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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 38e Législature,
Volume 142, Numéro 18

Le mercredi 24 novembre 2004
L'honorable Daniel Hays, Président


 

 

LE SÉNAT

Le mercredi 24 novembre 2004

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

VISITEURS DE MARQUE

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, nous avons des invités spéciaux parmi nous aujourd'hui.

Je vous signale la présence à notre tribune de notre ancien collègue et ancien gouverneur général du Canada, le très honorable Roméo LeBlanc.

Au nom de tous les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada!

[Français]

VISITEURS À LA TRIBUNE

Son Honneur le Président : J'aimerais également signaler la présence dans notre tribune de M. George Bowring et de Mme Pauline Michel, notre nouveau poète officiel au Parlement. Bienvenue à vous.

Honorables sénateurs, nous avons également le privilège d'avoir à notre tribune Son Excellence M. Oum Sarith, secrétaire général du Sénat au Cambodge, Son Excellence M. Chan Ven, secrétaire général adjoint de l'Assemblée nationale du Cambodge et M. Moul Sasnak, conseiller du secrétaire général du Sénat au Cambodge.

Nous vous souhaitons la bienvenue au Sénat du Canada.

[Traduction]

Pour terminer, honorables sénateurs, je vous signale la présence à notre tribune d'un groupe d'étudiants en histoire politique de deuxième année de l'Université Carleton. Ils sont accompagnés du professeur Kerry Badgley, d'Archives du Canada.

Au nom des honorables sénateurs, je leur souhaite la bienvenue au Sénat.


[Français]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

HOMMAGES

L'HONORABLE YVES MORIN, O.C.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j'ai reçu plus tôt aujourd'hui un avis du leader du gouvernement qui demande, conformément au paragraphe 22(10) du Règlement, que la période réservée aux déclarations de sénateurs soit prolongée afin de rendre hommage au sénateur Yves Morin, qui prendra sa retraite le 28 novembre 2004.

Je rappelle aux honorables sénateurs qu'en vertu du Règlement, chaque sénateur ne dispose que de trois minutes pour son intervention.

[Traduction]

L'honorable Michael Kirby : Honorables sénateurs, c'est avec énormément de regret que je prends la parole aujourd'hui pour dire adieu à notre collègue, et un très bon ami, Yves Morin, qui prend sa retraite du Sénat aujourd'hui.

Le sénateur Morin siège dans cette assemblée depuis le début de 2001. Au cours de cette période, soit près de quatre ans, il a contribué de manière exceptionnelle à l'amélioration de la politique en matière de santé, tant en sa qualité de membre du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, qu'à titre de conseiller spécial en matière de recherche sur la santé auprès du ministre de la Santé.

Le docteur Morin a été nommé au Sénat après une longue et brillante carrière comme cardiologue, spécialiste des professions médicales à l'Université Laval, où il a également été doyen de la Faculté de médecine. Par ailleurs, il a, en sa qualité de chercheur médical, été membre d'un comité qui a recommandé la création des Instituts de recherche en santé du Canada. On a reconnu les services qu'il a rendus à la médecine au Canada en lui décernant l'Ordre du Canada et l'Ordre national du Québec.

(1340)

C'est son expérience extraordinaire en médecine que le sénateur Morin a utilisée dans le cadre des travaux reliés à la politique de santé au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. Les travaux du comité dans le domaine des soins de santé, à commencer par son rapport en six volumes sur le système de soins de santé au Canada, qui a été suivi notamment par le rapport en trois volumes sur la santé mentale qui a été rendu public hier, ont énormément profité de l'expérience du sénateur Morin. En fait, la contribution du sénateur Morin est l'une des principales raisons pour lesquelles les rapports sur la santé présentés par le comité — et je suppose qu'il en ira de même pour son rapport sur la santé mentale — ont eu une grande influence sur la politique publique.

Yves a révisé tous les mots de toutes les versions de chaque volume. Il a recruté des experts de tout le pays pour examiner des dispositions précises des divers rapports afin de veiller à ce qu'elles constituent une contribution importante à la politique en matière de santé. En bref, comme ses antécédents universitaires l'y avaient préparé, le sénateur Morin s'est assuré que les rapports du comité en matière de santé soient soumis à un contrôle par les pairs très strict et qu'ils passent le test haut la main.

Le sénateur Morin a fait une bonne partie de son travail sur les rapports sur la santé à partir de sa maison à Québec et, durant l'été, à partir de sa maison de campagne aux Éboulements. En fait, je dois des remerciements bien sentis à son épouse, Marie, qui est assise dans la tribune. La tolérance et la compréhension dont elle a fait preuve lorsque mes coups de téléphone répétés, mes nombreuses télécopies et mes nombreux courriels sont venus déranger leur couple, surtout les fins de semaine durant l'été 2002 et été 2004, ont été vivement appréciées.

Merci beaucoup, Marie, de m'avoir permis de déranger autant que je l'ai fait votre vie privée avec Yves.

Yves, votre engagement à l'égard de la cause de l'amélioration du système de santé du Canada et de la santé des Canadiens est remarquable. Votre volonté d'utiliser cet engagement pour aider le Sénat, en particulier le Comité des affaires sociales, à devenir le principal foyer de débat sur la politique en matière de santé au Canada est une chose pour laquelle nous vous serons tous, dans cette enceinte, à jamais reconnaissants.

Chose encore beaucoup plus importante, votre travail sur la politique en matière de santé au cours des quatre dernières années est l'héritage durable que vous laissez à tous les Canadiens. En leur nom, je vous remercie pour tout ce que vous avez accompli. En mon nom personnel, je voudrais vous remercier d'être devenu un ami si proche au cours des quatre dernières années.

[Français]

L'honorable Wilbert J. Keon : Honorables sénateurs, je suis devant vous aujourd'hui pour souligner le départ de notre collègue et ami, le sénateur Morin. Je le connais depuis de nombreuses années puisque nous avons poursuivi notre carrière dans le même domaine de la cardiologie. Il a contribué de manière significative à la médecine, de part et d'autre, sur la scène régionale, nationale et internationale.

[Traduction]

Yves, tel que nous le connaissons, était partout à la fois. Je ne mentionnerai que quelques-uns des organismes au sein desquels il a joué un rôle : Société canadienne de cardiologie, Fondation des maladies du coeur du Canada, Conseil de recherches médicales du Canada, Instituts de recherche en santé du Canada, pendant leur création, Association des facultés de médecine du Canada, en tant que doyen de l'Université Laval, Congrès mondial de la cardiologie, dont nous avons été les hôtes au Canada et auquel nous avons participé à l'étranger. Le Comité scientifique consultatif auprès du ministre de la Santé, présidé par Roberta Bondar, est le dernier comité auquel j'ai participé avec lui. Il a été un contributeur monumental à tous les niveaux.

Le sénateur Morin est arrivé au Sénat il y a trois ans et demi, à la suite d'une vie consacrée aux Canadiens, à ses patients, à son université et à la recherche médicale. Il est débarqué avec toutes ses qualités et le Sénat a profité grandement de son passage.

L'importance que le sénateur Morin accordait à l'intérêt de ses patients est évidente, à tous les niveaux. Il a souvent parlé de ses préoccupations au sujet de la santé, nous rappelant diverses activités dans l'ensemble du Canada, dans des domaines tels que le cancer, la sclérose en plaques, l'ostéoporose, le sida, le diabète, la sensibilisation aux accidents cérébrovasculaires, la maladie d'Alzheimer, la maladie de Parkinson et, au début du mois, la souffrance débilitante.

Il a piloté le projet de loi sur les cigarettes à inflammabilité réduite, un projet de loi d'initiative parlementaire qui a été adopté à l'autre endroit, et a veillé à son adoption par le Sénat. Ce projet de loi n'aurait jamais abouti sans sa conviction qu'il pourrait sauver des vies au Canada et sans sa persévérance. Il entrera en vigueur à la fin de l'année. Il sauvera des vies, en particulier celles des personnes les plus démunies de notre société.

Il nous a également entraînés dans des débats complexes et arides sur le projet de loi sur la procréation humaine assistée. Je crois que la plupart d'entre nous ont été déchirés par les questions opposées et contradictoires qui ont été soulevées par ce projet de loi. Le sénateur Morin nous a sans cesse rappelé que, malgré nos réserves sur certains aspects de ce projet de loi, la décision de ne pas l'adopter finirait à long terme par faire plus de mal que de bien aux Canadiens en laissant libre cours au développement de ce domaine vaste et fondamental de la santé et de la recherche.

L'importance accordée à la recherche par le sénateur Morin était aussi mise en évidence par son travail à la Bibliothèque du Parlement, qu'il a appuyée énergiquement par le biais du comité mixte, et sur laquelle beaucoup d'entre nous continuent de compter pour avoir accès à des analyses objectives.

J'ai toujours été reconnaissant au sénateur Morin pour le dévouement, la perspicacité et l'esprit constructif dont il a fait preuve au sein du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. Les deux récents rapports importants du comité sur le rôle du fédéral dans les soins de santé, et le premier rapport sur la santé mentale publié cette semaine, ont grandement profité de l'apport du sénateur, surtout par son insistance à aborder les questions de la recherche et de l'éthique. Je veillerai à ce que nous n'oubliions pas ces leçons.

Honorables sénateurs, en plus de perdre un serviteur dévoué du Canada, nous perdons un collègue pour qui l'important était de servir et non pas d'acquérir la gloire ou la reconnaissance, et un ami dont les conseils éclairés, la curiosité et l'intelligence, sans oublier son remarquable sens de l'humour, ont éclairé et animé cette assemblée.

Cher ami, vous quittez cet endroit, mais votre travail n'est pas terminé pour autant. Vous êtes encore jeune et vous êtes une véritable encyclopédie dans laquelle nous continuerons de puiser.

Honorables sénateurs, notre collègue nous manquera, mais nous lui rendrons visite souvent.

Des voix : Bravo!

(1350)

L'honorable Yves Morin : Honorables sénateurs, je remercie le sénateur Kirby de ses aimables paroles, empreintes de générosité. J'ai eu la chance de travailler sous sa gouverne, en tant que membre du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, et j'ai beaucoup appris en travaillant sous sa direction. Nous avons publié un rapport qui a eu un effet considérable sur notre politique nationale en matière de santé. J'ai eu aussi la chance de représenter le Sénat à la dernière conférence des premiers ministres sur la santé, en septembre, où je me suis rendu compte que notre rapport constituait réellement la base de la réforme recommandée par le premier ministre et acceptée par les premiers ministres provinciaux.

Hier, le sénateur Kirby a déposé un rapport sur la première étape de l'étude du comité sur la santé mentale. De nouvelles consultations auront lieu au cours de l'année. Je ne doute nullement que ce document aura tout autant d'effet sur ce secteur extrêmement négligé de notre système de soins de santé.

Le sénateur Kirby m'a fait un grand honneur, il y a quelques minutes, en me demandant de contribuer au prochain rapport, ce que je ferai avec plaisir.

Je remercie également mon bon ami, le sénateur Keon. Nous étions des amis avant d'arriver au Sénat. Je savais déjà dans quelle mesure il avait contribué au développement de la recherche en cardiologie au Canada. Je suis heureux de savoir qu'il sera vice- président du comité et que le comité et le Sénat pourront profiter de ses avis inestimables pendant encore de nombreuses années.

Votre Honneur, je vous remercie d'avoir fait preuve d'indulgence à mon endroit toutes les fois où j'ai fait montre d'une méconnaissance des règles de procédure et de débat.

Je suis également reconnaissant au leader du gouvernement et au leader de l'opposition. À maintes reprises, les deux ont fait montre d'une grande gentillesse et je les remercie de leur aide.

J'ai été très honoré de servir mon pays au Sénat. Comme le sénateur Keon l'a déclaré, j'ai eu de nombreux emplois dans ma vie, mais travailler au Sénat a été, et de loin, le meilleur de tous. Nous avons ici la possibilité d'aborder des questions cruciales qui ont de grandes répercussions sur l'avenir et sur la vie des Canadiens.

[Français]

On peut aussi être en contact avec des gens fascinants. Vous êtes, honorables sénateurs, l'exemple le plus frappant de cette démonstration. Encore une fois, je désire vous remercier de l'aide que vous m'avez apportée au cours des quatre dernières années au cours desquelles où j'ai été membre du Sénat. Je voudrais aussi remercier tous ceux qui m'ont aidé dans cette Chambre : le greffier, les officiers à la table, les sténographes, les interprètes et les pages. J'aimerais leur dire à quel point ils m'ont été d'un précieux secours.

Mes chers amis, je n'aurais rien réalisé sans l'appui indéfectible de mon adjointe, Mme Louise Dalphy. Sa connaissance de la colline du Parlement, son ardeur au travail et son efficacité m'ont été d'un grand secours dans mes travaux comme sénateur.

Enfin, je voudrais rendre un hommage particulier, vous le comprendrez, à Marie, mon épouse. Elle a dû, pendant trop longtemps, diriger ma famille alors que j'étais pris par un travail professionnel très astreignant, — le sénateur Keon le sait — celui de cardiologue et de chirurgien cardiaque. Ce travail nous amène à être très souvent absent de la maison. Voilà qu'au moment où j'abandonne ma tâche de cardiologue, je suis appelé au Sénat et je suis encore absent. Toutefois, pour mieux apprivoiser mon retour, j'ai su que Marie s'exerçait à pratiquer le salut militaire dont nous honorent les agents de sécurité afin que je ne sois pas trop dépaysé.

Merci, et encore une fois, bonne chance! Enfin, comme le disait si bien M. Chrétien : Vive le Canada!

[Traduction]

VISITEUR DE MARQUE

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, avant de passer aux déclarations, j'attire votre attention sur la présence à la tribune de notre ancien collègue, l'honorable Douglas Roche.

Heureux de vous voir de retour.

[Français]

LE TRÈS HONORABLE ROMÉO LEBLANC, C.P.

L'honorable Marilyn Trenholme Counsell : Honorables sénateurs, c'est une occasion très spéciale pour moi d'offrir des hommages à notre citoyen, le Néo-Brunswickois le plus distingué, le très honorable Roméo LeBlanc.

En cette année où nous avons célébré le 400e anniversaire de l'arrivée des Européens au Canada, — nos chers Acadiens et nos chères Acadiennes — il est approprié d'honorer le premier Acadien à être nommé gouverneur général de ce grand pays. Avant cela, il était renommé en tant qu'enseignant, journaliste, membre du Parlement, ministre, sénateur et Président du Sénat. Aujourd'hui, le très honorable Roméo LeBlanc passe ses jours auprès de la mer, entouré de sa famille et de ses amis les plus proches, avec tous ses souvenirs. Il a beaucoup d'espoir pour son pays bien-aimé.

Pendant toutes ces années, tout comme aujourd'hui, Roméo, comme ses amis l'appellent, a été un exemple vivant d'humanité et d'humilité. Né dans le petit village de L'Anse-aux-Cormier, il n'a jamais perdu son appréciation pour les choses simples et fondamentales de la vie. Les valeurs de cet endroit étaient au cœur de toutes ses incroyables contributions pendant six décennies en tant que bâtisseur d'une meilleure société au Canada.

