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Débats du Sénat (Hansard)

2e Session, 41e Législature,
Volume 149, Numéro 58

Le jeudi 8 mai 2014
L'honorable Noël A. Kinsella, Président

LE SÉNAT

Le jeudi 8 mai 2014

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Les innovations canadiennes pour le traitement du diabète

L'honorable Kelvin Kenneth Ogilvie : Honorables sénateurs, environ 2 millions de Canadiens sont diabétiques, un chiffre qui, si la tendance se maintient, devrait atteindre 3,7 millions d'ici 2019. Le diabète de type 1 est habituellement diagnostiqué chez les enfants et les adolescents et compte, en gros, pour 10 p. 100 des cas. Le diabète de type 2, qui représente les autres 90 p. 100, est souvent lié à l'obésité. Avec plus de 60 000 nouveaux diagnostics par année, il s'agit d'une des maladies qui prend le plus d'ampleur au pays. En raison de ses vastes répercussions sur la santé et du fardeau financier accru qu'il impose au système de santé, le diabète constitue une maladie très grave.

Le diabète peut entraîner certaines complications : cécité, maladies du cœur ou du rein, AVC, atteinte nerveuse, dépression et j'en passe. La première grande percée à l'égard de la maladie est survenue au Canada lorsque sir Frederick Banting, en 1922, a découvert le rôle de l'insuline, et cette tradition d'innovation se poursuit encore aujourd'hui au pays. Ainsi, le Canada a joué un rôle majeur dans la conception des pompes à insuline, qui permettent de remplacer les injections périodiques par une insulinothérapie continue. Pensons également à la Fondation de la recherche sur le diabète juvénile. En partenariat avec le gouvernement du Canada, elle subventionne le Réseau canadien d'essais cliniques, un organisme qui, au moyen de ses trois centres d'essais cliniques situés respectivement à London, à Toronto et à Ottawa, finance des essais qui comblent des lacunes majeures dans le traitement et la gestion du diabète, notamment en ce qui concerne les pompes à insuline. De nouvelles générations de médicaments conçus grâce à des travaux de recherche entamés au Canada stimulent la sécrétion d'insuline chez les patients. De multiples stratégies prometteuses sont aussi élaborées afin de prévenir et de contrôler plus facilement le diabète. Ce sont autant d'innovations qui peuvent accroître la longévité et améliorer la qualité de vie tout en réduisant le coût des soins et des traitements.

Lundi prochain, je tiendrai un kiosque sur le sujet, en compagnie d'innovateurs et de chercheurs canadiens de premier plan du domaine de la santé, et plus précisément du diabète, à qui nous avons demandé de se joindre à nous. Ils pourront vous dire eux-mêmes de quelle façon ils contribuent à prévenir cette maladie chez les Canadiens, où en sont les recherches visant à trouver un remède pour les diabétiques, et de quelle façon ils aident les Canadiens souffrant de diabète à mener une vie saine et productive.

Je vous invite à vous joindre à nous le lundi 12 mai, de 16 heures à 19 heures, dans la pièce 256-S de l'édifice du Centre, pour visiter le kiosque du Comité sur la recherche en santé portant sur la recherche et l'innovation relatives au diabète au Canada.

Le Conseil canadien de la santé

L'honorable Catherine S. Callbeck : Honorables sénateurs, il y a un peu plus d'un mois que le gouvernement fédéral a permis que l'accord sur la santé de 2004 arrive à échéance sans discussion, sans négociation et sans tenter aucunement de conclure un nouvel accord avec les provinces. L'expiration de cet accord est un autre exemple du peu d'intérêt que porte le gouvernement aux soins de santé. J'aimerais attirer votre attention sur une autre victime, à savoir le Conseil canadien de la santé.

Le financement du Conseil canadien de la santé a expiré à la fin de mars. Créé à l'origine par le premier ministre Chrétien et les premiers ministres provinciaux, le conseil était à l'origine chargé d'assurer la reddition de comptes et l'égalité d'accès aux soins de santé pour les Canadiens, où qu'ils habitent. Plus tard, les gouvernements fédéral et provinciaux ont conclu de nouvelles ententes et le rôle du conseil a été élargi de façon à mesurer les progrès réalisés par les accords sur la santé de 2003 et de 2004.

Pendant plus de 10 ans, le Conseil canadien de la santé a produit et diffusé publiquement des dizaines de rapports sur une vaste gamme de sujets importants touchant la santé. Ces rapports ont rendu compte des progrès réalisés dans la mise en œuvre de l'accord sur la santé. Le conseil a aussi fait des recherches spécifiques dans des domaines comme la santé des Premières Nations, la santé maternelle et les soins à domicile, et il en a fait rapport. Il était une voix fiable en matière de reddition de comptes et il fournissait aux gouvernements et aux particuliers de précieux renseignements sur les pratiques exemplaires. En fait, le Conseil canadien de la santé était l'un des meilleurs moyens de savoir ce qui avait été fait et comment fonctionnaient les choses pour quiconque s'intéressait aux soins de santé.

Malheureusement, le Conseil canadien de la santé n'est qu'un organisme parmi bien d'autres qui ont écopé sous le présent gouvernement. Le Centre international des droits de la personne et du développement démocratique, connu sous le nom de Droits et Démocratie, a été aboli dans le budget de 2012, tout comme le Secrétariat de la Commission des nominations publiques, quoiqu'il n'avait jamais vraiment démarré après sa création par le présent gouvernement. Disparus aussi l'Institut de la statistique des Premières nations, le Conseil canadien sur l'apprentissage, le Conseil national du bien-être social et la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie.

Je trouve extrêmement décourageant de voir que ces organismes, qui avaient pour but de consulter et d'informer les Canadiens, ont été supprimés. La plus récente victime, le Conseil de la santé, est un coup de plus porté à notre système de santé déjà éprouvé. Je ne puis qu'espérer que sa disparition ne contribuera pas à accentuer les disparités et les iniquités pour ce qui est de l'accès et de la qualité des soins au pays.

Visiteur à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune du gouverneur général de Mme Maria Corina Machado, députée du parti de l'opposition au Venezuela, qui a recueilli un nombre important de voix lors des élections au Venezuela.

Au nom de tous les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

[Français]

L'Assemblée nationale du Québec

Le trentième anniversaire de la tragédie

L'honorable Jean-Claude Rivest : Honorables sénateurs, j'aimerais rappeler qu'aujourd'hui, le 8 mai, nous soulignons le 30e anniversaire d'une tragédie qui s'est déroulée à l'Assemblée nationale du Québec, tragédie au cours de laquelle 3 personnes ont été tuées et 13 autres blessées par le caporal Lortie.

À l'époque, moi-même, ainsi que le sénateur Maltais, je crois, étions membres de l'Assemblée nationale. Je voudrais rappeler le décès de trois membres du personnel de l'Assemblée nationale, soit MM. Camille Lepage, Georges Boyer et Roger Lefrançois.

J'aimerais aussi profiter de cette occasion pour souligner le travail remarquable, qui a été remarqué d'ailleurs par l'ensemble des Québécois et des Canadiens, du sergent d'armes de l'époque, M. René Jalbert, qui a négocié avec le caporal Lortie et qui a probablement réussi à sauver un nombre considérable de vies.

(1340)

Le sergent Jalbert est décédé en 1996, et l'ensemble des Québécois et des Canadiens ont su reconnaître les mérites de cet officier de l'Assemblée nationale du Québec.

Cet événement me touche personnellement quelque peu puisque j'étais, à l'époque, député de l'Assemblée nationale et président de la Commission des institutions. À 10 heures, au moment où les événements se sont passés, je devais présider une séance de la commission dans l'enceinte même de l'Assemblée nationale. Toutefois, grâce à une rencontre fortuite avec M. Parizeau au restaurant parlementaire, j'allais être en retard de quelques minutes; j'ai donc été témoin de la montée du caporal Lortie et de ses tirs de mitraillette. C'était une situation absolument désespérée.

À la suite de ces événements, l'ensemble des mesures de sécurité au Parlement, à Ottawa, et dans l'ensemble des législatures canadiennes, a été renforcé dans l'intérêt de tous les Canadiens et de tous les Québécois.

J'aimerais profiter de ce triste anniversaire pour marquer notre reconnaissance envers le personnel de la sécurité, ces hommes et ces femmes, par exemple ici, sur la Colline du Parlement, qui assurent la sécurité du Parlement du Canada; peut-être ne leur dit-on pas assez souvent à quel point leur travail est précieux. Je vous remercie.

[Traduction]

La Marche pour la vie

L'honorable Norman E. Doyle : Chers collègues, comme chaque année depuis 17 ans, la Marche pour la vie se tiendra aujourd'hui sur la Colline du Parlement. La Marche pour la vie, un événement national, a commencé ici à Ottawa durant les années 1990 et n'a pas cessé depuis. À sa première édition, en 1997, je crois qu'elle a attiré entre 3 000 et 5 000 personnes. L'an dernier, environ 25 000 personnes se sont déplacées jusqu'ici. Je crois que cette année, la marche attirera autant de participants, sinon plus.

Je tiens à dire que cet événement annuel, le plus important qui se tienne sur la Colline du Parlement, est devenu une célébration — une célébration de la vie. Selon moi, il est important de souligner que bon nombre des jeunes Canadiens qui se rassemblent et manifestent leur point de vue ici même chaque année se préoccupent grandement de la protection des enfants à naître. Les jeunes rassemblés aujourd'hui nous disent : « Il faut que ça change. » Selon eux, il est temps de réaliser pleinement que personne ne verra ses droits mieux protégés en niant les droits fondamentaux d'un autre. Or, le droit à la vie est fondamental.

Espérons qu'un changement se produira. Comme nous le constatons aujourd'hui sur la Colline, le nombre de participants demeure encourageant, tout comme les résultats de sondages menés partout au pays.

Nous avons donc bon espoir.

La Semaine nationale des soins palliatifs

L'honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, la Semaine nationale des soins palliatifs se déroule du 4 au 10 mai. La question des soins en fin de vie nous touche tous, qu'il s'agisse des traitements apportés à un proche ou de la planification de notre propre fin. La fin de l'existence peut engendrer du stress et causer des difficultés pour le patient, sa famille et les aidants.

Il est important de rendre hommage à notre ancienne collègue, la sénatrice Sharon Carstairs, pour l'incroyable travail qu'elle a fait et qu'elle continue de faire pour les soins en fin de vie au Canada.

Les centres de soins palliatifs permettent aux patients d'avoir plus de contrôle pendant leurs derniers jours. Ils les aident à gérer plus efficacement leur douleur et leurs symptômes et offrent du soutien aux proches et aux aidants.

Seulement 30 p. 100 des Canadiens qui ont besoin de soins en fin de vie ont accès à un centre de soins palliatifs ou reçoivent des soins de fin de vie. Malheureusement, l'accès à ces soins est souvent tributaire de l'endroit où ils vivent.

Statistique Canada estime que, d'ici 2020, le nombre annuel de décès augmentera de 33 p. 100. Le nombre de Canadiens qui ont besoin de soins de fin de vie explose, et l'accroissement de la demande continuera d'exercer une pression sur le réseau des soins palliatifs.

La Semaine nationale des soins palliatifs est le moment tout indiqué pour sensibiliser les Canadiens à la question des soins en fin de vie et pour prendre des mesures visant à assurer un meilleur accès à des soins visant le maintien de la qualité de vie. On estime que seulement 13 p. 100 des Canadiens ont préparé à l'avance un plan de soins. Il faut que cela change. Des études révèlent que la vaste majorité des Canadiens estiment que les soins en fin de vie sont très importants. Malgré tout, relativement peu de Canadiens établissent un plan à cet égard.

L'Association canadienne de soins palliatifs essaie de combler cette lacune. Quelqu'un m'a déjà dit que la question n'est pas de savoir si nous allons mourir, mais plutôt quand nous allons mourir.

Cette semaine, l'association incite les professionnels, les fournisseurs de soins, les aidants et les proches à collaborer, à former une sorte d'équipe interdisciplinaire, pour que les êtres chers reçoivent les meilleurs soins possibles en fin de vie.

Le caucus libéral du Sénat tiendra une séance publique de discussion sur la Colline du Parlement le mercredi 14 mai, de 9 h 30 à 11 h 30, dans la pièce 160. Quelques personnes prendront la parole : Steven Fletcher, C.P., député, le Dr Derryck Smith, directeur de l'organisme Dying with Dignity, David Baker et Amy Hasbrouck, de l'Association canadienne de l'intégration communautaire et, enfin, Rick Firth, vice-président de l'Association canadienne de soins palliatifs.

Honorables sénateurs conservateurs et indépendants, je vous invite à vous joindre à notre caucus libéral ouvert et à participer à un débat non partisan et ouvert. Je vous demande de vous joindre à moi pour appuyer la Semaine nationale des soins palliatifs.

[Français]

La bataille de l'Atlantique

Le soixante et onzième anniversaire

L'honorable Ghislain Maltais : Honorables sénateurs, permettez-moi de joindre mes souvenirs, ainsi que ma reconnaissance, au discours que le sénateur Rivest a tenu. Je me souviens des amis qu'on a perdus, des personnes qui ont été blessées et je me souviendrai toujours de l'immense courage de M. Jalbert.

Dimanche dernier, on a célébré le 71e anniversaire de la bataille de l'Atlantique, bataille fort importante pour le Canada, pour l'Europe et pour la paix dans le monde. C'est grâce aux milliers de marins de l'armée canadienne, aux soldats et aux marins de la marine marchande — qui transbordaient de Montréal, Trois-Rivières, Québec et Halifax, qui était le centre de répartition des munitions et de la nourriture — que nous avons pu, finalement, gagner la bataille d'Europe.

Souvenons-nous de ces gens. J'ai eu le privilège d'être accompagné de deux anciens militaires qui ont participé à la bataille de l'Atlantique. Ils étaient âgés de 94 et 96 ans. Ce qu'ils ont vécu est inexplicable, mais ils m'ont donné une très bonne leçon et je me dois, en qualité de Canadien, de vous la transmettre. Leur message était le suivant : « Monsieur le sénateur, c'est dommage que nous tombions dans l'oubli. D'ici cinq ans, il ne restera plus personne ayant vécu ces événements et nous passerons à l'oubli. »

Dans nos écoles et nos collèges, on néglige de rappeler à l'ensemble des Canadiens et des Canadiennes d'aujourd'hui que, s'ils sont dans un pays démocratique, si nous sommes aujourd'hui dans cette Chambre, c'est parce que des milliers de personnes ont donné leur vie pour que nous conservions cette liberté. Nous avons le devoir de nous souvenir d'eux.

Je vous invite donc, tous les 8 mai, à penser à ces milliers de personnes qui ont donné leur vie pour notre pays et pour la liberté.

[Traduction]

Brunéi

Le code pénal fondé sur la charia

L'honorable Daniel Lang : Honorables sénateurs, j'aimerais attirer votre attention sur un événement politique très grave qui se déroule à l'autre bout du monde, très loin de chez nous : la talibanisation de Brunéi.

En septembre dernier, mon collègue, le sénateur Plett, et moi avons visité le sultanat de Brunéi en tant que représentants canadiens d'une délégation interparlementaire.

Pour ceux qui n'y sont jamais allés, le sultanat de Brunéi Darussalam se situe dans l'extrémité nord-ouest de l'île de Bornéo. Brunéi occupe une superficie d'un peu moins de 6 000 kilomètres carrés et est divisé en deux parties, toutes deux enclavées dans l'État malais de Sarawak.

(1350)

Une portion relativement faible de la superficie de Brunéi est cultivée, et environ 60 p. 100 du territoire est couvert de forêt primaire, mais la présence de pétrole et de gaz en fait l'un des pays les plus riches du monde par habitant.

Le sultan de Brunéi serait l'un des hommes les plus riches du monde. De par sa Constitution, le sultanat de Brunéi est une monarchie absolue. Le pays est dirigé par le sultan Haji Wadula, qui est à la fois chef d'État et premier ministre en plus d'être chef de la religion islamique à Brunéi.

Notre visite dans cet ancien protectorat britannique de 406 000 habitants a été fort instructive et nos hôtes nous ont accueillis avec amabilité et générosité. Les gens que nous avons rencontrés étaient positifs et progressistes et semblaient tournés vers l'avenir.

Chers collègues, en octobre 2013, le sultan a annoncé qu'un code pénal fondé sur la charia entrerait graduellement en vigueur à compter d'avril 2014. Plus tôt cette semaine, il a confirmé sa décision.

La compétence des tribunaux islamiques sera étendue de façon à ce que les tribunaux imposent les peines liées aux infractions prévues dans le code. Ces infractions incluent notamment l'apostasie, l'abandon de l'islam, le vol, le viol et le meurtre. Le nouveau code pénal prévoit le châtiment corporel, dont la lapidation en cas d'adultère, l'amputation en cas de vol ainsi que la flagellation pour l'avortement, la consommation d'alcool et l'homosexualité. Il prévoit également la peine de mort en cas de viol et de sodomie.

Le code s'appliquera aux musulmans et aux non-musulmans, dont les bouddhistes, les chrétiens, les hindous et un petit nombre de personnes qui pratiquent des religions autochtones et qui peuvent faire l'objet d'accusations en vertu du code pour certaines infractions, comme la consommation d'alcool en public et l'adultère avec un musulman, entre autres.

Chers collègues, la « talibanisation » de Brunéi est profondément inquiétante. Comme nous le savons tous, le premier ministre Stephen Harper et le ministre John Baird sont d'ardents défenseurs de la démocratie, de la primauté du droit, du respect des droits de la personne et de la liberté.

Au nom de tous les Canadiens à qui ces valeurs tiennent à cœur, je demande au gouvernement de prendre promptement des mesures énergiques et indéfectibles pour signaler au sultan de Brunéi que les Canadiens ne voient pas d'un bon œil l'application de la charia et la talibanisation de Brunéi.

Honorables sénateurs, vous conviendrez sans doute avec moi que le monde n'a pas besoin de plus de fondamentalisme, mais bien de pluralisme religieux.


AFFAIRES COURANTES

Affaires sociales, sciences et technologie

L'étude sur la cohésion et l'inclusion sociales—Le vingt-sixième rapport du comité, déposé pendant la première session de la quarante et unième législature—Dépôt de la réponse du gouvernement

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement au vingt-sixième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, intitulé Réduire les obstacles à l'inclusion et à la cohésion sociales pour lutter contre la marginalité, qui a été déposé au cours de la première session de la quarante et unième législature.

Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Présentation du septième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles

L'honorable Bob Runciman, président du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, présente le rapport suivant :

Le jeudi 8 mai 2014

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a l'honneur de présenter son

SEPTIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-444, Loi modifiant le Code criminel (fausse représentation à titre d'agent de la paix ou de fonctionnaire public), a, conformément à l'ordre de renvoi du mardi 11 février 2014, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.

Respectueusement soumis,

Le président,
BOB RUNCIMAN

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Dagenais, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

L'étude sur l'usage que fait Bell Canada des données de ses clients

Dépôt du quatrième rapport du Comité des transports et des communications

L'honorable Dennis Dawson : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le quatrième rapport du Comité sénatorial permanent des transports et des communications, portant sur la pratique consistant à recueillir et à analyser les données des clients de Bell Canada à des fins commerciales, notamment à des fins de publicité ciblée.

[Traduction]

Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Première lecture

L'honorable Bob Runciman dépose le projet de loi S-221, Loi modifiant le Code criminel (voies de fait contre un conducteur de véhicule de transport en commun).

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Runciman, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

ParlAmericas

La réunion du conseil d'administration, tenue du 19 au 21 mars 2014—Dépôt du rapport

L'honorable Michael L. MacDonald : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la Section canadienne de ParlAmericas concernant sa participation à la 33e réunion du conseil d'administration, tenue à Saint-Domingue, en République dominicaine, du 19 au 21 mars 2014.

La très honorable Beverley McLachlin, C.P.

