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Débats du Sénat (Hansard)

2e Session, 41e Législature,
Volume 149, Numéro 139

Le jeudi 7 mai 2015
L'honorable Leo Housakos, Président

LE SÉNAT

Le jeudi 7 mai 2015

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Jafar Panahi

L'honorable Linda Frum : En cette Semaine de la responsabilisation de l'Iran, je prends de nouveau la parole au nom du cinéaste iranien Jafar Panahi. J'ai été jumelée avec lui dans le cadre du programme mondial de soutien aux prisonniers politiques iraniens.

Il y a eu du changement depuis que j'ai parlé de lui l'année dernière. Il y a trois mois, le film Taxi de M. Panahi a remporté l'Ours d'or au Festival international de cinéma de Berlin. Il a tourné ce film en dépit de restrictions sévères qui lui avaient été imposées par le régime iranien. Je le félicite pour le courage dont il a fait preuve en réalisant ce film et d'autres, alors que cela lui était interdit, et pour avoir reçu cette récompense de ses pairs.

En 2010, M. Panahi a été arrêté en plein tournage. Pourquoi? Parce que ses films traitent des conditions de vie en Iran — les difficultés auxquelles sont confrontés les femmes, les enfants et les pauvres.

Pour avoir péché en tentant de faire un film sur les événements qui ont suivi les élections iraniennes de 2009, M. Panahi a été condamné par le tribunal révolutionnaire à un emprisonnement de six ans et on lui a interdit de participer à toute activité politique, de faire des films, d'accorder des entrevues et de voyager à l'étranger pendant 20 ans. Bien que sa peine d'emprisonnement de six ans ne soit pas appliquée, elle pourrait l'être n'importe quand, tant la justice iranienne est arbitraire.

Entre-temps, M. Panahi est toujours officiellement frappé d'une interdiction de faire des films, d'accorder des entrevues et de sortir de l'Iran pendant 20 ans. Comme il l'a dit lui-même lors d'entrevues interdites :

Ils m'ont libéré d'une petite prison pour me jeter dans une plus grande lorsqu'ils m'ont interdit de travailler [...] je dois simplement continuer à essayer de trouver des occasions de m'évader de temps en temps.

J'en ai assez de devoir travailler en catimini dans des espaces très confinés et de ne pas jouir de la liberté que j'avais avant [...] Cela me fait mal au cœur de penser à tous les projets que j'aimerais entreprendre, mais je n'en ai plus les moyens.

Malgré cela, honorables sénateurs, selon Variety, une publication sur le monde du divertissement, M. Panahi a réalisé trois films depuis qu'on lui a interdit de le faire. En plus de Taxi, il a réalisé Ceci n'est pas un film et Pardé.

Honorables sénateurs, les cinéastes de partout dans le monde reconnaissent le talent de Jafar Panahi — et ils ont dénoncé le régime iranien, qui s'emploie à l'empêcher de s'exprimer. Si M. Panahi peut réaliser des films primés comme Taxi, malgré l'interdiction dont il est frappé, malgré les contraintes qui l'obligent à travailler en cachette et malgré les efforts qu'il doit déployer pour distribuer ses films dans le monde entier, songez un peu à la contribution qu'il pourrait faire à son pays et au monde entier s'il pouvait s'exprimer librement.

Honorables sénateurs, j'exhorte tout le monde à réfléchir au sort de Jafar Panahi et, en fait, de tous les gens en Iran qui subissent les injustices commises par leur gouvernement.

La Saskatchewan

Les droits des transgenres

L'honorable Lillian Eva Dyck : Honorables sénateurs, le 31 mars 2015, l'Assemblée législative de la Saskatchewan, à Regina, a arboré le drapeau de la fierté transgenre dans le cadre de la Journée internationale de la visibilité des transgenres et de la semaine provinciale de sensibilisation aux personnes transgenres. La Saskatchewan est la première capitale provinciale à hisser ce drapeau devant son assemblée législative. C'est un pas très positif pour la reconnaissance et la protection des droits des transgenres en Saskatchewan.

En décembre dernier, le gouvernement de la Saskatchewan a adopté une modification à son Code des droits de la personne pour interdire la discrimination fondée sur l'identité sexuelle. Ainsi, l'identité sexuelle a été ajoutée à la liste des motifs de distinction illicite en Saskatchewan.

Dans le contexte du débat sur le projet de loi C-279, dont le Sénat est actuellement saisi, j'attire aussi l'attention des sénateurs sur une tendance qu'on observe à Saskatoon. De plus en plus d'écoles secondaires ont aménagé des toilettes pour les deux sexes, pour permettre aux élèves d'exprimer leur identité sexuelle sans éprouver d'anxiété. Au contraire, ces toilettes favorisent l'inclusion. Elles permettent à tous les jeunes de se sentir bien et en sécurité à l'école à une période de leur vie où leurs questionnements identitaires pourraient leur faire éprouver de l'anxiété.

Il y a encore beaucoup à faire pour protéger et favoriser les droits des personnes transgenres en Saskatchewan et dans l'ensemble du Canada, mais je tiens à féliciter l'Assemblée législative de la Saskatchewan et l'organisme TransSask Support Services de leurs efforts soutenus pour que la loi protège autant les transgenres que les autres Canadiens.

Le Mois du patrimoine asiatique

L'honorable Victor Oh : Honorables sénateurs, c'est avec beaucoup de fierté que je parle aujourd'hui du Mois du patrimoine asiatique. Nous soulignons en mai de cette année sa 14e édition.

Ce mois est l'occasion idéale de célébrer la beauté des cultures asiatiques et de rappeler la longue et riche histoire des immigrants de l'Asie, ainsi que leur apport à la prospérité du Canada. Dans le contexte de la mondialisation, il est plus important que jamais de protéger, mais aussi de célébrer la diversité des cultures et des patrimoines.

À l'occasion du Mois du patrimoine asiatique, différentes activités et réjouissances sont organisées un peu partout au Canada. Je suis fier que le plus grand festival multiculturel de l'Ontario, Carassauga, ait lieu dans ma ville, Mississauga. L'activité Taste of Asia, qui s'est déroulée hier soir sur la Colline, a été très bien accueillie par les diplomates et les parlementaires.

Sur la Colline du Parlement, plusieurs groupes interparlementaires cherchent aussi à créer des liens avec leurs équivalents asiatiques et échangent des idées sur diverses questions internationales. La présence de sénateurs de culture asiatique témoigne à elle seule de la mosaïque culturelle et ethnique qu'on trouve au Canada.

En tant que sénateur d'origine singapourienne et fier membre de la communauté sino-canadienne, je me réjouis de voir que de telles initiatives incitent les membres de notre communauté à s'intéresser de plus près à leur identité culturelle tout en favorisant l'établissement de liens interculturels avec les autres Canadiens.

Cette année, honorables sénateurs, le Mois du patrimoine asiatique rend hommage aux athlètes canadiens d'origine asiatique, ceux d'hier comme ceux d'aujourd'hui, pour la manière dont ils ont contribué au monde des sports, ici comme sur la scène internationale. Il coïncide de plus avec la proclamation, par le gouverneur général du Canada, Son Excellence le très honorable David Johnston, de l'« Année du sport ».

(1340)

Le Mois du patrimoine asiatique permet de garder vivant le riche patrimoine culturel asiatique et de jeter les ponts de la compréhension entre les différents groupes culturels du pays. Bref, il fait ressortir les valeurs typiquement canadiennes que sont la compréhension mutuelle, le respect et le multiculturalisme.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune d'une délégation dirigée par le ministre des Finances et de la Planification de la Jamaïque, l'honorable Peter Phillips. Il est accompagné de la haute-commissaire de la Jamaïque au Canada, Son Excellence Janice Miller; du gouverneur de la Banque de la Jamaïque, M. Brian Wynter; du vice-président principal pour la région des Caraïbes de la Banque Scotia, M. Bruce Bowen; du secrétaire financier Devon Rowe; et, enfin, de Mme Helen McIntosh, du ministère des Finances et de la Planification. Ils sont les invités de l'honorable sénateur Meredith.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

George Braden

L'honorable Dennis Glen Patterson : Honorables sénateurs, je souhaite aujourd'hui rendre hommage à mon extraordinaire conseiller stratégique principal et associé de longue date, M. George Braden. Je m'estime privilégié d'avoir pu profiter de son expérience, de sa sagesse et de son professionnalisme depuis près de six ans maintenant. Conseiller avisé et membre respecté de l'équipe du Sénat, il a su gagner l'estime de tous ceux à qui il a eu affaire pendant toutes ces années, particulièrement dans les secteurs des ressources et des affaires gouvernementales.

George habite à Yellowknife depuis longtemps. Il a fait des études en sciences politiques à l'Université de l'Alberta et a complété sa maîtrise à l'Université Dalhousie en 1976.

De 1977 à 1979, M. Braden occupait les fonctions de conseiller principal auprès de l'honorable Bud Drury, celui-là même qui, dans un rapport, a fait état du mécontentement engendré dans les Territoires du Nord-Ouest par le régime colonial et antidémocratique qui avait cours et l'absence de progrès dans le règlement des revendications territoriales.

Puis, en 1979, George a été élu député territorial de Yellowknife-Nord. À l'époque, le colonialisme était encore bien vivant dans les Territoires du Nord-Ouest. Le commissaire nommé par le gouvernement fédéral et son sous-commissaire présidaient le Cabinet et dirigeaient des ministères clés. George Braden et, plus tard, le sénateur Nick Sibbeston ont mené la transition lorsque ces fonctionnaires coloniaux nommés ont abandonné leurs pouvoirs aux mains des représentants élus des citoyens des Territoires du Nord-Ouest. Cela a été accompli sans colère ni bouleversement, au moyen de la diplomatie.

Le leadership dont M. Braden a fait preuve au cours de cette transition paisible et historique a amené ses pairs à le choisir comme chef de l'exécutif élu des Territoires du Nord-Ouest — un poste qui a précédé celui de premier ministre.

George et ses collègues — et j'ai eu le privilège d'en être — ont marqué l'histoire en réglant des revendications territoriales. M. Braden a déclaré qu'il a toujours été fier que les Territoires du Nord-Ouest aient été « [...] l'une des premières administrations canadiennes ayant pour politique de partager avec les Autochtones les recettes tirées des ressources naturelles ».

Il a été le premier à diriger le long et, éventuellement, fructueux processus visant à revendiquer le rôle que les territoires avaient le droit de jouer dans les conférences des premiers ministres et la réforme constitutionnelle.

Lorsque la Constitution a été rapatriée, George Braden était coprésident du comité spécial des Territoires du Nord-Ouest chargé de la Constitution. Je crois que ce comité a contribué fructueusement à exercer des pressions sur le premier ministre Trudeau et son Cabinet afin que les droits des Autochtones soient reconnus à l'article 35 de la Constitution. Le sénateur Joyal le sait, car il était secrétaire d'État à l'époque où a été prise cette décision historique.

M. Braden a également été commissaire du pavillon très acclamé des Territoires du Nord-Ouest à l'Expo 86, un pavillon qui mettait en valeur l'industrie de la fourrure, qui employait exclusivement des résidants des Territoires du Nord-Ouest et qui a accueilli 1,5 million de visiteurs en six mois. Les hamburgers au bœuf musqué servis dans les restaurants du pavillon étaient l'un des plats préférés des visiteurs de l'exposition.

Pendant plusieurs années, M. Braden a bien représenté les Territoires du Nord-Ouest, ainsi que le Nord du Canada, au gouvernement fédéral, à titre de sous-ministre des Affaires intergouvernementales, avant de venir travailler au Sénat. George n'a pas perdu son humour pince-sans-rire, sa vive intelligence, son humilité et son humanité. Il se sert de ces qualités pour tenter d'obtenir des meilleures conditions de vie pour les habitants du Nord.

M. Braden est actuellement en congé de maladie. Je sais que mes collègues se joindront à moi pour le féliciter de son dévouement infatigable à la cause publique et pour lui souhaiter un prompt rétablissement.

L'Île-du-Prince-Édouard

Les résultats des élections

L'honorable Elizabeth Hubley : Honorables sénateurs, lundi dernier, les Prince-Édouardiens se sont déplacés en grand nombre pour élire les députés de la 65e assemblée générale de notre province.

À l'Île-du-Prince-Édouard, nous prenons nos responsabilités d'électeurs au sérieux. Nous savons que nos votes comptent. Par conséquent, notre taux de participation électorale est généralement élevé. Ces élections n'étaient pas différentes : 86 p. 100 des électeurs admissibles ont voté.

Il y a eu des résultats serrés dans certains districts, et il se peut qu'un nouveau dépouillement doive être effectué à un endroit ou deux, mais, officieusement, le premier ministre Wade MacLauchlan et son équipe libérale ont remporté 18 des 27 sièges, formant ainsi un troisième gouvernement majoritaire. Les progressistes-conservateurs, quant à eux, ont remporté 8 sièges, et ils forment l'opposition officielle.

Fait notable, le chef du Parti vert, Peter Bevan-Baker, est entré dans l'histoire en tant que premier député de ce parti à être élu dans notre province. Il s'agit d'un homme réfléchi, et je suis convaincue qu'il parviendra à se faire entendre à l'assemblée législative.

Durant la campagne, le premier ministre MacLauchlan a prôné une approche plus positive et a demandé aux partis de montrer ce qu'il y avait de meilleur en eux. C'est ce qu'ils ont fait, en grande partie. Le premier ministre espère qu'ils poursuivront sur cette voie lorsque les députés prendront leur place à l'assemblée législative pour gouverner notre province.

À l'Île-du-Prince-Édouard, la compétition politique peut être féroce. J'aimerais donc saluer chaque candidat de chaque parti qui a eu le courage de se présenter aux élections. Il n'est pas facile de se porter candidat à une charge publique — je le sais d'expérience —, mais la santé de notre démocratie en dépend. Les gens qui répondent à cet appel méritent d'être félicités.

En fin de compte, 27 candidats ont été élus pour représenter leurs concitoyens de l'île à l'assemblée législative. Je voudrais faire mes meilleurs vœux au premier ministre MacLauchlan et aux autres députés de la province pour les quatre prochaines années.

La Journée nationale des gilets de sauvetage et de la natation

L'honorable Nancy Greene Raine : Honorables sénateurs, on soulignera lundi la Journée nationale des gilets de sauvetage et de la natation sur la Colline du Parlement.

L'eau douce est l'une des plus grandes richesses du Canada. Notre pays compte des centaines de milliers de lacs d'eau douce non polluée, aux berges magnifiques et accueillantes pour les baigneurs lors des canicules estivales.

La Journée nationale des gilets de sauvetage et de la natation sur la Colline vise à promouvoir la natation et la sécurité aquatique parmi les Canadiens, depuis les cours de natation jusqu'à la pratique de ce sport la vie durant.

La natation est une belle forme d'activité physique modérée. C'est un sport formidable pour les familles parce qu'il est gratuit, qu'il est généralement très accessible et qu'il peut être pratiqué la vie durant.

Nous voulons également prévenir les noyades. Près de 500 Canadiens se noient chaque année, et le taux des noyades parmi les néo-Canadiens est trois fois plus élevé que dans la population en général. De tels accidents peuvent être évités lorsque les gens prennent des cours de natation et portent des gilets de sauvetage. Il est très important d'être initié à la sécurité aquatique, et cette initiation peut commencer dès l'âge d'un an. Une noyade peut se produire rapidement, parfois en deux minutes seulement.

Honorables sénateurs, si vous vous trouvez sur la Colline lundi, je vous invite à passer à l'avant de l'édifice du Centre à 15 h 30 pour rencontrer des chefs de file du monde de la natation et de la sécurité aquatique au Canada.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune d'un groupe de participants au programme de stages pour les Tibétains, qui est administré par l'Association canadienne des parlementaires amis du Tibet. Il s'agit de Sonam Chokey, Pema Tsering, Tenzin Palyoun et Chemi Lhamo. Ils sont les invités de la sénatrice Martin et de la sénatrice Jaffer.

Au nom de tous les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!


[Français]

AFFAIRES COURANTES

Le commissaire aux langues officielles

Dépôt du rapport annuel de 2014-2015

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport annuel de 2014-2015 du Commissariat aux langues officielles.

[Traduction]

La sécurité publique

Le Service canadien du renseignement de sécurité—Dépôt du rapport public de 2013-2014

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport public du Service canadien du renseignement de sécurité pour l'exercice 2013-2014.

