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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

3e Session, 40e Législature,
Volume 147, Numéro 68

Le mardi 23 novembre 2010
L'honorable Noël A. Kinsella, Président


LE SÉNAT

Le mardi 23 novembre 2010

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Hommages

L'honorable Peter A. Stollery

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j'ai reçu un avis du leader de l'opposition qui demande que, conformément à l'article 22(10) du Règlement, la période des déclarations de sénateurs soit prolongée aujourd'hui, afin que l'on puisse rendre hommage à l'honorable Peter A. Stollery, qui prendra sa retraite du Sénat le 29 novembre 2010.

Je rappelle aux sénateurs que, conformément à notre Règlement, les interventions des sénateurs ne peuvent dépasser trois minutes et qu'aucun sénateur ne peut parler plus d'une fois.

Je vais demander si les sénateurs sont d'accord pour que la période des déclarations des sénateurs soit prolongée de 30 minutes de manière à ce que nous continuions les hommages au sénateur Stollery. C'est sans compter le temps alloué à la réponse du sénateur Stollery. Le temps qu'il restera après ces hommages sera consacré à d'autres déclarations.

Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

L'honorable James S. Cowan (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, seul mon collègue néo-écossais, le sénateur Lowell Murray, empêche le sénateur Stollery d'être le doyen du Sénat. Quoi qu'il en soit, le sénateur Stollery a commencé sa carrière sur la Colline du Parlement bien avant sa nomination au Sénat en 1981.

En 1972, il a été élu député de la circonscription de Spadina à la Chambre des communes. Il allait être réélu à trois autres occasions par la suite. À la Chambre des communes, il a servi à titre de président du caucus libéral national, puis à titre de secrétaire parlementaire du secrétaire d'État et ministre des Communications, notre collègue, le sénateur Fox.

Le sénateur Stollery a fait partie de nombreux comités sénatoriaux, y compris le Comité mixte spécial sur le renouvellement du Canada et le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international. Il a présidé ce comité au cours des audiences qui ont abouti à la publication, en 2007, du rapport sur l'Afrique subsaharienne, qui a fait l'objet de nombreux éloges.

Jusqu'à présent, mon intervention a tout l'air d'une biographie politique conforme à la tradition. Toutefois, comme nous le savons tous, Peter ne s'est jamais conformé à la tradition. Sa vision unique du monde a débuté tôt dans la vie, en 1958 plus précisément, lorsqu'il a quitté sa maison de Toronto pour n'y revenir que trois ans plus tard. Pendant ce temps, il a visité 75 pays et parcouru 75 000 milles.

Il a enseigné pendant un an en Algérie, au quartier général de la Légion étrangère pour l'Afrique du Nord. Il a ensuite traversé le Sahara en plein mois de juillet, un exploit qu'on lui avait souvent dit impossible à réaliser. Il a parcouru la Corne de l'Afrique, d'abord dans une petite Renault puis, lorsque celle-ci a rendu l'âme, à pied, sur le toit de camions qui le prenaient au passage, ou avec des habitants de l'endroit curieux de voir ce Canadien un peu fou traversant l'Afrique à pied.

Il gagnait son pain en partie en rédigeant une série d'articles pour la revue Maclean's. Son premier article, en avril 1961, était intitulé « Un nomade au Sahara », et la photo qui l'accompagnait, montrant ce voyageur hirsute, ne laissait pas présager qu'il s'agissait là d'un futur membre de la Chambre haute du Parlement du Canada.

L'année suivante, il est retourné en Algérie pour être témoin des derniers jours violents du régime français dans ce pays. Comme il l'a écrit dans des articles pour Maclean's, il y a vu là « une leçon à la fois fascinante et consternante sur la façon dont il ne faut pas gouverner ou vivre ».

Cette expérience a procuré à Peter une perspective unique sur l'importance d'un système politique sain et sur ce qui arrive aux individus et à des sociétés entières lorsque ceux qui gouvernent font mal leur travail.

La curiosité du sénateur Stollery pour le monde en général est sans limite, qu'il s'agisse de l'habitat de champignons sauvages ou de la psychologie des bananes de mer. C'est pourquoi il possède probablement la liste de titres la plus variée de tous les sénateurs. Il est notamment membre de la société mycologique de Toronto, associé de la Royal Geographical Society et grutier, pour ne nommer que ceux-là.

Toutefois, sa plus grande passion est son désir de comprendre les gens, tant au Canada qu'ailleurs dans le monde.

Peter, vous allez beaucoup nous manquer. Il est difficile d'imaginer qu'on pourra vous trouver un remplaçant, mais je soupçonne que vous planifiez déjà une prochaine étape originale et intéressante. Nous vous souhaitons la meilleure des chances dans vos nouvelles entreprises, qu'il s'agisse de l'exploration de nouveaux mondes, de pêche à la mouche, de canot dans l'Arctique ou de trekking en Sibérie.

[Français]

L'honorable Suzanne Fortin-Duplessis : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui en cette Chambre pour souligner le départ de notre collègue, l'honorable Peter Stollery.

En tout premier lieu, je veux vous remercier, sénateur Stollery, pour la façon respectueuse et gentille avec laquelle vous m'avez accueillie au Comité des affaires étrangères et du commerce international.

C'est d'ailleurs lors de nos déplacements avec ce comité que nous avons fait plus ample connaissance. Je garderai toujours un souvenir agréable de nos petits-déjeuners, après vos habituelles séances de jogging, au cours desquels nous réglions le sort du monde. Votre intérêt marqué pour les affaires internationales et l'aide humanitaire vous a amené à prendre part à de nombreuses missions à l'étranger. Ainsi, l'acuité de vos analyses a fait en sorte que, bien souvent, j'en ai appris plus avec vous qu'avec les grands et importants témoins experts des pays que nous visitions.

Pourtant, au-delà de l'homme érudit et du citoyen du monde, c'est l'homme humble qui m'a beaucoup touchée. C'est l'intérêt que vous manifestez auprès des gens ordinaires et les réels efforts que vous déployez pour interagir avec eux afin de mieux les connaître et d'en apprendre un peu plus sur leur vie au quotidien.

Votre vaste expérience et vos connaissances approfondies ont enrichi les travaux de notre comité durant ce qui s'est révélé une passionnante étude sur l'émergence de la Chine, de l'Inde et de la Russie dans l'économie mondiale et ses répercussions sur les politiques canadiennes. Votre implication au sein du comité a largement contribué à la rédaction d'un rapport d'une très grande qualité.

Vous allez nous manquer, sénateur Stollery. Je vous souhaite de fréquents séjours en Amérique latine, où vous allez souvent vous ressourcer, et je vous souhaite aussi de longues randonnées à vélo, que vous aimez tant.

Je me sens extrêmement privilégiée de vous avoir côtoyé et sachez que je serai toujours heureuse de revoir un ami. Bonne retraite!

[Traduction]

L'honorable David P. Smith : Je prends la parole pour rendre hommage au sénateur Stollery, que je connais depuis des années. Comme l'ont entendu les sénateurs, il est arrivé à la Chambre des communes en 1972 et y a été élu à quatre reprises. Puis, le 2 juillet 1981, un jour qui marquera l'histoire, il est arrivé au Sénat. Je me souviendrai toujours d'une petite conversation que nous avons eue la veille, le jour de la fête du Canada.

(1410)

Le sénateur Stollery et moi avons des choses en commun — pas tout — et je vous laisse le soin de déterminer lesquelles. Il est unique, mais dans un sens positif et spécial. C'est vraiment un homme de Toronto. Stollery's est installé au coin de Bloor et Yonge depuis toujours et, dans 100 ans, il y sera encore. Le sénateur Stollery est excentrique, mais un adorable excentrique. C'est un raconteur, il donne un nouveau sens à ce mot. Ses histoires pourraient remplir bien des encyclopédies.

Le sénateur Stollery a beaucoup voyagé, mais vous avez déjà entendu tout cela. Christophe Colomb, Marco Polo, Vasco de Gama et Magellan étaient des amateurs comparés à lui. Bien sûr, il n'y avait pas d'avions à l'époque de ces voyageurs, mais Peter a pris le bateau et même la motocyclette pour se rendre à beaucoup d'endroits qu'il a visités. Je crois même qu'il a parfois pris la bicyclette.

Il connaît l'Amérique latine comme le fond de sa poche, qu'il s'agisse du tango à Buenos Aires, des terrasses de Panama ou des Andes, il a tout vu. Je ne peux pas penser à une région de l'Europe où il n'est pas allé et je ne parle même pas des coins les plus reculés de Russie et de tout ce qui formait autrefois l'Union soviétique. Je l'ai entendu raconter ses histoires, elles sont magnifiques.

Nous avons entendu parler d'Algérie et d'Afrique du Nord. J'ai lu beaucoup d'articles qu'il a écrits dans les années 1950, lorsque la situation était un peu tendue dans cette région en raison de l'existence de colonies française et de de Gaulle. Je pourrais aussi parler de l'Orient, de l'Inde et du Pacifique Sud, mais, pour résumer, disons qu'il est allé partout.

Le sénateur Stollery est d'agréable compagnie. Il s'exprime bien, c'est un gros travailleur et un parlementaire dévoué. C'est un détaillant expérimenté. J'ai mentionné Stollery's, qui est situé à un coin de rue d'où j'habite parce que je suis torontois moi aussi. Il connaît tout des chemises et aussi des sous-vêtements masculins. Au toucher, il peut vous nommer tous les tissus et vous dire d'où ils proviennent; oui, c'est un véritable expert. C'est un professionnel et il est agréable d'être avec lui. Il nous manquera.

Sénateur Stollery, je vous remercie pour le magnifique héritage que vous laissez à la Chambre des communes, au Sénat, aux Canadiens et même aux Torontois.

L'honorable Consiglio Di Nino : Honorables sénateurs, j'ajoute moi aussi des éloges — des commentaires appréciatifs — à l'intention du sénateur Stollery. Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il est unique, ce qui n'est certes pas un secret dans cette enceinte en tout cas. Le sénateur Stollery est un personnage haut en couleur qui a énormément voyagé, qui a le goût de l'aventure et qui a énormément lu.

Il donne souvent à ses interlocuteurs des renseignements sur un grand nombre d'endroits et de sujets et, plus souvent qu'autrement, il a raison.

Le sénateur Tkachuk : Même si on ne veut pas l'entendre.

Le sénateur Di Nino : Peter et moi avons siégé ensemble au Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international pendant de nombreuses années et nous avons partagé certaines expériences au Canada et à l'étranger.

Pour ce qui est des conseils du sénateur Stollery, l'exemple qui est resté gravé dans ma mémoire est celui de sa méthode de traitement, ou plutôt de sa méthode de prévention de la malaria qu'il communique généreusement — pas la malaria, mais la prévention — à tous ceux qui veulent bien l'écouter.

Peter, j'avoue que je préfère une autre marque de whisky single malt, mais le vôtre n'est pas mauvais non plus.

Honorables sénateurs, Peter Stollery a servi le Canada pendant 38 ans et, pendant cette période, il a considérablement contribué au succès de son parti. Peter n'a jamais été partisan à outrance et il s'est toujours montré prêt à collaborer, même en dépit de divergences de positions et d'opinions.

Le sénateur Stollery m'a récemment informé qu'un des nouveaux défis qu'il allait relever à la retraite sera d'apprendre à réparer les machines à laver. Si je vois poindre une nouvelle carrière à l'horizon pour lui, j'ai néanmoins un peu de mal à m'imaginer Peter Stollery en technicien Maytag.

Peter, vous avez vraiment de nombreux talents. Le premier ministre aura du mal à trouver une autre personne de votre stature, mais j'imagine qu'il vous a déjà choisi un successeur.

Des voix : Oh, oh.

Le sénateur Di Nino : Peter, vous voyez que mes commentaires ont suscité de l'enthousiasme? C'est bien.

Cher ami, je vous souhaite de profiter de nombreuses années bien remplies, notamment à vous promener à bicyclette et à motocyclette et à réparer des machines à laver. Bonne chance!

[Français]

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool : Honorables sénateurs, à mon tour, c'est avec beaucoup de respect et de regret que je dis au revoir aujourd'hui à un bon collègue qui nous privera de sa sagesse et de son expérience à compter de la semaine prochaine.

[Traduction]

Comme on l'a déjà mentionné, ce serait un euphémisme de dire que le sénateur Stollery a beaucoup voyagé. Existe-t-il un pays sur cette planète qu'il n'a pas visité, sur son fidèle vélo ou autrement? J'aimerais bien le savoir.

Quoi qu'il en soit, ce fait intéressant est probablement l'une des principales raisons pour lesquelles le sénateur Stollery a une connaissance approfondie des problèmes dans le monde et qu'il les comprend intuitivement, ce qui en a fait un membre et un président très apprécié du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international.

[Français]

Le rapport-phare de ce comité sur l'Afrique, déposé en 2007, en est un qui a rappelé au Canada et au reste de la planète l'importance de notre Sénat et la qualité du travail que nous y faisons. Ce rapport s'est aussi inscrit à un moment charnière de l'évolution de notre monde moderne, alors que l'aide étrangère consentie à l'Afrique se recalibrait et que notre gouvernement définissait sa nouvelle politique en matière de développement international.

[Traduction]

La courtoisie et l'élégance du sénateur Stollery vont me manquer; il s'habillait parfois avec excentricité, mais toujours avec goût. Son approche humaine des relations et son respect du français, ma langue, vont aussi me manquer.

[Français]

C'est avec beaucoup de fierté que le sénateur Stollery aimait s'exprimer en français avec moi.

[Traduction]

Je sais que le sénateur Stollery sera très content de garder la forme et de pratiquer la pêche à la mouche pendant sa retraite, mais j'ai le sentiment que cette enceinte va lui manquer, tout comme il va nous manquer beaucoup.

[Français]

Cher collègue, merci pour tout, bon début dans ce nouveau chapitre de votre vie et bonne chance « as a Maytag man ». À bientôt!

[Traduction]

L'honorable Francis William Mahovlich : Honorables sénateurs, j'aimerais faire une observation au sujet du sénateur Stollery. À mon avis, le sénateur Stollery incarne le parfait sénateur. J'ai été très à l'aise avec lui dès le jour où j'ai fait sa connaissance.

Je connaissais la famille Stollery à Toronto. Je connaissais la mercerie pour hommes. J'y faisais des achats de temps en temps. Je connaissais aussi l'oncle du sénateur, Art Stollery.

Nous avons voyagé ensemble à quelques occasions, et je savais que Peter possédait de grandes connaissances dans à peu près tous les domaines. Je me souviens d'ailleurs d'une série de réunions en Inde et du fait que, pendant une de ces réunions, certains d'entre nous regardaient par la fenêtre et pointaient du doigt diverses espèces d'oiseaux. J'ai pensé que j'allais le coincer...

Le sénateur Stollery : Vous avez bien failli me coincer.

Le sénateur Mahovlich : Pendant que nous étions à New Delhi, j'ai dit à mon épouse : « Je crois savoir comment le coincer. Je vais lui poser une question. » En allant déjeuner, j'ai pris le sénateur Stollery à part et je lui ai demandé qui était le célèbre architecte britannique qui avait collaboré à la conception de la magnifique ville de New Delhi.

Peter a commencé à se tortiller sur sa chaise et à se parler à lui-même. Il a parlé et parlé, puis, après un moment, il m'a dit : « Ce ne serait pas Lutyens, par hasard? » Pardi, c'était la réponse exacte; il l'avait trouvée.

Il se trouve que j'ai un banc de jardin Lutyens à mon chalet. J'en ai parlé avec mon épouse et je projette de l'inviter au chalet pendant l'été. Nous aurons tous les deux l'occasion de nous asseoir sur ce banc de Lutyens.

L'honorable Wilfred P. Moore : Honorables sénateurs, c'est avec plaisir que je prends la parole pour rendre hommage à l'honorable Peter Alan Stollery, explorateur, journaliste, chauffeur de taxi, homme d'affaires, député, pêcheur, boulanger — et je le soupçonne d'être également boucher et maître chandelier, mais je n'ai pas de preuves à l'appui — enseignant, réparateur de cuisinières, bibliophile, linguiste, couvreur de toiture et sénateur, un véritable esprit universel.

(1420)

Les hommes à l'esprit universel ont soif de connaissances. Comme nous le savons, le savoir est synonyme de pouvoir, et j'ai rencontré très peu de gens qui possèdent autant de connaissances que Peter Stollery. Les livres n'ont pas été la seule source de son savoir. Il a adopté une approche scientifique dans sa vie. Il ne s'est pas contenté de lire sur le monde. Il l'a expérimenté, il l'a senti, il l'a vu, et il l'a touché.

Dire qu'il a vécu une vie bien remplie serait une litote. Il a parcouru l'Asie à dos d'éléphants, il a fait de l'auto-stop en Europe, il a parcouru l'Afrique du Nord en voiture, il a voyagé avec la Légion étrangère française, et il a parcouru la Russie et l'Amérique centrale en bicyclette. Il a vécu sa vie.

Il n'est pas surprenant que notre ancien collègue, le sénateur John B. Stewart, ait déjà dit à propos de Peter Stollery qu'il faisait des remarques qui semblaient farfelues, mais qui, avec le temps, se révélaient toujours justes.

Le sénateur Stollery a siégé au Sénat et à l'autre endroit pendant 38 années remarquables, et il l'a fait avec un élan que nous ne verrons probablement plus jamais.

Le bureau que j'occupe est situé en face de celui du sénateur Stollery. Cela m'a permis d'écouter le récit de ses exploits et de profiter de ses points de vue éclairés sur les problèmes du monde. Je vais vraiment m'ennuyer de nos conversations.

