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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

3e Session, 37e Législature,
Volume 141, Numéro 12

Le jeudi 19 février 2004
L'honorable Dan Hays, Président


LE SÉNAT

Le jeudi 19 février 2004

La séance est ouverte à 13 h 30, la Présidente intérimaire étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

LA LOI SUR LA CITOYENNETÉ DE 1977

LE RÉTABLISSEMENT DE RÉSIDENTS AYANT PERDU LA CITOYENNETÉ

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, le temps est venu pour le Sénat du Canada de faire preuve de leadership pour corriger une terrible erreur qui a victimisé un groupe très particulier de personnes.

Honorables sénateurs, je parle des enfants perdus du Canada. Il s'agit des enfants nés au Canada, mais qui ont perdu le droit à la citoyenneté canadienne à cause d'une terrible disposition contenue dans la Loi sur la citoyenneté de 1947. Cette loi, qui a été remplacée par la loi de 1977, a privé des citoyens nés au Canada entre 1947 et 1977 de leur citoyenneté, si leur père a pris la citoyenneté d'un autre pays au cours de cette période.

Compte tenu des valeurs adoptées par les Canadiens en matière de droits de la personne, telles qu'énoncées dans la Convention relative aux droits de l'enfant des Nations Unies qui dispose que les enfants ne sont ni un bien ni une propriété, j'exhorte le Sénat à intervenir, par tous les moyens possibles, et à prendre soit des mesures exécutives soit législatives, pour faciliter la réparation d'un tort considérable.

Tous ont le droit d'avoir une nationalité et il ne doit pas être permis que les personnes nées au Canada demeurent les enfants perdus du Canada.

Des voix: Bravo!

LA DIRECTION DU PARTI CONSERVATEUR

LES PARTISANS DE L'ÉQUIPE DE BELINDA STRONACH

L'honorable John G. Bryden: Honorables sénateurs, en lisant ce matin mon journal favori, le National Post, je n'ai pu que me rappeler certaines des déclarations faites hier par nos vis-à-vis. Cela m'a rappelé le vieil adage qui dit qu'il faut être sans défaut pour critiquer autrui. J'aimerais citer aux honorables sénateurs l'article qui m'a rappelé ce dicton. La manchette disait que Stronach se méfiait des conservateurs tombés en disgrâce. C'est un article de Irwin Block, de Montréal. Le sous-titre disait: «Ils ne travaillent pas pour nous.» On dit ceci dans l'article:

Belinda Stronach s'est dissociée de trois anciens conservateurs au passé trouble qui aident à soutenir, au Québec, sa campagne à la direction du Parti conservateur.

Mme Stronach a déclaré hier que deux anciens députés qui l'ont appuyée ne font pas partie de son équipe de campagne, mais comptent simplement parmi un grand nombre de personnes qui souhaitent qu'elle dirige le nouveau parti.

Les deux hommes — Gabriel Fontaine et Michel Côté — ont annoncé la semaine dernière qu'ils appuyaient sa candidature.

Après une rencontre dans la matinée avec l'éditeur de la Gazette de Montréal, Larry Smith, qui a songé à un moment donné à se porter lui-même candidat à ce poste, Mme Stronach a déclaré que ces deux hommes ne travaillaient pas pour son camp, qu'ils étaient des partisans, elle le supposait.

MM. Fontaine et Côté ont vu leur carrière politique se terminer par un scandale. M. Fontaine a été reconnu coupable, en 1999, d'avoir volé aux contribuables 100 000 $. Pour sa part, M. Côté, un ancien ministre de l'Industrie, a été congédié par le premier ministre de l'époque, M. Brian Mulroney, en 1988, pour avoir violé les règles sur les conflits d'intérêts.

Dans le cadre d'une brève entrevue, Mme Stronach a laissé entendre que son personnel n'a pas eu le temps de vérifier les antécédents de tous les anciens conservateurs qui avaient offert leur aide.Elle a déclaré que son équipe était dépassée par tout l'appui qu'elle recevait.

Mme Stronach a également précisé qu'elle ne savait pas qu'un éminent avocat de Montréal, qui a été condamné aux États-Unis l'année dernière pour conspiration et falsification de documents dans le cadre de la manœuvre frauduleuse de manipulation des actions de 17 millions de dollars américains, était l'hôte conjoint d'une réception en son honneur, qui a eu lieu hier soir.

Elle n'avait aucune idée qu'il était l'`hôte de la réception à laquelle elle a assisté hier soir à Montréal.

Harry Bloomfield, qui s'était présenté contre Pierre Elliott Trudeau et qui a été un administrateur de la Banque de développement du Canada a dit au National Post que le sénateur conservateur David Angus lui avait demandé de coparrainer la réception d'hier soir.

Une voix: C'est honteux.

Le sénateur Bryden: L'article dit que Mme Stronach a précisé clairement...

Le sénateur Kinsella: Silence! Asseyez-vous! Silence!

Le sénateur St. Germain: Trois hourras pour Belinda!

Son Honneur la Présidente intérimaire: J'ai le regret de vous informer, honorable sénateur Bryden, que votre temps de parole est écoulé.

[Français]

LE CODE CRIMINEL

LA DÉCISION DE LA COUR SUPRÊME SUR L'ARTICLE 43

L'honorable Gérald-A. Beaudoin: Honorables sénateurs, à la fin de janvier 2004, la Cour suprême du Canada rendait un jugement sur l'article 43 du Code criminel, qui porte sur les châtiments corporels que l'on peut infliger aux enfants. Dans un premier temps, la cour a affirmé qu'aucun enfant de moins de deux ans et aucun adolescent ne devaient être soumis à des châtiments corporels.

La Cour suprême a ciblé les châtiments qui ne doivent pas être utilisés, et elle a eu raison d'interdire les gifles, les coups de poing à la tête, l'utilisation de bâtons, fouets, ceintures, fils électriques et autres objets qui étaient tolérés par l'article 43.

Je me réjouis grandement, cependant, que la Cour suprême ait écarté ce genre de châtiment. Il était temps. Mais je rêve du jour où l'on pourra dire qu'il faut mettre à l'écart les châtiments corporels qu'on peut infliger aux enfants. Il faut trouver d'autres façons pour éduquer les enfants, j'en suis certain. Il faut recourir à des modes de discipline autres que des châtiments corporels. On se civilise lentement.


(1340)

[Traduction]

AFFAIRES COURANTES

LE BUDGET SUPPLÉMENTAIRE DES DÉPENSES 2003-2004

DÉPÔT DU BUDGET SUPPLÉMENTAIRE (B)

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, deux exemplaires du budget supplémentaire des dépenses (B) de 2003-2004 pour l'exercice se terminant le 31 mars 2004.

[Français]

RÉGIE INTERNE, BUDGETS ET ADMINISTRATION

PRÉSENTATION DU TROISIÈME RAPPORT DU COMITÉ

L'honorable Lise Bacon, présidente Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, présente le rapport suivant:

Le jeudi 19 février 2004

Le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration a l'honneur de présenter son

TROISIÈME RAPPORT

Votre Comité recommande que les fonds soient débloqués pour l'année financière 2003-2004.

Transports et communications (législation)

Services professionnels et autres    4 800 $
Transports et communications    0 $
Toutes autres dépenses    500 $
Total    5 300 $

Respectueusement soumis,

La présidente,

LISE BACON

Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Bacon, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

LE COMITÉ DE SÉLECTION

PRÉSENTATION DU TROISIÈME RAPPORT

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool, présidente du Comité de sélection, présente le rapport suivant:

Le jeudi 19 février 2004

Le Comité de sélection a l'honneur de présenter son

TROISIÈME RAPPORT

Votre Comité recommande un changement à la composition du comité suivant:

Comité sénatorial permanent des droits de la personne

L'honorable sénateur Plamondon remplace l'honorable sénateur Mercer comme membre du Comité sénatorial permanent des droits de la personne.

Respectueusement soumis,

La présidente,

ROSE-MARIE LOSIER-COOL

Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Losier-Cool, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

EXAMEN DE LA RÉGLEMENTATION

PRÉSENTATION DU PREMIER RAPPORT DU COMITÉ MIXTE

L'honorable Céline Hervieux-Payette, présidente du Comité mixte permanent d'examen de la réglementation, présente le rapport suivant:

Le jeudi 19 février 2004

Le Comité mixte permanent d'examen de la réglementation à l'honneur de présenter son

PREMIER RAPPORT

Votre comité fait rapport que, relativement à son ordre de renvoi permanent, l'article 19 de la Loi sur les textes réglementaires, L.R.C. 1985, c. S-22, il a déjà été autorisé «à étudier les moyens par lesquels le Parlement peut mieux surveiller le processus de réglementation du gouvernement et plus particulièrement à faire enquête et rapport sur:

1. les principes et les pratiques qu'il convient d'observer

a) dans la rédaction des pouvoirs permettant aux délégués du Parlement de faire des lois subordonnées;

b) dans l'adoption des textes réglementaires;

c) dans l'utilisation du règlement exécutif -y compris les pouvoirs délégués et la réglementation;

et la façon dont le contrôle parlementaire devrait être effectué à cet égard;

2. le rôle, les tâches et les pouvoirs du Comité mixte permanent d'examen de la réglementation.»

Votre comité recommande que lui soit soumis le même ordre de renvoi, ainsi que les témoignages y afférents produits au cours des sessions précédentes.

Votre comité fait part aux deux Chambres du Parlement des critères d'étude et de contrôle des textes réglementaires qu'il utilisera:

Si un règlement ou autre texte réglementaire relevant de sa compétence, de l'avis du comité:

1. n'est pas autorisé par les dispositions de la législation habilitante ou n'est pas conforme à toute condition prescrite dans la législation;

2. n'est pas conforme à la Charte canadienne des droits et libertés ou à la Déclaration canadienne des droits;

3. a un effet rétroactif en l'absence d'autorisation formelle dans la législation habilitante;

4. impose des frais au Trésor ou exige qu'un paiement soit versé à la Couronne ou à toute autre autorité, ou prescrit le montant de l'un quelconque de ces frais ou paiements, en l'absence d'autorisation formelle dans la législation habilitante;

5. impose une amende, un emprisonnement ou autre pénalité en l'absence d'autorisation formelle dans la législation habilitante;

6. tend directement ou indirectement à exclure la juridiction des tribunaux en l'absence d'autorisation formelle dans la législation habilitante;

7. n'est pas conformé à la Loi sur les textes réglementaires sur le plan de la transmission, de l'enregistrement ou de la publication;

8. paraît pour une raison quelconque enfreindre le principe de la légalité;

9. empiète indûment sur les droits et libertés de la personne;

10. assujettit indûment les droits et libertés de la personne au pouvoir discrétionnaire de l'Administration ou n'est pas conforme aux règles de justice naturelle;

11. utilise de manière inhabituelle ou inattendue les pouvoirs que confère la législation habilitante;

12. représente l'exercice d'un pouvoir législatif de fond qui devrait faire l'objet d'une loi du Parlement;

13. est défectueux dans sa rédaction ou pour toute autre raison nécessite des éclaircissements quant à sa forme ou son objet.

Votre comité recommande que le quorum soit de 4 membres, à condition que les deux Chambres soient représentées au moment d'un vote, d'une résolution ou de toute autre décision, et que les coprésidents soient autorisés à tenir des réunions pour entendre les témoignages et à en autoriser la publication dès que trois membres sont présents, pourvu que les deux Chambres soient représentées; et, que le comité puisse obtenir les services d'experts, de sténographes et de commis, selon les besoins.

Votre comité recommande aussi au Sénat qu'il soit autorisé à siéger durant les séances et ajournements du Sénat.

Votre Comité, qui a été autorisé par le Sénat à engager des dépenses en rapport avec ses attributions permanentes relatives à l'étude et à la vérification des textes réglementaires, dépose, conformément à l'article 104 du Règlement du Sénat, le relevé suivant des dépenses contractées à cette fin par le comité (part du Sénat) au cours de la deuxième session de la trente-septième législature:

Services professionnels et autres    14 149 $
Transports et communications    0
Autres dépenses    11 490
Total    25 639 $

Un exemplaire des Procès-verbaux et témoignages s'y rapportant (fascicule no 1, troisième session, trente-septième législature) est déposé à la Chambre des communes.

Respectueusement soumis,

La coprésidente,

CÉLINE HERVIEUX-PAYETTE, C.P.

Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Hervieux-Payette, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Traduction]

ÉNERGIE, ENVIRONNEMENT ET RESSOURCES NATURELLES

BUDGET—PRÉSENTATION DU RAPPORT DU COMITÉ SUR L'ÉTUDE SPÉCIALE RELATIVEMENT À SON MANDAT

L'honorable Tommy Banks, président du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, présente le rapport suivant:

Le jeudi 19 février 2004

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles a l'honneur de présenter son

DEUXIÈME RAPPORT

Votre Comité a été autorisé par le Sénat, le 10 février 2004, à étudier et faire rapport sur de nouvelles questions concernant son mandat.

Conformément à l'article 2:07 des Directives régissant le financement des Comités du Sénat, le budget présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration ainsi que le rapport s'y rapportant, sont annexés au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,

TOMMY BANKS

(Le texte du budget figure à la page 159 de l'annexe A des Journaux du Sénat d'aujourd'hui.)

Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

Le sénateur Banks: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat, et nonobstant l'alinéa 58(1)g) du Règlement, je propose: Que l'étude du rapport soit inscrite à l'ordre du jour de la séance d'aujourd'hui.

Le sénateur Lynch-Staunton: Expliquez.

Le sénateur Banks: Le budget, qui est compris dans ce rapport, prévoit la participation à une conférence, à la fin de mars, pour laquelle il faut prendre sans tarder les dispositions relatives aux déplacements et à l'hébergement. Il s'agit d'une situation où une journée fait toute la différence.

Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, la permission est-elle accordée?

Le sénateur Lynch-Staunton: Non.

Son Honneur la Présidente intérimaire: La permission n'est pas accordée.

(Sur la motion du Sénateur Banks, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

TRANSPORTS ET COMMUNICATIONS

BUDGET—PRÉSENTATION DU RAPPORT DU COMITÉ SUR L'ÉTUDE DES INDUSTRIES DE MÉDIAS

L'honorable Joan Fraser, présidente du Comité sénatorial permanent des transports et des communications, présente le rapport suivant:

Le jeudi 19 février 2004

Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications a l'honneur de présenter son

DEUXIÈME RAPPORT

Votre Comité, autorisé par le Sénat, le vendredi 13 mars 2004, à examiner, pour en faire rapport, l'état actuel des industries de médias canadiennes; les tendances et les développements émergeants au sein de ces industries; le rôle, les droits, et les obligations des médias dans la société canadienne; et les politiques actuelles et futures appropriées par rapport à ces industries, demande respectueusement qu'il soit autorisé à retenir les services d'avocats, de conseillers techniques et de tout autre personnel jugé nécessaire aux fins de ces travaux.

Conformément à l'article 2:07 des Directives régissant le financement des Comités du Sénat, le budget présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration ainsi que le rapport s'y rapportant, sont annexés au présent rapport.

Respectueusement soumis,

La présidente,

JOAN FRASER

(Le texte du budget figure à la page 167 de l'annexe B des Journaux du Sénat d'aujourd'hui.)

Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Fraser, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

SÉCURITÉ NATIONALE ET DÉFENSE

BUDGET—PRÉSENTATION DU RAPPORT DU COMITÉ SUR L'ÉTUDE DE LA NÉCESSITÉ D'UNE POLITIQUE NATIONALE SUR LA SÉCURITÉ

L'honorable Colin Kenny, président du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, présente le rapport suivant:

Le jeudi 19 février 2004

Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense a l'honneur de présenter son

DEUXIÈME RAPPORT

Votre Comité, qui a été autorisé par le Sénat, le vendredi 13 février 2004, à étudier, afin d'en faire rapport, la nécessité d'une politique nationale sur la sécurité pour le Canada, demande respectueusement que le comité soit autorisé à retenir les services d'avocats, de conseillers techniques et de tout autre personnel jugé nécessaire, ainsi qu'à s'ajourner d'un lieu à l'autre au Canada et de se déplacer à l'intérieur et à l'extérieur du Canada aux fins de ses travaux.

Conformément à l'article 2:07 des Directives régissant le financement des comités du Sénat, le budget présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration ainsi que le rapport s'y rattachant sont annexés au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,

COLIN KENNY

(Le texte du budget figure à la page 173 de l'annexe C des Journaux du Sénat d'aujourd'hui.)

Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur motion du sénateur Kenny, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

PÊCHES ET OCÉANS

DÉPÔT DU RAPPORT VISÉ À L'ARTICLE 104 DU RÈGLEMENT

L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateur, conformément à l'article 104 du Règlement du Sénat, j'ai l'honneur de déposer le premier rapport du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans, concernant les dépenses engagées par le comité au cours de la deuxième session de la 37e législature.

(Le texte du rapport figure à la page 148 des Journaux du Sénat d'aujourd'hui.)

[Traduction]

LE BUDGET DES DÉPENSES DE 2003-2004

AVIS DE MOTION AUTORISANT LE COMITÉ DES FINANCES NATIONALES À ÉTUDIER LE BUDGET SUPPLÉMENTAIREDES DÉPENSES (B)

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je donne avis que demain, le vendredi 20 février 2004, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des finances nationales soit autorisé à étudier, afin d'en faire rapport, les dépenses projetées dans le Budget supplémentaire des dépenses (B) pour l'exercice se terminant le 31 mars 2004, à l'exception du crédit 10b du Parlement.

AVIS DE MOTION VISANT À RENVOYER LE CRÉDIT 10B DU BUDGET SUPPLÉMENTAIRE DES DÉPENSES (B) AU COMITÉ MIXTE PERMANENT DE LA BIBLIOTHÈQUE DU PARLEMENT

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je donne avis que demain, le vendredi 20 février 2004, je proposerai:

Que le Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement soit autorisé à étudier les dépenses projetées au crédit 10b du Parlement contenu dans le Budget supplémentaire des dépenses (B) pour l'exercice se terminant le 31 mars 2004; et

Qu'un message soit transmis à la Chambre des communes pour l'en informer.

LE SÉNAT

LES SÉNATEURS DÉSIGNÉS POUR SIÉGER AUX COMITÉS MIXTES—MESSAGE AUX COMMUNES—AVIS DE MOTION

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je donne avis que demain, le vendredi 20 février 2004, conformément au paragraphe 59(18) du Règlement, je proposerai:

Qu'un message soit transmis à la Chambre des communes pour l'informer des noms des honorables sénateurs désignés pour faire partie des comités mixtes permanents comme en fait état le deuxième rapport du Comité de sélection adopté le 3 février 2004.

(1350)

PROJET DE LOI SUR LES CANDIDATURES DE COMPÉTENCE FÉDÉRALE

PREMIÈRE LECTURE

L'honorable Terry Stratton présente le projet de loi S-13, Loi visant à accroître la transparence et l'objectivité dans la sélection des candidats à certains postes de haut niveau de l'autorité publique.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président intérimaire: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Stratton, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

LES LANGUES OFFICIELLES

LE STATUT BILINGUE DE LA VILLE D'OTTAWA—PRÉSENTATION DE PÉTITIONS

L'honorable Joan Fraser: Honorables sénateurs, conformément à l'alinéa 4h) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer des pétitions signées par 95 personnes qui demandent qu'Ottawa, la capitale du Canada, soit déclarée ville bilingue, pour refléter la dualité linguistique du pays. Les pétitionnaires demandent au Parlement de considérer les points suivants:

Que la Constitution du Canada reconnaît le français et l'anglais comme les deux langues officielles de notre pays, ayant un statut et des droits et privilèges égaux quant à leur usage dans les institutions du gouvernement du Canada;

Que l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867 désigne la ville d'Ottawa comme le siège du gouvernement du Canada;

Que les citoyens ont le droit, dans la capitale nationale, d'avoir accès aux services offerts par les institutions du gouvernement du Canada dans la langue officielle de leur choix, soit en français, soit en anglais;

Que la capitale du Canada doit être le reflet de la dualité linguistique qui est au cœur de notre identité collective et qui caractérise la nature même de notre pays;

Par conséquent, les pétitionnaires demandent au Parlement de confirmer dans la Constitution du Canada qu'Ottawa, la capitale du Canada, doit être déclarée officiellement bilingue en vertu de l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867 à 1982.

[Français]

L'honorable Viola Léger: Honorables sénateurs, conformément à l'article 4h) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer en cette Chambre les pétitions de 84 signataires demandant de déclarer Ottawa, la capitale du Canada, une ville bilingue reflétant la dualité linguistique du pays.

Les pétitionnaires prient le Parlement de considérer les points suivants:

Que la Constitution du Canada reconnaît le français et l'anglais comme les deux langues officielles de notre pays, ayant un statut et des droits et privilèges égaux quant à leur usage dans les institutions du gouvernement du Canada;

Que l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867 désigne la ville d'Ottawa comme le siège du gouvernement du Canada;

Que les citoyens ont le droit, dans la capitale nationale, d'avoir accès aux services offerts par les institutions du gouvernement du Canada dans la langue officielle de leur choix, soit en français, soit en anglais;

Que la capitale du Canada doit être le reflet de la dualité linguistique qui est au cœur de notre identité collective et qui caractérise la nature même de notre pays;

Par conséquent, les pétitionnaires demandent au Parlement de confirmer dans la Constitution du Canada qu'Ottawa, la capitale du Canada, doit être déclarée officiellement bilingue en vertu de l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867 à 1982.

L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, conformément à l'article 4h) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer en cette Chambre les pétitions de 71 signataires demandant de déclarer Ottawa, la capitale du Canada, une ville bilingue reflétant la dualité linguistique du pays.

Les pétitionnaires prient le Parlement de considérer les points suivants:

Que la Constitution du Canada reconnaît le français et l'anglais comme les deux langues officielles de notre pays, ayant un statut et des droits et privilèges égaux quant à leur usage dans les institutions du gouvernement du Canada;

Que l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867 désigne la ville d'Ottawa comme le siège du gouvernement du Canada;

Que les citoyens ont le droit, dans la capitale nationale, d'avoir accès aux services offerts par les institutions du gouvernement du Canada dans la langue officielle de leur choix, soit en français, soit en anglais;

Que la capitale du Canada doit être le reflet de la dualité linguistique qui est au cœur de notre identité collective et qui caractérise la nature même de notre pays;

Par conséquent, les pétitionnaires demandent au Parlement de confirmer dans la Constitution du Canada qu'Ottawa, la capitale du Canada, doit être déclarée officiellement bilingue en vertu de l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867 à 1982.


[Traduction]

PÉRIODE DES QUESTIONS

LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET LA PROTECTION CIVILE

LA NOUVELLE-ÉCOSSE—LA TEMPÊTE HIVERNALE—LA DÉCLARATION DE L'ÉTAT D'URGENCE

L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Comme le ministre le sait, la Nouvelle-Écosse a été durement touchée par une énorme tempête de neige, à un point tel que le gouvernement provincial a déclaré l'état d'urgence. Le ministre peut-il dire au Sénat si la province a demandé l'aide du gouvernement fédéral et, dans l'affirmative, quel genre d'aide a été demandé ou offert?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, tous les Canadiens sont sans doute au courant de la tempête qui fait rage actuellement en Nouvelle-Écosse, mais je n'ai encore reçu aucun message de la part du gouvernement de la Nouvelle-Écosse au sujet de la déclaration de l'état d'urgence.

Le sénateur Comeau: Le ministre pourrait-il chercher à savoir si la Nouvelle-Écosse a demandé notre aide et, dans l'affirmative, si les forces armées viendront au secours de la Nouvelle-Écosse, si une telle aide est nécessaire, et quel sera le niveau de l'aide?

Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, j'inclurai cela dans mes recherches. Comme le sénateur Comeau le sait, la province doit demander expressément l'aide des forces armées. Je n'ai pas entendu dire qu'elle l'ait fait.

LA SANTÉ

LE PROGRAMME DE LUTTE CONTRE LE TABAGISME

L'honorable Wilbert J. Keon: Honorables sénateurs, même si le nombre de fumeurs au Canada continue de diminuer, une étude de Santé Canada parue récemment révèle que, en 1988, 100 bébés sont morts de causes liées au tabagisme, y compris l'insuffisance de poids à la naissance et des complications respiratoires. Le nombre de décès liés au tabagisme et l'incidence du cancer du poumon chez les femmes ont également augmenté, selon ce rapport.

Le printemps dernier, le Canada a appuyé la Convention-cadre pour la lutte antitabac de l'Organisation mondiale de la santé qui vise, notamment, à lutter contre le tabagisme et l'exposition à la fumée des autres.

Voici ma question: que fait le gouvernement fédéral pour contribuer à la réalisation de ce programme?

(1400)

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Tout d'abord, permettez-moi de dire, honorables sénateurs, que j'apprécie les questions du sénateur Keon, car elles informent le Sénat de diverses questions préoccupantes sur le plan sanitaire.

Deuxièmement, en réponse à la question du Sénateur Keon, probablement pas assez, mais je vais étudier la situation.

Le sénateur Keon: Honorables sénateurs, quatre membres du Comité consultatif ministériel sur la lutte contre le tabagisme ont démissionné de leur poste l'an dernier, affirmant qu'ils n'avaient qu'un accès extrêmement limité à l'ancienne ministre de la Santé, Anne McLellan, et qu'on les avait empêchés de mener des travaux véritablement valables. Le Programme fédéral de lutte contre le tabagisme a également vu son financement diminuer de 13 millions de dollars par rapport à l'année dernière. Bien que le pourcentage des fumeurs ait diminué ces dernières années au Canada, des dizaines de milliers de personnes meurent encore de maladies liées au tabagisme, comme nous le savons tous.

