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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 39e Législature,
Volume 143, Numéro 89

Le mercredi 25 avril 2007
L'honorable Noël A. Kinsella, Président


LE SÉNAT

Le mercredi 25 avril 2007

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

HOMMAGES

LE DÉCÈS DE L'HONORABLE JACK WIEBE

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, en vertu du paragraphe 22(10) du Règlement, le leader de l'opposition a demandé que la période des déclarations de sénateurs soit prolongée aujourd'hui afin de rendre hommage à l'honorable Jack Wiebe, décédé le 16 avril 2007.

[Traduction]

L'honorable Marilyn Trenholme Counsell : Honorables sénateurs, c'est avec une grande tristesse pour la famille et les amis de l'honorable Jack Wiebe que je prends la parole. Je sais que je parle au nom de tous les sénateurs lorsque je dis que la plupart d'entre nous auraient souhaité pouvoir assister à ses funérailles nationales, hier, à Swift Current, en Saskatchewan. Je sais aussi que nos pensées et nos prières ont accompagné sa femme, Ann, et leurs enfants.

Lorsque j'ai rencontré Leurs Honneurs en 1997, ils voulaient qu'on les appelle Jack et Ann. C'est ce qui a défini leur relation avec les autres, peu importe où leur vie commune les a menés, tout au long de leurs 46 merveilleuses années de mariage.

Pendant nos réunions à titre de représentants vice-royaux, l'honorable Jack Wiebe voyait les choses avec clarté, responsabilité et simplicité. Pas de flaflas, pas de prétention, que des principes.

Son honnêteté, sa bienveillance et son sourire lui ont attiré une légion d'amis de partout et dans tous les milieux. Le premier ministre Lorne Calvert a déclaré ce qui suit après la mort de notre regretté collègue : « Jack Wiebe s'était surtout fait connaître par son amour des gens. [...] Jack Wiebe n'a jamais cessé d'être profondément enraciné dans le sol de Herbert et des Prairies... ».

(1335)

Ce fils de la campagne, cet agriculteur des Prairies, ce représentant des citoyens à l'Assemblée législative de la Saskatchewan, ce lieutenant gouverneur, ce sénateur a fait profiter notre Chambre de son incroyable expérience, de son excellent jugement, de son bon sens et de son dévouement.

Au moment où le sénateur Wiebe a pris sa retraite, madame le sénateur Carstairs a raconté l'anecdote suivante dans son discours d'hommage à cette excellente personne : « La seule fois où Jack a dit non à son chef, c'est lorsqu'il a refusé d'annuler un voyage à Disneyland avec ses petits- enfants. » Je suis d'ailleurs convaincue que ceux-ci se souviennent de ces moments précieux.

Mais l'hommage le plus émouvant, et sans doute le plus significatif, est celui rendu par le sénateur Oliver :

Il possédait évidemment une fibre partisane [...] mais le sénateur Wiebe était aussi notre roi philosophe [...]

Jack a joué un rôle de premier plan dans la production, par notre comité, d'un rapport clé sur le changement climatique [...]

Dans une note privée datée du 28 janvier dernier, Jack m'informait qu'il prenait une retraite anticipée [...] À la fin de sa note, il m'écrivait ce qui suit : « [...] Il vous incombera maintenant de poser les questions difficiles. »

Le sénateur Oliver a conclu en disant : « Jack manquera à tous les sénateurs. »

Honorables sénateurs, la vie de Jack Wiebe a été synonyme d'amitié, d'inspiration et de défi. Il faut se poser les questions difficiles avec humilité et intégrité.

Il ne faut pas connaître le repos avant nos derniers instants. À ce moment, peut-être que nous saurons, à l'instar de Jack Wiebe, que notre vie n'a pas été futile. Nous nous rappelons de Jack avec respect, gratitude et affection. Que Dieu soit avec Ann et sa famille.

L'honorable David Tkachuk (leader adjoint suppléant du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai rencontré Jack lors d'une élection partielle en 1977, il y a très longtemps. Il faisait partie des libéraux de Davie Steuart au moment où nous étions en train de bâtir le Parti conservateur de la Saskatchewan.

La lutte lors de cette élection partielle a été la plus chaude à laquelle j'ai participé. Notre tâche était d'arriver seconds, ce que nous avons réussi à faire. Le NPD a remporté le siège, mais Jack a représenté avec ardeur le Parti libéral tout au long de cette lutte.

Il est mort il y a une semaine, du cancer. Lorsque la nouvelle de sa mort s'est mise à circuler, les hommages ont afflué de partout au pays. Jack était bien connu, il était respecté et, ce qui est encore plus important, il était aimé. Ce n'était pas difficile de l'aimer.

Un des hommages qui lui a été rendu décrit bien le personnage. Cet hommage disait que Jack était aussi à l'aise de rencontrer ses collègues éleveurs de porcs que de rencontrer la reine. Jack a eu la possibilité de faire les deux durant les 30 années qu'il a passées à élever des porcs et les six années où il a été lieutenant-gouverneur de la Saskatchewan. Jack a été nommé à ce poste en 1994; c'était la première fois qu'un agriculteur était nommé lieutenant-gouverneur en près de 50 ans.

Malgré les sommets qu'il a atteints, Jack n'a jamais oublié d'où il venait; c'était un fils des Prairies issu d'une petite ville nommée Herbert. Cette ville, au même titre que la politique, vivait en lui.

L'arrière-grand-père de Jack a émigré de la Russie au Kansas, et son fils, John Wiebe, a quitté le Kansas pour s'installer à Herbert. D'une certaine manière, la famille n'est jamais partie; ceux qui sont partis n'ont jamais manqué de revenir.

Puis, il y a eu la politique. Le grand-père de Jack a été le premier maire de la ville d'Herbert après la création de celle-ci en 1912. Le père de Jack, dont le prénom était Herbert, a aussi été maire de la ville de 1928 à 1954 — tellement longtemps que certaines personnes pensaient que la ville avait été nommée en son honneur. Il est plus probable qu'il ait été lui-même nommé en l'honneur de la ville.

Jack a suivi les traces de ses ancêtres. Il a été élu pour la première fois à l'Assemblée législative de la Saskatchewan en 1971 et il a été réélu en 1975. Après avoir été lieutenant-gouverneur, il a été nommé au Sénat du Canada en 2000. Il a pris sa retraite en 2004.

Il a brillé dans cette Chambre par sa grande dignité et son humilité d'homme de la terre. Il a quitté le Sénat beaucoup trop tôt, tout comme cette terre d'ailleurs. Cela me rappelle une chose qu'il avait écrite à l'époque où il était lieutenant-gouverneur. Je le cite :

Une autre année s'est écoulée, encore plus rapidement il me semble que les précédentes. Comme certains l'ont écrit, on se rend compte en vieillissant qu'on n'est pas né depuis si longtemps, après tout. Le temps s'écourte.

Que Dieu vous bénisse, Jack.

(1340)

L'honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, je veux aussi rendre hommage au sénateur Jack Wiebe. Jack fut nommé au Sénat peu de temps avant moi, au printemps de 2000. J'ai eu le plaisir de siéger à ses côtés au Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense. Tous ceux qui ont déjà siégé à ce comité savent que ses membres passent beaucoup de temps ensemble et qu'ils finissent par bien se connaître.

Jack était un homme de valeur. Il ne fallait pas discuter longtemps avec lui pour comprendre qu'il était originaire de la Saskatchewan. Il aimait beaucoup sa province et il prenait un grand plaisir à parler de l'endroit où il vivait. Jack était colonel honoraire au sein de l'armée. Bien qu'il eût un grand respect pour tous les membres, anciens et présents, des Forces canadiennes, il vouait une admiration particulière à nos réservistes. Ses collègues au comité savaient qu'il n'était pas nécessaire de poser des questions dans ce domaine, parce que c'était le domaine d'expertise de Jack. Il était un ardent défenseur des réservistes et un grand promoteur de l'excellent travail qu'ils accomplissent pour le Canada.

Ce fut un plaisir de travailler avec Jack au Sénat. Mes pensées accompagnent sont épouse, Ann, et sa famille.

M. BERT BROWN

NOMINATION AU SÉNAT

L'honorable David Tkachuk (leader adjoint suppléant du gouvernement) : Honorables sénateurs, je tiens à féliciter le premier ministre d'avoir fait part de son intention de nommer Bert Brown au Sénat. Le premier ministre Harper reconnaît ainsi les années que M. Brown a consacrées à la cause de la réforme du Sénat. Le premier ministre a dit :

Aucun Canadien n'a fait autant que Bert Brown pour la réforme du Sénat. Depuis plus de deux décennies, il prône inlassablement la démocratisation de la Chambre haute. Il s'est présenté trois fois aux élections sénatoriales de l'Alberta, et c'est le seul Canadien à avoir été élu deux fois à titre d'aspirant sénateur. Bref, M. Brown est un modèle parfait auquel peuvent s'identifier les sénateurs élus [...]

Je ne peux en dire autant du chef libéral Stéphane Dion, qui a tenté de déprécier M. Brown en disant que le premier ministre ne nommait pas « la meilleure personne » pour faire le travail. M. Dion a également dit que cette nomination n'était pas dans l'intérêt de l'Alberta. Il semble oublier que l'Alberta a tenu compte des meilleures traditions démocratiques en choisissant M. Brown et que la majorité des Albertains ont voté pour lui. Selon M. Dion, ils ont fait une erreur. Je suis persuadé qu'aucun Albertain et aucun autre Canadien ne serait d'accord pour dire que le premier ministre devrait passer outre au processus démocratique qui a été respecté en Alberta et s'en remettre à M. Dion lorsqu'il s'agit de décider ce qui est dans le meilleur intérêt de l'Alberta. Personne à l'exception, bien sûr, de certains sénateurs.

Honorables sénateurs, les remarques du chef du Parti libéral sont très malheureuses. Elles dénotent une grande incompréhension à l'égard du dossier de la réforme du Sénat et des répercussions que cela entraîne non seulement en Alberta, mais aussi dans d'autres provinces.

Bert Brown sera sans aucun doute une excellente recrue, et je sais que tous les sénateurs lui souhaiteront la bienvenue.

LE TRANSPORT

LES NAVIRES DE CROISIÈRE—LE DÉVERSEMENT DE DÉCHETS DANS LES EAUX CÔTIÈRES

L'honorable Pat Carney : Honorables sénateurs, les habitants du littoral de la Colombie-Britannique ont exprimé leurs préoccupations à propos du déversement d'eaux usées par des navires de croisière, une pratique qui transforme les eaux côtières en latrines de l'industrie de la croisière. Dans son numéro du 19 avril 2007, Georgia Straight, une publication britanno-colombienne, publiait un article d'Andrew Macleod intitulé « Cruise on down to our dumping ground ». L'article décrit les tonnes d'eaux usées que les navires de croisière déversent en toute impunité dans les eaux côtières canadiennes. Intriguée par cette histoire étrange, je me suis renseignée et j'ai appris une chose incroyable : le Canada n'a aucun recours juridique pour empêcher les navires de croisière de déverser leurs eaux usées. Il peut seulement signaler l'existence des lignes directrices facultatives que Transports Canada a élaborées en 2003 de concert avec Environnement Canada. Les Lignes directrices en matière de prévention de la pollution pour l'exploitation des navires de croisière relevant de la compétence du Canada contiennent les exigences réglementaires actuelles ainsi que les pratiques que les navires de croisière ont volontairement consenti à adopter. Cependant, puisque ces lignes directrices sont facultatives, il n'y a aucun mécanisme d'application ni aucune sanction juridique prévue à l'égard des contrevenants. À titre d'exemple, un navire appartenant à Celebrity Cruises Incorporated a payé une amende de 100 000 $ à l'État de Washington pour avoir déversé des eaux usées dans le détroit de Juan de Fuca, qui n'est pas loin de là où j'habite sur l'île Saturna, mais cette même société n'a rien payé au Canada malgré le fait qu'elle ait admis avoir souillé ses eaux à trois reprises.

(1345)

Les collectivités côtières accueillent volontiers l'industrie des croisières, mais elles s'inquiètent aussi, avec raison, de la pollution causée par les navires. L'Administration portuaire de Vancouver évalue à plus de 13 000 le nombre d'emplois générés par l'industrie des croisières tous les ans et à 2 millions de dollars les retombées économiques pour la région chaque fois qu'un navire jette l'ancre.

Le problème, c'est que, en tout, les 33 navires de croisière basés à Vancouver passeront par la Colombie-Britannique environ 300 fois cet été, transportant plus d'un million de passagers qui produisent chacun 3,5 kilos de déchets tous les jours, eaux usées exclues. Nombre de ces navires ayant plus de 2 000 passagers à bord, ce sont comme des villes flottantes équipées des mêmes installations et produisant autant de déchets qu'un centre de villégiature de luxe de taille semblable. Le navire passera une bonne partie de son temps dans les eaux restreintes du détroit d'Hécate, dans le Passage de l'Intérieur et entre l'île de Vancouver et le continent, où la population de baleines est déjà vulnérable.

Bien qu'un certain nombre de règlements en matière de pollution aient déjà été promulgués en vertu de la Loi sur la marine marchande du Canada, à l'heure actuelle aucun d'entre eux ne porte sur le déversement d'eaux usées par les navires. Le 17 juin 2006, Transports Canada a publié dans la partie I de la Gazette du Canada un projet de règlement qui fusionnerait les divers règlements actuels relatifs aux polluants provenant des navires et contiendrait de nouvelles dispositions qui n'existent pas dans la réglementation actuelle, y compris des dispositions visant l'interdiction ou le contrôle du rejet de substances polluantes provenant de tous les vaisseaux, y compris les navires de croisière. Les représentants de Transports Canada affirment que ces mesures réglementaires ne sont pas encore en vigueur.

J'espère que les honorables sénateurs conviendront avec moi que le gouvernement doit agir dès que possible pour appliquer ces nouveaux règlements afin que les habitants des localités côtières puissent avoir l'assurance que leurs eaux ne se transformeront pas en une immense fosse septique.

LA JOURNÉE DE LA MALARIA EN AFRIQUE

L'honorable Rod A. A. Zimmer : Honorables sénateurs, pour la plupart des Canadiens, le mot « filet » évoque des images positives, grâce à la connotation de protection associée, par exemple, à l'expression « filet de sécurité sociale », et à ce temps-ci de la saison, étant donné les séries éliminatoires de la Coupe Stanley, à l'expression « filet de hockey ». Dans de nombreux pays africains, les filets ont une utilité plus fondamentale, ils servent à prévenir la propagation de la malaria.

La malaria est causée par un parasite qui est transmis par les maringouins. C'est un mal généralisé dans la plupart des pays de l'Afrique subsaharienne et dans certaines parties de l'Afrique du Nord. Cette maladie a de sombres conséquences sur la vie humaine; plus de 1,3 million de personnes en meurent à chaque année. En Afrique, la malaria est la principale cause de mortalité chez les enfants de moins de 5 ans. Les femmes enceintes sont aussi très vulnérables, car la malaria augmente le risque de décès maternel et néonatal, de fausses couches et d'enfants mort-nés.

Honorables sénateurs, il y de l'espoir pour ce qui est de ralentir la transmission de cette terrible maladie. Les filets de lit traités à l'insecticide constituent une barrière physique durant la nuit, quand les maringouins sont plus susceptibles d'infliger leurs piqûres dévastatrices. Il a été prouvé que les filets de lit réduisent jusqu'à 50 p. 100 la transmission de la malaria. Un filet, qui ne coûte que 10 $, peut protéger un enfant pendant cinq ans. Comme plusieurs enfants et adultes peuvent utiliser le même filet, plusieurs vies sont donc protégées.

