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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

3e Session, 40e Législature,
Volume 147, Numéro 89

Le mardi 1er mars 2011
L'honorable Noël A. Kinsella, Président



LE SÉNAT

Le mardi 1er mars 2011

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Hommages

Le décès de l'honorable Marian L. Maloney

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j'ai reçu un avis du leader de l'opposition qui demande que, conformément à l'article 22(10) du Règlement, la période des déclarations de sénateurs soit prolongée aujourd'hui, afin que l'on puisse rendre hommage à une ancienne collègue, l'honorable Marian Maloney, qui est décédée le 29 mai 2010.

Je rappelle que, conformément à notre Règlement, les interventions des sénateurs ne peuvent dépasser trois minutes, qu'aucun sénateur ne peut parler plus d'une fois et que le temps alloué aux hommages est limité à 15 minutes.

L'honorable David P. Smith : Honorables sénateurs et membres de la famille Maloney, j'ai rencontré Marian Maloney pour la première fois sur les marches de l'hôtel Prince Arthur, à Thunder Bay, à l'automne 1964. J'étais alors au début de la vingtaine et directeur national de l'aile jeunesse et bras droit de Keith Davey au siège du Parti libéral. Lester B. Pearson était premier ministre. Je parcourais le Canada toutes les deux ou trois semaines pour préparer les « huiles » du Parti libéral, catégorie à laquelle appartenait bien évidemment la famille Maloney. La circonscription était représentée par le néo-démocrate Doug Fisher, qui était également journaliste. Il fallait qu'on rencontre les Maloney.

J'étais sur les marches de l'hôtel Prince Arthur quand Marian Maloney s'est approchée et m'a dit : « Je m'appelle Marian Maloney, mais vous pouvez m'appeler Babe. » J'ai obtempéré, et nous sommes restés amis jusqu'à la fin de ses jours.

Bill Maloney a été nommé à la magistrature peu de temps après et la famille s'est installée à Toronto. Il faisait sans arrêt l'aller-retour sur les routes 90 et 97 lorsqu'il était juge régional en chef tandis que Marian s'occupait de tout à Toronto. Tous les libéraux actifs au sein du parti connaissaient Marian. Le bon fonctionnement de la démocratie dépend de personnes qui se dévouent corps et âme à leur parti. Il en va de même de tous les partis, ce n'est pas une observation partisane que je fais.

Marian s'occupait de quelques causes à Thunder Bay, dont le carnaval d'hiver et le concours de Miss Thunder Bay, mais sa véritable cause, c'était le Parti libéral. Elle tenait beaucoup à attirer davantage de femmes en politique et à ce qu'elles soient élues.

Elle était connue d'un océan à l'autre à l'intérieur du parti et elle était très active dans le Fonds Judy LaMarsh. Certains vieux comme moi se souviennent de Judy LaMarsh. Je l'ai très bien connue. Il y aurait encore beaucoup de choses à raconter, mais pas aujourd'hui.

En 1991, nous avons modifié les structures du parti et des décisions nécessaires ont été prises. Nous devions nommer quelques femmes pour en inciter davantage à devenir membre du parti. À l'époque, il y avait 23 circonscriptions à Toronto et 21 hommes y avaient été nommés. J'étais aussi directeur de campagne. Toutes les personnes nommées étaient des hommes. J'ai dit à M. Chrétien : « Il faut nommer des femmes dans les deux dernières circonscriptions. Nous ne pouvons pas présenter 23 hommes dans les 23 circonscriptions de Toronto. » M. Chrétien m'a donné raison. Marian a été le moteur de beaucoup de changements.

Je ne puis m'empêcher de raconter mon histoire préférée au sujet de Marian. J'ai milité pour sa nomination au Sénat et, lorsque cela a été fait, elle n'avait qu'une année à servir. Cependant, lorsque les choses se sont calmées, je lui ai demandé si tout allait bien. Elle m'a répondu : « Oui, tout va bien. Il n'y a qu'une chose qui me dérange : beaucoup de gens connaissent ma date d'anniversaire, mais je suis toujours restée vague au sujet de l'année de ma naissance. Cependant, ce renseignement est maintenant du domaine public et les gens se sont rendu compte que j'ai quelques années de plus que Bill. » Je lui ai répliqué qu'elle paraissait plus jeune que Bill et que la nomination en valait la peine.

Je présente mes plus sincères sympathies à la famille Maloney. À Marian, qui, je l'espère, nous écoute de là-haut, je dirai que nous avons besoin de plus de gens comme elle. Vous avez laissé un héritage magnifique en Patrick, Michael et Jamie.

L'honorable Catherine S. Callbeck : Honorables sénateurs, je veux aujourd'hui ajouter mes paroles à l'hommage rendu à la regrettée Marian Maloney, dont le décès constitue une grave perte pour tous ceux qui ont eu la chance de la connaître. Marian a consacré sa vie à améliorer les choses et son héritage continue de nous inspirer.

Nous le savons tous, Marian était très attachée au Parti libéral et estimait que les membres de ce parti formaient sa deuxième famille. L'avancement des femmes au sein du Parti libéral était une de ses grandes priorités. Marian est considérée comme étant la mère du Fonds Judy LaMarsh, qui fournit argent et encouragement aux femmes qui se présentent à des postes électifs. Elle a travaillé sans relâche à la constitution du fonds pour que davantage de femmes puissent participer avec succès à la vie politique. Ce faisant, Marian a aidé à changer les attitudes envers les femmes en politique. Elle soutenait et encourageait les candidates. Elle était l'amie et le mentor de beaucoup de femmes aspirant à faire carrière en politique. Elle avait des paroles et des gestes d'encouragement et elle travaillait fort pour aider les femmes par tous les moyens possibles.

(1410)

Il y a bien des années, Marian et son fils, Jamie, sont venus me rendre visite chez nous, à l'Île-du-Prince-Édouard, durant l'été. Ils logeaient chez nous et ont assisté à plusieurs événements, dont le baptême du NCSM Summerside. Marian a fait tout ce que font les touristes quand ils visitent la province. J'ai encore dans mon bureau une photo qu'elle m'a envoyée à son retour de voyage. On l'y voit costumée, de la tête aux pieds, en Anne des Pignons verts. Elle a beaucoup aimé notre île et s'y est bien amusée.

Qu'elle fût au bord de la mer à l'Île-du-Prince-Édouard, au Sénat ou chez elle, à Thunder Bay ou Toronto, Marian aimait la vie et vivait pleinement. Je fais part de mes condoléances à ses fils, Patrick, Michael et Jamie, ainsi qu'à leur famille. Elle nous manquera beaucoup.

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, je prends aujourd'hui la parole pour rendre hommage au sénateur Maloney, que je connaissais depuis plus de 30 ans. C'était une femme très dynamique. Le Parti libéral était sa deuxième famille, — on se souviendra plus précisément de son engagement envers ce parti et l'avancement des femmes au sein du parti — et le Fonds Judy LaMarsh était l'œuvre de sa vie.

Comme l'a dit Mme Jean Augustine, qui a été ministre et qui a représenté la circonscription d'Etobicoke—Lakeshore de 1993 à 2005, Marian Maloney était l'amie et le mentor de bien des candidates. Elle travaillait sans relâche pour le Fonds Judy LaMarsh, qui fournit du financement et de l'aide aux femmes qui se présentent en politique.

Je cite Jean Augustine :

Elle était la mère de ce fonds. Elle participait à tous les événements, sans exception.

Mme Augustine a raconté une anecdote qui remonte à sa campagne de 1993. Madame le sénateur Maloney avait alors eu l'occasion de montrer qu'elle savait prendre une situation en main. Voici ce qu'elle raconte :

J'avais un tout petit bureau de campagne équipé d'une seule table bancale. Elle est entrée, a placé cette table dans un coin stratégique et a déclaré : « Voilà mon bureau. » Nous avons tous ri parce que le local était tellement petit qu'il était impossible d'en réserver un coin à l'usage exclusif d'une seule personne, mais elle avait la situation bien en main.

Je reconnais bien là Marian. Elle prenait les choses en main.

En 1998, Mme Maloney était déjà bien connue pour ses efforts incessants quand le premier ministre Jean Chrétien l'a nommée sénateur. Au moment de sa retraite, en 1999, le sénateur Pépin a qualifié le sénateur Maloney de leader et de modèle pour la génération de femmes qui l'a suivie. Nous sommes nombreux à être du même avis.

À mes yeux, Marian personnifiait ce que signifie être un membre loyal, passionné et travailleur du Parti libéral. Je tiens à dire à ses fils, Patrick, Michael et Jamie — et surtout à ses petits-enfants — qu'un grand nombre de femmes sont en politique aujourd'hui grâce au travail acharné de leur mère et grand-mère. Je les remercie d'avoir partagé celle-ci avec un grand nombre de femmes du Parti libéral.

L'honorable Art Eggleton : Honorables sénateurs, je me joins à mes collègues pour rendre hommage à Marian Maloney. Marian n'a pas siégé au Sénat durant une longue période, mais elle a consacré sa vie au service des Canadiens, des gens de sa collectivité et des membres du Parti libéral. Sa famille peut être très fière des services qu'elle a rendus. Bien des souvenirs me viennent à l'esprit lorsque je pense à Marian.

Elle vivait à Thunder Bay, mais je l'ai connue lorsque j'étais maire de Toronto. Elle a apporté une précieuse contribution à la vie de notre ville. J'ai souvent bénéficié de ses conseils et aussi de son appui. Je peux d'ailleurs vous dire qu'elle donnait ses conseils d'une façon très catégorique.

Je suis surtout fier du travail qu'elle a accompli pour promouvoir la présence des femmes en politique. Chaque fois que je participais à la campagne d'une candidate féminine, j'étais certain de rencontrer Marian Maloney. Elle répondait toujours présente pour recruter des candidates et tenter de les faire élire.

Nous devrions perpétuer la tradition, la légende et l'héritage qu'elle nous a laissés. Nous sommes fiers des services que Marian Maloney a rendus à notre parti, mais aussi à notre pays.

L'honorable Terry M. Mercer : Honorables sénateurs, j'ai eu le privilège d'être le directeur national du Parti libéral durant une longue période et de jouer un rôle actif au sein du Parti libéral en Nouvelle-Écosse, en Ontario et dans tout le pays. Je ne me souviens pas du moment où j'ai rencontré Marian Maloney pour la première fois. En fait, je ne me souviens pas de l'époque où elle n'était pas membre du Parti libéral.

Marian était effectivement une personne éminente et elle avait une présence avec laquelle il fallait toujours composer. Tous avaient intérêt à tenir compte de sa présence, sinon elle se chargeait de rectifier la situation. Par ailleurs, si les questions touchant les femmes échappaient à la discussion de façon purement accidentelle, Marian s'empressait de rappeler tout le monde à l'ordre.

Et elle ne le faisait pas seulement dans le cas du pauvre directeur national du parti que j'étais. Je l'ai vue agir de la sorte avec des ministres. Sa victime favorite était Paul Martin. Je l'ai vue le corriger, en privé comme en public, lorsqu'il avait fait une erreur. Je l'ai vue faire des rappels à M. Chrétien lorsqu'il avait oublié un point ou que, selon elle, il n'avait pas porté suffisamment attention à un détail.

Mes meilleurs souvenirs de Marian ont trait à son travail pour le Fonds Judy LaMarsh, qui avait été mis sur pied pour encourager les femmes à participer au processus politique par l'entremise du Parti libéral. Il est important que les femmes participent aux activités de tous les partis politiques et, même s'il a parfois été difficile de recueillir de l'argent pour cette cause, Marian n'a jamais perdu sa motivation. De nombreuses femmes qui s'engagent dans la vie publique aujourd'hui et bien des femmes qui sont membres du Parti libéral doivent une fière chandelle au dévouement de Marian Maloney. Nous sommes tous extrêmement redevables aux membres de sa famille d'avoir bien voulu nous la prêter.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de membres de la famille de notre ancienne collègue, Marian Maloney.

Au nom de tous les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Le mois de la Croix-Rouge

L'honorable Catherine S. Callbeck : Honorables sénateurs, mars est le Mois de la Croix-Rouge. C'est l'occasion de sensibiliser la population au travail de la Croix-Rouge et de promouvoir ses activités de financement. Depuis plus de 100 ans, des travailleurs et des bénévoles dévoués ne ménagent pas leur temps et leurs efforts, tant au pays qu'à l'étranger, pour offrir des soins et du réconfort dans les moments de détresse, pour prévenir les blessures et les décès et pour assurer le bien-être des enfants et des adultes dans toutes les régions.

Comme nous le savons tous, la Croix-Rouge canadienne aide les gens dans des collectivités, au Canada et partout dans le monde, qui sont touchés par des situations d'urgence et des catastrophes. Les situations peuvent varier énormément, allant des familles qui n'ont plus de toit ni de biens à la suite d'un incendie aux catastrophes naturelles, comme les inondations et les tremblements de terre qui peuvent perturber tout un pays ou toute une région du monde. La Croix-Rouge passe à l'action immédiatement pour subvenir aux besoins essentiels, par exemple en envoyant sur place des gens ou des fournitures ou en recueillant des fonds.

Les activités de la Croix-Rouge ne se limitent pas à l'aide aux sinistrés. Elle met aussi en œuvre des programmes et des services qui assurent le bien-être des Canadiens ici, au pays. Par exemple, la Croix-Rouge canadienne offre un programme de secourisme qui vise à prévenir les décès et les souffrances attribuables aux blessures et aux maladies soudaines. Près d'un demi-million de Canadiens suivent une formation en secourisme et en RCR chaque année grâce aux programmes offerts par la Croix-Rouge.

Une autre activité de la Croix-Rouge est le programme de sécurité aquatique, qui a été conçu à un endroit qui entretient des liens avec l'eau depuis longtemps — l'Île-du-Prince-Édouard. En place depuis maintenant 65 ans, il s'agit du programme de sécurité aquatique le plus important et le plus reconnu au pays. Au nombre des activités offertes dans le cadre de ce programme, mentionnons des cours de natation, des cours de sécurité aquatique pour les nourrissons, les tout-petits, les enfants, les adolescents et les adultes, des programmes de formation pour les instructeurs et les formateurs des instructeurs, ainsi que des campagnes de sensibilisation à la sécurité. Chaque année, plus de 1,2 million de Canadiens s'inscrivent aux programmes de natation et de sécurité aquatique de la Croix-Rouge, tandis que 21 000 autres reçoivent une attestation d'instructeur ou de formateur d'instructeur.

Je félicite les travailleurs et les bénévoles de la Croix-Rouge, dont la compassion et le dévouement contribuent à améliorer la vie des plus vulnérables au Canada et dans le reste du monde. Honorables sénateurs, je vous demande de vous joindre à moi pour souligner et célébrer les nombreuses réalisations de la Croix-Rouge canadienne.

La bourse d'études TD Black Student Opportunity Grant

L'honorable Donald H. Oliver : Honorables sénateurs, j'ai le plaisir de souligner aujourd'hui le geste généreux que vient de poser l'une de nos grandes banques canadiennes. Le Groupe financier Banque TD a illustré encore une fois la manière dont il honore ses responsabilités sociales en venant en aide à l'un des quatre groupes désignés du Canada, à savoir les étudiants noirs.

(1420)

Le 11 février, dans le cadre d'une activité organisée par le Musée maritime de l'Atlantique, à Halifax, à l'occasion du Mois de l'histoire des Noirs, la Banque TD a annoncé qu'elle entendait faire un généreux don de 1 million de dollars à l'Université Dalhousie. Cette somme servira à créer la bourse d'études TD Black Student Opportunity Grant, qui aidera les élèves de race noire du niveau secondaire à poursuivre des études postsecondaires. Elle sera remise aux élèves les plus doués qui éprouvent des difficultés financières.

Pour l'occasion, l'Université Dalhousie créera un programme unique à l'intention des élèves noirs des premier et deuxième cycles du secondaire. Selon le vice-président principal du Groupe TD, Bruce Shirreff, ce nouveau programme a pour objectif de faire des jeunes élèves noirs des modèles pour leurs pairs, de les pousser à l'excellence sur le plan scolaire et de les inciter à faire des études postsecondaires.

Le Groupe financier Banque TD et l'Université Dalhousie ont joint leurs efforts afin d'aider les jeunes Noirs à aller à l'université et d'éliminer les obstacles financiers qui se dressent sur leur chemin.

Voici les propos que le recteur et vice-chancelier de l'Université Dalhousie, Tom Traves, a tenus à ceux qui étaient rassemblés au Musée maritime de l'Atlantique :

Tous les Canadiens qui ont le talent nécessaire devraient pouvoir faire des études universitaires, peu importe leur origine ethnique. Lorsqu'il est offert à un jeune âge, le mentorat peut inspirer ceux à qui il est offert, à qui il ne manque dès lors que les moyens financiers pour réaliser leurs rêves. Le don extraordinaire fait par le Groupe financier Banque TD à l'Université Dalhousie saura inspirer et les jeunes Noirs de la Nouvelle-Écosse, les inciter à rêver et les aider à rendre notre monde meilleur.

Le don d'un million de dollars de la Banque TD coïncidait aussi avec le lancement du nouveau Black History in Canada Education Guide. Ce guide permet aux enseignants et aux étudiants canadiens de se renseigner sur les nombreuses contributions des Canadiens d'origine africaine à notre pays. Il explore des personnalités et des événements marquants de l'histoire des Noirs du Canada à l'aide de discussions intéressantes et d'activités interactives. Il a été élaboré par l'Institut Historica-Dominion, distribué par HarperCollins Canada et parrainé par la Banque TD. Il se base sur le best-seller historique et primé de Lawrence Hill, The Book of Negroes.

Lawrence était présent à Halifax. Il a lu des extraits de son livre, et il a participé à une séance de questions et de réponses avec des jeunes Noirs de la Nouvelle-Écosse.

Pour conclure, honorables sénateurs, le mois de février est terminé. Le Mois de l'histoire des Noirs est maintenant derrière nous, mais cela ne signifie pas que nous devrions arrêter de sensibiliser la population à la culture et au patrimoine africains. Cela ne signifie pas non plus que nous devrions ralentir notre lutte contre le racisme et la discrimination. Nous devons continuer de favoriser une société inclusive et diversifiée, un endroit où tous les gens, peu importe leur race, ont des chances égales. C'est ce que va permettre le nouveau programme de bourses d'études de la Banque TD. Je tiens à la remercier.

La Libye

La réponse du Canada au soulèvement politique

L'honorable Roméo Antonius Dallaire : Honorables sénateurs, j'interviens pour attirer votre attention sur les atrocités de masse ordonnées par le colonel Kadhafi et son gouvernement contre un mouvement d'opposition légitime en Libye.

Bien qu'il soit difficile d'en déterminer le nombre exact, selon certains rapports, le nombre de décès découlant des affrontements contre les forces armées et les avions militaires du régime, ainsi que contre les mercenaires de partout en Afrique et au Moyen-Orient, s'élèverait à 6 500, et il y aurait plus de 100 000 réfugiés et personnes déplacées.

La semaine dernière, le sénateur Segal et moi avons expliqué dans l'Ottawa Citizen que l'utilisation par le colonel Kadhafi de mots comme « coquerelles » pour décrire les manifestants et ses menaces de nettoyer la Libye maison par maison nous rappelaient d'autres massacres à grande échelle, y compris ceux au Rwanda et au Kosovo. Kadhafi utilise les mêmes termes qui ont été utilisés par la dictature au Rwanda lors du génocide qui s'est produit il y a 17 ans.

Il est louable qu'Ottawa ait finalement décidé de prendre des mesures en ce qui concerne la Libye, y compris le déploiement d'une mission de reconnaissance à Malte et, finalement, l'envoi d'aéronefs sur place. Cependant, le fait est que nous avons gardé le silence pendant que des atrocités étaient signalées au début de la semaine dernière et même pendant les premiers jours des manifestations. Le gouvernement n'a simplement rien fait, attendant de voir ce que feraient les alliés du Canada, une stratégie défendable, mais seulement lorsque le temps n'est pas un facteur critique de la prise de décision. En Libye, des manifestants continuaient d'être massacrés par un régime mégalomane diabolique pendant que les gouvernements démocratiques et les puissances mondiales, y compris notre gouvernement, ne disaient mot.

Les initiatives relatives à la Libye sont expliquées par le gouvernement dans des communiqués de presse et des discours comme celui que le ministre Cannon a prononcé devant le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies, à Genève, et les communications bilatérales avec nos alliés, y compris celles du premier ministre, sont positives et formulées beaucoup plus rapidement qu'elles ne l'avaient été il y a 17 ans pendant cette autre catastrophe humanitaire. Cependant, certaines mesures auraient pu et auraient dû être prises il y a plusieurs jours. Les sanctions, le gel des actifs et des déplacements, de même que les déploiements humanitaires, auraient dû être automatiques. Les directives ou l'approbation des États-Unis, de la Grande-Bretagne, de la France ou d'autres pays, ou même de l'ONU, n'étaient pas nécessaires.

La lenteur avec laquelle la communauté internationale a réagi aux événements qui se déroulaient en Libye n'aurait pas dû empêcher le Canada d'exprimer sa volonté d'agir. Les mesures prises jusqu'à maintenant montrent une volonté d'agir en périphérie, mais ne permettent pas d'assurer la sécurité de ceux qui continuent d'être massacrés dans les rues en Libye.

Il y a une semaine, au Council on Foreign Relations, à New York, le ministre Cannon a demandé aux États-Unis de « respecter la capacité du Canada à contribuer et à trouver son propre espace sur la scène mondiale ».

Notre capacité d'apporter une contribution positive en cas de troubles mondiaux, d'atrocités de masse et de violations flagrantes des droits de la personne ne découlera pas d'une capacité supérieure d'intervention militaire. En fait, nous avons contribué à la dissolution, il y a deux ans, de la seule capacité de réaction rapide de l'ONU, la Brigade multinationale d'intervention rapide des forces en attente des Nations Unies, ou BIRFA, dont nous assurions le commandement.

Il est évident que nous disposons des actifs militaires et de l'expertise nécessaires pour contribuer à une initiative multilatérale dans de telles situations, mais la capacité du Canada à contribuer doit reposer sur sa capacité à exprimer haut et fort sa position morale, cette voix qui jadis prenait sans équivoque la défense de la démocratie, des droits de la personne et de la protection de l'innocence partout dans le monde, y compris l'intervention et la volonté d'intervenir lors de massacres catastrophiques ou lors de violations massives des droits de la personne, conformément à la doctrine visant la responsabilité de protéger que nous avons apportée aux Nations Unies.

Le Tournoi des cœurs Scotties 2011

L'honorable Pamela Wallin : Honorables sénateurs, pendant que des Canadiens regardaient le faste, le glamour et les vedettes défilant sur la scène de la soirée des Oscars dimanche soir, j'ai regardé, à l'instar de centaines de milliers d'autres Canadiens, le Tournoi des cœurs Scotties 2011, où, sur une scène beaucoup moins somptueuse, les curleuses n'avaient de cesse de nous éblouir et balayaient tout sur leur passage.

Tout au long de la partie, je suis restée assise, stupéfaite, tentant de me rappeler mes leçons de géométrie au secondaire pour pouvoir prédire les intentions des curleuses lorsqu'elles lançaient un gros morceau de granite de 40 livres sur une surface glacée, un endroit que la plupart d'entre nous éviteraient en février si nous le pouvions.

L'équipe de la Saskatchewan — composée d'Amber Holland, la skip, Kim Schneider, la troisième, Tammy Schneider, la deuxième, et Heather Kalenchuk, la première — a remporté une victoire à l'arraché de 8-7 à Charlottetown, grâce au lancer parfait d'Amber au dixième bout.