Préavis de motion

L'honorable Anne C. Cools : Honorables sénateurs, conformément à l'article 5j) du Règlement, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que,

Attendu que la discorde et l'hostilité entre les hauts dirigeants du corps politique sont déplorables et portent injure et atteinte à l'équilibre et au bon fonctionnement de la constitution du Canada, et qu'elles doivent de toute force être évitées en raison de leurs conséquences terribles et néfastes sur la population, la gouvernance et les personnes en subissant tort ou préjudice ainsi qu'en raison de la possible crise constitutionnelle vaste et fatale qu'elles peuvent causer;

Attendu que la courtoisie constitutionnelle représente une condition obligatoire des relations entre les institutions coordonnées prévues dans notre constitution, soit les ministères, le Sénat, la Chambre des communes et la magistrature, lesquelles sont redevables les unes envers les autres de par leur serment engageant au respect de la comitas, c'est-à-dire les obligations de bienséance, de courtoisie et de considération qui sont indispensables au maintien de l'équilibre constitutionnel, ce qui est le premier devoir des titulaires d'une charge publique;

Attendu que la juge en chef de la Cour suprême du Canada est aussi le vice-roi de notre souveraine, Sa Majesté la reine Elizabeth II, et que, de par les Lettres patentes de 1947 constituant la charge de gouverneur général, elle agit également à titre de suppléant de Son Excellence le Gouverneur général en tout ce qui concerne la sanction royale des projets de loi et les autres prérogatives royales et qu'elle est désignée, de par l'article VIII de ces mêmes lettres patentes, Notre Administrateur, soit la personne et l'officier qui, en cas d'absence, de décès, de renvoi ou d'incapacité du gouverneur général, remplit les fonctions de représentant de Sa Majesté la reine au Canada;

Qu'il soit résolu que le Sénat respecte son serment d'allégeance à Sa Majesté ainsi qu'aux principes fondamentaux que sont la courtoisie constitutionnelle, l'indépendance judiciaire ainsi que l'équité et la justice, et que le Sénat exprime son plus profond respect et sa plus grande confiance envers la Très Honorable Beverley McLachlin, juge en chef de la Cour suprême du Canada, en reconnaissance de décennies de loyaux services consacrés à la fonction publique de ce pays, à sa Cour suprême, à sa population, à ses peuples souverains et sa souveraine la reine Elizabeth.

(1400)

[Français]

Le Myanmar

La persécution des Rohingyas musulmans—Préavis d'interpellation

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, je donne préavis que, dans deux jours :

J'attirerai l'attention du Sénat sur la persécution des Rohingyas musulmans au Myanmar et sur le mandat du Bureau de la liberté de religion du Canada.


[Traduction]

PÉRIODE DES QUESTIONS

La santé

La Commission de la santé mentale

L'honorable James S. Cowan (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, je vais poser une autre question que nous avons reçue du public. Elle porte sur la Commission de la santé mentale du Canada.

La question provient de Michael Da Silva, un citoyen de Toronto, et elle s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Voici ce que dit M. Da Silva :

L'importance que revêt la santé mentale pour les Canadiens prend bien des dimensions. Les effets négatifs sur la santé non seulement touchent la vie des gens ayant des problèmes de santé mentale et de leurs parents, mais peuvent aussi avoir des répercussions sur l'économie et sur le nombre d'actes qui, selon de nombreuses personnes, devraient être criminalisés si leurs auteurs ne souffrent pas de troubles mentaux. Il n'est donc pas surprenant que les engagements du Canada en droit international à l'égard du droit à la santé englobent une obligation générale visant à faire en sorte que les gens bénéficient des normes les plus élevées en matière de santé mentale et des obligations précises concernant la planification et la prestation de services de santé mentale. Au cours des dernières années, la Commission de la santé mentale du Canada a joué un rôle important dans l'élaboration de la réponse canadienne à ce problème important. Sa réalisation la plus remarquable est peut-être la création de la première stratégie canadienne en matière de santé mentale dans le cadre du rapport de 2012 intitulé Changer les orientations, changer des vies.

Le gouvernement croit-il encore en l'importance d'un organisme indépendant ayant pour objectif d'assurer la santé mentale des Canadiens? Si c'est le cas, renouvellera-t-il le mandat de la Commission de la santé mentale du Canada, qui arrivera à échéance en 2017?

[Français]

L'honorable Claude Carignan (leader du gouvernement) : Merci, monsieur Da Silva, pour votre question. Comme vous le savez, on n'insistera jamais assez sur l'importance de la santé mentale pour les Canadiens et leurs familles. Notre gouvernement a consenti des investissements considérables en faveur de la recherche et de la promotion relatives à la santé mentale. Comme le sait l'honorable sénateur Cowan, nous avons créé la Commission de la santé mentale du Canada afin de mettre au point une stratégie nationale et de partager les meilleurs pratiques.

Depuis 2006, nous avons investi plus de 431 millions de dollars dans la recherche en santé mentale, 112 millions de dollars par année dans la promotion de la santé auprès des familles en milieu communautaire et plus de 261 millions de dollars par année dans les services de santé mentale destinés aux Premières Nations et aux Inuits. De plus, dans le budget de 2013, nous avons annoncé des fonds supplémentaires afin d'accroître le nombre d'équipes consacrées à la santé mentale dans les collectivités des Premières Nations.

Donc, compte tenu de l'importance que revêt la problématique de la santé mentale, et compte tenu des enveloppes et de l'énergie qui sont consacrées pour combattre ou, en tout cas, diminuer l'effet des troubles de santé mentale, je pense que notre gouvernement a fait preuve, et va continuer de faire preuve dans l'avenir d'un engagement important pour protéger la santé mentale.

[Traduction]

Le sénateur Cowan : Merci, sénateur, de votre réponse. Je tiens à féliciter de nouveau le gouvernement d'avoir mis sur pied la Commission de la santé mentale du Canada, comme l'avait recommandé notre comité sénatorial il y a quelques années. C'est une initiative louable, tout comme celle de consacrer des fonds supplémentaires à divers services de santé mentale. Cependant, il reste encore du travail à faire.

Je ne vous ai pas demandé de répéter encore une fois toutes les choses que le gouvernement a faites dans ce domaine. Je vous ai plutôt posé une question bien précise : le gouvernement va-t-il renouveler le mandat de la Commission de la santé mentale du Canada qui, comme vous le savez, arrivera à échéance en 2017? M. Da Silva souhaite obtenir une réponse à cette question.

[Français]

Le sénateur Carignan : Comme je l'ai dit, nous allons continuer à consentir des investissements considérables en faveur de la recherche et de la promotion liées à la santé mentale.

[Traduction]

Le sénateur Cowan : Sénateur Carignan, ma question était très précise : le gouvernement va-t-il renouveler le mandat de la Commission de la santé mentale du Canada, qui arrivera à échéance non pas à cause des mesures prises par le gouvernement, mais bien parce que la Commission de la santé mentale du Canada n'a aucun fondement législatif? La commission a été mise en place pour une période donnée. Comme je l'ai mentionné, c'est fort louable, mais cette période prendra fin bientôt.

Je vais donc poser de nouveau la question : le gouvernement va-t-il renouveler le mandat de la commission, qui arrivera à échéance en 2017?

[Français]

Le sénateur Carignan : Comme je l'ai déjà exprimé à l'honorable sénateur, nous allons continuer d'investir dans la recherche et la promotion liées au dossier de la santé mentale, compte tenu, notamment, de l'importance que revêt la santé mentale pour les Canadiens et leurs familles. Je pense que les Canadiens peuvent compter sur l'engagement de ce gouvernement envers la promotion relative à la santé mentale.

[Traduction]

L'honorable Catherine S. Callbeck : J'étais membre du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie lorsqu'il a mené l'étude sur la santé mentale. Notre principale recommandation était de créer la Commission de la santé mentale. Je félicite moi aussi le gouvernement de l'avoir fait.

Par ailleurs, comme on l'a déjà mentionné, le mandat de la commission arrivera à échéance en 2017. Vous ne vous êtes pas engagés à le renouveler. Si le mandat de la commission n'est pas renouvelé, qui alors effectuera le travail qui lui a été confié?

[Français]

Le sénateur Carignan : Sénatrice, je pense que vous avez noté qu'on est en 2014, et je n'ai pas dit que le mandat ne serait pas renouvelé. J'ai insisté sur l'importance de la santé mentale pour les Canadiens et leurs familles, et j'ai réitéré que notre gouvernement a consenti des investissements considérables dans la recherche et la promotion relatives à la santé mentale.

J'ai donné des exemples, comme la création de la Commission de la santé mentale, qui visait à mettre au point une stratégie nationale et à partager les meilleures pratiques en santé mentale. J'ai donné également des exemples d'engagement en faveur de la recherche et du développement en matière de santé mentale, soit des centaines de millions de dollars, des sommes considérables qui ont été destinées à la recherche. J'ai mentionné également que nous avons annoncé, dans le budget de 2013, que nous allions consacrer des fonds supplémentaires qui permettront d'accroître le nombre d'équipes qui travaillent dans le domaine de la santé mentale.

Je pense donc que les Canadiens peuvent être assurés de notre engagement à améliorer la santé mentale au Canada.

[Traduction]

La sécurité publique

Le Service correctionnel du Canada—La gestion des pénitenciers

L'honorable Joan Fraser (leader adjointe de l'opposition) : Dans un autre ordre d'idées — même si ce sujet n'est pas plus réjouissant —, comme plusieurs sénateurs le savent, le vérificateur général a publié hier un rapport dévastateur sur les dépenses du Service correctionnel du Canada, notamment en ce qui concerne la construction.

Voici quelques repères chronologiques, chers collègues. En 2007, une enquête indépendante a révélé que de nombreux pénitenciers canadiens étaient inadéquats sur le plan de la gestion de la population carcérale. Elle a recommandé la fermeture des établissements les plus anciens et les moins efficaces, et le Service correctionnel du Canada en a choisi 20 qui devaient être fermés au fur et à mesure que d'autres seraient construits.

En 2009, année où le gouvernement a lancé à fond de train son programme de lutte contre la criminalité, le Service correctionnel du Canada a obtenu l'approbation d'une dépense de trois quarts de milliard de dollars pour accroître la capacité des prisons existantes et un accord de principe pour construire cinq pénitenciers, au coût de près de 1 milliard de dollars, en attendant l'élaboration d'un plan à long terme. Il n'y avait pas encore de plan à long terme, c'est important de le souligner. Ensuite, en 2012, au lieu d'entreprendre la construction des établissements nécessaires, le gouvernement a annoncé la fermeture de trois pénitenciers et déclaré qu'aucun autre ne serait construit. L'année suivante, le vérificateur général a constaté que, des 20 établissements qui devaient, au départ, être mis hors service, comme on dit, huit étaient plutôt agrandis.

(1410)

Le vérificateur général a constaté que les agrandissements n'étaient pas fondés sur des critères comme l'âge et l'état des installations, les pressions qui s'exercent sur la capacité existante et les effets à long terme des décisions. Bien souvent, on a décidé d'agrandir telle ou telle prison, d'après ce que je crois comprendre, simplement parce qu'il y avait des terrains disponibles aux alentours. Il arrivait même que ce soit le seul critère pris en compte.

Ce n'est pas une façon de diriger un réseau de prisons. Ce n'est même pas comme cela qu'on gère une fourrière. Si le problème n'était pas si grave, ce pourrait être le scénario d'un film des Trois Stooges.

Le leader aurait-il l'obligeance de nous dire qui est responsable et ce qu'on fait pour améliorer la gestion de ces dossiers?

[Français]

L'honorable Claude Carignan (leader du gouvernement) : Sénatrice, comme vous le savez, nous sommes plutôt de l'opinion que nous devons garder les criminels derrière les barreaux, et nous faisons réaliser des économies aux contribuables. L'augmentation du nombre de prisonniers, que l'opposition a soulevée au cours des dernières années, ne s'est jamais concrétisée.

Comme le sait l'honorable sénatrice, nous ouvrirons 2 700 cellules qui seront plus sécuritaires pour les agents correctionnels de première ligne. Ce sont les faits, sénatrice Fraser. Nous gardons les criminels dangereux et violents derrière les barreaux. La croissance de la population carcérale a été modeste, beaucoup moins grande qu'anticipée et, malgré tout, nous allons ouvrir 2 700 nouvelles cellules.

[Traduction]

La sénatrice Fraser : Ce sont les services correctionnels qui ont prédit au départ que la population carcérale augmenterait plus qu'elle ne l'a fait. Il reste que les agrandissements ont été faits sans qu'on se demande s'ils étaient nécessaires ni si les établissements en cause se prêtaient à un agrandissement. Il reste que bien des établissements carcéraux du Canada, même après le programme d'agrandissement, continueront d'accueillir plus de détenus que leur capacité ne le permet. C'est dire que, officiellement, il y aura surpeuplement.

Tâchant de se dépêtrer dans ce gâchis, le SCC a déplacé des détenus d'un bout à l'autre du pays pour les faire passer d'établissements surpeuplés vers d'autres qui le sont moins, et cela coûte cher aux contribuables. En 2010-2011, le service a déplacé 529 détenus au coût de 1,5 million de dollars. Au cours des neuf premiers mois de 2013, il en a transféré presque le double, soit 908, et cela lui a coûté deux fois plus cher qu'au cours de l'exercice précédent. Le transfèrement de ces 908 détenus a coûté 3,4 millions de dollars.

Je le répète : qui tient les commandes? Que fait-on pour améliorer le cadre administratif à l'intérieur duquel se prennent les décisions?

[Français]

Le sénateur Carignan : Je réitère ma réponse, sénatrice, selon laquelle nous allons ouvrir 2 700 cellules qui seront plus sécuritaires pour les agents correctionnels de première ligne. Nous allons continuer d'incarcérer les criminels, ce qui va permettre de faire réaliser des économies à l'ensemble des contribuables. Vous avez sûrement noté la diminution du taux de criminalité au Canada, ce qui démontre que, lorsqu'on met les criminels derrière les barreaux, ils ne peuvent plus commettre de crimes dans la société.

[Traduction]

La sénatrice Fraser : Monsieur le leader, personne ne parle de laisser des meurtriers sanguinaires en liberté dans les rues. Il s'agit d'affronter les vraies conséquences des orientations choisies par le gouvernement du Canada.

L'une des conséquences de cette décision, et j'ai déjà soulevé la question au Sénat, c'est l'augmentation phénoménale du nombre de prisonniers qui doivent partager une cellule. Ce n'est pas moi qui le dis, ni même l'enquêteur correctionnel, mais le vérificateur général du Canada, qui n'a pas la réputation d'être une mauviette. Il dénonce avec une inquiétude évidente la double occupation des cellules et même des cellules d'isolement, qui ne sont même pas acceptables pour un seul occupant et le sont encore moins pour deux. Des cellules de cinq mètres carrés, voire moins, sont occupées par deux détenus. À ceux d'entre nous qui ne sont pas à l'aise avec le système métrique, cela correspond à moins de 50 pieds carrés pour deux personnes qui ne seraient pas là si elles n'étaient pas des criminels, ce qui veut dire qu'un certain nombre d'entre elles ne sont pas psychologiquement très stables ou ont parfois des tendances antisociales.

Ce n'est pas moi, mais le vérificateur général qui fait écho à l'avertissement des services correctionnels : la double occupation des cellules a des conséquences graves, dont un niveau de tension plus élevé, de l'agressivité, de la violence, des préoccupations accrues pour la sûreté et la sécurité non seulement des détenus, mais aussi du personnel, de ces gens à qui nous faisons confiance et que nous payons pour maintenir l'ordre dans les prisons. Cela s'explique. Si j'étais enfermée dans une cellule de 50 pieds carrés pendant la majeure partie de ma vie avec une autre personne, je deviendrais probablement folle furieuse en très peu de temps, et c'est sans doute le cas pour bien des gens.

Quand le gouvernement va-t-il s'apercevoir qu'il doit assumer les conséquences des politiques qu'il a tenu à adopter? Si on veut mettre des gens en prison, qu'on leur donne des conditions de vie telles que, lorsqu'ils seront libérés, ce qui arrive à la plupart d'entre eux, ils ne présenteront pas un risque plus grave pour la sécurité de la société, mais seront plutôt davantage en mesure de réintégrer la société comme des citoyens qui ont une attitude constructive, qui veulent coopérer et apporter leur contribution.

[Français]

Le sénateur Carignan : J'ai cru comprendre qu'il y avait un point d'interrogation après votre commentaire. Donc, comme vous l'avez souligné au sujet des services correctionnels, la croissance de la population carcérale n'a atteint que le quart des prévisions des services correctionnels et est de loin inférieure aux prévisions de l'opposition. La double occupation est une pratique tout à fait normale et est utilisée dans de nombreux pays de l'Ouest.

Comme vous le savez, nous ne croyons pas que les criminels condamnés aient droit à un logement privé. Quant à votre commentaire sur la santé mentale dans les prisons, notre gouvernement croit que les criminels dangereux doivent être incarcérés, mais que les prisons ne sont pas l'endroit idéal pour traiter les maladies mentales graves. C'est pourquoi le ministre Blaney a annoncé le plan d'action sur la santé mentale pour le traitement des délinquants sous responsabilité fédérale, qui s'appuie sur cinq piliers visant à faire en sorte que le système correctionnel puisse corriger le comportement criminel. Les cinq piliers de la stratégie sont les suivants : premièrement, l'évaluation en temps opportun; deuxièmement, la gestion efficace; troisièmement, les interventions judicieuses; quatrièmement, la formation continue; et finalement, la gouvernance et la surveillance rigoureuse.

Le plan d'action s'appuie sur des mesures visant à améliorer l'accès aux traitements en matière de santé mentale et la formation des agents correctionnels dans les prisons. Nous avons également accéléré le dépistage en santé mentale, créé une stratégie en santé mentale pour les prisonniers, élargi le counselling en santé mentale et amélioré la formation du personnel.

Je pense que tous les outils sont mis en œuvre, de concert avec une gestion rigoureuse des prisons, pour atteindre les objectifs de la gestion des systèmes pénitenciers, mais aussi pour faire en sorte que les criminels condamnés demeurent derrière les barreaux. Vous dites que votre position n'est pas de faire libérer les criminels. Non, c'est vrai. Votre position est plutôt de ne pas les envoyer en prison.

[Traduction]

L'agriculture et l'agroalimentaire

Le financement des expositions—La commercialisation des produits

L'honorable Terry M. Mercer : Honorables sénateurs, le ministère de l'Agriculture prévoit dans son budget près d'un quart de million de dollars pour un kiosque au Salon international de l'agroalimentaire, une grande exposition de produits agroalimentaires qui a lieu à Paris en octobre prochain. D'après le ministère de l'Agriculture, il y aura 6 000 exposants de 106 pays, et 140 000 acheteurs du monde entier.

Je comprends que nous devons commercialiser les produits de l'agriculture canadienne à l'étranger. C'est une bonne idée. Mais le leader pourrait-il nous dire comment notre délégation utilisera cet argent?

[Français]

(1420)

L'honorable Claude Carignan (leader du gouvernement) : Les questions qui viennent de l'autre côté sont parfois curieuses. L'autre jour, une question de la collègue du sénateur Mercer mentionnait qu'on n'en faisait pas assez pour promouvoir le commerce international. Elle citait notamment l'agriculture et ses craintes par rapport à l'accord de libre-échange avec l'Union européenne.

Aujourd'hui, son collègue d'en arrière nous reproche d'organiser des salons internationaux pour promouvoir le commerce international et l'agriculture et d'y participer. Décidément, il y a un manque de coordination de l'autre côté.

[Traduction]

Le sénateur Mercer : Il n'y a pas de coordination de ce côté-ci, car nous sommes tous des sénateurs indépendants et nous pouvons poser toutes les questions que nous voulons. C'est l'avantage de siéger de ce côté-ci. Vous en profiterez lorsque vous serez à notre place.