Parmi toutes ses réalisations, je tiens surtout à féliciter le sénateur Stollery pour son travail en tant que président du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international et pour le rapport de ce dernier sur l'Afrique, certainement l'une des études les plus importantes et les plus passionantes qui ait jamais été menée par le Sénat du Canada

Je vous remercie, sénateur Stollery, d'avoir partagé une partie de votre vie avec nous au Sénat, et j'ai hâte d'entendre parler de vos prochains voyages. En terminant, je veux citer le regretté sénateur Harold Connolly :

Puis-je faire ton éloge, toi qui pourrais soudain protester en disant que tu n'as fait que ce pourquoi tu étais appelé? Ne soutiendrais-tu pas que les récompenses qui ont donné satisfaction à ton cœur et à ton âme, bien que non matérielles, ont largement compensé les services que tu as rendus? Malgré cela, je dois me risquer à entendre tes protestations. Tu as tant donné et si peu demandé que tu as bien le droit de savoir à quel point on te porte en haute estime. Le cœur des gens auxquels tu as rendu service est rempli de gratitude à ton égard. Elle est peut-être silencieuse, mais elle n'en est pas moins tangible, surpassant de loin tout ce qui pourrait être écrit sur du papier ou gravé dans la pierre ou dans le marbre. Je te le rappelle par souci de justice.

Bon voyage, monsieur le président.

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour rendre hommage à un collègue et à un ami, l'honorable sénateur Stollery. Le sénateur Stollery siège à la Chambre haute depuis 29 ans. Pendant ce temps, son dur labeur a eu des répercussions positives sur la vie de nombreuses personnes, au Canada et à l'étranger. Lorsque j'ai été nommée au Sénat il y a 10 ans, le sénateur Stollery a été l'une des premières personnes à me souhaiter la bienvenue. Il m'a donné de sages conseils qui me sont encore extrêmement utiles. En plus d'être un ami précieux, il a été un excellent mentor. J'ai appris énormément à ses côtés lorsque j'ai siégé au Comité des affaires étrangères. J'ai admiré son dévouement et son engagement envers ce comité.

Sénateur Stollery, vos connaissances et votre sagesse manqueront beaucoup au comité. Vous quittez le Sénat ce mois-ci, mais vous laissez derrière vous tous les conseils sages et judicieux que vous nous avez donnés au fil des années. Les compétences que vous m'avez enseignées me serviront encore longtemps et je vous remercie de votre aide.

L'honorable Percy E. Downe : Honorables sénateurs, je tiens à me joindre à ceux qui rendent hommage au sénateur Stollery aujourd'hui, alors qu'il se prépare à quitter le Sénat. J'hésite à parler de retraite, parce que ce n'est pas un mot que j'associe à Peter Stollery. J'ai travaillé avec lui au Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international, où nous avons étudié un large éventail de pays et de dossiers. Comme un grand nombre d'entre nous, j'en suis venu à apprécier son énergie et sa détermination au cours des innombrables séances, et je pense que nous sommes tous d'accord pour dire que le bon travail accompli par le comité durant cette période était dû en grande partie à ses efforts.

Sa perspective est unique. Même s'il a lu durant toute sa vie, il est d'avis que la meilleure façon de connaître un pays et ses habitants est de se rendre sur place — de préférence en vélo — et de parler à tous ceux qui veulent bien échanger avec nous. Que ce soit dans le désert du Sahara, dans la jungle de Panama ou dans la campagne russe, les voyages et les expériences du sénateur Stollery lui ont donné une vision éclairée et une connaissance de première main du monde.

Chaque fois que le comité se lançait dans l'étude d'une région, le sénateur Stollery était toujours le plus ardent promoteur des voyages. Cette volonté de voyager n'était certainement pas motivée par un penchant pour les chambres d'hôtel et la nourriture servie dans les avions. Elle découlait plutôt de la conviction selon laquelle, indépendamment de l'importance des témoignages fournis par les intervenants, si nous voulons vraiment connaître un endroit, il faut s'y rendre. Plus souvent qu'autrement, le point de vue du sénateur Stollery était confirmé, et les attachés de recherche de la Bibliothèque du Parlement ont souvent eu à remanier des ébauches de rapports à la lumière de ce que les sénateurs avaient vu et entendu au cours de leurs missions d'enquête.

Je me souviens que lors de notre étude sur l'Afrique j'avais reçu une trousse d'information de la Bibliothèque du Parlement. Les documents incluaient un article sur l'Algérie qui avait été publié dans la revue Maclean's au début des années 1960 par un certain Peter Stollery. L'article, qui renfermait beaucoup de détails sur la vie locale, était rédigé selon le point de vue de quelqu'un qui avait vécu dans le pays, de quelqu'un qui connaissait et aimait la région et ses habitants.

Sa passion n'a jamais diminué au fil des années, comme peuvent en témoigner tous ceux qui ont travaillé avec lui dans le cadre de l'étude sur l'Afrique. Par ailleurs, son enthousiasme pour les études sur la Chine, l'Inde et la Russie reflète sa conviction selon laquelle le Canada devrait toujours être tourné vers l'extérieur et être enthousiasmé, comme il l'est lui-même, par la recherche de nouvelles possibilités.

Une fois, il a décrit sa première expérience en Afrique comme celle d'un « jeune Canadien curieux voyageant seul par voie de terre ». Maintenant qu'il est plus âgé, mais non moins curieux, et qu'il n'aura plus à obéir à la sonnerie, nous ne pouvons que nous demander quel chemin il empruntera.

En terminant, honorables sénateurs, j'aimerais féliciter le sénateur Stollery pour près de quatre décennies de service public. Quelqu'un occupera son siège, mais il ne sera jamais remplacé.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, le sénateur Stollery a la parole.

L'honorable Peter A. Stollery : Honorables sénateurs, c'est une expérience exceptionnelle que de prendre sa retraite au terme de près de 40 ans de vie politique au Parlement. J'ai donc rédigé quelques notes.

Lorsque j'ai été élu pour la première fois à la Chambre des communes, en 1972, les élections ont été difficiles pour les libéraux. Quant à savoir qui allait former le gouvernement, M. Trudeau ou M. Stanfield, l'issue dépendait en grande partie du dépouillement judiciaire des bulletins de vote dans ce qui était alors la circonscription ontarienne de Norm Cafik, un libéral. Il a été déclaré perdant le soir des élections, puis déclaré élu après le dépouillement, donnant une majorité de deux sièges aux libéraux qui, sous la direction parlementaire compétente d'Allan MacEachen, ont formé le gouvernement. J'étais enthousiasmé et inquiet à la fois. Je venais d'être élu, mais j'étais fauché, ayant assumé moi-même mes dépenses électorales, et je risquais la défaite dans un mois ou deux lors d'un autre scrutin.

Me voici aujourd'hui, 38 ans plus tard, en compagnie de gens qui disent de gentilles choses à mon sujet, ce qui me fait plaisir. Ils ne disent rien quand vous êtes défait à la Chambre des communes; vous n'existez même plus. Je ne connaissais rien du Parlement lorsque je suis venu ici. Une des grandes différences entre être élu à la Chambre des communes et être nommé au Sénat est que, lorsque vous êtes élu à la Chambre des communes, vous n'êtes pas le seul nouveau. Vous vous liez d'amitié avec les autres nouveaux parce que vous traversez tous la même expérience horrible pour la première fois. C'est comme la première année à l'école.

Lorsque vous venez au Sénat, vous arrivez seul et il vous faut plus de temps pour développer des liens de camaraderie. J'ai eu de la chance. Je me suis fait de nombreux amis durant le temps que j'ai passé à la Chambre des communes et je me suis fait des camarades ici, au Sénat.

Je remercie tous ceux qui ont enrichi ma vie : tous les gens de contrées lointaines qui m'ont appris les usages du monde et ceux qui m'ont aidé et m'ont appris les usages en politique. Je parle de personnes de divers horizons, parmi lesquelles j'aimerais mentionner M. Ken Counsell, le regretté époux de notre ancienne collègue, le sénateur Trenholme Counsell, et M. Joseph Ricciuti, de Toronto.

Honorables sénateurs, permettez-moi de mentionner brièvement mes parents : ma mère, qui a enduré mes manières non orthodoxes, et mon défunt père, Alan Stollery, qui m'a encouragé.

(1430)

[Français]

Si je parle français, c'est à cause de mon père qui disait ceci, en 1955 : « On a deux langues au Canada. Il faut utiliser beaucoup plus le français au Canada ». Quand, en 1958, j'ai trouvé un travail en Algérie française, je lui ai envoyé un message. La réponse fut la suivante : « Vas-y! Tu auras l'occasion d'apprendre le français ». En 1955, c'était bien avant la mode du bilinguisme.

[Traduction]

C'était la réponse d'un homme d'affaires torontois qui ne parlait pas un mot de français et qui était rarement sorti de l'Ontario.

Sans l'esprit curieux que mon père m'a transmis, je ne serais rien du tout.

Honorables sénateurs, j'ai de très bonnes raisons d'être reconnaissant, et je le suis. Je tiens à vous remercier tous de vos paroles aimables. J'adresse aussi mes remerciements les plus sincères à ceux qui ont fait de moi la personne que je suis.

Je vois à la tribune Mme Calvert, qui travaille sur la Colline depuis 1962 et qui a longtemps été ma collaboratrice. J'ai écrit dans mes notes qu'elle a dû me supporter. La vérité, c'est que nous nous sommes supportés l'un l'autre depuis 1972. C'est un vrai record.

Honorables sénateurs, je voudrais terminer en disant d'abord que le sénateur Mahovlich a presque réussi à m'avoir à New Delhi. Je ne sais pas comment j'ai pu sortir le nom de Lutyens. Je ne plaisante pas. J'ai pensé à toutes sortes d'architectes obscurs, puis le nom a surgi au bon moment.

Deuxièmement, pour toutes ces questions de transport aérien et de déplacements, je ne crois pas aux avions. J'ai la chance d'être né avant l'ère du long-courrier à réaction. J'ai donc passé ma vie à voyager sur terre et par mer. On ne peut rencontrer personne dans un avion volant à 30 000 pieds d'altitude.

Troisièmement, je voudrais dire au sénateur Di Nino que nous ne passerons pas aux machines à laver et aux séchoirs avant l'étape suivante du cours. Pour le moment, nous sommes en train de nous familiariser avec les cuisinières. Il y a plus de fils à l'arrière d'une cuisinière que je n'en ai jamais vu de ma vie.

Merci beaucoup.

Des voix : Bravo!

La Foire royale d'hiver de l'agriculture

L'honorable Catherine S. Callbeck : Honorables sénateurs, chaque année, en novembre, la ville retrouve la campagne à la Foire royale d'hiver de l'agriculture qui se tient à Toronto. La foire de cette année, qui a eu lieu du 4 au 13 novembre, n'a pas fait exception. Plus grande foire agricole et équestre intérieure du monde, cette manifestation a attiré des dizaines de milliers d'éleveurs, de cultivateurs et d'exposants canadiens et étrangers au centre des expositions.

Lorsque la Foire royale a commencé en 1922, elle a enregistré 17 000 inscriptions et plus de 150 000 visiteurs. Aujourd'hui, elle attire plus de 350 000 participants et visiteurs de tous les coins du pays et du monde.

On a signalé que beaucoup des visiteurs de la foire ne représentent pas le milieu agricole. Les nombreux articles exposés montrent aux Canadiens d'où viennent leurs produits alimentaires ainsi que l'importance de l'agriculture dans l'économie nationale.

Le système agricole et agroalimentaire a fait une contribution d'environ 90 milliards de dollars à l'économie en 2006, ce qui représente 8 p. 100 du produit intérieur brut. Le secteur emploie 2,1 millions de personnes.

L'agriculture est l'un des trois grands secteurs de l'économie de ma province. L'incidence directe du secteur agricole et agroalimentaire est d'environ 15 p. 100 du PIB, soit près de 560 millions de dollars. Chaque année, la foire constitue une merveilleuse occasion de présenter ce que le Canada rural a de mieux à offrir.

Ma province a une longue tradition dans le monde de l'agriculture et, comme on peut l'imaginer, nous avons une longue tradition pour ce qui est d'envoyer des concurrents à la Foire royale. Ce n'est probablement pas une surprise que ma province a également une longue tradition pour ce qui est de remporter des prix. Cette tradition s'est maintenue. Cette année, des participants aussi bien jeunes qu'expérimentés de l'Île sont venus à Toronto se mesurer aux autres. Au concours de la volaille, les exposants de l'Île ont dominé dans un certain nombre de divisions et de catégories. Au concours du bœuf et des produits laitiers, ils se sont bien placés dans un certain nombre de divisions et de catégories. Au concours des pommes de terre de semence, l'un de nos inscrits a été nommé « Grand champion de réserve ». Au concours des pommes de terre de table, nous avons remporté la première place dans plusieurs catégories.

Honorables sénateurs, j'espère que vous voudrez bien vous joindre à moi pour féliciter les concurrents de ma province et du reste du pays. Chaque participant mérite d'être félicité pour son dévouement, son travail acharné et son engagement à produire des aliments sains et de grande qualité pour le Canada et le reste du monde.

La Journée nationale de l'enfant

L'honorable Terry M. Mercer : Honorables sénateurs, le sénateur Cochrane, le sénateur Munson et moi avons organisé deux rencontres pour célébrer la Journée nationale de l'enfant ces deux derniers jours. Nous avons été enchantés de poursuivre la tradition lancée par notre ancienne collègue, madame le sénateur Landon Pearson, en organisant des manifestations annuelles pour célébrer les enfants et les jeunes.

Il y a 21 ans que l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté à l'unanimité la Convention relative aux droits de l'enfant.

Cette année, la Journée nationale de l'enfant a été organisée de façon à nous faire penser à nos collectivités. Nos enfants peuvent avoir une influence extraordinaire sur leur collectivité dans le cadre des sports, de l'éducation et du bénévolat.

Hier, nous avons accueilli ici plus de 300 enfants des écoles de la région de la capitale nationale pour leur permettre de célébrer les enfants et les jeunes. Nous avons effectivement eu droit à des représentations incroyables présentées par de jeunes Canadiens.

Parmi ceux qui se sont produits, il y avait le violoniste et maître de cérémonie de 11 ans Dominique LeBlanc, de Dartmouth, en Nouvelle-Écosse.

KidSingers, chorale faisant partie de la Leading Note Foundation, donne aux enfants des collectivités peu desservies la possibilité d'apprendre à jouer de la musique.

Deux des pages du Sénat, Andrew Ruban et Maria Habanikova, ont animé une séance de questions et réponses au sujet du Sénat et de ce que nous faisons ici. J'ai été extrêmement surpris de voir à quel point les enfants étaient au courant de ce que nous faisons.

Nous avons eu droit à un magnifique spectacle de chanson et de chant guttural présenté par de petits enfants et des jeunes du Centre des enfants inuits d'Ottawa.

Le groupe de percussion Boom! nous a donné un avant-goût de la musique ouest-africaine et brésilienne. Cet endroit trépidait vraiment hier.

Mike Nordby, orateur doué venant de Terre-Neuve-et-Labrador qui est en même temps entraîneur personnel de culture physique, spécialiste du développement de la conscience communautaire et collecteur de fonds, nous a parlé des moyens d'inspirer les jeunes et les adultes pour leur permettre de surmonter les obstacles et de découvrir les possibilités.

Nous avons organisé cette manifestation de concert avec le centre Ottawa : L'amie de la jeunesse. Katie McGregor, du centre, a présenté le Prix du jeune génial à Timi Boyo, 16 ans, étudiant de 12e année à l'école secondaire catholique Lester B. Pearson, qui a eu la moyenne générale la plus élevée chaque année depuis la neuvième année et qui est un leader en philanthropie grâce à son travail de recherche sur le cancer et à son engagement auprès d'aînés atteints de la maladie d'Alzheimer.

Ce matin, dans le foyer du Sénat, nous avons accueilli près d'une centaine de représentants de différents groupes qui ont passé leur vie à s'assurer que les enfants et les jeunes réalisent leur potentiel.

Sur la Colline, de nombreux sénateurs et députés partagent cet engagement envers le bien-être des jeunes du Canada. J'ai été heureux de voir que tant de nos collègues étaient présents ce matin.

Au nom du sénateur Cochrane et du sénateur Munson, je voudrais remercier Son Honneur, ainsi que le greffier du Sénat, Gary O'Brien, l'huissier du Bâton noir, les pages du Sénat et tout le personnel de l'administration du Sénat pour l'appui qu'ils nous ont manifesté.

Je voudrais également remercier les membres du personnel du Sénat qui se sont occupés de l'installation, de la sécurité, de la traduction et des services audiovisuels. Sans eux, ces rencontres n'auraient pas été possibles.

Je tiens aussi à exprimer ma gratitude la plus sincère à nos extraordinaires collaborateurs, qui ont planifié et organisé ces cérémonies. Il est évident qu'ils prennent à cœur le sens de la Journée nationale de l'enfant. Nous leur sommes reconnaissants de nous avoir aidés à montrer aux enfants et aux jeunes du Canada que le Sénat est toujours prêt à défendre leur avenir.


AFFAIRES COURANTES

Le Budget supplémentaire des dépenses de 2010-2011

L'étude du crédit 10 du Budget supplémentaire des dépenses (B)—Dépôt du deuxième rapport du Comité mixte de la Bibliothèque du Parlement

L'honorable Percy E. Downe : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le deuxième rapport du Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement, qui porte sur le crédit 10 inscrit sous la rubrique « Parlement » du Budget supplémentaire des dépenses (B) pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 2011.

(1440)

L'étude de la proposition relative aux frais d'utilisation

Sécurité publique—Présentation du douzième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles

L'honorable John D. Wallace, au nom du sénateur Fraser, présidente du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, présente le rapport suivant :

Le mardi 23 novembre 2010

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, a l'honneur de présenter son

DOUZIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le document « Proposition de la Commission nationale des libérations conditionnelles concernant les frais d'utilisation », en date du 27 septembre 2010, a, conformément à l'ordre de renvoi du lundi 27 septembre 2010, étudié la proposition de frais d'utilisation.