Projet de loi sur la sûreté des pipelines

Projet de loi modificatif—Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-46, Loi modifiant la Loi sur l'Office national de l'énergie et la Loi sur les opérations pétrolières au Canada, accompagné d'un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Martin, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

(1350)

Projet de loi antiterroriste de 2015

Projet de loi modificatif—Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des de la Chambre des communes le projet de loi C-51, Loi édictant la Loi sur la communication d'information ayant trait à la sécurité du Canada et la Loi sur la sûreté des déplacements aériens, modifiant le Code criminel, la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité et la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés et apportant des modifications connexes et corrélatives à d'autres lois, accompagné d'un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Martin, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

Le Groupe interparlementaire Canada-États-Unis

La Réunion annuelle de la Western Governors' Association, tenue du 9 au 11 juin 2014—Dépôt du rapport

L'honorable David M. Wells : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation parlementaire canadienne du Groupe interparlementaire Canada-États-Unis concernant sa participation à la Réunion annuelle de 2014 de la Western Governors' Association, tenue à Colorado Springs, au Colorado, aux États-Unis, du 9 au 11 juin 2014.

La réunion annuelle et le Forum sur les politiques régionales de la Conférence régionale de l'Est du Conseil des gouvernements des États, tenus du 3 au 6 août 2014—Dépôt du rapport

L'honorable David M. Wells : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation parlementaire canadienne du Groupe interparlementaire Canada-États-Unis concernant sa participation à la 54e réunion annuelle et au Forum sur les politiques régionales de la Conférence régionale de l'Est du Conseil des gouvernements des États, tenus à Baltimore, au Maryland, aux États-Unis, du 3 au 6 août 2014.

La Conférence nationale annuelle du Council of State Governments et la réunion annuelle du Council of State Governments-WEST, tenues du 9 au 13 août 2014—Dépôt du rapport

L'honorable David M. Wells : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation parlementaire canadienne du Groupe interparlementaire Canada-États-Unis concernant sa participation à la Conférence nationale annuelle du Council of State Governments et à la réunion annuelle du Council of State Governments-WEST, tenues à Anchorage, en Alaska, aux États-Unis, du 9 au 13 août 2014.

La réunion hivernale annuelle de la Western Governors' Association, tenue les 6 et 7 décembre 2014—Dépôt du rapport

L'honorable David M. Wells : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation parlementaire canadienne du Groupe interparlementaire Canada-États-Unis concernant sa participation à la réunion hivernale annuelle de 2014 de la Western Governors' Association, tenue à Las Vegas, au Nevada, aux États-Unis, les 6 et 7 décembre 2014.

[Français]

L'Association parlementaire Canada-Europe

La Mission d'observation des élections de l'Assemblée parlementaire de l'OSCE, tenue le 30 novembre 2014—Dépôt du rapport

L'honorable Ghislain Maltais : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation parlementaire canadienne de l'Association parlementaire Canada-Europe concernant sa participation à la Mission d'observation des élections de l'Assemblée parlementaire de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, tenue à Chisinau, en Moldavie, le 30 novembre 2014.

[Traduction]

L'Association législative Canada-ChineLe Groupe interparlementaire Canada-Japon

L'Assemblée annuelle du Forum parlementaire Asie-Pacifique, tenu du 11 au 15 janvier 2015—Dépôt du rapport

L'honorable Victor Oh : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation parlementaire canadienne de l'Association législative Canada-Chine et du Groupe interparlementaire Canada-Japon concernant sa participation à la 23e Assemblée annuelle du Forum parlementaire Asie-Pacifique, tenue à Quito, en Équateur, du 11 au 15 janvier 2015.


PÉRIODE DES QUESTIONS

L'emploi et le développement social

Les fonds non utilisés des programmes

L'honorable Jim Munson : Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Puisque vous êtes le leader, vous êtes au courant que, grâce à la Loi sur l'accès à l'information, CBC/Radio-Canada nous a appris que 16 programmes d'Emploi et Développement social Canada ont un manque à gagner de 97,1 millions de dollars. Comme vous le savez, cet argent n'a pas été dépensé comme promis et est retourné dans les coffres du gouvernement. C'est le montant le plus important de fonds non utilisés depuis 2008.

Les fonds attribués à la Stratégie emploi jeunesse et au Bureau de l'alphabétisation et des compétences essentielles n'ont pas tous été dépensés, alors que des Canadiens cherchent un emploi à temps plein et que des jeunes attendent d'accéder au marché du travail. À mon sens, ce qui est encore plus troublant, c'est que le Fonds d'intégration pour les personnes handicapées n'a pas reçu le quart de son budget, qui se chiffre à 38,8 millions de dollars. C'est scandaleux, monsieur le leader, car des Canadiens handicapés me disent sans cesse qu'ils doivent quémander en vue d'obtenir plus d'aide et de ressources et de bénéficier de meilleures possibilités. Ils ont besoin de ce financement.

Monsieur le leader, pouvez-vous expliquer pourquoi on a retourné ces fonds dans les coffres du gouvernement au lieu d'aider les Canadiens handicapés? Pourquoi cet argent n'a-t-il pas été dépensé pour aider les Canadiens handicapés qui en ont désespérément besoin?

[Français]

L'honorable Claude Carignan (leader du gouvernement) : Comme vous le savez, notre gouvernement a l'habitude de dépenser judicieusement les fonds qui sont à sa disposition. Vous faites une critique à l'endroit d'un programme ou de ce qu'il reste de sommes en deçà de ce qui avait été budgétisé. Toutefois, il faut se rappeler que ces sommes représentent l'argent des contribuables. Lorsque le gouvernement s'engage à financer des projets qui aident les Canadiens, il peut arriver que l'argent ne soit pas dépensé au cours de la même année; il retourne alors dans le fonds. Il est tout à fait approprié de procéder ainsi plutôt que de créer des dépenses inutiles ou de la bureaucratie, comme un certain gouvernement libéral avait l'habitude de le faire.

[Traduction]

Le sénateur Munson : Mon Dieu! Je parle de ce qui se passe aujourd'hui, pas de ce qui est arrivé par le passé. Cet argent a été promis et il aurait dû être dépensé au cours de la période en question. Il s'agit du plus grand total de crédits périmés en sept ou huit ans. Les gens s'attendaient à recevoir cet argent.

Je sais que vous ne pouvez pas me répondre aujourd'hui, mais j'aimerais savoir quels programmes exactement ont été retardés. J'aimerais connaître les critères d'admission à ces programmes et le nombre exact de demandes approuvées et rejetées pour ce qui est du Fonds d'intégration pour les personnes handicapées. Si vous ne pouvez pas répondre à cette question aujourd'hui, auriez-vous l'obligeance de le faire bientôt?

[Français]

Le sénateur Carignan : Sénateur, comme vous le savez, le budget et les fonds destinés au programme doivent être utilisés pour ce programme. Lorsque des enveloppes sont inutilisées, il est tout à fait normal et adéquat qu'elles soient retournées au fonds consolidé. Nous procédons ainsi chaque année, et je crois qu'il s'agit là d'une bonne pratique.

Je sais que vous n'aimez pas parler du passé, car cela vous rappelle sans doute de mauvais souvenirs. Il est toutefois important de ne pas perdre de vue les mauvaises pratiques du passé, au cas où il vous viendrait à l'idée de les reprendre.

[Traduction]

Le sénateur Munson : Monsieur le leader, le taux de chômage des jeunes est plus du double de celui des adultes, et la moitié des personnes handicapées sont sans emploi. Vous avez parlé de gaspillage d'argent tout à l'heure et dit qu'il n'était pas nécessaire d'affecter les fonds à d'autres programmes. Vous avez aussi déclaré qu'il était normal que les fonds non utilisés soient retournés dans les coffres du gouvernement. Je ne pense pas que ce soit normal d'agir ainsi. Le gouvernement conservateur a pris des engagements importants dans le dernier budget au titre du financement de programmes d'emploi destinés aux personnes handicapées. Je tiens à vous féliciter à cet égard. C'est une bonne chose. Toutefois, il est inacceptable que le gouvernement ne remplisse pas ses engagements. Comme vous le savez ou devriez le savoir, l'emploi des personnes handicapées contribue à renforcer l'économie. Nous parlons d'investir dans les gens, monsieur le leader. Ne pensez-vous pas?

(1400)

[Français]

Le sénateur Carignan : Honorables sénateurs, notre gouvernement a l'habitude de dépenser les fonds judicieusement. En ce qui concerne les projets liés aux jeunes, nous avons notamment octroyé des prêts et des subventions aux apprentis; un montant de plus de 500 000 $ a donc été distribué à de jeunes Canadiens.

Je crois sincèrement que vous devriez vous rallier à notre plan d'action économique, qui vise l'amélioration du commerce et de la formation, ainsi que les diminutions d'impôts. Avec ce plan, nous allons créer des emplois et réduire les impôts au lieu de créer des taxes — la taxe Trudeau —, de revenir à des déficits opérationnels et de chercher ensuite à couper dans les services offerts à la population afin de combler le déficit prévisible de 2 milliards de dollars de la première ère Trudeau.

[Traduction]

Le sénateur Munson : J'ai une autre question complémentaire, honorables sénateurs.

Il faut lire les petits caractères ces jours-ci. Vous parlez de dépenses judicieuses, mais il y a aussi les dépenses partisanes. Quelque chose nous a empêchés de regarder le match de hockey hier soir — ce plan d'action dont vous avez parlé, qui nous faisait voir d'heureux Canadiens réalisant joyeusement toutes sortes de magnifiques activités canadiennes. Vous niez que c'est de la politique partisane, mais les élections se tiendront dans deux ou trois mois et vous dépensez des deniers publics sur ce genre de publicité. Puis, tout au bas de l'écran, au moment où on aurait vraiment voulu revenir au match — qui, lui, est pertinent —, on aperçoit les mots « sous réserve de l'approbation du Parlement ».

C'est ça, être honnête avec les Canadiens?

[Français]

Le sénateur Carignan : J'imagine que vous avez regardé le match de hockey sur la chaîne de la CBC, puisque c'était gratuit. Je l'ai regardé, moi aussi, et je dois vous avouer que j'ai été assez déçu de l'issue de la partie, en passant. Je n'avais pas activé mon enregistreur pour filtrer les publicités, sénateur. Je considère qu'il est important de mettre les Canadiens et les Canadiennes au courant des programmes qui sont mis à leur disposition — particulièrement ceux qui visent les réductions d'impôts — et qu'ils puissent bénéficier de l'ensemble des services et des avantages fiscaux auxquels ils ont droit, afin qu'ils aient plus d'argent dans leurs poches. C'est leur argent.

[Traduction]

L'honorable Jane Cordy : Le gouvernement a déjà été réprimandé pour avoir annoncé des programmes qui n'avaient pas encore été approuvés par le Parlement; cela semble importer peu aux conservateurs, qui persistent à le faire.

J'aimerais revenir à la caisse de la Stratégie emploi jeunesse. Trente millions de dollars n'ont pas été dépensés par le gouvernement. Les sommes prévues à cette fin avaient été approuvées par les deux Chambres du Parlement. Ces deux Chambres semblaient croire que l'argent était important en raison du taux de chômage élevé chez les jeunes au Canada. Trente millions de dollars n'ont pas été dépensés dans le cadre de la Stratégie emploi jeunesse.

Vous avez dit que c'était une bonne chose que cet argent n'ait pas été dépensé, car il faut éviter les dépenses inutiles. Affirmez-vous que l'argent approuvé par les deux Chambres du Parlement, soit 30 millions de dollars pour la Stratégie emploi jeunesse, constituait une dépense inutile?

[Français]

Le sénateur Carignan : En ce qui concerne les fonds destinés aux programmes d'emplois pour les jeunes, nous avons créé des prêts et des subventions pour les apprentis. Plus de 500 000 $ en prêts et subventions ont été remis à des Canadiens.

En ce qui a trait à la question des sommes importantes consacrées à la publicité, je vous rappelle que nous cherchons toujours les 40 millions de dollars liés au scandale des commandites. Nous aimerions beaucoup récupérer cette enveloppe afin de continuer à créer de la richesse et à investir dans les programmes. Je sais que vous avez des amis qui ont peut-être une idée de l'endroit où ces sommes se trouvent, alors, s'il vous vient à l'idée de leur parler, nous aimerions en savoir plus à ce sujet.

[Traduction]

La sénatrice Cordy : Chaque fois qu'il n'y pas de réponse, nous revenons à la même ritournelle. En désespoir de cause, vous pouvez toujours ressasser ce sujet.

Les anciens combattants

Les fonds non utilisés pour les programmes

L'honorable Jane Cordy : Le montant de 1,1 milliard de dollars destiné aux anciens combattants, qui a été approuvé par la Chambre et le Sénat, n'a pas été utilisé. Laissez-vous entendre que ce montant de 1,1 milliard de dollars pour les anciens combattants représentait une dépense inutile?

[Français]

L'honorable Claude Carignan (leader du gouvernement) : Madame la sénatrice, je sais que vous avez été enseignante; si vous aviez l'habitude de corriger les examens de vos étudiants en leur faisant dire des choses qu'ils n'avaient jamais dites, je m'interroge sur les résultats obtenus en fin de session.

Les finances

Les règlements sur les institutions financières

L'honorable Céline Hervieux-Payette : Nous allons changer de sujet, bien que ce ne soit pas un sujet très agréable. Dans l'édition du Devoir d'aujourd'hui, la directrice générale du Fonds monétaire international, Christine Lagarde, mettait en garde les communautés financières du monde entier contre les risques actuels liés à la stabilité financière. Elle nous disait que la culture du système bancaire était en grande partie à blâmer. Mme Lagarde croit que non seulement les règlements bancaires sont déficients, mais que leurs modes de gestion le sont également. Cela dit, quelques pages plus loin dans ce même journal, on apprend que la rémunération du président-directeur général de la Banque Toronto Dominion, M. Ed Clark, a progressé de 10 p. 100 au cours de la dernière année, pour atteindre une rémunération totale de 11,4 millions de dollars. C'est un petit détail. Dans son discours public, alors qu'il faisait le point sur sa carrière plutôt prolifique, il nous annonçait qu'il serait beaucoup plus difficile, dorénavant, pour nos banques de produire des profits. Il nous annonce cela au moment même où il vient de se donner un supplément de 10 p. 100 sur un salaire de 10 millions de dollars.

J'aimerais savoir ceci : votre gouvernement tient-il compte des inquiétudes de la présidente du Fonds monétaire international face aux activités des secteurs bancaire et financier et aux risques que court l'économie mondiale depuis que les banques, au Canada comme ailleurs, sont devenues propriétaires de firmes de valeurs mobilières? Elles se servent et jouent le jeu sur deux fronts.

Avez-vous réfléchi à la manière dont vous pourriez empêcher une nouvelle débâcle dans le monde bancaire?

L'honorable Claude Carignan (leader du gouvernement) : Il est reconnu que nous avons l'un des systèmes bancaires parmi les meilleurs au monde. En ce qui concerne les frais bancaires, nous estimons que les Canadiens qui ont durement gagné leur argent méritent de le conserver; c'est pourquoi nous avons pris des mesures pour étendre les options bancaires sans frais à plus de 7 millions de Canadiens, y compris les personnes âgées et les étudiants.

Je vous rappelle, sénatrice, que notre gouvernement prend des mesures concrètes pour protéger les consommateurs. Nous avons notamment interdit la distribution de chèques tirés de cartes de crédit non commandées. Nous avons limité les pratiques commerciales anticonsommateurs, et nous nous sommes assurés que les cartes prépayées n'expirent jamais. Nous avons aussi créé des règles qui exigent la divulgation claire des modalités des contrats et des demandes de carte de crédit.

Bref, en ce qui concerne plus particulièrement les frais bancaires auxquels vous avez fait allusion au début de votre question, je crois que notre gouvernement agit promptement et de façon efficace.

(1410)

La sénatrice Hervieux-Payette : Le mois dernier, lors de la rencontre du Fonds monétaire international, à laquelle M. Oliver n'a pas participé, le FMI s'est adressé directement au Canada pour annoncer que notre pays se trouve dans une situation critique sur le plan du marché immobilier. Hier, l'agence de notation Fitch — qui donne au Canada sa cote de bon organisme sur le plan financier — l'a également rappelé.

