la fournir ce soir?
Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, je n'ai pas la réponse ce soir. Je suis au courant de l'histoire et je suis sceptique concernant la véracité de la dépense ou de l'engagement d'une somme de deux milliards de dollars. Cependant, je me charge de faire des recherches et de fournir l'information au Sénat.
L'honorable Pat Carney: Honorables sénateurs, étant donné que le ministre se charge de rechercher l'information demandée, pourrait-il fournir les renseignements au Comité sénatorial permanent des finances nationales, présidé par l'inestimable sénateur Lowell Murray, aussitôt qu'il en disposera?
Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, je prendrai la question en délibéré. Je ne suis pas sûr maintenant de la réponse ni en quoi elle consiste, ni même si l'ensemble du Sénat est intéressé à obtenir des renseignements de ce genre.
Le sénateur Carney: Allons donc! Nous sommes bien sûr intéressés.
[Français]
L'ACTION INTENTÉE EN COUR FÉDÉRALE PAR LE FORUM DES MAIRES DE LA PÉNINSULE ACADIENNE—APPEL DE LA DÉCISION PAR LE GOUVERNEMENT
L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Je lui ai donné avis de cette question.
Le 8 septembre 2003, le juge Pierre Blais de la Cour fédérale donnait raison au Forum des maires de la péninsule acadienne qui s'opposait à l'Agence canadienne d'inspection des aliments voulant transférer les postes de quatre inspecteurs du nord au sud de la péninsule acadienne.
Les communautés de langues officielles étaient satisfaites de ce jugement. Il s'agissait de l'une des rares fois qu'un juge de la Cour fédérale interprétait de façon généreuse la portée de l'article 41 de la Partie VII de la Loi sur les langues officielles. Nous sommes plusieurs à soutenir que l'article 41 est exécutoire plutôt que déclaratoire, comme le prétend le gouvernement.
Tous les sénateurs savent que depuis quelques années, je présente au Sénat un projet de loi visant à clarifier l'article 41 de la Partie VII de la Loi sur les langues officielles afin de le rendre exécutoire.
Or, voilà que le gouvernement en appelle de cette décision. Au même moment, la commissaire aux langues officielles a demandé à la Cour fédérale d'être reconnue comme intervenante dans cette cause. Les membres du Comité sénatorial permanent des langues officielles ont appuyé cette demande.
La question est simple: le gouvernement a-t-il l'intention de revenir sur sa décision en assumant toutes les responsabilités en ce qui a trait à la mise en œuvre de la Partie VII de la Loi sur les langues officielles afin de protéger, promouvoir le développement des communautés de langues officielles et travailler à l'égalité et à la pleine reconnaissance du français et de l'anglais dans la société canadienne?
[Traduction]
L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Je remercie le sénateur Gauthier de m'avoir envoyé un avis écrit de cette question. Je l'ai reçu vers la fin de l'après-midi. Je n'ai pas eu l'occasion de poser des questions au ministère de la Justice pour connaître les motifs d'un appel. Je vais continuer de m'occuper des questions plus précises que le sénateur Gauthier a soulevées et je m'efforcerai de lui répondre dans les meilleurs délais.
LE PATRIMOINE
LE RAPPORT DE LA VÉRIFICATRICE GÉNÉRALE—L'ÉTAT DES SITES, DES DOCUMENTS ET DES ARTEFACTS HISTORIQUES
L'honorable Brenda M. Robertson: Honorables sénateurs, il est malheureux que dans la fureur provoquée par le scandale des commandites, d'autres parties du rapport de la vérificatrice générale n'aient pas beaucoup retenu l'attention.
La vérification du patrimoine culturel, une des premières de ce type dans le monde, a révélé une très mauvaise situation. Il a été constaté que plus des deux tiers de nos sites historiques sont dans une condition qui va de mauvaise à passable, et que certains d'entre eux pourraient être perdus à jamais s'ils ne sont pas réparés au cours des prochaines années. Le rapport a affirmé que le financement fédéral du patrimoine culturel au titre de l'année financière 2001 était de 14 millions de dollars inférieur à ce qu'il était en 1990-1991 sous le régime du gouvernement conservateur précédent. Le gouvernement fédéral semble penser qu'il y a de l'argent en abondance pour les sociétés de publicité amies des libéraux, mais pas assez pour sauver nos sites et édifices historiques en décrépitude.
Le leader du gouvernement au Sénat peut-il nous dire ce que le gouvernement compte faire en réponse aux avertissements de la vérificatrice générale, selon laquelle nos sites historiques se détériorent rapidement?
L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je partage l'inquiétude de l'honorable sénateur Robertson au sujet de la partie du rapport de la vérificatrice générale qui porte sur les sites patrimoniaux. On m'a informé qu'une évaluation du rapport de la vérificatrice générale est en cours. Je sais qu'il se fait des représentations auprès du ministre des Finances en ce qui concerne le prochain budget et j'espère certainement qu'elles aboutiront.
Il y a des sites ici à Ottawa, que les Canadiens connaissent bien, et qui ont un besoin urgent de réparations. Malheureusement, je fais allusion au 24, Promenade Sussex, qui, à mon avis, est dans un état...
Le sénateur Tkachuk: Vous y êtes allé?
Le sénateur Austin: J'y suis allé, oui, et je donne mon opinion personnelle.
Le sénateur Angus: Profitez-en pendant que vous le pouvez.
Le sénateur Austin: Ce site est dans un état tel qu'il a besoin d'être sauvegardé et beaucoup d'autres sites au Canada se trouvent dans la même situation. Aucun doute, je suis tout aussi préoccupé que l'honorable sénateur Robertson.
Le sénateur Robertson: Honorables sénateurs, nos documents et artefacts historiques sont également en danger, d'après le rapport de la vérificatrice générale. Plus de 90 p. 100 de la collection de la Bibliothèque nationale est entreposé dans des bâtiments qui ne respectent pas les normes d'espace, de température et d'humidité pour de tels documents. Il existe un retard accumulé considérable dans le traitement des archives, y compris de documents ministériels remontant à 35 ans.
Le leader du gouvernement au Sénat peut-il nous dire si le gouvernement fédéral entend, pour ce qui a trait aux archives canadiennes, laisser choir celles-ci dans le même état de négligence et d'altération que celui de nos sites historiques ou s'il entend investir afin de contribuer à remédier à ce grave problème?
(2050)
Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, la vérificatrice générale a rendu un grand service aux Canadiens en soulignant l'état de réparation, ou son manque, du patrimoine et des sites historiques canadiens. Résultat: on se préoccupe sérieusement du problème qu'elle a soulevé, et il est à espérer que cette préoccupation se traduira par les représentations non seulement du sénateur Robertson mais également de bien d'autres, de sorte que le gouvernement se concentre sur des mesures correctrices.
RÉPONSE DIFFÉRÉE À UNE QUESTION ORALE
L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de présenter la réponse différée à la question orale posée par l'honorable sénateur Beaudoin le 10 février 2004 concernant la cause québécoise des congés parentaux au titre de l'assurance-emploi.
LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES
LE JUGEMENT DE LA COUR D'APPEL DU QUÉBEC DÉCLARANT INCONSTITUTIONNELS LES PROGRAMMES FÉDÉRAUX DE CONGÉ PARENTAL ET DE CONGÉ DE MATERNITÉ
(Réponse à la question posée par l'honorable Gérald-A. Beaudoin le 10 février 2004)
Le gouvernement du Canada examine attentivement la décision de la Cour dans cette affaire. Il évalue les conséquences de même que ses options.
Le gouvernement fédéral dispose de 30 jours à partir de la date à laquelle la Cour a émis sa décision pour interjeter appel, c'est-à-dire jusqu'au 26 février.
Nous avons entamé des discussions auprès de la province du Québec sur cette question.
L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, au sujet de réponses différées, peut-être pourrions-nous demander au leader adjoint du gouvernement à quel moment nous pouvons espérer une réponse à la question posée par le sénateur Angus au leader du gouvernement vendredi dernier?
L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement): Nous traitons les réponses aux questions orales aussi rapidement que possible.
ORDRE DU JOUR
PROJET DE LOI SUR LA REPRÉSENTATION ÉLECTORALE DE 2003
DEUXIÈME LECTURE—REPORT DU DÉBAT
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Smith, c.p., appuyée par l'honorable sénateur Robichaud, C.P., tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-5, Loi sur la date de prise d'effet du décret de représentation électorale de 2003.
Des voix: Le vote.
L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Reporté.
Son Honneur le Président: Reporté? Le débat est-il reporté?
Le sénateur Kinsella: Pourquoi sommes-nous ici ce soir?
Le sénateur Austin: Pour écouter le sénateur Lynch-Staunton.
Le sénateur Rompkey: Reporté.
L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Honorables sénateurs, pardonnez-moi, mais j'invoque le Règlement. Le sénateur Austin vient de dire que nous sommes revenus ce soir pour écouter le sénateur Lynch-Staunton. J'exige des excuses. Je rappelle au sénateur qu'il n'est pas ici pour m'écouter, mais pour mener les affaires du gouvernement. Je n'ai jamais dit que j'interviendrais ce soir sur quelque sujet que ce soit. Je n'ai pas été consulté. On ne m'a rien demandé. Je n'ai pas été approché. Le sénateur a tout à fait tort de dire que «nous ne sommes ici que pour écouter le sénateur Lynch-Staunton ce soir». J'exige des excuses.
L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Je récapitule les faits. Le sénateur Kinsella a demandé pourquoi nous étions ici ce soir et j'ai dit que c'était pour écouter le sénateur Lynch-Staunton parce que son nom figure à l'ordre du jour. Il a proposé l'ajournement du débat sur le projet de loi C-5 et personne ne m'a dit qu'il n'interviendrait pas ce soir. Je croyais que les sénateurs de l'opposition avaient très hâte de poursuivre le débat sur ce sujet précis.
Le sénateur Lynch-Staunton: C'est de la foutaise. Nous ne sommes pas pressés de discuter des affaires du gouvernement. Qu'est-ce que cela veut dire? De quoi parle donc le leader du gouvernement? On nous reproche de ne pas nous empresser de traiter des affaires du gouvernement. On ne m'a jamais demandé d'intervenir ce soir. J'ai passé la journée à Halifax et j'ai dit au leader adjoint, au cas où on le lui demanderait, que je n'étais pas prêt à intervenir ce soir parce que je n'avais pas encore lu les observations que le sénateur Smith a formulées lorsqu'il a présenté le projet de loi. J'espérais être prêt demain. Après cette insulte, je crois que je vais attendre un peu plus longtemps.
Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, comprenons-nous bien en ce qui concerne ce recours au Règlement. Il est ici question d'une initiative ministérielle. Lorsqu'il y a ajournement, le débat n'est pas ajourné au nom d'un autre sénateur. Il est ajourné au nom du gouvernement. L'honorable leader du gouvernement au Sénat voudra peut-être en prendre bonne note; le débat sur les initiatives ministérielles est ajourné au nom du gouvernement.
Le sénateur Austin: Je ne suis pas certain de comprendre la nature du recours au Règlement, honorables sénateurs, mais le débat sur le projet de loi C-5 a été ajourné au nom du sénateur Lynch-Staunton. La simple courtoisie de notre part consistait à lui donner la possibilité de prendre la parole. Je n'ai pas entendu dire qu'il ne prendrait pas la parole ce soir. Ce n'est pas la seule raison pour laquelle le Sénat siège ce soir, mais c'est l'une des raisons pour lesquelles je croyais que nous étions ici.
Le sénateur Lynch-Staunton: Je vais soulever une question de privilège demain, car la lecture du compte rendu de nos délibérations montrera que le leader du gouvernement a dit que nous étions réunis ici ce soir pour entendre le sénateur Lynch- Staunton.
Le sénateur Austin: C'est effectivement le cas.
Le sénateur Lynch-Staunton: Si le sénateur ne s'excuse pas d'avoir dit cela ce soir, je soulèverai une question de privilège demain.
Son Honneur le Président: Je pense que c'est peut-être la meilleure façon de procéder, honorables sénateurs.
Parfois le microphone n'est pas en fonction lorsque nous sommes assis, et je n'entends pas le mot «reporté». Nous allons devoir ralentir un peu afin que je puisse entendre. Je veux être certain.
Le débat est-il reporté?
Le sénateur Rompkey: Reporté.
(Le débat est reporté.)
PROJET DE LOI SUR LA BIBLIOTHÈQUE ET LES ARCHIVES DU CANADA
PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT
L'honorable Laurier L. LaPierre propose: Que le projet de loi C-8, Loi constituant Bibliothèque et Archives du Canada, modifiant la Loi sur le droit d'auteur et modifiant certaines lois en conséquence, soit lu pour la deuxième fois.
— Honorables sénateurs, le paragraphe 8(2) du projet de loi C-8 propose de modifier la Loi sur le droit d'auteur afin de permettre à l'administrateur général de constituer, à des fins de préservation, des échantillons représentatifs des éléments d'information accessibles au public sans restriction dans Internet.
Essentiellement, ce dont il est question ici, ce soir, c'est d'une loi visant la fusion de deux institutions qui forment la mémoire des Canadiens, soit les Archives nationales du Canada et la Bibliothèque nationale du Canada, et il s'agit du projet de loi C-8.
Les Archives nationales du Canada, établies en 1872, sont l'une des institutions culturelles les plus anciennes. Depuis le début, cette institution a eu un mandat culturel général plutôt qu'un mandat uniquement administratif et elle a joué un rôle clé dans l'établissement de l'étude historique du Canada.
La Bibliothèque nationale du Canada a été fondée en 1953 à la suite de recommandations formulées par la Commission royale d'enquête sur l'avancement des arts, lettres et sciences, et en raison des préoccupations d'après-guerre quant à la sauvegarde de la mémoire collective du Canada et d'un besoin de renforcer les ressources culturelles canadiennes. La base de la collection de la nouvelle Bibliothèque nationale, créée en 1953, était constituée du dépôt légal de copies de publications canadiennes conservées jusque- là par la Bibliothèque du Parlement en vertu de la Loi canadienne sur le droit d'auteur. Jusqu'en 1968, l'administration de la Bibliothèque nationale et des Archives Nationales était assurée par une seule personne.
Dans le discours du Trône de 2002, le gouvernement annonçait son intention de créer une nouvelle institution du savoir, appelée Bibliothèque et Archives Canada, pour mieux servir les Canadiens au cours du XXIe siècle. Bibliothèque et Archives Canada est une institution du savoir novatrice ayant le mandat général de préserver et de faire connaître le patrimoine documentaire canadien et d'en promouvoir l'accès facile et intégré. À titre d'historien, je l'apprécie infiniment.
Cette mesure était également recommandée, jusqu'à un certain point, dans le rapport John English, il y a quelques années, mais on n'y avait jamais donné suite.
[Français]
Honorables sénateurs, c'est pour moi un plaisir de vous parler du projet de loi C-8 qui traite de la Loi constituant Bibliothèque et Archives du Canada. En tant qu'historien et en tant que Canadien, je suis très fier que ce projet de loi soit un des premiers présentés à cette honorable enceinte. J'en suis fier parce qu'il établira une institution du savoir dont tous les Canadiens et Canadiennes bénéficieront pendant de multiples générations à venir. J'en suis également fier parce que cette loi contribuera à protéger l'histoire et la culture que nous partageons tous et qui sont le fondement même de notre identité nationale.
Ce projet de loi ne pouvait pas arriver à un moment plus opportun, comme nous l'avons appris dans le rapport de la vérificatrice générale.
(2100)
[Traduction]
La vérificatrice générale a abordé un grand nombre de questions dans son excellent rapport, outre celles qui font les manchettes. L'une d'entre elles concerne la situation inquiétante du patrimoine culturel du pays. Je suis très heureux de pouvoir parler du patrimoine culturel du Canada parce que, malheureusement, il n'y a pas de comité sénatorial permanent pour s'occuper de l'âme du pays, de son patrimoine et de sa culture. Ces questions ne sont traitées qu'accessoirement par un autre comité. Il est donc très important de dire que le temps est venu de faire quelque chose pour corriger cette situation. C'est pourquoi la vérificatrice générale n'a pas cherché à édulcorer ses paroles.
D'après la déclaration rendue publique mardi:
Le patrimoine [...] archivistique et de l'édition administré par le gouvernement fédéral est exposé à de sérieux risques de pertes.
La vérificatrice générale a poursuivi en disant:
Plus de 90 p. 100 des collections de la Bibliothèque nationale du Canada sont gardées à des taux d'humidité qui ne répondent pas aux normes reconnues de conservation.
Honorables sénateurs, 90 p. 100 de tout notre patrimoine documentaire est menacé. Qu'est-ce que cela signifie plus précisément, en pratique? Le rapport l'explique bien clairement. Il précise que depuis 1988, la Bibliothèque nationale a connu 116 incidents environnementaux, dont quelque 60 dus à des inondations et à un excès de chaleur qui ont endommagé environ 30 000 documents parmi les vastes collections de la bibliothèque.
Le coût estimatif minimum pour réparer ou remplacer les documents endommagés s'élève à 4,5 millions de dollars. La Bibliothèque nationale ne connaît pas le nombre exact de documents qui sont irrévocablement perdus.
Mais il ne s'agit pas seulement de ces dégâts. Certaines collections de la Bibliothèque nationale sont surchargées. D'après une étude interne de la Bibliothèque, réalisée en 1999, la collection de journaux se détériore rapidement. À moins qu'on ne la numérise, qu'on la mette sur microfilm ou que l'on fasse appel à un autre mécanisme de conservation, elle disparaîtra complètement. La durée de vie prévue de ces journaux, qui constituent une véritable image de notre histoire au jour le jour, la durée de vie de ces importants documents de notre histoire collective en tant que peuple est très limitée.
Ce qui se produit n'est rien de moins que la disparition de notre mémoire collective. Au fur et à mesure que nous perdons notre histoire, nous perdons aussi notre identité. Le Sénat a été témoin d'un grand nombre d'événements historiques. Regardez les peintures murales qui nous entourent; pourtant, plus de 90 p. 100 des Canadiens ne savent pas ce qu'elles signifient ou représentent, parce qu'ils n'ont aucune idée de l'histoire de notre pays.
Je parcours le pays d'un bout à l'autre presque chaque semaine. Je constate que les jeunes ne connaissent pas leur histoire. On ne leur enseigne pas l'histoire. Je dis humblement que ce sont ceux qui créent des programmes parascolaires visant à sensibiliser les jeunes à leur patrimoine, notamment par des fêtes du patrimoine, par l'entremise de Connexion jeunesse et par d'autres initiatives liées à l'histoire, qui permettent aux jeunes de comprendre et de discuter ensemble de l'histoire de leur pays. Les jeunes n'ont pas d'autres sources d'information. Il n'y a pas d'institutions. Ils n'ont pas la possibilité de savoir qui ils sont et d'où ils viennent.
Le Canada est le refuge de l'humanité. On compte plus de 150 religions, langues et nationalités dans notre pays. Il n'existe pas d'autres exemples semblables dans l'histoire du monde. Pourtant, nous n'en savons pas assez sur qui nous sommes en tant que peuple.
Honorables sénateurs, le plus grave, c'est que nous n'enseignons pas à nos enfants qui nous sommes.
[Français]
Comment nos enfants pourront-ils connaître nos efforts et nos succès s'ils ne peuvent en lire le compte rendu? Et comment pourront-ils construire l'avenir s'ils ignorent le passé?
[Traduction]
Le passé est la porte qui donne sur l'avenir. Si vous ne connaissez pas le passé, vous ne saurez pas quoi faire lorsque la porte s'ouvrira et vous ne saurez peut-être même pas comment l'ouvrir.
[Français]
Honorables sénateurs, nous savons que cette simple voix ne pourra régler à elle seule tous les problèmes soulevés par la vérificatrice générale, ni assurer la préservation d'un seul document. En effet, comme le recommande la vérificatrice générale, il faudra des ressources supplémentaires.
Ne sous-estimons pas l'importance du projet de loi C-8 pour ceux et celles qui travaillent à réunir, recueillir et préserver notre patrimoine grâce à l'édition et aux archives. Ce projet de loi offre une base solide pour la création d'une institution importante dont bénéficieront tous les Canadiens et Canadiennes, qui contribuera à faire avancer notre société dans l'art du savoir.
[Traduction]
Honorables sénateurs, je vous exhorte à vous joindre à moi pour adopter rapidement ce projet de loi. Cette mesure législative a déjà fait l'objet de nombreux retards ici et à l'autre endroit. Le seul article de l'ancien projet de loi C-36 qui a soulevé un débat est maintenant désuet. Avec le début de la nouvelle année, les oeuvres visées sont maintenant du domaine public. Ainsi, la modification proposée à l'article 21 de la Loi sur le droit d'auteur ne s'applique plus et sera maintenant abandonnée.
Revenons-en à l'objectif du projet de loi C-8, soit de créer une nouvelle institution, Bibliothèque et Archives du Canada, et de veiller à ce qu'elle nous donne les outils dont nous aurons besoin pour protéger le riche trésor de connaissances que nous avons accumulées au fil des siècles.