Votre comité recommande que, conformément à l'article 5 de la Loi sur les frais d'utilisation, le Sénat approuve la proposition de hausser de 35 $ à 135 $ la part des frais d'utilisation exigés qui revient à la Commission nationale des libérations conditionnelles, ce qui porterait le montant total des frais à 150 $ (y compris la part de la GRC).

Votre comité a aussi fait certaines observations qui sont annexées au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le vice-président,
JOHN D. WALLACE

(Le texte des observations figure en annexe aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, p. 978.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur Wallace, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

Le Sénat

Avis de motion tendant à autoriser l'enregistrement et la couverture photographique de la prochaine sanction royale

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que lors de la prochaine sanction royale par cérémonie traditionnelle à laquelle Son Excellence le Gouverneur général est présent, des caméras de télévision soient autorisées dans la salle du Sénat afin d'enregistrer la cérémonie, d'une manière qui perturbe le moins possible ses travaux;

Que des photographes soient également autorisés à avoir accès à la salle du Sénat pour photographier la cérémonie à cette occasion, d'une manière qui perturbe le moins possible ses travaux.

La Loi sur la sécurité de la vieillesse

Projet de loi modificatif—Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu de la Chambre des communes un message accompagné du projet de loi C-31, Loi modifiant la Loi sur la sécurité de la vieillesse (Loi supprimant le droit des prisonniers à certaines prestations).

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Comeau, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

[Traduction]

Projet de loi sur l'équité entre les sexes relativement à l'inscription au registre des Indiens

Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-3, Loi favorisant l'équité entre les sexes relativement à l'inscription au registre des Indiens en donnant suite à la décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans l'affaire McIvor c. Canada (registraire, Affaires indiennes et du Nord Canada), accompagné d'un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Comeau, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

Agriculture et forêts

Avis de motion tendant à autoriser le comité à reporter la date du dépôt de son rapport final de l'étude sur l'état actuel et les perspectives d'avenir du secteur forestier

L'honorable Percy Mockler : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, par dérogation à l'ordre adopté par le Sénat le jeudi 11 mars 2010, le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts, autorisé à entreprendre une étude sur l'état actuel et les perspectives d'avenir du secteur forestier au Canada, soit habilité à reporter la date de présentation de son rapport final du 31 décembre 2010 au 31 mars 2011; et

Qu'il conserve jusqu'au 31 mars 2011 tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions.


PÉRIODE DES QUESTIONS

Le patrimoine

La candidature de la ville d'Edmonton en vue d'accueillir l'Exposition de 2017

L'honorable Claudette Tardif (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Hier, nous avons appris que le gouvernement fédéral avait fermé la porte à la candidature d'Edmonton pour la tenue d'Expo 2017, la seule candidature d'une ville canadienne à cette occasion. Je rappellerai à cette Chambre que l'événement en question, d'une durée de trois mois, aurait attiré quelque 5,3 millions de visiteurs. Il aurait également marqué le centième anniversaire de la bataille de la crête de Vimy et le 150e anniversaire du Canada, tout en mettant l'accent sur des discussions relatives à la durabilité, à l'énergie humaine, aux énergies fossiles et à d'autres questions d'intérêt international.

Ai-je besoin de dire que les Edmontoniens et les Albertains sont extrêmement déçus de la décision du gouvernement? En fait, c'était le premier ministre lui-même qui avait encouragé les municipalités à poser leur candidature pour la tenue d'Expo 2017. Le maire d'Edmonton, M. Stephen Mandel, a exprimé sa consternation en ces mots :

Il est évident qu'Ottawa ne s'intéresse tout simplement pas à la croissance et aux ambitions d'Edmonton. Notre ministre a complètement failli à sa tâche.

Randy Ferguson, un membre du comité de mise en candidature, a fait état de sa frustration en disant ceci :

Les Albertains ont encaissé un dur coup aujourd'hui.

Comment le gouvernement du leader a-t-il pu abandonner les Edmontoniens en refusant de soutenir la candidature de leur ville pour la tenue d'Expo 2017, un événement international qui aurait profité à tous les Canadiens?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je pense que les propos tenus par le ministre des Finances au cours des derniers mois et hier encore sont suffisamment clairs. Le retour aux budgets équilibrés est un élément clé de la prochaine phase de la reprise économique. Le ministre des Finances a insisté sur le fait que le gouvernement ne va pas s'engager à faire de nouvelles dépenses importantes.

Il va de soi que des décisions difficiles devront être prises. C'est dans cette veine qu'il a été décidé de n'accorder aucun financement au titre de la candidature pour la tenue d'Expo 2017 à Edmonton. S'il s'était engagé à soutenir cette candidature, le gouvernement fédéral aurait fini par débourser plus de 1 milliard de dollars, en tenant compte du coût de la sécurité et des autres obligations fédérales connexes à la tenue d'un événement de cette ampleur.

Il convient de noter que, par le passé, le gouvernement a soutenu la candidature d'Edmonton pour la tenue des Jeux mondiaux universitaires.

[Français]

Le sénateur Tardif : J'ai une question complémentaire à poser. Au moment où on apprenait que le gouvernement fédéral dépensera plus de 300 millions de dollars pour fermer le camp Mirage, aux Émirats arabes unis, on apprenait également qu'il avait décidé de ne pas appuyer la tenue d'Expo 2017 à Edmonton pour des raisons économiques et financières. Pourtant, honorables sénateurs, on ne peut nier les avantages à la fois économiques, sociaux et culturels de la tenue d'Expo 2017 à Edmonton.

Comment madame le leader peut-elle justifier ce refus de la part de son gouvernement, alors que cet appui est nécessaire pour la réalisation d'un tel événement?

[Traduction]

Le sénateur LeBreton : Le chiffre que le sénateur a cité pour le camp Mirage est de la pure supposition. Je ne pense d'ailleurs pas que ce chiffre ait été confirmé. Cela étant dit, il est actuellement question de la candidature d'Edmonton. Dans ce contexte, et vu l'engagement que le gouvernement a pris de rétablir l'équilibre budgétaire, il nous a semblé qu'il fallait témoigner de respect pour les contribuables et nous abstenir d'appuyer cette candidature.

(1450)

À l'évidence, le gouvernement doit prendre des décisions pénibles, et celle-ci en a été une, cela ne fait aucun doute. Dans l'intérêt des contribuables, les coûts de 1 milliard de dollars pour la sécurité, que nous entrapercevons déjà, ne sont pas une dépense que peuvent appuyer les Canadiens ni les Albertains.

L'honorable Grant Mitchell : Honorables sénateurs, il est assez clair que, à Edmonton même, le gouvernement cueille les fruits de son irresponsabilité financière. S'il n'a pas les moyens d'appuyer ce projet d'une importance immense, c'est parce que, depuis quelques années, il gaspille allègrement l'argent des contribuables. Permettez-moi une énumération : un déficit de 56 milliards de dollars; le camp Mirage, 300 millions de dollars; les sommets du G8 et du G20, plus de 1 milliard de dollars. Et il n'arrive même pas à établir une comptabilité claire des dépenses de ces sommets.

Madame le leader du gouvernement au Sénat admettra-t-elle simplement que si le gouvernement a l'impression de ne pas avoir l'argent nécessaire pour ce projet d'une incroyable importance pour Edmonton, l'Alberta et le Canada, c'est parce qu'il a gaspillé l'argent des contribuables et ne sait pas, tout bonnement, s'il en a assez pour faire les choses correctement?

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, c'était le tour du Canada d'accueillir les sommets du G8 et du G20. Ils ont coûté très cher, et la sécurité a représenté une grande partie de ces dépenses. En réalité, le gouvernement a parfaitement rendu compte des dépenses du G8 et du G20.

Il a fallu considérer la demande d'un soutien pour la candidature d'Edmonton dans le contexte de nos efforts visant à rembourser le déficit, après un train de mesures de stimulation économique très fructueuses qui ont aidé à donner du travail à plus de 420 000 Canadiens. Le gouvernement a déjà lancé un message : nous ne pouvons pas continuer à débourser de l'argent au moment où nous essayons d'équilibrer le budget. Nous avons estimé que nous ne pouvions pas imposer aux contribuables cette charge de 1 milliard de dollars en ce moment.

Le sénateur Mitchell : Faites le calcul. Il ne s'agit pas de débourser 1 milliard de dollars tout de suite. Ce montant s'étalerait sur sept ou huit ans. C'est beaucoup moins : environ 150 millions de dollars par année. Le gouvernement ne peut même pas se permettre de dépenser 150 millions de dollars par année pour les habitants d'Edmonton, les Albertains et les Canadiens afin de lancer un message dans le monde entier, de lui faire comprendre l'importance du Canada et de lui montrer tout ce que nous avons à offrir?

Le sénateur LeBreton : Edmonton est une ville importante. Nous nous sommes engagés à y appuyer d'autres entreprises. Les habitants d'Edmonton, les Albertains et les contribuables canadiens en général souhaitent que le gouvernement renoue avec l'équilibre budgétaire, après une période difficile de ralentissement économique mondial. Pour cela, il faut malheureusement dire non à des demandes très convaincantes.

Le sénateur Mitchell : Avant de rejeter le projet, le gouvernement a-t-il considéré le fait que, pour peu qu'on croie le ministre des Finances lorsqu'il promet d'équilibrer le budget d'ici 2014, il y aura amplement de temps après cela? On peut présumer qu'il y aura des budgets excédentaires et beaucoup d'argent pour réaliser ce projet qui non seulement lancera de beaux messages et défendra les sables bitumineux devant le monde, mais suscitera aussi beaucoup de développement économique.

Le sénateur LeBreton : Il ne fait aucun doute que la décision a été pénible à prendre pour le gouvernement, mais il ne fait pas de doute non plus que le Canada a des décisions difficiles à prendre à cause du ralentissement économique mondial. Le Canada a été un chef de file dans le monde au cours de cette période, et c'est lui qui est dans la meilleure position au sortir de la crise. Normalement, le sénateur serait le premier à bondir sur ses pieds pour exiger que le gouvernement honore son engagement à équilibrer le budget. C'est exactement ce que fait le gouvernement. Il prend des décisions pénibles comme celle-ci dans l'intérêt des contribuables.

Le sénateur Mitchell : Le leader prétend que la décision a été pénible. À quel point a-t-il été difficile de décider d'injecter 50 millions de dollars dans la circonscription du ministre Clement pour construire des kiosques, par exemple?

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, toutes les dépenses visant à stimuler l'économie ont été prises avec la collaboration des administrations provinciales et municipales.

Le sénateur Mitchell : C'est la même chose cette fois-ci.

Le sénateur LeBreton : Ces dépenses ont donné des résultats, puisqu'elles ont aidé à créer plus de 420 000 emplois pendant une période difficile de ralentissement économique.

L'Agence de promotion économique du Canada atlantique

Le projet du port de Sydney—La stratégie pour la porte d'entrée de l'Atlantique

L'honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, le dragage du port de Sydney a été désigné comme indispensable à la croissance économique future de la région industrielle du Cap-Breton. Les ordres local et provincial de gouvernement ont placé ce projet au premier rang des priorités économiques. Toutes les estimations du projet ont été faites. Les coûts estimatifs s'élèvent à 38 millions de dollars. La province et la municipalité se sont engagées à participer au financement à hauteur de la moitié des coûts de dragage, pourvu que le gouvernement fédéral apporte les 19 millions de dollars qui manquent. Le projet aurait pu être mis en chantier le printemps dernier. Il suffisait d'un engagement du gouvernement fédéral, mais cet engagement ne s'est pas concrétisé.

Au cours de la dernière semaine, le maire de la municipalité régionale du Cap-Breton a reçu une lettre de refus du ministre des Transports du Canada, Chuck Strahl, disant que son ministère ne finançait pas le dragage de ports privés et n'allait donc pas financer le projet.

Faut-il déduire de cette lettre du ministre des Transports du Canada que le gouvernement fédéral ne financera pas le projet? Madame le leader pourrait-elle dire au Sénat où en est cette demande?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, il est évident que le gouvernement souhaite vivement trouver une solution au problème du dragage du port de Sydney. Comme je l'ai déjà dit et comme le sénateur Cordy le sait pertinemment, il s'agit d'une entreprise complexe et coûteuse qui nécessitera la participation de tous les ordres de gouvernement et du secteur privé. Pour l'instant, le gouvernement ne peut dire qu'une chose : il continue de chercher des solutions.

Le sénateur Cordy : Il me semble incroyable que le leader dise que le gouvernement « souhaite vivement trouver une solution ». Nous n'avons eu aucune nouvelle. Le projet n'a rien de complexe. Le leader signale que tous les ordres de gouvernement doivent participer. L'administration municipale le fait. Le gouvernement provincial aussi. Tous les deux se sont engagés à participer financièrement. Le projet est même leur plus grande priorité dans la région du Cap-Breton.

J'ai également rencontré des représentants du secteur privé dans la région du Cap-Breton. Ils sont complètement acquis à ce projet. Seul le gouvernement fédéral n'a toujours pris aucun engagement.

Le 28 avril dernier, j'ai posé une question sur le financement fédéral du dragage du port de Sydney, et le leader a pris note de ma question. Le 17 juin, je suis revenue à la charge parce que je n'avais pas obtenu de réponse à ma question, et je n'ai toujours obtenu aucune réponse à ma question du 28 avril.

Ces derniers mois, le gouvernement a dépensé des montants exorbitants, aux dépens des contribuables, pour les sommets du G8 et du G20, faisant des dépenses inutiles pour aménager un faux lac, acheter des bâtons lumineux, des stylos et des tirettes de fermeture éclair. Il a dépensé de l'argent en publicité et prévu récemment 500 millions de dollars pour le déménagement du camp Mirage.

Le projet de dragage revêt une grande importance économique pour la région du Cap-Breton, et les ordres municipal et provincial de gouvernement sont prêts à s'engager financièrement.

(1500)

On a demandé au gouvernement fédéral une contribution de 19 millions de dollars. Pourquoi tarde-t-il tant à répondre? Pourquoi se dérobe-t-il quand on lui parle du projet de dragage du port de Sydney? Qu'est-ce que le gouvernement attend pour agir?

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, je ne peux rien ajouter à ce que je viens de dire. Nous aimerions évidemment qu'une solution soit trouvée. Il est évident que le sénateur éprouve une grande inquiétude et a de fortes convictions, dont je ferai part à mon collègue, l'honorable Chuck Strahl.

Je pensais qu'une réponse écrite avait été transmise au sénateur Cordy. Je lui présente mes excuses à ce sujet. J'essaierai de déterminer ce qui s'est passé. Toutefois, je n'ai rien à ajouter pour le moment.

L'honorable Terry M. Mercer : Honorables sénateurs, je suis inquiet de voir que madame le ministre a écarté le projet comme si c'était une chose de peu d'importance.

Dans les annonces qu'il a faites à plusieurs reprises au sujet de l'argent à consacrer à la porte de l'Atlantique, le gouvernement a dit qu'il y aurait de merveilleux programmes. Nous avons continué à poser des questions à ce sujet, mais nous ne sommes au courant d'aucune dépense visant la porte de l'Atlantique.

Le gouvernement néo-démocrate actuel a déterminé, de même que le gouvernement progressiste-conservateur qui l'a précédé en Nouvelle-Écosse, que le dragage du port de Sydney constituait la première priorité de la province. Le dragage du port n'a rien de complexe. Il suffit que le gouvernement fédéral se présente à la table et prenne une décision.

Je rappelle au leader que j'ai posé une question semblable concernant le dragage du port de Sydney et l'affectation à ce projet de l'argent prévu pour la porte de l'Atlantique, puisqu'aucune partie de cet argent n'a été dépensée jusqu'ici. J'attends toujours une réponse.

Le leader dit que c'est une affaire complexe. Tout le monde lui dira que le dragage du port de Sydney constitue la partie la plus simple de tout le projet de la porte de l'Atlantique.

Le sénateur LeBreton : Comme le sénateur Mitchell, le sénateur Mercer essaie de m'attribuer des paroles que je n'ai jamais prononcées.

Je pensais avoir dit que le gouvernement fédéral cherchait une solution au problème du port de Sydney. Il y a eu plusieurs réunions avec nos partenaires de tous les ordres de gouvernement ainsi qu'avec d'autres pays pour élaborer une stratégie efficace de la porte de l'Atlantique pouvant assurer de nouvelles perspectives à la région dans la nouvelle économie mondiale.

De bons progrès ont été réalisés concernant l'initiative de la porte de l'Atlantique, tant au niveau du gouvernement qu'à celui des fonctionnaires. Le gouvernement a pris des engagements fermes envers la stratégie de la porte de l'Atlantique.

En ce qui concerne le port de Sydney, je ne peux rien ajouter à ce que j'ai dit en réponse à la question du sénateur Cordy. Le gouvernement cherche une solution, mais celle-ci doit comprendre un plein partenariat avec la province, la municipalité et le secteur privé.

Le sénateur Mercer : Comme le sénateur Cordy l'a dit dans sa première question et comme l'ont déclaré le maire de la municipalité régionale du Cap-Breton et le premier ministre Dexter, c'est leur première priorité. Ils se sont présentés à la table et tiennent leur argent prêt pour financer la moitié de ce projet. Le gouvernement fédéral a juste à dire oui pour que les travaux de dragage puissent commencer.

Cela est important non seulement pour la population du Cap-Breton, mais pour toute la Nouvelle-Écosse parce que le charbon qui sert à la production d'électricité est importé par le port de Sydney. Les navires ne peuvent accoster qu'avec une charge de 70 p. 100 parce que le port n'a pas été dragué. Cela augmente le prix du charbon et maintient le prix de l'électricité à un niveau bien trop élevé en Nouvelle-Écosse.

Si le port de Sydney est dragué, le prix du charbon baisserait un peu, ce qui stabiliserait le prix de l'électricité en Nouvelle-Écosse. C'est une affaire qui touche toute la province. Elle ne concerne pas seulement la population de l'île du Cap-Breton.

