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Débats du Sénat (Hansard)

2e Session, 41e Législature,
Volume 149, Numéro 78

Le mardi 23 septembre 2014
L'honorable Noël A. Kinsella, Président

LE SÉNAT

Le mardi 23 septembre 2014

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de représentants du South Asian Women's Centre et de l'AWIC Community and Social Services, deux organismes basés à Toronto. Ces organismes offrent des services d'établissement et d'emploi ainsi que des possibilités de formation et de bénévolat aux nouveaux arrivants au Canada. Ils ont été invités par notre collègue, la sénatrice Seth.

Au nom de tous les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!


DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Les mères et les enfants qui immigrent de l'Asie du Sud

L'honorable Asha Seth : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui au sujet de la nécessité d'aider les mères et les enfants qui ont récemment immigré au Canada.

Les nouveaux arrivants sont souvent confrontés à des difficultés et à des obstacles lorsqu'ils doivent s'intégrer à une toute nouvelle culture et à un nouvel environnement, surtout les femmes qui vivaient des problèmes conjugaux dans leur pays d'origine. Ils peuvent aussi devoir composer avec une maîtrise limitée de la langue, le chômage, le choc culturel, la difficulté à faire reconnaître leurs titres de compétence, le manque d'information sur les services offerts et sans doute bien plus.

Il est important que le Canada aide ces mères et leurs enfants pour qu'ils puissent s'épanouir au maximum et devenir des citoyens canadiens prospères tout en conservant leur héritage ethnique. De plus, il est essentiel que nous leur donnions les outils pour qu'ils ne connaissent plus la vulnérabilité, l'impuissance ou la maltraitance.

Je soulève cette question aujourd'hui dans le cadre de ma campagne de sensibilisation à la situation de la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants au Canada et partout dans le monde.

Aujourd'hui, de 17 h 30 à 19 h 30, je donnerai une réception pour le South Asian Women's Centre à laquelle participera l'organisme AWIC Community and Social Services. Ces deux organismes offrent une vaste gamme de services pour permettre aux femmes et aux enfants de s'intégrer sans difficulté et en toute sécurité à la culture canadienne.

Honorables sénateurs, les immigrants butent contre toute une série d'obstacles lorsqu'ils viennent s'installer dans leur nouveau pays, le Canada. Il est essentiel que nous comprenions les problèmes auxquels ils font face pour pouvoir aider ceux qui en ont besoin. Je sais que c'est une question qui nous préoccupe tous.

Je vous invite à vous joindre à nous dans la salle 256-S de l'édifice du Centre, à 17 h 30, pour poursuivre la discussion et entendre les discours du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Chris Alexander, de la directrice générale du South Asian Women's Centre et d'autres personnes encore. Merci, et j'espère vous y voir tous.

La Nouvelle-Écosse

Cole Harbour—Le hockey

L'honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, les Néo-Écossais adorent le hockey et adorent leurs joueurs de hockey, mais les gens de Cole Harbour, en Nouvelle-Écosse, une municipalité d'environ 25 000 habitants, étaient encore plus enthousiastes que d'habitude lors de la remise des prix de la LNH, en juin dernier, pour une raison que toute la population de la province comprend parfaitement.

Sidney Crosby, de Cole Harbour, en Nouvelle-Écosse, est le capitaine des Penguins de Pittsburgh. En juin, il s'est vu décerner pour la deuxième fois le trophée Hart, remis au joueur de la LNH le plus utile à son équipe. Il a également reçu le trophée Art Ross, en tant que champion marqueur de la ligue. De plus, « Sid the Kid » a reçu le prix Ted Lindsay, remis au joueur désigné par l'Association des joueurs de la LNH comme le meilleur joueur de la saison. Un prix que l'on reçoit pour avoir été choisi par ses pairs a toujours une saveur bien particulière.

Honorables sénateurs, n'oubliez pas que Sidney Crosby était en outre le capitaine de l'équipe nationale du Canada qui a remporté la médaille d'or aux Jeux olympiques de Sotchi, cette année.

Honorables sénateurs, Nathan MacKinnon est un attaquant de l'Avalanche du Colorado et il vient, lui aussi, de Cole Harbour, en Nouvelle-Écosse. Vous vous rappelez peut-être qu'il était capitaine des Mooseheads de Halifax lorsque cette équipe a remporté la coupe Memorial, en 2013. Il a été le premier choix au repêchage de la LNH cette année-là, tout comme Sidney Crosby, qui avait été le premier choix en 2005. Nathan est devenu joueur professionnel dès sa première année d'admissibilité et a, de surcroît, connu une excellente saison. Il a beaucoup aidé l'Avalanche à atteindre les séries éliminatoires cette année et a joué un rôle prépondérant lors des matchs de ces séries.

Nathan MacKinnon a remporté le trophée Calder, décerné à la recrue de l'année de la LNH. Il a été choisi presque à l'unanimité, avec 130 votes de première place sur 137. Nathan est le plus jeune joueur à avoir remporté le trophée Calder.

Félicitations à Sidney Crosby et Nathan MacKinnon pour leur saison couronnée de succès et félicitations aux amateurs de hockey et aux entraîneurs de Cole Harbour ainsi qu'à leurs familles. À Cole Harbour, continuez d'appliquer votre recette secrète pour le développement du hockey, car c'est manifestement une recette qui fonctionne.

[Français]

Le Sénat

L'honorable Pierre-Hugues Boisvenu : Honorables sénateurs, depuis 10 ans, je consacre toute mon énergie, ainsi qu'une partie de mes ressources personnelles, à défendre les droits des victimes d'actes criminels. Ce mandat que m'ont donné mes filles, je le remplis avec dignité, sérénité et dans le plus grand respect de nos institutions, tant canadiennes que québécoises.

(1410)

Le 30 janvier 2010, j'ai accepté l'invitation très privilégiée de notre premier ministre, le très honorable Stephen Harper, de poursuivre cette mission en cet honorable lieu qu'est le Sénat canadien. Depuis lors, à travers mes activités publiques, j'ai toujours ardemment défendu cette institution. J'ai expliqué son origine, son rôle et son importance pour la démocratie canadienne, tant aux jeunes dans les écoles et aux groupes de victimes qu'aux personnes âgées.

[Traduction]

J'éprouve un profond respect pour cet endroit exceptionnel et pour ceux qui y travaillent.

[Français]

Je tiens donc à présenter mes excuses aux membres de cette Chambre et aux victimes d'actes criminels dont je me fais le porte-parole fidèle ici même, chaque jour, si les faits rapportés par la commissaire à l'éthique ont pu entacher la crédibilité et l'image du Sénat.

Honorables sénateurs, soyez assurés que je poursuivrai ma mission en cette honorable Chambre avec tout le respect que je lui dois et avec la même admiration que j'ai pour les victimes d'actes criminels et leurs familles qui, chaque jour, se lèvent aussi pour prendre la parole afin de faire reconnaître leurs droits.

Le Nouveau-Brunswick

Les résultats de l'élection provinciale de 2014

L'honorable Percy Mockler : Honorables sénateurs, même si je sais que la presse rapporte immédiatement la démission de l'ancien premier ministre Alward, je crois qu'il est tout de même important de poser le geste suivant pour reconnaître notre grande démocratie.

À titre de parlementaire et de candidat à sept élections au Nouveau-Brunswick, que mon équipe a remportées six fois, je voudrais tout d'abord féliciter le nouveau premier ministre, M. Brian Gallant, et l'équipe libérale pour la victoire qu'ils ont remportée au Nouveau-Brunswick, lors des élections générales d'hier soir.

[Traduction]

Je tiens également à féliciter David Alward et l'équipe progressiste-conservatrice d'avoir remporté 21 des 49 sièges à l'Assemblée législative du Nouveau-Brunswick. Je félicite aussi David Coon, qui est devenu le tout premier élu du Parti vert dans notre province.

Au début de la campagne, les experts prévoyaient une forte majorité libérale. Cependant, le premier ministre Alward et son équipe ont réussi à remporter 43 p. 100 des sièges à l'assemblée législative, après un retour en force admirable.