La dernière fois que la Saskatchewan a remporté le Tournoi des cœurs c'était en 1997, avec la regrettée et extraordinaire Sandra Schmirler, véritable idole dans le monde du curling. « Schmirler la curleuse », comme on l'appelait, a remporté trois championnats mondiaux et canadiens. La douce et discrète « reine du curling » est décédée des suites du cancer en mars 2000. Elle n'avait que 36 ans, mais elle avait déjà fait sa marque dans l'histoire. Le quatuor de Schmirler a remporté une médaille d'or olympique en 1998, à Nagano. C'était la première fois que le curling féminin était un sport de compétition féminin aux Jeux olympiques.

D'une certaine façon, la boucle semblait bouclée lorsque la skip de l'équipe de la Saskatchewan, Amber Holland, une autre fille d'une petite ville qui n'avait que 36 ans, a été déclarée gagnante du prix Sandra Schmirler pour la joueuse la plus utile lors de la cérémonie de clôture, dimanche. Ce prix souligne la qualité exceptionnelle du jeu lors des éliminatoires. Espérons qu'Amber saura égaler, ou peut-être même battre, le record de Sandra.

Je souhaite bonne chance à l'équipe de la Saskatchewan, qui se rendra le mois prochain au Danemark pour représenter le Canada au Championnat mondial. Félicitations aussi à Jennifer Jones et à son Équipe Canada pour tous les moments de fierté et d'excellent curling qu'elles nous ont fait vivre.

L'honorable Sharon Carstairs

Félicitations à la récipiendaire de la distinction présidentielle de l'académie américaine de médecine palliative

L'honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, depuis près de 20 ans maintenant, madame le sénateur Sharon Carstairs se fait l'ardent défenseur des soins palliatifs au Canada. Depuis sa nomination au Sénat, en 1994, le sénateur Carstairs a siégé à deux comités qui se sont penchés sur les enjeux liés aux soins palliatifs, notamment à titre de présidente au Comité sénatorial spécial sur le vieillissement, auquel j'ai eu le privilège de siéger moi aussi.

Le sénateur Carstairs a publié deux rapports spéciaux sur les soins palliatifs, l'un en 2005 et l'autre plus récemment, en juin 2010, qui porte sur l'état des soins palliatifs au Canada et qui est intitulé Monter la barre : Plan d'action pour de meilleurs soins palliatifs au Canada.

(1430)

Le jeudi 17 février, le sénateur Sharon Carstairs a reçu la distinction présidentielle de l'académie américaine de médecine palliative lors de l'assemblée générale annuelle de l'académie, qui a eu lieu à Vancouver, en Colombie-Britannique.

L'académie américaine de médecine palliative a pour mandat d'élargir l'accès des patients et de leur famille à des soins palliatifs de qualité et de faire avancer la médecine palliative grâce à l'éducation et à la formation des professionnels, l'établissement d'une main-d'œuvre spécialisée, le soutien des normes de pratique clinique, la recherche et les politiques publiques.

La distinction présidentielle est remise à des personnes ou à des organisations qui ont contribué de façon importante à la médecine palliative.

Grâce au dévouement du sénateur Carstairs, des progrès sont apportés en vue d'améliorer l'état des soins palliatifs au Canada, un enjeu qui touche des millions de Canadiens chaque année.

Honorables sénateurs, veuillez vous joindre à moi pour féliciter le sénateur Carstairs pour cette distinction ainsi que pour les efforts inlassables qu'elle déploie et le dévouement inébranlable dont elle fait preuve afin de faire avancer une cause aussi noble. Son travail, qui a contribué à changer radicalement et concrètement les choses, est la preuve qu'une seule personne très déterminée peut améliorer la vie des autres.

Merci, Sharon, et félicitations pour cet honneur.

[Français]

Le décès de Jean-Marc Léger

L'honorable Andrée Champagne : Honorables sénateurs, le 13 février dernier, la Francophonie internationale a perdu un de ses bâtisseurs, un de ses défenseurs les plus connus et les plus habiles; on nous annonçait alors le décès de Jean-Marc Léger.

Pour vous parler de ce Canadien francophone de cœur et d'esprit, je ne saurais trouver mieux que les mots de l'actuel secrétaire général de l'OIF, Son Excellence Abdou Diouf :

La famille francophone pleure la perte d'un grand militant et d'un père pour la Francophonie institutionnelle. Grâce à son courage, à ses compétences et à ses profondes convictions, Jean-Marc Léger a donné à notre Institution des assises solides dont nous mesurons encore la portée, quarante ans plus tard. Il a activement contribué à la construction des deux principaux réseaux de la Francophonie au sein de la société civile : celui des journalistes et celui des universitaires.

Jean-Marc Léger a entrepris une carrière de journaliste à l'âge de 24 ans, d'abord à La Presse, puis au journal Le Devoir. Il a occupé les fonctions de secrétaire général, puis de président de l'Union canadienne des journalistes de langue française.

En 1970, à Niamey, il était aux côtés des Senghor, Diori, Bourguiba et Sihanouk alors qu'on posait les premières pierres de l'édifice devenu aujourd'hui l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF).

Amoureux de l'Afrique, humaniste engagé dans la défense des valeurs de solidarité entre les peuples, Jean-Marc Léger a été le premier secrétaire général de l'Agence de coopération culturelle et technique (ACCT). Il a impulsé les programmes de coopération en faveur du développement des pays francophones du Sud autour de l'éducation et de la diversité culturelle.

Pendant plus de 15 ans, il a dirigé le secrétariat général de l'Association des universités partiellement ou entièrement de langue française. Il a aussi agi à titre de secrétaire général de l'Association internationale des journalistes de langue française.

Jean-Marc Léger a aussi été l'auteur de plusieurs ouvrages, dont Afrique française — Afrique nouvelle, en 1958, La Francophonie : grand dessein, grande ambiguïté, en 1987, et Vers l'indépendance? Le pays à portée de main, en 1989.

Honorables collègues, la Francophonie internationale est en deuil.

Il est difficile de prévoir qui pourra prendre sa place avec autant d'humanité, d'ardeur, de détermination et d'optimisme.

Je suis certaine que vous vous joindrez à moi pour offrir à ses proches et à toute la Francophonie internationale cette expression de nos regrets les plus sincères.

[Traduction]

L'honorable Anne C. Cools
L'honorable Donald H. Oliver

L'honorable Don Meredith : Honorables sénateurs, j'écoute et j'apprends les façons de faire au Sénat et j'aimerais remercier tous les sénateurs de m'avoir accueilli à la Chambre rouge. Nous venons tous de régions et de milieux différents, et nous apportons nos forces et nos connaissances individuelles à cette assemblée.

Durant le mois de février, le sénateur Oliver et le sénateur Pépin ont rendu hommage aux héros du Mois de l'histoire des Noirs au Canada. J'aimerais à mon tour rendre hommage à deux de mes collègues qui ont certainement été confrontés à de nombreux obstacles dans leur vie, mais qui ont su les transformer en occasions à saisir. J'ai nommé le sénateur Cools et le sénateur Oliver.

Madame le sénateur Anne Cools a travaillé comme activiste sociale dans nos collectivités, se battant avec détermination pour les causes qui lui tiennent à cœur. Elle a montré ses qualités de chef de file en fondant à Toronto, en 1974, l'un des premiers refuges pour femmes victimes de mauvais traitements au Canada — judicieusement appelé Femmes en transition Inc. Grâce à son travail social innovateur et réfléchi, le sénateur Cools a contribué à réduire la violence familiale, à transformer les attitudes et à améliorer à jamais la vie d'innombrables personnes.

Comme le savent les sénateurs, le sort de nos jeunes me tient très à cœur, et madame le sénateur Cools a encadré de nombreux jeunes en sa qualité de conseillère et d'instructrice sur le terrain, plus particulièrement des étudiants de deuxième et troisième cycle dans plusieurs universités partout au pays. Le sénateur Cools a transmis à ces futurs dirigeants communautaires des connaissances concernant un aspect indispensable de la vie avec lequel il faut composer.

Honorables sénateurs, au début des années 1980, madame le sénateur Cools a été nommée à la Commission nationale des libérations conditionnelles, ce qui lui a permis d'être aux premières loges pour voir comment fonctionne notre système juridique et comment sont traités les détenus dans les établissements correctionnels fédéraux.

Ces expériences lui ont permis d'acquérir un trésor de connaissances. Je crois savoir que madame le sénateur est une lectrice insatiable et qu'elle s'intéresse à l'histoire constitutionnelle — comme nous avons pu le constater il y a quelques semaines — et qu'elle aime étudier les mesures législatives. Cette passion pour la connaissance enrichit le Sénat. Je remercie le sénateur Cools.

Le sénateur Oliver est un homme de principe qui a travaillé sans relâche dans sa collectivité, dans notre pays et à l'étranger pour nous apprendre à tous ce que cela signifie qu'être humain.

Le sénateur Oliver a dirigé un cabinet d'avocat prospère, il a plaidé au civil et a enseigné dans plusieurs universités. Ses étudiants ont eu de la chance de l'avoir comme enseignant. Il travaille d'arrache-pied depuis près d'un demi-siècle afin d'aider les gens à mieux comprendre la société dans laquelle nous vivons.

Le sénateur Oliver a parlé à des auditoires dans le monde entier sur la nécessité d'encourager une culture de réflexion diverse et inclusive. Le sénateur Oliver est aussi un fervent défenseur de l'idée de gouvernance et de responsabilité d'entreprise et il croit en ce qui est juste et équitable dans notre société. Il ne se limite pas à la promotion de l'égalité des chances pour les Canadiens noirs et pour les autres minorités visibles dans nos collectivités. Partager son savoir avec les autres le passionne. Il se fera un plaisir d'aider quiconque sollicitera son avis.

Le sénateur Oliver comprend bien aussi l'esprit du bénévolat; il fait ainsi gracieusement don de son temps et de ses connaissances aux membres d'organisations culturelles et communautaires partout au Canada. Son engagement auprès des collectivités n'est pas passé inaperçu. Il a reçu trois doctorats honorifiques et un nombre incalculable de prix prestigieux. C'est un grand honneur pour moi d'être en présence d'un homme aussi généreux et prévenant que le sénateur Oliver.

Comme Harriet Tubman, qui se qualifiait elle-même de chef de train du chemin de fer clandestin, disait :

Tous les grands rêves commencent avec un rêveur. N'oubliez jamais, vous avez en vous la force, la patience et la passion qui vous permettront d'aller décrocher les étoiles et changer le monde.

(1440)

Honorables sénateurs, je vous invite à vous joindre à moi pour rendre hommage à ces deux grands Canadiens.


[Français]

AFFAIRES COURANTES

Le Budget des dépenses de 2011-2012

Dépôt des parties I et II

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, les parties I et II du Budget des dépenses pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 2012.

Les affaires indiennes et le Nord canadien

L'Accord définitif Nisga'a—Dépôt du rapport annuel de 2008-2009

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, deux exemplaires du rapport annuel pour 2008-2009 de l'Accord définitif Nisga'a.

La Libye

Dépôt du Règlement sur l'application de la résolution des Nations Unies sur la Libye et les mesures économiques spéciales ainsi que le Décret concernant l'autorisation, par permis, à procéder à certaines opérations (mesures économiques spéciales)

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, conformément à l'article 7 de la Loi sur les mesures économiques spéciales et à l'article 4 de la Loi sur les Nations Unies, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, des copies du décret et du règlement d'application de la résolution des Nations Unies sur la Libye et des mesures économiques spéciales prises dans le cadre des sanctions contre la Libye et Mouammar Kadhafi, annoncées le 27 février 2011.

Le Budget des dépenses de 2011-2012

Avis de motion tendant à autoriser le Comité des finances nationales à étudier le Budget principal des dépenses

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent des finances nationales soit autorisé à étudier, afin d'en faire rapport, les dépenses prévues dans le Budget principal des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2012, à l'exception du crédit 10 du Parlement.

Avis de motion tendant à autoriser le Comité mixte de la Bibliothèque du Parlement à étudier le crédit 10 du Budget principal des dépenses

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement soit autorisé à étudier, afin d'en faire rapport, les dépenses prévues au crédit 10 du Parlement dans le Budget principal des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2012 et;

Qu'un message soit transmis à la Chambre des communes pour l'en informer.


PÉRIODE DES QUESTIONS

Les affaires étrangères

La Libye—La réponse de la communauté internationale

L'honorable Roméo Antonius Dallaire : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et porte sur le contexte dans lequel la communauté internationale, et plus spécifiquement notre gouvernement, répond à la situation en Libye.

Notre pays étant à la base du concept des responsabilités protégées lorsqu'il y a abus massifs des droits de la personne par une dictature, et la souveraineté de ce pays n'étant plus absolue, nous avons la responsabilité d'intervenir, par l'entremise des Nations Unies. Ne réalisez-vous pas quelle valeur le Canada aurait eue s'il avait siégé au Conseil de sécurité des Nations Unies?

[Traduction]

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, la situation en Libye est manifestement grave. Pour tous les gouvernements du monde, l'organisation des mesures à prendre pour réagir à la situation a été plutôt chaotique, c'est le moins qu'on puisse dire. Évidemment, l'évacuation sans danger des Canadiens constitue notre priorité, mais le Canada collabore avec ses alliés pour intensifier la pression sur le régime Kadhafi par des sanctions, conformément à la résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies. Le régime Kadhafi doit mettre fin au bain de sang immédiatement et abandonner le pouvoir en Libye. C'est la seule issue acceptable.

Mon voisin, le sénateur Comeau, a déposé la réponse du gouvernement et du premier ministre concernant les sanctions additionnelles imposées à la Libye par le gouvernement du Canada. Ces sanctions ont été applaudies dans le monde entier, y compris dans une déclaration publiée hier par le cabinet du président des États-Unis, qui félicitait le Canada pour sa position à l'égard de la Libye.

Pour répondre au commentaire du sénateur concernant notre siège au Conseil de sécurité des Nations Unies, il faut reconnaître que le Conseil de sécurité a pris les mesures qu'il fallait, comme beaucoup de gens l'ont souligné. Si le Canada avait été membre du Conseil de sécurité, cela n'aurait rien changé. Il a pris une décision que le Canada approuve sans réserve.

Pendant que j'y suis, je dois dire également que le gouvernement et les citoyens du Canada doivent une fière chandelle aux diplomates, au personnel du Service extérieur et aux militaires canadiens, dont le travail relativement à la situation en Libye se fait dans des circonstances difficiles et changeantes. Je crois que tous les Canadiens devraient être fiers des efforts qui ont été faits là-bas.

La semaine dernière, je suivais les médias du monde entier, et tous les pays étaient dans la même situation. Ils essayaient de déterminer ce qui était en train de se passer en Libye. Un moment donné, je regardais CNN parce que je n'ai pas pu quitter mon domicile vendredi — pour des raisons évidentes qui paraissent dans ma voix — et j'ai pu constater que la situation en Libye était difficile même pour la grande puissance que sont les États-Unis.

Mais pour revenir à la décision du Conseil de sécurité des Nations Unies, c'est une bonne décision et elle a été prise rapidement. Le Canada l'a appuyée sans réserve et est même allé plus loin que les sanctions imposées par le Conseil de sécurité et les Nations Unies.

Le sénateur Dallaire : Il y a 17 ans, on a utilisé ces arguments, ou des arguments du même acabit, pour ne pas intervenir au Rwanda. Le Conseil de sécurité et la communauté internationale trouvaient difficile et compliqué d'intervenir dans un scénario aussi chaotique. Cette fois-ci, le Conseil de sécurité a travaillé la fin de semaine, ce qu'il n'avait pas fait il y a 17 ans, et les régions périphériques répondent plus rapidement qu'à l'époque, mais les gens demandent tout de même avec insistance, au moyen de leurs téléphones cellulaires, entre autres, de la protection, de l'aide humanitaire et des zones sécuritaires pour que cesse, en fin de compte, l'utilisation d'armes à feu et d'armes lourdes contre eux, ce qui en soi constitue un crime contre l'humanité. Nous participons en périphérie, mais le massacre se poursuit en Libye.

Madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle nous dire pourquoi le Canada a retiré son soutien à la brigade d'intervention rapide des forces en attente que nous avions contribué à créer après le Rwanda afin d'avoir une force d'intervention rapide pour des scénarios identiques à celui-ci?

Le sénateur LeBreton : Je comprends le point de vue du sénateur Dallaire. Bien entendu, personne ne songerait à remettre en question ses préoccupations à cet égard, surtout en ce qui a trait aux événements qu'il a connus au Rwanda.

Quant à la situation en Libye, je crois qu'il est clair que les ministres Cannon et MacKay, ainsi que le ministère de la Défense nationale, collaborent étroitement avec nos alliés pour faire face à la situation. La situation sur le terrain est en train de changer en Libye. Nous collaborons étroitement avec nos alliés, non seulement pour rapatrier les quelques Canadiens qui sont encore sur place, mais aussi pour discuter de l'aide humanitaire et de la distribution de ravitaillement à la population libyenne.

(1450)

Honorables sénateurs, des employés du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international et de la Défense nationale se trouvent actuellement à Malte. Ils travaillent en étroite collaboration avec les Britanniques, les Américains et les Français. Nous faisons tout ce que nous pouvons pour aider nos partenaires à stabiliser la situation en Libye. Bien entendu, la situation demeure instable, comme nous le savons tous. Nous devons suivre les actualités tous les soirs, parce que les événements évoluent rapidement d'un jour à l'autre.

Nous faisons tout notre possible. Nos gens travaillent fort. Je crois que non seulement les Canadiens, mais tous les peuples du monde occidental sont horrifiés, surtout s'ils ont vu l'interview avec Christine Amanpour. Je suis sûre que la plupart d'entre nous l'ont écoutée attentivement la nuit dernière et comprennent à quel genre de situation nous sommes confrontés.

Je comprends bien les préoccupations du sénateur Dallaire, mais je crois que le gouvernement, de concert avec nos alliés, fait tout ce qui est humainement possible pour rétablir la stabilité en Libye.

Le sénateur Dallaire : J'ai personnellement vécu le même genre de scénario, il y a des années, lorsque la communauté internationale a œuvré avec diligence pour rapatrier les ressortissants étrangers. En fait, elle s'est assez bien tirée d'affaire, et nous constatons la même chose aujourd'hui.

Toutefois, je me demande à quel point le Canada a été efficace pour ce qui est du rapatriement de ses ressortissants. Nous savons qu'un gros appareil militaire s'est rendu là, puis est rentré bredouille, alors que l'aéroport était plein de monde. Nous avons vu des Canadiens monter à bord de navires britanniques.

Est-ce que le leader peut nous dire combien de Canadiens ont été évacués par le gouvernement grâce à l'action de nos diplomates et combien ont pu être rapatriés par d'autres dans ce scénario chaotique?

Le sénateur LeBreton : Je ne crois pas qu'il convienne de critiquer n'importe quel gouvernement qui essaie de localiser ses citoyens. Les retrouver est tout un défi, sans parler de leur évacuation. Notre gouvernement a travaillé en étroite collaboration avec les Britanniques et les Américains. Nous avons organisé le départ de Canadiens à bord de navires du Royaume-Uni et des États-Unis. De même, nous avons emmené des ressortissants d'autres pays à bord de nos avions.

Je l'ai mentionné plus tôt, mais je répète que notre propre personnel du MAECI et de la Défense nationale travaille fort là-bas. Nous avons tendance à croire que la tâche est facile. La situation en Libye est extrêmement confuse. Si on y pense, on se rend compte que la région est plus grande que le Québec, avec une population de 6,5 millions d'habitants et une situation d'anarchie. Parmi tous ces gens, il y a 200 ou 300 Canadiens éparpillés dans le pays. Essayer de retrouver ces Canadiens et de les regrouper quelque part en vue d'une évacuation est une tâche difficile.

Cela dit, j'ai tous les chiffres. Je ne les ai pas sous la main, honorables sénateurs, mais nous savons combien de Canadiens ont quitté la Libye jusqu'ici. Comme je l'ai mentionné, je regardais CNN vendredi dernier. Cette chaîne américaine se demandait pourquoi les États-Unis n'avaient réussi jusque-là à envoyer en Libye qu'un seul avion pour rapatrier leurs ressortissants. Nous ne sommes pas les seuls dans cette situation. C'est la même chose pour tous les pays du monde. Tous travaillent fort et collaborent bien.

Le personnel de l'ambassade canadienne à Tripoli, qui a été évacué avec raison la semaine dernière, a continué de travailler. Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international travaille directement d'Ottawa et de Malte. Comme chacun le comprendra, s'il y pense un peu, nos fonctionnaires ont eu de la difficulté à retrouver les Canadiens — mais ils y sont parvenus — et à les transporter vers un endroit à partir duquel ils pouvaient être évacués en toute sécurité.

L'honorable James S. Cowan (leader de l'opposition) : Lorsque j'ai discuté avec le sénateur LeBreton de la situation en Égypte, il y a plusieurs semaines, je lui ai posé une question en citant comme référence un rapport de notre Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense. Le rapport recommandait que le gouvernement mène une étude sur ce qui s'est passé au Liban et rende les résultats publics.

À ce moment-là, madame le leader n'avait pas les renseignements voulus sous la main, ce qui était compréhensible. A-t-elle pu confirmer, premièrement, que le gouvernement a entrepris l'étude recommandée par le comité et, deuxièmement, si c'est le cas, quand le rapport sera rendu public? Si le gouvernement n'a pas entrepris l'étude, pourquoi ne l'a-t-il pas fait?

Le sénateur LeBreton : Encore une fois, honorables sénateurs, je dois me porter à la défense des fonctionnaires des Affaires étrangères affectés dans ces pays. La situation en Libye est tellement instable que toute personne raisonnable comprendra les difficultés que doivent affronter les fonctionnaires en cas de crise soudaine.

Le chef de l'honorable sénateur et son porte-parole pour les affaires étrangères — qui sont tous deux des fils de diplomates nés avec une cuillère d'argent dans la bouche — ont dit que la solution consistait à engager davantage de diplomates. Il y avait plus d'employés et de diplomates en Libye ces derniers temps qu'il n'y en avait il y a cinq ans. Il y a 10 ans, nous n'avions pas du tout de diplomates en Libye.

Il est injuste de critiquer nos diplomates, qui travaillent vraiment très fort. Il est en même temps peu réaliste de s'attendre à ce que les responsables de la politique étrangère puissent constamment prévoir toutes les crises qui se produisent dans le monde et puissent instantanément envoyer des gens pour rapatrier nos citoyens éparpillés dans des régions isolées.

Chacun fait de grands efforts. Nous avons eu beaucoup de succès dans l'évacuation des Canadiens. De toute évidence, le premier ministre a fait sa part dans ses observations relatives au Conseil de sécurité des Nations Unies et relativement aux nouvelles sanctions prises par le Canada. En fait, ces efforts nous ont valu les félicitations de nos alliés.

Nous travaillons donc avec nos alliés, en particulier les Britanniques. Nous exploitons nos C-17 — que le gouvernement a achetés, Dieu merci — ainsi que les nouveaux Hercules — également achetés par notre gouvernement — à partir de Malte, où la Défense nationale a aussi envoyé du personnel supplémentaire. Tout cela contribuera aux efforts déployés pour rétablir la stabilité en Libye.

(1500)

Le sénateur Cowan : Honorables sénateurs, je ne critiquais pas alors et je ne critique toujours pas ceux qui font de leur mieux. J'ai simplement demandé si, sur la base du rapport unanime du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, nous pouvions, oui ou non, tirer des enseignements de l'expérience passée.

Je vais répéter la question que le leader du gouvernement au Sénat a prise en note. Le gouvernement a-t-il accepté la recommandation du Sénat voulant qu'on fasse une enquête et qu'on la rende publique?

Je ne critiquais alors personne, pas plus que je ne le fais maintenant. J'ai simplement demandé si on faisait quelque chose. Le leader n'a pas besoin de monter une défense. C'est inutile, puisque personne n'attaque.

Le sénateur LeBreton : J'ai répondu à la question, honorables sénateurs, en disant que je n'avais pas eu l'occasion de le savoir. C'était ma réponse, mais j'ai décidé d'ajouter autre chose.