La campagne Un filet d'espoir a pour objectif d'amasser suffisamment de fonds pour acheter 500 000 filets de lit. Ses cofondateurs, Belinda Stronach, Rick Mercer et Nigel Fisher, d'UNICEF Canada, ont récemment annoncé que le Libéria recevrait 33 000 filets. Lors de sa récente visite à Ottawa, la présidente du Libéria, Ellen Johnson-Sirleaf, a exprimé sa gratitude pour le don qui sauvera très certainement la vie de nombreux enfants dans son pays.

Honorables sénateurs, c'est aujourd'hui la Journée de la malaria en Afrique. Je vous demande de vous joindre à moi pour souligner les efforts soutenus déployés dans le cadre de projets comme la campagne Un filet d'espoir et pour célébrer la vie des enfants qui ne connaîtront pas les ravages de la malaria.

LA GOUVERNEURE GÉNÉRALE

LES COMMENTAIRES FORMULÉS RÉCEMMENT DANS LES MÉDIAS

L'honorable Jim Munson : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour discuter de certains des commentaires négatifs qui ont été faits dans le Globe and Mail à l'égard de la très honorable Michaëlle Jean. Comme les sénateurs en ont sans doute entendu parler, Mme Jean a décidé d'alléger son programme afin de prendre un repos bien mérité. Cette annonce semble avoir donné à certains de mes anciens collègues journalistes l'occasion de dénigrer tout ce qu'elle a accompli dans le cadre de ses fonctions.

Je comprends que le rôle des médias consiste à faire la lumière sur les aspects les plus obscurs de notre société mais, dans ce cas-ci, je crois que leurs commentaires sont tout à fait déplacés. Nous étions tous présents lorsque Mme Jean a été assermentée à titre de Gouverneure générale. Sa personnalité charismatique a égayé ce merveilleux endroit. Son histoire continue d'inspirer des générations de néo-Canadiens.

Dans le cadre de son rôle de commandante en chef des Forces canadiennes, elle a été accueillie à bras ouverts par nos militaires qui servent à l'étranger, et surtout par ceux qui se trouvent en Afghanistan.

(1350)

Elle leur a donné de l'espoir et une vision. Elle a visité l'Afrique, et elle a montré aux pays en développement une caractéristique du Canada que l'on n'observe malheureusement pas aussi souvent qu'on le voudrait ces jours-ci, à savoir la compassion. Son visage compatissant laisse savoir aux gens démunis du monde qu'elle comprend ce qu'ils vivent, mais aussi qu'il y a de l'espoir, qu'il existe une façon de se sortir des griffes de la pauvreté.

Honorables sénateurs, il est intéressant de constater qu'à son retour en Haïti, où elle est née, elle a été accueillie comme une héroïne nationale. Cela ne se produit pas très souvent dans ce pays. Honorables sénateurs, Michaëlle Jean est un trésor national. Elle devrait être célébrée comme le visage du nouveau Canada, et on ne devrait pas chercher à la dénigrer.


AFFAIRES COURANTES

L'ÉTUDE RELATIVE AUX OBLIGATIONS INTERNATIONALES CONCERNANT LES DROITS ET LIBERTÉS DES ENFANTS

DÉPÔT DU RAPPORT FINAL DU COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES DROITS DE LA PERSONNE

L'honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le dixième rapport du Comité sénatorial permanent des droits de la personne relativement aux droits des enfants, et je propose que l'étude de ce rapport soit inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance du Sénat.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(Sur la motion du sénateur Andreychuk, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

LA LOI SUR LA GESTION DES TERRES DES PREMIÈRES NATIONS

PROJET DE LOI MODIFICATIF—PREMIÈRE LECTURE

L'honorable David Tkachuk présente le projet de loi S-6, Loi modifiant la Loi sur la gestion des terres des premières nations.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons- nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Tkachuk, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après- demain.)

[Français]

L'ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE DE LA FRANCOPHONIE

DÉPÔT DU RAPPORT DE LA RÉUNION DE LA COMMISSION POLITIQUE, TENUE DU 28 FÉVRIER AU 3 MARS 2007

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool : Honorables sénateurs, conformément au paragraphe 23(6) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la Délégation parlementaire canadienne de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie concernant sa participation à la réunion de la Commission politique de l'APF, à Pré-Saint-Didier, Vallée d'Aoste, en Italie, du 28 février au 3 mars 2007.


[Traduction]

PÉRIODE DES QUESTIONS

LES FINANCES

LES PERTES D'EMPLOIS AU PROFIT DE PAYS ÉTRANGERS ET LES RESTRICTIONS SUR LES INVESTISSEMENTS ÉTRANGERS—LA POLITIQUE DU GOUVERNEMENT

L'honorable Céline Hervieux-Payette (leader de l'opposition) : Les honorables sénateurs savent que l'économie du Canada évoluera dans le village planétaire. Au cours des dernières années, de nombreux emplois dans le secteur manufacturier ont été transférés dans des pays tels que la Chine et l'Inde, entre autres.

(1355)

Pendant ce temps, le gouvernement procède à la fermeture de 23 consulats qui aident les Canadiens à faire des affaires à l'étranger. Il a instauré un nouveau régime pour les fiducies de revenu, qui a donné lieu à des pertes d'emplois dans les sièges sociaux de ces sociétés, étant donné que plusieurs d'entre elles ont été transférées dans d'autres pays.

Entre-temps, des sociétés canadiennes comme Alcan, Bombardier et Quebecor, pour ne nommer que celles-là, ont vu qu'on remettait en question la déductibilité des intérêts étrangers et qu'on modifiait la politique à cet égard, et elles ne savent pas exactement où en est ce dossier.

M. Thomas d'Aquino, président et chef de la direction du Conseil canadien des chefs d'entreprise, a dit récemment que les changements annoncés dans le budget « pourraient miner dangereusement la compétitivité des sociétés canadiennes qui sont des fleurons [...] ». Comme nous le savons, les sociétés Bombardier et Alcan ont des actionnaires canadiens et des professionnels canadiens à leur emploi et elles effectuent également leur recherche au Canada.

Voici ma question au leader du gouvernement au Sénat : concernant la politique sur les transferts d'emplois à d'autres pays et l'impossibilité, pour les entreprises, d'investir à l'étranger dans les même conditions, quand le gouvernement s'occupera-t-il de corriger l'ensemble de la situation économique et modifiera-t-il sa politique?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Je remercie madame le sénateur de sa question.

D'après les statistiques sur l'emploi au Canada, il est tout à fait clair que, pour l'instant, nous ne subissons pas de perte d'emplois. En fait, on remarque surtout une grave pénurie de main-d'œuvre dans certains secteurs de l'économie.

Comme je l'ai déjà dit aux sénateurs, et comme le ministre des Finances l'a dit, notre plan d'équité fiscale va rétablir l'équilibre et l'équité dans le système fiscal fédéral en harmonisant les règles auxquelles sont soumises les fiducies de revenu et les sociétés. Le marché peut maintenant, à l'instar des sociétés, évaluer les fiducies selon leurs mérites plutôt qu'en fonction des avantages fiscaux qu'elles offrent.

Pour répondre plus précisément à la question du sénateur, et compte tenu de ses observations sur Thomas d'Aquino, parallèlement à leurs travaux de rédaction de la loi, les fonctionnaires du ministère des Finances discutent actuellement avec les représentants de l'industrie des détails des changements proposés et de la transition nécessaire.

Le sénateur Hervieux-Payette : Il y a peut-être pénurie de main- d'œuvre dans certaines régions du pays, mais je peux dire au leader du gouvernement que, dans bien des régions de ma province, le Québec, et ailleurs au Canada, les emplois ne se multiplient pas, ils disparaissent.

Entre-temps, une société dont le siège est au Québec, Bell Canada, semble très ouverte à la privatisation. Elle sera achetée par des investisseurs étrangers qui en vendront les services les plus importants et priveront ainsi le Canada d'une institution prestigieuse.

Que fera le gouvernement pour empêcher cette prise de contrôle indirecte par des investisseurs étrangers et s'assurer que cette entreprise, qui est en fait un signe distinctif du Canada, demeure la propriété d'intérêts canadiens?

Le sénateur LeBreton : Je remercie madame le sénateur de sa question. Je suis sûre que le sénateur Hervieux-Payette comprend très bien qu'il serait inconvenant que moi ou tout autre ministériel commente une activité en cours actuellement sur les marchés. Je m'engage simplement à communiquer son point de vue, tel qu'elle l'a exprimé, à mes collègues.

Le sénateur Hervieux-Payette : Je veux m'assurer que la politique du gouvernement est appliquée comme il se doit. Premièrement, il faudrait tenir des consultations avant de prendre des décisions. Deuxièmement, toutes les politiques devraient viser à garder les bons emplois au Canada et nous permettre de donner notre avis sur les politiques futures.

Le sénateur LeBreton : Le ministre des Finances, le ministre de l'Industrie et d'autres de leurs collègues du Cabinet participent à de vastes consultations auprès de l'industrie et des entreprises. Madame le sénateur sait bien, puisqu'elle a elle-même été ministre, que des décisions de ce genre sont généralement prises après consultation, du moins il faut l'espérer. C'est ce qui s'est produit dans le cas qui nous occupe.

(1400)

L'EXAMEN DU COÛT DES ACQUISITIONS À L'ÉTRANGER

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : Honorables sénateurs, ce sujet ne sera pas nouveau pour le leader du gouvernement et pour l'opposition puisque j'en ai parlé, comme l'a fait mon leader aujourd'hui, le 21 mars, immédiatement après le dépôt du budget du 19 mars. Il s'agit d'un problème assez restreint, qui est difficile à résoudre et fait du tort au secteur privé au Canada, soit la déductibilité de l'intérêt. Je ne donnerai pas d'explication en long et en large puisque le leader du gouvernement au Sénat a très bien compris la question et l'a très bien exposée.

J'ai lu dans la presse aujourd'hui que le ministre a fait savoir qu'il étudiait la question, comme l'a dit madame le leader du gouvernement. Il a déclaré qu'il devrait avoir terminé son examen d'ici deux semaines et qu'une mesure législative devrait être prête d'ici le mois de mai. Puis, nous avons les avis d'un ancien conseiller du ministère des Finances, une personne d'une compétence exceptionnelle bien connue de nombreux comités du Sénat : M. Farber. M. Farber est maintenant à son propre compte et il dit avoir exhorté le gouvernement à reporter l'examen de la question jusqu'à ce qu'elle puisse être étudiée par un nouveau groupe d'experts créé pour faire un examen du droit fiscal international.

Je suis très content d'apprendre que M. Flaherty est en train de changer d'idée au sujet du budget. Tant mieux. Cependant, l'incertitude persiste, ce qui met nettement les entreprises canadiennes qui évoluent sur les marchés mondiaux dans une situation très désavantageuse par rapport à leurs concurrents des États-Unis et d'Europe. J'invite fortement le gouvernement à marquer immédiatement un temps d'arrêt pour revenir à la politique initiale, consistant à autoriser dès maintenant la déductibilité, et ensuite à poursuivre l'examen pour déterminer si cette politique est la plus opportune.

Nous avons déjà vu des situations du genre. Par le passé, des ministres des Finances — c'est certainement le cas de M. Chrétien et très certainement celui de M. Martin — ont effectué des consultations en profondeur avant d'opérer un virage majeur de la politique fiscale. Dans le cas qui nous intéresse, une telle consultation n'a pas eu lieu. Il n'y en a tout simplement pas eu.

Le budget a été déposé. Une erreur a été commise et j'espère que le ministre agira pour la corriger de manière à ce que les entreprises canadiennes ne soient pas désavantagées sur le plan de la concurrence, ce qui mettrait en péril nos emplois, notre réputation, notre crédibilité et la confiance de nos électeurs.

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Honorables sénateurs, depuis notre arrivée au pouvoir, nous avons amélioré la compétitivité du régime fiscal. Par exemple, nous avons réduit les taux d'imposition des sociétés et supprimé l'impôt sur le capital pour les entreprises. La limitation proposée de la déductibilité de l'intérêt aidera à protéger l'assiette fiscale du Canada et résoudra des questions soulevées à de nombreuses reprises par la vérificatrice générale.

Le sénateur n'a pas son pareil pour essayer de mettre des mots dans la bouche des gens. En réponse au sénateur Hervieux-Payette, j'ai dit que, dans le cadre de l'élaboration du projet de loi, y compris des dispositions transitoires, des fonctionnaires étaient en train de discuter avec des représentants de l'industrie au sujet des détails du changement proposé.

Le sénateur Grafstein : Le ministre a dit que le projet de loi serait prêt d'ici le mois de mai. Il reste donc seulement quelques jours. Madame le leader du gouvernement peut-elle nous dire si le projet de loi sera soumis au Parlement le 1er mai ou immédiatement après, de manière à dissiper l'incertitude?

Le sénateur LeBreton : Je n'ai pas l'intention de me prononcer sur l'échéancier du ministre des Finances, mais je vais certainement lui communiquer les inquiétudes du sénateur Grafstein.

LE CONSEIL DU TRÉSOR

LA LOI FÉDÉRALE SUR LA RESPONSABILITÉ—L'ENTRÉE EN VIGUEUR DES DISPOSITIONS RESTANTES

L'honorable Lorna Milne : Honorables sénateurs, 135 jours se sont écoulés depuis que le projet de loi C-2, la prétendue Loi sur la responsabilité, a reçu la sanction royale. Mais, comme dans bien d'autres cas, le gouvernement fait beaucoup de tapage sans nous donner grand-chose de tangible.

Depuis le 12 décembre, quelques dispositions du projet de loi C-2 ont été promulguées, mais de grands pans de cette loi énorme et désordonnée ne sont toujours pas en vigueur. De plus, nombre de structures associées aux nouveaux postes créés par les dispositions déjà promulguées n'ont toujours pas été établies. Quand le gouvernement cessera-t-il de se vanter d'avoir simplement fait adopter la loi sur la responsabilité et quand commencera-t-il à agir en véritable gouvernement qui met les lois en vigueur et respecte ses propres règles?

(1405)

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Comme madame le sénateur le sait, la Loi fédérale sur la responsabilité a reçu la sanction royale le 12 décembre 2006. Nous avons ainsi donné suite à une promesse électorale. Le public canadien est manifestement très satisfait du contenu de cette loi, dont la mise en œuvre est en train de se faire. Certaines dispositions sont entrées en vigueur dès la sanction royale, et nous nous employons, en collaboration avec les ministères et les principaux intéressés, à appliquer les changements prévus dans la loi.

Les dispositions restantes vont entrer en vigueur à mesure que la réglementation nécessaire aura été rédigée, comme je l'ai expliqué précédemment au sénateur Milne. Le mois dernier, nous avons entrepris des consultations au sujet de la nouvelle Loi sur l'enregistrement des lobbyistes, et la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles est entrée en vigueur le 15 avril. De plus, le ministre Toews a annoncé que la Loi sur l'accès à l'information s'appliquerait à d'autres sociétés d'État à compter du 1er septembre prochain.

Le sénateur Milne : Je remercie le leader du gouvernement au Sénat de sa réponse, mais je dois lui répéter que les Canadiens commencent à être las de devoir se contenter de beaux discours. Ils veulent de l'action et du leadership. Ils souhaitent notamment que le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux se retire du dossier et qu'il ordonne qu'aucun contrat ne soit accordé tant que la question n'aura pas été élucidée par une source indépendante. C'est ce que les Canadiens attendent des ministres dans les cas où il y a apparence de conflit d'intérêts.