[Français]

À titre de sénateur du Nouveau-Brunswick et en tant que parlementaire pour les autres sénateurs du Nouveau-Brunswick, je suis prêt à travailler avec le nouveau gouvernement libéral, qui aura certainement besoin d'aide. Les finances de la province sont en mauvaise posture et celle-ci devra peut-être emprunter une page de la plateforme du Parti progressiste-conservateur du Nouveau-Brunswick pour miser, elle aussi, sur le développement des ressources naturelles.

[Traduction]

Les élections sont terminées et, oui, le vrai travail commence maintenant au Nouveau-Brunswick. Je souhaite bonne chance aux élus et j'espère, honorables sénateurs, qu'ils pourront mettre de côté la partisanerie et collaborer avec nous tous, peu importe les allégeances politiques, afin de mettre en valeur nos ressources naturelles et de créer de la richesse, ce dont notre province a grandement besoin.

[Français]

Vive la démocratie!

[Traduction]

L'honorable Joseph A. Day : Tout d'abord, honorables sénateurs, je tiens à féliciter le sénateur Mockler pour sa brillante et courageuse intervention au sujet de ce qui s'est produit hier au Nouveau-Brunswick. Je joins ma voix à la sienne et je suis d'accord avec lui sur presque tous les points qu'il a soulevés, sauf en ce qui concerne sa remarque sur le « retour en force », mais nous y reviendrons une autre fois.

Les sénateurs savent sans doute qu'il y a 49 sièges à l'Assemblée législative du Nouveau-Brunswick. Le Nouveau-Brunswick, qui est une petite province, a réduit le nombre de sièges pour le porter à 49. Il fallait donc qu'un parti politique gagne 25 sièges pour obtenir la majorité. Quatre partis politiques étaient dans la course. À l'instar de l'Île-du-Prince-Édouard, de la Nouvelle-Écosse, de l'Ontario, de la Colombie-Britannique et du Québec, le Nouveau-Brunswick a élu un gouvernement libéral.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Day : Je songe aux élections à Terre-Neuve, qui, je présume, auront lieu très bientôt.

Une voix : Et en Alberta!

Le sénateur Day : Honorables sénateurs, le sénateur Mockler a fait une remarque très pertinente lorsqu'il a dit que beaucoup de gens très compétents se sont présentés aux élections, ce qui est bon pour la démocratie. Beaucoup de très bons candidats n'ont pas été élus. Félicitons et remercions tous ceux qui se sont portés candidats.

Merci.


[Français]

AFFAIRES COURANTES

Les affaires autochtones et le développement du Nord canadien

La situation de la culture et de la société inuites dans la région du Nunavut—Dépôt des rapports annuels de 2011-2012 et de 2012-2013

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, les rapports annuels sur la situation de la culture et de la société inuites dans la région du Nunavut pour les exercices 2011-2012 et 2012-2013.

[Traduction]

La Loi sur l'indemnisation de l'industrie aérienne

Projet de loi modificatif—Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-3, Loi édictant la Loi sur l'indemnisation de l'industrie aérienne et modifiant la Loi sur l'aéronautique, la Loi maritime du Canada, la Loi sur la responsabilité en matière maritime, la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada et d'autres lois en conséquence, accompagné d'un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Housakos, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)


[Français]

PÉRIODE DES QUESTIONS

Les affaires autochtones et le développement du Nord canadien

L'éducation

L'honorable Marie-P. Charette-Poulin : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et provient de Mme Colleen Green, de Little Britain, en Ontario. Je vais citer sa question dans la langue dans laquelle elle l'a envoyée.

[Traduction]

Dans le Nord de l'Ontario comme dans la plupart des provinces, les élèves des Premières Nations n'ont pas accès à une école secondaire dans leur ville; bon nombre d'entre eux doivent se rendre dans des villes plus au sud. En Ontario, les parents des Premières Nations envoient leurs enfants faire leurs études secondaires à Thunder Bay. Or, un nombre élevé de ces enfants ont été assassinés.

Étant moi-même mère de quatre jeunes adultes, je ne peux pas me résoudre à envoyer mes enfants vivre seuls dans une ville étrange, à des centaines de kilomètres, pour qu'ils y obtiennent leur diplôme d'études secondaires. Aucun enfant ne devrait avoir à risquer sa vie pour obtenir un diplôme d'études secondaires.

Au Canada, l'éducation publique est un service financé par le gouvernement et offert à tous les enfants canadiens. Que fait le gouvernement pour offrir un environnement sécuritaire aux enfants des Premières Nations afin qu'ils puissent poursuivre leurs études?

(1420)

[Français]

L'honorable Claude Carignan (leader du gouvernement) : Je vous remercie de votre question. Je dois avouer que vous avez provoqué en moi un certain émoi lorsque, premièrement, vous avez demandé s'il y aurait une période des questions, et, deuxièmement, parce que vous avez dit que la question était posée dans la langue de la personne qui l'a soumise; j'ai craint qu'il ne s'agisse d'une autre langue que l'une des deux langues officielles du Canada, ce qui m'aurait embarrassé quelque peu.

Depuis 2006, notre gouvernement a investi plus de 10 milliards de dollars afin de soutenir l'éducation élémentaire et secondaire pour 117 500 étudiants des Premières Nations dans les réserves.

De plus, entre 2006 et 2013, nous avons investi environ 1,7 milliard de dollars en faveur de l'infrastructure des établissements scolaires des Premières Nations.

Vous êtes également au courant de l'entente qui a été signée entre le premier ministre et M. Atleo au sujet du projet de loi sur l'éducation des Premières Nations. Je crois que ce document montre jusqu'à quel point notre gouvernement a travaillé avec les dirigeants de l'Assemblée des Premières Nations en vue de créer un projet de loi qui protège les intérêts des élèves des Premières Nations.

Nous sommes extrêmement déçus que l'Assemblée des Premières Nations n'ait pas respecté l'accord qu'elle a conclu avec le gouvernement. Comme nous le disons depuis le début, notre projet de loi ne pourra pas évoluer sans l'accord de l'Assemblée des Premières Nations et nous pouvons difficilement investir davantage dans un système d'éducation qui ne sert pas les intérêts des enfants des Premières Nations, comme vous l'avez si bien souligné à l'aide d'exemples.

Une enveloppe supplémentaire sera octroyée uniquement si le système d'éducation fait l'objet de véritables réformes; par conséquent, nous exhortons l'Assemblée des Premières Nations à appuyer le projet de loi afin que nous puissions donner suite à la priorité qui consiste, comme vous l'avez souligné, à donner aux enfants une éducation de qualité.

[Traduction]

La sénatrice Charette-Poulin : Sénateur Carignan, Mme Green a ajouté ceci :

Je suggère que l'on crée des écoles satellites dans les réserves du Nord pour permettre aux enfants des Premières Nations d'obtenir leur diplôme d'études secondaires et leur assurer un meilleur avenir à eux et à leur famille.

L'un des principaux obstacles à l'autonomie auxquels se heurtent les membres des Premières Nations, c'est l'éducation. Là où les taux d'analphabétisme sont élevés, on constate des taux de chômage élevés, des problèmes de santé et une piètre qualité de vie. Les réserves situées dans les régions du sud des provinces canadiennes sont souvent à proximité de centres urbains. Les Mohawks du territoire de Tyendinaga sont à 20 minutes de Belleville, en Ontario. Mes beaux-parents vivent là-bas, et un grand nombre de Mohawks détiennent non seulement un diplôme d'études secondaires, mais aussi un diplôme d'études collégiales ou universitaires. Le taux d'emploi et la qualité de vie de ces Autochtones sont également élevés. Il est grand temps que tous les enfants des Premières Nations aient un accès sécuritaire à l'éducation. L'avenir du Canada en dépend.

La question que je veux vous poser, sénateur Carignan, est la suivante : le gouvernement a-t-il envisagé ce modèle d'écoles satellites pour l'éducation secondaire dans les régions éloignées?