[Français]

Les finances

Le gel des avoirs et des actifs de l'ancien président tunisien et de ses proches

L'honorable Jean-Claude Rivest : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Le gouvernement canadien a annoncé hier qu'il a procédé au gel des avoirs du président Khadafi, de sa famille et de ses proches au Canada. Cette annonce a été faite environ une semaine après le début de la révolution en Libye.

Sauf erreur, le gouvernement canadien n'a pas fait une déclaration aussi engageante que celle qu'il a faite à l'égard de la Libye en ce qui concerne la Tunisie.

Pourtant, eu égard au gouvernement actuel de la Tunisie, ainsi qu'à l'ensemble des Tunisiens vivant au Canada et au Québec en particulier, une demande similaire a été faite concernant le gel des avoirs et des actifs de l'ancien président de la Tunisie et de ses proches. Il s'agit de l'argent qui appartient au peuple tunisien comme il s'agit, sans doute, de l'argent qui appartient au peuple libyen.

Le gouvernement canadien, un mois et plus après la révolution en Tunisie, est-il sur le point de faire une déclaration aussi claire que celle qu'il a formulée à l'égard de la situation en Libye?

[Traduction]

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Je remercie le sénateur de cette question. Les circonstances sont différentes en ce qui concerne notre capacité de bloquer les actifs de la Libye, étant donné les activités auxquelles des Canadiens participent dans ce pays.

Comme nous l'avons dit à de nombreuses reprises, M. Ben Ali, les membres de l'ancien régime tunisien et les membres de leurs familles immédiates ne sont pas les bienvenus au Canada. Le gouvernement tient beaucoup à obtenir justice pour le peuple tunisien en bloquant les avoirs des membres du régime de l'ancien président Ben Ali, comme le nouveau gouvernement tunisien nous a demandé de le faire. Nous lui avons donné l'assurance que nous utiliserions tous les moyens à notre disposition pour accéder à sa requête.

Honorables sénateurs, le cas de la Tunisie met en lumière le fait que la législation canadienne à cet égard a besoin d'importantes modifications. On m'informe que le gouvernement proposera bientôt des mesures législatives pour corriger les injustices de la loi.

Les affaires étrangères

La Libye—La réaction canadienne au soulèvement politique

L'honorable Art Eggleton : Honorables sénateurs, les pays occidentaux ont laissé tomber le peuple rwandais, et ce fut le génocide. En 1999, nous sommes intervenus au Kosovo pour arracher la population des griffes de Milosevic. Après une période de négociations stériles, une campagne aérienne a été lancée contre Milosevic et ses forces, qui ont fini par quitter le Kosovo. Cela s'est produit à une époque où nous préconisions le principe de la responsabilité de protéger, principe que l'ONU a accepté depuis. Toutefois, il va souvent à l'encontre de questions de droits des États que certains pays font valoir, et il arrive fréquemment que l'ONU s'en trouve incapable d'agir avec quelque célérité. Or, en l'espèce, il est de la plus haute importance de faire vite. Ce fou, Kadhafi, est en train de tuer son peuple, chaque minute de chaque heure de chaque jour. Plus tôt nous pourrons l'évincer, mieux ce sera, peu importe comment nous pourrons nous y prendre.

Une des propositions envisagées comme prochaine étape est l'imposition d'une zone d'interdiction de vol pour empêcher les militaires libyens de s'attaquer à leur propre population au moyen d'avions et d'hélicoptères. Le gouvernement est-il disposé à exhorter ses alliés à imposer cette zone pour atténuer le risque que Kadhafi ne tue son propre peuple et pour mettre un terme à cette répression le plus rapidement possible, avant qu'il n'y ait d'autres pertes de vie?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, le premier ministre a dit que nous travaillons en étroite collaboration avec nos alliés de l'OTAN et que nous sommes disposés à envisager toutes les options.

La Côte d'Ivoire—La conduite du gouvernement du Bélarus

L'honorable Hugh Segal : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Des informations veulent que le gouvernement du Bélarus s'apprête à violer l'embargo sur les armements imposé à la Côte d'Ivoire et à livrer des hélicoptères de combat au général Gbagbo, qui a perdu les élections certifiées par un large groupe d'organisations internationales. Ces appareils peuvent servir contre le Golf Hotel, où sont maintenant retranchés des représentants internationaux et le président dûment élu du pays.

Madame le leader ferait-elle usage de ses bons offices pour essayer de savoir si le gouvernement va convoquer l'ambassadeur du Bélarus pour lui remettre une note diplomatique ferme ou s'il va prendre des mesures contre cette violation totalement inacceptable d'un embargo international, violation qui fera courir de grands risques à des Ivoiriens honnêtes qui ont participé à des élections démocratiques?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Je suis tout à fait au courant de ces informations et c'est avec plaisir que je vais me procurer l'information que le sénateur demande.

La défense nationale

Les blessures de stress opérationnel

L'honorable Joseph A. Day : Honorables sénateurs, j'ai une question à poser au leader du gouvernement au Sénat. Le sujet est différent, mais il a aussi un lien certain avec les échanges que nous venons d'avoir. Il s'agit des blessures de stress opérationnel.

Madame le ministre n'est pas sans savoir qu'environ 35 000 soldats des Forces canadiennes auront servi en Afghanistan en juillet, au moment où notre mission de combat se transformera en mission de formation. En outre, étant donné l'approche pangouvernementale que nous avons adoptée pour la reconstruction dans les provinces de l'Afghanistan, des membres de la fonction publique et de la GRC, ainsi que des secouristes opérationnels, ont été et se trouvent toujours dans des situations stressantes.

Un spécialiste qui a comparu devant le comité des anciens combattants nous a appris qu'environ le tiers de ceux qui servent dans des situations stressantes seront eux-mêmes en proie à un certain stress et éprouveront des difficultés lorsqu'ils rentreront au pays. Cela veut dire qu'environ 12 000 personnes, en plus de leurs familles, risquent de souffrir à cause de ces situations. Il y a 10 ans, le ministère des Anciens Combattants a dit que 2 000 personnes figuraient sur la liste des clients atteints de problèmes de stress opérationnel et qu'ils sont aujourd'hui 13 000.

Le gouvernement est-il conscient de ce problème qui est en train d'exploser? Madame le ministre exhortera-t-elle ses collègues du Cabinet à prendre des mesures pour combler les très graves lacunes dans les services d'aide proposés à ceux qui ont risqué leur vie pour protéger notre propre sécurité?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je remercie le sénateur Day de sa question. Il doit être au courant de l'annonce que le ministre MacKay a faite à Trenton il y a environ une semaine. Il s'agit d'un problème émergent très grave, celui des soldats qui rentrent au pays avec des problèmes de stress opérationnel.

(1510)

Comme le sait le sénateur, le gouvernement a nommé un conseiller spécial en matière de blessures de stress opérationnel et des équipes compétentes dans le domaine de la santé mentale offrent, d'un bout à l'autre du Canada, des services sociaux cliniques, des services psychiatriques et des services de consultation psychologique. Les Forces canadiennes comptent plus de 378 spécialistes travaillant à plein temps dans le domaine de la santé mentale et elles s'emploient à en embaucher davantage. La proportion de professionnels de la santé mentale par rapport au nombre de soldats est plus élevée dans les Forces canadiennes que dans les forces armées des pays de l'OTAN, nos alliés. Le gouvernement offre des soins de santé mentale dans 33 établissements du Canada, des cliniques de premiers soins et des détachements. Les membres des Forces canadiennes reçoivent de l'aide tout au long de leur carrière et de leurs déploiements.

Comme le sénateur suit de près le dossier, il sait également que le ministère a investi des millions de dollars dans de nouvelles technologies et de nouvelles infrastructures afin de mieux aider les soldats et de leur offrir de meilleurs soins.

Le sénateur Day : Honorables sénateurs, je suis au courant de l'annonce du ministre au sujet des cinq nouveaux centres intégrés de soutien. Pas plus tard que ce matin, des employés des forces armées nous ont appris que ces centres renseignent les militaires actifs et retraités sur les programmes offerts. Aucun de ces centres ne soigne les militaires ni ne leur offre des services de consultation psychologique.

Nous avons eu l'occasion de visiter les installations de l'hôpital Sainte-Anne, où le Dr Paquette rêvait de créer un centre d'excellence consacré à l'étude du stress post-traumatique et des blessures de stress opérationnel pour qu'on puisse traiter ces maux et, espérons-le, les prévenir. Or, le ministre des Anciens Combattants a annoncé la vente de l'hôpital Sainte-Anne.

Madame le ministre pourrait-elle indiquer à notre assemblée si le gouvernement compte réaliser le rêve du Dr Paquette, qui consistait à créer un centre d'excellence consacré à ce grave problème qui prend de l'ampleur?

Le sénateur LeBreton : Je remercie le sénateur de sa question. Ma réponse intéressera madame le sénateur Fraser, car elle a posé plusieurs questions sur l'hôpital de Sainte-Anne-de-Bellevue. Comme le sait le sénateur, le ministre MacKay a annoncé que le système de soutien et le système de soutien clinique font tous deux partie du programme.

Par ailleurs, je prends bien note de sa question précise sur l'hôpital.

Le patrimoine

La nomination du vice-président du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes

L'honorable Pierre De Bané : Honorables sénateurs, à ma question portant sur l'engagement pris par le premier ministre au Saguenay, en septembre 2008, soit qu'il consulterait le gouvernement du Québec avant de nommer au CRTC un vice-président francophone, madame le leader a répondu qu'elle ne se souvenait pas de cet engagement. Je ne doute pas qu'elle ait répondu de son mieux, autant qu'elle se souvienne. J'ai consulté les journaux The Gazette et Le Devoir du lendemain, qui faisaient tous deux état de la promesse du premier ministre Harper de consulter le gouvernement du Québec.

Je demande aujourd'hui à madame le leader de bien vouloir vérifier auprès du ministre Moore s'il a consulté le gouvernement du Québec, comme le premier ministre s'était engagé à le faire.

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je demanderai au ministre du Patrimoine, l'honorable James Moore, quelle procédure il suit en ce qui concerne les nominations au CRTC.

[Français]

Réponse différée à une question orale

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer la réponse à une question orale posée par l'honorable sénateur Losier-Cool, le 8 février 2011, concernant les pêches et les océans, les réparations aux installations portuaires du Nouveau-Brunswick.

Les pêches et les océans

Les réparations aux installations portuaires du Nouveau-Brunswick

(Réponse à la question posée le 8 février 2011 par l'honorable Rose-Marie Losier-Cool)

Vers la fin de 2010, une série de tempêtes ont infligé des dommages sans précédent aux installations des Ports pour petits bateaux. Au cours de l'automne, l'ouragan Igor a frappé Terre-Neuve alors que le Manitoba était également victime d'une puissante tempête. En décembre, des tempêtes et des ondes de tempêtes ont frappé les côtes des quatre provinces atlantiques et du Québec.

Bien que les Ports pour petits bateaux poursuivent leur évaluation de l'étendue des dommages, pour le moment 237 ports de pêche essentiels sont reconnus avoir subi des dommages à divers degrés (19 autres ports non essentiels furent aussi endommagés). Les dommages encourus aux ports essentiels touchés peuvent être répartis en trois catégories : nettoyage et travaux légers; réparations de quai et/ou de brise-lames; et reconstruction de quai et/ou de brise-lames.

Les activités de nettoyage et les réparations mineures sont nécessaires à 154 installations portuaires. Les travaux comprennent des interventions de nettoyage en raison de l'érosion et de l'accumulation de débris, des activités de dragage supplémentaires et/ou des réparations mineures aux gardes-roues, aux défenses, aux échelles, aux quais flottants et autres ouvrages.

Les réparations de quai et/ou de brise-lames sont nécessaires à 59 emplacements supplémentaires. Les travaux comprennent des réparations aux tabliers de quai, aux caissons de bois, systèmes électriques, ouvrages de protection (brise-lames), rampes de lancement et/ou quais flottants.

Aux autres 24 ports, la reconstruction du quai et/ou du brise-lames est nécessaire en raison des dommages considérables et des bris importants.

Pour ce qui est des coûts, les Ports pour petits bateaux n'ont pas terminé leur évaluation de l'étendue des dommages tel que mentionné auparavant. Les conditions hivernales rendent difficiles les inspections techniques des installations portuaires et un rapport complet et précis des dommages ne sera pas achevé avant le printemps, accompagné du détail des coûts, s'ils sont disponibles à ce moment-là.

Entre-temps, les Ports pour petits bateaux voient à ce que tous ces sites soient protégés et que la sécurité du public soit assurée. La prochaine priorité sera d'entreprendre les réparations les plus pressantes, selon le financement disponible, avant le début de la prochaine saison de pêche.

Les Ports pour petits bateaux continuent d'envisager tous les moyens à leur disposition pour aborder ces réparations urgentes aux ports de pêche essentiels.

[Traduction]

Projet de loi sur la protection des enfants contre l'exploitation sexuelle en ligne

Présentation du quinzième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles

Permission ayant été accordée de revenir à la présentation de rapports de comités permanents et spéciaux :

L'honorable Joan Fraser, présidente du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, présente le rapport suivant :

Le mardi 1er mars 2011

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a l'honneur de présenter son

QUINZIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-22, Loi concernant la déclaration obligatoire de la pornographie juvénile sur Internet par les personnes qui fournissent des services Internet, a, conformément à l'ordre de renvoi du mardi 8 février 2011, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.

Votre comité a également fait certaines observations qui ont été annexées au présent rapport.

Respectueusement soumis,

La présidente,
JOAN FRASER

(Le texte des observations figure aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, p. 1237.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Comeau, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

Affaires juridiques et constitutionnelles

Avis de motion tendant à autoriser le comité à siéger en même temps que le Sénat et pendant l'ajournement du Sénat

Permission ayant été accordée de revenir aux avis de motion :

L'honorable Joan Fraser : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, jusqu'au 24 mars 2011, pour les fins de son examen de projets de loi du gouvernement, le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles :

a) soit autorisé à siéger même si le Sénat siège à ce moment-là, l'application de l'article 95(4) du Règlement étant suspendue à cet égard;

b) soit autorisé, conformément à l'article 95(3)a) du Règlement, à se réunir du lundi au vendredi, même si le Sénat est alors ajourné pour une période de plus d'une semaine.


[Traduction]

ORDRE DU JOUR

La Loi sur l'inspection de l'électricité et du gazLa Loi sur les poids et mesures

Projet de loi modificatif—Troisième lecture—Ajournement du débat

L'honorable Stephen Greene propose que le projet de loi C-14, Loi modifiant la Loi sur l'inspection de l'électricité et du gaz et la Loi sur les poids et mesures, soit lu pour la troisième fois.

— Honorables sénateurs, je suis heureux de lancer le débat à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-14, Loi modifiant la Loi sur l'inspection de l'électricité et du gaz et la Loi sur les poids et mesures.

En vertu du paragraphe 91(17) de la Loi constitutionnelle, le gouvernement du Canada a la responsabilité exclusive des mesures liées au commerce. Le projet de loi à l'étude est une mesure législative importante destinée à confirmer l'équité, l'honnêteté et la décence sur le marché. Il est conçu pour redonner confiance aux consommateurs, pour que les Canadiens aient l'assurance d'obtenir ce pour quoi ils paient effectivement. Le projet de loi moderniserait les lois régissant les mesures utilisées dans le commerce et donnerait à Mesures Canada les outils additionnels dont l'organisme a besoin pour assurer l'équité et l'exactitude lors de l'achat et de la vente de produits mesurés. À chaque étape de l'élaboration du projet de loi C-14, Mesures Canada a consulté les intervenants, y compris des consommateurs et des entreprises de tout le Canada. Le contenu du projet de loi C-14 se fonde sur les recommandations faites lors de la consultation des intervenants.

Honorables sénateurs, lorsqu'ils ont comparu devant le comité permanent de l'autre endroit, les représentants de l'Institut canadien des produits pétroliers ont offert de travailler de concert avec le gouvernement pour assurer l'exactitude des mesures sur le marché. L'institut a soutenu qu'il existait quelques cas de manipulations mal intentionnées des appareils de mesure, mais que l'usure sur ces appareils pouvait donner des lectures inexactes.

Les consommateurs ne sont pas les seuls à bénéficier de l'application rigoureuse des normes dans le domaine des mesures. Pendant la consultation des intervenants par Mesures Canada, les détaillants ont déclaré qu'ils avaient été désavantagés par des mesures inexactes, que ce soit en raison d'erreurs de leur part commises par inadvertance ou d'erreurs de calcul faites délibérément par leurs concurrents.

Pas étonnant que le projet de loi ait reçu un soutien de principe et des consommateurs et des détaillants. Il a été adopté à l'autre endroit après des amendements mineurs et a été porté à l'attention des sénateurs après une étude supplémentaire par le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce.

(1520)

Je vais rappeler aux sénateurs les trois façons dont le projet de loi favorisera des mesures justes. D'abord, il prévoit des fréquences d'inspections obligatoires des instruments de mesure que les détaillants utilisent conformément à la Loi sur les poids et mesures. Deuxièmement, il autorise le ministre de l'Industrie à désigner des fournisseurs de services autorisés compétents pour inspecter les instruments de mesure. Troisièmement, il modernise le régime d'amendes et prévoit de nouveaux moyens sous la forme de pénalités, mettant ainsi en place à la fois des amendes plus sévères et une approche plus souple à l'égard des infractions moins flagrantes afin de promouvoir le respect de la loi sur le marché.

Permettez-moi de commencer par les fréquences des inspections obligatoires. Aux termes du projet de loi, les entreprises de huit secteurs du commerce seront soumises à des inspections obligatoires semblables à celles qui existent maintenant pour les compteurs d'électricité et de gaz aux termes de la Loi sur l'inspection de l'électricité et du gaz. Au départ, huit secteurs du commerce seront visés par ces modifications : commerce au détail des produits pétroliers, commerce de gros des produits pétroliers, produits laitiers, aliments au détail, pêche, exploitation forestière, céréales et produits de grande culture, et exploitation minière.

Le projet de loi à l'étude exigerait que les détaillants fassent inspecter leurs instruments à intervalles réguliers. Les fréquences des inspections obligatoires seront imposées progressivement dans les huit secteurs que je viens d'énumérer. D'autres secteurs pourraient s'ajouter par la suite à la lumière des consultations menées auprès des intéressés. Au cours des consultations réalisées dans le secteur commercial, les intéressés ont réaffirmé que les inspections obligatoires s'imposaient, si on voulait préserver l'intégrité de l'industrie et aider les détaillants à rester compétitifs sur des marchés aux enjeux importants.

Je passe maintenant aux moyens par lesquels Mesures Canada mènera les inspections. Le projet de loi n'exige pas l'embauche de nouveaux inspecteurs comme fonctionnaires de Mesures Canada. Le ministre de l'Industrie aura plutôt le pouvoir de désigner des inspecteurs non gouvernementaux pour exécuter les inspections et de suspendre ou révoquer la désignation d'un inspecteur. Ces inspecteurs non gouvernementaux n'auront pas de pouvoirs d'exécution, ceux-ci étant dévolus aux inspecteurs du gouvernement. Avant de pouvoir certifier des instruments de mesure, tous les fournisseurs de services autorisés devront suivre une formation dispensée par Mesures Canada et respecter des critères de rendement stricts. Mesures Canada évaluerait également tous les fournisseurs autorisés pour veiller à ce qu'ils s'acquittent correctement de leurs fonctions.

Les modes différents de prestation sont un moyen efficace de s'assurer de l'exactitude des instruments et ils sont utilisés avec succès depuis le milieu des années 1980 aux termes de la Loi sur l'inspection de l'électricité et du gaz.

Mesures Canada continuerait d'évaluer le comportement sur le marché au moyen d'inspections indépendantes. Il incomberait à l'organisme de répondre aux plaintes au sujet de mesures soupçonnées d'inexactitude et vérifierait le rendement des fournisseurs de services autorisés. S'il faut prendre des mesures d'exécution, seuls les inspecteurs de Mesures Canada, et non les fournisseurs de services autorisés, assumeraient cette responsabilité.

Honorables sénateurs, qu'il me soit permis d'expliquer brièvement comment les moyens d'exécution proposés dans le projet de loi à l'étude amélioreraient la Loi sur les poids et mesures et la Loi sur l'inspection de l'électricité et du gaz, non seulement par une plus grande fermeté à l'égard des infractions graves, mais aussi par une souplesse plus grande pour imposer des sanctions moins lourdes lorsque cela convient.

Certaines infractions en matière de mesures peuvent être le résultat d'une altération délibérée et malveillante, alors que d'autres sont le simple effet de l'usure de l'instrument de mesure. Un seul régime de sanctions ne convient pas dans les deux situations, mais, aux termes des lois existantes, les poursuites sont le seul moyen disponible lorsqu'on veut imposer des amendes pour non-conformité à la loi.

Honorables sénateurs, le projet de loi dont nous sommes saisis nous donnera plus de latitude pour promouvoir le respect de la loi et, lorsqu'il y a lieu de le faire, sanctionner ceux qui bafouent les règles. Le projet de loi alourdira les amendes prévues dans les deux lois. Les amendes dont le maximum est actuellement de 1 000 $ seront portées à 10 000 $ sur déclaration sommaire de culpabilité. Dans le cas des infractions punissables par mise en accusation, les amendes doubleront, passant de 25 000 $ à 50 000 $, et il pourrait y avoir une peine d'emprisonnement d'un maximum de deux ans. Ces sanctions ne seront pas considérées comme un simple coût à absorber pour pouvoir faire des affaires. Elles décourageront l'inexactitude dans les mesures sur le marché. Elles sont du même ordre que celles qu'imposent d'autres pays industrialisés pour des infractions semblables et elles constitueront un message clair : le Canada préserve l'intégrité de son marché.

Qu'en est-il des infractions plus légères? Le projet de loi permettra à Mesures Canada d'imposer des pénalités qui ne dépasseront pas 2 000 $. Elles seront imposées selon une stratégie d'application progressive. Les sénateurs comprendront qu'un régime de pénalités permettra à Mesures Canada d'adapter les sanctions à la gravité de l'infraction, ce qui est impossible pour l'instant. Grâce aux pénalités, Mesures Canada possède un moyen de veiller à ce que les règles lancent un avertissement aux autres, leur faisant voir à quoi ils peuvent s'attendre s'ils agissent de la même façon.

Des ministères et organismes comme Transports Canada, l'Agence canadienne d'inspection des aliments et le Bureau de la concurrence ont actuellement un régime de pénalités. La force de ce régime tient au fait qu'il permet d'adapter la peine à l'infraction et qu'il sera un moyen utile de promouvoir la conformité et l'exactitude sur le marché.

Honorables sénateurs, je signale également que le projet de loi prévoit une défense fondée sur la diligence raisonnable dans le cas de certaines infractions, lorsque la personne peut montrer qu'elle a pris des mesures raisonnables pour prévenir l'infraction.

Enfin, je rappelle au Sénat que le projet de loi a été étudié à fond et est l'aboutissement d'une recherche de consensus. Comme les sénateurs s'en souviendront peut-être, Industrie Canada a annoncé un examen législatif de la Loi sur les poids et mesures et de la Loi sur l'inspection de l'électricité et du gaz dans son Rapport de 2006-2007 sur les plans et les priorités.

En 2006, Mesures Canada a entrepris des consultations sur un large éventail de réformes. Un thème qui est revenu sans cesse dans les consultations est celui de la nécessité de fréquences d'inspections obligatoires. Le projet de loi a encore été perfectionné à l'autre endroit et notre propre comité l'a étudié. Il fera également l'objet d'un examen législatif cinq ans après avoir reçu la sanction royale.

Pour le consommateur canadien, le projet de loi voudra dire une meilleure protection contre les pratiques injustes du commerce de détail et l'assurance que leurs opérations reposent sur des mesures exactes. Pour les détaillants, le projet de loi fixera des normes uniformes pour que l'entreprise devienne plus responsable de l'exactitude des mesures. Les inspections obligatoires, dont la fréquence varie de un à cinq ans, selon le secteur du commerce, risquent d'ajouter des coûts mineurs, mais la solidité et l'intégrité du marché l'emportent sur ces coûts mineurs.