Parlant de conflit d'intérêts, je signale que cette question occupait une grande place dans le projet de loi C-2. En fait, 52 pages de cette mesure législative portaient là-dessus; la plupart figuraient à l'article 2. Cet article a-t-il été promulgué? À quelle étape le gouvernement en est-il arrivé dans la mise en place de ce régime sur les conflits d'intérêts? Entre-temps, à quel code de conduite les ministres se conforment-ils en attendant la promulgation de l'article 2? Est-ce à la loi antérieure, qui interdisait les conflits d'intérêts apparents ou éventuels ou au code de conduite qui doit être promulgué, qui constitue d'ailleurs un régime nettement plus faible?

Le sénateur LeBreton : Premièrement, à titre de ministre, je peux dire à l'honorable sénateur que je suis fort satisfaite de la conduite de l'ensemble de mes collègues ministres. Ils se conduisent avec le plus haut degré d'intégrité et ils suivent, comme moi, tous les codes présentés par le Bureau du Conseil privé et par l'ancien commissaire à l'éthique.

Pour ce qui est du reste de la question, je le prends en délibéré. Encore une fois, je signale que cela fait 14 mois que nous formons le nouveau gouvernement et que, durant ce temps, les ministres et le gouvernement ont fait preuve d'honnêteté et d'intégrité, ce que les Canadiens reconnaissent d'ailleurs.

LES TRAVAUX PUBLICS ET LES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

L'OCTROI D'UN CONTRAT AU GROUPE CGI INC.—LA POSSIBILITÉ D'UN CONFLIT D'INTÉRÊTS

L'honorable Lorna Milne : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux.

Le gouvernement dont il fait partie a été élu notamment grâce à sa promesse de mettre de l'ordre dans l'appareil gouvernemental, et il a lui-même déclaré le 27 février : « Il est essentiel que la population canadienne ait confiance en l'équité, l'ouverture et la transparence avec lesquelles les activités d'approvisionnement du gouvernement sont réalisées. »

Un nombre croissant de Canadiens et certains des médias nationaux qui ne sont pas connus pour leur sympathie à l'endroit des sénateurs libéraux réclament une enquête sur ce contrat. Ils sont en train de perdre rapidement confiance dans la capacité du ministère de répondre de ses actes. Est-ce que le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux va donner l'exemple à son propre gouvernement et se retirer du comité du Conseil du Trésor chargé d'encadrer l'octroi de ce contrat? Le ministre va-t-il respecter sa propre Loi sur la responsabilité et se récuser de sorte que les Canadiens puissent retrouver le peu de confiance qu'il leur reste dans ce gouvernement vieillissant?

(1410)

L'honorable Michael Fortier (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux) : Honorables sénateurs, j'ai comparu hier devant le Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires de la Chambre des communes et j'ai répondu à plusieurs questions de collègues du sénateur à ce sujet. J'étais accompagné de plusieurs hauts fonctionnaires du ministère, dont le sous-ministre. On a demandé de but en blanc au sous-ministre de commenter la conduite du ministre et de son personnel relativement à l'octroi des contrats. J'invite madame le sénateur à lire ce qu'il a dit. Nous n'avons jamais été mêlés, que ce soit directement ou indirectement, à quelque situation contractuelle que ce soit, comme il se doit, et ce, depuis le début.

Je ne me présente pas comme un exemple; je pense faire ce qu'il se doit. C'est la façon dont le ministère doit fonctionner, ce qui a été confirmé par le sous-ministre qui, soit dit en passant, a été nommé par l'ancien gouvernement libéral.

Le sénateur Milne : Honorables sénateurs, j'ai une question complémentaire. Comme je l'ai déjà dit, nous savons bien que le gouvernement n'a choisi que certains éléments de sa Loi sur la responsabilité dont il se vante tant. Plusieurs des quelques éléments proclamés ne prévoient pas les structures, représentants et titulaires de postes nécessaires pour appliquer la loi. Par un hasard qui fait sans doute l'affaire du ministre, un des éléments oubliés de la Loi sur la responsabilité concerne la création d'un poste d'ombudsman de l'approvisionnement, dont la mission consistera à examiner les pratiques en matière d'approvisionnement et à enquêter sur de possibles conflits d'intérêts.

Par conséquent, le ministre reportera-t-il l'attribution de ce marché jusqu'à ce qu'ait eu lieu la nomination de l'ombudsman de l'approvisionnement, qui se fait attendre depuis très longtemps, et permettra-t-il à la Loi sur la responsabilité de jeter un peu de lumière sur ce sujet trouble?

Le sénateur Fortier : Je remercie le sénateur de sa quatrième question. Si ses collègues de l'autre endroit lui avaient parlé avant qu'elle pose cette question, ils lui auraient dit que le sous-ministre a répondu, hier, à cette même question en disant qu'ils en étaient maintenant à l'étape où ils doivent choisir parmi un petit nombre de candidats. Ils devraient donc nommer quelqu'un bientôt. Des annonces ont paru dans les journaux nationaux — on a retenu les services d'un chasseur de têtes — et plusieurs entrevues ont eu lieu. Le sous-ministre a donné l'assurance que le nom de l'ombudsman serait annoncé sous peu.

À titre d'information pour madame le sénateur, l'ombudsman de l'approvisionnement n'exercera pas les fonctions qu'elle croyait qu'il exercerait. Par exemple, il entendra les plaintes de certains fournisseurs, mais pas ceux qui ont perdu des marchés. Ces derniers auront d'autres recours; ils pourront notamment s'adresser aux divers tribunaux administratifs ou même à la Cour fédérale, mais pas à l'ombudsman de l'approvisionnement. Ce dernier entendra les plaintes d'autres catégories de fournisseurs et fera des recommandations au ministre et au Parlement sur la façon d'améliorer le processus d'approvisionnement. Il ne serait pas nécessairement la bonne personne pour ce que madame le sénateur a en tête.

La bonne nouvelle, toutefois, c'est que cette personne sera nommée sous peu. Madame le sénateur devrait s'en réjouir.

Le sénateur Milne : Le ministre reportera-t-il l'attribution du marché jusqu'à cette nomination?

LES FINANCES

LA LOI SUR LA FAILLITE ET L'INSOLVABILITÉ—LA PRÉSENTATION D'UNE LOI MODIFICATRICE

L'honorable Yoine Goldstein : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. C'est la saison des vivaces, de sorte que je vais poser de nouveau une question sur la Loi sur l'insolvabilité que je pose tous les ans.

On aurait pu croire que les demandes pressantes d'un grand nombre d'intervenants auraient incité le gouvernement à aller de l'avant dans l'adoption de cette loi-cadre de première importance, mais rien n'a bougé encore. Nous savons que le gouvernement cultive un grand mépris pour les tribunaux et les juges qui ne partagent pas son allégeance politique, mais je me permettrai de citer la Cour d'appel de l'Ontario qui, le mois dernier, a déclaré ce qui suit, tel que publié dans le magazine The Lawyers' Weekly, Volume 26 No 48, qui reprend en partie le texte du jugement :

À tout le moins, il faudrait envisager la possibilité de modifier la LFI afin qu'elle soit conforme à l'état actuel de la common law [...]

On dit encore que :

Les juges ont mentionné le rapport de 2003 du Comité sénatorial des banques et du commerce, qui demandait instamment au Parlement de modifier la Loi sur la faillite et l'insolvabilité en tenant compte de l'équité, de l'accessibilité, de la prévisibilité, de la responsabilité, de la coopération, de l'efficience et de l'efficacité.

Là encore, on cite, en partie, la décision de la Cour d'appel de l'Ontario :

La situation dont nous sommes saisis ne tient compte d'aucun de ces principes.

(1415)

Après les intervenants du milieu, ce sont maintenant les tribunaux qui exhortent le gouvernement à aller de l'avant avec la mesure législative qu'il a en main.

Quand donc le gouvernement mettra-t-il de côté sa volonté d'imposer son programme néo-conservateur à la population pour commencer à adopter des mesures législatives dont les Canadiens ont besoin, qu'ils attendent et qu'ils exigent?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Je remercie l'honorable sénateur de sa question. Je sais que les tribunaux prient actuellement le gouvernement d'accélérer le rythme dans ce dossier. Les honorables sénateurs savent très bien qu'il s'agit d'un projet de loi qui comporte des difficultés, car il nous posait déjà des problèmes pendant la législature précédente. Les ministres Blackburn et Bernier, en collaboration avec leurs fonctionnaires respectifs, s'efforcent en ce moment même de rédiger ce projet de loi. Cette fois, ils tiennent à le faire correctement.

Je comptais présenter mes excuses au sénateur Goldstein pour avoir tant tardé à lui donner une réponse appropriée, jusqu'à ce qu'il parvienne à la dernière partie de sa question, qui était inutile, à mon avis. D'abord, un « gouvernement néo-conservateur » ne s'attaque pas à des questions comme le règlement du dossier des pensionnats autochtones; un gouvernement néo-conservateur ne règle pas le dossier des victimes de l'hépatite C ni ne présente des excuses à l'égard des Chinois victimes de la taxe d'entrée. Toutes ces questions auraient dû être réglées par le gouvernement de l'honorable sénateur, qui y a été confronté, et non par le nôtre. Si c'est ce qu'on entend par « néoconservateur », je suis très fière de cette appellation.

Le sénateur Goldstein : Honorables sénateurs, ma question demeure. Quand le gouvernement va-t-il présenter ce projet de loi, dont j'ai pris connaissance et qui existe? Le gouvernement n'a qu'à le présenter. Quand le fera-t-il?

Le sénateur LeBreton : Dès que possible, sénateur Goldstein.

Le sénateur Goldstein : Que veut dire « dès que possible »?

Le sénateur LeBreton : Exactement cela : dès que possible.

L'ENVIRONNEMENT

LE PROTOCOLE DE KYOTO—LA POLITIQUE SUR LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES

L'honorable Grant Mitchell : Honorables sénateurs, le défaitisme et la négativité dont le gouvernement fait preuve dans le débat sur le Protocole de Kyoto ne cessent de m'étonner. On dirait qu'il n'a aucune vision des possibilités que le Protocole de Kyoto, appliqué convenablement, offre pour l'économie, pour la qualité de la vie et pour notre rôle de chef de file dans le monde.

Madame le leader du gouvernement au Sénat aurait-elle l'obligeance de nous dire si les conservateurs sont embourbés dans cette négativité et ce défaitisme parce qu'ils n'arrivent tout simplement pas à comprendre que les Canadiens sont aptes à relever des défis de taille, ou parce qu'elle sait que son gouvernement est tout simplement incapable de montrer aux Canadiens comment les relever?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Si les honorables sénateurs veulent un exemple vivant d'une personne embourbée dans la négativité, ils devraient regarder dans le miroir du sénateur Mitchell. Le fait est que le ministre Baird annoncera demain le plan du gouvernement; il s'agira du premier plan de ce genre jamais offert par un gouvernement au Canada. Nous avons la conviction que ce plan sera équitable, raisonnable et équilibré et qu'il s'attaquera aux préoccupations liées à l'environnement et aux industries touchées.

Le sénateur Mitchell : Pourquoi le gouvernement est-il tout simplement incapable de comprendre que les chefs d'entreprises canadiennes sont capables de prendre les mesures requises en réponse au Protocole de Kyoto? Par exemple, l'industrie forestière canadienne ne fait pas que respecter ses obligations à l'égard du Protocole de Kyoto; elle a déjà réalisé sept fois ses objectifs, cinq ans avant 2012.

(1420)

Le sénateur LeBreton : Nous comprenons et nous avons un plan. Comme le ministre Baird l'a si justement fait remarquer lors de sa comparution devant le comité sénatorial, la semaine dernière — et comme l'ont également signalé de nombreux experts indépendants — le gouvernement précédent avait calculé le coût du Protocole de Kyoto, et c'est peut-être la raison pour laquelle il n'a jamais rien fait pour le mettre en œuvre.

DÉPÔT DE LA RÉPONSE À UNE QUESTION INSCRITE AU FEUILLETON

LE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA

L'honorable David Tkachuk (leader adjoint suppléant du gouvernement) dépose la réponse à la question no 28 inscrite au Feuilleton par le sénateur Callbeck.


LA LOI ÉLECTORALE DU CANADA

PROJET DE LOI MODIFICATIF—MESSAGE DES COMMUNES—REJET DE L'AMENDEMENT DU SÉNAT

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur d'annoncer que j'ai reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-16, Loi modifiant la Loi électorale du Canada, accompagné d'un message informant le Sénat qu'elle rejette l'amendement qu'il a apporté au projet de loi.

Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce message?

(Sur la motion du sénateur Tkachuk, l'étude du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

RECOURS AU RÈGLEMENT

L'honorable Tommy Banks : Honorables sénateurs, je voudrais faire un recours au Règlement. Je m'en suis rappelé quand le sénateur Stratton m'a questionné sur le budget du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense. Il a dit que ce comité comptait actuellement six membres. J'ai répondu que je croyais qu'il y en avait en fait neuf, car le Sénat a déterminé que ce comité devait être composé de neuf membres, comme le prévoit le Règlement du Sénat.

Ce malentendu s'est produit parce que trois membres du comité, à savoir les sénateurs Tkachuk, Meighen et St. Germain, n'ont pas participé aux réunions du comité depuis le 27 février.

Le recours au Règlement porte sur les paragraphes 85(3) et 85(4) et le paragraphe 85(2) aussi. D'après le paragraphe 85(2), au début de chaque session, le Comité de sélection fait des recommandations à propos de la composition du comité. Le Sénat accepte ensuite la recommandation — en tout cas, il l'a acceptée en l'occurrence — et il désigne les membres du comité.

En vertu du paragraphe 85(3), ces membres « demeurent en fonction [...] jusqu'à la fin de la session pendant laquelle ils sont désignés ».

(1425)

Le paragraphe 85(4) prévoit l'apport de changements à la composition du comité par le leader du gouvernement ou le leader de l'opposition et détermine les moyens en vertu desquels ces changements peuvent être effectués.

Le point le moins important de mon rappel au Règlement porte sur l'avis de changement à la composition d'un comité qui nous a été transmis et qui précise que, conformément au paragraphe 86(4) du Règlement, avis est donné des changements apportés à la composition du comité suivant.

Honorables sénateurs, il n'y a pas de paragraphe 86(4). Ce paragraphe n'existe pas, l'avis est donc erroné. L'avis précise ensuite que le comité visé est le Comité permanent de la défense nationale et de la sécurité. Ce n'est pas le nom exact du comité, c'est là un détail mineur. Je suppose qu'il s'agit d'une simple erreur typographique. Cependant, on peut ensuite lire que les sénateurs touchés sont le sénateur Tkachuk, le sénateur Meighen et le sénateur St. Germain et qu'il y aurait des remplaçants.

Honorables sénateurs, je crois qu'au paragraphe 85(4), le changement dont il est question ne concerne pas le nombre de membres du comité en question, mais bien les membres du comité. Il suppose, j'imagine — et là est la question — qu'il existe une obligation de la part du leader de l'opposition ou du leader du gouvernement, après qu'un changement a été apporté à la composition d'un comité, de remplacer dans un délai raisonnable tout membre retiré du comité.

Le Sénat a établi que le comité compte neuf membres. À l'heure actuelle, nous sommes six; j'ai l'honneur d'être un de ces membres. Les travaux du comité vont bon train. Tous les membres du comité aimeraient mieux que neuf membres assistent aux réunions qui se tiennent les lundis. Je sais qu'ils préféreraient aussi que ces membres soient le sénateur Tkachuk, le sénateur Meighen et le sénateur St. Germain.