[Français]

Le sénateur Carignan : Madame la sénatrice, j'entends la suggestion de Mme Green. Comme je l'ai expliqué, notre gouvernement a signé une entente avec l'Assemblée des Premières Nations, et ce document illustre à quel point notre gouvernement a travaillé avec les dirigeants de l'Assemblée des Premières Nations en vue de créer un projet de loi qui protège les intérêts des élèves des Premières Nations. Nous exhortons l'Assemblée des Premières Nations à appuyer le projet de loi pour que nous puissions agir dans le but de donner aux enfants une éducation de qualité et de permettre aux Autochtones d'établir leurs priorités en matière d'éducation et de gestion de leur système scolaire.

La sénatrice Charette-Poulin : Dans la presse écrite, on a constaté une approche non partisane de la part de deux anciens premiers ministres et d'un chef de parti, tout récemment, concernant la question des Autochtones. Chaque fois que l'on soulève des questions qui concernent les Autochtones auprès du gouvernement, qu'il s'agisse des femmes disparues, de la sécurité dans certaines réserves autochtones, de l'éducation, de l'eau ou du logement, nous ne recevons que des réponses chiffrées. Pourriez-vous nous dire si, oui ou non, le gouvernement a bel et bien l'intention d'élaborer un plan de travail pour aborder ces questions importantes qui touchent les communautés autochtones d'un bout à l'autre du pays?

Le sénateur Carignan : Comme vous le savez, le ministère des Affaires autochtones relève de la responsabilité de M. Valcourt, un excellent ministre. Je comprends que vous n'aimiez pas nécessairement nos réponses chiffrées, mais il s'agit tout de même du bilan du gouvernement en matière d'investissement dans l'éducation. Je crois qu'il est important de rappeler l'importance qu'on accorde aux dossiers des Affaires autochtones. Non seulement nous vous fournissons des chiffres, mais ceux-ci se traduisent par des actions concrètes sur le terrain. Vous avez cité, entre autres, le dossier des femmes disparues; on dit souvent qu'il est inutile de mener une 41e étude pour associer un chiffre au dossier, mais qu'il faut plutôt des actions concrètes. Or, c'est ce que notre gouvernement fait jour après jour.

[Traduction]

L'honorable Jane Cordy : Les jeunes Autochtones constituent le segment de la population qui croît le plus rapidement au Canada. En dépit du fait que le nombre de jeunes Autochtones âgés de moins de 25 ans augmente considérablement, depuis son arrivée au pouvoir, votre gouvernement a imposé un plafond de 2 p. 100 au financement de l'éducation. Par conséquent, le financement pour l'éducation des jeunes Autochtones diminue terriblement. Si nous, en tant que société et gouvernement, n'intervenons pas rapidement pour veiller à ce que ce segment de la population qui connaît la plus forte croissance soit bien préparé pour le marché du travail, alors ce ne sera pas seulement la collectivité autochtone qui en souffrira, mais l'ensemble du pays.

Votre gouvernement s'engagera-t-il à éliminer le plafond imposé au financement de l'éducation des Autochtones?

[Français]

Le sénateur Carignan : Je ne peux partager la prémisse de votre question, qui suggère que le gouvernement ne fait rien. C'est une prémisse que je qualifierais de partisane et qui ne juge pas à son mérite l'ensemble des gestes qui sont posés dans le cadre du dossier de l'éducation au sein des Premières Nations.

(1430)

Je l'ai dit tout à l'heure, depuis 2006, notre gouvernement a investi plus de 10 milliards de dollars pour soutenir l'éducation élémentaire et secondaire d'environ 117 500 étudiants des Premières Nations dans les réserves; de plus, entre 2006 et 2013, nous avons investi environ 1,7 milliard de dollars pour l'infrastructure des établissements scolaires des Premières Nations. Cela se traduit donc par de nombreuses infrastructures et beaucoup d'écoles qui servent à l'éducation des jeunes Autochtones.

Je pense donc qu'il est inapproprié de dire que le gouvernement ne fait rien. Le gouvernement en a fait une priorité, il a signé une entente historique avec l'Assemblée des Premières Nations qui, malheureusement, a décidé de ne pas la respecter.

Encore une fois, nous exhortons l'Assemblée des Premières Nations à appuyer le projet de loi pour que nous puissions nous atteler à cette priorité qui consiste à donner aux enfants une éducation de qualité et, ainsi, donner suite aux engagements que le gouvernement a pris dans le cadre de cette entente.

[Traduction]

La sénatrice Cordy : Ceci n'est pas une prémisse et je ne fais pas preuve de partisanerie quand j'affirme que, depuis son arrivée au pouvoir, le gouvernement a imposé un plafond au financement de l'éducation des Autochtones et des membres des Premières Nations. C'est un fait.

Ma question était la suivante : le gouvernement s'engagera-t-il à éliminer ce plafond? Compte tenu du nombre toujours croissant de jeunes Autochtones, le fait que l'augmentation du financement soit plafonnée à 2 p. 100 par année empêche d'instruire tous les jeunes Autochtones qui ont besoin de faire des études pour satisfaire aux exigences du milieu du travail.

[Français]

Le sénateur Carignan : Comme je l'ai dit tout à l'heure, sénatrice Cordy, le système d'éducation des Premières Nations doit faire l'objet de véritables réformes, et un financement supplémentaire sera octroyé uniquement si le système d'éducation fait l'objet desdites réformes.

La citoyenneté et l'immigration

L'immigration francophone

L'honorable Maria Chaput : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et concerne l'immigration francophone au Canada.

Au début de septembre, le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a annoncé qu'il prévoyait consulter les communautés afin d'élaborer des stratégies pour attirer des immigrants francophones au Canada à l'extérieur du Québec. Très heureux de cette annonce, nous attendons maintenant la tenue de ces consultations.

Cependant, la semaine suivante, ce même gouvernement a annoncé l'abolition du programme Avantage significatif francophone, un programme mis sur pied pour simplifier le processus d'embauche de travailleurs qualifiés d'expression française à l'extérieur du Québec.

Depuis 2012, monsieur le leader, les francophones en situation minoritaire n'obtiennent plus de financement pour participer au forum emploi Destination Canada en France et en Belgique pour recruter des immigrants francophones. Le programme Entrée express, qui sera lancé en 2015, ne prévoit pas de mesures spécifiques d'appui à l'immigration francophone, contrairement à ce qui avait été promis.

Ma question est la suivante : si le gouvernement fédéral veut réellement attirer davantage d'immigrants francophones, pourquoi agit-il de la sorte?

L'honorable Claude Carignan (leader du gouvernement) : Je vous remercie de votre question. Les changements que le gouvernement a apportés récemment au Programme des travailleurs étrangers temporaires francophones visent à ce que les emplois disponibles soient d'abord proposés aux Canadiens. Dans le cadre de ces changements, nous voulions avant tout garantir la cohérence de nos programmes. C'est pourquoi les dépenses exceptionnelles qui étaient prévues dans le cadre du programme Avantage significatif francophone seront éliminées à compter du 30 septembre.

En 2013, le nombre d'immigrants francophones qui sont venus au Canada grâce à ce programme correspondait à moins de 1 p. 100 seulement du nombre total de travailleurs étrangers au Canada. Comme vous pouvez vous en douter, le gouvernement continuera de promouvoir l'immigration francophone dans le cadre de son programme d'immigration permanent. En outre, certaines demandes d'immigration sont traitées en six mois ou moins dans le cadre du programme Entrée express.

Si vous vous demandez ce que je fais, personnellement, appelez à mon bureau : vous entendrez un accent français répondre au téléphone. C'est le fait de l'arrivée d'un jeune immigrant français qui est venu s'établir au Canada grâce au système d'immigration permanent.

La sénatrice Chaput : J'ai une question complémentaire. Dans le cadre du programme Entrée express, qui semble être un programme qui fonctionnera très bien et qui sera lancé en 2015, pourquoi n'y a-t-il pas de mesures spécifiques permettant d'appuyer l'immigration francophone, contrairement à ce qui a été promis? Pourquoi ne pouvons-nous pas obtenir ces mesures spécifiques?

Le sénateur Carignan : Madame la sénatrice, je vous rappelle la Feuille de route pour les langues officielles du Canada 2013-2018, qui concerne l'éducation, l'immigration et les communautés. Citoyenneté et Immigration Canada a investi 29,4 millions de dollars pour appuyer les communautés de langue officielle en situation minoritaire, et le gouvernement du Canada finance 13 réseaux d'immigration francophone aux quatre coins du pays, sauf au Québec et au Nunavut. Ces réseaux mobilisent les intervenants mis en place afin de favoriser la collaboration dans le but d'accroître l'immigration francophone dans les communautés visées.