Le magazine Maclean's a accordé une entrevue au ministre Oliver, qui a affirmé qu'il n'était pas préoccupé par cette situation et que Mme Lagarde faisait sans doute appel à des personnes non compétentes. L'agence de notation Fitch et les économistes sont unanimes : 25 p. 100 des contribuables au Canada sont endettés et présentent un risque dans le domaine immobilier. J'aimerais savoir qui a raison, Mme Lagarde ou M. Oliver?

Le sénateur Carignan : Vous devriez demander à votre chef, Justin Trudeau, de réviser sa position sur les comptes d'épargne libre d'impôt. En effet, 600 000 personnes âgées gagnant moins de 60 000 $ maximisent leurs droits de cotisation et bénéficieront des effets de ces mesures, et 11 millions de Canadiens possèdent un compte d'épargne libre d'impôt, surtout des contribuables à faible et à moyen revenu. La moitié des détenteurs de CELI gagnent moins de 42 000 $ par année. Donc, notre gouvernement a réduit les impôts des familles et des personnes âgées. Il est clair que, de l'autre côté, on veut abolir ces avantages pour les Canadiens. Le CELI est un outil extrêmement important pour encourager l'épargne et diminuer l'endettement.

Le budget de 2015—Le compte d'épargne libre d'impôt

L'honorable Céline Hervieux-Payette : Quand j'entends d'un côté que votre gouvernement, et en particulier votre premier ministre, aimerait se départir du Régime de pensions du Canada, et que nous devrions gérer nous-mêmes notre fonds de retraite, il doit certainement oublier les particuliers qui gagnent de 29 000 $ à 40 000 $ par année.

Monsieur le Président, pouvez-vous rappeler à l'ordre les sénateurs? Je ne vous interromps pas lorsque vous prenez la parole. Je vous demande de vous taire!

[Traduction]

Son Honneur le Président : À l'ordre. Honorables sénateurs, lorsqu'un de nos collègues a la parole, essayons de nous abstenir de siffler et de nous livrer à des échanges qui n'en finissent plus. Ayons la politesse de permettre à la sénatrice de poser sa question et au leader d'y répondre.

[Français]

La sénatrice Hervieux-Payette : Je vous remercie, monsieur le Président. Je faisais référence aux Canadiens qui gagnent de 29 000 $ à 40 000 $ par année. De 1999 à 2009, ceux-ci ont vu leur revenu augmenter de 48 p. 100, alors que ceux qui contribuent au CELI, c'est-à-dire les contribuables qui gagnent 100 000 $ et plus par année, ont vu leur revenu augmenter de 98 p. 100. Dites-moi comment les particuliers qui gagnent 40 000 $ par année peuvent épargner 10 000 $ par année une fois qu'ils ont mangé, qu'ils se sont mis un toit sur la tête, qu'ils se sont déplacés pour le travail et qu'ils se sont vêtus? Comment peuvent-ils financer un CELI à 10 000 $ par année? Ce sont les personnes qui gagnent 100 000 $ par année qui prennent de l'avance sur les petits salariés en doublant leurs revenus.

L'honorable Claude Carignan (leader du gouvernement) : D'où l'importance de créer des emplois, de prendre des mesures qui laisseront plus d'argent dans les poches des Canadiens et de préconiser des baisses d'impôt plutôt que des hausses d'impôt pour les familles. On parle également de la Prestation universelle pour la garde d'enfants, qui profite à la vaste majorité des familles à faible et moyen revenu. En outre, notre gouvernement a adopté de nouvelles mesures en faveur des familles. J'attire votre attention, sénatrice — vous n'étiez peut-être pas au courant —, sur le fait que nos nouvelles mesures, jumelées avec celles qui ont été mises en œuvre en 2006, permettront d'offrir un allègement fiscal allant jusqu'à concurrence de 6 600 $ pour une famille moyenne de quatre personnes.

Grâce à nos initiatives, le taux d'imposition des petites entreprises sera réduit de près de 50 p. 100, ce qui permettra de créer des emplois et de stimuler la croissance économique. Notre plan d'action économique vise à réduire les impôts, à équilibrer les budgets et à créer des emplois. Par contre, votre chef, Justin Trudeau, prévoit une hausse d'impôts et des compressions dans les services pour équilibrer le budget, ce qui favorisera un retour au déficit. Il cherchera 2 milliards de dollars, alors que nous cherchions 40 millions tantôt. Il faudra que M. Trudeau trouve ces 2 milliards de dollars.

La sénatrice Hervieux-Payette : J'aimerais ajouter un commentaire au sujet de vos avantages importants pour les familles. N'oubliez pas de leur dire que, désormais, les contributions versées aux parents qui ont des enfants sont imposables. Comme on dit au Québec, vous avez tout simplement « changé quatre trente sous pour une piastre ». Ces familles n'auront pas un sou de plus dans leurs poches. Ce que je vous demande, c'est comment les particuliers qui gagnent de 29 000 $ à 40 000 $ par année parviendront-ils à verser de l'argent dans leur CELI?

Le sénateur Carignan : Je vous invite à attendre au début du mois de juillet, lorsque les familles canadiennes recevront leur chèque supplémentaire, dont le montant sera à la hausse. Vous leur direz que le gouvernement n'a pas « changé quatre trente sous pour une piastre » et qu'il leur a remis l'argent qui leur revenait.

[Traduction]

La santé

Les soins de santé des Premières Nations dans les régions du Nord et les régions éloignées

L'honorable Wilfred P. Moore : Ma question s'adresse aussi au leader du gouvernement au Sénat.

Monsieur le leader, hier j'ai posé une question concernant le rapport du printemps 2015 du vérificateur général, qui s'est penché sur les communautés des Premières Nations en régions éloignées dans le Nord du Manitoba et de l'Ontario. On a indiqué que les résultats de cette étude étaient alarmants. J'aimerais mentionner un autre exemple alarmant de problème de santé qui affecte les peuples des Premières Nations vivant dans le Nord canadien.

Selon le Journal de l'Association médicale canadienne, les cas de rachitisme sont à la hausse chez les enfants autochtones dans le Nord canadien. La Dre Leanne Ward, du Centre hospitalier pour enfants de l'Est de l'Ontario, ici à Ottawa, a été la première à soulever cette question et à publier un article à ce sujet en 2007.

C'est une maladie que l'on associe au Londres des années 1830 de Charles Dickens. Aujourd'hui, il est associé à la pauvreté, à l'insécurité alimentaire et à une carence en aliments traditionnels dans le régime alimentaire des Premières Nations du Nord.

Des enfants autochtones âgés de moins de six mois souffrent de graves symptômes de la maladie, dont des difformités squelettiques, des fractures, des insuffisances cardiaques et des crises. C'est inadmissible.

Pouvez-vous nous dire et nous assurer que les Premières Nations du Nord canadien peuvent s'attendre à des mesures immédiates et efficaces pour enrayer cette maladie insidieuse?

[Français]

L'honorable Claude Carignan (leader du gouvernement) : Les crédits en matière de santé destinés aux Premières Nations représentent des sommes importantes. Le gouvernement verse 2,5 milliards de dollars par année au titre des programmes et des services en faveur de la santé des Autochtones. Il donne accès à des services 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, dans 80 réserves et à plus de 91 000 personnes. Il s'agit des soins à domicile et des soins communautaires dans 500 réserves, soit 1,1 milliard de dollars par année pour les médicaments d'ordonnance, le transport médical, les soins dentaires et d'autres services dans les réserves. Le budget de 2015 prévoit 2 millions de dollars par année pour offrir des services favorisant la santé mentale au sein des collectivités autochtones. Il s'agit d'une panoplie de mesures qui bénéficieront aux Premières Nations en matière de soins de santé. Les sommes sont disponibles pour répondre à l'ensemble des besoins des Premières Nations en matière de santé.

[Traduction]

Le sénateur Moore : Monsieur le leader, il existe une mesure du niveau de services de santé dans le Nord. Santé Canada a fixé ces niveaux dans les stations de soins infirmiers, dont nous avons parlé hier.

(1420)

Ce sont des services de triage d'urgence et des services de soins externes non urgents. Cependant, le vérificateur général a constaté que Santé Canada ne peut pas assurer que les stations de soins infirmiers respectent ce niveau de service.

Je vais poser de nouveau ma question. Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas fourni aux collectivités des Premières Nations du nord du Manitoba et de l'Ontario le niveau de service que le gouvernement s'est engagé à maintenir? C'est bien beau dire que vous le ferez, mais cela nous ramène peut-être aux sommes non dépensées. Monsieur le leader, si nous ne nous en occupons pas, cela nous coûtera plus cher au final. Je vous prie d'abord de répondre à ma question. Si vous ne pouvez pas le faire aujourd'hui, j'aimerais savoir ce que nous ferons pour corriger la situation. Nous avons entendu que seulement 1 infirmière sur 45 a obtenu la formation adéquate. Nous avons entendu que les stations de soins infirmiers, les bâtiments, ne sont pas adéquatement entretenues. J'aimerais avoir une réponse.

[Français]

Le sénateur Carignan : Comme je l'ai dit hier au sujet de la formation obligatoire des infirmières, il est important pour nous que les Autochtones aient accès aux fournisseurs de soins de santé. Les infirmières dans les réserves sont instruites, qualifiées, formées et agréées. Nous allons donc redoubler d'effort pour que ces dernières respectent les exigences en matière de formation, et ce, en plus de leur titre de compétence.

Puisque nous voulons encourager les praticiens à travailler dans les réserves, nous allons exonérer le remboursement des prêts canadiens aux étudiants, aux médecins et aux infirmières qui travaillent en région éloignée. Nous allons également établir une stratégie de recrutement et de rétention des infirmières dès la fin de leurs études, et nous allons favoriser l'intégration des diplômés.

Déjà, depuis février dernier, nous avons reçu plus de 250 demandes par mois dans le cadre de ce programme. Nous continuerons donc à travailler en ce sens.

[Traduction]

Le sénateur Moore : J'ai été encouragé par ce que vous avez dit hier, à savoir que vous aviez constaté une augmentation du nombre de demandes d'emploi. C'est fantastique, mais j'aimerais revenir sur ce que j'ai dit hier. Le vérificateur général a constaté que seulement 1 infirmière sur 45 a suivi le cours obligatoire pour donner des soins aux membres des Premières Nations. Cet élément a été souligné en 2010 par la vérificatrice générale.

Qu'est-ce qui a été fait depuis 2010 pour offrir les cours nécessaires? Votre propre gouvernement, le gouvernement fédéral, a exigé que ces cours soient offerts et soient suivis par les infirmières qui veulent donner des soins aux membres des Premières Nations dans le Nord. Qu'est-ce qui a été fait depuis 2010 pour nous assurer que ces qualifications sont offertes et respectées?

[Français]

Le sénateur Carignan : Comme je l'ai dit, nous avons accueilli le rapport du vérificateur général. Nous l'en remercions, et nous allons continuer à redoubler d'effort pour que les infirmières respectent les exigences du ministère en matière de formation.

Depuis 2006, les fonds consacrés à la santé des Autochtones ont augmenté de 31 p. 100, et plus de la moitié des réserves comptent moins de 500 personnes. À certains moments, même l'accès routier est impossible, ce qui a mené à la création de 215 sites de télésanté. C'est pourquoi nous continuerons d'encourager le recrutement de personnel qualifié pour la prestation des soins de santé.

[Traduction]

Le sénateur Moore : Pour ce qui est des candidats aux postes, j'ignore au juste de quels postes il s'agit. S'agit-il de postes d'infirmiers? Si c'est le cas, s'agit-il de postes dans les réserves près des centres urbains ou dans les réserves en régions éloignées, dans le Nord?

[Français]

Le sénateur Carignan : On parle de recrutement et de rétention de postes d'infirmières en région éloignée.

[Traduction]

Le sénateur Moore : Pour les communautés dans les régions éloignées et dans le Nord. Pourriez-vous le confirmer? J'aimerais savoir où se trouvent ces emplois. Évidemment, il est plus intéressant de travailler dans une réserve située près d'un centre urbain. Toutefois, le comité a visité quelques réserves où les besoins en matière de soins de santé et de fournitures courantes dans le Sud étaient criants, comme on dit — et je ne parle même pas du logement. J'espère que nous saurons répartir les 250 candidats de façon équitable et que plusieurs d'entre eux voudront véritablement rendre service et travailler dans les localités du Nord.

[Français]

Le sénateur Carignan : Sénateur, je transmettrai vos commentaires au ministre.

[Traduction]

Son Honneur le Président : Je signale que la période prévue pour la période des questions est terminée.

Dépôt de la réponse à une question inscrite au Feuilleton

Les anciens combattants—Les anciens combattants qui travaillent au ministère

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) dépose la réponse à la question no 14 inscrite au Feuilleton par le sénateur Downe.


ORDRE DU JOUR

La Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat

L'honorable Tom McInnis propose que le projet de loi C-12, Loi modifiant la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je suis heureux de prendre la parole à titre de parrain du projet de loi C-12, aussi appelé Loi concernant l'éradication des drogues dans les prisons. Il ne fait aucun doute que la consommation de drogues dans nos pénitenciers représente un danger supplémentaire pour nos agents correctionnels. De plus, les drogues dans les prisons représentent une menace pour la réhabilitation des détenus. La réalité, c'est qu'environ 75 p. 100 des contrevenants qui entrent dans le système correctionnel fédéral ont des problèmes de consommation de drogues ou d'alcool ou de dépendance à ces substances.

En fait, dans bien des cas, l'infraction qui a initialement donné lieu à leur incarcération peut être liée aux drogues ou à l'alcool.

La consommation de drogues en prison peut avoir des conséquences négatives sur la réhabilitation, plus particulièrement pour les contrevenants dont les problèmes de toxicomanie sont liés à la possibilité qu'ils récidivent. Il convient de souligner que près de 95 p. 100 des contrevenants qui souhaitent participer à des programmes de réhabilitation dans nos prisons reçoivent des services. Le Service correctionnel du Canada a également mis en œuvre un système de détection précoce. Ainsi, lorsqu'un contrevenant entre en prison, le système correctionnel peut évaluer s'il est nécessaire de lui offrir certains services de soutien.

Même les toxicomanes les plus déterminés à se sortir de cette dépendance ont de la difficulté à le faire lorsqu'ils se retrouvent dans un milieu où ils peuvent avoir accès à des drogues. C'est donc pour cette raison que cette mesure législative est si importante. Rappelons-nous que la grande majorité des contrevenants incarcérés dans les pénitenciers fédéraux purgent une peine de durée déterminée. Cela signifie donc que la majorité d'entre eux seront un jour libérés et retourneront dans la collectivité.

Quelles seront les répercussions sur la sécurité publique si ces contrevenants ne parviennent pas à régler leurs problèmes de toxicomanie avant d'être libérés?

Les drogues dans les prisons compromettent la réhabilitation des contrevenants à risque. Elles mettent en péril la sécurité publique, et bien sûr, elles compromettent aussi la sécurité des pénitenciers fédéraux et des personnes qui y travaillent.

En fait, c'est notamment parce que les effets néfastes de la consommation de drogues dans les prisons suscitaient des inquiétudes que le gouvernement a chargé, en 2007, un comité d'examen indépendant de chercher des moyens d'améliorer le système correctionnel et d'accroître la sécurité du public.

À la lumière des recommandations du comité, Service correctionnel Canada a entrepris en 2007 un programme de transformation en vue de contribuer le plus possible à assurer la sécurité de la population à long terme.

Pour appuyer cette transformation, le gouvernement a prévu, dans le Plan d'action économique de 2008, l'affectation de 122 millions de dollars sur cinq ans à la mise en place de mesures de contrôle du trafic de drogues dans les établissements carcéraux fédéraux. Il s'agit d'un investissement d'importance, tant sur le plan de la somme engagée que du point de vue de l'objectif.

Honorables sénateurs, certaines personnes qui suivent le débat chez elles pourraient croire que les pénitenciers fédéraux sont des endroits dont les portes sont toujours verrouillées et où les déplacements sont limités. Il est vrai que les pénitenciers fédéraux sont des établissements sûrs, mais il demeure possible d'y faire le trafic de la drogue. Des camions à ordures et de livraison de produits alimentaires y circulent. Les parents et les amis des détenus leur rendent visite. Il n'y a pas que les agents correctionnels, mais aussi toutes sortes d'employés et de travailleurs à contrat qui entre dans les établissements et en sortent tous les jours, y compris des cuisiniers, des nettoyeurs, du personnel de bureau, des blanchisseurs, des conseillers, des plombiers, des électriciens, des médecins, du personnel infirmier, des enseignants et bien d'autres.