En même temps, le projet de loi va donner aux Canadiens la possibilité d'assouvir leur soif de connaissances au sujet des nombreuses facettes de notre pays. En rassemblant les vastes collections et les grandes compétences de la Bibliothèque nationale du Canada et des Archives nationales du Canada, afin de créer une nouvelle institution appelée Bibliothèque et Archives du Canada, le gouvernement veille à ce que nous profitions encore davantage de notre patrimoine documentaire.
Le projet de loi permet d'établir une véritable institution du savoir du XXIe siècle, une source de savoir permanent accessible à tous et qui contribue à l'épanouissement culturel, social et économique de la société libre et démocratique que constitue le Canada.
En fusionnant la Bibliothèque et les Archives, nous allons inviter les Canadiens et ceux qui s'intéressent à notre pays à partager la richesse de notre patrimoine documentaire.
Ce qui est nouveau dans le projet de loi, c'est le mandat explicite de faire connaître le patrimoine documentaire du Canada à tous les Canadiens et à tous ceux qui s'intéressent au Canada. Bibliothèque et Archives du Canada se servira de façon accrue des technologies de l'information à la fine pointe et d'Internet pour rejoindre tous ceux qui utilisent ces outils modernes.
Je m'occupais déjà de ces questions avant que la plupart des honorables sénateurs ne soient nés. J'ai toujours été exaspéré. J'ai enseigné l'histoire à tous les niveaux dans tout le pays. J'ai souvent organisé des colloques dans toutes les régions du pays pour essayer de rejoindre les jeunes et de leur faire comprendre ce qu'est au juste notre pays.
Honorables sénateurs, le Canada est le pays le plus magnifique sur la planète. C'est, surtout, le plus important du monde. C'est le seul pays au monde voué entièrement au maintien, au soutien et à l'appréciation de la diversité culturelle.
Nous sommes l'un des trois pays au monde qui autorise les immigrants à devenir citoyens, et nous le faisons au terme de trois ans plutôt qu'après 15 ou 20 ans ou après une génération. Nous invitons des gens du monde entier à venir vers nous, à venir nous enrichir.
Nous sommes déjà riches de la présence des peuples autochtones qui ont contribué et continuent de contribuer davantage au Canada que les millions de personnes qui viendront ou qui sont déjà arrivées au Canada. Nous possédons la diversité culturelle, le multiculturalisme et des institutions démocratiques. Nous sommes l'essence de ce dont le monde a besoin de savoir et de comprendre pour vivre en harmonie.
(2110)
On n'enseigne plus l'histoire du Canada; on enseigne plutôt les sciences sociales, un méli-mélo de divers éléments qui n'ont rien à voir avec l'essence de ce que nous sommes en tant que peuple. Au moyen des Fêtes du patrimoine et du site InterJeunes Historica, nous incitons les jeunes à échanger au sujet du Canada. En outre, nous les incitons à parler du Canada aux enfants de la planète, par l'entremise d'Internet, et nous le faisons très bien. Toutefois, ce qui fait défaut, c'est la volonté ferme des adultes de faire leur part.
Honorable sénateurs, combien de fois vous êtes-vous assis avec vos petits-enfants pour leur raconter une page de l'histoire du Canada? Les statistiques révèlent que de 95 à 96 p. 100 des Canadiens n'ont pas une telle habitude. Or, comment les enfants apprendront-ils les atrocités historiques commises contre les premières nations de notre pays et sauront-ils qu'il faut réparer les torts au cours de la prochaine génération si nous voulons aller de l'avant? Comment les enfants apprendront-ils ce qu'il en est de vivre dans un pays ayant deux langues? Comment sauront-ils ce qu'est la vie dans un pays valorisant le multiculturalisme, le pluralisme et la montée de la diversité comme pierres d'assise d'une société démocratique? Comment sauront-ils tout cela si nous, adultes, ne leur donnons pas la possibilité de l'apprendre?
Le gouvernement fédéral n'intervient pas dans l'enseignement de l'histoire parce que l'éducation est une compétence provinciale. Toutefois, il peut, par le truchement de la citoyenneté et d'autres domaines relevant de sa compétence législative, contribuer immensément au développement d'outils de connaissance et d'intérêt.
Les Archives ont créé un remarquable programme généalogique qui permet aux enfants de toutes les régions du pays de s'informer au sujet de leur arrière-grand-père qui a combattu pendant la Première Guerre mondiale. Les enfants ne mettent que quelques secondes à s'y retrouver, car ils maîtrisent fort bien le Web. Ils en sont fiers. Ils consultent les livres pour savoir où leur arrière-grand- père est mort ou a été blessé. Ils en viennent à partager leur amour de ce pays. Mais surtout, ils partagent avec leur pays un lien indestructible. Il nous faut une institution pour obtenir ce résultat.
Nous ne pouvons pas être dispersés partout sur la planète. Nous avons de magnifiques musées un peu partout dans ce pays. Depuis des années, nous tentons de les relier, pour que les enfants puissent, en pressant sur un bouton, être reliés à tous les musées du Canada et y trouver de l'information. Si j'ai gain de cause, ils pourront, d'une simple pression du doigt, se connecter à un musée au Pérou.
Honorables sénateurs, nous voulons que nos enfants puissent découvrir le monde à travers le regard de ce beau et magnifique pays. Pour cela, la Bibliothèque et les Archives doivent devenir une seule institution, au lieu de cataloguer leurs oeuvres chacune à sa façon. C'est une absurdité dont nous ne voulons pas.
L'ignorance est tellement répandue. Il ne s'agit pas de faire des héros. Je me soucie peu des héros. Ce dont je me préoccupe, ce sont les Canadiens ordinaires, qui luttent et vivent leur vie.
Un jour, je me suis rendu dans une école du Yukon, où on m'a dit que ce territoire n'avait pas participé à la Première Guerre mondiale. Je leur ai dit que c'était faux. Proportionnellement, le Yukon a fourni le contingent de soldats le plus important pendant la Première Guerre mondiale. Les enfants de cette région ignoraient que les Autochtones du Yukon étaient des héros disséminés un peu partout dans les plaines de France, dans les Flandres et ailleurs en Europe. Ils ignoraient que leurs congénères ont créé une énorme société capable de comprendre ce qu'est ce pays.
Je vous supplie de fusionner les Archives et la Bibliothèque, pour que nous ayons un instrument aisément accessible, qui mettra fin à la lutte entre les bibliothécaires et les archivistes. Les enfants pourront ainsi accéder à leur histoire mais, surtout, ils pourront nous l'enseigner et l'enseigner à vos parents. Après tout, l'enfant enseigne à l'homme. C'est inévitable. Par conséquent, un père est un enseignant, un enseignant est un père; une enseignante est une mère, une mère est une enseignante. Ces notions datent depuis la nuit des temps.
L'important, honorables sénateurs, c'est votre désir de faire connaître le Canada aux jeunes de notre pays. Veuillez le faire rapidement. Ne renvoyez pas ce projet de loi à un comité où il pourrait rester pendant 300 jours. Acceptez-le dès maintenant. J'ai proposé la deuxième lecture et quelqu'un appuiera ma motion. La deuxième lecture aura lieu ce soir, la troisième lecture aura aussi lieu ce soir et demain, nous aurons un instrument national d'une étonnante importance grâce auquel nos enfants, nos petits-enfants et nous-mêmes pourrons acquérir des connaissances et ainsi mieux apprécier notre magnifique et glorieux pays.
(Sur la motion du sénateur LeBreton, le débat est ajourné.)
LE DISCOURS DU TRÔNE
MOTION D'ADOPTION DE L'ADRESSE EN RÉPONSE—SUITE DU DÉBAT
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Trenholme Counsell, appuyée par l'honorable sénateur Massicotte, relative à l'Adresse à Son Excellence la Gouverneure générale en réponse au discours qu'elle a prononcé lors de l'ouverture de la troisième session de la trente-septième législature.—(7e jour de la reprise du débat)
L'honorable B. Alasdair Graham: Honorables sénateurs, lors de l'ouverture de la nouvelle session du Parlement, j'avais réfléchi à haute voix ici sur le fait que la date coïncidait avec le 150e anniversaire de l'instauration du gouvernement responsable au Canada-Uni, c'est-à-dire le Québec et l'Ontario, et dans ma province natale, la Nouvelle-Écosse, quelques semaines auparavant.
Permettez-moi de réfléchir aujourd'hui aux fondements de notre magnifique pays, dans le cadre de ma réponse au discours du Trône. Incidemment, ce sera la dernière puisque je me retire de cette historique chambre plus tard cette année. Le sénateur Lynch- Staunton a souligné qu'il était à Halifax aujourd'hui. Il a sans doute entendu dire qu'il ne manque pas de candidats pour mon siège.
Le sénateur John Connolly, ancien leader du gouvernement au Sénat, a déjà qualifié le Sénat du Canada de gardien de nos libertés fondamentales. Ayant eu l'honneur de servir ma province et mon pays depuis plus de 30 ans dans cette enceinte, j'ai eu la chance de faire partie de cette remarquable assemblée de gens talentueux — vous tous — de toutes les régions du pays et de toutes les conditions sociales.
(2120)
En compagnie de nombreux sénateurs, j'ai eu l'occasion d'étudier le pays de fond en comble et d'examiner de près ses défis et ses forces. J'ai eu la très grande chance de faire personnellement l'expérience du vrai pouvoir du modèle canadien, tant au Canada qu'à l'étranger.
Les honorables sénateurs savent sans doute qu'hier était le Jour du drapeau. Je suis allé patiner sur le canal en une journée très froide, même pour Ottawa. J'ajouterai que ce fut une heureuse coïncidence que de voir notre glorieux unifolié rouge et blanc flotter dans le beau ciel bleu de l'hiver canadien. Je suppose que j'ai eu ma propre cérémonie du Jour du drapeau à cet endroit merveilleux de la patinoire — un puissant symbole de notre fière nation canadienne nordique. J'ai pensé au pouvoir d'évocation de notre drapeau en tant que symbole de tolérance, d'égalité sociale, de liberté et de démocratie pour tous les peuples de la planète — pour les dépossédés, les marginaux et tous ceux qui aspirent à une vie meilleure pour eux et leurs enfants. Je pensais au fait que le Canada a été conçu comme un fruit de l'imagination, une vision, un rêve et une idée dont l'heure était venue. Des chefs de file comme Robert Baldwin, Louis-Hippolyte Lafontaine et Joseph Howe se sont attelés à l'édification d'une société civile riche recherchant le bien commun. Toutefois, ils n'étaient pas que des idéalistes; ils étaient aussi des stratèges de premier ordre.
