Débats du Sénat (Hansard)
1re Session, 42e Législature,
Volume 150, Numéro 28
Le mardi 19 avril 2016
L'honorable George J. Furey, Président
- DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
- AFFAIRES COURANTES
- Le Code criminel
- L'Assemblée parlementaire de la Francophonie
- La session de l'Assemblée régionale Amérique, tenue du 27 au 31 juillet 2015—Dépôt du rapport
- La réunion du Bureau, tenue du 28 au 30 janvier 2016—Dépôt du rapport
- La réunion du Comité directeur et la réunion intersessionnelle du Réseau des femmes parlementaires, tenues du 24 au 26 février 2016—Dépôt du rapport
- Langues officielles
- PÉRIODE DES QUESTIONS
- ORDRE DU JOUR
- Recours au Règlement
- Le Sénat
- Le discours du Trône
- Pêches et océans
- Projet de loi renforçant la sécurité des Canadiens et promouvant la chasse et le tir sportif
- Projet de loi canadienne sur le paiement sans délai
- Régie interne, budgets et administration
- Affaires étrangères et commerce international
- Budget et autorisation de se déplacer—L'étude sur le potentiel de renforcement de la coopération avec le Mexique depuis le dépôt du rapport du comité intitulé Voisins nord-américains : maximiser les occasions et renforcer la coopération pour accroître la prospérité—Adoption du troisième rapport du comité
- Budget et autorisation d'embaucher du personnel et de se déplacer—L'étude sur les faits nouveaux en matière de politique et d'économie en Argentine dans le cadre de leur répercussion possible sur les dynamiques régionale et globale—Adoption du quatrième rapport du comité
- Les travaux du Sénat
- Transports et communications
LE SÉNAT
Le mardi 19 avril 2016
La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.
Prière.
[Traduction]
DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
L'honorable Gérard La Forest, C.C.
Félicitations à l'occasion de son quatre-vingt-dixième anniversaire
L'honorable Jim Munson : Honorables sénateurs, au début du mois, Gérard La Forest, ancien juge de la Cour suprême du Canada, a célébré son 90e anniversaire de naissance chez lui, à Fredericton. Cela fait plusieurs années que j'entends parler de cet homme qui m'inspire du respect pour la marque qu'il a laissée sur la législation canadienne, sur nos vies et sur notre pays, et aussi pour son authenticité et sa perspicacité, des traits que je découvre en écoutant les histoires que me raconte sa fille, qui fait partie de mon équipe à Ottawa.
Comme M. La Forest et moi venons du Nouveau-Brunswick, j'ai une petite idée de l'enfance qu'il a dû avoir. Né en 1926 à Grand Falls, benjamin d'une famille de 12 enfants, il a grandi à une époque où les familles et les collectivités entières étaient aux prises avec des défis économiques de taille. Bon élève curieux et avide de lecture, il se distinguait de ses frères et sœurs. Il rit avec nostalgie en se rappelant la patience avec laquelle son père en vint à accepter que son plus jeune n'était pas destiné à la rude vie agricole.
La carrière de M. La Forest est marquée de remarquables réalisations. Il attribue à la chance la plupart des grands points tournants dans sa vie, autant personnels que professionnels, dont la suite d'événements qui lui tient le plus à cœur : sa rencontre et son mariage avec Marie Warner, de Saint John.
En 1997, dans l'affaire Eldridge c. Colombie-Britannique (Procureur général), M. La Forest évoque le quotidien des personnes handicapées au Canada pour justifier sa décision de donner gain de cause à la partie appelante, un groupe de personnes sourdes de naissance. Il a écrit ceci :
[...] les personnes handicapées n'ont généralement pas obtenu [traduction] « l'égalité de respect, de déférence et de considération » que commande le par. 15(1) de la Charte. Au lieu de cela, elles ont fait l'objet d'attitudes paternalistes inspirées par la pitié et la charité, et leur intégration à l'ensemble de la société a été assujettie à leur émulation des normes applicables aux personnes physiquement aptes [...]
Cette description de la marginalisation et de l'exclusion sociales est aussi représentative aujourd'hui qu'elle l'était il y a 20 ans. Ses propos expriment le point de vue auquel je souscris lorsque je défends les intérêts des autistes ou des personnes ayant des déficiences intellectuelles.
Aujourd'hui, c'est avec plaisir que j'offre mes meilleurs vœux à M. La Forest. Je crois comprendre qu'il a célébré son anniversaire en compagnie de ses cinq filles, de leur famille et de leurs bons amis de tous âges; c'était un vibrant rassemblement sous le signe de la joie et de l'amour. Nous lui souhaitons beaucoup de bonheur.
Visiteurs à la tribune
Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de M. Brendan Paddick, un entrepreneur et un philanthrope bien connu de Terre-Neuve-et-Labrador. M. Paddick est consul général aux Bahamas. Il est accompagné de son épouse, Renée.
Au nom de tous les honorables sénateurs, nous vous souhaitons la bienvenue au Sénat du Canada.
Des voix : Bravo!
Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune d'une délégation de pompiers de Burnaby, de Vancouver et du district de Vancouver-Nord. Ils sont les invités de l'honorable sénatrice Martin.
Au nom de tous les honorables sénateurs, nous vous souhaitons la bienvenue au Sénat du Canada.
Des voix : Bravo!
Les pompiers
L'honorable Yonah Martin (leader adjointe de l'opposition) : Honorables sénateurs, j'interviens aujourd'hui pour remercier les pompiers canadiens du travail incroyable et courageux qu'ils accomplissent. Ce sont des premiers répondants qui risquent chaque jour leur vie pour aider, sauver et protéger des Canadiens.
En écoutant les nouvelles ce matin, je me suis rappelé le dur travail que doivent accomplir les pompiers en raison des récents incendies en Colombie-Britannique. En raison des températures printanières plus chaudes qu'à l'habitude que nous avons eues, la saison des feux de forêt a déjà débuté en Colombie-Britannique. Hier, le district régional de la rivière de la Paix, dans le nord de la province, a déclaré l'état d'urgence. Il a rapporté 48 incendies dans la région. Les services de lutte contre les feux de forêt de la Colombie-Britannique ont également rapporté des incendies à Dawson Creek et près de Burns Lake. Nos pensées accompagnent les résidants de ces collectivités, les citoyens qui ont dû être évacués et les pompiers qui travaillent sans relâche à éteindre ces incendies.
Les feux de forêt sont courants en Colombie-Britannique et les pompiers sont sur la ligne de front pour limiter les dégâts dans les localités et, au bout du compte, pour éteindre les feux. Au cours des dernières années, lors de mes rencontres avec les pompiers de la Colombie-Britannique à l'occasion de leurs visites annuelles sur la Colline du Parlement, j'ai appris que la Commission canadienne des codes du bâtiment et de prévention des incendies en 2005 avait modifié le code et que les dispositions sur la sécurité des pompiers avaient été supprimées par inadvertance dans la révision du code cette année-là. Le code est révisé tous les cinq ans et les révisions subséquentes de 2010 et de 2015 n'ont pas rétabli les dispositions sur la sécurité des pompiers non plus.
En 2010, lorsque les pompiers ont participé au processus de modification du code pour y réintégrer les dispositions relatives à la sécurité des pompiers, le changement a été refusé par la CCCBPI, qui a fait valoir que les pompiers étaient déjà protégés par la disposition portant sur les occupants de l'immeuble.
Honorables sénateurs, les pompiers ne sont pas des « occupants de l'immeuble ». C'est plutôt le contraire : les occupants de l'immeuble s'enfuient lorsqu'il brûle et s'effondre, alors que les pompiers entrent dans l'immeuble et mettent leur vie en danger pour trouver des occupants qui y sont coincés et qui, sans leur aide, mourraient sûrement. La plupart du temps, les occupants sauvés par les pompiers sont les plus vulnérables : les aînés, les personnes handicapées, les enfants et toute autre personne coincée qui n'arrive pas à sortir de l'immeuble.
Les pompiers ne sont pas des « occupants de l'immeuble ». Il faut une clause distincte pour refléter leur rôle. Le manque de considération à l'égard de leur sécurité dans le code a donné lieu à la construction de nouvelles maisons qui brûlent plus rapidement que les anciennes structures. Par exemple, la composition des nouveaux matériaux légers fait en sorte que les maisons brûlent plus rapidement et dégagent plus de chaleur qu'avant en brûlant, ce qui entraîne l'effondrement des planchers dans les 10 minutes suivant le début de l'incendie.
Dans ces cas-là, les dispositions du code relatives à la sécurité des occupants ne donnent pas suffisamment de temps aux pompiers pour faire leur travail de façon sécuritaire. C'est pourquoi les dispositions relatives à la sécurité des pompiers sont si importantes. Elles donneraient aux pompiers plus de temps pour entrer dans les immeubles et sauver les occupants qui ne peuvent pas sortir seuls.
Honorables sénateurs, joignez-vous à moi pour défendre les pompiers avec vigueur et demander au présent gouvernement de veiller à ce que la sécurité des pompiers soit expressément mentionnée dans le code. Nos pompiers courageux et altruistes et leur famille méritent notre soutien et notre gratitude pour leur dévouement et le service qu'ils rendent à tous les Canadiens.
La Journée mondiale de la propriété intellectuelle
L'honorable Joseph A. Day : Honorables sénateurs, la Journée mondiale de la propriété intellectuelle, décrétée par l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, qui relève des Nations Unies, est prévue dans une semaine, le 26 avril. Comme le savent les sénateurs, la propriété intellectuelle désigne le droit de propriété des créateurs reconnu par la loi.
Pour souligner cette journée, vous êtes invités à la réception parlementaire annuelle tenue par l'Institut de la propriété intellectuelle du Canada ce soir, entre 17 et 19 heures à la salle 256S de l'Édifice du Centre. Cette activité met en vedette quatre projets primés d'écoles secondaires locales. Les années précédentes, les participants avaient été ébahis par le degré de créativité et le dynamisme de jeunes Canadiens remarquablement doués qui avaient présenté un large éventail d'expériences et de propositions novatrices. Nous pouvons demeurer très fiers de ces étudiants. De toute évidence, ce sont les innovateurs de demain.
(1410)
Il n'y a certainement rien de plus important ni de plus opportun pour le développement de l'innovation chez nous que le leadership et le soutien constants offerts par l'Institut de la propriété intellectuelle du Canada et ses praticiens. Cet institut apporte l'équilibre et la coordination aux éléments en tout temps essentiels de l'innovation, c'est-à-dire les brevets, les marques de commerce, le dessin industriel et les droits d'auteur.
Sur l'ensemble de notre territoire national, les praticiens canadiens de la propriété intellectuelle sont à l'avant-garde du renouvellement de la productivité chez nous. Leur dévouement à la cause de la promotion de l'excellence et du progrès technique, dans nos efforts inlassables pour jouer dans la cour des grands au niveau international, pour une large gamme de défis en matière d'innovation, en dit long sur la bonne santé et l'exigence des normes du cadre réglementaire canadien de la propriété intellectuelle.
L'Institut de la propriété intellectuelle du Canada est en première ligne pour assurer une bonne gestion réglementaire au Canada, mais, en même temps, il s'occupe d'enjeux importants, ce qui renforce la confiance des praticiens et des responsables gouvernementaux de la réglementation. Il est l'un de nos héros obscurs que nous tenons trop souvent pour acquis.
Dans le nouveau budget fédéral présenté il y a quelques semaines, les fonds pour l'innovation occupent une belle place. On remarque l'engagement à long terme à dépenser 800 millions de dollars sur quatre ans, à compter de l'an prochain, dans les régions où il existe des partenariats entre l'industrie et les universités. Celles-ci recevront 2 milliards de dollars sur trois ans pour payer 50 p. 100 des projets d'infrastructure majeurs. Un autre montant de 95 millions de dollars sera accordé aux conseils subventionnaires en recherche. En outre, le gouvernement s'est engagé à élaborer un vaste cadre fondé sur les résultats pour les accélérateurs et les incubateurs d'entreprise partout au Canada.
Honorables sénateurs, j'espère que vous pourrez passer à la salle 256-S entre 17 et 19 heures pour adresser vos meilleurs vœux à ces jeunes innovateurs de demain et les féliciter du travail qu'ils ont réalisé.
Les sénateurs indépendants
L'honorable Leo Housakos : Honorables sénateurs, comme j'ai été Président du Sénat, je comprends beaucoup mieux que d'autres la nécessité de préserver l'égalité entre les sénateurs, sans égard à leur allégeance politique ou à leur absence d'allégeance, et j'y suis beaucoup plus sensible. Mon bilan comme Président, tant au Sénat qu'à l'extérieur, est assez éloquent. Mes décisions n'ont pas été dictées par l'appartenance du sénateur en cause à un caucus ou un autre, et ma porte, dans le couloir du Président, était ouverte à tous.
Je me suis conduit de cette manière parce que je suis profondément convaincu que tous les sénateurs ont été appelés à faire partie de notre institution grâce à leurs mérites. De plus, tous les sénateurs ont un rôle à jouer et ils ont beaucoup à apporter au travail que nous accomplissons au Sénat.
Il est vrai que nous nous trouvons à naviguer dans des eaux troubles, puisque nous sommes contraints de nous plier au programme du parti ministériel à l'autre endroit, mais qu'on ne dise pas que nous ne sommes pas disposés à nous adapter, à encourager et à soutenir nos nouveaux collègues pour qu'ils soient des membres à part entière qui contribuent au travail de notre institution.
Au cours de la législature, nous avons déjà pris des mesures inédites pour faire en sorte que les sénateurs indépendants aient leur place dans tous nos travaux, aussi bien au Sénat qu'au sein des comités.
Aucun nouveau sénateur n'avait encore été nommé lorsque le Comité de sélection a été mis sur pied pour la nouvelle législature, mais ce comité était conscient de la nouvelle réalité qui se dessinait. Des places dans les comités ont été ouvertes à des sénateurs indépendants qui étaient déjà là, et ces postes ont été confiés par exemple au sénateur Demers, à la sénatrice Cools et à la sénatrice McCoy. En fait, non seulement la sénatrice McCoy siège au Comité de la modernisation, mais elle est aussi le troisième membre du comité directeur.
Des sénateurs indépendants ont été invités à siéger à divers sous- comités. Il est regrettable que certains d'entre eux aient plusieurs fois repoussé ces invitations.
Nous allons maintenant encore plus loin, comme nous l'avons appris hier grâce à un communiqué conjoint des leaders de l'opposition et du caucus libéral, les sénateurs Cowan et Carignan. Les consultations en cours ont amené les deux caucus à accepter tous deux de céder une place dans chaque comité, peu importe sa taille, pour qu'elles puissent être cédées à des sénateurs indépendants. Cela comprend le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, que je préside. Il s'agit d'un comité transparent qui répond de toutes ses décisions, toutes consignées dans les comptes publics.
Toutefois, si cela ne suffit pas, tous les sénateurs, qu'ils adhèrent à un parti ou non, ont toujours été les bienvenus pour participer à nos séances, et la sénatrice indépendante Elaine McCoy le fait régulièrement. Il ne faut pas oublier de dire que le sénateur Larry Campbell, nouvellement indépendant, est déjà membre à part entière du CIBA. Il nous tarde d'ajouter d'autres sénateurs, lorsque le Comité de sélection se réunira de nouveau.
Le gala de la Journée internationale en rose
L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, le 13 avril 2016, c'est avec fierté que j'ai pris la parole au gala de la Journée internationale en rose. Cette manifestation souligne les efforts déployés par les jeunes, les collectivités et les entreprises dans la lutte contre l'homophobie, la transphobie et l'intimidation dans notre milieu. J'étais fière de porter du rose, comme l'ont fait 10,2 millions de Canadiens dans l'ensemble du territoire canadien.
Le thème de cette année était le dialogue. L'organisation qui est derrière cette Journée en rose, le Centre canadien de la diversité des genres et de la sexualité, a organisé plus de 30 dialogues avec des jeunes et des maires dans des municipalités des quatre coins de notre pays.
Vous n'ignorez pas que l'intimidation, la haine et l'oppression sont toujours des problèmes majeurs dans les écoles, les collectivités et les milieux de travail.
Pour souligner cette journée, le centre a organisé un gala réunissant plus de 600 personnes dans la capitale nationale. J'ai été honorée d'être parmi ceux qui ont présenté des prix dont le but était de reconnaître le travail accompli dans notre collectivité par des militants locaux, nationaux et internationaux.
Je voudrais saluer plus spécialement Kim Katrin Milan pour son travail sur les problèmes des allosexuels et transsexuels dans les collectivités noires et chez les gens de couleur. Je voudrais aussi attirer l'attention sur nos lauréates américaines, Nance Lomax et Suzanne Poli, qui ont résisté, lors des émeutes de Stonewall, à New York, en 1969.
Les personnes suivantes ont participé à l'événement la sénatrice Nancy Ruth, le ministre Ralph Goodale et les députés Randy Boissonnault, Pam Goldsmith-Jones, Kamal Khera, Bernadette Jordan et Randall Garrison, ainsi que les ambassadeurs de l'Australie, du Costa Rica, de l'Inde, de l'Allemagne, de l'Espagne, des Pays-Bas et des États-Unis.
Je voudrais faire aussi une observation spéciale : cette campagne et ce programme ont été entièrement organisés par des jeunes. Je souligne en particulier le travail d'Emily Fergusson dans la création et l'organisation de la Journée internationale en rose cette année, et son travail sur l'ensemble du territoire national.
Comme nous le savons tous, il y a des personnalités spéciales qui, année après année, nous sensibilisent aux problèmes d'homophobie et de transphobie. Jeremy Dias a travaillé inlassablement, surtout pour les jeunes. Je salue tout le travail accompli par Jeremy pour que tous les jeunes puissent se faire entendre.
Honorables sénateurs, l'homophobie et la transphobie ne sont pas des problèmes qu'on peut régler à coup de mesures législatives. En vérité, pour apporter un changement durable, il faut toucher le cœur et l'esprit des Canadiens. Il faut favoriser le dialogue, offrir de la formation et prendre un engagement de tous les instants. Ce travail n'est pas une destination; il exige plutôt un engagement constant à nous encourager nous-mêmes, ainsi que les personnes de notre entourage, à améliorer nos comportements et nos actes. Chacun doit entrer en soi-même et se demander : « Comment puis-je aider quelqu'un aujourd'hui? »
La prévention de l'intimidation ne se résume pas en objectifs à atteindre, mais ressemble davantage à un geste que l'on doit faire chaque jour, comme le recyclage. Pour que chacun de nos concitoyens se sentent respectés, aimés et en sécurité, quel que soit l'endroit du Canada où ils vivent, nous devons continuellement sensibiliser notre prochain et miser sur l'attention, l'apprentissage et la détermination.
[Français]
En tant que sénateurs et sénatrices, nous avons la responsabilité de promouvoir la diversité et le respect au sein de nos communautés. Pour moi, il s'agit d'écouter chacun et chacune, et tout spécialement les jeunes qui ont besoin de notre soutien. En ces temps difficiles, nos jeunes sont certainement à risque et ils ont besoin de notre attention.
[Traduction]
J'invite donc tous les honorables sénateurs à se joindre à la conversation en organisant un dialogue Journée en rose en avril 2017.
AFFAIRES COURANTES
Le Code criminel
Projet de loi modificatif—Préavis de motion tendant à autoriser le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles à en étudier la teneur
L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :
Que, conformément à l'article 10-11(1) du Règlement, le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit autorisé à étudier la teneur du projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d'autres lois (aide médicale à mourir), déposé à la Chambre des communes le 14 avril 2016, avant que ce projet de loi soit soumis au Sénat;
Que, nonobstant toute disposition du Règlement ou pratique habituelle, le comité soit autorisé à se réunir aux fins de cette étude à tout moment que le Sénat siège ou est ajourné;
Que les documents reçus et les témoignages entendus par le Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir, au cours de son étude et de son examen du cadre législatif pour l'aide médicale à mourir, soient renvoyés au comité aux fins de son étude de la teneur du projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d'autres lois (aide médicale à mourir);
Que, nonobstant les pratiques habituelles, le comité soit autorisé à déposer auprès du greffier du Sénat son rapport sur cette étude si le Sénat ne siège pas, et que ledit rapport soit réputé avoir été déposé au Sénat.
(1420)
[Français]
L'Assemblée parlementaire de la Francophonie
La session de l'Assemblée régionale Amérique, tenue du 27 au 31 juillet 2015—Dépôt du rapport
L'honorable Paul E. McIntyre : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation parlementaire canadienne de la section canadienne de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) concernant sa participation à la XXXIe Session de l'Assemblée régionale Amérique de l'APF, tenue à Lafayette et à Lake Charles, aux États- Unis, du 27 au 31 juillet 2015.
La réunion du Bureau, tenue du 28 au 30 janvier 2016—Dépôt du rapport
L'honorable Paul E. McIntyre : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation parlementaire canadienne de la section canadienne de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF), concernant sa participation à la réunion du Bureau de l'APF, tenue à Siem Reap, au Cambodge, du 28 au 30 janvier 2016.
La réunion du Comité directeur et la réunion intersessionnelle du Réseau des femmes parlementaires, tenues du 24 au 26 février 2016—Dépôt du rapport
L'honorable Paul E. McIntyre : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation parlementaire canadienne de la section canadienne de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) concernant sa participation à la réunion du Comité directeur et à la réunion intersessionnelle du Réseau des femmes parlementaires de l'APF, tenues à Tanger, au Maroc, du 24 au 26 février 2016.
Langues officielles
Préavis de motion tendant à autoriser le comité à étudier les défis liés à l'accès aux écoles françaises et aux programmes d'immersion française de la Colombie-Britannique et à être saisi des documents reçus et des témoignages entendus par le comité dans le cadre de son étude des meilleures pratiques en matière de politique linguistique et d'apprentissage d'une langue seconde dans un contexte de dualité ou de pluralité linguistique au cours de la deuxième session de la quarante et unième législature
L'honorable Claudette Tardif : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :
Que le Comité sénatorial permanent des langues officielles soit autorisé à examiner, pour en faire rapport, les défis liés à l'accès aux écoles françaises et aux programmes d'immersion française de la Colombie-Britannique;
Que les documents reçus, les témoignages entendus et les travaux accomplis par le comité sur son étude des meilleures pratiques en matière de politique linguistique et d'apprentissage d'une langue seconde dans un contexte de dualité ou de pluralité linguistique au cours de la deuxième session de la quarante et unième législature soient renvoyés au comité; et
Que le comité soumette son rapport final au Sénat au plus tard le 15 décembre 2016, et qu'il conserve tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions dans les 180 jours suivant le dépôt du rapport final.