Le principal point, à part les erreurs typographiques contenues dans mon recours au Règlement, est de déterminer si, après avoir retiré un membre d'un comité — si c'est bien ce qui s'est produit — le leader de l'opposition ou du gouvernement a l'obligation de nommer un remplaçant pour que le comité compte le nombre de membres voulu selon ce que je crois être un ordre du Sénat. Dans le cas du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, il s'agit de neuf membres. C'est l'objet de mon recours au Règlement.

L'honorable Colin Kenny : Honorables sénateurs, à la suite des commentaires du sénateur Banks, puisqu'un ordre du Sénat fait suite au rapport du Comité de sélection, cela ne devrait-il pas nous porter à croire que lorsqu'un membre d'un comité est remplacé, il s'agit d'une situation temporaire — à moins que ce remplacement ne soit causé par une maladie prolongée, un décès ou une démission — et qu'une fois la situation revenue à la normale, cet ordre du Sénat ayant créé le comité devrait s'appliquer et les membres nommés à l'origine devraient revenir au comité?

L'honorable Anne C. Cools : Honorables sénateurs, j'aimerais faire part de mon appui au recours au Règlement soulevé par le sénateur Banks et appuyé par le sénateur Kenny.

Je crois que bon nombre de mes collègues savent que j'ai demandé à plusieurs reprises au cours des dernières années des précisions sur la signification de ces règles. Nous pourrions peut-être commencer par être plus attentifs lorsque nous citons les règles pertinentes. Je commencerai par le commencement, c'est-à-dire par le fait que la liste des membres d'un comité, autrement dit la composition du comité, la liste de ses membres et le nom de chacun des sénateurs qui en font partie, relève de la décision de l'ensemble des sénateurs.

Le Comité de sélection fait des recommandations au Sénat. Si, à la suite d'un vote auquel tous les sénateurs ont participé, le Sénat accepte ces recommandations, celles-ci constituent alors un ordre du Sénat. Honorables sénateurs, j'aimerais préciser très clairement qu'il n'y a aucune autorité sur terre qui peut abroger ou transgresser un ordre du Sénat. Tous les sénateurs sont liés par cet ordre du Sénat, et les leaders des partis à plus forte raison, notamment les leaders du gouvernement, puisque le paragraphe 85(4) du Règlement leur accorde le privilège particulier de faire des modifications avec l'accord des sénateurs concernés. Les paragraphes 85(3) et 85(4) du Règlement interdisent au Sénat de contrevenir à ses propres règles — ses propres ordres. Le Sénat ne déléguerait pas à un leader un pouvoir qui aurait l'effet d'aller à l'encontre de ses propres ordres.

(1430)

Honorables sénateurs, je n'ai pas eu le temps de me préparer pour parler de ce sujet. Voici ce qui est indiqué au paragraphe 85(3) du Règlement du Sénat :

Sous réserve du paragraphe (4) ci-dessous, les sénateurs désignés aux termes du présent article demeurent en fonction, lorsque leur désignation est confirmée par le Sénat, jusqu'à la fin de la session pendant laquelle ils sont désignés.

On ne peut contrevenir à cette règle. Lorsque les leaders du Sénat prétendent avoir le pouvoir de le faire, ils tiennent des propos fallacieux. Je ne crois pas que de telles allégations et de tels gestes pourraient être faits et posés avec une telle effronterie où que ce soit en ce bas monde, sauf en cette enceinte. Cela me trouble beaucoup.

Les sénateurs devraient savoir que le paragraphe 85(4) du Règlement n'autorise personne à violer les ordres du Sénat. Voici ce que précise le paragraphe 85(4) :

Sauf dans le cas prévu au paragraphe (2.1) ci-dessus et sous réserve du paragraphe (5) ci-dessous, tout changement à la composition d'un comité peut s'effectuer sur avis déposé auprès du greffier du Sénat, qui voit à ce que le changement figure aux Journaux du Sénat.

Encore une fois, le Règlement est clair. Il est question d'un « changement », c'est-à-dire d'une modification ou d'une substitution, et il n'est indiqué nulle part que les leaders peuvent apporter un tel changement. Le Règlement stipule que le changement « peut s'effectuer sur avis déposé auprès du greffier du Sénat ». L'article 85 décrit le processus applicable, soit la présentation d'un formulaire dûment rempli au greffier du Sénat. En fait, cela se fait auprès des greffiers du comité. En effet, récemment, j'ai demandé au greffier du Sénat de me fournir certains de ces avis, mais je n'ai pas pu les obtenir. J'ai plutôt dû m'adresser directement aux greffiers du comité.

Il est important que les sénateurs comprennent la nature et la source des pouvoirs que les leaders du Sénat ont usurpés et se sont approprié pour pouvoir faire ces changements de façon arbitraire, unilatérale et sans consultation ni discussion avec les autres sénateurs, en agissant de manière effrontée et éhontée. Dieu sait que je n'accepterai pas de sitôt de tels gestes. Advienne que pourra.

Honorables sénateurs, l'objet du paragraphe 85(4) du Règlement est simple : permettre au système de fonctionner. Si certains sénateurs sont malades et ne peuvent pas assister à des réunions de comité, le Règlement prévoit qu'il peut y avoir un remplacement sans que le Sénat au complet participe à la décision. J'ai été étonnée de découvrir que, soudainement, après avoir compris pendant des années la nature du droit commun et du droit du Parlement, certains sénateurs ne saisissaient plus la signification du Règlement. Je n'arrive pas à comprendre d'où vient cette ignorance soudaine qui s'abat sur nous.

Le Règlement est plus qu'un simple ensemble de rouages. Il est censé coexister non seulement avec les principes qui régissent le Sénat, mais aussi avec le droit commun. Un ancien principe du droit commun veut que toute personne lésée ou contestée ait le droit de réagir. Cette règle, qui cadre avec l'ensemble des règles du Parlement et celles du droit commun, repose sur le fait que les sénateurs doivent approuver le remplacement; c'est absolument vital. De façon générale, il devrait y avoir des consultations.

Je soutiens catégoriquement qu'il n'y a pas de place dans le Règlement du Sénat pour l'arbitraire ni pour le mauvais traitement des sénateurs ni pour la violation de la liberté et des privilèges des sénateurs de participer aux travaux du Sénat et de ses comités. Certains sénateurs se sont peut-être approprié ces pouvoirs et certains souhaitent peut-être ne pas créer d'histoires ni de commotion, mais ils n'ont pas ce genre de pouvoir, car personne n'a le pouvoir de maltraiter.

Nos règles sont issues de la tradition britannique. Il n'existe pas de pouvoir de maltraiter, ni pour les familles ni pour les patrons ou les supérieurs. Il n'existe aucun pouvoir ni aucun droit de maltraiter un être humain. Il fut un temps où quiconque maltraitait un parlementaire le faisait en tremblant. À l'époque où les parlements et leurs membres se prenaient au sérieux et où les gouvernements prenaient les parlementaires au sérieux, ce n'est pas sans risque qu'on pointait l'un d'eux du doigt, qu'on levait la main sur lui ou qu'on lui manquait de respect. À l'époque, les parlements ne faisaient pas dans la dentelle, et ceux qui s'en prenaient à des parlementaires se voyaient destitués ou assujettis à d'autres mesures sévères.

Je vais maintenant parler des comités en soi, du sénateur Segal et des autres sénateurs. Honorables sénateurs, les membres des comités sont nommés par le Sénat, mais les présidents et les vice-présidents des comités sont désignés par les comités. Ne confondons pas les deux et n'essayons pas de prétendre que les deux sont des synonymes. Le Règlement du Sénat ne contient aucune disposition permettant aux dirigeants de revendiquer le pouvoir de changer les présidents et les vice-présidents de manière brutale et soudaine, sans préavis, comme ce que nous avons vu.

Honorables sénateurs, essayons de bien comprendre ce que je suis en train de dire. Les vice-présidents et les présidents sont désignés et élus par un vote de tous les membres d'un comité.

(1440)

Aucun leader ne peut avoir le privilège d'exiger la démission d'un président ou d'un vice-président de comité, puisque ceux-ci sont nommés par le comité. D'ailleurs, ce qui s'est passé au Comité des affaires étrangères est très intéressant. Les démissions peuvent être acceptées ou rejetées, mais une chose est on ne peut plus claire : les échanges qui ont eu lieu à propos du sénateur Hugh Segal et, si je ne me trompe pas, du sénateur Michael Meighen, bien que je ne m'en souvienne pas très bien, et de leurs lettres de démission étaient très intéressants, car on y exprimait un certain regret et une certaine tristesse. Cependant, le langage employé, le style et les tournures de phrases indiquent très clairement qu'on exerçait d'énormes pressions pour qu'ils démissionnent de leur poste à la direction du comité.

Honorables sénateurs, dans mon cas, personne ne m'a demandé de démissionner. Je n'ai pas écrit de lettre de démission. Je n'ai pas donné ma démission. Quelqu'un l'a tout simplement fait pour moi, et je laisse aux gens le soin de comprendre. Les faits sont là. Quelqu'un m'a tout simplement demandé ce qu'il en était de mon caucus. J'ai moins d'influence que quiconque à cet égard. Le comité a cru quelqu'un sur parole. Voilà ce qu'il a fait.

Je vais vous dire quelque chose, honorables sénateurs. Personne ne peut proposer la démission de qui que ce soit. Pouvez-vous imaginer que nous en arrivions un jour au point où quelqu'un pourrait pénétrer dans cette enceinte et dire : « Ce sénateur présente sa démission », et tout le monde le croirait sans poser de question? C'est inconcevable. On n'a même pas besoin de suivre un cours d'introduction au droit pour comprendre cela. Il suffit simplement de connaître les principes de base de la common law.

Honorables sénateurs, l'heure est venue. Si le moindre doute subsiste quant à la signification de ces règles, il faut les clarifier parce que, en leur absence, tôt ou tard, un parlementaire intentera des poursuites pour préciser la nature de l'injustice dont il fait l'objet au nom de la direction d'un parti. Si le Sénat n'est pas disposé à résoudre ces questions équitablement, tôt ou tard, quelqu'un d'autre le fera. Je le sais, parce que j'ai convaincu assez de parlementaires et assez de personnes lésées de ne pas intenter de poursuites. J'ai passé beaucoup de temps à faire ce genre de chose.

Quoi qu'il en soit, pour appuyer le rappel au Règlement qu'a fait le sénateur Banks, j'essaie de ne pas trop parler de moi, car je trouve toute cette affaire extrêmement humiliante et honteuse. Lorsqu'un président ou un vice-président démissionne d'un comité, ce dernier a toujours le choix d'accepter ou non cette démission. C'est semblable à ce qui se passe lorsqu'un ministre démissionne : le représentant de Sa Majesté et le premier ministre ont le choix d'accepter ou non la démission. Cela arrive et, à une époque, cela se produisait fréquemment. Cette affaire est tellement vile, à mon avis,

Honorables sénateurs, ceux qui en doutent peuvent examiner le compte rendu. Le compte rendu du Comité sénatorial permanent des finances nationales de la fin de septembre dernier montre très clairement que quelqu'un a assisté à une réunion, a annoncé que madame le sénateur Cools avait décidé de renoncer à ses fonctions et a immédiatement présenté une motion visant à élire un nouveau vice-président. C'était tout. Honorables sénateurs, j'irai jusqu'à dire que cette motion était nulle. Je dirais que c'est une motion irrégulière qui a été adoptée. Bien sûr, il y a matière à soulever la question de privilège. Il y avait plus que cela. Ces temps-ci, on traite des sénateurs adultes comme de petits enfants qu'on retire de comités et qu'on réintègre à des comités sans leur consentement et à leur insu. Il faut corriger cette situation.

Il est question d'un changement à la composition d'un comité et, tout à coup, tout le monde en perd son latin. C'est extrêmement étrange. On dit ici qu'un changement peut être effectué. Ce changement signifie qu'il y a substitution temporaire, avec l'accord du sénateur, car aucun ordre du Sénat ne tolérera ni n'acceptera une violation des droits de ses propres membres, car le premier ordre du Sénat consiste à préserver les droits et les privilèges de tous les sénateurs.

Honorables sénateurs, il s'agit là d'un signe du déclin ou de l'effritement du Sénat. Certaines de ces choses me choquent profondément. Je me trouvais ici, il y a quelques mois, alors qu'une conférence de presse avait lieu à l'extérieur du Sénat, pendant que la masse était sur la table. Certaines personnes n'ont peut-être plus de respect pour la masse qui se trouve sur la table, mais je peux dire qu'elle possède un caractère mystique, quasi spirituel, et on m'a appris que, lorsque la masse est sur la table, elle commande et exige une certaine dose de respect ou de déférence. Pourtant, certaines personnes, notamment le premier ministre, ont tenu une conférence de presse directement à l'extérieur du Sénat, et il a dit quelque chose comme : « Je maudis le Sénat tous les matins. » Je n'ai pas ses paroles exactes sous les yeux, mais il disait à peu près ceci : « Tous les matins, au réveil, le Sénat m'agace; je maudis le Sénat. »

Honorables sénateurs, je ne comprends pas. Nous pouvons fonctionner dans le cadre d'un système en faisant preuve d'un certain respect à l'égard du processus, du système qui nous rend solidaires, des principes et de tous ces gens qui sont morts pour donner naissance à ces systèmes. Nous devrions peut-être faire preuve de respect à leur égard et ne pas chercher refuge dans l'assertion puérile et infantile selon laquelle un leader peut faire tout ce que bon lui semble. Dans les systèmes que nous connaissons, les leaders traitent moins bien les parlementaires qu'un serviteur n'a jamais été traité, à ma connaissance. Selon l'éducation que j'ai reçue, il convient de bien traiter ceux qui nous servent bien, et j'ai grandi dans une société où il était courant d'avoir des serviteurs. J'ai grandi avec eux, et la première chose que l'on m'a apprise dans mon enfance, c'est qu'il convient de respecter les personnes qui nous aident et qui nous servent.

Honorables sénateurs, il importe que le Sénat dans son ensemble se penche sur l'état des relations humaines en politique et au sein des caucus des partis. J'ai entendu dire, il y a un certain nombre de semaines, que cette question relève du caucus. Tout d'abord, ce n'est pas le cas. Ensuite, les caucus sont des sociétés secrètes; tout le monde semble l'oublier. Ce sont des sociétés secrètes qui ne sont régies par aucun processus officiel. Leurs délibérations ne sont consignées nulle part. Comme les caucus sont des sociétés secrètes qui existent dans une sorte de zone grise, pratiquement un vide juridique, il est d'autant plus important que les relations internes des caucus soient gérées de façon correcte et sérieuse, pas nécessairement avec compassion, mais avec adresse et circonspection. Tout le fonctionnement d'une telle société secrète doit reposer sur des principes moraux, des convictions et une direction intelligente, plutôt que sur la force brute.

(1450)

Honorables sénateurs, j'ai grandi dans un contexte très différent de celui où bon nombre d'entre vous ont grandi. Il y a quelques semaines à peine, je parlais de l'influence qu'a eue sur ma vie d'enfant la personnalité de William Wilberforce. Cette influence a été profonde. Lorsque nous, les non-Blancs, envisagions des règles et des systèmes, nous étions incités à en mesurer la valeur à l'aulne de leur capacité d'assurer une société égalitaire et ce que nous appelions à l'époque une « société libérale ». Nous devrions peut- être nous pencher sur certains de ces aspects.