Madame le ministre dit qu'elle veut la coopération des deux autres niveaux de gouvernement. Ils ont déjà dit qu'ils sont prêts à participer. Où est le gouvernement fédéral?

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, le sénateur Cordy a parlé de la réponse du ministre Chuck Strahl. Il est exact, comme le sénateur le sait fort bien, que Transports Canada ne finance que le dragage des ports publics.

Comme je l'ai dit, le gouvernement tient à trouver une solution au problème du dragage du port de Sydney. Les ministres MacKay et Ashfield travaillent fort avec leurs collaborateurs pour trouver des solutions à ce problème complexe.

Je ne sais pas ce que je peux ajouter. Le gouvernement cherche une solution et les ministres Ashfield et MacKay s'en occupent. Ce que le ministre Strahl a dit est parfaitement vrai et s'applique partout dans le pays : le ministère des Transports finance uniquement le dragage des ports publics.

L'industrie

Les prestations d'invalidité de longue durée—Les employés de Nortel

L'honorable Art Eggleton : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. La semaine dernière, le Comité des banques a tenu deux audiences au sujet du projet de loi S-216, Loi modifiant la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, en vue de protéger les prestataires de régimes d'invalidité de longue durée qui travaillaient pour des sociétés ayant fait faillite. Bien entendu, cela s'applique particulièrement aux travailleurs handicapés de Nortel.

Au terme des deux audiences, les membres du comité représentant le gouvernement ont voté en faveur de l'ajournement du débat alors que tout le monde sait qu'il ne reste plus de temps pour aider ces gens. Leurs conditions de vie changeront radicalement à la fin de cette année, c'est-à-dire dans quelques semaines à peine. Tout comme moi, ils attendent avec impatience un geste du gouvernement.

Le gouvernement appuiera-t-il le projet de loi S-216 ou proposera-t-il d'autres mesures pour protéger les gens qui se trouvent dans cette situation, y compris les employés handicapés de Nortel?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Je remercie le sénateur de sa question. Je crois savoir que les témoins qui ont comparu devant le comité ne se sont pas prononcés à l'unanimité en faveur ou contre le projet de loi et que beaucoup d'entre eux pensaient qu'il pouvait avoir des effets pervers.

Je crois que le comité est conscient du problème. Comme nous le savons, c'est une situation très difficile. Le gouvernement a essayé de trouver des solutions permettant de protéger les personnes en cause. Je n'ai pas participé aux audiences du comité, mais j'ai cru comprendre que les membres de ce dernier ont demandé de bonne foi à disposer d'une période suffisante pour étudier adéquatement les arguments des témoins.

Le sénateur Eggleton : Je conviens que les témoins n'étaient pas tous du même avis au sujet du projet de loi S-216, bien que j'estime que les arguments présentés contre le projet de loi étaient très faibles. Bien sûr, cela est sujet à interprétation. Toutefois, tous les témoins sans exception ont convenu qu'il y a des gens malades et handicapés qui ont besoin d'attention et d'aide. Le leader dit que les membres du comité veulent avoir du temps pour examiner les dispositions du projet de loi.

Cette mesure législative est à l'étude depuis le printemps. La deuxième lecture au Sénat remonte au 17 juin. Il n'y a là rien de nouveau. Il s'agit d'un projet de loi fort simple qui se résume à huit articles. Pourtant, une chose est absolument certaine : la limite, c'est la fin de décembre, dans quelques semaines. À la fin de décembre, les prestations du régime d'assurance-maladie de l'employeur prendront fin. Certains retraités, que ce soit à cause du cancer, de maladies cardiaques ou de la maladie de Parkinson, par exemple, auront besoin de milliers de dollars pour remplacer ces prestations. Comment y arriveront-ils?

(1510)

Leurs revenus, déjà réduits de moitié au moment de leur invalidité de longue durée, seront de nouveau diminués de moitié, voire plus. Tout cela se passe à la fin de l'année. Il reste peu de temps. Combien de temps faut-il encore au gouvernement pour décider de porter secours à ces gens-là? Si ce n'est pas le projet de loi S-216 qui permettra de le faire, d'où viendra la solution?

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, je n'ai pas dit que les membres du comité avaient besoin de plus de temps pour étudier le projet de loi. Ils comprennent clairement le projet de loi. Je crois avoir dit que le comité n'a pas poursuivi son étude parce que les témoins qui ont comparu n'ont pas appuyé cette mesure à l'unanimité et que certains ont parlé d'effets pervers. Il se peut que j'aie tort, mais c'est ce que j'ai compris.

En ce qui concerne les retraités de Nortel, il est certain que le gouvernement et nous tous sommes conscients de leur sort. Le système des retraites du Canada est déjà reconnu comme l'un des plus solides au monde, mais, cela dit, nous savons qu'il faut s'occuper de certains éléments.

Nous savons également que les régimes de pensions comme celui-là ne font pas partie des modestes 10 p. 100 des régimes qui sont de ressort fédéral, mais plutôt de ceux qui relèvent de la compétence des gouvernements provinciaux.

Le gouvernement a pris des mesures jusqu'à maintenant pour protéger les travailleurs et leurs pensions de retraite en cas de faillite de l'entreprise. Il a mis en œuvre le Programme de protection des salariés pour garantir le versement rapide des salaires non payés jusqu'à concurrence de 3 250 $ en cas de faillite. Il a aussi modifié la Loi sur la faillite et l'insolvabilité pour placer une tranche de 2 000 $ des salaires non versés au rang de super-priorité et élever au même rang les cotisations à un régime de retraite non versées par l'employeur.

Comme le sénateur Eggleton le sait fort bien, il n'y a pas de réponse facile. Le ministre Clement est le principal ministre responsable des dispositions sur la faillite, mais non de celles qui portent sur les retraites. Les ministres responsables cherchent des moyens d'améliorer la situation et de répondre aux préoccupations. Pour l'instant, tout ce que je peux dire au sénateur, c'est que le ministre Clement fera connaître ses intentions lorsqu'il sera en mesure de le faire, et je présume qu'il ne tardera pas trop.

Le sénateur Eggleton : Voilà qui me donne un peu d'espoir. Je dois ajouter qu'il ne s'agit pas ici des retraites, mais de l'invalidité de longue durée. La mesure dont parle madame le leader, le Programme de protection des salariés, est celle dont j'ai parlé au comité également, car il s'agit d'un bon exemple de ce que le gouvernement a déjà fait pour classer ces créances plus haut dans la liste, leur accordant même la super-priorité, ce que je n'ai même pas demandé dans mon projet de loi. J'ai proposé le rang de créance privilégiée ou intermédiaire.

Madame le ministre aurait-elle l'obligeance de souligner l'urgence de la situation auprès de ses collègues du Cabinet? Il est urgent de trouver une solution avant la date fatidique pour les gens de Nortel.

Le sénateur LeBreton : Je puis donner au sénateur Eggleton l'assurance que mes collègues du Cabinet, et surtout ceux qui habitent dans la région d'Ottawa, où le problème est le plus évident, sont tout à fait conscients de la situation.

Je sais que le problème concerne avant tout l'invalidité de longue durée. Comme je l'ai dit à l'instant, je crois que le ministre Clement a entendu les supplications des personnes touchées, et je présume qu'il aura quelque chose à annoncer bientôt.

[Français]

La justice

La langue française et les services d'immigration

L'honorable Maria Chaput : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Un article est paru dans le quotidien La Presse, le 18 novembre 2010, au sujet des services en français à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada à Montréal. Selon l'auteur, qui est un avocat spécialisé en droit de l'immigration, « il devient de plus en plus difficile d'obtenir des services en français » devant ce tribunal administratif fédéral.

Comment expliquer que l'on refuse d'accorder une audience en français devant ce tribunal administratif fédéral à Montréal, que, dans certains cas, on refuse de transmettre la documentation en français à Montréal et qu'il soit parfois impossible d'obtenir les services d'un interprète en français à Montréal? Comment expliquer ce refus de services en français?

[Traduction]

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je ne puis donner aucune explication. Je n'étais pas au courant et je n'ai pas lu l'article.

Le Canada a une Loi sur les langues officielles qui est là pour garantir la prestation des services dans les deux langues officielles. Pourquoi ces services n'ont-ils pas été offerts dans un bureau de l'immigration de Montréal? Il faudra que je me renseigne. Je ne peux imaginer aucune explication au fait qu'on n'ait pas pu offrir des services en français à Montréal, mais je vais me faire un plaisir de prendre note de la question du sénateur Chaput et de me renseigner.


ORDRE DU JOUR

Projet de loi de 2010 pour la mise en œuvre de conventions fiscales

Message des Communes

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu de la Chambre des communes le projet de loi S-3, Loi mettant en œuvre des conventions et des protocoles conclus entre le Canada et la Colombie, la Grèce et la Turquie afin d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôt sur le revenu, accompagné d'un message informant le Sénat qu'elle a adopté le projet de loi sans amendements.

[Français]

La Loi sur les langues officielles

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Chaput, appuyée par l'honorable sénateur Mahovlich, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-220, Loi modifiant la Loi sur les langues officielles (communications avec le public et prestation des services).

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour appuyer mes collègues qui ont déjà pris la parole au sujet du projet de loi S-220, Loi modifiant la Loi sur les langues officielles (communications avec le public et prestation des services).

Noble initiative de l'honorable sénateur Maria Chaput, ce projet de loi mérite toute notre attention. Je me permets de féliciter madame le sénateur Chaput pour cette indéniable mesure qui s'impose : une mise à jour de la Loi sur les langues officielles, qui date de 1969 et qui a été réadaptée seulement en 1988. À cette époque, en 1988, la nécessité de prendre en compte la composition familiale ainsi que le public voyageur se faisait moins sentir. Au fil des ans, l'immigration, les mariages mixtes, les déplacements et les déménagements des familles d'une frontière à l'autre de notre pays ont fait en sorte que la Loi sur les langues officielles n'est plus vraiment d'actualité.

(1520)

Je comprends très bien et j'apprécie beaucoup l'intervention du sénateur Chaput dans le sens où la gestion des ressources existantes reste primordiale dans la prestation des services en français. N'oublions pas une chose importante; ce projet de loi n'impose pas une augmentation importante des ressources fédérales.

Un autre objectif digne d'être souligné est celui de la compréhension : le règlement tel quel, dans son état actuel, est tellement ambigu et peu clair que même les fonctionnaires qui devraient l'appliquer ne peuvent pas l'expliquer. Les constructions compliquées, les termes flous, les ambiguïtés sont présents à tous les pas. Ne parlons même pas des droits des voyageurs, de la notion de voyageur et du droit à des services bilingues.

Permettez-moi, honorables sénateurs, de revenir aux changements dans la composition familiale de nos jours.

Il y a de plus en plus de familles mixtes dont la Loi sur les langues officielles fait abstraction : la maman francophone et le papa anglophone; la maman anglophone et le papa francophone; un des parents anglophone ou francophone, l'autre parent d'une autre langue maternelle; les parents allophones qui rêvent de voir leurs enfants parler les deux langues officielles du Canada.

La question que je me pose est la suivante : pourquoi? Pourquoi la Loi sur les langues officielles ne tient-elle pas compte de ce contexte?

Pourquoi la plus grande classe de la population canadienne actuelle, celle issue d'une composition familiale mixte, ne se retrouve et ne se reconnaît pas dans la loi actuelle sur les langues officielles?

La spécificité de la minorité linguistique au Canada fait partie de notre réalité à nous et cela, tous les jours. Qu'on le veuille ou non, ces familles, nos familles, en font partie.

On sait que 22,8 p. 100 des États se déclarent bilingues ou multilingues, mais que très peu réussissent à assurer une égalité réelle entre les langues. La lutte pour la dominance se poursuit à l'intérieur de l'État et l'une ou l'autre des langues sera privilégiée, spécifiquement celle qui est la plus forte. À ce moment, l'État devient l'oppresseur de la langue plus faible, tout en restant le défenseur de celle qui est la plus forte. Dans son œuvre Linguistique et colonialisme, Louis-Jean Calvet a inventé le terme de glottophagie pour décrire les États comme étant des dévoreurs de langue.

N'oublions pas que, lorsque nous parlons de bilinguisme étatique, bilinguisme d'un État/pays, nous devons comprendre que les langues officielles doivent se retrouver dans tous les domaines de la législation : débat, rédaction et promulgation des lois, administration publique, justice, enseignement, et cetera.

Nous vivons dans un monde où 45 pays sont officiellement bilingues, soit presque un quart des pays du monde. Il existe 193 États souverains dont 45 bilingues et, malheureusement, l'Amérique est la plus pauvre à cet égard. Seuls le Canada et la République d'Haïti ont deux langues officielles.

Le poids démographique joue un rôle crucial et politiquement incontournable. Notre multiculturalisme est unique au monde et heureusement, il n'y a pas de gros risques de conflits intercommunautaires. Les minorités linguistiques s'y retrouvent du Nord au Sud et de l'Est à l'Ouest.

Ce qui est le plus important à retenir, si nous voulons que cette précieuse minorité continue d'exister, si nous ne voulons pas la délaisser, c'est que nous devons faire en sorte que les services soient offerts dans la seconde langue officielle.

Comment pouvons-nous être sûrs que le français sera maintenu dans les familles mixtes tout en assurant la vitalité de la communauté minoritaire?

Premièrement, en faisant ressentir aux personnes concernées que leur seconde langue n'est pas éradiquée, qu'elle a la même importance à nos yeux que la première.

Deuxièmement, nous devons nous assurer que la qualité des services offerts dans la seconde langue est la même que celle des services offerts dans la langue dominante de la région en question.

Nous ne devons pas nous contenter d'une simple traduction des faits, nous devons adapter notre manière de faire, nos gestes, nos attitudes, bref, tout remettre dans un contexte adéquat.

L'un de nos mandats est aussi d'amener le gouvernement fédéral à assumer ses responsabilités et de donner des exemples dignes d'être suivis.

Le gouvernement fédéral doit agir en tant que chef de file, donner l'exemple et montrer aux gouvernements provinciaux qu'il est possible de prendre en considération les attentes de la population et que ces attentes sont très normales dans un pays où nous avons deux langues officielles.

Une étroite coopération entre les prestataires des services fédéraux, provinciaux et locaux doit rimer avec la collaboration des centres locaux afin d'assurer la survie et la vitalité des communautés en situation minoritaire, que ce soit les anglophones au Québec ou les francophones en Colombie-Britannique, par exemple.

Je refuse d'admettre que, dans notre pays, il y a seulement une forme déclaratoire du bilinguisme et que les choses autour de nous parlent d'elles-mêmes : nous avons des billets de banque bilingues; nous avons des débats bilingues; nous avons un Parlement bilingue; des réunions du conseil des ministres bilingues; nos deux langues se retrouvent dans l'enseignement, dans les médias, et cetera.

Alors, pourquoi les services publics dans des zones bien définies et où le besoin se fait sentir ne seraient-ils pas bilingues?

Je souligne encore l'importance de la qualité des services offerts : avec les techniques modernes, la traduction est facile, mais ce n'est pas ce dont nous avons besoin. Il nous faut du personnel, des personnes capables d'offrir ce dont le public a besoin : des services de qualité et bien contextualisés, pas seulement des phrases traduites et des listes de mots mémorisés.

Sincèrement, nous ne pouvons pas comparer notre système à celui d'autres pays, par exemple l'Irlande, où le bilinguisme est vraiment symbolique, car les billets de banque et les timbres sont bilingues, mais tout le reste se fait exclusivement en anglais : débats au Parlement, en anglais; réunions ministérielles, en anglais; enseignement, en anglais. Dans une étude publiée à l'Université Laval, j'ai lu ceci :

Si les services gouvernementaux ne sont assurés qu'en français au Tchad, ils ne sont rendus dans la seconde langue que de façon restreinte en Israël (arabe en région), aux Seychelles (français et créole), au Sri Lanka (tamoul), aux Philippines (filipino), au Vanuatu (français), au Kenya (swahili), au Canada (français hors Québec) et en Afrique du Sud (en fonction de la région).

Dans la fonction publique, la langue de travail entre fonctionnaires correspond presque toujours à la première langue dominante. C'est l'anglais au Canada [...]

Un bilinguisme qui va vers l'égalité de nos deux langues officielles.

(1530)

Pourquoi pas? Oui, nous avons des formulaires administratifs bilingues, mais malheureusement, les services offerts ne vont pas de pair avec ces formulaires parce qu'ils ne sont pas toujours offerts dans la langue de l'individu, que ce soit l'anglais ou le français. Pour pousser encore plus loin les choses, le bilinguisme pourrait être égalitaire uniquement si l'attribution des postes de fonctionnaires correspondait au pourcentage de la population réelle de la langue représentée.

Un exemple remarquable et digne à suivre est celui de la Suisse. L'administration centrale de ce pays est bilingue, pour ne pas dire multilingue, au sein de certains cantons. Quant aux services gouvernementaux, il est, je le soulignais, possible d'obtenir des services bilingues partout au pays. Selon les régions, on peut obtenir ces services en deux, voire trois langues. Je peux vous donner également d'autres exemples de pays, comme la Belgique et le Cameroun.

En ce qui concerne les droits des voyageurs, plus spécifiquement les transporteurs, ce projet de loi pourrait donner au gouvernement fédéral la possibilité d'harmoniser les conditions de concurrence entre transporteurs et imposer des services dans la langue minoritaire là où la demande est importante.

Permettez-moi de vous rappeler, comme je l'ai fait il y a quelques semaines, ce qui s'est passé à Vancouver.

Honorables sénateurs, au début de cette année, le Canada a accueilli le monde entier à l'occasion des Jeux olympiques et paralympiques d'hiver de 2010 à Vancouver. La Colombie-Britannique était fière d'être l'hôte de ces événements. Malheureusement, nous avons une tache à notre dossier. Nous avons bien reçu le monde, mais nous avons laissé tomber les Canadiens. Notre dualité linguistique, anglophone et francophone, n'a pas été mise en valeur pendant ces Jeux.