PÉRIODE DES QUESTIONS
La coopération internationale
L'Accord de libre-échange entre le Canada et le Panama
L'honorable Claude Carignan (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Au cours du mois d'avril, soit du 14 au 16 avril, les ministres des Finances des pays du G20 se sont réunis pour discuter de la possibilité de dresser une liste noire des pays qui favorisent l'évasion fiscale. Selon les rapports qui nous ont été transmis, la France, l'Allemagne, le Royaume-Uni, l'Italie et l'Espagne seraient disposés à dresser une liste noire des pays qui favorisent l'évasion fiscale. Toutefois, le Canada manifeste une réticence à cet égard.
Ma question est la suivante : pourquoi le Canada refuse-t-il de participer à la création d'une liste noire des pays qui favorisent l'évasion fiscale, comme le Panama?
[Traduction]
L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de la question. J'en prends note et j'y répondrai en déposant une réponse différée.
[Français]
Le sénateur Carignan : Monsieur le leader, j'aimerais préciser que, selon le communiqué de presse commun qu'ont diffusé les ministres des Finances, les grands argentiers ont confié à l'OCDE le soin de nommer, d'ici le mois de juillet, les États et les territoires qui refusent de collaborer. De plus, des mesures contraignantes seront envisagées par les membres du G20. Monsieur le leader du gouvernement, quelles sont les mesures contraignantes que le ministre des Finances et le gouvernement du Canada comptent prendre contre les pays qui favorisent l'évasion fiscale?
[Traduction]
Le sénateur Harder : Encore une fois, je prends note de la question et je répondrai de la manière appropriée.
[Français]
Le sénateur Carignan : Comme vous le savez, le Canada a conclu une entente de libre-échange avec le Panama, un pays qui favorise l'évasion fiscale. Dans le cadre des mesures contraignantes qui pourraient être prises, le Canada envisagerait-il, par exemple, de mettre fin à cette entente de libre-échange ou aux conditions qui favorisent les échanges commerciaux avec le Panama?
[Traduction]
Le sénateur Harder : Encore une fois, je remercie le sénateur de cette importante question et j'y répondrai par écrit.
La sécurité publique
Les pompiers
L'honorable Yonah Martin (leader adjointe de l'opposition) : J'ai une question à poser au leader du gouvernement au Sénat.
Monsieur le leader, les pompiers qui sont avec nous aujourd'hui, leurs collègues de la Colombie-Britannique et les pompiers de partout au Canada méritent de savoir que leur sécurité est primordiale. Cela fait plus de 15 ans que le terme « sécurité des pompiers » a été retiré par inadvertance du Code national du bâtiment et du Code national de prévention des incendies du Canada. La question de la sécurité des pompiers doit être abordée séparément et très précisément, plutôt que simplement sur le plan de la sécurité des occupants. Les pompiers vont à la rencontre de situations très dangereuses, contrairement aux gens ordinaires ou aux occupants d'un bâtiment.
Monsieur le leader, quand et comment le gouvernement corrigera- t-il cette omission dans le Code national du bâtiment et le Code national de prévention des incendies du Canada? Que fera le gouvernement d'ici 2020, année de publication du prochain code révisé, pour s'assurer que le terme « sécurité des pompiers » sera réinséré dans le code?
L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Encore une fois, je remercie l'honorable sénatrice de sa question et des mentions faites par les sénateurs à l'endroit de nos invités. Je vais me pencher sur la question et y répondre en conséquence.
La sénatrice Martin : Pourriez-vous aussi obtenir une réponse en ce qui concerne le processus de consultation et voir à ce que les pompiers soient dûment consultés pour que cet oubli ne se produise plus jamais? Cela se produit depuis plus de 15 ans. Les révisions se font aux cinq ans. Il ne faut pas que les pompiers et leur famille aient à attendre encore cinq ans avant que la question de la sécurité des pompiers, qui a été supprimée par inadvertance des codes, en fasse de nouveau partie. Les pompiers attendent depuis très longtemps, monsieur le leader, et je me demande s'ils devront encore attendre encore aussi longtemps avant que la situation soit corrigée.
Le sénateur Harder : Je vais me renseigner et répondre à votre question.
Le Sénat
Le rôle du représentant du gouvernement
L'honorable Donald Neil Plett : Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. J'espère qu'il pourra me répondre aujourd'hui.
Monsieur le leader, vous avez pris la parole à plusieurs reprises au Sénat et vous êtes toujours dit représentant du gouvernement au Sénat. Vous avez aussi fait valoir votre indépendance et le fait que vous ne faites partie d'aucun groupe parlementaire. Or, la semaine dernière, au Comité permanent de de la régie interne, des budgets et de l'administration, vous avez demandé que le Sénat vous accorde un budget semblable à celui de l'ancien leader du gouvernement au Sénat, qui était à la tête d'un groupe d'environ 50 sénateurs.
(1430)
On m'a aussi informé que vous aviez communiqué avec le service des locaux du Sénat pour vous renseigner sur les espaces de bureau et savoir si vous aviez droit à des locaux aussi importants que l'ancien leader du gouvernement.
Monsieur le leader, étant donné que vous n'avez aucun programme politique, aucun caucus à gérer, pourriez-vous expliquer au Sénat pourquoi vous auriez besoin du même espace de bureaux et aussi du même budget que quelqu'un qui avait un caucus de 50 membres?
L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l'honorable sénateur de sa question. J'ai comparu devant le Comité permanent de la régie interne, des budgets de l'administration pour parler du budget, et, comme l'ai dit au comité, expliquer que le rôle du représentant du gouvernement au Sénat, souvent appelé leader du gouvernement au Sénat, comporte de nombreux éléments. Il ne dépend pas particulièrement d'un caucus ni de la taille de ce caucus pour jouer son rôle. Ce rôle est étroitement lié à l'étude des projets de loi au Sénat, et il s'agit de veiller à ce que le point de vue des ministres et la relation entre le gouvernement et ses projets de loi soient bien reflétés dans les travaux du Sénat, et à ce que le travail du Sénat soit pris en compte au centre du gouvernement, au Cabinet.
Tout comme mon prédécesseur, je suis membre du Conseil privé, même si je ne siège pas au Cabinet, et je participe selon ce qui convient aux considérations du Cabinet qui concernent mon travail. Le travail constant de communication et le travail législatif, dans mes fonctions, sont ceux pour lesquels je demande le niveau de soutien dont bénéficiait mon prédécesseur.
Le sénateur Plett : Merci de cette réponse, monsieur le leader, qui diffère des autres réponses entendues jusqu'à maintenant.
De plus, je voudrais que vous disiez au Sénat, si vous le pouvez... Je sais que le premier ministre vous a envoyé une lettre vous disant que vous êtes en fait le leader du gouvernement, mais que vous devriez vous désigner comme représentant du gouvernement.
Pourriez-vous expliquer au Sénat... J'estime en effet que bien des choses que vous avez demandées, à titre de leader du gouvernement, seraient peut-être justifiées, si seulement vous aviez un caucus. Cependant, vous n'en avez pas. Vous êtes un caucus d'une personne. Vous n'avez donc pas les mêmes responsabilités qu'un leader du gouvernement.
Encore une fois, quelle est la différence entre un leader du gouvernement et un représentant du gouvernement? Je pourrais dire que nous tous... Je crois être un représentant du Parti conservateur du Canada et, avant la défaite électorale, j'étais également un représentant du gouvernement au Sénat, mais peut-être suis-je dans l'erreur.
Le sénateur Harder : Évidemment, je ne peux pas m'exprimer à votre place, monsieur le sénateur. Le premier ministre a demandé, dans sa correspondance avec le Président du Sénat, avec moi et avec les leaders de l'opposition, que je me présente comme le représentant du gouvernement au Sénat de façon à tenir compte des changements qu'il a apportés au fonctionnement de notre institution, dans le processus de nomination, afin d'atténuer l'esprit de parti et de mettre moins l'accent sur la dimension partisane des nominations au Sénat et des délibérations de cette institution.
La coopération internationale
L'Accord de libre-échange Canada-Panama
L'honorable Joan Fraser (leader adjointe des libéraux au Sénat) : Monsieur le leader, je voudrais revenir à la question de l'Accord de libre-échange Canada-Panama. Je crois savoir que vous allez faire des recherches à ce sujet.
Comme vous vous le rappellerez sûrement, les négociations sur cet accord ont débuté en octobre 2008. Il a été conclu en août 2009 par le président du Panama et celui qui était alors premier ministre du Canada, M. Harper. Les ministres du Commerce des deux pays l'ont signé en mai 2010.
Ma question est donc la suivante : pourriez-vous voir précisément pour nous ce que dit cet accord de libre-échange si soigneusement négocié à propos du secret bancaire, de l'échange de renseignements fiscaux et de tout ce domaine — s'il aborde la question?
L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie la sénatrice de sa question, et je peux lui donner l'assurance que je vais me renseigner.
Le Sénat
Le rôle du représentant du gouvernement
L'honorable Leo Housakos : J'ai une question complémentaire qui fait suite à celle que le sénateur Plett a posée au sujet du leader du gouvernement au Sénat.
Je me demande si le leader du gouvernement au Sénat se rallie à l'interprétation que nous faisons de ce côté-ci, selon laquelle la Loi sur le Parlement du Canada reconnaît clairement et de façon très distincte des responsables au Sénat, comme le leader de l'opposition et le leader du gouvernement au Sénat.
Pourriez-vous expliquer un peu plus longuement pourquoi le gouvernement Trudeau souhaite ne pas respecter la Loi sur le Parlement du Canada? De plus, le gouvernement actuel souhaite-t-il réformer cette loi et y apporter des modifications?
L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l'honorable sénateur de sa question.
Je répondrai en disant que la lettre du premier ministre à laquelle je me suis reporté est claire dans ses références exactes à la loi et au titre de leader du gouvernement au Sénat. Il n'entendait pas du tout déroger à la loi, mais il s'attend à ce que, en présentant mon rôle comme celui de représentant du gouvernement au Sénat, on traduise un point de vue sur l'exercice de ce rôle qui correspond aux caractéristiques que j'ai décrites dans ma réponse précédente.
Comme je l'ai dit ailleurs, il n'est pas inhabituel qu'un ministre — ce que je ne suis pas, je sais — soit désigné par ses titres ou fonctions selon une nomenclature différente de ce qu'on trouve dans le texte de loi. C'est dans cet esprit que le premier ministre demande que je sois appelé représentant du gouvernement au Sénat.
Le sénateur Housakos : Monsieur le leader, vous êtes le porteur de flambeau du gouvernement dans cette institution, la Chambre haute du Parlement. Nous sommes une assemblée qui légifère, et vous conviendrez que, dans les lois, le libellé à un impact énorme. Il va de soi que, comme ancien haut fonctionnaire, vous comprenez que le libellé revêt une importance fondamentale dans l'élaboration des lois. Par conséquent, lorsque nous essayons de changer la façon de nommer l'un des plus hauts responsables au Sénat sans modifier la Loi sur le Parlement du Canada, vous conviendrez que tout cela est lourd de conséquences.
Le sénateur Harder : Je prends note du point de vue de l'honorable sénateur.
L'honorable Serge Joyal : L'honorable leader du gouvernement, appelé représentant du gouvernement, accepterait-il de répondre à une autre question sur le même sujet?
Le sénateur Harder : Évidemment.
Le sénateur Joyal : Sénateur Harder, je dois vous dire que, lorsque j'ai eu l'occasion de lire la lettre du premier ministre vous nommant leader du gouvernement, appelé représentant du gouvernement, j'ai remarqué qu'une copie avait été envoyée au Président, au greffier du Sénat et au leader de l'opposition, mais pas au leader des libéraux au Sénat.
Pour vous dire la vérité, j'ai été offensé. Je me suis dit que, si le gouvernement était rationnel et cohérent dans la structuration de la participation des divers groupes politiques au Sénat, il devrait tenir compte du fait qu'il y a un groupe officiellement lié au Parti conservateur du Canada, un caucus libéral indépendant, sans aucun lien avec le caucus ministériel à l'autre endroit et, maintenant, un groupe de plus en plus important de sénateurs indépendants dont on peut s'attendre que, à l'avenir, il veuille peut-être se donner un délégué, selon le modèle du « convenor » qui existe à la Chambre des lords, c'est-à-dire une personne qui les représente dans l'organisation du travail du Sénat.
Le groupe que forment les libéraux indépendants au Sénat est organisé. Nous avons un leader. Nous nous rencontrons et nous discutons du programme du gouvernement et du Sénat et nous essayons d'apporter la meilleure contribution possible grâce à nos connaissances et à nos compétences. J'ai remarqué que, dans la lettre vous nommant leader du gouvernement, ou représentant du gouvernement, notre groupe a été complètement omis, même s'il est organisé. J'aurais cru que, si les sénateurs indépendants avaient eu un délégué, ils auraient aussi été informés du fait que vous êtes le leader du gouvernement et le représentant du gouvernement. Peu importe comment est formulée la lettre, nous n'existons pas dans l'esprit du premier ministre comme sénateurs assez dévoués dans cette enceinte pour assumer leur juste responsabilité dans l'examen des lois et le débat des enjeux de politique.
(1440)
Comment expliquez-vous que notre leader n'ait pas été informé du fait que vous étiez nommé leader du gouvernement, avec le titre de « représentant du gouvernement »?
Le sénateur Harder : Je remercie l'honorable sénateur de sa question. Il soulève un point très important.
Bien entendu, je n'ai pas participé à la rédaction de la lettre, que j'ai reçue en même temps que les autres destinataires. Fidèle à mon rôle qui consiste à transmettre les opinions du Sénat au gouvernement, je vais faire valoir vos préoccupations, ainsi que les observations qui ont été faites ou sous-entendues dans les interventions d'autres sénateurs, pour qu'il soit au courant des préoccupations exprimées au Sénat.
La sécurité publique
La possibilité d'une attaque par impulsion électromagnétique
L'honorable Daniel Lang : Honorables sénateurs, je voudrais passer à un autre sujet. Au préalable, je voudrais ajouter quelque chose à la déclaration que le sénateur Housakos a faite tout à l'heure au sujet de la participation aux travaux du Sénat des sénateurs indépendants nommés récemment. J'ai été très heureux d'accueillir la nouvelle sénatrice indépendante Frances Lankin aux délibérations de notre comité hier, où elle a participé à titre de sénatrice.
Je passerai maintenant à une question dont mon bureau a donné préavis au bureau du leader du gouvernement aujourd'hui. Il s'agit d'un sujet qui a été abordé au cours des audiences de notre comité, la semaine dernière et hier encore. C'est une menace importante qui plane sur l'Amérique du Nord. On parle d'une attaque par impulsion électromagnétique contre l'Amérique du Nord.
Hier, les témoins qui ont comparu devant notre comité ont dit qu'il s'agit de la plus grande menace existentielle qui pèse sur notre civilisation à l'heure actuelle et qu'une telle attaque pourrait priver diverses régions de l'Amérique du Nord d'électricité pour une période aussi longue qu'un an, ce qui causerait évidemment d'énormes ravages économiques et sociaux dans notre société.
La première question que je veux poser au sénateur Harder, à titre de leader du gouvernement, est la suivante : le gouvernement nouvellement élu estime-t-il prioritaire de s'attaquer au problème des impulsions électromagnétiques causées par des phénomènes naturels, tels qu'une éruption solaire ou une explosion nucléaire, et d'atténuer les risques qui en découlent? Si c'est le cas, pouvez-vous informer le Sénat des mesures prises par le gouvernement pour lutter contre ce problème?
L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je tiens à remercier le sénateur d'avoir donné préavis de la question à mon bureau. Malheureusement, elle est arrivée à mon bureau juste après le dîner. J'ai essayé de voir si je pouvais obtenir une réponse à temps pour la période des questions, mais je ne l'ai pas encore reçue.
Je puis assurer à l'honorable sénateur que je m'efforcerai de trouver la réponse à cette question importante le plus tôt possible.
Le sénateur Lang : J'ai une question complémentaire. J'aimerais poursuivre la discussion sur ce sujet. À titre de préambule, je tiens à dire que je sais que la pertinence de la période des questions a été mise en doute. La question que je soulève ici aujourd'hui est une question qui, j'en suis certain, n'est pas soulevée à la Chambre des communes. Je pense qu'il est très important d'avoir une conversation publique sur des questions comme celle-ci. C'est ce que cette assemblée peut faire pour servir la population que nous avons été nommés pour représenter.
J'aimerais explorer un peu plus la question des attaques par impulsion électromagnétique. La semaine dernière, des fonctionnaires ont signalé au comité que l'information à leur disposition au sein de la fonction publique est classifiée, et qu'ils ne pouvaient donc pas parler concrètement des conséquences d'une telle menace pour la population en général.
Cette situation n'est pas inhabituelle, honorables sénateurs, car ce genre d'information est demeurée secrète pendant de nombreuses années aux États-Unis — jusqu'à il y a environ 14 ans —, puis on a commencé à publier de l'information révélant que les attaques par impulsion électromagnétique constituent une véritable menace pour la société. Ensuite, pendant 14 ans, la question a fait l'objet d'une discussion publique aux États-Unis, et une commission a fait des recommandations à ce sujet. Aujourd'hui, cette commission est de nouveau mise sur pied et elle a pour mission d'étudier la question et de déterminer comment on peut collaborer avec les intervenants qui doivent assurer le maintien du réseau électrique et de l'approvisionnement en électricité de notre société.
Lorsque le leader du gouvernement consultera ses collègues, pourrait-il également obtenir la réponse à la question suivante? J'aimerais savoir quand l'information relative aux attaques par impulsion électromagnétique qui concerne le Canada sera déclassifiée afin que nous puissions vraiment commencer à tenir une discussion publique à ce sujet.
Le sénateur Harder : Je tiens à assurer au sénateur que je vais également tenter d'obtenir une réponse à cette question.
Le Sénat
Le titre de représentant du gouvernement
L'honorable Anne C. Cools : Honorables sénateurs, je tiens à souhaiter au sénateur Harder la bienvenue à la Chambre rouge. Je souhaite lui poser une question très simple que plusieurs d'entre nous se posent également.
Le Sénat est une institution ancienne. Comme nous le savons, il constitue l'une de trois parties constituantes de la Haute Cour du Parlement, mais le Sénat est depuis toujours l'une des parties, sinon la seule, qui choisit les titres et appellations de ses agents. Par exemple, le greffier du Sénat ne pourrait pas dire demain qu'il n'est plus le greffier du Sénat. Il occupe un rôle précis au Sénat.
Le Sénat ou les sénateurs ont-ils eu un rôle quelconque à jouer pour ce qui est de choisir le terme « représentant du gouvernement »?
L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : J'aimerais remercier de sa question la sénatrice, qui inspire le respect en raison de ses longs états de service au sein de notre institution.
Pour autant que je sache, ce n'est pas le cas, et je n'ai pas non plus été consulté. J'ai été bien renseigné par le premier ministre et je suis heureux d'assumer ce titre stylisé.
Les affaires autochtones et le développement du Nord
La crise dans les réserves
L'honorable Don Meredith : Honorables sénateurs, il y a une crise dans la réserve d'Attawapiskat, et les bulletins de nouvelles ont fait état de jeunes Autochtones qui s'enlèvent la vie. Le représentant du gouvernement peut-il faire le point sur les mesures prises par le gouvernement pour gérer cette situation et cette crise qui continue de sévir chez les Premières Nations partout au pays?
J'estime que les jeunes ne constituent pas seulement un pourcentage de la population du Canada, mais qu'ils représentent l'avenir du pays. J'aimerais savoir quelles sont les mesures décisives prises par le gouvernement pour remédier à cette crise.
L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie le sénateur de sa question et, de concert avec tous les Canadiens, je souligne l'importance de cette question qu'il a soulevée à juste titre.
Comme le savent les sénateurs, nombre de représentants haut placés du gouvernement, notamment des ministres et des députés, se sont rendus sur place et ont formulé des commentaires au sujet des engagements pris par le gouvernement. Ces engagements font actuellement l'objet d'un examen. Je serai heureux de faire le point, pour le bénéfice de l'honorable sénateur, sur les plus récentes déclarations faites par les ministres responsables.
[Français]
Les affaires étrangères
Les rapports sur les droits internationaux de la personne
L'honorable Thanh Hai Ngo : Ma question s'adresse au sénateur Harder. Le nouveau gouvernement Trudeau n'a pas fait preuve de cohérence dans le cadre de l'application de la politique internationale du Canada relative aux droits de la personne, et les Canadiens peinent à y voir une priorité. Depuis novembre 2015, le gouvernement a traité avec quelques-uns des pires auteurs de violations des droits de la personne au monde, en reléguant ces droits au second plan.
La publication de rapports sur les droits de la personne nous permettrait de rester honnêtes envers nous-mêmes et envers le monde. Le premier ministre a demandé au ministre Dion de faire preuve de transparence et de rigueur en ce qui a trait aux rapports que le gouvernement du Canada publie sur la situation des droits de la personne dans certains pays.
Ma question est la suivante : quand le gouvernement Trudeau compte-t-il présenter aux Canadiens des rapports publics complets et détaillés sur la situation des droits de la personne dans des pays comme l'Arabie saoudite, le Vietnam, la Russie, le Bahreïn et l'Iran? Par ailleurs, à quel type d'évaluation des droits de la personne procède-t-on?
(1450)
[Traduction]
L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Encore une fois, je remercie l'honorable sénateur de sa question et je lui fournirai une réponse par écrit.
Le sénateur Ngo : Ma question est la suivante : pourriez-vous nous dire au moins quand le gouvernement compte présenter le rapport aux Canadiens?
Le sénateur Harder : Je n'ai pas cette information pour l'instant, mais je verrai à ce qu'elle soit incluse dans la réponse fournie à l'honorable sénateur.
[Français]
L'industrie
La société Bombardier—Le soutien du gouvernement
L'honorable Claude Carignan (leader de l'opposition) : Monsieur le leader du gouvernement, on a pu lire dans les journaux, ce matin, que la ministre de l'Économie, de la Science et de l'Innovation du Québec, Mme Dominique Anglade, exhorte le gouvernement fédéral à poser des gestes concrets pour venir en aide à une entreprise extrêmement importante au Canada, la société Bombardier. Pouvez- vous nous informer des actions concrètes que le gouvernement entend prendre pour soutenir cette importante entreprise canadienne?