(1430)

Il est arrivé que des corps d'oiseaux morts contenant de la drogue soient jetés par-dessus les murs d'une prison. On a utilisé des arcs et des flèches pour faire passer de la drogue par-dessus les murs de la prison, menaçant ainsi la sécurité à la fois du personnel et des délinquants. De la drogue a été trouvée dans la couche de nouveau-nés que l'on avait amenés à l'occasion d'une visite à un parent ou à un grand-parent.

On rapporte maintenant que des véhicules aériens sans pilote, notamment des drones, sont utilisés pour faire entrer de la drogue, des produits de contrebande et d'autres articles interdits dans les prisons.

Voilà le genre de difficultés auxquelles notre service correctionnel est confronté.

Pour contrer cela, on a élargi de façon considérable le programme des chiens détecteurs du service correctionnel. Pour ne citer qu'un exemple, en octobre dernier, des agents correctionnels qui effectuaient une vérification de routine avec deux chiens détecteurs ont découvert une réserve de drogue d'une valeur de plus de 200 000 $ dans l'entrepôt de colis de l'établissement à sécurité moyenne de Joyceville, près de Kingston, en Ontario. C'est plutôt extraordinaire.

De plus, Service correctionnel Canada a réussi à établir des liens plus étroits avec les organismes d'application de la loi pour que l'on soit davantage en mesure de surveiller les délinquants dans la collectivité et d'obtenir des renseignements de sécurité dans les collectivités et dans les établissements.

En 2011, le gouvernement a présenté la Loi sur la sécurité des rues et des communautés, qui a permis de prendre des mesures supplémentaires pour remédier au problème de la drogue dans les prisons. Depuis l'entrée en vigueur de cette loi, ceux que l'on surprend à vendre de la drogue dans une prison sont désormais passibles de peines minimales obligatoires sévères.

Par ailleurs, honorables sénateurs, il faut désormais que 10 p. 100 des détenus se soumettent tous les mois à des analyses d'urine effectuées de façon aléatoire. Tout détenu sous responsabilité fédérale trouvé en possession de substances illicites subira les mesures disciplinaires appropriées. Un détenu à qui l'on a accordé une libération conditionnelle — mais qui n'a pas encore été libéré — peut voir sa liberté conditionnelle annulée s'il omet ou refuse de soumettre un échantillon d'urine.

Honorables sénateurs, à la fin de l'exercice 2013-2014, les prisons fédérales détenaient 15 295 délinquants.

Au cours de l'exercice 2010-2011, il y a eu un peu moins de 1 300 saisies de drogue. À peine trois ans plus tard, en 2013-2014, il y en a eu près du double dans les centres carcéraux fédéraux, soit plus de 2 400.

Depuis que, chaque mois, 10 p. 100 de la population carcérale est soumise à un test de dépistage, Service correctionnel Canada constate des retombées positives.

En 2013-2014, il a ainsi procédé à 16 518 tests d'urine dans les pénitenciers, une hausse de 114 p. 100 par rapport à l'exercice 2011-2012.

Tous les détenus d'un centre carcéral peuvent faire l'objet d'un test d'urine à l'issue d'un processus de sélection aléatoire, une démarche qui s'inscrit dans l'engagement du gouvernement à soumettre tous les détenus fédéraux à au moins une analyse d'urine par année.

Les tests aléatoires s'ajoutent aux tests de dépistage que peut réclamer le personnel correctionnel s'il a des motifs raisonnables de soupçonner qu'un délinquant a consommé un stupéfiant.

Je précise que le délinquant qui refuse de se soumettre à un test de dépistage est traité comme si l'analyse s'était avérée positive.

Selon moi, les tests de dépistage sont très importants, car ils ont un puissant effet dissuasif.

Service correctionnel Canada remplit également le deuxième volet de notre engagement : désormais, le dossier de tout délinquant qui est trouvé en possession de drogue est automatiquement renvoyé aux forces de l'ordre pour qu'elles prennent les mesures appropriées. C'est une question de gros bon sens. La loi, c'est la loi, même lorsque l'on est déjà en prison. Les outils proposés aideront Service correctionnel Canada à appliquer les lois dans les pénitenciers fédéraux.

Grâce à l'augmentation de la fréquence des tests de dépistage et à l'application plus rigoureuse des lois, le pourcentage d'analyses positives et de délinquants qui refusent de passer un test a chuté, ce qui laisse fortement supposer que la drogue circule moins dans le réseau carcéral.

Le projet de loi prévoit également que la demande de libération conditionnelle d'un délinquant sera refusée si celui-ci échoue un test de dépistage de drogue. Honorables sénateurs, la Loi concernant l'éradication des drogues dans les prisons modifierait la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition de deux façons. Premièrement, elle donnerait clairement à la Commission des libérations conditionnelles du Canada le pouvoir législatif d'annuler la libération conditionnelle d'un délinquant si celui-ci refuse de subir un test de dépistage de drogue avant sa remise en liberté.

Autrement dit, si un délinquant à qui on a accordé une libération conditionnelle refuse de subir un test de dépistage de drogue ou échoue à un tel test avant sa remise en liberté, Service correctionnel Canada sera tenu d'en informer la Commission des libérations conditionnelles. La commission pourra alors tenir compte de ces renseignements et décider s'il convient d'annuler la libération conditionnelle du délinquant.

La deuxième modification donnerait explicitement à la Commission des libérations conditionnelles le pouvoir législatif d'assortir la libération de conditions relatives à la consommation de drogues ou d'alcool. Ce critère s'appliquerait particulièrement aux cas où l'alcoolisme ou la toxicomanie ont contribué au délit pour lequel le délinquant a été incarcéré.

Le non-respect de cette condition aurait des conséquences; le délinquant pourrait retourner en prison.

C'est une question de sécurité publique. Si l'usage de drogues a joué un rôle dans le comportement criminel du délinquant, il semble tout à fait raisonnable d'exiger que celui-ci évite toute consommation de drogue pendant sa libération conditionnelle.

C'est une question de sécurité publique, sans oublier que les délinquants doivent être tenus responsables de leurs actes. Cet élément est au cœur de la réhabilitation : chacun doit comprendre que ses gestes ont des conséquences et qu'il est responsable de ses gestes.

Honorables sénateurs, à l'heure actuelle, tous les délinquants font l'objet d'une évaluation professionnelle et exhaustive dans les 90 premiers jours de leur incarcération. Cette évaluation couvre tout, de leurs antécédents socioéconomiques à leurs problèmes de toxicomanie ou d'alcoolisme.

Un plan correctionnel particulier à chaque délinquant est ensuite établi en fonction de cette évaluation, ce qui comprend, lorsque cela est nécessaire, la participation à des programmes pour aider le délinquant à surmonter ses problèmes de toxicomanie. Donc, dès que les délinquants commencent à purger leur peine, on leur fournit les outils qui les aideront à réintégrer la société de façon réussie, libérés de leur dépendance à l'alcool ou aux drogues. De plus, les délinquants dont le test de dépistage s'avère positif pourraient se voir offrir de participer à l'un des programmes de lutte contre la toxicomanie reconnus à l'échelle internationale qu'offre Service correctionnel Canada.

Ces programmes aident les délinquants à gérer leurs habitudes de consommation et ont comme objectif ultime de réduire les risques de récidive. Ces programmes fonctionnent, et c'est pour cela que nous devons continuer de fournir au système correctionnel les ressources dont il a besoin pour couvrir cet important aspect de la réhabilitation.

Ces modifications aideront à veiller à ce que les délinquants comprennent qu'ils sont responsables et qu'ils seront tenus responsables de leur comportement.

Ces modifications permettront de mieux motiver les délinquants à participer à des programmes de lutte contre la toxicomanie et joueront par conséquent un rôle important pour appuyer les efforts du gouvernement visant à éliminer les drogues illicites des pénitenciers fédéraux.

Honorables sénateurs, à l'autre endroit, ce projet de loi a été approuvé de façon unanime. Je suis convaincu que mes collègues sauront voir la sagesse qui sous-tend ces amendements et qu'ils se joindront à moi pour appuyer la réhabilitation réussie des délinquants et, du même coup, l'amélioration de la sécurité dans nos prisons et dans nos collectivités.

Merci.

Des voix : Bravo!

(Sur la motion du sénateur Campbell, le débat est ajourné.)

(1440)

L'ajournement

Adoption de la motion

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement), conformément au préavis donné le 6 mai 2015, propose :

Que, lorsque le Sénat s'ajournera après l'adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu'au mardi 12 mai 2015, à 14 heures.

L'honorable Ghislain Maltais (Son Honneur le Président suppléant) : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénatrice Nancy Ruth, appuyée par l'honorable sénateur Patterson, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-225, Loi modifiant le Code criminel (aide médicale à mourir).

L'honorable Denise Batters : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi S-225 sur le suicide assisté. Le projet de loi propose que l'on accorde aux Canadiens adultes atteints d'une maladie ou d'une incapacité qui leur cause des souffrances physiques ou psychologiques « insupportables » le droit de demander de l'aide médicale à mourir.

Tout d'abord, je dois dire que j'ai beaucoup de sympathie pour les personnes et les familles qui se trouvent dans une situation qui les force à se questionner sur l'interruption de la vie. Les douleurs physiques extrêmes, un diagnostic de maladie en phase terminale et l'absence d'espoir de retrouver une certaine qualité de vie sont tous des facteurs qui font en sorte que certaines personnes finissent par croire que le suicide médicalement assisté constitue la meilleure façon de mettre fin à leurs souffrances, et je le comprends.

Toutefois, cette mesure législative m'inquiète énormément, plus particulièrement parce qu'elle accepterait que l'on se fonde uniquement sur la détresse psychologique d'une personne pour l'aider à mettre fin à ses jours. Avant même que le projet de loi soit présenté au Sénat, j'ai informé la sénatrice Nancy Ruth que je ne pourrais absolument pas appuyer son projet de loi tant et aussi longtemps qu'il parlerait de « souffrances psychologiques ». Comme on peut le constater, cette notion se trouve encore dans le projet de loi, et c'est pourquoi je ne peux tout simplement pas l'appuyer. Je m'opposerai même à ce qu'il soit renvoyé à un comité du Sénat pour une étude plus approfondie. Chers collègues, permettez-moi de vous exposer mes préoccupations.

Comme plusieurs d'entre vous le savent, la question du suicide me touche personnellement. J'ai perdu mon mari, le député Dave Batters, qui s'est suicidé en 2009, après avoir lutté contre l'anxiété et la dépression. Je sais malheureusement comment fonctionne un esprit suicidaire. Je sais certainement comment la vie des proches est durement touchée lorsqu'une personne a décidé de faire ce choix définitif.

En cette enceinte, la sénatrice Nancy Ruth a fait savoir qu'elle avait choisi d'inclure les « souffrances psychologiques » parmi les motifs pour demander l'aide à mourir pour assurer un traitement équitable à ceux qui souffrent de maladie mentale. Je comprends son but, honorables collègues, parce que je serais la dernière personne à dire qu'une personne aux prises avec une maladie mentale devrait être moins bien traitée par la loi. Toutefois, je pense que, dans le contexte de l'aide à mourir, il y a certains facteurs à prendre en considération pour la maladie mentale qui sont différents de ceux qui ont trait à une maladie physique. La maladie mentale est généralement moins visible, au sens physique. Elle n'est pas en soi mortelle. Son traitement suppose souvent un rapport différent, plus intime, avec les dispensateurs de soins médicaux. Donc, si la souffrance psychologique peut être aussi insupportable que la souffrance physique, les deux sont différentes et j'estime qu'il faudrait en tenir compte dans le contexte juridique de l'aide au suicide.

Comme je l'ai mentionné, la maladie mentale et la dépression ne sont pas en soi des maladies mortelles. Or, le projet de loi S-225 permettrait l'aide au suicide aux personnes souffrant de ces maladies. En fait, cette mesure législative n'exige pas de diagnostic de maladie mortelle, que ce soit pour une maladie mentale ou physique.

Au cas où vous penseriez que j'exagère en disant que l'État offrirait la possibilité d'obtenir de l'aide au suicide aux personnes aux prises avec des souffrances psychologiques en l'absence de souffrances physiques, je peux vous dire qu'on a déjà commencé à voir de tels cas dans les pays européens qui ont légalisé l'euthanasie et l'aide au suicide.

Dans un article paru dans le journal allemand Der Spiegel, on parle d'une clinique de soins en fin de vie, située à La Haye :

Parmi les patients admis à cette clinique, il y avait une femme qui avait une peur pathologique de la saleté et des bactéries, d'où sa compulsion de se laver de façon obsessive, ainsi qu'un retraité de 63 ans qui avait peur de la solitude. Dans les deux cas, un médecin les a aidés à mourir.

Récemment, la clinique a été réprimandée pour avoir aidé une mère de 47 ans à se suicider, parce qu'elle souffrait d'un cas grave d'acouphène, ou de bourdonnements d'oreilles. La clinique a été réprimandée parce qu'« elle n'avait pas tenu compte de toutes les options de traitement ».

Le projet de loi S-225 n'exige même pas cela, honorables sénateurs.

Voici un autre cas, qui remonte à 1994, devant la Cour suprême néerlandaise. Il s'agissait d'une mère de 50 ans, en parfaite santé, dont les deux fils étaient morts dans leur vingtaine, l'un, d'un cancer et l'autre, par suicide. Accablée par le chagrin, elle a souhaité se joindre à eux. Elle voulait qu'un médecin l'aide à se tuer, pour qu'elle puisse se reposer dans sa tombe, entre ses deux fils. Elle a refusé toute thérapie d'accompagnement du deuil et tout antidépresseur. Le médecin qui l'a aidée à se suicider a dit, et je cite : « La souffrance psychologique peut être tout aussi intolérable que la souffrance physique. » Ce raisonnement ne vous rappelle-t-il pas quelque chose, honorables sénateurs? C'est le genre d'argument qui est invoqué dans le projet de loi S-225.

Au final, la Cour suprême néerlandaise a choisi — à tort, selon moi — d'élargir les critères afin d'y inclure les souffrances psychologiques en l'absence de maladie physique. Voici ce qu'a dit George Annas, professeur de droit de la santé à l'Université de Boston, au sujet de la décision : « Si les pentes glissantes vous font peur, ce cas vous en mettra plein la vue. » En effet, honorables sénateurs. En tant que législateurs, nous avons le devoir d'éviter de nous engager sur une telle pente glissante au Canada.

Comme vous le savez tous sans doute, au début de l'année, la Cour suprême du Canada a annulé sa décision précédente, qui interdisait l'aide au suicide, afin de l'autoriser dans certains cas. La cour a déclaré que l'interdiction générale de l'aide au suicide était nulle :

[dans le cas d'une] à une personne adulte capable qui (1) consent clairement à mettre fin à sa vie; et qui (2) est affectée de problèmes de santé graves et irrémédiables (y compris une affection, une maladie ou un handicap) lui causant des souffrances persistantes qui lui sont intolérables au regard de sa condition.

Toutefois, le jugement dit également ceci :

Cette déclaration est censée s'appliquer aux situations de fait que présente l'espèce. Nous ne nous prononçons pas sur d'autres situations où l'aide médicale à mourir peut être demandée.

La Cour suprême a suspendu l'application de ce jugement pour 12 mois, manifestement pour donner au Parlement le temps d'adopter une loi régissant l'aide médicale à mourir.

Les défenseurs de l'aide au suicide citent des études et des sondages récents qui indiquent que le public y est favorable. Le sondage qui a été effectué en 2014 par Ipsos-Reid, pour le compte de l'organisme Dying with Dignity, et qui est souvent cité, indique, dit-on, que 88 p. 100 des personnes interrogées sont d'accord. Pourtant, lorsqu'on examine de près la question posée, on voit clairement à quel énoncé ces personnes souscrivent :

[...] une personne qui est atteinte d'une maladie terminale ou qui souffre insupportablement devrait pouvoir décider elle-même quand et comment elle va mourir.

L'expression « maladie terminale », honorables sénateurs, ne se trouve ni dans le projet de loi S-225 ni dans la décision récente de la Cour suprême.

J'ai parlé de cette question à beaucoup de gens en Saskatchewan et ailleurs au pays. Dans bien des cas, ils se sont dits en faveur du principe de l'aide médicale à mourir, mais ce que ces gens approuvent, honorables sénateurs, n'est pas la même chose que ce que l'on trouve dans le projet de loi S-225, qui ne limite pas l'aide médicale à mourir aux cas de maladie terminale ou de troubles pour lesquels il n'existe aucun traitement et qui ne parle même pas de douleurs physiques ou de souffrances.