Le Commissariat aux langues officielles a reçu 46 plaintes à propos des Jeux de Vancouver, dont 38 visaient précisément l'absence du français lors de la cérémonie d'ouverture. Après enquête, le commissariat a déterminé que ces 38 plaintes correspondaient à des infractions à la partie VII de la Loi sur les langues officielles, qui est la loi de notre pays.

Avant les Jeux olympiques, Patrimoine canadien avait négocié avec le Comité organisateur des Jeux de Vancouver une entente qui contenait une disposition sur les langues officielles.

Dans son rapport de 2009-2010, le commissaire a déploré le fait que cette disposition n'ait pas été explicite à l'égard de la mise en valeur de la dualité linguistique canadienne.

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, est-ce que vous accordez cinq minutes de plus au sénateur Jaffer?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Jaffer : Merci, honorables sénateurs. Pourquoi la disposition sur la langue n'était-elle pas plus précise quant à la responsabilité du comité en ce qui concerne la dualité linguistique?

J'estime qu'Air Canada a eu bien raison de demander, depuis des années, que les lois fédérales traitent les transporteurs aériens de façon cohérente.

De nos jours, le Canada pratique encore un bilinguisme déséquilibré. Si, dans certains domaines, l'égalité est presque atteinte, il nous reste encore du chemin à faire jusqu'au point de pouvoir s'autodéclarer comme étant un pays dont le bilinguisme est parfaitement égalitaire.

Honorables sénateurs, compte tenu de toutes ces conditions et recommandations, je vous suggère d'appuyer ce projet de loi et de faire en sorte qu'il soit renvoyé devant le comité concerné. Veuillez garder à l'esprit que nous ne pouvons assurer la vitalité des communications linguistiques sans faire la mise à jour de la Loi sur les langues officielles et sans adopter des projets de loi comme celui que j'ai eu l'honneur de défendre aujourd'hui, le tant attendu projet de loi S-220.

[Traduction]

Honorables sénateurs, quand nous n'avons pas mis en évidence notre dualité linguistique aux Jeux olympiques d'hiver, nous avons privé le monde, ainsi que nous-mêmes, de l'occasion de connaître la véritable nature du Canada. En tant que Britanno-Colombienne, cela m'a mise en colère, et je sais maintenant qu'il nous reste beaucoup à faire au Sénat. Quand nous ne mettons pas adéquatement en valeur notre dualité linguistique dans nos communications, nous représentons bien mal les Canadiens. Quand notre dualité linguistique n'est pas mise en valeur dans les services que nous leur offrons, nous les laissons tomber.

Quand je suis arrivée au Canada, mon mari et moi avons décidé que nos enfants apprendraient les trois langues des Amériques, nommément le français, l'anglais et l'espagnol. À cette fin, nous avons envoyé nos enfants au Québec et au Mexique à plusieurs reprises. Comme je siège maintenant au Sénat, je suis déterminée à trouver des façons de donner aux enfants britanno-colombiens les moyens de parler nos deux langues officielles couramment. C'est leur patrimoine.

Je suis également grand-mère, et je sais qu'il est essentiel que mon petit-fils comprenne qu'il appartient à un grand pays et qu'il doit parler nos deux langues officielles. Ce n'est pas un choix.

Honorables sénateurs, dans l'intérêt de l'unité nationale, des merveilleux habitants de notre pays et de nos enfants, nous devons mettre le français et l'anglais en valeur dans toutes nos communications, autant publiques que privées, et dans tous les services que nous offrons. C'est notre devoir en tant que Canadiens. Nous sommes un pays bilingue.

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, le débat sur le projet de loi était ajourné à mon nom et je souhaite qu'il demeure ajourné à mon nom.

(Sur la motion du sénateur Comeau, le débat est ajourné.)

[Français]

La Loi sur les conflits d'intérêts

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Day, appuyée par l'honorable sénateur Losier-Cool, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-208, Loi modifiant la Loi sur les conflits d'intérêts (cadeaux).

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, je note que le sénateur Angus a dû s'absenter pour un certain temps. Je sais qu'il voulait participer au débat sur ce projet de loi aujourd'hui. Il est au courant que la motion en est à la 14e journée. Puisqu'il a l'intention de parler avant longtemps sur ce projet de loi, je voudrais proposer l'ajournement à son nom.

(Sur la motion du sénateur Comeau, au nom du sénateur Angus, le débat est ajourné.)

(1540)

[Traduction]

L'importance des sables pétrolifères du Canada

Interpellation—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Eaton, attirant l'attention du Sénat sur les avantages des sables bitumineux du Canada.

L'honorable Stephen Greene : Honorables sénateurs, je tiens à remercier les sénateurs Eaton et Segal de leurs observations sur les sables pétrolifères du Canada. Il ne fait aucun doute que les sables pétrolifères sont une réussite d'ordre économique, et ils ont a largement démontré qu'ils sont également une réussite d'ordre moral. L'exploitation des sables pétrolifères est la concrétisation de nos valeurs, à savoir la préservation de l'environnement et le libre-échange, sur le plan industriel.

Je les remercie du survol qu'ils ont fait de l'histoire des sables pétrolifères. Je suppose que de nombreux Canadiens entendent parler pour la première fois de la façon proprement canadienne dont a été développé le secteur des sables pétrolifères. J'aborderai maintenant les enjeux politiques liés à ce secteur.

J'aimerais d'abord reconnaître l'apport d'Anne McLellan, l'unique ministre libérale de l'Alberta, qui a réussi à protéger le secteur des sables pétrolifères des mesures proposées par d'autres membres du Cabinet du gouvernement Chrétien, qui cherchaient à imposer des taxes et à réglementer le secteur au point de l'éliminer. Elle a fait en sorte qu'un deuxième programme énergétique national ne détruise pas ce secteur.

Permettez-moi de dire avec la même franchise que si on avait adopté la taxe sur le carbone que proposaient Michael Ignatieff et Stéphane Dion au cours de la dernière campagne électorale, nous nous serions infligé un tel coup que le PEN aurait paru bien banal en comparaison. Je n'ai jamais compris pourquoi les sénateurs libéraux de l'Alberta, faisant fi de la vision d'Anne McLellan, continuent d'être en faveur d'une taxe sur le carbone.

Bien entendu, comme nous le savons, la plupart des critiques concernant l'exploitation des sables pétrolifères ne viennent pas des politiciens canadiens. Elles viennent plutôt de groupes militants professionnels, parmi lesquels se trouvent des terroristes écologistes, si vous me passez l'expression. La plupart de ces groupes sont basés à l'étranger.

Dernièrement, un article du Financial Post démontrait qu'au moins 36 campagnes contre l'exploitation des sables pétrolifères au Canada sont financées par la fondation Tides, un groupe de pression multimillionnaire basé aux États-Unis. Pour dissimuler la provenance étrangère de l'argent, la fondation Tides a recours à des prête-noms canadiens au service de bâilleurs de fonds étasuniens. J'aime les Américains autant que n'importe qui d'autre, et peut-être davantage que la plupart des gens, mais je ne suis pas prêt à les laisser orienter nos décisions politiques par quelque moyen que ce soit. Le bras canadien de la fondation Tides a reçu plus de 56 millions de dollars américains provenant des contribuables étasuniens depuis 2000.

D'autres groupes militants étasuniens sont aussi à l'œuvre, en plus de Tides. Ils ont dépensé près de 200 millions de dollars américains, au cours des dernières années, dans le but d'influer sur les politiques canadiennes. Par exemple, les annonces visant à anéantir le secteur touristique en Alberta ont été payées par la fondation Rockerfeller.

Le Financial Post donne aussi un autre exemple frappant de cette influence, soit la Fondation David Suzuki, qui se dit aussi canadienne que le sirop d'érable, mais à laquelle des militants des États-Unis ont versé plus de 10 millions de dollars américains. Il ne fait aucun doute que le militantisme écologiste est une occupation lucrative.

Cependant, les militants à gages et les bonimenteurs de l'écologisme qui nous viennent des États-Unis ne sont que du menu fretin comparativement au mastodonte qu'est la multinationale Greenpeace. Basée en Europe, la société Greenpeace International a un budget annuel qui dépasse les 200 millions de dollars américains, et les sables pétrolifères constituent l'un de ses meilleurs arguments de collecte de fonds.

L'une des tactiques favorites de Greenpeace est la désobéissance civile organisée et planifiée. Des militants de Greenpeace, dont bon nombre arrivent par avion de l'étranger, s'introduisent régulièrement sans permission dans des mines et des raffineries de sables pétrolifères pour y commettre des méfaits. Évidemment, ces coups publicitaires très bien orchestrés sont filmés par des professionnels de Greenpeace, et les films sont diffusés dans le monde entier avec des messages invitant les gens à faire des dons en argent. Nous assistons donc au cycle sans fin du financement de coups publicitaires dans le but d'amasser encore plus de dons.

D'une certaine manière, Greenpeace se trouve dans le même camp que les sociétés pétrolières puisque les sables pétrolifères sont très rentables pour elle. Et pourtant, les coups publicitaires de Greenpeace sont la preuve de la supériorité morale du Canada en ce qui a trait aux sables pétrolifères, car ce n'est que dans une démocratie libérale comme le Canada, où le droit à la dissidence politique est protégé par la Constitution, que des saboteurs peuvent entrer par effraction sur les terrains d'une industrie stratégique en sachant qu'ils ne risquent pas d'être abattus par la police ou des agents de sécurité privés.

Les membres de Greenpeace n'ont jamais pénétré par effraction dans une usine de l'Arabie saoudite ou de l'Iran, mais le cas échéant, ils auraient été immédiatement abattus, et ils n'ont même jamais tenu de conférence de presse paisible dans l'un ou l'autre de ces pays. Le Canada n'est pas le plus important producteur de pétrole au monde, mais il est l'un des producteurs les plus éthiques au monde. C'est précisément la raison pour laquelle Greenpeace s'intéresse autant à nous. Nous sommes une cible facile. Ils ne seront pas tués et ils pourront recueillir beaucoup d'argent.

Comparez un peu les violentes attaques de Greenpeace à l'égard des sables pétrolifères, y compris leurs petits délits routiniers ici, avec l'approche docile et obéissante que cette association adopte à l'égard du plus important pollueur au monde, la Chine. Selon la Banque mondiale, 20 des 30 villes les plus polluées au monde se trouvent en Chine. La Chine est maintenant reconnue comme étant le plus gros émetteur de gaz à effet de serre au monde. De plus, il se produit régulièrement des catastrophes environnementales en Chine, mais la section de Greenpeace basée dans ce pays semble avoir adopté la règle d'or qui veut qu'on ne doit pas critiquer le gouvernement chinois.

On ne trouve pas une seule publicité de Greenpeace, pas une vidéo et pas une page de son site Web qui critique le gouvernement chinois. Greenpeace s'oppose avec véhémence à l'énergie nucléaire et aux armes nucléaires partout au monde, mais pas en Chine. La Chine a sa propre version des sables pétrolifères, mais Greenpeace n'a rien à redire à cela non plus.

Si Greenpeace devait faire autant de critiques sur la Chine qu'elle en fait sur le Canada, l'organisation serait vite expulsée du pays et il faut savoir que les nouveaux riches Chinois sont devenus une importante source de financement pour Greenpeace. Il est clair que les membres de Greenpeace ont choisi de ne pas intervenir dans le dossier de l'environnement en Chine, en échange de quoi on leur a laissé le droit de recueillir des fonds.

Le fait que nous permettons à Greenpeace de mener ses activités au Canada est un signe de notre force et non de notre faiblesse. Contrairement à bon nombre de producteurs de pétrole dans le monde, nous ne nous débarrassons pas des gens qui nous critiquent, nous les écoutons et nous apprenons.

Les Canadiens ne toléreraient jamais que l'industrie énergétique se comporte comme le font les industries des pays de l'OPEP, mais il semble que Greenpeace n'ait rien à redire sur le comportement du cartel pétrolier de l'OPEP, tant des sociétés pétrolières que des gouvernements qui les régissent. Greenpeace n'a rien à redire sur ce qui se produit en Iran, en Arabie saoudite, au Venezuela et dans d'autres pays, ou du moins c'est ce que nous sommes portés à croire, puisque Greenpeace ne se prononce jamais sur la production de pétrole dans ces pays.

D'un autre côté, les Canadiens n'accepteront jamais le génocide commis par le Soudan au Darfour, en grande partie à cause du pétrole, mais Greenpeace est restée silencieuse.

Nous, Canadiens, n'approuverions jamais le traitement qu'on réserve aux femmes, aux gais et à d'autres minorités en Arabie saoudite et en Iran, mais Greenpeace n'a jamais pris la peine de publier un communiqué de presse à ce sujet.

Nous, Canadiens, ne tolérerions jamais le vol de pétrole en proportions gigantesques, comme l'ont fait des dictateurs et des fonctionnaires. Par exemple, au Nigeria, des représentants du gouvernement ont volé plus de 350 milliards de dollars au Trésor, laissant leur pays en état de sous-développement. Greenpeace est-elle préoccupée par la situation? Nous ne le savons pas.

Même les budgets phénoménaux que Greenpeace, la fondation américaine Tides ou d'autres organismes consacrent à la sollicitation de fonds n'expliquent pas tout. Qui bénéficie réellement d'une taxe sur les sables pétrolifères? Nous savons que les bonnes gens de Greenpeace en profitent, mais cela profite-t-il à d'autres?

Depuis cinq ans que les sables pétrolifères rapportent bien, les exportations de pétrole saoudien aux États-Unis ont diminué de 80 millions de barils par année. Au prix actuel, cela représente plus de 6 milliards de dollars par année, et l'on s'attend à ce que l'exploitation des sables pétrolifères canadiens prenne de l'expansion, ce qui réduira encore l'importation du pétrole de l'OPEP par les États-Unis. Un nouveau pipeline vers la côte Ouest permettrait d'écouler le pétrole canadien sur les marchés asiatiques. Nous pourrions ainsi en vendre à la Chine, au Japon, à l'Inde et à la Corée. Tous ces pays mis ensemble importent beaucoup plus de pétrole que les États-Unis.

Le Canada ne remplacera jamais l'OPEP comme source de pétrole. Même selon les projections les plus optimistes, les sables pétrolifères ne pourront fournir qu'environ 6 p. 100 de la demande mondiale totale. Néanmoins, grâce à nos sables pétrolifères, les dictateurs de l'OPEP ont un manque à gagner annuel de dizaines de milliards de dollars, et cet argent contribue plutôt à l'épanouissement de notre démocratie libérale pacifique. Il n'y a aucun doute qu'une taxe sur le produit de nos sables pétrolifères bénéficie à l'OPEP.

Je me suis montré critique à l'égard de lobbyistes internationaux voués à l'environnement comme Greenpeace et la fondation Tides, mais permettez-moi de préciser que je respecte la liberté de parole de ces organismes et leur droit de critiquer pacifiquement notre gouvernement et l'exploitation des sables pétrolifères. Notre pays valorise grandement la réflexion honnête, et nous savons que l'autocritique est un facteur nécessaire, si nous voulons améliorer les choses.

Seulement, quand des lobbyistes étrangers grassement payés nous font la leçon sur notre sens moral tout en restant silencieux sur la valeur morale des solutions de rechange à l'exploitation des sables pétrolifères, je ne peux m'empêcher de constater que quelque chose ne va pas. Ces gens n'appliquent pas uniformément les principes qu'ils professent et, s'ils réussissaient à mettre un terme à l'exploitation des sables pétrolifères, ils s'éloigneraient encore davantage du but qu'ils prétendent viser, soit la production d'un pétrole socialement responsable. Et quand ces groupes n'appliquent pas équitablement leurs principes d'éthique, il ne reste qu'une machine à ramasser des fonds, une machine pour qui la survie et la rentabilité de l'organisation prend le pas sur les raisons qui font qu'elle existe. Résultat : ces groupes ont souvent tendance à pratiquer ce que j'appellerais l'environnementalisme sélectif, c'est-à-dire un environnementalisme hypocrite.

Car aussitôt qu'on les presse de trouver des solutions de rechange aux sables pétrolifères canadiens, ces lobbyistes, qui ne veulent surtout pas parler de l'OPEP, deviennent soudain maîtres dans l'art du flou. Ils parlent de nouvelles technologies inédites; ils parlent de solutions éconergétiques qui ne verront pas le jour avant 30 ou 40 ans. Ils ne répondent jamais aux vraies questions, comme : « Si ce n'est pas avec des produits pétroliers canadiens, avec quoi les Américains vont-ils remplir leurs réservoirs à essence cette semaine? ». Eh bien, s'ils veulent faire le plein, les 300 millions d'Américains vont bien être obligés de se tourner vers des produits étrangers.

S'ils étaient moralement sérieux, ceux qui critiquent les sables pétrolifères reconnaîtraient que c'est ou bien du pétrole éthique canadien, ou bien du pétrole de l'OPEP. Au bout du compte, c'est ce qui m'agace le plus à propos des collecteurs de fonds professionnels qui se font passer pour des environnementalistes : ils sont intellectuellement malhonnêtes. Ils savent qu'il n'y aurait pas une seule voiture de moins sur les routes si on arrêtait complètement d'exploiter les sables pétrolifères, car le pétrole canadien, dont la production est conforme aux principes éthiques, serait remplacé par du pétrole provenant de l'OPEP. Un point, c'est tout.

En fait, le monde serait plus pollué et plus dangereux si on arrêtait d'exploiter les sables pétrolifères, parce que la production se ferait dans des pays où les régimes se moquent allègrement de l'environnement, où les droits de la personne ne figurent même pas parmi les aspirations des habitants et où des centaines de millions de dollars sont transmis chaque année aux pires terroristes du monde. C'est d'abord et avant tout pour cette raison que nous devons rejeter les propos de ceux qui critiquent le plus durement les sables pétrolifères : pas parce qu'ils représentent des intérêts étrangers plutôt que canadiens, pas parce qu'ils déguisent leur campagne de financement en campagne de défense de l’environnement car la seule chose qui les intéresse, c’est leur budget, mais parce que, si nous devions les écouter, la production d’énergie ne se ferait plus au Canada, le producteur qui possède le meilleur bilan éthique au monde, mais dans des pays qui n'ont pas les mêmes principes éthiques que nous, notamment sur le plan environnemental, ce qui serait une véritable tragédie pour l'ensemble de la planète.