D'ailleurs, récemment, le ministre Alexander s'est engagé à tenir des consultations pour trouver des moyens supplémentaires pour attirer les francophones les plus talentueux et les plus brillants qui nous aideront à répondre à nos besoins en matière de main-d'œuvre.

Je pense donc, madame la sénatrice, que ce sont des actions concrètes qui parlent d'elles-mêmes et qui font partie du plan que nous avons adopté dans le cadre de la Feuille de route pour les langues officielles, qui a d'ailleurs été applaudie par les communautés francophones du Canada, et particulièrement par des gens de votre province.

La sénatrice Chaput : J'ai une autre question complémentaire. Je reconnais et j'apprécie ce que vous venez de nous dire, monsieur le leader, mais je vous répète la même question : le ministre semble être ouvert à l'immigration francophone et veut l'appuyer. C'est le message qui nous a été transmis à plusieurs reprises. Il veut aussi trouver des moyens supplémentaires pour appuyer l'immigration francophone, comme vous venez de le mentionner. Alors, pourquoi ne veut-il pas reconnaître comme moyen supplémentaire une mesure spécifique d'appui à l'immigration francophone au sein du programme Entrée express qui sera lancé en 2015? Les communautés et les employeurs le demandent. Pourquoi ne peut-on pas faire ajouter ce moyen à ceux que le ministre appuie déjà?

Le sénateur Carignan : Madame la sénatrice, comme je l'ai expliqué, le Programme des travailleurs étrangers temporaires a atteint ses objectifs, lesquels avaient été adoptés afin que les Canadiens puissent obtenir en priorité les emplois disponibles. En ce qui a trait à l'immigration francophone, le gouvernement continuera de la promouvoir au moyen de ses programmes d'immigration permanents, en incluant également les demandes d'immigration qui seront traitées dans le cadre du programme Entrée express. Nous allons également continuer de favoriser, à l'aide de la Feuille de route pour les langues officielles, les actions menées en ce sens.

Si vous avez d'autres suggestions constructives à faire au chapitre de l'immigration, nous y sommes toujours ouverts. Je crois tout de même que notre bilan est éloquent, au regard de nos actions en matière d'immigration francophone.

La sénatrice Chaput : Pour ajouter à ce bilan, monsieur le leader, pourriez-vous, s'il vous plaît, poser les questions suivantes au ministre de l'Immigration et me revenir avec les réponses?

(1440)

Pourriez-vous demander au ministre de l'Immigration d'examiner de nouveau la possibilité d'ajouter des mesures spécifiques d'appui à l'immigration francophone au sein du programme Entrée express?

Pourriez-vous aussi demander au ministre de l'Immigration à quelles dates se tiendront les consultations et à quel moment ces consultations auront lieu auprès des communautés de langue officielle en situation minoritaire?

Le sénateur Carignan : Si vous me le permettez, je lui transmettrai personnellement vos demandes par l'entremise de mon bureau. Je devrais voir le ministre demain à la réunion du caucus, parce que nous avons la chance de siéger dans un caucus avec nos collègues de l'autre Chambre; il s'agit d'un moment privilégié pour échanger des idées sur les enjeux qui touchent ce beau grand pays.

L'honorable Marie-P. Charette-Poulin : Lorsque vous serez assis à côté de votre collègue pour lui transmettre la question de la sénatrice Chaput, vous pourriez également lui poser ma question au sujet du processus. J'étais membre du Comité des langues officielles lorsque le ministre de l'Immigration a comparu devant le comité, en juin, si je me souviens bien. Le ministre était particulièrement fier de nous parler de ce programme d'appui à l'immigration francophone au pays. Comment peut-on, dans un processus ministériel et dans un processus de décision, appuyer un programme en juin et annoncer son annulation en septembre?

Le sénateur Carignan : Comme vous le savez, nous avons jugé nécessaire de revoir le Programme des travailleurs étrangers temporaires. Je crois que vous avez été témoin des événements qui ont nécessité la révision des objectifs du programme et que vous en avez entendu parler. Le programme sert avant tout à fournir de la main-d'œuvre temporaire lorsqu'on ne peut trouver un Canadien pour occuper un emploi. Vous serez d'accord avec nous sur le fait que, en premier lieu, le programme doit servir à trouver des emplois aux Canadiens et, subsidiairement seulement, à des travailleurs étrangers temporaires.

Les finances

L'endettement des ménages—Le prix du logement

L'honorable Céline Hervieux-Payette : Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. La semaine dernière, à Sydney, en Australie, le ministre des Finances, M. Oliver, nous a donné l'impression que les supposés résultats du gouvernement Harper lui fournissaient l'occasion de donner une leçon d'économie aux pays européens en difficulté et à d'autres pays ailleurs dans le monde.

Le ministre Oliver a déclaré ce qui suit :

[Traduction]

Nous ne voulons pas [...] voir l'Europe s'engager dans une spirale déflationniste.

[Français]

Cependant, il y a un problème : le Canada affiche présentement un ratio d'endettement des ménages de 164 p. 100. La dernière fois que je vous ai parlé de la question de l'endettement, on en était à 152 p. 100, et il y a de cela environ six mois.

Les spirales déflationnistes, en clair, ce sont des moments où personne n'a plus les moyens d'emprunter et où tout le monde rembourse sa dette. À ce moment-là, évidemment, les banques s'inquiètent. L'indicateur clé annonçant qu'un tel événement se produira est une hausse dramatique continue de la dette des ménages. Une augmentation de 12 p. 100 en quelques mois est tout de même très inquiétante. Certains se sentent en sécurité au Canada, car ils croient qu'une crise financière majeure ne pourrait jamais nous arriver. Cependant, le président sortant de la Banque de Toronto, Ed Clark, dans son discours d'adieu ou presque, la semaine dernière, à Toronto, a déclaré que le gouvernement devrait faire quelque chose pour réduire la dette des ménages canadiens.

M. Clark a dit ce qui suit, et je cite :

[Traduction]

[...] tant qu'on offre des taux d'intérêt bas, on devrait pouvoir continuellement s'appuyer sur des bulles d'actifs.

[Français]

Cela signifie que le risque d'une crise est présent — cela a été souligné par un président de banque sortant — et qu'il doit être géré par le gouvernement immédiatement.

Quelles mesures votre gouvernement envisage-t-il de mettre en œuvre afin de lutter contre la hausse continue et dramatique de l'endettement des ménages canadiens et contre la hausse du prix de l'immobilier?

La question se pose probablement davantage pour nos collègues de l'Ouest que pour vous et moi qui habitons au Québec, mais cette hausse est tout de même inquiétante.

L'honorable Claude Carignan (leader du gouvernement) : Merci, sénatrice, pour votre question qui comporte plusieurs volets sur les mesures que notre gouvernement met en œuvre pour contrer l'endettement des ménages.

Comme vous le savez, nous ne voulons surtout pas que les Canadiens soient surendettés, et notre priorité est qu'ils puissent prendre des décisions financières éclairées. Nous avons, par exemple, désigné un responsable de l'éducation financière pour surveiller leurs progrès. Nous avons réduit le fardeau fiscal et créé le compte d'épargne libre d'impôt pour inciter les Canadiens à épargner pour leur avenir.

Les consommateurs canadiens méritent que l'accès au crédit soit équitable et transparent. C'est pourquoi nous avons mis en place de nouvelles règles qui interdisent la distribution de chèques non sollicités sur carte de crédit; qui exigent que l'information soit présentée de façon claire et simple; qui exigent que les hausses des taux d'intérêt et les frais soient communiqués à l'avance; qui limitent les pratiques commerciales nuisibles aux consommateurs et, enfin, qui éliminent les dates d'expiration de cartes de crédit prépayées.

Nous avons été attentifs aux préoccupations des petits entrepreneurs et nous avons présenté un code de conduite dont nous surveillons constamment l'observation. Nous travaillons également avec les petites entreprises et les consommateurs pour entendre leur opinion.