Le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il nous dire si le nouveau gouvernement va rétablir à la fois les crédits et la priorité de la campagne de lutte contre le tabagisme?

Le sénateur Austin: Pour le moment, honorables sénateurs, je ne suis pas en mesure de le faire mais, encore une fois, je vais m'informer et je tiendrai l'honorable sénateur au courant.

LE SÉNAT

LES ÉTATS-UNIS—LA PARTICIPATION À UN SYSTÈME DE DÉFENSE ANTIMISSILE—DEMANDE D'UN DÉBAT

L'honorable Douglas Roche: Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Aujourd'hui, à la Chambre des communes, pour la deuxième fois cette semaine, il se tient un débat sur l'éventuelle participation du Canada au système américain de défense antimissile. Cela témoigne certainement de l'existence d'un profond intérêt pour ce sujet au Parlement.

Le leader du gouvernement va-t-il faire en sorte qu'un débat ait lieu au Sénat et envisager de confier à un comité l'examen de cette question, qui revêt une importance centrale pour la politique étrangère du Canada?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, certes, je conviens que cette question est importante pour la politique étrangère du Canada dans les domaines de la défense, de la sécurité et des affaires étrangères, mais le débat auquel le sénateur Roche a fait allusion se tient à l'autre endroit et toutes les questions sont sur la table. Le débat à l'autre endroit est exhaustif; dès lors, je ne vois pas très bien ce qu'on y ajouterait en tenant un débat en ce moment au Sénat.

Le sénateur Lynch-Staunton: L'influence du Sénat est bien insignifiante.

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

LES ÉTATS-UNIS—LA PARTICIPATION AU SYSTÈME DE DÉFENSE ANTIMISSILE

L'honorable Douglas Roche: Un débat débouchant sur l'étude de ce sujet aborderait la question, très litigieuse, de savoir si le système terrestre est indissociable du système spatial. Il pourrait aussi être l'occasion d'examiner l'annonce faite aujourd'hui par le gouvernement de Russie, et rapportée par Associated Press, selon laquelle ce pays a perfectionné une arme capable de pénétrer n'importe quel bouclier antimissile. Il y a certainement là, honorables sénateurs, matière à une réflexion sérieuse du Sénat sur la question.

En ce qui a trait à l'examen de la politique étrangère du Canada et de sa politique de défense, qui fera enfin l'objet d'un rapport à la fin de 2004, et dans l'intervalle la vie continue, de nombreuses décisions vont devoir être prises relativement à la politique étrangère. Aussi, je poserai la question suivante au leader du gouvernement: sur quelles valeurs le gouvernement va-t-il fonder ses décisions? Sur quelles valeurs, en ce qui a trait aux questions de politique étrangère et de défense, le nouveau gouvernement va-t-il fonder ses décisions?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, comme toujours, le sénateur Roche domine la situation.

L'examen de la politique des affaires étrangères et de la défense va démarrer sous peu, mais comme le sénateur Roche l'a dit, le rapport n'est pas attendu avant la fin de cette année.

Je souscris également à ce que disait l'honorable sénateur, à savoir que des décisions devront être prises dans l'intervalle et que la politique canadienne en matière d'affaires étrangères et de défense ne peut attendre les résultats de l'étude. Toutefois, les questions qui n'auront pas à être réglées d'ici là seront abordées dans le cadre de l'étude.

En ce qui concerne le dernier volet de la question de l'honorable sénateur, je crois que l'objet de toute l'étude est de répondre à la question de l'honorable sénateur quant à la mesure dans laquelle les valeurs canadiennes doivent influer sur nos intérêts et notre politique dans le domaine des affaires étrangères et sur nos intérêts et notre politique en matière de défense. Dans la mesure où c'est utile, et je suis certain que ce ne l'est pas beaucoup, je dirais que la défense, y compris, selon moi, les questions touchant la paix et le désarmement, sont des questions importantes qui méritent examen.

LES TRAVAUX PUBLICS ET LES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

LE RAPPORT DE LA VÉRIFICATRICE GÉNÉRALE—LE PROGRAMME DES COMMANDITES—LA DIVULGATION DE DOCUMENTS DU CABINET

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et fait suite aux questions que j'ai posées hier au sujet de la divulgation des documents de l'enquête.

Le premier ministre a promis que tous les documents du Cabinet seraient communiqués au Comité des comptes publics pour faciliter son enquête sur le scandale des commandites. Le leader du gouvernement sait-il maintenant si l'utilisation de ces documents sera assortie de conditions? Par exemple, le comité sera-t-il tenu de les étudier à huis clos?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le premier ministre a demandé le consentement de l'ancien premier ministre Chrétien pour qu'on puisse avoir accès aux documents pertinents. Ce consentement a été accordé.

Quant aux modalités d'utilisation de ces documents, elles tiennent à la nature des documents du Cabinet. Ces documents traitent de questions qui, au nom d'une politique qui correspond à la pratique acceptée par tous les gouvernements, ne devraient pas être divulguées au grand public. Je crois comprendre et je pense que les documents seront divulgués dans des conditions qui permettront au comité de comprendre les questions en jeu.

Le sénateur Oliver: Comme les honorables sénateurs le savent, le mandat de l'enquête publique devrait être rendu public aujourd'hui. Je n'en connais pas encore la teneur. Même si le mandat n'a pas été publié, le leader du gouvernement peut-il nous dire si les documents du Cabinet seront également à la disposition de la commission d'enquête?

Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, le mandat sera effectivement rendu public, du moins je le crois. Il a été rédigé à la satisfaction du commissaire, le juge Gomery. Le premier ministre, le très honorable Paul Martin, a dit que le commissaire pourra voir tout ce qu'il voudra.

Là encore, je présume qu'il faudra prendre des décisions au sujet des règles qui s'appliquent normalement aux documents du Cabinet aux termes des lois en vigueur.

LE RAPPORT DE LA VÉRIFICATRICE GÉNÉRALE—LE PROGRAMME DE COMMANDITES—L'IMPLICATION DU PERSONNEL MINISTÉRIEL

L'honorable W. David Angus: D'abord, honorables sénateurs, je tiens à remercier le leader du gouvernement au Sénat de la réponse qu'il a donnée mardi, avant mon arrivée à la Chambre, sur les rôles de Pierre Tremblay et de Charles (Chuck) Guité.

Honorables sénateurs, il semble que plus on creuse dans ce bourbier qu'est le scandale des commandites, et plus il grossit et devient dégoûtant. À l'autre endroit, hier, on a déposé un document concernant les sociétés ayant été recommandées pour des marchés publics. Aujourd'hui, la presse fait état des entretiens de Mario Laguë, directeur des communications du très honorable premier ministre, le Très honorable Paul Martin, et de sa participation au programme des commandites en sa qualité de haut fonctionnaire du Bureau du Conseil privé responsable de la stratégie fédérale de communication. Hier, le très honorable premier ministre a affirmé à la Chambre des communes que tous les ministres avaient été ou étaient interrogés pour savoir s'ils avaient eu connaissance de la moindre irrégularité dans le programme de commandites.

(1410)

Le leader du gouvernement peut-il assurer à cette assemblée qu'on questionne également tous les membres du personnel des ministres qui sont interrogés au sujet de leur rôle dans cette affaire afin de savoir s'ils ont eu eux aussi connaissance d'une quelconque irrégularité?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, comme nous le savons tous, dans le cadre des discussions avec les ministres éventuels, une divulgation complète a été demandée non seulement aux candidats qui sont actuellement ministres, mais aussi à un certain nombre d'autres personnes de l'autre endroit, et peut-être d'ici, je ne le sais pas. Je peux assurer à l'honorable sénateur Angus qu'il s'agissait d'une divulgation très complète. Les mêmes règles s'appliquent aux membres du personnel en vertu des lignes directrices relatives aux conflits d'intérêts diffusées par le premier ministre à l'intention des ministres et de leur personnel. D'après ce que je sais du processus, toutes ces personnes auraient dû être interrogées et faire une divulgation complète avant leur embauche.

Le sénateur Angus: Honorables sénateurs, le leader du gouvernement possède-t-il des renseignements indiquant que Mario Laguë a été interrogé au sujet de son rôle? Peut-il également indiquer si M. Laguë est toujours un membre clé du personnel du premier ministre?

Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, je crois savoir que Mario Laguë a été interrogé, qu'il a fourni tous les détails et que le premier ministre se réjouit qu'il l'ait fait et qu'il ne soit impliqué d'aucune façon dans les enquêtes en cours.

Le sénateur Angus: Fait-il encore partie du personnel?

Le sénateur Austin: Oui.

LE RAPPORT DE LA VÉRIFICATRICE GÉNÉRALE—LE PROGRAMME DES COMMANDITES—L'IMPLICATION DE DIRIGEANTS D'ORGANISMES DE LA COURONNE

L'honorable W. David Angus: Notre ami Jack Aubry a publié un article dans l'édition d'aujourd'hui de l'Ottawa Citizen, dont le titre dit que Gagliano aurait discuté du programme des commandites avec des dirigeants d'organismes de la Couronne. Il y est mentionné que le président du Conseil du Trésor, Reg Alcock, interrogera ces dirigeants d'organismes de la Couronne et précisera, s'il y a lieu, s'il faut les congédier ou les soumettre à d'autres mesures.

Qui sont ces dirigeants d'organismes de la Couronne? S'agit-il seulement de présidents ou de chefs de la direction, ou s'agit-il aussi de membres de conseil d'administration qui ont été nommés par décret?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, j'espère que les Débats du Sénat rapporteront fidèlement que le sénateur Angus a bien dit «Crown heads» et non pas «crowned heads».

Honorables sénateurs, le président du Conseil du Trésor faisait référence aux cinq sociétés d'État mentionnées dans le rapport de la vérificatrice générale. Pour autant que je sache, certaines entrevues ont déjà eu lieu alors que d'autres sont en train de se dérouler séparément avec le président et le chef de la direction, dans les cas ou ces fonctions sont séparées. Je ne suis pas au courant si des membres du conseil d'administration de ces sociétés d'État sont interrogés. Je n'ai aucune information à ce sujet.

LE RAPPORT DE LA VÉRIFICATRICE GÉNÉRALE—LE PROGRAMME DES COMMANDITES—LES RENCONTRES ENTRE LES MINISTRES ET LES DIRIGEANTS D'ORGANISMES DE LA COURONNE

L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, dans le même article du Citizen, M. Aubry relate la façon dont M. Gagliano organisait des déjeuners de travail trimestriels avec les dirigeants de diverses sociétés d'État et dit que M.Gagliano les incitait instamment à contribuer à accroître la présence canadienne au Québec, peut-être en participant au Programme de commandites. M. John Grant, l'ancien dirigeant de la Société immobilière du Canada, a refusé de jouer le jeu de M. Gagliano en rappelant qu'il faut garder une distance adéquate dans les relations entre le gouvernement et la Couronne.

Que pense le gouvernement du fait que ces sociétés autonomes recevaient de telles directives de la part de ce ministre? D'autres ministres du Cabinet agissaient-ils de la sorte en vertu de la même politique?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, permettez-moi d'abord de dire que, lorsqu'un sénateur se base sur un article émanant de la presse, il est entendu, selon nos règles, qu'il s'en tiendra aux faits exposés dans cet article.

Bien sûr, je ne sais pas quelle est la part de vérité dans l'article de Jack Aubry. Toutefois, pour répondre partiellement à la question du sénateur, je crois qu'il est parfaitement normal que le ministre responsable d'organismes de la Couronne rencontre les dirigeants de ces organismes et qu'il tienne, à l'occasion, une réunion regroupant tous les dirigeants de ces organismes étant donné qu'ils ont des politiques et des dossiers communs.

Le simple fait que le ministre tienne une telle réunion ne suppose en rien qu'un comportement ait été inapproprié.

Le sénateur Tkachuk: Honorables sénateurs, contrairement au sénateur qui a fait une déclaration au sujet d'un article de la presse, je voudrais savoir si l'article en question est fondé. Je ne suis pas certain que le leader du gouvernement ait répondu à cette question. Je vais répéter ma question et je poserai ensuite une question complémentaire.

Le gouvernement a-t-il pour politique que les ministres tiennent de telles réunions à l'occasion d'un déjeuner dans un petit restaurant, lorsqu'ils veulent que des programmes gouvernementaux soient instaurés au sein de sociétés d'État? ? Le gouvernement Martin est-il d'avis que les affaires qui concernent les sociétés d'État et le ministre des Travaux publics devront être menées de la même façon?

Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, je suis ravi de voir que les questions du sénateur Tkachuk ne concernent que la justesse des articles parus dans la presse. Le sénateur a ensuite dit qu'il fallait s'en tenir aux faits et il a posé une question quant à savoir si les faits sont véridiques. Je répète la réponse que je lui ai donnée.

Pour ce qui est des rencontres des ministres avec les dirigeants de sociétés d'État qui relèvent d'eux, j'ai dit que cette façon de faire était tout à fait normale. Dans ce type d'organisation, il n'y a rien d'irrégulier à ce qu'un ministre rencontre les dirigeants des sociétés d'État.

Enfin, si le sénateur me demande si une telle réunion a été entachée d'irrégularités, je n'ai pas de renseignements à ce sujet, le sénateur n'en a pas et je ne sais pas si Jack Aubry en a.

Le sénateur Tkachuk: Est-ce à dire que M. John Grant, qui est la source de cette histoire, ne dit pas la vérité?

Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, je ne fais pas rapport à cette assemblée au nom de M. John Grant.

LES AFFAIRES INTERGOUVERNEMENTALES

LES LANGUES OFFICIELLES—LE STATUT BILINGUE DE LA VILLE D'OTTAWA

L'honorable Eymard G. Corbin: Honorables sénateurs, les questions complémentaires peuvent parfois rester sans réponse pendant des semaines.

Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat.

[Français]

La question du bilinguisme, de la dualité linguistique dans la capitale nationale n'est pas seulement l'affaire des résidents de la région de la capitale nationale. C'est une question nationale. Le gouvernement a-t-il entamé ou est-il disposé à entamer des pourparlers avec la province de l'Ontario pour rendre la ville d'Ottawa bilingue? Étant donné que la ville d'Ottawa est une créature de la législature ontarienne, il est tout à fait normal que nous entamions des pourparlers auprès du gouvernement provincial pour qu'il puisse prendre des initiatives dans cette direction.

(1420)

Le ministre peut-il nous dire si le gouvernement a pris des initiatives en ce sens ou s'il a l'intention d'en prendre bientôt?

[Traduction]

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je vais me renseigner auprès de l'honorable Pierre Pettigrew, le ministre des Affaires intergouvernementales, afin de déterminer si des démarches officielles ont été entamées. Je serais intéressé de connaître la réponse à cette question.

Je vais aussi me renseigner pour savoir si la ville d'Ottawa a pris officiellement une décision à ce sujet et si elle appuierait la tenue d'un référendum, exigé par la province ou la municipalité, sur cette question.

Son Honneur la Présidente intérimaire: L'honorable sénateur Fraser a la parole.

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, conformément au paragraphe 33(3) du Règlement, je propose que le sénateur St. Germain puisse maintenant prendre la parole.

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, j'appuie la motion!

LES TRAVAUX PUBLICS ET LES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

LE RAPPORT DE LA VÉRIFICATRICE GÉNÉRALE—LE PROGRAMME DES COMMANDITES—L'IMPARTIALITÉ DU COMMISSAIRE-ENQUÊTEUR

L'honorable Gerry St. Germain: Quel gentilhomme de l'Ouest!

Honorables sénateurs, ma question complémentaire s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. On a dit hier que le juge montréalais, John Gomery, qui dirigera la commission d'enquête publique sur le scandale de la corruption, est aussi le président de la Commission du droit d'auteur du Canada et que c'est le gouvernement libéral qui l'y a nommé. Je connais les circonstances qui entourent ces nominations. Je sais parfaitement que le titulaire de ce poste doit être un juge et que ce dernier n'est pas rémunéré pour assumer ces fonctions et ainsi de suite.

Loin de moi l'idée de laisser planer quelque doute que ce soit sur l'intégrité du juge. Son intégrité est indiscutable. Il a toutefois été placé dans une position intenable, ne croyez-vous pas, monsieur le leader du gouvernement au Sénat? Pendant les dix dernières années du régime Chrétien, toutes les nominations faites par le gouvernement ont revêtu un caractère sectaire. Par conséquent, la population aura l'impression que cette nomination revêt, elle aussi, un caractère partisan. Même le juge dit que cette situation est intenable. Que pense le leader du gouvernement de cette déclaration?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je suis absolument certain que, si le sénateur St. Germain réfléchit à sa question et à ses allégations...

Le sénateur St. Germain: Ce n'est pas une allégation.

Le sénateur Austin: ... que chacune des nominations effectuées au cours des 10 dernières années a été une nomination partisane, il retirera ses paroles. Je dis cela parce que cela s'appliquerait à la nomination des juges de la Cour suprême du Canada, du personnel des tribunaux provinciaux...

Le sénateur Bryden: Et des sénateurs.

Le sénateur Austin: Je n'irai pas jusqu'à dire les sénateurs.

Mais le sénateur St. Germain connaît la réponse à cette question. Je suis heureux d'avoir entendu dire de sa part qu'il ne récuse en rien le juge Gomery. Le sénateur St. Germain sait que le juge Gomery a servi le Canada grâce à l'occasion d'un déjeuner dans un petit restaurant son expertise dans le domaine des droits d'auteur et qu'il n'a pas été rémunéré.

Enfin, je suis sûr que le sénateur St. Germain sait que le juge Gomery a déclaré qu'il donnerait sa démission de la Commission du droit d'auteur dès qu'il recevrait le mandat et commencerait l'enquête.

Le sénateur St. Germain: Honorables sénateurs, vous, moi et d'autres personnes dans cette enceinte savent qu'il y a eu des nominations qui n'étaient peut-être pas partisanes. Je parle de la perception du grand public. Le sénateur Austin, en tant que leader du gouvernement au Sénat et en tant que ministre d'expérience sous le régime Trudeau, sait ce que notre région du pays en pense, à tort ou à raison. Il ne s'agit pas de la réalité mais d'une perception. Ne croyez-vous pas que cette perception pourrait être fausse?

Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, si telle est la perception, alors il est du devoir du sénateur St. Germain, de moi-même et de tous ceux qui se trouvent ici de dire ce qui est vrai et de rétablir les faits.

[Français]

LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL

TRANSGRESSION POSSIBLE DU CODE D'ÉTHIQUE DE LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA—IMPLICATION DU PROGRAMME DES COMMANDITES

L'honorable Jean-Claude Rivest: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et fait suite à la question posée hier. Je ne sais pas si le ministre a eu le temps d'effectuer les vérifications qui s'imposent concernant un certain voyage en train effectué par des agents de la GRC.

À titre de renseignement additionnel au ministre, pour bien circonscrire ses recherches, M. Odilon Émond, officier de la GRC, dans une lettre rédigée à tous les hauts-officiers de la GRC, disait ceci:

Nous avons obtenu de VIA Rail la commandite d'un train spécial pour nous transporter de Québec à Montréal pour notre bal régimentaire [...]

Et pour aider le ministre dans ses recherches, on précise que l'invitation à cette réception ne s'adressait pas seulement à quelques agents de la GRC, mais à tout l'état-major d'Ottawa et à tous les commandants de la GRC à travers le Canada.

Le ministre a-t-il obtenu des informations additionnelles? Je rappelle, d'une part, qu'il s'agit d'une pratique courante et normale de la GRC; et d'autre part, que nous aimerions obtenir réponse à cette question. Le journaliste ayant posé la question à la GRC, ses représentants ont refusé de commenter.

Deuxièmement, en ce qui a trait au dossier des commandites, le gouvernement ne devrait-il pas préciser la nature du mandat qui a été donné à la Sûreté du Québec pour prendre la relève de la GRC dans la partie de l'enquête concernant VIA Rail, dans la mesure où des hauts-officiers de la GRC auraient bénéficié d'un avantage particulier de VIA Rail, ce qui semblerait contraire au code d'éthique et au bon sens même de la gestion des affaires de la GRC?

[Traduction]

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai vu dans le journal l'article dont parle l'honorable sénateur. C'est tout ce que je sais relativement à la GRC et aux avantages que celle-ci a pu obtenir de VIA Rail en contrepartie. Je vais tenter d'en apprendre davantage à ce sujet.

Pour ce qui du rôle joué par la Sûreté du Québec dans l'enquête sur le rôle de la GRC relativement à la commandite de son Carrousel, je ne vois pas ce qui devrait être précisé dans son mandat. Celui-ci a été négocié entre la Sûreté du Québec, la GRC et le procureur général du Canada. Jusqu'à présent, il semble satisfaire les trois parties.

[Français]

RÉPONSE DIFFÉRÉE À UNE QUESTION ORALE

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer la réponse différée à une question orale posée par l'honorable sénateur Andreychuk, le 4 février 2004, au sujet de l'examen parlementaire de la Loi sur la protection de l'information.

LA JUSTICE

L'EXAMEN DE LA LOI SUR LA PROTECTION DE L'INFORMATION

(Réponse à la question posée par l'honorable A. Raynell Andreychuk le 4 février 2004)

Bien que la question telle que posée ne réfère pas spécifiquement à l'article 4 de la Loi sur la protection de l'information, les extraits des débats du Sénat du 3 février 2004 démontrent que c'est bien à cet article que fait référence le sénateur Andreychuk.

Tel que mentionné lors de débats tenus au Sénat les 3 et 4 février 2004, l'honorable Anne McLellan, Vice-première ministre et Ministre de la Sécurité publique, annonçait, le 28 janvier 2004, qu'il serait demandé au Parlement d'examiner l'article 4 de la Loi sur la protection de l'information. L'honorable Irwin Cotler, en sa qualité de ministre de la Justice, est responsable de la Loi sur la protection de l'information et donc de l'examen parlementaire de l'article 4.

Au cours de cet examen, le Parlement aura la possibilité de se pencher sur bon nombre de questions stratégiques soulevées par l'article 4, dont celles de déterminer quels sont les documents qui devraient être protégés et dans quels cas une divulgation devrait être justifiée au nom de l'intérêt public.

Le ministère de la Justice a entrepris des travaux préparatoires en vue d'assister les parlementaires dans leur examen de l'article 4 de la Loi sur la protection de l'information. Il n'envisage ou n'examine aucune modification spécifique à l'article 4 en ce moment.


ORDRE DU JOUR

PROJET DE LOI SUR LA REPRÉSENTATION ÉLECTORALE DE 2003

DEUXIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Smith, c.p., appuyée par l'honorable sénateur Robichaud, C.P., tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-5, Loi sur la date de prise d'effet du décret de représentation électorale de 2003.

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, pour la troisième fois depuis 1993, nous voici devant une initiative dont le but est la manipulation de la Loi électorale. Dans les deux cas précédents, le Sénat a su prendre ses responsabilités en bloquant les tentatives de manipulation du processus.

En 1994 et 1995, le gouvernement voulait, pour des raisons partisanes, reporter la mise en place de la nouvelle carte électorale. Cette fois-ci, pour des élections anticipées en 2004, il s'agit de faire exception à la loi en réduisant de cinq mois le délai entre la proclamation de la nouvelle carte et son entrée en vigueur.

(1430)

On nous assure que le projet de loi C-5 jouit de l'appui de presque tous les partis politiques à la Chambre des communes. Loin de nous persuader d'adopter le projet de loi hâtivement, cet argument devrait nous faire réfléchir. Le délai de 12 mois prévu dans la loi actuelle est là pour accorder à tous les intéressés, candidats, partis politiques aux plans local et national, électeurs, suffisamment de temps pour s'habituer aux nouvelles limites des circonscriptions, pour s'organiser et pour se préparer avant le déclenchement des élections.

Les intérêts des députés sortants ne sont pas toujours identiques à ceux des autres personnes en cause. Il se pourrait même que des députés se placent en position de conflit d'intérêts. C'est la raison pour laquelle, dans un tel cas, il incombe au Sénat d'examiner de façon toute particulière les raisons invoquées par les collègues de l'autre endroit.

[Traduction]

Notre ami, le sénateur Smith, est venu proclamer vendredi que ce projet de loi visait à améliorer la qualité de la démocratie représentative. J'ignore si c'est l'enthousiasme de la jeunesse ou la loyauté aveugle à son parti qui l'a amené à faire une déclaration aussi exagérée au sujet de ce projet de loi. Je ne peux m'empêcher de me rappeler que cette affirmation provient d'un gouvernement qui, en 1994 et en 1995, s'apprêtait à faire adopter à toute vapeur des projets de loi qui auraient obligé le pays à tenir des élections en 1997 en fonction des chiffres de population de 1981: toute une qualité de démocratie représentative!

Entre parenthèses, je ne peux m'empêcher de souligner l'ironie du fait que ce projet de loi provient d'un gouvernement qui fait tant pour se distinguer de ses prédécesseurs. Après tout, ce projet de loi a été présenté l'automne dernier par le gouvernement Chrétien. Nous savons que l'actuel gouvernement Martin a abandonné un certain nombre de projets de loi passablement importants de son prédécesseur. M. Martin s'est départi de la plupart des ministres du gouvernement Chrétien. En fait, on laisse même entendre qu'il ne serait que trop heureux de laisser choir dans l'oubli M. Chrétien lui-même; cela ne l'empêche pas de s'accrocher à ce restant, à cette seule relique de la session précédente, à ce projet de loi qui vise à accélérer le processus de modification des limites des circonscriptions électorales.