[Traduction]
L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je tiens à remercier l'honorable sénateur de sa question. Vous soulevez là une préoccupation qui est largement partagée par le gouvernement, en raison de l'importance que revêt cette société. Sachez que le gouvernement étudie activement la question, et je suis sûr qu'une décision sera annoncée sous peu par les ministres compétents.
[Français]
Le sénateur Carignan : Est-ce que le leader du gouvernement peut nous indiquer les gestes concrets qui sont envisagés dans le cadre des solutions qui permettront de venir en aide à Bombardier?
[Traduction]
Le sénateur Harder : Votre Honneur, je crois qu'il serait malvenu de ma part de faire des conjectures sur ce que le gouvernement pourrait ou non envisager dans ce dossier. Je veillerai à ce que le Sénat soit mis au courant dès qu'une décision sera prise.
[Français]
Les affaires étrangères
L'aide humanitaire accordée en réponse au séisme survenu en Équateur
L'honorable Claude Carignan (leader de l'opposition) : Le gouvernement a pu constater l'ampleur du séisme qui vient de se produire en Équateur. Nous avons appris, au cours des dernières heures, le décès de deux autres Canadiens à la suite de cette catastrophe. Or, votre gouvernement a annoncé une aide d'un million de dollars en réponse à la catastrophe, ce qui représente, selon moi, un geste plus symbolique que réel pour aider le peuple équatorien à faire face à cette terrible tragédie. Le gouvernement a-t- il l'intention d'améliorer l'enveloppe accordée à ce pays et, le cas échéant, dans quelle mesure et à quel moment?
[Traduction]
L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Encore une fois, je remercie l'honorable sénateur de sa question. Dans ce genre de situation, il n'est pas inhabituel que les gouvernements fassent une annonce initiale d'aide et qu'ils attendent de connaître l'engagement du gouvernement de l'Équateur et d'autres pays et organisations aux vues similaires afin d'évaluer au mieux les besoins du peuple équatorien. Puisque j'ai moi-même séjourné et travaillé en Équateur, je tiens à signaler à l'honorable sénateur que la perte de vies et l'ampleur des dégâts dans le pays constituent une tragédie que nous reconnaissons tous.
ORDRE DU JOUR
Recours au Règlement
Report de la décision de la présidence
L'honorable Donald Neil Plett : Je souhaite invoquer le Règlement si vous le permettez, Votre Honneur. Je m'adresse à vous avec beaucoup d'appréhension, car c'est la première fois que j'invoque le Règlement depuis mes sept années au Sénat. Votre Honneur, je le fais avec réticence, car j'éprouve la plus grande estime pour vous. Toutefois, je pense que je dois le faire.
Votre Honneur, depuis que le Sénat existe, il a toujours été guidé, dans son fonctionnement, par les lois, les règles et les conventions qui le régissent. Tous les éléments de ce cadre ont joué un rôle dans l'évolution et le maintien de l'efficacité de l'institution. Conformément au Règlement, à son interprétation dans La Procédure du Sénat en pratique ainsi qu'à la convention établie de longue date, le sénateur Munson et moi, qui sommes les deux whips du Sénat, avons convenu la semaine dernière de l'attribution des banquettes dans l'enceinte du Sénat. Nous avons attribué des places aux sénateurs conservateurs, aux sénateurs libéraux ainsi qu'aux indépendants.
Conformément à la règle, aux précédents et à la tradition, nous avons remis le plan de salle à l'huissier du bâton noir pour qu'il fasse immédiatement le nécessaire. Je tiens à souligner que, conformément à la convention et à la tradition, le sénateur Munson et moi avons attribué des banquettes aux sénateurs indépendants selon leur ancienneté, à l'exception bien sûr de la sénatrice Petitclerc, qui a besoin qu'on adapte les lieux pour elle, et de la sénatrice Lankin, qui est membre du Conseil privé. Nous n'avons toutefois pas formé de caucus imaginaires selon la date de nomination des sénateurs.
Après avoir reçu notre proposition, le Président du Sénat est intervenu pour attribuer aux sénateurs nommés récemment des places disposées de manière à former un caucus. Je tiens à dire que les autres sénateurs indépendants n'ont pas bénéficié du même genre de traitement, même si les sénateurs qui viennent d'être nommés sont tout aussi indépendants que les autres sénateurs indépendants. Lorsque j'ai demandé à l'huissier du bâton noir pourquoi il y avait eu un changement dans l'attribution des banquettes par rapport au plan de salle que le sénateur Munson et moi lui avions remis, il a dit que le bureau du Président l'avait informé qu'un consensus avait été atteint entre le Président et les whips, ce qui n'est évidemment pas le cas, comme vous le savez, Votre Honneur.
À des fins de référence, la règle en question se trouve dans l'ouvrage La procédure du Sénat en pratique, sous la rubrique « Les dirigeants et les structures politiques », et se lit comme suit :
Enfin, ce sont eux [les whips] qui déterminent où les membres de leur parti siégeront à la Chambre. Ils communiquent tout changement à l'huissier du bâton noir, qui ajuste en conséquence le plan de salle.
Comme cette disposition se trouve dans La procédure du Sénat en pratique plutôt que dans le Règlement du Sénat, je renvoie les sénateurs à l'article 1-1(2) du Règlement du Sénat, qui prévoit ce qui suit :
Dans les cas non prévus par le Règlement, les pratiques du Sénat, de ses comités et de la Chambre des communes s'appliquent avec les adaptations nécessaires.
Chers collègues et Votre Honneur, cette règle est implicite dans La procédure du Sénat en pratique et, de surcroît, la section du Règlement du Sénat portant sur son application affirme explicitement que, dans les cas non prévus par le Règlement, les pratiques du Sénat doivent s'appliquer. Le Sénat repose sur un système de règles et de conventions, et, Votre Honneur, si vous changez une convention, vous êtes en fait en train d'établir une nouvelle convention. Je me demande donc si le Président a l'intention de créer de nouvelles conventions. Je crois que le Sénat devrait être avisé si c'est le cas.
Si la nouvelle convention veut que les sénateurs qui viennent d'être nommés occupent un siège selon un ordre de préséance supérieur à celui des sénateurs indépendants ayant plus d'ancienneté et que le plan de répartition des sièges des sénateurs indépendants soit établi unilatéralement par le Président, je crois que cette intention devrait être communiquée et expliquée aux sénateurs afin que ceux-ci soient autorisés à en débattre.
À l'heure actuelle, cette décision n'est pas conforme aux règles et aux conventions du Sénat. C'est pourquoi je demande que le plan de salle présenté par le sénateur Munson et moi soit mis en œuvre immédiatement et que, par conséquent, les sénateurs indépendants se voient attribuer un siège par ordre de préséance et en fonction de leur ancienneté et que, en tout respect, le Président ne s'ingère pas dans des questions qu'il incombe à tous les sénateurs de trancher.
L'honorable George Baker : Votre Honneur, je sais que l'honorable sénateur a cité le Règlement en vigueur; cela ne fait aucun doute.
Pendant qu'il parlait, j'ai jeté un coup d'œil au Document d'accompagnement du Règlement du Sénat du Canada. Il souligne l'importance de l'article 2-1 du Règlement :
(1500)
2-1. (1) Le Président est chargé :
a) de présider les séances du Sénat; [...]
c) de maintenir l'ordre et de faire observer le décorum.
Le paragraphe du Règlement sur le maintien de l'ordre a été ajouté relativement tard. Je fais allusion au Document d'accompagnement du Règlement du Sénat du Canada, à la page 10, qui énonce ce qui suit :
Toutefois, une série d'incidents survenus dans les années 1890 et au début du XXe siècle ont entraîné une réévaluation du poste de Président, et le Sénat lui a accordé plus de pouvoirs. À la suite de changements apportés en 1906, le Sénat lui a confié le pouvoir de faire respecter l'ordre.
Ensuite, lorsqu'il est question de conflit, à la page 11, le document mentionne ce qui suit :
Les questions de procédure mentionnées dans le présent code qui sont expressément prévues dans le Règlement du Sénat relèvent de la compétence du Président du Sénat [...]
On y lit ceci :
Ses actions ne doivent pas être critiquées dans le cours du débat [...]
Et je ne dis pas que ces points sont au cœur même de la déclaration de l'honorable sénateur.
Ses actions ne doivent pas être critiquées dans le cours du débat, ni d'aucune autre manière, sauf par la voie d'une motion de fond. Il est arrivé en de rares occasions que des motions de ce genre soient présentées contre le Président ou d'autres présidents de séance. Les réflexions sur la personnalité ou les actions du Président, par exemple les allégations de partialité, peuvent toutefois être interprétées par la Chambre comme des atteintes à son privilège et sanctionnées en conséquence.
Je poursuis :
Le Président est au service de la Chambre. Il l'aide à s'acquitter de ses travaux d'une manière ordonnée qui respecte, autant que possible, un équilibre entre les nombreux intérêts divergents.
Dans ce cas, monsieur le Président, je souligne l'évidence : le Règlement du Sénat a été élaboré à une époque où les partis politiques contrôlaient les procédures en place dans cette enceinte, mais des changements importants ont récemment été apportés aux procédures du Sénat, à la suite de la nomination de sénateurs indépendants, et leur nombre devrait augmenter au fil du temps.
Donc, honorables sénateurs, j'estime qu'il serait foncièrement injuste pour les sénateurs indépendants de conférer les pouvoirs des partis politiques uniquement aux whips.
Vous pensez peut-être que, en ce qui concerne les conflits d'ordre procédural, comme celui dont nous discutons aujourd'hui, puisque le Règlement indique que c'est le Président qui rend la dernière décision, nous devrions peut-être renvoyer la question à un comité, comme le Comité du Règlement. Or, il se trouve que, actuellement, les sénateurs indépendants ne sont pas représentés de façon équitable au sein du Comité du Règlement.
Si je le mentionne, c'est parce que je veux que les choses soient claires. Même si le whip du Parti conservateur interprète le Règlement correctement, je pense que le Sénat devrait prendre connaissance d'office du fait que la composition de notre assemblée a beaucoup évolué, d'une part, et que, compte tenu des pouvoirs qui sont confiés à la présidence en vertu du Règlement, celle-ci devrait avoir la latitude nécessaire pour prendre des décisions, d'autre part. Ainsi, pour être en mesure de maintenir l'ordre dans cette enceinte, l'ordre et le décorum, le Président a le pouvoir de prendre des décisions définitives, plus particulièrement en ce qui concerne l'attribution des sièges, et aussi peut-être dans d'autres cas, pour que les sénateurs indépendants puissent jouer un rôle au sein des organes décisionnels, comme ils le méritent.
Selon le Règlement, ce pouvoir repose sur les épaules du Président; on peut lire dans le Règlement qu'il doit maintenir l'ordre et le décorum, et je pense qu'il devrait se servir de son pouvoir dans un cas comme celui-ci.
L'honorable Serge Joyal : Je souhaite participer au présent débat, parce qu'il soulève un très important principe qui sous-tend le fonctionnement de notre institution. On pourrait facilement comparer ce qui se passe ici à une partie de hockey : les rouges sont d'un côté de l'arène et les bleus de l'autre et tout le monde se lance dans la mêlée pour essayer de compter un but au détriment de l'équipe adverse.
En fait, le Sénat n'est pas vraiment une arène sportive. Le Sénat a essentiellement été conçu sur le modèle de la Chambre des lords, notamment pour ce qui est du plan de la salle qui est établi en fonction des partis : celui qui forme le gouvernement se trouve d'un côté et l'opposition officielle, de l'autre.
Selon le principe du gouvernement responsable, le gouvernement doit conserver la confiance de la Chambre. Cette confiance est mesurée par le vote sur les projets de loi budgétaires. C'est ce vote qui décide si le gouvernement survit ou s'il tombe. Si le gouvernement perd le vote sur un projet de loi budgétaire, le représentant de Sa Majesté, en l'occurrence le chef de la loyale opposition — c'est ainsi qu'on l'appelle — est immédiatement appelé à former un gouvernement, ce qui s'impose pour conseiller Sa Majesté dans l'exercice des pouvoirs législatif et exécutif.
Lorsqu'on lit l'article 9 de la Loi constitutionnelle, on constate que le pouvoir exécutif est attribué à Sa Majesté. Lorsqu'on lit l'article 91, on constate qu'elle exerce le pouvoir de l'avis et du consentement du Sénat et de la Chambre des communes.
Nous participons à l'exercice du pouvoir par Sa Majesté. Lorsque nous siégeons dans cette enceinte, nous incarnons l'idée que le gouvernement occupe un côté de la salle et l'opposition, l'autre côté.
Nous nous trouvons actuellement dans une situation différente : un nombre de sénateurs indépendants forment un groupe raisonnable au Sénat, dans cette enceinte, mais ils n`ont pas décidé d'élire un délégué, en l'occurrence un sénateur qui serait chargé d'organiser leur participation aux travaux législatifs du Sénat et aux débats sur les politiques publiques qui se tiennent dans cette enceinte.
Honorables sénateurs, ceux parmi vous qui ont assisté à la séance du Comité sur la modernisation hier — je vois la sénatrice Frum, le sénateur Pratte, la sénatrice McCoy, la sénatrice Cools, le sénateur McInnis et la sénatrice Tardif — ont entendu par vidéoconférence lord Hope of Craighead, le leader à la Chambre des lords que l'on appelle le « convenor », ou délégué des indépendants. Pendant deux heures, nous l'avons abondamment interrogé sur l'organisation du groupe des lords indépendants, que l'on désigne « cross-benchers » en anglais.
Honorables sénateurs, ils sont organisés comme le sont les sénateurs conservateurs et les sénateurs indépendants. Ils ont un leader pour organiser leur participation au débat. C'est ce lord qui rencontre chaque semaine le lord représentant les conservateurs, les libéraux-démocrates et les travaillistes afin d'organiser l'ordre du jour, d'assurer que tous les comités ont le personnel nécessaire, de remplacer les absents ou les malades et de veiller à ce que tous aient voix au chapitre dans le travail des lords. Ce faisant, ils veillent à ce que la représentation soit proportionnelle, ce qui semble juste et logique.
Comment cela cadre-t-il avec le genre de problèmes que nous avons à régler? Dans la Chambre des lords, où les « cross-benchers » siègent-ils? Où les indépendants siègent-ils à la Chambre des lords? Le nom le dit, on les appelle des « cross-benchers » et ils font un pont entre les côtés des partis. Comme je l'ai signalé, il y a trois côtés à la Chambre des lords, plus les « cross-benchers ». Ces derniers siègent au milieu. Si nous suivons ce modèle, il faudra réorganiser les sièges ici pour en placer un certain nombre devant la barre afin d'y faire asseoir les « cross-benchers ». Ce serait le modèle de la Chambre des lords.
(1510)
Lord Hope a comparu devant le comité hier — le sénateur Carignan a assisté à la séance —, et il a décrit tout cela clairement. Il a parlé du siège du Président, le « woolsack », de la table du greffier des Parlements, et de tout le reste. Ceux qui ont visité la Chambre des lords ou l'ont vue en photo sur une carte postale connaissent la configuration des lieux.
Comment pouvons-nous aborder la question de la disposition des sièges ici même? Honorables sénateurs, je suggère que nous continuions de faire ce que nous avons fait par le passé et qui nous a bien servis. Qu'avons-nous fait par le passé? Les whips se réunissaient régulièrement pour établir notre façon de procéder. Il est certain que nous devrons maintenant trouver une autre façon de faire les choses puisqu'il y aura un groupe d'indépendants. Tôt ou tard, ceux-ci devront choisir en leur sein un « cross-bencher », c'est- à-dire un sénateur qui les représentera aux discussions quotidiennes afin qu'ils aient leur mot à dire dans nos travaux et nos débats. Voilà la façon de faire les choses.
Pour le moment, nous sommes devant une impasse. Je soutiens, très respectueusement, que le sénateur Harder ne représente pas les sénateurs indépendants. Bien que cette distinction puisse sembler tortueuse, le sénateur agit à titre de leader du gouvernement au Sénat et porte le nouveau titre de « représentant du gouvernement ».
Malgré tout le respect que je vous dois, sénateur Harder, vous ne pouvez pas prétendre représenter les indépendants. Vous êtes vous- même sénateur indépendant, certes, mais les indépendants ne vous ont pas choisi comme délégué, c'est-à-dire comme responsable de l'organisation de leur travail. Ils choisiront un délégué un jour. Je ne sais pas si vous voudrez proposer votre candidature, quand le moment viendra. Ils choisiront un représentant et nos activités s'en trouveront facilitées. Nous vivons actuellement une période de transition; il ne faudrait pas perdre de vue la voie à suivre, qui est guidée par les principes fondamentaux de notre institution.
Le Sénat sait être souple. Comme je le mentionnais dans un discours que j'ai prononcé avant l'arrivée du leader du gouvernement, aussi appelé « représentant du gouvernement », le Sénat connaît un vent de changement et sera bien différent dans quatre ans. Mon collègue, le sénateur Baker, en a parlé à différentes occasions.
Honorables sénateurs, en attendant que les indépendants aient un représentant, nous tenterons de trouver une méthode qui nous permettra, temporairement, de discuter et de résoudre les problèmes dans un esprit de consensus. Le consensus est au cœur de nos activités. Tout le monde n'est pas enchanté, mais nous sommes relativement satisfaits de nos façons de faire, et nous respectons tous les sénateurs. Voilà la voie à suivre, honorables sénateurs.
Il faudrait y penser à deux fois avant de mêler la présidence à ces discussions; je le souligne avec tout le respect que je dois au Président. Lisez le Règlement du Sénat : vous verrez que le poste de Président a une valeur symbolique. Ces discussions de cuisine, dénuées de respect, ne serviraient pas les intérêts du Président, selon moi. Faisons confiance à ceux qui nous représentent. Invitons les indépendants à choisir un sénateur de leur groupe pour les représenter. Pour le moment, continuons de travailler comme nous l'avons toujours fait. Nous sommes conscients du problème, mais nous pouvons compter sur les réflexions des sénateurs qui participent à ces discussions pour trouver une solution.
Honorables sénateurs, c'est le meilleur conseil que je puisse vous donner.
Mes excuses à la sénatrice McCoy.
L'honorable Leo Housakos : Honorables sénateurs, je prends la parole au sujet du recours au Règlement du sénateur Plett. J'ai écouté avec grand intérêt mes bons amis, les sénateurs Baker et Joyal, qui ont tous deux présenté des arguments intéressants. En effet, le sénateur Joyal a tout à fait raison de dire que le Président du Sénat représente le Sénat du Canada ainsi que tous les sénateurs de toutes les affiliations. Je sais que le Président est résolu à nous représenter avec intégrité et avec dignité, comme il le fait jusqu'à présent.
Il est également impératif de nous rappeler que, en dépit de la règle que le sénateur Baker a invoquée et dont il a en quelque sorte étiré l'interprétation, ce qu'il fait très bien et avec habileté, nous sommes tous conscients en cet endroit que le rôle du Président est quelque peu différent de celui des Présidents des autres assemblées législatives du Canada, pour ce qui est tant du Règlement que des précédents. Nous sommes également conscients que le rôle du Président du Sénat consiste à agir à titre de baromètre du consensus, comme l'ont mentionné les sénateurs Joyal et Baker.
Certes, il ne consiste pas à se percevoir comme étant le représentant d'un groupe au détriment d'un autre. Honorables sénateurs, pour parvenir à ce consensus, il est impératif que vous permettiez l'évolution des traditions et du Règlement de notre assemblée alors que nous continuons de nous adapter aux besoins créés par les changements qui se produisent actuellement. Les sénateurs indépendants en cet endroit sont bien capables de se représenter eux-mêmes. Il est impératif de dire que nous violons un principe fondamental ici lorsque le Président commence à se mêler des aspects administratifs du Sénat.
Le sénateur Baker a raison : le rôle fondamental du Président est de préserver le décorum. La décision quant à savoir quels sièges et quels bureaux occuperont les sénateurs ne relève pas du décorum mais plutôt de l'administration. Le Sénat est une entité qui s'autodirige; cela se retrouve dans notre Règlement et dans nos traditions. Il fonctionne ainsi depuis 150 ans.
Je rappelle à mes collègues la suprématie du Sénat dans son rôle et sa relation avec le Président de la Chambre des communes ou de toute assemblée législative provinciale. Par exemple, vers la fin de la dernière législature, le Sénat a annulé une décision du Président, ce qui ne peut se faire dans aucune autre assemblée législative.
Cela témoigne sans équivoque de la souveraineté de la Chambre haute.
Honorables sénateurs, il est important que, à partir de maintenant, le Président — peu importe qui occupera ce poste — ne perde jamais de vue le principe fondamental selon lequel sa fonction est de servir de baromètre pour le consensus. Par consensus, on entend de permettre aux groupes — autant les sénateurs indépendants que les différents caucus qui forment notre assemblée — de se gérer eux-mêmes, ce qui a été un principe directeur de la conception du Sénat, elle-même inspirée de la Chambre des lords du Parlement de Westminster.
L'honorable Elaine McCoy : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui non pas pour débattre, mais bien pour remettre les pendules à l'heure.
C'est toujours un plaisir d'écouter mon collègue, le sénateur Joyal. Notre institution le passionne, et je l'admire depuis le début à cause de cela. Je ne suis pas toujours d'accord avec lui, mais j'aime beaucoup l'entendre parler de sa façon de concevoir notre assemblée. Or, je crois que la question actuelle en est une sur laquelle je ne suis pas d'accord, et ce, trois fois plutôt qu'une; voilà à quoi l'on peut s'attendre d'une sénatrice « indépendante », sénateur Joyal.
Tout d'abord, nous avons entendu le témoignage de l'experte Meg Russell, lorsqu'elle a comparu devant le comité, le 12 avril 2016. J'ai lu ses propos par la suite. Elle a dit que la Chambre des lords existait bien avant qu'il y ait des partis. Nous devons nous montrer respectueux et comprendre que la Chambre des lords a été une source d'inspiration. Ce n'est pas un précédent. Nous devons savoir que même les premiers constitutionnalistes — par exemple, A. V. Dicey, en 1885 — ont souligné que notre Sénat ressemblait bien peu à la Chambre des lords.
(1520)
Enfin, j'aimerais dire que, selon mes recherches, l'expression « la loyale opposition de Sa Majesté » a été utilisée pour la première fois en 1874.
Il y a quelques faits que je voulais porter à votre attention.
J'aimerais simplement vous dire, comme vous l'avez tous entendu le 24 mars 2016, que certains de mes collègues ont eu la gentillesse de m'élire pour être leur « facilitator ». Ils ont décidé de ne pas me donner le titre de « convenor » parce que ce mot se traduit mal en français. Nous avons donc opté pour le mot « facilitatrice », et il finira probablement avec le temps par désigner une fonction analogue. Une de nos principales valeurs est la collaboration.