Nous continuons aussi à surveiller de près le marché du logement. Nous sommes intervenus de façon prudente au cours des dernières années pour réduire l'endettement des consommateurs et le risque financé par les contribuables, tout en réduisant la période d'amortissement à 25 ans pour les prêts hypothécaires garantis par le gouvernement. Nous avons également abaissé à 80 p. 100 le montant maximal que les prêteurs hypothécaires peuvent accorder dans le cadre du refinancement de prêts hypothécaires. En outre, nous avons éliminé la garantie d'assurance sur les marges de crédit hypothécaire, laquelle était financée par les contribuables. L'ensemble de ces mesures a contribué et contribue à faire en sorte que le marché de l'habitation au Canada reste relativement fort, tout en permettant de gérer ou de limiter le surendettement des ménages.

La sénatrice Hervieux-Payette : Votre réponse vous a donné une belle occasion de parler d'autres mesures; je vous parlais strictement du taux d'endettement, qui est de 164 p. 100 et qui est lié directement au marché de l'habitation.

D'ailleurs, la semaine dernière, M. Evan Siddall, PDG de la SCHL, a déclaré que son organisation cherche de meilleures façons de gérer l'exposition du gouvernement dans le cadre du marché de l'habitation. Rappelez-vous, lors de la crise, que des hypothèques d'une valeur de 70 milliards de dollars ont été reprises par la SCHL parce que nos banques n'avaient plus de liquidités.

Cela signifie qu'il existe, à l'heure actuelle, des risques qui doivent être gérés et traités. M. Siddall a expliqué comment la SCHL est en train de réexaminer son rôle tout en envisageant les mesures qui pourraient être prises. Elle reconnaît donc qu'il y a un problème.

Or, le ministre des Finances, lors de cette réunion du G20, a déclaré que ce sont des questions à long terme qui ne nécessitent pas une attention immédiate, alors même que M. Siddall se penche sur le même sujet au moment où on se parle.

J'en viens à ma question : alors que les secteurs privé et public nous informent que des risques importants menacent l'économie canadienne, pourquoi le gouvernement ne prend-il pas des mesures immédiates pour freiner la hausse des prix du logement et pour minimiser les risques pour le secteur public, soit le portefeuille de tous les Canadiens qui paient des impôts au Canada?

Le sénateur Carignan : Votre question à propos du système bancaire me donne l'occasion de réitérer que le système financier du Canada est fort et sûr. En fait, pendant sept années de suite, le Forum économique mondial a classé le système bancaire du Canada au premier rang mondial pour sa solidité. Le régime de renflouement adopté permettra de réduire les risques que courent les contribuables canadiens dans l'éventualité extrêmement improbable de la faillite d'une grande banque, en faisant porter le risque de comportement des obligations de certaines banques par ceux qui ont choisi d'assumer ce risque.

(1450)

Cette mesure protégera les contribuables. Cette approche avait été annoncée dans le Plan d'action économique de 2013, contre lequel vous avez voté, si je ne m'abuse.

[Traduction]

Dépôt de réponses à des questions inscrites au Feuilleton

Les anciens combattants—L'agent formé par Anciens combattants Canada en poste au bureau de Service Canada à Charlottetown

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) dépose la réponse à la question no 13 inscrite au Feuilleton par le sénateur Downe.

Les anciens combattants—Les poursuites intentées contre le gouvernement au sujet de la Charte des anciens combattants

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) dépose la réponse à la question no 15 inscrite au Feuilleton par le sénateur Downe.

Le revenu national—L'auto-identification des anciens combattants et de leurs familles

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) dépose la réponse à la question no 20 inscrite au Feuilleton par le sénateur Downe.

Les anciens combattants—La recommandation du Groupe consultatif sur les besoins spéciaux en 2006 pour qu'Anciens Combattants Canada emploie des anciens combattants

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) dépose la réponse à la question no 23 inscrite au Feuilleton par le sénateur Downe.

Les anciens combattants—Les primes

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) dépose la réponse à la question no 25 inscrite au Feuilleton par le sénateur Downe.

Le revenu national—Le financement de gouvernements, d'ambassades, d'entreprises d'État ou d'organisations et de personnes affiliées de l'étranger

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) dépose la réponse à la question no 27 inscrite au Feuilleton par le sénateur Downe.

Les travaux publics et les services gouvernementaux—L'Édifice Jean Canfield

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) dépose la réponse à la question no 28 inscrite au Feuilleton par le sénateur Downe.

Les transports—Le financement et l'exploitation du pont de la Confédération

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) dépose la réponse à la question no 33 inscrite au Feuilleton par le sénateur Downe.


ORDRE DU JOUR

Le Code canadien du travail
La Loi sur les relations de travail au Parlement
La Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénatrice Martin, appuyée par l'honorable sénatrice Marshall, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-525, Loi modifiant le Code canadien du travail, la Loi sur les relations de travail au Parlement et la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (accréditation et révocation — agent négociateur).

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) : Permettez-moi d'apporter une précision, Votre Honneur. L'ajournement est inscrit à mon nom, mais ce n'est pas moi qui parraine ce projet de loi. Je ne veux pas prendre la parole au sujet de ce projet de loi; le sénateur Tannas pourrait donc le faire maintenant.

Son Honneur le Président : C'est tout à fait conforme au Règlement. Nous poursuivons le débat, et je crois que le sénateur Tannas souhaite prendre la parole.

L'honorable Scott Tannas : Je vous remercie beaucoup, Votre Honneur.

Honorables sénateurs, aujourd'hui, mon discours sera bref, car la Loi sur le droit de vote des employés est un projet de loi assez court et, selon moi, fort sensé.

Le principe de base du projet de loi est que tous les travailleurs assujettis à la réglementation fédérale devraient avoir le droit démocratique à un scrutin secret libre et équitable lorsqu'ils décident d'accréditer un syndicat ou de révoquer son accréditation.

Le système actuel de vérification des cartes pour les industries sous réglementation fédérale exige que plus de la moitié des travailleurs signent une carte de membre en vue de l'accréditation syndicale. Ce système prête le flanc aux abus; des collègues de travail et d'autres parties intéressées pourraient faire pression auprès des employés afin qu'ils signent leur carte de membre. Le projet de loi remplacerait l'accréditation automatique d'un syndicat par l'exigence de l'obtention d'une majorité de votes exprimés lors d'un scrutin secret à l'appui de l'accréditation.

Honorables sénateurs, tout comme le vote secret aux élections générales représente la voix de chaque électeur, un vote secret sur l'accréditation syndicale permettrait aux employés d'exprimer librement leur volonté.

De la même façon qu'un grand nombre de Canadiens ne veulent pas dire pour qui ils ont voté lors d'élections générales, il y a certainement des travailleurs qui n'aiment pas exprimer publiquement leur opinion sur la syndicalisation. Donc, le projet de loi prévoit la mise en place d'un cadre protégeant ces travailleurs.

Le projet de loi propose aussi de fixer à 40 p. 100 le seuil minimal d'appui des employés pour valider le processus d'accréditation et de révocation d'accréditation. Ce seuil correspond davantage aux conventions internationales et à la majorité des lois provinciales. Je pense que cette approche est juste et qu'elle permettra d'établir des règles équitables, tant pour ceux qui sont favorables à la syndicalisation que pour ceux qui s'y opposent.

Le projet de loi propose l'entrée en vigueur de la mesure six mois après la sanction royale, ce qui donnera aux commissions des relations de travail suffisamment de temps pour apporter des changements à leurs règlements et procédures.

Honorables sénateurs, comme je l'ai dit, il me semble raisonnable d'utiliser ce système dans l'intérêt des droits démocratiques des travailleurs. De même, il semble aussi que les travailleurs jugent cette approche pleine de bon sens. Selon les sondages effectués auprès d'employés syndiqués et non syndiqués au Canada, une grande majorité d'entre eux appuient la tenue de scrutins secrets pour l'accréditation et la révocation d'accréditation. Honorables sénateurs, il est clair que les Canadiens sont d'avis que nous devrions adopter cette importante mesure pour protéger ce droit fondamental des employés qui travaillent dans des lieux sous réglementation fédérale.