Alors que nous marquerons cette année le 200e anniversaire de la naissance de Joseph Howe, il convient de se rappeler ce qu'il a dit en 1850. Ces propos sont liés aux observations faites par le sénateur LaPierre il y a quelques minutes au sujet du projet de loi C-8, qui est si important pour notre pays. Joseph Howe a dit:
C'est le premier devoir du gouvernement d'être au premier rang de toute entreprise noble, d'être en avance sur les énergies sociales, politiques et industrielles, qu'il s'est engagé à diriger.
Peu importe la période de l'histoire de notre pays que nous étudions, ce fut le premier devoir du gouvernement d'être au premier rang pour bâtir un pays et un monde meilleurs. C'est pourquoi le discours du trône a mis d'abord l'accent sur une nouvelle mobilisation des citoyens dans la vie politique du Canada et sur les formes de renouveau démocratique propres à rétablir la confiance envers le processus politique. Ce renouveau insufflera un dynamisme nouveau chez des citoyens qui sont plongés dans les angoisses des transformations qui les entourent et de la transition. Les efforts du gouvernement visant à redonner espoir et à renouveler l'engagement sont particulièrement importants pour nos jeunes. J'ai consacré une partie importante de ma vie à participer au développement de la démocratie dans diverses régions du monde. C'est pourquoi je suis particulièrement heureux que le premier ministre souhaite créer Corps Canada. Il a compris l'extraordinaire potentiel que nous pouvons exploiter chez les jeunes Canadiens, dynamiques et talentueux, en faisant jouer à fond leur engagement et leur dévouement pour servir les pays en développement.
Honorables sénateurs, comme on le dit souvent, le monde a besoin d'un plus grand nombre de pays comme le Canada. Il a besoin de notre conception de la démocratie pluraliste, du fédéralisme, de la justice et des droits de la personne. Mais le renforcement de la démocratie chez nous est la première étape. Au fur et à mesure que notre riche société civile évolue et gagne en maturité, les Canadiens connaîtront de nouveau la magie de leur pays, son sens de l'aventure. Une riche société civile où, pour citer le discours du Trône:
[...] les Canadiens ne passent pas leur temps à se demander quel gouvernement fait ceci ou cela. Ils attendent à juste titre que leurs divers ordres de gouvernement collaborent et se concertent en vue du bien commun, chacun mettant à profit ce qui fait sa force.
Honorables sénateurs, ce genre de partenariat favorisera une culture politique dans laquelle chacun tient, dans son cœur et son esprit, à ce qui est juste et dévoué à la cause du bien commun.
Nous aurons besoin de ces forces pour relever les défis qui sont proposés dans le discours du Trône et dont un grand nombre gravitent autour d'un audacieux programme de réforme sociale. J'ai eu la chance de participer à la vie politique au début des années 90, et j'ai vu de près M. Pearson présider une période remarquable de législation sociale et économique qui a remodelé notre pays et ancré l'État-providence. La chose a été probablement le mieux décrite par l'un des principaux architectes du système, mon ami de longue date Tom Kent qui, à 80 ans, travaille toujours d'arrache-pied en rédigeant des documents de politique sur la croissance et le développement de la protection sociale.
Honorables sénateurs, je crois que nous avons passé tout ce beau temps à mettre au point notre régime d'assurance-maladie qui faisait partie de l'infrastructure devant permettre une société plus compatissante, dont les valeurs servent à ancrer notre identité nationale et les conditions indispensables de notre citoyenneté. Notre ami Allan MacEachen a mené la bataille pour l'accès total et universelle aux soins de santé peu de temps après sa nomination au poste de ministre de la Santé et du Bien-être en 1966. Ce furent là des années grisantes et excitantes. Quand j'y repense, je me rends compte qu'au cours des années 60, les bons dirigeants politiques étaient en place pour faire face à une conjecture favorable, comme Jim Coutts l'a souligné récemment.
Honorables sénateurs, la même coïncidence fortuite au niveau du leadership et des occasions à saisir nous est maintenant offerte avec cette nouvelle législature et ce nouveau gouvernement. Le premier ministre Martin a démontré dans le discours du Trône que, à titre de chef, il avait non seulement l'intention de poursuivre le processus extraordinaire qui se trouve au centre de la tradition pearsonnienne, mais de l'élargir et de le refaçonner. Les principes traditionnels de la Loi canadienne sur la santé ont été réaffirmés. Par exemple, le développement de la petite enfance est devenu une priorité nationale. Les Canadiens handicapés verront s'ouvrir de nouveaux horizons grâce à des programmes d'aide en milieu de travail. Le gouvernement du Canada travaillera de concert avec les Premières nations pour accroître le niveau de vie dans le domaine de l'économie, de l'éducation et de l'autonomie gouvernementale.
L'une des choses qui me préoccupe au plus haut point à titre d'habitant du Cap Breton, c'est l'importance qu'on consacre dans le discours du Trône à la nécessité d'aider les collectivités à s'aider elles-mêmes. J'ai toujours été très fier du développement économique communautaire au niveau local tant au Cap Breton qu'ailleurs dans la province. Je ne peux qu'applaudir l'accent qu'on met, au niveau national, sur les modèles d'autonomie qui remontent aux enseignements de Monseigneur Moses Coady et au célèbre mouvement d'Antigonish, maintenant connu à l'échelle internationale comme le Coady International Institute de l'Université St. Francis Xavier, mon alma mater.
Le modèle d'autonomie que l'on trouve au centre du récent discours du Trône tire profit de la sagesse puissante et conventionnelle qui inspire confiance et suscite l'espoir en cette ère de mondialisation qui a renversé bon nombre des schèmes traditionnels de pensée. Il est également clair qu'à mesure que nos régions, nos collectivités et nos villes suivent leurs propres chemins menant aux marchés mondiaux, le gouvernement doit travailler en collaboration avec les Canadiens de partout au pays pour libérer leurs énergies, tant au pays qu'à l'étranger.
(2130)
Le congé de TPS procurera un avantage extraordinaire aux diverses municipalités de toutes les provinces. Dans ma province, la Nouvelle-Écosse, nous songeons spontanément à des communautés telles Halifax et Sydney, mais également à Antigonish et à Shelburne, ainsi qu'à Kentville et à Truro. Elles aussi ont beaucoup à gagner de ce congé fiscal qui se traduira par une amélioration des services fournis à l'ensemble de notre population.
Ayant été parmi les nombreux habitants de l'île du Cap-Breton qui, au cours des années, se sont battus en faveur d'un nettoyage des étangs bitumineux du port de Sydney, je salue le commencement de la fin de ce triste chapitre dans la vie de cette magnifique île où je suis né. Ces étangs ont besoin d'être réhabilités, opération que seul permet un investissement important, capable de s'attaquer à cette blessure, le pire désastre environnemental en Amérique du Nord. Le gouvernement canadien, qui a pris un engagement sans équivoque à l'égard du Protocole de Kyoto, déclare maintenant que le processus de réhabilitation peut être entrepris.
J'ai parlé plus tôt de la période fiévreuse de réforme sociale des années 60. Avant la fin de cette décennie, le multilatéralisme était devenu la pierre angulaire de notre politique étrangère. Le discours du Trône indique que le gouvernement entend réactiver l'attachement particulier des Canadiens à l'endroit du multiculturalisme, moteur de notre politique étrangère à beaucoup d'égards. L'engagement à procurer de l'équipement nouveau à nos militaires est un signal important d'un gouvernement activiste prêt à faire face à des réalités mondiales radicalement modifiées. Plus particulièrement, honorables sénateurs, je me réjouis des investissements imminents dans des véhicules blindés et du remplacement des hélicoptères Sea King, trop longtemps retardé.
Néanmoins, nous devons nous rappeler que la défense du Canada exige un engagement global. Il ne s'agit pas seulement de dépenser davantage dans le secteur militaire, tout aussi important que cela soit. La défense du Canada porte sur bien plus que des frontières intelligentes ou des mesures de protection civile, là encore, aussi cruciaux fussent ces engagements dans un monde ayant vécu les attentats du 11 septembre. La défense du Canada concerne aussi l'esprit et le cœur de ses citoyens, la vigueur et les convictions qui cimentent sa société civile si talentueuse, cette société capable de s'élever à la hauteur des défis d'un monde terrible et horriblement inéquitable à de nombreux égards.
Honorables sénateurs, le discours du Trône indique clairement que le gouvernement du Canada comprend que la population veut que notre pays joue un rôle particulier et indépendant afin de rendre le monde plus sûr, plus pacifique et plus ouvert. Ces valeurs sont enracinées dans les nobles traditions créées par des diplomates érudits tels que John Holmes et Escott Reid, qui ont fait connaître les valeurs et les traditions canadiennes à la communauté internationale. Reid a déjà fait remarquer que les Canadiens ont une grande affinité pour la gouvernance mondiale. En fait, ils se préoccupent surtout des mécanismes de gouvernance mondiale.
Le premier ministre Martin correspond à l'image de ces bons internationalistes. En effet, il se préoccupe particulièrement de l'appareil de gouvernance mondiale. Il est fasciné par les gouvernements mondiaux et cela depuis qu'il a présidé le groupe financier du G20. Nous pouvons nous attendre à ce qu'il mette son énergie au service de la création d'institutions multilatérales qui enthousiasmeront véritablement les Canadiens au cours des jours et des mois à venir.
Honorables sénateurs, comme je l'ai déjà dit, il y a plus de 150 ans, un petit groupe de réformateurs ont soumis des idées novatrices concernant la liberté, la tolérance et l'idéal d'un intérêt commun aux assemblées législatives du Canada-Uni et à ma province, la Nouvelle-Écosse. Stratèges de la première heure, ils ont contribué à créer quelque chose de nouveau, un laboratoire de changement social. À la manière de Joseph Howe, ils croyaient que le premier devoir d'un gouvernement était d'être à l'avant-garde de la société, de la politique et de l'industrie qu'ils avaient décidé de diriger.
En conclusion, lorsque nous pensons à eux à l'aube de cette nouvelle session du Parlement, ce sont des mots simples profondément chargés de sens, des mots qui incitent à la modestie. Le Sénat est un endroit magnifique qui est, a été et doit toujours être le gardien fier et sans cesse vigilant des droits et des libertés du peuple que nous sommes tellement privilégiés de servir. Nous devons nous souvenir que peu importe les imprévus et les embûches que l'avenir nous réserve — le miracle des possibilités et le pouvoir de concrétiser le changement — ce pouvoir, honorables sénateurs, nous appartient à tous.