Certains sénateurs estiment que le titre abrégé du projet de loi, Loi sur l'équité à la pompe, est inapproprié. Au contraire, je crois qu'il est tout à fait approprié, surtout alors que nous connaissons une période de grande variation des prix à la pompe en raison de l'agitation qui a gagné les pays d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient. Combien de temps dureront ces fluctuations? Nous n'en savons rien. Toutefois, nous savons que, grâce à ce projet de loi, les Canadiens auront l'assurance qu'ils obtiennent la quantité qui leur est facturée.

Honorables sénateurs, si vous êtes comme moi, vous quittez toujours la station-service avec le sentiment désagréable que vous n'avez peut-être pas obtenu ce que vous auriez dû obtenir ou, à l'inverse, que vous en avez peut-être obtenu trop. Après tout, contrairement à presque tout ce que l'on achète, il est impossible de vérifier soi-même la quantité d'essence que l'on obtient. Pour les consommateurs, cela représente l'aspect le plus important du projet de loi. Ce dernier, présenté à un moment fort opportun par notre brillant gouvernement, non seulement élimine l'inquiétude des consommateurs et leur assure qu'ils obtiendront la quantité d'essence payée, mais vient aussi protéger les détaillants de la critique à un moment où leur clientèle risque de voir les prix à la pompe augmenter.

J'exhorte les sénateurs à se joindre à moi pour appuyer ce projet de loi.

L'honorable Céline Hervieux-Payette : Honorables sénateurs, je me demande si le sénateur pourrait me dire ce qu'il recommande afin d'assurer une meilleure équité. Recommande-t-il au gouvernement de faire ce que les autres gouvernements ont fait, c'est-à-dire contrôler le prix de l'essence? Comme nous produisons nous aussi du pétrole, pourquoi devons-nous payer aussi cher sur les marchés internationaux, tandis que certains pays qui produisent eux aussi du pétrole offrent de bien meilleurs prix à leurs citoyens?

Le sénateur Greene : Je n'ai pas bien compris la question. Est-ce que madame le sénateur pourrait la répéter?

Le sénateur Hervieux-Payette : Oui. Le sénateur a parlé d'assurer l'équité à la pompe, ce qui, selon lui, refléterait l'esprit du projet de loi. Le sénateur serait-il prêt à respecter le libellé du projet de loi tout en tenant compte du fait que le gouvernement pourrait assurer l'équité à la pompe en fixant un prix adapté à la réalité canadienne, étant donné que nous sommes un pays producteur de pétrole? Le sénateur appuie-t-il cette proposition?

Le sénateur Greene : Non, je ne l'appuie pas, honorables sénateurs. De ce côté-ci, nous ne souscrivons pas à l'idée d'un programme énergétique national. Nous croyons aux forces du marché.

[Français]

L'honorable Fernand Robichaud : L'honorable sénateur peut-il nous assurer que, lorsqu'on achète de l'essence, les mesures au litre soient exactement les mêmes, que ce soit au Nouveau-Brunswick, au Québec ou dans une autre province? Parce que les prix sont totalement différents d'une province à l'autre.

[Traduction]

Le sénateur Greene : Les prix varient, honorables sénateurs, pour trois raisons. Premièrement, les taxes provinciales ne sont pas les mêmes. Deuxièmement, il y a concurrence à l'échelle locale. Troisièmement, l'emplacement des raffineries joue aussi un rôle. La majeure partie du pétrole de la côte Est provient de l'étranger. Il n'en va pas nécessairement de même ailleurs au Canada.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Je crois que l'honorable sénateur n'a pas compris ma question, mais j'accepte sa réponse.

(1530)

[Traduction]

L'honorable Mac Harb : Honorables sénateurs, le projet de loi C-14 est le point culminant d'un énorme travail de Mesures Canada, échelonné sur plusieurs années. Comme il a été dit plus tôt, la mesure législative vise à moderniser des dispositions de la Loi sur l'inspection de l'électricité et du gaz et de la Loi sur les poids et mesures pour mieux protéger les consommateurs. Le projet de loi imposera un calendrier d'inspections obligatoires comme on en trouve dans de nombreux pays occidentaux. Il a l'appui de principe des groupes de défense des consommateurs et des détaillants qui ont été consultés par Mesures Canada.

Les sénateurs de ce côté-ci et moi sommes déterminés à protéger les consommateurs et convenons que d'assurer l'exactitude des opérations commerciales est un bon objectif. La question de l'exactitude des pompes ou des balances mérite notre attention. Les Canadiens doivent en avoir pour leur argent.

Je félicite le ministère d'avoir mené de vastes consultations auprès des principaux intéressés et d'avoir présenté au Parlement une mesure législative qui responsabilisera davantage les détaillants et donnera aux fonctionnaires un moyen plus efficace d'assurer le respect de la loi. Il aurait peut-être été bon que ces mêmes fonctionnaires aient été chargés de choisir le titre abrégé du projet de loi. Malheureusement, cette décision a apparemment été laissée au ministre.

Bien que nous soyons saisis d'un projet de loi qui couvre un grand nombre de secteurs de la consommation, de l'exploitation forestière à la production laitière et de l'alimentation au détail à l'électricité, chacun appliquant à des degrés variables les normes de précision, et bien que le secteur de la vente au détail d'essence ait les plus hauts taux de conformité, pour une raison quelconque, le titre abrégé du projet de loi est « Loi sur l'équité à la pompe ». En faisant ce choix, le ministre et son gouvernement ont rendu un bien mauvais service aux fonctionnaires dévoués et aux intervenants de l'industrie. Le gouvernement a décidé de faire de la petite politique en choisissant un titre abrégé incendiaire et trompeur qui déprécie une mesure législative qui est autrement légitime et bien intentionnée.

Interrogé sur ce titre provocateur, Mike Lake, secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, a dit ceci au comité du Sénat :

Nous tentons de régler le problème de l'équité pour les consommateurs, dans les huit secteurs, mais le titre du projet de loi fait allusion à un seul exemple que n'importe quel Canadien qui achète de l'essence comprend.

Voilà la raison. Et pourtant, c'est dans le secteur de la vente d'essence au détail qu'on trouve le taux de conformité le plus élevé : il est en effet supérieur à 91 p. 100. En 2007, le taux de conformité dans ce secteur était de 97 p. 100.

Nous avons débattu antérieurement dans cette enceinte de la raison pour laquelle le secteur des carrières de pierre et de sable a un taux de conformité de 47 p. 100. Pourquoi n'a-t-on pas intitulé ce projet de loi « Loi sur la conformité dans les carrières de pierre et de sable »?

Le secteur de l'électricité, qui a des répercussions considérables sur le budget mensuel des Canadiens, a un taux de conformité de plus de 74 p. 100. Pourquoi n'appelons-nous pas cette mesure « Loi sur l'équité aux compteurs d'électricité »? Quoi qu'il en soit, elle s'appelle « Loi sur l'équité à la pompe ».

Ce titre a créé de vrais problèmes et a contribué à entacher la réputation d'une grande partie du secteur de la vente au détail du Canada. Comme des représentants de la Canadian Independent Petroleum Marketers Association l'ont indiqué au comité, 72 p. 100 des 13 000 stations-service du Canada sont gérées par des particuliers. Ces stations-service sont de petites entreprises privées. Leurs propriétaires sont inquiets.

Ian Wilson, président de Wilsons Fuel Co., entreprise indépendante de vente de carburants et de mazout du Canada atlantique, a dit ce qui suit : « Nous sommes préoccupés par le fait que le gouvernement utilise le titre abrégé pour marquer des points, politiquement parlant, sur le dos des petites et moyennes entreprises comme Wilsons Fuel. »

Qu'est-ce que le gouvernement a retiré de la politisation d'un projet de loi administratif qui n'aurait pas dû être litigieux? De nombreux sénateurs ont vu le « bulletin parlementaire » qui a déjà été distribué dans une circonscription conservatrice. Ce document montre un consommateur en colère, les bas croisés sur la poitrine, à côté du gros titre :

Tous les ans, des pompes à essence défectueuses coûtent des millions de dollars aux consommateurs canadiens. Ce n'est pas juste. Le gouvernement conservateur prend des mesures pour protéger les consommateurs canadiens. C'est pour cette raison que nous avons proposé la Loi sur l'équité à la pompe.

C'est vraiment terrible, trompeur, injuste et inapproprié de distribuer des documents de ce genre dans un but partisan, politiquement parlant, et seulement dans ce but.

Souvenez-vous donc des gros titres qui sont apparus dans les journaux à la suite du dépôt de cette mesure législative. Le Chronicle-Herald d'Halifax affirmait en première page : « Ottawa s'en prend aux pompistes escrocs ». Un gros titre du Vancouver Sun annonçait « Un projet de loi qui s'attaque aux arnaques à la pompe ». Le dernier gros titre vient de l'Edmonton Journal, qui affirmait qu' « Ottawa promet d'imposer de lourdes amendes aux propriétaires de stations d'essence qui gonflent les prix ».

Les honorables sénateurs trouvent-ils que ces titres sont sensés? Ils sont insensés aux yeux des 13 000 détaillants d'essence au Canada. Ces propriétaires de PME se sentent trompés et maltraités, ils trouvent qu'ils sont ciblés et pointés du doigt, plus que les autres secteurs visés par la mesure.

L'outrance verbale du gouvernement laisse entendre que les détaillants cherchent à arnaquer les consommateurs; elle évoque des images de propriétaires de petites entreprises, clef à molette et lampe de poche en main, qui trafiquent les pompes pour flouer les consommateurs. Ce n'est tout simplement pas le cas; c'est faux.

Honorables sénateurs, les pompes sont des appareils de pointe hautement perfectionnés. Il arrive parfois qu'elles ne fonctionnent pas correctement, souvent à l'avantage des consommateurs, mais parfois à l'avantage des détaillants. Étant donné la quantité d'essence qui passe par ces pompes, il se peut qu'il y ait parfois de légères inexactitudes. Il demeure que, des huit secteurs visés par la mesure, c'est celui où les mesures sont le plus exactes.

Nous croyons comprendre qu'on installe de plus en plus de pompes électroniques; ces pompes sont encore plus précises et répondent à un niveau de conformité encore plus élevé. Les détaillants tiennent autant à l'exactitude que les consommateurs. Il est dans leur intérêt de savoir combien d'essence ils achètent et combien ils en vendent.

Ces 30 dernières années, seulement un ou deux détaillants ont été accusés de non-conformité par Industrie Canada. Selon les dossiers de l'industrie, pas un seul détaillant d'essence n'a encore été reconnu coupable d'une infraction à la Loi sur les poids et mesures. Les honorables sénateurs conviennent-ils qu'il s'agit là d'un bilan reluisant? Les sénateurs de l'autre côté ne le croient pas, malheureusement.

J'espère que nous saurons nous acquitter de notre rôle en tant que Chambre de second examen objectif et faire ce qui s'impose.

Bref, ce secteur ne devrait pas être pointé du doigt, malmené et mis dans l'embarras par le gouvernement. Les détaillants d'essence indépendants ont essayé à plusieurs reprises d'expliquer au gouvernement qu'ils se sentent visés, qu'ils trouvent qu'on les accuse de tromper les Canadiens. À l'autre endroit comme au comité, les membres de l'opposition ont tenté à plusieurs reprises de faire modifier ou supprimer le titre abrégé, mais en vain. Pourquoi s'obstine-t-on donc à refuser de modifier un titre abrégé trompeur et préjudiciable?

(1540)

Le projet de loi ne protège absolument pas les consommateurs contre les prix élevés à la pompe. Il ne traite même pas de la question de la concurrence dans le secteur de la vente de l'essence au détail. La multiplication des inspections fera augmenter les coûts et l'on craint vraiment que ces coûts s'ajoutent à la facture des consommateurs. Encore une fois, le titre abrégé induit les Canadiens en erreur. Les gens qui lisent « Loi sur l'équité à la pompe » concluent que la mesure traite de ces préoccupations, mais il n'en est rien.

Quand nous avons demandé à M. Lake, lors de son témoignage au comité, de nous expliquer le sens de ce titre, il a dit ceci :

Lorsqu'on cherche à nommer un projet de loi, il arrive que certains noms ne veuillent rien dire et n'interpellent pas les Canadiens qui essaient de comprendre sur quoi porte le projet de loi. Lorsqu'on utilise un titre comme « Loi sur l'équité à la pompe » cela présente un exemple d'une situation qui n'est pas toujours équitable et que les Canadiens connaissent.

On ne rend pas service aux Canadiens en choisissant un nom qui donne l'impression que le gouvernement prend des mesures pour corriger une situation, mais qui est trompeur et n'est pas fidèle à la réalité. Je trouve que c'est une insulte à l'intelligence des Canadiens. C'est aussi une insulte au Sénat et à l'autre endroit.

Nous sommes tous en faveur de l'équité, mais nous en voyons bien peu dans cette attaque manifestement injuste et intéressée du gouvernement à l'endroit du secteur de la vente de l'essence au détail.

En résumé, ce projet de loi est bien conçu, dans l'ensemble, et la plupart des intéressés l'approuvent en principe. L'absence de détails suscite des préoccupations, étant donné que le règlement d'application n'a pas encore été rédigé, mais le processus d'examen prévu après cinq ans, grâce à l'amendement libéral, s'avérera déterminant pour assurer aux Canadiens qu'ils obtiennent bien la quantité qu'ils ont payée grâce à cette loi.

Ce qui est regrettable, et peut-être irréparable, c'est qu'on a fait du tort à l'un des plus importants secteurs de la vente au détail au Canada en raison de l'opportunisme dont le gouvernement a fait preuve en choisissant et en approuvant un titre abrégé aussi mal conçu.

L'industrie demande au gouvernement de faire ce qui s'impose. Tous les témoins nous ont demandé, les uns après les autres, de modifier le titre abrégé, et je crois que nous ferions bien d'acquiescer à leur demande.

Motion d'amendement

L'honorable Mac Harb : Je propose donc un amendement à ce projet de loi, un amendement visant à remplacer le titre abrégé par ce qui suit :

« Loi sur l'équité des poids et mesures ».

La clarté et la transparence, des qualités importantes pour au moins certains d'entre nous, seront bien servies par cet amendement. Ce titre est plus honnête et il décrit plus fidèlement le but et l'objet du projet de loi. Il ne cible pas injustement une industrie en particulier, une industrie qui, en fait, a montré la voie en matière de promotion et de maintien de la précision dans ses transactions avec les consommateurs.

Le gouvernement ne peut camoufler le fait qu'il n'a pas de solution concrète au problème du prix du carburant dans ce pays derrière le titre abrégé et totalement faux d'un projet de loi relatif à la précision des poids et des mesures.

L'amendement est mineur. C'est une petite modification qu'il est important que mes collègues de cette Chambre adoptent pour montrer à l'autre endroit que nous faisons vraiment notre travail au Sénat, du côté de l'opposition et du côté du gouvernement. Nous devons dire au gouvernement à la Chambre des communes qu'il n'est pas juste de choisir des titres qui ne sont même pas mentionnés dans le projet de loi, seulement dans le titre abrégé. Nulle part dans le projet de loi il n'est question d'équité à la pompe, sinon dans le titre abrégé. Ce titre est injuste. Voilà pourquoi, honorables sénateurs, j'espère que vous appuierez cet amendement.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, le sénateur Harb, avec l'appui du sénateur Merchant, propose que le projet de loi ne soit pas lu pour la troisième fois, mais qu'il soit amendé en remplaçant le titre abrégé par celui-ci :

« Loi sur l'équité des poids et mesures ».

Le sénateur Comeau a la parole.

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Compte tenu du fait que le Sénat est la Chambre du second examen objectif, je pense qu'il vaut la peine d'évaluer l'amendement proposé par le sénateur. De prime abord, j'ai peu de sympathie pour cet amendement, mais il vaut la peine d'y penser jusqu'à demain. Je propose donc l'ajournement du débat.

(Sur la motion du sénateur Comeau, le débat est ajourné.)

Le Code criminel
La Loi sur la défense nationale

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Lang, appuyée par l'honorable sénateur Meredith, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-48, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur la défense nationale en conséquence.

L'honorable George Baker : Honorables sénateurs, je voudrais dire quelques mots. Je crois que nous ferions bien de renvoyer le projet de loi au comité pour qu'il l'étudie en profondeur.

Nous ne sommes pas à la Chambre des communes, où, comme cela s'est produit à de nombreuses reprises au fil des ans, on présente un projet de loi, puis, quelques jours plus tard, il est réputé avoir été lu pour la deuxième fois, avoir été renvoyé à un comité, avoir fait l'objet d'un rapport et avoir été lu pour la troisième fois. C'est une approche souvent utilisée aux Communes.

Mais le Sénat n'emploie pas cette approche. Par conséquent, si les sénateurs jettent un coup d'œil sur la jurisprudence canadienne, ils s'apercevront que, dans les décisions des tribunaux quasi judiciaires, tant fédéraux que provinciaux, comme je l'ai indiqué auparavant, les travaux du Sénat sont cités trois fois plus souvent que ceux de la Chambre des communes en ce qui a trait aux mesures législatives.

Encore la semaine dernière, la Cour suprême du Canada écrivait ceci au paragraphe 68 de son jugement, dans l'affaire R. c. Ahmad, 2011 CSC 6 :

Pour bien comprendre la façon dont le législateur conçoit le rôle respectif des juges qui président les procès criminels et des juges de la Cour fédérale, il convient sans doute de se reporter à l'échange suivant, qui a eu lieu devant le Comité sénatorial spécial sur la teneur du projet de loi C-36 [...]

Le paragraphe se poursuit avec un extrait des délibérations du comité sénatorial. Il s'agit d'un jugement que la Cour suprême du Canada a rendu tout juste la semaine dernière.

Le sénateur Stratton siège parmi nous aujourd'hui. Or, récemment, il a été cité plus souvent que tout autre sénateur et tout autre député, en raison d'un changement qui vient d'être apporté dans les dispositions sur la conduite avec facultés affaiblies. J'ai déjà parlé de cette affaire, mais, à la Cour de justice de l'Ontario, le juge Fraser a déclaré ce qui suit dans une autre décision. Ce sont des paroles qui reviennent souvent par les temps qui courent et qui ont été répétées dans de nombreuses affaires :

Le sénateur Stratton, parlant en tant que parrain au Sénat du projet de loi C-2, présenté lors de la deuxième session, a également affirmé que l'objectif de la mesure législative consistait à limiter les preuves contraires aux défenses scientifiquement valables.

Son Honneur a été professeur de droit et a enseigné les dispositions de l'article 253 du Code criminel. Le Sénat, comme vous le savez, a adopté un projet de loi d'initiative ministérielle donnant une nouvelle définition à la « preuve contraire » et aujourd'hui, seules les preuves reconnues scientifiquement sont admissibles. Bien entendu, tous les juges en tiennent le sénateur Stratton responsable; en fait, ils ne le tiennent pas vraiment responsable, mais il leur faut bien citer quelqu'un. Par conséquent, plus souvent qu'autrement, ils se tournent du côté du Sénat. Naturellement, la personne condamnée croit bien souvent que le sénateur Stratton a mis récemment de nombreuses personnes derrière les barreaux.

(1550)

Voilà ce qui arrive quand un organe comme le Sénat se penche sérieusement sur des mesures législatives et que le comité s'emploie activement à en faire l'examen. Voilà qui renvoie au rôle du Sénat, que n'a pas la Chambre des communes, à titre d'organe législatif et non politique. Les nouveaux sénateurs doivent prendre conscience que la plus importante distinction entre les deux organes est sans doute que la Chambre des communes veille à ce que le gouvernement rende des comptes à la population. C'est là sa principale fonction. Aujourd'hui, il s'agit possiblement de sa plus importante fonction, tout simplement parce que le Sénat remplit désormais la fonction législative de la Chambre des communes, comme en témoignent les jugements des tribunaux.

Lorsque les juges déterminent l'objet du projet de loi, ils consultent d'abord le sénateur qui le parraine à l'étape de la deuxième lecture. Dans le cas du projet de loi à l'étude aujourd'hui, les noms de certains sénateurs seront mentionnés dans cinq ou 10 ans. Évidemment, lorsqu'ils présentent des projets de loi, les sénateurs doivent éviter de dire ce qu'ils en pensent personnellement; toutefois, ils sont tenus d'exposer la position du gouvernement — celle du ministère de la Justice — à ce sujet, de telle sorte que les juges puissent comprendre l'objectif visé.

Ce projet de loi a été présenté par le sénateur Lang. Très brièvement, je pense que le sénateur Lang en a décrit l'objet le 10 février 2011 en déclarant ce qui suit :

Il autoriserait les juges à imposer, aux personnes reconnues coupables de meurtres multiples, des périodes distinctes d'inadmissibilité à la libération conditionnelle de 25 ans pour le deuxième meurtre et tout autre meurtre subséquent. Mais la modification la plus importante qu'il apporterait est celle qui ferait en sorte que ces périodes supplémentaires de 25 ans soient consécutives à la période d'inadmissibilité à la libération conditionnelle imposée pour le premier meurtre.

On peut citer des exemples récents, comme les cas de Bernardo et du colonel Williams, qui mettaient en cause deux meurtres. Chacun de ces individus a écopé d'une peine d'emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans. Au fil des ans, le raisonnement de notre système de justice a été qu'on ne peut purger qu'une seule peine d'emprisonnement à perpétuité, car nul ne dispose de deux vies.

En vertu de ce projet de loi, le juge aurait le pouvoir discrétionnaire de prendre la décision suivante : « Dans le cas du premier meurtre, j'impose une peine d'emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans; dans le cas du deuxième meurtre, il n'y a pas non plus de possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans. » La période d'inadmissibilité à la libération conditionnelle serait donc de 50 ans au total.

Si ces meurtres avaient été commis après l'adoption du projet de loi, le juge aurait été tenu, en vertu du Code criminel, de prendre cela en considération et de faire état des motifs pour lesquels il n'imposerait pas une deuxième peine d'emprisonnement à perpétuité, encore une fois sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans. En gros, comme le sénateur Lang l'a expliqué, c'est ce que fait ce projet de loi.

Dans le cas de Pickton, étant donné qu'il y a eu six meurtres et qu'il s'agissait de condamnations pour meurtres au deuxième degré, la première période d'inadmissibilité à la libération conditionnelle aurait été de 10 ans, puis de 25 ans pour chacun des meurtres suivants.

Le sénateur Lang a fait allusion au cas de Clifford Olson lorsqu'il a déclaré ce qui suit :

Les juges pourront ainsi éviter aux familles d'avoir à subir de multiples demandes de libération conditionnelle qui, souvent, ne font qu'ouvrir d'anciennes plaies.

Le sénateur Lang a aussi souligné, à juste titre, que ce projet de loi avait été présenté il y a 10 ans par un député libéral — qui est d'ailleurs toujours député — et qu'il avait été adopté par la Chambre des communes, mais pas par le Sénat.

En fait, ce que nous dit le sénateur Lang, c'est que, à l'heure actuelle, quand une personne est condamnée à la prison à vie, elle peut demander une première fois d'être libérée sous condition dès qu'elle a passé 25 ans derrière les barreaux et que la loi lui permet ensuite de répéter sa demande tous les deux ans.

Nous savons que Clifford Olson n'obtiendra jamais de libération conditionnelle. Au début de chacune de ses audiences, les premiers mots qu'il prononce sont toujours les mêmes : « Vous seriez fous de me remettre en liberté. » , ce qui ne l'empêche pas d'attirer sur lui l'attention des familles de ses victimes et de leur faire subir cela tous les deux ans.

Honorables sénateurs, le sénateur Lang a laissé entendre, et je crois que le sénateur Boisvenu s'intéresse lui aussi à la question depuis longtemps, que cette mesure législative réglerait certainement le problème. Or, elle ne s'appliquerait qu'aux meurtres commis après son adoption. Il s'agira vraisemblablement du premier point sur lequel se penchera le comité du Sénat. Pourquoi ne s'appliquerait-elle pas aux meurtres qui ont eu lieu avant son adoption, mais dont le procès n'a pas encore eu lieu?