Au cours des derniers mois, plusieurs de nos collègues se sont rendus dans des pays où l'intimidation des électeurs est pratique courante. En tant que Canadiens, nous tirons une grande fierté de nos processus démocratiques. Le scrutin secret est une caractéristique de notre démocratie moderne. C'est un système que nous appuyons au point d'avoir versé notre sang pour aider d'autres pays à en bénéficier et à accéder à la liberté et à la démocratie.

J'invite tous les sénateurs à appuyer ce projet de loi. C'est une mesure sensée qui va rendre le processus d'accréditation et de révocation d'accréditation des syndicats beaucoup plus démocratique, puisque tous les travailleurs pourront s'exprimer sans crainte d'intimidation. Je vous remercie.

L'honorable Joan Fraser (leader adjointe de l'opposition) : Le sénateur Tannas accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Tannas : Oui.

La sénatrice Fraser : Il y a longtemps que je n'ai pas eu à réfléchir à ces questions, mais je me demande comment fonctionnerait le processus, particulièrement dans le cas d'une campagne d'accréditation. Comment déterminerait-on qu'un vote d'accréditation doit se tenir s'il n'y a pas signature de cartes ou autres mesures du genre? Pourriez-vous m'éclairer à ce sujet?

Le sénateur Tannas : Je crains de ne pas être en mesure de le faire, si ce n'est pour dire que le processus prévoirait un seuil minimal de 40 p. 100, au lieu de la signature de carte dans une proportion de 50 p. 100 plus une, comme c'est le cas actuellement. Je vais obtenir la réponse à votre question et je vous la communiquerai.

La sénatrice Fraser : Merci beaucoup. Je suis sûre qu'il sera utile pour nous tous de mieux comprendre le fonctionnement du processus.

Votre Honneur, je ne suis pas le porte-parole de l'opposition relativement à ce projet de loi. Nous n'avons pas encore de porte-parole, mais nous en aurons un très bientôt. En attendant, je propose l'ajournement du débat.

(Sur la motion de la sénatrice Fraser, le débat est ajourné.)

(1500)

[Français]

Le Sénat

Ses racines, l'histoire de ses origines et son évolution—Interpellation—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Nolin, attirant l'attention du Sénat sur ses racines, l'histoire de ses origines ainsi que sur son évolution.

L'honorable Diane Bellemare : Honorables sénateurs, je prends la parole au nom du sénateur Tannas, qui m'a laissé le droit de prendre la parole, aujourd'hui, sur cette interpellation.

Son Honneur le Président intérimaire : Vous ne prenez pas la parole au nom du sénateur Tannas, mais vous le remplacez. Il vous a cédé son ajournement.

La sénatrice Bellemare : Exactement. Honorables sénateurs, il y a maintenant près d'un an que le gouverneur général a prononcé le dernier discours du Trône. Au chapitre de l'anniversaire de la Confédération, il a dit ce qui suit, et je cite :

La route vers 2017 est le moment tout indiqué pour renforcer nos institutions et nos processus démocratiques. Le gouvernement demeure convaincu que le statu quo au Sénat du Canada ne peut plus durer. Ce dernier doit subir une réforme ou être éliminé, comme ses équivalents provinciaux. Les travaux du gouvernement à cet égard reprendront lorsque la Cour suprême se sera prononcée.

La Cour suprême a maintenant rendu son jugement. Ainsi, de l'avis du plus haut tribunal canadien, le gouvernement fédéral ne peut modifier unilatéralement certaines dispositions relatives au mode de fonctionnement du Sénat. Dans son jugement, elle dit ce qui suit :

Le Sénat est une des institutions politiques fondamentales du Canada. Il se situe au cœur des ententes ayant donné naissance à la fédération canadienne.

Elle poursuit en disant ce qui suit :

La Constitution ne doit pas être considérée comme un simple ensemble de dispositions écrites isolées. Elle a une architecture, une structure fondamentale.

C'est pourquoi, selon la Cour suprême, l'introduction d'élections consultatives pour la nomination des sénateurs ainsi que des modifications à la durée exigeraient l'approbation de 7 provinces représentant 50 p. 100 de la population, car ces changements métamorphoseraient l'architecture de la Constitution.

Au sujet de l'abolition du Sénat, la Cour suprême conclut de la façon suivante, et je cite :

L'abolition du Sénat changerait donc fondamentalement notre architecture constitutionnelle — en supprimant la structure bicamérale de gouvernement qui sous-tend l'architecture de la Loi constitutionnelle de 1867 — et modifierait la partie V,...

— soit, chers collègues, la procédure d'amendement —

... ce qui exige le consentement unanime du Parlement et des provinces [...]

Le dernier jugement de la Cour suprême impose des conditions exigeantes, difficiles à respecter pour réformer fondamentalement le Sénat.

Même s'il y avait eu, depuis 1867, 17 propositions de réforme, est-ce une raison de tenter d'abolir le Sénat? Cette idée a aussi été avancée régulièrement depuis les débuts de la Confédération. Notre ex-collègue, l'honorable Hugh Segal, qui n'était pas d'accord avec l'abolition du Sénat, a d'ailleurs présenté une motion en cette Chambre, en 2007, concernant la tenue d'un référendum pancanadien sur cette question. Toutefois, advenant l'obtention d'une majorité en faveur de l'abolition du Sénat, il n'est pas certain, d'un point de vue constitutionnel, qu'on aurait pu le faire, comme l'a soutenu l'ex-sénatrice Sharon Carstairs en décembre 2008 en cette Chambre.

[Traduction]

Autrement dit, s'il est possible d'abolir le Sénat, les chances que cela se produise sont très faibles.

[Français]

Néanmoins, la question de l'abolition du Sénat revient trop souvent pour que l'on puisse l'écarter du revers de la main. Les raisons invoquées pour l'abolir sont essentiellement toujours les mêmes. Parmi celles-ci, on entend que le Sénat est une institution archaïque et antidémocratique, qui fait obstruction aux projets de loi adoptés à la majorité par les députés élus à la Chambre des communes, seule Chambre élue représentant la population. Les sénateurs seraient nommés selon des critères arbitraires que seul le premier ministre connaît. Ces nominations serviraient à récompenser ceux ou celles qui auraient servi le parti au pouvoir, ce qui ferait du Sénat une institution plus partisane qu'indépendante. Prêts à obéir aux ordres de leur parti respectif, les sénateurs défendraient les intérêts de leur parti plutôt que d'accomplir convenablement leur devoir, soit celui de défendre les intérêts de leur province et ceux du Canada en général. De plus, le statut conféré aux sénateurs les inciterait à profiter indûment de leurs privilèges, critique qui revient chaque fois qu'un ou des sénateurs sont accusés de frauder le système.

Le Sénat canadien est-il à ce point dysfonctionnel qu'on ne puisse le rendre plus efficace, plus légitime et lui permettre de jouer le rôle pour lequel les provinces l'ont créé, sans amender la Constitution?

[Traduction]

Est-il possible que les Pères de la Confédération aient si mal rédigé la Constitution que nous devions maintenant abolir le Sénat? Je ne le crois pas.

[Français]

Le Sénat est une institution importante, qui doit continuer à protéger la démocratie au Canada, mais le Sénat doit être réformé, et il est possible de le faire sans amender la Constitution.

Dans cette première de deux interventions, je tente de répondre à la question suivante : quel est le rôle distinctif de la Chambre haute qui fait qu'aucune autre institution parlementaire canadienne ne peut l'exercer convenablement? J'aborderai les questions de réforme dans le cadre de ma deuxième intervention.

Dans mes propos, je reprends, à ma façon, des idées déjà exprimées dans cette Chambre et ailleurs. Ils s'inspirent notamment des contributions réunies, sous la direction de l'honorable Serge Joyal, dans l'ouvrage Protéger la démocratie : le Sénat en vérité, ainsi que d'autres ouvrages et des contributions apportées par des sénateurs, notamment, dans le contexte des interpellations lancées par notre collègue l'honorable Pierre Claude Nolin, que je remercie de son initiative.