Toute cette question est fort troublante. Je n'accepte pas que les caucus puissent continuer à fonctionner selon le principe qu'ils peuvent bousculer et malmener leurs membres à volonté, sans que ces derniers n'aient d'autre choix que d'endurer de telles vexations ou de quitter le caucus. Le temps est venu d'examiner cette question dans son ensemble. J'espère que Son Honneur le fera très sérieusement, puisque les principes fondamentaux du Parlement et les ordres du Sénat ne sont pas censés être considérés de façon si arbitraire ou cavalière.

Honorables sénateurs, les caucus furent une grande innovation dans l'évolution des partis. Les partis sont des structures informelles, ce qui signifie, à plus forte raison, que leurs méthodes de fonctionnement devraient être conformes à des principes pouvant être clairement et rapidement reconnus, et universellement acceptés.

J'espère ne pas donner l'impression de me plaindre, mais honorables sénateurs, je suis le premier sénateur de couleur noire au Canada et la première femme à occuper un tel poste en Amérique du Nord. Je jouis d'un grand soutien du public dans ce pays. J'ai été classée 72e dans le cadre du concours de 2004 de la CBC pour désigner les 100 plus grands Canadiens et j'étais le seul parlementaire sur cette liste. Les 35 premières personnes étaient décédées, et je me suis classée au 72e rang.

En outre, lorsque le Toronto Sun a effectué son sondage sur les dix femmes les plus importantes en 2004, j'ai gagné le concours haut la main. À ce qu'il paraît, j'ai recueilli plus de la moitié de toutes les voix. Je pense que c'était l'année dernière, en 2006, que le Toronto Sun a dressé une liste des 50 Canadiens qui ont apporté une contribution notable et, encore une fois, j'étais sur la liste et j'étais encore une fois le seul parlementaire à y figurer.

Honorables sénateurs, si le soutien politique compte, si l'intelligence compte, si la reconnaissance publique compte, je suis certainement apte à siéger à des comités sénatoriaux, y compris en qualité de présidente ou de vice-présidente. Honorables sénateurs, il est parfois très difficile de ne pas voir ces questions sous un angle racial.

[Français]

L'honorable Céline Hervieux-Payette (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, je pense que la question qui a été d'abord soulevée par mes collègues, les sénateurs Banks et Kenny, ainsi que les propos de madame le sénateur Cools, nous obligent à une réflexion sur l'article 85 du Règlement. Il me semble que cet article ne prévoyait que les nominations et la sélection des membres de comités au début d'une session. La procédure pour changer la composition de ces comités en cours de session n'est certainement pas claire.

J'ai été moi-même confrontée à cette situation. Le caucus libéral est très mal à l'aise face à cette façon de procéder. Madame le sénateur Cools a tout à fait raison de dire que c'est le Sénat qui confirme la composition des comités. Cette procédure ne relève pas des leaders, mais de cette Chambre, qui agrée à ces comités en début de session et souscrit aux membres qui y sont nommés. Les comités désignent les présidents et les vice-présidents, en consultation avec le leadership, j'en conviens.

Toutefois, un des principaux soucis de mon équipe est que nous avons des gens qui ont les compétences nécessaires pour consacrer temps et énergie aux travaux des comités. Lorsqu'un comité a commencé ses travaux, il est toujours difficile de penser qu'on peut, à pied levé, remplacer un collègue pour quelque raison que ce soit.

Son Honneur le Président sait que, à l'occasion, j'envoie des lettres pour dire que, cette journée, nous allons modifier le mandat d'une personne parce qu'elle est absente; des avis sont donnés. Pour ce qui est des avis pour revenir à la procédure originale de nomination de début de session, à mon avis, cette question demeure très obscure et ne me satisfait pas.

J'en ai discuté avec mes collègues. Il serait souhaitable que le Comité permanent du Règlement ou le personnel de Son Honneur puissent nous aider dans l'interprétation et, peut-être, dans la modification de notre Règlement pour nous permettre, en cours de session, d'adopter une façon de procéder plus claire. Je ne dis pas que, à l'heure actuelle, il n'y a pas une certaine façon sous-jacente de procéder, mais je pense qu'elle n'est pas assez claire, surtout quand plusieurs personnes sont invitées à quitter leur poste en cours de mandat.

Son Honneur le Président pourrait-il nous éclairer sur cette question? Le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement pourrait étudier cette question. C'est une question très importante. Je souscris aux propos du sénateur Cools. Elle dit qu'on ne peut prétendre qu'un sénateur a démissionné d'un comité quand cette personne ne siège pas à un comité. Je pense qu'il n'est pas nécessaire de faire un long cours de droit pour être d'accord avec cela.

Je pense qu'on doit réparer les torts qui ont été faits. Nous devons voir comment nous pourrons, à l'avenir, éviter ce genre de questions qui ne contribuent pas à la qualité des travaux de cette Chambre. Cette façon de faire empêche des personnes compétentes et intéressées à servir dans des comités. Il faut que tout ce processus de gestion des travaux de notre Sénat soit clair. On sait que, en début de session, les sénateurs sont invités à faire des choix. Ils représentent des intérêts particuliers, assistent aux séances des comités et décident dans quel comité ils peuvent le mieux servir.

Je pense donc que cette règle, qui n'est pas écrite, a toujours été respectée par les leaders. Le Comité de sélection du Sénat fait rapport au Sénat, qui adopte ce rapport. Donc, les membres des comités sont nommés par le Sénat. Je pense que nous devons réviser cette procédure. J'invite Son Honneur le Président à nous faire part de ses commentaires pour voir comment nous pourrions résoudre ce dilemme.

[Traduction]

L'honorable David Tkachuk (leader adjoint suppléant du gouvernement) : Tout ceci à propos de la composition d'un comité. Je suis l'une des personnes visées. Cela n'a pas tant changé ma vie, que je sache, mais c'est néanmoins une question importante. Venons-en à l'essentiel.

Sénateur Banks, nous savons que le comité compte neuf membres, mais qu'il n'y en a que six actuellement parce que trois d'entre eux ont été suspendus. Donc, honorables sénateurs, ce rappel au Règlement n'est pas fondé. Le paragraphe 85(4) du Règlement dit clairement qu'un changement peut être fait sur avis. Il ne précise pas la durée pendant laquelle le changement s'appliquera. C'est une exception clairement énoncée dans le Règlement.

(1500)

Honorables sénateurs, l'article 85 autorise clairement l'apport de changements à la composition du comité après que le Comité de sélection ait présenté son rapport. Des changements peuvent être apportés de la manière prévue au paragraphe 85(5), soit sur un avis signé par le leader ou un sénateur désigné par le leader, généralement le whip. Le paragraphe 85(4) dit qu'il doit s'agir de changements à la composition du comité. Il n'y a aucune restriction quant à la nature du changement ou à sa durée. Dans le cas présent, le changement consistait à donner avis que le nom du remplaçant allait être bientôt connu. Autrement dit, il n'avait pas encore été déterminé. C'était en fait un moyen d'attirer l'attention sur le fait qu'un comité sénatorial avait décidé d'exclure complètement les représentants du gouvernement du sous-comité.

Le commentaire 773 de la 6e édition de Beauchesne semble appuyer le paragraphe 85(4) :

Il est toujours possible de modifier la composition d'un comité législatif ou spécial, conformément au paragraphe 114(3) du Règlement, sur dépôt d'un avis signé par le whip d'un parti reconnu.

En outre, dans la 23e édition d'Erskine May, on lit, au sujet de la Chambre des lords, que la modification de la composition, même celle de comités constitués par Règlement, lequel exige que la composition reste la même durant le reste de la législature en cours, n'est pas rare.

Je demande à la présidence de juger que ce rappel au Règlement n'est pas fondé et d'accepter notre argument, qui s'énonce comme suit : la composition des comités peut être modifiée; il existe un processus pour modifier la composition des comités; nous l'avons respecté; et nous avons agi correctement.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, conformément au paragraphe 18(3) du Règlement, j'ai recueilli l'avis de suffisamment de sénateurs sur ce rappel au Règlement. Je songeais à rendre ma décision là-dessus immédiatement parce que je connais assez bien la question, mais je me suis alors souvenu de l'une des six inscriptions qu'on trouve dans les appartements de la présidence Nihil ordinatum est quod praecipitatur et properat, qui signifie que tout ce qui est fait à la hâte risque d'être mal fait. Cet adage nous vient des Sénécas.

[Français]

Honorables sénateurs, comme on le dit en français, la précipitation exclut la mesure.

[Traduction]

Cela dit, je prends la question en délibéré et je rendrai ma décision en temps opportun.


ORDRE DU JOUR

LE CODE CRIMINEL

PROJET DE LOI MODIFICATIF—TROISIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable J. Trevor Eyton propose que le projet de loi C-26, Loi modifiant le Code criminel (taux d'intérêt criminel), soit lu pour la troisième fois.

— Honorables sénateurs, j'interviens aujourd'hui au sujet du projet de loi C-26, Loi modifiant le Code criminel (taux d'intérêt criminel). J'estime que cette mesure législative qui porte sur l'industrie du prêt sur salaire propose une formule pratique et efficace pour réglementer un marché qui, jusqu'ici, n'était généralement assujetti à aucune réglementation. Plus important encore, le projet de loi C-26 ouvre la voie à la protection des consommateurs qui traitent avec des entreprises de prêt sur salaire.

Aucune loi fédérale ne se penche sur la plupart des questions liées aux prêts sur salaire. Les entreprises de prêt sur salaire ne sont pas des institutions de dépôt. Les lois fédérales et celles qui s'appliquent aux institutions financières courantes ne s'appliquent pas aux prêteurs sur salaire et, de ce fait, comme ils font partie d'une industrie relativement récente, ils tombent dans un vide législatif. Quand les choses se gâtent pour les consommateurs, il n'est pas clair à qui ils doivent s'adresser.

Il ne faut pas se leurrer; nous avons vu que les choses peuvent mal tourner pour les emprunteurs sur salaire. Les prêts sur salaire coûtent très cher, une fois qu'on calcule le taux d'intérêt et les frais additionnels, notamment les frais de demande, de traitement, de commodité et autres frais divers. Dans certains cas, les pratiques de prêt peuvent être abusives. Parfois, l'emprunteur ne comprend pas les conséquences financières de son emprunt, parfois, il est incapable de rembourser dans le délai prescrit et, parfois, le prêteur impute des frais additionnels de refinancement pour étaler le règlement de l'emprunt sur plusieurs périodes de paie successives.

Nombre de prêteurs sur salaire fournissent peu d'explications concernant les frais qu'ils réclament. Souvent, ils utilisent des termes descriptifs ambigus comme « frais de vérification » ou « frais de financement » et d'autres expressions du genre. Parfois encore, ils n'indiquent pas tous les frais. Compte tenu de tout cela, les consommateurs ne savent pas exactement à quoi s'en tenir, alors que les prêteurs sur salaire ont apparemment le champ libre pour agir à leur guise.

Pendant ce temps, les provinces ont le sentiment d'être devant un obstacle qui les empêche de réglementer efficacement un service financier qui est manifestement recherché par les consommateurs. Les prêts sur salaire sont populaires; des millions de Canadiens y ont recours. Par exemple, le taux d'intérêt dépassant la limite de 60 p. 100 établie par l'article 347 du Code criminel, les prêts sont considérés comme des actes criminels, ce qui est critiquable. Compte tenu de cette illégalité, les autorités réglementaires ne peuvent pas intervenir de quelque façon que ce soit pour réduire les coûts, de manière à ce que les consommateurs puissent obtenir ces prêts. Grâce au projet de loi C-26, qui est le fruit de cinq années de consultations auxquelles ont pris part le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires, on souhaite aplanir cette difficulté. Le projet de loi prévoit une dérogation spéciale concernant l'article 347, de sorte que les provinces et les territoires pourront réglementer efficacement le secteur en établissant des règles claires et acceptables. Cette dérogation est accordée comme contrepartie à l'établissement de régimes réglementaires qui stabilisent le marché et le rendent prévisible.

Permettez-moi de dissiper tout malentendu : le gouvernement n'est pas en train d'imposer au secteur une loi dont celui-ci ne voudrait pas. En effet, les prêteurs sur salaire sont en général favorables au projet de loi C-26. Le secteur admet lui-même qu'un cadre réglementaire est nécessaire pour que la concurrence soit équitable entre les prêteurs. En outre, de vastes consultations ont eu lieu avec la participation du gouvernement fédéral, des provinces, des territoires et des acteurs du milieu représentés par le Comité des mesures en matière de consommation. Ce comité a été créé conformément au chapitre 8 de l'Accord sur le commerce intérieur. Il a notamment pour mandat de fournir aux gouvernements un forum où ils peuvent discuter de questions concernant les consommateurs.

Le Comité des mesures en matière de consommation a formé un groupe de travail chargé d'examiner le marché des petits services de crédit offerts aux consommateurs. Depuis sa création, le groupe de travail s'est surtout employé à étudier le fonctionnement du secteur des prêts sur salaire. Il a examiné le secteur en profondeur. Il a effectué à deux reprises des consultations publiques auxquelles entreprises, défenseurs des droits des consommateurs et universitaires ont été invités à participer. Il a aussi organisé des tables rondes avec les acteurs du milieu.

Le résultat de tout ce travail est le projet de loi C-26. Celui-ci prépare le terrain pour que les provinces puissent établir des régimes réglementaires capables de stabiliser le marché et de le rendre prévisible. Certaines provinces sont d'ailleurs déjà à l'œuvre pour arriver à cet objectif.

Par exemple, le Manitoba a déjà adopté une loi relative aux prêts sur salaire. En vertu de cette loi, les entreprises devront se conformer au cadre réglementaire exhaustif de la province. Elles devront détenir un permis et verser un cautionnement. La Régie des services publics du Manitoba établira le taux d'intérêt maximal que les prêteurs pourront exiger. Il sera interdit de facturer de nouveaux frais lors du renouvellement, de la prolongation ou du remplacement d'un prêt, à moins que ces frais n'aient été autorisés par la régie. Il sera interdit de donner en garantie un salaire à venir ou une automobile. Les consommateurs disposeront d'une période de 48 heures pour résilier un emprunt.

En outre, la loi manitobaine permet à l'Office de la protection du consommateur de cette province de visiter les entreprises détenant un permis et de faire des copies de leurs dossiers. L'office pourra ainsi avoir accès aux entreprises qu'on soupçonne d'accorder des prêts sur salaire sans détenir le permis nécessaire.

(1510)

La Nouvelle-Écosse a récemment adopté une loi qui permet à la commission des services publics et d'examen de la province d'imposer des règlements aux prêteurs sur salaire. La commission peut fixer des taux d'intérêt, des frais et des pénalités maximums qui sont jugés justes et raisonnables. En outre, les prêteurs doivent expliquer en détail ce que coûteront les prêts. La loi de la Nouvelle- Écosse établit aussi les pratiques admissibles dans les cas de reconduction et interdit aux prêteurs d'imposer des pénalités quand les prêts sont remboursés avant l'échéance.

Une fois ces lois en vigueur, les clients sauront exactement à quoi s'en tenir, et les prêteurs connaîtront les restrictions imposées à leur commerce.

La Saskatchewan et la Colombie-Britannique ont aussi mis à l'étude récemment des mesures législatives qui ressemblent beaucoup à celles du Manitoba et de la Nouvelle-Écosse. Je crois comprendre que d'autres provinces surveillent la situation avec intérêt.

Honorables sénateurs, notre but est d'établir un cadre qui permettra aux provinces et aux territoires d'imposer des règlements à cette industrie, s'ils le jugent bon. Avec l'adoption du projet de loi C-26, chacun pourra, à sa guise, concevoir un régime de réglementation qui fixera les règles à l'intérieur de ses frontières.