Des voix: Bravo!
Le sénateur Norman K. Atkins: Honorables sénateurs, au moment où je m'apprête à participer au débat sur le discours du Trône, je dois, d'emblée, féliciter le sénateur Austin de sa nomination au poste de leader du gouvernement au Sénat. Le sénateur aborde cette nouvelle tâche avec une conscience de l'histoire de cet endroit et de la nécessité de garantir sa pertinence dans notre système parlementaire. Je crois qu'il va s'acquitter de son nouveau rôle avec équité et que, puisqu'il est de la Colombie-Britannique, il est sensible à l'étendue de notre pays et à la nécessité que toutes ses régions soient adéquatement représentées au Parlement.
Je souhaite également féliciter le sénateur de l'autre côte, l'honorable sénateur Bill Rompkey, de sa nomination au poste de leader adjoint du gouvernement, l'honorable sénateur Losier-Cool de sa nomination à ce qui est peut-être un des postes les plus difficiles au Sénat, celui de whip.
Je ne me suis pas rendu compte, lorsque je me suis préparé à prendre la parole ce soir, que le sénateur Graham allait faire une intervention avant moi. Il nous a rappelé qu'il s'agissait de sa dernière allocution sur le discours du Trône. Il a procuré à cette institution, à notre Chambre, à sa province et au pays une grande fierté. Il est difficile de croire qu'il est au bord de la retraite. Le sénateur Graham nous dit qu'il a patiné sur le canal Rideau pendant le week-end. On se demande si, dans les années 60, lorsque la décision a été prise que l'âge de la retraite des sénateurs serait de 75 ans, ce fut vraiment une bonne décision. Je crois que nous pouvons tous être fiers de ce que le sénateur Graham a fait pour son pays au cours du dernier quart de siècle.
Des voix: Bravo!
Le sénateur Atkins: Honorables sénateurs, avant de commencer ma réponse au discours du Trône, je souhaite faire miennes les observations de l'honorable sénateur John Lynch-Staunton, qui a amorcé le débat pour l'opposition. Je crois qu'il a trouvé le ton juste lorsqu'il a déclaré ceci: «La principale raison d'être du discours est de perpétuer le mythe voulant que l'arrivée d'un nouveau premier ministre signifie un nouveau gouvernement.»
Je dois admettre que, lorsque j'ai écouté le discours du Trône dans cette enceinte, j'étais assez satisfait de son contenu et de l'orientation qu'il exprimait. Mais, en le lisant et en le relisant, j'ai pris conscience qu'il n'offrait rien de très substantiel à la population canadienne. Il présente un grand nombre de généralisations et de leurres qui permettent de préparer le terrain pour la tenue d'élections générales.
Même si les municipalités se réjouissent de recevoir un remboursement de la TPS, qu'est-ce que cela apporte réellement? Il ne s'agit que d'un petit acompte par rapport aux besoins réels des municipalités — besoins relatifs à des infrastructures qui s'effondrent, besoins auxquels il faut répondre de manière concrète et substantielle, pas seulement par des solutions ponctuelles.
Il y a quelque chose de fondamentalement incorrect dans la structure financière, économique et fiscale de ce pays si pratiquement toutes les provinces, sauf l'Alberta, connaissent un déficit budgétaire ou presque, tandis que le gouvernement fédéral continue d'afficher un excédent, toujours plus important que celui qui était originellement prévu. On nous affirme maintenant qu'il pourrait atteindre 5 milliards de dollars pour l'exercice courant.
Ce problème fondamental a une incidence sur la prestation et l'accessibilité des soins de santé, de l'éducation et des services sociaux. Les provinces devraient avoir la garantie qu'il existe un plan et un engagement à plus long terme du gouvernement fédéral dans ces domaines. Elles devraient avoir un rôle à jouer dans ce plan. Elles se situent en première ligne. C'est à elles qu'il revient d'assurer la prestation des soins de santé, la gestion des écoles et des établissements postsecondaires, et l'assainissement des conditions sociales, souvent très différentes d'une région du Canada à l'autre.
(2140)
Les dix années de dérive qui sont l'héritage de l'équipe Chrétien- Martin ont nui considérablement à notre pays. Le manque d'éthique gouvernementale et les scandales ont maintenant des répercussions sur la compétitivité du Canada à l'échelle internationale. La réputation de notre pays au chapitre des affaires étrangères est ternie. Il fut un temps où les pays du monde entier se tournaient vers nous — pour adopter une position de principe à l'égard de l'Afrique du Sud, pour aider les réfugiés du Vietnam, du Cambodge et de la Somalie — mais notre politique étrangère ne repose maintenant sur aucun principe et elle est une source de confusion pour les Canadiens et pour nos partenaires du monde entier.
Nos forces armées n'ont pas l'équipement nécessaire pour s'acquitter des missions que le gouvernement leur confie. Chez nous, les longues listes d'attente et les pénuries de personnel récurrentes sont caractéristiques de notre système de soins de santé à court d'argent. Nos étudiants qui poursuivent des études postsecondaires sont aux prises avec une accumulation de dettes. Notre régime fiscal reste moins concurrentiel que celui des États- Unis et de la plupart des pays de l'OCDE. Nous avons besoin d'un régime fiscal concurrentiel pour les sociétés, un régime qui attirera des entreprises et des investissements étrangers créateurs d'emplois.
Les libéraux oublient parfois que ce n'est pas le gouvernement qui génère des recettes. Ses seules recettes proviennent des contribuables. En l'absence d'emplois et d'entreprises créatrices d'emplois, les recettes sont insuffisantes et nos programmes sociaux s'en ressentent.
Avec tout cela en toile de fond, comme je l'ai dit tout à l'heure, j'ai écouté attentivement le discours du Trône. Je dois avouer avoir eu l'impression que certains des problèmes qui nous inquiétaient ont peut-être été réglés. Malheureusement, cette administration libérale qui se prétend «nouvelle», à l'instar de l'ancienne dans laquelle le premier ministre a joué un rôle si important, ne propose aucune solution immédiate aux problèmes sur lesquels les libéraux ont fermé les yeux pendant des années.
Examinons la liste en détail: il n'y a pas d'allégement fiscal immédiat annoncé pour aider les petits salariés ou pour attirer au Canada de nouveaux investissements de la part d'entreprises; il n'y a pas d'aide pour les étudiants qui croulent sous les dettes. Bon nombre de suggestions ont été faites à cet endroit par moi-même et d'autres sénateurs; aucune n'a été retenue: la déductibilité, au titre de l'impôt, des montants versés pour rembourser les prêts; un moratoire de deux ans à partir de l'obtention du diplôme pour le remboursement des prêts; l'annulation des prêts en échange de travail communautaire; l'élimination de l'impôt sur les bourses d'études et de perfectionnement.
Il y aura d'autres discussions fédérales-provinciales sur les soins de santé. Le comité Kirby-LeBreton a présenté son plan pour la réforme des soins de santé il y a deux ans au Sénat. Le défi réside maintenant dans sa mise en oeuvre.
Nos militaires ont enfin reçu un engagement concret à l'égard de leurs besoins en immobilisations — certains de leurs besoins en immobilisations — futurs. Mais qu'en est-il de leurs besoins actuels? N'est-il pas possible d'adopter une approche à deux volets pour le renouvellement des immobilisations? N'est-il pas possible d'acheter du matériel standard afin de répondre aux besoins immédiats tout en mettant en place nos programmes d'achat à long terme?
Le gouvernement doit entreprendre immédiatement un examen cohérent de la politique étrangère et de la politique de défense de manière à faire ressortir le rôle que nos militaires joueront dans l'avenir et à fournir les fonds appropriés. Cet examen ne saurait attendre. Le Parlement et les comités parlementaires appropriés, y compris des comités sénatoriaux, doivent avoir l'occasion de se pencher sur cet examen et de se prononcer dès que possible.
L'aide consentie aux municipalités canadiennes est un pis aller qui ne tient pas lieu de réforme véritable. Si les municipalités sont pour bénéficier de la TPS, pourquoi pas nos universités, nos commissions scolaires, nos bibliothèques, nos hôpitaux et d'autres établissements? En quoi ces établissements, qui sont des créatures provinciales, sont-ils différents des municipalités et comment se fait- il qu'ils méritent moins d'aide?
Comme d'habitude, il n'y a pas de plan cohérent. Il ne s'agit que d'un paquet de clichés, qui n'est pas sans ressembler au premier livre rouge, comme aux suivants, d'ailleurs. L'auteur en est le même, et les promesses sont usées. On retrouve nombre de promesses non tenues du premier livre rouge dans ce discours du Trône.
Nous sommes impatients de voir le premier ministre aborder le véritable déficit de son gouvernement, le déficit éthique. Y aura-t-il un commissaire à l'éthique vraiment indépendant ou verrons-nous encore la même négligence qui a nui à nos relations internationales, à nos forces armées, à nos aînés, à nos étudiants et à nos pauvres?
Le discours du Trône renferme des promesses qui n'auront pas à être tenues avant les prochaines élections si celles-ci sont déclenchées en avril, comme nous en avons tous l'impression. Selon moi, M. Martin devrait attendre, gouverner pendant quelques mois et montrer aux Canadiens comment il se dissocie de l'administration Chrétien. Qu'il aborde les dossiers dont j'ai parlé ici aujourd'hui et qu'il montre qu'un véritable changement est survenu. S'il ne le fait pas, nous devrons nous contenter encore une fois d'une nouvelle liste de promesses libérales non tenues.
L'honorable Douglas Roche: Honorables sénateurs, j'invoque le Règlement. J'aimerais savoir si le leader adjoint du gouvernement est prêt à prolonger le débat, qui en est à son septième jour, au-delà du huitième jour, de manière à ce que les sénateurs qui le désirent puissent intervenir dans quelques jours?
Son Honneur le Président: Je crois qu'il s'agit plutôt d'une question.
Sénateur Rompkey, souhaitez-vous répondre?
L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement): Nous aimerions terminer le débat demain. Bien entendu, les sénateurs ont la possibilité de prendre la parole ce soir et demain. Nous essayons d'accorder la parole à tous les sénateurs qui le désirent; plusieurs l'ont fait déjà. Nous souhaiterions clore le débat demain.
L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, la motion dont parle le sénateur Roche n'a jamais été présentée au Sénat, de sorte que la limite de huit jours ne s'applique pas. Si le gouvernement décidait de proposer cette motion, alors le délai commencerait à courir à partir du jour où la motion est adoptée. Dans l'état actuel des choses, il y a autant de jours que nous voulons, plus huit jours si l'autre endroit impose la clôture du débat sur l'Adresse en réponse au discours du Trône.