Je crois que les témoins vont beauoup insiter sur le fait que les juges ne peuvent pas ajouter autre chose que des périodes de 25 ans. Autrement dit, ils ne pourront pas dire : « C'est 25 ans pour le premier meurtre, 10 ans pour le deuxième et cinq ans pour le suivant. » Ils n'auront pas ce pouvoir discrétionnaire. Ils pourront seulement ajouter des périodes fixes de 25 ans à la première condamnation pour meurtre.

J'ai bien l'impression qu'il s'agira de la première critique que formulera la Criminal Lawyers' Association. J'ai également l'impression que Son Honneur sera du même avis.

Le sénateur Lang a également laissé entendre que, dans les faits, le pendant de cette mesure législative, le projet de loi S-6, Loi renforçant la sévérité des peines d'emprisonnement pour les crimes les plus graves, fera en sorte que les futurs meurtriers ne pourront même plus invoquer la disposition de la dernière chance. Encore un élément dont les témoins vont, sans aucun doute, nous parler.

Comme certains sénateurs s'en souviendront sans doute, c'est en 1976 que le Canada a adopté la loi qui abolissait la peine de mort. J'étais moi-même député à l'époque et je m'en souviens comme si c'était hier. On y disait que les personnes reconnues coupables de meurtre au premier degré ne seraient pas admissibles à une libération conditionnelle avant 25 ans. C'est ce qu'avait recommandé l'Association canadienne des policiers, si je ne m'abuse. On avait choisi une durée de 25 ans parce qu'à l'époque, on pouvait juger que c'était assez sévère. Mais, pour que le projet de loi soit adopté, il fallait qu'il aille aussi loin. Par conséquent, cela soulève peut-être une question sur laquelle le comité se penchera et qui n'a pas été soulevée à la Chambre des communes. Aucune de ces questions n'a été soulevée à la Chambre des communes, mais un point qui pourrait faire surface est la constitutionnalité de la disposition.

(1600)

Les sénateurs se souviendront qu'il s'agissait de l'affaire Luxton. La Cour suprême du Canada devait déterminer si la période d'inadmissibilité de 25 ans à une libération conditionnelle violait l'article 12 en tant que peine cruelle et inusitée. La cour a jugé qu'une période de 25 ans n'était pas une peine cruelle et inusitée en raison de la disposition de la dernière chance. Je ne dis pas que cela va se produire, mais il est possible que la disposition retienne l'attention du comité lorsque celui-ci étudiera le projet de loi.

Honorables sénateurs, le sénateur Lang a fait de l'excellent travail en présentant la position du gouvernement relativement au projet de loi. Nous devrions étudier attentivement cette mesure au comité afin de lui donner la teneur que les juges vont rechercher.

Honorables sénateurs, je termine en mentionnant que, à l'autre endroit, les députés sont en train de discuter d'une motion du NPD portant que le Sénat devrait être dissous, qu'il devrait être aboli.

La majorité des sénateurs se souviendront que, il y a environ deux ans, la Chambre des communes avait adopté un projet de loi omnibus de 500 pages qui supprimait le crédit d'impôt accordé à l'industrie cinématographique canadienne, mais qui maintenait celui qui était accordé à l'industrie cinématographique américaine. Mes collègues s'en souviennent-ils? Les néo-démocrates avaient appuyé le projet de loi. Ils avaient ensuite eu une rencontre avec les représentants de l'industrie cinématographique et la guilde des acteurs, et ils nous avaient fourni une explication. Les néo-démocrates n'avaient pas lu le projet de loi. Ils avaient oublié neuf pages. Toutefois, ils ont décidé de corriger leur erreur en demandant au Sénat de faire en sorte que le projet de loi ne soit pas adopté.

Quelle erreur. Je reconnais qu'il s'agissait d'une mesure législative de 500 pages, mais c'était aussi un sujet nouveau. J'ai jeté un coup d'œil sur le projet de loi et je me suis demandé comment ces neuf pages avaient bien pu leur échapper. La mesure avait été étudiée par le comité, mais celui-ci l'avait adoptée au moyen de cinq motions visant chacune 100 pages à la fois. « Les articles 1 à 100 sont-ils adoptés? » « Oui. » « Les articles 200 à 300 sont-ils adoptés? » « Oui. » C'est ainsi que les choses ont été faites et c'est ainsi que les neuf pages leur ont échappé.

Honorables sénateurs, le NPD est venu voir les membres du comité individuellement pour leur demander de bloquer le projet de loi. Il a dit publiquement qu'il demandait au Sénat de rejeter la mesure législative. C'est ce que le Sénat a fait. Nous n'avons pas adopté le projet de loi et celui-ci n'a jamais été présenté de nouveau.

À peine trois mois plus tard, le Sénat a été appelé à se pencher sur un projet de loi visant à modifier la Loi électorale. Cette mesure législative aurait permis la divulgation des noms, adresses et dates de naissance de tous les électeurs au Canada. Encore une fois, la Chambre des communes a avoué qu'elle ne s'était pas rendu compte de ce qu'elle faisait, et le NPD a de nouveau fait appel au Sénat afin qu'il corrige la mesure législative. Le Sénat a corrigé la mesure et l'a renvoyée à la Chambre des communes, qui a approuvé le changement que nous avions apporté.

Honorables sénateurs, en réponse à la motion présentée par le NPD aujourd'hui à la Chambre des communes, nous devrions dire que, si les néo-démocrates prônent l'abolition du Sénat, ils doivent donner aux Canadiens l'assurance que, à l'avenir, ils liront les mesures législatives en faveur desquelles ils votent.

Des voix : Bravo!

Son Honneur le Président intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Comeau, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.)

La Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Eaton, appuyée par l'honorable sénateur Rivard, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-35, Loi modifiant la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés.

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi C-35, Loi modifiant la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés.

L'immigration dans notre grand pays a toujours été l'un des fondements de notre société. Tout au long de son histoire, le Canada a toujours été l'un des pays au monde qui a attiré le plus d'immigrants, en provenance des quatre coins du monde. Non seulement cette tendance se maintient aujourd'hui, mais elle s'accentue plus que jamais. Les gens viennent ici parce qu'ils veulent un nouveau départ. Ils veulent se bâtir une nouvelle vie, pas seulement pour eux, mais surtout pour leurs enfants. Ils veulent s'établir dans un pays où, en travaillant avec acharnement et dévouement, ils pourront réaliser leur plein potentiel. Le Canada est un pays où ce rêve peut devenir réalité. Je suis un témoin privilégié, car je suis arrivée au Canada avec ma famille, en tant que réfugiée, il y a près de 30 ans.

Mon mari et moi avons tout abandonné et nous sommes venus nous établir ici, parce que nous voulions que nos enfants aient une meilleure vie. Bien d'autres personnes sont prêtes à faire la même chose et, pour reprendre le mot approprié de mon collègue, Justin Trudeau, il est « décourageant » de voir que certains individus exploitent à des fins personnelles le rêve de nombreux immigrants et réfugiés, celui de devenir Canadien.

Comme le souligne le projet de loi C-35, une faille — qui sera corrigée par cette mesure législative — dans notre système d'immigration a permis à des consultants non officiels en immigration de déposséder des candidats à l'immigration vulnérables de leur argent durement gagné en prétendant pouvoir les aider à obtenir la citoyenneté, alors que c'est faux.

En facturant des frais de consultation et de représentation aux personnes désireuses d'obtenir la citoyenneté canadienne, sans pour autant livrer des résultats tangibles, ces consultants malhonnêtes ont, pendant trop longtemps, escroqué des familles et des personnes totalement innocentes.

Honorables sénateurs, comme on l'a souligné au Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration de la Chambre des communes et comme l'a rappelé le sénateur Eaton, la marraine du projet de loi au Sénat, le recours à des consultants non officiels en immigration, également appelés « conseillers fantômes », est une pratique courante dans notre système d'immigration. Les activités et les actions de ces escrocs ont des répercussions négatives non seulement sur ces familles et ces personnes totalement innocentes qu'ils manipulent et malmènent, mais sur l'ensemble de la société canadienne. Ces consultants donnent une mauvaise réputation à notre grand pays dans le monde de l'immigration, ce qui dissuade les gens de venir chez nous. Cette situation est inacceptable parce que nous sommes un pays qui est et qui a toujours été très accueillant.

(1610)

Ces consultants « fantômes », qui travaillent depuis trop longtemps d'une manière illégale, immorale et malhonnête, ont trouvé dans notre système d'immigration des échappatoires qui leur permettent de poursuivre leurs pratiques abusives. Ces gens ont agi en toute impunité pendant trop longtemps. À moins d'adopter une réglementation et des sanctions adéquates, nous ne faisons que jouer leur jeu. Le projet de loi C-35 a pour but de mettre fin à cette situation.

Le projet de loi modifiera le cadre de l'immigration de telle façon que seuls des représentants autorisés pourront dispenser des services consultatifs aux candidats à l'immigration. Grâce à cette mesure législative, seuls les avocats, les notaires et les consultants autorisés membres en règle d'un organisme de réglementation autorisé par le ministre de la Citoyenneté, de l'Immigration et du Multiculturalisme pourront conseiller ou représenter les candidats à l'immigration à toute étape d'une procédure ou d'une demande.

Si l'organisme de réglementation trouve des gens qui se font passer pour des consultants en immigration sans être agréés, ils seront soumis à des sanctions comprenant des amendes et des peines d'emprisonnement. Le projet de loi C-35 crée non seulement un cadre de réglementation et de responsabilité, mais prévoit les sanctions à imposer au besoin à l'égard des services consultatifs en immigration. Ce projet de loi est exactement ce dont nous avons besoin en ce moment.

Honorables sénateurs, j'ai travaillé dans le domaine de l'immigration pendant plus de 30 ans. Durant cette période, j'ai été en contact étroit avec des réfugiés, dont plusieurs étaient des femmes.

Je peux donner aux sénateurs de nombreux exemples de cas où la vie de certaines personnes a été complètement détruite parce qu'elles n'avaient pas été adéquatement représentées par des consultants en immigration.

Il y a un cas dont je me souviens particulièrement. Il s'agissait d'une Jordanienne que j'appellerai Fatima, même si ce n'est pas son vrai nom. Fatima a été victime de l'incompétence d'un consultant en immigration. Lorsque je l'ai rencontrée pour la première fois, j'ai eu le cœur serré. Son visage était inondé de larmes et tout son corps était secoué de sanglots. Il était évident qu'elle avait subi des sévices physiques. Elle avait des cicatrices partout sur le visage et les bras.

Il a fallu plusieurs rencontres avec elle pour reconstituer son histoire. Elle avait fui la Jordanie en y laissant ses deux filles. J'ai appris que Fatima enseignait de longues heures dans une prestigieuse école privée et qu'elle avait deux filles adolescentes dont elle était très fière.

Malheureusement, son mari et sa famille l'ont soupçonnée d'avoir une aventure. Persuadés qu'elle avait entaché l'honneur de toute la famille, ils ont essayé de la tuer. Elle a été la victime d'un crime d'honneur. Même si la tentative d'assassinat a échoué, Fatima a dû passer plusieurs mois à l'hôpital. Pendant ce temps, avec l'aide d'amis et de membres de sa famille, elle a trouvé un moyen de gagner le Canada dès qu'elle a pu quitter l'hôpital.

À son arrivée dans le pays, sa demande de statut de réfugié a été rejetée parce que le consultant en immigration qui la représentait ne connaissait pas suffisamment la loi applicable.

Honorables sénateurs, dans notre pays, la définition acceptée de réfugié désigne une personne qui craint d'être persécutée pour des motifs de race, de religion, de nationalité, d'opinions politiques ou d'appartenance à un groupe social particulier.

Même si Fatima ne demandait pas le statut de réfugié pour l'une des raisons énumérées dans la convention, elle y était quand même admissible en vertu des lignes directrices canadiennes concernant la persécution fondée sur le sexe, qui ont été spécialement conçues pour des cas comme le sien. Malheureusement, le consultant en immigration qui la représentait ne connaissait pas les lignes directrices et n'a donc pas présenté sa demande d'une manière appropriée.

Finalement, après une bataille de six ans, elle a été autorisée à rester au pays. Je n'oublierai jamais le jour où j'ai pu lui dire qu'elle pouvait désormais considérer le Canada comme son pays d'adoption. La joie l'a submergée, et elle a recommencé à pleurer, sauf qu'il s'agissait cette fois-ci de larmes de bonheur. Bien que nous ne puissions pas faire disparaître ses cicatrices, nous pouvons l'aider à mener une meilleure vie.

Honorables sénateurs, notre pays a donné à Fatima une deuxième chance et l'a accueillie à bras ouverts avec ses filles, leur accordant les droits et les perspectives dont jouissent tous les Canadiens. Même si nous ne pouvons pas changer son passé, nous avons pu assurer à cette femme et à ses filles un meilleur avenir. Pour cette raison, je suis certaine qu'elle sera éternellement reconnaissante au Canada.

Malheureusement, il y a, au Canada, beaucoup de gens qui se trouvent dans la même situation que Fatima, des gens qui ont souffert physiquement et mentalement et qui ont été privés de tout ce qu'ils possèdent. Voilà pourquoi il est très important que les gens qui fuient la persécution puissent avoir accès à des consultants capables de les représenter.

Le cas de Fatima aurait dû pouvoir être réglé en un an, mais il a pris six ans. Une femme qui avait déjà tout perdu à été exploitée par un consultant en immigration qui était incapable de faire son travail.

Je crois que le projet de loi C-35 empêchera les consultants de ce genre de tirer parti de victimes en situation vulnérable. Je vous ai raconté une histoire, mais il y en a des milliers d'autres. Je suis sûre que tous les honorables sénateurs connaissent d'autres exemples aussi injustes.

Honorables sénateurs, j'ai suivi l'évolution de ce projet de loi depuis qu'il a été déposé à la Chambre par l'honorable Jason Kenney, ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration. Je suis satisfaite de son contenu, d'autant plus qu'il est le fruit du travail commun de tous les partis. L'adoption de ce projet de loi leur vaudra tous des félicitations. Comme nous le savons, il y a des moments où nous ne sommes pas du même avis sur certaines questions pour des motifs idéologiques. Cela est acceptable. Toutefois, il y a aussi des moments où nous devons tous travailler ensemble pour mettre en œuvre des changements en faveur des plus vulnérables.

Honorables sénateurs, le Canada peut être fier de sa situation dans le cadre international. C'est un endroit où beaucoup de gens de par le monde aspirent à vivre un jour, un endroit que nous avons le privilège d'appeler notre pays. Ma famille et moi avons choisi d'y venir parce que nous savions qu'il nous offrirait ce qu'aucun autre pays ne pouvait nous offrir : un lieu où non seulement nous serions autorisés à garder nos traditions, notre culture et notre mode de vie, mais où nous trouverions aussi la dignité ainsi que des droits et libertés.

Le Canada offre encore ce rêve à beaucoup de gens. Si certains ont la chance de le réaliser, nombreux sont ceux qui sont exploités à cause de leur aspiration. Le projet de loi C-35 est la solution au problème, car il établit un cadre efficace de réglementation des consultants en immigration. Cette mesure législative aidera vraiment les plus vulnérables. J'exhorte tous les honorables sénateurs à l'appuyer.

Son Honneur le Président intérimaire : Je dois aviser les honorables sénateurs que si le sénateur Eaton prend la parole, le débat sur la question sera clos.

L'honorable Nicole Eaton : Honorables sénateurs, quel projet de loi merveilleux! Je vous remercie de votre appui. Je propose que le projet de loi soit lu pour la deuxième fois.

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Eaton, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.)

[Français]

Projet de loi concernant la sélection des sénateurs

Deuxième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Brown, appuyée par l'honorable sénateur Runciman, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-8, Loi concernant la sélection des sénateurs.

L'honorable Andrée Champagne : Honorables sénateurs, certains nous font, à nous tous et toutes, sénateurs, une bien mauvaise réputation.

On nous accuse d'être de vieux « politicailleux », à qui on a offert cette nomination prestigieuse en retour de bons services à l'égard de l'un ou l'autre des principaux partis. Surtout, on nous croit trop grassement payés à ne rien faire.

(1620)

Je n'ai pas réussi à me rappeler lequel de nos prédécesseurs avait été surpris à somnoler durant une séance. C'était sûrement attribuable à une accumulation de travail et/ou à un lunch un peu trop copieux. Ce sont des choses qui peuvent arriver à n'importe qui, n'importe où. La photo a fait le tour du pays et continue d'entacher ce que nous sommes, à enlever beaucoup de valeur à nos efforts et aux longues heures que nous passons à nous préparer pour pouvoir correctement assumer nos responsabilités au Sénat et au sein des différents comités auxquels nous sommes assignés.

Pour ma part, j'ai déjà offert à un journaliste de me suivre au cours d'une semaine bien ordinaire. J'ai essuyé un refus — rien de surprenant. Après nos heures de séance, qui d'autre voudrait s'astreindre à la quantité de recherche, de lecture et d'écriture qui remplissent nos journées, nos soirées, voire parfois nos nuits? Il faut aimer ce travail pour s'y adonner avec un tel enthousiasme et une telle constance. Et voilà que notre légitimité est mise en doute parce que nous ne sommes pas élus par la population des provinces que nous représentons.

Je dois vous avouer hésiter beaucoup à me rallier à ce que propose le projet de loi S-8. Toutes les questions que cela soulève....

Il y a quelques mois, un projet de loi voulant limiter le nombre d'années pendant lesquelles un sénateur pourrait siéger à la Chambre haute a été défait à cet autre endroit que nous n'osons même pas appeler par son nom. On a parlé d'un mandat de six, huit, voire 12 ans.

Je suis d'accord avec le sénateur Nolin pour dire que notre efficacité n'arrive pas automatiquement le jour de notre assermentation. Il nous faut prendre le temps ne serait-ce que d'apprendre la procédure bien spéciale de cet endroit. Il m'a fallu oublier beaucoup de ce que j'avais appris au cours de mes neuf années à titre de députée et de presque sept années assise dans le grand fauteuil vert à l'autre endroit.

Combien de fois, depuis mon arrivée au Sénat, suis-je allée m'informer auprès de nos greffiers quand la procédure allait à l'encontre de ce que j'avais dû mettre en pratique à l'autre bout du couloir? J'en profite pour les remercier de leur patience et pour la clarté de leurs explications. J'ai passé plusieurs dizaines d'heures à relire et à tenter d'assimiler le contenu de notre petit livre rouge, celui que nous trouvons dans chacun de nos bureaux.

On a donc proposé qu'un sénateur dûment élu ne puisse siéger que pendant six ans. C'est bien court pour acquérir les connaissances et la sagesse nécessaires pour prendre les meilleures décisions pour les Canadiens et les Canadiennes.

Une des questions que je me pose est la suivante : après six ans, le sénateur pourrait-il demander un autre mandat de six ans? Si je ne me trompe pas, le sénateur Brown a déjà été élu à plus d'une reprise dans son Alberta natale. Si la réponse est positive, une autre question se pose. Lors de la création du Sénat, déjà, le Québec ne faisait pas les choses comme les autres — ce qui n'a pas changé, je ne vous apprends rien. À l'époque, inquiets que les sénateurs choisis et nommés proviennent tous de Montréal et de Québec, en oubliant le bien des régions éloignées, on a institué au Québec des circonscriptions sénatoriales. Chacun et chacune d'entre nous qui vient de cette province représente une région du Québec. Celle de Grandville, que l'on m'a assignée, se trouve dans la région du Bas-Saint-Laurent et se rend du fleuve jusqu'à la frontière américaine, bien loin de la Montérégie, où j'habite depuis ma naissance et où je suis propriétaire depuis les années 1960.

En 2005, l'appel du bureau du premier ministre Paul Martin s'informant de mon intérêt à accepter une nomination me permettant de me joindre à vous, m'est venu à la mi-juillet, presqu'au moment de mon anniversaire — cadeau très apprécié, je vous l'avoue. Quelques jours plus tard, je recevais par courrier ou par télécopie une carte qui délimitait la région qu'on allait me demander de représenter et au sein de laquelle je devais m'assurer d'être propriétaire.

Au mois de juillet, au Québec, partout, sonne l'heure de ce qu'on appelle « les vacances de la construction ». Inutile de vous dire que les agents d'immeuble en profitent aussi pour partir. Comment trouver ne serait-ce qu'un petit bout de terrain à plus de 500 kilomètres de chez moi, sans mettre qui que ce soit aux aguets, sans que toute la province sache que j'allais être nommée au Sénat du Canada? On m'avait bien prévenue que garder ce secret était tout aussi important que de devenir propriétaire. J'ai même caché la nouvelle à mon vieux papa de plus de 90 ans jusqu'à quelques jours avant la cérémonie d'assermentation. La tâche ne fut pas facile, surtout compte tenu du fait que, tous les matins, un appel arrivait d'Ottawa pour savoir si la transaction avait été effectuée.

Revenons au projet de loi S-8. Le sénateur représentant une circonscription québécoise devra-t-il être élu par les résidants de la région assignée, donc, lors d'élections municipales, ou alors par les Québécois de tous les coins de la province lors d'une élection provinciale? Et si le sénateur souhaitait demander un second mandat, à qui pourrait-il le demander?

Si les sénateurs du Québec doivent être élus lors d'élections municipales, ils se verront tenus d'aller faire campagne dans ladite région. La mienne est située à cinq ou six heures de route de ma résidence. Devrais-je y aller chaque fin de semaine et m'astreindre à faire ce qui, est en ce moment, une des corvées des députés, soit me promener à travers la région, apprendre à connaître les maires et toutes les municipalités, me familiariser avec leurs doléances?

Au Sénat, nous avons le temps d'étudier plus à fond les projets de loi et de préparer des amendements quand ils s'imposent. Celle qui a été, pendant neuf ans, députée d'une circonscription rurale-urbaine connaît très bien, par expérience, l'énorme quantité de temps qu'il faut consacrer pour bien faire ces tournées — sans jamais arriver à satisfaire tout le monde. Lesquels d'entre nous seraient prêts à faire ce travail avant d'espérer devenir sénateur ou de demander un deuxième mandat six ans plus tard?

L'autre proposition veut que la liste que les premiers ministres provinciaux soumettraient au premier ministre du Canada fasse l'objet d'un vote à l'Assemblée nationale du Québec ou à toute autre législature provinciale. En ce moment, le premier ministre du Québec a dit préférer s'en laver les mains, que cette prérogative et ce devoir appartenaient au premier ministre du Canada. Mais si, et Dieu nous en garde, il y avait un changement de gouvernement à Québec, qui nous dit qu'un autre gouvernement verrait les choses de la même façon?

Certains prétendent que notre Sénat est déjà trop partisan. La grande majorité d'entre nous représentent un des deux partis bien établis. Toutefois, nous partageons une grande idéologie : nous croyons au Canada avec toutes ses provinces et tous ses territoires.

La proposition du sénateur Brown ouvre la porte à la venue de sénateurs indépendantistes qui, comme leurs collègues péquistes ou bloquistes, ne songeraient qu'à démembrer notre pays. Le sénateur Brown a souligné que, le cas échéant, le premier ministre du Canada n'aurait qu'à choisir quelqu'un d'autre dans la liste soumise par la province. À mon avis, voilà un autre endroit où le bât blesse. Si la décision finale n'est pas soumise aux stricts résultats du vote, pourquoi procéder à un vote, qui serait coûteux pour quiconque serait chargé de l'organiser et qui engendrerait chez nous encore des chicanes de famille?

Comme l'ont dit certains de nos collègues, des sénateurs élus de cette façon représenteraient-ils aussi bien les intérêts des différentes régions et ceux des Autochtones? Cette élection ferait-elle en sorte qu'autant de femmes soient incluses? Regardez le faible pourcentage de femmes élues à l'autre endroit, comptez le nombre de sénateurs ici et la réponse est claire.