Il est très intéressant de voir que le gouvernement fait des pressions si vigoureuses, en recourant à une mesure législative de l'ère Chrétien. En premier lieu, pourquoi M. Chrétien a-t-il présenté ce projet de loi? Tout simplement pour faciliter la tâche à son successeur, M. Martin. M. Diefenbaker aurait trouvé les mots pour décrire cette situation. Il aurait vraisemblablement dit: «Chrétien et Martin, c'est blanc bonnet et bonnet blanc.»

Les sénateurs Smith et Austin, qui sont intervenus brièvement vendredi matin, ont prétendu que ce projet de loi portait sur la création de sept sièges additionnels: trois en Ontario et deux en Colombie-Britannique et deux autres en Alberta. Évidemment, cette explication ne tient pas debout. Ces huit sièges additionnels à la Chambre des communes ont été approuvés définitivement le 25 août dernier, et ce redécoupage entrerait en vigueur toutes élections déclenchées après le 25 août 2004.

Honorables sénateurs, le but de ce projet de loi est d'accélérer les choses pour que M. Martin puisse déclencher des élections dès le 1er avril. Comme je l'ai mentionné hier, ils auraient pu modifier la loi — c'est-à-dire s'ils croyaient vraiment qu'un délai de six mois était suffisant. Toutefois, ils n'ont pas modifié la loi parce qu'ils ne sont pas certains que ce soit suffisant. Ils ne veulent modifier la loi que pour le présent cas, uniquement pour servir les intérêts politiques du Parti libéral. Nous aurons une loi qui prévoira un délai de 12 mois. Cependant, à intervalle de dix ans environ et, il va sans dire, à la convenance du gouvernement ou des députés qui se présentent à la Chambre, de tous les partis, nous prolongerons cette période au-delà de 12 mois ou nous la raccourcirons à moins de 12 mois, en fonction de l'opportunisme politique.

Le sénateur Smith a soulevé quelques autres questions que j'espère moi aussi aborder au cours des minutes qui me restent. Le sénateur a dit, à juste titre je le souligne, que la représentation selon la population est la formule qui s'applique et le principe le plus important, mais que nous parlons en réalité de parité relative du droit de vote. Il est vrai qu'il n'y a jamais eu au Canada de représentation selon la population. Il a mentionné, à cet égard, le plancher sénatorial et a précisé qu'il est établi qu'aucune province ne peut avoir moins de députés à la Chambre des communes qu'elle n'a de représentants au Sénat. Comme nous le savons tous, cela ne peut être modifié que par une modification de la Constitution.

Il y a d'autres éléments qu'il convient de signaler en passant. Que l'on pense notamment à la Loi de 1985 sur la représentation électorale. En vertu de cette loi, aucune province ne pouvait avoir moins de sièges qu'elle n'en avait obtenu en 1976. Par conséquent, cinq provinces comptaient au total 18 sièges de plus qu'elles n'auraient eu droit si le principe de la représentation selon la population avait été appliqué. J'espère, honorables sénateurs, que je peux, sans offenser qui que ce soit, dire de quelles provinces il s'agit et dans quelle mesure elles sont surreprésentées.

Depuis l'entrée en vigueur de la Loi de 1985 sur la représentation électorale, la Saskatchewan est surreprésentée de cinq députés, le Manitoba, de quatre, le Québec, de sept, et les provinces de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve-et-Labrador de un chacune. La Nouvelle-Écosse est déjà surreprésentée de deux députés, et dans le cas de Terre-Neuve-et-Labrador, de un, en raison du plancher sénatorial.

Du strict point de vue de la représentation selon la population, nous avons donc non seulement le plancher sénatorial, qui ne peut être changé qu'au moyen d'une modification constitutionnelle — et personne ne propose un tel changement — mais également la Loi de 1985 sur la représentation électorale, qui peut être modifiée par le seul Parlement. Je ne prétends pas qu'il faudrait faire table rase de tout cela, mais nous devons examiner le rapport de la commission Lortie et d'autres qui se sont penchés sur cette question et qui ont proposé des façons élégantes d'éliminer progressivement ces dispositions afin de nous rapprocher le plus possible de la représentation selon la population.

L'honorable sénateur a eu raison de signaler que la révision ne porte pas seulement sur l'ajout de sièges qui peuvent être accordés à plusieurs provinces en raison de l'évolution démographique, mais aussi sur les nombreux rajustements qu'il faut apporter à la délimitation des circonscriptions existantes à l'intérieur des provinces à cause des déplacements de la population. Je remarque par exemple dans la documentation publiée par Élections Canada que, alors que la révision s'est fondée sur le recensement de 1991, nous avions les résultats suivants en Ontario, au recensement de 2001: la circonscription de Markham se situait à 32 p. 100 au-dessus du quotient; celle de Mississauga-Ouest était à 40 p. 100 au-dessus; Barrie—Simcoe—Bradford était de 44 p. 100 au-dessus; Vaughan—King—Aurora était de 53 p. 100 au-dessus; Oak Ridges était de 61 p. 100 au-dessus, et Brampton-Ouest—Mississauga de 76 p. 100 au-dessus. Je peux encore donner aux sénateurs des chiffres semblables au sujet de l'Alberta et de certaines régions de la Nouvelle-Écosse. Il est facile de constater que les déplacements de la population sont si rapides que, en seulement dix ans, le déséquilibre du pouvoir relatif d'un vote, c'est-à-dire la valeur relative de mon vote dans ma circonscription par rapport à un vote dans une autre circonscription, devient plus prononcé.

(1440)

Son Honneur le Président: Je suis désolé d'interrompre l'honorable sénateur, mais son temps de parole est terminé.

Honorables sénateurs, le sénateur Murray a-t-il la permission de poursuivre?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Murray: Merci, honorables sénateurs.

Je voudrais signaler qu'une des propositions qui ont été avancées, et je crois que c'était dans un projet de loi du gouvernement qui est resté en plan il y a un ou deux ans, voulait que, lorsque le recensement révèle d'importants déplacements de population, il faudrait peut-être envisager une révision après cinq ans, sur la base du recensement quinquennal. La commission Lortie a proposé une révision après toutes les élections générales.

Je tiens à dire que cette fois la commission de redécoupage a fait un travail admirable. Jamais elle ne s'est même approchée de la limite de tolérance beaucoup trop généreuse de 25 p. 100 qui est permise par la loi. Dans la très grande majorité des cas, elle a réussi à ramener la taille des circonscriptions à moins de 10 p. 100, et dans de nombreux cas à moins de 5 p. 100, du quotient provincial. Elle a donné un véritable coup de pouce à la démocratie représentative et à la représentation selon la population et on doit la féliciter à cet égard.

J'aimerais que la loi soit modifiée pour que l'on réduise cette limite de tolérance à 10 p. 100 et même moins, sauf dans quelques cas évidents comme le Labrador et certaines grandes circonscriptions du Nord où il faudrait envisager un certain dépassement.

Enfin, il y a également la participation aux élections qui diminue. Je pense que cette question a à voir avec le nouveau Registre national des électeurs. Une étude réalisée par un professeur de l'Université McGill a révélé que l'absence de recensement effectué de porte en porte a eu un effet néfaste sur la participation électorale et qu'elle a entraîné une baisse plus marquée de la participation des jeunes et des pauvres aux élections.

Honorables sénateurs, la Loi de 1985 sur la représentation électorale; la limite de tolérance excessivement généreuse, à mon avis, qui est autorisée par la loi pour ce qui est du dépassement du quotient provincial; la possibilité d'un redécoupage à intervalle de cinq ans dans les régions où l'on observe une grande volatilité dans les mouvements de population; et l'examen du Registre national des électeurs pour voir s'il fait le travail pour lequel il a été conçu, ce qui n'est pas le cas à mon avis, voilà autant de questions sur lesquelles le Sénat devra se pencher à un moment donné.

J'ai vu ce matin dans les journaux que la Chambre des communes entreprend une certaine révision de la loi électorale. Cependant, je vous dis maintenant, comme je l'ai insinué hier, que si nous attendons que la Chambre des communes trouve le courage et la détermination de régler ces questions véritablement difficiles et délicates, nous allons attendre très, très longtemps. Lorsqu'il s'agit des intérêts des députés en place à l'autre endroit, le degré de partisanerie multiple que l'on peut observer est absolument touchant. Par conséquent, certaines de ces questions constituent un travail approprié pour le Sénat. J'espère que nous nous mettrons à la tâche le plus tôt possible.

Des voix: Bravo!

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Est-ce que l'honorable sénateur accepterait de répondre à une question?

Le sénateur Murray: Certainement.

Le sénateur Kinsella: Si je peux poser à l'honorable sénateur la même question que j'ai déjà posée au sénateur Smith, Élections Canada serait-il mieux préparé pour une élection si la loi qui est actuellement en vigueur était respectée, plutôt que d'adopter cette date d'élection hâtive du 1er avril? Si M. Kingsley avait plus de temps, il serait mieux préparé; peut-on le démontrer?

Le sénateur Murray: Je ne saurais dire. Je veux bien croire ceux qui disent que M. Kingsley pourrait être prêt dès le 1er avril.

Élections Canada et son état de préparation ne sont pas tout ce qui compte, ne l'oublions pas. Il y a les candidats, il y a les partis politiques et il y a les électeurs. Je ne suis pas encore convaincu que tous les candidats et tous les partis soient prêts.

Une chose dont je suis certain, c'est qu'à l'autre endroit, pendant trois mandats, ils ont toujours hésité à donner suite aux recommandations visant à réduire l'intervalle entre la fin d'un redécoupage et l'établissement officiel des nouvelles circonscriptions. Ils craignent que cet intervalle ne soit pas assez long pour se préparer.

Ce projet de loi permettra de manipuler le processus pour servir les intérêts politiques du parti qui s'adonne à être au pouvoir. J'ai constaté avec beaucoup de tristesse que, aux premières étapes au moins, cette mesure semblait avoir gagné la complicité — non pas l'appui — de la plupart des autres partis à la Chambre des communes.

Le sénateur Kinsella: L'étymologie du mot «gerrymandering» remonte aux desseins du gouverneur Gerry, au début des années 1800 dans le Commonwealth du Massachusetts, et à la forme des circonscriptions là-bas qui ressemblait beaucoup à celle d'une salamandre, d'où l'expression «gerrymandering». L'honorable sénateur est-il d'avis qu'il y a manifestement ici un cas de remaniement arbitraire des circonscriptions, sur le plan chronologique?

Le sénateur Murray: Je n'avais pas pensé à aborder la chose de cette façon et je remercie l'honorable sénateur de le faire.

L'honorable Douglas Roche: Ma question s'adresse au sénateur Murray. Comme il est très versé dans ces questions, je tiens à savoir ce qu'il en pense. Que pense le sénateur Murray de l'argument selon lequel, à l'arrivée d'un nouveau premier ministre, lorsque celui-ci déclare qu'il forme un nouveau gouvernement et passe ensuite aux gestes au moyen d'un discours du Trône où il énonce son programme, les citoyens du Canada ont le droit d'exprimer leur opinion par le biais d'une élection dans les meilleurs délais, afin de montrer si oui ou non, ils appuient ce gouvernement?

Le sénateur Murray: Honorables sénateurs, j'accepte en principe ce que dit l'honorable sénateur. Toutefois, je ne vois guère de différence entre une élection fondée sur ce principe et tenue dans la dernière moitié de mai et une élection tenue vers la fin de septembre ou le début d'octobre. À mon avis, les Canadiens et les Canadiennes seraient heureux d'attendre à l'automne pour une telle élection et il y a de plus en plus raison de croire que M. Martin serait heureux d'attendre lui aussi.

L'honorable Terry M. Mercer: Honorables sénateurs, j'ai une question pour le sénateur Murray. Il a parlé du recensement des électeurs et de la nécessité de le faire avant chaque élection.

L'honorable sénateur laisse-t-il entendre qu'on devrait abandonner le Registre national des électeurs? Si c'est le cas, ayant dirigé des campagnes dans le passé, je suppose qu'il reconnaît que l'un des plus importants changements et des plus grands avantages qu'un registre national apporterait serait de permettre à ceux d'entre nous qui s'occupent de ces choses de gérer le processus plus efficacement en sachant longtemps à l'avance qui sont les électeurs, même s'il y a des inexactitudes.

De plus, l'honorable sénateur est-il conscient du coût d'un recensement des électeurs? L'un des avantages d'un registre permanent des électeurs est l'économie pour les contribuables des immenses sommes que représente le recensement des électeurs à chaque campagne. Voilà un aspect dont il faut tenir compte.

(1450)

Je crois qu'il pourrait y avoir une façon de combiner les deux et de tenir un recensement des électeurs dans les secteurs où un certain nombre d'électeurs ont déménagé, ou encore là où de la construction a eu lieu et qu'on pourrait ainsi peut-être faciliter les choses dans les deux cas.

Le sénateur Murray: Il y a peut-être une solution, honorable sénateur. Certains d'entre nous ont examiné de façon très rigoureuse les actions du directeur général des élections dès 1996, si je ne m'abuse, au sujet d'un registre permanent. Il n'est pas évident pour moi que ces économies ont été réalisées et nous pourrions examiner cela.

De plus, l'ancien système de dénombrement, au porte à porte, malgré toutes ses lacunes, surtout dans les grandes régions urbaines, alors qu'il était notamment difficile de recruter des gens pour recenser les électeurs, faisait qu'on dénombrait 92 p. 100 des votants admissibles. Le mieux qu'ils aient réussi à faire pour le registre, le premier jour, est 80 p. 100.

On ajoute au registre avec le temps, mais la technologie peut également créer des problèmes. J'ignore si c'était lors d'élections fédérales ou provinciales en Ontario, bien que cela importe peu, car les listes sont échangées. À ce moment-là des centaines d'électeurs de Picton, en Ontario, si je ne m'abuse, ont abouti sur une liste dans une circonscription tout à fait différente, dans une ville ou un village d'une autre circonscription portant un nom semblable à Picton. Des problèmes surgissent avec la technologie, des incidents terribles peuvent se produire avec ce registre permanent.

Je veux tout simplement réexaminer la question et voir s'il est vrai, comme le professeur de l'Université McGill l'a déclaré, qu'il y a des répercussions négatives tout d'abord sur la participation électorale et ensuite, sur le taux de participation des gens plus défavorisés. Je veux savoir si c'est vrai et je vais examiner les coûts. Nous devrions être disposés à réexaminer la question. Je ne veux pas prédire ce que pourrait être ma position lorsque j'aurai étudié les faits.

(Sur la motion du sénateur Di Nino, le débat est ajourné.)

L'ATTRIBUTION DE TEMPS—AVIS DE MOTION

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'interviens conformément à l'article 39 du Règlement pour signaler au Sénat que j'ai eu une discussion avec mon homologue, l'honorable sénateur Kinsella, au sujet de l'étude du projet de loi C-5 et qu'il n'a pas été possible d'en arriver à une entente concernant le temps devant être consacré à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi. Ainsi, conformément à l'article 39 du Règlement, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:

Que, conformément à l'article 39 du Règlement, pas plus de six heures de délibérations ne soient attribuées à l'étude à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-5, Loi sur la date de prise d'effet du décret de représentation électorale de 2003;

Que, lorsque les délibérations seront terminées ou que le temps prévu pour le débat sera écoulé, le Président interrompe, au besoin, les délibérations en cours au Sénat et mette aux voix immédiatement et successivement toutes les questions nécessaires pour disposer de l'étape de la deuxième lecture dudit projet de loi; et

Que tout vote par appel nominal sur lesdites questions soit pris conformément au paragraphe 39(4) du Règlement.

Le sénateur St. Germain: Plus ça change, plus c'est pareil.

RECOURS AU RÈGLEMENT

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, j'invoque le Règlement. J'invite les honorables sénateurs à prendre le Règlement, la version à jour qui est maintenant sur leur pupitre, à la page 39, où le paragraphe 39(1) dit:

Lorsque le Sénat siège, le leader du gouvernement au Sénat ou le leader adjoint du gouvernement au Sénat peut, de sa place au Sénat, déclarer que les représentants des partis n'ont pas réussi à s'entendre sur le nombre précis de jours ou d'heures à attribuer à une quelconque étape d'un débat ajourné [...]

Je ne me rappelle pas que le leader adjoint du gouvernement m'ait demandé, comme le stipule le Règlement, si j'acceptais d'attribuer un nombre précis de jours. Il y a eu une conversation. On ne m'a pas demandé combien de sénateurs du Parti conservateur du Canada désiraient prendre la parole à ce sujet. Si on m'avait posé cette question, j'aurais répondu: «le sénateur Di Nino et moi-même».

Je tiens à ce qu'il soit parfaitement clair que le paragraphe 39(1) du Règlement n'a pas été appliqué. Je sais que c'était une conversation privée. Il nous faudra peut-être mettre ces choses par écrit à l'avenir. Je tiens à dire officiellement que les conditions prévues dans cet article du Règlement n'ont pas été respectées par le leader adjoint du gouvernement.

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, la conversation a effectivement eu lieu, et j'avais clairement compris qu'on avait proposé d'attribuer un certain temps au reste du débat en deuxième lecture de ce projet de loi. J'avais compris qu'il n'y avait eu aucune entente sur ce temps en particulier. C'est pourquoi j'ai agi comme je l'ai fait aujourd'hui. Ce que j'avais compris de la conversation que j'avais eue était très clair — que nous ne pouvions en venir à une entente quant au temps à attribuer au reste du débat. En ce qui concerne les autres sénateurs qui désirent prendre la parole lors du débat en deuxième lecture, cet avis de motion leur offre amplement le temps de le faire.

Le sénateur Kinsella: L'honorable sénateur se rappelle-t-il si, dans la conversation, les mots «attribuer un nombre précis de jours» ont jamais été utilisés, parce que je ne m'en rappelle pas.

Le sénateur Rompkey: Je me souviens certainement avoir parlé de clore le débat à un certain moment la semaine prochaine, ce qui suppose automatiquement qu'il y aura un certain nombre d'heures avant d'arriver à ce moment la semaine prochaine.

Le sénateur Kinsella: Des suppositions et des déductions ont été faites, mais la demande spécifique d'attribution de temps ne l'a pas été. La conversation est claire dans mon esprit.

Je sais que l'honorable sénateur est nouveau dans le poste de leader adjoint et qu'il suivra plus soigneusement les exigences du Règlement, parce que les règles protègent la minorité. Si, pour certains honorables sénateurs, en particulier les nouveaux, nous semblons un peu tatillons à ce sujet, c'est que la minorité dépend du Règlement pour faire fonctionner notre système parlementaire. Je crois que c'est clair.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, c'est une question entre les leaders parlementaires et je n'avais pas l'intention de m'adresser à d'autres sénateurs. L'argument du sénateur Kinsella souligne l'importance de la précision quand il est fait référence au Règlement. Le président de séance se trouve lui-même dans la drôle de position de déterminer qui croire, domaine dans lequel je ne veux pas m'aventurer.

Je vais accepter l'avis de motion, mais je le fais en ajoutant cette réserve: ayant écouté l'échange entre les leaders parlementaires, je les exhorte, ainsi que les autres sénateurs, à faire très attention au Règlement et à en observer les exigences.

(1500)

PROJET DE LOI SUR L'ENREGISTREMENT DE RENSEIGNEMENTS SUR LES DÉLINQUANTS SEXUELS

DEUXIÈME LECTURE

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Pearson, appuyée par l'honorable sénateur Christensen, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-16, Loi concernant l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels et modifiant le Code criminel et d'autres lois en conséquence.

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, je suis heureux d'intervenir et de participer au débat sur le projet de loi C-16, Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels. Le projet de loi C-16, comme on nous l'a dit, remplace le projet de loi C-23, mort au Feuilleton à la dissolution de la Chambre à la mi-novembre.

On devrait, à de nombreux égards, se réjouir du projet de loi C-16. Il représente l'engagement du gouvernement fédéral de créer un registre national des délinquants sexuels et il constituera un excellent outil pour les corps policiers et les organismes d'exécution de la loi du pays chargés d'enquêter sur des infractions d'ordre sexuel.

Cependant, honorables sénateurs, de nombreux aspects du projet de loi ont fait l'objet de critiques. Certains soutiennent que ce projet de loi ne va pas assez loin, ce qui a été dit avec vigueur tant en comité que lors des débats dans l'autre endroit. On dit qu'il s'agit d'une approche édulcorée dans une situation qui requiert une action décisive. Même si l'on dit que ce projet de loi pourrait sauver des vies, ses omissions pourraient également coûter des vies.

Certains voudraient que le projet de loi rende le registre public, comme aux États-Unis. Ils soutiennent qu'ils ne peuvent pas garantir la sécurité des enfants s'ils ne peuvent pas activement faire des recherches pour déterminer si un délinquant sexuel a emménagé dans leur quartier. Le gouvernement et d'autres intervenants soutiennent que le fait de rendre cette information publique provoquerait des chasses aux sorcières et obligerait les délinquants sexuels à se cacher, à ne pas suivre les programmes de traitement et à ne pas faire l'objet de la supervision qui vise à les réintégrer dans la société. Nous devons examiner minutieusement en comité ces points de vue divergents et contradictoires.

D'autres critiques ont été formulées à l'endroit du projet de loi. La mesure législative ne comprendra que les délinquants actuels et nouveaux, et non pas les anciens qui ont purgé leur peine. Le gouvernement de l'Alberta, notamment, voulait moins de rétroactivité et a fait valoir qu'il y avait 27 anciens délinquants qui risquaient de récidiver dans la province. Un autre aspect est que le registre ne contiendra pas de photographies. En outre, cette mesure législative ne recommande pas l'utilisation des actuelles méthodes de suivi à la fine pointe de la technologie que demandent les enquêteurs de police. En plus, les sanctions ne sont pas suffisamment sévères dans le cas des délinquants qui ne s'enregistrent pas. Toutes ces critiques et préoccupations sont valables et exigent notre étude la plus rigoureuse.

Je porte à votre attention les observations de Jim Stephenson, qui a comparu devant le Comité de la justice de l'autre endroit. Il est le père de Christopher Stephenson, victime d'un crime sexuel commis par un récidiviste. M. Stephenson fait des démarches en faveur d'un registre des délinquants depuis 15 ans. Grâce à ses efforts, la province de l'Ontario a adopté la «Loi de Christopher», qui a créé le système d'enregistrement des délinquants sexuels de l'Ontario.

M. Stephenson a décrit le registre fédéral proposé comme étant essentiellement rien de plus qu'un annuaire téléphonique qui ne sera utile aux enquêteurs que si les coupables laissent leur portefeuille sur les lieux du crime. La description de M. Stephenson peut sembler un peu exagérée. Le projet de loi prévoit que le délinquant doit fournir des renseignements comme «sa taille, son poids et la description de ses marques physiques distinctives». Ces renseignements sont versés dans la banque de données du Centre d'information de la police canadienne, et ils comprennent les empreintes du délinquant, mais il n'y a pas d'exigence concernant l'inclusion d'une photographie.

Le projet de loi adopté à l'autre endroit accorde en fait une certaine latitude à la personne qui recueille les renseignements — et j'attire votre attention là-dessus: «le préposé peut en outre consigner toute caractéristique apparente permettant de l'identifier, dont la couleur de ses yeux et des cheveux, et lui demander de se soumettre à une séance de photographie.» C'est à sa discrétion. Je suis d'avis, honorables sénateurs, que ces renseignements devraient toujours être recueillis et ne pas être laissés à la discrétion du préposé.

Honorables sénateurs, les préoccupations de M. Stephenson ne peuvent être rejetées du revers de la main et doivent être examinées. J'espère donc qu'il sera invité à comparaître comme témoin. Je comprends en outre les difficultés que pose de projet de loi en ce qui concerne les libertés civiles, et que des négociations ont dû être tenues avec les provinces. Je sais aussi que le comité des Communes a entendu de nombreux témoins pour et contre, dont certains s'opposaient carrément à l'idée d'un registre. La John Howard Society a mis en doute pour sa part l'efficacité, l'exactitude et le coût du registre de délinquants sexuels. Le gouvernement a dit craindre que la mesure n'entraîne des contestations judiciaires pour des motifs constitutionnels ou d'application régulière de la loi.

Honorables sénateurs, ce projet de loi controversé soulève de nombreuses questions que nous devrons examiner. Je vais en souligner quelques-unes. Il semble n'y avoir guère d'excuses pour ne pas avoir inclus les photographies comme pièces allant de soi. La latitude accordée aux préposés dans le projet de loi me semble très bizarre, et j'ai hâte d'entendre la justification des intéressés à cet égard.

Je ne comprends pas non plus pourquoi le registre ne ferait pas appel au système de verification de concordance qu'autorise la technologie moderne et qu'ont demandé les policiers. Le fait de pouvoir faire des recherches en fonction de la province, de l'autorité compétente, du rayon ou du code postal ne porte aucunement atteinte aux libertés civiles. La base de données sur les délinquants sexuels de l'Ontario permet de faire des recherches aux moyens de 93 paramètres de différents. Le registre fédéral devrait au moins permettre d'en faire autant. J'aimerais en savoir davantage sur les limites du système tel qu'il est proposé et sur la façon de l'améliorer.