(Sur la motion du sénateur Comeau, au nom du sénateur Segal, le débat est ajourné.)

(1550)

Le racisme au Canada

Interpellation—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Oliver, attirant l'attention du Sénat sur l'état du pluralisme, de la diversité et du racisme au Canada et, en particulier, sur comment nous pouvons développer de nouveaux outils adaptés au XXIe siècle pour lutter contre la haine et le racisme, réduire le nombre de crimes haineux et accroître la tolérance au Canada en matière de race et de religion.

L'honorable Vivienne Poy : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui au sujet de l'interpellation du sénateur Oliver sur l'état actuel du pluralisme, de la diversité et du racisme au Canada. Je vais passer en revue les répercussions que notre politique de multiculturalisme a eues sur les minorités ethniques et l'immigration, et parler des mesures que nous pouvons prendre pour aller de l'avant, en tant que pays pluraliste prospère.

Son Altesse l'Aga Khan, chef spirituel de la communauté musulmane ismaélienne à qui le sénateur Oliver a fait référence, définit le pluralisme comme étant « la convergence de gens ayant des origines et des intérêts divers, au sein de divers organismes qui poursuivent des buts différents à des fins d'expression créatrice, lesquelles sont très utiles et méritent le soutien du gouvernement et de l'ensemble de la société ». Autrement dit, le pluralisme va bien au-delà du respect des cultures et comporte l'acceptation d'autres idées ou pratiques qui mettent parfois en question nos propres croyances.

L'Aga Khan a fait l'éloge du bilan du Canada en matière d'appui au pluralisme et a créé le Centre mondial du pluralisme sur la promenade Sussex à Ottawa. Il s'agit d'un centre de recherche et d'éducation et d'un lieu de dialogue, d'échange et de rencontre pour des gens d'origines différentes qui se cherchent des points communs.

Le professeur Will Kymlicka, de l'Université Queen's, a récemment rédigé un rapport pour le gouvernement du Canada, dans lequel il écrit ceci :

[...] nous avons été témoins non seulement de preuves croissantes de l'avantage comparatif du Canada en matière d'intégration des immigrants, mais également de preuves croissantes que la politique sur le multiculturalisme a joué un rôle important dans cette réussite comparative.

[...] il existe de plus en plus de preuves que les immigrants au Canada et les minorités visibles ou confessionnelles réussissent mieux que dans la plupart des autres démocraties occidentales, sinon dans toutes ces démocraties.

Puis, il a ajouté ce qui suit :

[...] des recherches récentes ont révélé ce qui suit :

— un degré élevé d'identification et d'acceptation mutuelles entre les immigrants et les Canadiens de naissance.

Malgré toutes ces bonnes paroles, nous sommes-nous écartés du bon chemin, à tout le moins selon nos médias? Réfléchissez à ce qui suit. On a pu lire dans le Globe and Mail un article intitulé « Le multiculturalisme est-il une mosaïque ou une erreur? » Sur les ondes de TVOntario, un groupe de discussion s'est demandé si on avait sonné le glas du multiculturalisme. Le Centre pour une réforme des politiques d'immigration, un groupe de réflexion privé mis sur pied cette année, semble être contre l'immigration, les réfugiés, la Charte des droits et libertés et la réunification des familles. Des articles publiés dans la presse écrite qualifient les quartiers ethniques de « ghettos ». Rob Ford a été élu maire de Toronto, la ville la plus multiculturelle du monde. Enfin, Maclean's a publié récemment un article intitulé « Trop asiatique? ».

Au même moment, apparemment en contradiction directe avec toutes ces voix stridentes qui remettent en question l'efficacité du modèle pluraliste canadien, le nouveau maire de Calgary, Naheed Nenshi, est un homme progressiste de 38 ans, professeur d'administration et musulman ismaélien, dont la famille, originaire de Tanzanie, a immigré à Calgary. Qu'est-ce qui se passe?

Je crois que la diversité est la plus grande force du Canada. À Toronto, nous avons la chance de vivre dans une société qui a été transformée par une immigration massive et qui est à la fois dynamique et cosmopolite. Nous sommes toujours en contact avec des gens originaires de toutes les régions du monde, ce qui aide à ouvrir les esprits.

Dans ma vie publique et privée, je me rends compte que le multiculturalisme est un succès au Canada, car je suis en communication constante avec diverses communautés d'un bout à l'autre du pays. Il faut améliorer notre politique pour intensifier l'interaction entre les cultures et dissiper l'ignorance. Parallèlement, n'oublions pas que, dans une large mesure, l'approche canadienne a permis de créer le genre de société pluraliste à laquelle nous aspirons. Cette opinion est renforcée par toutes les études universitaires qui examinent les résultats scolaires, l'adoption de la citoyenneté et les degrés d'acceptation sociale et de participation politique.

Cette réussite se vérifie également dans la plupart des sondages, même ceux menés immédiatement après les événements du 11 septembre 2001. Par exemple, en 2002, 83 p. 100 des Canadiens convenaient que les gens qui appartiennent à des groupes raciaux et culturels différents enrichissent la vie culturelle du Canada. En 2006, le même pourcentage de personnes interrogées convenait que les musulmans apportent une contribution positive au Canada.

Certains ont suggéré que le multiculturalisme soit rebaptisé. Les termes « interculturalisme » et « pluralisme » ont été suggérés. Cependant, quel que soit le terme utilisé, le multiculturalisme est la marque distinctive du Canada. Au lieu de le rebaptiser, nous devrions le considérer comme une politique en devenir, un travail de longue haleine.

Nous connaissons tous le nouveau discours qui nous vient de l'Europe au sujet de l'échec du multiculturalisme. Honorables sénateurs, le Canada n'est ni l'Allemagne ni la France, des pays qui ne disposent d'aucune politique en matière de multiculturalisme. Il est donc impossible de comparer leur situation au modèle canadien. En fait, l'enseignement que nous devrions retenir de l'expérience de l'Allemagne, à plus forte raison au moment où le gouvernement canadien préconise de plus en plus le recours aux travailleurs temporaires, c'est que la façon dont ce pays a traité les travailleurs temporaires turcs l'a conduit à l'impasse actuelle. Nous ne voulons pas nous engager sur la même voie que l'Allemagne.

En comparant le Canada à l'Europe dans une étude importante effectuée en 2007, intitulée Belonging : diversity, recognition and shared citizenship in Canada, l'Institut de recherche en politiques publiques a conclu que :

[...] Peu d'éléments indiquent que le Canada se dirige vers une profonde ségrégation sociale comme celle que l'on craint dans certaines parties de l'Europe [...] Le Canada ne se dirige pas aveuglément vers la ségrégation. Rien ne justifie un changement d'orientation draconien dans les politiques de multiculturalisme, comparable à celui qui est en cours dans certains pays européens.

L'un des principaux défis auxquels nous avons à faire face en ce moment, c'est de déterminer comment intégrer la religion dans le contexte du multiculturalisme. En Ontario, la question de l'intégration de la charia au droit de la famille a fait l'objet d'un débat, tout comme celle du financement public des écoles confessionnelles. Les deux initiatives ont été abandonnées.

Au Québec, nous sommes tous au courant de la Commission Bouchard-Taylor de consultation sur les pratiques d'accommodement reliées aux différences culturelles et du projet de loi visant à interdire le port du niqab au moment de la prestation ou de la réception de services publics.

Pendant ce temps, en Ontario, une ordonnance de la cour ouvre la porte au témoignage devant les tribunaux de femmes portant un niqab. Les médias ont rapporté un certain nombre de crimes d'honneur, ce qui a aiguillonné le débat sur la diversité religieuse. Le soi-disant crime d'honneur n'a rien à voir avec la diversité. Il s'agit d'un meurtre et cet acte est traité comme tel par nos lois.

Charles Taylor, coauteur du rapport québécois, prône le dialogue, sans lequel, dit-il, nous nous égarerons. Taylor dit en outre que la récente islamophobie européenne est « le genre de stupidité tout à fait ignorante dans laquelle pataugent les sociétés démocratiques ». Il ajoute que cela « s'applique également à toute vision méprisante d'autrui ».

(1600)

Malheureusement, en manipulant les politiques multiculturelles et en tenant un discours anti-immigrants et anti-refugiés pour se faire du capital politique, les politiciens incitent souvent au racisme à l'égard de collectivités données. Il suffit de penser à l'arrivée récente d'un plein navire de Tamouls qui réclamaient le statut de réfugié et au discours politique qui a été tenu à ce sujet, ce qui a fait monter les tensions entourant la question de l'immigration et à l'égard des demandeurs d'asile comme des membres de minorités visibles établies.

Notons cependant que, lorsqu'un demandeur du statut de réfugié arrive seul dans un aéroport canadien, cela ne soulève pas l'indignation. Il fait partie des chanceux qui peuvent se payer l'avion au lieu de s'exposer au danger d'un voyage en mer à bord d'un bateau qui prend l'eau.

Le projet de loi C-49, qui en est à l'étape de la deuxième lecture à l'autre endroit, a pour but de décourager les activités de passage de clandestins, qui sont des opérations internationales. Ce projet de loi prendra en définitive pour cibles des demandeurs du statut de réfugié qui arrivent au Canada en groupe, leur imposant arbitrairement une période de détention obligatoire maximale d'une année, sans possibilité d'en appeler d'une décision défavorable.

Selon Amnistie Internationale, ce projet de loi va à l'encontre de nos obligations juridiques en vertu du droit international canadien et ne fera rien pour prévenir le passage de clandestins.

Un autre défi qui se pose à notre modèle pluraliste est l'intégration économique difficile des nouveaux immigrants, surtout comparativement à des cohortes antérieures d'immigrants. En termes simples, les nouveaux immigrants prennent plus longtemps à rattraper les revenus des Canadiens de souche. Le sous-emploi des nouveaux immigrants coûte à notre pays des milliards de dollars en pertes de revenu. Fait intéressant à signaler, des immigrants me disent souvent qu'ils sont prêts à sacrifier leur propre carrière pour assurer un meilleur avenir à leurs enfants.

L'existence du sous-emploi, même s'il y a lieu d'avoir un débat politique sérieux sur la reconnaissance des titres de compétence étrangers, sur l'agrément et sur la planification du marché du travail, n'annule pas pour autant les tendances positives en matière d'intégration sociale et politique des immigrants dont font foi les bons résultats scolaires, les mariages entre personnes appartenant à des groupes culturels différents, l'adoption de la citoyenneté et le sentiment de fierté nationale.

Y a-t-il un conflit racial au Canada? Oui, comme cela peut arriver dans n'importe quelle société humaine, mais cela ne veut pas dire que notre politique multiculturelle n'est pas efficace. Nos quartiers ethniques n'abritent pas une classe marginale de citoyens qui vivent dans des ghettos comme cela se voit en Europe. En fait, plusieurs de ces quartiers sont cossus.

Dès la deuxième génération, la plupart des habitants de ces quartiers s'intègrent à la société canadienne et déménagent dans d'autres quartiers. Il est intéressant de souligner que le nombre d'unions mixtes entre un membre d'une minorité visible et un autre qui n'en fait pas partie a augmenté de 33 p. 100 entre les recensements de 2001 et de 2006. Selon un sondage mené au printemps dernier, la majorité des parents n'ont aucun mal à accepter que leur enfant épouse une personne d'une autre race.

Les immigrants et leurs enfants font preuve d'un grand désir de participer au système politique canadien. Ils sont deux fois plus nombreux à demander la citoyenneté du pays qu'aux États-Unis. Ils exercent leur droit de vote et se portent candidat pour une charge publique. Plus de citoyens nés à l'étranger sont élus au Parlement au Canada que dans tout autre pays, tant en chiffres absolus qu'en proportion de la population.

Un rapport préparé à la fin de 2008 pour Ressources humaines et Développement des compétences Canada a établi que la plupart des immigrants de seconde génération réussissaient aussi bien ou même mieux que leurs homologues nés au Canada, tout particulièrement dans le domaine de l'éducation. Plusieurs d'entre eux se déplacent librement d'un continent à l'autre. Partout où ils vont, ils apportent avec eux les valeurs canadiennes avec lesquelles ils ont grandi.

L'Université Ryerson a jeté un œil nouveau sur le rôle joué par les immigrants pour stimuler l'innovation au Canada et a démontré que malgré le fait que les personnes nées à l'étranger ne comptent que pour environ 20 p. 100 de la population, au moins 35 p. 100 des responsables des 1 800 chaires de recherche du Canada sont nés à l'étranger. Toutes ces statistiques laissent entendre que notre mosaïque est intacte. À moins que les familles canadiennes commencent à faire un plus grand nombre d'enfants, nous dépendrons de l'immigration pour ce qui est de la croissance nette de notre main-d'œuvre d'ici 2017, c'est-à-dire dans six ans.

La diversité est un avantage tant que nous améliorons notre façon de régler les problèmes à mesure qu'ils se présentent, et les médias ont de grandes responsabilités à cet égard. Comme l'a dit Charles Taylor :

Nos sociétés actuelles ne se maintiendront que si l'on peut y discuter avec franchise et ouverture, et, ce faisant, recréer une certaine notion de solidarité émanant de nos racines si diverses.

(Sur la motion du sénateur Andreychuk, le débat est ajourné.)

[Français]

Le Sénat en ligne

Interpellation—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Mitchell, attirant l'attention du Sénat sur la présence du Sénat en ligne et sur le site web du Sénat.

L'honorable Maria Chaput : Honorables sénateurs, il s'agit là d'un sujet très important. Par conséquent, j'aimerais proposer l'ajournement du débat à mon nom.

(Sur la motion du sénateur Chaput, le débat est ajourné.)

[Traduction]

L'égalité des femmes au Canada

Interpellation—Ajournement du débat

L'honorable Grant Mitchell, ayant donné avis le 21 octobre 2010 :

Qu'il attirera l'attention du Sénat sur la situation de l'égalité des femmes au Canada.

— Honorables sénateurs, je donne suite à mon avis d'interpellation. D'abord, je le lis : j'attirerai l'attention du Sénat sur la situation de l'égalité des femmes au Canada.

J'attire l'attention du Sénat sur cette question car, à l'instar de tous mes collègues du Sénat, j'en suis convaincu, j'accorde une grande importance à la question de l'égalité en général et de l'égalité des femmes en particulier. Par ailleurs, je crois que nous avons régressé sur le front de l'égalité au cours des dernières années, et c'est pour cela que je veux faire deux choses. D'abord, je veux évaluer où en est l'égalité des sexes au Canada, puis établir comment ou pourquoi nous avons régressé sur ce front — les sénateurs peuvent s'imaginer ce que cette démarche peut comporter — et enfin, discuter des mesures que nous pourrions prendre pour améliorer la situation au Canada.

Pour ce qui est de l'évaluation, en ce qui concerne la violence faite aux femmes au Canada, plus de la moitié des Canadiennes âgées de plus de 16 ans ont été victimes d'au moins une agression physique ou sexuelle. Chaque semaine, au Canada, une ou deux femmes sont tuées par un partenaire intime, actuel ou ancien. L'idée que je vais lancer n'est pas originale, mais elle est puissante, à savoir que, pour bon nombre de femmes et d'enfants, le foyer familial est l'endroit le moins sûr au monde.

La violence conjugale est la principale cause des condamnations pour infraction avec violence prononcées par les tribunaux non spécialisés pour adultes au Canada, à tout le moins au cours des cinq années allant de 1997-1998 à 2001-2002, et plus de 90 p. 100 des délinquants sont des hommes.

Dans un article publié dans le Globe and Mail en juillet 2010, Gerald Caplan dit ceci : au Canada, pas moins de 178 femmes — je répète — pas moins de 178 femmes, en moyenne, ont été tuées chaque année entre 1994 et 2008. C'est un nombre époustouflant.

(1610)

Il poursuit ainsi :

Pourquoi notre gouvernement n'a-t-il pas déclaré la guerre à l'ennemi intérieur qui continue à assassiner tant de femmes?

Près de 70 p. 100 des décès liés à l'utilisation d'armes à feu mettent en cause une arme d'épaule, et les femmes forment une majorité écrasante des victimes.

Voici un autre chiffre époustouflant : au 31 mars 2010, l'Association des femmes autochtones du Canada a dénombré 582 cas de femmes et de jeunes filles autochtones assassinées ou portées disparues.

Dans le domaine de la parité salariale, les femmes gagnent en moyenne 72 p. 100 du salaire de leurs collègues masculins. Toutefois, les femmes qui ont des enfants ne gagnent que 52 p. 100 du revenu de leurs collègues masculins. Parmi l'ensemble des Canadiens qui gagnent le salaire minimum, les deux tiers sont des femmes, qui sont en même temps surreprésentées parmi les travailleurs à temps partiel, les travailleurs non rémunérés et ceux qui se situent dans la tranche de revenu la moins élevée. Dans la tranche des revenus les plus élevés, la proportion des hommes dépasse celle des femmes de plus de 333 p. 100.

Les femmes et la pauvreté. Au Canada, une femme sur sept vit dans la pauvreté. Cela fait plus de 2 millions de femmes. Lorsque les mères sont pauvres, il est évident que les enfants le sont aussi. Plus d'un million d'enfants vivent dans la pauvreté au Canada, pauvreté qui est en forte corrélation avec des résultats scolaires médiocres. C'est donc un cercle vicieux. Si ces statistiques ne touchent pas les Canadiens privilégiés, je ne sais pas s'il y a quelque chose qui puisse les toucher. Le revenu est un déterminant clé de la santé. Cela signifie que les femmes et les enfants qui vivent dans la pauvreté sont plus susceptibles que les autres d'être en mauvaise santé physique et mentale. Encore une fois, c'est le cercle vicieux.