Honorables sénateurs, je lis que le budget de cette participation au salon prévoit 1 600 verres de vin et de bière gratuits, 2 500 verres de jus et de boissons gazeuses et 1 500 tasses de café. Tout cela sera servi dans un salon à l'exposition. J'ai l'impression que ce sera toute une fête.

Le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il nous dire si c'est là une façon utile de dépenser l'argent des contribuables?

[Français]

Le sénateur Carignan : Sénateur, comme vous le savez, notre gouvernement s'assure que chaque dollar est dépensé là où il rapporte le plus aux Canadiens. J'ose espérer, sénateur Mercer, que vous ne critiquez pas le fait que nous faisons la promotion de l'agriculture sur la scène internationale.

[Traduction]

Le sénateur Mercer : Je ne critique certainement pas l'objectif qui consiste à commercialiser dans le monde les produits de l'agriculture canadienne. Nous dépensons un quart de million de dollars pour une conférence à Paris.

La question que je vais finir par poser est la suivante : qui d'autre devrait assumer une partie de ces dépenses?

Que servira-t-on? Il y a de la bière sur la liste. Ce sera de la bière de la Nouvelle-Écosse? Je l'espère. On sert des hors-d'œuvre. Des pommes de terre de l'Île-du-Prince-Édouard? Y a-t-il de la viande d'orignal de Terre-Neuve? Des bleuets et des canneberges du Nouveau-Brunswick? Des fromages du Québec? Des vins de l'Ontario, ce serait bien; peut-être du porc du Manitoba; des produits à base de légumineuses de la Saskatchewan; du bœuf de l'Alberta; peut-être des jus SunRype de la Colombie-Britannique?

Va-t-on servir des produits canadiens, puisqu'on dépense un quart de million de l'argent des contribuables canadiens?

[Français]

Le sénateur Carignan : Je vous remercie pour votre question, sénateur Mercer. Cela me permet de souligner le fait que j'ai une bouteille de vin dans mon cellier qui provient de la Nouvelle-Écosse. Je vous invite donc à Saint-Eustache pendant l'été. On pourra l'ouvrir et la déguster ensemble.

[Traduction]

Le sénateur Mercer : Vous l'avez entendu : tout le monde est invité. Nous cherchions justement un endroit où réunir notre caucus cet été. Cette réunion se tiendra à la résidence privée du leader du gouvernement, à Saint-Eustache. Les membres de notre caucus n'iront qu'à un seul endroit cet été : à Saint-Eustache, où le leader du gouvernement leur servira à boire.

Honorables sénateurs, je sais fort bien que la commercialisation de nos produits agricoles est importante, mais, en même temps, il faut aussi faire la promotion de certaines autres choses. Lorsque le nouvel accord avec l'Union européenne entrera en vigueur, nous devrons acheminer nos produits là-bas. Nous devons aussi promouvoir l'idée d'inciter des résidants de l'Union européenne à venir au Canada.

Des groupes comme l'Autorité portuaire d'Halifax et la Commission canadienne du tourisme ont-ils été invités à participer au salon pour qu'ils puissent eux aussi faire connaître ce qu'ils font?

[Français]

Le sénateur Carignan : Par votre question, vous me permettez de mettre en évidence l'important accord économique et commercial qui a été conclu avec l'Union européenne le 18 octobre 2013, entre le premier ministre Harper et le président Barroso. Ceux-ci ont annoncé que le Canada et l'Union européenne avaient conclu une entente de principe, un accord commercial qui aura des retombées économiques de plusieurs centaines de millions de dollars au Canada et qui permettra aux entreprises canadiennes d'avoir accès à un demi-milliard de nouveaux clients, ce qui inclura, évidemment, les entreprises du milieu de l'agriculture.

Des voix : Bravo!

[Traduction]

Le sénateur Mercer : Je tiens de nouveau à remercier le leader du gouvernement d'avoir invité notre caucus à se réunir chez lui cet été et à avoir accès à sa grande cave à vin.

Comme le gouvernement conservateur tient beaucoup à ce que les coûts soient partagés et recouvrés dans le cas de nombreux services, les membres de la délégation canadienne partageront-ils les coûts de ce voyage destiné à commercialiser leurs produits au salon de Paris?

[Français]

Le sénateur Carignan : Sénateur, comme vous le savez, on veut s'assurer de faire la promotion des produits canadiens d'une manière adéquate, et on fera tout notre possible pour assurer une digne représentation du Canada tout en respectant les contribuables canadiens.

Le patrimoine canadien

La neutralité du réseau

L'honorable Marie-P. Charette-Poulin : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et elle provient d'un Canadien de Toronto.

[Traduction]

Monsieur le leader, ma question provient d'un membre du public, M. Edwin Mok, de Toronto. Voici la question qu'il nous a envoyée :

Le Parlement européen a récemment adopté ce qui est présenté comme un solide projet de loi sur la neutralité du réseau, ou d'Internet. Alors que cette question revêt une grande importance pour les communications et les échanges commerciaux en cette ère d'Internet, le gouvernement actuel ne semble pas adopter de position, pour ou contre, à cet égard. Le gouvernement américain examine actuellement de près la question de la neutralité d'Internet; quand les Canadiens peuvent-ils s'attendre à ce que leur gouvernement adopte à son tour une position proactive à cet égard et, le cas échéant, quelle serait celle-ci?

[Français]

L'honorable Claude Carignan (leader du gouvernement) : Je vous remercie pour cette question. Je transmettrai les préoccupations de ce Canadien de Toronto au ministre responsable du dossier.

[Traduction]

La sénatrice Charette-Poulin : J'imagine que nous nous trouvons tous dans la même situation, monsieur le leader, parce que je dois admettre que ma connaissance de la question de la neutralité du réseau est très limitée. Si vous dites que vous allez vous en remettre au ministre, j'en déduis que notre connaissance à tous du dossier est limitée. J'ai effectué quelques recherches et je vais vous faire part du fruit de celles-ci.

La neutralité du réseau est le principe selon lequel les fournisseurs de service Internet et les gouvernements devraient traiter également toutes les données sur Internet, sans faire de discrimination, notamment au chapitre de la facturation, à l'égard des utilisateurs, du contenu, du site, de la plateforme, de l'application, du genre d'équipement ou du mode de communication.

L'expression, qui a été inventée en 2003 par Tim Wu, professeur en droit des médias à l'Université Columbia, se veut une extension du concept ancien du transporteur public. Les partisans de la neutralité du réseau considèrent généralement celle-ci comme un important volet d'un Internet ouvert, où les politiques comme celles relatives à l'égalité de traitement des données et aux normes du Web visible permettent aux internautes de communiquer facilement et de faire des affaires entre eux sans ingérence de la part d'une tierce partie.

« Internet fermé » renvoie à la situation contraire, où des sociétés établies ou des gouvernements favorisent certains usages. Un Internet fermé peut, par exemple, restreindre l'accès aux normes Web nécessaires, dégrader artificiellement la qualité de certains services ou bloquer explicitement un certain contenu.

Voilà pour votre gouverne, monsieur le leader.

[Français]

Le sénateur Carignan : Je réitère le fait que je transmettrai la question au ministre responsable du dossier.

CBC/Radio-Canada

L'honorable Céline Hervieux-Payette : Monsieur le leader du gouvernement n'est pas sans savoir qu'il y a des problèmes budgétaires à CBC/Radio-Canada. Même nos adversaires, c'est-à-dire Pierre Karl Péladeau, qui n'est pas nécessairement un grand fédéraliste, le pensent. Et tout récemment, Gabriel Nadeau-Dubois, qui était candidat pour le Parti Québécois, a écrit ce qui suit :

Il est irresponsable de sabrer ainsi dans la société d'État sans avoir procédé avec l'ensemble de la population à une réflexion en profondeur sur son financement et son organisation.

(1430)

Je suis confuse face au programme du Parti Québécois, qui veut nous sortir du Canada, mais quand je vois que deux personnes qui appuient l'indépendance du Québec veulent sauver une institution nationale canadienne, j'ai de l'espoir.

Je peux comprendre que, de temps à autre, vous éprouviez des frustrations envers certains reportages. Je peux vous dire que nous en avons eues également par le passé. On ne s'attend pas à ce que les journalistes...

[Traduction]

Le sénateur Tkachuk : Nous croyons à la liberté d'expression, dans notre parti.

[Français]

La sénatrice Hervieux-Payette : Excusez-moi. Est-ce que je peux parler?

Je crois qu'à partir de maintenant, les Canadiens français veulent avoir une couverture nationale, une façon de se comprendre à travers le pays.

Je demande donc au leader du gouvernement si, dans le contexte actuel et compte tenu des coupes répétées à Radio-Canada, il ne serait pas temps de mener une consultation nationale pour savoir si les Canadiens qui fournissent, sur le plan du financement, cinq fois moins que la plupart des pays de l'OCDE voudraient être consultés sur le montant qu'ils sont prêts à accorder à une télévision et à une radio nationales.

L'honorable Claude Carignan (leader du gouvernement) : Merci, sénatrice, pour votre question. Vous avez fait référence à Gabriel Nadeau-Dubois, mais vous vouliez peut-être faire référence à Léo Bureau-Blouin, qui était un député du Parti Québécois. À ma connaissance, M. Nadeau-Dubois ne s'est jamais présenté pour le Parti Québécois.

De toute manière, quand on entend Pierre Karl Péladeau défendre Radio-Canada, c'est une voix surprenante. Mais, comme le sait la sénatrice Hervieux-Payette, notre gouvernement n'a rien à voir avec les décisions annoncées par Radio-Canada; c'est une société d'État indépendante, responsable de ses décisions opérationnelles. Selon son président, M. Hubert Lacroix, c'est le déclin des téléspectateurs dans certains groupes démographiques et la baisse des revenus publicitaires qui constituent un défi pour la société.

Radio-Canada a suffisamment d'argent pour remplir son mandat en vertu de la Loi sur la radiodiffusion, et c'est à elle d'offrir aux Canadiens, en anglais et en français, une programmation qu'ils ont envie de regarder.

Je vous inviterais à suivre les travaux du Comité sénatorial permanent des transports et des communications, présidé par votre collègue, le sénateur Dawson, qui fait actuellement une étude sur CBC/Radio-Canada.

Recours au Règlement

L'honorable Joan Fraser (leader adjointe de l'opposition) : Merci, monsieur le Président. Tout à l'heure, pendant son échange fort intéressant avec le sénateur Mercer, le leader du gouvernement m'a mentionnée. Il a indiqué que j'aurais posé des questions sur l'agriculture et les échanges avec l'Europe. Il s'est corrigé par la suite, mais je ne suis pas sûre que la correction soit très claire.

J'ai tenu pour acquis qu'il avait été tellement impressionné par ma propre série de questions qu'il n'a pas pu m'oublier. Mais l'important, c'est que les questions sur l'agriculture et l'Europe ont été posées par ma collègue, la sénatrice Hervieux-Payette; ses questions étaient d'ailleurs excellentes. Je voulais simplement m'assurer que les débats indiqueraient clairement que ces questions étaient les siennes, et non les miennes.

L'honorable Claude Carignan (leader du gouvernement) : C'était effectivement le cas. Les réponses étaient également très bonnes.


[Traduction]

ORDRE DU JOUR

La Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Housakos, appuyée par l'honorable sénatrice Fortin-Duplessis, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-4, Loi modifiant la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques et une autre loi en conséquence.

L'honorable George J. Furey : Honorables sénateurs, j'aimerais aujourd'hui dire quelques mots à propos du projet de loi S-4, la Loi sur la protection des renseignements personnels numériques. Je serai bref.

Comme vous le savez, chers collègues, ce projet de loi a ceci de particulier qu'il a été élaboré au Sénat. Il n'a encore fait l'objet d'aucun examen.

Cette mesure vise à modifier la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, entrée en vigueur en 2000.

Selon certains commentaires diffusés dans les médias, le projet de loi S-4 viserait avant tout à offrir l'immunité aux fournisseurs de services Internet et à d'autres organismes tels que les banques, afin qu'ils puissent recueillir des données personnelles et les communiquer volontairement à la police sans avoir à exiger de consentement.

Le ministre a déclaré que le projet de loi S-4 ne comprenait aucun élément ne figurant pas déjà dans la loi initiale. Cette affirmation est en grande partie exacte. J'aimerais toutefois attirer votre attention sur plusieurs éléments de cette mesure qui pourraient, en fait, accroître l'immunité accordée en cas de divulgation de renseignements au-delà de ce que prévoit la loi initiale.

Par ailleurs, les éloges au sujet du projet de loi S-4 portent sur les nouvelles sanctions à l'endroit des organisations qui portent atteinte aux mesures de sécurité que les entreprises sont tenues de mettre en place pour protéger les données des citoyens. Cela signifie que, si votre banque ou votre fournisseur de services Internet permet accidentellement à des pirates de mettre la main sur vos données, le commissaire à la protection de la vie privée peut lui imposer une amende pour mesures de protection inadéquates. Cela semble certainement un ajout législatif utile.

J'attire votre attention, chers collègues, au paragraphe 10.1(6) du projet de loi S-4, qui oblige l'organisation à aviser le plus tôt possible l'individu concerné lorsqu'il y a atteinte aux mesures de sécurité. C'est ainsi que ce doit être.

Avant le projet de loi S-4, cela était régi par la common law, qui oblige l'entreprise à informer immédiatement la victime, à défaut de quoi elle s'expose à une rupture de contrat et à des poursuites pour négligence. Il est donc vrai qu'il existait des mesures de protection pour les victimes avant le projet de loi S-4. Nous devons donc nous demander si le projet de loi S-4 améliore les choses pour l'innocente victime dont les données sont piratées, dont la sécurité financière est compromise, et nous assurer qu'il ne les aggrave pas.

J'attire l'attention des sénateurs sur le paragraphe 10.1(6) du projet de loi :

L'avis est donné le plus tôt possible après que l'organisation a conclu qu'il y a eu atteinte. Cependant, si une institution gouvernementale — ou une subdivision d'une telle institution — demande un délai à l'organisation pour mener une enquête en matière criminelle relative à l'atteinte aux mesures de sécurité, l'avis n'est donné qu'une fois que l'institution ou la subdivision l'autorise à le faire.

Ce qu'il faudra examiner lors de l'étude en comité, c'est le fait que, avant le projet de loi S-4, la common law demandait aux fournisseurs de services Internet et aux banques d'informer sur-le-champ les personnes dont les données avaient été piratées. Une banque pourrait différer l'avis, mais, à mon humble avis, elle risquerait alors d'être tenue responsable de toute perte subie au cours de ce délai.

Toutefois, avec le projet de loi S-4, il semble que la banque ou l'organisation n'assume plus aucune responsabilité pour les pertes subies par des particuliers pendant le délai qu'elle met à les informer de la menace à leur sécurité financière. Il n'appartiendra plus à la banque de déterminer le moment où les intéressés doivent être informés de la perte de leur données. Il semble que cette responsabilité incombera désormais à la police.

Avant le projet de loi S-4, notre sécurité financière relevait de notre banque. Nous étions protégés contre tout manquement de la banque par toutes les règles de la common law relatives aux contrats et à la négligence. Nous étions protégés en particulier par l'exigence de notification immédiate. Ce changement nécessitera une analyse approfondie à l'étape de l'étude en comité.

De plus, sénateurs, il y a une disposition du projet de loi S-4 que nous devrons examiner de près au comité. J'attire votre attention sur l'article 5 du projet de loi, qui modifie l'article 6.1 de la loi. Cette disposition vise le consentement des enfants, qui doit être écrit de façon à être compris par les enfants.

Considérons pendant quelques instants le monde d'avant le projet de loi S-4. Dans ce monde, les enfants n'avaient jamais à consentir à quoi que ce soit. Tant la common law que la législation provinciale interdisent d'obtenir un consentement d'une personne qui n'a pas atteint l'âge du consentement dans une province donnée. C'est ce que prévoient la common law, le droit civil et le droit législatif avant le projet de loi S-4.

(1440)

La situation qui prévaudra après l'adoption du projet de loi S-4 est très incertaine. Cette mesure législative fédérale prendra-t-elle le pas sur la common law et sur toutes les lois provinciales relatives à l'âge du consentement? À mon avis, elle n'est pas rédigée en termes assez forts pour atteindre ce but particulier, même si cela semble être l'objet du projet de loi. La note explicative du ministère qui accompagne l'article 5 dit clairement que cette disposition porte sur le consentement des enfants.

On peut donc se demander si cette disposition vise à avantager les entreprises ou à protéger le public. Elle pourrait bien avoir pour effet d'assurer l'immunité aux sociétés et de les protéger contre leurs clients. À ce titre, le projet de loi S-4 pourrait bien affaiblir la common law et supprimer la responsabilité qui incomberait autrement aux organisations.

Pour conclure, collègues, je voudrais répéter que le projet de loi comprend des points forts qui augmenteront la sécurité du public, mais il présente aussi certains aspects qui nécessiteront une bonne analyse critique à l'étape de l'étude en comité.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi pour la troisième fois? Y a-t-il une motion?

L'honorable Leo Housakos : Je propose de renvoyer le projet de loi au Comité sénatorial permanent des transports et des communications.

L'honorable Serge Joyal : Le sénateur Furey vient de soulever de multiples questions liées à des aspects juridiques. Je suis surpris qu'on demande le renvoi du projet de loi au Comité des transports plutôt qu'au Comité des affaires juridiques et constitutionnelles.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, voyons si nous pouvons régler ce point. J'aimerais avoir l'avis de la leader adjointe du gouvernement à ce sujet.

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) : J'ai discuté de cette question avec la leader adjointe d'en face. Dans le passé, le Comité des transports s'est occupé de projets de loi de ce genre. Nous avons eu une discussion ce matin et avons convenu de renvoyer cette mesure au Comité des transports. Tant le président que le vice-président du comité ont été consultés.

Le sénateur Joyal : Monsieur le Président, avec la permission de la Chambre, je voudrais exprimer mon opposition et demander que le projet de loi soit renvoyé au Comité des affaires juridiques et constitutionnelles plutôt qu'au Comité des transports, parce qu'il aborde des questions liées à la Charte canadienne des droits et libertés.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, la Chambre a reçu l'avis du leader du gouvernement, qui nous a dit avoir eu des discussions avec sa collègue, la leader de l'opposition, et avoir officiellement convenu avec elle — car nous sommes actuellement saisis d'une motion officielle — de renvoyer le projet de loi au Comité sénatorial permanent des transports et des communications.

Lorsque je mettrai la motion aux voix, les sénateurs pourront, en votant, manifester leur plaisir ou leur déplaisir.

Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : L'honorable sénateur Housakos, avec l'appui de l'honorable sénatrice Fortin-Duplessis, propose que le projet de loi soit renvoyé au Comité sénatorial permanent des transports et des communications.

Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président : À mon avis, les oui l'emportent.

(Sur la motion du sénateur Housakos, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des transports et des communications, avec dissidence.)

La Loi sur les grains du Canada
La Loi sur les transports au Canada

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat

L'honorable Donald Neil Plett propose que le projet de loi C-30, Loi modifiant la Loi sur les grains du Canada et la Loi sur les transports au Canada et prévoyant d'autres mesures, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour vous présenter le projet de loi C-30, Loi sur le transport ferroviaire équitable pour les producteurs de grain. Je suis très fier de parrainer au Sénat cette mesure législative qui répond clairement aux besoins immédiats des agriculteurs, des expéditeurs de grain et de toute notre économie.

Chers collègues, permettez-moi de vous donner un aperçu de la situation ou du problème que ce projet de loi vise à régler et, plus particulièrement, de l'objectif du projet de loi, de l'urgence de la situation et de la nécessité d'une coopération des deux côtés de la Chambre pour qu'il soit adopté rapidement.

Je suis très fier du leadership manifesté par notre gouvernement dans le domaine agricole et de son soutien constant des agriculteurs et des producteurs de tout le pays.