De plus, le gouvernement a affirmé qu'il craignait une contestation fondée sur la Charte si la loi s'appliquait rétroactivement, c'est-à-dire si la base de données comprenait les délinquants sexuels qui ont déjà purgé leur peine. La protection conférée par la Charte comporte des limites raisonnables. À mon avis, je pense qu'on peut faire valoir un argument de poids, à savoir que même s'il s'agit d'une atteinte à la Charte, il s'agit d'une atteinte raisonnable étant donné l'objectif poursuivi.

Nous devrions rédiger la loi pour limiter les contestations, mais nous ne devrions pas sacrifier nos objectifs fondamentaux simplement parce que nous avons peur des contestations. Comme l'ont affirmé des représentants de l'Association canadienne des policiers devant le Comité de la justice à l'autre endroit:

...l'enregistrement de tous les délinquants sexuels trouvés coupables sert à des fins de réglementation valable et non punitive et, par conséquent, ne porte pas atteinte aux droits des délinquants, lorsqu'on tient compte des préoccupations légitimes très importantes en matière de sécurité publique. Cela est conforme à l'expérience et à la jurisprudence aux États-Unis, notamment à un arrêté de la Cour suprême américaine cautionnant le maintien de registres des délinquants sexuels qui vont bien au-delà de la proposition canadienne et de l'exemple ontarien.

Même s'il était déterminé que de telles dispositions concernant la rétroactivité allaient à l'encontre de la Charte, seule cette partie de la loi serait abrogée. La Charte n'entraîne pas l'abrogation des lois dans leur totalité parce qu'une atteinte aux droits a été constatée. Lorsque la chose est possible, seules les dispositions qui portent atteinte à la Charte sont supprimées. Par conséquent, les craintes du gouvernement pourraient, en réalité, être le reflet de sa timidité et non de sa prudence.

Enfin, le chef de la police de Toronto a affirmé qu'à son avis, la mise en application de cette loi pourrait s'avérer impossible. Il est clair que nous devons examiner cet aspect également.

En raison de ces nombreuses préoccupations, nos délibérations sur ce projet de loi seront d'une importance vitale. Je suis de plus en plus contrarié par les initiatives du gouvernement qui ne parviennent pas à résoudre de manière définitive les problèmes. J'ai parfois l'impression que nous faisons du «gouvernement par points de discussion».

Honorables sénateurs, la mission du Sénat est de se livrer à un second examen objectif. Nous devons commencer à remplir cette mission d'une manière beaucoup moins partisane. Il nous faut étudier les projets de loi qui nous sont confiés et nous demander s'ils permettent de réaliser pleinement les objectifs visés. Sinon, nous devrons dire que la loi n'est pas suffisamment bonne et décider de la changer ou de la rejeter.

Je suis impatient de discuter de cette question importante en comité et j'espère que nos délibérations permettront d'obtenir une loi beaucoup plus efficace qui joue le rôle prévu — protéger les personnes à risque, principalement les femmes et les enfants, d'un petit groupe de gens méchants dans notre société.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu une deuxième fois.)

(1510)

RENVOI AU COMITÉ

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand ce projet de loi sera-t-il lu une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Pearson, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.)

PROJET DE LOI DE 2002 SUR LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

DEUXIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Joseph A. Day propose: Que le projet de loi C-7, Loi modifiant certaines lois fédérales et édictant des mesures de mise en oeuvre de la convention sur les armes biologiques ou à toxines, en vue de renforcer la sécurité publique, soit lu une deuxième fois.

— Honorables sénateurs, j'ai le plaisir d'ouvrir le débat sur ce très important projet de loi, le C-7, qui mérite notre plus grande attention. Ce projet de loi est intitulé «Loi de 2002 sur la sécurité publique». En 2002, une ancienne version de ce projet de loi a été présentée à l'autre endroit pour la première fois.

[Français]

Ce projet de loi prévoit des modifications dans 23 lois qui sont en vigueur et la promulgation d'une nouvelle loi. Son but est d'augmenter la capacité gouvernementale de prévenir des attaques terroristes et d'intervenir rapidement en cas de menace grave ou d'attaque. Il vise 12 ministères et, de ce fait, 12 ministres.

Le libellé du projet de loi devant nous est le résultat d'un débat très sérieux qui s'est déroulé à la Chambre des communes, en novembre 2001, lors de la présentation du projet de loi C-42. On a réussi à trouver un équilibre entre la protection de tous et la vie privée de chacun.

[Traduction]

Ce projet de loi modifie 23 lois et crée une loi de mise en oeuvre de la convention sur les armes biologiques ou à toxines. Le projet de loi C-7 s'est d'abord appelé le projet de loi C-42, puis le C-55 et le C-17. Il a fait l'objet d'un débat exhaustif dans l'autre endroit et a été étudié en comité, où il a subi plusieurs amendements.

Honorables sénateurs, ce projet de loi a été introduit dans cette Chambre en octobre de l'an dernier et l'honorable sénateur Carstairs l'avait commenté le 21 octobre, juste avant la prorogation. Dans son allocution, l'honorable sénateur a passé en revue chaque partie du projet de loi et en a fait une analyse très poussée.

À cette étape-ci, je ne propose pas d'examiner de nouveau le projet de loi article par article, mais je recommande aux honorables sénateurs qui veulent avoir un aperçu efficace de chaque partie, de se reporter à l'allocution faite par l'honorable sénateur Carstairs le 21 octobre. Conformément à l'article 75 du Règlement du Sénat du Canada, je propose, à cette étape de la deuxième lecture, d'examiner les principes du projet de loi C-7.

Il est certain que certaines dispositions antérieures auraient amélioré la sécurité, mais je pense que tous les honorables sénateurs reconnaîtront, et le débat qui a eu lieu à la Chambre et dans l'autre endroit l'a démontré, qu'il en serait résulté un coût trop élevé du point de vue de l'intrusion dans la vie privée. C'est pourquoi de nombreux articles ont été retirés ou amendés. Par exemple, le projet de loi ne contient plus l'expression «zones d'exclusion militaire». Il ne propose plus de réglementer les composants inexplosibles de munition, ni de recueillir des renseignements sur les passagers dans le but principal d'exécuter des mandats d'arrestation.

En outre, les dispositions relatives à la sécurité des transports et aux ordonnances provisoires ont été éclaircies. Je propose d'examiner en profondeur les dispositions relatives aux ordonnances provisoires, afin que les honorables sénateurs en saisissent le concept, et la façon dont elles seront mises en oeuvre en vertu des diverses lois qui seront modifiées. Le projet de loi modifie neuf lois qui portent sur des ordonnances provisoires.

La protection de la sécurité des transports et de notre sécurité nationale conserve une grande importance pour nous tous et, bien entendu, le gouvernement du Canada y accorde la plus grande importance. Nous devons toujours assurer un juste équilibre entre les mesures prises pour assurer la sécurité, et les autres intérêts fondamentaux comme la vie privée et les droits civils et humains. Grâce aux sauvegardes qu'il prévoit, le projet de loi C-7 assure transparence, reddition de comptes et protection de la vie privée.

[Français]

Honorables sénateurs, en raison des attaques terroristes du 11 septembre 2001 et de l'existence mieux connue de groupes terroristes bien organisés et très astucieux, nous nous devons de continuer à améliorer nos programmes de sécurité publique.

Pour illustrer la hausse des attaques terroristes, examinons l'organisation terroriste Al-Qaïda.

Au cours des sept ans qui ont précédé les attaques du 11 septembre 2001, un incident par année, en moyenne, impliquant Al-Qaïda s'est produit. Au cours des deux années qui ont suivi les attaques du 11 septembre 2001, cette moyenne a grimpé à cinq.

[Traduction]

Si nous pensons que le groupe Al-Qaïda n'a pas entendu parler du Canada, dans l'enregistrement diffusé le 12 novembre 2002, Oussama ben Laden a déclaré:

Pourquoi vos gouvernements se sont-ils alliés à l'Amérique pour nous attaquer en Afghanistan, et je cite en particulier la Grande-Bretagne, la France, l'Italie, le Canada, l'Allemagne et l'Australie?

De plus, Al-Qaïda n'est qu'un des 33 groupes terroristes actifs répertoriés dans le monde. Que cela nous plaise ou non, nous devons tenir compte du fait que le Canada peut être la cible d'attaques terroristes. Nous devons envisager que des terroristes peuvent vouloir entrer au Canada avant de se rendre dans d'autres pays.

(1520)

Les honorables sénateurs apprendront à bien connaître la protection sur deux fronts de la frontière canadienne. Premièrement, un programme empêche l'importation d'objets illégaux, notamment des armes et des dispositifs explosifs. Deuxièmement, un programme empêche l'entrée illégale de personnes, qu'il s'agisse d'immigrants ou de visiteurs.

À la suite des événements du 11 septembre 2001, nos ministères se sont constamment ajustés pour faire face aux nouvelles réalités. On a créé la nouvelle Agence des services frontaliers du Canada à partir d'unités des Douanes et de l'Immigration, et cette agence relève maintenant du nouveau ministère canadien de la Sécurité publique et de la Protection civile. Cette nouvelle Agence des services frontaliers gère les deux programmes et nous protège contre l'importation d'objets et l'entrée de personnes.

Honorables sénateurs, les méthodes utilisées pour protéger un aéronef ne sont pas tellement différentes de celles utilisées par l'Agence des services frontaliers pour protéger la frontière canadienne.

[Français]

Des attaques ont déjà été déclenchées contre des aéronefs et de nouvelles tentatives seront faites dans le futur. Dans le passé, pour protéger un aéronef, on présumait qu'il suffisait de faire en sorte que tous les objets susceptibles d'être utilisés à des fins terroristes ne se trouvent pas à bord des aéronefs. Cette approche a été utilisée dans la plupart des pays.

Les événements de septembre 2001 ont tôt fait de détruire cette théorie. Des gens sont prêts à mourir et même ont hâte de mourir pour leur cause. Ils n'ont pas besoin d'armes traditionnelles lorsqu'ils agissent en groupe.

Honorables sénateurs, l'attention accordée aux objets et aux personnes à nos frontières pour assurer la protection du Canada doit l'être maintenant aux objets et aux personnes qui doivent se trouver à bord des aéronefs, pour assurer la protection de ces derniers.

Aujourd'hui, à chaque vol en partance d'un aéroport du Canada, on procède au contrôle méthodique des objets qui doivent être transportés à bord de l'aéronef. Cela dit, rien dans la loi canadienne ne prescrit la conduite d'une évaluation à des fins de sûreté des personnes qui se trouvent à bord également.

[Traduction]

Pour un vol Toronto-Vancouver, je peux acheter un billet sur Internet, procéder à l'enregistrement au moyen du kiosque électronique, faire vérifier mon bagage à main seulement au point de contrôle de sécurité et, au moment de l'embarquement, produire un document montrant ma photo et le nom que j'ai utilisé en achetant le billet. Je peux ensuite monter à bord.

Honorables sénateurs, nous faisons aujourd'hui de l'excellent travail pour détecter les objets qu'il est interdit d'apporter à bord d'un avion, mais nous sommes loin de faire un excellent travail dans le cas de la vérification des personnes qui prendront place à bord de ce même avion. Les événements que nous avons connus doivent nous convaincre que ce que nous faisons ne suffit plus.

Pour aller de Toronto à Vancouver, l'avion doit être gros et a besoin de quantités énormes de kérosène. Il survolera plusieurs villes canadiennes et passera près de plusieurs villes américaines. La loi canadienne interdit de contrôler les passagers strictement aux fins de la sécurité. Par exemple, lorsque les autorités connaissent le nom d'un terroriste présumé qui est peut-être au Canada, elles aimeraient sans doute pouvoir demander au transporteur de vérifier si cette personne a réservé un vol. La loi actuelle au Canada interdit de le faire.

[Français]

Aux termes de l'article 4.82 du projet de loi sur la sécurité publique, les transporteurs aériens et les exploitants de systèmes de réservation de services aériens seraient tenus de fournir, sur demande, des renseignements sur les passagers à des agents désignés de la GRC et du SCRS pour les seuls besoins de la sûreté des transports et de la sécurité nationale.

Pour assurer la protection de la vie privée, les agents désignés établiraient des comparaisons entre les renseignements sur les passagers et les renseignements à usage restreint qui sont directement liés à leur mandat respectif en vertu de l'article 4.82.

En d'autres mots, les renseignements sur les passagers seraient comparés à l'information interne qui sert à déterminer les risques pour la sûreté des transports ou la sécurité nationale.

Les agents désignés seraient également autorisés à divulguer des renseignements sur les passagers à un tiers uniquement à des fins très précises.

[Traduction]

Au nombre des motifs raisonnables, il y a l'enquête à mener dans le cas d'une menace à la sécurité du Canada, l'aide à apporter aux agents de protection de l'avion dans l'exécution de leurs tâches ou encore l'aide à apporter aux responsables de la santé et des transports lorsque la vie, la santé ou la sécurité sont menacées. Pour assurer la sécurité publique générale, le projet de loi sur la sécurité publique conférerait à des agents désignés de la GRC les pouvoirs qu'il leur faut pour prévenir le service de police local lorsqu'ils repèrent, au moment de l'analyse des renseignements sur les passagers, un fugitif visé par un mandat d'arrestation au Canada à cause d'un délit grave tel que le meurtre ou l'agression sexuelle.

[Français]

Les Canadiens peuvent être assurés que le projet de loi C-7 permettra d'accroître la sûreté des transports tout en respectant leur vie privée. C'est pourquoi l'article 4.82 comporte des garanties strictes sur la collecte, la divulgation, la conservation et la destruction des renseignements sur les passagers. J'aimerais tout particulièrement attirer votre attention sur certaine caractéristiques précises.

[Traduction]

Toutefois, les renseignements sur les passagers ne pourraient pas être utilisés pour faciliter l'exécution d'un mandat pour n'importe quel délit. Selon les dispositions de ce projet de loi, l'agent désigné de la GRC ne serait autorisé à communiquer des renseignements sur les passagers aux autres corps de police que pour l'arrestation de personnes visées par un mandat d'arrestation pour un délit grave passible d'une peine d'emprisonnement de cinq ans ou plus. Il serait autorisé à collaborer uniquement à l'exécution de mandats d'arrestation pour des crimes graves précis énoncés dans le règlement.

[Français]

En vertu de l'article 4.82, tous les renseignements sur les passagers devront être détruits dans les sept jours suivant leur transmission par le transporteur aérien, à moins que ces renseignements ne soient raisonnablement nécessaires aux fins de la sûreté des transports ou d'une enquête sur des menaces à la sécurité du Canada.

[Traduction]

(1530)

Il faudrait atteindre une certaine norme ou un certain seuil de suspicion avant que l'information ne puisse être mise en commun. Par exemple, le paragraphe 4.82(9) dispose qu'un agent désigné devrait avoir des motifs de croire que l'information aiderait un agent de la sûreté aérienne à s'acquitter de ses fonctions avant de faire une communication visant à protéger la sûreté des transports. Des dossiers écrits seraient exigés pour les rétentions et les communications, le fait de les mettre à disposition pour examen par le commissaire à la vie privée, la présidente de la Commission des plaintes du public contre la GRC et, dans le cas du SCRS, le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité et l'inspecteur général du SCRS.

[Français]

En outre, la loi exigerait que le commissaire de la GRC et le directeur du SCRS veillent à l'examen annuel de tous les renseignements conservés. Ils seraient tenus d'ordonner la destruction des renseignements qu'il n'est plus nécessaire de conserver pour assurer la sûreté des transports ou la sécurité nationale.

[Traduction]

Le projet de loi donne le pouvoir de mettre en place des mesures qui, de nombreux Canadiens en conviendraient, reposent sur le bon sens. Le Programme de protection des transporteurs aériens canadiens favorise la sécurité de l'aviation en plaçant un agent armé de la GRC à bord de certains appareils. On le fait en ce moment. La mise en œuvre de l'article 4.82 rendrait ce programme plus efficace et efficient pour ce qui est du choix des aéronefs et en donnant aux agents à bord des informations pertinentes sur l'identité des passagers à bord. Cela fournira une meilleure sécurité publique au bénéfice des Canadiens et des visiteurs. Comme je l'ai fait remarquer plus tôt, il faudra détruire dans les sept jours tous les renseignements sur les passagers, à moins qu'on n'en ait besoin dans un but très circonscrit.

Honorables sénateurs, j'ai parlé assez longuement de l'article 4.82 de la Loi sur l'aéronautique, qui fait l'objet d'un amendement, parce que c'est le domaine qui a le plus retenu l'attention des médias et de l'autre endroit. Il est important que nous nous rendions compte du fait que des amendements importants ont été apportés et du fait qu'il y a des freins aux pouvoirs qui sont donnés ou dont on propose l'attribution aux termes de cet article en particulier.

Je crois, honorables sénateurs, qu'après mûre réflexion, vous conviendrez avec moi qu'un équilibre a été instauré, entre des intérêts fondamentaux comme la protection de la vie privée, les libertés civiles et les droits de la personne, et l'importance du maintien de la sécurité.

Afin de mieux illustrer l'équilibre qui a été établi dans ce projet de loi, permettez-moi d'aborder maintenant un autre domaine qui a fait l'objet de certaines discussions par le passé. Il s'agit des arrêtés d'urgence.

[Français]

Tout d'abord, je constate que deux des lois modifiées par le projet de loi C-7 renferment déjà des dispositions relatives à des arrêtés d'urgence, soit la Loi sur l'aéronautique et la Loi canadienne sur la protection de l'environnement.

[Traduction]

Ainsi, honorables sénateurs, le concept d'un arrêté d'urgence n'est pas nouveau. Il existe déjà en droit.

Honorables sénateurs, le 11 septembre 2001, des avions pénétraient dans l'espace aérien sous contrôle canadien au rythme d'un toutes les 45 secondes. Il fallait décider sur-le-champ de les renvoyer vers l'Europe ou de les inviter à atterrir à l'aéroport le plus près. Les honorables sénateurs se rappelleront les services inestimables qu'ont fournis des aéroports de Terre-Neuve, de la Nouvelle-Écosse et de Montréal, en particulier, à ce moment très difficile de notre histoire. Bien qu'il y ait eu alors en place une autorité en mesure de contrôler sur-le-champ notre espace aérien, la leçon très importante que nous avons alors tirée, c'est que, en cas d'autres crises semblables, nous devons également disposer d'une autorité essentielle pour la gérer.

[Français]

Pour illustrer la crainte à propos d'événements potentiels qui sont susceptibles de nécessiter des décisions immédiates, voici des exemples d'événements d'un niveau de complexité de plus en plus élevé.

[Traduction]

Permettez-moi de vous donner deux ou trois exemples possibles qui vont vous montrer l'importance de pouvoir réagir rapidement.

Voici en quoi consiste le premier niveau de réaction à une menace crédible d'origine maritime à l'encontre d'une centrale nucléaire, mettons celle de Gentilly, au Québec, ou de Point Lepreau, au Nouveau-Brunswick. Les autorités peuvent vouloir interdire une zone de deux milles autour de ladite centrale afin d'y empêcher toute activité — autrement dit, que personne ne puisse s'y déplacer sans autorisation.

Comment mettre en œuvre une telle interdiction? Je vous renvoie à la proposition d'ajouter dans la Loi sur la marine marchande du Canada la disposition sur les arrêtés d'urgence, contenue dans ce projet de loi. On pourrait proposer d'instaurer une telle zone de façon permanente, de manière à ne pas avoir besoin d'un arrêté d'urgence en cas de crise. Or la Voie maritime du Saint-Laurent traverse sur toute sa largeur une telle zone raisonnable qui serait établie autour de la centrale de Gentilly et il y a des navires et des filets de pêche à distance raisonnable de celle de Point Lepreau, Nouveau-Brunswick. Interdire en permanence une telle zone, ce serait interdire la Voie maritime du Saint-Laurent. Évidemment, ce ne serait pas une situation acceptable.

Voilà un cas où un arrêté d'urgence pourrait être employé et, qui plus est, les conséquences d'un tel arrêté sont prévisibles. Voilà pourquoi nous ne souhaiterions pas l'instaurer sur une base permanente, autrement dit interdire une zone maritime donnée.

[Français]

Pour le deuxième exemple, la Loi sur la quarantaine fait état de quatre maladies dangereuses dans son annexe: le choléra, la peste, la varicelle et la fièvre jaune. Le projet de loi prescrit qu'il est loisible au gouverneur en conseil d'y ajouter d'autres maladies dangereuses.

Nous ne connaissons aucune autre maladie dangereuse qui devrait être ajoutée pour le moment, mais advenant la propagation d'une certaine maladie par des terroristes — ce qui est fort possible —, il faudrait l'ajouter immédiatement.

[Traduction]

Comment pourrait-on faire cet ajout à l'annexe aux termes de la Loi sur la quarantaine si nous ne savons pas à quel type de maladie pourrait recourir le terroriste? Je vous renvoie, honorables sénateurs, à la disposition sur l'arrêté d'urgence qui se trouve dans le projet de loi concernant la Loi sur la quarantaine. C'est un exemple de cas où le pouvoir de prendre des arrêtés d'urgence pourrait être utilisé, mais nous ne savons pas exactement ce qu'il contiendra à ce moment-là. Dans l'exemple précédent, nous savions que l'arrêté viserait à fermer les voies navigables ou les routes maritimes. Dans cet exemple-ci, nous ne savons pas de quelle maladie il s'agit, mais nous savons qu'il faudra peut-être ajouter quelque chose à la Loi sur la quarantaine pour prévoir cette éventualité inconnue.

Pour ce qui est du troisième et plus important niveau où il faudrait peut-être prendre un arrêté d'urgence, c'est-à-dire dans les cas où certaines prévisions peuvent être faites concernant des accidents et leurs conséquences, les actes terroristes ne sont pas si aisément prévisibles. Comme dans le cas des attentats du 11 septembre 2001, un acte terroriste peut créer des situations imprévues.

[Français]

Par conséquent, il faut prévoir que certains événements que nous ignorons pourront se produire, pour lesquels la prise d'un arrêté d'urgence sera un élément essentiel de l'intervention.

Avec cet exemple à l'appui, je vous renvoie à la proposition visant l'ajout d'une disposition pour la prise d'un arrêté d'urgence, par exemple à la Loi sur les produits dangereux et à la Loi sur les dispositifs émettant des radiations.

[Traduction]

Pour ces trois niveaux, j'ai observé une menace spécifique et une réponse connue, une menace non spécifique et une réponse connue. Pour les trois possibilités, ce qui pourrait bien survenir de plus préoccupant dans une attaque terroriste, c'est une menace imprévue et une réponse correspondante inconnue. C'est pourquoi nous devons prévoir des arrêtés d'urgence pouvant être pris à très court préavis. Cependant, les honorables sénateurs reconnaîtront que nous devons absolument encadrer ce pouvoir.

(1540)

J'ajouterais que le pouvoir proposé de prendre des arrêtés d'urgence s'accompagne de plusieurs contraintes, à savoir qu'il ne doit pas et ne sera pas utilisé à la légère. Parmi ces contraintes, il devra y avoir la nécessité d'une intervention immédiate afin de parer à un risque appréciable pour la sécurité publique.

[Français]

Un arrêté d'urgence peut être pris uniquement si la loi invoquée prévoit le pouvoir de prendre ledit arrêté sous forme de règlement.

[Traduction]

Le gouvernement doit approuver l'arrêté dans les 14 jours, sinon il cesse automatiquement d'avoir effet.

[Français]

L'arrêté d'urgence doit être renvoyé au Parlement dans un délai de 15 jours civils.

[Traduction]

Les arrêtés d'urgence doivent être publiés dans la Gazette du Canada dans un délai de 23 jours.

[Français]

L'arrêté d'urgence vient à échéance dans un délai d'un an mais, dans l'intervalle, peut être pris sous forme d'un règlement — auquel cas il arrive à expiration au bout de deux ans, en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement — qui existe déjà.

Honorables sénateurs, la nécessité d'un arrêté d'urgence ne fait pas de doute, et les restrictions dont sont assortis les pouvoirs prescrits dans le projet de loi C-7 permettent de contrôler la situation de très près. Je m'attends d'ailleurs à ce que ces pouvoirs ne soient exercés que très rarement.

[Traduction]

Dans les commentaires que j'ai formulés plus tôt, je me suis arrêté à deux idées de ce projet de loi. J'ai d'abord fait observer qu'il était nécessaire que l'on effectue un quelconque contrôle des passagers à bord des avions si nous voulons atteindre un niveau raisonnable en matière de sûreté aérienne. J'espère que nous comprendrons et accepterons ce principe. Les détails d'un tel contrôle seraient basés sur l'article 4.82 de la Loi sur l'aéronautique. Le comité se penchera certainement sur cette question.

Honorables sénateurs, j'ai ensuite parlé de la nécessité des arrêtés d'urgence. J'ai signalé que ces dispositions fourniraient aux ministres les outils dont ils ont besoin pour réagir rapidement, au besoin, mais j'ai aussi dit que l'équilibre de ce projet de loi, soit l'équilibre entre la sécurité et le respect de la vie privée, posait des contraintes.

Honorables sénateurs, il importe de comprendre que les arrêtés d'urgence proposés dans le projet de loi sont un outil exceptionnel pour des circonstances exceptionnelles et que l'obligation démocratique de rendre des comptes intervient à ce chapitre. Je suis certain que le comité se penchera de plus près sur cette question.

Honorables sénateurs, le Canada a besoin d'un système de sécurité efficace, capable de s'adapter rapidement aux nouvelles exigences. Au cours de la première session, nous avons adopté le projet de loi C-36, la Loi antiterroriste. Au cours de la même session, nous avons adopté le projet de loi C-44, Loi modifiant la Loi sur l'aéronautique. Le projet de loi C-7 est la troisième mesure prise en réaction à la tragédie du 11 septembre 2001 et aux nouveaux défis posés par les activités terroristes.