J'aimerais que vous, sénateur Plett, et vous, sénateur Munson, veniez nous voir pour discuter. Nous voulons tous que les choses se fassent de manière ordonnée ici et nous voulons vraiment honorer nos traditions. Nous n'estimons pas que notre rôle ici est de mettre les bâtons dans les roues au gouvernement. Nous estimons être ici pour faire des examens factuels des mesures législatives, mais aussi des questions diverses que nous soulevons.
L'honorable David Tkachuk : Honorables sénateurs — et vous remarquerez que j'ai dit « honorables sénateurs », et non « Monsieur le Président », parce que, honorables sénateurs, c'est nous qui, en principe, dirigeons cet endroit —, le problème vient en partie du fait que je considère le Président comme un ami. Nous nous connaissons depuis longtemps et, s'il m'avait demandé à l'avance s'il devait faire cela, je lui aurais dit de ne pas le faire.
Nous sommes en train de discuter de cette question parce que l'exécutif n'a pas la moindre idée de ce qu'il veut voir au Sénat. Il croit qu'il apportera des changements au Sénat en s'ingérant continuellement dans les processus. Je ne suis pas contre le changement. Je voudrais moi aussi qu'il y ait des changements au Sénat, mais si tel est le souhait du gouvernement, il devrait plutôt soumettre ses idées au Sénat pour que nous puissions en discuter et décider par nous-mêmes. Il ne revient pas au premier ministre de décider de la façon dont le Sénat doit fonctionner et de dire ensuite à la population canadienne que les sénateurs devraient être plus indépendants. Nous ne sommes pas indépendants à l'heure actuelle. Nous sommes complètement — comment dire — à la merci du premier ministre. C'est lui qui a créé la fonction de représentant du gouvernement au Sénat et qui a nommé la personne qui l'occupe.
Le sénateur Harder est le leader du gouvernement au Sénat. Vous êtes ce que vous êtes. Vous ne pouvez pas prétendre être autre chose que ce que vous êtes.
Nous ne mêlons pas le Président à cette affaire; le Président s'en est mêlé lui-même. Cela tombe bien, il me semble, que les sept nouveaux sénateurs fassent partie du même groupe. Puis, il y a l'autre groupe, juste ici, qui est représenté par un délégué. Il y a aussi la sénatrice Cools, qui devrait être assise à la première rangée. Enfin, il y a tous les autres sénateurs, qui ne sont sous aucune bannière ou qui sont membres d'un parti politique. Ils siègent de ce côté-là.
Il a sans doute fallu une certaine planification avant d'en arriver là; il a fallu que le sénateur Harder conseille la présidence, que le Président y ait réfléchi lui-même ou — comble de l'horreur! — qu'il y ait eu ingérence de la part de la Chambre des communes, du cabinet du premier ministre ou du Bureau du Conseil privé.
Selon moi, il s'agit d'une question très importante. Les whips ont certaines fonctions, ce que nous respectons tous. À mon avis, s'il faut apporter des changements au Sénat, nous devrions en discuter et prendre nous-mêmes les décisions. Nous voulons tous répondre aux besoins des indépendants. Les gens qui sont nommés sénateurs peuvent décider de leur allégeance. Certains ont manifesté le désir d'être indépendants : très bien. Nous nous retrouvons devant une nouvelle situation. Réglons alors le problème. Il ne revient pas à la présidence de le régler pour nous; il nous incombe plutôt de le régler à sa place. C'est à nous d'informer la présidence de la façon dont nous voulons que le Sénat fonctionne et qu'elle s'acquitte de ses fonctions. Nous ne sommes pas la Chambre des communes.
J'appuie l'initiative de notre whip, qui a porté cette question à notre attention. Je crois que c'est important. Lorsque ces questions seront réglées, nous pourrons enfin procéder aux travaux du Sénat au lieu de discuter de l'endroit où chacun devrait siéger. Cette question relève des bureaux du whip et du leader. Ne gaspillons pas les ressources publiques en la confiant à tout le Sénat.
L'honorable Jim Munson : J'imagine les manchettes : « Les sénateurs débattent de l'emplacement de leurs sièges. » Pensons aux problèmes en Équateur, aux bombardements à Jérusalem ou aux suicides chez les Autochtones. Les questions qui méritent notre attention ne manquent pas et nous venons de passer 40 minutes à discuter de l'endroit où chacun siégera au Sénat.
Il n'y a pas de mauvais siège au Sénat. Lorsque j'ai été nommé sénateur il y a 12 ans, beaucoup de sénateurs que j'aurais appelés, en toute franchise, de vieux sénateurs à l'époque — je souligne que je vais avoir 70 ans en juillet — m'ont dit : « N'allez pas croire que vous pourrez apporter des changements dès votre arrivée. Vous êtes au Sénat du Canada. Laissez entrer le métier et faites vos preuves ». Eh bien, lorsqu'on me dit quoi faire et ne pas faire, je me dis que ce ne sont que des suggestions.
J'ai écouté les propos du sénateur Plett. Nous avions convenu d'une configuration fondée, selon nous, sur l'ancienneté et la faisabilité. Nous avons déjà eu cette discussion. En rétrospective, lorsque la sénatrice McCoy parle d'être facilitatrice et le sénateur Harder dit qu'il veut sélectionner un whip, il semble que la conversation aurait dû avoir lieu bien avant l'assermentation et la prise de décision quant à la configuration des sièges.
Il y a lieu de se demander quel est le raisonnement qui a mené à la configuration actuelle. J'ai siégé un peu partout dans cette enceinte. J'ai siégé dans le coin là-bas. Lorsque nous étions trop nombreux de ce côté-ci, j'ai occupé le siège situé deux rangs derrière Marjory LeBreton, ce qui était formidable, car nous pouvions alors l'énerver et la contrarier tous les jours. Cela m'a beaucoup plu.
C'est une question d'équité, et je proposerais que nous y revenions et que nous travaillions ensemble, puisqu'en fin de compte, la question qui s'impose est la suivante : quelle est la logique que le Président a suivie pour placer les sénateurs là où ils sont? C'est aussi simple que cela. Aussi, il faudra bien se rendre compte de toute la chance que nous avons d'être ici : il n'y a pas de mauvaise place. Alors, revenons à nos vraies préoccupations. Merci.
L'honorable John D. Wallace : Je suis d'accord avec le sénateur Munson. Après avoir écouté ces 40 minutes de débat sur la répartition des sièges alors que nous avons une foule d'enjeux pressants dont nous devrions parler, il y a lieu de se poser des questions. Je ne puis m'empêcher de penser qu'il s'agit du prolongement d'un problème que je trouve très déconcertant et au sujet duquel j'ai dû m'expliquer dans les médias : mon espace de bureau. Quoi qu'il en soit, ce sont des questions qui retiennent l'attention de certains sénateurs et nous devons nous y astreindre. Je trouve quand même la situation navrante. Je pense que ces questions nous font perdre notre temps.
L'une des observations formulées par le sénateur Plett est que la répartition provisoire des places que le sénateur Munson et lui ont préparée se fonde sur l'ancienneté, et que certains sénateurs nouvellement nommés ont été consultés dans une certaine mesure. Cependant, le sénateur Plett semble dire que les sénateurs indépendants — comme moi, qui suis ici depuis un certain temps — n'ont pas été consultés.
(1530)
Si le sénateur Plett essaie vraiment de défendre mes intérêts, je dois dire que je n'ai pas été consulté, et je suis sûr d'avoir moi-même plus d'ancienneté que tous les sénateurs récemment nommés. Cela signifie, je suppose, que j'ai droit à une place plus prioritaire et plus importante que celle que j'ai actuellement. Je remercie le sénateur Plett de son offre de défendre mes intérêts, mais je n'en ai pas besoin.
La question des places occupées par les indépendants n'a absolument aucun effet sur les sénateurs libéraux ou conservateurs. Il s'agit simplement de sièges occupés par des sénateurs indépendants. C'est une question que nous réglerons d'une autre façon à un autre moment. Je n'en vois pas l'intérêt pour le moment.
Je tiens en même temps à dire clairement que, même si mon ancienneté me donne droit à une place plus importante dans le cadre du plan proposé — que je n'ai pas vu —, je trouve parfaitement confortable ma place actuelle et tout à fait raisonnable le plan prévu pour tous nos nouveaux sénateurs. Nous pouvons discuter des questions d'intérêt commun avec tous les sénateurs indépendants non partisans.
Du moins pour moi, car je ne voudrais pas parler au nom d'autres sénateurs indépendants, ce plan est excellent. Il est peut-être gênant pour les membres des caucus politiques, mais, Votre Honneur, j'appuie pleinement votre décision. Ce plan est le bon.
L'honorable Anne C. Cools : Votre Honneur, je trouve très malheureux et je regrette profondément le fait que vous ayez été entraîné dans cette affaire, comme Président du Sénat. J'en suis vraiment consternée.
Je voudrais commencer par dire que, comme beaucoup d'autres, je suis entrée ici il y a quelques jours pour découvrir que je n'avais plus le même siège. Des choses très inhabituelles se produisent de plus en plus souvent ici, ce qui fait que je ne me suis pas plainte. J'ai pensé que nous aurions des explications au moment voulu.
La raison pour laquelle je m'inquiète au sujet de la présidence et de l'importance qu'il y a pour nous à défendre la dignité et l'honneur de cette fonction, c'est qu'il s'agit du Président du Sénat. Contrairement au Président de la Chambre des communes, qui parle au nom de la Chambre, le Président du Sénat ne parle pas au nom du Sénat. Il parle plutôt au nom de la Reine. Nous devons le comprendre. Toute insulte, toute injure adressée au Président vise en fait Sa Majesté. Comme le sait notre Président, il est quatrième dans l'ordre de préséance du pays.
La fonction de Président du Sénat est de la nature de la fonction de vice-roi. Le Président du Sénat peut au besoin se substituer au gouverneur général. Le président Obama, lors de sa visite en 2009, a été accueilli par le Président Kinsella, ce qui convenait parfaitement du point de vue de la préséance.
Honorables sénateurs, je m'apprêtais à inviter le sénateur Plett à retirer son rappel au Règlement pour que cette importante discussion puisse avoir lieu dans un meilleur contexte, mais il est déjà parti.
Il y a quelques points que je voudrais éclaircir par souci de clarté intellectuelle. Nous utilisons constamment le mot « indépendant ». Dans les deux Chambres, le terme est utilisé pour désigner l'absence d'esprit partisan, c'est-à-dire la non-appartenance à un parti politique. Ce n'est cependant pas le vrai sens du mot « indépendant ». Ce mot est apparu il y a bien longtemps lorsque les Chambres ont commencé à faire la distinction entre les ministres et les parlementaires d'arrière-ban.
Le terme « indépendant » qualifiait les parlementaires qui n'étaient pas membres du Cabinet. Ce n'est que récemment que les dirigeants politiques ont exercé une influence excessive sur les parlementaires et qu'ils en sont arrivés à chasser de leur caucus ceux qui ne suivaient pas la ligne du parti. Les parlementaires d'arrière- ban n'ont jamais été obligés de voter pour le gouvernement. Seuls les ministres avaient cette obligation et devaient démissionner s'ils souhaitaient voter contre le gouvernement.
Ce sont là des termes que nous devons examiner. J'aurais été plus satisfaite si nous avions abordé cette question sous une autre rubrique.
Je remercie les sénateurs Munson et Plett de leur travail. Il est vrai que le Règlement du Sénat confère aux whips le pouvoir de nous attribuer nos places. Nous avons ici des places et non des sièges. Il serait peut-être bon d'y réfléchir, mais je ne crois pas que ce soit le genre de discussion qui permette d'examiner convenablement ces questions. Je serais heureuse de participer à un tel débat sous une autre rubrique.
Chers collègues, il y a beaucoup de changements qui se produisent ici. Je compatis avec les nouveaux sénateurs qui commencent leur grand voyage de découverte. Nous ne devons pas perdre de vue que ce sont là les Chambres du Parlement, qu'elles ont de vieilles coutumes et qu'elles ne se prêtent pas facilement à la nouveauté, comme la nouvelle désignation de représentant du gouvernement. Nous ne savons pas ce que cela signifie vraiment.
Nous envoyons à l'étranger des représentants, des ambassadeurs, des plénipotentiaires, mais nous ne sommes pas une nation étrangère, de sorte qu'il ne convient pas de nous envoyer un représentant. Cela s'inscrit mal dans notre vocabulaire. Le sénateur Harder trouvera peut-être un moyen d'atténuer cette difficulté ou la nouveauté qu'elle a occasionnée.
Je suis persuadée que le sénateur Harder arrive ici plein de bonnes intentions et qu'il est disposé à faire de bonnes choses et à poursuivre un noble objectif.
Le seul problème, sénateur Harder, c'est que le seul moyen pour vous d'être représentant du gouvernement du Canada consiste à être membre de ce gouvernement. J'ai soulevé cette question ici à plusieurs reprises, étant d'avis que seul un membre du Cabinet peut faire d'une question une affaire ministérielle. Un parlementaire d'arrière-ban ne peut pas le faire. Nous devrions adopter cette règle car nous devons comprendre que notre système se fonde sur le gouvernement responsable. Autrement dit, le Cabinet est choisi par les membres des deux Chambres qui sont censés prendre en main les affaires ministérielles, c'est-à-dire les affaires de Sa Majesté dans les deux Chambres.
Bref, nous ne pouvons pas nous passer d'un leader du gouvernement. Nous en avons un maintenant. Le problème réside dans le terme utilisé pour le désigner. Je ne sais pas où tout cela nous mènera, mais je sais qu'il est important pour nous d'aller au-delà de cette nouveauté et de passer aux plus grandes questions qui vont se poser. Je pense, par exemple, au projet de loi que nous recevrons bientôt concernant l'aide médicale à mourir. Nous devons aller de l'avant.
Oui, il y a de la nouveauté, mais nous avons un système de préséance, des pratiques et des coutumes, des lois et des règles qui ont fait leurs preuves au fil des ans.
(1540)
Je vous dis, chers collègues, qu'aucune constitution, aucun instrument de pouvoir n'a jamais été conçu qui puisse égaler notre Constitution, l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867. Cette loi géniale a survécu pendant 150 ans — c'est une longue période dans l'histoire constitutionnelle — à cause du génie qui a présidé à sa conception. Nous devons comprendre que le Sénat était au cœur de la Confédération parce que les Pères de la Confédération voulaient qu'il dure aussi longtemps que la Confédération elle- même.
Je voulais simplement vous le dire, honorables sénateurs, pour que vous ayez une bonne idée de cette grande institution que chacun tente de réformer de mille façons différentes. C'est l'institution la plus remarquable qui soit. Les personnes les plus admirables et les plus merveilleuses du pays y ont servi. J'ai eu le privilège de connaître beaucoup d'entre elles. Pour moi, certaines de ces personnes sont des êtres supérieurs. Si vous aviez collaboré avec un Allan MacEachen, vous sauriez exactement ce que je veux dire
Je ne sais pas si c'est vraiment un rappel au Règlement. Je pensais qu'il s'agissait davantage d'une question de privilège. Quoi qu'il en soit, j'espère que le Président saura se tirer de cette situation.
Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, le temps passe. J'ai remarqué que la sénatrice Ringuette souhaitait prendre la parole il y a un moment. Je vais la lui donner.
Je voudrais en même temps demander aux honorables sénateurs de s'abstenir de demander la parole à moins d'avoir quelque chose de nouveau ou de différent à dire. Si vous avez des arguments nouveaux ou complémentaires, je serai heureux de les entendre. Autrement, essayons d'éviter les répétitions. Nous avons d'autres affaires à examiner aujourd'hui.
L'honorable Pierrette Ringuette : Je serai brève, comme dirait le sénateur Baker.
Tout d'abord, je crois que les interventions de différents sénateurs dans le cadre de ce rappel au Règlement donnent certainement aux sénateurs qui viennent d'arriver une bonne idée du niveau que le débat peut atteindre ici.
J'aimerais formuler une observation sur un fait. Par exemple, sénateur Munson, vous êtes l'un des whips d'un parti politique et vous agissiez conformément aux instructions de votre direction. Quand vous demandez quels motifs expliquent la répartition actuelle des places, vous m'amenez à demander moi-même ce qu'il y a d'irrationnel dans cette répartition qui puisse justifier ce ridicule rappel au Règlement. C'est certainement un problème.
Ensuite, presque chacune des personnes qui sont intervenues a parlé de consensus. Le consensus est bon quand il s'agit de partis, de whips ou de dirigeants, mais il ne semble pas convenir s'il a trait au fait que je siège à titre de sénatrice indépendante, de même que vous, vous ou vous, sénatrice Cools, qui êtes la doyenne de notre institution. Honorables sénateurs, certains semblent utiliser le mot « consensus » à toutes les sauces.
J'ai surtout été saisie quand j'ai entendu le sénateur Tkachuk dire que le gouvernement doit diriger cette institution en ce qui a trait aux changements qu'il souhaite y apporter. Je suis sûre qu'il prendra la parole demain et dira : « Le Sénat est maître de ses règles et décidera lui-même de la façon dont il doit fonctionner. »
Ressaisissons-nous, bonté divine. Les Canadiens s'attendent à ce que le Sénat change. Certains sénateurs souhaitent aussi voir leur institution évoluer. Ils joueront le rôle d'agents de changement et n'agiront pas conformément aux ordres d'un dirigeant conservateur, d'un dirigeant libéral ou d'un quelconque leader du gouvernement.
Cette institution doit redevenir ce que les Canadiens veulent qu'elle soit, mais voilà que nous sommes saisis d'un rappel tout à fait ridicule. Moi, j'en ai honte. Où en sommes-nous rendus? À du sectarisme politique?
Je siège au Sénat depuis 14 ans, et j'ai entendu bien des observations de bas niveau, mais je trouve absolument ignoble qu'on ait présenté aujourd'hui ce rappel au Règlement qui vise à déterminer où je dois m'asseoir, où tel ou tel sénateur doit s'asseoir. À mon avis, on n'aurait jamais dû présenter un rappel au Règlement qui conteste la décision du Président et qui cherche à modifier nos places. Jusqu'où peut-on descendre? C'est allé trop loin. Merci.
Son Honneur le Président : Honorables collègues, j'estime avoir entendu assez d'arguments, mais, par déférence pour le leader de l'opposition, je permettrai au sénateur Carignan de faire une dernière intervention. Après quoi, je crois que j'en aurai assez entendu.
[Français]
L'honorable Claude Carignan (leader de l'opposition) : Monsieur le Président, si vous le permettez, et avec tout le respect que je dois aux nouveaux sénateurs, il ne s'agit pas d'incommoder les gens, et encore moins de privilégier le sénateur Wallace, mais bien de traiter d'une question de convention à l'intérieur de nos règles. Les conventions font partie de nos règles, et notre Règlement indique clairement que, lorsqu'une situation n'y est pas prévue, c'est la convention qui doit s'appliquer.
J'ai entendu le sénateur Baker parler de décorum. Vous comprendrez que ce n'est pas en changeant les sénateurs de siège que nous allons créer un désordre au point où vous devrez imposer le maintien du décorum. Il n'est question que de respecter les conventions, et, si c'est le vœu de la Chambre de changer cette convention, ou de modifier le Règlement, elle peut toujours le faire, car elle est souveraine. Cependant, tant que ce changement n'aura été effectué, je crois que la convention doit être respectée.
Je crois également qu'il faut accorder plus d'importance au rôle des leaders du tiers parti. Le concept de parti reconnu existe dans nos règlements. Il y a des leaders de partis reconnus, et j'inviterais le gouvernement à y porter une attention particulière, notamment au pouvoir d'imposer une allocation de temps. Le pouvoir d'imposer une allocation de temps dépend directement de la volonté des leaders des deux partis reconnus, parce qu'il y a seulement deux leaders de partis reconnus. Le troisième parti est prévu au Règlement, il a des pouvoirs, et la discussion et l'entente qui ont eu lieu entre les whips des deux partis reconnus ont été tenues dans le respect de la convention.
Chers collègues, je crois qu'il faut respecter cela, sinon, nous pouvons toujours nous tourner vers notre Comité sur la modernisation. Bien que les sujets de l'assignation des sièges ou de l'ordre de préférence pour occuper un siège quelconque puissent paraître anodins, la règle de la convention et sa valeur sont extrêmement importantes pour notre institution.
[Traduction]
Son Honneur le Président : Honorables collègues, j'ai bien dit que le sénateur Carignan serait le dernier intervenant, mais je me permets de faire preuve d'un peu de souplesse aujourd'hui. J'ai entendu le mot « flexibilité » à quelques reprises. Je vais l'utiliser une fois de plus.
(1550)
La sénatrice Andreychuk a déjà pris la parole une ou deux fois, mais elle a dit avoir quelques nouveaux arguments à présenter.
L'honorable A. Raynell Andreychuk : Merci, Votre Honneur. J'apprécie ce privilège. Je ne prendrai pas trop de votre temps.
Je voudrais m'associer à toutes les observations formulées ici. C'est la force de notre institution qui fait que nous pouvons au moins tenir un débat. Nous ne nous entendons pas sur l'interprétation des règles, mais nous sommes disposés à en discuter. Cela nous permet de dire que nous formons une société au Canada, contrairement à d'autres que le sénateur Munson et moi visitons souvent.
Il ne s'agit pas de règles banales, mais du principe de primauté du droit. Si nous voulons apporter des changements, nous devons recourir aux règles qui régissent les modifications législatives. Je crois que c'est ce que nous discutons. Comment pouvons-nous changer les choses d'une manière ordonnée, sans nous en prendre les uns aux autres, en défendant nos points de vue respectifs?
Je m'associe au sénateur Joyal, particulièrement ce qui concerne ses antécédents, ainsi qu'à la sénatrice Cools, qui nous sert parfois de bien longs discours, mais qui se soucie toujours beaucoup de cette institution et qui nous fait connaître de nombreuses perspectives historiques. Je respecte les nouveaux sénateurs qui arrivent, et je voudrais entendre ce qu'ils ont à dire sur tous ces sujets liés au changement.
La raison pour laquelle je voulais prendre la parole est que le sénateur Baker a formulé certaines observations. Lui et moi avons siégé pendant des années au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Il a dit que les nouveaux sénateurs ont été nommés ici d'une manière indépendante.