Presque sans exception, les gens auxquels j'ai parlé sont en faveur de l'aide au suicide uniquement si celui-ci est solidement balisé et s'il n'existe aucune autre solution. Ils estiment que, pour être admissible à l'aide médicale à mourir, une personne devrait être atteinte d'une maladie ou d'une incapacité terminale. Lorsque j'ai expliqué aux gens que ce projet de loi permettrait aux personnes subissant des souffrances psychologiques de mettre fin à leurs jours, ils ont été abasourdis, voire horrifiés. Personne parmi nous ne souhaite voir son prochain souffrir, mais nous ne pouvons pas nous précipiter dans un gouffre moral auquel les Canadiens ne sont pas préparés, honorables sénateurs.

Quoi qu'il en soit, la décision récente de la Cour suprême sur l'aide au suicide a donné lieu à une discussion nationale sur la question. Je pense que l'on commettrait une grave erreur en adoptant le projet de loi dans sa forme actuelle, avant que le gouvernement fédéral n'ait le temps de consulter largement les Canadiens et les provinces sur la question.

Je ne suis pas non plus tout à fait à l'aise avec la définition de la Cour suprême quant aux critères à remplir pour être admissible à l'aide au suicide. Je crois que sa définition laisse beaucoup trop de place à l'interprétation, surtout en ce qui concerne les considérations d'ordre mental liées à l'aide au suicide. Mais il est important de noter que ce jugement ne traite pas explicitement des souffrances psychologiques, à l'instar du projet de loi de la sénatrice Nancy Ruth dont nous sommes saisis.

(1450)

L'aide au suicide est une question complexe et multidimensionnelle qui doit être examinée attentivement. Toute mesure législative sur cette question doit être claire et précise si l'on veut mettre en place les mécanismes de protection pour prévenir les abus, car c'est la vie des Canadiens qui est en jeu, honorables sénateurs, et nous ne pouvons pas oublier à quel point c'est sérieux.

L'aide au suicide va à l'encontre du modèle traditionnel de prévention du suicide. On peut lire ceci sur le site web de la Commission de la santé mentale du Canada :

L'objectif de la prévention du suicide est simple : réduire les facteurs qui augmentent le risque de suicide tout en renforçant les facteurs de protection tels que la résilience et l'espoir.

Et quel est l'un des principaux facteurs pour déterminer si une personne est plus susceptible de s'enlever la vie? L'accès aux moyens de le faire, ce que ce projet de loi offrirait dans une situation désespérée, honorables sénateurs.

Le suicide est un choix entre la vie et la mort. C'est définitif. Pour bien des gens qui veulent désespérément mettre fin à leurs souffrances émotionnelles, l'idée de s'enlever la vie est suffisamment pénible pour les dissuader de le faire. Il est impensable de faciliter ce choix et de rendre le suicide plus accessible pour ces personnes.

Pour une personne atteinte de troubles mentaux graves, tels des troubles d'anxiété ou de dépression sévères, ces souffrances lui semblent-elles intolérables? Sans aucun doute. J'en ai été témoin. Je respecte cela et ne le conteste pas. Mais ce projet de loi tient-il suffisamment compte de la complexité d'une décision finale où une maladie mentale comme la dépression est en cause? Selon moi, non.

Les personnes qui songent à se suicider peuvent changer plusieurs fois d'avis selon leur état d'esprit et les circonstances. De plus, les chiffres nous montrent que bien des gens qui se suicident le font après avoir fait une ou plusieurs tentatives. Ces tentatives, aussi tragiques soient-elles, permettent parfois à la personne de recevoir enfin l'aide dont elle a besoin pour se soigner ou pour traiter sa maladie mentale. Si une dose mortelle est administrée à une personne par un médecin, le patient n'aura aucunement la possibilité de changer d'avis ou de demander de l'aide. Cette mesure entraîne inéluctablement la mort.

Le projet de loi S-225 prévoit un délai de 14 jours entre le moment de la signature de la demande d'aide médicale à mourir et le moment de la mort. À mon avis, cette période ne permettrait même pas à bien des gens d'obtenir un rendez-vous chez un psychiatre. Elle permet encore moins aux gens de décider si leur vie vaut la peine d'être vécue. Dans le cas de maladies comme la dépression et l'anxiété, qui déforment souvent la façon de penser des gens et qui peuvent être épisodiques, le délai de 14 jours ne fournit tout simplement pas une protection suffisante.

En outre, les définitions nébuleuses du projet de loi sont carrément inadéquates. Une personne en proie à une grave dépression ou à des crises d'anxiété peut-elle vraiment être considérée comme saine d'esprit? Les définitions semblent sous-entendre une certaine capacité de réflexion rationnelle. Selon la gravité de la maladie mentale, la pensée rationnelle peut être possible ou non, mais la décision de se suicider peut-elle vraiment être prise au terme d'une réflexion rationnelle? Je ne suis pas certaine qu'on puisse défendre cette idée. Et si une personne souffrant de dépression était en mesure de penser rationnellement, sa maladie pourrait-elle être grave au point d'être jugée insupportable?

Le fait est que, dans cette mesure législative, les définitions sont subjectives. Il faut qu'il s'agisse de souffrances psychologiques qui « sont insupportables » à la personne « et qui ne peuvent être soulagées par aucun traitement médical qui lui soit acceptable ». Donc, il est possible que des traitements raisonnables soient à votre disposition et que ces traitements puissent réussir à atténuer vos souffrances psychologiques intolérables, mais, si vous décidez de ne pas les essayer, l'État doit vous aider à mettre fin à vos jours.

En fin de compte, la décision d'accéder à votre demande de suicide dépend de deux médecins qui, dans la mesure législative, sont définis comme étant des médecins autorisés à pratiquer la médecine par les lois de la province du territoire où vous vous trouvez. De plus, le projet de loi S-225 indique que le médecin-conseil, et seulement celui-ci, doit être « qualifié, en raison de sa spécialité ou de son expérience, pour poser un diagnostic et un pronostique professionnel relativement à l'état de santé de la personne ».

Je demande encore une fois ce qu'on entend au juste par là. Un omnipraticien est-il qualifié pour poser un diagnostic professionnel de maladie mentale? Comme les omnipraticiens peuvent prescrire des antidépresseurs, ce qu'ils font quotidiennement, il semble raisonnable de supposer qu'ils pourraient remplir les conditions requises et, pourtant, il y a un vaste fossé entre les connaissances d'un omnipraticien en matière de troubles mentaux et celles d'un psychiatre.

Ni le médecin aidant ni le médecin-conseil ne sont tenus d'avoir soigné le patient auparavant ou de bien connaître ses antécédents médicaux. En l'absence de symptômes physiques qui seraient probablement présents dans le cas d'une maladie physique, sur quoi un médecin est-il censé fonder son évaluation des « souffrances psychologiques insupportables »? Les notes d'un autre médecin? La parole du patient? L'option très définitive du suicide ne doit pas être offerte en l'absence de mesures de protection aussi cruciales.

En outre, si un médecin juge insupportables les souffrances mentales ou psychologiques d'un patient, ce jugement ne suppose-t-il pas l'absence d'espoir? En déclarant que la dépression d'un patient est insupportable, cela ne risque-t-il pas de dissuader le patient d'envisager d'autres traitements, d'autres médicaments, et cetera, qui pourraient le soulager et, au bout du compte, le garder en vie? Cela ne va-t-il pas à l'encontre de l'objectif premier d'un médecin, qui est « de ne pas faire de mal »?

Les considérations d'ordre éthique pèsent probablement encore plus lourd dans la balance pour les psychiatres. Le bioéthicien et auteur Jacob M. Appel a écrit ceci :

La nature de la thérapie psychiatrique diffère de celle des autres traitements médicaux par le degré d'attachement entre le thérapeute et le patient. Cette distinction est prise en compte dans divers codes réglementaires, et c'est justement pourquoi il est strictement interdit aux psychiatres d'entretenir des relations amoureuses avec leurs anciens patients, même des années après la fin des traitements. Les psychiatres ont aussi reçu la formation nécessaire pour prévenir les suicides — ce que la profession considère par ailleurs comme un échec à peu près complet. Ce conflit d'intérêts place le psychiatre dans une alternative désagréable, puisqu'il doit choisir entre respecter le choix de son patient et se conformer aux normes en vigueur dans sa profession. Certains psychiatres peuvent même être tentés de ne pas traiter les patients rationnels mais aux tendances suicidaires chroniques afin de ne pas être soumis à un tel choix.

Personne n'aimerait se trouver dans une telle position, on s'en doute.

Le projet de loi S-225 est avare de détails sur le processus qui servirait à déterminer si la demande d'aide médicale à mourir d'une personne serait autorisée ou non. Quel type d'évaluation le médecin effectuera-t-il pour déterminer si le suicide est la seule option envisageable pour son patient?

Selon le texte du projet de loi, c'est la personne qui demande de l'aide médicale à mourir qui décide elle-même ce qui lui est intolérable. En fait, le projet de loi S-225 précise que les souffrances « ne peuvent être soulagées par aucun traitement médical qui lui soit acceptable ». On ne dit pas que toutes les autres avenues doivent être explorées avant d'en venir à l'aide médicale à mourir.

Cette mesure législative ne servirait pas uniquement dans les cas de troubles mentaux résistant aux traitements, pour ne donner qu'un exemple. Il suffirait que le patient juge que toutes les autres formes de traitements médicaux lui sont inacceptables.

Puis-je avoir cinq minutes de plus, honorables sénateurs?

Son Honneur le Président : Nous allons accorder cinq minutes de plus à la sénatrice Batters.

La sénatrice Batters : Je vous remercie.

Il suffirait que le patient juge que toutes les autres formes de traitements médicaux lui sont inacceptables. Si on ajoute à cela un diagnostic, sous quel prétexte un médecin pourrait-il refuser d'acquiescer à une demande d'aide au suicide?

Est-ce qu'il y aura des consultations avec la famille ou les amis du patient? Je ne crois pas qu'il y en aurait, par respect pour sa vie privée, mais alors comment pouvons-nous garantir que le médecin conseillant le patient suicidaire est pleinement conscient de toutes les ressources qui sont à la disposition du patient? Est-ce qu'une thérapie intensive prolongée pourrait aider un patient à se guérir lui-même, à réparer des relations brisées ou à rétablir des réseaux de soutien essentiels qui pourraient lui donner une lueur d'espoir, une raison de vivre?

Honorables sénateurs, à mon avis, la préservation de cet espoir, pour une personne atteinte de troubles mentaux, est le principal facteur à prendre en considération.

Est-ce que notre société abdique sa responsabilité et son obligation d'aider les personnes souffrant de troubles mentaux en leur proposant cette aide au suicide sanctionnée par l'État? Ne devrions-nous pas plutôt trouver un moyen de leur offrir le soutien dont elles ont besoin?

La mesure législative soulève beaucoup trop de questions et ne fournit presque aucune réponse. Cependant, je peux vous dire quelle serait ma réponse à ces questions, honorables sénateurs. Cela fait maintenant presque six ans que j'ai perdu l'homme que j'aimais. J'ai recollé les morceaux, et j'ai continué ma vie. J'ai tenté de tirer quelque chose d'utile de notre tragédie personnelle. Or, pas un jour ne s'écoule sans que je me demande si une autre solution n'aurait pas été possible pour Dave — un autre conseiller, un autre traitement médical, une autre conversation qui aurait pu l'amener à changer sa décision. À cause de l'irrévocabilité de son choix, nous ne le saurons jamais.

Dans le milieu de la prévention du suicide, on dit ceci : « Le suicide n'empêche pas ta vie de devenir pire. Il élimine la possibilité qu'elle s'améliore un jour. »

Honorables sénateurs, c'est la Semaine de la santé mentale. Je pense donc qu'il est particulièrement important de tenter de fournir de réelles solutions aux gens qui sont aux prises avec des troubles mentaux, plutôt que de leur offrir des moyens plus faciles de recourir à l'irrémédiable.

Honorables collègues, nous ne pouvons pas appuyer ce projet de loi dans sa forme actuelle, car il comporte de graves lacunes. Les Canadiens sont d'accord pour dire qu'il faut atténuer la souffrance des personnes malades, mais pas dans ces circonstances. Dans cette vénérable enceinte, je ne peux pas me prononcer en faveur de l'étude approfondie d'une mesure qui condamnerait d'autres familles canadiennes à subir le même sort que le mien, c'est-à-dire à devenir les survivants de personnes qui se sont suicidées.

Les personnes qui souffrent sur le plan psychologique ont besoin de soutien et de ressources, et nous devons leur promettre que nous ne les abandonnerons jamais, même lorsque, pour elles, la seule solution, c'est de lâcher prise définitivement. Honorables sénateurs, les Canadiens méritent mieux. Je vous demande de vous joindre à moi pour rejeter ce projet de loi. La vie de nos proches qui souffrent d'une maladie mentale pourrait en dépendre.

Des voix : Bravo!

(Sur la motion de la sénatrice Seidman, le débat est ajourné.)

(1500)

Projet de loi de 2014 instituant des réformes

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Tannas, appuyée par l'honorable sénatrice Ataullahjan, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-586, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi sur le Parlement du Canada (réformes visant les candidatures et les groupes parlementaires).

L'honorable Joan Fraser (leader adjointe de l'opposition) : Honorables sénateurs, permettez-moi de dire d'entrée de jeu qu'il y a très peu de parlementaires, voire aucun, que je respecte plus que l'auteur de ce projet de loi, Michael Chong. Vous pouvez compter sur les doigts d'une seule main — et vous n'utiliseriez pas tous les doigts — le nombre de personnes qui, au cours des 50 dernières années, ont eu le courage et le cran de démissionner du Cabinet pour une question de principe. C'est ce qu'a fait M. Chong.

Il a démissionné, mais il n'est pas parti vexé. Pendant les années qui ont suivi, il a consacré énormément d'énergie à la lutte pour le renouveau et l'amélioration du Parlement. J'admire ses principes, et je l'admire d'avoir eu le courage de les défendre et la ténacité qu'il a montrée dans ses démarches pour les faire respecter.

Son projet de loi s'intitule Loi de 2014 instituant des réformes, mais je suppose que l'année serait changée pour 2015 s'il était adopté. C'est un titre qui a une forte résonance historique. Il nous rappelle que la réforme parlementaire est sans fin.

Récemment, j'ai lu un excellent livre, de l'historienne britannique Antonia Fraser, au sujet des débats houleux qui ont eu lieu à Westminster en ce qui concerne la loi de 1832 sur la réforme. La réforme parlementaire n'a rien de nouveau. Elle sera toujours d'actualité, parce que les sociétés évoluent, tout comme le public et les technologies. Nous ne devons jamais oublier que, pour tenir compte de cette évolution, il nous faut constamment changer et modifier nos pratiques.

Par ce projet de loi, M. Chong vise notamment à renverser des tendances malsaines qui se sont dessinées au Parlement ces dernières décennies. Qui parmi nous le blâmerait de vouloir faire une telle chose?

Qui parmi nous n'a pas déploré la façon dont les gouvernements successifs ont écarté le Parlement du pouvoir au cours des dernières décennies? La situation s'aggrave d'un gouvernement à l'autre, ce qui veut dire que l'actuel gouvernement a rendu les choses encore pires qu'elles étaient, quoique la tendance existe depuis des années et a persisté d'un gouvernement à l'autre. Le pouvoir a glissé peu à peu des mains des parlementaires vers ce qu'on appelle couramment le centre, c'est-à-dire vers le cabinet du premier ministre ou celui du leader du gouvernement, pour, bien souvent, aboutir avec le personnel politique, des gens non élus qui, à l'heure actuelle, ont bien souvent plus de pouvoir que certains ministres. Cette tendance entraîne progressivement une énorme distorsion des principes fondamentaux du système parlementaire de type Westminster.

Dans ce système, ce sont les parlementaires qui sont censés avoir le pouvoir ultime et non les employés d'un quelconque cabinet. Ainsi fonctionne un gouvernement dit responsable. J'entends encore la voix de mon professeur d'histoire en huitième année, qui tentait de nous faire comprendre combien l'instauration d'un gouvernement responsable représentait une grande victoire. Or, c'est le gouvernement qui est censé rendre des comptes au Parlement, et non l'inverse.