Espérons que le projet de loi C-26 facilitera les choses à ces gouvernements qui veulent rendre les prêts sur salaire plus justes et plus transparents pour les consommateurs.

Par ailleurs, j'insiste sur le fait que ce projet de loi n'empêche pas les provinces d'adopter la politique qu'elles préfèrent. Comme nous le savons, le Québec interdit les prêts sur salaire en fixant une limite inférieure au taux prévu dans le Code criminel. Il pourra continuer à le faire.

J'exhorte tous les sénateurs à voter en faveur de ce projet de loi. Les provinces attendent son adoption parce qu'elles veulent que leurs habitants bénéficient des protections voulues grâce à l'application d'une loi appropriée de protection des consommateurs. Ainsi, les Canadiens sauront davantage ce qui les attend et ils bénéficieront de la stabilité accrue de cette nouvelle industrie.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : Honorables sénateurs, je vais commenter ce projet de loi en adoptant le point de vue du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, qui a approuvé ce projet de loi sans propositions d'amendement, mais en formulant quelques observations. Je veux passer ces observations en revue avec les sénateurs. Elles sont brèves, mais il importe que le Sénat comprenne l'importance et la complexité de ce projet de loi particulier et qu'il se rende bien compte que le sujet est délicat. Ce projet de loi est court, mais il est complexe et il peut avoir des répercussions considérables.

Vous n'aurez pas oublié que le comité du Sénat a récemment effectué une étude repère sur la protection des consommateurs dans le domaine des services financiers. Dans le cadre de cette étude, le comité a mis au jour les activités du secteur du prêt sur salaire. Nous avons été renversés de découvrir l'expansion fulgurante de ce secteur qui, parti de zéro, a réalisé des profits se situant entre 2 et 5 milliards de dollars après moins de cinq ans. Il s'agit là d'une croissance ahurissante. Ce secteur répond assurément à un besoin. Si j'ai parlé de profits se situant entre 2 et 5 milliards de dollars, c'est qu'il s'agit d'un secteur pour lequel il existe peu de statistiques.

Le comité a décidé de faire rapport du projet de loi C-26 sans amendement, et je cite :

... malgré les réserves à l'égard du projet de loi tel qu'il est libellé, pour les raisons suivantes.

Je cite toujours le rapport :

Premièrement, le comité appuie à l'unanimité les mesures visant à favoriser la protection des utilisateurs de services de prêt sur salaire et ne veut pas en retarder l'entrée en vigueur de peur de pénaliser ces emprunteurs, dont la situation peut être précaire dans certains cas. Nous connaissons assez bien la disposition du Code criminel qui sera modifiée par le projet de loi de même que les problèmes liés au prêt sur salaire. Nous avons en effet étudié en 2005 un projet de loi présenté par notre ex-collègue, le sénateur Plamondon, qui visait lui aussi à modifier l'article 347 du Code criminel et, dans le cadre de notre étude sur la protection des consommateurs dans le secteur des services financiers, nous avons aussi recueilli des témoignages sur la question des services financiers parallèles, en particulier les sociétés de prêt sur salaire.

Puis :

Nous sommes encore quelque peu perplexes quant aux raisons à l'origine de la rapide expansion du secteur du prêt sur salaire.

En effet, nous sommes perplexes parce que le secteur financier l'est aussi. Nous n'avons pas réussi à trouver ou à obtenir des chiffres précis sur l'ampleur de la croissance de ce secteur.

Le rapport dit encore ceci :

Cette croissance donne à penser que les services offerts par ces prêteurs répondent à un besoin des consommateurs. Il nous apparaît donc important de nous interroger sur l'émergence et la croissance de ce secteur de même que sur le désintérêt apparent des banques à charte à l'égard des sommes modestes qui sont prêtées pour des périodes très courtes.

Le comité est arrivé à un fort consensus en concluant qu'il n'y avait pas de justification suffisante au fait que les banques n'aient pas comblé ce besoin particulier. Nous espérons pouvoir aller plus loin dans cette direction.

Je poursuis :

Au cours de leur récent exposé sur le projet de loi C-37, les représentants de l'Association des banquiers canadiens ont fait savoir qu'ils étaient eux aussi perplexes. Ils ont aussi fait valoir que les banques à charte offrent un éventail d'options en matière de crédit à court terme. Le comité croit néanmoins que la croissance du secteur du prêt sur salaire est peut-être en partie liée au peu d'empressement relatif des banques à charte canadiennes à faire crédit à certains emprunteurs,

qui se tournent alors vers les prêteurs sur salaire. Nous exhortons donc nos banques à charte — qui sont assujetties à la réglementation fédérale, sont régies par un mécanisme indépendant de règlement des plaintes et collaborent en partie à l'éducation des consommateurs en matière financière — à commencer à autoriser le prêt à court terme de modestes sommes.

Honorables sénateurs, ce n'est pas une exigence, mais bien une suggestion formulée par notre Comité des banques. Celui-ci, en vertu du pouvoir qui lui a été conféré par le Sénat de surveiller le secteur financier, suivra cette affaire de près. Le vice-président et moi avons l'intention de rencontrer les présidents de toutes les grandes banques canadiennes et de leur demander d'expliquer pourquoi elles hésitent à s'avancer dans ce secteur. Nous avons obtenu une réponse de leur association, mais nous préférerions une réponse des banques elles-mêmes. Quand nous aurons obtenu des réponses, nous ferons dûment rapport au comité.

On peut également lire ceci dans le rapport :

De plus, nous croyons que la mise en œuvre des mesures législatives proposées amènerait le gouvernement fédéral à accorder des exemptions à certaines provinces...

Le sénateur Eyton a bien pris soin de souligner ce passage.

... sans être vraiment certain que les mesures prises par les provinces permettront d'assurer aux consommateurs le niveau et le genre de protection que recherche le comité. De plus, si le projet de loi est adopté, rien ne garantit en effet que toutes les provinces adopteront des mesures de protection. Enfin, nous ne voulons pas non plus que puisse se développer dans l'ensemble du Canada un ramassis de mesures de protection hétéroclites.

J'expliquerai ce qui s'est produit. Le sénateur Eyton l'a expliqué très clairement, mais je souhaite ajouter un bref commentaire. Il s'agit évidemment d'une question fédérale-provinciale. Les intérêts sont de compétence fédérale, tandis que le crédit relève des provinces. Le dossier a fait l'objet de négociations et de consultations de longue haleine entre les gouvernements fédéral et provinciaux. Le gouvernement précédent a procédé à de longues négociations, et le gouvernement actuel a poursuivi ces négociations avec les différents intervenants. Nous avons établi une norme qui constitue, selon nous, un minimum, et non un maximum.

Je reviens au rapport :

C'est pourquoi nous exhorterons les provinces à adopter des mesures conformes au projet de loi pour protéger les consommateurs de services de prêt sur salaire afin d'imposer des exigences minimales, à tout le moins dans les domaines suivants : ...

Le projet de loi n'était pas clair à cet égard, et nous étions d'avis que nous ne pouvions ajouter d'autres amendements, car les négociations avec les provinces étaient terminées et il ne convenait pas que nous changions ultérieurement les résultats de ces négociations. Nous avions tout de même des préoccupations.

... limitation de la reconduction des prêts et du crédit adossé; participation obligatoire des prêteurs sur salaire à un mécanisme indépendant de règlement des plaintes; mise en place de mécanismes pour garantir la communication intégrale et fidèle des modalités de contrat; adoption de pratiques acceptables de recouvrement des créances; reconnaissance

à l'emprunteur du droit de renoncer à un prêt et d'obtenir un plein remboursement, au plus à la fin du jour ouvrable suivant celui où le prêt a été consenti. Il serait également souhaitable que les prêteurs sur salaire participent à l'éducation des consommateurs en matière financière.

Voilà ce que dit notre rapport. Finalement, nous avons conclu, et je cite :

Conformément au mandat du comité, nous comptons continuer à suivre l'évolution du secteur du prêt sur salaire et espérons que l'adoption du projet de loi C-26 permettra de vraiment protéger les consommateurs. Selon nous, si les provinces ne parviennent pas à assurer le respect de normes minimales dans les domaines précités, ...

Nous leur avons effectivement donné une mission.

... le gouvernement fédéral devrait prendre les mesures législatives nécessaires.

Je terminerai en disant que le gouvernement ne délègue pas aux provinces, au moyen de ce projet de loi, des pouvoirs en matière pénale en ce qui concerne l'établissement des taux d'intérêt. Ce projet de loi permet d'exempter les provinces d'une certaine disposition du Code criminel, à la condition qu'elles adoptent des lois. Le projet de loi comporte une exigence législative réduite à sa plus simple expression.

Si, à un moment donné, le gouvernement fédéral ou le Sénat vient à conclure que le statu quo ne donne pas de bons résultats, c'est-à- dire que les consommateurs ne sont pas protégés et qu'il n'existe aucun mécanisme de base dans les provinces pour assurer leur protection, rien n'empêcherait alors le gouvernement du jour de légiférer et d'abolir cette exemption ni le Sénat de présenter un projet de loi pour remédier à la situation.

(1520)

Je m'engage, au nom du comité, à surveiller l'efficacité de cette mesure législative. Le comité a décidé à l'unanimité d'appuyer le projet de loi, mais à ces conditions.

Je sais que madame le sénateur Callbeck, qui était notre porte- parole, aimerait également prendre la parole. Toutefois, elle n'est pas ici. Je vais proposer l'ajournement du débat à son nom. Il ne s'agit pas d'entraver le processus; c'est simplement que madame le sénateur voudrait intervenir au sujet du projet de loi.

(Sur la motion du sénateur Grafstein, le débat est ajourné.)

LE BUDGET DE 2007

INTERPELLATION—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Comeau, attirant l'attention du Sénat sur le budget, intitulé Viser un Canada plus fort, plus sécuritaire et meilleur, déposé à la Chambre des communes le 19 mars 2007 par le ministre des Finances, l'honorable James M. Flaherty, C.P., député, et au Sénat le 20 mars 2007.

L'honorable Lowell Murray : Honorables sénateurs, je remercie le leader adjoint de l'opposition d'avoir accepté avec courtoisie que j'intervienne à sa place à la condition, comme d'habitude, que lorsque j'aurai terminé, l'ajournement soit proposé en son nom.

Lorsque le leader du gouvernement, madame le sénateur LeBreton, a ouvert le débat sur cette interpellation le 29 mars, elle nous a fourni une description détaillée des principaux éléments du budget. Par comparaison, mes observations seront limitées; je me concentrerai sur les relations financières entre le gouvernement fédéral et les provinces et les territoires. Je tiens à assurer aux sénateurs à ma droite que j'ai quelques commentaires positifs à formuler au sujet du budget à cet égard. J'y viendrai si le temps le permet.

Entre-temps, j'aimerais dire qu'il faut féliciter le gouvernement pour les mesures qu'il a prises concernant le financement offert aux territoires, et je suis sûr que nos collègues des territoires seront d'accord. Le gouvernement a accepté les principales recommandations du comité O'Brien visant à assujettir de nouveau le financement offert aux territoires à un programme fondé sur une formule. Le gouvernement a intégré la formule, qui reconnaît les circonstances et les besoins différents des trois territoires, en particulier ceux du Nunavut, où il y a un gouvernement autochtone autonome et où on constate de très graves problèmes et des indicateurs sociaux franchement horribles. C'est une question que, tôt ou tard, le Sénat pourrait vouloir aborder, ne serait-ce que pour que le gouvernement et la population canadienne s'en préoccupent.

Le document budgétaire intitulé Rétablir l'équilibre fiscal au Canada confirme et reconfirme l'intention du gouvernement de négocier le partage des recettes tirées des ressources. J'ai bon espoir que les négociations auront lieu et qu'elles déboucheront sur une conclusion satisfaisante, car il s'agit d'une question en suspens depuis plus de 20 ans. Tant que nous n'aurons pas de conclusion satisfaisante, nous ne pourrons pas dire que nous sommes justes et équitables envers les territoires, et cette situation engendrera un état d'aliénation.

En ce qui concerne la controverse liée aux relations fédérales- provinciales touchant les provinces de Terre-Neuve-et-Labrador, de la Nouvelle-Écosse et de la Saskatchewan, M. Harper a fait deux promesses avant de devenir premier ministre. Premièrement, il a promis qu'aucune recette tirée de l'exploitation des ressources naturelles ne serait inclue dans le calcul de la capacité fiscale relative des provinces. Deuxièmement, il a promis que la formule de péréquation ne contiendrait aucun plafond automatique limitant le montant que peut recevoir une province bénéficiaire.

Je vais tout d'abord parler de la promesse de ne pas inclure de recettes tirées des ressources naturelles. Je dois dire que la surprise n'est pas que le premier ministre Harper ait manqué à sa promesse, mais bien qu'il l'ait faite au départ. L'idée de ne pas inclure de recettes tirées des ressources naturelles vient d'universitaires assez respectés; Ken Boessenkool est l'un des principaux défenseurs de cette thèse. L'argument veut que l'exploitation des ressources naturelles non renouvelables et les recettes qui en découlent s'apparentent à la vente d'un actif immobilisé : c'est non récurrent. C'est ponctuel. Le contrepied de cet argument est que ces recettes sont, pour la plupart, versées au Trésor et font partie des recettes générales des provinces en question, lesquelles s'en servent pour offrir des services. Il faut donc considérer qu'elles font partie de leur capacité fiscale.

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales a étudié les deux arguments. Nous avons entendu le témoignage du professeur Boessenkool et d'autres et, en 2002, nous avons déposé un rapport préconisant l'inclusion intégrale, et non l'exclusion totale, des recettes provinciales, y compris celles découlant des ressources naturelles. En 2001-2002, le Sénat a effectué rétrospectivement des calculs dont les résultats figurent à la page 26 du rapport que nous avons déposé en mars 2002. J'ai mis ces résultats à jour, avec l'aide de la Bibliothèque du Parlement, un peu avant les élections de 2004.

Le Comité des finances du Sénat est arrivé, quelques années plus tard, à la même conclusion : la totalité des recettes découlant des ressources naturelles devrait être prise en compte, comme l'indique le rapport que nous avons déposé ici en décembre 2006. Le comité consultatif provincial-territorial nommé en 2005-2006 par le Conseil de la fédération a fait ses propres projections relatives à l'incidence de l'exclusion des recettes tirées des ressources naturelles. Ces projections figurent à la page 89 de notre rapport intitulé Réconcilier l'irréconciliable : s'attaquer au déséquilibre fiscal au Canada.

Les conclusions sont toujours les mêmes, peu importe les projections. L'exclusion totale bénéficierait énormément à la Saskatchewan et, à un moindre degré, à la Colombie-Britannique et à Terre-Neuve-et-Labrador, mais toutes les autres provinces essuieraient un dur coup. Le montant total à distribuer aux provinces étant plus faible, la part destinée aux cinq autres provinces bénéficiaires serait inférieure.

En l'occurrence, le budget du ministre Flaherty ne propose ni l'exclusion totale des recettes tirées des ressources naturelles, comme l'avait promis M. Harper et, si je puis me permettre de le mentionner, M. Layton en 2004, ni l'inclusion totale recommandée à deux reprises par le comité sénatorial et à une reprise par le groupe provincial-territorial, mais bien l'inclusion à 50 p. 100, comme l'avait recommandé le comité fédéral d'experts présidé par Al O'Brien et dont le rapport a été déposé en mai 2006.