Je regrette, mais nous avons tous étés nommés de la même façon. Il y a eu un processus de sélection indépendant qui était différent et qui n'était pas partisan. Toutefois, c'est le premier ministre qui a nommé les nouveaux sénateurs, tout comme d'autres premiers ministres l'ont fait. Je crois qu'il est nécessaire de le dire.
L'autre point que je veux soulever est que nous parlons sans cesse du groupe des indépendants. Cinq sénateurs ont formé un groupe, et je les respecte. Je crois qu'ils devraient avoir leur mot à dire, mais la sénatrice Cools ne s'est jamais jointe à un groupe. Elle s'est jointe à des partis de temps à autre, mais elle a toujours parlé en toute indépendance. Je pense que nous devrions définir ce que nous voulons dire par « sénateurs indépendants ».
Si quelqu'un affirme que je ne suis pas indépendante parce que je siège au sein d'un parti, je m'inscrirais probablement en faux contre ces propos parce que je fais preuve d'indépendance dans ce qui compte pour moi, à savoir dans mes idées, ainsi que dans mes responsabilités envers le Sénat, mes pairs et le grand public.
Merci, Votre Honneur.
Son Honneur le Président : Je remercie tous les sénateurs de leur contribution au débat sur ce sujet. Je prendrai la question en délibéré.
Le Sénat
Adoption de la motion concernant la période des questions de la séance du 20 avril 2016
L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat), conformément au préavis donné le 14 avril 2016, propose :
Que, pour permettre au Sénat de recevoir un ministre de la Couronne au cours de la période des questions tel qu'autorisé par le Sénat le 10 décembre 2015, et nonobstant ce que prévoit l'article 4-7 du Règlement, lorsque le Sénat siégera le mercredi 20 avril 2016, la période des questions commence à 15 h 30, toutes les délibérations alors en cours au Sénat étant interrompues jusqu'à la fin de la période des questions, qui sera d'une durée maximale de 30 minutes;
Que, si un vote par appel nominal coïncide avec la période des questions tenue à 15 h 30 ce jour-là, ce vote soit reporté et ait lieu immédiatement après la période des questions;
Que, si la sonnerie d'appel pour un vote retentit à 15 h 30 ce jour-là, elle cesse de se faire entendre pendant la période des questions et qu'elle retentisse de nouveau à la fin de la période des questions pour le temps restant;
Que, si le Sénat termine ses travaux avant 15 h 30 ce jour-là, la séance soit suspendue jusqu'à 15 h 30, heure de la période des questions.
Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
Des voix : D'accord.
(La motion est adoptée.)
[Français]
Le discours du Trône
Motion d'adoption de l'Adresse en réponse—Suite du débat
L'ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénatrice Jaffer, appuyée par l'honorable sénatrice Cordy,
Que l'Adresse, dont le texte suit, soit présentée à Son Excellence le Gouverneur général du Canada :
À Son Excellence le très honorable David Johnston, Chancelier et Compagnon principal de l'Ordre du Canada, Chancelier et Commandeur de l'Ordre du mérite militaire, Chancelier et Commandeur de l'Ordre du mérite des corps policiers, Gouverneur général et Commandant en chef du Canada.
QU'IL PLAISE À VOTRE EXCELLENCE :
Nous, sujets très dévoués et fidèles de Sa Majesté, le Sénat du Canada, assemblé en Parlement, prions respectueusement Votre Excellence d'agréer nos humbles remerciements pour le gracieux discours qu'elle a adressé aux deux Chambres du Parlement.
L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, c'est un grand honneur pour moi de prendre la parole pour participer au débat sur le discours du Trône. En particulier, je me rapporte à l'extrait suivant du discours qu'a prononcé Son Excellence, et je cite :
Pour rétablir la confiance de la population et mettre fin à la partisanerie, le gouvernement respectera son engagement concernant la réforme du Sénat en mettant sur pied un nouveau processus non partisan et fondé sur le mérite afin de conseiller le premier ministre concernant les nominations au Sénat.
[Traduction]
La première mesure concrète prise en vue de remplir l'engagement de renouveler le Sénat est l'arrivée, la semaine dernière, de sept nouveaux sénateurs, qui ont tous été assujettis au processus susmentionné.
[Français]
Il s'agit également de mon premier discours au Sénat. Je prends la parole tout en étant animé du sens profond de mes responsabilités envers les Canadiens et envers vous, mes collègues sénateurs. Comme vous tous, je suis ici pour servir les Canadiens et pour aider le Sénat à servir le Canada.
[Traduction]
Comme plusieurs d'entre vous, j'arrive au Sénat en étant bien conscient des sacrifices consentis par mes parents, ma femme et mon fils, ainsi que de l'éducation que m'ont prodiguée mes enseignants et de l'influence que continuent d'exercer sur moi les membres du village où j'ai grandi.
Mon histoire est typiquement canadienne. Mes parents sont arrivés au Canada en tant que jeunes réfugiés durant l'exode des mennonites de l'ancienne Union soviétique, durant les années 1920. Ma mère a travaillé à l'usine H.J. Heinz pendant 12 ans. Elle a quitté cet emploi à l'âge de 29 ans pour entreprendre sa 9e année et pour concrétiser son rêve de devenir enseignante.
Je suis né au Manitoba et j'ai grandi à Vineland, en Ontario, au cœur de la péninsule du Niagara. Je suis fier de mes racines mennonites, du fait que suis originaire d'un petit village et des valeurs qui en découlent. Je suis aussi conscient de l'importance de la communauté et des services que l'on rend au pays et à ceux qui, partout dans le monde, sont beaucoup moins chanceux que nous.
[Français]
Je suis tout d'abord venu à Ottawa à titre de stagiaire parlementaire, grâce à un formidable programme qui m'a permis d'observer le Parlement, ses députés et sénateurs et leur travail pendant un an. Je me souviens avec grand plaisir d'avoir rencontré les sénateurs Grattan O'Leary et Eugene Forsey, d'avoir assisté à des séances de comités et, bien sûr, d'avoir assisté à la période des questions à l'autre Chambre.
[Traduction]
Après des études de deuxième cycle, je suis entré au ministère des Affaires étrangères et, peu après, je suis devenu l'adjoint de la ministre Flora MacDonald, qui venait d'être nommée. Ce n'était pas une tâche facile. Par la suite, j'ai quitté la fonction publique pour devenir chef de cabinet du chef de l'opposition, le très honorable Joe Clark, puis chef de cabinet du vice-premier ministre Erik Nielsen, dans le gouvernement du premier ministre Mulroney. Je peux donc dire que je connais assez bien l'esprit partisan ainsi que ses avantages et ses limites.
J'en suis venu ensuite à la conclusion que mes intérêts et ma nature se prêtaient mieux à un travail non partisan dans la fonction publique. J'ai eu la chance de devenir directeur exécutif fondateur de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, dont le président, Gordon Fairweather, était le parlementaire pour qui j'avais travaillé comme stagiaire bien des années auparavant.
[Français]
En 1991, le premier ministre Mulroney m'a nommé sous-ministre, et j'ai eu l'honneur de servir en cette qualité sous 5 premiers ministres et 12 ministres, y compris le sénateur Art Eggleton.
[Traduction]
Au cours des neuf dernières années, j'ai travaillé pour le secteur privé et le secteur des organismes à but non lucratif. L'été dernier, j'ai eu le plaisir d'être invité à conseiller le chef de ce qui était alors le troisième parti sur la transition au gouvernement. Je crois que cette invitation concordait avec l'actuelle conviction du premier ministre qu'il convient de faire appel, dans l'intérêt du pays, à des conseils professionnels non partisans fondés sur l'expérience et adaptés aux conditions politiques.
Je tiens à remercier le premier ministre de m'avoir nommé au Sénat et de m'avoir chargé de ce rôle sans précédent de représentant du gouvernement au Sénat.
Je crois fermement que le Canada a besoin d'un Sénat, encore plus aujourd'hui qu'à n'importe quel autre moment de son histoire. C'est la raison pour laquelle je suis ici. Si le Sénat n'existait pas, il faudrait que nous l'inventions.
Nous avons un Sénat. Faisons donc en sorte qu'il marche bien. Convenons tous que le Sénat est là pour rester. Aucun pays aussi grand que le Canada, aussi divers du point de vue régional, linguistique et culturel, ne peut bien fonctionner sans une seconde Chambre faisant partie de ses institutions politiques nationales. Notre Constitution insiste là-dessus à juste titre.
Par suite de la décision rendue il y a deux ans par la Cour suprême du Canada, on reconnaît que le Sénat joue un rôle important au niveau fédéral dans notre système parlementaire bicaméral.
(1600)
En fait, comme complément à la Chambre des communes, le Sénat renforce le processus d'examen législatif et joue l'important rôle de groupe de réflexion dans l'élaboration de la politique publique dans une vaste gamme de domaines relevant de la compétence du gouvernement.
La décision de la Cour suprême a également précisé le fait que tout changement fondamental visant soit à abolir le Sénat, soit à en faire un corps élu dont les membres ont un mandat d'une durée fixe nécessite l'accord des provinces : dans le premier cas, cet accord doit être unanime et, dans le second, le changement doit avoir l'appui de sept provinces représentant au moins 50 p. 100 de la population du pays.
D'après la décision de la Cour suprême, il est maintenant évident que les nombreuses tentatives faites par le gouvernement précédent pour apporter unilatéralement d'importants changements étaient vouées à l'échec. Aussi sincère qu'il ait pu être dans ses efforts de réforme du Sénat, le gouvernement a présenté au Sénat ou à la Chambre des communes sept projets de loi qui étaient indiscutablement inconstitutionnels. En effet, ils ne satisfaisaient pas aux conditions du mode de révision applicable et, ce qui est plus important, ils étaient incompatibles avec le caractère fédéral du pays, qui impose que tout changement structurel important touchant la gouvernance fasse l'objet d'un accord négocié entre les partenaires. Il est donc certain que le Sénat ne sera ni aboli ni élu dans un avenir prévisible. Nous pouvons en conclure qu'il restera dans sa forme constitutionnelle actuelle.
De plus, j'invite les Canadiens à considérer d'autres fédérations et à penser aux raisons pour lesquelles elles ont un système parlementaire bicaméral. Prenons, par exemple, l'Australie, l'Allemagne, les États-Unis ou l'Inde parmi beaucoup d'autres. Une Chambre haute est essentielle au bon fonctionnement d'un régime fédéral.
La deuxième Chambre joue un rôle essentiel dans tous les systèmes démocratiques, en prévoyant des mécanismes de contrôle qui obligent l'exécutif à rendre des comptes, ainsi que dans tous les systèmes fédéraux, en représentant les plus petites régions et en défendant l'intérêt des minorités pour qu'elles ne soient pas complètement oubliées en présence de la majorité.
C'est pour cette raison que les sénateurs représentent des régions et que la représentation égale des régions est garantie et inscrite dans la Constitution; presque toutes les tentatives de réforme constitutionnelle des 40 dernières années visaient entre autres à perfectionner l'approche régionale.
Les Canadiens ne savent pas tous qu'il a fallu inclure cette notion d'équité régionale pour que les négociations relatives à la Confédération canadienne aboutissent. Sans cela, le Canada n'existerait pas. L'un des Pères de la Confédération les plus influents, George Brown, a résumé la situation en ces termes :
Nous n'aurions pas pu avancer d'un pas si nous avions rejeté cette condition.
[Français]
George-Étienne Cartier, quant à lui, a affirmé que « la force numérique ne l'emporte pas toujours sur toutes les autres considérations ». Cela explique pourquoi le Sénat et son rôle ont dominé les débats lors de la Conférence de Québec de 1864.
Sir John A. Macdonald voyait le Sénat comme une Chambre dont le travail serait dirigé par un principe de second examen réfléchi. La démocratie représentative, en 1867, était très différente de ce qu'elle est aujourd'hui. La démocratie telle que nous la connaissons de nos jours était encore en train de prendre forme à cette époque. La Révolution française et ses excès, tous commis au nom de la démocratie, remontaient à quelque 70 ans à peine. Le Canada et les autres pays occidentaux n'avaient pas encore adhéré au suffrage universel. On craignait que les masses, si on leur en laissait l'occasion, ne fassent pression en faveur de mauvaises politiques et de mauvaises décisions. James Madison, un architecte clé du régime politique américain, prétendait, par exemple, que les masses allaient, et je cite, « se voter de la bière gratuite ».
Aujourd'hui, peu de gens mettent en doute la valeur de la démocratie représentative. Cela dit, le rôle du gouvernement a considérablement évolué depuis l'après-guerre. Le gouvernement a étendu son champ d'action à presque tous les secteurs, et notre exécutif supervise à présent des dépenses annuelles de quelque 300 milliards de dollars, soit près de 15 p. 100 du PIB de notre pays. L'exécutif est aussi beaucoup plus puissant qu'il ne l'était il y a une cinquantaine d'années, et ce pouvoir a été de plus en plus concentré entre des mains de moins en moins nombreuses. Le premier ministre Trudeau l'a reconnu durant sa campagne, et il a voulu commencer à s'attaquer à cette question dès la transition vers la formation du gouvernement, et dans les mesures qu'il a prises depuis lors.
Les spécialistes de l'administration publique font état de nombreuses preuves selon lesquelles le Parlement a du mal à suivre le rythme de la complexité croissante de la politique moderne. En outre, ils font valoir que la capacité du Parlement à obliger le gouvernement à rendre des comptes a considérablement diminué. L'heure est venue de renforcer le Parlement ainsi que sa capacité à tenir les grands débats de l'époque et à faire en sorte que son action ait de meilleurs échos auprès des Canadiens et au sein de l'administration du gouvernement. Il ne suffit que d'un instant de réflexion pour comprendre que le Parlement est la plus importante institution démocratique de notre pays. C'est l'unique institution qui puisse faire le lien entre les voix des citoyens de St. John's, à Terre- Neuve, et ceux de Victoria, en Colombie-Britannique, en passant par ceux de Resolute Bay, au Nunavut.
[Traduction]
Donc, la question n'est pas de savoir si le Sénat est nécessaire. Nous savons qu'il l'est, parce que les Pères de la Confédération l'ont dit et parce que les exigences fondamentales du fédéralisme le montrent. Nous devons plutôt nous poser la question suivante : comment pouvons-nous moderniser, adapter et renforcer le rôle du Sénat afin de répondre aux attentes des Canadiens au XXIe siècle? Honorables sénateurs, c'est un défi que nous devons relever tous ensemble. Si le gouvernement souhaite apporter des améliorations au Sénat, c'est parce que la crédibilité de celui-ci a été remise en question.
Étant donné qu'il semble à peu près impossible de mettre en œuvre une réforme constitutionnelle du Sénat, le gouvernement du Canada a décidé de se concentrer sur un changement qui ne touche pas la Constitution et qui pourrait améliorer la crédibilité du Sénat auprès de la population. Tout le monde conviendra que les Canadiens sont en colère, à juste titre d'ailleurs, en raison des récents scandales, qui ont montré que certains sénateurs ont commis des manquements à l'éthique et n'ont pas rendu tous les comptes nécessaires. À l'heure actuelle, l'image du Sénat est ternie. Nous ne pouvons pas le nier. Parallèlement, les sénateurs qui connaissent bien le contexte parlementaire savent que l'excellent travail accompli par le Sénat a joué un rôle très important dans la bonne gouvernance du pays. Cela dit, les efforts positifs déployés par le Sénat sont assombris par des accusations de favoritisme et de partisanerie. Ces accusations, qui sont alimentées par les problèmes existants, minent la crédibilité de cette institution. Pour la population, et dans le monde d'aujourd'hui, il importe peu que la Constitution confère au Sénat la légitimité requise. Puisque ses membres sont nommés par le premier ministre, à son entière discrétion, dans le cadre d'un processus traditionnel, le Sénat ne jouit pas d'une véritable crédibilité.
Le gouvernement a deux objectifs ambitieux, quoique réalisables, pour améliorer le Sénat et sa crédibilité : établir un processus de nomination fondé sur le mérite et indépendant du contrôle unilatéral du premier ministre, et encourager davantage l'indépendance et la non-partisanerie des personnes nommées au Sénat. Le gouvernement peut atteindre le premier objectif en exerçant ses prérogatives. Pour ce qui est du deuxième objectif, cela dépendra de l'intégrité et de l'engagement des nouveaux sénateurs, et beaucoup de l'incidence qu'auront les changements sur les sénateurs actuels.
Un comité consultatif pour la sélection des candidats au Sénat a été mis sur pied; il est présidé par Mme Huguette Labelle, ancienne fonctionnaire, chancelière de l'Université d'Ottawa et présidente de l'organisme Transparency International. Le comité utilise un ensemble de critères rendus publics pour évaluer les candidats potentiels pour les nominations au Sénat. Pour chaque siège vacant au Sénat, une liste de cinq noms est soumise au premier ministre, qui en choisit un et soumet une recommandation de nomination au gouverneur général. Ce processus, utilisé pour combler les sept premiers sièges, sera de nouveau élargi en vue d'inviter le public à participer en proposant des candidats potentiels. Même si cette ouverture présentera certains défis pour le comité consultatif, le gouvernement a pleinement l'intention de faire participer la population au processus de sélection.
(1610)
Les candidatures seront évaluées en fonction de critères comme l'expérience pertinente fondée sur le mérite, la réputation, l'aptitude pour le poste et d'autres facteurs pour refléter la grande diversité de la population et les valeurs de la Charte. En plus de tenir compte de facteurs culturels, ethniques, linguistiques, religieux, professionnels et physiques, le gouvernement est déterminé à promouvoir l'égalité entre les sexes.
Distingués collègues, lorsque nous prenons la composition actuelle du Sénat, force nous est de reconnaître que les gouvernements précédents, y compris celui du premier ministre Harper, ont déployé de sérieux efforts pour élargir la base du Sénat afin d'assurer une meilleure représentation de la diversité et du talent des citoyens canadiens. Néanmoins, puisque ces nominations ont été faites exclusivement par le premier ministre sans le bénéfice d'un processus plus transparent auquel aurait participé un organe consultatif indépendant servant de filtre pour évaluer les qualités des candidats, les nominations étaient susceptibles de laisser planer des soupçons de népotisme. Il est clair que c'était la perception générale du public, que les médias ont bien renvoyée.
Pendant trop d'années, on a entendu le même refrain, c'est-à-dire que le Sénat est un genre de repaire pour les fidèles du parti au pouvoir ou une récompense pour les collecteurs de fonds efficaces. Tout le monde n'a pas eu l'audace de mon bon ami, l'ancien sénateur Irving Gerstein, qui s'est vanté fièrement et ouvertement de sa capacité de collecter des fonds. Bien que je sache qu'il était un sénateur compétent qui s'acquittait de ses responsabilités avec brio, et beaucoup d'humour, le gouvernement a déterminé qu'il était temps de faire ce qu'il pouvait pour que le Sénat ne soit plus teinté de népotisme. C'est la première étape minimale qu'il faut suivre pour renouveler le Sénat et rétablir sa crédibilité. Le gouvernement a promis de le faire pendant la dernière campagne et il est résolu à prendre des mesures efficaces.
Le gouvernement propose également de renouveler le Sénat en encourageant les sénateurs à demeurer indépendants. En s'assurant encore davantage que les nominations soient fondées sur le mérite, le gouvernement estime que les nouveaux sénateurs ne ressentiront ni le besoin ni l'obligation de se ranger du côté d'un parti ou d'un autre. Si la méthode fonctionne, le Sénat en viendra à bénéficier davantage du fait que l'ensemble de ses membres est nommé. La Cour suprême invoque expressément cet avantage dans la décision qu'elle a rendue en 2004 et dont je cite l'extrait suivant :
Les rédacteurs ont cherché à soustraire le Sénat au processus électoral auquel participaient les députés de la Chambre des communes, afin d'écarter les sénateurs d'une arène politique partisane toujours soumise aux impératifs des objectifs politiques à court terme.
Tout en reconnaissant l'attrait que représente l'allégeance politique et le confort que confère une identité commune, la partisanerie a tendance à miner l'indépendance d'un sénateur en exigeant sa loyauté envers le parti. Elle est contraire à l'objectif fondamental de la création d'un Sénat indépendant et nommé plutôt qu'élu.
Force est d'admettre, cependant, que le Sénat est allé dans une autre direction. Il y a toujours eu des libéraux et des conservateurs au Sénat. Cela dit, il se peut très bien que ce soit là un des grands moteurs du mouvement en faveur de la réforme du Sénat. Si les sénateurs se comportent de façon partisane, pourquoi ne pas les faire élire comme leurs homologues à la Chambre des communes? Ce n'est qu'en encourageant l'indépendance et l'impartialité des sénateurs que nous pourrons donner tout son sens à un Sénat nommé. Ce n'est qu'en nous engageant dans cette voie que les projets de loi et les politiques publiques à l'étude pourront bénéficier des talents et des antécédents de l'ensemble des sénateurs.
La préférence du gouvernement pour un Sénat plus indépendant et moins partisan est amplement démontrée non seulement par les six autres sénateurs indépendants qui viennent de joindre le Sénat, mais aussi par ma nomination à titre de représentant du gouvernement et par la façon dont j'exercerai cette responsabilité. Comme je l'ai dit plus tôt aujourd'hui, bien que je sois le leader du gouvernement au Sénat, avec tous les avantages que procure ce poste en vertu de la loi et du Règlement du Sénat, le gouvernement a délibérément insisté pour que je sois considéré à titre de représentant du gouvernement, ce qui a une signification importante à mon avis. Contrairement aux anciens leaders du gouvernement au Sénat, je siège à titre de sénateur indépendant. Je n'appartiens à aucun caucus politique. Tout comme mon prédécesseur immédiat, je suis membre du Conseil privé, mais je ne suis pas ministre.
Cela signifie que, dans l'exercice de mon rôle, mon objectif fondamental est d'agir à titre d'intermédiaire entre le gouvernement et le Sénat. Je suis responsable de parler au Sénat au nom du gouvernement et, de façon similaire, d'exprimer le point de vue du Sénat au gouvernement. Pour remplir mon mandat, je n'ai pas besoin d'être membre d'un parti politique et je ne serai pas membre d'un caucus national ni d'aucun caucus politique. Toute influence que j'exercerai au Sénat, en plus des avantages dont je bénéficie à titre de leader, dépendra de mon pouvoir de persuasion, du mérite des lois et politiques du gouvernement et, bien franchement, de la bonne volonté du Sénat dans le cadre de leur étude et de leur approbation.