Le Prix de l'entraide, qu'il a créé alors qu'il était gouverneur général, est un témoignage de son engagement d'honorer les hommes et les femmes qui contribuent énormément à leur communauté afin d'assurer le bien-être de leurs concitoyens. Le très honorable Roméo LeBlanc disait toujours : « Ils font tellement, mais ils ne demandent rien en retour. »

Nous saluons le très honorable Roméo LeBlanc comme Acadien, comme Néo-Brunswickois, comme Canadien, comme ami et comme homme de grande distinction et de grande inspiration. Merci du fond du cœur, et que Dieu vous bénisse toujours.

[Traduction]

L'HONORABLE JOHN BUCHANAN, C.P., C.R.

FÉLICITATIONS POUR SON ENTRÉE À LA MAPLE LEAF FOUNDATION ACADEMY OF DISTINGUISHED CANADIANS AND AMERICANS

L'honorable J. Michael Forrestall : Honorables sénateurs, il y a deux semaines, un de nos collègues a été honoré par le New England-Canada Business Council et le gouvernement de la Nouvelle-Angleterre par l'intermédiaire d'une institution de Boston, la Maple Leaf Foundation. Le sénateur John Buchanan prétend être Écossais, mais il est autant Irlandais qu'Écossais.

(1400)

Le sénateur Buchanan, lors d'un dîner de gala auquel assistaient 700 personnes dont l'ancien premier ministre Lougheed, les premiers ministres Charest, du Québec et Williams, de Terre-Neuve et l'honorable Ron Irwin, consul général du Canada, a été admis à l'Académie des éminents Canadiens et Américains. Honorables sénateurs, permettez-moi de citer un bref extrait du discours prononcé à cette occasion :

À l'occasion du vingtième anniversaire du banquet Maple Leaf, les administrateurs de la Maple Leaf Foundation créent l'Académie des éminents Canadiens et Américains. Ce soir, nous avons le grand plaisir de nommer l'honorable John M. Buchanan, C.P., c.r., premier membre de l'académie. Le sénateur Buchanan a été nommé au Sénat du Canada en 1990. En 1967, il a été élu une première fois à l'Assemblée législative de la Nouvelle-Écosse. En 1978, il était élu premier ministre de cette province et, en 1981, 1984 et 1988, il était réélu, ce qui fait de lui le troisième premier ministre de l'histoire de cette province à avoir remporté quatre élections consécutives. Récipiendaire de cinq diplômes honoraires décernés par des établissements d'enseignement, le sénateur John M. Buchanan est un fervent porte-parole des liens économiques et culturels qui unissent nos deux pays. Ce soir, nous saluons particulièrement sa vision et ses prises de position passionnées et c'est avec une grande admiration que nous l'intronisons à l'Académie des éminents Canadiens et Américains.

Le gouverneur du Massachusetts a remis un certificat au sénateur Buchanan. De plus, l'ambassadeur Paul Cellucci et l'ancien gouverneur du Massachusetts, Ed King, lui ont fait parvenir des lettres de félicitations. Je joins mes félicitations personnelles à ces hommages au sénateur Buchanan.

[Français]

LE POÈTE OFFICIEL DU PARLEMENT

FÉLICITATIONS À PAULINE MICHEL À L'OCCASION DE SA NOMINATION

L'honorable Viola Léger : Honorables sénateurs, quel plaisir de souhaiter la bienvenue à notre deuxième poète lauréate, Mme Pauline Michel. Romancière, scénariste, comédienne, chanteuse, pédagogue et, aujourd'hui, poète lauréate du Parlement, Mme Michel devient un témoin privilégié de notre démocratie en action.

[Traduction]

Mme Michel s'est taillé une réputation non seulement à titre de poète, mais aussi à titre d'artiste multidisciplinaire, au Québec et dans les collectivités francophones un peu partout dans le monde. Elle parle parfaitement le français et l'anglais et possède un baccalauréat ès arts en éducation de l'Université de Sherbrooke et une licence ès lettres modernes de l'Université de Laval. Mme Michel a également enseigné aux niveaux secondaire et universitaire. Elle a publié plusieurs ouvrages dans divers genres dont le roman, la poésie, la chanson et le conte pour enfants.

[Français]

Dans une entrevue, madame Michel, vous disiez que vous vouliez mettre les artistes en contact avec le monde de la politique. J'aimerais ajouter que vous allez aussi mettre le monde de la politique en contact avec les artistes. En tant que poète, vous avez le don de raconter et de décrire les réalités de la condition humaine avec des mots justes, précis, simples et concis. C'est pourquoi, à titre d'artiste, j'ai souvent parlé au Parlement, c'est-à-dire au Sénat, avec des poèmes.

[Traduction]

En gage d'accueil, voici les paroles poétiques du magnifique spectacle du Cirque du soleil, « O ».

Descends au fond des choses
Mon ami
Et tu découvriras
Une pure splendeur :
Toi

[Français]

Pour vous souhaiter la bienvenue en français, en attendant vos textes, voici Roseau pensant, de Serge Patrice Thibodeau :

Roseau pensant : fragilité de l'homme.
Roseau dont on fait une flûte : fragilité du chant.
Roseau dont on fait une plume : fragilité de l'écriture. 
Dans la tourmente inattendue, livré aux vents assassins, à la violence de la pluie, le roseau ploie mais résiste.
Ainsi, chaque nouvel amour danse pour célébrer son frêle avenir ...

Toutes mes félicitations, madame Michel.

[Traduction]

LA JOURNÉE NATIONALE DE L'ENFANT

L'honorable Norman K. Atkins : Honorables sénateurs, vendredi matin dernier, madame le sénateur Callbeck et moi-même avons eu le plaisir de participer à un événement célébrant la Journée nationale de l'enfant, qui tient une place toute spéciale dans le cœur du sénateur Pearson. Il y avait notamment à l'ordre du jour une réception au foyer du Sénat, suivie d'un programme dans la chambre du Sénat. Le mot d'ordre de cette année était celui du respect réciproque, dans le cadre du thème : Un Canada digne des enfants.

Les mots me manquent pour dire à quel point j'ai trouvé ce programme remarquable. Comme merveilleux mélange, il y avait Max Keeping et Stuntman Stu, les maîtres de cérémonie; des prestations de jeunes aux talents exceptionnels, dont des groupes comme Canadian Floor Masters; un groupe de danse acrobatique; un groupe de tambours autochtones très divertissant; enfin il y avait Alex Leafloor et Brad Barkman, qui ont présenté des pièces musicales. Le numéro en solo de Jason Levesque au début du spectacle était vraiment exceptionnel.

J'ai également été impressionné par le nombre de jeunes étudiants qui ont pris la parole au sujet de divers aspects du thème de l'événement. J'ai constaté que la chambre du Sénat était remplie de jeunes très attentifs tout au long du programme, qui semblaient trouver l'activité fort agréable.

Le chef national du Congrès des peuples autochtones, le chef Dwight Dorey, de la Nouvelle-Écosse, s'est adressé au public avec éloquence, tout comme les sénateurs Mercer et Munson. Il faut féliciter chaleureusement nos collègues qui ont dû consacrer un temps considérable à ce projet. On a vu clairement que cette cause leur tient à coeur et je félicite donc les sénateurs et leur personnel de leurs efforts pour créer cet événement splendide.

LES SOINS PALLIATIFS

L'honorable Sharon Carstairs : Honorables sénateurs, j'ai participé la semaine dernière, à Lisbonne, au Portugal, à la deuxième conférence sur les soins palliatifs parrainée par la fondation Gulbenkian. Comme la première conférence, il y a deux ans, avait attiré 150 participants, les organisateurs ont pris les dispositions nécessaires pour accueillir 500 personnes cette année. En réalité, 600 résidants du Portugal ont participé. On a dû refuser 300 personnes et les organisateurs ont constaté qu'ils auraient pu faire des préparatifs pour accueillir 1 000 personnes. Ainsi on constate à nouveau la nécessité, partout dans le monde, de soins de qualité au terme de la vie, et on se rend compte que, dans le monde occidental mais aussi dans les pays du tiers monde, les citoyens souhaitent voir changer les approches vis-à-vis des mourants.

Le Canada était représenté par trois orateurs. Le docteur Harvey Chochinov, professeur à l'Université du Manitoba et président du groupe de recherche en médecine palliative, a traité de la question de la dignité et a rappelé aux délégués que la dignité affichée par le médecin aux yeux du patient constitue un facteur déterminant et clair de la façon dont le patient prend conscience de sa propre dignité.

Le docteur Pereira, directeur de la médecine palliative à l'hôpital Foothills de Calgary et professeur à l'Université de Calgary, a parlé de l'importance de la communication avec le patient et sa famille ainsi que de l'importance déontologique de dire au patient tout ce qu'il veut savoir, mais pas davantage.

En ma qualité de ministre exerçant une responsabilité spéciale pour les soins palliatifs, j'ai parlé des réalisations du gouvernement du Canada et du rôle joué par ce dernier dans la détermination de la politique de santé.

Il y avait également des représentants de l'Allemagne, de l'Espagne et du Royaume-Uni, mais le fait que le Canada était le pays qui était représenté par le plus grand nombre d'orateurs témoigne du rôle de chef de file international que joue le Canada. Le Sénat du Canada s'est particulièrement distingué dans ce domaine. En effet, c'est le Sénat qui a fait du travail de défrichement dans ses deux études : De la vie et de la mort, en 1995, et Des soins de fin de vie de qualité : Chaque Canadien et Canadienne y a droit, en 2000.

(1410)

Il reste encore beaucoup à faire dans notre pays pour que les Canadiens obtiennent les soins dont ils ont besoin à la fin de leur vie. Nous avons fait des progrès marqués, ce qui est reconnu dans le reste du monde. La première étude du Sénat a montré que seulement 200 000 $ par année étaient consacrés à la recherche sur les soins palliatifs. L'annonce faite en septembre 2004 et selon laquelle 16,4 millions de dollars étaient accordés à ce domaine au cours des cinq années à venir atteste du chemin que nous avons parcouru. Mais nous ne devons pas nous reposer sur nos lauriers. Nous devons au contraire continuer de travailler pour veiller à ce que tous les Canadiens obtiennent les soins dont ils ont besoin.

Honorables sénateurs, je vous ferai de nouveau rapport en juin 2005, mois qui marquera le dixième anniversaire de notre premier rapport. Une bonne partie des nouvelles seront bonnes, mais certaines seront mauvaises. Nous n'en faisons toujours pas assez.

LA COUPE GREY

FÉLICITATIONS AUX ARGONAUTS DE TORONTO

L'honorable J. Trevor Eyton : Honorables sénateurs, j'interviens aujourd'hui pour rendre hommage aux Argonauts de Toronto, qui ont remporté le trophée de la coupe Grey pour cette année.

Pour les quelques personnes qui ne l'auraient pas remarqué ou qui ne le sauraient pas, les Argonauts ont défait l'équipe de la Colombie-Britannique dimanche dernier ici, à Ottawa, par un score de 27 à 19. Cette remarquable victoire a été remportée dans un stade rempli à pleine capacité où plus de 50 000 spectateurs ont pu jouir d'une température et de conditions de jeu idéales. Je sais que tous les députés, dont ceux de la Colombie-Britannique, seront heureux d'apprendre que les Argonauts ont remporté la coupe Grey à 14 reprises, ce qui les place au premier rang de toutes les équipes de la LCF, et ce en 20 compétitions seulement, ce qui est également remarquable. Leur pourcentage de réussite est donc impressionnant.

C'est le quart arrière Damon Allen, un magnifique joueur, qui a été la vedette de la partie, ayant complété 23 de ses 34 passes, pour un total de 299 verges et un touché. Ce qui m'a tout particulièrement impressionné, c'est qu'un joueur de 41 ans ait accompli un tel exploit. C'est une source d'inspiration pour les anciens que nous sommes.

Je sais que les sénateurs tiennent à féliciter l'équipe et son gérant, Michael Clemons. Quand il était dans les rangs des joueurs, il avait été surnommé « Pinball ». Maintenant qu'il est derrière le banc et qu'il a remporté une coupe Grey, il veut qu'on l'appelle tout simplement Michael.

Je tiens à souligner l'extraordinaire contribution des nouveaux propriétaires des Argonauts, Howard Sokolowski et David Cynamon. Ce n'est que grâce à leur grand appui que les Argonauts sont devenus des champions nationaux.

Pour l'équipe de la Colombie-Britannique, disons qu'elle pourra se reprendre l'année prochaine.


AFFAIRES COURANTES

L'ÉTUDE SUR DES QUESTIONS RELATIVES AU MANDAT

DÉPÔT DU RAPPORT PROVISOIRE DU COMITÉ DE L'ÉNERGIE, DE L'ENVIRONNEMENT ET DES RESSOURCES NATURELLES

L'honorable Tommy Banks : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le troisième rapport du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, un rapport provisoire intitulé Le Défi d'une tonne : Passons à l'action!

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Banks, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

BIBLIOTHÈQUE DU PARLEMENT

PRÉSENTATION DU PREMIER RAPPORT DU COMITÉ MIXTE

L'honorable Marilyn Trenholme Counsell, coprésidente du Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement, présente le rapport suivant :

Le mercredi 24 novembre 2004

Le Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement a l'honneur de présenter son

PREMIER RAPPORT

Votre comité recommande qu'il soit autorisé à conseiller les présidents du Sénat et de la Chambre des communes dans l'exercice de leur autorité sur la Bibliothèque du Parlement et qu'il soit habilité à faire des recommandations aux présidents des deux chambres concernant la régie de la bibliothèque et la bonne utilisation des crédits affectés par le Parlement à l'achat de documents ou objets destinés à y être déposés.

Votre comité recommande que son quorum soit fixé à sept (7) membres, à condition que les deux chambres soient représentées et qu'un membre de l'opposition et un membre du gouvernement soient présents chaque fois qu'il y a une mise aux voix ou qu'une résolution ou une autre décision est prise, et que les coprésidents soient autorisés à tenir des séances afin de recevoir et de publier des témoignages en l'absence de quorum, à condition qu'au moins quatre (4) membres soient présents, dont un membre de l'opposition et un membre du gouvernement.

Votre comité recommande aussi au Sénat qu'il soit autorisé à siéger durant les séances du Sénat.

Un exemplaire des procès-verbaux pertinents (réunion no 1) est déposé à la Chambre des communes.

Respectueusement soumis,

La coprésidente,
MARILYN TRENHOLME COUNSELL

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur Trenholme Counsell, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)


PÉRIODE DES QUESTIONS

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

LES ÉTATS-UNIS—LA VISITE DU PRÉSIDENT

L'honorable Noël A. Kinsella (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Hier, nous avons demandé si, oui ou non, le gouvernement du Canada avait invité le président des États-Unis, qui sera à Ottawa dans six jours, à s'adresser à une séance conjointe du Sénat et de la Chambre des communes. Le ministre nous a informés qu'effectivement, cette invitation avait été lancée.

Je lis aujourd'hui dans le Toronto Star qu'un porte-parole du cabinet du premier ministre, du nom de Scott Reid, a dit qu'il n'était pas prêt à annoncer les détails de la visite du président. Le ministre pourrait-il indiquer à la Chambre si le président a répondu à l'invitation du gouvernement canadien de prendre la parole devant les deux chambres du Parlement?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Je n'aurai reçu aucune information qui me permettrait de modifier la réponse que j'ai donnée hier.