Les sénateurs se souviendront que j'avais également parrainé le projet de loi C-18, Loi sur le libre choix des producteurs de grains en matière de commercialisation, le projet de loi sur la Commission canadienne du blé, il y a environ trois ans. Pendant la première année du libre choix, les producteurs de blé et d'orge de l'Ouest ont gagné jusqu'à 20 p. 100 de plus qu'en 2011.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Plett : L'année dernière, les agriculteurs ont semé plus de 2 millions d'acres de plus de blé, comme résultat direct de la liberté de choix, et ont eu un rendement d'un tiers supérieur en boisseaux. En fait, une enquête de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante a révélé qu'en grande majorité, c'est-à-dire à plus de 80 p. 100, les agriculteurs membres croient que la liberté de choix a eu des effets positifs sur leurs opérations.

Aujourd'hui, nous voulons encore une fois apporter notre appui à l'industrie céréalière canadienne, une industrie de classe mondiale qui est un important moteur de la croissance économique et de la création d'emplois au pays.

Comme les sénateurs le savent, le secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire est l'un des plus importants de notre économie. Il exporte pour plus de 100 milliards de dollars de produits et fournit un emploi sur huit au Canada. Nos produits alimentaires sont dégustés dans 193 pays, et la plupart des secteurs qui exportent le plus font partie de l'industrie céréalière, dont les exportations totalisent plus de 20 milliards de dollars. Voilà pourquoi ce projet de loi est si essentiel.

L'année dernière, l'Ouest canadien a connu une production record de 76 millions de tonnes métriques de grains, soit 50 p. 100 de plus qu'une récolte moyenne. La liberté dont les agriculteurs jouissent présentement pour la mise en marché, grâce au projet de loi C-18, a contribué substantiellement à cette récolte record, puisque les agriculteurs ont ensemencé 2 millions d'acres de plus pour y récolter du blé. Cette production record a toutefois causé un engorgement du système de manutention et de transport des grains.

Déjà à l'automne, les chemins de fer transportaient des quantités de grains au-dessus de la moyenne, à destination des ports. Malgré cela, en novembre, les chemins de fer avaient accumulé un arriéré de 20 000 chargements. À partir de décembre, l'hiver rigoureux a réduit considérablement le rendement des transporteurs. Dans le froid extrême, la longueur et la vitesse des trains doivent être réduites pour des raisons de sécurité. Par conséquent, le 9 mars, seulement 77 chargements avaient été livrés, soit 68 000 de moins que les commandes reçues. Pour mettre ce nombre en perspective, précisons que les grains qui attendent actuellement dans les silos valent entre 14,5 et 20 milliards de dollars, selon les estimations.

La saison des semences est sur le point de commencer et les silos sont pleins à craquer. Le système de manutention et de transport des grains déborde de partout, et les conséquences de l'arriéré sont graves. Les agriculteurs et les expéditeurs risquent de subir une diminution de leurs rentrées de fonds et des pertes de revenus. Les prix de vente des grains pourraient être nettement plus bas que les prix de l'année dernière et que les cours mondiaux actuels. Les coûts d'entreposage pourraient être plus élevés pour les agriculteurs et les sociétés céréalières. Des sommes importantes devront en outre être déboursées sous forme d'indemnités de surestaries et de compensations pour rupture de contrat. Enfin, les récoltes de ceux qui ont eu recours à des mesures temporaires d'entreposage des grains risquent de se détériorer. Selon les estimations, 46 millions de tonnes métriques de grains sont entreposées dans les exploitations agricoles. Il y a aussi le risque que la réputation dont le Canada jouit à l'échelle internationale en tant que fournisseur fiable de grains soit compromise.

(1450)

À la lumière de la situation, les ministres Ritz et Raitt ont rencontré plusieurs représentants des chemins de fer et de l'industrie céréalière en vue de trouver une solution. En attendant que la loi soit rédigée, les ministres ont pris un décret qui est entré en vigueur le 7 mars 2014. Le décret fixe la quantité minimale de grain que chaque société ferroviaire est tenue de transporter. Cette quantité, qui a été révisée à la hausse, est de 1 million de tonnes métriques par semaine, répartie entre toutes les compagnies ferroviaires, soit le double du volume actuellement transporté.

Le décret exige également des compagnies ferroviaires qu'elles informent la ministre des Transports des cargaisons transportées chaque semaine, en plus de créer des obligations juridiques sur ces compagnies qui pourraient donner lieu à une amende pour non-conformité pouvant aller jusqu'à 100 000 $ par jour. Bien que nous ayons battu des records l'année dernière, on s'attend à ce que les rendements supérieurs deviennent la norme.

La production de grain dans l'Ouest augmente d'environ 3 p. 100 par année depuis 30 ans maintenant. On s'attend à ce que les nouvelles technologies et l'amélioration des pratiques agronomiques accélèrent cette croissance encore davantage. De surcroît, étant donné la croissance de la demande dans le monde, nous devons nous assurer de pouvoir expédier notre grain plus rapidement et compter sur un service ferroviaire fiable et prévisible.

C'est pour cette raison que le gouvernement a présenté la Loi sur le transport ferroviaire équitable pour les producteurs de grain, qui contribuera davantage à l'efficacité et la fiabilité de la chaîne d'approvisionnement, ce qui stimulera la compétitivité des entreprises canadiennes de tous les secteurs.

Dans cette mesure, le gouvernement propose plusieurs solutions à court et moyen termes visant à améliorer tout de suite l'efficacité du système logistique, en prévision de prochaines récoltes.

Premièrement, le projet de loi modifiera la Loi sur les transports au Canada de manière à augmenter le volume minimum de grain que le Canadien National et le Canadien Pacifique sont tenus de transporter, selon la recommandation conjointe de la ministre des Transports et du ministre de l'Agriculture. La pénalité en cas de non-conformité pourrait s'élever à 100 000 $ par jour. En plus, afin de réduire l'arriéré actuel, le CN et le CP seront tenus de transporter au moins 500 000 tonnes de grain chaque semaine, et ce, du 7 avril 2014 au 3 août 2014.

Il incombera à l'Office des transports du Canada de recommander une quantité minimum à la ministre des Transports pendant l'été et le début de l'automne, à mesure que le rendement des récoltes se précisera. Cette recommandation tiendra compte des renseignements recueillis auprès des manutentionnaires du grain, notamment le CN et le CP, au cours de la nouvelle consultation annuelle de l'office.

Il s'agit d'une modification importante. Elle accroîtra la fiabilité et la prévisibilité du système de transport du grain du Canada. Elle améliorera la capacité des expéditeurs de grain de planifier et de respecter leurs obligations contractuelles envers les producteurs et les consommateurs. Enfin, elle rétablira la réputation internationale du Canada en tant qu'expéditeur fiable de grain de qualité.

Deuxièmement, la mesure législative conférera des pouvoirs réglementaires à l'Office des transports du Canada lui permettant d'accroître les distances d'interconnexion. L'interconnexion désigne les activités qu'effectue une compagnie de chemin de fer qui prend en charge les wagons d'un expéditeur et qui transfère ces wagons à un autre transporteur qui effectue le transport de ligne.

La distance de l'interconnexion passera de 30 à 160 kilomètres pour toutes les denrées en Alberta, en Saskatchewan et au Manitoba. La modification prévoit que 150 élévateurs à grain primaire situés dans les Prairies auront accès à plus d'une compagnie de chemin de fer, notamment à celles des États-Unis.

À l'heure actuelle, en raison de la distance de l'interconnexion de 30 kilomètres, seuls 14 élévateurs à grain primaire bénéficient de cette option. L'accessibilité aux élévateurs à grain s'en trouvera plus que décuplée. Accroître l'accès des agriculteurs et des exploitants d'élévateurs à grain aux lignes des compagnies de chemin de fer favorisera la concurrence entre celles-ci et offrira aux expéditeurs un éventail plus large d'options en matière de transport.

OmniTRAX, la compagnie de chemin de fer qui dessert le port de Churchill, dans ma province, a indiqué que le projet de loi pourrait contribuer à étendre son service au sud, à proximité des régions du nord-est de la province où l'on cultive le grain. Il s'agit d'excellentes nouvelles pour les producteurs de grain du Manitoba.

Troisièmement, nous établissons un pouvoir de réglementation pour rendre beaucoup plus précis les accords sur les niveaux de service, comme l'ont demandé tous les expéditeurs. À l'heure actuelle, les expéditeurs ont le droit de négocier une entente de service avec les compagnies de chemin de fer, mais la nouvelle modification conférerait à l'Office des transports du Canada le pouvoir de réglementer les éléments prescrits dans les accords sur les niveaux de service établis par un arbitre, dont les détails seraient déterminés lors d'un processus de consultation. Les expéditeurs seront ainsi davantage en mesure de planifier leurs opérations et d’en tirer le meilleur parti. De plus, la fiabilité du service et le rendement global de la chaîne d’approvisionnement seront améliorés.

Quatrièmement, le projet de loi vise à modifier la Loi sur les grains du Canada en vue de réglementer les dispositions obligatoires des contrats relatifs aux céréales. L'amendement proposé laissera également la Commission canadienne des grains réglementer le dédommagement que la société céréalière devra verser à l'agriculteur lorsqu'elle ne respecte pas les dates de livraison précisées dans le contrat.

La modification incitera les expéditeurs à respecter les contrats conclus avec des producteurs sous peine de devoir leur verser un dédommagement. Il ne sera toutefois pas nécessaire de faire appel à cette disposition lorsque l'expéditeur et le producteur prévoiront volontairement à leur contrat des exigences convenables en matière de rendement et d'indemnisation.

Honorables sénateurs, le gouvernement se porte une fois de plus à la défense de l'industrie agricole canadienne. Le projet de loi propose des solutions axées sur le marché pour aider les agriculteurs à commercialiser leur récolte tout en assoyant la réputation du Canada à titre d'exportateur de calibre mondial. C'est ce qui explique que l'industrie agricole appuie le projet de loi C-30 et ce qu'il tente d'accomplir.

Lors des audiences du Comité de l'agriculture de l'autre endroit sur le projet de loi C-30, des expéditeurs de toutes sortes de marchandises, très favorables à la mesure législative, ont demandé au Parlement d'aller encore plus loin en donnant davantage de mordant aux accords sur les niveaux de service de manière à obliger les sociétés ferroviaires à mieux s'acquitter de leurs responsabilités.

En réaction, le comité a proposé un amendement pour permettre aux expéditeurs qui concluent des accords sur les niveaux de service d'être directement indemnisés pour toute dépense encourue lorsqu'une société ferroviaire manque à ses obligations de service.

Le comité a adopté l'amendement à l'unanimité. Le début de l'amendement se lit comme suit :

[...] ordonner à la compagnie d'indemniser toute personne lésée des dépenses qu'elle a supportées en conséquence du non-respect des obligations de la compagnie [...]

Chers collègues, cette disposition va en fait plus loin que les sanctions réciproques que beaucoup d'intervenants de l'industrie ont demandées, car elle s'applique à toute plainte formulée à l'égard du niveau de service, aux termes de la Loi sur les transports au Canada.

Même si aucun accord sur les niveaux de service n'a été conclu, on pourrait quand même obliger la compagnie de chemin de fer à couvrir les pertes. Par exemple, si un expéditeur de grain a conclu un accord sur les niveaux de service avec une compagnie de chemin de fer, que cette dernière ne le respecte pas et que, en conséquence, l'expéditeur doit payer des frais de surestarie, la compagnie de chemin de fer serait obligée de l'indemniser.

Voici ce qu'on peut lire dans la deuxième partie de l'amendement :

[...] ou, si celle-ci est partie à un contrat confidentiel avec un expéditeur qui prévoit qu'elle versera, en cas de manquement à ses obligations, une indemnité pour les dépenses que l'expéditeur a supportées en conséquence du non-respect des obligations de la compagnie, lui ordonner de verser à l'expéditeur cette indemnité.

(1500)

Cette deuxième partie est tout aussi importante puisqu'elle permet l'indemnisation dans le cadre d'un contrat commercial, ce qui encouragera les expéditeurs et les compagnies de chemin de fer à négocier pour fixer leurs pénalités respectives s'ils le souhaitent. Cet amendement a été bien accueilli par la majorité des parties concernées.

L'industrie a aussi dit clairement qu'il fallait situer ces mesures dans le contexte plus vaste de l'examen de la Loi sur les transports au Canada. La ministre a confirmé qu'elle avait demandé que cet examen soit accéléré. Il commencera donc cet été. Cet examen accéléré permettra au gouvernement, qui aura consulté les parties intéressées, d'envisager d'autres modifications visant à améliorer l'efficience et la fiabilité de la chaîne d'approvisionnement du Canada à long terme.

Honorables sénateurs, le décret pris par les ministres Ritz et Raitt expirera le 1er juin, à 23 h 59. C'est dans quelques semaines seulement. Comme ce projet de loi augmente le volume minimal que les transporteurs de grain seront tenus de transporter, il est capital que nous travaillions dans un esprit de collaboration et d'efficience pour adopter cette importante mesure législative.

Chers collègues, renvoyons ce projet de loi immédiatement au comité pour nous assurer qu'il sera étudié en bonne et due forme dans les délais impartis. Nous devons tenir compte des échéanciers à respecter. Quant à moi, je suis prêt à siéger durant la semaine de pause s'il le faut pour qu'il n'y ait pas d'interruption de service pour les agriculteurs et l'industrie céréalière. Rien n'empêche de le renvoyer au comité aujourd'hui. Je suis donc déçu de voir que, selon toute apparence, il ne le sera pas.

Par souci de collaboration et compte tenu de l'urgence de la situation, tous les partis à l'autre endroit ont fait cause commune pour pouvoir adopter rapidement cet important projet de loi. J'invite tous les sénateurs à ne pas jouer de jeux politiques aux dépens des agriculteurs. Nous devons coopérer pour que ce projet de loi soit renvoyé au comité au plus tard à la prochaine séance du Sénat pour qu'il puisse être étudié à fond, que le rapport puisse être présenté au Sénat et que le projet de loi puisse être adopté dans le délai voulu.

Honorables sénateurs, les retards accumulés dans le système de transport sont un coup dur pour notre industrie céréalière. La livraison des céréales en temps voulu est essentielle pour cette industrie. Les agriculteurs ont fait leur part; il faut maintenant que le reste de la chaîne d'approvisionnement fasse la sienne et achemine efficacement leurs produits aux marchés mondiaux qui les attendent.

Comme Kevin Hursh, chroniqueur et agriculteur de la Saskatchewan, l'a dit récemment :

Le gouvernement fédéral a l'occasion unique d'améliorer considérablement l'efficacité du transport des céréales.

Honorables sénateurs, continuons de soutenir inconditionnellement les agriculteurs canadiens en renvoyant immédiatement cette mesure législative essentielle au comité.

Des voix : Bravo!

Son Honneur le Président intérimaire : Je vois deux sénatrices se lever. Est-ce pour poser une question ou pour poursuivre le débat?

L'honorable Joan Fraser (leader adjointe de l'opposition) : Pour faire une brève observation et demander ensuite l'ajournement.

L'honorable Elaine McCoy : Le sénateur accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Plett : Certainement.

La sénatrice McCoy : Je suis tout à fait favorable à ce que ce projet de loi soit renvoyé le plus rapidement possible au comité, mais il y a une chose qui pique ma curiosité. Il me semble que vous avez été un grand défenseur de l'instauration d'un régime de libre marché au Canada dans le secteur de la vente du blé, à tel point que vous avez réussi, il y a un an ou deux, à supprimer les limites prévues par la loi qu'imposait la Commission canadienne du blé. Est-ce exact?

Le sénateur Plett : Vous me demandez s'il est vrai que j'ai défendu cette idée?

La sénatrice McCoy : Oui.

Le sénateur Plett : Oui, absolument. J'ai été un ardent défenseur du libre marché et je le suis toujours; on juge évidemment l'arbre à ses fruits. C'était une excellente mesure législative, et les producteurs de blé de l'Ouest canadien remercient tous les sénateurs de l'avoir appuyée. Ils se sentent vraiment libres maintenant. Comme je l'ai dit, l'an dernier, les agriculteurs ont ensemencé au-delà de 2 millions d'acres de blé de plus qu'avant l'adoption du projet de loi sur la Commission canadienne du blé.

La sénatrice McCoy : Voilà une belle démonstration de vivacité et de bonne volonté caractéristique des provinces de l'Ouest. On en a la preuve encore une fois : retirez le gouvernement des affaires et les affaires prospèrent.

Nous sommes donc d'accord sur ce principe. C'est pourquoi le projet de loi que vous présentez me laisse un peu perplexe. Le CN et le CP sont des sociétés privées. Pourquoi le gouvernement s'ingère-t-il dans leurs affaires?

La sénatrice Cordy : Bonne question.

Le sénateur Plett : Il est vrai que le CN et le CP sont des entreprises privées, mais, malheureusement, nous avons créé un monopole avec ces deux sociétés. Leurs concurrents n'ont pas beaucoup d'occasions d'offrir leurs services pour le transport du grain, car il n'existe pas d'autres chemins de fer. C'est là une des raisons, sénateurs, pour lesquelles nous avons étendu les limites de l'interconnexion de 30 à 160 kilomètres, ce qui permet aux exploitants des courtes lignes ferroviaires d'intervenir et d'aider enfin au déplacement des wagons.

Selon moi, ce projet de loi contribue en fait à la libre entreprise et au libre marché pour les agriculteurs qui ensemencent leurs champs, produisent la nourriture qu'il nous faut et font prospérer l'économie, mais qui voient leurs efforts gênés par deux sociétés formant un monopole. Nous devons faire notre travail pour que les agriculteurs fassent le leur.

La sénatrice McCoy : Nous discuterons de ce sujet au comité, sans aucun doute. J'ose espérer que l'honorable sénateur plaidera davantage pour mettre fin au monopole que pour laisser le gouvernement s'ingérer dans les affaires des sociétés privées.

Le sénateur Plett : Je ne suis pas certain que vous ayez posé une question, sénatrice, mais s'il s'agissait d'un commentaire en faveur de la libre entreprise et d'une ingérence moindre du gouvernement, je suis tout à fait du même avis que vous. Adoptons ce projet de loi rapidement, de sorte que le gouvernement puisse se retirer du dossier et cesser d'y penser, et laisse les compagnies ferroviaires faire ce qu'elles ont à faire, c'est-à-dire transporter le grain, l'acheminer jusqu'au marché et jusqu'aux ports, afin que nous l'exportions.

La sénatrice Fraser : Honorables sénateurs, je tiens à préciser que l'opposition ne fait pas d'obstruction à ce projet de loi, qui est arrivé mardi.

Notre porte-parole, qui était à l'extérieur de la ville mardi, a accepté mercredi, c'est-à-dire hier, d'être le porte-parole pour ce projet de loi. En ce moment même, des fonctionnaires lui donnent une séance d'information et il a promis d'intervenir au sujet du projet de loi mardi. Je ne prends pas cela pour de l'obstruction. Par conséquent, je propose l'ajournement du débat au nom du sénateur Mercer.

Son Honneur le Président intérimaire : Une motion a été proposée. Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(Sur la motion de la sénatrice Fraser, au nom du sénateur Mercer, le débat est ajourné.)

Fixation de délai—Préavis de motion

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) : Honorables sénateurs, je voudrais informer le Sénat que j'ai été incapable d'en venir à une entente avec la leader adjointe de l'opposition pour fixer un délai à l'étude du projet de loi C-30. Par conséquent, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, conformément à l'article 7-2 du Règlement, pas plus de six heures de délibérations additionnelles soient attribuées à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-30, Loi modifiant la Loi sur les grains du Canada et la Loi sur les transports au Canada et prévoyant d'autres mesures.

(1510)

Projet de loi concernant la Première Nation Qalipu Mi'kmaq

Deuxième lecture—Ajournement du débat

L'honorable John D. Wallace propose que le projet de loi C-25, Loi concernant le Décret constituant la bande appelée Première Nation Qalipu Mi'kmaq, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je suis ravi d'intervenir aujourd'hui sur le projet de loi C-25, Loi concernant la Première Nation Qalipu Mi'kmaq.