La promotion de l'indépendance des sénateurs à titre d'idéal n'entraîne pas le rejet des allégeances politiques pures et simples, si c'est ce que préfèrent les sénateurs individuels. Les partis politiques continueront d'être une caractéristique du Sénat aussi longtemps que des sénateurs voudront en faire partie. De plus, le gouvernement comprend tout à fait qu'il n'a pas le droit ou le pouvoir d'insister auprès des sénateurs pour qu'ils soient indépendants, et cette approche visant à encourager l'indépendance ne signifie pas que les alliances fondées sur des valeurs partagées seront interdites. Les sénateurs auront toujours tendance à former des groupes ou des associations en fonction de leurs valeurs, de leur géographie ou de leurs objectifs communs. En fait, cette tendance devrait même s'accentuer si le Sénat est dominé par des sénateurs indépendants au fil du temps. Or, ces alliances ne doivent pas forcément être fondées sur le parti et il n'est pas obligatoire qu'elles aillent au-delà du sujet qui a donné lieu à l'union ou qu'elles soient permanentes.
Cette analyse me semble refléter fidèlement les propositions du gouvernement pour rétablir la réputation du Sénat. En créant un mécanisme de nomination indépendant et en encourageant les sénateurs à être indépendants plutôt que d'être liés à un parti politique, le Sénat saura tirer parti des qualités des sénateurs et rétablir au fil du temps sa crédibilité au sein du public. C'est important parce que le Sénat pourra canaliser son attention vers la substance du travail qu'il accomplit et qui est un complément de celui de la Chambre des communes. Je souligne avec admiration le chemin que les sénateurs ont parcouru au cours des derniers mois.
Le travail du Comité sur la modernisation du Sénat, les réunions libres de caucus et la présence des ministres lors de la période des questions sont tous des changements novateurs et prometteurs. Mes collègues récemment nommés et moi avons hâte d'œuvrer en collaboration avec tous les sénateurs, qu'ils fassent partie d'un caucus, qu'ils soient indépendants ou qu'ils ne soient pas liés par les positions de leur parti politique. Mais nous devons changer. Notre Règlement, nos procédures, nos pratiques et notre façon d'exploiter nos ressources doivent faire en sorte que les voix et les contributions de tous les sénateurs soient respectées. Nous devons gérer notre institution avec la transparence qui inspirera confiance aux Canadiens.
Comme beaucoup le savent, j'ai comparu devant les comités sénatoriaux à plusieurs occasions lorsque j'étais sous-ministre. J'ai toujours été impressionné par la qualité des questions des sénateurs et leur profond dévouement envers le Canada et les Canadiens. Malheureusement, le remarquable bilan du Sénat dans l'étude des projets de loi, les délibérations et l'étude des questions de l'heure a été relégué aux oubliettes à cause des questions d'allocations de dépenses, des problèmes éthiques et, bien franchement, d'une dose excessive de partisanerie. Nous devons faire mieux. Nous devons mieux sensibiliser les Canadiens au solide travail qui est accompli au Sénat en leur nom. À cet égard, je suis impressionné par l'approche novatrice adoptée il y a quelques semaines seulement en ce qui concerne l'étude sur l'obésité du Comité des affaires sociales. Non seulement le travail était de grande qualité, mais le recours aux médias sociaux a permis au comité de susciter la participation d'un public plus vaste au débat sur les politiques dans ce domaine.
Historica Canada a décrit à juste titre le Sénat comme « le meilleur centre de réflexion du Canada ». Le Sénat a effectué d'excellents travaux de recherche, produit des rapports majeurs sur une grande variété de sujets et attiré l'attention sur les questions d'actualité les plus importantes. Le gouvernement récolte encore les fruits du rapport de l'ex-sénateur Michael Kirby et de son comité sur la santé mentale.
Vous comprenez maintenant pourquoi j'ai accepté sans la moindre hésitation l'invitation à siéger dans cette enceinte. Le Sénat est à un stade de transition critique, et je veux apporter ma contribution, aussi modeste qu'elle soit, au renforcement de cette institution essentielle. C'est pour cette raison que je prends la parole aujourd'hui.
Je crois que le Sénat dans son ensemble peut fournir un apport inestimable en adoptant une approche moins partisane à l'égard de nombreux enjeux d'intérêt public. Le Sénat ne pourrait ni accomplir ni ajouter grand-chose en essayant d'être plus partisan que l'autre Chambre. La politique partisane est le moteur des Communes. Nous ne devons pas rivaliser avec la Chambre élue, mais compléter ce qu'elle fait. Un Sénat qui peut aborder l'analyse d'un projet de loi ou d'une politique sans être gêné par des considérations partisanes ni subir les pressions de l'opinion publique peut jouer un rôle utile. Cela correspond bien au rôle complémentaire du Sénat, qui doit s'ajouter à celui de la Chambre des communes plutôt que de concurrencer celle-ci.
(1620)
En ce qui concerne les lois, le Sénat peut ajouter à la qualité de l'examen en s'appuyant sur le travail réalisé à la Chambre des communes. Il peut se concentrer sur les éléments d'un projet de loi qui n'ont pas été vérifiés à fond aux Communes. Il peut aussi encourager un engagement public plus poussé en entendant des témoins qui n'ont pu comparaître devant les comités des Communes. En outre, le Sénat est capable d'entreprendre des études sur des questions de fond qui réclament l'attention, mais qui sont politiquement sensibles et délicates dans l'opinion publique. Les interpellations du Sénat, notamment sur l'euthanasie et l'aide au suicide, les drogues illégales et les services nationaux de santé, au cours des dernières décennies, ont permis à notre institution de promouvoir un discours public sérieux ces 50 dernières années.
Lorsqu'il fait ce travail, le Sénat ne vise pas à imposer un résultat ou à régler une question. Il recueille plutôt des témoignages auprès des sources pertinentes et des points de vue différents pour présenter une évaluation équilibrée. En fait, c'est là une des caractéristiques paradoxales du Sénat : comme il peut résister aux pressions de l'opinion publique, il peut contribuer au bien commun en favorisant une discussion utile sur des enjeux importants, mais qui prêtent à controverse.
Cela dit, j'accepte que la Chambre des communes doit pouvoir imposer sa volonté sur divers fronts. Le gouvernement en place a tout à fait le droit d'appliquer les priorités qui figuraient dans son programme électoral. Le parti au pouvoir a obtenu des Canadiens le mandat qui lui permet d'appliquer les mesures proposées en campagne. C'est ce que veut la démocratie. Si les institutions démocratiques ne peuvent donner ces résultats, on doit forcément se demander ce qu'elles peuvent faire.
[Français]
Je crois fermement que le système parlementaire inspiré de Westminster est le meilleur régime politique qui soit. Il a évolué avec le temps et il a bâti sa réputation sur son action et en tirant des leçons, souvent après une quelconque crise de renouveau.
J'ai consulté de nouveau le traité classique de Walter Bagehot, The English Constitution, dans lequel il décrit comment la partie non écrite de la Constitution devrait fonctionner. Publié en 1867, l'année de la création du Canada, cet ouvrage a résisté à l'épreuve du temps. Nous savons et nous acceptons depuis longtemps que le Sénat ne peut pas présenter de projets de loi de finances.
[Traduction]
Bagehot a également donné à la Chambre des lords des conseils qui s'appliquent au Sénat du Canada. Il a écrit ceci :
[...] la Chambre des lords doit s'incliner lorsque l'opinion de la Chambre des communes représente celle de la nation [...]
Bagehot a affirmé que les lords forment « une Chambre de second examen et de temporisation ».
L'auteur a brièvement expliqué son point de vue en disant que la Chambre des lords peut rejeter jusqu'à trois fois un projet de loi que lui a renvoyé la Chambre des communes, mais que si cette dernière persiste à le lui renvoyer, la Chambre des lords doit finalement s'incliner et l'accepter.
Le Sénat offre d'importants avantages par comparaison avec d'autres institutions. Nous devons mieux en tirer parti pour le Canada. Nous sommes l'une des deux Chambres du Parlement du Canada. Voici un autre paradoxe du Sénat : nous pouvons faire abstraction, à court terme, de l'opinion publique et, ce faisant, outrepasser les attentes de la population. Le moins nous agirons de façon partisane, le plus notre voix sera crédible. Nous sommes en mesure de nous élever au-dessus de la mêlée et nous pouvons faire la lumière, avec célérité, sur les enjeux à long terme auxquels le Canada est confronté. Nous sommes en mesure de présenter le contexte régional qui caractérise les six principales régions économiques du pays pour qu'on en tienne compte dans l'élaboration de politiques économiques nationales. Voilà l'un des rôles les plus importants du Sénat, si ce n'est le plus important, et nous devons mieux nous en acquitter. Si le Sénat ne peut être traité comme un interlocuteur respecté dans le traitement des enjeux et des tensions régionales, personne ne le peut. En ce qui concerne les minorités, le Sénat doit être particulièrement vigilant pour ce qui est du respect des droits qui leur sont garantis en vertu de la Charte. La décision rendue la semaine dernière par la Cour suprême au sujet des modifications au Code criminel devrait nous donner le courage de défendre les droits garantis par la Charte.
Le Sénat est dans une situation idéale pour aborder d'une façon posée et réfléchie les grands enjeux de l'heure. Grâce au travail des comités, nous pouvons, ensemble, établir un programme pour aborder ces dossiers difficiles pendant la présente législature et les suivantes.
Je vais conclure en disant un mot sur deux enjeux qui pourraient bénéficier d'une étude du Sénat.
D'abord, les soins aux aînés. L'enjeu est d'habitude scindé en deux questions complètement séparées, alors qu'elles sont intimement liées. Ces deux questions sont les revenus des aînés et le soin des aînés qui ont besoin de services mais n'ont pas à être hospitalisés. Dans les gouvernements fédéral et provinciaux, la première question relève des ministères chargés du soutien du revenu, tandis que la deuxième est confiée aux ministères de la Santé.
Vu la croissance sans cesse plus rapide du nombre d'aînés et la volonté de trouver des moyens de leur permettre de rester chez eux, ce qui, à la fois, coûte moins cher et assure une meilleure qualité de vie, les deux questions sont étroitement liées. Quelle devrait être la politique portant sur ces deux questions? Comment faudrait-il répartir les coûts inévitables entre le soutien de l'État et la contribution de la personne?
Le deuxième enjeu très important, à mon sens, est le pluralisme et l'actuel « accueil de la différence » dans notre pays et dans le monde en général. Les élections récentes et les débats publics sur la diversité culturelle et religieuse font ressortir la nécessité de renforcer, de rendre plus résiliente, notre culture de respect pour la différence, tout en permettant la mise en commun des valeurs canadiennes.
Cela devient de plus en plus difficile dans un monde de réfugiés, là où il y a des flots spontanés de migrants, le risque de radicalisation, la terreur, autant d'éléments qui menacent la cohésion sociale. Voilà un enjeu de notre temps, à propos duquel la voix du Canada doit se faire entendre dans le débat mondial.
Il se fait déjà du bon travail. Nous devrions tirer pleinement parti de notre position, au cœur de la démocratie canadienne, pour repousser les frontières de la connaissance sur les questions décisives qui se posent à notre pays. Ainsi, nous aiderons à modeler, à préparer pour les Canadiens le débat politique et stratégique. Nous avons les ressources voulues et nous avons des Canadiens hautement qualifiés et profondément engagés qui veulent jouer un rôle déterminant. Mettons-nous à l'œuvre.
J'ai hâte de travailler avec chacun de vous pour créer le Sénat du XXIe siècle, afin que nous puissions tous dire à nos enfants, à nos petits-enfants et à tous les Canadiens que nous sommes fiers d'être sénateurs et fiers du travail que nous accomplissons pour notre pays.
Pour reprendre les mots du sénateur Campbell : honorables sénateurs, un brillant avenir nous attend.
L'honorable James S. Cowan (leader des libéraux au Sénat) : Chers collègues, j'entends prendre part au débat. Je tiens à remercier le sénateur Harder du discours bien réfléchi qu'il nous a adressé cet après-midi. Je voudrais y réfléchir, car j'allais aborder un grand nombre de questions identiques. Je voudrais revoir mes notes à la lumière de ce qu'il a dit aujourd'hui et prendre la parole demain. Je propose l'ajournement du débat pour le reste de mon temps de parole.
(Sur la motion du sénateur Cowan, le débat est ajourné.)
Pêches et océans
Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat
L'honorable Elizabeth Hubley : Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'article 5-5a) du Règlement, je propose :
Que le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans soit autorisé à se réunir le mardi 19 avril 2016, à 17 heures, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application de l'article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.
Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?
Des voix : D'accord.
Son Honneur le Président : L'honorable sénatrice Hubley propose, avec l'appui de l'honorable sénateur Munson, que le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans soit autorisé... Puis- je me dispenser de lire la motion?
Des voix : Oui.
Son Honneur le Président : La sénatrice Hubley a la parole.
La sénatrice Hubley : Merci beaucoup, honorables sénateurs. Aujourd'hui, nous accueillons des témoins qui viennent de l'extérieur de la province. Ils ont parcouru une grande distance, et ils nous attendront à 17 heures. Je vous remercie de prendre cette motion en considération pour que nous ne les fassions pas attendre.
Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
Des voix : D'accord.
(La motion est adoptée.)
(1630)
[Français]
Projet de loi renforçant la sécurité des Canadiens et promouvant la chasse et le tir sportif
Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat
L'honorable Céline Hervieux-Payette propose que le projet de loi S-223, Loi modifiant la Loi sur les armes à feu, le Code criminel et d'autres lois en conséquence, soit lu pour la deuxième fois.
— Honorables sénateurs, comme la plupart d'entre vous le savent certainement, j'ai toujours été indépendante et j'ai toujours combattu pour mes idées. À titre de Québécoise, je crois aux politiques de contrôle des armes à feu, mais je défends également la pratique de la chasse, puisque j'ai moi-même exercé cette activité lorsque j'étais plus jeune en compagnie de mon père. C'est dans cet ordre d'idées que je présente à nouveau mon projet de loi qui vise à renforcer la sécurité des Canadiennes et des Canadiens et à promouvoir la chasse et le tir sportif.
Les événements survenus récemment dans la communauté autochtone de La Loche ne peuvent que nous glacer le sang. Il s'agit d'une tragédie tout à fait désastreuse pour les familles des victimes auxquelles j'offre mes plus sincères condoléances. Il est maintenant trop tôt pour se prononcer sur les faits; nous devons laisser l'enquête progresser, mais nous connaissons certains facteurs clés responsables de la situation. La pauvreté, l'intimidation et le manque de ressources en santé mentale sont fort probablement tous des facteurs qui ont amené un jeune de 17 ans à commettre l'impossible et à tirer sur d'innocentes personnes dans une école de la petite communauté albertaine.
En outre, il semble que le problème de l'accessibilité des armes à feu pour les mineurs soit aussi un élément important. Je suis allée à plusieurs reprises dans le Nord canadien au cours de ma carrière, tant à titre de députée que de sénatrice, afin de militer pour la chasse au phoque. Je peux vous dire que la très grande majorité des Autochtones utilisent leurs armes de chasse à bon escient. J'en suis arrivée à formuler l'adage suivant : dans le Nord, on utilise l'arme à feu en tant qu'outil servant à la chasse de subsistance, alors que, dans le Sud, on semble de plus en plus fanatiser et idolâtrer les armes au lieu de s'en servir pour le plaisir de consommer du chevreuil ou une autre espèce animale de venaison.
Cette conception des choses m'est venue à l'esprit lorsqu'un journaliste m'a demandé de commenter la montée en flèche de la popularité des armes à feu restreintes, qui sont essentiellement des armes à feu semi-automatiques à percussion centrale et des armes de poing.
Honorables collègues, les chiffres sont astronomiques. En cinq ans, le nombre de détenteurs de permis de possession et d'acquisition d'armes à feu restreintes a bondi de 75 p. 100 au Canada. Ces armes ont été conçues strictement pour des fonctions militaires. Bien que je puisse comprendre qu'elles puissent être utilisées pour le tir sportif, elles ne remplissent tout simplement aucune utilité dans le cadre des activités de chasse.
Je tiens à souligner que mon projet de loi ne va pas à l'encontre des honnêtes citoyens qui respectent la loi. Au contraire, l'objectif principal de ce projet de loi est d'encourager la pratique de la chasse ou du tir sportif au Canada, tout en assurant la sécurité des Canadiennes et des Canadiens. Son objectif regroupe trois grands thèmes : premièrement, garantir la sécurité des Canadiennes et des Canadiens; deuxièmement, garantir aux passionnés de chasse et de tir sportif la possibilité d'effectuer leurs activités de façon sécuritaire; et troisièmement, retirer de nos maisons toute arme à feu qui n'est pas utilisée pour la chasse.
Honorables sénateurs, l'ancien gouvernement conservateur a complètement transformé notre régime des armes à feu. Sous le règne conservateur, le Canada a été l'un des rares pays à rétrograder ses politiques sur le contrôle des armes à feu. Après la tuerie du Collège Dawson en 2006 — lors de laquelle une jeune femme a été tuée et 19 autres personnes ont été blessées par balle — et celle de Moncton en 2014 — où 3 agents de police de la GRC ont été tués et 2 autres ont été blessés —, l'ancien gouvernement Harper a entériné le projet de loi C-19, qui prévoyait l'abolition du registre des armes d'épaule, et le projet de loi C-42, que ses auteurs ont vanté comme étant un texte de loi qui suivait le gros bon sens.
Tout cela pour dire qu'un gouvernement responsable n'aurait certainement pas agi de la sorte. Rappelez-vous les événements de Polytechnique en 1989, motivés par la misogynie de Marc Lépine. Personne ne peut oublier cette sordide soirée du 6 décembre 1989, lors de laquelle 14 jeunes personnes ont été froidement assassinées simplement parce qu'elles étaient des femmes.
Le gouvernement Chrétien a pris les choses en main et a fait preuve de leadership en adoptant, en 1995, le projet de loi C-68 qui deviendra la Loi sur les armes. C'est grâce à lui que nous pouvons nous vanter d'avoir un taux de mortalité par arme à feu aussi bas, qui est ironiquement utilisé aujourd'hui comme argument par le lobby des armes à feu. Si, en effet, nous avons autant de chances de mourir par une arme à feu que de mourir frappé par la foudre, c'est grâce aux politiques de contrôle des armes à feu d'un ancien gouvernement libéral.
Nous ne pouvons pas jouer à l'autruche face aux événements quasi quotidiens qui surviennent chez nos voisins du Sud qui, eux, ne bénéficient pas d'un régime visant à assurer la sécurité de leur population, tel celui du Canada. Les statistiques sont éloquentes : plus de 30 000 morts par balle aux États-Unis en 2011, comparativement à 698 au Canada. Durant les deux mandats du président Obama, il y a eu 9 tueries de masse qui ont provoqué la mort gratuite de 119 innocentes victimes qui se trouvaient simplement au mauvais endroit, au mauvais moment.
Le cri d'alarme du président Obama en janvier dernier a provoqué des échos ici, au Canada, et j'ai pu le constater moi-même à la télévision. Personne ne peut rester indifférent à son vibrant plaidoyer visant à changer l'esprit de ses concitoyens au sujet des armes à feu. À l'instar du premier ministre Chrétien, le président Obama est intervenu. Dans le cadre juridique limité de ses fonctions et de la majorité conservatrice au Congrès, il a réussi à mettre en œuvre le Common Sense Gun Safety Reform.
Honorables sénateurs, les différentes tueries survenues aux États- Unis m'amènent à vous préciser un élément fondamental qui distingue le régime des armes à feu du Canada de celui des États- Unis : la Constitution canadienne ne prévoit aucun droit de posséder des armes ou encore de porter une arme à feu au Canada.
De la même façon, les restaurants doivent payer des frais aux différents organismes municipaux et provinciaux pour pouvoir vendre et servir des produits alcoolisés à leurs clients, car il s'agit d'un privilège que de faire du commerce avec des produits alcoolisés dans les villes canadiennes qui y sont autorisées par les gouvernements. En outre, combien d'autres activités doivent être encadrées.
(1640)
Voici donc les sept mesures audacieuses et progressives — j'ose espérer que vous serez du même avis — que je souhaite mettre en place grâce à cette loi.
Premièrement, le projet de loi réinvente le régime actuel des armes à feu en prévoyant que toutes les armes à feu au Canada soient prohibées des maisons d'habitation, à l'exception des armes à feu consacrées à la chasse et des armes de collection, moyennant un régime spécifique pour ces dernières.
Deuxièmement, on redéfinit deux des trois classes actuelles d'armes à feu en créant la catégorie des armes à feu de chasse et la catégorie des armes à feu à autorisation localisée. Cette dernière inclut la plupart des armes à feu restreintes sous l'ancien régime.
Troisièmement, on permet la possession des armes à feu de chasse dans nos maisons et on limite l'utilisation et l'entreposage des armes à feu à autorisation localisée dans les clubs de tir.
Quatrièmement, on limite le transport des armes à feu à autorisation localisée à des transporteurs spécialisés — une forme de transport qui relève de personnes qui n'ont aucun intérêt, sinon celui de faire du transport sécuritaire, semblable à celui de la Brink's —, ce qui renforce le contrôle de la circulation des armes à feu.
Cinquièmement, le projet de loi remplace la terminologie du « certificat d'enregistrement » par celle du « certificat d'immatriculation ». Je tiens à souligner que le projet de loi ne remet pas en place le registre canadien des armes à feu sans restriction. C'est dans cette optique que nous voulons remplacer le terme « enregistrement » par celui d'« immatriculation », soit un terme plus approprié.
Sixièmement, le projet de loi renforce le rôle de la Gendarmerie royale du Canada et du commissaire aux armes à feu de façon statutaire.
Septièmement, le projet de loi renverse toutes les dispositions du projet de loi C-42, exception faite des interdictions de recevoir un permis de possession et d'acquisition à la suite d'un verdict de culpabilité en matière de violence conjugale.
Nous allons maintenant voir en détail ces sept mesures.
Pour commencer, je crois que nous devons renverser le régime actuel en autorisant exclusivement les armes à feu de chasse dans les maisons. Il ne s'agit pas d'un secret de Polichinelle, le lobby des armes à feu canadien s'est énormément renforcé sous le règne du gouvernement Harper. L'Association canadienne des armes à feu regroupe actuellement plus de 75 000 membres au pays. Je dois préciser qu'ils m'envoient des courriels tous les jours. Depuis plusieurs années, ce groupe ne cesse de faire pression à Ottawa. Son message est simpliste : il soutient que les armes ne tuent pas, car ce sont les hommes qui tuent les hommes.