Le sénateur Kinsella : Le ministre pourrait-il, en sa qualité de membre du gouvernement, nous dire si le gouvernement a invité le président à rencontrer M. Harper, le chef de l'opposition officielle de Sa Majesté?

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, je regrette vivement de ne pas avoir d'information sur l'organisation de la visite du président et, donc, je ne peux répondre à la question.

Le sénateur Kinsella : Je pourrais peut-être formuler ma question sous forme d'une instance. À la lumière de la description que le collègue du ministre, M. Valeri, leader du gouvernement aux Communes, fait de la visite, « une visite qui est entièrement une visite de travail », le gouvernement du Canada va-t-il, par exemple, soulever les question du bois d'œuvre et de l'ESB, dans cette rencontre de travail avec M. Bush? Va-t-il soulever des questions relatives aux droits de la personne, comme le lieu de détention des prisonniers capturés par les Forces canadiennes en Afghanistan et livrés ou remis aux forces américaines, et l'application ou la non- application de normes fondamentales en matière de droits de la personne, notamment l'habeas corpus, aux prisonniers à la baie de Guantanamo?

(1420)

Le ministre pourrait-il nous parler de ces questions ici au Sénat? S'il ne peut pas, les transmettrait-il à ses collègues qui planifient cette rencontre de travail?

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, je transmettrai l'instance du sénateur Kinsella au ministre des Affaires étrangères, qui est chargé d'établir le programme de cette rencontre. Si la question du bois d'œuvre n'est pas au programme, je suis dans le pétrin.

LES NATIONS UNIES

L'ÉLARGISSEMENT DU MANDAT—LE PLAN D'INTERVENTION DU PREMIER MINISTRE

L'honorable Donald H. Oliver : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. À l'occasion d'une conférence des pays côtiers du Pacifique tenue au Chili la fin de semaine dernière, le premier ministre a préconisé d'élargir le mandat des Nations Unies en vue de permettre à cette organisation d'intervenir lorsque des pays souverains ne protègent pas leurs citoyens. Il s'agit d'une proposition admirable et d'un objectif louable, mais certains problèmes se posent. Tout d'abord, ce n'est pas le mandat des Nations Unies qui fait obstacle aux interventions, c'est la volonté politique des pays. Ensuite, les Nations Unies et d'autres organisations ont déjà trouvé des façons créatives d'intervenir dans le passé, mais ces interventions ont eu des résultats mitigés. Le premier ministre a-t-il un plan concret pour assurer la réussite de ces interventions et, si oui, l'honorable leader pourrait-il en faire part au Sénat?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, le sénateur Oliver soulève une question primordiale dans la politique étrangère du Canada en ce moment, à savoir la doctrine que le premier ministre a présentée aux Nations Unies, selon laquelle l'ONU devrait jouer un rôle positif et actif en intervenant là où les États n'ont pas su protéger et ne protègent pas leur population.

Je peux donner à l'honorable sénateur l'assurance que le premier ministre s'occupe de faire valoir des éléments de la politique étrangère avec énergie, tant à la conférence de l'APEC, au Chili, qui est terminée, qu'aux réunions de la Francophonie et aux réunions prévues à Khartoum.

Je crois qu'il existe dans la communauté internationale une volonté d'agir, mais, comme le sénateur Olivier l'a dit, il y a une énorme résistance de la part de membres importants de l'ONU qui adhèrent plus rigoureusement aux anciennes doctrines de la souveraineté des États et de la non-ingérence.

Cette évolution de la culture internationale prend du temps, et les changements ne se font pas du jour au lendemain. Toutefois, la crise du Darfour et peut-être aussi celle du Zaïre montrent la nécessité d'une intervention, ce qui fera peut-être fléchir ces pays.

Le sénateur Oliver : Je remercie le leader de cette réponse.

Au cas où l'ONU conviendrait d'élargir son mandat, le gouvernement a-t-il proposé que le Canada soit un des principaux pays qui fourniront des troupes pour ces interventions? Si oui, d'où viendront ces troupes canadiennes?

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, en faisant valoir la nouvelle doctrine de la responsabilité internationale, le premier ministre dit que le Canada entend contribuer au soutien international. Il y a bien des champs d'action : renforcement des capacités, transfert de matériel, formation, besoins de base, comme le logement, le vêtement, l'éducation, les soins de santé.

J'invite mon honorable collègue à ne pas s'en tenir à la seule présence militaire, bien que, dans tout effort d'aide à une autre société, il faille d'abord rétablir l'ordre, je le reconnais volontiers, tout comme le sénateur Oliver. Par exemple, le Canada est très actif en Haïti aujourd'hui. Il aide à stabiliser le pays et offre de la formation et d'autres formes d'aide.

En dehors de l'ordre public, il faut aider certaines sociétés en leur transmettant des connaissances simples — simples pour nous parce que nous les appliquons depuis longtemps — des connaissances qui accompagnent la mise en place des éléments politiques, sociaux et économiques d'une société. Je crois qu'il faut appliquer une notion plus large de l'assistance.

[Français]

LES RESSOURCES HUMAINES ET LE DÉVELOPPEMENT DES COMPÉTENCES

L'AIDE FINANCIÈRE À L'ÉDUCATION POSTSECONDAIRE

L'honorable Pierre Claude Nolin : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et concerne la réforme du système d'éducation postsecondaire au Canada. Notre système de santé ne fut pas la seule victime des réductions sévères effectuées par votre gouvernement, de 1994 à 1999, dans les transferts aux provinces. L'éducation postsecondaire a souffert de cette décision unilatérale qui a eu des effets néfastes non seulement sur la qualité de l'enseignement, mais aussi sur la qualité de vie des étudiants et leurs possibilités de réussite professionnelle.

Ainsi, les collèges et les universités ont dû compenser cette baisse de financement public par une hausse vertigineuse des frais de scolarité, plus de 99 p. 100 depuis 1994, selon Statistique Canada. Toujours selon cet organisme, l'endettement étudiant moyen a augmenté de 30 p. 100, de 1995 à 2000, pour atteindre plus de 29 000 $!

Honorables sénateurs, cette situation est, vous l'avouerez, inacceptable. Oui, il est normal de s'endetter pour étudier. Mais est-il aussi acceptable que des étudiants amassent une dette qui frôle parfois les 40 à 60 000 $ et qui constitue une lourde hypothèque avant même qu'il ou qu'elle ait entrepris la recherche d'un premier emploi? Face à cette situation alarmante, le sénateur Austin peut-il dire au Sénat si son gouvernement a l'intention d'augmenter les transferts aux provinces en matière d'éducation postsecondaire afin que les étudiants cessent d'hypothéquer ainsi leur avenir?

[Traduction]

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je ne me lancerai pas dans une discussion sur la gestion financière dans les années 1980 et 1990; je dirai simplement que, dans les années 1990, tous les Canadiens convenaient qu'il fallait rétablir la situation, et elle l'a été, grâce à leur soutien. Comme je l'ai dit dans mon discours sur l'Adresse en réponse au discours du Trône, le 2 novembre, l'heure est venue pour les Canadiens d'oublier ces moments difficiles et de profiter de la prospérité qui règne aujourd'hui.

En ce qui concerne la question plus complexe du sénateur Nolin, je pense que le Canada est reconnu dans le monde entier comme ayant l'un des meilleurs systèmes d'aide financière aux étudiants au monde. En outre, des mesures ont été annoncées dans le discours du Trône pour bonifier le système actuel. Ainsi, à partir d'août 2005, les étudiants issus de familles à faible revenu pourront bénéficier d'une subvention destinée à payer une partie de leurs frais de scolarité, jusqu'à concurrence de 3 000 $, pour la première année d'éducation postsecondaire. De plus, nous mettons en oeuvre le Bon d'études canadien, qui permettra aux familles à faible revenu de mettre très tôt de l'argent de côté pour payer les études postsecondaires de leurs enfants.

Nos recherches révèlent que, en ce qui concerne l'accès garanti des citoyens à faible revenu à l'éducation postsecondaire, le Canada est au troisième rang dans le monde occidental, après les Pays-Bas et l'Irlande. Comme le sait le sénateur Nolin, le Programme d'aide aux étudiants est un partenariat entre le gouvernement fédéral et les provinces, qui s'entendent pour faire leur part pour venir en aide aux étudiants.

Le sénateur Nolin : Je remercie le ministre de sa réponse partielle. Cependant, certains de ces étudiants ont visité le Parlement cette semaine et je suis certain que le leader du gouvernement au Sénat les a rencontrés. J'ai rencontré un certain nombre d'entre eux, comme certains de mes collègues, sans doute. Ils sont très préoccupés. Ils ont entendu ce que l'on vient de nous dire, mais ils souhaitent obtenir davantage, et ils doivent obtenir davantage, à mon avis.

(1430)

Le gouvernement est-il disposé à adopter une stratégie nationale visant à donner une nouvelle impulsion à l'éducation postsecondaire? Nous vivons dans une fédération. Le gouvernement fédéral n'est pas seul en cause, non plus que les gouvernements provinciaux, c'est certain. Sous l'égide de ce gouvernement, ne serait-il pas possible de voir surgir une stratégie nationale entre partenaires? Voilà ce que réclament ces étudiants. Voilà ce qu'ils espèrent obtenir.

Le sénateur Austin : Je suis en accord total avec le sens de la question de l'honorable sénateur. Le gouvernement est en train de moderniser l'aide qu'il apporte aux étudiants du niveau postsecondaire. Il investira près de 57 millions de dollars dans ce programme au cours de l'année financière 2005-2006.

Je rappelle pour information que le programme de prêts d'études vient en aide à près de 330 000 étudiants en leur prêtant environ 1,6 milliard de dollars chaque année. Pendant le gouvernement du premier ministre Chrétien, nous avons créé le programme des bourses d'études du millénaire, qui a attribué 285 millions de dollars de bourses par année à près de 90 000 étudiants. Des subventions canadiennes pour études totalisant 75,5 millions de dollars par année ont été accordées à 56 000 étudiants. Le programme des subventions canadiennes pour l'épargne-études a versé 2 milliards de dollars depuis 1998.

Je vais répondre à la question de façon plus précise. C'est un sujet important. Accordez-moi encore un peu de temps, même si je sais que certains, de l'autre côté, sont préoccupés par le fait que je réponds trop en détail et que mes réponses sont trop longues.

Nous admettons que l'endettement est un sérieux problème pour les étudiants, mais les statistiques montrent que 80 p. 100 d'entre eux remboursent leur prêt en totalité et à temps après avoir fini leurs études, de sorte que c'est l'ensemble des étudiants qui sont bénéficiaires. Certains étudiants éprouvent des difficultés, et nous disposons d'un certain nombre de mesures pour les aider à gérer leur dette. Nous avons allégé les taux d'intérêt de quelque 128 000 étudiants diplômés, en 2002-2003, à hauteur de 77 millions de dollars et nous avons allongé à 15 ans la période de remboursement des prêts pour les étudiants qui ont présenté une demandé justifiée. Nous réduisons la dette pour les emprunteurs éprouvant des difficultés financières — nous l'avons fait pour quelque 1 500 étudiants, également au cours de l'année financière 2002-2003 — et nous avons allégé le taux d'intérêt sur des prêts étudiants d'une valeur de 65 millions de dollars au cours de l'année 2002.

Je m'arrêterai là, honorables sénateurs. Comme l'a dit le sénateur Nolin, on peut toujours améliorer les choses, mais le gouvernement fédéral, de concert avec les provinces, a pour politique d'intervenir concrètement et d'aider les étudiants du postsecondaire. Je sais que certains réclament la gratuité des études postsecondaires, mais d'après les études que j'ai vues, une telle chose n'est pas financièrement possible dans le Canada d'aujourd'hui.

Le sénateur Nolin : Honorables sénateurs, ils ne réclament pas la gratuité des études postsecondaires. J'espère que le ministre a déjà reçu certains des représentants de ces étudiants. S'il ne l'a pas encore fait, je l'implore de le faire. Je suis certain que les étudiants seraient ravis d'écouter son discours, et peut-être encourageront-ils le gouvernement à faire preuve d'une bonne volonté encore plus grande. Le ministre verra, en les écoutant, qu'ils ont une liste de réclamations très précises. C'est un très bon modèle, mais ce n'est pas une raison pour ne pas essayer de l'améliorer.

LA DÉFENSE NATIONALE

LE REMPLACEMENT DES HÉLICOPTÈRES SEA KING—LES CONTRATS AVEC SIKORSKY—LES DATES DE LIVRAISON

L'honorable J. Michael Forrestall : Honorables sénateurs, ma question est très courte. J'aimerais une réponse du même genre.

Hier, j'ai posé des questions au leader du gouvernement au Sénat sur les ententes contractuelles entre le gouvernement du Canada et Sikorsky. Je lui ai demandé, entre autres, si Sikorsky, au moment de la signature du contrat, avait parlé de la possibilité de retarder ou de reporter la date de livraison prévue au contrat. Le ministre a répondu que le gouvernement était encore en pourparler avec Sikorsky et que tous les détails du contrat n'étaient pas encore réglés. Je pense que c'est très révélateur. Il a également dit que, pour l'instant, il ne pouvait répondre à aucune autre de mes questions.

Honorables sénateurs, comme nous le savons tous maintenant, pendant que le leader du gouvernement répondait à ma question, ses collègues signaient le contrat. Il doit y avoir des renseignements au sujet de la date de livraison. Est-elle ferme? Pourrait-il y avoir des changements? Le ministre pourrait-il nous éclairer là-dessus? Le gouvernement s'engagerait-il à nous informer promptement lorsqu'une demande serait faite en vue de retarder ou de reporter les dates de livraison prévue? Le leader du gouvernement comprendra l'importance de la question, bien entendu.

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je dois féliciter une fois de plus le sénateur pour sa capacité à suivre le dossier de très près. Hier, il m'a posé une question au moment même où on signait le contrat ou, me dit-on, juste avant. Bien entendu, je ne suis jamais au courant des détails des négociations avec les ministères. Le sénateur est peut-être au courant de tels détails lorsqu'il s'agit du ministère de la Défense nationale.

De toute manière, comme le sénateur et le Sénat le savent, le gouvernement a annoncé hier la signature de deux contrats distincts mais connexes avec Sikorsky International Operations Inc. pour le projet de l'hélicoptère maritime. Le premier contrat, d'une valeur de 1,8 milliard de dollars, comprend l'acquisition de 28 hélicoptères pleinement intégrés, certifiés et qualifiés, avec leurs systèmes de mission installés. Le deuxième contrat, d'une valeur de 3,2 milliards de dollars, vise le soutien en service des hélicoptères sur une période de 20 ans.

Le sénateur Forrestall : Quel est le total?

Le sénateur Austin : Le total est de 3,2 milliards sur 20 ans, ce qui comprend la construction d'une installation d'entraînement, ainsi que d'un système de simulation et d'entraînement. Selon ce que j'ai appris, la livraison du premier hélicoptère, qui s'appellera le CH-148 Cyclone, doit se faire au plus tard en novembre 2008, et les autres appareils devront être livrés par la suite au rythme d'un par mois. Le contrat est assorti d'une série de primes en cas de livraison anticipée et de pénalités en cas de livraison tardive. Il est donc dans l'intérêt de l'entreprise de livrer les hélicoptères le plus vite possible.