Par ailleurs, nous devons chercher continuellement des moyens d'améliorer notre approche en matière de sûreté publique et de sécurité nationale. La vigilance et une collaboration étroite à l'intérieur et à l'extérieur des frontières demeurent nos meilleures défenses contre le terrorisme. J'ai déjà parlé des changements au sein des ministères du gouvernement, des changements qui ont été instaurés récemment. Ces changements illustrent bien comment nous affrontons les nouveaux défis.

Honorables sénateurs, le projet de loi C-7 constitue un pas important vers l'instauration d'un système permettant une adaptation rapide aux nouvelles réalités du terrorisme international.

Honorables sénateurs, il me tarde de poursuivre le débat sur cette mesure au sein du comité.

L'honorable Tommy Banks: Le sénateur accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Day: J'en serai ravi.

Le sénateur Banks: L'honorable sénateur a fait référence à l'importance de parvenir à un équilibre entre, d'une part, les nouvelles nécessités de la vie qu'on nous a confiées et, d'autre part, les droits traditionnels.

On vient de rappeler aux honorables sénateurs l'existence de la Loi antiterroriste, c'est-à-dire le projet de loi C-36 déposé à la première session de l'actuelle législature, comme l'a dit l'honorable sénateur. C'est l'espoir, le vœu ardent, de chacun d'entre nous, j'en suis convaincu, que la nouvelle réalité à laquelle l'honorable sénateur vient de faire référence ne soit peut-être pas permanente — même si pour l'instant cela semble un espoir vain.

Par nécessité, la Loi antiterroriste empiète plus que nous ne l'aurions normalement permis dans notre pays sur les droits des personnes. Si je me souviens bien, cette loi comporte des aspects semblables à ceux du présent projet de loi, et l'honorable sénateur en a mentionné quelques-uns.

Pour ce qui est de la Loi antiterroriste, nous nous sommes assurés qu'il y avait une disposition concernant un examen complet. Dans les trois années de la sanction royale, les comités des deux Chambres procéderaient à un tel examen et feraient rapport sur tout ce qu'ils auraient à dire aux deux Chambres.

L'honorable sénateur peut-il dire à cette Chambre si le projet de loi C-7 comporte une disposition semblable?

Le sénateur Day: Honorables sénateurs, je remercie l'honorable sénateur de sa question. Il est important que les honorables sénateurs sachent que le projet de loi C-36 a été adopté très rapidement après les incidents du 11 septembre 2001. Si je me rappelle bien, nous avons effectué une étude préalable à l'égard de ce projet de loi, un des rares qui ont emprunté cette voie ici, en raison de l'inquiétude suscitée par une action rapide. Le Sénat est toujours prudent et examine les questions lentement et méthodiquement afin que nous puissions être raisonnablement certains que nous n'oublions aucun détail.

J'ai consacré un certain temps à décrire l'évolution de ce projet de loi, qui ne fait pas partie de la même catégorie. Autrement dit, le projet de loi C-7 ne semble pas être une réaction rapide à une situation, contrairement au projet de loi antiterroriste que nous avons adopté à la fin de 2001.

Le présent projet de loi a été modifié plusieurs fois. Chaque fois, nous avons eu la chance de dire: «Nous sommes peut-être allés trop loin à cet égard; nous avons peut-être besoin d'un autre frein ou contrepoids.»

Neuf des 23 dispositions de ce projet de loi portent sur des arrêtés d'urgence, dont j'ai parlé à profusion parce que j'estime que c'est une caractéristique importante du projet de loi. Ces arrêtés comportent des dispositions de temporarisation. Ils disparaissent au bout d'un an si rien d'autre n'est fait.

Il existe d'autres dispositions, comme la nécessité de publication et le dépôt des arrêtés d'urgence devant chaque Chambre du Parlement dans un certain délai, et tout cela illustre bien les contrôles incorporés. D'autres parties de ce projet de loi mettent en oeuvre la convention sur les armes biologiques ou à toxines. Nous ne voudrions pas qu'une disposition de temporarisation s'y applique. Il s'agit d'une partie importante de la sécurité globale du public, mais cela fait partie du projet de loi.

(1550)

Pour répondre directement à votre question, je dirais que ce n'est pas dans la même catégorie. C'est davantage comme un projet de loi omnibus qui traite d'un grand nombre de concepts, dont certains comportent des dispositions de temporarisation si rien n'est fait, et non certains autres.

L'honorable Mobina S. B. Jaffer: Je crois comprendre qu'aucune disposition du projet de loi C-36 n'a été utilisée, et qu'il y aura un examen. Pourriez-vous nous dire pourquoi ce projet de loi est nécessaire maintenant, avant cet examen?

Le sénateur Day: Je crois comprendre que le projet de loi C-36 traite des dispositions du Code criminel et des activités terroristes punies par le Code criminel. Le présent projet de loi n'est pas un projet de loi axé sur le Code criminel. Il traite de nombreuses lois différentes — en fait, 23 lois. Il traite d'un sujet différent, comme la façon dont les ministères doivent fonctionner. Par exemple, des parties du projet de loi portent sur la protection de la propriété intellectuelle et de la technologie de l'information au sein du ministère de la Défense. Il s'agit d'un projet de loi différent et d'un concept différent. Normalement, nous considérons les dispositions du Code criminel comme beaucoup plus susceptibles d'empiéter sur la vie des gens. Dans le cas de ce projet de loi, l'aspect qui doit nous préoccuper, c'est la protection de la vie privée contre l'empiètement.

Le sénateur Jaffer: Peut-être ai-je mal entendu. L'honorable sénateur a dit que ce projet de loi avait également pour but de prévoir le cas des personnes qui viennent au pays sans les documents appropriés ou qui viennent illégalement. Ai-je bien compris?

Le sénateur Day: Je n'ai pas dit «sans les documents appropriés», mais j'ai effectivement fait allusion aux immigrants et aux touristes qui se présentent à notre frontière de manière illégale ou irrégulière.

Le sénateur Jaffer: Dois-je comprendre que ce projet de loi vient s'ajouter à notre projet de loi sur l'immigration? S'agit-il d'une autre façon de restreindre l'arrivée au pays de gens qui cherchent à y obtenir asile?

Le sénateur Day: J'espère que les réfugiés légitimes, les visiteurs légitimes et les immigrants légitimes ainsi que les nouveaux Canadiens ne trouveront rien à redire de ce projet de loi à cet égard.

L'honorable A. Raynell Andreychuk: J'ai entendu l'honorable sénateur dire qu'il s'agissait d'un empiétement uniquement du point de vue de la protection et non pas du point de vue des droits de la personne. N'est-ce pas un fait reconnu que le projet de loi C-36 empiète sur les droits? Certaines limites ont été fixées au pouvoir discrétionnaire et à l'action du ministre, et il y a eu un débat sur la question de savoir si nous avions établi le bon équilibre.

Par ce projet de loi, 23 lois confèrent au ministre, par le biais d'arrêtés d'urgence, un pouvoir discrétionnaire quasi absolu face aux citoyens canadiens et, dans certains cas, j'ajouterais, face à d'autres personnes. L'arrêté est valable pour 14 jours, ou 30 jours, ou une année, selon la loi qui est modifiée. Pendant cette période, le ministre possède un pouvoir discrétionnaire absolu. Cela ne représente-t-il pas un empiètement et un danger plus grave encore pour les droits de la personne que le projet de loi C-36 lui-même?

Le sénateur Day: Je remercie l'honorable sénateur de sa question. J'hésite à trop approfondir à l'étape de la deuxième lecture de ce projet de loi, mais j'ai bien hâte de débattre de cette question en comité.

Il est important que les honorables sénateurs se souviennent d'un point que j'ai soulevé plus tôt: les ministres n'ont l'autorité nécessaire pour prendre des arrêts d'urgence que pour des questions qui ont déjà été autorisées par règlement, par le Sénat. Le ministre doit être investi d'une autorité générale par règlement avant de pouvoir prendre un arrêté d'urgence. Il s'agit d'un frein important sur toute cette question qui empêche les ministres d'adopter la position extrême que l'honorable sénateur a suggérée.

Le sénateur Andreychuck: Dans la même veine, n'est-il pas exact qu'avant d'agir, le ministre se devait de respecter un certain processus et, ainsi, il y avait un système de freins et contrepoids. Maintenant, le ministre peut agir immédiatement en utilisant cette discrétion absolue sous prétexte qu'il s'agit d'une urgence. Ne privons-nous pas les personnes qui sont dans ces situations du droit même de se défendre parce que nous disons qu'il s'agit d'une urgence? Pourquoi n'avons-nous pas recours à la Loi des mesures d'urgence qui, de toute manière, donnerait ces pouvoirs aux ministres, ou à la Loi sur la sécurité nationale?

Le sénateur Day: J'ai deux cahiers d'information sur cette question et j'ai bien hâte de pouvoir discuter de ces choses. À l'étape où nous en sommes, au sujet de la finalité du projet de loi, la meilleure réponse que je puisse donner à votre question est de dire que la Loi sur les mesures d'urgence serait sans doute un peu trop lourde lorsque l'on a à s'occuper de certaines des questions qui exigent une intervention conformément aux différents arrêtés d'urgence qui sont décrits dans cette mesure législative: la Loi sur la marine marchande du Canada, la Loi sur la quarantaine et les diverses lois sur l'environnement. Le recours à la Loi sur les mesures d'urgence dans cette situation nous paraît un peu radical.

Le sénateur Andreychuk: Ce sont là des questions très difficiles et très complexes. Beaucoup d'entre elles débouchent sur des considérations juridiques concernant l'interprétation des arrêtés d'urgence, les recours qu'il peut y avoir à leur égard et la possibilité pour la personne lésée d'interjeter un appel en bonne et due forme plutôt que d'avoir à se contenter d'un examen administratif. On ne retrouve nulle part dans le projet de loi les mesures de protection que nous avons réclamées dans le projet de loi C-36. À mon avis, les mesures prévues laissaient à désirer, mais au moins il y avait de telles mesures. Nous avons affaire ici à des questions juridiques complexes. Ne convenez-vous pas qu'elles méritent notre attention? Personne ne conteste la nécessité d'assurer la sécurité pour les Canadiens. Il faut se demander toutefois si l'on sacrifie les droits de la personne pour arriver à assurer cette sécurité et s'il n'y aurait pas une meilleure façon de procéder que les méthodes proposées dans ce projet de loi.

Le sénateur Day: Je dirais que l'honorable sénateur a préparé le terrain pour le débat en comité.

L'honorable Laurier L. LaPierre: Honorables sénateurs, ces choses m'inquiètent. Le mot «terrorisme» est appliqué à presque tous les aspects de la vie humaine. Je n'ai vu nulle part une définition du terme «terrorisme». Il peut avoir tel ou tel sens aujourd'hui et ensuite tel ou tel autre sens demain ou après-demain. Je pense que nous sommes en train d'élaborer une série de lois sur les mesures de guerre pour pouvoir, au bout du compte, nous protéger, et pendant que nous le faisons, nous limitons de plus en plus les libertés des citoyens canadiens, nous rendons nos frontières de plus en plus hermétiques et nous nous exposons à des situations où certaines de nos libertés fondamentales peuvent être gravement compromises par la définition qu'une personne en position d'autorité peut décider d'appliquer à une situation particulière que la législation ne définit pas ou ne prévoit pas.

(1600)

C'est pourquoi, sénateur Day, je vous demande, étant un homme de grande liberté qui a fréquenté un collège qui lui a inculqué le goût de la liberté du peuple canadien et de la défense de ces libertés, et en présence du sénateur Cools qui, bien sûr, connaît toutes les réponses à toutes ces questions, n'empiétons-nous pas par cette fonction d'intervention sur notre vie privée et sur nos libertés à cause de toute cette question du terrorisme?

Le sénateur Day: Je dirais que le sénateur LaPierre se fait l'écho des préoccupations que tous les honorables sénateurs dans cette Chambre nourrissent à propos des droits et libertés individuels, du besoin de sécurité collective et du conflit qui se produit entre ceux-ci de temps à autre.

L'honorable sénateur a parlé de la Loi sur les mesures de guerre. Si je comprends bien, les arrêtés d'urgence et les autres mesures proposées dans le projet de loi sur la sécurité publique sont là justement pour qu'il ne soit pas nécessaire de recourir à cet outil radical, qui à un moment donné était peut-être le seul outil dont on disposait à très brève échéance. Ce que nous voulons, c'est un compromis acceptable qui puisse répondre aux besoins de notre société collective mais qui empiète le moins possible sur les droits individuels.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'ai le regret de vous informer que les 45 minutes de l'honorable sénateur Day sont écoulées. En fait, nous avons un peu dépassé le temps prescrit. Cependant, madame le sénateur Fraser m'indique qu'elle désire prendre la parole. Par conséquent, nous écouterons son intervention et le sénateur Di Nino désirera peut-être lui aussi prendre la parole, mais je crois comprendre que le sénateur Andreychuk veut ajourner le débat.

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, j'invoque le Règlement. Je me demande si je pourrais conjurer Son Honneur de préciser qu'il ne convient pas que certains sénateurs mentionnent constamment les noms d'autres sénateurs au cours de leurs remarques.

Le sénateur LaPierre semble trouver mon nom irrésistible, et j'aimerais bien qu'il résiste à l'attrait qu'il semble avoir pour mon nom. Il n'est pas convenable que des sénateurs mentionnent constamment les noms d'autres sénateurs de la façon dont le sénateur LaPierre mentionne le mien. Je dois admettre que je trouve cela ennuyeux, et pas particulièrement instructif, ni même spirituel ou amusant.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, l'intervention du sénateur Cools est explicite. Si les honorables sénateurs le permettent, je considérerai ses commentaires comme une intervention indépendante, que les sénateurs reconnaîtront comme telle.

L'honorable Joan Fraser: Honorables sénateurs, j'avais l'intention de poser une très brève question ou de faire un très bref commentaire après le discours très réfléchi et diversifié du sénateur Day, mais le sénateur LaPierre a soulevé une question qui nous perturbe grandement depuis 2001 quand il a fait référence à la définition du mot «terrorisme».

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, il y a une question que je tiens à m'assurer d'avoir bien comprise. Il existe une tradition voulant que 45 minutes soient accordées au premier et au deuxième intervenants, limite qui sera respectée pour le sénateur Andreychuk de l'opposition. Je signale cependant que le temps de parole du sénateur Fraser est limité.

Le sénateur Fraser: Je m'excuse de l'avoir oublié. Je ne veux d'aucune façon réduire le temps de madame le sénateur Andreychuk parce qu'il sera très intéressant d'entendre ce qu'elle a à dire.

J'aimerais faire remarquer aux sénateurs préoccupés par cette question que le comité spécial qui a étudié le projet de loi C-36, auquel j'ai eu le grand honneur de siéger, a consacré beaucoup de temps à la question de savoir s'il fallait définir le «terrorisme»; les membres étaient tous très conscients qu'au Canada on ne rend pas illégaux tous les mots en «ismes». On ne rend pas illégal le fait de croire en quelque chose. Ce qu'on rend illégal, c'est une certaine activité. Le projet de loi C-36 comporte une définition soigneusement rédigée non pas du «terrorisme» mais de «l'activité terroriste», et c'est ce que nous rendons illégal. C'est à mon avis une définition bien rédigée et tous les sénateurs préoccupés par cette question feraient bien de la relire.

(Sur la motion du sénateur Andreychuk, le débat est ajourné.)

PROJET DE LOI ANTI-POURRIEL

DEUXIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Oliver, appuyée par l'honorable sénateur Gustafson, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-2, Loi visant à empêcher la diffusion sur l'Internet de messages non sollicités. — (L'honorable sénateur Poulin).

L'honorable Marie-P. Poulin: Honorables sénateurs, il y a plusieurs années, j'ai eu l'honneur de présider le Comité sénatorial permanent des transports et des communications, qui était chargé d'enquêter sur la révolution technologique qui était en train de transformer complètement les communications internationales, et d'en faire rapport. Les travaux du comité se sont traduits par deux documents dans lesquels était examinée la position du Canada dans le monde des télécommunications, qu'il s'agisse de notre infrastructure électronique ou du contenu diffusé par fil, câble ou satellite.

Le premier rapport, publié en 1997, il y a déjà sept ans, donnait un portrait instantané des changements fondamentaux alors en cours. On a nommé «fin de la distance» l'impact du nouvel âge de l'information. Il est souligné dans le rapport que les lois, les règlements et les organismes de surveillance ne suivaient pas le rythme de la phénoménale explosion du développement technologique.

En 1999, a été déposé le deuxième rapport intitulé «Positionnement du Canada dans la révolution technologique mondiale». Ce rapport traitait principalement des effets émergents de l'Internet. En fait, la toute première recommandation de ce rapport prévoyait qu'avec le concours des autres gouvernements et dans le cadre d'un forum international approprié, le gouvernement canadien devrait s'attaquer au plus tôt aux sites qui, sur Internet, font la promotion du racisme, de la pornographie et de la violence. Depuis lors, certaines lois ont été adoptées. Des normes applicables à l'industrie ont été mises en oeuvre, la technologie a été sans cesse améliorée et des groupes de consommateurs ont été créés pour s'occuper de la nouvelle réalité de l'information.

Ce qui n'était pas vraiment apparent à l'époque, c'est la plaie du pollupostage, ces messages commerciaux et non commerciaux non sollicités qui sont adressés à des millions et des millions d'ordinateurs. Pour tous ceux qui sont branchés sur l'Internet, les pourriels constituent une vraie plaie. D'abord, ils engorgent le cyberespace. Ensuite, ils sont une nuisance pour les entreprises et les consommateurs. Enfin, ils coûtent énormément cher en ressources financières et humaines.

Au Canada, on estime que le pollupostage a coûté un milliard de dollars en perte de productivité, les entreprises devant lutter contre le déluge de courriels non sollicités, absorber les coûts plus élevés de la capacité de TI, comme de l'équipement plus puissant et une plus grande bande passante ou des dépenses accrues de leurs centres de dépannage qui doivent purger les boîtes de courrier engorgées.

Les pourriels sont aux communications modernes ce que les circulaires et les dépliants étaient aux boîtes aux lettres il y a plusieurs années. Autrement dit, du courrier poubelle.

(1610)

Selon certains observateurs d'Internet, le pourriel est une menace potentielle à la viabilité même d'Internet en raison des quantités incroyables de documents inutiles et indésirables qui déferlent sur les internautes sans méfiance, qu'ils soient des personnes ou des comptes de société.

C'est pourquoi, honorables sénateurs, je prends la parole dans cette enceinte pour appuyer le projet de loi S-2. C'est aussi la raison pour laquelle l'auteur du projet, le sénateur Donald Oliver, mérite toutes nos félicitations pour la quantité considérable de temps et d'efforts qu'il a investis dans la rédaction de ce projet de loi essentiel. Le sénateur Oliver doit être félicité d'avoir pris cette initiative et de nous avoir saisis d'une question aussi urgente.

Comme je viens de le mentionner, tous les gouvernements de tous les pays éprouvent de la difficulté à simplement suivre le courant très rapide de la technologie. Cependant, au Canada, des progrès ont été réalisés pour la protection des Canadiens: il y a eu une modification du Code criminel et la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques. Il y a un groupe de travail sur le commerce électronique et les consommateurs, ainsi qu'un site Web conçu pour la protection des consommateurs en ligne, mais ils ont leurs limites.

Pour votre information, en passant, l'adresse de ce site Web est www.adware.com. Les principes du groupe de travail pour la protection du consommateur en ligne se limitent à cela, à savoir un ensemble de principes, et le site Web, qui distribue des logiciels gratuits conçus pour déceler et supprimer les mouchards électroniques qui ont pour but d'identifier les visiteurs d'un site précis, est parfois difficile à comprendre. Bref, il reste encore beaucoup à faire pour combattre le mauvais usage du courrier électronique et je crois que des mesures législatives comme le projet de loi S-2 sont essentielles. Ce projet définit précisément les problèmes, impose un ensemble de normes applicables aux fournisseurs de services Internet et prévoit des peines pour usage inapproprié.

Manifestement, le pourriel est une invasion de la vie privée des personnes et des grandes et petites entreprises, et toutes les personnes, de même que ces entreprises de toutes tailles, doivent consacrer le temps et les ressources nécessaires pour régler ce problème.

Les promotions frauduleuses, la distribution de pornographie et le vol d'identité qui sont inhérents aux messages sont en soi tout aussi inquiétants que la perte de contrôle implicitement causée par le bombardement de courriels non sollicités. Voilà donc les aspects répréhensibles du pourriel Internet que ce projet de loi est conçu pour combattre.

Honorables sénateurs, l'intérêt du projet de loi S-2 réside dans l'approche holistique qu'il adopte pour résoudre un sérieux problème du monde moderne. Le point de vue du sénateur Oliver, avec lequel je suis d'accord, ne repose pas simplement sur un seul moyen mais sur de multiples moyens d'atteindre les objectifs du projet de loi. Ceux-ci reposent notamment sur le développement d'une technologie efficace: filtres pour bloquer les pourriels; pratiques industrielles consistant, par exemple, en règles applicables aux fournisseurs d'accès Internet pour le contrôle du multipostage non sollicité; application de la loi avec amendes appropriées; enfin l'indispensable coopération internationale.

Les moyens de dissuasion proposés contre le pourriel font l'objet de dispositions qui donneraient aux utilisateurs Internet le choix de s'abonner ou non aux avis commerciaux. Les messages par courriel nécessiteraient l'utilisation de boutons qui permettraient aux destinataires de choisir ou non de s'abonner. En choisissant de s'abonner, l'usager manifesterait son désir de recevoir d'autres courriels. En choisissant de ne pas s'abonner, il mettrait fin à toute communication ultérieure de la part du fournisseur. Mais certains critiques ont signalé que cela pourrait imposer un fardeau intolérable aux comptes de courrier électronique, les utilisateurs étant ainsi obligés de signaler leur intention à l'expéditeur de chaque message.

Pour simplifier la procédure, le projet de loi S-2 propose la création d'une liste officielle anti-pourriel qui permettrait aux utilisateurs d'Internet de s'enregistrer pour ne pas recevoir de messages publicitaires et promotionnels non sollicités. Les expéditeurs de messages n'auraient pas le droit d'envoyer de messages aux personnes enregistrées. On pourrait laisser au ministre responsable du projet de loi la liberté de déterminer les paramètres de la liste: durée de l'enregistrement et procédure de modification du choix en faveur ou non d'un abonnement. Les parents pourraient utiliser la liste des usagers anti-pourriel pour bloquer les messages adressés à leurs enfants. Bref, cette mesure législative interdirait les courriels sans le consentement explicite du destinataire, ce qui correspond à une pratique en usage en Union européenne. C'est une possibilité dont disposent les utilisateurs des modèles BlackBerry. Seuls les courriels filtrés par ce dispositif sont reçus. Ainsi, l'utilisateur non seulement donne son consentement mais opère même un choix.

Honorables sénateurs, il est important de se souvenir que le principal objectif du projet de loi S-2 est de donner aux Canadiens le contrôle des messages qu'ils reçoivent au lieu de laisser ce pouvoir à l'expéditeur. Bien que le Canada dispose de certains moyens de limitation des messages commerciaux non sollicités ou, du moins, de repérage de leur origine, il est à la traîne d'un grand nombre de pays pour ce qui est d'instaurer et de mettre en vigueur une loi contre le pourriel.

Trente pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques ont présenté des lignes directrices sur la coopération internationale visant à protéger les consommateurs contre les pourriels provenant de l'extérieur de leur pays. L'Australie a prévu des amendes salées qui peuvent aller jusqu'à 1 million de dollars par jour pour les infractions à la loi anti-pourriel. Au Royaume-Uni, les amendes sont de 11 000 $ ou plus. L'Italie peut infliger des amendes allant jusqu'à 110 000 $. La Californie a adhéré à la guerre contre les pourriels en prévoyant des amendes qui s'élèvent à 1 000 $US par message ou qui peuvent atteindre 1 million de dollars par campagne — ce qui constitue les amendes anti-pourriel les plus sévères prévues parmi les 35 États.

Les amendes de 500 $ et de 5 000 $ proposées dans le projet de loi S-2 sont à discuter et elles pourraient être réduites ou haussées, selon les recommandations qui émaneront du comité permanent chargé d'étudier le projet de loi.

En gros, les gens en ont marre de trouver dans leur boîte de courrier électronique des pourriels qui, comme l'a dit le ministre des Communications de l'Australie, servent généralement à promouvoir des choses illégales, de mauvais goût et indécentes comme la vente de médicaments sur le marché noir, de la pornographie, des prix bidons, le blanchiment d'argent ou des documents faux ou frauduleux.

Évidemment, les courriels indésirables peuvent aussi faire planter les ordinateurs, ralentir la circulation sur Internet et transmettre des virus destructeurs à tous les ordinateurs qu'ils atteignent. D'après les estimations, les pourriels pourraient représenter de 60 à 70 p. 100 des courriels d'ici le printemps ou le milieu de l'an prochain. Selon la Federal Trade Commission des États-Unis, les deux tiers des pourriels peuvent contenir des informations trompeuses ou carrément fausses.