Le récent Global Gender Gap Report de 2010 publié par le Forum économique mondial est vraiment saisissant. Au chapitre de l'égalité entre hommes et femmes, le Canada se classe au 20e rang. Oui, nous venons après le Sri Lanka, le Lesotho et la Lettonie. C'est vraiment honteux.

Nous pourrions faire quelque chose pour remédier à cette inégalité. Cela prendra un certain temps, mais il est certain que si nous commençons à travailler sur des problèmes difficiles en faisant un pas à la fois, nous pouvons arriver à les résoudre. Mais, que fait le gouvernement conservateur quand il est confronté à ce genre d'inégalité flagrante? Il lui serait possible de s'attaquer à ce problème et d'y remédier en partie s'il pouvait seulement se soucier de l'inégalité, de la pauvreté et de la situation des femmes autant qu'il s'intéresse aux avions de chasse.

Voici ce que les conservateurs ont fait. Ils ont transformé le droit fondamental des femmes à la parité salariale en un avantage à gagner ou à perdre au cours des négociations collectives. C'est ce qui s'est produit l'année dernière lorsqu'ils ont enlevé aux femmes le droit de faire appel à la Commission des droits de la personne, qui considère la parité salariale comme un droit, et leur ont accordé en échange la possibilité de recourir à la Commission des relations de travail, où la parité salariale peut faire l'objet de négociations. Si quelqu'un ose dire que ce n'est pas là une diminution de ce droit, c'est qu'il ne sait pas en quoi consiste un droit.

Le présent gouvernement a réduit de 43 p. 100 le budget de fonctionnement de Condition féminine Canada tout en supprimant le mot « égalité » — et c'est vraiment mesquin — du mandat du Programme de promotion de la femme, comme si les mots « égalité » et « femme » n'étaient pas compatibles. À quoi cela peut-il aboutir?

Le gouvernement a également supprimé le questionnaire détaillé obligatoire du recensement de 2011, ce qui nuira à la crédibilité des données qui jouent un rôle essentiel dans les politiques et les programmes relatifs aux femmes qui vivent dans la pauvreté, aux femmes autochtones et aux femmes handicapées. Si on ne peut pas définir le groupe et le problème, je suppose qu'on ne peut pas faire d'efforts pour y remédier ou y consacrer des crédits. C'est un moyen détourné de commencer à réduire les dépenses destinées aux gens absolument vulnérables tout en consacrant 16 milliards de dollars à des chasseurs, sans même recourir à un appel d'offres.

On peut se demander pourquoi le gouvernement agit si vite pour acheter des chasseurs et si lentement pour aider les gens de ces catégories ou même pour aider les anciens combattants.

Les conservateurs ont banni l'expression « égalité des sexes » du vocabulaire du ministère des Affaires étrangères et ont littéralement embarrassé le Canada sur la scène mondiale en excluant la santé génésique des plans du G8 et du G20. Parlons donc de liberté d'expression. Ils craignent de placer les mots « égalité » et « femmes » dans la même phrase.

Quelle honte! C'est tout simplement incroyable.

Le gouvernement a supprimé la section de l'égalité des sexes de la Direction des droits de la personne du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Je me demande combien d'argent il a épargné ce faisant et combien le préjudice que cela a causé nous coûtera. En effet, le travail de ce groupe ne sera plus fait, avec les conséquences économiques et autres que cela implique.

Ils ont amputé de 1 milliard de dollars par an les ententes libérales sur l'apprentissage préscolaire et la garde des enfants qui aurait rendu les services de garde abordables pour les femmes à faible revenu. Si vous mettez l'accent sur les femmes à faible revenu, par définition, vous mettez l'accent sur la lutte à la pauvreté et cela donnerait à ces femmes et aussi aux femmes à revenu moyen et supérieur la possibilité de se trouver un emploi rémunéré. Je sais qu'il y a des gens qui ne pensent pas qu'il soit nécessaire pour les femmes de trouver un emploi, mais elles doivent le faire et elles ont le droit de le faire et, lorsqu'elles ont un emploi, elles peuvent être un peu rassurées en sachant que leurs enfants sont en sécurité et que l'on s'occupe bien d'eux. Est-ce trop demander?

Ils ont déchiré l'accord de Kelowna, qui aurait permis de fournir des services de santé, d'éducation et de développement économique aux femmes autochtones, qui en ont bien besoin. S'il existe un problème de pauvreté parmi la population canadienne, surtout parmi les femmes, c'est chez les femmes autochtones qu'il est le plus criant. Les femmes en général et les femmes autochtones en particulier sont frappées de façon disproportionnée par la pauvreté.

Ils ont éliminé le supplément du régime national de prestations pour enfants. Voilà pour le soutien des familles. Ils n'ont tenu aucun compte de la motion adoptée à l'unanimité le 25 novembre 2008 par la Chambre des communes — évidemment, ils ont tendance à ne pas tenir compte de ce qui se passe à la Chambre des communes avec ces damnés votes — en faveur de l'élaboration d'une stratégie de prévention de la violence contre les femmes.

Ils ont encore abandonné les femmes en tentant d'éliminer le registre des armes à feu avec le projet de loi C-391, qui aurait évidemment privé les policiers canadiens d'un outil crucial pour assurer la sécurité publique et pour assurer la sécurité des femmes.

Ils ont réduit le pourcentage de femmes au Sénat depuis qu'ils forment le gouvernement.

De plus, ils ont accentué la régression de la situation des femmes en réduisant le financement de différents groupes, dont des groupes internationaux qui travaillent en faveur de l'égalité des sexes, qui collaboraient avec Condition féminine Canada et qui s'occupaient d'autres dossiers concernant les femmes sur la scène internationale. Je donne quelques exemples. Ils ont supprimé le financement du Centre international MATCH, qui, je crois, a reçu des fonds 34 années de suite pour son travail en faveur de l'égalité des sexes partout dans le monde. Ils ont simplement éliminé sa subvention.

Le gouvernement a réduit le financement de l'Institut canadien de recherches sur les femmes, du Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail, de la Coalition pour l'équité salariale du Nouveau-Brunswick, de l'Alberta Network on Immigrant Women, de l'Association féminine d'éducation et d'action sociale, de l'Ontario Association of Interval & Transition Houses, du centre de ressources Womanspace, et je pourrais continuer. La liste est très longue.

Face à un problème évident cerné depuis très longtemps et qui renvoie à ce que je crois être une des valeurs fondamentales des Canadiens — à savoir, le sens et l'importance du principe d'égalité, de l'égalité des chances selon lequel on tend la main à un voisin moins chanceux — le gouvernement fait des coupes dans les programmes, tout simplement. Le gouvernement s'est montré mesquin au point d'enlever le terme « égalité » partout — dans de nombreux cas, pour le moins — où il pouvait apparaître près du mot « femmes », et ce, dans les documents et sur les sites web du gouvernement. Dans l'expression « égalité des femmes », il a supprimé le mot « égalité » et a sabré le financement destiné à des gens beaucoup moins chanceux que nous, dans le monde, et à des groupes qui aidaient ces gens depuis des années véritablement, dans de nombreux cas.

C'est ce qu'a apporté à ce pays, dans ce secteur très important, ce type d'idéologie et de dogmatisme.

Y a-t-il des mesures que nous puissions prendre? Il y en a beaucoup.

Tout d'abord, de toute évidence, nous devrions conserver le registre des armes à feu — et nous allons le faire. Les lois en matière de contrôle des armes à feu ont contribué à faire baisser le nombre de vols, de suicides, d'armes à feu, de meurtres et en particulier de meurtres de femmes. Le registre des armes à feu sauve la vie des femmes. Les honorables sénateurs savent-ils combien le registre des armes à feu coûte en fait? Il coûte 1,5 million de dollars par an. C'est un rapport que le gouvernement a escamoté et dont il n'a autorisé la publication qu'après le vote, qui l'affirme. Un million et demi de dollars, ce n'est que de l'argent de poche pour la circonscription de M. Clement. Voilà les économies qui seraient réalisées, et le gouvernement justifie l'élimination du registre par le souci d'économiser.

(1620)

Nous pourrions faire une analyse comparative entre les sexes de toutes les lois et politiques fédérales, y compris les politiques internationales, pour voir comment les politiques d'intérêt public touchent différemment les femmes et les hommes. Le gouvernement prétend faire cette analyse, mais quand nous lui demandons de répondre par oui ou non et de prouver qu'il l'a faite, nous constatons tout simplement qu'elle ne se fait pas.

Nous devrions appuyer le projet de loi de M. Ignatieff sur l'équité salariale, qui prévoit des mesures rapides de mise en œuvre des recommandations du Groupe de travail sur l'équité salariale de 2004. Ces recommandations portent notamment sur la création d'une commission de l'équité salariale pour assurer cette équité dans la fonction publique fédérale, les sociétés d'État et les sociétés de ressort fédéral.

L'un des éléments les plus importants pour le statut social, sinon le plus important, c'est le niveau de revenu. Par définition, les femmes sont donc nettement désavantagées dans leur quête de l'égalité et de tout ce qui vient avec l'égalité. Honorables sénateurs, considérez tous les problèmes qui seraient réglés si elles faisaient de grands pas vers l'égalité en gagnant autant d'argent que les hommes, ce qui n'est tout simplement pas le cas pour le moment.

Nous devrions accélérer l'enquête sur les femmes et les jeunes filles autochtones assassinées ou portées disparues. Le gouvernement a prétendu avoir débloqué des fonds. Il semblerait qu'une partie de cet argent commence à arriver sur le terrain, après des mois et des mois d'attente, sans qu'il y ait le moindre sentiment d'urgence.

Nous devrions rétablir le Programme de contestation judiciaire. De quoi le gouvernement a-t-il si peur? A-t-il peur, dans une démocratie, d'être appelé à répondre de certaines des choses qu'il fait, qu'il devrait faire ou qu'il ne devrait pas faire? Il parle de démocratie, mais il élimine le Programme de contestation judiciaire qui a joué un rôle essentiel dans la défense des droits des femmes au Canada — des femmes qui sont désavantagées et n'ont pas l'argent nécessaire pour agir. Aux yeux du gouvernement, ce désavantage ne pose pas problème.

Nous devrions songer à ce qui se passe aux États-Unis. Le président Obama a mis sur pied le White House Council on Women and Girls pour assurer une action fédérale coordonnée devant les défis que les femmes et les filles doivent relever et pour veiller à ce que tous les membres du Cabinet et les organismes qui en relèvent examinent avec détermination et rigueur les effets de leurs politiques et de leurs programmes sur les femmes et les familles. Le président Obama a également nommé un conseiller auprès de la présidence pour le conseiller expressément sur les questions de la violence au foyer et des agressions sexuelles. Voilà une chose importante et qui n'est pas si difficile. Ce n'est même pas difficile du tout. Reste à savoir où on place les priorités.

Le gouvernement devrait relancer l'idée d'un programme national de garderies et s'assurer d'agir, maintenant qu'est complété le rapport exigé par l'ONU sur la résolution 1325 du Conseil de sécurité.

Pourrais-je avoir encore cinq minutes?

Son Honneur le Président intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils disposés à accorder cinq minutes de plus au sénateur Mitchell?

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Pas une seconde de plus.

Le sénateur Banks : Il a dit : pas une seconde de plus.

Le sénateur Mitchell : Oui, j'ai entendu. Merci de cette générosité.

Bien des problèmes dans le monde, au Canada et dans le tiers monde disparaissent lorsque les femmes commencent à faire des études. Beaucoup de pays du tiers monde, nous le savons, n'ont que des capacités limitées pour accorder aux femmes l'accès à l'éducation. Dans un pays comme l'Afghanistan, l'une des raisons admirables — et il n'en manque pas — qui justifient notre présence prolongée est que les femmes n'ont même pas la possibilité d'aller à l'école, là-bas.

Je parle de la condition féminine à l'étranger, dans des pays du tiers monde, mais je parie que les sénateurs, s'ils étudiaient la question, constateraient qu'il y a des inégalités à cet égard ici même, chez les femmes autochtones, par exemple. Est-il facile pour les femmes autochtones de faire des études? Voilà l'inégalité dont je veux parler.

Considérons le problème sous l'angle de l'économie, du pouvoir de l'économie. Fait intéressant, McKinsey and Company, entreprise internationale de consultants de bonne réputation, a réalisé une étude avec l'Amazone Euro Fund. L'entreprise a choisi 89 sociétés européennes où la représentation des deux sexes était la meilleure aux plus hauts niveaux de la gestion et elle les a comparées à d'autres où les femmes étaient moins présentes aux postes de commande. Ses constatations sont frappantes :

Il ne fait pas de doute que, en moyenne, ces sociétés ont un rendement des capitaux propres supérieur à celui de leur secteur (11,4 p. 100 contre une moyenne de 10,3 p. 100) [...]

Quant aux sociétés où les femmes sont moins présentes aux plus hauts échelons de la gestion, les résultats d'exploitation, c'est-à-dire les bénéfices avant intérêts et impôts, les BAII, ont été de 11,1 p. 100 contre 5,8 p. 100, et leur progression sur le marché des actions a été de 64 p. 100 contre 47 p. 100 entre 2005 et 2007.

Cette étude est importante sur le plan des statistiques. Pour améliorer la situation et lutter contre la pauvreté dans le tiers monde, éduquons les femmes. Si les sénateurs veulent apporter des solutions à plusieurs problèmes sociaux auxquels le Canada est confronté actuellement, qu'ils améliorent la situation de l'égalité des femmes au pays. De la même façon, si le gouvernement cherche purement et simplement à stimuler l'économie et à créer davantage d'emplois, qu'il donne aux femmes la chance d'avoir leur place dans l'économie pour qu'elles soient fondamentalement égales.

Le sénateur Wallin : Je voudrais ajourner le débat à mon nom.

(Sur la motion du sénateur Wallin, le débat est ajourné.)

L'engagement du Canada en Afghanistan

Interpellation—Ajournement du débat

L'honorable Pamela Wallin, ayant donné avis le 18 novembre 2010 :

Qu'elle attirera l'attention du Sénat sur les efforts et les réalisations des membres des Forces armées, des diplomates et des travailleurs de l'aide du Canada en Afghanistan au cours des dix dernières années, notamment sur les grandes réussites au chapitre de la sécurité, des services de base, du développement économique et de l'aide humanitaire;

Les plans du gouvernement du Canada en ce qui a trait au maintien de l'aide à l'Afghanistan pour permettre à ce pays de se développer grâce à notre nouvel engagement pour des postes de non-combattants d'ici 2014 par la formation des forces de sécurité afghanes de manière à ce que l'Afghanistan puisse assumer peu à peu le contrôle de sa sécurité et de son avenir; et

Le fait que le gouvernement canadien poursuivra ses initiatives en matière d'éducation et de santé pour les enfants, de promotion de la diplomatie régionale et de prestation d'aide humanitaire au peuple afghan.

— Honorables sénateurs, je prends la parole concernant l'interpellation dont j'ai donné avis la semaine dernière au sujet des réalisations des militaires, des civils, des diplomates et des travailleurs humanitaires canadiens ainsi que du gouvernement en ce qui concerne les mesures prises en Afghanistan.

En juin dernier, le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense a entendu l'appel pressant de l'ambassadeur de l'Afghanistan au Canada, M. Jawed Ludin, qui a dit ceci : « Ma réponse au Canada est de lui demander de continuer à participer à notre effort de sécurité en renforçant nos forces. Je le répète, c'est notre première et plus importante priorité stratégique. Nous voulons bien faire les choses, avec votre aide. »

À la suite de ce témoignage et de tellement d'autres, notre comité a recommandé que les Forces canadiennes demeurent en Afghanistan après la fin de la mission de combat précisément pour aider à développer les forces de sécurité afghanes.

Maintenant, honorables sénateurs, le gouvernement répond à l'appel. Le Canada fournira jusqu'à 950 instructeurs militaires et employés de soutien jusqu'en mars 2014 pour continuer de former les forces de sécurité nationale afghanes, ce qui comprend autant les forces armées que la police de ce pays.

Il va sans dire que cette nouvelle a réjoui l'ambassadeur Ludin. « Cette nouvelle tombe à point nommé, a-t-il dit, et correspond exactement à ce dont mon pays a besoin en ce moment. »

Le gouvernement a rejeté l'attitude clairement défaitiste de certains sénateurs d'en face, qui disaient que le Canada devrait se retirer. Cela ne correspond pas à la tradition canadienne. Cela ne fait pas partie de notre longue et fière histoire, que ce soit en tant que combattants ou travailleurs humanitaires.

Nous avons fait ce que les Afghans, nos alliés, les libéraux à la Chambre des communes et nous savons être la chose à faire. Les dirigeants de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord, l'OTAN, ont applaudi notre décision. Hier, le sénateur américain Joe Lieberman, président du Comité sénatorial de la sécurité du territoire et des affaires gouvernementales, a louangé pendant une réunion la décision du premier ministre Harper, disant qu'elle était fondée sur des principes et non le résultat d'un sondage d'opinion. Il a ajouté ceci :

Je comprends à quel point il est difficile, sur le plan politique, d'appuyer ce combat en Afghanistan. Je comprends aussi comment la population finit naturellement par se lasser de la guerre, mais je tiens à vous dire à quel point la contribution du Canada est importante, et à quel point le peuple américain est reconnaissant du fait que vous allez demeurer là-bas, à nos côtés, dans un rôle de formation. C'est important à nos yeux, et aux yeux du peuple afghan.

Tout le monde est content, car l'objectif du Canada et de l'OTAN en Afghanistan est d'aider à développer les forces de sécurité nationales afghanes afin qu'elles soient de plus en plus capables d'assurer la sécurité et la défense de leur pays. Comme le colonel George Petrolekas l'a déjà dit au sujet de l'Afghanistan :

Nous serons vainqueurs si nous préservons l'espoir, tout en donnant aux Afghans les outils nécessaires pour qu'ils puissent continuer eux-mêmes de préserver l'espoir.