Sénateur Forrestall, étant donné que je dois prendre ma retraite en 2007, je ne peux vous donner aucune assurance concernant ce qui va se produire en 2008.

Le sénateur Forrestall : Je vais prendre ma retraite vers cette période-là, moi aussi.

J'aimerais obtenir quelques précisions. En voyant ces deux chiffres, les Canadiens vont conclure que nous avons gaspillé non pas la somme de 500 millions de dollars qui, selon la croyance populaire actuelle, constitue le coût total de l'annulation du contrat d'achat des EH-101, mais bien une somme dépassant largement le milliard de dollars de l'argent des contribuables pour cette absurdité.

(1440)

Le leader n'a pas répondu à la deuxième partie de ma question. Au cas où il y aurait une demande visant à reporter ou retarder les dates stipulées au contrat, — je mentionne en passant que j'obtiens mes renseignements de ces machines modernes qui alimentent le monde en informations, les gens en Russie et ceux en Chine recevant ces informations en même temps que moi — nous informerait-il de la nature de la demande et de la durée visée?

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, je ferai de mon mieux, mais permettez-moi de dire au sénateur Forrestall quelque chose qu'il sait déjà, mais que je dois déclarer officiellement : lorsque je réponds aux questions, je dois respecter les directives des ministères. Je ne peux pas simplement répéter ce que je lis dans les journaux ou sur un site Internet.

Le sénateur Forrestall : Est-ce que cela s'applique au propre site Internet du leader?

LES TRANSPORTS

LA FRONTIÈRE CANADO-AMÉRICAINE—L'OBLIGATION POUR L'INDUSTRIE DU CAMIONNAGE DE FOURNIR À L'AVANCE DES RENSEIGNEMENTS SUR LE FRET

L'honorable Gerry St. Germain : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat.

À compter de la semaine prochaine, les camionneurs canadiens pourraient être passibles de sanctions sévères s'ils violent un nouveau règlement américain en vertu duquel ceux-ci sont tenus de fournir aux autorités douanières américaines, par voie électronique et avant d'arriver à la frontière, des renseignements sur le fret qu'ils transportent. Cette nouvelle mesure vise à mieux cibler les expéditions à risque élevé.

Les amendes imposées sont de 5 000 $ dans le cas d'une première infraction, et de 10 000 $ pour les infractions ultérieures. En plus de ces amendes, les contrevenants pourraient aussi se voir refuser l'entrée aux États-Unis, à compter de janvier de l'an prochain.

Les autorités douanières américaines ont fait beaucoup d'efforts pour faire connaître ce nouveau programme. L'Alliance canadienne du camionnage s'est elle aussi efforcée d'en informer les camionneurs, mais il peut y avoir des entreprises qui ne sont pas encore au courant de cette nouvelle mesure. Que fait le gouvernement pour s'assurer que tous les camionneurs canadiens soient au courant de ce changement?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, depuis le 11 septembre 2001, l'industrie du camionnage connaît des changements radicaux en ce qui a trait aux déplacements à destination des États-Unis, et les camionneurs et entreprises de camionnage professionnels sont en ligne afin d'être informés des changements qui surviennent au Canada. Je présume que le sénateur fait allusion aux changements apportés aux règlements et aux pratiques en vigueur au Canada.

Le sénateur St. Germain : Je fais surtout allusion aux changements apportés aux États-Unis.

Le sénateur Austin : En ce qui a trait aux changements apportés par les Américains, les camionneurs devront obtenir les renseignements voulus de leurs associations et en se servant de leurs propres moyens d'accès au système douanier américain. Cela dit, si je me fie à mon expérience relativement à l'industrie du camionnage, ces gens ont de bonnes qualités d'entrepreneurs et ils sont très au courant des exigences auxquelles ils doivent satisfaire pour exercer leur activité.

Le sénateur St. Germain : Honorables sénateurs, j'ai une question complémentaire. Selon Ron Lennox, de l'Alliance canadienne du camionnage, les petites et moyennes entreprises de camionnage ont eu de la difficulté à s'y retrouver dans tous les changements apportés à la réglementation américaine. Le Windsor Star rapporte que M. Lennox aurait dit : qu'il était très difficile pour bien des gens d'essayer de s'habituer à tous ces changements en même temps. Selon lui, les règles qui entrent en vigueur dépendent des systèmes technologiques en place, mais ce n'est pas tout le monde qui y a accès.

Il y a actuellement des files de camions — là où j'habite, sur la 8e Avenue, ils sont refoulés à la croisée municipale pour les camions jusqu'à la route 99, tout le long de la 176e Rue. L'entrée en vigueur de ces règles aggravera la situation. L'honorable sénateur nous dit qu'il incombe aux camionneurs d'obtenir l'information des Américains.

Ma question est la suivante : que fait le gouvernement du Canada pour les aider à obtenir cette information de manière à ce qu'ils soient relativement au courant des règles à respecter pour franchir la frontière?

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, je vais me renseigner sur ce que fait le gouvernement du Canada pour aider le secteur du camionnage à s'informer sur la réglementation américaine. Le sénateur sait sans doute qu'on a fait des investissements considérables et qu'on continue d'en faire pour prévoir des aménagements supplémentaires sur la 176 et à d'autres points d'accès en Colombie-Britannique. Des progrès étonnants ont été accomplis, notamment dans les centres commerciaux et par rapport aux dispositions visant à faciliter la circulation transfrontalière.

L'ÉVENTUELLE DÉCRIMINALISATION DE LA POSSESSION DE MARIJUANA—LES RÉPERCUSSIONS SUR L'INDUSTRIE DU CAMIONNAGE

L'honorable Gerry St. Germain : Honorables sénateurs, mon autre préoccupation concerne la décriminalisation de la possession de marijuana ou l'assouplissement des dispositions législatives à cet égard, ce qui inquiète bien des camionneurs que je connais. Cela pourrait aggraver considérablement la situation si les autorités américaines décidaient qu'elles doivent adopter une position rigoureuse par rapport aux inspections. Y a-t-il des discussions à ce sujet ou a-t-on réfléchi à la question étant donné la volonté du gouvernement et du premier ministre de légiférer sans tenir compte de l'opinion de nos voisins?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je dirai deux choses en réponse à la question du sénateur : Oui, des discussions sont en cours entre le Canada et les États-Unis, notamment au sujet du problème de la culture de la marijuana au Canada, de sa contrebande vers les États-Unis et de ses répercussions dans un certain nombre de secteurs. Quant à l'autre point, le Parlement du Canada veut évidemment respecter la volonté des Canadiens à cet égard et c'est justement cette volonté que nous tentons tous de définir actuellement.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénateur Cochrane, nous avons le temps pour une courte question.

LE COÛT ÉLEVÉ DU TRANSPORT AÉRIEN

L'honorable Ethel Cochrane : Honorables sénateurs, le coût élevé du transport aérien au Canada est une importante source de préoccupation pour nous tous. Une nouvelle étude prouve ce dont se doutaient un bon nombre d'entre nous depuis quelque temps. Les redevances d'atterrissage dans les aéroports canadiens sont parmi les plus élevées au monde.

L'aéroport Pearson de Toronto est un des plus coûteux en Amérique pour les avions qui y atterrissent. Selon les estimations, les redevances qui y sont versées par les transporteurs ont augmenté annuellement de 35 p. 100 en moyenne au cours des cinq dernières années. Selon certains rapports, une augmentation à deux chiffres nous guette pour l'an prochain.

Les loyers dans les aéroports constituent un autre problème. Cette année, ceux-ci vont rapporter environ 250 millions de dollars au gouvernement fédéral. Cette somme devait atteindre 437 millions de dollars d'ici la fin de la décennie. Eu égard au fait que les coûts de ce genre sont répercutés sur nous, les passagers, il n'est pas surprenant de voir qu'un bon nombre d'entre nous considèrent ces loyers comme une taxe déguisée imposée aux voyageurs et à l'industrie.

Voici ma question pour le leader du gouvernement au Sénat : Que fait le gouvernement relativement au problème des coûts du transport aérien que subissent l'industrie et les passagers canadiens?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Pour répondre succinctement, sénateur Cochrane, il fait beaucoup. Le ministre des Transports a annoncé au cours des deux ou trois dernières semaines que des études sont en cours sur la question des loyers payés par les aéroports au gouvernement canadien, et qu'il y aura un élargissement de l'accès à l'espace aérien pour les transporteurs étrangers.

En ce qui concerne la question de la situation précise à Toronto qu'a mentionnée l'honorable sénateur, je crois comprendre qu'il s'agit du coût de construction des nouvelles installations et de l'obligation des autorités aéroportuaires de le répercuter sur les passagers. La question de savoir s'il faudrait créer un programme d'une manière ou d'une autre pour subventionner ou appuyer l'aéroport de Toronto est très intéressante. J'aurais vraiment des doutes quant à la volonté des Canadiens d'appuyer directement une idée de ce genre.

[Français]

RÉPONSE DIFFÉRÉE À UNE QUESTION ORALE

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer une réponse différée à une question orale du sénateur LeBreton, posée au Sénat le 18 novembre 2004, concernant les allégations d'ingérence politique de la part de la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration.

LA CITOYENNETÉ ET L'IMMIGRATION

LES ALLÉGATIONS D'INGÉRENCE POLITIQUE DE LA PART D'UNE MINISTRE—L'ENQUÊTE DU COMMISSAIRE À L'ÉTHIQUE

(Réponse à la question posée le 18 novembre 2004 par l'honorable Marjory LeBreton)

Le cabinet du premier ministre a entendu parler de ces allégations pour la première fois à la fin de l'été 2004, en août, semblerait-il.

À ce moment-là, le cabinet du premier ministre a communiqué avec le bureau de la ministre Sgro pour déterminer si des actes irréguliers avaient été commis. Le cabinet voulait vérifier s'il y avait eu des actes irréguliers, comme il est de son devoir de le faire, et le bureau de la ministre lui a confirmé que rien d'irrégulier ne s'était produit.

La ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a pris sa décision pour des motifs d'ordre humanitaire, comme le prévoit l'article 25 de la Loi sur l'immigration.

Néanmoins, elle a demandé au commissaire à l'éthique, Bernard Shapiro, de faire enquête sur la question. Elle lui a aussi demandé de rendre son rapport public.


(1450)

[Traduction]

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

L'UKRAINE—LA VIOLATION DU PROCESSUS ÉLECTORAL—LA DÉCLARATION DU LEADER DU GOUVERNEMENT

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je demande la permission de faire une très courte déclaration.

Honorables sénateurs, ma déclaration porte sur la crise qui émerge actuellement en Ukraine à la suite des élections qui viennent tout juste d'avoir lieu. Ce que j'ai appris m'amène à craindre sérieusement l'effondrement de la démocratie en Ukraine et une lutte quant à l'orientation que prendra ce pays, soit un rapprochement avec l'Occident, soit un retour aux cultures politiques antérieures.

Je voulais simplement faire état des préoccupations du gouvernement à l'égard de ces questions. Le sénateur Grafstein, le sénateur Milne, le sénateur Cordy et le sénateur Smith ont agi à titre d'observateurs lors de la première étape du processus électoral qui a eu lieu en Ukraine et qui semble s'être déroulé assez bien par rapport aux normes démocratiques. Toutefois, la situation semble maintenant se gâter. J'informe les sénateurs que le gouvernement du Canada s'apprête à faire de vigoureuses représentations auprès des autorités ukrainiennes au sujet du processus électoral.

Son Honneur le Président : Je donne la parole à madame le sénateur Andreychuk à ce sujet.

L'honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, je conviens avec le leader du gouvernement au Sénat que l'Ukraine vit présentement une situation urgente qui risque de dégénérer. Il était connu depuis plusieurs années que les récentes élections risquaient de comporter des difficultés si certaines conditions préalables n'étaient pas mises en place, notamment un accès égal aux ressources, au temps d'antenne médiatique et à toutes les autres procédures habituelles qui entrent en jeu lors d'élections. Les membres de la communauté ukrainienne du Canada et d'autres observateurs ont fait état de nombre de ces facteurs depuis plusieurs années. À l'heure actuelle, je crois comprendre que l'Ukraine n'a toujours pas de président élu et que la crise persiste.

Dans l'intérêt des Ukrainiens, le leader du gouvernement pourrait-il nous dire quelles mesures le gouvernement canadien devrait prendre? À mon avis, le gouvernement canadien devrait exprimer sa vive préoccupation, contacter immédiatement l'actuel président et insister pour que personne ne soit désigné président jusqu'à ce que les observateurs internationaux puissent évaluer l'importance de la fraude électorale en Ukraine.

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, j'apprécie vivement la position que madame le sénateur Andreychuk vient d'exprimer et je note — comme elle le sait pertinemment — que l'ambassadeur du Canada en Ukraine a parlé sans ambages des lacunes du processus démocratique, ce qui reflète la position du gouvernement également.

Le sénateur Andreychuk : Les mesures prises par l'ambassadeur ont été notées. En fait, à la télévision publique canadienne, il a parlé des irrégularités et des difficultés qu'on a notées dans le cadre de ces élections.

Qu'est-ce que le gouvernement canadien va faire aujourd'hui pour veiller à ce que le processus démocratique soit reconnu en Ukraine? Quelles mesures particulières le premier ministre prend-il pour contacter l'actuel président, afin de veiller à ce qu'on reconnaisse ces lacunes avant que quiconque soit déclaré président?

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, ce n'est pas la période des questions. Je dirai simplement, comme je l'ai déjà déclaré, que nous présentons des instances énergiques.

L'honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, dans mon cas, ce n'est pas une question, c'est simplement une observation.

J'ai eu l'occasion de diriger les observateurs de l'OTAN qui ont surveillé le premier tour des élections en Ukraine le 31 octobre. Il y avait également les sénateurs Milne et Grafstein qui représentaient l'OSCE.

Nous avons observé, le jour des élections, à quel point les gens ordinaires voulaient que la démocratie fonctionne. Ils ont travaillé si dur. Dans le cadre de notre compte rendu le lendemain des élections, toutes les personnes, qu'elles représentent l'Union européenne, le Conseil de l'Europe, l'OTAN ou l'OSCE, ont dit à quel point les Ukrainiens voulaient que la démocratie fonctionne et à quel point ils avaient travaillé fort durant les élections. Les bureaux de scrutin ont fermé leurs portes à 20 heures et les gens sont restés jusqu'à trois heures du matin à compter les bulletins. Vous pouviez voir sur le visage des gens qu'ils savaient que ce moment était peut-être celui d'un grand changement. Dans l'ensemble, le fonctionnement des bureaux de scrutin visités par les observateurs semblait assez équitable.

Malheureusement, lorsque les dirigeants des organisations dont je parlais ont tenu une conférence de presse le lendemain, nous avons exprimé notre déception, non pas tant au sujet de ce qui s'était passé le jour même de l'élection, mais au sujet du parti pris flagrant des médias en faveur de M. Ianoukovitch et contre M. Iouchtchenko. Nous avons également exprimé notre grande déception à la suite de l'ingérence du gouvernement ukrainien, parce que l'actuel premier ministre, M. Ianoukovitch, est candidat à la présidence.