Je m'appuie également sur un ouvrage, que j'ai lu cet été d'un couvert à l'autre, signé par John Stuart Mill et paru en 1861, Considérations sur le gouvernement représentatif. Comme vous le savez, Mill est un grand philosophe britannique d'économie politique qui a grandement inspiré les Pères de la Confédération et de nombreux sénateurs dans les débats sur l'abolition du Sénat.

Vous vous demandez sans doute quelle est la pertinence de s'appuyer sur un ouvrage vieux de plus de 150 ans. En fait, les propos de Mill sur la démocratie portent en eux une vision du futur qui s'est actuellement concrétisée dans le fait que le nombre de sénats dans le monde ne cesse d'augmenter — comme j'en ferai état plus tard.

En fait, Mill explique avec une grande limpidité pourquoi le Sénat constitue le premier rempart de protection de la démocratie. On en a beaucoup parlé, mais j'aimerais citer Mill sur la notion de la démocratie. Dans son ouvrage, il dit ce qui suit :

On confond habituellement deux idées très différentes sous le nom de démocratie. L'idée pure de la démocratie, selon sa définition, c'est le gouvernement du peuple tout entier par le peuple également représenté. La démocratie, telle qu'on la conçoit ordinairement et telle qu'on la pratique par conséquent, c'est le gouvernement du peuple tout entier par une simple majorité du peuple exclusivement représentée.

La première est synonyme d'égalité pour tous les citoyens. La seconde, que l'on confond étrangement avec la précédente, désigne un gouvernement de privilège en faveur de la majorité numérique qui, concrètement, possède seule une voix dans l'État. C'est la conséquence inévitable de la manière dont les votes sont aujourd'hui recueillis entraînant la complète exclusion des minorités.

Dans une démocratie réellement égalitaire, tout groupe, quel qu'il soit, serait représenté non pas disproportionnellement, mais proportionnellement à son importance. [...] Si ce n'est pas le cas, alors nous n'avons pas un gouvernement égalitaire, mais un gouvernement d'inégalité et de privilège; une partie du peuple règne sur le reste; cela signifie qu'à une partie du peuple est retirée une mesure équitable et égale d'influence au sein de la représentation; ce qui est contraire à tout gouvernement juste, mais surtout contraire au principe de la démocratie qui, en sa racine et en son fondement, professe l'égalité.

(1510)

Cet impératif de poursuivre la démocratie pure plutôt que de s'appuyer uniquement sur la voie de la majorité simple est inscrit dans la Constitution canadienne et confirmé dans plusieurs renvois de la Cour suprême. Pourquoi les Pères de la Confédération ont-ils insisté sur ce point? Parce que la démocratie vraie, celle où tous les points de vue sont représentés, est nécessaire à la pérennité des institutions démocratiques.

[Traduction]

Chers collègues, comme vous le savez, le principe de la majorité simple est trompeur et, même s'il paraît être une bonne idée, il pourrait secrètement permettre à la minorité d'imposer sa volonté à la majorité. Cette situation est rendue plus probable à cause du grand nombre de partis qui se font concurrence. Le pire, c'est que, en fonction de la façon dont les limites des circonscriptions sont tracées, une majorité simple pourrait donner un mandat majoritaire à un parti qui a reçu moins de voix que l'opposition officielle. C'est ce qui s'est produit lors des élections provinciales québécoises de 1998.

[Français]

De telles situations cultivent le cynisme dans la population. N'est-ce pas ce qui se passe actuellement au Canada, lorsqu'on observe la baisse du taux de participation aux élections fédérales et provinciales depuis plus de 20 ans, et hier encore, au Nouveau-Brunswick? Pour cette raison, John Stuart Mill prône un mode de représentation proportionnelle plutôt qu'un mode de représentation à la majorité simple, comme cela est le cas au Canada.

[Traduction]

Je répète que c'est la raison pour laquelle M. Mill recommande de remplacer le système à majorité simple que nous avons actuellement au Canada par un système de représentation proportionnelle.

[Français]

Par contre, une Chambre haute peut jouer un rôle important pour défendre les intérêts de ceux et celles qui ne sont pas représentés au gouvernement et ainsi promouvoir une véritable démocratie dans un contexte de représentation à la majorité simple. En effet, le Sénat peut et doit faire entendre les voix des groupes politiques associés à des causes et à des situations minoritaires, comme la protection de l'environnement et les changements climatiques, pour ne nommer que ceux-là.

[Traduction]

Cela contribue de manière cruciale à la vitalité de notre démocratie. D'après M. Mill, il s'agit du premier rôle de la deuxième Chambre.

[Français]

Cet extrait de l'ouvrage de John Stuart Mill, cité récemment par le sénateur Nolin, mérite d'être répété. Il se lit comme suit :

La considération qui milite le plus, selon moi, en faveur des deux Chambres [...], c'est l'effet néfaste produit sur l'esprit de tout détenteur du pouvoir, que ce soit un individu ou une assemblée, par la conscience de n'avoir que soi-même à consulter. Il est important qu'aucun ensemble d'hommes ne puisse, même temporairement, faire prévaloir son sic volo sans solliciter le consentement de personne d'autre. Une majorité dans une assemblée quand elle a acquis un caractère permanent — quand elle est composée des mêmes personnes accoutumées à agir ensemble et toujours assurées de la victoire au sein de la Chambre —, devient aisément despotique et arrogante, si on la libère de la nécessité de s'assurer que ses actes seront soutenus par une autre autorité institutionnelle. Cette même raison qui conduisit les Romains à se doter de deux consuls rend souhaitable que nous ayons deux Chambres, et que ni l'une ni l'autre ne soient jamais exposées, même l'espace d'une année, à l'influence corruptrice du pouvoir non partagé.

Bref, pour John Stuart Mill, le Sénat a un rôle majeur à jouer pour protéger la démocratie d'un pays contre l'exploitation des minorités par une majorité de députés souvent élus par une minorité d'électeurs. Ce rôle, le Sénat l'exerce par le simple fait de son existence. Heureusement, il peut faire beaucoup plus que d'exister.

Une deuxième fonction exclusive aux sénats dans les pays fédérés est de protéger les intérêts des régions ou des provinces constituantes dans la législation et les politiques fédérales. Les débats entre les provinces qui ont entouré la création du Canada sont autant de preuves qu'elles ont vu dans la deuxième Chambre le moyen de protéger leurs intérêts. Sans la création d'un Sénat, il n'y aurait jamais eu de Canada. Tous les experts, de même que la Cour suprême, sont clairs sur ce point.

Malheureusement, au Canada, les liens entre le Sénat et les réalités provinciales sont laissés au libre arbitre des sénateurs individuels plutôt que d'être institutionnalisés dans des pratiques. Par exemple, dans plusieurs fédérations, comme l'Allemagne, l'Autriche et l'Australie, des dispositions institutionnelles liées au processus de nomination sont prévues pour veiller à ce que ce rôle soit réellement pris en compte par la Chambre haute.

Bref, le Sénat permet, en théorie, de promouvoir la démocratie pure et constitue un lieu privilégié pour protéger les intérêts des provinces dans la législation fédérale. Cela est majeur.

La troisième fonction que ne peut remplir adéquatement la Chambre basse est celle d'être une seconde Chambre de réflexion. En effet, trop souvent, la Chambre basse, dominée par l'esprit partisan, n'a pas le temps ni la volonté d'amender ses projets de loi pour faire place aux commentaires répétés de la population ou de groupes socioéconomiques importants, ni même d'en corriger la formulation dans les deux langues officielles.

À ce chapitre, le Sénat a souvent amendé les projets de loi provenant de la Chambre des communes afin de les améliorer. Depuis 1960, 116 projets de loi, dont 33 depuis l'an 2000, qui ont été présentés à la Chambre des communes ont été amendés par la Chambre haute et ont obtenu la sanction royale.

Son Honneur le Président intérimaire : Est-ce que l'honorable sénatrice demande plus de temps pour terminer ses remarques?

La sénatrice Bellemare : S'il vous plaît.

Son Honneur le Président intérimaire : Les honorables sénateurs consentent-ils à accorder cinq minutes de plus à la sénatrice?

Des voix : D'accord.