Comme mes collègues le savent peut-être déjà, il est essentiel d'adopter ce projet de loi pour assurer l'intégrité de la procédure d'inscription de la bande de la Première Nation Qualipu Mi'kmaq. Autrement dit, la mesure législative proposée garantit que seules les personnes ayant un droit légitime de réclamer leur appartenance pourront devenir membres de la Première Nation.

Pour comprendre pourquoi il est important que le gouvernement fasse adopter ce projet de loi, il est impératif que mes collègues connaissent l'histoire unique de cette Première Nation. Le problème remonte à l'entrée de Terre-Neuve dans la Confédération, en 1949. À l'époque, la province et le Canada ne se sont pas entendus sur l'opportunité d'appliquer le régime de la Loi sur les Indiens ni sur la façon ou le moment de l'appliquer.

En 1989, la Fédération des Indiens de Terre-Neuve a intenté une poursuite contre le Canada en vue d'obtenir la reconnaissance aux termes de la Loi sur les Indiens. La fédération et le gouvernement du Canada ont réglé cette poursuite par la conclusion de l'Accord de 2008 pour la reconnaissance de la bande de la Première Nation Qalipu Mi'kmaq.

L'accord de 2008 a permis à la Première Nation Qualipu Mi'kmaq d'être reconnue comme bande sans assise territoriale en vertu de la Loi sur les Indiens. Il prévoyait également une procédure d'inscription permettant aux personnes qui respectaient des critères très précis pour être admises dans la Première Nation Qualipu Mi'kmaq de devenir membres de la bande et d'être inscrites à titre d'Indiens sous le régime de la Loi sur les Indiens. En étant inscrites, elles auraient accès aux mêmes programmes et aux mêmes avantages que les membres de toute autre bande sans assise territoriale ou les Indiens inscrits vivant à l'extérieur d'une réserve.

Honorables sénateurs, vous êtes peut-être au courant, mais je tiens à vous rappeler que le mot « Indien » est encore défini dans la Loi sur les Indiens.

L'accord de 2008 prévoyait une procédure d'inscription en deux parties, répartie sur une période de plus de quatre ans, afin de donner suffisamment de temps à tous les candidats pour demander à devenir membres de la Première Nation. La Fédération des Indiens de Terre-Neuve et le gouvernement voulaient que les membres fondateurs de la Première Nation nouvellement reconnue soit désignés principalement parmi les personnes vivant à l'intérieur ou à proximité des 67 communautés micmaques de Terre-Neuve qui sont nommées dans l'accord. Bien que les personnes vivant à l'extérieur de ces communautés soient également admissibles, les parties voulaient que les non-résidants aient maintenu des liens culturels étroits avec une communauté micmaque de Terre-Neuve.

L'accord de 2008 établit quatre critères, négociés et approuvés par les deux parties, concernant l'admissibilité des membres fondateurs. Ainsi, pour être admissible, le candidat doit être d'ascendance indienne du Canada, être un membre ou un descendant d'un membre d'une communauté micmaque datant d'avant la Confédération, s'identifier comme membre du groupe des Indiens micmacs de Terre-Neuve, et être accepté par le groupe des Indiens micmacs de Terre-Neuve sur le fondement de solides liens culturels clairement établis.

Honorables sénateurs, il importe de comprendre que, lorsque l'accord de 2008 a été conclu, les parties estimaient entre 8 700 et 12 000 le nombre de personnes admissibles à devenir des membres fondateurs de la Première Nation. Cette estimation se fondait sur les données du recensement de 2006, et sur des études menées par la Fédération des Indiens de Terre-Neuve.

Lorsque la première partie de la procédure d'inscription a pris fin, en novembre 2009 — un an seulement après la conclusion de l'accord —, un total de 23 877 personnes avaient été désignées comme membres fondateurs. Ce nombre dépassait les prévisions initiales, mais il n'était pas loin des données du recensement de 2006, selon lequel 23 450 résidants de Terre-Neuve-et-Labrador s'identifiaient alors comme autochtones.

Toutefois, une deuxième période de 36 mois a été prévue afin que les personnes admissibles aient amplement le temps de présenter une demande pour être ajoutées à la liste des membres fondateurs. Cette deuxième période a pris fin le 30 novembre 2012.

Honorables sénateurs, c'est pendant cette période que les problèmes ont commencé à se manifester. Un nombre inattendu et, comme l'a dit le chef de la Première Nation Qualipu Mi'kmaq, déraisonnable de demandes ont été présentées pendant la deuxième étape. En effet, environ 75 000 demandes supplémentaires d'inscription à la liste des membres fondateurs ont été présentées, faisant passer du coup le nombre total de demandes d'inscription à plus de 101 000, ce qui représente 11 p. 100 de tous les Indiens inscrits au Canada.

En plus, la majorité de ces demandes — approximativement 46 000 — ont été reçues au cours des trois derniers mois avant la date butoir. La plupart de ces demandes ont été envoyées par des gens vivant à l'extérieur de Terre-Neuve.

Honorables sénateurs, je pense que vous pouvez comprendre pourquoi le chef de la Première Nation et la Fédération des Indiens de Terre-Neuve ont exprimé des inquiétudes quant à la crédibilité de la procédure d'inscription et à l'intégrité de la nouvelle Première Nation Qualipu Mi'kmaq.

Comme le gouvernement, ils voulaient s'assurer que les objectifs de l'accord initial conclu en 2008 seraient respectés. Les deux parties voulaient avoir la certitude que les personnes acceptées comme membres fondateurs répondaient aux conditions d'inscription de l'accord et que la procédure serait juste et équitable pour toutes les personnes concernées.

C'est pourquoi la Première Nation et le gouvernement ont travaillé ensemble pour négocier un accord supplémentaire, qui a été annoncé en juillet 2013. Cet accord supplémentaire est le fruit de vastes discussions et négociations entre le gouvernement du Canada et la Fédération des Indiens de Terre-Neuve, et il répond aux préoccupations soulevées lors de la deuxième période de la procédure d'inscription.

L'accord supplémentaire fournissait davantage de précisions au sujet des exigences liées aux membres fondateurs et du processus d'inscription. Cet accord confirmait que les critères établis dans l'accord initial de 2008 demeuraient les mêmes. Cependant, il fournissait plus de précisions au sujet du type de renseignements que les demandeurs doivent présenter pour prouver qu'ils répondent aux critères établis en ce qui concerne les membres fondateurs. Par exemple, l'accord supplémentaire précisait que les demandeurs doivent prouver qu'ils ont été acceptés par le groupe des Indiens micmacs de Terre-Neuve en participant activement à la collectivité ou à la culture micmaque avant la création officielle de la Première Nation Qualipu Mi'kmaq. Ces renseignements s'appliquaient tout particulièrement aux demandeurs qui habitent à l'extérieur des communautés micmaques de l'île de Terre-Neuve.

L'accord supplémentaire prolonge également les échéances établies pour l'examen de l'ensemble des demandes, qui ont été beaucoup plus nombreuses que ce qu'on avait prévu. Il fallait plus de temps pour veiller à ce que toutes les demandes qui n'avaient pas encore été traitées puissent être étudiées avec soin et pour s'assurer de traiter de façon juste et équitable toutes les personnes cherchant à se faire reconnaître comme membres fondateurs. Seule cette approche raisonnable permet de garantir l'intégrité du processus d'inscription et de veiller à ce que les règles d'admissibilité à l'inscription comme membre soient appliquées de façon juste et à ce que tous les demandeurs soient traités équitablement.

Cette approche équilibrée et impartiale répond également aux attentes des Canadiens. Les personnes qui ont le statut d'Indien profitent d'avantages sociaux et économiques importants, et par conséquent, nous ne pouvons pas prendre ce dossier à la légère.

Le gouvernement a été très clair : aucun changement ne sera apporté au statut d'Indien des membres actuels de la Première Nation Qualipu Mi'kmaq pendant le processus d'inscription. Tant que l'examen des demandes se poursuit, les membres de la bande qui sont en ce moment des Indiens inscrits en vertu de la Loi sur les Indiens conserveront leur statut d'Indien.

Cela dit, il est tout à fait possible qu'à la fin du processus d'examen, certaines de ces personnes puissent perdre leur statut, étant donné que celui-ci aura été réévalué. Si on juge que ces personnes ne peuvent pas légitimement prétendre être membres de la Première Nation, leur statut de membre sera révoqué. Même si ces personnes ne seront pas tenues de rembourser les prestations qu'elles ont reçues auparavant, elles n'auront plus accès aux programmes et aux services offerts aux Indiens inscrits.

(1520)

C'est essentiel pour protéger l'intégrité de la bande micmaque Qualipu et de l'inscription au registre des Indiens en général. S'il s'avère que des personnes n'ont pas de droits légitimes en matière d'inscription, il importe que ces personnes cessent de recevoir les avantages réservés aux Indiens inscrits.

C'est à cause de cette possibilité que le projet de loi C-25 est nécessaire. Il permettra au gouverneur en conseil de modifier l'annexe du décret constituant la bande en fonction de la liste définitive et approuvée des membres fondateurs de la Première Nation Qualipu Mi'kmaq. Autrement dit, le gouverneur en conseil pourra ajouter des noms à l'annexe et en retirer. En ce moment, on ne sait pas au juste s'il a le droit de retirer des noms. En vertu de l'alinéa 2(1)c) et du paragraphe 73(3) de la Loi sur les Indiens, le gouverneur en conseil peut déclarer qu'un groupe d'Indiens constitue une bande aux fins de la loi, mais rien ne lui donne expressément le pouvoir de modifier un décret constituant une bande.

Honorables sénateurs, il est absolument essentiel, pour l'intégrité et le succès futurs de la bande, d'assurer la légitimité des personnes inscrites comme Indiens. La certitude est nécessaire pour que l'accord original de 2008 et l'accord supplémentaire de 2013 puissent être pleinement mis en œuvre. Cette certitude ne peut être obtenue que si le gouverneur en conseil a le pouvoir voulu pour apporter les corrections nécessaires au décret constituant la bande.

Le projet de loi proposé vise un but vraiment très simple : comme je l'ai dit au début, il fera en sorte que seules les personnes véritablement admissibles comme membres fondateurs de la Première Nation Qalipu Mi'kmaq reçoivent ce privilège. Surtout, il permettra à la Première Nation Qualipu Mi'kmaq d'établir solidement et de maintenir les assises de son développement et de sa culture, ce qui assurera un meilleur avenir à la génération présente et à celles qui viendront. Voilà des décennies que la population micmaque de l'île de Terre-Neuve le réclame.

Il est temps de régler cette question afin que les membres fondateurs légitimes de la Première Nation Qalipu Mi'kmaq puissent aller de l'avant. J'encourage vivement les sénateurs à appuyer le projet de loi C-25, de sorte que les objectifs des membres de la Première Nation Qualipu Mi'kmaq puissent se concrétiser et entraîner des résultats positifs.

(Sur la motion de la sénatrice Fraser, le débat est ajourné.)

Agriculture et forêts

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat et pendant l'ajournement du Sénat

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement), conformément au préavis donné le 7 mai 2014, propose :

Que, pour le mois de mai 2014,

1. nonobstant l'article 12-18(1) du Règlement, le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts soit autorisé à se réunir même si le Sénat siège aux fins de son étude du projet de loi C-30, Loi modifiant la Loi sur les grains du Canada et la Loi sur les transports au Canada et prévoyant d'autres mesures, si ce projet de loi est renvoyé au comité;

2. conformément à l'article 12-18(2)b)i) du Règlement, le comité soit également autorisé à se réunir aux fins de cette étude, même si le Sénat est alors ajourné pour plus d'une semaine.

— Honorables sénateurs, je serai brève, puisque la motion parle d'elle-même.

Nous avons pu entendre le parrain expliquer les mérites de ce projet de loi extrêmement important, qui répond à un besoin que nous savons pressant. Afin que le Comité de l'agriculture puisse disposer du temps nécessaire à l'étude de cette mesure, nous demandons qu'il soit autorisé à siéger à d'autres moments que lors des rencontres habituelles et même pendant la semaine de relâche.

Je remercie à l'avance les membres du comité pour le travail qu'ils accompliront.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

Des voix : Non.

Une voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée avec dissidence.)

L'ajournement

Adoption de la motion

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement), conformément au préavis donné le 7 mai 2014, propose :

Que, lorsque le Sénat s'ajournera après l'adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu'au mardi 13 mai 2014, à 14 heures.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

Projet de loi sur la Journée Lincoln Alexander

Troisième lecture

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Meredith, appuyée par l'honorable sénatrice Raine, tendant à la troisième lecture du projet de loi S-213, Loi instituant la Journée Lincoln Alexander, tel que modifié.

L'honorable Art Eggleton : Honorables sénateurs, je prends la parole sur l'objet du projet de loi, l'honorable Lincoln Alexander, et le dévouement avec lequel il a servi la population pendant de nombreuses années.

Les sénateurs Meredith et LeBreton ont déjà parlé longuement de ses diverses réalisations et des grandes étapes de sa carrière, particulièrement de la période qu'il a passée sur la Colline du Parlement. Je le connais cependant sous une autre dimension. En effet, comme il a été lieutenant-gouverneur de l'Ontario pendant la plupart des années où j'ai occupé le poste de maire de Toronto, nous nous sommes rencontrés à plusieurs reprises et avons assisté ensemble à de nombreuses activités et réunions.

Chaque fois, je constatais que Lincoln Alexander était beaucoup aimé en tant que personne et qu'il jouissait d'un grand respect et d'une excellente réputation à titre de lieutenant-gouverneur. Lorsque nous étions en public, il était « Votre Honneur », mais lors des discussions privées, il était tout simplement « Linc ».

Comme l'ont signalé les orateurs qui m'ont précédé, il s'était démarqué de nombreuses façons : premier lieutenant-gouverneur — ou représentant vice-royal — noir du Canada, premier député noir et premier membre du Cabinet fédéral noir. Ce sont bien sûr d'importantes distinctions, qui étaient assorties de grandes attentes et de grandes responsabilités, mais ce qui est encore plus important, c'est qu'il a su en tirer quelque chose d'exceptionnel. Au fil des ans, je l'ai vu réussir à rassembler les gens.

L'un de ses grands objectifs pendant son mandat de lieutenant-gouverneur a été son engagement à l'égard d'un Canada diversifié et de l'unification des gens pour qu'ils vivent en paix et en harmonie dans un pays diversifié et multiculturel, ce qui peut se révéler particulièrement important. Il a été extrêmement utile à ce chapitre. En cas de défi, de difficulté ou de conflit, on pouvait toujours faire appel à lui pour régler la situation, et je crois qu'il y parvenait de manière exceptionnelle. Il le faisait également avec grande dignité, avec grâce et toujours avec une bonne dose d'humour. Je suis très reconnaissant des services qu'il a rendus au pays.

Le gouvernement de l'Ontario a décidé de désigner une journée pour Lincoln Alexander. Le projet de loi ferait coïncider une journée nationale en son honneur. Dans sa citation, le gouvernement de l'Ontario dit :

Tout au long de sa vie, il a fait preuve de dévouement envers les autres, de détermination et d'humilité. En luttant constamment en faveur de l'égalité des droits pour toutes les races dans notre société, et ce sans malveillance aucune, il a changé les mentalités et a largement contribué à l'esprit d'inclusivité et de tolérance qui règne au Canada de nos jours.

(1530)

Tout ce que je peux ajouter à cela, c'est : « Bravo Linc! »

Son Honneur le Président intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

Projet de loi sur les restrictions applicables aux promoteurs du crédit d'impôt pour personnes handicapées

Troisième lecture—Rejet de la motion d'amendement

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénatrice Buth, appuyée par l'honorable sénateur Doyle, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-462, Loi limitant les frais imposés par les promoteurs du crédit d'impôt pour personnes handicapées et apportant des modifications corrélatives à la Loi sur la Cour canadienne de l'impôt;

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénatrice Hervieux-Payette, C.P., appuyée par l'honorable sénateur Eggleton, C.P., que le projet de loi C-462 ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit modifié à l'article 2, à la page 2, par substitution, à la ligne 19, de ce qui suit :

« personnes handicapées, à l'exclusion de la personne qui est membre en règle d'une association professionnelle constituée sous le régime d'une loi d'une province et qui est habilitée à y dispenser des soins de santé. »

L'honorable Art Eggleton : J'interviens au sujet du projet de loi pour signaler tout d'abord, comme je l'ai dit à l'étape de la deuxième lecture, que 12,5 millions de Canadiens sont handicapés. En tant que groupe social, les Canadiens handicapés sont confrontés à bien des obstacles et ils sont très marginalisés. J'ai également indiqué qu'ils affichent un taux d'emploi plus faible et que leurs revenus sont souvent bien inférieurs à ceux du reste de la société.

Selon Statistique Canada, parmi ceux qui ont l'âge de travailler, 54 p. 100 sont au chômage ou ne sont pas sur le marché du travail. Presque 50 p. 100 de ceux qui ont un revenu gagnent moins de 15 000 $. C'est pourquoi la majorité des personnes handicapées ne sont pas admissibles au crédit d'impôt qui leur est destiné et sur lequel le projet de loi porte essentiellement. Les gens peuvent demander rétroactivement ce crédit jusqu'à 10 ans plus tard. Dans le projet de loi, il est question de personnes que l'on appelle des « promoteurs » et qui constituent en fait une industrie de consultants dans ce domaine, si je puis m'exprimer ainsi. Cependant, le projet de loi n'aborde pas les vrais besoins. En fait, les personnes handicapées ont besoin d'une aide plus substantielle.

La façon la plus simple d'y arriver, que de nombreux organismes et le Sénat réclament à l'unanimité, consiste à faire du crédit d'impôt pour personnes handicapées un crédit remboursable, afin que les gens qui ont un revenu trop faible pour payer de l’impôt ou qui en paient très peu, mais qui ne bénéficient pas du crédit, bien qu’ils soient pauvres, puissent eux aussi obtenir des sommes leur permettant de mieux répondre à leurs besoins.

Transformer le crédit d'impôt pour personnes handicapées en crédit remboursable serait une bien meilleure mesure que ce projet de loi, qui n'a qu'une portée très limitée. C'est un projet de loi d'initiative parlementaire qui ne nous propose rien d'autre qu'un expédient. Ce n'est pas ce dont les personnes handicapées ont besoin.

Quant aux personnes gravement handicapées, qui ne sont pas 12,5 millions, mais plutôt environ 0,5 million, il faudrait créer un programme semblable au revenu annuel garanti pour les personnes âgées. Ce genre de programme conviendrait très bien aux personnes gravement handicapées. Le Sénat a déjà adopté à l'unanimité une recommandation à cet égard. Les deux mesures ont été recommandées dans le rapport intitulé Pauvreté, logement et itinérance : les trois fronts de la lutte contre l'exclusion, produit il y a quelques années par le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

Puis, nous avons été saisis de ce projet de loi. Selon son parrain, on a d'abord constaté que certains de ces consultants — ils sont appelés « promoteurs » dans le projet de loi — soutiraient jusqu'à 40 p. 100 de la somme totale à laquelle avait droit le demandeur, soit la personne handicapée. Quarante pour cent; c'est incroyable. On a souligné que plusieurs millions de dollars étaient en jeu — de l'argent qui serait beaucoup plus utile aux personnes qui en ont vraiment besoin.

C'est ce qui semble avoir précipité la présentation de ce projet de loi.