Honorables sénateurs, le projet de loi dont nous sommes saisis est important. Les pourriels sont en train de devenir un problème de plus en plus grave. Même si l'on a multiplié les efforts pour sensibiliser les consommateurs aux côtés sombres d'Internet, on n'a pas réussi à réduire le nombre de pourriels qui leur parviennent. En fait, si, comme certains le prétendent, la solution consistait à créer des logiciels de filtrage plus perfectionnés pour bloquer l'arrivée de courriels indésirables, il semble qu'on aurait déjà réglé le problème.

(1620)

Malheureusement, à chaque fois qu'il y a un progrès technologique, les expéditeurs de pourriels en masse trouvent le moyen de contourner les logiciels. Les fournisseurs de service Internet essaient de régler le problème, mais leurs efforts sont contrecarrés eux aussi par l'absence de loi fermes, même s'ils étaient en mesure de tenir un registre des expéditeurs de pourriels en masse.

Certains intervenants du secteur d'Internet ont émis des réserves à l'égard d'une mesure législative. Ils soutiennent que des lois anti-pourriel ne fonctionneront pas et que l'idée même d'un surveillant gouvernemental, pouvant entre autres être un organisme de surveillance de l'industrie, favoriserait les grands intervenants aux dépens des plus petits concurrents, que les petites et les moyennes entreprises fermeraient leurs portes et qu'un filtre anti-pourriel approuvé doit être exigé de tous les fournisseurs de services Internet. J'estime pour ma part que nous ne devrions pas laisser ces préoccupations, qui sont des détails, faire dérailler une tentative novatrice et déterminée, lancée par le sénateur Oliver, pour contrer un grave problème qui a une incidence sur nos entreprises, sur l'économie en général et sur les citoyens, particulièrement les enfants.

Le projet de loi S-2 créerait un environnement Internet où les utilisateurs pourraient bloquer les courriels non sollicités en s'inscrivant sur la liste anti-pourriel ou en choisissant le courriel commercial qu'ils veulent recevoir. Cette mesure législative amènerait le Canada au même point que nombre d'autres pays qui ont adopté des lois anti-pourriel pour contrôler un problème mondial évident, mais, il faut le dire, avec divers degrés de réussite. Pour le Canada, une telle loi serait un nouvel outil dans l'arsenal de lutte contre ce fléau qui afflige une des avancées technologiques les plus considérables de tous les temps, en l'occurrence la communication dans le cyberespace.

La loi, les progrès des technologies de filtrage et une attention indéfectible pour sensibiliser nos enfants contre les messages pernicieux et les prédateurs internautes contribueront à tout le moins à contrôler la vulgarité, la fraude et les pratiques trompeuses qui nous agressent actuellement, tant au foyer qu'au travail.

Nous ne pouvons attendre jusqu'à ce qu'on ait élaboré une technologie infaillible, qu'elle ait été commercialisée en masse et que les intervenants se soient entendus sur les normes de l'industrie. C'est maintenant qu'il faut agir, puisque le problème est réel. Dans le même ordre d'idées, honorables sénateurs, les solutions doivent également être réelles.

J'exhorte les honorables sénateurs à souscrire aux principes du projet de loi S-2 et à renvoyer le projet de loi à un comité pour une étude plus approfondie.

(Sur la motion du sénateur Stratton, le débat est ajourné.)

PROJET DE LOI SUR L'ABROGATION DES LOIS

DEUXIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Banks, appuyée par l'honorable sénateur Moore, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-11, Loi prévoyant l'abrogation des lois non mises en vigueur dans les 10 ans suivant leur sanction.—(L'honorable sénateur Banks).

L'honorable Tommy Banks: Honorables sénateurs, je ne vous ferai pas l'historique de ce projet de loi, aussi intéressant puisse-t-il être. Il s'agit du projet de loi S-11. C'était au cours de la session précédente le projet de loi S-12. Tout comme le projet de loi dont le sénateur Poulain vient de parler, parmi les projets de loi dont nous avons entendu parler au cours des derniers jours, le projet de loi S-11 est une mesure législative plutôt inhabituelle en ce sens qu'il ne se présente pas exactement sous la forme où elle était au cours de la session précédente. Il s'en rapproche beaucoup et son objectif est exactement le même. Cependant, ce projet de loi diffère légèrement.

Honorables sénateurs, je vais aller droit au but: le projet de loi vise à abroger certaines mesures législatives, particulièrement les lois du Parlement qui ont reçu la sanction royale mais qui ne sont pas encore mises en vigueur, même si elles pourraient l'être en tout temps.

Pourquoi une loi ne serait-elle pas mise en vigueur? C'est parce que l'un des derniers paragraphes de tous les projets de loi appelé «entrée en vigueur» dit précisément ou à peu près «cette loi entrera en vigueur à la date fixée par le gouverneur en conseil.» Il y a de nombreuses bonnes raisons pour lesquelles les gouvernements ont besoin de ce type de souplesse et doivent avoir beaucoup de temps. Cela peut être aussi banal qu'un manque d'argent dans l'immédiat pour mettre en vigueur cette mesure ou aussi obscur qu'un certain nombre de conditions préalables reliées à des conventions internationales et d'autres choses du genre. Pour une raison quelconque, beaucoup de projets de loi dont nous sommes saisis renferment cette disposition. Ils sont adoptés par le Parlement. Ainsi, on octroie un grand pouvoir discrétionnaire au gouvernement quant à la date d'entrée en vigueur de la loi.

Les questions à l'origine du projet de loi sont les suivantes: pendant combien de temps le gouvernement devrait-il pouvoir exercer ce pouvoir discrétionnaire? Combien de gouvernements après celui auquel ce pouvoir a initialement été accordé devraient pouvoir continuer de l'exercer? Pendant combien de temps cette situation devrait-elle durer? Le projet de loi prévoit, de façon arbitraire, que ce sera pendant 10 ans, une période jugée raisonnable. Ce pourrait être cinq, ou vingt. L'objectif du projet de loi est qu'à un moment donné le gouverneur en conseil, le gouvernement, auquel le Parlement a délégué un pouvoir, doive, si j'ai bien compris, revenir au Parlement pour expliquer qu'il doit conserver cette flèche dans son carquois. Le gouvernement devra être en mesure d'appliquer cette loi, en dépit du fait que le projet de loi a initialement été conçu, déposé, débattu et adopté dans des circonstances tout à fait différentes, étant donné l'écoulement du temps, de celles dans lesquelles la loi entrerait en vigueur. Les circonstances qui prévaudront seront, par définition, différentes et parfois même très différentes.

Le nombre des lois en vigueur aujourd'hui, auxquelles cette affirmation s'applique, et qui sont en vigueur depuis plus de 10 ans, dépend des listes, que j'ai sous les yeux, auxquelles vous vous reportez. J'ai quatre de ces listes. En tout, il y a une cinquantaine de lois, des lois du Parlement ou des articles de loi du Parlement qui existent et qui pourraient être mises en vigueur par un gouvernement autre que celui qui les a adoptées lorsque le projet de loi a initialement été conçu, dans des circonstances qui diffèrent de celles dans lesquelles le projet de loi a initialement été conçu, et dans lesquelles le Parlement les avait adoptées.

Il est indubitable que le gouvernement doit posséder, de temps à autre, cette marge de manœuvre à l'égard de certains projets de loi. La question de la durée du délai soulève la question de forme suivante: le gouvernement a-t-il le droit de décider si, plutôt que quand, une loi entrera en vigueur?

Interrogés par le comité qui a étudié le projet de loi pendant la dernière législature, au sujet des effets sur certaines lois, les fonctionnaires du ministère de la Justice ont répondu qu'il faudrait abroger ce projet de loi parce que le gouvernement ne lui donnerait pas force de loi. Autrement dit, le gouvernement a l'intention d'agir différemment de ce qu'avait prévu le Parlement. Le gouvernement a décidé non pas du moment de l'entrée en vigueur d'une loi particulière, mais s'il fallait que telle loi entre en vigueur.

(1630)

Au cours des discussions entourant le projet de loi S-12 au Comité sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles à la dernière session, un cas a été mentionné concernant une affaire, en Angleterre, qui a été renvoyée aux lords juristes. Elle n'était pas absolument identique à notre situation, mais elle renvoyait à une situation semblable à la nôtre.

J'aimerais consigner au compte rendu certains extraits des observations des lords juristes qui pourraient intéresser les honorables sénateurs. Ces exemples présentent des similitudes avec le projet de loi que nous débattons.

Lord Keith of Kinkel a fait remarquer — et ceci est fondamental —: «il ne fait aucun doute que le pouvoir exécutif est responsable devant le Parlement». En d'autres termes, d'après ce que j'en comprends, il n'est pas loisible au pouvoir exécutif de décider, après que le Parlement a adopté une loi, qu'il ne mettra pas en vigueur des lois contraires à la volonté du Parlement.

Lord Browne-Wilkinson a déclaré ce qui suit:

Soutenir que le pouvoir exécutif possède le pouvoir discrétionnaire absolu de mettre ou non en vigueur un article d'une loi équivaut à conclure que si les deux Chambres du Parlement ont adopté le projet de loi à toutes les étapes et que si la loi a reçu la sanction royale, c'est uniquement pour permettre au pouvoir exécutif de décider selon son bon vouloir s'il y a lieu d'incorporer ce texte dans le droit.

Il a ajouté:

Une telle conclusion est non seulement dangereuse au plan constitutionnel, mais contraire au bon sens. Ce serait on ne peut plus étonnant si, de nos jours, le pouvoir exécutif pouvait se prévaloir de prérogatives pour contrer la volonté exprimée dans cette loi par le Parlement et, dans une certaine mesure, pour écarter la décision de celui-ci.

Lord Mustill, dans son jugement, observe que:

Le Parlement possède ses propres moyens spéciaux pour s'assurer que le pouvoir exécutif exerce ses fonctions déléguées d'une façon que le Parlement juge appropriée, car c'est au Parlement et au pouvoir exécutif, et non aux tribunaux, qu'il incombe de gouverner le pays. Cependant, on a l'impression au cours des dernières années que le Parlement s'est servi insuffisamment — voire très insuffisamment — de ces moyens spéciaux pour rappeler le pouvoir exécutif à l'ordre et l'obliger à respecter la loi et un minimum d'équité dans l'exercice de chaque fonction de décision qu'il lui délègue.

Lord Lloyd of Berwick a déclaré:

Cela peut surprendre l'homme de la rue qu'un membre du pouvoir exécutif puisse écarter ainsi les articles d'une loi du Parlement que les deux Chambres du Parlement ont adoptée et qui a reçu la sanction royale. Après tout, c'est la fonction normale du pouvoir exécutif d'appliquer les lois adoptées par le Parlement. L'erreur, si je peux me permettre, est d'agir comme si ces articles n'existaient pas. Certes, ils n'ont pas force de loi, mais cela ne signifie pas qu'ils n'existent pas. Ils renferment une déclaration d'intention du Parlement, même s'ils ne créent aucun droit qu'on peut faire respecter. En abordant la question sous cet angle, je considère que cet article prévoit que...

— et il reprend les articles de la loi —

[...] entrent en vigueur à la date fixée par le secrétaire de l'Intérieur et non selon son bon vouloir. Autrement dit, l'article donne le pouvoir de fixer la date de leur entrée en vigueur, mais pas celui de décider ou non de les mettre en vigueur.

Je pourrais poursuivre et citer encore bien d'autres observations de Leurs Seigneuries à cet effet, mais elles soulèvent la question que j'ai posée auparavant, soit: Pendant combien de temps le Parlement peut-il raisonnablement permettre le maintien du pouvoir discrétionnaire accordé à un gouvernement, puis à son successeur, puis au successeur de ce successeur et ainsi de suite? Honorables sénateurs, si nous adoptions ce projet de loi après une étude par le comité compétent, nous réglerions le problème en faisant un grand ménage, en fait, et nous forcerions le gouvernement à revenir au Parlement s'il veut ravoir certaines lois.

Ce projet de loi donne au gouvernement une latitude considérable car il prévoit qu'il n'entrera en vigueur que deux ans après la sanction royale et que, par la suite, un rapport devra être fait aux deux Chambres du Parlement au début de chaque année civile pour répertorier les lois qui auront reçu la sanction royale depuis au moins neuf ans et qui ne seront pas encore entrées en vigueur. Le gouvernement est donc pleinement averti qu'il doit utiliser ces lois, sinon il va les perdre.

J'espère que les honorables sénateurs conviendront que ce projet de loi devrait être renvoyé au comité pour étude à la première occasion.

Des voix: Bravo!

(Sur la motion du sénateur Cools, le débat est ajourné.)

[Français]

LA LOI SUR LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Pierre Claude Nolin propose: Que le projet de loi S-12, Loi modifiant la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada (modernisation du régime de l'emploi et des relations de travail), soit lu une deuxième fois.—(L'honorable sénateur Nolin).

— Honorables sénateurs, c'est pour moi un plaisir et un honneur de prendre la parole aujourd'hui à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi S-12, qui vise à moderniser en profondeur la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada en matière de relations de travail.

D'entrée de jeu, je tiens à préciser que le projet de loi S-12 est une réplique de l'ancien projet de loi S-24 que j'avais déposé, le 23 octobre dernier, dans cette Chambre. Comme vous le savez il est mort au Feuilleton le 12 novembre dernier lors de la prorogation de nos travaux.

Depuis le dépôt du projet de loi en octobre dernier, j'ai reçu, honorables sénateurs, plusieurs témoignages d'encouragement provenant, vous vous en doutez, de membres de la GRC, mais aussi d'associations représentant les agents de divers corps policiers canadiens, ainsi que de citoyens.

Je dois ajouter que certains d'entre vous m'ont même encouragé à poursuivre la démarche entreprise. Ces témoignages, et je remercie ceux d'entre vous qui m'en ont fait parvenir, m'ont convaincu, au nom de la protection publique, de la nécessité de mener à bien une telle réforme au cours des prochains mois.

La GRC a été créée en 1873. Depuis plus de 130 ans, ses traditions, le professionnalisme de ses membres et son excellente réputation internationale constituent à la fois une importante source de fierté nationale pour les Canadiennes et les Canadiens et aussi un symbole important de notre pays. Or, au cours des dernières années, plusieurs membres de la GRC ont sévèrement et énergiquement critiqué les dispositions de leur régime de relations de travail. Par exemple, ils critiquent, avec raison, les coûts élevés de ce régime pour les contribuables canadiens ainsi que son manque de transparence, d'équité et d'impartialité.

Au fil des recherches et des consultations qui ont précédé le dépôt du projet de loi S-12, j'ai constaté, comme je le démontrerai plus loin, que cette triste situation est à l'origine d'abus de la part de l'employeur, de la détérioration du moral des troupes et de la dévalorisation personnelle et professionnelle de celles-ci.

(1640)

Ces factures sont également responsables de la frustration et du cynisme des membres de la GRC envers la procédure actuelle de détermination des conditions de travail, d'une part, et les mécanismes désuets — j'oserais dire paternalistes — et hautement controversés du règlement des griefs et des cas de discipline, d'autre part.

Honorables sénateurs, les membres de la GRC méritent que nous consacrions une partie de nos travaux à la résolution de ces graves problèmes qui peuvent nuire à l'atteinte de la principale raison d'être de notre corps policier national, c'est-à-dire la protection des Canadiennes et des Canadiens. En effet, je crois fermement que la sécurité de nos concitoyens dépend non seulement de l'implantation de meilleures procédures de reddition de comptes au sein de la Gendarmerie royale du Canada, mais aussi de la qualité des relations de travail qui y sont pratiquées.

En ce sens, le projet de loi S-12 a pour objectif principal l'amélioration des relations de travail afin que la GRC puisse accomplir efficacement son mandat, ni plus ni moins.

Honorables sénateurs, je suis fier d'affirmer que ce projet de loi constitue la première réforme majeure du régime de relations de travail des membres de la GRC depuis l'adoption, en 1986, du projet de loi C-65.

Ce dernier avait pour objectif la mise en œuvre d'une série de recommandations énoncées en 1976 par le rapport de l'importante Commission d'enquête sur les plaintes du public, la discipline interne et le règlement des griefs au sein de la Gendarmerie royale du Canada, mieux connu sous le nom de rapport Marin.

Honorables sénateurs, je n'ai pas l'intention de répéter le même discours prononcé le 29 octobre dernier. Par contre, permettez-moi plutôt de préciser certains éléments du projet de loi afin de bien expliquer la nécessité pour le Sénat de l'adopter.

Selon les données officielles, en excluant les officiers supérieurs, les dispositions du projet de loi que je vous soumets s'appliqueront à environ 15 000 membres de la GRC. Les fonctionnaires fédéraux qui œuvrent majoritairement au sein des services administratifs de la GRC seraient aussi exclus de l'application du projet de loi S-12, puisque leurs conditions de travail, ainsi que leurs procédures internes de grief ou de discipline, sont déjà régies par la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique.

Compte tenu du caractère historique de la réforme que je vous propose aujourd'hui, le projet de loi S-12 comporte un préambule. Ce dernier renferme les principes sur lesquels reposent l'application ainsi que l'interprétation des dispositions de cette initiative législative.

Le projet de loi S-12 reconnaît, dans un premier temps, que l'accès à l'accréditation et à la négociation collective fait partie des droits fondamentaux de l'organisation du travail, tant dans le secteur privé que dans le secteur public au Canada.

Deuxièmement, le projet de loi S-12 rappelle que les membres de la GRC, contrairement à leurs confrères œuvrant au sein des autres corps policiers civils au Canada, n'ont pas accès à ce droit et que cette situation donne lieu à des injustices, constitue une source constante de frustration et compromet la sécurité des Canadiennes et des Canadiens.

Troisièmement, le préambule dit que l'établissement de relations de travail harmonieuses au sein de ce corps policier favorisera la protection du public puisque les agents de la paix consacreront davantage de temps à bien remplir leurs fonctions auprès de la population, sachant que leurs représentants, au sein d'une association de policiers accréditée, défendront leurs intérêts en matière de conditions de travail ou lors d'une procédure interne de grief ou de discipline.

Enfin, le préambule stipule que la GRC pourra bénéficier de la confiance et du respect de la population et devra être imputable devant les Canadiens non seulement par le biais de la Commission des plaintes du public contre la GRC, mais également par des mécanismes de règlement, des cas de discipline et des griefs internes qui respectent les principes d'application générale de la loi — ce que l'on appelle communément en anglais le «due process» — notamment l'uniformité du processus, son équité, son impartialité, son indépendance et sa célérité.

Considérant le préambule que je viens de vous résumer, le projet de loi S-12 reconnaît donc aux membres de la GRC, pour la première fois dans l'histoire canadienne, leur droit de se prononcer démocratiquement et librement sur la possibilité de se syndiquer.

Depuis 1873, le gouvernement fédéral a toujours refusé aux membres de la GRC la reconnaissance du droit à l'accréditation et à la négociation collective.

En 1918, le gouvernement fédéral adoptait un décret interdisant sévèrement aux membres de la GRC de s'impliquer dans des activités de nature syndicale sous peine d'être renvoyés sans autre forme de procès.

Pour justifier cette politique, le gouvernement fédéral avait insisté, et insiste toujours aujourd'hui, sur la nécessité de protéger le public en maintenant un corps policier national stable, les tâches particulières des membres de la GRC ainsi que leur assujettissement à un code de discipline à caractère paramilitaire et, enfin, l'existence d'un possible conflit de loyauté, c'est-à-dire la possibilité que certains agents de la GRC ne soient loyaux qu'à leur association de policiers plutôt qu'à leurs commandants lorsque surviendrait un conflit de travail.

En 1967, après plus de 25 ans de tergiversation, les fonctionnaires fédéraux ont obtenu le droit à l'accréditation et à la négociation collective suivant l'adoption par le Parlement fédéral de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique.

Conformément au décret de 1918, une disposition de ce projet de loi de 1967 a exclu les membres de la GRC de l'application de ce qui allait devenir le nouveau régime de relations de travail au sein de la fonction publique fédérale.

Or, afin de contrer les efforts de certains membres de la GRC pour obtenir les mêmes droits que les autres fonctionnaires fédéraux, le gouvernement fédéral a abrogé, en 1974, le décret de 1918 et a établi, au cours de la même année, le programme des représentants divisionnaires des relations fonctionnelles.

À première vue, honorables sénateurs, la structure organisationnelle de ce programme s'apparente à celle d'une association accréditée dans le cadre de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. Le programme est constitué de membres de la GRC choisis à titre de représentants des relations fonctionnelles pour représenter leurs collègues auprès de l'employeur d'une part, et conseiller l'employeur en matière de relations de travail, d'autre part.

Cependant, une analyse plus poussée du fonctionnement du programme montre qu'il est bien différent du régime consenti aux fonctionnaires fédéraux. D'abord, les représentants des relations fonctionnelles ne peuvent être comparés aux représentants syndicaux puisqu'ils ne sont pas indépendants de la chaîne hiérarchique de la GRC. De plus, le programme est entièrement financé par l'employeur.

Selon des documents obtenus en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, cette initiative coûterait au moins 3,2 millions de dollars aux contribuables canadiens annuellement.

Enfin, il n'existe aucun mécanisme indépendant permettant de régler les différends entre les représentants des relations fonctionnelles et l'employeur. Par conséquent, les autorités administratives et le haut-commandement de la GRC disposent, au détriment de leurs employés, d'une très grande liberté d'action concernant non seulement la détermination des conditions de travail, mais également le règlement des griefs ou des cas de discipline.

(1650)

Honorables sénateurs, comme je le mentionnais plus tôt, les membres de la GRC sont exclus de l'application du droit à l'accréditation et à la négociation collective dont jouit actuellement la majorité des agents de la paix oeuvrant au sein d'autres corps policiers civils au Canada, au Royaume-Uni, en Nouvelle-Zélande et en Australie.

À cet égard, je vous invite à consulter une excellente étude préparée par la Direction de la recherche parlementaire de la Bibliothèque du Parlement sur cette importante question. Elle est intitulée: «Le dossier de la syndicalisation à la GRC». Elle vous a été distribuée en octobre dernier. Pour ceux d'entre vous qui ne l'auriez pas reçue ou l'auriez déjà distribuée à quelqu'un d'autre, vous n'avez qu'à contacter le personnel de mon bureau pour en obtenir une autre copie.

Cette étude démontre notamment qu'au fil des années, la GRC a beaucoup évolué — comme le reste de la société canadienne, il va sans dire. D'une force essentiellement paramilitaire qu'elle était à ses débuts, en 1873, la GRC est devenue aujourd'hui un corps policier civil national qui offre sensiblement les mêmes services que les autres corps policiers canadiens.

La majorité de ses activités est consacrée aux services de police qu'elle assure à contrat — les services de police contractuelle — dans huit provinces canadiennes, à l'exception du Québec et de l'Ontario. Plus de 200 municipalités, 65 communautés autochtones et trois aéroports ont ainsi recours à ce type de services de nature contractuelle.

À l'heure actuelle, plus de 60 p. 100 des membres de la GRC sont affectés au maintien de l'ordre en vertu de ces ententes contractuelles. Ils offrent sensiblement les mêmes services que les corps policiers civils municipaux et provinciaux, où l'on reconnaît le droit à l'accréditation et à la négociation collective. Afin de corriger cette situation, certains membres de la GRC ont décidé de contester, devant les tribunaux, l'interdiction de former une association d'employés.

Ainsi, les membres de la Division «C» — qui regroupe le détachement du Québec — ont formé, en 1985, sous l'impulsion du sergent d'état-major Gaétan Delisle, l'Association des membres de la Police montée du Québec. En 1987, M. Delisle a entrepris une longue bataille juridique afin de faire invalider l'exclusion prévue par la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique pour les membres de la GRC.

Pour appuyer sa demande, l'intimé déclarait qu'elle était contraire à l'alinéa (d) de l'article 2 de la Charte canadienne des droits et libertés qui garantit la liberté d'association à tous les citoyens canadiens.

Étant toutefois conscient de l'importance de la profession qu'il exerçait, de la nécessité de protéger le public et des pratiques en vigueur au sein des autres corps policiers canadiens, M. Delisle — comme les membres de son association — n'a jamais réclamé le droit de grève.

Il est remarquable que, malgré les difficultés considérables qu'ils ont éprouvées dans ce dossier depuis le début des années 70, les membres de la GRC ont toujours utilisé des moyens pacifiques et légitimes pour faire progresser leur cause.

En comparaison, les policiers de l'Angleterre et du Pays-de-Galles, au Royaume-Uni, ont obtenu le droit à l'accréditation et à la négociation collective, en 1919 — il y a maintenant plus de 84 ans —, à la suite d'une grève illégale et d'autres moyens de pression axés sur la désobéissance civile.

En septembre 1999, une majorité de juges de la Cour suprême du Canada, dans l'affaire Delisle c. Canada (Sous-procureur général), a catégoriquement rejeté l'argument voulant que le droit d'association inscrit dans la Charte garantisse expressément le droit aux membres de la GRC de former une association accréditée en vertu de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique et, conséquemment, accéder à un régime de négociation collective.

Selon l'opinion de la majorité, une telle reconnaissance limiterait indûment la capacité du Parlement fédéral ou d'une assemblée législative provinciale de régir les relations de travail dans la fonction publique.

Considérant que les membres de la GRC du Québec avaient pu créer librement une association d'employés indépendante, la majorité de la cour a donc conclu que leur droit à l'association n'avait pas été brimé, d'une part, et que la reconnaissance du droit réclamé par M. Delisle revenait exclusivement au Parlement du Canada par le biais d'amendements législatifs, d'autre part.