Trouverions-nous chez ces sénateurs élus à la courte paille autant de compétences variées et d'expérience de vie dans des secteurs aussi hétéroclites que pointus?

Voilà certaines des questions que je continue de me poser quand on parle du projet de loi S-8. Peut-être trouvera-t-on des réponses à mes questions et trouvera-t-on moyen d'alléger mes craintes avant que nous procédions au vote. Reste aussi à savoir comment les élus de l'autre endroit réagiraient à un tel projet de loi.

Plusieurs députés ne se sont pas encore rendu compte de l'importance et du sérieux de nos travaux.

(1630)

Même si, parfois, ils se rallient à nos suggestions, aux amendements que nous proposons, ils n'apprécient vraiment pas que nous puissions toujours jeter un dernier et plus sage coup d'œil à leurs décisions. Ceux-là et celles-là voudraient plutôt nous voir disparaître, quoi qu'en dise notre Constitution, que plusieurs d'entre eux ne se sont même pas donné la peine de lire.

Quoi que certains prétendent, notre Sénat n'est pas dysfonctionnel. Loin de là! Quels sont donc les véritables symptômes de cette maladie dont certains nous croient atteints?

Finalement, le projet de loi S-8 vient proposer une cure à quoi? Un mal que personne ne peut décrire avec précision? Sommes-nous certains que le médicament qu'ils appellent « élection » ne ferait pas plus de tort que de bien?

Rien ni personne ne m'a encore convaincue qu'il faille, plus d'un siècle et demi plus tard, tout refaire alors que le système actuel fonctionne encore très bien. Après cette deuxième lecture, une étude en profondeur par un de nos comités trouvera-t-elle réponse à mes questions? Je garde l'esprit ouvert et continuerai d'écouter avec beaucoup d'attention ce que vous, honorables sénateurs, en direz.

L'honorable Joan Fraser : Le sénateur Champagne accepterait-elle de répondre à une question?

Le sénateur Champagne : Bien sûr.

Le sénateur Fraser : D'abord, je félicite l'honorable sénateur pour les questions qu'elle a soulevées et qui sont parmi les questions les plus importantes que nous devons nous poser à ce sujet.

J'aimerais demander au sénateur Champagne si elle pourrait prendre note de ce qui suit. Elle a parlé d'un sénateur qui a été photographié un jour en train de dormir sur nos bancs. Elle a dit qu'il avait peut-être trop travaillé ou peut-être trop bien déjeuné. Je connaissais ce sénateur. Il adorait le Sénat. Il avait le plus grand respect pour le Sénat.

À ce moment-là, son épouse était très malade; elle est décédée quelques mois plus tard et il passait ses nuits à s'occuper d'elle. Ensuite, il essayait de faire son travail ici. Voilà pourquoi il était fatigué. Ce n'était pas la question d'avoir trop bien déjeuné.

Le sénateur Champagne : Je vous remercie d'avoir participé à mon éducation. Une image m'était revenue, mais je ne me souvenais pas de qui il s'agissait. Je me souviens toutefois que beaucoup de gens en sont venus, par la suite, à dire ceci : « Au Sénat ils ne font rien et même ils y dorment. »

C'est pourquoi j'ai dit que je trouvais cela très injuste parce que, tous autant que nous sommes, nous travaillons durant un grand nombre d'heures pour faire le mieux possible le travail qui nous est demandé.

J'ai narré ce petit incident pour ceux qui ont toujours l'impression que nous sommes payés à ne rien faire et que nous ne travaillons pas. Je ne sais pas qui a pu prendre cette photo parce qu'il faut une permission avant qu'un photographe entre dans la salle du Sénat; mais, ce jour-là, quelqu'un a pris une photo et l'a donnée à des gens qui, de toute évidence, n'aimaient pas beaucoup ni les sénateurs ni le travail qui se fait au Sénat.

L'honorable Claude Carignan : Honorables sénateurs, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui sur le projet de loi S-8, visant à modifier le mécanisme de sélection des sénateurs.

À chaque nouvelle nomination au Sénat, le débat sur son abolition ou sa réforme ressurgit pendant quelques jours, puis s'estompe.

Avec la conjoncture d'un gouvernement minoritaire à la Chambre des communes et majoritaire au Sénat, la remise en question de la légitimité de l'institution risque de se répéter chaque fois qu'un vote sénatorial sera contraire à celui des députés dûment élus.

Honorables sénateurs, après plus d'un an au Sénat, je suis plus convaincu que jamais de la nécessité de le réformer, tant au plan du mode de nomination qu'au chapitre de la durée du mandat. Si, pour d'aucuns son abolition demeure une option valable, celle-ci aurait des répercussions néfastes pour toutes les régions du pays, et particulièrement pour le Québec.

Plusieurs États fédératifs du monde — environ 80 pays — font appel au bicamérisme dans l'exercice du pouvoir législatif, soit une Chambre basse — ici, la Chambre des communes — avec une représentation selon la population et une Chambre haute, le Sénat, avec une représentation régionale.

Dans le contexte qui prévaut au Canada, le Québec détient 24 postes de sénateurs sur un total de 105. Avec la Cour suprême, le Sénat est la seule institution fédérale où la représentation du Québec est garantie constitutionnellement, et ce, peu importe sa population.

D'ici 2036, la population du reste du Canada augmentera proportionnellement et de façon plus importante qu'au Québec. Ainsi, ce poids relatif du Québec à la Chambre des communes risque d'être réduit significativement par l'application du principe constitutionnel d'une représentation selon la population. Or, le nombre de sénateurs, lui, ne variera pas. En 1865, George Brown, alors chef des libéraux du Haut-Canada, déclarait ceci :

L'essence de notre convention est que l'union sera fédérale et nullement législative. Nos amis du Bas-Canada ne nous ont concédé la représentation d'après la population qu'à la condition expresse qu'ils auraient l'égalité dans le conseil législatif. Ce sont là les seuls termes possibles d'arrangement et pour ma part, je les ai acceptés de bonne volonté.

D'où l'importance, honorables sénateurs, pour le Québec d'avoir une vision à long terme, de légitimer la présence des sénateurs et d'orienter leur sélection en fonction des préoccupations provinciales.

[Traduction]

L'abolition du Sénat serait de toute évidence une erreur pour la province de Québec. Néanmoins, il est clair qu'une réforme de fond de cette institution s'impose. En fait, il est étonnant de constater que même aujourd'hui, le Canada fait partie du groupe limité d'États fédératifs où une seule personne est responsable de nommer les sénateurs, les autres pays étant Bahreïn, la Jordanie, Oman et le Yémen.

[Français]

Le premier ministre Stephen Harper entend, avec raison, démocratiser et moderniser l'institution du Sénat, et c'est dans cet esprit qu'il a déposé deux projets de loi, dont le projet de loi C-10, qui vise à limiter la durée du mandat des sénateurs à huit ans. Un second projet de loi, soit le projet de loi S-8, vise, quant à lui, à faire élire les candidats sénatoriaux dans le cadre d'élections provinciales, des candidats qui, dans la pratique, seraient affiliés aux partis provinciaux.

[Traduction]

Le premier ministre se fonde pour ce faire sur un ancien droit du Bas-Canada antérieur à l'adoption de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867. À l'époque, les membres du conseil législatif du Bas-Canada étaient élus en fonction d'un système établi en 1856.

[Français]

En 1865, en appui à la réforme du défunt conseil législatif, le député du temps, Jean-Baptiste Dorion, tenait des propos qui, 156 ans plus tard, ont encore tout leur sens. Il disait ceci, en s'opposant au projet de Confédération :

Je m'oppose au projet de confédération parce qu'il enlève au peuple de ce pays des droits politiques qu'il n'a acquis qu'après bien des années de lutte; entre autre, celui d'élire ses représentants au conseil législatif comme dans la Chambre d'assemblée. Depuis 1856 nous jouissons d'un conseil électif. Pendant plus d'un demi-siècle, on avait demandé qu'il le devînt. Ces demandes avaient été faites dans la presse, dans les assemblées publiques, au moyen de requêtes adressées au parlement et à la métropole, et par des propositions directement en Chambre. Le conseil législatif tel que constitué avant la réforme de 1856 était devenu des plus impopulaires, il était aussi tombé dans un état d'insignifiance complet. En y faisant entrer l'élément populaire au moyen d'élections périodiques, on le galvanisa et il devint un tout autre corps dans l'esprit public.

(1640)

Honorables sénateurs, cette dernière phrase m'interpelle énormément. Je vous la répète :

En y faisant entrer l'élément populaire au moyen d'élections périodiques, on le galvanisa et il devient un tout autre corps dans l'esprit public.

Quels étaient donc les arguments en faveur d'un Sénat non élu? Voici quelques exemples :

Selon Hector Langevin, ministre du Bas-Canada :

La nature du système empêche un grand nombre d'hommes qualifiés sur tous les rapports et dignes de siéger au conseil législatif de se présenter au suffrage des électeurs par suite du trouble, de la fatigue et des dépenses énormes résultant de contestations électorales dans d'immenses divisions.

Honorables sénateurs, pourrait-on sérieusement, encore aujourd'hui, soutenir cette thèse?

George-Étienne Cartier, quant à lui, était opposé au suffrage universel par conviction profonde. En 1850, il faisait l'éloge de la propriété, se déclarant heureux que la Constitution de 1840 prévoie une Chambre basse qui se compose d'hommes possédant des propriétés. Il déclarait ceci :

Nous avons ainsi la garantie qu'ils ne se comporteront pas comme des socialistes et des radicaux de Paris.

En 1865, traitant du suffrage universel aux États-Unis et de son impuissance fonctionnelle, il déclarait ceci :

De l'autre côté de la frontière, le pouvoir dominant, c'est la volonté de la foule, de la populace.

[Traduction]

Honorables sénateurs, nous savons tous que nous travaillons de façon rigoureuse et consciencieuse et que ce que nous faisons est essentiel à une meilleure démocratie. Qu'est-ce que les citoyens pensent de notre travail?

Personnellement, je crois que la réforme du Sénat vise à légitimer l'existence de cette institution aux yeux de nos concitoyens. Certes, l'efficacité des sénateurs et du Sénat ne fait pas de doute. Toutefois, l'efficacité et le rôle du Sénat sont en ce moment remis en question, car cette institution manque de légitimité. Le système et l'institution vieillissent mal.

[Français]

Prenons un exemple de dichotomie entre l'intention d'origine et son effet aujourd'hui, même s'il s'agit d'un aspect distinct. En 1867, les sénateurs devaient être nommés à vie, mais quelle était l'espérance de vie en 1867? Au Canada, les données sont difficiles à obtenir, mais prenons celles de la France. En 1867, l'espérance de vie d'un homme à la naissance était de 43 ans.

Voici un autre exemple : la valeur en biens immeubles de 4 000 dollars nécessaires pour nous qualifier à titre de sénateur serait aujourd'hui, selon les différents indices d'indexation qu'on utiliserait, de près d'un million de dollars. Qui parmi nous se qualifierait?

Revenant au mode électif, le député Dorion déclarait également ceci, concernant la légitimité d'un conseil législatif élu lors de débats entourant la Confédération :

Le système électif l'a rétabli complètement, lui a attiré le respect des populations et donné une importance qu'il n'avait pas auparavant.

Il n'a donc fallu qu'une période de 10 ans, de 1856 à 1865, pour accorder au Sénat électif une légitimité et un respect de la part du public.

Sur la pertinence du Sénat, après avoir étudié l'historique de l'adoption de notre Constitution, j'ai étudié une partie du monde moderne. Quels sont les pays qui adoptent leurs lois selon un système bicaméral? Presque toutes les sociétés démocratiques ont une Chambre de seconde réflexion. Qu'il nous suffise de préciser que tous les pays du G8, du Commonwealth et presque tous ceux du G20 ont une Chambre régionale de second examen objectif. J'ai également constaté que 80 p. 100 des autres sénats sont élus par différents modes et que les sénateurs de ces Chambres ont en moyenne des mandats renouvelables qui excédent rarement cinq ans.

Honorables sénateurs, dans ma recherche sur les sénats dans le monde, j'ai été estomaqué de constater que notre pays se trouvait dans une très courte liste des pays où les sénateurs sont nommés par une seule personne. Cette courte liste, la voici : le Bahreïn, une monarchie; la Bosnie-Herzégovine, une république; le Canada, une démocratie; la Jordanie, une monarchie; le Lesotho, une monarchie; Oman, une monarchie; le Yémen, une république. On peut inclure le Royaume-Uni dans cette liste si on ne considère pas les lords héréditaires.

Honorables sénateurs, sur environ 80 pays recensés qui ont une Chambre haute, seulement huit ont des sénateurs nommés par une seule personne. Tous les autres pays ont une forme directe ou indirecte de participation populaire à la sélection de ses sénateurs et seulement deux pays nomment leurs sénateurs pour une période aussi longue, soit 75 ans et à vie : le Canada et le Royaume-Uni.

D'ailleurs, à cet égard, j'inviterais mes collègues sénateurs libéraux à s'inspirer d'un de leurs prédécesseurs aussi libéral, qui, au moment d'un débat sur l'existence et la nature du Sénat, formula, le 13 avril 1874, la proposition suivante à la Chambre des communes, alors que le Parti libéral venait de prendre le pouvoir. Avec l'appui du député libéral Edward Blake, le député libéral David Mills proposa que :

Le présent mode de constituer le Sénat est incompatible avec le principe fédéral de notre gouvernement, rend le Sénat indépendant et du peuple et de la Couronne et est, sous d'autres rapports importants, défectueux; et que notre constitution devrait être changée de manière à conférer à chaque province le pouvoir de nommer ses propres sénateurs et de définir le mode de les nommer.

Même si cette proposition n'a pas reçu l'aval du Parlement et du gouvernement, il est intéressant de constater que, dès cette époque, la question de la légitimité du Sénat était soulevée.

En ce sens, honorables sénateurs, et de façon plus contemporaine, il est intéressant de lire les commentaires du renommé constitutionnaliste Benoît Pelletier, qui a écrit ceci :

Le Sénat souffre d'un double déficit, un déficit de légitimité parce que les sénateurs ne sont pas élus, mais nommés à toutes fins utiles par le premier ministre fédéral en place, sans consultation de ses homologues provinciaux, et un déficit de représentation parce que les sénateurs ne représentent pas leur province d'origine, mais plutôt le parti politique auquel ils sont affiliés par suite de leur nomination.

Que nous propose le professeur Pelletier pour remédier à cette situation? Voici sa réponse :

Si la Chambre haute dans une fédération est censée représenter les intérêts de ses entités fédérées, on doit alors se retourner vers ces entités pour en assurer cette représentation. Deux formules sont possibles, soit l'élection des sénateurs par les entités fédérées, soit l'élection des sénateurs au moment des élections régionales sur la base des partis régionaux s'il en existe. Cette deuxième option répond davantage au déficit de légitimité que la première, mais les deux visent à mieux représenter les intérêts régionaux au niveau central et à traduire la diversité politique qui existe dans toute la fédération. En adoptant cette dernière solution, le Canada ferait figure de pionnier et exprimerait son réel désir de représenter les intérêts régionaux au niveau central.

[Traduction]

Honorables sénateurs, beaucoup de gens ont demandé la réforme du Sénat, et ce, depuis la création de cette institution. Par contre, ce qui est différent aujourd'hui, c'est que bientôt, une majorité de sénateurs demanderont eux aussi une réforme du Sénat, comme en fait foi le projet de loi S-8. Le texte tient non seulement compte de plusieurs arguments à l'appui de la réforme du Sénat en vue de lui conférer une plus grande légitimité...

Son Honneur le Président intérimaire : Je dois informer le sénateur que son temps de parole est écoulé. Le sénateur voudrait-il plus de temps?

Le sénateur Carignan : Oui, s'il vous plaît.

Des voix : Cinq minutes de plus.

Le sénateur Carignan : Honorables sénateurs, le projet de loi S-8 respecte également l'autonomie des provinces et des territoires en ce qui concerne le processus de sélection des sénateurs, tout en tenant compte de leur opinion et des caractéristiques de chaque région.

[Français]

L'article 1 du projet de loi S-8 établit le principe de la nomination des sénateurs à partir d'une liste fournie par les provinces ou les territoires.

(1650)

L'article 2 établit les différentes options pouvant être retenues par les provinces ou territoires pour procéder à l'élection des sénateurs.

À mon avis, ce projet de loi est moderne et dynamique, empreint de sagesse et d'une réelle volonté de respecter nos différentes régions et nos minorités.

Le manque de légitimité du Sénat, tant dans son mode de nomination que pour la durée du mandat, nuit à notre efficacité. Les populations modernes ne tolèrent plus d'être gouvernées par une institution illégitime, quelle qu'elle soit. Un Sénat illégitime est un Sénat inefficace, même si l'on tente de se convaincre du contraire.

Le débat entourant le projet de loi S-8 m'amène à me poser cette question : ai-je donc mis les pieds dans une institution figée dans le temps et impossible à moderniser, ou ai-je plutôt mis les pieds dans une institution composée d'individus ouverts sur le monde, pragmatiques, respectueux de la démocratie et qui saura se moderniser afin de maintenir son rôle réel de protection des régions et des minorités?

Sans cette légitimité, le Sénat risque, à moyen ou à long terme, d'être aboli. Son abolition, pour les minorités, pour les régions, pour le Québec et pour le Canada, serait une erreur flagrante et le résultat de notre refus de voir l'évidence. Une démocratie doit être gouvernée par le peuple et pour le peuple. Le peuple ne se trompe jamais, et si exceptionnellement il se trompait, il serait le seul à en subir les conséquences.

Honorables sénateurs, je vous invite fortement à appuyer le projet de loi S-8.

[Traduction]

L'honorable Art Eggleton : L'honorable sénateur accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Carignan : Oui.

Le sénateur Eggleton : En posant cette question, je voudrais d'abord noter les observations du sénateur Champagne, qui a soulevé des questions très légitimes, notamment au sujet de la diversité du Sénat, des différents milieux représentés par les gens qui siègent ici, dont beaucoup ne seraient probablement pas présents si nous avions un Sénat élu. Ce ne serait pas la nature de ce qu'ils font, mais leur contribution est utile dans le cadre du second examen objectif et de l'élaboration de la politique publique. Je crois que le sénateur Champagne a posé des questions justifiées.

Je suis cependant surpris que le sénateur ait dit que le Sénat est une institution illégitime. Je suis surpris qu'il ait accepté d'y être nommé. Il a néanmoins noté — et j'en conviens avec lui — que cette nomination ne devrait pas être l'apanage d'une seule personne. Le premier ministre de l'heure, quel qu'il soit, est celui qui nomme les sénateurs. Je suis d'accord avec le sénateur sur ce point.

N'y a-t-il pas une troisième voie, qui n'impose pas un Sénat entièrement élu qui serait un peu comme l'institution équivalente des États-Unis, formant un corps beaucoup plus politique que l'entité très diverse que nous avons ici? Ne pourrait-on pas envisager de faire recommander les candidats par les provinces ou par un groupe de pairs ou d'éminentes personnalités, ou encore une combinaison de tout cela? C'est un peu le cas des nominations à la Cour suprême du Canada, qui ont eu beaucoup de succès dans l'histoire de notre pays. On pourrait même, si on veut, prendre le modèle de l'Ordre du Canada.

N'y a-t-il pas une troisième voie à envisager pour que le Sénat continue d'une façon très représentative, mais sans être nommé par une seule personne?

[Français]

Le sénateur Carignan : En ce qui concerne ma nomination, je considère que c'est un privilège extraordinaire d'être nommé sénateur par le premier ministre, mais je suis convaincu qu'il serait tout aussi important d'être élu par 250 000 personnes.

En ce qui a trait au mode de nomination, j'ai fait des tableaux des différents modes de nomination des 80 sénats à travers le monde. Il existe évidemment différents modes de nomination, mais je pense que celui qui est le plus noble, le plus respectueux d'une démocratie moderne, est l'élection par les habitants des régions que l'on représente. L'étude au comité pourra peut-être élaborer sur d'autres façons de constituer une liste de sénateurs, que ce soit par nomination ou par suggestion de candidats.

Plusieurs des pays que j'ai nommés plus tôt subissent les bouleversements démocratiques actuellement en vigueur dans le monde. Je crois donc que l'élection devrait être le mode de sélection des sénateurs.

(Sur la motion du sénateur Cowan, le débat est ajourné.)

[Traduction]

La Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat

L'honorable Larry W. Smith propose que le projet de loi C-59, Loi modifiant la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (procédure d'examen expéditif) et apportant des modifications corrélatives à d'autres lois, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je suis heureux d'appuyer la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui et de prendre part à ce débat.

[Français]

Permettez-moi de prendre un instant pour remercier les membres de l'autre endroit qui ont appuyé le projet de loi C-59. Ils sont déterminés à veiller à la sécurité des citoyens canadiens, et c'est pourquoi ils font tout ce qui est en leur pouvoir pour faire adopter rapidement cette mesure.

[Traduction]

Le projet de loi C-59 est axé sur la responsabilité. Lorsqu'une infraction est commise, les délinquants doivent être tenus responsables de leurs crimes. Justice est faite quand la peine est purgée. Le projet de loi C-59 met fin à la procédure d'examen expéditif et abroge les articles de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition qui régissent les dispositions correspondantes.

[Français]

En conséquence, tous les contrevenants, peu importe la nature du crime commis, seront traités sur un pied d'égalité en matière d'admissibilité à la libération conditionnelle.

[Traduction]

Honorables sénateurs, le projet de loi C-59 apporte un changement clair et nécessaire. Il met fin à un système qui permet à ceux qui se rendent coupables de crimes en col blanc, c'est-à-dire non violents, d'être admissibles à la libération conditionnelle plus tôt que les délinquants condamnés pour des crimes violents.

[Français]

Ainsi, en matière d'octroi de la libération conditionnelle, il n'y aura plus de distinction entre le coupable du crime non violent ou en col blanc et le coupable d'une infraction violente. Tous les contrevenants seront évalués en fonction des mêmes critères, peu importe le crime commis.

[Traduction]

Sous le régime actuel, les délinquants condamnés pour la première fois pour fraude ou d'autres infractions non violentes sont admissibles à la semi-liberté après avoir purgé un sixième de leur peine, et à la libération conditionnelle complète après avoir purgé un tiers de leur peine.

[Français]

La loi en vigueur est sans équivoque. La Commission des libérations conditionnelles du Canada doit accorder à un contrevenant non violent sa liberté sous surveillance dans la collectivité, à moins qu'elle n'ait un motif raisonnable de croire qu'il commettra un crime violent une fois libéré.

Honorables sénateurs, cela vous semble-t-il juste et équitable?

[Traduction]

Si on posait cette question aux Canadiens victimes de fraude qui ont perdu les économies de toute une vie, je suis absolument certain qu'ils répondraient sans la moindre hésitation : « Non, nous ne croyons pas que le régime actuel est équitable. »

[Français]

Nous ne croyons pas que le régime actuel soit adéquat.

Il est vrai que la criminalité en col blanc a longtemps été un crime sans visage, dont les victimes étaient de grandes entreprises, des compagnies et des gouvernements.

(1700)

Cependant, honorables sénateurs, au cours des dernières années, ce sont des citoyens canadiens respectueux des lois qui ont tout perdu : leur avenir, leurs relations, leur dignité.

[Traduction]

Les fraudes sont des crimes non violents, mais le tort que font les délinquants à cravate est tout de même dévastateur pour leurs victimes.

[Français]

Non seulement les victimes de crimes en col blanc souffrent-elles sur le plan financier, elles subissent également l'humiliation d'avoir été roulées et d'avoir confié toutes leurs économies à une personne en qui elles croyaient pouvoir avoir confiance.