L'inclusion à 50 p. 100 n'est pas une position de principe; après tout, la totalité des autres recettes provinciales est prise en compte. C'est une solution pratique. Bien que je n'aie aucun droit de parler au nom de la Saskatchewan et des deux provinces atlantiques, j'ai le pressentiment que, même si Terre-Neuve-et-Labrador et la Saskatchewan avaient continué de s'opposer à l'inclusion des recettes tirées des ressources naturelles, la solution prévoyant l'inclusion à 50 p. 100 aurait été un peu plus acceptable si on n'avait pas imposé de plafond en fonction de la capacité fiscale de l'Ontario. C'est ce plafond qui fait le plus grand tort, et quiconque souhaite en apprendre davantage devrait lire le témoignage du ministre des Finances de la Saskatchewan devant notre comité, mardi dernier.

J'en arrive donc au plafonnement. En bref, le problème, comme je l'ai laissé entendre dans le cas du plafonnement pour la Saskatchewan, c'est que M. Harper, appuyé par M. Layton, a promis qu'il n'y en aurait pas, puis en a imposé un en rapport avec l'inclusion de 50 p. 100 des recettes tirées des ressources naturelles.

(1530)

Dans le cas de Terre-Neuve-et-Labrador et de la Nouvelle-Écosse, il s'agit de savoir si les paiements compensatoires qui leur sont destinés dans le cadre des accords relatifs aux ressources extracôtières doivent être inclus dans le calcul de la capacité fiscale de ces deux provinces.

Il y a derrière tout cela un long historique. Les honorables sénateurs seront soulagés de savoir que je n'ai pas l'intention de remonter jusqu'aux discussions sur cette question menées, sous le gouvernement Trudeau, entre son ministre de l'Énergie de l'époque, Jean Chrétien, et ces provinces atlantiques. Il suffit de dire que les gouvernements fédéral et provinciaux précédents ont défini les accords relatifs aux ressources extracôtières comme étant des ententes de développement économique. Ces accords étaient donc visés par le paragraphe 36(1) de la Loi constitutionnelle de 1982, et non par le paragraphe 36(2), qui porte sur la péréquation.

Certains pourraient dire — et ont même déjà dit — qu'il s'agit là d'un débat purement sémantique. Cependant, les provinces bénéficiaires prétendent qu'il n'est pas plus justifié d'inclure ces paiements dans le calcul de la capacité fiscale relative qu'il le serait d'inclure, disons, les transferts fédéraux pour l'infrastructure versés à l'Ontario et à d'autres provinces dans le calcul de leur capacité fiscale relative.

L'histoire plus récente commence avec la campagne électorale de 2004, au cours de laquelle le premier ministre Martin a promis publiquement à Terre-Neuve-et-Labrador — et implicitement tout au moins à la Nouvelle-Écosse — que les paiements compensatoires ne seraient pas inclus dans le calcul de la capacité fiscale de ces provinces aux fins des droits de péréquation. Après les élections, lorsqu'est venu le moment de préciser l'engagement de M. Martin, les fonctionnaires du ministère fédéral des Finances se sont mis à interpréter son engagement et à le définir selon leurs propres critères, lesquels étaient relativement restreints et étroits.

Le fameux « plafonnement de l'Ontario » visant les droits de péréquation de Terre-Neuve-et-Labrador et de la Nouvelle-Écosse était au nombre des limites qu'ils ont tenté d'imposer. Une controverse animée et spectaculaire a éclaté à ce moment-là entre Ottawa et les deux provinces, et elle n'a pris fin que lorsque le premier ministre Martin a renversé la décision de ses fonctionnaires et signé des accords avec Terre-Neuve-et-Labrador et la Nouvelle- Écosse selon l'engagement qu'il avait pris antérieurement avec ces provinces.

Passons rapidement à 2006, à l'arrivée au pouvoir d'un nouveau gouvernement. Le programme de péréquation devait être renouvelé — depuis un certain temps d'ailleurs —, et le ministère des Finances a constaté que le ministre Flaherty et le premier ministre Harper étaient disposés à adopter la politique que M. Martin, dans un moment de lucidité politique, avait rejetée.

Comme le dit la Bible, « la pierre qu'ont rejetée ceux qui bâtissaient est devenue la pierre angulaire ». Les sénateurs qui sont allés à l'église à Pâques reconnaissent assurément ce passage du Livre des psaumes.

Le budget Flaherty de 2007 place la Nouvelle-Écosse et Terre- Neuve-et-Labrador entre l'arbre et l'écorce. Ces provinces peuvent opter soit pour l'ancienne formule, y compris les compensations qui leur étaient accordées, mais sans les avantages découlant de la norme des dix provinces dont les autres provinces bénéficieront dans le cadre de la nouvelle formule, soit pour la nouvelle formule, si elles acceptent le plafond établi en fonction de la capacité fiscale de l'Ontario et renoncent aux recettes qui pourraient provenir de la mise en valeur des ressources extracôtières dans les années à venir. Comme un commentateur à la télévision l'a dit, c'est « la péréquation à choix multiple », et ce n'est pas cela que le Parti conservateur a promis.

Cela dit — je crois l'avoir dit auparavant —, lorsqu'il a parlé des relations fiscales entre le gouvernement fédéral et les provinces dans le discours qu'il a prononcé à Québec le 19 décembre 2005, M. Harper avait raison. Au chapitre du déséquilibre fiscal, la politique du gouvernement actuel constitue une amélioration marquée par rapport à la politique du gouvernement précédent, qui niait l'existence d'un déséquilibre fiscal ou la possibilité qu'il puisse y en avoir un.

Lorsqu'il était ministre des Affaires intergouvernementales, M. Dion lui-même répétait le mantra du ministère des Finances, selon lequel les gouvernements fédéral et provinciaux ont accès aux mêmes sources de revenus et que les provinces n'ont qu'à augmenter les impôts si elles manquent de fonds. Ceux qui ne me croient pas n'ont qu'à lire la lettre que M. Goodale et sa collègue, Mme Robillard, qui était ministre des Affaires intergouvernementales à l'époque, ont envoyée au groupe d'experts provinciaux-territoriaux. Dans cette lettre, qui se trouve à la page 117 du rapport de notre groupe d'experts, ils disent ceci :

La position du gouvernement du Canada au sujet du soi- disant déséquilibre fiscal est bien connue. Le gouvernement ne croit pas à l'existence d'un déséquilibre fiscal entre les gouvernements fédéral et provinciaux au Canada. Les deux ordres de gouvernement ont accès à toutes les grandes sources de revenus fiscaux et jouissent d'une autonomie complète en ce qui a trait à l'élaboration de politiques fiscales pour répondre aux pressions qui les incitent à dépenser pour assumer leurs responsabilités respectives.

Telle était leur politique. Je crois que M. Flaherty a raison de dire, comme il l'a fait dans le document budgétaire de 2007, Rétablir l'équilibre fiscal pour créer une fédération plus forte :

On a beaucoup parlé de l'équilibre fiscal. Mais de quoi s'agit-il au juste? Il s'agit de meilleures routes et de services de transport en commun plus efficaces. De meilleurs soins de santé. De meilleurs outils pour les universités. D'océans, de rivières, de lacs et d'air plus propres. D'une formation qui permet aux Canadiens de développer les compétences dont ils ont besoin. Il s'agit de bâtir un meilleur avenir pour notre pays. Et, pour cela, il faut assurer un financement adéquat des gouvernements des provinces et des territoires.

Les améliorations apportées à l'égard du déséquilibre fiscal horizontal visaient à faire en sorte que le programme de péréquation repose de nouveau sur une formule. Il mesure désormais la capacité fiscale relative en fonction d'une norme qui repose sur dix provinces, et non sur cinq, comme cela a été le cas pendant 20 ans ou plus; il rend le système fiscal représentatif plus rationnel et plus cohérent et, avec l'exception que j'ai signalée, il englobe toutes les recettes.

Le grave problème, bien sûr, c'est le plafonnement de l'Ontario. Je veux ajouter quelques mots; j'espère en avoir le temps. En ai-je le temps?

Son Honneur le Président : Vous pouvez demander la permission de continuer.

Le sénateur Murray : Je demande la permission de continuer et j'espère que, lorsque mes cinq minutes seront écoulées...

L'honorable Anne C. Cools : Dites combien de temps vous désirez.

Le sénateur Murray : Je vais terminer si la permission m'est accordée.

Le problème que pose le déséquilibre fiscal vertical, comme l'a constaté le groupe provincial-territorial, c'est qu'on prévoit que les dépenses des provinces et des territoires — notamment en santé et en éducation postsecondaire — augmenteront plus rapidement que leurs recettes, de sorte que les gouvernements provinciaux et territoriaux seraient en situation déficitaire d'ici six ans. Nous prévoyions une augmentation annuelle de 5,7 p. 100 en santé, de 3,8 p. 100 en éducation élémentaire et secondaire et de 4,5 p. 100 en éducation postsecondaire. Un dépassement de 1 p. 100 de nos prévisions ferait que les provinces se retrouveraient en déficit beaucoup plus rapidement.

Même si l'on fait l'estimation la plus modeste, la santé et l'éducation accapareront 75,4 p. 100 des recettes des provinces et des territoires en 2024-2025. Si ces dépenses dépassent de 1 p. 100 nos prévisions, elles accapareront 91,6 p. 100 des recettes et représenteront 76,2 p. 100 des dépenses des provinces et des territoires.

Le budget confirme l'augmentation annuelle de 6 p. 100 du Transfert canadien en matière de santé, telle que le gouvernement précédent l'avait négociée, jusqu'en 2013-2014. Il prévoit aussi des rajustements du Transfert canadien en matière de programmes sociaux, soit l'enseignement postsecondaire, le soutien aux enfants et les transferts sociaux pour la même période — c'est-à-dire jusqu'en 2013-2014 —, ce qui est une bonne chose.

Le gouvernement propose d'attribuer un montant égal par habitant à toutes les provinces. Bien qu'il ait investi 687 millions de dollars afin de couvrir les augmentations consenties à l'Ontario et à l'Alberta, maintenant le statu quo pour les autres provinces pendant une année, le fait est que les autres provinces bénéficiaires seront perdantes. En effet, les provinces les plus riches et les plus peuplées recevront beaucoup plus d'argent, tandis que les provinces pauvres en obtiendront moins. M. Van Mulligan nous a décrit cette situation de façon détaillée il y a une semaine.

Rétablir la péréquation à titre de programme financé selon une formule établie constitue une étape importante. Confirmer l'augmentation annuelle de 6 p. 100 du Transfert canadien en matière de santé est la chose à faire. Je crois que la disposition d'indexation de 3 p. 100 prévue dans le Transfert canadien en matière de santé est nettement insuffisante, étant donné les problèmes éprouvés dans le secteur de l'éducation postsecondaire et le fait que celui-ci est désavantagé depuis de nombreuses années en raison des besoins financiers toujours croissants du secteur des soins de santé. La disposition d'indexation de 3 p. 100 est et se révélera insuffisante.

(1540)

Le budget « confirme à nouveau » l'engagement du gouvernement de limiter le recours au pouvoir fédéral de dépenser. Je veux dire aux sénateurs d'en face que l'idée de limiter le pouvoir de dépenser du fédéral pourrait rendre mal à l'aise que, lorsque la sous-ministre adjointe des Finances, Mme Barbara Anderson, a comparu devant le comité mardi, elle a confirmé que cet engagement figure en des termes presque identiques — ce sont mes mots, et non les siens — dans l'Entente-cadre sur l'union sociale négociée par le gouvernement Chrétien avec neuf des provinces. J'espère que, lorsque le temps viendra, le gouvernement tentera de limiter par voie législative le pouvoir de dépenser du fédéral, ce que nous n'avions pas prévu dans l'Entente-cadre sur l'union sociale, et d'inclure un protocole concernant les fonds attribués directement par le fédéral à des particuliers et à des institutions dans des domaines de compétence provinciale exclusive.

Enfin, on insiste beaucoup dans le document sur la nécessité de réserver des fonds pour l'éducation postsecondaire, les programmes sociaux et l'aide aux enfants dans le cadre du Transfert canadien en matière de programmes sociaux. Madame le sénateur LeBreton en a d'ailleurs parlé dans son discours. Le gouvernement fédéral peut bien « réserver » des fonds, mais il n'en reste pas moins qu'il s'agit là de subventions sans condition et que les provinces peuvent dépenser ces fonds comme elles l'entendent, tant que des ententes plus concrètes n'auront pas été conclues entre le gouvernement fédéral et les provinces. Il est bon de savoir ce que le gouvernement entend faire et cela peut servir à presser les provinces à agir dans certains de ces secteurs prioritaires, mais il reste que l'on parle de subventions inconditionnelles, et nous ne devons pas l'oublier pour la suite des choses.

Je sais qu'il y a une interpellation au nom du sénateur Moore au Feuilleton qui porte sur cette question. Peut-être aurons-nous l'occasion de nous pencher à nouveau sur cette question lorsque cette interpellation sera mise à l'étude.

(Sur la motion du sénateur Tardif, le débat est ajourné.)

LA LOI SUR LES ALIMENTS ET DROGUES

PROJET DE LOI MODIFICATIF—TROISIÈME LECTURE

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Banks, appuyée par l'honorable sénateur Dallaire, tendant à la troisième lecture du projet de loi S-205, Loi modifiant la Loi sur les aliments et drogues (eau potable saine).—(L'honorable sénateur Comeau)

Une voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

Une voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée avec dissidence et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

DROITS DE LA PERSONNE

BUDGET ET AUTORISATION D'ENGAGER DU PERSONNEL—L'ÉTUDE DES QUESTIONS DE DROIT PORTANT SUR LES BIENS IMMOBILIERS MATRIMONIAUX DANS LES RÉSERVES EN CAS DE RUPTURE D'UN MARIAGE OU D'UNE UNION DE FAIT—ADOPTION DU RAPPORT DU COMITÉ

Le Sénat passe à l'étude du huitième rapport du Comité sénatorial permanent des droits de la personne (budget—étude sur une invitation au ministre des Affaires indiennes et du Nord—autorisation d'embaucher du personnel), présenté au Sénat le 29 mars 2007.—(L'honorable sénateur Fraser)

L'honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, je propose l'adoption de la motion inscrite à mon nom.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

RÈGLEMENT, PROCÉDURE ET DROITS DU PARLEMENT

QUATRIÈME RAPPORT DU COMITÉ—AJOURNEMENT DU DÉBAT

Le Sénat passe à l'étude du quatrième rapport du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement (modifications au Règlement du Sénat—questions de privilège et rappels au Règlement), présenté au Sénat le 18 avril 2007.—(L'honorable sénateur Di Nino)

L'honorable Consiglio Di Nino : Honorables sénateurs, je voudrais faire quelque chose qui ne se fait pas souvent ici. La question renvoyée au comité a été examinée par le personnel du comité, et je tiens à préciser à quel point j'ai été impressionné par l'excellente connaissance que ce personnel a du Règlement du Sénat du Canada et par la compétence avec laquelle il formule des solutions aux questions soulevées. Je remercie ce personnel pour son superbe travail.

Honorables sénateurs, le 26 octobre, le Président a rendu une décision sur un recours au Règlement concernant l'avis qui avait été donné par un sénateur au sujet d'une question de privilège. Dans sa décision, le Président a reconnu qu'il fallait que l'avis contienne certains renseignements sur la question de privilège afin que cet avis soit conforme aux exigences du Sénat. Le Président a également souligné que le Règlement du Sénat du Canada n'était pas clair quant au moment où les questions de privilège et les recours au Règlement peuvent ou ne peuvent pas être soulevés.

Le Président proposait que le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement examine la question afin de déterminer comment clarifier le Règlement et mieux y définir les limites à l'intérieur desquelles les recours au Règlement et les questions de privilège peuvent être soulevés aux différentes étapes des délibérations du Sénat.