Fait plutôt étonnant, en décembre 2001, une majorité de juges de la Cour suprême du Canada, dans l'affaire Dunmore c. Ontario (Procureur général), a contredit le raisonnement établi par la majorité dans l'affaire Delisle.

En effet, ils ont statué que la reconnaissance du droit à l'Association des travailleurs agricoles de l'Ontario nécessitait expressément la création d'un syndicat!

Honorables sénateurs, l'opinion de la majorité de la Cour suprême dans l'affaire Delisle, selon laquelle la modification du régime des relations de travail des membres de la GRC représentait une prérogative du Parlement, a constitué l'élément déclencheur du processus qui a mené au dépôt du projet de loi S-12.

Toutefois, d'autres facteurs, en plus de ceux que j'ai cités au début de mon discours, m'ont également motivé à aller de l'avant dans ce dossier.

Ainsi, parallèlement au déroulement des procédures judiciaires dans l'affaire Delisle, deux autres associations composées de membres de la GRC furent créées au Canada, soit l'Association de la Police montée de l'Ontario, en 1990, et l'Association professionnelle de la Police montée de la Colombie-Britannique, en 1992, démontrant ainsi les lacunes du Programme des représentants divisionnaires des relations fonctionnelles et l'existence d'une volonté de réformer le régime de relations de travail au sein de la GRC.

De plus, le 22 septembre 1989, l'ancien commissaire de la GRC, Norman Inkster, a fait une déclaration surprenante au cours d'un interrogatoire devant la Cour supérieure du Québec ayant trait à l'affaire Delisle.

Selon lui, le Parlement fédéral était l'ultime responsable du régime de relations de travail s'appliquant à la GRC — jusque-là, tout va bien. Dans ce contexte, si la loi était modifiée comme le souhaitait M. Delisle, cela n'affecterait pas outre mesure l'administration de la GRC.

Cette position a été réitérée récemment par le Caucus des représentants des relations fonctionnelles à la GRC selon le magazine Pony Express, dans son édition de novembre 2003.

Il s'agit de la revue nationale interne et officielle du service de police. Cette dernière rapportait que lors d'une réunion tenue à Ottawa à l'automne 2003, le Caucus des représentants des relations fonctionnelles ne s'opposait pas à ce que les membres de la GRC votent sur la question de la syndicalisation si le projet de loi S-12 était adopté.

En 1995, l'important rapport du groupe de travail chargé de réviser la partie I du Code canadien du travail — mieux connu sous le nom de commission Sims — intitulé «Vers l'équilibre», a recommandé la syndicalisation des membres de la GRC sous le régime d'une autre loi que celui du Code canadien du travail.

Selon la Commission, l'adoption d'une telle politique ne nuirait pas au contrôle opérationnel de la GRC ni à la protection de l'intérêt public.

Considérant tous ces facteurs, le projet de loi S-12 accorde le droit à l'accréditation et à la négociation collective en créant, à même la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, un régime distinct de celui prévu par la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique dans ce domaine.

Afin de favoriser l'implantation de relations de travail harmonieuses au sein de la GRC et d'assurer la crédibilité, la transparence, l'indépendance et le bon fonctionnement de cette initiative, sa gestion sera confiée à la Commission des relations de travail dans la fonction publique, nommée ci-après, dans mon discours, la «Commission».

(1700)

Le projet de loi édicte une procédure complète et transparente qui permettra, comme je l'ai mentionné un peu plus tôt, aux membres de la GRC de se prononcer démocratiquement et librement sur la création d'une association de policiers. S'ils votaient contre, tout ce qu'on adopterait deviendrait caduc. Le projet de loi donne aux membres de la GRC le droit de se prononcer sur l'à-propos d'accéder à un régime de négociation collective. En ce sens, le projet de loi n'impose pas la formation d'une telle association à l'intérieur de ce corps policier.

Si la réponse d'une majorité de membres est positive, l'association agira à ce moment à titre d'agent négociateur accrédité par la Commission afin de négocier avec l'employeur l'amélioration des conditions de travail des membres de la GRC. L'association s'impliquera également dans la défense d'un employé lors d'une procédure de grief ou de l'imposition d'une mesure disciplinaire.

Compte tenu de l'organisation particulière du travail au sein de la GRC, des tâches qu'accomplissent ses employés ainsi que de la pratique observée dans les autres juridictions au Canada, au Royaume-Uni et en Australie, cette association ne sera pas formée que de membres de la GRC et, de surcroît, elle ne pourra être affiliée aux grandes centrales syndicales qui regroupent la majorité des fonctionnaires fédéraux.

Des protections contre l'intimidation ou toute autre tactique déloyale de la part de l'employeur visant à empêcher les membres de la GRC de s'associer sont également prévues dans le projet de loi.

Une fois le processus d'accréditation dûment complété, le projet de loi S-12 établit une procédure semblable à celle qui existe actuellement au sein de la fonction publique fédérale visant la négociation de bonne foi de la première convention collective des membres de la GRC ainsi que de son renouvellement.

Le projet de loi prévoit également le recours à des mécanismes de conciliation ou d'arbitrage obligatoire en cas d'impasse dans les négociations.

L'application de ces deux procédures distinctes de résolution de conflits sera encadrée par la Commission.

Ainsi, cette dernière pourra nommer un conciliateur afin de favoriser un rapprochement entre les deux parties ou, selon certains critères, un arbitre indépendant afin de résoudre les questions litigieuses.

Les décisions prises en vertu de la procédure d'arbitrage seront exécutoires et sans appel.

Honorables sénateurs, la procédure de négociation collective proposée par le projet de loi S-12 a non seulement pour objectif de favoriser le règlement positif des conflits de travail au sein de la GRC, mais elle vise également à assurer une meilleure protection du public.

En effet, l'implantation de la procédure d'arbitrage obligatoire fait en sorte que, conformément à la pratique observée dans la plupart des autres corps policiers civils au Canada, au Royaume-Uni, en Australie et en Nouvelle-Zélande, les membres de la GRC, en cas d'impasse dans les négociations avec leur employeur, n'auront pas le droit de grève. Je le répète, le projet de loi S-12 n'accorde pas le droit de grève aux membres de la GRC.

Cette interdiction comprend également le ralentissement du travail ou toute autre activité concertée de la part des employés ayant pour objet la limitation du rendement.

À cet égard, le projet de loi est très clair et prévoit l'application de sanctions criminelles lors d'un débrayage illégal.

Si des actes de vandalisme, de méfaits ou de troubles de l'ordre public sont perpétrés par certains membres de la GRC au cours des négociations collectives, ces derniers s'exposeront aux mesures disciplinaires prévues dans la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada ou à des accusations criminelles.

Honorables sénateurs, j'ai cité plus tôt une série d'arguments faisant en sorte que le gouvernement fédéral a toujours refusé de proposer une réforme semblable à celle prévue par le projet de loi S-12.

Honorables sénateurs, en 2004, ce refus tout comme les arguments du gouvernement qui s'y rattachent ne sont plus justifiés, n'ont plus leur raison d'être et, enfin, et c'est ce qui devrait nous convaincre tous, nuisent à la sécurité publique.

Selon moi, le professionnalisme et la retenue démontrés par certains membres de la GRC dans cet épineux dossier, les propos précités de l'ancien commissaire Inkster ainsi que les commentaires récents du Caucus des représentants des relations fonctionnelles, les recommandations de la commission Sims, l'évolution de la GRC ainsi que l'interdiction de débrayer prévue par le projet de loi démontrent hors de tout doute que la formation d'une association de policiers accréditée n'aurait aucun effet néfaste sur la protection du public, l'administration de la GRC ou le maintien de la discipline.

Qui plus est, le gouvernement fédéral est à la remorque non seulement des pratiques actuelles des provinces et des municipalités dans ce dossier, mais également de celles d'autres pays du Commonwealth.

Mis à part les cas de l'Angleterre et du Pays-de-Galles que j'ai déjà mentionnés, l'Australie a reconnu le droit à l'accréditation et à la négociation collective à ses policiers en 1942. La Nouvelle-Zélande a fait de même en 1935.

Sur la question du présumé conflit de loyauté et du chaos qui résulteraient de la création d'une association de policiers au sein de la GRC, je considère cet argument futile puisque la pratique observée dans d'autres juridictions tend à démontrer qu'ils ne se sont jamais réellement produits.

À vrai dire, en tant que parlementaire responsable et soucieux de la sécurité de la population, je me préoccupe davantage de la situation actuelle où les policiers doivent mener une lutte acharnée pour faire reconnaître leurs droits les plus élémentaires lors d'une procédure disciplinaire ou de griefs et ce, trop souvent, au détriment de la protection du public. Si vous cherchez un problème de déficit de qualité de protection des citoyens canadiens, vous en avez un en ce moment. Je vous mentionnerai plus tard quelques cas qui vous feront dresser les cheveux sur la tête.

Cela dit, passons maintenant à la deuxième partie du projet de loi ayant trait aux procédures de griefs et de discipline prévues par la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada.

Honorables sénateurs, le débat entourant la syndicalisation des membres de la GRC a également souvent été associé à l'inefficacité et au manque d'impartialité, de célérité, de transparence et d'indépendance des procédures très complexes ayant trait aux griefs et aux mesures disciplinaires.

Actuellement, plus de 1 100 griefs provenant de membres civils inquiets d'une décision unilatérale de la part du haut-commandement de la GRC visant à modifier leur catégorie d'employé, engorgent la procédure interne prévue pour le traitement de ces dossiers.

Selon une série de rapports publiés au cours des dernières années par le Comité d'examen externe de la GRC, les délais entourant le règlement de griefs ou l'imposition d'une sanction disciplinaire sont trop souvent supérieurs à ceux prévus par la loi et, parfois, s'étalent sur plusieurs années.

Toujours selon ce Comité, cette situation entraîne des coûts importants pour la GRC ainsi qu'une source de tension considérable pour un membre, sa famille ou ses collègues, notamment lorsqu'il s'agit du traitement d'une mesure disciplinaire prévoyant une suspension sans solde ou même un renvoi.

Je tiens à souligner que cela peut affecter aussi la confiance des Canadiennes et des Canadiens dans un corps policier national efficace et professionnel.

À l'heure actuelle, un membre de la GRC peut déposer un grief relativement à l'application des conditions de travail par son employeur. Qu'advient-il lorsqu'un tel grief est déposé?

Selon la loi, le commissaire de la GRC constitue le dernier niveau d'appel d'une décision rendue par un niveau inférieur en matière de contestation de griefs.

Or, avant de prendre sa décision, le commissaire doit référer certaines catégories de griefs au Comité d'examen externe de la GRC.

(1710)

Bien que les membres de ce comité soient nommés par le gouverneur en conseil, ils ne peuvent qu'étudier les cas référés par le Commissaire.

De surcroît, le Comité d'examen n'a qu'un pouvoir de recommandation auprès du commissaire faisant ainsi en sorte qu'il ne dispose d'aucun moyen pour que ses conseils soient exécutoires.

Afin de corriger cette situation, le projet de loi abolit le Comité d'examen pour le remplacer par une procédure d'arbitrage externe et indépendante semblable à celle prévue dans la fonction publique fédérale.

Ainsi, lorsqu'un grief aura franchi tous les niveaux de la procédure de contestation interne, il pourra être renvoyé devant un conseil d'arbitrage où l'employeur ainsi que l'association de policiers seront représentés et où les coûts seront également partagés entre les deux parties.

Le fonctionnement de ce nouveau mécanisme sera encadré par la Commission des relations de travail dans la fonction publique et les décisions issues de ce processus seront exécutoires.

En ce qui à trait aux mesures disciplinaires graves imposées suite à une infraction au Code de déontologie, la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada prévoit que, suivant une plainte déposée par l'employeur, un comité d'arbitrage composé de trois officiers de la GRC soit formé. Ce comité doit déterminer la sanction appropriée pour prévenir toute forme de récidive de la part du membre de la GRC. Ce dernier peut en appeler de la décision du comité après du commissaire.

Comme dans le cas d'un grief, le Comité d'examen peut faire des recommandations au commissaire avant qu'il ne prenne sa décision. Dans le cas d'un renvoi ou d'une rétrogradation, la décision est prise par une commission de licenciement ou de rétrogradation également composée de trois officiers. Tout comme dans le cas des mesures disciplinaires graves, le membre peut porter sa cause en appel devant le commissaire.

Honorables sénateurs, ces décisions quasi judiciaires, qui mettent souvent en cause les droits fondamentaux des membres de la GRC, peuvent avoir des effets hautement négatifs sur la qualité de vie et le travail des membres de la GRC qui doivent affronter solitairement et avec peu de ressources ce processus complexe reconnu pour son manque d'indépendance.

Honorables sénateurs, j'aimerais vous citer trois cas qui démontrent que cette situation ne peut plus durer.

Dans les affaires Laberge c. Officier compétent de la Gendarmerie royale du Canada, en 2000, et Lefebvre c. Officier compétent de la Gendarmerie royale du Canada, toujours en 2000, deux comités d'arbitrage interne ont carrément rejeté les procédures prescrites contre deux membres de la GRC. Le comité d'arbitrage interne avait carrément rejeté les procédures contre les deux membres. Ces derniers avaient été suspendus puis congédiés à la suite de procédures disciplinaires qui ont duré près de cinq ans!

Les deux autres dossiers que je veux évoquer concernent des cas de harcèlement ou d'inconduite sexuelle au sein de la GRC, dont les victimes sont malheureusement encore une fois des femmes.

Le 29 août 2003, le Journal de Montréal publiait une importante nouvelle selon laquelle les procédures disciplinaires prévues par la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada seraient inefficaces pour régler les problèmes de harcèlement sexuel au sein de la GRC.

La situation est telle que, dans une lettre obtenue par ce quotidien, le commissaire de la GRC, Giulianio Zaccardelli affirme:

Des cas de harcèlement, y compris d'inconduite sexuelle, ont été portés à mon attention, mais les comptes rendus que j'ai reçus sur le traitement de certaines de ces situations sont encore plus troublants.

C'est une lettre du commissaire de la GRC. Cela dit, le premier dossier que je vous présente est celui de Mme Terry Lebrasseur. En juin 2003, cette agente de la GRC, qui faisait partie de l'équipe de protection du premier ministre et de son épouse, a déposé une poursuite contre la GRC devant la Cour fédérale pour non-respect des procédures disciplinaires prévues par la loi.

Mme Lebrasseur a joint les rangs de la GRC en 1993. De 1998 à 2001, elle affirme avoir toujours reçu d'excellentes évaluations de performance au travail.

Or, en mai 2001, un inspecteur lui aurait conseillé de quitter l'équipe de protection du premier ministre, sinon elle écoperait d'une réprimande. La raison d'un tel geste? Elle aurait simplement indisposé un collègue, une autre personne au cours de son travail.

Mme Lebrasseur a refusé cette proposition — j'ajouterais à bon droit d'ailleurs — et par la suite, elle a été retirée de l'équipe. Malgré sa demande de révision de la mesure disciplinaire prescrite par l'inspecteur, la GRC aurait refusé de porter l'affaire devant un comité d'arbitrage comme le prévoit la loi!

Dans sa poursuite contre le procureur général, Mme Lebrasseur allègue que sa démotion est due au fait qu'entre 1998 et 2000, elle aurait tenté d'informer son employeur du harcèlement sexuel perpétré à son égard par un surintendant de la GRC. Selon elle, les autorités du service de police étaient au courant de la situation mais n'ont rien fait pour la corriger.

Mme Lebrasseur poursuit donc son employeur pour dédommagements pour les problèmes économiques, psychologiques et médicaux prétendument engendrés par les procédures disciplinaires à son égard.

L'affaire Lebrasseur n'est pas la seule du genre. En septembre dernier, quatre agentes de la GRC de Calgary ont intenté une poursuite contre leur employeur devant la Cour du Banc de la Reine de l'Alberta.

Dans ce qui est convenu d'appeler l'affaire Doe, les quatre agentes ont été agressées sexuellement par le même sergent et des mesures disciplinaires, après de nombreux délais, ont été entreprises à l'égard de ce dernier.

Honorables sénateurs, je ne veux pas juger du bien-fondé de cette procédure. Les tribunaux vont s'en charger. Je veux juste vous alerter au fait suivant: Est-ce qu'il est normal que, dans un corps de police en 2004, le commissaire ait le dernier mot sur tout alors que nous exigeons transparence, célérité, indépendance de tous ceux qui tranchent les droits? Pourquoi ne pas exiger la même chose du corps de police dont nous sommes très fiers, d'ailleurs?

L'autre affaire se passe en Alberta et implique trois agents de la GRC. Les plaignantes allèguent que plusieurs officiers de la GRC auraient voulu étouffer l'affaire par le biais de représailles disciplinaires contre elles afin de préserver l'image de la police fédérale.

D'autres officiers auraient tenté d'interférer dans les procédures disciplinaires en ne respectant pas pleinement la loi en ce qui a trait à la gestion des enquêtes de discipline ou des causes portées devant un comité d'arbitrage.

Enfin, les représentants des relations fonctionnelles — c'est le plus honteux — auraient refusé d'intervenir. Ils sont payés par les employeurs et ils essaient de ressembler à un représentant syndical. Ces représentants ont refusé d'appuyer certaines plaignantes dans les diverses étapes des procédures disciplinaires, c'est le comble. Il va sans dire que les quatre agentes sont allées devant les tribunaux, mais elles devront payer elles-mêmes les frais d'avocats.

Tout comme dans l'affaire Lebrasseur, elles poursuivent — à bon droit, j'espère — la GRC pour dédommagements.

Honorables sénateurs, ces trois cas démontrent, notamment les poursuites pour harcèlement ou inconduite sexuelle, l'inefficacité de la loi puisque les membres doivent se référer aux tribunaux pour que leurs droits fondamentaux soient respectés.

Le projet de loi S-12 mettra fin à cette situation.

Ainsi, sans nuire à l'application de mesures disciplinaires ou de renvoi et tout en protégeant la sécurité publique, le projet de loi S-12 abolit le comité d'arbitrage et la commission de licenciement ou de rétrogradation, d'une part, et la procédure d'appel devant le commissaire de la GRC, d'autre part.

Désormais, la sanction sera encore déterminée par l'employeur et suivra la procédure de contestation interne.

Toutefois, pour des raisons d'efficacité, d'impartialité et d'indépendance, cette décision pourra être assujettie à la nouvelle procédure d'arbitrage externe et indépendante prévue pour les griefs.

Finalement, par souci de transparence auprès des membres de la GRC et des Canadiens, le projet de loi S-12 prévoit que la Commission des relations de travail dans la fonction publique devra présenter un rapport annuel au Parlement sur l'administration des diverses dispositions de ce projet de loi, comme elle le fait actuellement dans le cadre de l'administration de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique.

(1720)

Avant de conclure, honorables sénateurs, j'aimerais répondre à certaines affirmations faites par des membres du Comité national des représentants des relations fonctionnelles de la GRC, qui ont dit ne pas avoir été consultés avant le dépôt de mon projet de loi.

Si je me réfère aux propos de Joe Mitchell et de Tim Kennedy, deux membres de cet important comité — propos rapportés dans l'édition précitée du magazine Pony Express, le magazine officiel de la GRC —, les modestes réformes entreprises récemment par la GRC pour améliorer la procédure de traitement des griefs et des mesures disciplinaires seraient satisfaisantes pour améliorer les relations de travail et la qualité de vie des membres.

Or, plusieurs personnes que j'ai consultées au cours des derniers mois, et qui témoigneront lors de l'étude du projet de loi S-12 par un comité, affirment que ces changements feront bien peu pour rétablir la confiance d'une majorité de membres de la GRC dans le régime actuel des relations de travail qui, je le rappelle, n'est pas perçu comme étant efficace, équitable, impartial et, surtout, indépendant.

En d'autres mots, honorables sénateurs, ces modifications, aussi louables soient-elles, ne règleront pas les problèmes de fond qui minent constamment le moral des membres de la GRC.

Honorables sénateurs, en conclusion, le Parlement doit agir rapidement dans ce dossier. Nous avons toujours fait preuve de non-partisanerie politique et de célérité dans nos travaux parlementaires lorsqu'il s'agit d'améliorer les outils législatifs mis à la disposition des membres de la GRC pour qu'ils combattent efficacement la criminalité dans nos communautés, le crime organisé ou le terrorisme. En ce sens, je crois fermement que le même esprit doit prévaloir tout au long de l'étude du projet de loi S-12.

Cette initiative législative favorisera l'établissement de relations de travail harmonieuses fondées sur la confiance, le dialogue et le respect mutuel. Cet élément est tout aussi important que l'augmentation du budget de la GRC ou les modifications au Code criminel pour permettre à ce corps policier de remplir efficacement son mandat.

En bout de ligne, le projet de loi S-12 sera non seulement à l'avantage de la GRC, mais également et surtout des Canadiens qui méritent un service de police fédéral de premier ordre.

(Sur la motion du sénateur Rompkey, le débat est ajourné.)

[Traduction]

LE CODE CRIMINEL

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—REPORT DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Joyal, C.P., appuyée par l'honorable sénateur Kinsella, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-250, Loi modifiant le Code criminel (propagande haineuse).—(L'honorable sénateur Sparrow).

Son Honneur le Président: Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix: Le vote!

L'honorable Anne C. Cools: Non.

Son Honneur le Président: Sénateur Cools, souhaitez-vous prendre la parole?

Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, le débat sur le projet de loi C-250 est actuellement reporté au nom du sénateur Sparrow et celui-ci souhaite prendre la parole au sujet du projet de loi. J'engage les honorables sénateurs à laisser le sénateur Sparrow parler. Il n'est pas ici en ce moment, mais j'ai la certitude qu'il pourra prendre la parole à propos du projet de loi dans un proche avenir. J'engage le Sénat à permettre au doyen de cette assemblée de prendre la parole ou à reporter l'article.

Son Honneur le Président: L'article demeure-t-il reporté, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Le débat est reporté.

(Le débat est reporté.)

LA RÉSOLUTION DE BERLIN DE 2002 DE L'ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE DE L'ORGANISATION POUR LA SÉCURITÉ ET LA COOPÉRATION EN EUROPE

RAPPORT DU COMITÉ DES DROITS DE LA PERSONNE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

Le Sénat passe à l'étude du deuxième rapport du Comité sénatorial permanent des droits de la personne (clarification de son mandat), présenté au Sénat le 17 février 2004 —(L'honorable sénateur Maheu).

L'honorable Shirley Maheu: Honorables sénateurs, notre comité m'a priée de demander une nouvelle clarification du mandat qui lui a été confié le 17 février.

Dans la motion dont nous sommes saisis, la plupart des paragraphes mentionnent la communauté juive et l'antisémitisme. Certains membres du comité estiment que la communauté juive n'est pas le seul groupe sémite. Ils ont demandé si, dans les circonstances, nous devons étudier tous les groupes. Je recherche une orientation du Sénat sur cette question.

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, je croyais que je n'interviendrais pas du tout en février. D'abord, je pense que nous devrions attendre le sénateur Grafstein, étant donné qu'il est l'un des parrains de cette mesure. Je n'oserais jamais dire qu'un sénateur est absent car cela va à l'encontre des règles et de la courtoisie. De toute façon, je crois que nous devrions à tout le moins le consulter.

Cette motion fut adoptée un jour où je m'étais absenté pour participer à une célébration. Le sénateur Nolin était absent aussi. Étant à la fête, je ne pouvais pas ajourner le débat en son nom et lui, occupé par son projet de loi, ne pouvait pas ajourner le débat en son nom. La motion portant le renvoi de la résolution à un comité a donc été adoptée. Je n'ai pas d'objection. Je veux étudier cette résolution. Je veux comparaître comme témoin étant donné que j'ai prononcé un discours sur cette question qui me tient beaucoup à cœur.

Je dois rendre à César ce qui lui revient: le sénateur Maheu a fait son devoir en renvoyant au Sénat les souhaits du comité. La courtoisie exigerait que nous parlions au sénateur Grafstein, le principal parrain de cette mesure. Cette résolution remonte à deux ans. Le sénateur a dit aux quatre coins du monde, même avant de consulter le Sénat, que la mesure serait prise. Il est maintenant ravi que la résolution ait été renvoyée au Sénat, mais il y a un doute au sein du comité sénatorial. C'est pourquoi je prie le sénateur Maheu d'ajourner le débat sur la motion et de demander des renseignements additionnels au parrain de cette vieille résolution de l'OSCE qui remonte à près de deux ans.

Son Honneur le Président: Sénateur Maheu, vous avez une observation à formuler?

Le sénateur Maheu: Non, j'aimerais demander aux sénateurs d'examiner les observations formulées par le sénateur Kinsella lorsque la résolution a été renvoyée au Comité des droits de la personne. À ce moment-là, le sénateur a mentionné le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le fait que le Canada avait enfreint l'article 27 prévoyant que, dans les États où il existe des minorités ethniques, religieuses ou linguistiques, les personnes appartenant à ces minorités ne peuvent être privées du droit d'avoir, en commun avec les autres membres de leur groupe, leur propre vie culturelle, de professer et de pratiquer leur propre religion, ou d'employer leur propre langue. Selon moi, cette disposition s'applique à plus d'un groupe. Plusieurs membres du comité ont demandé que nous demandions au Sénat s'il souhaiterait que le comité entende des témoins de tous les groupes concernés.

Je demande que la question soit mise de côté jusqu'au retour du sénateur Grafstein.