[Traduction]

Lorsqu'on permet à un délinquant à cravate, qui a peut-être ruiné l'avenir de nombreux citoyens respectueux des lois, de sortir de prison bien avant la fin de sa peine, peut-on dire que justice a été faite? Je suis certain que bon nombre de victimes de crimes financiers ressentent de la frustration à l'égard d'un système qui, selon eux, protège les délinquants. Les Canadiens sont outrés et ils exigent que les droits des honnêtes citoyens pèsent autant que ceux des délinquants.

Honorables sénateurs, le gouvernement est à l'écoute des Canadiens, et il prendra les mesures nécessaires pour s'attaquer à la criminalité et défendre les intérêts des victimes en écoutant ce qu'ils ont à dire et en tenant compte de leurs préoccupations.

[Français]

Le projet de loi C-59 nous permet d'aller de l'avant avec la réalisation du programme gouvernemental de répression du crime.

Honorables sénateurs, la feuille de route du gouvernement depuis cinq ans en matière d'amélioration de la sécurité des citoyens et des collectivités est impressionnante.

[Traduction]

Nous avons investi dans la prévention de la criminalité et dans les mesures d'application de la loi; et nous avons fourni les outils nécessaires au travail des policiers. Nous avons également fait preuve de notre engagement à l'égard des droits des victimes. Pas plus tard que cette semaine, le Parlement a adopté le projet de loi S-6, Loi renforçant la sévérité des peines d'emprisonnement pour les crimes les plus graves. Cette mesure législative abroge la disposition de la dernière chance qui permet aux personnes accusées de meurtre d'obtenir une libération conditionnelle anticipée.

[Français]

Grâce à l'abolition de la clause de la dernière chance, le contrevenant coupable de meurtre au premier degré n'est pas admissible à une libération conditionnelle avant d'avoir purgé la totalité des 25 ans de sa peine.

[Traduction]

De la même façon, les contrevenants purgeant une peine d'emprisonnement à perpétuité pour meurtre au deuxième degré ne sont plus admissibles à la libération conditionnelle avant la fin de la période d'inadmissibilité complète, qui peut durer jusqu'à 25 ans.

Honorables sénateurs, le projet de loi que le gouvernement conservateur a présenté en mai dernier afin de modifier les dispositions du Code criminel relatives aux fraudes en infligeant des peines plus sévères à ceux qui s'en prennent à d'honnêtes citoyens est conforme au projet de loi C-59.

[Français]

En vertu du projet de loi C-21, la Loi sur la défense des victimes du crime en col blanc établit une peine minimale obligatoire de deux ans d'emprisonnement lorsque la fraude commise a une valeur supérieure à un million de dollars. Elle durcit les peines, notamment en ajoutant des circonstances aggravantes, comme les répercussions financières et psychologiques de la fraude sur la victime, dont les tribunaux peuvent tenir compte en fonction de la situation particulière de la victime, y compris son âge, sa santé et ses finances personnelles.

[Traduction]

Le gouvernement défend en outre les victimes d'actes criminels. En 2006, il a lancé la Stratégie fédérale d'aide aux victimes en vue d'améliorer l'expérience des victimes d'actes criminels dans le système de justice pénale. Depuis, il a affecté plus de 50 millions de dollars à cette stratégie.

[Français]

En 2007, notre gouvernement a mis sur pied le Bureau de l'ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels afin de s'assurer que le gouvernement fédéral s'acquitte de ses responsabilités à l'égard des victimes d'actes criminels.

Par ailleurs, notre gouvernement a sévi contre le crime organisé, y compris le crime lié à la drogue, en durcissant les peines.

Par l'intermédiaire de la Loi sur l'adéquation de la peine et du crime, nous avons éliminé le crédit du deux-pour-un, qui permettait de tenir compte du temps passé en détention dans la détermination de la peine.

[Traduction]

Nous avons prouvé notre volonté de protéger les Canadiens contre ceux qui commettent des crimes graves et violents en faisant adopter la Loi sur la lutte contre les crimes violents. Il ne s'agit là que de quelques exemples illustrant la volonté du gouvernement d'assurer la sécurité des Canadiens et de veiller à ce que les victimes puissent se faire entendre et que leurs préoccupations soient prises en compte.

Honorables sénateurs, si nous n'agissons pas maintenant en adoptant le projet de loi C-59, la protection des Canadiens et des droits des victimes accusera un important recul.

Honorables sénateurs, cela fait plusieurs années qu'il est question d'abolir la procédure d'examen expéditif.

[Français]

En décembre 2007, le Comité d'examen indépendant du Service correctionnel du Canada a publié son rapport final, contenant des recommandations à l'intention du gouvernement du Canada. Le comité avait pour mandat d'examiner les priorités opérationnelles, les stratégies et les plans d'activités de SCC.

[Traduction]

Les amendements qu'on propose d'apporter au projet de loi C-59 répondent aux recommandations du comité d'examen indépendant d'instaurer un système de libération conditionnelle mérité. Ces amendements répondent aussi aux préoccupations des groupes représentant les victimes.

Comme je l'ai indiqué plus tôt, en vertu du système actuel, les délinquants reconnus coupables de fraude qui en sont à leur première infraction peuvent demander la semi-liberté après avoir purgé le sixième de leur peine, et la libération conditionnelle totale au tiers de celle-ci. Toutefois, en abolissant la procédure d'examen expéditif, les personnes reconnues coupables de ces crimes pourront demander la semi-liberté au plus tôt six mois avant la date d'admissibilité à la libération conditionnelle totale.

[Français]

La procédure d'examen expéditif se fait sur papier, au moyen de formulaires, alors que l'examen en vue d'une libération conditionnelle ordinaire se déroule en entrevue avec le contrevenant.

À moins que la Commission des libérations conditionnelles du Canada n'ait des motifs raisonnables de croire que le contrevenant commettra une infraction violente s'il est remis en liberté, elle doit lui permettre de retourner dans la collectivité.

[Traduction]

Une personne condamnée pour un crime en col blanc grave, par exemple, peut demander ce genre de libération anticipée.

Honorables sénateurs, à l'heure actuelle, un délinquant condamné à 12 ans de prison peut bénéficier d'une semi-liberté après deux ans et d'une libération conditionnelle totale après quatre ans.

La situation est d'autant plus difficile que la Commission des libérations conditionnelles du Canada doit accorder la libération conditionnelle à un délinquant qui est admissible à la procédure d'examen expéditif, à moins d'estimer qu'il est susceptible de commettre un crime violent.

[Français]

Je suis convaincu que cela ne semble pas juste aux Canadiens et aux Canadiennes respectueux des lois, et je suis convaincu que cela ne semble pas juste aux honorables sénateurs qui sont devant moi.

[Traduction]

Honorables sénateurs, il est grand temps d'envoyer un message aux criminels en col blanc. Ces délinquants ne pourront plus profiter des avantages offerts en vertu de la loi actuelle.

[Français]

Nous avons clairement exprimé que le gouvernement ne fera pas passer les droits d'un délinquant avant les droits des citoyens respectueux des lois.

[Traduction]

Honorables sénateurs, je vous exhorte à appuyer les amendements proposés au projet de loi C-59 et de donner la priorité aux victimes. Nous avons l'occasion de collaborer dans le meilleur intérêt des Canadiens respectueux des lois.

(Sur la motion du sénateur Tardif, le débat est ajourné.)

[Français]

Le Régime de pensions du Canada

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Recours au règlement—Report de la décision de la présidence

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Callbeck, appuyée par l'honorable sénateur Poy, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-223, Loi modifiant le Régime de pensions du Canada (versement rétroactif d'une pension de retraite ou de survivant).

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'aimerais invoquer le Règlement relativement à l'inadmissibilité du projet de loi S-223, Loi modifiant le Régime de pensions du Canada (versement rétroactif d'une pension de retraite ou de survivant), présenté par le sénateur Callbeck.

Indépendamment du bien-fondé de ce projet de loi, je crois que ce dernier renferme des dispositions qui auraient pour effet de créer une nouvelle dépense distincte, non autorisée à l'heure actuelle dans la législation. En conséquence, le projet de loi nécessite une recommandation royale. En vertu de l'article 81 du Règlement, il doit être retiré du Feuilleton.

(1710)

On lit à la page 189 de la sixième édition de la Jurisprudence parlementaire de Beauchesne qu'un amendement à un programme préexistant, et je cite :

[...] empiète sur le droit d'initiative de la Couronne dans le domaine financier, non seulement s'il alourdit la dépense, mais aussi s'il en étend l'objet et le but visé, ou s'il assouplit les conditions et réserves [...]

Honorables sénateurs, le projet de loi S-223 modifiera le Régime de pensions du Canada de manière à permettre à une personne de plus de 70 ans qui présente une demande de pension de retraite de recevoir des prestations pour une période rétroactive maximale de 60 mois avant son 70e anniversaire et de verser des prestations de pension de survivant pour une période rétroactive de 60 mois.

À l'heure actuelle, le Régime de pensions du Canada prévoit une période de versements rétroactive de 12 mois pour la pension de retraite et la pension de survivant.

Le projet de loi S-223 prolongerait de 48 mois la période de rétroactivité applicable à ces deux pensions. On peut ainsi dire que le projet de loi assouplirait les conditions du régime.

Le ministre des Ressources humaines et Développement des compétences juge que la prolongation de la période de rétroactivité pourrait coûter jusqu'à 251 millions de dollars en 2011 — des coûts ponctuels — en plus des coûts permanents, qui sont de dizaines de millions de dollars. C'est ainsi que le projet de loi augmenterait les dépenses du gouvernement d'une façon non autorisée actuellement en vertu du Régime de pensions du Canada.

Le 24 février 2009, le Président du Sénat a rendu une décision sur le projet de loi S-207, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-emploi (affectation à l'étranger). Il conclut, et je cite :

La proposition d'étendre l'accès aux prestations qui est envisagée dans le projet de loi S-207 élargit le régime des prestations prévues dans la Loi sur l'assurance-emploi et, par conséquent, une recommandation royale est nécessaire.

Le 8 mai 2008, le Président de l'autre endroit s'est prononcé sur la question des versements rétroactifs de prestations. Dans le cas du projet de loi C-490, Loi modifiant la Loi sur la sécurité de la vieillesse, et je cite :

Les articles [...] du projet de loi visent à modifier les modalités du versement des prestations de la Sécurité de la vieillesse [...] en modifiant les versements rétroactifs [...].

[...] le projet de loi C-490 modifie l'objet initial des prestations et qu'il doit donc être accompagné d'une recommandation royale.

Le 13 février 1992, le Président du Sénat a rendu une décision au sujet du projet de loi C-280, Loi modifiant la Loi sur les régimes de pension du Canada, pensions d'invalidité. Je cite :

Il modifie les critères d'admissibilité actuels qui obligent une personne invalide qui cotise au RPC de satisfaire aux exigences minimales en matière de cotisations.

[...] je suis dans l'obligation de déclarer que, pour des raisons de procédure, il n'est pas recevable dans cette Chambre.

Certains sénateurs diront peut-être que le Régime de pensions du Canada est administré à partir de comptes distincts et que, par conséquent, le projet de loi ne nécessite pas de recommandation royale.

Cependant, l'article 108 du Régime de pensions du Canada stipule expressément que toutes les transactions en vertu du régime sont soit passées au Trésor et portées au crédit du compte du Régime de pension du Canada, soit payées sur le Trésor et portées au débit du compte du Régime de pensions du Canada.

En conséquence, tous les fonds pertinents au régime sont inscrits au Trésor. Le Président a également reconnu ce point dans sa décision du 13 février 1992. Conformément à la décision du 13 février 1992 et des autres éléments de jurisprudence que j'ai cités, le projet de loi S-223 entraînerait de nouvelles dépenses du gouvernement qui ne sont pas déjà autorisées par le Régime de pensions du Canada. Il doit donc être accompagné d'une recommandation royale.

Le projet de loi doit, ainsi, être jugé irrecevable.

[Traduction]

L'honorable Claudette Tardif (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, je crois que nous ne sommes saisis d'aucun rappel au Règlement valide. Madame le sénateur Callbeck a fait ses recherches, elle a cherché à obtenir des avis juridiques et elle a porté à notre attention des arguments très convaincants contre la nécessité d'une recommandation royale en ce qui concerne le projet de loi S-223.

[Français]

Honorables sénateurs, à l'article 81 du Règlement, nous pouvons lire que :

Le Sénat ne doit pas procéder à l'étude d'un projet de loi comportant l'affectation de fonds publics sauf si, à la connaissance du Sénat, le représentant de la Reine a recommandé cette affectation.

Les retraités canadiens, au fil des ans, ont contribué activement au Régime de pensions du Canada. Les sommes qui s'y trouvent appartiennent aux retraités de ce pays. Ces fonds ne sont pas nouveaux puisqu'ils ont déjà fait partie des fonds attribués au RPC.

Le projet de loi S-223 n'engendre donc aucune nouvelle affectation de fonds publics.

De plus, les précédents du Sénat appuient l'argumentaire du sénateur Callbeck.

[Traduction]

En 1997, le Président Molgat a déclaré ce qui suit dans sa décision sur l'admissibilité du projet de loi S-12 :

[...] on ne sait trop si les opérations envisagées seraient financées par une nouvelle affectation nécessitant une recommandation royale ou par des affectations déjà prévues par d'autres lois. Il n'y a pas non plus dans le projet de loi de dispositions portant de loin ou de près affectation de crédits. Or, ce sont là les conditions à respecter lorsqu'on détermine si un projet de loi doit être accompagné d'une recommandation royale.

En outre, le Président Molgat déclarait ce qui suit, dans une décision rendue en 1998 :

[...] il faut présumer, jusqu'à preuve du contraire, que les choses sont conformes ou régulières. Cette supposition m'indique que la meilleure règle à suivre pour le Président est d'interpréter le Règlement de manière à permettre le débat au Sénat, sauf s'il est manifeste que la question à débattre est inadmissible.

Honorables sénateurs, je crois que les retraités canadiens ont droit à leur argent.

Le projet de loi du sénateur Callbeck permettrait aux personnes qui présentent une demande de pension de retraite en vertu du Régime de pensions du Canada après l'âge de 70 ans ou une demande de pension de survivant d'être admissibles à recevoir des prestations pour une période rétroactive maximale de cinq ans au lieu de la période maximale actuelle de 12 mois.

J'aimerais de nouveau répéter que ce projet de loi n'engendre pas une nouvelle affectation de fonds publics parce que les personnes touchées par ces changements sont déjà admissibles à ces prestations.

Je demande à Son Honneur de tenir compte de ces arguments et de conclure qu'il n'y a pas matière à invoquer le Règlement et que nous devrions poursuivre le débat sur le projet de loi S-223 afin de pouvoir étudier davantage ce projet de loi et ses répercussions pour les Canadiens.

Des voix : Bravo!

L'honorable Catherine S. Callbeck : Honorables sénateurs, je suis heureuse de participer au débat, et je conviens que ce projet de loi n'a pas besoin de recommandation royale. J'ai obtenu un avis juridique sur cette question et j'ai déposé la lettre d'Heenan Blaikie, qui est très claire à cet égard. Le cabinet fait observer ce qui suit :

L'avant-projet de loi n'est pas un projet de loi de finances aux fins des articles 53 et 54 de la Loi constitutionnelle de 1867; il peut donc être présenté et examiné au Sénat sans recommandation royale.

De plus, sous un article intitulé « projet de loi de finances », il est indiqué :

Comme on l'explique dans le sommaire de l'avant-projet de loi, l'objectif des modifications proposées consiste à prolonger la période de versement des prestations de retraite et des pensions de survivant. Les fonds qui sont visés par les modifications proposées ne font pas partie du Trésor et les modifications proposées ne tentent pas, directement ou indirectement, d'imposer des taxes ou d'affecter des fonds. À notre avis, l'ébauche du projet de loi n'exige pas de recommandation royale et les articles 53 et 54 de la Loi constitutionnelle de 1867 ne portent pas atteinte à la capacité d'un sénateur de présenter le projet de loi au Sénat ou la capacité du Sénat d'en être saisi.

(1720)

L'avis juridique que j'ai reçu indique clairement que le projet de loi n'exige pas une recommandation royale.

Son Honneur le Président intérimaire : Y a-t-il d'autres sénateurs qui souhaiteraient intervenir dans le débat sur ce recours au Règlement?

Le sénateur Comeau : Je crois que les deux intervenants ont été très prudents. Ils ont traité la question en périphérie, mais se sont bien gardés d'aborder la substance du projet de loi. Je crois avoir indiqué au début de mes observations qu'elles ne portaient pas sur la substance ou sur la pertinence du projet de loi, car c'est une tout autre question.

Mon propos a porté sur la procédure ou les règles que nous devons suivre dans cette enceinte. Lorsque la mise en œuvre d'un projet de loi qui nous est soumis nécessite une dépense initiale de 250 millions de dollars, puis des dizaines de millions de dollars chaque année, il est évident que ce projet de loi nécessite une recommandation royale.

Si tout sénateur agissant à titre individuel avait le droit de présenter au Sénat des projets de loi entraînant des dépenses aussi considérables, le contribuable canadien aurait toutes les raisons d'être très nerveux. Voilà pourquoi nous devons respecter des règles qui exigent que les gouvernements obtiennent une recommandation royale dans le cas des projets de loi entraînant des dépenses aussi massives. Quelles que soient les qualités du projet de loi, ce sont les règles que nous devons suivre.

J'aurais probablement dû prêter une oreille plus attentive, mais je ne suis pas certain d'avoir bien entendu d'où provient l'avis juridique.

Le sénateur Day : Heenan Blaikie.

Le sénateur Comeau : Pour les questions de procédure et de respect des règles comme celle-ci, au Sénat, nous nous adressons généralement à un autre groupe qu'un cabinet d'avocats privé pour obtenir des avis juridiques. En général, nous nous référons à des règles qui sont bien connues des sénateurs ou des parlementaires eux-mêmes. Il n'est pas interdit d'obtenir un avis juridique à l'extérieur du Sénat, évidemment, sur des sujets de cette nature, mais nous devrions nous en tenir aux autorités et à la jurisprudence auxquelles nous nous en remettons généralement.

Je pense que mon recours au Règlement est valable. Encore une fois, nonobstant la valeur de ce qui est proposé dans le projet de loi, nous devrions nous en tenir à nos règles et à nos procédures.

Le sénateur Callbeck : Je veux juste ajouter, encore une fois, que l'argent nécessaire à cette mesure ne viendrait pas du Trésor. Le Comité des finances a tenu une réunion exclusivement sur cette question, il y a deux ans de cela, je crois. L'actuaire en chef y était. Je veux lire ce qu'a dit l'actuaire. Il a expliqué que cette proposition tient déjà compte des personnes admissibles et qui sont considérées comme vivant au Canada. Il a dit que, dans les rapports actuariels triennaux, on présume que ces gens ont présenté leur demande. Comme le rapport actuariel était fondé sur la présomption que ces gens formuleraient leur demande, les coûts sont déjà prévus. C'est ce qu'il a dit le 4 décembre 2007.

Comme je le disais, aucune somme ne proviendrait du Trésor. Le RPC est un fonds à part, et l'argent nécessaire s'y trouve déjà, selon l'actuaire en chef.

Son Honneur le Président intérimaire : Comme aucun autre sénateur ne souhaite participer au débat, la présidence prend la question en délibéré. Le Président rendra une décision ultérieurement.

La Loi sur la Société canadienne des postes

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Peterson, appuyée par l'honorable sénateur Lovelace Nicholas, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-219, Loi modifiant la Loi sur la Société canadienne des postes (service postal en milieu rural et ombudsman de Postes Canada).

L'honorable Michael L. MacDonald : Honorables sénateurs, je suis heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi S-219, Loi modifiant la Loi sur la Société canadienne des postes (service postal en milieu rural et ombudsman de Postes Canada), présenté au Sénat le 1er juin 2010.

Le projet de loi propose de modifier la Loi sur la Société canadienne des postes de manière qu'elle prévoie la reprise de la livraison du courrier à toutes les boîtes aux lettres rurales qu'elle desservait le 1er septembre 2005, sauf quand la société est d'avis que cela poserait un risque indu et que ce risque ne pourrait être écarté par le déplacement de la boîte aux lettres ou par la prise d'autres mesures raisonnables aux frais de la société; oblige Postes Canada à donner un préavis de six mois, par écrit, aux clients touchés par toute modification apportée au service de livraison du courrier ou à tout autre service postal en milieu rural; établisse un poste d'ombudsman, nommé par le gouverneur en conseil, habilité à demander que des changements soient apportés aux politiques et pratiques de la société; oblige le ministre à procéder à l'examen de l'application des modifications tous les cinq ans.

Je dois avouer qu'au début, le projet de loi m'a laissé plutôt perplexe. Quand je l'ai lu pour la première fois, j'ai été frappé par la mesure dans laquelle les modifications proposées à la Loi sur la Société canadienne des postes ressemblent aux mesures déjà entreprises par le gouvernement ou par Postes Canada.

Par exemple, il y a bientôt quatre ans, le gouvernement a demandé à Postes Canada de maintenir le service de livraison aux boîtes aux lettres rurales qui étaient desservies le 1er septembre 2005, tout en respectant les lois en vigueur.

Postes Canada a fait preuve de diligence dans ses réponses à la directive du gouvernement relativement au service dans les régions rurales ainsi que dans les efforts déployés pour s'acquitter de ses obligations légales envers la sécurité des employés et pour donner suite aux préoccupations du public concernant le service de livraison aux boîtes aux lettres rurales. Depuis l'émission de la directive, Postes Canada s'est affairée à évaluer la sûreté de toutes les boîtes aux lettres dans les régions rurales, qui sont au nombre d'environ 843 000. C'est là un chiffre important, mais il convient de signaler qu'il représente seulement 6 p. 100 de toutes les adresses desservies par Postes Canada dans l'ensemble du pays.

À mesure que la population canadienne augmente et que les villes s'étendent, certains chemins secondaires ruraux se transforment en routes bien achalandées. Les facteurs ruraux ont donc de plus en plus de mal à quitter et à réintégrer les voies de circulation de façon sécuritaire pour livrer le courrier. Il est arrivé qu'une personne sorte d'un long virage et n'ait pas suffisamment de temps ou de place pour éviter une collision avec un véhicule de la poste. Malheureusement, de nombreux accidents mettant en cause des facteurs ruraux ont eu lieu ces dernières années. Encore plus regrettable, trois facteurs ont perdu la vie dans l'exercice de leurs fonctions.

En date d'aujourd'hui, Postes Canada a évalué plus de la moitié des boîtes aux lettres rurales à l'aide d'un outil d'évaluation de la sécurité routière élaboré de concert avec des experts externes. Dans 89 p. 100 cas, le courrier est toujours déposé dans les boîtes aux lettres situées à la fin de l'allée.

Dans les cas exceptionnels où il a été déterminé qu'il serait dangereux de livrer le courrier, les Canadiens se sont efforcés, avec Postes Canada, de veiller à la sûreté de leur facteur en acceptant d'installer leur boîte aux lettres dans un lieu plus sûr, habituellement quelques pieds plus loin, ou encore de l'autre côté de la rue.

D'autres options sont envisagées — comme la livraison du courrier dans une boîte aux lettres communautaire ou un casier postal — seulement quand on ne peut trouver un lieu sûr à proximité.

Postes Canada mène activement des consultations auprès des collectivités touchées et un grand nombre d'entre nous avons saisi l'occasion qui nous a été offerte par Postes Canada d'accompagner un facteur dans sa tournée pour mieux comprendre les dangers et ce que Postes Canada fait pour y remédier. J'invite tous les sénateurs à aller constater le bon travail que fait Postes Canada.

Même si l'opposition semble se rendre enfin compte de l'importance de maintenir et d'évaluer la livraison dans les boîtes aux lettres en région rurale, le projet de loi dont nous sommes saisis semblerait indiquer qu'ils se sont réveillés un peu tard. Néanmoins, je trouve encourageant qu'on s'entende pour dire, des deux côtés, que l'évaluation rigoureuse des boîtes aux lettres rurales actuellement en cours est une tâche importante.