Cependant, chose intéressante, lorsque le Comité des finances a étudié cette question, il s'est bien rendu compte que les consultants n'étaient pas diaboliques. Certains d'entre eux semblaient assumer des responsabilités légitimes dans le milieu de la comptabilité ou du droit, ou un mélange des deux, et ils étaient assujettis à certaines restrictions en vertu de leur code de déontologie. On a alors dit : « Eh bien, c'est 30 p. 100. » Même 30 p. 100 semble un chiffre très élevé. Toutefois, si c'est le pourcentage qui sera établi une fois que l'Agence du revenu du Canada aura complété son processus de consultation, je ne suis pas sûr que ce projet de loi aura été très utile. Néanmoins, il faut maintenant passer aux consultations.

Je dois vous dire que j'ai été impressionné par l'exposé des représentants de l'Agence du revenu du Canada devant le comité, ainsi que par leurs réponses aux questions. Je pense qu'ils prennent cette question très au sérieux et qu'ils souhaitent faire quelque chose pour aider les personnes handicapées.

Nous avons présenté des observations sur le projet de loi. C'est la sénatrice Buth qui les a formulées, et je pense qu'elle a fait du bon travail. Le comité recommande notamment d'examiner le formulaire du crédit d'impôt pour personnes handicapées afin de le simplifier et d'envisager la possibilité qu'il puisse être rempli en ligne. Si nous simplifions le formulaire, les personnes handicapées auront moins de mal à le remplir et, ainsi, elles ne seront peut-être pas tentées d'avoir recours à des consultants, dont les services coûtent très cher.

Nous avons également dit que vous devez clarifier le terme « promoteur » — nous doutions tous que ce soit le terme le plus approprié — afin de désigner le plus exactement possible les différents groupes qui remplissent le formulaire du crédit d'impôt pour les personnes handicapées, par exemple les professionnels de la santé, les comptables et les consultants. Les professionnels de la santé, en particulier, se sont offusqués. Nous avons reçu une lettre de l'Association médicale canadienne qui nous informait qu'elle se retire et ne peut plus appuyer l'adoption du projet de loi. L'association trouvait offensant qu'on mette les médecins dans la même catégorie que les promoteurs simplement parce qu'ils prélèvent des frais, fort modestes par ailleurs, pour faire un travail fondamental, à savoir remplir un formulaire.

Je suis du même avis, tout comme la sénatrice Hervieux-Payette, qui a présenté un amendement à cet égard — et j'ai l'intention de l'appuyer. S'il n'est pas adopté, j'espère que cette observation en particulier contribuera à clarifier le terme « promoteur ». Il aurait été nettement préférable que le parrain de ce projet de loi à l'autre endroit n'ait pas utilisé ce terme et ait fait une meilleure distinction dès le départ.

Ensuite, il faut examiner le niveau de service et la promotion du crédit par l'Agence du revenu du Canada, afin de mieux le faire connaître et de faire en sorte qu'il soit plus facile de le demander. Avez-vous déjà essayé de communiquer par téléphone avec l'ARC ou d'utiliser son service au comptoir? La ligne est toujours occupée et, avec les compressions, le service au comptoir a été considérablement réduit. Imaginez la difficulté pour une personne handicapée de communiquer avec l'ARC.

Je crois que les témoins de l'ARC sont sensibles à cette situation et qu'ils veulent être en mesure d'améliorer, dès le départ, les chances des gens qui présentent une demande d'obtenir le service et l'aide dont ils ont besoin. Je crois qu'ils examineront cette problématique de près.

Ensuite, il faudrait discuter avec l'industrie de la possibilité d'élaborer un code de déontologie pour améliorer le service et fixer des normes, notamment pour la publicité.

C'est ce qui permettra de séparer le bon grain de l'ivraie. Certains consultants sont peut-être tout à fait légitimes, mais, tout comme nous l'avons constaté dans le domaine de l'immigration, il y a les vrais consultants et il y a les autres, et certains font de la publicité qui induit les gens en erreur selon certains représentants de l'industrie qui ont comparu devant le Comité des finances.

Enfin, il faut veiller à ce que le paragraphe 3(2) du projet de loi soit interprété comme voulant dire que le remboursement pour le crédit d'impôt est versé au demandeur et non au consultant.

(1540)

Ces observations sont vraiment très utiles. Je remercie la sénatrice Buth et ses collègues du Comité des finances de nous les avoir fait parvenir. Dommage que le projet de loi ne vienne pas davantage en aide aux personnes handicapées.

Son Honneur le Président intérimaire : Reprise du débat.

L'honorable JoAnne L. Buth : J'aimerais parler de la motion sur l'amendement.

Son Honneur le Président intérimaire : Oui, bien sûr.

La sénatrice Buth : J'aimerais faire quelques observations au sujet de la motion tendant à amender le projet de loi. Premièrement, la version actuelle du projet de loi a été adoptée par tous les partis à l'autre endroit. Deuxièmement, le Comité sénatorial permanent des finances nationales nous l'a renvoyé sans proposition d'amendement.

Enfin, et il s'agit du point le plus important, comme le sénateur Eggleton l'a déjà indiqué, le comité a dressé une liste d'observations afin d'orienter les consultations sur les frais maximums avec l'Agence du revenu du Canada avant la tenue des consultations. L'une des observations, comme l'a fait remarquer le sénateur Eggleton, concernait la nécessité de clarifier le mot « promoteur », car le comité a entendu des témoignages selon lesquels certains professionnels de la santé ne voulaient pas faire partie de ce groupe. C'est quelque chose que l'Agence du revenu du Canada pourrait faire.

Pour ces raisons, j'encourage tous les sénateurs à voter contre l'amendement et à adopter le projet de loi C-462 dans sa forme actuelle.

Son Honneur le Président intérimaire : Reprise du débat.

Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

La sénatrice Martin : Le vote!

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion d'amendement?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président intérimaire : Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion d'amendement veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président intérimaire : Que les sénateurs qui sont contre la motion d'amendement veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président intérimaire : Les non l'emportent sans aucun doute.

Des voix : Avec dissidence.

Son Honneur le Président intérimaire : Avec dissidence. La motion d'amendement du projet de loi C-462 est rejetée.

Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer sur la motion principale?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président intérimaire : L'honorable sénatrice Buth, avec l'appui de l'honorable sénateur Doyle, propose que le projet de loi soit lu pour la troisième fois.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président intérimaire : La motion est adoptée, avec dissidence.

(La motion est adoptée avec dissidence et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénatrice Hervieux-Payette, C.P., appuyée par l'honorable sénatrice Fraser, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-206, Loi modifiant le Code criminel (protection des enfants contre la violence éducative ordinaire).

Son Honneur le Président intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

Des voix : Avec dissidence.

Son Honneur le Président intérimaire : Je déclare la motion adoptée, avec dissidence.

(La motion est adoptée avec dissidence et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Hervieux-Payette, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.)

La Loi sur les conflits d'intérêts

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Day, appuyée par l'honorable sénateur Moore, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-207, Loi modifiant la Loi sur les conflits d'intérêts (cadeaux).

L'honorable Linda Frum : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi S-207, Loi modifiant la Loi sur les conflits d'intérêts. Le sénateur Day, parrain du projet de loi, a dit que cette mesure corrigerait ce qu'il appelle une énorme lacune dans la Loi sur les conflits d'intérêts.

À mon humble avis, cette lacune n'existe pas et il n'y a aucun problème à régler. En fait, c'est le gouvernement actuel qui, dans le cadre de la première mesure d'importance qu'il a prise en 2006, a comblé un grand nombre de lacunes en présentant le projet de loi C-2, Loi fédérale sur la responsabilité.

La Loi sur les conflits d'intérêts, que le sénateur Day propose de modifier, fait partie de la Loi fédérale sur la responsabilité. Il convient de souligner que la Loi sur les conflits d'intérêts du Canada est l'une des lois les plus musclées à avoir été adoptées par un Parlement se conformant au système de Westminster. Parmi ses caractéristiques, l'article 67 exigeait que le Parlement réexamine la loi cinq ans après son entrée en vigueur. Un comité de l'autre endroit a terminé cet examen récemment. Le gouvernement présentera une réponse à ce rapport.

Examinons la Loi sur les conflits d'intérêts dans sa forme actuelle. Le paragraphe 11(1) prévoit ce qui suit :

Il est interdit à tout titulaire de charge publique et à tout membre de sa famille d'accepter un cadeau ou autre avantage, y compris celui provenant d'une fiducie, qui pourrait raisonnablement donner à penser qu'il a été donné pour influencer le titulaire dans l'exercice de ses fonctions officielles.

C'est plein de bons sens. Un titulaire de charge publique ne doit accepter aucun cadeau qui pourrait raisonnablement être considéré comme une tentative de l'influencer dans l'exercice de ses fonctions officielles. La loi prévoit toutefois certaines exceptions raisonnables à l'alinéa 11(2)b), et c'est ce qui dérangeait le sénateur Day.

Le sénateur Day : C'est encore le cas.

La sénatrice Frum : C'est ce que j'ai compris.

Voici l'alinéa 2b) :

Le titulaire de charge publique ou un membre de sa famille peut toutefois accepter [...] un cadeau ou autre avantage qui provient d'un parent ou d'un ami.

Les titulaires de charge publique ou les membres de leur famille peuvent donc recevoir des cadeaux d'un parent ou d'un ami.

Le sénateur Day estime que cela pose problème. Il souhaite limiter les circonstances où les titulaires de charge publique et les membres de leur famille peuvent recevoir pareils cadeaux. Plus précisément, il retirait l'exception visant les « amis ».

En outre, les modifications proposées par le sénateur Day feraient en sorte que le « titulaire de charge publique principal » serait tenu de divulguer dans les 30 jours tout cadeau excédant 200 $ reçu d'un ami et de faire une déclaration publique identifiant le cadeau, le donneur et les circonstances dans lesquelles il a été accepté. Examinons les répercussions qu'aurait une telle mesure.

Honorables sénateurs, entre autres choses, les cadeaux de mariage, les cadeaux offerts lors des fêtes organisées avant la naissance d'un enfant, les cadeaux d'anniversaire, les cadeaux offerts lors des célébrations de Hanouka, les cadeaux de Noël, bref les cadeaux ou les séries de cadeaux valant plus de 200 $ offerts par un ami — tous des cadeaux hautement personnels — devraient être divulgués et déclarés.

Honorables sénateurs, y a-t-il la moindre preuve selon laquelle ces changements sont nécessaires? Le sénateur Day se demande ce qu'est un ami et comment nous pouvons définir cette notion. Il en vient à la conclusion que, puisqu'il n'en existe aucune définition, il faudrait donc l'enlever de la loi. Il en irait de même pour l'expression « ami personnel intime » que l'on trouvait dans d'anciens codes d'éthique : puisqu'elle n'est pas définie, elle n'est pas acceptable.

Cela me semble déraisonnable. Il peut être difficile de définir ce qu'on entend par « ami », mais je pense que nous savons tous ce qu'est un ami et qui sont nos amis. Je crois que nous comprenons tous la raison d'être de cette exception.

Les modifications proposées par le sénateur Day ne sont pas nécessaires et elles imposeraient un fardeau lourd et déraisonnable aux titulaires de charge publique telle que cette notion est définie dans la loi.

Les modifications proposées imposeraient également un fardeau déraisonnable au Bureau du commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique.

(1550)

La suppression du mot « ami » des exceptions prévues dans les dispositions de la loi élargirait considérablement les obligations relatives à la divulgation et à la déclaration des cadeaux.

Tous les cadeaux d'une valeur supérieure à 200 $ — ou une série de cadeaux dont la valeur totalise 200 $ ou plus — que des amis ont offerts à un titulaire d'une charge publique ou à un membre de sa famille devraient être divulgués au commissaire et déclarés publiquement. Les titulaires d'une charge publique devraient obligatoirement déclarer la nature des cadeaux, leur valeur, l'identité des personnes qui les ont offerts et le contexte dans lequel ils ont été donnés.

Oui, les titulaires d'une charge publique doivent rendre des comptes aux Canadiens et ils doivent absolument éviter les conflits d'intérêts, mais ils devraient aussi pouvoir s'attendre à ce que certains aspects de leur vie privée soient relativement protégés, et ils ne devraient pas avoir à tenir un registre des cadeaux que leur offrent leurs amis.

Au lieu d'approuver le projet de loi du sénateur Day, je propose d'attendre la réponse du gouvernement à l'examen quinquennal de la Loi sur les conflits d'intérêts, dont j'ai parlé tout à l'heure.

Soulignons que, après son examen approfondi, le comité n'a pas recommandé de supprimer l'exception qui concerne les amis, ce que propose le sénateur Day. Même la commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique, Mary Dawson, n'a pas recommandé de modifier l'exception relative aux amis. Elle a expressément dit qu'il n'était pas nécessaire que le mot « ami » soit défini dans la loi. Elle a indiqué au comité qu'elle avait déjà interprété le sens de ce mot. Selon elle, ce mot :

[...] comprend les personnes qui ont un lien étroit d'amitié, un sentiment d'affection ou une affinité spéciale avec le titulaire de charge publique concerné, mais [...] ne comprend pas les membres d'un vaste cercle social, les partenaires d'affaires ou les collègues, à moins qu'un tel lien n'ait été établi.

Le mot « ami » lui-même a d'ailleurs fait l'objet de questions et d'observations au comité. Il y a même eu une courte discussion sur sa définition. Cependant, aucune définition n'en a été proposée, et personne n'a exprimé de préoccupation à l'idée que les règles ne s'appliquent pas aux cadeaux reçus d'un ami. De plus, le Commissariat aux conflits d'intérêts et à l'éthique formule déjà des directives claires à l'intention des titulaires de charge publique à propos des cadeaux qu'ils devraient ou non accepter.

Soulignons par ailleurs que le gouvernement a également précisé les règles d'éthique applicables à tous les titulaires de charge publique, dont les ministres et les ministres d'État, dans Pour un gouvernement responsable : Guide du ministre et du ministre d'État, qui fournit des directives en ce qui concerne les activités politiques.

Grâce au projet de loi C-2 du gouvernement Harper, les titulaires de charge publique sont déjà tenus de se conformer à des normes strictes. Pour toutes ces raisons, honorables sénateurs, j'estime que rien ne justifie l'adoption du projet de loi S-207.

L'honorable Joseph A. Day : La sénatrice accepterait-elle de répondre à une question?

La sénatrice Frum : Certainement.

Le sénateur Day : Avant tout, permettez-moi de vous féliciter de votre discours, où vous avez bien su résumer mes préoccupations. Vous les avez parfaitement cernées. Je n'ai donc que quelques questions.

Premièrement, je déduis de vos commentaires que vous avez eu l'occasion de passer en revue les débats qui, à l'époque, ont entouré le projet de loi C-2, la Loi fédérale sur la responsabilité, la première mesure législative qu'a proposée le gouvernement actuel lorsqu'il a accédé au pouvoir. Or, saviez-vous que deux anciens commissaires à l'éthique, en l'occurrence Harold Wilson et Bernard Shapiro, qui ont tous deux témoigné au comité relativement au projet de loi C-2, avaient exprimé des réserves à propos du mot « ami »?

La sénatrice Frum : Non, sénateur. Je l'ignorais. Cependant, comme je l'ai dit, l'actuelle commissaire à l'éthique, elle, n'a exprimé aucune réserve de cet ordre relativement à ce projet de loi-ci.

Le sénateur Day : J'aimerais revenir sur vos commentaires à propos de la définition que Mary Dawson, l'actuelle commissaire à l'éthique, fait du mot « ami ». Selon vous, le gouvernement est-il satisfait de cette définition?

La sénatrice Frum : Comme je l'ai mentionné, nous attendons toujours la réponse du gouvernement au rapport et aux conclusions de l'examen. Il faudra voir. Selon moi, la définition me semble tout à fait sensée.

Le sénateur Day : Merci. Dernière question : accepteriez-vous un amendement — qui pourrait être qualifié d'amical, puisque je l'accepterais probablement moi-même, si nous avions une définition du mot « ami »? Accepteriez-vous cet amendement et donneriez-vous votre appui au projet de loi ainsi amendé?

La sénatrice Frum : D'après ce que je comprends, le projet de loi sera renvoyé au Comité du Règlement. Je fais partie de ce comité depuis peu. Nous allons certainement discuter ensemble d'amendements possibles et nous procéderons à partir de là.

Le sénateur Day : Merci. Je suis impatient de collaborer avec vous lorsque le comité sera saisi du projet de loi.

Son Honneur le Président intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président intérimaire : L'honorable sénateur Day, avec l'appui de l'honorable sénateur Moore, propose que le projet de loi soit lu pour la deuxième fois.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Carignan : Avec dissidence.

(La motion est adoptée avec dissidence et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Day, le projet de loi est renvoyé au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement.)

La Loi sur les Indiens

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Ngo, appuyée par l'honorable sénatrice Bellemare, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-428, Loi modifiant la Loi sur les Indiens (publication des règlements administratifs) et prévoyant le remplacement de cette loi.

L'honorable Joan Fraser (leader adjointe de l'opposition) : Honorables sénateurs, l'objet de ce projet de loi revêt un intérêt considérable pour plusieurs d'entre nous, y compris, à mon avis, presque tous les sénateurs de ce côté-ci et probablement presque tous ceux de l'autre côté. Comme vous le savez, la sénatrice Dyck est la porte-parole pour ce projet de loi. À la lumière de ce qui s'est passé récemment en ce qui a trait aux lois qui touchent les Autochtones, je pense que nous sommes tous maintenant beaucoup plus conscients de la nécessité de redoubler nos efforts de recherche et de réflexion pour des projets de loi de cette importance.

Comme vous le savez, la sénatrice Dyck est malheureusement absente en ce moment, mais je demande le consentement de la Chambre pour ajourner, à son nom, le débat sur ce projet de loi pour le reste de son temps de parole.

Son Honneur le Président intérimaire : Le consentement est-il accordé?

Des voix : D'accord.

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(Sur la motion de la sénatrice Fraser, au nom de la sénatrice Dyck, le débat est ajourné.)

(1600)

L'inefficacité des crédits d'impôt non remboursables pour les familles à faible revenu

Interpellation—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénatrice Callbeck, attirant l'attention du Sénat sur l'inefficacité des crédits d'impôt non remboursables pour les familles à faible revenu.

L'honorable Catherine S. Callbeck : Honorables sénateurs, au cours des huit dernières années, le gouvernement conservateur a établi à plusieurs reprises — et en grande pompe — des crédits d'impôt personnel qui sont inutiles aux innombrables Canadiens qui en ont le plus besoin.

On ne peut profiter de ces crédits que si on a un revenu suffisamment élevé pour devoir quelque chose au gouvernement fédéral. Le crédit d'impôt non remboursable n'est utile que si on doit payer des impôts.

Tous les crédits d'impôt instaurés depuis 2006 sont non remboursables. Nous avons eu, entre autres, le crédit d'impôt pour enfants, le crédit d'impôt pour la condition physique des enfants, le crédit d'impôt pour la rénovation domiciliaire et le crédit canadien pour l'emploi.

Ces dernières années, le gouvernement a continué dans la même veine en instituant le crédit d'impôt pour les pompiers volontaires, le crédit d'impôt pour aidants familiaux et le crédit d'impôt pour les activités artistiques des enfants. Dans le dernier budget, il a instauré le crédit d'impôt pour volontaires participant à des activités de recherche et de sauvetage et le crédit d'impôt à l'adoption. Or, les personnes à faible revenu qui ne paient pas d'impôt ne peuvent profiter d'aucun de ces crédits.

Comme je l'ai répété plusieurs fois, ces crédits d'impôt ne me dérangent pas. Je reconnais, en fait, que c'est très bien d'alléger le fardeau fiscal de nombreux Canadiens. Ce que je déplore, c'est que les personnes à faible revenu ne peuvent pas en profiter.

Le fait est que les crédits d'impôt non remboursables n'aident pas ceux qui pourraient s'en servir le plus. En gros, 34 p. 100 des Canadiens gagnent si peu qu'ils ne paient pas d'impôt fédéral. Les familles qui ont besoin d'un vrai répit — celles dont le revenu est le plus faible — sont celles qui ne peuvent pas bénéficier de ces crédits d'impôt.