Voilà ce que M. Chong veut rétablir. Je ne puis que saluer ses bonnes intentions, de même que l'habile façon dont il a su mettre le dossier au programme du gouvernement. Il a réussi à susciter une conversation publique sur le sujet. Le reste d'entre nous ne peut pas en dire autant.

Toutefois, les gestes bien intentionnés ne nous mènent pas toujours là où nous voulons aller. J'ai eu plusieurs réactions à la lecture du projet de loi. Premièrement, il est présumé que celui-ci ramènera le pouvoir entre les mains des députés — mais pas vraiment dans celles des sénateurs —, ce qui est quelque peu illusoire. En fait, il n'aura pas pour effet de retirer le contrôle du centre; il enlèvera plutôt du pouvoir aux membres des partis politiques, sur lesquels repose le système actuel. Il contre ainsi les efforts déployés par tous les partis au cours des dernières décennies au Canada pour donner plus de pouvoir aux membres du parti. Je suis d'avis que, pour cette raison, le projet de loi aurait pour effet pervers de décourager l'engagement citoyen dans la politique — et Dieu sait combien nous devons éviter qu'une telle chose se produise.

J'ai une autre réaction, beaucoup plus viscérale, celle de me demander dans quelle mesure un projet de loi qui propose une solution unique devrait influer sur les décisions et les pratiques de partis politiques qui sont différents les uns des autres, comme il se doit. Lorsque l'on adhère à un parti donné, c'est notamment en raison de ce qui le distingue des autres, sur le plan aussi bien de l'idéologie que des usages, des traditions et des approches à l'égard des grands enjeux.

Je ne suis pas la seule à exprimer des réserves à ce sujet. Lorsqu'il a étudié le projet de loi, le comité de l'autre endroit a pu entendre le témoignage d'un éminent politologue, Ned Franks, qui a dit ce qui suit :

Je me demande vraiment dans quelle mesure le Parlement lui-même devrait dicter aux groupes parlementaires et aux partis la façon de gérer leurs politiques internes. Il y a toujours eu une grande différence entre les partis au Parlement et à l'extérieur du Parlement, et dans les rapports entre les deux.

Je partage l'avis de M. Franks. Élaborer un projet de loi dans le but d'uniformiser les règles du jeu en période électorale, c'est une bonne chose, il me semble, car il vise à faire en sorte que tous les Canadiens aient la possibilité de choisir entre les divers partis en lice. Cependant, lorsqu'on en vient à adopter un projet de loi pour régir les affaires internes des partis et, ce faisant, la liberté de choix et d'action des parlementaires, je pense que nous conviendrons tous que cela constitue une ingérence excessive de la part de l'État.

Je récapitule dans l'ordre ce que propose le projet de loi. Tout d'abord, il y a l'article qui retirerait ostensiblement au chef d'un parti le pouvoir de choisir qui sera ou non candidat. Actuellement, comme on le sait, les chefs doivent donner leur aval aux candidats qui se présentent pour leur parti. À mes yeux, il s'agit de la disposition la plus illusoire du projet de loi. Après tout, personne n'est dupe. Le projet de loi indique qu'il incombe aux personnes autorisées par le parti politique de soutenir les candidats potentiels. Dites-moi quel chef de parti ne contrôlera pas la personne ou les personnes qui approuveront les candidats, parce que croire que cela n'arrivera pas, c'est bâtir des châteaux en Espagne.

(1510)

M. Chong définit ensuite ce qu'est un groupe parlementaire. Habituellement, on peut laisser tomber les définitions, mais, dans ce projet de loi, la définition de ce qu'est un groupe parlementaire est l'élément central de toutes les dispositions, à part l'approbation des candidats. Voici la définition proposée par M. Chong :

[...] groupe composé exclusivement des députés qui adhèrent à un même parti reconnu.

J'espère bien que tous les sénateurs d'en face sont disposés à devenir indépendants comme nous le sommes de ce côté-ci.

Le sénateur Mitchell : Vous venez de vous faire expulser de votre groupe parlementaire. C'est un groupe à deux vitesses.

La sénatrice Fraser : M. Chong a fourni quelques explications sur cette définition, que je trouve, si je puis dire, malhonnête. Il dit que la Loi sur le Parlement du Canada prévoit déjà qu'un groupe parlementaire comprend seulement les députés de la Chambre des communes et que l'autre définition qui concerne les sénateurs renvoie au caucus sénatorial. Or, dans la Loi sur le Parlement du Canada, la définition de groupe parlementaire de la Chambre des communes — il ne s'agit pas vraiment d'une définition, mais plutôt d'une référence — parle de la composition du Bureau de régie interne. En fait, il s'agit d'un comité de la Chambre des communes. On ne s'attend pas à ce que des sénateurs puissent faire partie d'un comité de la Chambre des communes, n'est-ce pas? L'autre passage où il est question des groupes parlementaires est le long article qui traite des indemnités supplémentaires qui sont accordées à ceux qui occupent divers postes de direction.

Cela n'a rien à voir avec ce que je considère comme étant le rôle plus fondamental du caucus, soit, en grande mesure, selon moi, de faire le pont entre le parti et le Parlement. C'est pour cette raison, parce que le caucus sert de pont, que je réfléchirais longuement et sérieusement avant d'adopter une loi empêchant les sénateurs d'appartenir à un caucus, car, en fonction du moment, du parti et des personnes concernées, il y a des sénateurs qui ont beaucoup à contribuer à ce rôle qui consiste à faire le pont entre le parti et le Parlement. Cela a toujours été le cas, des deux côtés de l'enceinte, et je pense qu'il y a suffisamment de chances que cette réalité se maintienne pour affirmer qu'il serait peu judicieux d'adopter une mesure empêchant les sénateurs d'appartenir à un caucus.

M. Chong affirme qu'il pourrait quand même y avoir un caucus national. Rien n'empêcherait le caucus du Sénat et le caucus de la Chambre des communes de se réunir. Mais les sénateurs continueraient d'être des citoyens de deuxième rang car ils ne pourraient pas se prononcer sur les questions cruciales que le projet de loi aurait pour effet de confier aux caucus.

Je ne crois vraiment pas qu'il soit judicieux de définir ainsi un caucus en droit. Le concept peut changer d'un parti à l'autre, et il peut également changer au fil du temps. Vous vous souviendrez qu'il y a un peu plus d'un an, le chef du Parti libéral du Canada a décidé que les sénateurs libéraux ne feraient plus partie de son caucus national. J'ai mes propres opinions sur la façon dont il s'y est pris et sur les conséquences à long terme de sa décision, mais jamais n'ai-je remis en question son droit de la prendre, sans contraintes juridiques. L'inclusion ou l'exclusion d'un membre du caucus ne devrait jamais se faire aux termes d'une loi. À mon avis, c'est une question pour les membres du caucus et les chefs des partis.

Et ce n'est qu'un début. D'après le projet de loi, le président du caucus doit être élu, ce qui concorde avec mon point de vue personnel, en fait. Tous les caucus dont j'ai fait partie élisent leur président. Je pense au caucus national du Parti libéral, à celui du Québec, à celui du Sénat, à celui des femmes... Tous ces caucus ont élu leur président, une pratique admirable. Mais comme le savent les sénateurs d'en face, les partis et les caucus ne choisissent pas tous de procéder ainsi. Je plains parfois les partis qui n'ont pas adopté ce principe démocratique admirable, mais je suis convaincue que, si l'autre côté a adopté une méthode différente, il l'a fait pour des raisons qui lui semblaient logiques. Je suis simplement soulagée de ne pas être dans cette situation. Quoi qu'il en soit, la loi ne devrait pas dicter aux caucus comment gérer leurs affaires, vraiment pas.

Passons maintenant à l'aspect le plus important, celui du leadership du parti. En vertu de ce projet de loi, 20 p. 100 des membres du caucus, donc 20 p. 100 des députés d'un parti donné, pourraient demander un vote d'examen de la direction. Ce pourcentage de 20 p. 100 n'est pas très élevé. C'est une personne sur cinq. Si 20 p. 100 des membres du caucus écrivent au président du caucus pour demander un vote d'examen de la direction, le président devra demander aux membres du caucus, par scrutin secret, s'ils souhaitent un congrès à la direction en bonne et due forme. Il suffirait qu'une majorité de députés répondent oui pour jeter le parti dans la tourmente. Cette proposition comporte tellement de failles que je ne sais plus par où commencer.

M. Chong est animé de bonnes intentions, bien entendu. Il souhaite ramener les pratiques parlementaires qui étaient en vigueur à l'époque où les gouvernements savaient qu'ils avaient des comptes à rendre au Parlement. À l'époque, les caucus choisissaient leur président, mais les méthodes du XIXe siècle ne conviennent pas nécessairement au Canada du XXIe siècle.

Depuis plusieurs années, l'idée selon laquelle les membres d'un parti devraient choisir le chef du parti, et le congédier au besoin, gagne graduellement du terrain au Canada. Les membres ordinaires des partis ont de plus en plus la possibilité de participer à cette décision. À une certaine époque, on tenait des congrès réunissant des délégués, et le choix des délégués pouvait laisser à désirer. Nous l'avons toutefois rendu plus ouvert et plus transparent. Nous avons fait en sorte que les délégués représentent tous les secteurs de la société et toutes les régions, puis que tous les membres du parti puissent voter. Récemment, mon gouvernement — je voulais dire mon parti, pardonnez-moi... J'aimerais que mon parti soit mon gouvernement. Bref, dans le parti auquel je suis fière d'appartenir, nous avons permis à de simples sympathisants du parti de voter pour l'élection du chef. Notre but est de rendre le processus plus ouvert et plus démocratique. Voilà ce que nous avons fait au Canada. Le projet de loi de M. Chong brouillerait terriblement les cartes.

Il est vrai qu'il n'est pas facile de destituer un chef après qu'il ou elle a été choisi. J'espère que nous aurons une autre femme chef avant que je meure. La destitution devrait être difficile, parce que les chefs doivent souvent prendre des décisions difficiles et qu'ils ne peuvent pas fonctionner adéquatement si à tout moment ils doivent se demander si leur décision déplaira à 20 p. 100 des membres de leur caucus. Par contre, il y a des occasions de destituer un chef inadéquat, notamment après une défaite électorale. Selon moi, ce système entraînerait une instabilité dangereuse et dommageable.

Je suis, chaque fois, surprise de lire l'exemple de l'Australie.

(1520)

En Australie, en 2010, le caucus du Parti travailliste qui dirigeait le pays a montré la porte au premier ministre, M. Kevin Rudd, et l'a remplacé par une députée rebelle, Mme Julia Gillard. Toutefois, M. Rudd ne s'est pas laissé démonter et il a continué à se battre. Cela se passait en 2010. Au début de 2012, M. Rudd se sent assez d'attaque pour remettre en question la direction de Mme Gillard, mais il échoue. Or, malgré son échec, il continue à se battre. Un an plus tard, en mars 2013, il essaie de nouveau, essuie un autre échec, mais tient le coup. Son opiniâtreté est finalement couronnée de succès en juin 2013, et il réussit à inciter ses collègues à remercier Mme Gillard et à le remettre à la tête du parti. En procédant de la sorte, M. Rudd a fait vivre trois ans d'incertitude et d'instabilité à son parti, certes, mais aussi à tout le système politique australien, ce qui n'est pas une conséquence particulièrement souhaitable. Ce qui est fascinant, cependant, c'est qu'il a modifié le système dès qu'il est revenu en selle.

Aujourd'hui, au sein du Parti travailliste de l'Australie, un vote à la direction du parti susceptible d'entraîner le limogeage du premier ministre ne peut avoir lieu que si 75 p. 100 des membres du caucus signent une pétition et, même si cette condition est remplie, cela ne peut se faire que si le chef a jeté le discrédit sur le parti, ce qui est très différent du fait d'avoir pris des décisions avec lesquelles je n'étais pas d'accord, de ne pas m'avoir accordé un poste au Cabinet ou de toute autre raison susceptible de contrarier les uns et les autres.

Au pays, plus récemment, nous avons été témoins de l'exemple fascinant du Manitoba, où il y a eu une exubérante rébellion au sein du caucus qui a mené à un congrès à la direction au terme duquel — oh, surprise! — le parti a décidé de garder son chef. Je ne suis pas membre de ce parti. Je ne suis pas manitobaine. Néanmoins, je déteste penser au stress et à la pression que toute cette séquence d'événements a pu faire vivre au gouvernement, au caucus et, fondamentalement, au parti. Ce n'est pas le genre de chose que l'on peut prendre à la légère.

En ce qui concerne la notion selon laquelle 20 p. 100 des voix suffisent pour exiger la tenue d'un vote, de même que l'idée voulant que 50 p. 100 des voix suffisent pour lancer une course à la direction du parti, vous pourriez faire valoir — en fait, je ferais valoir — que cette mesure donnerait du pouvoir aux mécontents. Or, quelle que soit l'institution humaine, il y aura toujours un certain nombre de mécontents, de personnes insatisfaites.

Une voix : Comme...

La sénatrice Fraser : Oui, je le pense vraiment. Comme moi, vous avez travaillé dans des salles de presse; vous savez donc que c'est vrai. Il y a beaucoup de mécontents dans les salles de presse. C'est la nature humaine. Ces gens diront : le chef ne me comprend pas; le chef n'est pas d'accord avec moi; le chef ne fait pas ce que j'estime qu'il devrait faire; le moment est venu de montrer la porte au chef. Il y a beaucoup de gens comme ça, et il y en a probablement plus en politique que n'importe où ailleurs.

Donc, ce projet de loi prévoit que seulement 20 p. 100 de ceux qui font partie du caucus pourront prendre cette décision. Je pense que c'est le sénateur Wells qui a souligné, lors d'un échange avec le sénateur Tannas, que le groupe parlementaire dont je ne fais plus partie compte 32 membres, ce qui signifie que seulement 7 personnes pourraient lancer le processus menant à la destitution d'un chef qui a reçu l'appui d'environ 25 000 Canadiens, qui a été choisi et élu par eux — 7 personnes par rapport à 25 000. J'estime que cette proposition est tout à fait antidémocratique.

Cela dit, je suppose que s'il y a un aspect positif, c'est probablement le fait que tout cela peut être illusoire. En effet, pour que ces règles puissent être appliquées, le caucus devrait décider après chaque élection s'il accepte ou non ces règles. On peut dire que c'est un choix qui n'en est pas un. Si vous acceptez ces règles, vous acceptez aussi un système fondamentalement mauvais. Si vous ne les acceptez pas, eh bien, imaginez seulement ce que les journalistes raconteront et ce que les gens diront dans les tribunes téléphoniques, de même que le genre de courriels que vous recevrez. C'est pour ces raisons que je pense que cette mesure est illusoire quel que soit l'angle sous lequel vous l'examinez.

J'aimerais ne pas le croire, mais je pense en fait que si ce projet de loi est adopté et entre en vigueur, il aura l'effet presque contraire de ce que tant de Canadiens espèrent — en fait, de ce que M. Chong espère, nommément la revitalisation, la modernisation et une plus grande ouverture du Parlement. Je ne pense pas que cela se passera ainsi. J'ai bien peur que, de bien des façons, il aura l'effet contraire.

Alors me voilà, à descendre en flammes la seule mesure législative que nous ayons vue depuis bien longtemps qui tente d'améliorer le Parlement. Il serait juste de dire : « Alors, que feriez-vous si vous n'aimez pas ce projet de loi? »

Ma solution paraît plus simple qu'elle ne l'est, mais elle est, essentiellement, assez simple. Elle consiste à faire en sorte que toutes les personnes qui siègent dans les deux Chambres fassent simplement leur travail — qu'elles ne se contentent pas de s'incliner devant le leader, son personnel ou le personnel ministériel lorsqu'elles ne sont pas d'accord; quand, après mûre réflexion, elles ne sont pas d'accord avec ce qu'on leur demande d'avaliser ou non, en fait.

J'estime que chaque personne qui siège dans une Chambre ou l'autre a pour devoir de déterminer avec soin s'il est dans l'intérêt du public de voter en faveur d'une mesure législative donnée ou d'un amendement précis. Dans les deux Chambres, nous avons de plus en plus manqué à ce devoir. Pratiquement chaque vote est considéré comme un vote soumis à la discipline de parti, même dans le cas de nombreux projets de loi d'initiative parlementaire. Cependant, pourquoi les citoyens canadiens nous paient-ils? Ils ne nous paient pas pour être les « chiens savants » que l'on décrie fréquemment. Cependant, si nous sommes dépréciés, c'est que nous nous comportons souvent ainsi. Notre premier devoir est de représenter les gens.