Je ne souscris pas à cette vision un peu étriquée, car c'est par les armes à feu que les hommes se tuent. Je suis persuadée que tous les honorables membres de cette Chambre se souviennent de l'horrible évènement du 14 décembre 2012, le jour où Adam Lanza, un jeune autiste de 20 ans, a commis l'inimaginable en ouvrant le feu dans une école primaire avec une arme d'assaut semi-automatique. À la suite de l'hécatombe, 20 enfants âgés de 6 à 7 ans et 6 adultes responsables de leur éducation ont été lâchement assassinés.
Bien que le geste d'Adam Lanza soit impensable et tout à fait incompréhensible, nous ne pouvons lui jeter tout le blâme. Ce jeune homme souffrait de maladie mentale et de troubles sociaux. Il n'aurait jamais dû avoir accès à ce type d'arme. Le blâme devrait se porter sur le lobby des armes, qui ne cesse de promouvoir la violence et le non-sens de l'armement civil.
Lorsque de tels évènements surviennent, on se concentre trop souvent sur l'individu qui a commis la tuerie, en omettent le rouage et la rhétorique du lobby des armes. Dans une société libre et démocratique comme la nôtre, on ne peut se contenter de gérer seulement les symptômes : il faut s'attaquer aux causes.
Ici, au Canada, on se rappelle les évènements tragiques de 2014, lorsque Justin Bourque, dans une folie meurtrière, a ouvert le feu sur des policiers de la GRC. On se souvient que trois policiers sont décédés, et que deux ont été gravement blessés à la suite de cette fusillade. À l'instar d'Adam Lanza, M. Bourque était un véritable fanatique des armes à feu. Contrairement à la grande majorité des criminels qui utilisent les armes à feu pour commettre des crimes, M. Bourque avait dûment enregistré toutes ses armes, et il possédait tous les permis requis.
Le changement proposé au régime actuel, qui autoriserait exclusivement les armes à feu de chasse dans les maisons, est une forte réponse à l'endroit des fausses prétentions du lobby des armes à feu. Contrairement à eux, je n'ai pas d'armes à vendre, mais j'ai bel et bien la sécurité des Canadiennes et des Canadiens à protéger.
La sécurité de nos compatriotes m'amène à aborder le deuxième point de mon projet de loi : la redéfinition de deux des trois classes actuelles d'armes à feu. Ce changement majeur en matière de définition favorise une meilleure distinction entre les armes à feu qui peuvent raisonnablement être utilisées pour la chasse — donc, qui peuvent être conservées dans une maison selon les règlements qui les entourent — et les armes à feu que les tireurs sportifs manient dans des clubs de tir et qu'ils devront entreposer dans ces mêmes clubs.
Alors, quelles sont ces définitions? La catégorie des armes à feu de chasse regroupe toute arme à feu pourvue d'un canon d'une longueur de plus de 470 millimètres, à âme lisse ou striée — ne soyez pas inquiets, je n'ai rien inventé —, soit, respectivement, les fusils et les carabines. Toutes les armes à feu semi-automatiques sont exclues de la définition d'armes à feu de chasse, à l'exception des carabines semi-automatiques de calibre .22 à percussion annulaire.
Par ailleurs, plusieurs personnes m'ont posé la question à savoir si les fusils de chasse semi-automatiques, communément appelés shot guns, sont inclus dans les définitions d'armes à feu de chasse. La réponse est oui.
Cette nouvelle définition de l'arme à feu de chasse est basée notamment sur les indications des chasseurs et d'un instructeur du Cours canadien de sécurité dans le maniement des armes à feu. En effet, dans le cadre de l'étude du présent projet de loi, les instructeurs m'avaient fortement déconseillé l'utilisation d'armes à feu semi-automatiques pour la chasse, en raison des nombreux accidents qu'elles provoquent.
Le projet de loi S-223 abroge ainsi le privilège des titulaires de permis de possession et d'acquisition de garder dans leur maison d'habitation toute carabine semi-automatique à percussion centrale. Pourtant, le projet de loi S-223 ne prohibe pas le droit d'en faire usage. Ceux et celles qui ont la passion du maniement de ces armes et qui souhaitent continuer à vivre leur passion peuvent le faire dans les centres de tir, où ces armes seraient entreposées. Je veux ainsi, dans le cadre de mon projet de loi, favoriser la pratique et le commerce sécuritaires du tir sportif.
Je ne suis donc pas contre les armes à feu, mais je suis favorable à ce qu'on les utilise de façon sécuritaire.
Ainsi, avec le projet de loi S-223, tout titulaire d'un permis de possession et d'acquisition aura la possibilité d'acquérir et de posséder une carabine à percussion centrale et de s'exercer au tir dans un club réservé à cet effet. Lorsque ce titulaire de permis aura terminé sa session de tir, il devra entreposer son arme à l'intérieur du club de tir. La distinction entre les carabines semi-automatiques de calibre .22 à percussion annulaire et les carabines semi-automatiques à percussion centrale est un élément essentiel de mon projet de loi.
Par ailleurs — je vous invite à prendre note de ceci —, le Royaume-Uni a adopté la même distinction après les terribles évènements de Hungerford. En 1987, un tireur fou nommé Michael Ryan massacre 16 personnes, y compris sa propre mère. Équipé d'une arme de poing et de deux carabines semi-automatiques, soit une arme à feu appelée Type 56 Assault Rifle — variante chinoise du fusil d'assaut AK-47 —, et d'un M1 Carabine, Ryan a également blessé 14 autres personnes avant de se suicider. Selon les autorités, Ryan aurait commis sa folie meurtrière sans aucun motif. Autre fait important, Ryan possédait toutes ces armes à feu conformément aux lois britanniques de l'époque.
L'année suivante, la première ministre Margaret Thatcher a promptement répondu à cette horrible tragédie. Le gouvernement conservateur de la dame de fer a effectivement banni complètement les armes à feu semi-automatiques à percussion centrale du Royaume-Uni et restreint l'utilisation des fusils de chasse ayant une capacité maximale de trois cartouches. Les seules qui sont demeurées légales au Royaume-Uni sont les armes à feu semi- automatiques à percussion annulaire de calibre .22.
Les politiques britanniques strictes en matière d'armes à feu ne s'arrêtent toutefois pas en 1988, car, en 1996, soit neuf ans après la tragédie de Hungerford, la Grande-Bretagne se retrouve encore une fois en état de choc à la suite d'une fusillade meurtrière. Un individu nommé Thomas Hamilton est alors entré dans une école primaire de Dunblane, en Écosse, et a tué 16 enfants âgés de 4 à 5 ans, ainsi que leur professeur d'éducation physique, avant de se suicider. Hamilton possédait légalement deux carabines de chasse et une arme de poing. Le massacre a été commis avec l'arme de poing qui était dûment enregistrée.
(1650)
En réponse à ce massacre, le gouvernement britannique a demandé à lord William Douglas Cullen de présider une commission royale afin d'enquêter sur les circonstances qui ont amené Hamilton à commettre un tel geste, et surtout à faire des recommandations pour empêcher une nouvelle tragédie semblable.
Dans son rapport, lord Cullen suggère que l'État effectue un nouveau resserrement du contrôle des armes à feu. Le gouvernement britannique a répondu au rapport Cullen en adoptant la Firearms (Amendment) Act 1997. C'est ainsi qu'il est maintenant interdit à tout civil de posséder et d'entreposer dans une maison d'habitation la plupart des armes de poing en Grande-Bretagne.
Les résultats de ces politiques de contrôle des armes à feu sont impressionnants. En 2011, seulement 38 Britanniques ont été tués par une arme à feu, alors que, pour la même année, avec une population au moins deux fois moindre, 153 Canadiens ont été assassinés de la même façon. Selon d'autres données pour l'année 2011, le taux d'homicide britannique serait plus faible qu'au Canada : 0,06 sur une population de 100 000 habitants contre 0,45 sur 100 000 habitants au Canada. Toutes ces mesures mises en œuvre par le Royaume-Uni en 1988 et en 1997 prouvent encore une fois qu'un meilleur contrôle des armes et un retrait de celles-ci des foyers contribuent à faire diminuer le nombre d'homicides par arme à feu.
Le projet de loi S-223 s'inspire d'un modèle qui a fait ses preuves. Je veux bien entendre toutes les critiques contre mon projet de loi et recevoir tous les messages Twitter. Cependant, les critiques qui consistent à attaquer un modèle qui fonctionne pour se rapprocher du modèle américain, qui est manifestement une faillite sécuritaire, n'ont aucun sens, ou plutôt, si elles ont un sens, elles servent les intérêts d'une industrie et certainement pas celles des Américains.
Le projet de loi S-223 remplace l'actuelle catégorie des armes à feu restreintes par la catégorie des armes à feu à autorisation localisée. Une arme à feu à autorisation localisée regroupe toute arme à feu qui est pourvue d'un canon qui ne dépasse pas 470 millimètres, comme armes de poing, ainsi que les armes à feu semi-automatiques à percussion centrale, nonobstant la longueur du canon si elles ne sont pas prohibées.
Comme le terme le laisse entendre, un titulaire de permis de possession et d'acquisition d'une arme à feu de telle catégorie ne pourra qu'utiliser et entreposer ces armes dans les clubs de tir. C'est le troisième point de mon projet de loi. Je me suis assurée que la traduction anglaise des termes « circumscribed firearms » fasse également référence à cette notion de localisation.
Honorables sénateurs, ce n'est pas sans raison que mon projet de loi range ces armes dans la catégorie « à autorisation localisée ». Ce sont de telles armes qui ont été impliquées à répétition dans des tueries au Canada. Je pense à Marc Lépine, à Kimveer Gill et à Justin Bourque. Ils avaient tous un élément en commun au niveau de leur arsenal. En effet, ils s'étaient conformés à la Loi sur les armes à feu et avaient tous des armes d'épaule semi-automatiques tirant des munitions à percussion centrale. Ces armes sont extrêmement dangereuses et ne remplissent aucun rôle utilitaire en matière de chasse. Elles n'ont donc pas leur place dans une maison.
C'est aussi le sens de la déclaration de Me David Lutz, l'avocat de Justin Bourque, qui a communiqué avec moi. Dans les minutes qui ont suivi le prononcé de la peine de son client, Me Lutz a lancé un vibrant plaidoyer contre les armes à feu à la sortie du Palais de justice de Moncton, le 31 octobre 2014. Il a mentionné ce qui suit à la CBC, et je cite :
Trois policiers sont morts à Moncton et un autre à Ottawa parce que les mauvaises personnes avaient des armes à feu.
Il poursuit en affirmant ce qui suit, et je cite :
Aucun chasseur n'a besoin d'une arme comme celle qu'a utilisée Bourque. Aucun.
Quatrièmement, le projet de loi S-223 vient renforcer le contrôle de la circulation de ces armes semi-automatiques. Ainsi, tout propriétaire d'une telle arme qui aurait besoin de la déplacer, notamment pour l'entreposer dans un autre centre de tir ou participer à une compétition, devra faire appel à un service extérieur, un transporteur spécialisé.
Suivant la présentation du précédent projet de loi, j'ai reçu plusieurs plaintes selon lesquelles l'entreposage des armes à feu à autorisation localisée impliquerait des coûts faramineux. Je leur réponds que ce n'est pas au législateur de s'adapter aux clubs de tir et au lobby des armes. C'est à ces commerces et groupes de pression de s'adapter à nos mesures sur les armes à feu, d'abord, pour la sécurité des Canadiennes et des Canadiens, et ensuite, pour favoriser la pratique du sport.
Le personnel de mon bureau et moi avons consulté plusieurs experts, y compris d'anciens policiers, qui ont tous affirmé que les carabines semi-automatiques à percussion centrale sont des armes à feu dangereuses comparativement aux autres mécanismes. Ils ont insisté sur le fait qu'il n'y a aucune nécessité de garder ce type d'arme dans une maison d'habitation. Le modèle américain le prouve : plus il y a de circulation d'armes à feu dans un pays, plus le taux d'homicide est élevé. Or, le projet de loi S-223 vise à renforcer la sécurité des Canadiennes et des Canadiens.
Mon cinquième point concerne le remplacement du certificat d'enregistrement par un certificat d'immatriculation. Selon moi, le choix des mots est important. Le projet de loi S-223 prend acte de la disparition du registre canadien des armes à feu, et il ne reviendra pas sur ce point. Je déplore toutefois la disparition de ce registre — et je souligne que le Québec est en train de se doter d'un registre —, une autre mesure des conservateurs qui visait à satisfaire le lobby des armes à feu. Cependant, par souci d'efficacité, mon projet de loi ne reviendra pas sur cette mesure afin de ne pas dévier du débat qu'il propose.
Le terme « certificat d'enregistrement » rappelle l'idée d'un registre; le terme « immatriculation » évoque le privilège. Pour les mêmes raisons, en anglais, c'est l'expression « inscription certificate » qui vient remplacer l'expression connotée « registration certificate ». Personne ne s'oppose à faire immatriculer son automobile, et parfois son vélo, à des fins administratives. Je souhaite ainsi que l'on immatricule son arme à feu à autorisation localisée dans le même esprit.
En sixième lieu, le projet de loi S-223 renforce les rôles de la Gendarmerie royale du Canada et du commissaire aux armes à feu en précisant leurs responsabilités dans le processus de classification des armes à feu, ce qui est inexistant dans la loi actuelle. Pour plus de précision, sous le régime du projet de loi S-223, et contrairement au projet de loi C-42, le gouverneur en conseil devra s'appuyer sur les recommandations du commissaire aux armes à feu lorsqu'il utilisera son pouvoir discrétionnaire pour désigner une arme à feu de chasse par règlement. En outre, le gouverneur en conseil ne disposera pas de pouvoirs discrétionnaires pour désigner une arme à feu autre qu'une arme à feu de chasse, et cela contrairement à la loi C-42. Il s'agit d'un ajout important à la loi actuelle, puisque le rôle de ces acteurs n'est pas clairement expliqué dans notre régime lorsque vient le temps de classifier une arme.
De plus, le projet de loi S-223, contrairement à la loi C-42, ne permet pas au gouvernement de décider de manière unilatérale la « déclassification » d'une arme à feu et ne permet pas de « déjuger » la GRC, c'est-à-dire de lui enlever le pouvoir de mesurer la dangerosité. Le dossier traité par l'ancien ministre de la Sécurité publique Blaney dans le dossier des Swiss Arms en est un bel exemple.
En 2014, à la suite de plaintes selon lesquelles ces armes à feu semi-automatiques pouvaient être facilement converties en armes à feu automatiques, la Gendarmerie royale du Canada a mené une enquête. Au terme de cette enquête, la GRC a prohibé les Swiss Arms. Furieux, plusieurs lobbyistes d'armes à feu ont fait pression sur le gouvernement conservateur pour qu'il infirme la décision de la GRC.
Comme la loi de l'époque ne permettait pas de « déclassifier » une arme à feu, le ministre Blaney a pris, le 13 mars 2014, un décret d'amnistie de deux ans afin de protéger les propriétaires de ces armes contre les dures peines que son propre gouvernement avait prévues dans le cadre du projet de loi C-10 en 2012, ce qui paraissait absurde. Donc, même le ministre qui avait légiféré sur ce dossier est revenu sur son propre projet de loi. Enfin, le ministre Blaney a annoncé ce qui suit, dans un communiqué de presse daté du 28 février 2014, et je cite :
J'ai été troublé d'apprendre que des bureaucrates non élus ont décidé d'interdire certaines armes importées de la Suisse.
Il parlait de la GRC. Il a affirmé ensuite qu'il prendrait des mesures pour assurer que cela ne se reproduise pas.
Je traduis : le ministre de l'époque n'aimait pas que ceux qui sont responsables de la sécurité des Canadiens prennent des mesures contraires aux intérêts des groupes de pression des armes à feu. Le ministre a donc proposé des mesures dans le cadre du projet de loi C-42, qui ont pris la forme d'un pouvoir discrétionnaire confié au Cabinet pour « déclassifier » des armes à feu, même si cela s'opposait aux recommandations de la GRC.
Mon septième et dernier point est le suivant : mon projet de loi abroge toutes les modifications que la loi C-42 a apportées à notre régime canadien des armes à feu, à l'exception du cas où une personne coupable de violence conjugale ne pourra jamais plus recevoir de permis de possession et d'acquisition d'armes à feu.
(1700)
Je terminerai l'explication du texte de mon projet de loi qui, soit dit en passant, est très volumineux, en rappelant son titre, Loi renforçant la sécurité des Canadiens et promouvant la chasse et le tir sportif. Je ne reviendrai pas sur la question de la sécurité. J'ai suffisamment expliqué en quoi les Canadiens bénéficieraient réellement de ce projet de loi à ce chapitre. Cependant qu'en est-il de la promotion de la chasse et du tir sportif?
Le projet de loi S-223 redéfinit les armes de chasse au sens strict et fait de ces armes les seules qui aient l'autorisation de se trouver entre les mains des usagers sur le territoire canadien. Il donne toute sa légitimité à cette activité en lui accordant un privilège que nulle autre arme à feu ne possède. Il ne rétablit pas le registre des armes à feu. Autrement dit, c'est un projet de loi qui est favorable à la chasse et aux chasseurs, et je m'en réjouis. En outre, je suis sûre que si mon père était encore parmi nous, il en serait heureux.
La définition restrictive de l'arme de chasse retenue dans mon projet de loi est basée sur les indications des chasseurs et d'un instructeur du Cours canadien de sécurité dans le maniement des armes à feu, et sur le modèle britannique. Ce projet de loi fait du chasseur le détenteur d'une arme à feu qui est réellement consacrée à la chasse. L'image du chasseur devrait donc en ressortir améliorée dans l'opinion publique.
Quant aux clubs de tir, la nouvelle classification énoncée dans mon projet de loi, notamment la nouvelle catégorie des armes à feu à autorisation localisée, permet de développer un marché tout en assurant la sécurité. En effet, le fait de contraindre l'usage des armes à feu semi-automatiques d'autres calibres que le calibre .22 aux clubs de tir et d'en obliger l'entreposage accroît de facto l'activité des clubs de tir qui, moyennant l'aménagement des lieux, pourront même devenir des armureries et pourront s'associer à elles.
Pour conclure, je tiens à remercier l'équipe d'avocats, de juristes, de légistes et de rédacteurs du Sénat qui ont travaillé très fort au cours de l'été dernier pour faire de ce projet de loi une réalité. Il n'a pas été conçu en quelques minutes, je peux vous l'assurer. Ce projet de loi respecte les amoureux de la chasse et les passionnés du tir tout en apportant de réels bienfaits à la sécurité des Canadiens.
Comme je l'ai déclaré au tout début de mon discours, j'ai toujours été une personne indépendante. J'ai toujours défendu mes idées et travaillé au service des Canadiens et des Canadiennes. Je viens d'une famille de chasseurs qui a habité une petite ville au nord de Montréal, qui a toujours eu du plaisir à consommer du gibier toute l'année, mais je crois cependant aux politiques sur le contrôle des armes à feu.
L'élaboration de ce projet de loi s'est effectuée en l'absence de dogmatisme et d'idéologie. Je me suis fondée sur des faits, des chiffres et des résultats documentés tirés des politiques canadiennes, américaines et britanniques. J'ai également mis sur pied une base de travail pour tout gouvernement ou toute organisation non gouvernementale qui voudra faire un pied de nez au lobby des armes, qui est très actif, mais qui, à mon avis, n'a pas à cœur la sécurité des Canadiens et Canadiennes.
(Sur la motion de la sénatrice Cools, le débat est ajourné.)
[Traduction]
Projet de loi canadienne sur le paiement sans délai
Deuxième lecture—Ajournement du débat
L'honorable Donald Neil Plett propose que le projet de loi S-224, Loi sur les paiements effectués dans le cadre de contrats de construction, soit lu pour la deuxième fois.
— Honorables sénateurs, je suis fier de prendre la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi S-224, Loi canadienne sur le paiement sans délai. Au Canada, les projets de construction fédéraux connaissent aujourd'hui deux problèmes majeurs. Premièrement, les autorités fédérales mettent trop de temps à traiter les factures valides relatives à des travaux de construction en l'absence de différends quant au respect des conditions du contrat. Deuxièmement, il y a des retards dans la remise des paiements aux sous-traitants, encore une fois en l'absence de différends et en présence de factures valides. Ces retards ne sont pas occasionnels. Ils sont systématiques.
Le problème ne se limite pas au Canada. Toutefois, les autres administrations ont adopté des mesures législatives pour combattre les retards systématiques dans la remise des paiements aux sous- traitants. Le gouvernement fédéral américain ainsi que tous les États des États-Unis, à l'exception du New Hampshire, ont adopté des lois sur le paiement sans délai dans le secteur public. Le Royaume- Uni, l'Irlande, l'Australie et la Nouvelle-Zélande ont également des lois de ce genre. Le Canada est l'exception dans ce domaine.
Dans le secteur du bâtiment, les paiements en retard sont systématiques surtout à cause de la pyramide de la construction. La structure complexe des contrats et des ententes de sous-traitance distingue l'industrie de la construction de la plupart des autres secteurs. Pour les travaux fédéraux, l'autorité fédérale se situe au sommet de la pyramide. Elle confie les travaux de construction à un entrepreneur général ou à un entrepreneur spécialisé, qui devient l'entrepreneur principal, c'est-à-dire la partie qui signe un contrat avec l'autorité fédérale pour la réalisation du projet conformément aux plans et devis.
Pour la majorité des projets, l'entrepreneur principal confie différents éléments du projet en sous-traitance à des entrepreneurs spécialisés, qui exécutent souvent 80 p. 100 des travaux, sinon plus. De plus, dans la plupart des projets, des entrepreneurs spécialisés prennent en sous-traitance du travail d'un entrepreneur général ou d'autres entrepreneurs spécialisés.
Comme c'est le cas pour de nombreuses petites et moyennes entreprises, l'accès d'un entrepreneur spécialisé au crédit bancaire est souvent limité. Il dépend donc dans une très grande mesure de ses propres liquidités. Cela signifie que ses recettes sont soumises à des retards imprévisibles sans qu'il dispose lui-même d'une marge de manœuvre dans ses propres paiements. Les versements à effectuer à l'Agence du revenu du Canada et aux commissions des accidents du travail doivent être faits sans faute tous les mois. Les salaires sont payés toutes les semaines. Les factures relatives aux matériaux et à la location d'équipement doivent être acquittées dans les 15 à 30 jours.