Toutefois, ce projet de loi ne semble pas tenir compte de la responsabilité juridique de Postes Canada, en qualité d'employeur, d'assurer la sécurité de ses employés conformément au Code canadien du travail et au Code criminel. Tout comme la directive de 2006 concernant le service en région rurale, le projet de loi propose que Postes Canada reprenne la livraison dans toutes les boîtes aux lettres en région rurale qui étaient desservies le 1er septembre 2005.

Le projet de loi est différent de la directive sur le service en région rurale du fait qu'il ne tient pas compte des lois en vigueur, comme le Code canadien du travail, et laisse à Postes Canada le soin de déterminer s'il existe un risque indu à la reprise de ce service. Il y a risque que l'obligation de Postes Canada en soit amoindrie du fait qu'on utilise le terme « risque indu » plutôt que de parler de « danger » selon la définition du Code canadien du travail.

Une telle ambiguïté peut introduire un flou dans l'interprétation et peut-être une incertitude quant à la façon de procéder en cas de situation dangereuse pour les employés.

Quelle loi aurait préséance sur l'autre, une Loi sur la Société canadienne des postes modifiée comme le propose le projet de loi S-219 ou le Code criminel et le Code canadien du travail? Bien qu'il s'agisse d'une question qu'il vaut mieux laisser aux juristes le soin de trancher, il ne fait pas de doute qu'il faut s'abstenir de faire entrer en vigueur des modifications législatives qui ne tiennent pas compte d'une loi préexistante aussi importante.

(1730)

La première disposition charge Postes Canada d'assumer le coût du déplacement des boîtes aux lettres rurales dans les circonstances exceptionnelles où ce déplacement s'impose. Dans l'état actuel des choses, les résidants sont propriétaires de leurs propres boîtes. Pareille modification risque d'exposer Postes Canada à engager sa responsabilité si quelqu'un se blesse pendant le déplacement. En outre, il y aurait des conséquences financières au déplacement des boîtes qui ne sont pas sûres à un moment où Postes Canada dégage à peine des bénéfices malgré les importantes compressions des dernières années, y compris parmi les cadres. Je dois me demander si les résidents qui ont déjà déplacé leur boîte à leurs frais ne demanderaient pas une indemnisation rétroactive à Postes Canada. Si cela se produisait, imaginez le scénario et imaginez à quel point ce serait coûteux et long pour la Société canadienne des postes.

La deuxième disposition proposée par le projet de loi S-219 voudrait que Postes Canada donne un préavis écrit de six mois au client lorsqu'une modification doit être apportée à la distribution du courrier ou à quelque autre service postal en zone rurale. Le Protocole du service postal canadien que le gouvernement actuel a annoncé il y a à peine plus d'un an, en septembre 2009, exige déjà une période de consultation de 30 jours. Cette période de consultation prolongée assurerait-elle un meilleur service? Je ne vois pas comment on pourrait le penser. Je peux dire aux sénateurs que le fait de faire passer de un à six mois la période de consultation privera probablement Postes Canada d'une partie de la souplesse opérationnelle dont elle a besoin pour réagir rapidement à des imprévus qui surgissent et touchent l'infrastructure — comme un incendie dans un bureau de poste — ou le personnel — comme le départ à la retraite non prévu d'un maître de poste. Et si une nouvelle directive venait d'un agent de la santé et de la sécurité? Comme les autres employeurs de ressort fédéral, Postes Canada doit se conformer immédiatement.

À propos du Protocole du service postal canadien, j'insiste sur le fait qu'il s'agit d'une autre initiative importante du gouvernement. Il soutient Postes Canada et il s'est engagé envers tous les Canadiens, ruraux comme citadins, à maintenir un service postal universel, efficace et rentable. C'est pourquoi il a mis sur pied en avril 2008 un groupe indépendant chargé d'examiner Postes Canada et sa capacité de continuer à s'acquitter du mandat que la loi lui confie, c'est-à-dire assurer un service postal universel dans tout le Canada en régime d'autonomie financière.

C'est également pourquoi le gouvernement a agi sans tarder après avoir reçu les conseils de ce groupe indépendant, prenant les mesures voulues pour que Postes Canada puisse continuer à s'acquitter de son mandat.

En septembre dernier, le gouvernement a présenté le Protocole du service postal canadien, qui énonce nos attentes à l'égard de la société d'État. Celle-ci assurera des services postaux sur lesquels les Canadiens pourront compter. Elle maintiendra les services postaux en zone rurale et elle protégera le courrier des Canadiens.

C'est la première fois que les attentes des Canadiens à l'égard de Postes Canada sont clairement énoncées par le gouvernement fédéral. Ce dernier a dit clairement dans ce protocole qu'il croit que les services postaux dans les régions rurales font partie intégrante du service universel de Postes Canada. Le protocole exige expressément que Postes Canada s'adresse à la collectivité et la consulte lorsqu'elle est contrainte de modifier les modes de livraison ou de fermer pour de bon ou déplacer certains de ses bureaux de poste. Cela donne à la société et à la collectivité une occasion de travailler de concert à la recherche des solutions possibles afin de répondre aux besoins en services postaux de la collectivité et de trouver la solution qui convient.

Au cours de l'examen récent de Postes Canada et après la publication du rapport du groupe indépendant, le gouvernement a reçu des réactions importantes des gens des régions rurales, des conseils locaux et des groupes d'intérêts ruraux au sujet de l'importance du réseau postal pour les collectivités rurales. Le protocole est une réponse à ces réactions et il répond aux préoccupations des gens des régions rurales en assurant un service postal universel. À la différence de l'intention qui se profile derrière le projet de loi, qui semble favoriser indument certaines régions du Canada par rapport à d'autres, notre attente à l'égard du service est nationale, sans considérations de régions ou de proximité. C'est plutôt une approche qui garantit à tous, partout, l'accès aux mêmes services.

La troisième disposition du projet de loi S-219 veut qu'on crée un poste d'ombudsman à la Société canadienne des postes. Le titulaire serait nommé par le gouverneur en conseil et il aurait le pouvoir de demander des modifications dans les politiques et les pratiques de la société. Comme la plupart des sénateurs le savent, Postes Canada a déjà un ombudsman. Cet ombudsman a même reçu l'un des prestigieux prix d'excellence décernés par l'Institut national de la qualité le 13 septembre 2010. Le bureau de l'ombudsman, dirigé par Nicole Goodfellow, a remporté le trophée d'or pour la qualité dans le secteur public, catégorie des petites organisations. Ces prix d'excellence sont un programme de prix annuels dont le but est de souligner l'excellence sur les plans de la qualité, du service à la clientèle et de la salubrité des lieux de travail.

Postes Canada a donc un ombudsman depuis 1997. Il travaille en toute indépendance par rapport au personnel et aux cadres de Postes Canada, et il relève directement du conseil d'administration de la société. Ces dernières années, par exemple, l'ombudsman a étudié plus de 7 000 plaintes par année. Bien que ce nombre semble élevé, Postes Canada reçoit fort peu de plaintes, si on tient compte du fait qu'il sert quotidiennement des millions de clients.

Le projet de loi demande donc un ombudsman nommé par le gouverneur en conseil qui ferait partie de la fonction publique et aurait le pouvoir de modifier les politiques administratives de Postes Canada. Pareil changement renforcerait l'impression de contrôle gouvernemental et irait à l'encontre du rôle de responsabilité qui, dans la tradition canadienne, a été confié au conseil d'administration de la société. C'est la fonction de fiduciaire du conseil d'administration que de surveiller la gestion de la société et d'agir dans l'intérêt supérieur de cette société. La nomination d'un ombudsman doté du pouvoir de modifier les politiques administratives risque de réduire la capacité de la commission de s'acquitter de son obligation.

La dernière disposition du projet de loi S-219 oblige le ministre responsable de Postes Canada devant le Parlement de procéder tous les cinq ans à un examen de l'application des modifications proposées. Cette disposition se rapproche beaucoup de l'exigence formulée dans le Protocole du service postal canadien selon laquelle le gouvernement l'examine tous les cinq ans après son adoption pour évaluer s'il est nécessaire de l'adapter à l'évolution des besoins. Étant donné que le Protocole du service postal a été conçu à la suite de l'examen stratégique de Postes Canada en 2008, les attentes que le gouvernement place dans Postes Canada y sont formulées de manière beaucoup plus exhaustive que ne le fait le projet de loi dont nous débattons aujourd'hui.

Les mesures prises au cours des dernières années prouvent clairement que le gouvernement et Postes Canada sont très au fait des inquiétudes des Canadiens vivant en régions rurales et de l'importance que revêtent pour eux des services postaux fiables.

Comme le dit l'avant-propos du protocole, le gouvernement du Canada s'engage à assurer la transparence dans la façon dont Postes Canada offre des services postaux de qualité à tous les Canadiens, particuliers et entreprises, dans les régions rurales et urbaines, de manière sécurisée et financièrement autonome.

Étant donné que pratiquement toutes les mesures préconisées dans le projet de loi S-219 ont déjà été prises par le gouvernement ou par la Société canadienne des postes et étant donné que les dispositions proposées dans le projet de loi peuvent même entrer en conflit avec la loi en vigueur et compromettre la distribution du courrier en milieu rural, je pense que ce projet de loi devrait être rejeté.

Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de clarifier la position du gouvernement à propos de ce projet de loi.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Comeau, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des transports et des communications.)

[Français]

Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Hervieux-Payette, C.P., appuyée par l'honorable sénateur Tardif, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-204, Loi modifiant le Code criminel (protection des enfants)

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, je note que nous en sommes déjà rendus à la 14e journée, mais mes commentaires sont encore sous rédaction. Je propose donc l'ajournement du débat.

(Sur la motion du sénateur Comeau, le débat est ajourné.)

(1740)

[Traduction]

Les promesses du gouvernement

Interpellation—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Cowan, attirant l'attention du Sénat sur la litanie de promesses non tenues par l'administration Harper, à commencer par celle concernant les fiducies de revenu, ce qui a anéanti le coussin que tant de Canadiens âgés s'étaient constitué en prévision de la retraite.

L'honorable Nicole Eaton : Honorables sénateurs, le sénateur Cordy a accepté que je prenne la parole aujourd'hui et que j'ajourne le débat à son nom.

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui au sujet de l'interpellation du sénateur Cowan. Par où dois-je commencer? D'entrée de jeu, comme l'a fait remarquer le sénateur Finley, l'hypocrisie derrière l'objet de cette interpellation est grotesque. Après une décennie marquée de nombreux scandales, de mensonges et de promesses non tenues envers les Canadiens, le Parti libéral semble devenir de plus en plus geignard après cinq ans dans l'opposition.

L'ego du parti qui s'autoproclame le « parti naturel du pouvoir » au Canada en a apparemment pris un dur coup. Cette interpellation fait penser à un enfant gâté qui pique une crise après avoir perdu son jouet favori. En l'occurrence, le jouet perdu, c'est le pouvoir, et l'enfant gâté, c'est le Parti libéral.

Au lieu de s'interroger sérieusement sur les raisons pour lesquelles il a sombré dans la déliquescence et la confusion, le Parti libéral se livre à des attaques mesquines au Sénat. Il est ironique qu'un parti qui a résisté si longtemps à toutes les tentatives pour réformer le Sénat soit celui qui cause le plus de tort à sa réputation. Les sénateurs ont comme mandat d'étudier les mesures législatives proposées et les enjeux touchant les Canadiens, et non de se livrer à des attaques politiques flagrantes sous le couvert des travaux du Sénat.

Cela les arrange peut-être de tenir le premier ministre Harper responsable de tous leurs problèmes, mais cela ne changera rien au fait qu'ils n'ont pas de positions politiques solides, que leur leadership est faible et leurs campagnes de financement pathétiques. Peut-être que durant toutes ces années où ils ont abusé du pouvoir, les libéraux ont perdu le contact avec les travailleurs canadiens moyens qui en ont eu assez des scandales et de l'arrogance, et qui se sont lassés des messages vagues. Honorables sénateurs, le gouvernement a promis de protéger et de consolider l'économie canadienne. Il s'est engagé à tenir cette promesse et nous l'avons tenue.

Honorables sénateurs, quoi qu'en disent mes collègues d'en face, le Plan d'action économique du Canada a soutenu le Canada et ses citoyens durant la récession mondiale. Il a servi de tremplin à la reprise économique, au progrès et à la croissance. Grâce à ce plan et à la bonne gestion financière du gouvernement, le Canada est un modèle international de gestion budgétaire à suivre. À preuve, l'Association des comptables généraux accrédités du Canada a déclaré que le Plan d'action économique fournit les outils nécessaires à la relance de l'économie et à la création d'emplois.

De plus, le Fonds monétaire international a déclaré que le Canada est le pays du G7 qui a la position financière la plus solide.

Je pourrais parler toute la journée des réussites du Plan d'action économique. Faute de temps, je soulignerai du moins les efforts extraordinaires déployés par le gouvernement pour intervenir sur-le-champ et de manière décisive afin de protéger les emplois et d'aider les Canadiens les plus durement touchés par la récession mondiale.

Le Plan d'action économique du Canada a aidé directement les chômeurs par divers moyens, notamment en modifiant l'assurance-emploi. Cependant, permettez-moi d'évoquer les jours sombres de l'assurance-emploi à l'époque où les libéraux étaient au pouvoir. Il est bien connu que les libéraux utilisaient les cotisations d'assurance-emploi payées par les travailleurs et les entreprises comme caisse politique occulte. Ils ont puisé dans le fonds de l'assurance-emploi et l'ont dépouillé de près de 60 milliards de dollars sans sourciller. Le professeur Thomas Courchene, de l'Université Queen's, a rédigé un article sur les libéraux dans l'édition d'avril 2010 d'Options politiques :

[...] a détourné de 5 à 6 milliards de dollars par année du surplus du fonds de l'assurance-emploi [...] Le surplus cumulatif du fonds de l'assurance-emploi que les libéraux ont versé dans le Trésor s'élevait à la somme faramineuse de 60 milliards de dollars.

La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante a déclaré en 2000 qu'elle en avait assez que la caisse de l'assurance-emploi serve secrètement à financer d'autres initiatives.

C'est un gouvernement conservateur provincial, un gouvernement dont faisait partie le sénateur Runciman, qui a signalé à tous que les libéraux, même s'ils donnaient l'impression d'avoir rétabli l'équilibre budgétaire, avaient en fait vidé la caisse de l'assurance-emploi en s'adonnant à des tours de passe-passe comptables.

Honorables sénateurs, les libéraux ont vidé la caisse et ils ont équilibré le budget au détriment des travailleurs du Canada et des provinces. C'est grâce à un gouvernement conservateur que l'ingérence politique a été éliminée de la Loi sur l'assurance-emploi pour que les futurs gouvernements ne puissent plus refaire la même chose. C'est très noble.

Laissons maintenant de côté les méfaits passés du Parti libéral et considérons plutôt la promesse qu'a faite le gouvernement conservateur de protéger l'économie et les gens qui ont été le plus touchés par la récession mondiale. Comme je l'ai dit à maintes reprises, la priorité du gouvernement, c'est l'économie, et cette priorité restera la même. Contrairement aux sénateurs d'en face, quand il faut agir, les conservateurs répondent rapidement et sans hésiter aux problèmes qui se posent. Hélas, les libéraux n'agissent pas de la même façon lorsqu'il est question, par exemple, des nouveaux avions chasseurs dont nous avons grand besoin. Cette attitude correspond peut-être, toutefois, à la décennie noire qu'ont connue les militaires la dernière fois que les libéraux étaient au pouvoir. On n'a qu'à penser aux Sea Kings. Mais je m'écarte du sujet.

Finalement, la première phase du Plan d'action économique du Canada incluait 8,3 milliards de dollars sur deux ans pour soutenir la création d'emplois et protéger et aider les sans-emploi. En raison du fort leadership du premier ministre Harper, cette décision et cette intervention rapide ont permis à l'économie du Canada de récupérer pratiquement tous les emplois perdus pendant cette période tumultueuse. Ce que je veux dire, c'est que lorsqu'il a fallu intervenir énergiquement dans l'économie, le gouvernement l'a fait. Le gouvernement a accordé cinq semaines supplémentaires de prestations d'assurance-emploi à plus d'un million de chômeurs. Le gouvernement a permis à 164 000 travailleurs de longue date de toucher jusqu'à 20 semaines additionnelles de prestations. En outre, plus de 14 000 de ces sans-emploi ont obtenu une aide additionnelle et une formation à long terme par l'intermédiaire du programme d'aide à la formation professionnelle. Le gouvernement a offert, par le programme d'assurance-emploi, des possibilités de formation à tous les travailleurs canadiens et il a offert aux provinces et aux territoires la possibilité d'offrir du développement professionnel et un soutien à plus de 200 000 Canadiens chaque année pour faire entrer le Canada dans l'économie du savoir. Même ceux qui n'étaient pas admissibles à des prestations d'assurance-emploi ont pu obtenir une formation et des cours de perfectionnement professionnel grâce au Fonds de transition et de formation stratégique. Le gouvernement a dégagé des fonds pour des programmes de stages pour les jeunes, ce qui les aide à acquérir une expérience professionnelle et des compétences. Le gouvernement a offert plus de possibilités aux Autochtones canadiens en prévoyant 80 millions de dollars sur deux ans en fonds additionnels pour le programme Partenariat pour les compétences et l'emploi des Autochtones et 75 millions de dollars sur deux ans pour le Fonds d'investissement stratégique pour les compétences et la formation des Autochtones.

Le gouvernement a prolongé la durée des accords de travail partagé de 14 semaines, pour atteindre un maximum de 52 semaines et a accru l'accès à ces accords en assouplissant les critères d'admissibilité. L'initiative a permis d'aider plus de 35 000 Canadiens en décembre dernier seulement.

(1750)

C'est le gouvernement conservateur qui a alloué 40 millions de dollars en argent frais à une initiative destinée aux travailleurs âgés. Cette initiative a permis à plus de 9 900 travailleurs âgés sans emploi d'obtenir le soutien spécialisé dont ils avaient besoin pour s'adapter à de nouveaux emplois. C'est le gouvernement conservateur qui s'est engagé à encourager l'apprentissage de métiers spécialisés et la formation en entreprise en investissant 80 millions de dollars dans la nouvelle Subvention à l'achèvement de la formation d'apprenti. Cela a permis d'aider 38 000 nouveaux Canadiens.

Ces réalisations montrent clairement que le gouvernement conservateur a tenu sa promesse d'aider les chômeurs et de protéger l'économie canadienne. Je suis fière de faire partie d'un gouvernement qui est conscient que la population active a évolué comparativement à la situation que la plupart d'entre nous ont vécue. Elle est aussi très certainement complètement différente de ce qu'elle était à l'époque de nos parents. Aujourd'hui, la main-d'œuvre au Canada est très différente : elle est plus éduquée, plus compétente, plus raffinée et plus exigeante, non seulement à l'endroit de son employeur, mais aussi de son gouvernement. Nous avons fait tout ce qui était possible de faire pour faciliter cette transition.

Grâce au Plan d'action économique du Canada, nous avons réussi à créer plus de 460 000 emplois depuis juillet 2009. Près de 85 p. 100 de ces emplois sont à temps plein et presque 90 p. 100 sont des emplois de qualité dans des secteurs à rémunération élevée. Qui plus est, notre économie est en croissance depuis les cinq derniers trimestres. Cependant, la reprise demeure fragile et c'est pourquoi nous sommes résolus à poursuivre la mise en œuvre de notre plan de création d'emplois et de réduction des impôts, qui profitera à tous les Canadiens.

Cette croissance montre de nouveau que le Plan d'action économique du Canada donne de bons résultats, ce que, semble-t-il, le Parti libéral a du mal à accepter. Ce refus de leur part de voir la réalité les a poussés à faire cette interpellation mesquine. Cependant, leurs enfantillages n'ont aucune importance.

Ce qui est important et encourageant, c'est de constater que l'économie canadienne est sur la bonne voie. Je ne puis m'empêcher de féliciter le gouvernement de cette grande réussite.

Honorables sénateurs, le gouvernement conservateur, sous la direction du premier ministre Harper, a tenu la promesse qu'il avait faite devant la population canadienne d'assurer la vigueur de l'économie et de maintenir les emplois existants. C'est un honneur aujourd'hui de prendre la parole afin d'attirer l'attention sur cette réalisation remarquable.

Son Honneur le Président : Le Sénat est-il d'accord pour que cet article reste inscrit au nom du sénateur Cordy?

(Sur la motion du sénateur Cordy, le débat est ajourné.)

Projet de loi visant à assurer la sécurité des Canadiens

Présentation du sixième rapport du Comité de la sécurité nationale et de la défense

Permission ayant été accordée de revenir à la présentation de rapports de comités permanents ou spéciaux :

L'honorable Pamela Wallin, présidente du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, présente le rapport suivant :

Le mardi 1er mars 2011

Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense a l'honneur de présenter son

SIXIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi S-13, Loi portant mise en œuvre de l'Accord cadre sur les opérations intégrées transfrontalières maritimes d'application de la loi entre le gouvernement du Canada et le gouvernement des États-Unis d'Amérique, a, conformément à son ordre de renvoi du mercredi 15 décembre 2010, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport avec les modifications suivantes :

1. Article 17, page 8 : Remplacer la ligne 15 par ce qui suit :

« l'agent désigné, au sens de l'article 45.88, qui a été nommé à titre d'agent maritime transfrontalier d'application de la loi en vertu du paragraphe 8(1) de la Loi visant à assurer la sécurité des Canadiens (protection des frontières). ».

2. Article 22 :

a) Page 12 :

(i) Ajouter après la ligne 22 ce qui suit :

« (10) Lorsqu'une plainte porte sur la conduite d'un agent désigné, la Commission peut tenir une enquête, une révision ou une audience sur la plainte conjointement avec l'entité publique ayant les mêmes compétences en matière de plaintes du public dans tout ressort concerné, au Canada ou à l'étranger.

(11) Le ministre peut prendre des règlements concernant les enquêtes, révisions et audiences conjointes en vertu du paragraphe (10).

(ii) Remplacer les lignes 23 et 24 par ce qui suit :

« 45.9 Articles 45.52 à 45.56, 45.63 à 45.67, 45.71, 45.72 et 45.74 à 45.76 s'appliquent aux plaintes »;

b) Page 19 :

(i) Ajouter après la ligne 32 ce qui suit :

« (10) Lorsqu'une plainte porte sur la conduite d'un agent désigné, la Commission peut tenir une enquête, une révision ou une audience sur la plainte conjointement avec l'entité publique ayant les mêmes compétences en matière de plaintes du public dans tout ressort concerné, au Canada ou à l'étranger.

(11) Le ministre peut prendre des règlements concernant les enquêtes, révisions et audiences conjointes en vertu du paragraphe (10)»,

(ii) Remplacer les lignes 33 et 34 par ce qui suit :

"45.9 Articles 45.52 à 45.56, 45.63 à 45.67, 45.71, 45.72 et 45.74 à 45.76 s'appliquent aux plaintes;

c) Page 24 : Remplacer la ligne 26 parc ce qui suit :

« l'agent désigné, au sens de l'article 45.88, qui a été nommé à titre d'agent maritime transfrontalier d'application de la loi en vertu du paragraphe 8(1) de la Loi visant à assurer la sécurité des Canadiens (protection des frontières). »;

d) Page 25 : Remplacer la ligne 28 par ce qui suit :

« l'agent désigné, au sens de l'article 45.88, qui a été nommé à titre d'agent maritime transfrontalier d'application de la loi en vertu du paragraphe 8(1) de la Loi visant à assurer la sécurité des Canadiens (protection des frontières). »

3. Article 23, page 27 : Remplacer la ligne 30 par ce qui suit :

« l'agent désigné, au sens de l'article 45.88, qui a été nommé à titre d'agent maritime transfrontalier d'application de la loi en vertu du paragraphe 8(1) de la Loi visant à assurer la sécurité des Canadiens (protection des frontières). »

Respectueusement soumis,

La présidente,
PAMELA WALLIN

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur Wallin, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 2 mars 2011, à 13 h 30.)


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