On a naturellement tendance à vouloir prendre le parti de son équipe. Il n'y a rien de mal à cela, tant qu'on ne croit pas que son équipe fait quelque chose de mal. Il y a des raisons pour lesquelles nous appartenons à nos partis respectifs. Il y a un esprit d'équipe, et je pense que c'est une bonne chose. Mais nous devons exercer notre propre jugement. Qu'est-ce que nos chefs peuvent nous faire si nous exerçons notre propre jugement? Pas grand-chose. Ils peuvent nous expulser du caucus. Et après? Qu'est-ce qui est plus important? Voter pour ce que l'on juge être juste ou dîner à Stornoway ou au 24, promenade Sussex? Allons donc.

Au cours des derniers mois, nous avons adopté dans cette enceinte des projets de loi tout en sachant qu'ils comportaient des lacunes. Nous savions qu'ils étaient imparfaits — et je ne parle pas de divisions partisanes quant à savoir si une politique est bonne ou mauvaise, mais d'erreurs contenues dans des projets de loi —, et nous les avons quand même adoptés. Nous sommes censés être la Chambre de second examen objectif. Il serait peut-être approprié que les deux Chambres du Parlement changent leurs règles et leurs pratiques respectives, sans passer par l'intermédiaire de la loi, pour favoriser une plus grande indépendance.

Une chose qui serait très simple à adopter, qui est souvent proposée mais qui n'est jamais mise en œuvre, c'est le système britannique de vote de troisième catégorie, car les votes de troisième catégorie sont des questions de confiance pour lesquelles on s'attend à appuyer son parti. Pour ce qui est des votes des autres catégories, le respect de la ligne de parti est moins important, et les députés au Parlement de Westminster sont alors beaucoup plus libres de voter selon leur conscience.

(1530)

Des mesures de ce genre peuvent être mises en place sans l'adoption d'un projet de loi fourre-tout. Si nous voulons une réforme sérieuse du processus parlementaire, voilà le genre de mesures que nous devrions étudier, et je crois que M. Chong serait un excellent candidat pour piloter cette initiative.

Il travaille sans relâche. Il est manifestement tenace et courageux. Si, comme je l'espère, ce projet de loi n'est pas adopté dans sa forme actuelle, j'espère sincèrement qu'il ne baissera pas les bras, qu'il emploiera ses talents admirables à s'attaquer aux problèmes qui peuvent être résolus en limitant les conséquences malheureuses qui, bien qu'elles soient involontaires, sont néanmoins prévisibles.

J'aimerais pouvoir appuyer ce projet de loi. Cependant, je crains, honorables collègues, de ne pas pouvoir l'appuyer dans sa forme actuelle.

L'honorable Grant Mitchell : Honorables sénateurs, je n'avais pas prévu prendre la parole à ce moment précis, mais j'ai été inspiré par les observations de ma collègue. J'aimerais renchérir sur ce qu'elle a dit, tout en indiquant que j'approuve complètement certaines de ses observations.

De façon plus générale, j'aimerais d'abord dire qu'il n'est pas toujours facile d'être le chef d'un caucus, qu'il soit ministériel ou autre. Comme j'ai déjà été dans cette situation, je suis tout à fait conscient des tensions et des pressions que cela implique, et je suis persuadé que toute personne présente dans cette salle aujourd'hui qui est ou qui a déjà été chef conviendra que ce n'est pas un travail particulièrement facile. Même si je ne suis pas resté longtemps dans le caucus ministériel, j'y suis resté assez longtemps pour pouvoir affirmer qu'il n'est pas tout à fait vrai de dire que les chefs ont le genre de pouvoir absolu que certains experts et analystes veulent bien leur attribuer.

Ceux qui ont siégé dans un caucus ministériel, j'en suis sûr, ont été témoins d'occasions où l'on a probablement surestimé l'importance de la présence et du pouvoir, au sein de ce caucus, d'un premier ministre qui, de l'avis de plusieurs, avait plus de pouvoir que bien d'autres avant lui, si ce n'est tous ses prédécesseurs, et qui tenait à ce pouvoir.

Ce n'est pas comme si le premier ministre en fonction, ou tout autre premier ministre ou chef, dans le processus politique, était entouré de faibles et de gens qui s'inclinent devant toutes ses requêtes. Je sais qu'il y a des débats intenses dans tous les caucus. Il y en avait dans tous les caucus dont j'ai fait partie.

Une chose m'a paru juste dans ce que la sénatrice Fraser a dit, et elle concerne le problème de la déstabilisation du leadership d'un parti, surtout le leadership d'un parti au pouvoir. Au Canada, nous avons vraiment besoin d'un leadership fédéral fort. C'est un pays qui n'est pas particulièrement facile à gouverner. Il est problématique d'affaiblir ou de déstabiliser ce leadership.

Comme je disais, il y a moyen de contenir cela, ce qui se fait de plusieurs façons. Il arrive que le contrôle faiblisse, mais, dans l'ensemble, cette possibilité est habituellement très bien contenue.

Je dirais aussi, à la défense de l'opposition et de l'importance de l'opposition, que, s'il est difficile pour un premier ministre, fédéral ou provincial, d'avoir une emprise totale sur son caucus — et je pense que, jusqu'à un certain point, c'est le cas —, c'est extrêmement difficile pour un chef de l'opposition. Le chef de l'opposition dispose de bien moins d'armes dans son arsenal pour garder l'emprise sur son caucus. Cette mesure législative aurait un effet beaucoup plus marqué sur les partis de l'opposition et leurs chefs que sur les forces et les distractions auxquelles pourrait être confronté un premier ministre fédéral ou provincial.

J'ai un peu de mal à accepter ce projet de loi pour une autre raison. C'est un peu comme le problème de la destitution. Une destitution vise rarement un député d'arrière-ban ou même un ministre. C'est habituellement le chef qui fait l'objet d'une destitution. Je ne me souviens pas de tous les détails, mais l'histoire nous enseigne... Je pense que, à l'origine, ce sont les créditistes qui ont fait campagne en faveur de la destitution et que, peu après, Aberhart a fait l'objet d'une initiative de destitution. Celui-ci a changé rapidement la loi, car c'est toujours le chef qui fait les frais de cette pratique, ce qui est fort déstabilisant. Je tiens de nouveau à souligner ce fait.

Je dirais que je suis aussi très préoccupé — comme la sénatrice Fraser — par la question de la démocratie. Je pense que nous avons fait beaucoup de progrès en vue d'accroître la démocratisation du processus de sélection du chef au moyen du principe « une personne, un vote », mais que ce projet de loi va tout à fait à l'encontre de cela. Je ne peux tout simplement pas accepter cette situation. Je ne peux tout simplement pas accepter qu'une poignée de personnes puisse annuler la décision prise par un groupe beaucoup plus important.

Enfin, pour ce qui est des limites imposées aux pouvoirs des chefs, je dirais qu'il suffit de songer au pouvoir des membres du caucus. Leur pouvoir est grand, comme on nous l'a souvent prouvé. Je pense que, étrangement, M. Chong, le député qui a présenté ce projet de loi et qui insiste pour qu'il soit adopté, a présenté une argumentation contraire à la mienne, qui est la suivante : il est bel et bien vrai que les caucus peuvent s'opposer à leur chef et changer profondément la situation — pensez au cas de Stockwell Day, qui était chef lorsque 15 personnes ont quitté le caucus de son parti.

J'ajouterais que, si le petit nombre de députés nécessaires ont le courage de ne pas voter dans le même sens que leur chef, je ne vois pas pourquoi le même petit nombre de députés n'auraient tout simplement pas le courage de s'opposer à leur chef. Pourquoi ce même petit nombre de députés n'auraient-ils pas le courage de se lever à l'autre endroit et voter contre la ligne de parti?

À mon avis, c'est la façon de commencer à limiter les pouvoirs indus, et ce, d'une manière pratique et concrète qui n'engendre pas un problème qui peut être pire que celui que vous essayez de régler.

Je vote moi aussi contre le projet de loi.

L'honorable David M. Wells : La sénatrice Fraser accepterait-elle de répondre à une question?

La sénatrice Cordy : Elle ne le peut pas maintenant.

La sénatrice Fraser : Trop tard.

Son Honneur le Président : Son intervention est terminée.

Le sénateur Mitchell : Vous pouvez me poser votre question, et je ferai un commentaire.

Son Honneur le Président : Sénateur Wells.

Le sénateur Wells : Le sénateur Mitchell accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Mitchell : Oui.

Le sénateur Wells : Tout d'abord, je vous félicite de la rapidité avec laquelle vous vous êtes levé.

J'aimerais vous poser une question qui porte précisément sur la représentation régionale au Sénat. Nous savons que la Chambre des communes représente la population canadienne, et nous sommes ici en tant que sénateurs pour représenter des régions. Nous voulons aussi avoir une voix. Nous représentons également les minorités.

Dans notre cas, du moins dans le mien — je représente la région de Terre-Neuve-et-Labrador —, s'il y avait un vote concernant le chef du parti que j'appuie et que je représente — et je suis membre d'un caucus —, mais que je n'avais pas droit de vote, cela voudrait automatiquement dire que Terre-Neuve-et-Labrador ne pourrait pas s'exprimer sur la question, étant donné qu'il n'y a aucun député conservateur qui représente cette province.

Cela serait tout aussi vrai dans les territoires, qui ne sont représentés que par un parti chacun. La province de Québec est un autre exemple : le quart de la population canadienne s'y trouve, mais elle n'est représentée que par cinq députés conservateurs, si je ne m'abuse.

Que pensez-vous de la question de la représentation régionale en l'absence des sénateurs lors des discussions qui concernent la direction du parti?

La sénatrice Cordy : C'est une bonne question.

La sénatrice Tardif : Bonne question, en effet.

Le sénateur Mitchell : Eh bien, cela limite manifestement la légitimité du groupe parlementaire qui inclut le Sénat en créant un groupe parlementaire à deux vitesses, ainsi que sa légitimité à l'égard de cette décision. L'argument que vous présentez est excellent du moins; quant à savoir si vous le défendez, je l'ignore. Merci quand même de me l'avoir rappelé. Je le défendrai, car il fait ressortir davantage le problème.

J'aimerais profiter de l'occasion pour lancer quelques pointes, mais je vais m'abstenir parce vous avez présenté cet argument de bonne foi. Pour ce qui est de la représentation régionale au sein de votre caucus, je tiens à souligner qu'il y a maintenant 20 sièges vacants au Sénat, et que le Manitoba est passé bien près de ne plus être représenté comme il se doit dans cette enceinte. En effet, seulement trois des sièges de cette province sont en ce moment occupés; c'est la moitié seulement.

(1540)

En ce qui concerne l'Ontario, il y a maintenant cinq sièges vacants, ce qui signifie que 20 p. 100 de cette province n'est pas adéquatement représentée dans cette Chambre importante. Je pourrais continuer ainsi et, bien entendu, j'aimerais le faire, mais je ne veux pas abuser de votre bonne foi et de votre bonne volonté en répondant à votre question. Je pense que vous avez fait valoir un bon argument ou, du moins, vous m'avez permis de faire valoir ce qui, selon moi, est un bon argument, et je vous en remercie.

(Sur la motion du sénateur Doyle, le débat est ajourné.)

Règlement, procédure et droits du Parlement

Adoption du sixième rapport du comité

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur White, appuyée par l'honorable sénatrice Andreychuk, tendant à l'adoption du sixième rapport du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement (Modifications au Règlement du Sénat), présenté au Sénat le 21 octobre 2014.

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

Régie interne, budgets et administration

Adoption du quatorzième rapport du comité

Le Sénat passe à l'étude du quatorzième rapport du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration (budget de certains comités—législation), présenté au Sénat le 23 avril 2015.

L'honorable Larry W. Smith propose que le rapport soit adopté.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

La pêche sportive du saumon de l'Atlantique

Interpellation—Fin du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Maltais, attirant l'attention du Sénat sur la sauvegarde de la pêche sportive du saumon de l'Atlantique dans les zones maritimes dans l'est du Canada, et l'importance de la protection du saumon de l'Atlantique pour les générations futures.

L'honorable James S. Cowan (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, j'aimerais d'abord remercier le sénateur Maltais d'avoir lancé cette interpellation. Par le passé, il a attiré notre attention sur les différents aspects de la chasse au phoque, et par cette nouvelle interpellation, il s'efforce maintenant de souligner l'importance du saumon de l'Atlantique pour l'ensemble de la région de l'Atlantique. Je tiens aussi à remercier les collègues des deux côtés de la Chambre qui ont participé au débat jusqu'à présent. Toutes vos interventions ont prouvé qu'une population de saumon saine est importante pour la prospérité économique du Canada atlantique.

Nous savons tous que le saumon est un poisson d'une grande importance. Le roi des rivières, comme on appelle le saumon de l'Atlantique, occupe une grande place dans l'histoire et la culture de la région. Il est un grand moteur de l'économie locale et il est indissociable du développement global et de la vitalité de l'environnement et des écosystèmes de la région. Pourtant, comme nous le savons, le saumon de l'Atlantique est une espèce menacée. Quand le sénateur Meighen a lancé une interpellation semblable, en 2011, les populations de saumon étaient plus fortes qu'elles ne le sont aujourd'hui. Le nombre de remontes dans la rivière Miramichi, au Nouveau-Brusnwick — l'une des rivières les plus riches en saumon de la région de l'Atlantique — était d'environ 80 000 à l'époque. L'année dernière, il n'y a eu que 12 000 remontes dans la rivière Miramichi : il s'agit de l'un des taux de remontes les plus faibles jamais enregistrés.

Avant de prendre sa retraite, notre ancien collègue, le sénateur Robichaud, nous a parlé de la rivière Mirachimi. Cette rivière se trouve dans sa province natale qu'il aime tant. Le portrait qu'il nous avait alors présenté était plutôt sinistre. Le saumon de l'Atlantique se meurt : les stocks diminuent et nous ne comprenons pas tout à fait pourquoi. Que fait-on pour corriger cette situation désastreuse? Cette interpellation est une première étape. Vous avez été nombreux à parler des organisations de protection de l'environnement qui opèrent bénévolement dans la région et vous avez loué leurs efforts de sensibilisation, de gestion des stocks, de restauration de l'habitat et de création d'écosystèmes sains. Bien que ces efforts jouent un rôle crucial, chers collègues, ils ne sont pas suffisants. Il faut les associer à d'autres mesures.

J'ai souvent parlé, en cet endroit, de la nécessité d'avoir un leadership fédéral. Le gouvernement fédéral peut faire preuve d'initiative de bien des façons pour aider à améliorer la vie des Canadiens partout au pays. Au Canada atlantique, il peut jouer un rôle pour donner des résultats concrets en matière de conservation. En protégeant le saumon de l'Atlantique, nous pouvons renforcer les collectivités côtières, protéger les traditions culturelles et contribuer à stimuler les économies locales. À cet égard, je suis heureux de dire que le gouvernement a suivi les conseils qu'il a reçus. En plus de prêter l'oreille à tous les parlementaires, peu importe leur allégeance politique, le gouvernement a écouté les ONG, comme la Fédération du saumon atlantique et la Miramichi Salmon Association, qui ont réclamé la création d'un groupe d'experts pour aider à régler la crise du saumon.

En mars dernier, le nouveau Comité consultatif ministériel sur le saumon de l'Atlantique, qui relève du ministère des Pêches et des Océans, a entamé ses travaux afin d'examiner le déclin important des populations de saumon sauvage de l'Atlantique. Le comité s'est vu confier la tâche de formuler des recommandations à court et à long terme, ainsi que des recommandations provisoires sur les mesures en matière de gestion. Ses efforts sont axés sur les mesures de conservation et d'application de la loi, la prédation, la stratégie pour lutter contre la pêche étrangère non durable et certains domaines où faire progresser la science. Jusqu'à présent, le comité a tenu trois réunions en Nouvelle-Écosse, au Nouveau-Brunswick et à Terre-Neuve-et-Labrador, et il compte en tenir au moins une autre au Québec. Le comité a l'intention de produire un rapport final, en fonction des consultations qu'il tiendra le mois prochain. Je me réjouis de voir que les recommandations provisoires du comité ont donné des résultats. Ainsi, il a mis en œuvre une politique de capture et de remise en liberté pour la saison de pêche à la ligne de cette année dans les Maritimes; par ailleurs, les pêcheurs à la ligne sont maintenant tenus d'utiliser une mouche artificielle avec hameçon simple sans ardillon dans les rivières et ruisseaux où son usage est déjà obligatoire. Voilà autant de mesures opportunes qui constituent un premier pas dans la bonne direction, mais certaines questions continuent de me préoccuper.