Le mot « espoir » est effectivement merveilleux. Le brigadier-général Jonathan Vance, qui a commandé deux fois nos forces en Afghanistan, a dit que la combinaison unique de compétences guerrières et humanitaires du Canada permet aussi de rallier le peuple afghan à notre cause. Le général Vance croit que l'espoir de ce peuple augmente et que la présence canadienne a un « effet entraînant ». Ce sont les progrès réalisés en matière d'éducation, d'alphabétisation, de soins de santé et de sécurité qui provoquent cet effet.

(1630)

Le général Vance a aussi fait valoir que le rétablissement d'une armée professionnelle sera une réussite et un élément de l'héritage durable que laissera l'engagement international en Afghanistan. Or, c'est ce que le Canada continuera de faire : aider à établir une armée professionnelle.

Actuellement, et au cours des dernières années, les troupes canadiennes ont fait de la formation et agi comme mentors auprès des forces afghanes, et la fonction de mentor a souvent voulu dire participer à des combats avec elles. Cette nouvelle mission est axée sur la formation et sera réalisée en terrain sécurisé, derrière des barbelés. Il faut toutefois rester réaliste. L'Afghanistan est un pays en guerre et demeure un endroit dangereux. Il n'y a aucune garantie de sécurité où que ce soit, mais nos soldats, dont bon nombre se sont portés volontaires pour accomplir plusieurs périodes de service, sont disposés à réaliser ce travail.

Je crois comprendre qu'aujourd'hui, à l'autre endroit, le Bloc québécois, le parti voué à la destruction du Canada, présentera une motion demandant la tenu d'un vote sur la mission du Canada en Afghanistan. Les députés de ce parti, et d'autres, prétendent que le premier ministre ne s'est pas conformé à la résolution parlementaire de 2008 et que, par conséquent, il aurait dû demander à la Chambre d'approuver cette mission de formation de trois ans.

Ce n'est pas le cas. Le premier ministre respecte le principe de soumettre au vote à la Chambre l'envoi de troupes en mission de combat. C'est là-dessus que portait la résolution parlementaire de 2008, une mission de combat à Kandahar. Rien dans cette résolution ne disait que les Forces canadiennes abandonneraient complètement l'Afghanistan à la fin de l'année prochaine. C'est d'ailleurs le premier ministre actuel qui a fixé l'usage moderne de demander la permission du Parlement avant d'envoyer des troupes au combat.

Comme je le disais, cette mission est axée sur la formation, et non le combat. C'est pourquoi il n'y a aucun précédent voulant qu'il faille demander la permission, pas plus que nous n'avons dû la demander quand nous avons déployé des troupes en Haïti après le tremblement de terre, ou quand nos forces ont contribué à la sécurité aux Olympiques ou au sommet du G8.

D'autres détracteurs se demandent pourquoi, après la motion parlementaire tendant à mettre fin à la mission de combat en 2011, le premier ministre acquiescerait maintenant à la demande de nos alliés, qui désirent que nous poursuivions ce que nous faisons si efficacement. Cela me rappelle ce que l'économiste John Maynard Keynes a dit un jour où on l'avait critiqué pour avoir modifié sa position sur la politique monétaire durant la dépression. Il avait répliqué ceci :

Quand les faits changent, je change d'avis. Que faites-vous, monsieur?

Avoir l'esprit ouvert est une qualité qui fait trop souvent défaut à nos dirigeants politiques. Je suis fière du premier ministre, car il a écouté le vibrant plaidoyer de nos alliés.

En l'occurrence, les faits nous indiquent que les forces de sécurité nationale afghanes ont toujours besoin de renforts et que les forces de l'OTAN ne sont pas assez nombreuses pour les aider. C'est pourquoi on nous a demandé de l'aide, et le premier ministre a déclaré que le Canada donnerait un coup de main pour remédier à la situation. De nombreuses personnes, dont les Afghans, sont heureuses de sa décision.

En quoi consistera cette mission de formation? Nos militaires professionnels et aguerris offriront aux forces afghanes la meilleure formation possible sur les fonctions de soldat, à savoir : comment entretenir et utiliser convenablement des armes à feu; comment lire des cartes; comment élaborer des plans; comment emballer leur attirail; comment construire des infrastructures; et comment constituer un corps d'officiers et instituer une discipline militaire.

Ils sont formés par les meilleurs militaires qui soient. Nos Forces canadiennes — terrestres, maritimes, aériennes et spéciales — n'ont rien à envier aux autres forces armées du monde. Le gouvernement a aidé nos militaires à recommencer à donner le meilleur d'eux-mêmes en leur fournissant, au moment opportun, le matériel dont ils avaient besoin après une décennie de noirceur.

Les gouvernements précédents ont envoyé nos militaires risquer leur vie sans qu'ils aient les outils nécessaires pour faire leur travail, dans des tenues conçues pour la jungle et à bord de jeeps aussi sûres que des boîtes de conserve. Ils avaient besoin d'une capacité de transport aérien lourd. Le gouvernement a donc accéléré l'acquisition d'avions de transport C-17, qui ont été mis en service rapidement, non seulement en Afghanistan, mais aussi à Haïti et dans d'autres pays où nous menons des missions.

Nos troupes avaient besoin d'une capacité de transport lourd tactique, et le gouvernement a commandé de nouveaux avions Hercules C-130J dont il prend maintenant possession pour remplacer les vieux Hercules. Nos forces avaient besoin d'hélicoptères de transport lourd, comme le recommandait le comité indépendant dont j'ai fièrement fait partie. Elles disposent maintenant d'hélicoptères Chinook et Griffin, ce qui leur évite d'avoir à demander d'être transportées à bord d'hélicoptères appartenant à d'autres pays et à dépendre de la bonne volonté des étrangers.

Les Forces canadiennes avaient besoin de nouveaux véhicules et de blindés améliorés, ce qu'elles ont obtenu. Elles n'ont pas été aussi bien équipées pour faire leur travail depuis des décennies, et le gouvernement est résolu à faire en sorte que cela se poursuive en autorisant l'achat de 65 avions d'attaque interarmées F-35, dont la livraison commencera d'ici six ans. Ces chasseurs de la cinquième génération ont été choisis au terme d'essais comparatifs en vol avec un appareil Boeing. Ils sont furtifs, ce qui signifie qu'ils sont très difficiles à repérer au radar. Il s'ensuit qu'un plus grand nombre de nos pilotes et de nos avions pourront revenir des missions de combat, puisque l'ennemi ne peut les voir. Ces appareils sont interopérables, ce qui signifie que leurs puissants ordinateurs de bord peuvent communiquer avec ceux de tous les autres chasseurs F-35 que nos alliés sont aussi en train de se procurer. Cette caractéristique leur donnera la possibilité toute nouvelle d'analyser ensemble l'espace de combat et d'agir de façon concertée.

Ce sont là les avantages techniques, mais il y a aussi des retombées économiques incroyables. On estime que le coût d'achat de 9 milliards de dollars se traduira pour le secteur canadien de l'aéronautique par des contrats d'une valeur de 12 milliards de dollars, au cours de la durée du contrat, soit 40 ans. Cela représente au moins 3 milliards de dollars en revenus d'emploi pour les 80 000 travailleurs de l'aéronautique au Canada.

Ces travailleurs obtiendront 3 milliards de dollars de plus qu'en vertu d'un contrat ordinaire assorti, avec des retombées industrielles et régionales. Il en est ainsi parce que notre industrie aura l'occasion de soumissionner pour les contrats visant plus de 3 000 appareils qui doivent être construits dans le monde.

En plus d'acheter du matériel, le gouvernement a aussi pris des mesures afin d'aider les soldats qui reviennent de l'Afghanistan, qui forment notre nouvelle génération d'anciens combattants, et dont un grand nombre ont subi des blessures physiques ou psychologiques. Depuis cinq ans, nous avons investi 2,5 milliards de dollars en argent neuf dans les programmes et les avantages destinés aux anciens combattants.

Récemment, le gouvernement a presque doublé ce montant, lorsqu'il a annoncé un investissement supplémentaire de 2 milliards de dollars. À cette somme vient s'ajouter un montant de 52,5 millions de dollars, qui sera consacré au cours des cinq prochaines années au programme Une tradition de soins. Ainsi, le total des nouvelles dépenses pour les anciens combattants va excéder 4,5 milliards de dollars.

En outre, le gouvernement a pris des mesures afin que l'allocation d'invalidité, communément appelée le paiement forfaitaire, soit plus flexible et que les anciens combattants puissent la toucher en versements, en montant forfaitaire ou en une combinaison des deux. Cette initiative se veut une marque de respect pour les hommes et les femmes qui risquent leur vie pour nous.

Qu'est-ce que le Canada a accompli jusqu'à maintenant en Afghanistan? Eh bien, nos soldats assurent pratiquement tout seuls, et depuis des années, le contrôle de la province de Kandahar, qui est la patrie des talibans. Ils ont commandé les troupes américaines sur le terrain. Grâce à leur expérience, ils ont pu aider les Américains à mieux comprendre Kandahar, les tactiques contre les insurgés, les techniques de guerre asymétrique et la psychologie de la population locale.

Plus récemment, nos troupes ont aidé à entraîner les nouveaux contingents de soldats américains. Maintenant que nous disposons des connaissances et de la force militaire requises, nous avons pu chasser la majorité des talibans de la région de Kandahar. Ces efforts ont été tellement fructueux que le général Vance, qui n'a pas l'habitude de faire des déclarations à la légère, a dit que la guerre en Afghanistan était « gagnable ». Il a précisé que « gagner » signifiait que les Afghans seraient capables de gérer les situations d'urgence, sans qu'une menace claire et permanente plane quotidiennement sur leur capacité de continuer à gouverner. Le général Petraeus a tenu le même genre de propos lors d'un récent dîner organisé par la fondation True Patriot Love, lorsqu'il s'est adressé à nos soldats et aux civils à la base de Kaboul.

Nous sommes tous d'accord pour dire qu'il n'y aura pas de défilé du jour de la victoire, mais nous contribuons à donner aux Afghans les compétences dont ils ont besoin pour assumer les obligations fondamentales de tout État, c'est-à-dire sécuriser le pays et protéger la population.

Les Forces canadiennes travaillent fort dans les EMOL, c'est-à-dire les équipes de mentorat opérationnel et de liaison, pour former et conseiller les bataillons du 205e corps de l'armée afghane. Aujourd'hui, dans la province de Kandahar, trois brigades de l'armée nationale afghane, qui totalisent 10 500 soldats afghans, protègent la population locale, travaillent avec les forces internationales et démontrent leur capacité à planifier et à mener des opérations.

Les réalisations du Canada vont bien au-delà des aspects purement militaires. Notre approche pangouvernementale nous a permis de favoriser des changements énormes dans ce pays. Par exemple, depuis notre arrivée en Afghanistan, le nombre total d'élèves de la première à la douzième année est passé de 900 000 garçons, principalement dans les centres d'endoctrinement talibans, à 7,3 millions d'élèves, dont 40 p. 100 sont des filles. Ainsi, près de 3 millions de filles dont les visages étaient cachés, dont les voix avaient été réduites au silence, et dont les mères et les grands-mères ont été tuées, ont maintenant espoir.

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Nous savons que si nous nourrissons le moindre espoir pour les États faillis, nous devons tabler sur l'éducation des jeunes filles et des femmes. Il y a près de 12 000 écoles en Afghanistan, dont 50 dans la région de Kandahar. Près de 4 000 écoles communautaires ont été construites ou rénovées avec l'aide du Canada et plus de 900 sont en construction. Il y a huit fois plus d'enseignants qu'avant, soit 158 000. Huit Afghans sur dix ont accès à des soins de santé et, à certains endroits, comme dans la province de Bamiyan, ils sont de qualité. Dans le cadre du programme canadien, nous avons vacciné 7 millions d'enfants contre la polio et 20 000 conseils de village ont été élus et travaillent à la réalisation de 40 000 projets. L'armée afghane compte 120 000 soldats et peut se passer en grande partie du soutien des alliés. Nous parlons de 21 bataillons, deux postes de commandement du corps d'armée, six postes de commandement de brigades et six unités de soutien de garnison. La police afghane peut mener ses opérations sans soutien externe dans 12 districts. Elle recourt régulièrement à des conseillers externes dans 39 autres districts et à une aide plus importante dans 39 autres. C'est un progrès énorme.

Pour ce qui est des objectifs du Canada énoncés dans les rapports trimestriels du gouvernement, nous avons atteint la totalité de nos objectifs de formation de gestionnaires et d'agents de services correctionnels. Nous avons octroyé des micro-prêts à 1 100 personnes. Nous avons atteint et même dépassé l'objectif de former 500 travailleurs de la santé en 2011. En fait, cette année, nous en avons formé 1 200. Nous avons aussi dépassé nos objectifs pour les programmes d'alphabétisation et de formation professionnelle.

M'accordez-vous encore deux minutes?

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, accordez-vous une prolongation de cinq minutes?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Wallin : Outre l'alphabétisation et la formation professionnelle, nous menons un projet de premier plan, celui du barrage Dahla et de son réseau d'irrigation, qui redonne vie à un désert aride en fournissant ce dont les Afghans ont peut-être le plus besoin : de la nourriture et de l'eau propre. Le Canada est en Afghanistan, dans le cadre d'une mission autorisée par l'ONU et dirigée par l'OTAN, avec plus de 60 autres pays et organismes internationaux, à la demande du gouvernement afghan, qui a été démocratiquement élu. L'objectif que visait et que vise encore le Canada est d'aider les Afghans à bâtir un pays plus sûr, stable et prospère qui ne soit plus un repaire de terroristes.

Le Canada est déterminé à aider le peuple afghan à bâtir un pays mieux gouverné. Il est évident, sur le terrain, que les forces de sécurité ont besoin d'un entraînement plus poussé. C'est la raison de notre présence en Afghanistan. Sans entraînement, la transition est impossible. En continuant l'entraînement, nous améliorerons les forces de sécurité et grossirons leurs rangs, et nous pourrons leur confier la responsabilité principale d'ici 2014. C'est un objectif atteignable, et c'est la bonne chose à faire.

L'honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, pourrais-je poser une question?

Son Honneur le Président intérimaire : Madame le sénateur Wallin est-elle disposée à prendre le temps qu'il lui reste pour répondre à une question?

Le sénateur Wallin : Me reste-t-il du temps?

Son Honneur le Président intérimaire : Oui.

Le sénateur Wallin : Bien sûr.

Le sénateur Cordy : Je remercie le sénateur Wallin. Le Canada a d'excellentes forces armées, cela va sans dire. J'ai eu l'occasion de visiter de nombreuses bases dans l'ensemble du pays. En tant que Canadienne, et notamment en tant que membre du Sénat canadien, je suis extrêmement fière des hommes et femmes qui nous représentent au Canada et à l'étranger.

Nul n'est mieux placé que les forces armées canadiennes pour veiller à l'entraînement des forces militaire et policière afghanes. La semaine dernière, j'ai eu l'occasion d'assister à des réunions de l'Assemblée parlementaire de l'OTAN. Un témoin afghan, qui travaillait en Afghanistan, a comparu devant la Commission sur la dimension civile de la sécurité, à laquelle je siège, pour parler des bonnes choses qui se passent au pays. Le sénateur a parlé de ces bonnes choses aujourd'hui, et l'éducation des femmes en est une dont je suis particulièrement fière.

Le témoin a soulevé certaines préoccupations, cependant, qui m'ont troublée. Premièrement, les Pachtounes représentent 50 p. 100 de la population afghane, mais seulement 20 p. 100 de l'effectif policier et militaire. On espère que cet écart pourra être comblé.

Deuxièmement, il a affirmé que les membres des services de police et de l'armée afghans ne prêtent pas allégeance au gouvernement, mais bien à des particuliers. Il craint que, après le départ des troupes de l'OTAN, leur manque d'allégeance envers le gouvernement ne les pousse à quitter leur poste pour aller travailler pour des seigneurs de la guerre et des barons de la drogue. C'est inquiétant.

Le sénateur Wallin : Je présume que le sénateur me demande de dire quelques mots à ce sujet.

Le sénateur Cordy : Oui.

Le sénateur Wallin : L'armée et la police afghanes sont composées de volontaires. Il n'y a pas de conscription obligatoire. Je tiens à ce que ce soit clair au cas où il y aurait un malentendu.

Certes, l'Afghanistan suscite de nombreuses inquiétudes. Même les Nations Unies classent le pays presque au dernier rang pour ce qui est de la qualité de vie. C'est un pays difficile, où il existe une longue tradition de corruption, et la situation ne changera pas du jour au lendemain. En rencontrant les soldats et les policiers afghans ainsi que leur chef respectif, j'ai vu qu'ils sont très fiers de pouvoir fournir les services les plus élémentaires et les plus essentiels qu'un État puisse offrir. Les Afghans sont un peuple fier et de puissants guerriers. Qui d'autre aurait pu faire la guerre aux Russes pendant 30 ans et remporter la victoire, puis faire la guerre aux talibans pendant 10 ans?

Selon moi, c'est parce qu'ils en retirent une fierté. J'ignore pourquoi le sénateur tient pour acquis qu'ils iraient travailler pour des seigneurs de guerre.

Le sénateur Cordy : Ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai repris ce que le témoin avait dit.

Le sénateur Wallin : C'est peut-être ce que certains d'entre eux feraient. Je ne le sais pas. D'après ce que les gens à qui j'ai parlé m'ont dit en Afghanistan, à mon avis, les Afghans sont très fiers d'avoir la possibilité de reconstruire leur pays et sont très enthousiastes à cette perspective.

(Sur la motion du sénateur Stratton, le débat est ajourné.)

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 24 novembre 2010, à 13 h 30.)


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