Nous avons éprouvé un faux sentiment de sécurité parce que les choses ne se déroulaient pas si mal le jour même de l'élection, les irrégularités s'étant plutôt produites avant. Nous avons cru à tort que les choses se passeraient bien la seconde fois, mais ce ne fut certainement pas le cas.

Le peuple ukrainien se trouve malheureusement dans une situation précaire. Nous avons été témoins de ce qui s'est passé à Kiev, où des foules considérables se sont réunies dans les rues pour protester contre l'absence totale de démocratie lors de la tenue du scrutin, dimanche.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : Honorables sénateurs, je m'excuse, j'étais sorti de la pièce.

J'aimerais vous lire quelque chose que j'ai dans mon Black Berry. J'espère que cela n'est pas contraire au Règlement; il s'agit d'un texte écrit.

C'est un message d'une collègue ukrainienne que nous avons rencontrée à Kiev, il y a plusieurs semaines. Membre de l'union des artistes, elle est une personnalité culturelle très importante dans son pays. Je suis resté en contact continu avec elle, par courriel, et j'espère qu'elle est en sécurité.

Elle me dit que, pour l'instant, la principale source d'inquiétude pour elle, ses amis et ses proches est une possible explosion de violence. Une des choses que le gouvernement du Canada, qui est très respecté en Ukraine et au sein de la communauté européenne, peut faire, c'est d'exhorter les parties prenantes, à l'extérieur de l'Ukraine, à s'abstenir d'intervenir dans la situation qui règne dans ce pays et de permettre à sa population d'exercer sa volonté démocratique.

Nous étions là-bas pendant le premier tour de l'élection présidentielle. Bien qu'il y ait eu de graves irrégularités pendant la campagne — dont nous avons pris note et ferons état dans un rapport au Sénat, qui est actuellement en cours de traduction vers le français — nous avons constaté, le jour même de l'élection, un profond désir, de la part des personnes qui étaient directement concernées par les élections, d'exercer leur choix démocratique. C'était fascinant. Madame le sénateur Milne et moi-même avons observé le dépouillement des bulletins de vote jusqu'à trois heures du matin. Vers la fin, les 26 au 28 observateurs se sont tous regroupés pour faire ce qu'il fallait : s'assurer que le dépouillement était fait de façon juste et exacte.

Le problème, honorables sénateurs, ce sont les irrégularités commises et l'échec du dépouillement du scrutin.

(1500)

J'espère qu'un arrangement pourra être trouvé pour avoir un gouvernement intérimaire en attendant le dépouillement ou le recomptage des bulletins de vote, ou à défaut, la tenue d'un nouveau tour de scrutin comme on l'a fait en Géorgie. J'avais la chance d'être superviseur adjoint dans les deux tours de scrutin qui se sont tenus en Géorgie où j'étais témoin d'un déroulement réellement démocratique des élections. Le président s'est désisté et le président du Parlement a assuré la présidence par intérim et a autorisé la tenue d'un autre tour de scrutin qui s'est traduit par un excellent résultat sur le plan de la démocratie.

Honorables sénateurs, j'espère que nous tenterons d'utiliser notre persuasion morale et les pouvoirs du gouvernement pour qu'on recompte les bulletins de vote, ou à défaut de cela, pour qu'il y ait un gouvernement intérimaire qui déclencherait de nouvelles élections pour accomplir la volonté démocratique de la population de ce pays. Nous devons appuyer des élections démocratiques. C'est ce dont il est question ici.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, avant de donner la parole à d'autres sénateurs, j'aimerais préciser où nous en sommes dans le déroulement de nos délibérations. Le sénateur Austin a demandé la parole pour intervenir sur un sujet important, et c'est ce qu'il a fait.

Honorables sénateurs, sommes-nous d'accord pour demeurer sur ce sujet?

Des voix : D'accord.

L'honorable Noël A. Kinsella (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, je remercie Son Honneur de son intervention.

Nous sommes actuellement saisis d'une question qu'il est nécessaire d'aborder. Il vaudrait mieux certes pour nous d'étudier une résolution ou une motion particulière sur laquelle les honorables sénateurs, avec un préavis suffisant, auraient été en mesure de se pencher en effectuant des recherches et en consultant des collègues qui ont pris part à des groupes chargés d'observer le déroulement d'élections. Les honorables sénateurs voudront peut-être poser des questions comme celle de savoir dans quelle région de l'Ukraine sont allés les observateurs canadiens, car il s'agit d'un vaste pays. Les dynamiques sociales, économiques et politiques sont nombreuses dans cet important pays d'Europe.

En plus de l'annonce qu'il vient de faire, je crois que notre collègue, le sénateur Austin, devrait envisager de proposer une résolution appelant le gouvernement du Canada à prendre des mesures. Si l'initiative d'une résolution raisonnable pressant le gouvernement d'agir venait du ministre, cette résolution aborderait nos préoccupations à l'égard des droits démocratiques de la population de l'Ukraine. Nous comprenons tous le sens des valeurs des droits civils et politiques en question — le droit de vote, un pilier de la démocratie. J'espère que toute résolution que le gouvernement pourrait présenter dans cet endroit en vue d'un débat inclurait cet élément.

La résolution formulée par le gouvernement devrait aussi inclure un autre élément — la sécurité de la population de l'Ukraine. Selon moi, il y a urgence.

Il semble que les sénateurs des deux côtés de la Chambre sont prêts à commencer ce débat, si bien que nous pourrions peut-être passer à autre chose. Le gouvernement voudra peut-être agir de manière un peu plus respectueuse et présenter une résolution que l'on débattrait dans cet endroit. À en juger par la discussion que nous avons eue jusqu'à maintenant, la résolution pourrait faire état des données dont nous disposons, dont certaines ont été fournies par nos observateurs. Premièrement, nous devons être conscients du fait que nos observateurs étaient dans une région de l'Ukraine. Deuxièmement, nous devons préconiser la non-violence, à l'étape de la transition. Toute suggestion créative pourrait être formulée dans une résolution.

Au nom de l'opposition, je dirai que nous sommes prêts à tenir un débat complet sur une résolution qui pourrait s'avérer utile et que nous donnons un appui sans réserves à cette proposition.

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, je remercie le leader de l'opposition de même que les sénateurs de son côté de se montrer aussi courtois et d'accepter que l'on discute de ce sujet dans cet endroit. Le consentement était nécessaire et je suis ravi de la réaction.

Je prends bonne note des suggestions que le sénateur a faites. Nous verrons l'évolution des choses après une journée ou deux, mais je suis disposé, si la situation s'envenimait davantage, à présenter une résolution au Sénat. Je serais ravi d'en discuter avec le leader de l'opposition avant que nous décidions d'aller de l'avant.


ORDRE DU JOUR

LE CODE CRIMINEL

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Plamondon, appuyée par l'honorable sénateur Ringuette, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-19, Loi modifiant le Code criminel (taux d'intérêt criminel). —(L'honorable sénateur Rompkey, C.P.)

L'honorable Sharon Carstairs : Honorables sénateurs, même si cette motion est inscrite à son nom, le sénateur Rompkey m'a cédé la parole.

Honorables sénateurs, c'est avec un vif plaisir que je prends la parole pour appuyer le projet de loi S-19, qui a été si bien présenté par ma collègue, madame le sénateur Plamondon. Nous avons discuté de la question toutes les deux il y a quelque temps. Je dois admettre que j'avais de la difficulté à croire au début que les Canadiens puissent être facturés jusqu'à 60 p. 100 du prix d'achat de biens. Toutefois, comme elle me l'a expliqué, le projet de loi de 1981 était conforme au taux de 21,03 de la Banque du Canada au moment de son adoption. Il remplaçait une loi adoptée en 1939, la Loi sur les petits prêts.

Honorables sénateurs, le taux de la Banque du Canada est aujourd'hui beaucoup plus bas, soit 2,5 p. 100. Par conséquent, un taux d'intérêt de 60 p. 100 est, à mon avis, rien de moins qu'usuraire. Il importe d'instaurer un juste équilibre. Il est regrettable que de nombreux Canadiens ne sont pas en mesure d'emprunter de l'argent auprès de nos banques aux taux privilégiés. Ils doivent s'en remettre à d'autres institutions financières ou à d'autres entreprises disposées à assumer des risques plus élevés et qui, pour cette raison, sont autorisées à imposer des taux d'intérêt plus élevés. Cependant, un taux d'intérêt de 60 p. 100 semble certainement à la fois irraisonnable et injuste.

J'espère que le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, à qui le présent projet de loi sera, je le présume, renvoyé en temps utile, examinera avec soin cette question d'un équilibre essentiel. Cela va de soi, les taux d'intérêt doivent être assez élevés pour permettre aux prêteurs de faire du profit et aux Canadiens d'emprunter de l'argent. Autrement, ceux-ci ne pourraient pas emprunter l'argent dont ils ont besoin. Je pense qu'un profit raisonnable serait dans l'ordre des choses.

J'espère que le Comité des banques se penchera sur la deuxième partie de la loi. J'aimerais lire la définition suivante tirée de l'article 347 du Code criminel :

« intérêt » L'ensemble des frais de tous genres, y compris les agios, commissions, pénalités et indemnités, qui sont payés ou payables à qui que ce soit par l'emprunteur ou pour son compte, en contrepartie du capital prêté ou à prêter. La présente définition exclut un remboursement de capital prêté, les frais d'assurance, les taxes officielles, les frais pour découvert de compte, le dépôt de garantie et, dans le cas d'un prêt hypothécaire, les sommes destinées à l'acquittement de l'impôt foncier.

La disposition semble très claire et signifie que l'intérêt est sensé comprendre l'ensemble des frais. Des anecdotes récemment portées à ma connaissance tendraient à établir que, même si la loi dit qu'on peut imposer jusqu'à 60 p. 100 comme taux d'intérêt, un taux bien supérieur est imposé dans de nombreuses circonstances.

Par ce projet de loi, madame le sénateur Plamondon s'attaque à la première partie du problème, ce qui est un excellent premier pas, mais nous devons également étudier ce qui se produit dans la société canadienne relativement à l'autre partie du problème. Un certain nombre d'institutions financières ne semblent pas accorder d'avance à ce paragraphe particulier l'intérêt qu'il mérite, et il s'agit pourtant de la loi du pays. Elles ne respectent tout simplement pas ces principes.

(1510)

Je crois que madame le sénateur Plamondon a trouvé le parfait équilibre. En effet, il y a eu deux lois, l'une adoptée en 1939 et l'autre en 1981, qui toutes les deux reflétaient des taux d'escompte élevés. Elle propose, dans le projet de loi S-19, d'établir un rapport entre le taux d'escompte et le taux d'intérêt maximal pouvant être demandé. Elle dit — avec raison, je crois — qu'un écart de 35 p 100 entre le taux d'escompte de la Banque du Canada et le taux d'intérêt maximal pouvant être demandé produirait des bénéfices raisonnables pour les membres de cette industrie. Cela semble juste et équitable tant pour le consommateur que pour l'institution financière. Je recommande le projet de loi en principe à tous les sénateurs et j'espère que nous pourrons l'adopter rapidement.

(Sur la motion du sénateur Stratton, le débat est ajourné.)

PROJET DE LOI SUR LA RECONNAISSANCE DE L'AUTONOMIE GOUVERNEMENTALE DES PREMIÈRES NATIONS

DEUXIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Gerry St. Germain propose : Que le projet de loi S-16, prévoyant la reconnaissance par la Couronne de l'autonomie gouvernementale des premières nations du Canada, soit lu une deuxième fois.

— Honorables sénateurs, c'est pour moi un privilège et un honneur d'entamer le débat sur le projet de loi S-16 à l'étape de la deuxième lecture. Je commencerai en citant un extrait d'un ouvrage intitulé The Rights of Indians and Tribes, de Stephen L. Pevar, qui écrit ceci :

Quand les Européens sont arrivés en Amérique du Nord, des centaines de nations prospéraient sur le territoire qu'on appelle aujourd'hui le Canada. Elles avaient chacune leur propre gouvernement, leur propre culture et leur propre langue. Les membres de ces nations avaient en commun une foi religieuse profonde centrée sur le caractère sacré de la nature.

Leurs sociétés étaient complexes et spécialisées. Il y avait des chefs politiques, des chefs spirituels, des docteurs, des artisans, des architectes, des récolteurs de nourriture, etc. Toutes vivaient des produits de la terre et des cours d'eau, soit de l'agriculture, de la pêche et de la chasse.

Certaines étaient nomades et suivaient la migration du poisson et du gibier, tandis que d'autres étaient sédentaires. Des réseaux commerciaux s'étendaient sur tout le continent et les nations échangeaient aliments, vêtements et objets artisanaux.

Quand les Européens sont arrivés, les tribus indiennes, pour la majorité, les ont accueillis à bras ouverts. Elles les ont aidé, ont commercé avec eux et ont permis à ces étrangers de vivre sur leur territoire.

Honorables sénateurs, les Premières nations et la Couronne britannique avaient décidé dès 1763 que les relations entre leurs peuples seraient gouvernées par des traités et caractérisées par la paix, l'amitié et le partage. Par une proclamation royale qui fait maintenant partie de la Constitution canadienne, la Couronne s'est elle-même imposée, la même année, comme unique partie à recevoir des terres indiennes. Ayant pris le contrôle des ressources et des terres dont les Premières nations avaient besoin pour survivre, la Couronne a accepté la responsabilité fiduciaire d'assurer leur bien- être.

Cependant, les Premières nations ne tiennent pas à cet état de dépendance. Elles souhaitent pouvoir contribuer à part entière au Canada et au monde. Cela est difficile car la Loi sur les Indiens, élaborée à l'époque coloniale, confère à Ottawa le pouvoir de prendre les décisions concernant leurs communautés.

Le Canada se considère avec fierté comme un chef de file mondial dans les domaines des droits de la personne et du développement humain. Cependant, le travail reste inachevé dans le pays même, et c'est embarrassant. Bien que nous jouissions presque du contrôle absolu de la destinée des Premières nations, nous les avons empêchées de profiter de leur part équitable de la prospérité du Canada et je crois qu'il est temps de remédier à cette situation.

Les Autochtones, comme tous les autres Canadiens, ont le droit de jouir du contrôle démocratique de leurs propres affaires dans un cadre législatif qui leur garantit la certitude, la stabilité, le respect du droit qui font contrepoids à la responsabilité collective et individuelle. Les communautés autochtones doivent être libres de déterminer par elles-mêmes si et comment des principes du marché libre tels que la propriété individuelle doivent s'appliquer aux terres comprises dans les réserves. Les Autochtones ont droit à la transparence et à la responsabilité dans l'administration de leurs revenus propres et des fonds publics.

Aujourd'hui, les mesures législatives sont le principal moyen pour le Parlement de respecter l'esprit et la lettre des engagements que le Canada a pris en vertu de traités et faire en sorte que les communautés autochtones jouissent enfin de la démocratie la plus fondamentale.

Honorables sénateurs, les dirigeants autochtones ont approché les parlementaires pour discuter de la question de la gouvernance des Premières nations en leur disant :

La question de la gouvernance des Premières nations est importante pour tous, indépendamment de leur affiliation politique. C'est une question importante pour tous les représentants du (Parlement) du Canada.

Cet extrait est tiré d'une lettre de Herb George en date du 4 novembre.