La décision de n'autoriser aucune prise cette année vient à point, mais nous savons tous que c'est une solution provisoire. Plusieurs organismes, dont la Miramichi Salmon Association, souhaitent que cette politique soit levée au cours de l'année et qu'on instaure plutôt un régime de pêche semblable à celui de Terre-Neuve-et-Labrador. Cette province attribue une couleur à ses cours d'eau en fonction de l'abondance du saumon. Les pêcheurs à la ligne savent ainsi où aller pêcher.

Honorables sénateurs, la pêche au saumon de l'Atlantique ne se portera bien que si elle est très bien planifiée à long terme. Pour instaurer un système semblable à celui de Terre-Neuve-et-Labrador, il faudrait modifier la réglementation des provinces maritimes sur les pêches, et apporter des modifications législatives dont la promulgation pourrait prendre jusqu'à un an. Comme je l'ai déjà dit, le gouvernement fédéral pourrait faire preuve de leadership en fournissant des solutions à long terme.

Pour ce qui est des solutions à court terme, le gouvernement a récemment annoncé qu'il accorderait 400 000 $ à la Nouvelle-Écosse pour s'occuper des stocks de saumon en déclin. Presque tous les organismes qui ont comparu devant le comité consultatif ont déclaré qu'il faudrait accorder plus de fonds stables. Le financement stable et régulier permet de mener de meilleures recherches, d'obtenir de meilleures données scientifiques et de mieux comprendre les causes du déclin des stocks. En plus de réclamer plus de financement, les organismes de conservation et les groupes bénévoles estiment que le ministère des Pêches et des Océans n'est pas assez présent dans cette région. Il n'y a tout simplement pas assez d'employés. Selon eux, le gouvernement a laissé tomber la région au cours des dernières années.

(1550)

Bob Rutherford, ancien gestionnaire de l'habitat du ministère des Pêches, qui est à la retraite et qui fait partie des bénévoles du programme Adopter un cours d'eau, a déclaré que le MPO « n'avait pas les employés requis sur le terrain pour collaborer avec les groupes communautaires qui s'emploient à restaurer les habitats ». Bien que « les fonds aient augmenté, tout comme le travail, le personnel a disparu. »

De même, des groupes comme la Miramichi Salmon Association et la fédération de la faune de l'Île-du-Prince-Édouard ont demandé qu'un plus grand nombre de recherches soient menées et que des ressources financières supplémentaires soient affectées à ce dossier, mais ces groupes soutiennent que ces mesures doivent être accompagnées d'une plus grande présence de la part du MPO. Je le répète, un leadership fédéral est requis.

Enfin, dans le cadre de nos efforts de promotion de la conservation, il est essentiel de collaborer avec d'autres nations de l'Atlantique Nord pour favoriser le rétablissement de la pêche du saumon atlantique.

Honorables collègues, plusieurs d'entre vous ont décrit l'inaction et les excès de territoires comme le Groenland et de pays comme la France. J'ose espérer que le comité consultatif tient compte de ces considérations internationales. Je suis curieux de savoir si le mandat du comité est fondé sur des politiques déjà en vigueur mais non complètement mises en œuvre, comme la Politique pour la conservation du saumon atlantique sauvage et des lignes directrices sur la gestion des pêches qui sont acceptées à l'échelle internationale. Si nous souhaitons remédier à la surpêche, il est essentiel de déployer des efforts coordonnés plus généralisés.

Le saumon de l'Atlantique fait toujours face à énormément de difficultés. Les phoques et les bars rayés continuent de ravager nos eaux. Les maladies, les toxines et les changements climatiques représentent une menace constante tant pour notre environnement que pour notre économie. Nous sommes encore loin de collaborer avec nos homologues internationaux à la mise en œuvre de mesures de conservation. Il y a donc encore beaucoup de travail à faire.

Toutefois, nous semblons effectivement avoir commencé à faire des pas dans la bonne direction. J'ai hâte de lire le rapport du comité consultatif ministériel sur le saumon. J'espère qu'il marquera le début d'un changement et qu'il contribuera à produire un écosystème équilibré et durable dans lequel le saumon peut se développer.

J'invite tous mes collègues à prendre part à cette interpellation afin que le gouvernement et le secteur privé continuent de s'intéresser à cette question.

L'honorable Nicole Eaton : Le sénateur Cowan accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Cowan : Bien entendu.

La sénatrice Eaton : Sénateur Cowan, verriez-vous d'un bon œil que le Canada s'allie aux pays scandinaves ainsi qu'à l'Écosse et à l'Irlande, où l'on trouve de très célèbres rivières à saumons, et que nous tentions tous ensemble de convaincre la France et le Danemark de moins utiliser le filet pour pêcher le saumon de l'Atlantique? Croyez-vous qu'il pourrait y avoir une certaine concertation internationale?

Le sénateur Cowan : Absolument, sénatrice Eaton. Je crois qu'il s'agit d'une excellente idée. C'est exactement ce que nous devrions faire. Il y a des limites à ce que nous pouvons faire de notre côté, même si je crois que le gouvernement mérite des félicitations pour le travail qu'il a accompli.

Comme je le disais tout à l'heure, il est important de rallier les autres pays qui, comme ceux que vous avez nommés, sont réellement préoccupés par cette question et en comprennent vraiment les tenants et les aboutissants. Je suis convaincu que nous pourrions apprendre beaucoup de choses à leur contact, et sans doute que l'inverse serait vrai aussi.

Je crois que nous devrions nous unir pour faire pression de manière concertée et coordonnée sur les pays qui, comme le Groenland et la France, semblent faire exactement le contraire, du moins que je sache, de ce que nous croyons qu'il faudrait faire pour assurer la préservation de cette espèce extrêmement importante, d'un point de vue non seulement économique, mais aussi culturel.

Votre suggestion est la bienvenue, et j'y souscris entièrement.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous informe que, si le sénateur Maltais prend la parole maintenant, son intervention aura pour effet de mettre un terme au débat sur l'interpellation. Si d'autres sénateurs souhaitent prendre la parole, je les invite à se manifester avant que je donne la parole au sénateur Maltais.

L'honorable sénateur Maltais a la parole.

L'honorable Ghislain Maltais : Excellent discours, sénateur Cowan. Merci beaucoup.

[Français]

J'aimerais remercier les sénateurs qui ont pris part à cette interpellation, en particulier les sénateurs Eaton et Mockler. Lorsque j'ai présenté cette interpellation, le but était d'alerter la population canadienne sur la situation du saumon de l'Atlantique, qui est en voie de disparition. L'objectif était que les gouvernements, tant fédéral que provinciaux, se penchent sur la question. Grâce à vous tous, je crois que nous avons réussi.

Une semaine après l'interpellation, j'étais convoqué par la ministre Shea pour lui fournir des explications sur la situation, non pas de la part des fonctionnaires, mais de la part des utilisateurs des rivières à saumon de l'Est du Canada. Je lui ai dit qu'il était primordial que les provinces de l'Atlantique soient au cœur des décisions qu'elle prendra, qu'elle devra consulter non pas les fonctionnaires, mais les pêcheurs, ceux qui font la gestion des rivières, et les propriétaires de clubs de pêche au saumon, et qu'il faudra les écouter, après quoi elle pourra prendre des décisions. J'ai précisé qu'elle devra tenir compte de la recherche, et qu'elle devra travailler avec ces gens et avec les universités.

C'est ce qu'elle a fait, et je l'en remercie infiniment. D'ailleurs, mercredi prochain, le 13 mai, aura lieu la dernière réunion des comités à Québec. Elle se tiendra à l'Université Laval. J'accompagnerai alors la ministre, les utilisateurs et les gestionnaires de rivière, afin que l'on fasse bien le tour de la situation dans les provinces de l'Atlantique.

Ce qu'a souligné l'honorable sénateur Cowan est très important. Lors de la conférence de l'Arctique, en septembre dernier, j'étais à Whitehorse. J'en ai profité pour rencontrer les gens des pays de l'Arctique, soit l'Islande, le Groenland, la Norvège et la Suède. À mon retour, j'ai appelé le ministre des Pêches de l'Écosse pour connaître la situation de ce pays. Malheureusement, je me suis rendu compte que l'Écosse était dans la même situation que nous. Les stocks de saumon sont en baisse dans tous les océans, tant dans la mer Baltique, dans l'océan Arctique que dans l'Atlantique du côté de l'Écosse. J'ai rencontré des parlementaires de ces pays et j'ai constaté qu'ils ont fait certaines choses, eux aussi.

Il est évident qu'on ne rebâtira pas d'un coup toutes les montaisons de saumon dans nos rivières, tant au Québec qu'ailleurs dans le monde. Toutefois, nous pouvons être fiers du travail que nous avons accompli au Sénat, car, si nous n'avions pas pris la cause en main, elle serait peut-être encore passée sous silence. À peine quelques semaines après les discours de certains sénateurs, Radio-Canada, La Presse et les journaux de l'Atlantique ont commencé à s'intéresser à la disparition du saumon de l'Atlantique. Or, ce travail a été fait ici, au Sénat, avec la collaboration des deux côtés de la Chambre.

Je retiens de tout cela que les gestionnaires, les pêcheurs et les scientifiques doivent continuer de travailler conjointement, main dans la main. Vous avez parlé du financement accordé dans presque toutes les provinces de l'Atlantique, y compris au Québec. Or, ce financement doit être récurrent, année après année. On ne doit pas se pencher sur une situation et, le lendemain, la laisser tomber. On doit poursuivre nos efforts.

La pêche sportive n'est pas l'unique cause de la disparition du saumon de l'Atlantique. Bien sûr, les phoques en sont l'une des causes, mais il en existe d'autres, comme certains facteurs écologiques qu'on ne connaît peut-être pas assez. Il faut cerner ces facteurs et trouver des solutions. Pour ce faire, le travail doit continuer.

Honorables sénateurs, je crois que nous avons accompli notre travail. J'invite, cette année, comme l'ont dit les sénateurs Cowan, Eaton et Mockler, tous les pêcheurs à accepter la nouvelle réglementation. Les saumoniers savent que les boîtes de mouches sont chose du passé, et ils n'ont qu'à s'en défaire. Il faudra désormais utiliser de l'équipement qui ne fera pas de tort aux saumons. Je crois que les pêcheurs sportifs accepteront facilement cette nouvelle façon de faire. Les gestionnaires de rivières à saumon auront ainsi une meilleure chance d'accomplir leurs tâches.

Comme les sénateurs Mockler et Cowan l'ont souligné, les rivières à saumon représentent une industrie de 300 millions de dollars dans l'Est du Canada. Ce montant profite aux petites municipalités qui, souvent, n'ont que cette pêche sportive pour assurer leur survie.

(1600)

À titre de parlementaires, nous avons fait notre devoir, et je suis fier de chacun et de chacune d'entre vous qui ont contribué et qui continueront de soutenir cette cause pour que, dans 100 ans encore, on parle du saumon de l'Atlantique. Je vous remercie.

[Traduction]

Son Honneur le Président : Par conséquent, honorables sénateurs, le débat sur cette interpellation est considéré clos.

(Le débat est terminé.)

Visiteur de marque à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de notre ancien collègue, l'honorable Rod A. A. Zimmer.

Je lui souhaite la bienvenue au nom de tous les honorables sénateurs.

Des voix : Bravo!

L'armistice de Moudania

Interpellation—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénatrice Cools, attirant l'attention du Sénat, en cette année qui marque le centenaire du début des hostilités de la Grande Guerre de 1914-1918, sur le 11 novembre, connu de tous sous le nom de Jour du Souvenir, journée de deuil national et collectif, journée de commémoration et d'hommage à tous ceux qui ont combattu et sont tombés au service de Dieu, du roi et de leur pays et dont nous saluons l'ultime sacrifice par des actes à la fois individuels et collectifs de prière et de commémoration à l'occasion desquels nous nous arrêtons un instant et penchons la tête dans un recueillement sacré à la onzième heure du onzième jour du onzième mois en l'honneur de tous ceux qui ont tant donné d'eux-mêmes; et :

Sur deux soldats et êtres humains exceptionnels, qui se sont combattus dans la Grande Guerre, deux généraux distingués et militaires accomplis, à savoir le général Charles Harington, commandant en chef britannique de l'occupation alliée à Constantinople, et le général Mustafa Kemal, commandant des forces turques dans leur intrépide résistance au traité de Sèvres qui démembrait leurs terres en vue de les donner à certains des alliés qui les convoitaient; sur leurs troupes rassemblées, prêtes au combat et attendant les ordres pour lancer les hostilités à Chanak, sur les Dardanelles, en octobre 1922, et sur le destin qui les a fait se rencontrer là; sur leur détermination à éviter un bain de sang inutile, leur remarquable contribution à la paix turco-britannique et mondiale et leur volonté d'épargner à leurs soldats la mort dans une folle aventure en négociant et en signant, dans l'honneur et la justice pour tous, l'armistice de Moudania le 11 octobre 1922; et sur, Andrew Bonar Law, qui est né au Canada, qui est devenu premier ministre britannique de Grande-Bretagne le 23 octobre 1922, qui a servi pendant sept mois et est décédé le 30 octobre 1923, et sur son engagement ferme en faveur de la paix turco-britannique dans ce que les Britanniques, les Dominions et les Canadiens ont appelé l'affaire de Chanak.

L'honorable Don Meredith : Honorables sénateurs, je suis toujours en train de préparer mon intervention dans le cadre de cette interpellation de la sénatrice Cools, et j'aimerais demander que le débat soit ajourné à mon nom pour le temps de parole qu'il me reste.

(Sur la motion du sénateur Meredith, le débat est ajourné.)

La crise de Chanak

Interpellation—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénatrice Cools, attirant l'attention du Sénat, en cette année qui marque le centenaire du début des hostilités de la Grande Guerre de 1914-1918, sur le 11 novembre, connu de tous sous le nom de Jour du Souvenir, journée de deuil national et collectif, journée de commémoration et d'hommage à tous ceux qui ont combattu et sont tombés au service de Dieu, du roi et de leur pays et dont nous saluons l'ultime sacrifice par des actes à la fois individuels et collectifs de prière et de commémoration à l'occasion desquels nous nous arrêtons un instant et penchons la tête dans un recueillement sacré à la onzième heure du onzième jour du onzième mois en l'honneur de tous ceux qui ont tant donné d'eux-mêmes; et :

Sur les événements survenus en 1922, à peine quatre ans après la Grande Guerre, et connus sous le nom d'affaire de Chanak, à l'occasion de laquelle le Canada a défendu fermement contre la Grande-Bretagne son autonomie constitutionnelle en matière d'affaires étrangères, de guerre et de paix; sur le refus du premier ministre libéral Mackenzie King d'envoyer des troupes à Chanak, aujourd'hui Çanakkale, petit port turc des Dardanelles, comme le lui demandaient instamment le premier ministre britannique David Lloyd George et son secrétaire aux colonies Winston Churchill; sur le rejet total de cette guerre par les Canadiens et les Britanniques fatigués de la guerre et pleurant toujours leurs fils morts au combat; sur cette menace de guerre inexorablement issue du traité de Sèvres, création injuste, inapplicable et mort-née du premier ministre Lloyd George, traité injuste et humiliant qui chassait les peuples turcs de leurs terres ancestrales de Thrace orientale et d'Anatolie et auquel ils se sont opposés avec succès; sur le rôle du Canada dans l'arrangement qui a permis à l'occasion de l'affaire de Chanak d'éviter une guerre inutile et honnie; sur le jeu politique britannique où un seul vote du caucus conservateur a obligé le premier ministre Lloyd George et son gouvernement de coalition libérale à démissionner; et sur l'ascendant du premier ministre britannique né au Canada Bonar Law, qui a perdu deux fils dans la Grande Guerre et qui était alors l'homme le plus respecté en Grande-Bretagne, et sur sa politique de paix au Proche-Orient.

L'honorable Don Meredith : Honorables sénateurs, je prépare encore mon intervention, et j'aimerais ajourner le débat à mon nom pour le temps de parole qu'il me reste.

(Sur la motion du sénateur Meredith, le débat est ajourné.)

(La séance est levée, et le Sénat s'ajourne au mardi 12 mai 2015, à 14 heures.)

© Sénat du Canada

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