(Sur la motion du sénateur LeBreton, le débat est ajourné.)
[Français]
LES LANGUES OFFICIELLES
PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Gauthier, appuyée par l'honorable sénateur Gill, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-4, Loi modifiant la Loi sur les langues officielles (promotion du français et de l'anglais).—(L'honorable sénateur Stratton).
L'honorable Marie-P. Poulin: Honorables sénateurs, ce débat a été ajourné par le sénateur Stratton; nous nous sommes parlé jeudi dernier et il a généreusement accepté que je dise quelques mots ce soir, avant qu'il ne prenne la parole. Est-ce que j'ai le consentement de mes collègues?
Des voix: D'accord.
Le sénateur Poulin: Honorables sénateurs, le projet de loi S-4 modifie la Loi sur les langues officielles, afin de préciser l'article 41 de la Partie VII de cette loi de façon à le rendre exécutoire. Il s'agit du troisième projet de loi que le sénateur Gauthier présente au Sénat à ce sujet au cours des trois dernières sessions parlementaires. Chaque projet de loi, suite à des consultations, à des commentaires et à des propositions, a été amélioré.
(2150)
Nous nous souviendrons que le projet de loi S-32 avait été examiné par le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. À la suite de huit réunions et de la comparution de 32 témoins, le projet de loi est malheureusement mort au Feuilleton. Le projet de loi S-11 a été présenté et inscrit au Feuilleton. Il a passé les étapes de la première lecture, de la deuxième lecture et du renvoi au comité. Un rapport du comité a été rédigé et adopté au comité. Le projet de loi est revenu ici, mais encore là, il est mort au Feuilleton.
Honorables sénateurs, je crois que nous sommes bien préparés pour étudier ce projet de loi S-4. Celui-ci précise le caractère impératif de l'engagement énoncé à la Partie VII de la Loi sur les langues officielles. Le projet de loi S-4 tient compte de la majorité des recommandations faites par la commissaire aux langues officielles et par plusieurs témoins.
Je vous invite donc, honorables sénateurs, à lire le discours que le sénateur Gauthier a prononcé dans cette enceinte, le jeudi 5 février dernier. Son argumentation est claire; les exemples des décisions des tribunaux sont consistants. Je vous invite à appuyer le projet de loi S-4, qui nous permettra de respecter notre mandat constitutionnel de protéger les minorités et de représenter nos régions.
(Sur la motion du sénateur Kinsella, au nom du sénateur Stratton, le débat est ajourné.)
[Traduction]
LE CODE CRIMINEL
PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Joyal, C.P., appuyée par l'honorable sénateur Kinsella, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-250, Loi modifiant le Code criminel (propagande haineuse). —(L'honorable sénateur Tkachuk).
L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, il a quelques jours, nous avons tenu un vote, car certains sénateurs ne voulaient pas autoriser l'ajournement du débat sur cet article, pour lequel j'avais présenté une motion. Je remercie les sénateurs qui ont défendu la tradition entourant l'ajournement, qui permet à un sénateur de prendre la parole et d'exprimer son opinion.
Le nombre de sénateurs estimaient que ma motion d'ajournement constituait une sorte de tactique dilatoire. Cela m'a étonné. Cette conduite n'a fait que renforcer ma conviction que les aspects politiques de ce projet de loi sont parfois désagréables.
Deux sénateurs avaient pris la parole — ils avaient tous deux pris la parole lors de la dernière législature — et ils ont soulevé de nouvelles questions au cours de la présente législature. Certes, deux, cinq ou dix sénateurs, s'ils le désiraient, devraient pouvoir prendre la parole, puisque les deux premiers sénateurs ont soulevé de nouvelles questions. Il s'agit, après tout, d'une modification du Code criminel.
Contrairement à ce que beaucoup peuvent penser, notre plus importante fonction dans cet endroit n'est pas l'étude en comité. En tant que plus haut tribunal du pays — je parle du Parlement — cette fonction consiste à émettre une opinion sur les lois qui régissent notre population.
J'ai demandé que le comité chargé d'étudier ce projet de loi l'examine attentivement et ne soit pas pressé par le lobby des homosexuels parce que le gouvernement déclenchera peut-être des élections anticipées. Chaque fois que j'entends dire qu'il n'est question que d'une simple modification — nous avons entendu les mêmes propos au sujet d'autres projets de loi — je sais que nous sommes en difficulté. S'emprésser d'étendre ce genre de protection à d'autres groupes, c'est dégradant pour ceux que cet article du Code criminel vise à protéger.
J'aborde cette question parce les honorables sénateurs qui se sont prononcés en faveur de cette mesure législative ont affirmé qu'on ne peut rien contre l'homosexualité, sous-entendant comme principe qu'il y a un gène homosexuel et qu'on naît homosexuel. Pour autant que je puisse dire, c'est un mythe. Il n'y a pas de gène donnant lieu à l'homosexualité et il n'y a pas non plus chercheur digne de ce nom qui prétende qu'il en est ainsi ou qui ait prouvé l'existence d'un tel gène. Certains facteurs sociaux et environnementaux entrent en jeu ici.
Par conséquent, est-ce que les mots «orientation sexuelle» décrivent mieux ce que les partisans de cette mesure législative tentent de faire? D'autre part, peut-on prendre la mesure législative au pied de la lettre ou l'interpréter librement, ce qui entraîne des problèmes à l'égard d'une section particulière du Code criminel qui s'avère extrêmement importante pour d'autres groupes? Si le libellé de la mesure législative demeure imprécis, autrement dit, si nous ne faisons pas notre travail de parlementaires pour nous assurer qu'il est clair, et que cette omission de notre part entraîne pour les juges des problèmes d'interprétation de la Charte des droits et libertés, je vois déjà les gens craindre que l'interprétation ne soit trop libérale ou ne nuise à la liberté d'expression.
Le comité doit également faire enquête sur les plaintes de crimes haineux commis au Canada aujourd'hui. Certains groupes homosexuels américains sont reconnus pour exagérer le nombre d'incidents de cette nature, dans le but de servir leurs intérêts politiques. Je crois que les Canadiens qui veulent faire adopter cette mesure législative sont disposés à faire la même chose.
Permettez-moi de citer maintenant une organisation, l'Independent Gay Forum, qui possède un site Internet que tous les sénateurs peuvent consulter s'ils le désirent. Elle a, parmi ses collaborateurs, certains des auteurs gais les plus respectés en Amérique du Nord et probablement au monde. Ils expliquent ce qui s'est produit aux États-Unis après l'horrible mort de Matthew Shepard.
Andrew Sullivan, dans un texte rédigé pour le site Web de cette organisation, un forum intellectuel et universitaire pour les homosexuels, parle du décès de Shepard, l'homme assassiné que le lobby gai a décidé de transformer en martyr pour faire valoir ses idées. Andrew Sullivan dit notamment:
[...] si le destin de Shepard a prouvé la fréquence des meurtres motivés par la haine des gais, alors son élévation au rang de martyr pourrait aussi avoir du sens. Cependant, encore une fois, les preuves indiquent que Shepard représente un très petit nombre de gais aux États-Unis. Selon le FBI, en 1997, l'année avant l'assassinat de Shepard, trois meurtres d'homosexuels motivés par la haine ont été commis sur tout le territoire des États-Unis. Ce chiffre n'est pas fictif. Les meurtres sont les crimes les plus fidèlement rapportés car il faut bien comptabiliser les corps et le nombre indiqué par le FBI correspond au total des meurtres rapportés par quelque 10 000 organismes de signalement du pays. Mais supposons que le FBI a sous-estimé par un facteur de cinq le nombre de meurtres d'homosexuels motivés par la haine. On peut donc dire qu'il y a 15 meurtres par année. Supposons aussi que le nombre d'homosexuels équivaut à environ 5 p. 100 de la population....
Son chiffre est élevé, mais il est plus bas que celui avancé par le mouvement politique homosexuel.
Il s'ensuit que le risque qu'un homosexuel américain subisse le même sort que Matthew Shepard est d'un sur un million, soit à peu près le même risque que d'être frappé par un train.
Je demande aux sénateurs d'étudier cette modification avec soin et de ne pas se laisser pousser dans le dos par des gens qui professent des idées qui porteront préjudice au commun des mortels, car cette manifestation réduira la liberté d'expression et atténuera le pouvoir de l'article qui protège les autres groupes qui requièrent cette protection.
Je reviendrai à l'Independent Gay Forum parce que le 10 décembre 2001, Peter McKnight a écrit un article dans l'Ottawa Citizen, «The Last Word on Hate Crimes», qui a paru sur le site Web de l'Independent Gay Forum. Il dit craindre que le projet de loi dont nous sommes maintenant saisis ne fasse plus de mal que de bien à la communauté homosexuelle. Je vais le citer de nouveau:
Le gouvernement canadien a adopté une loi qui criminalise la propagande haineuse fondée sur des caractéristiques comme la race. Un important groupe canadien de protection des droits des homosexuels vient de demander que cette loi soit modifiée pour comprendre le discours sur l'orientation sexuelle. Or, les homosexuels ont le plus à perdre si nous abandonnons le principe que la liberté d'expression s'applique aussi aux idées que nous abhorrons.
(2200)
Il parle du député néo-démocrate Svend Robinson et de ses groupes de pression. Il explique aussi que les homosexuels sont ceux qui se sont battus pour la liberté d'expression. Les honorables sénateurs se souviendront des incidents survenus à la frontière. Une librairie de Vancouver pour gais et lesbiennes, Little Sisters, a contesté le droit des douaniers canadiens de saisir des livres en vertu des lois canadiennes réprimant l'obscénité. Au terme d'une bataille de 15 ans, la Cour suprême du Canada a confirmé la validité de ces lois.
Peter McKnight commence son article de façon intéressante, en écrivant: «Les gais ont fait tout leur possible pour passer pour des bêtes de party obsédées par le sexe.» À la fin de l'article, il dit:
Je ne suis pas l'auteur de mon affirmation d'ouverture qui compare les gais à des bêtes obsédées par le sexe. Elle n'est pas l'oeuvre d'un évangéliste non plus. Il s'agit d'une paraphrase du chroniqueur Jonathon Rauch, du National Journal, qui faisait la critique de Out for Good, une histoire du mouvement gai signée par Dudley Clendinen et Adam Nagourney. Si Robinson et EGALE réussissent à limiter la liberté de parole, des auteurs éloquents comme Rauch risquent d'être les premiers à tomber.
Merci, honorables sénateurs.