Le projet de loi S-16 se fonde sur l'idée de base, présentée pour la première fois par le regretté sénateur Walter Twinn, qu'il doit y avoir un moyen pour que la Couronne reconnaisse l'autonomie gouvernementale des Premières nations qui disposent d'une assise territoriale et pour que la Couronne fédérale et le Canada reconnaissent que ces Premières nations possèdent déjà ce pouvoir, c'est-à-dire que ce droit à l'autonomie gouvernementale précède l'arrivée des explorateurs et des colons en Amérique du Nord. La reconnaissance de ce droit non cédé, de cette réalité, est la pierre d'assise du projet de loi S-16.

Depuis la première présentation du projet de loi par le sénateur Twinn, les Premières nations ont formulé beaucoup de commentaires, ce qui fait que le projet de loi dont le Sénat est aujourd'hui saisi est grandement amélioré.

La Couronne a résolument et clairement ouvert la voie à la cohabitation harmonieuse des peuples autochtones et des récents arrivants sur le continent. Les gouvernements, de l'époque coloniale jusqu'à nos jours, ont eu une responsabilité envers les Peuples autochtones, ces États-nations organisées et autonomes. C'est cette responsabilité qui a entraîné la création du ministère des Affaires indiennes par la Couronne britannique dans le but de gérer les traités existants et d'en établir de nouveaux.

Les honorables sénateurs savent que les conséquences de la Loi sur les Indiens ont été nuisibles à la culture et au mode de vie de tous les Peuples autochtones du Canada. Dans le passé, les lois et les politiques canadiennes avaient comme objectif l'assimilation des Premières nations. Heureusement, les premiers habitants de ce territoire ont défendu leurs droits et continuent de le faire. Les Premières nations se sont battues pour leur droit à l'autonomie gouvernementale. Jamais cela n'a été si clair depuis l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1876, intégré à la Constitution en 1982, dont l'article 35 reconnaissait et proclamait les Premières nations et leurs droits préexistants.

Depuis 1982, nous avons vu une vague de revendications dont la plupart proviennent de Peuples autochtones qui n'avaient pas signé de traité ou découlent de la mauvaise administration des affaires, du défaut de responsabilité fiduciaire ou du refus de reconnaître les droits. Même au-delà des revendications liées au passé, il y a eu de forts et nets appels en faveur de l'établissement d'une relation productive dont l'autonomie gouvernementale est le nœud.

Les Premières nations ne veulent plus être soumises à la Loi sur les Indiens. Nous avons vu les ententes, confirmées par des lois, sur les Cris-Naskapis, les Sechelts, les Nisga'as, le Yukon et le Nunavut, la bande de Westbank et bien d'autres, ainsi que le projet de loi sur le peuple tlicho qui est à l'étude dans l'autre endroit. Bien d'autres suivront.

Honorables sénateurs, comme le premier ministre Trudeau aurait pu le dire, et la Cour suprême l'a d'ailleurs confirmé depuis la célèbre affaire Caulder de 1973, il est « juste » que l'autonomie gouvernementale soit reconnue pour certaines Premières nations au moyen d'accords négociés. Toutefois, les populations des Premières nations ne veulent pas de la version de l'autonomie gouvernementale figurant dans la Loi sur les Indiens, ni se voir imposer des arrangements constitutionnels qui continuent de fleurir en dépit de la garantie donnée à l'article 35 de la Constitution. Les conclusions de la Commission royale sur les peuples autochtones n'ont pas de quoi surprendre. Il n'est pas juste que les Premières nations doivent attendre leur tour pour négocier un accord avec des négociateurs gouvernementaux qui arrivent trop souvent à la table avec des conditions préalables inacceptables. Si vous examinez les 25 dernières années de négociation, vous constaterez que, en moyenne, il faut 15 ans pour qu'une entente soit présentée au Parlement, mais elle ne concerne qu'une ou deux Premières nations.

(1520)

Il existe environ 630 communautés des Premières nations, chacune d'elles étant autorisée à mettre en place sa version d'un gouvernement conformément à sa culture et à ses valeurs pour gouverner dans ses champs de compétence. Toutefois, le gouvernement fédéral canadien n'a réussi à conclure qu'un nombre limité d'ententes chaque année. Honorables sénateurs, le Parlement doit mieux faire.

Dans chaque discours du Trône que le gouvernement a présenté depuis 1994, le gouvernement du Canada s'est engagé à oeuvrer avec toutes les populations des Premières nations au Canada afin de relever leur niveau de vie et d'aider les structures de gouvernance à s'attaquer à leurs problèmes chroniques. Si vous lisez entre les lignes, on a promis de corriger les torts et d'accélérer les revendications et les accords. Il n'en demeure pas moins que, si les conditions se sont quelque peu améliorées sur les terres des Premières nations depuis 1982, elles sont dramatiquement loin derrière celles du reste du Canada.

En vérité, peu de communautés ont un organe ou une forme de gouvernement dont la majorité de leurs membres sont satisfaits. Cela a été confirmé par les sondages faits par le ministère lui-même en guise de prélude à la Loi sur la gouvernance des Premières nations, qui a été écartée, car on n'y voyait rien d'autre qu'une réécriture de la Loi sur les Indiens.

En ce moment, les communautés des Premières nations ne peuvent se soustraire au joug de la Loi sur les Indiens. Quel recours les Premières nations ont-elles pour être reconnues comme se gouvernant elles-mêmes dans des délais raisonnables et d'une manière qui soit financièrement abordable? Honorables sénateurs, je crois sincèrement que le projet de loi S-16 constitue ce recours. Le projet de loi S-16 porte entièrement sur cet aspect habilitant, sur l'abordabilité, la faisabilité et le temps qu'il faut pour traduire ce changement dans les faits.

Le premier ministre Martin a fait savoir aux médias qu'il comptait réaliser les principales promesses qu'il a faites lors des élections de 2004 concernant l'amélioration de la qualité de vie des gens des Premières nations, créant ainsi de nouvelles conditions pour les Premières nations du Canada.

La vérificatrice générale du Canada a encore une fois fait savoir au Parlement que ses études continuent de souligner la nécessité d'apporter des améliorations sur le plan de la réalisation des programmes. Il reste trop de sujets de préoccupation. Les conditions de logement déplorables, la dépendance sociale et les mauvais résultats scolaires ont des répercussions négatives sur la force socioéconomique des collectivités des Premières nations et restreignent la capacité de ces gens à participer à tous les aspects de la société canadienne en général.

La vérification menée en 2000 par le vérificateur général sur les programmes d'éducation de niveaux élémentaire et secondaire a démontré qu'il faudrait vingt ans pour que les gens des Premières nations atteignent le même niveau de succès scolaire que les autres Canadiens. Pas plus tard qu'hier, la vérificatrice générale a fait savoir au Parlement que le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien n'avait enregistré que des résultats mitigés à l'égard de la plupart des problèmes et des recommandations faites il y a quatre ans. Conséquemment, nous devrons maintenant attendre 28 ans pour que les Premières nations atteignent la parité.

C'est là la manière tout à fait inacceptable dont le ministère des Affaires indiennes prend des décisions qui fait qu'il est essentiel que les Premières nations obtiennent le droit que les Canadiens tiennent pour acquis, c'est-à-dire le droit d'administrer leurs propres affaires et de préparer leur avenir. Le rapport du vérificateur général pour l'an 2000 précisait également que le manque de mesures opportunes avait d'importantes répercussions sur les services de santé offerts aux Premières nations. On peut s'attendre à ce que la demande de services dans les réserves augmente de façon spectaculaire en raison du fait que l'âge moyen des membres des collectivités est bas et que le taux de natalité dans les réserves est élevé. L'écart entre les conditions de vie dans les collectivités autochtones et non- autochtones risque de s'élargir.

Le rapport de 2001 précisait qu'à défaut de régler les revendications territoriales globales ou de conclure des traités modernes, le Canada risquait de devoir payer les frais de procès onéreux et de perdre des occasions. Par exemple, des possibilités d'exploitation des terres et des ressources pourraient disparaître, des investisseurs potentiels pourraient fuir et des partenariats socio- économiques importants entre les Premières nations et les gouvernements en place, le secteur privé et d'autres Canadiens pourraient ne jamais se réaliser.

La vérification menée en 2003 a souligné des problèmes dans le mode de gestion des responsabilités fédérales du ministère en vue d'atteindre des résultats et dans les mécanismes de résolution des problèmes. Sans un effort concerté, le Canada risque de laisser passer des occasions de développement économique — la mise en valeur du pétrole et du gaz à grande échelle par exemple. Cela compromet l'aptitude des Premières nations à contrôler leurs destinées et à développer tout leur potentiel, pour le bénéfice de tous les Canadiens.

Honorables sénateurs, le doyen de la Chambre des communes, Stanley Knowles, affectionnait tout particulièrement la citation suivante : « Courage mes amis, il n'est pas trop tard pour faire de ce monde un monde meilleur. » Les sénateurs sont-ils disposés, avec le projet de loi S-16, à s'engager à travailler en collaboration, sans esprit de parti, à l'élaboration de la politique visant les Premières nations? La Couronne fédérale et le Parlement doivent avoir la volonté d'établir un nouveau rapport avec les Premières nations — un rapport que la Commission royale sur les peuples autochtones qualifiait de « prise de conscience nouvelle que nous jugeons nécessaire ». La Commission royale sur les peuples autochtones a déclaré que ce nouveau rapport devait être fondé sur quatre principes : la reconnaissance mutuelle du droit des Premières nations à coexister comme peuples se gouvernant eux-mêmes au Canada; le respect mutuel; l'interdépendance économique, le partage des avantages tirés des ressources, une gestion des ressources respectueuse des valeurs des Premières nations; et la responsabilité mutuelle découlant de l'autonomie politique, associée à un ordre distinct de gouvernement, donnant lieu à des arrangements financiers appropriés au lieu du « bien-être social ».

Honorables sénateurs, le Canada doit reconnaître les gouvernements des Premières nations de manière à respecter leur diversité et leurs droits inhérents. Le Canada ne peut plus se permettre de maintenir ces gens dans un état perpétuel de dépendance. Cela est coûteux non seulement en argent mais en dignité humaine. En agissant dès aujourd'hui et en respectant les engagements pris, le Canada pourra vraiment prétendre au titre de champion des droits humains des Premières nations.

Dans l'avenir immédiat, le Canada doit continuer à respecter ses obligations financières à l'égard des Premières nations. Toutes les Premières nations qui sont disposées à le faire doivent pouvoir exercer leurs droits à l'autonomie gouvernementale dans leurs domaines de compétence. Les gouvernements fédéral et provinciaux doivent reconnaître que la Proclamation royale, les traités, la jurisprudence de la Cour suprême et la Constitution confèrent des droits. Ces droits existent. Par conséquent, les Premières nations ne devraient pas avoir à demander à la Couronne de pouvoir exercer leurs droits à l'égard de leurs territoires et de leurs populations, comme c'est le cas à l'heure actuelle.

Honorables sénateurs, la question a été excessivement étudiée et le Canada a effectivement beaucoup amélioré sa compréhension des enjeux grâce à diverses initiatives. Je pense au rapport Penner de 1983, aux conférences des premiers ministres du gouvernement Mulroney, aux processus du lac Meech et de Charlottetown, à la Commission royale sur les peuples autochtones et à l'excellent rapport du Comité sénatorial des peuples autochtones présidé par le sénateur Watt, intitulé Forger de nouvelles relations.

Tous ces rapports et conférences tendaient à rétablir la relation initiale fondée sur des traités entre les Premières nations et la Couronne. Si nous voulons favoriser les efforts des Premières nations pour qu'elles puissent rebâtir leurs sociétés et rétablir leur culture dans leur territoire, il faut qu'elles puissent créer ou rétablir leurs propres institutions en exerçant leurs droits pré-existants, qui ont été constitutionnalisés.

Parmi ces institutions, il pourrait y avoir un organisme analogue au bureau du vérificateur général, une commission des droits fondamentaux pour les Premières nations, un ombudsman régional qui recevrait les plaintes au sujet de l'administration et du gouvernement. Ce sont des éléments que les Premières nations peuvent créer et prévoir dans leur constitution, qui serait reconnue par le Canada, si le projet de loi S-16 est adopté.

Les Premières nations sont en train de prendre au Canada la place qui leur revient. Elles affirment leurs droits, mais elles mettront beaucoup de temps à réaliser leur destin, étant donné les mécanismes que le gouvernement a mis en place. Il y a une autre voie, plus rapide, plus juste et moins coûteuse. Et elle permettra d'améliorer le quotidien des Premières nations où qu'elles se trouvent. Il s'agit du projet de loi S-16. Stanley Knowles, encore lui, a dit un jour, il y a de longues années : « Mettons-nous à l'oeuvre. L'heure est venue pour le Canada de faire de la justice sociale pour les Premières nations un élément permanent de la vie au Canada. »

Honorables sénateurs, je vais essayer de décrire les éléments du projet de loi le plus succinctement possible.

(1530)

Le projet de loi vise à mettre en place un cadre et un mécanisme pour que le Parlement accorde au gouvernement fédéral le pouvoir et le mandat législatif de reconnaître les Premières nations ainsi que les droits et les pouvoirs de leurs gouvernements, institutions et autres organismes.

Le projet de loi commence par un préambule qui donne le ton au projet de loi et pourra aider à l'avenir les tribunaux à interpréter les dispositions qui pourraient sembler ambiguës. Le préambule signale que la proclamation royale de 1763 reconnaît qu'il existait ici des peuples autonomes avant l'arrivée des Européens. Ils ont conclu des traités permettant la coexistence. Bien que le Parlement ait adopté certaines lois, la Loi constitutionnelle reconnaît et confirme les droits des Premières nations et les droits issus de traités. Le Canada serait plus fort s'il existait une relation renouvelée qui concilie la souveraineté du Canada et l'autodétermination et l'autonomie gouvernementale des peuples autochtones.

Honorables sénateurs, on lit dans le préambule :

... le Parlement souhaite reconnaître un lieu permanent et sécuritaire au Canada pour les premières nations autonomes [...], afin qu'elles puissent jouir de relations paisibles et harmonieuses avec ceux avec qui elles conviennent de partager leurs [...] territoires ancestraux.

... le Parlement souhaite confirmer la responsabilité du gouvernement de veiller à ce que les premières nations soient à l'abri de toute [...] ingérence ou dépossession relative à leurs terres, de la part de quelque gouvernement ou personne que ce soit.

On trouve ensuite les définitions des termes employés dans la mesure législative. Les « terres autochtones » sont définies comme étant les terres sur lesquelles une Première nation a établi un titre autochtone, ainsi que les terres réservées aux Indiens de la Première nation au sens du paragraphe 91(24) de la Loi constitutionnelle de 1867, les terres exclusivement réservées à la Première nation au sens de la Loi sur les Indiens, les terres que la Première nation possède et qui sont siennes par déclaration du gouverneur en conseil, les terres qui sont restituées à la Première nation à la suite du règlement d'une réclamation, les terres dont la Première nation détenait le titre aux termes d'un traité ou d'une proclamation royale, les terres acquises à titre d'indemnité d'expropriation ou de cession, et les terres acquises en échange d'autres terres de la Première nation.