L'honorable Joan Fraser: Honorables sénateurs, étant donné que ce que j'ai à dire ne sera pas long, j'interviendrai maintenant. J'ai participé au débat, comme le sénateur Maheu s'en souviendra. J'ai cru comprendre qu'on demandait au comité d'étudier le texte d'une résolution adoptée par une association parlementaire. Nous ne pouvons pas changer cela. Nous avons le texte devant nous.

Il est vrai que le débat à cet endroit a débordé le cadre de l'antisémitisme proprement dit. Il m'a semblé, lorsque j'ai appuyé la motion, que le travail du comité porterait principalement sur l'antisémitisme, parce que c'est ce dont il est question dans le texte.

Le sénateur Maheu préside toutefois les travaux du Comité sénatorial permanent des droits de la personne. Si les membres du comité sont d'avis que, pour bien étudier ce document, le comité devrait aussi examiner des circonstances comparables, je n'aurais pas l'impression que le comité trahit le mandat qui lui a été confié, pour autant qu'il étudie bel et bien le document et qu'il nous fasse ensuite rapport de ce qu'il pense de la résolution.

(1730)

Le sénateur Maheu: Je veux confirmer que madame le sénateur nous demande bien de nous pencher sur tous les groupes. Même dans la résolution, il n'est pas toujours fait mention d'un groupe en particulier, ni dans ses attendus ni dans son dispositif.

L'honorable Pierre Claude Nolin: Je ne suis pas au courant des discussions que vous avez eues au sujet du mandat, mais serez-vous autorisés à déborder le cadre des attendus de la résolution? Le cas échéant, pourrez-vous ou voudrez-vous avoir accès à d'autres discussions entourant le débat sur cette résolution?

Le sénateur Maheu: Voilà pourquoi nous demandons des éclaircissements au Sénat. Devrions-nous nous pencher sur plus d'un groupe ou devrions-nous nous en tenir à ce qui est dit dans tous les paragraphes de la résolution, qui peuvent englober plus d'un groupe?

Le sénateur Nolin: C'est justement là où je veux en venir. C'est peut-être incomplet, parce que les attendus couvrent de nombreuses questions, alors que le dispositif se limite à un groupe. Il faudrait peut-être qu'il englobe d'autres groupes. C'est là le problème. C'est ainsi que je le comprends.

(Sur la motion du sénateur Rompkey, le débat est ajourné.)

L'ÉTUDE SUR L'APPLICATION DE LA LOI SUR LES LANGUES OFFICIELLES, LES RÈGLEMENTS, LES INSTRUCTIONS ET LES RAPPORTS PERTINENTS

MOTION VISANT À DEMANDER UNE RÉPONSE AU GOUVERNEMENT—DÉCISION DU PRÉSIDENT

PEUPLES AUTOCHTONES

MOTION D'ADOPTION DU SIXIÈME RAPPORT DU COMITÉ DÉPOSÉ AU COURS DE LA DEUXIÈME SESSION ET DEMANDE D'UNE RÉPONSE DU GOUVERNEMENT—DÉCISION DU PRÉSIDENT

À l'appel de l'article no 2:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Gauthier, appuyé par l'honorable sénateur Fraser,

Que, conformément au paragraphe 131(2) du Règlement, le Sénat demande au gouvernement de déposer une réponse détaillée et globale au quatrième rapport du Comité sénatorial permanent des langues officielles, déposé au Sénat le 1er octobre 2003, durant la deuxième session de la 37e législature, et adopté le 28 octobre 2003.—(Décision du Président); et

À l'appel de l'article no 24:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Sibbeston, appuyée par l'honorable sénateur Adams,

Que le sixième rapport du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, déposé au Sénat le 30 octobre 2003, durant la deuxième session de la 37e législature, soit adopté et que, en application du paragraphe 131(2) du Règlement, le Sénat demande au gouvernement de fournir une réponse complète et détaillé et de confier cette tâche aux ministres des Affaires indiennes et du Nord canadien, de la Justice, des Ressources humaines et du Développement des compétences, du Développement social, du Patrimoine canadien, de la Sécurité publique et de la Protection civile, de la Santé, et de l'Industrie; et l'Interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits.—(Décision du Président).

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, à la rubrique «Autres», les articles nos 2 et 24 doivent faire l'objet d'une décision de la présidence, que je suis prêt à rendre aujourd'hui. Je vais me prononcer sur les deux en même temps. Pour ce qui est du Feuilleton, je vais aussi rendre une décision sur l'article no 3 lorsqu'il sera abordé.

Honorables sénateurs, deux rappels au Règlement connexes ont été soulevés pour dénoncer des motions distinctes présentées en vertu d'une règle relativement nouvelle, le paragraphe 131(2) du Règlement du Sénat. Dans le premier cas, le sénateur Gauthier a proposé que le Sénat demande au gouvernement de fournir une réponse à un rapport du Comité permanent des langues officielles qui avait été déposé et adopté à la fin de la dernière session.

Dans le second cas, une motion inscrite au nom du sénateur Sibbeston voulait qu'un rapport du Comité permanent des peuples autochtones, qui avait aussi été déposé durant la deuxième session de la 37e législature, mais qui n'avait pas été adopté à ce moment-là, soit adopté maintenant et que le Sénat demande au gouvernement de fournir une réponse à ce rapport. Le sénateur Corbin s'est opposé à ces deux motions pour des raisons de procédure.

[Français]

Le sénateur Corbin a soutenu que, dans les deux cas, il n'entre pas dans nos us et coutumes de prendre en considération des rapports de comité d'une session précédente. Dans le cas de la motion du sénateur Gauthier, le sénateur Corbin a ajouté que le Règlement exige que la motion demandant au gouvernement d'apporter une réponse soit présentée immédiatement après l'adoption du rapport.

Dans le cas de la motion inscrite au nom du sénateur Sibbeston, le sénateur Corbin a déclaré, et je cite: «C'est encore pire», étant donné que le rapport n'avait même pas été adopté durant la session précédente. Sur ce dernier point, le sénateur Corbin a reçu l'appui du sénateur Kinsella, qui a aussi fait des interventions à d'autres égards.

[Traduction]

Je suis redevable aux sénateurs Gauthier, Milne et Robichaud qui ont également pris la parole sur ces recours au Règlement. J'apprécie toujours la participation et l'aide de tous les sénateurs dans ces situations.

Les répercussions de la prorogation sur le Feuilleton sont bien connues. Comme le prévoit le commentaire 235(1) à la page 69 de la 6e édition de Beauchesne,

... la prorogation a pour effet de mettre fin sur-le-champ à tous les travaux en cours jusqu'à la convocation des Chambres. Non seulement le Parlement ne siège plus, mais toutes les affaires en souffrance sont abandonnées, de sorte qu'après une prorogation tous les projets de loi doivent être réintroduits, comme si la Chambre n'en avait jamais été saisie.

Il est important de savoir ici quelles sont les affaires abandonnées. Beauchesne emploie le mot «affaires». Les affaires relatives aux projets de loi, aux rapports et aux motions doivent cesser; la prorogation met fin à toutes les affaires.

Le commentaire 235(1) prévoit également ceci:

Il est d'usage, depuis quelques années, de réinscrire certains projets de loi au Feuilleton d'une nouvelle session, sur simple consentement de la Chambre, à l'étape qu'ils avaient atteinte avant la prorogation.

En fait, depuis la publication de la 6e édition du Beauchesne en 1989, il est devenu courant à la Chambre des communes de rétablir des initiatives gouvernementales et des initiatives parlementaires. Ramener des questions d'une session antérieure est aujourd'hui un usage bien établi au Parlement canadien.

[Français]

Pour en revenir au Beauchesne, le commentaire 890, à la page 252, dit clairement que les rapports d'une session antérieure peuvent, si la Chambre adopte une motion à cette fin, être pris en considération pendant une nouvelle session. Les deux rapports de comité visés par les motions contestées ont été déposés, selon les règles, devant le Sénat avant la prorogation. Il est clair, par conséquent, que la prorogation ne représente pas un obstacle insurmontable qui interdit au Sénat d'examiner, durant une nouvelle session, une question qui avait été inscrite au Feuilleton durant une session précédente.

[Traduction]

C'est la première fois que le Règlement est invoqué au sujet de cette nouvelle disposition qui diffère considérablement de la disposition correspondante du Règlement de la Chambre des communes. Le paragraphe 131(2) du Règlement ne dit rien au sujet des répercussions que la prorogation pourrait éventuellement avoir sur une demande de réponse du gouvernement. Dans l'autre endroit, selon l'ouvrage de procédure parlementaire La procédure et les usages de la Chambre des communes de Marleau et Montpetit, ces demandes sont traitées de la même manière que les ordres de dépôt de documents lesquels, selon le Règlement de la Chambre, survivent aux prorogations et peuvent même être rétablis après les dissolutions.

Par conséquent, le décompte des 150 jours civils continue de se faire comme s'il n'y avait pas eu prorogation. De plus, dans l'autre endroit, la pratique veut que les demandes de réponses du gouvernement soient renvoyées par motion adoptée en comité et non par motion adoptée à la Chambre, comme le prévoit notre Règlement.

Aux termes du paragraphe 131(2) du Règlement, il est possible de présenter une motion demandant au gouvernement d'apporter une réponse au rapport d'un comité «après l'adoption du rapport». Il n'est ici question d'aucun délai. Par conséquent, je ne peux pas partager le point de vue du sénateur Corbin selon lequel la motion doit être présentée immédiatement après l'adoption du rapport. En fait, dans le scénario dont il parle, lorsqu'il n'y a pas de recommandation dans le rapport à adopter demandant une réponse du gouvernement et lorsque la motion d'adoption du rapport ne comprend pas de demande de réponse du gouvernement, il faudrait un avis de deux jours pour présenter une motion indépendante visant le renvoi d'une demande de réponse du gouvernement.

Il a été suggéré de demander aux comités de déposer de nouveau leurs rapports au cours de la nouvelle session, afin que ces rapports soient présentés comme il se doit au Sénat. Il faudrait pour cela de nouveaux ordres de renvoi et le renvoi des témoignages de la session précédente, et cela obligerait les comités à adopter de nouveau leurs rapports avant de les présenter encore une fois au Sénat. Je ne crois pas que ce soit nécessaire. Le Sénat, comme le montrent les motions qu'il a adoptées au cours des derniers jours, a coutume de renvoyer aux comités les questions qu'ils n'avaient pas fini d'examiner durant les sessions précédentes pour qu'ils puissent poursuivre leurs travaux. De même, le Sénat a la discrétion de se saisir de questions non réglées lors de sessions antérieures.

(1740)

[Français]

Nous sommes ici saisis de deux motions demandant au Sénat d'examiner une proposition distincte — dans un cas, s'il convient ou non d'amender une réponse à un rapport de comité adopté au cours d'une session précédente et, dans l'autre cas, s'il convient ou non d'adopter une motion d'un comité d'une session précédente et, en même temps, de demander au gouvernement de répondre à ce rapport. Je trouve que le principe sous-jacent est valable; deux de nos collègues soumettent des propositions précises à l'attention du Sénat.

[Traduction]

Tant que la motion est claire et sans ambiguïté, je ne vois rien, dans la procédure, qui puisse empêcher les sénateurs de tenir un débat et de se prononcer sur la valeur respective des motions. Par conséquent, je décide que le débat sur ces deux motions peut avoir lieu.

(L'article est reporté.)

[Français]

RÈGLEMENT, PROCÉDURE ET DROITS DU PARLEMENT

MOTION VISANT L'EXAMEN ET LA CERTIFICATION DES PÉTITIONS DÉPOSÉES AU SÉNAT—MOTION D'AMENDEMENT—DÉCISION DU PRÉSIDENT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Gauthier, appuyée par l'honorable sénateur Fraser,

Que le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement étudie, afin d'en faire rapport avant le 1er mars 2004, toute la procédure au Sénat se rapportant aux pétitions déposées devant cette Chambre réunie en Parlement, qu'un greffier à la procédure, après examen quant à la forme et au contenu, certifie les pétitions selon des normes établies par le Sénat et qu'un suivi soit prévu dans les Règlements à cette fin;

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Corbin, appuyée par l'honorable sénateur Maheu, que la motion soit modifiée en supprimant tous les mots après le mot «Que» et en les remplaçant par ce qui suit:

«l'historique de la pratique dans les deux chambres du Sénat et des Communes se rapportant aux pétitions autres que les pétitions pour les projets de loi privés, ainsi que les pratiques, les coutumes et les conventions des deux chambres de Westminster soient déposés au Sénat et circulés aux honorables sénateurs avant d'en saisir le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement.»—(Décision du Président).

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, le lundi 16 février, l'honorable sénateur Gauthier a invoqué le Règlement pour s'opposer à la modification proposée par l'honorable sénateur Corbin relativement à une motion que l'honorable sénateur Gauthier avait présentée il y a quelques jours. Dans sa motion, le sénateur Gauthier demande que le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement soit autorisé à faire rapport sur les pratiques du Sénat concernant l'étude des pétitions. L'honorable sénateur Corbin, quant à lui, a remplacé la proposition initiale par une motion réclamant le dépôt au Sénat, avant le renvoi au Comité du Règlement, de renseignements sur l'historique de la pratique relative aux pétitions, tant au Sénat et à la Chambre des communes qu'à Westminster.

[Traduction]

Selon le sénateur Gauthier, cette modification, si elle est adoptée, annulerait sa proposition initiale. Il fonde son analyse sur plusieurs ouvrages parlementaires dont le Beauchesne, avec citation à l'appui, et maintient qu'une telle modification est, sur le plan de la procédure, irrégulière, inacceptable, antiréglementaire. Quel que soit le mérite de la proposition du sénateur Corbin, elle doit, d'après le sénateur Gauthier, être présentée en tant que motion distincte, assortie d'un avis, et non comme une modification.

Dans sa réponse, le sénateur Corbin précise que sa modification avait pour seul objet de garantir que tout changement apporté à la pratique actuelle et au Règlement du Sénat bénéficiera d'une compréhension de leurs origines historiques, de leur application et de leur évolution. Comme il l'a expliqué: «On prend rarement la peine de faire l'historique pour essayer de comprendre pourquoi le Règlement est rédigé de telle façon et pourquoi il est appliqué assez sévèrement parfois». Pour ce qui est de qualifier la motion de dilatoire, le sénateur Corbin nie tout motif ou toute intention de faire échec aux objectifs du sénateur Gauthier.

[Français]

À la suite de ces explications, j'ai fait savoir que je prendrais la question en délibéré et que je ferais connaître ma décision aux sénateurs aussitôt que possible. Ayant passé en revue les débats ainsi que la motion et la modification proposée, je suis maintenant prêt à rendre une décision.

[Traduction]

D'après les ouvrages parlementaires habituels, comme le Marleau et Montpetit à la page 454, une motion de remplacement est proposée «dans le but d'empêcher la poursuite des discussions sur la question à l'étude à la Chambre». Il y a deux types de motions de remplacement, soit la question préalable et les motions dilatoires. Parmi ces dernières, on compte les motions visant à suspendre les travaux de la Chambre, à ajourner le débat ou à passer à une autre affaire. La modification du sénateur Corbin n'entre dans aucune de ces catégories.

Elle s'applique plutôt au contenu de la motion du sénateur Gauthier et propose de le changer substantiellement. Si elle est adoptée, la proposition du sénateur Corbin remplacera entièrement celle du sénateur Gauthier. En pratique, les amendements peuvent avoir beaucoup d'effet. Comme on peut le lire au commentaire 567 de Beauchesne:

L'amendement peut avoir pour objet de modifier une proposition de façon qu'elle soit accueillie plus favorablement ou d'offrir à la Chambre un nouveau texte susceptible de remplacer la proposition originale.

À cette fin, on peut modifier une motion en retranchant certains mots, en retranchant certains mots pour les remplacer par d'autres ou en insérant ou ajoutant d'autres mots. Les amendements peuvent même substituer une proposition comportant une conclusion contraire.

Cela étant dit, je me dois de souligner que la formulation de la modification du sénateur Corbin ne permet peut-être pas d'atteindre l'objectif visé. En effet, à l'examen attentif du texte, je note que la responsabilité de préparer l'historique des pétitions n'y est pas impartie, non plus que la date de production de cet historique n'y est précisée. Fait également important, l'amendement précise que l'historique doit être établi et distribué aux sénateurs avant le renvoi au Comité du Règlement, mais il ne saisit pas explicitement le Comité de la question. Le manque de précision de la modification rend son objet plutôt confus.

Si elle était peaufinée, la modification pourrait sans doute nous aider à comprendre ce qui doit se passer et quand. Je rappelle aux sénateurs que l'article 30 du Règlement permet de modifier une motion avec la permission du Sénat.

En conclusion, je ne vois aucune raison de déclarer cet amendement irrecevable du point de vue de la procédure et j'estime que le débat peut se poursuivre.

L'honorable Eymard G. Corbin: Votre Honneur, j'invoque le Règlement. Je me suis exprimé sur cette question, mais vous m'invitez à m'expliquer. Je vais donc prendre le temps d'y penser; je propose d'ajourner le débat.

Son Honneur le Président: Je pense que le débat peut être reporté, honorables sénateurs.

Des voix: D'accord.

(Le débat est reporté.)

RÈGLEMENT, PROCÉDURE ET DROITS DU PARLEMENT

MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À ÉTUDIER LES INITIATIVES PARLEMENTAIRES—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Sharon Carstairs, conformément à l'avis du 12 février 2004, propose:

Que le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement étudie la manière dont les initiatives parlementaires, y compris les projets de loi et les motions, sont traitées dans cette Chambre et que le Comité fasse rapport à ce sujet au plus tard le 30 novembre 2004.

— Honorables sénateurs, à mon avis, il est temps que l'on étudie la manière dont les initiatives parlementaires, y compris les projets de loi et les motions, sont étudiées dans cette Chambre.

J'ai deux principales préoccupations que j'aimerais que le comité étudie. La première concerne la façon dont la Chambre des communes rétablit dans les faits des projets de loi, alors que nous ne disposons pas d'une procédure analogue. J'estime que cela pénalise les membres de notre assemblée qui ont consacré leur temps et leurs efforts à leurs projets de loi.

(1750)

Pourquoi, par exemple, des projets de loi comme le C-250, le C-212, le C-249, le C-260 et le C-300, qui sont tous de bons textes, seraient-ils rétablis d'office, alors que des projets de loi du Sénat comme S-2, S-4, S-7, S-3 et S-12 ne le sont pas? Est-ce que nos projets de loi sont moins bons? Ont-ils moins de mérite? Je ne le crois pas; c'est d'ailleurs le contraire. Mon expérience m'enseigne que nos projets de loi ont autant de substance et de valeur que ceux de l'autre endroit.

Ma deuxième préoccupation concerne les moyens par lesquels nos projets de loi retiennent l'attention des membres de cette Chambre. Permettez-moi de commencer par ce que nous pourrions peut-être appeler le pire des scénarios. Un honorable sénateur propose un projet de loi d'initiative parlementaire et prend la parole à ce sujet. Un autre sénateur obtient l'ajournement. Le projet de loi est alors reporté 14 jours de suite. Honorables sénateurs, selon le calendrier normal des séances du Sénat, cela correspond à cinq semaines. Nous avons cinq semaines sans débat. Le quinzième jour, le sénateur qui a obtenu l'ajournement initial se lève, fait quelques observations et indique qu'il souhaite vraiment poursuivre la discussion à une date ultérieure, donc le débat est ajourné à nouveau. Cela signifie que nous pourrions donc avoir encore 14 jours sans discussion, et ainsi de suite.

Les initiatives parlementaires ne sont pas les initiatives ministérielles, honorables sénateurs, et il n'y a donc pas de possibilité d'appliquer la clôture. Je crois que c'est une bonne chose. Cependant, cet usage place également nos leaders, les leaders adjoints des deux côtés de cette enceinte, dans une situation presque intenable. Le sénateur qui n'a pas utilisé son temps pour participer au débat n'est pas dans cette enceinte et ainsi, le sénateur Kinsella ou le sénateur Rompkey, en fonction du sénateur en cause, juge nécessaire de reporter l'étude de la question. Ce n'est pas vraiment leur responsabilité, mais le sénateur n'est pas présent au Sénat. Les leaders adjoints doivent accepter cette responsabilité, car il n'y a personne d'autre pour l'assumer pour eux.

Honorables sénateurs, il doit y avoir une meilleure façon de procéder. Si nous examinons les efforts que les sénateurs consacrent souvent à la préparation d'une motion ou d'un projet de loi d'initiative parlementaire, je pense que nous allons reconnaître, pour être justes, que cette mesure mérite alors qu'on s'y attarde.

À l'autre endroit, par exemple, un projet de loi est discuté pendant une heure au plus puis retombe au bas de la liste de priorité du Feuilleton s'il n'est pas soumis à un vote. Il réapparaît pour une autre heure de débat et pour un vote, le cas échéant. S'il est inscrit au Feuilleton pour une troisième fois, le vote doit avoir lieu. Un processus semblable se retrouve à l'Assemblée législative du Manitoba, l'assemblée provinciale que je connais le mieux.

Honorables sénateurs, je n'apprécie peut-être pas un projet de loi présenté par un collègue, et j'ai le droit de préciser mes raisons ou mes objections. Cependant, mon collègue a le droit de s'attendre à ce que son travail soit pris au sérieux et, selon moi, cela exige en fin de compte un vote. Non seulement est-ce là la façon courtoise de procéder, mais je pense que c'est la façon démocratique de faire.

Je n'ai pas de préjugé spécifique à l'endroit d'un système en particulier utilisé dans d'autres chambres ou, en fait, à l'autre endroit. Je pense simplement que le Comité du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement devrait étudier ce qui est fait à la Chambre des communes, dans d'autres assemblées législatives provinciales et d'autres parlements du monde entier.

Honorables sénateurs, le moment est venu de trouver une meilleure façon. À mon avis, notre système ne fonctionne tout simplement pas.

(Sur la motion du sénateur Poy, le débat est ajourné.)

[Français]

LANGUES OFFICIELLES

AUTORISATION AU COMITÉ D'ÉTUDIER L'APPLICATION DE LA LOI SUR LES LANGUES OFFICIELLES, LES RÈGLEMENTS, LES INSTRUCTIONS ET LES RAPPORTS PERTINENTS

L'honorable Maria Chaput, conformément à l'avis du 17 février 2004, propose:

Que le Comité sénatorial permanent des langues officielles reçoive la permission d'étudier, afin d'en faire rapport de façon ponctuelle, l'application de la Loi sur les langues officielles, ainsi que des règlements et instructions en découlant, au sein des institutions assujetties à la Loi, ainsi que les rapports de la commissaire aux langues officielles, de la présidente du Conseil du Trésor et de la ministre du Patrimoine canadien;

Que le comité dépose son rapport final au plus tard le 30 juin 2004; et

Que les mémoires reçus et les témoignages entendus sur la question par le Comité au cours de la deuxième session de la 37e législature soient déférés au Comité.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

DROITS DE LA PERSONNE

AUTORISATION D'ENGAGER DU PERSONNEL

L'honorable Shirley Maheu, conformément à l'avis du 17 février 2004, propose:

Que le Comité sénatorial permanent des droits de la personne soit habilité à retenir les services de conseillers, techniciens, employés de bureau ou autres éléments nécessaires pour examiner les projets de loi, la teneur de projets de loi et les prévisions budgétaires qui lui ont été renvoyés.

(La motion est adoptée.)

AUTORISATION AU COMITÉ DE PERMETTRE LA DIFFUSION DES DÉLIBÉRATIONS

L'honorable Shirley Maheu, conformément à l'avis du 17 février 2004, propose:

Que le Comité sénatorial permanent des droits de la personne soit autorisé à permettre la diffusion de ses délibérations publiques par les médias d'information électroniques, de manière à déranger le moins possible ses travaux.

(La motion est adoptée.)

AUTORISATION AU COMITÉ D'EXAMINER LES ASPECTS JURIDIQUES AYANT UNE INCIDENCE SUR LA QUESTION DES BIENS IMMOBILIERS MATRIMONIAUX SITUÉS SUR UNE RÉSERVE EN CAS DE RUPTURE D'UN MARIAGE OU D'UNE UNION DE FAIT

L'honorable Shirley Maheu, conformément à l'avis du 17 février 2004, propose:

Que le Comité sénatorial permanent des droits de la personne soit autorisé à examiner, pour en faire rapport, les aspects juridiques clés ayant une incidence sur la question des biens immobiliers matrimoniaux situés sur une réserve en cas de rupture d'un mariage ou d'une union de fait ainsi que leur contexte politique particulier.

Le Comité sera notamment autorisé à examiner:

.L'interaction entre les lois provinciales et les lois fédérales en ce qui concerne la répartition des biens matrimoniaux (biens personnels et immobiliers) se trouvant sur une réserve et, en particulier, l'exécution des décisions des tribunaux;

.La pratique de l'attribution des terres sur les réserves, en ce qui concerne, en particulier, l'attribution coutumière;

.Dans le cas de mariage ou d'union de fait, le statut des conjoints et la façon de répartir les biens immobiliers en cas de rupture d'une union; ainsi que,

.Les solutions possibles qui maintiendraient un équilibre entre les intérêts personnels et les intérêts communautaires.

Que les mémoires reçus et les témoignages entendus sur la question par le Comité sénatorial permanent des droits de la personne durant la deuxième session de la trente-septième législature soient déférés au comité;

Que le Comité présente son rapport final au plus tard le 25 juin 2004; et que le Comité conserve les pouvoirs nécessaires à la diffusion de son étude contenue dans son rapport final et ce, jusqu'au 30 juillet 2004.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne à 9 heures demain.)


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