(Sur la motion du sénateur LaPierre, le débat est ajourné.)
AFFAIRES ÉTRANGÈRES
ADOPTION DU RAPPORT SUR LE BUDGET DU COMITÉ
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Stollery, appuyée par l'honorable sénateur Banks, tendant à l'adoption du deuxième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères (budget—étude sur les relations commerciales entre le Canada et les États-Unis et le Canada et le Mexique), présenté au Sénat le 12 février 2004.—(L'honorable sénateur Rompkey, C.P.).
L'honorable Peter A. Stollery: Honorables sénateurs, j'ai mené des consultations et je crois qu'il y a consentement du Sénat pour adopter la motion. Je suis évidemment prêt à répondre à vos questions.
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je tiens à vous informer qu'il s'agit d'une motion de fond. Si le sénateur Stollery prend maintenant la parole, son discours mettra un terme au débat.
Le sénateur Stollery: Au risque de me répéter, honorables sénateurs, je signale qu'il y a consentement pour adopter le rapport.
Son Honneur le Président: Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?
Des voix: Le vote.
Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?
(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)
L'ÉTUDE SUR L'APPLICATION DE LA LOI SUR LES LANGUES OFFICIELLES, LES RÈGLEMENTS, LES INSTRUCTIONS ET LES RAPPORTS PERTINENTS
MOTION VISANT À DEMANDER UNE RÉPONSE AU GOUVERNEMENT—REPORT DU DÉBAT
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Gauthier, appuyée par l'honorable sénateur Fraser:
Que, conformément au paragraphe 131(2) du Règlement, le Sénat demande au gouvernement de déposer une réponse détaillée et globale au quatrième rapport du Comité sénatorial permanent des langues officielles, déposé au Sénat le 1er octobre 2003, durant la deuxième session de la trente-septième législature, et adopté le 28 octobre 2003.—(Décision du Président).
Son Honneur le Président: Cela devrait être reporté en attendant ma décision.
(Le débat est reporté.)
RÈGLEMENT, PROCÉDURE ET DROITS DU PARLEMENT
MOTION VISANT L'EXAMEN ET LA CERTIFICATION DES PÉTITIONS DÉPOSÉES AU SÉNAT—MOTION D'AMENDEMENT—RECOURS AU RÈGLEMENT
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Gauthier, appuyée par l'honorable sénateur Fraser,
Que le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement étudie, afin d'en faire rapport avant le 1er mars 2004, toute la procédure au Sénat se rapportant aux pétitions déposées devant cette Chambre réunie en Parlement, qu'un greffier à la procédure, après examen quant à la forme et au contenu, certifie les pétitions selon des normes établies par le Sénat et qu'un suivi soit prévu dans les Règlements à cette fin;
Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Corbin, appuyée par l'honorable sénateur Maheu, que la motion soit modifiée en supprimant tous les mots après le mot «Que» et en les remplaçant par ce qui suit:
«l'historique de la pratique dans les deux chambres du Sénat et des Communes se rapportant aux pétitions autres que les pétitions pour les projets de loi privés, ainsi que les pratiques, les coutumes et les conventions des deux chambres de Westminster soient déposés au Sénat et circulés aux honorables sénateurs avant d'en saisir le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement.»—(L'honorable sénateur Kinsella).
L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, je pense que cette motion est prête à être mise aux voix.
Son Honneur le Président: Le sénateur Gauthier demande la parole pour invoquer le Règlement.
L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, j'invoque le Règlement.
[Français]
Honorables sénateurs, il n'y a pas eu de débat sur la motion qui a été déposée, dans une langue officielle seulement, par l'honorable sénateur Corbin. Le débat a été ajourné au nom de l'honorable sénateur Kinsella jusqu'à aujourd'hui afin que la motion puisse être lue dans les deux langues officielles.
Après avoir relu ce matin la motion d'amendement de l'honorable sénateur Corbin, j'éprouve de sérieuses réserves sur le libellé de la modification proposée. L'amendement n'apporte aucune modification à la motion de fond. Elle supprime tout le libellé de ma motion du 10 février 2004, pour le remplacer par un libellé de remplacement. Ce faisant, l'honorable sénateur Corbin élimine la motion de fond. Ce qu'il a fait est une motion de remplacement. Selon la citation 559.2)b) du texte Jurisprudence Parlementaire de Beauchesne, on qualifie ce genre de motion de dilatoire. Ce genre de motion court-circuite le Règlement, élimine la question de fond et propose une formule nouvelle qui est inacceptable en procédure parlementaire.
Après avoir consulté les ouvrages de Beauchesne, Marleau et Montpetit et Erskine May, j'ai constaté que tous sont d'avis qu'il est irrégulier et inacceptable de présenter une motion de remplacement.
La motion de l'honorable sénateur Corbin peut avoir du mérite, mais il faut donner un avis de 24 heures pour suggérer une procédure différente.
Il est difficile de justifier que le Sénat n'ait pas de procédure appropriée et sérieuse en matière de pétition. À toutes fins utiles, cette rubrique au Feuilleton du Sénat permet aux Canadiens et aux Canadiennes de déposer des pétitions. Par contre, aucun suivi n'est prévu au Règlement du Sénat, ce qui est regrettable.
L'honorable sénateur Corbin a affirmé qu'il n'avait pas l'intention d'empêcher le Sénat d'adopter des mesures sérieuses pour bien traiter les pétitions déposées au Sénat. Il ajoute avoir rarement entendu des plaintes sur la façon dont on traite les pétitions en cette enceinte. Il n'a jamais jugé à propos de suggérer des procédures, des règlements et un suivi sérieux aux pétitions. L'absence de règlement ne semble pas le préoccuper.
Dans ses commentaires, l'honorable sénateur Corbin reconnaît que les pétitions ne reçoivent aucun suivi une fois déposées sur la table du greffier. Elles sont classées dans le bureau d'un greffier et oubliées. Cela n'est pas une procédure sérieuse.
L'heure est au changement. Il faut moderniser nos procédures et en finir avec cette question des pétitions. Il ne faut pas remettre cette question à plus tard, comme le propose l'honorable sénateur Corbin.
Depuis maintenant plus de quatre ans, je fais des suggestions au Comité sénatorial permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement. À l'époque, alors que j'étais membre du comité, j'avais suggéré que le comité étudie cette question des pétitions afin de proposer une procédure traitant de la forme, du contenu et du suivi sérieux, tel qu'il est d'usage dans d'autres chambres législatives au Canada ou ailleurs.
Le comité a tenu plusieurs réunions sous la présidence de l'honorable sénateur Austin, et a fait rapport le 11 juin 2002. Les membres du comité ont fait un travail sérieux. La recherche a été intense, la discussion intéressante et productive. Malheureusement, les Chambres ont été prorogées et le rapport, oublié.
Certaines propositions du 14e rapport de ce comité ont été adoptées par le Sénat, en l'occurrence la procédure permettant de demander au gouvernement une réponse globale à un rapport du Sénat une fois que celui-ci a été adopté par le Sénat. La question des pétitions est toujours en suspens car le rapport n'a jamais été adopté en entier.
Récemment, le greffier du comité envoyait un avis à tous les membres signalant qu'il était d'intérêt de reprendre la discussion sur les pétitions afin de poursuivre ce débat.
Pour une raison que j'ignore, l'année dernière j'ai été écarté du comité. Par conséquent, je ne peux plus faire de suggestions au comité concernant les pétitions.
L'automne dernier, j'ai fait la promotion d'un amendement constitutionnel visant à déclarer Ottawa, la capitale du pays, ville bilingue. Un grand nombre de pétitions ont été déposées à l'appui de cet objectif. J'ai déposé devant le Sénat, sous la rubrique «Présentation de pétitions», plus de 25 000 pétitions à ce jour, priant le Sénat réuni au Parlement de désigner, dans la Constitution, la ville d'Ottawa, capitale du Canada, bilingue en vertu de l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867 et 1982. Il s'agit de la motion 28 au Feuilleton.
(2210)
L'objectif est clair et précis et je suis convaincu que les 25 000 pétitionnaires s'attendent à ce qu'il y ait un suivi sérieux de la part du Sénat.
Le Sénat doit prendre cette question en délibéré, adopter dans les plus brefs délais une procédure sérieuse et efficace et effectuer un suivi respectueux des Canadiens et des Canadiennes qui en font la requête. Cela doit se faire dans le but de favoriser l'accès aux services municipaux et provinciaux dans la capitale du pays, dans les deux langues officielles du Canada et de façon impartiale et égale.
Les sénateurs pourront lire le chapitre C, du 14e rapport déposé par le sénateur Austin il y a presque deux ans. La procédure est simple. Que ce soit les règlements, les suggestions, les propositions, tout est là. Il n'est pas productif de demander qu'on fasse un historique de tout ce qui existe ailleurs. Je pourrais citer des auteurs dans le domaine de la procédure, comme Beauchesne ou Marleau et Monpetit, qui appuient le fait que les pétitions c'est sérieux et qu'elles demandent un suivi.
Tout ce que je veux, c'est que le Comité du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement prenne en considération cette question et dépose un rapport dans les plus brefs délais afin qu'on puisse en disposer.
Des voix: Bravo!
L'honorable Eymard G. Corbin: Honorables sénateurs, j'eus préféré que le sénateur Gauthier, dans son rappel au Règlement, ne personnalise pas la question. J'ai présenté une motion d'amendement et cette motion n'est pas celle du sénateur Corbin.
Rien ne sert de pleurer sur des œufs cassés. Il se peut que le sénateur Gauthier ait raison mais de là à dire que mon intention était dilatoire, c'est complètement faux. Je suis préoccupé par la façon dont les changements se font au Règlement au Sénat.
On prend rarement la peine de faire l'historique pour essayer de comprendre pourquoi le Règlement est rédigé de telle façon et pourquoi il est appliqué assez sévèrement parfois. Voilà ce que cette proposition d'amendement demande. Elle ne demande pas le rejet de la proposition du sénateur Gauthier. À mon avis, un règlement qui existe depuis 130 ans doit certainement avoir une raison d'être. Je n'en dirai pas plus, voilà qui est simple. Il ne faut pas chercher des motifs.
[Traduction]
Son Honneur le Président: Je crois que j'ai bien suivi le recours au Règlement du sénateur Gauthier ainsi que la réponse du sénateur Corbin, mais j'aimerais consulter les ouvrages qui font autorité dans ce domaine. Par conséquent, je vais prendre la question en délibéré et ferai connaître aux sénateurs ma décision aussitôt que possible.