La sénatrice Bellemare : D'autres projets de loi ont été rejetés, dont 74 au XXe siècle et 2 depuis l'an 2000. Ces données montrent clairement que, depuis 2000, le Sénat ne paralyse pas souvent la Chambre des communes, comme certains détracteurs se plaisent à l'affirmer, mais qu'il permet d'améliorer la qualité des lois.

[Traduction]

Je tiens maintenant à souligner que le Sénat n'est pas une institution ancienne et archaïque, contrairement à ce que plusieurs prétendent. C'est tout à fait le contraire. En réalité, le bicaméralisme est en hausse partout dans le monde.

[Français]

Selon la documentation produite par le Sénat de France — soit dit en passant, je publierai les différents tableaux sur mon site web —, le nombre de sénats ne cesse d'augmenter. Il y en aurait aujourd'hui 80 dans le monde. En 1900, on comptait 17 pays qui avaient une Chambre haute; en 1945, il y en avait 22; en 1980, 38; en l'an 2000, 60; et en 2014, 80.

Ceci confirme ce qu'entrevoyait John Stuart Mill il y a plus de 150 ans, soit la quête incessante de l'humanité pour une plus grande démocratie.

De plus, toutes les fédérations, même celles qui ont adopté la représentation proportionnelle, pratiquent le bicaméralisme, comme vous le savez, à l'exception de la Micronésie et des Émirats arabes.

(1520)

Certains plaideront que plusieurs pays reconnus pour leur démocratie vivante, comme les pays scandinaves, l'ont abandonné.

Il faut noter que les pays scandinaves qui ont aboli leur sénat n'étaient pas des fédérations — et ne le sont toujours pas. Pour expliquer leur geste, ces pays ont choisi de faire entendre les voix minoritaires à travers un mode de représentation proportionnelle. Je cite cet extrait d'un document produit par le Sénat français :

L'une des raisons invoquées pour justifier la disparition du bicamérisme dans les pays nordiques est l'utilisation de la représentation proportionnelle dans la Chambre basse, qui permet de représenter toutes les minorités politiques.

Aussi, dans les pays scandinaves, les partenaires sociaux et économiques participent souvent aux décisions politiques. Les projets de loi font ainsi l'objet de négociations bien avant leur adoption par les membres du parlement. La démocratie politique et la démocratie économique qui se pratiquent dans les pays scandinaves permettent donc de prendre en compte les intérêts et l'opinion de tous les groupes politiques et économiques, conditions que ne respectent pas les institutions politiques canadiennes.

Certains diront encore que les provinces ont aboli leur deuxième Chambre. C'est vrai, mais une province n'est pas une fédération. Leur existence, à l'époque, n'était pas protégée par la Constitution. En fait, les conseils existaient avant la création du Canada et servaient notamment à protéger les droits des francophones et des anglophones en situation minoritaire, comme l'a si bien démontré la sénatrice Chaput.

En conclusion, dans le contexte constitutionnel canadien, il est difficile de soutenir que l'abolition du Sénat améliorerait la démocratie. Comme, au Canada, le mode de représentation n'est pas proportionnel, l'abolition du Sénat nécessiterait de nombreux ajustements au mode de fonctionnement de la Chambre des communes pour protéger la véritable démocratie.

On néglige trop souvent d'aborder cette question. Elle est toutefois importante, comme en témoigne l'expérience de la Nouvelle-Zélande, qui a aboli sa Chambre haute en 1951 et qui a dû instaurer un mode de représentation proportionnelle pour pallier les carences démocratiques de ses institutions parlementaires. Le Canada est-il prêt à instaurer une représentation proportionnelle à la Chambre des communes, ce qui exigerait souvent un gouvernement de coalition? C'est une question qu'il faut se poser.

On néglige également d'aborder la façon dont les intérêts des provinces pourraient être représentés dans la législation fédérale si le Sénat était aboli. En effet, la Cour suprême ne peut pas tout régler, alors que le Sénat peut intervenir à l'étape de la législation.

Bref, abolir le Sénat réduirait les moyens dont dispose le Canada pour protéger et promouvoir la démocratie, défendre les intérêts provinciaux dans la législation fédérale et assurer une législation de qualité.

Cela dit, en pratique, le Sénat pourrait, sans aucun doute, mieux assumer que par le passé les mandats qui lui ont été historiquement dévolus. Pour cette raison, des réformes s'imposent pour renforcer sa légitimité et son efficacité, car l'un ne va pas sans l'autre. Il pourrait aussi mieux faire connaître ce qu'il fait et ce pour quoi il existe.

Le Canada n'a donc d'autre choix que de travailler, sans relâche, à réformer le Sénat afin de répondre aux critiques sévères dont il fait l'objet. Ce sera le sujet de ma deuxième intervention.

Merci, honorables sénateurs, de votre attention.

[Traduction]

L'honorable James S. Cowan (leader de l'opposition) : Je ne sais pas si le temps de parole de la sénatrice Bellemare est écoulé ou s'il reste du temps pour une question.

Son Honneur le Président intérimaire : Il nous reste encore quelques minutes.

Le sénateur Cowan : Merci. Je serai bref. Je vous félicite de votre discours, madame la sénatrice. Je pense que vous avez fait une contribution utile à une série utile de débats lancés par notre collègue, le sénateur Nolin.

Vous avez parlé des façons d'améliorer notre manière de faire notre travail sans rouvrir la Constitution. D'après vous, quelles mesures devrions-nous prendre pour y parvenir?

[Français]

La sénatrice Bellemare : Ce sera l'objet de ma deuxième intervention, mais je peux vous en donner un petit aperçu. Je pense notamment qu'on doit peut-être travailler à modifier cette Constitution en ce qui concerne le processus de nomination, mais on doit, dès maintenant, adopter des mesures transitoires, un peu comme l'a fait l'Angleterre. Je vais en dire davantage à ce sujet : il s'agit de mesures transitoires qui ont été adoptées au Royaume-Uni, en l'an 2000, et qui sont toujours en vigueur, parce qu'on n'a jamais réussi à changer les choses. Je vais discuter de cela.

Je vais également discuter du rôle de la convention. Je crois que, au Sénat, nous pouvons faire beaucoup de choses si nous nous mettons d'accord. Ainsi, je parlerai du rôle de la convention concernant notre pouvoir absolu, par rapport à l'autre Chambre, de rejeter un projet de loi. Je parlerai d'autres petits éléments également.

L'honorable Joan Fraser (leader adjointe de l'opposition) : J'ai vraiment hâte d'entendre ce deuxième discours, mais entre-temps, je propose l'ajournement du débat.

(Sur la motion de la sénatrice Fraser, le débat est ajourné.)

[Traduction]

Affaires étrangères et commerce international

Autorisation au comité d'étudier le potentiel d'accroissement du commerce et de l'investissement entre le Canada, les États-Unis et le Mexique

L'honorable A. Raynell Andreychuk, conformément au préavis donné le 16 septembre 2014, propose :

Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international soit autorisé à examiner pour en faire rapport : le potentiel d'accroissement du commerce et de l'investissement entre le Canada, les États-Unis et le Mexique, y compris dans les secteurs de croissance clés des ressources, de la fabrication et des services; les mesures fédérales nécessaires à la réalisation des possibilités cernées dans ces secteurs clés; les possibilités d'intensifier la collaboration au niveau trilatéral;

Que le comité fasse rapport au Sénat au plus tard le 31 mars 2015.

— Honorables sénateurs, je vais simplement formuler quelques commentaires. Le comité est d'avis qu'il serait opportun de réexaminer les enjeux de notre continent. Par conséquent, cette étude vise à examiner le potentiel d'accroissement du commerce et de l'investissement entre le Canada, les États-Unis et le Mexique. Comme vous pouvez l'imaginer, nous n'envisageons pas une étude exhaustive sur cette question. Nous allons nous concentrer sur les modifications importantes que le Mexique a apportées à ses lois, lesquelles se répercutent sur les Canadiens et les Américains qui collaborent avec nos homologues mexicains.

Nous voulons simplement avoir un aperçu de la situation actuelle. Nous n'envisageons pas de dépenses ou de déplacements.

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

(La séance est levée, et le Sénat s'ajourne au mercredi 24 septembre 2014, à 13 h 30.)

© Sénat du Canada

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