Dans ma province, l'Île-du-Prince-Édouard, environ 110 000 contribuables produisent une déclaration d'impôt chaque année. De ce nombre, plus de 30 000, soit un tiers environ, ne paient pas d'impôt fédéral. C'est donc dire que près d'un tiers des Prince-Édouardiens ne peuvent pas bénéficier des crédits d'impôt non remboursables.

Examinons de plus près deux de ces crédits.

Le crédit d'impôt pour les pompiers volontaires est offert aux pompiers volontaires qui travaillent au moins 200 heures par année. Ce crédit peut atteindre 450 $. C'est une initiative digne de louanges, bien sûr, mais il n'en demeure pas moins qu'il s'agit d'un crédit non remboursable. Par conséquent, un pompier volontaire qui a un revenu de 20 000 $ par année et une personne à charge ne pourra pas en bénéficier.

Quand le Comité sénatorial des finances a étudié ce crédit, en novembre 2011, j'ai posé des questions à ce sujet aux fonctionnaires du ministère des Finances. D'après leur témoignage, le Canada compte quelque 85 000 pompiers volontaires et on estime qu'environ 30 000 d'entre eux seront admissibles au crédit maximal.

Autrement dit, 55 000 pompiers volontaires, qui risquent régulièrement leur vie, ne peuvent pas profiter pleinement de ce crédit. Dans ma province, environ 20 p. 100 des pompiers n'y sont pas admissibles parce que leur revenu est trop faible. Selon moi, tous les pompiers méritent ce crédit d'impôt. Ils offrent un service extraordinaire et mettent leur vie en péril dans toutes sortes de conditions météorologiques.

Passons à un autre crédit semblable, le crédit d'impôt pour aidants familiaux, destiné aux personnes qui prennent soin d'un membre de leur famille, par exemple un conjoint ou un enfant mineur, atteint d'une incapacité physique ou mentale. Ce crédit, qui peut atteindre 309 $, est non remboursable, lui aussi. Une mère qui a un revenu de 20 000 $ et une personne à charge n'y sera pas admissible.

Je pense qu'une personne qui prend soin d'un membre malade de sa famille ne devrait pas être pénalisée parce qu'elle ne fait pas assez d'argent. Je ne suis pas la seule à le penser. Lorsque ce crédit d'impôt a été annoncé, l'Association canadienne des individus retraités, les Infirmières de l'Ordre de Victoria, la Société canadienne de la sclérose en plaques et d'autres organismes ont aussi demandé que ce crédit d'impôt devienne remboursable.

En fait, un certain nombre de personnes remettent en question l'utilité des crédits d'impôt non remboursables. M. Robin Boadway, professeur au Département d'économique de l'Université Queen's, a témoigné devant le Comité des finances de la Chambre des communes lorsque, en avril 2013, celui-ci a étudié la question de l'inégalité des revenus. Il a recommandé que tous les crédits d'impôt non remboursables deviennent remboursables. Voici ce qu'il a dit :

Il n'y a aucune raison logique justifiant le caractère non remboursable des crédits d'impôt.

Lors d'une réunion du Comité des finances tenue en novembre 2011 sur le projet de loi C-13, l'un des projets de loi d'exécution du budget, j'ai interrogé Ted Menzies, ancien ministre d'État aux Finances, au sujet du crédit d'impôt pour les activités artistiques des enfants. Il a reconnu ce qui suit :

En toute franchise, un grand nombre de personnes à revenu élevé pourront bénéficier du crédit d'impôt pour les activités artistiques des enfants, et ce, probablement davantage que les familles à faible revenu ou que les familles qui ne paient pas d'impôts.

Même le gouvernement est conscient que ses crédits d'impôt non remboursables ne profitent pas à tout le monde. Ils profitent certainement aux personnes à revenu moyen et élevé, mais ce sont les personnes à faible revenu qui en ont le plus besoin. Pourquoi un millionnaire bénéficierait-il d'un crédit d'impôt alors qu'une personne qui a du mal à joindre les deux bouts ne peut pas en profiter?

Un rapport publié par le Caledon Institute à la suite du budget de 2011 est allé encore plus loin en remettant en question l'utilité des crédits d'impôt non remboursables pour les Canadiens à faible revenu. Dans ce rapport, intitulé When is $500 not $500?, on signale que les personnes qui ont le plus besoin de crédits d'impôt ne peuvent pas s'en prévaloir parce qu'elles n'ont pas les moyens de payer en premier lieu les activités qui leur permettraient de les réclamer.

Une des sections du rapport est consacrée au crédit d'impôt pour les activités artistiques des enfants, qui avait été annoncé dans ce budget. On peut y lire ce qui suit :

Cette mesure repose sur une intention louable. Elle reconnaît le rôle que jouent les arts et la culture pour le bien-être des enfants, leur estime de soi, leur développement positif et l'expression de leur identité.

Pourtant, ce sont les enfants provenant de familles à faible revenu — qui ne peuvent pas se prévaloir du crédit d'impôt pour les activités artistiques des enfants — qui bénéficieraient le plus des programmes artistiques, parce qu'ils n'ont généralement pas accès à diverses activités d'enrichissement personnel. Ces familles ne peuvent tout simplement pas se permettre ce qui peut être considéré comme du luxe alors qu'elles se trouvent chaque jour devant le choix déchirant de payer le loyer ou de nourrir les enfants.

Le rapport souligne également que les crédits d'impôt du genre n'influent que très peu sur les décisions des gens — ceux qui en profitent auraient inscrit leurs enfants à ces activités de toute façon.

La plupart des familles qui ont droit au montant maximal des économies d'impôt que permettent de réaliser les crédits d'impôt non remboursables n'en ont pas réellement besoin. Leurs enfants pratiqueraient l'activité que le gouvernement souhaite encourager même si elles ne bénéficiaient pas d'une réduction d'impôt modeste.

Ceux qui profitent de ce crédit d'impôt sont les personnes qui avaient exactement le même comportement avant l'entrée en vigueur de celui-ci. L'institut Caledon n'est pas le seul à considérer que cette forme de crédit d'impôt n'est pas particulièrement efficace pour promouvoir de telles activités chez ceux qui n'y participeraient pas autrement.

(1610)

M. John Spence, de l'Université de l'Alberta, est un spécialiste de la sédentarité et de l'obésité. Il est le coauteur d'un rapport portant sur le crédit d'impôt pour la condition physique des enfants, qui permet à un parent qui inscrit un enfant à un programme d'activité physique admissible, comme le hockey ou le soccer, de réclamer un crédit pouvant atteindre 75 $. M. Spence et ses collègues ont constaté que les crédits d'impôt non remboursables n'aident vraisemblablement pas les familles à faible revenu.

Le rapport intitulé Non-refundable Tax Credits Are an Inequitable Policy Instrument for Promoting Physical Activity Among Canadian Children constate que les crédits d'impôt non remboursables ne favorisent tout simplement pas la participation des familles à faible revenu. Voici ce que dit le rapport :

[...] comme il s'agit d'un crédit non remboursable, les familles à faible revenu, qui n'ont pas nécessairement d'impôt à payer ou de paiement anticipé à se faire rembourser, ne bénéficient aucunement de celui-ci.

Les auteurs vont même plus loin en exprimant leurs préoccupations au sujet de l'activité physique et de la santé des Canadiens. Le rapport signale que les familles canadiennes à faible revenu se situant dans le quartile de revenu inférieur sont deux fois et demie moins susceptibles d'avoir inscrit leur enfant à des programmes d'activité physique organisés. Les enfants canadiens issus de familles à faible revenu sont également plus susceptibles d'être sédentaires que les enfants issus de familles à revenu moyen ou élevé.

M. Spence et ses collègues s'inquiètent donc des conséquences qu'auront des crédits d'impôt non remboursables qui favorisent les familles à revenu élevé. Selon eux :

À moins que les gouvernements canadiens ne rendent ces crédits d'impôt remboursables et n'envisagent d'autres mécanismes pour aider les familles à faible revenu, ces crédits d'impôt risquent de créer une iniquité encore plus grande sur le plan de la santé entre les enfants canadiens.

Je suis sûre que ce n'est pas là l'intention du gouvernement, et j'espère qu'il prendra ce type de données en considération.

Dans un autre article, intitulé Research article Uptake and effectiveness of the Children's Fitness Tax Credit in Canada : the rich get richer, le M. Spence et ses collaborateurs ont constaté qu'il est peu probable que le crédit d'impôt favorise l'activité physique chez les enfants et que celui-ci est destiné à ceux qui en ont le moins besoin.

Les auteurs du rapport tirent la conclusion suivante :

Il semble que, par exemple, le crédit d'impôt pour la condition physique des enfants ne soit qu'à l'avantage de ceux qui peuvent assumer le coût de l'inscription à un programme d'activité physique et en porter le fardeau jusqu'à la fin de l'exercice financier.

Ce que je déplore du crédit d'impôt pour la condition physique des enfants, du crédit d'impôt pour les pompiers volontaires et de tous les autres crédits d'impôt non remboursables mis en œuvre par le gouvernement Harper, c'est que ceux qui en ont le plus besoin ne peuvent s'en prévaloir. Ils gagnent un revenu tellement faible qu'ils ne paient pas d'impôt fédéral et ne peuvent donc pas se prévaloir des crédits d'impôt non remboursables.

Par conséquent, les familles qui pourraient le plus avoir besoin de ces crédits d'impôt — celles faisant partie de la plus faible tranche de revenu — n'y ont pas droit. La solution est fort simple : il suffit de rendre ces crédits d'impôt remboursables. Ainsi, les gens qui ont le plus besoin d'argent, soit les Canadiens à faible revenu, le recevront.

Je vais continuer de demander au gouvernement fédéral de rendre ces crédits remboursables. De cette façon, tous pourront réclamer le crédit, même les personnes qui ne paient pas d'impôt. Toutes les familles, quelle que soit leur tranche de revenu, devraient avoir droit à ces crédits d'impôt.

(Sur la motion de la sénatrice Fraser, le débat est ajourné.)

L'honorable Charlie Watt et l'honorable Anne C. Cools

Le trentième anniversaire de leur nomination au Sénat—Interpellation—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Cowan, attirant l'attention du Sénat sur le 30e anniversaire de la nomination des sénateurs Charlie Watt et Anne Cools.

L'honorable Catherine S. Callbeck : Honorables sénateurs, le débat sur cet article est ajourné au nom du sénateur Watt, mais j'aimerais prendre la parole aujourd'hui, pour ensuite demander l'ajournement du débat à son nom.

Je suis ravie de me joindre à mes collègues pour souligner le 30e anniversaire de la nomination des sénateurs Cools et Watt. C'est un événement remarquable. Ce sont actuellement les plus anciens membres du Sénat. Tous deux ont mené une brillante carrière au Sénat. J'aimerais faire un bref discours sur chacun d'entre eux.

Au cours des 30 dernières années, le sénateur Charlie Watt a apporté une contribution inestimable aux délibérations du Sénat. Comme le sénateur Cowan l'a dit dans ses observations, le sénateur Watt et l'ancien sénateur Willie Adams ont contribué à faire de leur langue maternelle une langue officielle au Sénat. Je crois que les Canadiens, moi y compris, ont profité de cet apport à nos délibérations.

Il ne fait aucun doute que le dévouement et l'engagement du sénateur Watt envers le peuple du Nunavik sont restés inébranlables depuis son arrivée au Sénat. Pendant trois décennies, il a représenté ce peuple, ainsi que les Autochtones de tout le pays, avec une passion et une intégrité inégalées. Puisqu'il a su défendre leurs intérêts avec ardeur, je dirais qu'il a, sans contredit, changé la vie d'innombrables Canadiens.

La sénatrice Anne Cools est reconnue pour ses contributions au Sénat. Elle a une connaissance approfondie des règles et des procédures de cette enceinte, et je crois que ses interventions nous ont aidés à mieux aborder les questions dont nous avons été saisis.

Lorsqu'elle parle de mesures législatives, chacun de ses discours est bien documenté et réfléchi. Sa participation à nos débats ne peut que rehausser la discussion.

Nous savons tous que la sénatrice Cools défend sans relâche depuis des années les familles en crise ainsi que les droits des pères. Avec dynamisme et compassion, elle s'est faite la voix des enfants du divorce et de la séparation. Je suis convaincue que ses efforts infatigables ont eu une incidence positive considérable sur d'innombrables vies.

Ces deux sénateurs ont beaucoup contribué à leur province respective et au pays entier, ont fait preuve d'intégrité et de dévouement au Sénat et ont régulièrement montré leur engagement profond au service des autres.

Je félicite ces deux sénateurs et je leur transmets mes meilleurs vœux.

(Sur la motion de la sénatrice Callbeck, au nom du sénateur Watt, le débat est ajourné.)

La réforme du Sénat

Interpellation—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Mercer, attirant l'attention du Sénat sur la réforme du Sénat et la façon dont le Sénat et ses sénateurs peuvent réaliser des réformes et améliorer la raison d'être du Sénat par l'examen du rôle des sénateurs dans leurs régions.

L'honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, j'interviens aujourd'hui car je ressens le besoin de répondre à certaines des observations qu'a faites le sénateur Mercer dans le cadre de son interpellation, qui en est actuellement à son 15e jour au Feuilleton.

L'interpellation attire l'attention du Sénat sur la façon dont il peut améliorer son fonctionnement en examinant le rôle des sénateurs dans leurs régions respectives. Il ne fait aucun doute que cette question vaut la peine d'être débattue, et le sénateur Mercer a présenté ses arguments avec brio.

Les sénateurs jouent un rôle essentiel dans la province ou le territoire qu'ils représentent. Ce rôle est un élément clé du fonctionnement du Sénat et du contrat social sur lequel repose notre fédération, et il complète le rôle que jouent les députés à l'autre endroit. Le sénateur Nolin a fait d'excellentes observations lorsqu'il s'est prononcé dans le cadre d'une interpellation semblable sur le rôle du Sénat dans la représentation des régions de la fédération canadienne.

J'aimerais appeler à la prudence concernant l'une des principales prémisses dans ce débat. Le sénateur Mercer laisse entendre que la partisanerie érode la capacité des sénateurs de défendre l'intérêt supérieur de leur région. Or, ma propre interprétation de l'histoire et des institutions politiques canadiennes m'amène à former une toute autre opinion.

Les racines de la démocratie canadienne sont profondément ancrées dans le système parlementaire de Westminster. Dans ce système, l'esprit partisan et la discipline de parti constituent un mécanisme organisationnel essentiel. Les partis aident à structurer notre démocratie parlementaire en un gouvernement et une opposition. Ils aident également les Canadiens à s'identifier à la politique, à s'y intéresser et à y participer.

En tant que rassembleurs de l'intérêt public, les partis politiques offrent un mécanisme par lequel l'opinion publique se raffine et donne naissance à des positions et à des propositions stratégiques. Nos partis sont le lieu où nous organisons la défense de nos idées politiques, ainsi que nos contre-arguments et réfutations.

(1620)

La discipline au sein des partis au pouvoir permet d'assurer la stabilité du système politique en conférant un caractère légitime aux représentants et aux institutions du gouvernement. Quant aux partis de l'opposition, ils offrent des opinions dissidentes et veillent à la responsabilité publique de façon légitime. Donc, même si je ne me considère aucunement comme une personne trop partisane, je suis étonnée de constater que certains s'empressent de critiquer l'esprit partisan.

La professeure Lori Turnbull, le regretté professeur émérite Peter Aucoin de même que Mark Jarvis, candidat au doctorat à l'Université de Victoria, ont très bien expliqué cet enjeu. Voici ce qu'ils ont écrit dans leur livre Democratizing the Constitution, Reforming Responsible Government, publié en 2011 :

La discipline de parti est un élément de la démocratie parlementaire au Canada depuis l'avènement du principe de gouvernement responsable.

[...] Le processus de reddition de comptes du gouvernement parlementaire responsable est fondé sur un rapport d'opposition, ce qui signifie donc qu'il est partisan.

Pourtant, dans le cadre des discussions sur la réforme du Sénat, on entend souvent que cette institution est devenue excessivement partisane. On fait valoir que le Sénat est indépendant de la « Chambre habilitée à procéder à un vote de confiance ». On prétend donc que les sénateurs devraient s'opposer à la discipline de parti et utiliser leurs privilèges pour s'exprimer librement.

Le sénateur Lowell Murray offrait une réponse utile à cet égard. Il disait que les partis politiques constituent la meilleure façon de défendre la liberté d'expression, car aucun groupe ne peut à lui seul infléchir le point de vue de tous les membres d'un parti politique.

Quant au sénateur Mercer, il fait valoir que la partisanerie compromet notre capacité de bien représenter nos provinces et nos régions. Cependant, si on suit la logique du sénateur Lowell Murray, à mon avis, la partisanerie ne nous empêche pas de nous exprimer librement. C'est plutôt un outil que nous utilisons parce que nous le voulons bien. Nous utilisons nos allégeances politiques pour défendre les intérêts des régions que nous représentons dans un contexte plus global, soit assurer le bien commun.

La partisanerie fait partie du processus qui nous aide à passer d'une foule d'intérêts divergents et souvent opposés à des positions éclairées et, à terme, à des décisions politiques. Elle nous permet d'éviter qu'on se retrouve dans un cul-de-sac, chacun campé sur ses positions, ce qui arrive si souvent dans des assemblées législatives moins disciplinées ou structurées.

Je cite de nouveau Jarvis, Aucoin et Turnbull :

La partisanerie est à la saine démocratie ce que la concurrence est au libre marché.

La partisanerie découle du droit fondamental d'avoir des opinions politiques, de se regrouper en parti politique avec des gens qui partagent notre opinion et, surtout, de s'opposer à d'autres personnes, que ces dernières soient au pouvoir ou non, dans la majorité ou non.

Les auteurs ajoutent par la suite ce qui suit :

Tout effort pour améliorer la démocratie en éliminant la partisanerie est voué à l'échec.

L'ensemble du processus parlementaire est fondé sur la politique partisane; l'institutionnalisation du rapport d'opposition constitue, dans ce modèle, la meilleure façon de protéger la démocratie.

Je ne suis pas contre l'idée que les sénateurs fassent partie de caucus régionaux non partisans, comme le propose le sénateur Mercer. Les associations parlementaires composées de représentants de tous les partis font de l'excellent travail. Ces groupes sont constitués par des députés partageant un intérêt dans un dossier donné qui transcende l'idéologie politique. Cependant, comme les sénateurs le savent, l'information que nous recueillons dans ces associations est utilisée en fonction de nos propres positions politiques.

C'est dans nos caucus que nous raffinons notre stratégie pour mieux mettre en valeur nos positions. En collaboration avec nos collègues des caucus, nous essayons de trouver des façons de faire valoir ces idées dans le cadre d'une vision politique plus large.

Je suppose qu'il en serait de même en ce qui concerne les réunions des groupes régionaux. Les parlementaires ont tous leurs propres perspectives, idéologies et opinions. Il s'agit d'abord et avant tout de convictions personnelles, mais les gens auront tendance à se joindre à des parlementaires animés de mêmes sentiments pour faire valoir leurs points de vue.

Des décennies d'expérience nous montrent que la coordination au sein des structures des partis est une bonne façon d'accélérer le travail dans notre système parlementaire.

Les mêmes principes s'appliquent aux intérêts régionaux : quelle que soit la façon dont ils s'organisent, les sénateurs auront des divergences d'opinion sur les politiques qui serviraient le mieux les intérêts de leur région. C'est dans le cadre des partis que nous nous sommes organisés au fil des décennies, sinon des siècles, pour régler ces différends.

Nos partis, qu'ils soient structurés en fonction des régions, des circonscriptions électorales ou des communautés minoritaires, nous donnent les grands cadres idéologiques qui nous permettent de faire valoir nos politiques. Les caucus régionaux sont peut-être une bonne façon d'encourager la discussion, mais on ne peut y élaborer nos idées dans un cadre politique plus large aussi bien qu'on le peut dans un caucus de parti, et ils ne nous permettront jamais de faire valoir les mérites de nos perspectives aussi bien que les groupes de défense des intérêts partisans. C'est le rapport d'opposition institutionnalisé de notre système parlementaire de Westminster qui maintient cette réalité.