PEUPLES AUTOCHTONES
MOTION D'ADOPTION DU SIXIÈME RAPPORT DU COMITÉ DÉPOSÉ DURANT LA DEUXIÈME SESSION ET DEMANDE D'UNE RÉPONSE DU GOUVERNEMENT—REPORT DU DÉBAT
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Sibbeston, appuyée par l'honorable sénateur Adams:
Que le sixième rapport du Comité permanent sénatorial des peuples autochtones, déposé au Sénat le 30 octobre 2003, durant la deuxième session de la trente-septième législature, soit adopté et que, en application du paragraphe 131(2) du Règlement, le Sénat demande au gouvernement de fournir une réponse complète et détaillée et de confier cette tâche aux ministres des Affaires indiennes et du Nord canadien, de la Justice, des Ressources humaines et du Développement des compétences, du Développement social, du Patrimoine canadien, de la Sécurité publique et de la Protection civile, de la Santé, et de l'Industrie; et l'interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits.—(Décision du Président).
Son Honneur le Président: Cette décision n'a pas été prise. Je prendrai une décision dès que possible.
(Le débat est reporté.)
[Français]
LA CULTURE DU GOUVERNEMENT LIBÉRAL
AVIS D'INTERPELLATION—DÉCISION DU PRÉSIDENT
L'ordre du jour appelle:
Qu'elle attirera l'attention du Sénat sur la culture de corruption répandue dans le gouvernement libéral que dirige actuellement le premier ministre Paul Martin.
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, le mercredi 11 février, le sénateur LeBreton a donné un avis d'interpellation visant à attirer l'attention du Sénat sur «la culture de corruption répandue dans le gouvernement libéral que dirige actuellement le premier ministre Paul Martin». Avant que le Sénat ne passe à l'ordre du jour, le sénateur Milne a pris la parole sur un recours au Règlement pour s'opposer aux propos tenus dans cet avis. Citant Marleau et Monpetit, autorité parlementaire de l'autre endroit, le sénateur Milne a soutenu que ces propos étaient antiparlementaires et elle m'a demandé de déclarer cet avis irrecevable.
[Traduction]
Plusieurs autres sénateurs ont exprimé leur point de vue sur le bien-fondé de ce recours au Règlement. Le sénateur Carstairs a fait état de la connotation criminelle se rattachant au mot «corruption». Le sénateur Cools a mentionné qu'il était ici question d'insinuation et de motifs attribués à des personnes qui n'étaient pas nommées. Pour sa part, le sénateur Robichaud a jugé les mots «culture de corruption» à la fois offensants et provocateurs. Par ailleurs, le sénateur Kinsella, fournissant à l'appui des extraits du rapport de la vérificatrice générale sur les activités de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, a dit trouver le mot «corruption» tout à fait acceptable, point de vue partagé par le sénateur Di Nino, qui a souligné que l'expression «culture de corruption» avait été utilisée à l'autre endroit apparemment sans conséquences.
Après les dernières observations du sénateur Milne, j'ai accepté de revoir les arguments qui avaient été présentés relativement au bien- fondé de ce recours au Règlement. J'ai ajouté que j'examinerais les précédents et les autorités en la matière avant de trancher la question. Cela étant fait, je suis maintenant prêt à rendre ma décision.
[Français]
Dans l'examen de ce recours au Règlement, je dois tenir compte du rôle qui est mien en tant que Président. J'estime que mon devoir consiste à aider les membres de cette assemblée à s'acquitter de leurs fonctions parlementaires en permettant la plus grande latitude possible dans les débats. En même temps, cependant, je suis tenu, en vertu du Règlement du Sénat, d'assurer l'ordre et le décorum dans cet endroit. Sans cet ordre, qui est indispensable pour la bonne conduite et le bon déroulement des travaux, il serait beaucoup plus difficile pour tous les sénateurs d'échanger leurs points de vue et d'en arriver à des décisions.
[Traduction]
Toutes les institutions parlementaires sans exception, qu'il s'agisse de «l'autre endroit» ou d'assemblées législatives au pays ou ailleurs dans le Commonwealth, doivent traiter de la question de l'ordre dans les débats et des propos non parlementaires. Au Sénat, l'article 51 du Règlement interdit «les propos vifs, offensants ou accusateurs». Cette règle est appliquée depuis 1867. En outre, par mesure de précaution, l'article 64 du Règlement prévoit que «le Président ne doit pas permettre l'inscription au Feuilleton d'un avis qui contient des expressions malséantes ou qui contrevient à un article du Règlement ou à un ordre du Sénat».
La 6e édition du recueil de Jurisprudence parlementaire de Beauchesne, qui fait autorité en matière parlementaire au Canada depuis de nombreuses années, donne une liste de mots et d'expressions ayant entraîné l'intervention du Président de l'autre endroit parce qu'ils étaient considérés par certains députés comme immodérés ou non parlementaires. Le mot «corruption» figure parmi les mots énumérés à la page 155. Toujours dans le Beauchesne, j'ai trouvé, en guise de mise en garde, le passage suivant: «Aucune expression n'est admissible ou inadmissible du simple fait qu'elle figure sur une liste. Un terme qui dans un certain contexte serait parlementaire pourrait, dans un autre contexte, amener le désordre et donc, ne plus l'être». C'est l'un des ouvrages desquels je me suis inspiré pour juger du bien-fondé du recours au Règlement.
En mai dernier, il s'est produit au Sénat une situation qui ressemble dans une certaine mesure à la situation à laquelle le Sénat est confronté aujourd'hui. Dans le cadre de son étude du code d'éthique, le Comité du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement avait entendu un témoin qui avait fait allusion à la perception publique de corruption au gouvernement et au Parlement. Le sénateur Carstairs, alors leader du gouvernement, avait parlé de ces observations, ce qui avait donné lieu à de nombreux échanges entre le sénateur et d'autres sénateurs dans cette enceinte, notamment le sénateur Lynch-Staunton, leader de l'opposition. Même si personne n'avait demandé que ce mot soit retiré en raison de sa nature non parlementaire, de toute évidence, il en avait offusqué plusieurs et avait suscité de nombreux échanges pleins de sous-entendus. Ce que je cherche à faire comprendre, en revenant à cet incident, c'est que le mot «corruption» est lourd de sens et qu'il ne faudrait l'employer qu'avec prudence.
(2220)
Le Sénat s'est toujours montré généreux envers ses membres lorsque vient le temps de présenter des motions ou des interpellations pour fins de débats. En cela, le Sénat demeure fidèle à ses traditions et à son objectif fondamental. Les sénateurs ont le loisir d'engager un débat sur à peu près n'importe quel sujet qui les intéresse.
Comme ils jouissent d'une telle liberté, j'inclinerais à dire que les sénateurs ont la responsabilité de rédiger leurs motions et leurs interpellations dans un style qui ne risque pas de provoquer inutilement le désordre. Cela ne porte aucunement atteinte au droit des sénateurs de s'engager dans de vigoureux débats où les points de vue contraires et les répliques ne manquent pas d'aplomb. Qu'ils y voient plutôt un avertissement pour éviter la rancœur et l'amertume qui nuisent manifestement au sain exercice de la libre expression.
[Français]
Même si l'article 64 du Règlement m'autorise, en tant que Président, à rejeter l'interpellation présentée par le sénateur LeBreton, je ne crois pas qu'il serait conforme aux traditions du Sénat d'exercer ce pouvoir dans le cas présent. Je souhaite que les sénateurs qui participeront à ce débat fassent preuve de jugement en s'abstenant d'employer des mots qui, dans ce contexte, sont non parlementaires.
[Traduction]
Par conséquent, je déclare que l'interpellation que se propose de faire le sénateur LeBreton est réglementaire.
AGRICULTURE ET FORÊTS
AUTORISATION AU COMITÉ D'ÉTUDIER L'ÉTAT ACTUEL ET LES PERSPECTIVES D'AVENIR DE L'AGRICULTURE ET DES FORÊTS
L'honorable Donald H. Oliver, conformément à l'avis donné le 11 février 2004, propose:
Que le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts soit autorisé à entendre de temps en temps les témoignages d'individus et de représentants d'organismes sur l'état actuel et les perspectives d'avenir de l'agriculture et des forêts au Canada;
Que le comité soumette son rapport final au plus tard le 30 juin 2004.
(La motion est adoptée.)
AUTORISATION AU COMITÉ DE POURSUIVRE L'ÉTUDE DU DÉVELOPPEMENT ET DE LA COMMERCIALISATION DE PRODUITS AGRICOLES, AGROALIMENTAIRES ET FORESTIERS À VALEUR AJOUTÉE
L'honorable Donald H. Oliver, conformément à l'avis donné le 11 février 2004, propose:
Que le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts soit autorisé à examiner les questions liées au développement et à la commercialisation de produits agricoles, agroalimentaires et forestiers à valeur ajoutée sur les marchés national et international;
Que les mémoires reçus et les témoignages entendus sur la question par le Comité au cours de la deuxième session de la trente-septième législature soient déférés au comité;
Que le comité soumette son rapport final au plus tard le 30 juin 2004, et qu'il conserve jusqu'au 31 juillet 2004 tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions.
(La motion est adoptée.)
FINANCES NATIONALES
PROJET DE LOI C-212—AUTORISATION AU COMITÉ D'ÊTRE SAISI DE LA DOCUMENTATION PRODUITE AU COURS DE LA DEUXIÈME SESSION
L'honorable Lowell Murray, conformément à l'avis donné le 13 février 2004, propose:
Que le Comité sénatorial permanent des finances nationales, auquel fut renvoyé le projet de loi C-212 le 11 février 2004, soit également saisi des mémoires reçus et des témoignages entendus sur la question par le comité durant la deuxième session de la trente-septième législature.
(La motion est adoptée.)
ÉNERGIE, ENVIRONNEMENT ET RESSOURCES NATURELLES
AUTORISATION AU COMITÉ D'ÊTRE SAISI DES DOCUMENTS ET DES TÉMOIGNAGES
L'honorable Tommy Banks, conformément à l'avis donné le 13 février 2004, propose:
Que les documents reçus et les témoignages entendus par le Comité sénatorial permanent des transports et des communications au cours de son étude du projet de loi S-26, Loi concernant les motomarines dans les eaux navigables, durant la première session de la trente-septième législature, et que les mémoires reçus et les témoignages entendus durant la deuxième session de la trente-septième législature au cours de son étude sur le projet de loi S-10, Loi concernant les motomarines dans les eaux navigables, soient renvoyés au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles en vue de son étude du projet de loi S-8, Loi concernant les motomarines dans les eaux navigables.
(La motion est adoptée.)
(Le Sénat s'ajourne à demain, à 14 heures.)