Après examen, votre comité a décidé de modifier le Règlement comme il est indiqué dans son quatrième rapport. Les modifications peuvent être décrites ainsi :

Le paragraphe 23(1) a été modifié afin de préciser que les périodes au cours desquelles les recours au Règlement sont irrecevables sont les périodes réservées aux déclarations de sénateurs, aux affaires courantes, à la période des questions et aux réponses différées. Le comité estime que les modifications proposées apporteraient plus de précision à cet égard. En outre, honorables sénateurs, la mention « identifiant clairement le sujet qui sera soulevé à titre de question de privilège » a été ajoutée dans les articles appropriés du Règlement du Sénat dans le but de préciser la règle régissant les avis relatifs aux questions de privilège qui seront soulevées. On espère et on croit que cet ajout aidera les sénateurs à se rappeler que les autres sénateurs doivent pouvoir se préparer en vue de participer à un élément important du fonctionnement du Sénat.

Le Règlement du Sénat a été modifié afin de préciser qu'une question de privilège fondée sur des travaux qui se déroulent dans l'enceinte du Sénat au cours d'une séance peut être soulevée immédiatement, sans préavis, ou le lendemain, selon le choix du sénateur mécontent.

Cette modification se trouve au paragraphe 43(3.1) proposé; cette règle se retrouve donc avec les autres dispositions concernant cette même pratique et ne figure plus à l'article 59, ce qui semblait créer de la confusion du fait qu'il était difficile de savoir s'il pouvait être invoqué et quand. Je pense que cela explique le but des changements proposés au Règlement, qui ont été dictés par le Président, et je présente la motion qui est inscrite à mon nom.

(1550)

Son Honneur le Président : L'adoption du rapport est proposée par le sénateur Di Nino, avec l'appui du sénateur Nolin.

Nous en sommes maintenant au débat sur cette motion, relativement à l'adoption du quatrième rapport, qui contient des recommandations. Si nous adoptons le rapport, ces recommandations constitueront un changement au Règlement, comme l'explique le rapport.

L'honorable Anne C. Cools : Honorables sénateurs, j'aimerais prendre la parole dans le cadre de ce débat. Par conséquent, je propose l'ajournement du débat.

Je crois que, dans ses remarques, le sénateur Di Nino a dit que le comité avait décidé de modifier le Règlement. Aucune décision semblable n'a été prise. Il faut un vote au Sénat.

(Sur la motion du sénateur Cools, le débat est ajourné.)

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable Anne C. Cools : Honorables sénateurs, je pourrais peut- être soulever un point qui doit être abordé aujourd'hui. J'ai jeté un coup d'œil au Feuilleton d'aujourd'hui et j'ai remarqué que mon interpellation sur le jour du Souvenir et la contribution des peuples arabes avait disparu. Je ne sais pas ce qui s'est produit, mais le Feuilleton ne fait plus mention de mon interpellation. J'ai remarqué il y a quelques jours que le sénateur Comeau, leader adjoint du gouvernement, avait, il y a un certain nombre de semaines, demandé l'ajournement. Il y a deux jours, je lui ai demandé s'il avait l'intention de prendre la parole et de répondre à d'autres sénateurs qui s'étaient exprimés sur ce sujet. Je suis préoccupée par le fait que le sénateur Comeau ne l'a peut-être pas fait hier. Il m'avait dit qu'il le ferait.

Une voix : Il n'était pas ici.

Le sénateur Cools : Je ne le savais pas. Je me demande si je pourrais obtenir la permission de faire réinscrire mon interpellation.

Son Honneur le Président : Madame le sénateur Cools nous informe que ce point en était au 15e jour et qu'elle croyait que le sénateur Comeau qui, comme on le sait, s'est rendu aux funérailles de M. Eltsine à court préavis, serait ici. Par conséquent, j'estime qu'il s'agit d'une erreur de bonne foi.

Je vais faire une vérification, mais je pense que nous pourrions convenir que madame le sénateur Cools ne doit pas être pénalisée et considérer que ce point en sera au 15e jour demain.

Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

EXAMEN DE LA RÉGLEMENTATION

CINQUIÈME RAPPORT DU COMITÉ MIXTE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

Permission ayant été accordée de revenir aux rapports de comités, article no 14 :

Le Sénat passe à l'étude du cinquième rapport du Comité mixte permanent d'examen de la réglementation (Rapport no 79—Le Règlement de 1997 sur les droits de licence de radiodiffusion), déposé au Sénat le 20 mars 2007.—(L'honorable sénateur Eyton)

L'honorable J. Trevor Eyton propose que le cinquième rapport du Comité mixte permanent d'examen de la réglementation soit adopté.

— Honorables sénateurs, ces dernières années, on a observé une augmentation importante de la fréquence avec laquelle le Parlement a délégué le pouvoir d'imposer des droits et d'autres charges. Ce phénomène a été accompagné d'une augmentation correspondante du nombre d'instruments exigeant de tels paiements aux fins du recouvrement des coûts. Il est clair que les progrès dans ce domaine intéressent le Parlement. Le cinquième rapport du Comité mixte permanent d'examen de la réglementation attire l'attention des Chambres sur certains de ces progrès.

Le 14 décembre 2006, la Cour fédérale a jugé que les droits exigés en vertu de la partie II du Règlement de 1997 sur les droits de licence de radiodiffusion étaient illégaux parce qu'il s'agissait en fait d'une taxe imposée sans l'autorisation du Parlement. La cour a fondé cette conclusion sur le fait que les droits exigés en vertu de la partie II ne pouvaient pas être considérés comme des charges versées en échange d'un service puisque l'argent ne servait pas à financer un système de réglementation. Ces fonds étaient plutôt traités comme des recettes générales et n'étaient pas utilisés à des fins liées à la radiodiffusion. De plus, il n'existait pas de lien raisonnable entre ces droits et ce qu'il en coûte au gouvernement pour réglementer l'industrie de la radiodiffusion.

Les sommes en cause sont importantes. Sur la période de sept ans pour laquelle des chiffres ont été fournis à la cour, les droits perçus dépassaient de 539,6 millions de dollars les dépenses du ministère de l'Industrie au titre de la réglementation de la radiodiffusion, soit une moyenne de plus de 77 millions de dollars par année.

Les motifs de la cour reflétaient certaines préoccupations soulevées par le comité mixte permanent, qui avait fait remarquer dans son 73e rapport que les droits exigés en vertu de la partie II ressemblaient à une taxe à bien des égards.

Il existe une distinction claire en droit entre un « droit » et une « taxe ». Un droit est une charge prescrite au titre des services d'un officier public ou de l'octroi ou de la reconnaissance d'un privilège ou d'un droit, tandis qu'une taxe est généralement définie comme un paiement obligatoire imposé au sujet dans le but de recueillir des recettes à une fin d'intérêt public. Le Parlement délègue souvent le pouvoir de percevoir des droits. En revanche, le pouvoir d'imposer une taxe est rarement délégué et en fait, les tribunaux considèrent qu'il existe une présomption à l'encontre de la délégation d'un tel pouvoir. En d'autres termes, si le Parlement souhaite déléguer le pouvoir d'imposer une taxe, il doit le faire expressément et de manière non équivoque. Lorsque le pouvoir d'imposer un droit est exercé de manière que la redevance qui en découle semble être plus facilement assimilable à une taxe, le droit en question doit être considéré illicite.

Dans sa décision, la Cour fédérale a cité plusieurs pages d'un document préparé par le Comité mixte permanent concernant la distinction juridique entre une taxe et des droits, document qui avait été présenté à la troisième Conférence du Commonwealth sur la législation déléguée, tenue à Londres en 1989. Le juge parle des commentaires livrés à cette occasion comme étant le fait de parlementaires chargés d'examiner la législation déléguée et expérimentés en la matière, commentaires dont on peut penser, écrit-il, qu'ils reflètent ce que les parlementaires s'attendent légitimement à ce que l'on comprenne quant au sens et à l'usage fait du mot « droits » dans la législation. Donc, le tribunal a mis l'accent sur l'importance à accorder à la terminologie utilisée par le Parlement lorsqu'il délègue le pouvoir d'exiger le paiement de sommes d'argent.

La question de savoir si les radiodiffuseurs ont droit au remboursement de l'argent versé conformément à la partie II fait toujours l'objet d'un appel. Le cinquième rapport du comité conjoint souligne qu'une récente décision rendue par la Cour suprême du Canada relativement à l'affaire Kingstreet Investments aura certainement une incidence sur cette question. Dans sa décision, la Cour suprême a statué « qu'aucune immunité générale n'est applicable au recouvrement d'une taxe illégale ». Selon elle, lorsque des taxes ont été illégalement perçues, « elles doivent être restituées, sous réserve des délais de prescription et des lois correctives éventuellement jugées appropriées ». Il en va, poursuit- elle, du respect des principes de la Constitution canadienne.

On a fait plus particulièrement observer que le principe « pas de taxation sans représentation » est au cœur même de notre conception de la démocratie et de la primauté du droit.

Dans son rapport, le Comité mixte permanent se dit totalement en accord avec ce point de vue qui reflète le caractère fondamental de l'autorisation du Parlement pour la perception de taxes et de droits valides.

(Sur la motion du sénateur Tardif, le débat est ajourné.)

DROITS DE LA PERSONNE

MOTION TENDANT À AUTORISER LE COMITÉ À ÉTUDIER LA RÉSOLUTION DE 2006 DE L'ORGANISATION POUR LA SÉCURITÉ ET LA COOPÉRATION EN EUROPE SUR L'ANTISÉMITISME ET LES AUTRES FORMES D'INTOLÉRANCE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Fraser, au nom de l'honorable sénateur Grafstein, appuyée par l'honorable sénateur Cook :

Que la Résolution suivante sur la lutte contre l'antisémitisme et les autres formes d'intolérance, adoptée à la 15e session annuelle de l'Association parlementaire de l'OSCE, à laquelle le Canada a participé, à Bruxelles, Belgique, le 7 juillet 2006, soit renvoyée au Comité sénatorial permanent des droits de la personne pour étude et que le comité présente son rapport final au Sénat au plus tard le 31 mars 2007 :

RÉSOLUTION SUR LA LUTTE CONTRE L'ANTISÉMITISME ET LES AUTRES FORMES D'INTOLÉRANCE

1. Rappelant les résolutions sur l'antisémitisme qui ont été adoptées à l'unanimité par l'Assemblée parlementaire de l'OSCE à ses sessions annuelles de Berlin en 2002, de Rotterdam en 2003, d'Édimbourg en 2004 et de Washington en 2005,

2. Souhaitant faire mieux percevoir la nécessité de lutter contre l'antisémitisme, l'intolérance et la discrimination à l'égard des musulmans, de même que contre le racisme, la xénophobie et la discrimination, tout en se préoccupant de l'intolérance et de la discrimination auxquelles sont confrontés les chrétiens et les membres d'autres religions ainsi que les minorités dans différentes sociétés,

L'Assemblée parlementaire de l'OSCE

3. Prend acte des mesures adoptées par l'OSCE et le Bureau des Institutions démocratiques et des Droits de l'homme (BIDDH) pour aborder le problème de l'antisémitisme et d'autres formes d'intolérance, notamment les travaux de l'Unité pour la tolérance et la non-discrimination au sein du BIDDH, la nomination des représentants personnels du président en exercice et l'organisation de réunions d'experts sur la question de l'antisémitisme;

4. Rappelle aux États participants que « par antisémitisme, on entend une certaine perception des Juifs qui peut se traduire par de la haine. Les manifestions rhétoriques et physiques de l'antisémitisme visent les Juifs ou les non-Juifs et/ou leurs biens, de même que les institutions communautaires et installations religieuses juives » [définition de l'antisémitisme adoptée par les représentants de l'Observatoire européen pour les phénomènes racistes et xénophobes (EUMC) et du BIDDH];

5. Prie instamment ses États participants d'établir un cadre juridique pour des mesures ciblées en vue de lutter contre la diffusion de documents racistes et antisémites par l'Internet;

6. Prie instamment ses États participants d'intensifier les efforts qu'ils déploient pour lutter contre la discrimination à l'encontre des minorités religieuses ou ethniques;

7. Prie instamment ses États participants de présenter des rapports écrits à la session annuelle de 2007 sur leurs activités de lutte contre l'antisémitisme, le racisme et la discrimination à l'encontre des musulmans;

8. Se félicite de l'offre du gouvernement roumain d'accueillir en 2007 une conférence de suivi sur la lutte contre l'antisémitisme et toutes les formes de discrimination en vue d'examiner toutes les décisions adoptées lors des conférences des l'OSCE (Vienne, Bruxelles, Berlin, Cordoue, Washington), au titre desquelles les États participants ont pris des engagements, avec une demande de proposition visant à améliorer leur mise en œuvre, et invite les États participants à adopter une décision à ce sujet lors de la prochaine Conférence ministérielle à Bruxelles;

9. Prie instamment ses États participants de fournir périodiquement au Bureau des Institutions démocratiques et des Droits de l'homme des informations faisant le point sur la mise en œuvre des 38 engagements pris lors des conférences de l'OSCE (Vienne, Bruxelles, Berlin, Cordoue, Washington);

10. Prie instamment ses États participants d'élaborer des propositions pour des plans d'action nationaux visant à lutter contre l'antisémitisme, le racisme et la discrimination à l'encontre des musulmans;

11. Prie instamment ses États participants de faire mieux percevoir la nécessité de protéger les institutions juives et d'autres institutions de minorités dans les diverses sociétés;

12. Prie instamment ses États participants de désigner des médiateurs ou des commissaires spéciaux chargés de présenter et de promouvoir des lignes directrices nationales sur les activités pédagogiques visant à favoriser la tolérance et à lutter contre l'antisémitisme, y compris un enseignement consacré à l'Holocauste;

13. Souligne la nécessité d'un large appui du public ainsi que de coopérer avec les représentants de la société civile qui participent au recueil, à l'analyse et à la publication des données sur l'antisémitisme, le racisme et les violences connexes et de favoriser leur action;

14. Prie instamment ses États participants d'aborder l'histoire de l'Holocauste et de l'antisémitisme et d'analyser le rôle des institutions publiques dans ce contexte;

15. Demande à ses États participants de prendre position contre toutes les formes actuelles d'antisémitisme, où qu'elles se manifestent;

16. Décide d'associer d'autres organisations interparlementaires, telles que l'Union interparlementaire, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE), l'Assemblée parlementaire euro-méditerranéenne (APEM) et l'Assemblée parlementaire de l'OTAN, à ses efforts visant à donner suite aux requêtes formulées ci- dessus.

(Sur la motion du sénateur Cools, le débat est ajourné.)

LE SÉNAT

MOTION TENDANT À ENCOURAGER LA POURSUITE DU DIALOGUE ENTRE LA RÉPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE ET LE DALAÏ-LAMA—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Di Nino, appuyée par l'honorable sénateur Andreychuk :

Que le Sénat encourage le gouvernement de la République populaire de Chine et le dalaï-lama, nonobstant leurs différends à l'égard de la relation historique entre le Tibet et la Chine, à poursuivre leurs discussions d'une manière prospective qui mènera à des solutions pragmatiques respectant le cadre constitutionnel chinois et l'intégrité territoriale de la Chine tout en répondant aux aspirations du peuple tibétain, à savoir l'unification et la véritable autonomie du Tibet.

(Sur la motion du sénateur Cools, le débat est ajourné.)

(Le Sénat s'ajourne au jeudi 26 avril 2007, à 13 h 30.)


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