J'estime donc que les problèmes que tant de gens ont repérés dans le fonctionnement du Sénat ne sont pas le fruit du sectarisme politique. Ils sont plutôt le fruit de comportements parlementaires douteux. La source du problème pourrait-elle être la diabolisation de nos adversaires politiques et de leurs fonctions, le manque de respect qu'on leur témoigne et la déformation des faits?

À en croire les observations des médias et de divers groupes d'intérêts, les Canadiens trouvent de tels comportements indignes d'un Parlement raisonné et civilisé. C'est à ce type de comportement, et non au sectarisme politique, qu'il faut s'attaquer pour rétablir notre légitimité aux yeux du public.

Certains sénateurs ont indiqué que nous serions plus indépendants si nous étions moins partisans. À cela, je dis que ce n'est pas le sectarisme politique qu'il faut examiner, mais la façon dont il est pratiqué.

Lorsqu'ils ont accueilli le sénateur Mercer au Sénat, en 2003, les leaders des deux côtés du Sénat ont décrit de manière détaillée ses longs états de services pour le Parti libéral et j'ai été très impressionnée. Les deux leaders ont présenté ces états de service comme un atout, comme la preuve d'un long engagement dans la sphère publique. Je me souviens d'avoir été impressionnée par le dévouement et le travail du sénateur Mercer pour son parti, en fait, pour le pays.

Plus récemment, lorsque les sénateurs d'en face se sont retrouvés dans une situation nouvelle ici, plusieurs d'entre eux ont sorti leur carte du Parti libéral et ont déclaré en être encore membres et fiers de l'être. Je dois respecter ce qu'ils ont été forcés de faire et ce que cela a changé dans leurs pratiques ici, mais, si certains d'entre nous de ce côté-ci choisissent de fonctionner à l'intérieur des structures de leur parti, il faut aussi le respecter.

Bien que j'aie choisi de m'aligner sur mon parti, j'exerce mon indépendance dans tout ce que je fais ici. Je dois constamment faire preuve d'intégrité et respecter mes responsabilités personnelles et les positions de mon parti et celles des gens que je représente. Ce faisant, j'accorde une attention particulière à mes responsabilités envers ma région. Quels que soient les choix que je fais dans l'exercice de mes fonctions de sénatrice — et ce, depuis plus de 20 ans —, ils ont des conséquences que je suis seule à devoir assumer.

Le passé nous apprend que l'esprit partisan est là pour rester, mais le respect des personnes et des institutions qui constituent le Sénat est une chose que nous devons constamment nous efforcer de préserver. Considérons donc notre devoir de défendre les besoins et les intérêts de nos régions comme un défi constant et reconnaissons que ce n'est pas un seul changement ici qui rendra cette tâche plus facile. Employons-nous plutôt à comprendre toute la complexité des questions que nous devons examiner dans les efforts que nous déployons constamment pour faire du Sénat une institution plus responsable et plus efficace.

Merci.

Des voix : Bravo!

L'honorable Leo Housakos (Son Honneur le Président suppléant) : Si aucun autre sénateur ne souhaite prendre la parole, l'article...

L'honorable Pierre Claude Nolin : La sénatrice accepterait-elle de répondre à une question?

(1630)

La sénatrice Andreychuk : Oui.

Le sénateur Nolin : Madame la sénatrice Andreychuk, la Cour suprême a expliqué en détail la responsabilité des sénateurs de faire un deuxième examen indépendant de ce que la Chambre des communes adopte.

Comment pouvez-vous concilier ce que vous venez de dire avec la décision rendue par la Cour suprême il y a trois semaines?

La sénatrice Andreychuk : Je ne partage pas votre interprétation de la décision de la Cour suprême. Toutefois, je pourrai en parler dans un autre discours.

Je pense que la Cour suprême nous présente les motifs pour lesquels nous sommes différents de la Chambre des communes et nous demande d'en être toujours bien conscients. Ceux qui, parmi nous, ont peut-être trop essayé d'imiter le comportement, les tactiques et les approches de la Chambre des communes devraient bien y réfléchir. C'est essentiellement ce que je dis. Nous savons que nous sommes une Chambre différente, et nous avons la responsabilité d'agir en conséquence.

Je suis indépendante maintenant, mais je l'étais déjà lorsque j'ai été nommée sénatrice. Il n'est pas facile de se séparer d'un parti politique. À l'inverse, je crois que, dans certains cas, il n'est pas facile d'œuvrer dans le cadre d'un parti. Ce n'est pas en déclarant tout à coup que je suis indépendante que je m'en trouverai mieux.

Je crois que je suis indépendante depuis que je siège comme sénatrice. L'indépendance signifie que j'ai des droits et des responsabilités. J'ai une responsabilité envers les gens de la Saskatchewan, ma région. J'ai une responsabilité envers les autres sénateurs. J'ai une responsabilité envers l'institution du Sénat. J'ai une responsabilité envers mon parti et son chef. Je dois tenir compte des projets de loi qu'adopte la Chambre des communes. Je ne crois pas que nous devrions ignorer ce qui se fait là-bas. Je crois que nous devons en tenir compte.

La presse mal informée nous a poussés à dire : « Si seulement nous étions un peu plus indépendants. » Je pense que ceux qui souhaitent jouir d'une plus grande indépendance veulent plutôt dire qu'ils aimeraient être plus indépendants et faire comme bon leur semble sans avoir à en subir les conséquences.

Je siège ici depuis 21 ans, comme vous, sénateur Nolin — nous sommes arrivés au Sénat en même temps. J'ai examiné et soupesé toutes ces responsabilités contradictoires avec l'indépendance que je souhaitais avoir. Je ne me suis jamais sentie menacée. Parfois, on a tenté de m'influencer. On m'a déjà dit que je faisais fausse route, mais c'est ainsi que se passent les débats. Que le débat se déroule au sein de notre caucus, qu'il soit public ou qu'il se tienne au Sénat, lorsque je rentre à la maison, je me demande ce que je devrais faire. Je ne me suis jamais sentie dans l'impossibilité de prendre des décisions qui sont conformes à mes convictions les plus profondes. Ai-je vraiment besoin de plus d'indépendance?

Le sénateur Nolin : Je suis tout à fait d'accord avec vous. En gros, vous dites ceci : « Je suis partisane, mais ma partisanerie ne m'aveugle pas. » Qu'en pensez-vous?

La sénatrice Andreychuk : Je considère cela comme un compliment venant de votre part, sénateur Nolin. Vous avez frappé en plein dans le mille.

J'ai aussi posé des gestes qui ont eu des conséquences pour moi. Il se peut qu'on me retire d'un comité ou qu'on m'empêche de participer à des activités au Sénat parce que les leaders et les whips exercent un certain contrôle. Toutefois, je pense que c'est un prix modeste à payer pour pouvoir faire ce que je veux.

L'honorable Joseph A. Day : Je vois que le temps de parole est écoulé.

Son Honneur le Président suppléant : Souhaitez-vous poser une question, sénateur?

Le sénateur Day : J'ai une brève question, et je suis sûr que la réponse sera aussi brève.

Son Honneur le Président suppléant : Souhaitez-vous demander cinq minutes supplémentaires?

Le sénateur Day : Il ne nous faudra pas cinq minutes.

Son Honneur le Président suppléant : Sénateur Day, vous avez la parole.

Le sénateur Day : Merci. Je tenais à remercier la sénatrice de sa présentation et de ses observations réfléchies. Je suis impatient de poursuivre ma réflexion sur certains aspects qu'elle a soulevés.

Un point m'a frappé, et j'ai jugé bon de vous demander des précisions. Vous avez dit au début de votre exposé que le Sénat est une assemblée fondée sur un rapport d'opposition, donc partisane. Émettez-vous l'hypothèse qu'un groupe fondé sur un rapport d'opposition est forcément partisan et qu'un tel groupe ne peut exister que s'il est partisan?

La sénatrice Andreychuk : Je ne puis répondre facilement à une telle question. Peut-être pourrions-nous poursuivre le débat puisqu'il est très important pour moi.

Je crois que les croyances, les valeurs et les idéologies servent de point de départ. Le modèle de Westminster se caractérise par la structure de parti, qui permet la tenue de débats réfléchis de façon à ce qu'on puisse parvenir à un consensus et prendre des décisions.

En théorie, le Sénat pourrait fonctionner sans l'existence d'aucun parti, mais je crois que des groupes se formeraient selon les affinités idéologiques, ce qui reste, d'une certaine manière, de la partisanerie.

Or, nous fonctionnons selon le modèle Westminster, ce qui — comme le sénateur Joyal peut le dire — impose une certaine organisation, et c'est ce que sont les partis politiques. Selon moi, nous causons du tort aux partis politiques aujourd'hui lorsque nous les critiquons. Peut-être que notre façon de fonctionner au sein des partis politiques laisse à désirer, mais, à mon avis, le modèle de Westminster est une structure qui a résisté à l'épreuve du temps. Qu'adviendrait-il si nous abolissions totalement les partis politiques?

J'ai vécu en Afrique, où l'on a tenté l'expérience de n'avoir qu'un seul parti dont tout le monde était membre et au sein duquel on discutait et débattait. Le problème, c'est qu'il n'y avait qu'un chef, élu par un quelconque mécanisme. En fin de compte, il n'y avait qu'une voix, car tout dépendait de la personne à qui il incombait de prendre les décisions au gouvernement.

Je crois qu'en ce sens, les partis ont leur place. Devrait-on créer d'autres structures pour les appuyer? Pouvons-nous réduire leur importance, les modifier et démocratiser la politique de parti? Bien entendu que nous le pouvons, et à mon avis, c'est sur cet aspect qu'il faut se concentrer, plutôt que d'affirmer à la hâte qu'il faut se débarrasser des partis pour être indépendants.

Vous êtes assis de ce côté-là du Sénat parce que vous avez certaines convictions, je respecte cela. Je suis assise de ce côté-ci parce que j'ai certaines convictions. Je ne partage pas toutes les convictions de tous les sénateurs de ce côté-ci, et il en va de même pour vous, de votre côté. Les partis nous aident à nous organiser.

Le sénateur Day : Vos observations seront utiles pour interpréter vos propos. Je suppose que ce qui fait consensus, c'est la définition de la partisanerie. Le sénateur Nolin a aussi soulevé ce point dans le cadre de son questionnement. La population a une opinion de ce qu'est la partisanerie de nos jours. Ce n'est pas nécessairement la même que celle que vous utilisez dans votre intervention.

La sénatrice Andreychuk : C'est le défi que nous devons relever.

Son Honneur le Président suppléant : Sénateur Lang, avez-vous une question?

L'honorable Daniel Lang : Je crois qu'il nous reste encore quelques minutes. J'aimerais poser une courte question à la sénatrice Andreychuk.

Tout d'abord, je souscris à vos propos. Je souligne en guise de préambule que j'ai siégé dans une assemblée législative dont tous les députés étaient indépendants. J'ai été député pendant quatre ans dans cet environnement politique particulier. Nous avons ensuite décidé de nous tourner vers la politique de parti.

Je vous assure que, durant ces quatre années, tous les soirs, c'était comme la Nuit des Longs Couteaux. Vous ne saviez pas qui était de votre côté ou qui allait vous appuyer. En fin de compte, très peu de gens ont assumé la responsabilité des grandes décisions qu'il a fallu prendre. En fait, tous ont fait leur possible pour éviter de prendre des décisions, car, ainsi, ils n'ont pas à en assumer la responsabilité.

Je pose donc la question suivante à la sénatrice Andreychuk. Supposons un instant qu'il n'y a aucune partisanerie au Sénat. Nous avons 105 sénateurs totalement indépendants. La sénatrice pense-t-elle que nous pourrions nous acquitter de notre travail avec rapidité et jouer le rôle de leaders après des Canadiens en l'absence de partis politiques organisés?

La sénatrice Andreychuk : Je crois que vous avez répondu à la question en la posant de cette façon.

Oui, si nous avions 105 sénateurs indépendants, je pense que nous aurions tendance à vouloir créer une organisation quelconque et nous aurions à lui déléguer un grand nombre de responsabilités. Nous n'aurions pas de whips. Pour commencer, nous n'aurions pas de leaders, je suppose. Si vous avez lu sur l'histoire, on passe du chaos à un chaos organisé, puis on adopte quelques règles et responsabilités, et je pense que c'est dans les partis que les choses bougent et changent, sans compter que vous pouvez exercer une influence sur votre parti.

Ce que nous avons perdu, je pense, ce sont les bons débats que nous tenions et la fierté que nous éprouvions d'avoir des opinions différentes. Les choses ont changé au fil des ans : maintenant, soit vous pensez comme moi soit votre opinion ne compte pour rien. Je pense donc que c'est une question de respect des différences, car notre société est très diversifiée.

(1640)

Nous devrions trouver un moyen d'exprimer des points de vue différents et accepter que nous somme le reflet du Canada d'aujourd'hui. Ce n'est pas seulement de nous qu'il s'agit; il faut représenter tous ces points de vue différents, ce qui est parfois très difficile sur le plan émotif. Je suis d'accord avec vous pour dire que nous devons nous organiser.

(Sur la motion de la sénatrice Fraser, le débat est ajourné.)

[Français]

Le Sénat

Motion tendant à constituer un comité spécial sur la modernisation du Sénat—Ajournement du débat

L'honorable Pierre Claude Nolin, conformément au préavis donné le 6 mai 2014, propose :

Qu'un comité spécial sur la modernisation du Sénat soit nommé pour examiner les façons de rendre le Sénat plus efficace, plus transparent et plus responsable, dans le cadre constitutionnel actuel, afin, entre autres de hausser la confiance de la population envers le Sénat;

Que le comité soit composé de neuf membres, désignés par le Comité de sélection, et que le quorum soit constitué de cinq membres;

Que le comité soit habilité à convoquer des personnes, à obtenir des documents et des dossiers, à interroger des témoins et à faire imprimer au jour le jour les documents et témoignages dont il peut ordonner l'impression;

Que le comité soit autorisé à retenir les services d'experts externes;

Que, nonobstant l'article 12-18(2)b)(i) du Règlement, le comité soit habilité à se réunir du lundi au vendredi, même si le Sénat est alors ajourné pour une période de plus d'une semaine;

Que le comité soit habilité à faire rapport de temps à autre et à présenter son rapport final au plus tard le 31 décembre 2015.

— Chers collègues, le 25 avril dernier, la Cour suprême du Canada a répondu unanimement à un renvoi que le gouvernement lui avait adressé en avril 2013, au sujet du Sénat.

La cour était invitée par le gouvernement à donner son avis sur la procédure d'amendement applicable à l'élection provinciale consultative en vue de nommer les sénateurs, à diverses formules visant la réduction de la durée du mandat des sénateurs, à la modification des qualifications des sénateurs en matière de propriété et, enfin, à l'abolition du Sénat.

[Traduction]

La Cour suprême a répété l'opinion qu'elle avait exprimée en décembre 1979 sur une série de questions semblables et elle a statué que le Parlement du Canada ne pouvait pas modifier unilatéralement la Loi constitutionnelle de 1867.

En fonction des diverses procédures de modification prévues dans la Loi constitutionnelle de 1982, à divers degrés et dépendamment de la modification, le consentement d'une province, de plusieurs d'entre elles ou de toutes les provinces serait nécessaire.

La cour a jugé que :

Le Sénat est une des institutions politiques fondamentales du Canada. Il se situe au cœur des ententes ayant donné naissance à la fédération canadienne.

[Français]

Relatant brièvement la nature et l'histoire de l'institution, la cour constate que, premièrement, la Chambre haute, appelée le Sénat par les auteurs de la Constitution, a été créée sur le modèle de la Chambre des lords britannique, mais adaptée au contexte canadien.

Deuxièmement, comme au Royaume-Uni, elle a été conçue pour permettre de donner un second regard attentif, « a sober second thought », aux mesures législatives adoptées par les représentants du peuple à la Chambre des communes.

Troisièmement, la Chambre haute a toutefois aussi assuré une forme distincte de représentation des régions qui s'étaient jointes à la Confédération et qui, ce faisant, avaient cédé une partie importante de leurs pouvoirs législatifs au nouveau Parlement fédéral.

Quatrièmement, même si la présentation des nouvelles provinces canadiennes à la Chambre des communes était proportionnelle à leur population, chaque région obtenait un nombre égal de représentants au Sénat, peu importe sa population.

Cinquièmement, cette règle d'égalité visait à assurer aux régions que leurs voix continueraient de se faire entendre dans le processus législatif même si elles devenaient minoritaires au sein de l'ensemble de la population canadienne.

[Traduction]

La cour a fait remarquer ce qui suit, à juste titre, à propos du Sénat :

Avec le temps, le Sénat en est aussi venu à représenter divers groupes sous-représentés à la Chambre des communes. Il a servi de tribune aux femmes ainsi qu'à des groupes ethniques, religieux, linguistiques et autochtones auxquels le processus démocratique populaire n'avait pas toujours donné une opportunité réelle de faire valoir leurs opinions [...]

Dans sa décision, la cour a plusieurs fois reconnu que les sénateurs ont besoin d'être indépendants pour pouvoir soumettre les projets de loi au second examen objectif nécessaire auquel on s'attend d'eux.

Chers collègues, certaines personnes sont déçues de la décision, alors que d'autres s'en réjouissent.

Je fais partie de ceux qui se réjouissent que notre institution ait été reconnue et défendue de la sorte. Le gouvernement a indiqué qu'il s'agit d'une décision pour le statu quo. Il s'agit assurément d'un « statu quo constitutionnel ».

Le gouvernement reconnaît également que le public veut manifestement que le Sénat soit beaucoup plus efficace; nous devons unir nos efforts pour exaucer ce souhait tout à fait légitime, et ce, rapidement et sans tarder. Nous sommes peut-être en présence d'un statu quo du point de vue de la Constitution, mais la transformation du Sénat en tant qu'institution doit aller de l'avant.

[Français]

C'est précisément ce que la motion que j'ai présentée propose de faire. Il est important que vous sachiez que la sénatrice Ringuette, qui a proposé une motion similaire, et moi sommes en contact continuel pour analyser les textes de nos motions respectives. La sénatrice Ringuette comprend et accepte le libellé de ma motion, qui contient un mandat plus large et moins ciblé que la sienne.

Depuis que j'ai déposé mon préavis de motion, plusieurs sénateurs m'ont offert leurs commentaires, et certains m'ont même suggéré des amendements.

Il m'importe, ainsi qu'au sénateur Joyal, qui a généreusement accepté d'appuyer ma motion, qu'une réflexion sereine et efficace puisse se faire. Il nous apparaît tout aussi important que la décision de nommer le comité spécial se prenne dans les meilleurs délais.

Afin de satisfaire le plus grand nombre de nos collègues et de permettre à tous ceux qui le désirent de poursuivre leur analyse en caucus ou autrement, je propose l'ajournement du débat, et je reprendrai la parole, pour le reste de mon temps, mardi prochain. Il est fort probable que, à cette occasion, je dépose des amendements pour clarifier, modifier et ajuster le texte à la suite des discussions qui auront lieu dans chacun des caucus.

[Traduction]

Je vous remercie beaucoup, chers collègues. Je vais demander que le débat soit ajourné à mon nom pour le temps de parole qu'il me reste pour que vous puissiez avoir une bonne discussion sur cette question en caucus, ou autrement, afin que la motion soit adoptée comme il se doit le plus tôt possible et que nous puissions procéder à la création du comité.

(Sur la motion du sénateur Nolin, le débat est ajourné.)

(La séance est levée, et le Sénat s'ajourne au mardi 13 mai 2014, à 14 heures.)

© Sénat du Canada

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