Un « titre autochtone » à l'égard d'une terre est défini dans le projet de loi comme étant les droits permanents d'une Première nation sur une terre qui existaient avant que Sa Majesté n'affirme sa souveraineté sur le territoire où se situe cette terre; ne sont pas issus de la concession de terres par un autre souverain ou gouvernement; sont de nature perpétuelle et transmis de génération en génération; appartiennent, de façon collective, aux membres de la Première nation.

« Première nation » signifie, selon le cas, tout groupe d'Autochtones à l'usage et au profit desquels des terres ont été réservées au sens du paragraphe 91(24) de la Loi constitutionnelle de 1867; tout groupe d'Autochtones qui a des terres autochtones et est reconnu soit par un traité ou un accord visé par l'article 35 de la Loi constitutionnelle, soit sous le régime de la Loi sur les Indiens. Si un groupe de Métis ou d'Inuits satisfait aux exigences, les adaptations pertinentes sont faites.

Une « société de la première nation » est une personne morale qui est constituée sous le régime d'une loi fédérale ou provinciale, ou d'une loi de la Première nation reconnue, dont le siège est situé sur les terres autochtones de celle-ci, et dont la majorité des actions sont détenues par la Première nation reconnue ou un de ses membres.

Un membre d'une Première nation reconnue est un membre de la Première nation aux termes de la Constitution de celle-ci.

Une « première nation reconnue » est une Première nation reconnue en vertu du projet de loi.

Deux ou plusieurs Premières nations peuvent fusionner et devenir une Première nation unique. La loi s'applique uniquement aux Premières nations qui demandent à être reconnues. C'est le statu quo en ce qui a trait aux autres Premières nations. Ceci est très important. Il s'agit ici d'une loi habilitante qui s'applique uniquement aux Premières nations qui veulent être reconnues.

Il y a une proposition aux électeurs visant l'autonomie gouvernementale. Pour être reconnue par le Canada, une Première nation doit d'abord soumettre à l'approbation de ses électeurs une proposition d'autonomie gouvernementale. Cette proposition comporte une constitution que la Première nation a elle-même élaborée, de même que certains renseignements.

Il s'agit d'un processus semblable à celui à l'issue duquel le Canada reconnaît un nouvel État sur la scène internationale. Il constate que le gouvernement est reconnu par les administrés et qu'il existe une forme de gouvernement suffisamment stable pour être reconnu.

En ce qui concerne le référendum, les consultations ne se limitent pas à un ultimatum ou à une simple discussion. Il faut que les membres de la collectivité soient pleinement informés de tous les faits, qu'ils aient suffisamment de temps pour étudier la situation de la manière la plus adéquate possible pour la collectivité et qu'ils acceptent ensuite la décision de la collectivité.

Les membres qui étudient la proposition de la Première nation sont toutes les personnes inscrites sur la liste des membres de la Première nation, cette dernière étant maître de cette liste. Si c'est le registraire qui tient la liste aux termes de la Loi sur les Indiens, les membres sont les personnes qui sont inscrites sur la liste et dont la qualité de membre est confirmée par la Première nation. En cas de divergence entre les deux listes, c'est celle de la Première nation qui a préséance, à moins qu'un tribunal n'ordonne le contraire.

Outre la constitution ratifiée, la Première nation présente aussi des renseignements comme la dénomination qui servira à la désigner une fois qu'elle sera reconnue, le détail des traités et accords antérieurs, une description des terres, des ressources et des sources de revenus de la Première nation et le nom de la personne chargée d'organiser le référendum, en qualité de directeur du scrutin.

La constitution soumise aux membres pour qu'ils la ratifient peut être conforme au modèle prévu en annexe de la loi ou être élaborée par la Première nation visée. Pour une Première nation, le modèle de constitution est à la fois un guide et un moyen rapide et peu coûteux d'obtenir sa reconnaissance.

Si la Première nation crée sa propre constitution, elle a quelques exigences minimales à respecter. Voici ces exigences : comment sera déterminée la qualité de membre dans l'avenir? Comment est défini un électeur? Quelles sont les règles et procédures relatives au choix et au mandat des membres de l'organe exécutif? Quelle sont les règles et procédures régissant l'édiction des lois de la Première nation? Quel est le système de gestion financière et de reddition de comptes? Quelles sont les voies de recours ainsi que les procédures de règlement des différends? Quelles sont les modalités à respecter par rapport à la tenue des assemblées annuelles et des assemblées générales? Comment la constitution peut-elle être modifiée ultérieurement? Quelles sont les décisions qui peuvent être prises par l'organe exécutif, et celles qui doivent être prises par les électeurs? Quels sont les secteurs de compétence à l'égard desquels l'organe législatif de la Première nation peut légiférer?

Avant de soumettre la constitution proposée aux électeurs, elle est soumise au vérificateur général du Canada, qui l'examine et détermine si, d'après lui, elle contient les dispositions nécessaires à la bonne gouvernance. Ce rapport fait partie de l'information remise aux électeurs dans le cadre du processus de ratification. Les auteurs de la proposition peuvent décider d'apporter les modifications proposées par le vérificateur général, ou bien expliquer aux électeurs pourquoi ils ne les apporteront pas. Les électeurs ont le droit d'accepter la constitution malgré l'avis contraire du vérificateur général.

Reconnaissance d'une Première nation : la constitution est un document fondamental qui doit être appuyé par la majorité des électeurs afin de devenir le fondement du gouvernement d'une Première nation. Pour que la constitution soit ratifiée, au moins deux tiers de tous les électeurs doivent participer au référendum, et au moins deux tiers de ceux qui votent doivent se prononcer en faveur de la ratification. Au total, au moins la moitié de tous les électeurs doivent approuver la constitution.

Une fois le document ratifié, la Première nation est automatiquement reconnue par le Canada en tant qu'entité politique autonome dont le gouvernement est régi par sa propre constitution. Elle devient une personnalité juridique à succession perpétuelle. Elle a la capacité d'exercer ses droits et ses pouvoirs inhérents et de jouir de ses propres privilèges, et exerce les fonctions décrites dans la constitution. La ratification est rendue publique par le directeur de scrutin, qui envoie le rapport au président du Conseil privé de la Reine qui, lui, le fait publier dans la Gazette du Canada.

Dispositions transitoires : les dirigeants et les employés de la Première nation restent en poste jusqu'à ce que le nouveau gouvernement prenne de nouvelles dispositions. Toute obligation de Sa Majesté envers la Première nation, ou vice-versa, continuent d'exister. Les droits que détient Sa Majesté ou toute autre personne avant que la Première nation soit reconnue se maintiennent et ne sont pas modifiés par cette reconnaissance.

Textes législatifs : la Première nation reconnue a le pouvoir de légiférer, de la manière prévue par sa constitution, à l'égard d'elle- même, de ses membres, de ses terres, de sa langue, de son identité, de sa culture et de tout domaine inclus dans sa constitution, sous réserve des restrictions imposées par sa constitution.

Les domaines dans lesquels une Première nation reconnue peut légiférer sont énumérés à l'annexe 2 du projet de loi.

Portée territoriale des lois : les lois d'une Première nation reconnue s'appliquent sur les terres de Premières nations de la Première nation. Dans certains cas, notamment en droit de la famille, les lois de la Première nation peuvent s'appliquer à l'extérieur de ses terres.

Application des lois : les lois d'une Première nation reconnue peuvent être faites pour s'appliquer à toutes les personnes qui se trouvent sur ses terres de Première nation, que ces personnes fassent partie ou non de la Première nation.

(1540)

Administration de la justice : lorsqu'une Première nation reconnue établit une cour de juridiction criminelle ou civile, la Constitution doit prévoir l'inamovibilité et un système de rémunération suffisant pour garantir l'indépendance par rapport à l'organisme dirigeant. Il doit y avoir une procédure pour destituer les juges en cas de faute grave.

Les règles de la preuve existantes s'appliquent. La Première nation reconnue peut intenter des poursuites, ou, si elle ne le fait pas, le procureur général pourra le faire. Sous réserve de la Constitution de la Première nation reconnue ou si la Première nation n'établit pas de cour, les cours provinciales et fédérales pourront faire respecter les lois de la Première nation. Il est possible d'en appeler d'un jugement de la cour de la Première nation à une cour d'appel fédérale ou provinciale.

Titre et fonds : les terres publiques de la Première nation seront transférées à la Première nation reconnue en tant que « terres de Premières nations ». Les intérêts existants seront protégés. Les terres de Premières nations ne peuvent être aliénées que si la proposition est approuvée par 80 p. 100 des électeurs de la Première nation. Les terres de Premières nations ne peuvent être expropriées. Des terres supplémentaires peuvent devenir des terres autochtones, sauf dans certaines circonstances. Aucun droit sur des terres autochtones ne peut être hypothéqué de telle sorte que les terres risqueraient d'être aliénées.

Les fonds détenus par Sa Majesté pour une Première nation lui seront transférés. Ces fonds seront réputés toujours situés sur les terres autochtones de la Première nation.

L'article 87 de la Loi sur les Indiens reste en vigueur. Les terres autochtones ne peuvent pas être saisies. Cette protection est étendue aux sociétés des Premières nations, mais elle ne s'applique pas lorsque le vendeur conserve un droit de propriété jusqu'à ce que l'objet vendu ait été entièrement payé.

Associations permises : une Première nation reconnue peut autoriser sa scission ou sa fusion avec une autre Première nation. En pareil cas, l'approbation des électeurs est nécessaire. Des Premières nations reconnues peuvent en outre constituer une confédération à laquelle elles délèguent des pouvoirs législatifs et administratifs, tout en conservant leur identité. La loi s'applique alors à la confédération de la même manière qu'à une Première nation reconnue.

Droits et responsabilités : la loi ne porte pas atteinte aux droits, aux pouvoirs et aux libertés des Premières nations. Les membres des Premières nations conservent leur statut d'Indiens au sens du paragraphe 24 de l'article 91 de la Constitution du Canada.

La loi lie Sa Majesté du chef du Canada ou d'une province. Les membres d'une Première nation reconnue ne peuvent être tenus personnellement responsables des actes de leur Première nation.

Dispositions générales concernant les lois : généralement, les dispositions de la Loi sur les Indiens ne s'appliquent pas à une Première nation reconnue. Toutefois, certaines dispositions de la Loi sur les Indiens peuvent continuer de s'appliquer tant que la Première nation n'a pas dans ses textes législatifs ou dans sa constitution des dispositions traitant des mêmes sujets.

Une Première nation reconnue peut incorporer dans ses textes législatifs toute disposition d'une loi fédérale applicable aux Indiens qui ne relève pas de sa compétence législative.

Si le gouvernement veut modifier la loi ou adopter une disposition qui a un effet sur les droits d'une Première nation reconnue, il doit fournir un avis au moins 180 jours à l'avance. Puis, il doit rencontrer des représentants de la Première nation reconnue au moins 120 jours avant le dépôt du projet de loi et il doit présenter par écrit sa réponse aux observations présentées. Des négociations de bonne foi doivent avoir lieu pour tenter de régler tout différend.

Sauvegarde : la personne qui avait droit à la qualité de membre de la Première nation avant la reconnaissance de celle-ci ne peut être déchue de cette qualité du seul fait de circonstances qui existaient avant que la Première nation ne soit reconnue. Cependant, l'application de cette disposition est exclue dans le cas où elle porterait atteinte à un droit existant dont bénéficie la Première nation.

Honorables sénateurs, mon bureau et mon équipe de recherche ont consacré beaucoup d'efforts à la rédaction de ce projet de loi et il est devenu clair, dans le cadre de nos conversations avec les membres des Premières nations et les autres, que certaines questions méritaient des observations supplémentaires. J'essaierai d'être bref.

En réponse à ceux qui croient qu'en reconnaissant l'autonomie gouvernementale des Premières nations du Canada, le Parlement du Canada reconnaît alors un « troisième ordre de gouvernement », je crois que c'est George Erasmus, de la nation dénée, qui a dit ce qui suit au milieu des années 80 :

Les intéressés luttent pour faire reconnaître les nations autochtones par les gouvernements et les habitants du Canada, ainsi que les peuples et les gouvernements du monde. Avec l'arrivée des Européens, les Premières nations se sont retrouvées englobées dans un pays et ce pays est le Canada. Cependant, le gouvernement n'est pas le gouvernement des Premières nations. Ces gouvernements ne sont pas le choix des Autochtones. Ils ont été imposés aux Premières nations.

Même si les Premières nations ont reconnu l'existence du Canada et de ses gouvernements, les Premières nations luttent pour trouver leur place dans la collectivité canadienne où elles peuvent exercer leur droit à l'autonomie gouvernementale en tant que peuple distinct et à titre de nation. Elles veulent l'indépendance et l'autonomie à l'intérieur du pays souverain qu'est le Canada. Elles recherchent un fort processus démocratique, un système de freins et de contrepoids — des processus clairs qui permettront de s'attaquer à des problèmes comme le logement, l'éducation et le reste.

Jusqu'à maintenant, Erasmus croit que le Canada peut être un chef de file dans le domaine des questions autochtones et il exhorte les Canadiens à faire une différence — en reconnaissant pleinement les droits autochtones.

Erasmus a souligné l'importance d'avoir une société autochtone fière et souveraine dans laquelle les Autochtones peuvent réaffirmer leur culture et récupérer leur autonomie gouvernementale, où ils peuvent briser le cycle de dépendance à l'égard de l'aide gouvernementale qui perpétue leur sentiment de ne pas être à la hauteur et de rien valoir.

Faisons en sorte que le projet de loi S-16 joue un rôle de catalyseur, alors que le Parlement s'assurera de respecter les termes de la Constitution canadienne laissant aux Premières nations la place qui leur revient au Canada. Le futur peut commencer maintenant.

En ce qui concerne la Charte des droits et libertés et les lois canadiennes sur les droits de la personne, il est important de rappeler que les Premières nations recherchent un équilibre entre les droits individuels et les droits collectifs, en particulier ceux qui font partie des « droits des Premières nations » ou des « droits issus de traités ».

En fait, l'article 25 de la Loi constitutionnelle de 1982 donne priorité aux droits collectifs sur les droits individuels, un peu comme la disposition de dérogation peut être invoquée pour faire passer le bien commun avant les droits individuels.

Les Premières nations ne sont pas opposées aux droits individuels, mais, conscientes que leur survie même est en jeu, elles veulent s'assurer que l'obligation de respecter les droits individuels ne menace pas cette survie.

Le même raisonnement explique l'opposition — certaines critiques virulentes à l'endroit de l'ancien projet de loi S-38, apparemment perçu comme une tentative de priver des femmes innocentes de leurs droits fondamentaux — de ceux qui refusent que la Loi sur les Indiens soit assujettie aux lois sur les droits de la personne. En fait, l'exemption initiale avait été établie par le gouvernement lui-même, pour tenir compte du caractère raciste de la Loi sur les Indiens.

Le fait d'imposer aux gouvernements des Premières nations des obligations en matière de droits de la personne, sans leur donner les ressources nécessaires pour faire respecter ces droits ou pour se défendre contre des accusations injustifiées constituerait, en soi, une violation de droits. Les Premières nations veulent avoir les ressources nécessaires pour pouvoir mettre en place des régimes de droits de la personne. À long terme, ce serait probablement moins coûteux que de donner des ressources supplémentaires à la Commission canadienne des droits de la personne.

Le Sénat a consacré un certain temps à l'étude d'un aspect particulier des droits de la personne, à savoir les droits relatifs à la propriété matrimoniale des femmes autochtones qui vivent dans des réserves. Je crois que la protection et la promotion des droits de la personne ont une influence déterminante sur l'identité de la société canadienne.

La Loi sur les Indiens demeure silencieuse au sujet de la propriété matrimoniale dans les réserves. De nombreux droits et recours prévus dans les lois canadiennes qui concernent le foyer matrimonial s'appliquent à l'extérieur des réserves et ne sont d'aucune utilité pour les personnes qui vivent dans les réserves. Il m'apparaît indiqué d'examiner les recommandations du Comité des droits de la personne dans le cadre de l'étude du projet de loi S-16, qui sera probablement effectuée par le Comité des peuples autochtones. Il est important que, dans le cadre de l'exercice du droit d'autonomie gouvernementale, les lois adoptées pour les communautés autochtones et leurs membres incluent et respectent les droits de la personne et les droits collectifs, en tenant compte de la coutume, du droit tribal et des conventions et du droit canadiens et internationaux.

Il n'y a aucun doute que les solutions doivent concilier les intérêts personnels et collectifs, mais cette question constitue une compétence reconnue aux gouvernements des Premières nations, et c'est à elles qu'il appartient de décider ce qui est le mieux pour leurs membres et leur collectivité. Au regard du droit à l'autonomie gouvernementale, leurs membres sont obligés de bâtir eux-mêmes leur constitution et leur gouvernement et ainsi de faire en sorte que soit protégés les droits et intérêts de la collectivité et des particuliers.

(1550)

La question de savoir qui peut voter aux élections des Premières nations est complexe : c'est la question dite de « la taxation sans représentation ».

Comme les autres gouvernements, les gouvernements des Premières nations doivent protéger l'intégrité de l'électorat. Le gouvernement fédéral ne permet pas aux non-citoyens de voter. Les provinces ne permettent pas aux non-résidents de voter. Le statut d'Indien au sens de la Loi sur les Indiens et la qualité de membre d'une Première nation ne sont pas définis en fonction de critères raciaux. Il est incorrect d'étudier la question comme si des critères de ce genre étaient applicables, alors que d'autres facteurs sont en fait en jeu.

En réponse aux personnes qui seraient tentées de qualifier le projet de loi S-16 de rédaction de constitution en suivant bêtement un formulaire, je dois signaler, comme l'a fait la Commission royale sur les peuples autochtones au sujet des modèles de gouvernement pour les Premières nations, au chapitre 3, volume 2 de son rapport, que :

L'exercice de l'autodétermination et de l'autonomie gouvernementale des Autochtones revêtira des formes multiples, variant selon les aspirations des peuples, leurs circonstances et leurs aptitudes au changement. Nous prévoyons par conséquent que les formules générales exposées dans la présente section seront appliquées dans la pratique de différentes façons [... ]

Honorables sénateurs, à mon avis, le projet de loi S-16 donne aux Autochtones le pouvoir de redresser leur condition économique et leur permet de faire preuve d'initiative, qualité détruite par plus d'un siècle de répression et de paternalisme. Le projet de loi contribuera à dynamiser les gouvernements autochtones et protègera leurs territoires. Les Autochtones affirmeront leurs pouvoirs en matière d'autonomie gouvernementale dans leurs propres constitutions.

Le projet de loi S-16 est un projet de loi habilitant auquel on ne peut aucunement reprocher d'être paternaliste. L'approche prévue est celle recommandée par le comité Penner en 1983 et elle s'harmonise avec l'approche recommandée par la Commission royale sur les peuples autochtones. Le projet de loi est un pas de géant dans la bonne direction, même s'il se fait attendre depuis longtemps.

Honorables sénateurs, le projet de loi découle de véritables efforts concertés. Je peux affirmer sans fausse modestie qu'il s'agit sûrement du projet de loi sur les Premières nations le plus novateur jamais présenté depuis 1982. Il peut remédier à l'injustice, corriger les erreurs historiques et, ce qui est plus important encore, restituer les droits qui ont été supprimés et niés.

Si le comité approprié tient des audiences, ce projet de loi fera l'objet d'une grande attention. Si le Sénat l'adopte, l'autre Chambre tiendra un débat approfondi à son sujet. Au fil de ces étapes, les amendements renforceront et amélioreront sans contredit le projet de loi. C'est un projet de loi historique. J'invite mes collègues à l'examiner attentivement et à l'appuyer fermement.

En concluant, je tiens à remercier le conseiller expert de la nation mohawk, Rarihokwats, ou Four Arrows, le rédacteur Michael Clegg, mon adjoint Stephen Stewart et bien d'autres personnes. D'anciens juges en chef de la Cour suprême ont été consultés pour l'élaboration du projet de loi et de nombreux aînés autochtones aussi. Je les remercie tous. J'espère que ce projet de loi sera un pas dans la bonne direction. C'est tout au moins un effort majeur.

[Français]

L'honorable Aurélien Gill : Honorables sénateurs, j'aimerais féliciter le sénateur St. Germain de son travail gigantesque dans la rédaction de ce projet de loi. On touche à peu près à tout dans le domaine autochtone. Si l'on pouvait appliquer une partie de ce que vous avez dit — ce que l'on demande depuis longtemps — on pourrait dire davantage que nous avons un beau pays. Cela viendra sans doute.

On reconnaît, règle générale, une nation comme une bande des communautés des Premières nations. On dit qu'il y a environ 630 nations au pays. Cette façon d'aborder la définition de l'entité de ce groupe de personnes est erronée, à mon avis. Elle a été voulue d'abord par la Loi sur les sauvages et, ensuite, par la Loi sur les Indiens.

À mon avis, lorsqu'on définit le mot « nation » comme étant une réserve indienne ou une bande, on fait fausse route. Cela fait peur aux gens d'aborder cette question et de voir des systèmes de justice, des systèmes de toutes sortes établis dans chacune des communautés. Par contre, si l'on donne le vrai sens du mot « nation » à un groupe de personnes, c'est différent. Par exemple, j'habite la communauté montagnaise ou innue du Lac Saint-Jean, Mashteuiatsh; c'est une communauté. Je fais partie d'une nation qui a 11 autres communautés au nord du Québec, de la côte du Saint- Laurent au Labrador. C'est une nation. Les Autochtones se définissent comme une nation.

À cause de l'existence de la loi depuis plusieurs années, on a un peu mêlé choses. On définit une nation comme une bande, une communauté. Et les communautés souvent se définissent comme Première nation. À mon avis, c'est une communauté qui fait partie d'une nation innue, crie, algonquine, iroquoise, Nisga'a, ainsi de suite.

Le sénateur Losier-Cool : Une nation.

Le sénateur Gill : Les Acadiens ne se définissent pas ainsi. Dans votre explication, vous reconnaissez la communauté comme une nation. Je pense qu'ultiment, il faudra corriger cette définition. Il n'y a pas 630 Premières nations au pays, il y en a, peut-être 50. Est-ce que je peux avoir vos commentaires?

[Traduction]

Le sénateur St. Germain : Honorables sénateurs, en ce qui concerne les nations, je reconnais qu'il y en a moins. Il y a en fait 630 bandes autochtones. Nous disons clairement dans le projet de loi que, si diverses bandes veulent travailler ensemble et s'unir, elles peuvent le faire. Le texte prévoit aussi que, si certaines parties d'une nation veulent être reconnues aux termes de la loi, elles peuvent l'être. Et l'ensemble de la nation iroquoise pourrait également être reconnue. Dans l'ouest du Canada, nous avons la nation crie. Le projet de loi permet de reconnaître l'ensemble de cette nation comme une seule entité, mais il est très peu probable que cela se produise. Ces dispositions pourraient s'appliquer dans l'Est, dans certains cas. Il reste que la disposition est là et que des groupes pourraient s'unir pour former une seule nation régie par cette mesure législative. Cela n'exclut pas forcément les petites bandes, mais il n'est pas dit que ce doit être une seule bande. Il y a de ce côté-là beaucoup de latitude.

(Sur la motion du sénateur Rompkey, le débat est ajourné.)

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, je propose que nous passions immédiatement aux deux rapports inscrits au nom madame le sénateur Andreychuk. Nous reporterons ensuite à la prochaine séance tous les autres articles, dans le même ordre.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

DROITS DE LA PERSONNE

BUDGET ET AUTORISATION D'EMBAUCHER DU PERSONNEL—ADOPTION DU RAPPORT DU COMITÉ SUR L'ÉTUDE DES OBLIGATIONS INTERNATIONALES RELATIVEMENT AUX DROITS ET LIBERTÉS DES ENFANTS

Le Sénat passe à l'étude du deuxième rapport du Comité sénatorial permanent des droits de la personne (budget—étude sur les droits et libertés des enfants et autorisation d'embaucher du personnel), présenté au Sénat le 18 novembre 2004. (L'honorable sénateur Andreychuk).

L'honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, je propose la motion inscrite à mon nom.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

(1600)

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, pourrais-je demander à madame le sénateur Andreychuk de donner un peu plus de détails sur le budget? Pourrait-elle préciser un montant? Je pense que ce qui est prévu par le budget est peut-être prévu au poste budgétaire dont nous sommes présentement saisis. L'honorable sénateur pourrait peut-être nous dire en particulier si des déplacements sont prévus et nous donner certains autres détails sur la façon dont le budget sera dépensé?

Le sénateur Andreychuk : Le budget est plutôt explicite. Il prévoit les menues dépenses habituelles au titre des repas et un montant de 7 500 dollars au titre des communications et de l'établissement du rapport, ce à quoi nous a constamment encouragés la régie interne.

À la suite de notre intervention d'urgence de la semaine dernière, nous avons maintenant la possibilité d'embaucher des experts- conseils. Il s'agit d'une étude portant sur la Convention des droits de l'enfant et d'autres instruments internationaux qui ont une incidence sur les droits et les libertés des enfants. C'est un domaine fort technique et nous allons donc affecter 22 500 $ à l'embauche d'un expert-conseil. Nous pouvons embaucher d'autres recherchistes jusqu'à hauteur de 33 750 $. Le montant total pour les services professionnels et autres est de 67 750 $. Pour les transports et les communications, nous disposons de 104 306 $. Étant donné que la Convention des droits de l'enfant comporte une stratégie de mise en oeuvre et qu'il existe un comité de travail, et que le sénateur Pearson connaît déjà le processus du gouvernement du Canada, qu'il a déjà présenté un rapport concernant notre respect de la convention et a participé au dialogue à ce sujet, le comité a jugé important de rencontrer ce comité de travail, le secrétariat des droits de la personne et d'autres experts à Genève. C'est à cette ville que remontent les origines de la convention et c'est à partir d'elle que se fait le suivi, ce qui permet de déterminer dans quelle mesure le Canada respecte la convention et de formuler des stratégies visant à rendre notre action plus conforme.

L'étude a été réalisée parce que nous croyons, et cela a été corroboré par des experts, certainement au cours des dernières consultations, que le Canada n'intègre pas encore complètement la Convention internationale relative aux droits de l'enfant quant à des aspects touchant la gouvernance dans l'ensemble des ministères et des organismes. Nous espérons recommander de meilleures pratiques qui feront s'exercer une plus grande volonté politique afin de faire en sorte que nous respections complètement la convention internationale. Il importe donc que nous rencontrions les gens qui s'occupent de la convention.

Deuxièmement, nous voulons rencontrer un pays qui applique des pratiques exemplaires, comme la Suède. Nous avons pensé que nous pouvions combiner le voyage pour voir comment elle s'y prend pour se conformer à la convention internationale, et faire une analyse et une comparaison entre les deux pays. Nous envisageons aussi — et cela ne supposerait pas de déplacement — de tenir une vidéoconférence avec, peut-être, l'Australie, où il y a un processus d'application des traités, afin de veiller à ce que les conventions soient intégralement respectées.

Voilà l'essentiel des déplacements pour le moment. Nous ne prévoyons pas faire de voyages au Canada, car nous sommes d'avis que nous comptons beaucoup d'experts. Nous n'allons pas étudier les droits...

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, comme il est 16 heures, je demande aux sénateurs s'ils acceptent d'oublier l'heure.

Des voix : D'accord.

Le sénateur Andreychuk : Nous voulons être certains de respecter la loi car nous croyons que le seul moyen de faire en sorte que les enfants canadiens jouissent des instruments internationaux est un respect accru de la convention. Nous ne tiendrons pas d'audiences aux quatre coins du Canada cette année parce que nous estimons le domaine plutôt technique. Nous avons des ONG qui ont suivi ce dossier et qui viendront témoigner à Ottawa. Les fonds serviront à rembourser les dépenses des spécialistes dans ce domaine et à payer les consultations nécessaires.

Je dirais, et je veux que ce soit consigné au compte rendu, que nous livrons une bataille contre le temps pour obtenir les conseils d'expert de madame le sénateur Pearson, cela dit sans divulguer d'âges. Le sénateur Pearson a une expérience incommensurable dans ce domaine et a été la force d'impulsion de ce rapport. Par conséquent, nous agissons le plus prestement possible de manière à livrer notre produit d'ici le 31 mars.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

BUDGET ET AUTORISATION D'ENGAGER DU PERSONNEL—ADOPTION DU RAPPORT DU COMITÉ CHARGÉ D'ÉTUDIER DIVERSES QUESTIONS AYANT TRAIT AUX OBLIGATIONS NATIONALES ET INTERNATIONALES DU CANADA

Le Sénat passe à l'étude du troisième rapport du Comité sénatorial permanent des droits de la personne (budget—étude des obligations relatives aux droits de la personne—autorisation d'engager du personnel), présenté au Sénat le 18 novembre 2004. — (L'honorable sénateur Andreychuk).

L'honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, je propose la motion inscrite à mon nom.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'aimerais poser à madame le sénateur Andreychuk une brève question et lui demander une réponse tout aussi brève quant à la composition du budget et aux postes auxquels il va s'appliquer.

Le sénateur Andreychuk : Le budget total s'élève à 74 000 dollars. Aujourd'hui, le Comité de la régie interne a approuvé une somme légèrement inférieure à 20 000 dollars. Cette somme s'applique à deux objets dont l'étude a été entreprise : l'Organisation des États américains et notre éventuelle participation à la Cour interaméricaine et aussi l'état des traités internationaux que nous avons ratifiés ou signés. Il s'agit d'actualiser ces deux objets d'étude. Les deux consultants feront l'actualisation des rapports et nous formulerons de nouvelles recommandations.

En ce qui concerne la Cour interaméricaine, nous sommes d'avis que le Canada doit ratifier le traité et souscrire à la cour. Nous verrons ce que décidera le gouvernement à ce sujet.

Pour ce qui est de l'autre étude, madame le professeur Laviolette examinera tous les traités internationaux relatifs aux droits de la personne pour voir lesquels ont été ratifiés depuis la dernière fois. Je ne prévois pas avoir besoin d'aucune autre somme pour ces deux études et nous prévoyons présenter le rapport à temps.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

(Le Sénat s'ajourne au jeudi 25 novembre 2004, à 13 h 30.)


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