Chers collègues, cette situation constitue la cause la plus fréquente des faillites parmi les entrepreneurs spécialisés du Canada. Cela se produit partout dans le pays, honorables sénateurs. À mon avis, l'aspect le plus inacceptable est que cela se produit aussi sur les terres publiques et dans le cadre de projets fédéraux. Nous avons le pouvoir d'intervenir à cet égard.
Le projet de loi réglerait le problème dans le cas des projets de construction du gouvernement fédéral. Les provinces font des progrès dans ce domaine. La Commission Charbonneau a recommandé l'adoption d'une loi sur les paiements sans délai au Québec. Le rapport Reynolds, qui est attendu dans les prochaines semaines, recommandera probablement aussi l'adoption de mesures semblables en Ontario.
Lorsque les États-Unis ont adopté une loi au niveau fédéral, les États n'ont pas tardé à emboîter le pas. J'espère que l'adoption de ce projet de loi aura les mêmes effets sur les provinces canadiennes. Ainsi, tous les entrepreneurs en construction du Canada seront payés à temps une fois qu'ils auront terminé le travail dont ils ont été chargés.
Le motif fondamental des paiements en retard réside dans le déséquilibre des pouvoirs entre les entrepreneurs et leurs sous- traitants. Les entrepreneurs obligent les sous-traitants à accepter des paiements tardifs comme conséquence normale à assumer pour rester en affaires. Ils peuvent agir ainsi parce qu'ils contrôlent le flux des travaux. La plupart des entrepreneurs spécialisés dépendent pour survivre des contrats de sous-traitance qu'ils obtiennent des entrepreneurs généraux ou d'autres entrepreneurs spécialisés. Aucun entrepreneur spécialisé ne peut se permettre d'être radié de la liste des soumissionnaires.
C'est là une tendance inquiétante qui se manifeste dans le secteur de la construction et qui met au chômage des travailleurs Canadiens. Dans ce secteur, la durée moyenne des comptes débiteurs est sensiblement plus élevée que dans les autres industries et ne cesse pas de monter. En 2007, cette durée était de 62,8 jours, soit près de 9 semaines. En 2012, elle était passée à 71,1 jours, soit plus de 10 semaines.
La plupart des entrepreneurs spécialisés sont de petits employeurs qui ont un effectif de moins de 20 travailleurs. Ils engagent souvent une importante partie de leurs ressources dans un projet unique. Dans ces conditions, de graves conséquences peuvent découler d'une hausse du risque de flux de trésorerie. Un retard de trois ou quatre mois dans la réception d'un paiement, au moment où un projet absorbe la quasi-totalité des ressources d'affaires de l'entrepreneur spécialisé, menace sérieusement sa survie.
(1710)
Les conséquences des retards sont évidentes dans le cas de ces entrepreneurs. Toutefois, les conséquences négatives pour le gouvernement fédéral et l'ensemble de l'économie sont très importantes. L'emploi baisse parce que les dépenses d'exploitation qu'un entrepreneur spécialisé peut assumer quand il dispose d'un capital donné diminuent par suite de l'augmentation du risque de non-paiement.
De plus, certains entrepreneurs spécialisés se débarrassent du risque que représente leur masse salariale en augmentant le nombre de travailleurs autonomes dans leur effectif. Cela réduit les déductions à la source et augmente la probabilité que les gains ne soient pas entièrement déclarés à l'Agence du revenu du Canada.
Il faut dire en outre que l'augmentation du risque de non- paiement a des effets désastreux sur l'embauche d'apprentis parce que les entrepreneurs spécialisés sont moins disposés à offrir les emplois à long terme nécessaires pour récupérer l'investissement fait dans la formation d'un apprenti.
Les coûts de construction du gouvernement fédéral augmentent parce que les entrepreneurs spécialisés haussent leurs prix pour tenir compte du risque de paiements tardifs des entrepreneurs généraux.
La généralisation des paiements en retard encourage d'autres à adopter la même attitude opportuniste pour mieux soutenir la concurrence. Cela mène à une érosion des normes et compromet l'équité des règles du jeu qui est essentielle à un marché sain.
Travaux publics a reconnu qu'il s'agit bien d'une importante préoccupation et a eu recours à différentes mesures administratives pour remédier à cette situation. Malheureusement, ces mesures n'ont pas abouti parce qu'elles ne s'attaquaient pas à la racine du problème.
Par exemple, les Travaux publics exigent des entrepreneurs qu'ils présentent avec chaque facture une déclaration statutaire affirmant qu'ils se sont acquittés de toutes leurs obligations de paiement. Cette mesure comporte deux difficultés. Premièrement, les déclarations étant rétrospectives, elles n'empêchent pas les retards futurs. Deuxièmement, si un paiement est retenu à cause d'un différend touchant l'exécution du travail, la déclaration statutaire peut quand même être présentée parce qu'en principe, le paiement retenu ne constitue pas une obligation tant que le différend n'a pas été réglé.
La Loi canadienne sur le paiement sans délai prévoit des mesures qui mettront finalement un terme à ce problème systémique. Le projet de loi impose aux institutions gouvernementales de verser des paiements proportionnels à l'entrepreneur en construction sur une base mensuelle ou à des intervalles plus courts, selon les dispositions du contrat.
De même, l'entrepreneur doit payer le sous-traitant, qui a l'obligation de payer lui-même ses propres sous-traitants dans les 20 jours suivant soit le dernier jour de la période de paiement soit, si elle est postérieure, la date de réception de la demande de paiement.
Le projet de loi prévoit aussi des paiements d'étape. Si un entrepreneur général signe avec le gouvernement fédéral un contrat qui autorise des paiements d'étape plutôt que des paiements proportionnels, l'entrepreneur doit informer par écrit tous les sous-traitants de tout paiement d'étape reçu.
Le droit pour l'entrepreneur qui n'a pas été payé de suspendre l'exécution des travaux constitue la plus importante disposition du projet de loi. L'absence de cette disposition m'a été signalée à maintes reprises par les petits entrepreneurs spécialisés. C'est là un important recours pour ces entrepreneurs s'ils ne sont pas payés. Je suis enchanté de voir ce droit explicitement reconnu dans le projet de loi, en plus du droit de mettre fin à un contrat et celui d'exiger des intérêts sur les paiements en retard.
Le projet de loi prévoit également un processus de règlement des différends et un droit d'accès à l'information pour les entrepreneurs et sous-traitants qui y participent.
La semaine dernière, j'ai été ravi d'entendre Patrick Brown, chef de l'opposition à l'Assemblée législative de l'Ontario, appuyer ce projet de loi en disant ceci :
Tout travail mérite salaire. C'est pour cette simple raison que j'appuie sans réserve le projet de loi sur le paiement sans délai du sénateur Plett.
Je réclame depuis des années un paiement sans délai à l'échelle tant fédérale que provinciale, et je suis ravi de voir le Parlement du Canada être saisi d'un autre projet de loi de cette nature.
Quelque 400 000 Ontariens gagnent leur vie dans l'industrie de la construction. Or, bon nombre des petites et moyennes entreprises familiales qui les emploient n'arrivent pas à se faire payer pendant des mois après la fin d'un projet de construction.
J'appuie sans réserve le projet de loi du sénateur Plett, et j'ai hâte de collaborer avec l'industrie, les travailleurs, les petites et moyennes entreprises et les autres intervenants concernés afin de poursuivre les efforts pour lutter contre ce problème à l'échelle provinciale.
Je remercie Patrick de son appui, et j'ai hâte de voir progresser cette initiative à l'Assemblée législative de l'Ontario.
Honorables collègues, c'est une question non partisane. Les gens devraient être payés en temps opportun pour leur travail. C'est le plus grand problème auquel l'industrie de la construction doit faire face au Canada, et nous avons enfin l'occasion de le résoudre. Portons-nous à la défense des propriétaires de petite entreprise et des Canadiens qui travaillent dans l'industrie de la construction.
Je compte sur votre appui, et j'espère sincèrement que vous vous joindrez à moi pour adopter ce projet de loi afin que nous puissions l'étudier en détail au comité.
Je remercie les entrepreneurs spécialisés d'être ici aujourd'hui. Je vous invite à vous joindre à moi pour les rencontrer dans la salle 160-S, de 17 h 30 à 19 h 30. Des hors-d'œuvre et des rafraîchissements seront servis. Merci beaucoup.
L'honorable Céline Hervieux-Payette : J'ai seulement quelques questions d'ordre technique.
Sénateur Plett, depuis combien d'années des entrepreneurs spécialisés se présentent-ils à votre bureau pour soulever la question des paiements en retard? Ils viennent me voir aussi, ainsi que d'autres sénateurs. Depuis combien d'années êtes-vous au courant de ce problème?
Le sénateur Plett : Je vous remercie de votre question. En effet, je travaille dans le secteur de la construction depuis que j'ai pris la relève de mon père en 1987, puis ce sont mes fils qui ont pris la direction de l'entreprise en 2007. Je suis un petit entrepreneur spécialisé et je l'ai été pendant presque toute ma vie. Au fil des ans, j'ai discuté avec divers entrepreneurs spécialisés, peu importe où je me trouvais, et j'ai éprouvé les mêmes problèmes qu'eux. Je suis sénateur depuis près de sept ans, et c'est depuis ce temps que des entrepreneurs spécialisés s'adressent à moi, au Sénat.
La sénatrice Hervieux-Payette : Comme vous avez fait partie du caucus du gouvernement majoritaire, avez-vous fait cette recommandation à votre chef ou est-ce que l'équilibre budgétaire a pris le dessus sur votre recommandation?
Le sénateur Plett : Je vous remercie de nouveau, madame la sénatrice. Comme vous le savez, j'ai en effet lancé une interpellation à ce sujet au cours de la dernière législature. Oui, j'en ai parlé, peut- être pas directement avec le chef, mais certainement avec la ministre des Travaux publics du gouvernement précédent. Nous avions commencé à élaborer une mesure législative appropriée. Sénatrice, vous avez présenté plusieurs projets de loi d'initiative parlementaire, et, comme vous le savez, il n'est pas très facile de les faire avancer. J'ai commencé à travailler sur une mesure au cours de la dernière législature, et, heureusement, grâce aux précieux services de notre légiste et des employés du Sénat, nous avons enfin mis au point une mesure qui, selon moi, est très intéressante pour tous les entrepreneurs.
La sénatrice Hervieux-Payette : Avant d'aller au comité avec votre projet de loi, je vous invite à chercher depuis combien de temps cela dure. J'étais de l'autre côté et je n'ai jamais entendu parler de cela parce que les paiements étaient effectués à temps. Quand a-t-on commencé à prendre l'habitude de ne pas payer les factures à temps? Il faut voir où sont les embûches et trouver comment cela s'est passé pendant tant d'années. Combien de milliards — pas des millions — de dollars n'ont pas été payés à temps? Je viens du Groupe SNC et je sais qu'il est absolument essentiel de payer à temps. J'avais promis de les appuyer, mais je ne formais pas le gouvernement; c'est vous qui étiez au pouvoir.
(1720)
Le sénateur Plett : Bien sûr, sénatrice Hervieux-Payette, le problème existe depuis bien plus de 10 ans. Avant cela, vous formiez en effet le gouvernement et le problème existait à ce moment-là. Le problème existait en 1987 lorsque j'ai succédé à mon père.
Ce qui était le plus difficile pour mon père lorsqu'il gérait notre entreprise, c'était de se faire payer. C'est une chose de traiter avec des particuliers, mais lorsqu'un gouvernement fédéral ou provincial ne paie pas ses factures à temps, c'est tout autre chose.
Ainsi, madame la sénatrice, vous avez fait partie d'un gouvernement qui avait ce même problème.
L'honorable Elaine McCoy : Le sénateur accepterait-il de répondre à une autre question?
Le sénateur Plett : Certainement, madame la sénatrice.
La sénatrice McCoy : Merci. Pour le bien de notre institution, je veux vous poser une question très simple : avez-vous confirmé auprès de la conseillère sénatoriale en éthique que vous n'étiez pas en conflit d'intérêts dans cette affaire?
Le sénateur Plett : Je vous remercie de la question. Non, je ne l'ai pas fait, mais je n'ai absolument aucun intérêt particulier dans quelque entreprise de construction que ce soit à l'heure actuelle.
La sénatrice McCoy : Est-ce que votre fils a des intérêts dans ce secteur?
Le sénateur Plett : Mes fils ont en effet des intérêts dans ce secteur. Je ne crois pas qu'ils réalisent des travaux pour le gouvernement fédéral à l'heure actuelle, mais, comme vous le recommandez, madame la sénatrice, je vais m'en assurer.
La sénatrice McCoy : Vous êtes très courtois, monsieur le sénateur.
Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?
Une voix : Le vote!
Une voix : Je propose l'ajournement du débat.
(Sur la motion de la sénatrice Fraser, le débat est ajourné.)
[Français]
Régie interne, budgets et administration
Troisième rapport du comité—Suite du débat
L'ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Housakos, appuyée par l'honorable sénateur Maltais, tendant à l'adoption du troisième rapport du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration (Prévisions budgétaires du Sénat 2016-2017), présenté au Sénat le 25 février 2016.
L'honorable Pierrette Ringuette : Chers collègues, j'ai demandé jeudi dernier l'ajournement du débat sur le rapport du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration (Prévisions budgétaires du Sénat 2016-2017), présenté au Sénat le 25 février 2016.
Il ne m'a pas fallu beaucoup de temps pour me rendre compte que les mots contenus dans le Feuilleton et dans la motion présentée par le président de ce comité ne reflétaient pas la réalité. Ce ne sont pas le budget ou les estimations de 2016-2017 pour le Sénat qui ont été déposés, mais bien les annexes A et B; trois feuilles. Il est maintenant facile de comprendre la raison pour laquelle il ne m'a fallu qu'une seule journée pour l'examiner.
Lors de l'intervention du sénateur Baker jeudi dernier, j'ai souligné le fait que c'était peut-être la façon habituelle de faire les choses.
[Traduction]
Toutefois, la façon habituelle de faire les choses n'existe plus.
[Français]
Cette institution a promis, au cours de la dernière année, à maintes et maintes reprises et de plusieurs façons, d'être transparente.
Laissez-moi vous citer les propos du Président du Sénat d'alors, l'honorable Léo Housakos, qui était également président du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, lors d'un discours prononcé le 9 juin 2015.
[Traduction]
[...] je tiens à préciser que nous adhérons sans réserve aux principes fondamentaux de transparence et de reddition de comptes qui sous-tendent les recommandations du vérificateur général.
Nous allons veiller à ce qu'ils imprègnent tous les aspects de notre approche visant à établir un mécanisme de surveillance qui, une fois mis en œuvre, sera conforme aux normes qui sont nécessaires et appropriées pour une institution parlementaire moderne.
À cette fin, nous allons aussi veiller à ce que les nouvelles règles et procédures mises en place soient conformes aux lois applicables, y compris la Constitution et la Loi sur le Parlement du Canada.
Nous veillerons à réaliser nos objectifs sans nuire à la capacité des législateurs de s'acquitter de leurs fonctions. Nous nous engageons fermement à améliorer la transparence, la surveillance et les mesures de contrôle.
[Français]
Il poursuit ensuite ainsi, et je cite :
Nous nous engageons fermement à améliorer la transparence, la surveillance et les mesures de contrôle.
Il conclut son discours du 9 juin 2015 en disant ce qui suit, et je cite :
Nous voulons faire du Sénat une assemblée législative responsable, attentive, transparente et respectée par tous les citoyens.
Mes collègues et moi travaillerons sans relâche pour atteindre cet objectif. C'est notre devoir envers les Canadiens et les Canadiennes.
[Traduction]
Nos gestes montrent à quel point nous prenons ces questions au sérieux.
Il doit exister un lien de confiance entre les Canadiens et leurs législateurs — tout comportement susceptible de nuire à ce lien est inacceptable.
En tant que parlementaires, nous devons respecter les normes de conduite les plus élevées qui soient.
Les dirigeants du Sénat sont résolus à employer tous les moyens dont ils disposent pour respecter cette norme élevée.
Nous avons pour objectif de faire du Sénat du Canada un organe législatif responsable, souple et transparent, qui méritera tout le respect des citoyens de notre merveilleux pays.
C'était en juin 2015. Aujourd'hui, pendant les déclarations de sénateurs, le sénateur Housakos a réitéré cet engagement en ces termes : « Le Comité de la régie interne, des budgets et de l'administration [est] transparent [et] répond de toutes ses décisions... »
Une décision n'est pas transparente si elle n'est pas publique. Plus important encore, une décision n'est pas transparente quand les discussions qui l'entourent ne sont pas publiques.
Pendant mes recherches, j'ai découvert une déclaration plus récente, faite encore une fois par le président du Comité de la régie interne. Elle remonte au 21 mars 2016, il y a à peine un mois. Parlant du rapport présenté par l'ex-juge Ian Binnie, le sénateur Housakos a dit que les sénateurs étaient satisfaits que l'ex-juge ait reconnu :
[les] efforts continus du Sénat afin de clarifier son règlement et son application, et ce, même si parfois il n'est pas facile de le faire. Ce rapport nous appuiera dans nos efforts en cours.
Le rapport de l'ex-juge Binnie confirme que nous déployons des efforts continus en faveur de la transparence et de la responsabilité.
Montrant son appui envers le processus, la sénatrice Cordy, vice- présidente du Comité de la régie interne, a déclaré ceci :
[...] dans le contexte actuel des mesures que nous mettons de l'avant afin de moderniser le Sénat. Ces initiatives sont fondées sur nos principes de transparence, de reddition de comptes, et du respect de l'argent des contribuables [...]
(1730)
Comme je l'ai dit plus tôt, pour qu'il y ait responsabilité et transparence, il faut une discussion publique. Si on consulte le site web du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, on constate que, depuis la fameuse déclaration faite par le sénateur Housakos en juin dernier, le comité a tenu un nombre relativement important de réunions.
La première à faire suite à la déclaration du sénateur Housakos a eu lieu le 11 juin 2015. La partie publique de cette réunion tient essentiellement à l'adoption par le comité de l'ordre du jour, puis d'une motion tendant à poursuivre la séance à huis clos. C'était le 11 juin.
Le 18 juin 2015, c'est essentiellement la même chose : l'adoption d'une motion ayant pour but de poursuivre la séance à huis clos.
Le 24 décembre 2015, c'est encore la même chose.
Le 5 novembre 2015, même chose encore.
Le 10 décembre 2015, comme vous pouvez le voir, c'est la même chose.
Le 13 janvier 2016, même chose.
Le 4 février 2016, même chose.
Exceptionnellement, le 18 février 2016, le comité a tenu une discussion publique concernant le financement du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts et les audiences qui ont eu lieu à Moncton, au Nouveau-Brunswick.
En tout, depuis la déclaration du sénateur Housakos, le comité a tenu 11 réunions au cours desquelles des discussions ont eu lieu à huis clos. Je pense qu'il y aurait lieu de revoir les efforts relatifs à la responsabilité et à la transparence.
Je crois que vous avez fait une exception le jeudi de la semaine dernière. Je comprends certainement cela ainsi que le but poursuivi.
Cela dit, les sénateurs sont invités à approuver l'affectation de plus de 90 millions de dollars de l'argent des contribuables aux dépenses de l'année prochaine, sur la base d'un sommaire exécutif qui ne comprend en réalité que les annexes A et B.
Compte tenu de la présente atmosphère politique au Sénat, je suis relativement certaine que, si j'avais déposé un tel document vous demandant d'autoriser des dépenses de 90 millions de dollars, vous auriez répondu : « Oh, ce n'est pas responsable. Ce n'est pas transparent. Il n'y a aucun détail. Comment pouvez-vous nous demander d'approuver des dépenses de 90 millions de dollars en nous fondant sur deux annexes? C'est absolument intolérable. »
[Français]
Il est intolérable, après avoir prononcé de nombreux discours sur la transparence au Sénat, que le comité principal du Sénat, qui régit les dépenses, n'ait fait aucun progrès. Je crois honnêtement que les citoyens canadiens ne seraient vraiment pas fiers de nous si nous procédions à un vote sans plus d'information, sans nous interroger sur les lignes de dépenses, le pourquoi, et cetera. Nous ne pouvons nous permettre d'adopter un budget des dépenses de 90 millions de dollars sur le dos des contribuables, le tout expliqué en trois pages. Si vous consultez le site pour obtenir plus d'information, vous ne trouverez rien, parce que tous les débats ont été tenus à huis clos.
Motion d'amendement
L'honorable Pierrette Ringuette : Monsieur le Président, chers collègues, je propose un amendement de sorte que les sénateurs puissent réviser le budget avant la tenue du vote. Je propose donc :
Que le Sénat reporte le débat sur le troisième rapport du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration (Prévisions budgétaires du Sénat 2016-2017) jusqu'à ce que le budget ventilé complet ait été déposé et communiqué aux sénateurs, de même que les dépenses détaillées du Sénat pour 2015-2016, et que, cinq jours de séance après que le budget aura été communiqué, le Sénat se réunisse en comité plénier pour poser des questions, et que le comité plénier siège jusqu'à ce qu'on ait répondu à toutes les questions des sénateurs.
Il s'agit d'un minimum de transparence. Honorables collègues, j'espère que vous comprendrez les raisons qui imposent cette motion. Je vous remercie.
(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné).
[Traduction]
Affaires étrangères et commerce international
Budget et autorisation de se déplacer—L'étude sur le potentiel de renforcement de la coopération avec le Mexique depuis le dépôt du rapport du comité intitulé Voisins nord-américains : maximiser les occasions et renforcer la coopération pour accroître la prospérité—Adoption du troisième rapport du comité
Le Sénat passe à l'étude du troisième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international (Budget—étude sur le potentiel de renforcement de la coopération avec le Mexique depuis le dépôt en juin 2015 du rapport du comité intitulé Voisins nord-américains : maximiser les occasions et renforcer la coopération pour accroître la prospérité—autorisation de se déplacer), présenté au Sénat le 14 avril 2016.
L'honorable A. Raynell Andreychuk propose que le rapport soit adopté.
— Honorables sénateurs, je crois avoir déjà pris la parole à ce sujet. Le débat sur le budget a permis d'expliquer pourquoi nous demandons des fonds et de rappeler aux sénateurs notre rapport. Nous espérons qu'il sera adopté pour que le comité puisse aller de l'avant.
L'honorable Joan Fraser (leader adjointe des libéraux au Sénat) : Pourriez-vous me rappeler combien vous prévoyez dépenser pour les déplacements?
La sénatrice Andreychuk : Je crois que, dans ce cas particulier, ce sera environ 9 200 $.
Son Honneur le Président : Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?
Des voix : Le vote!
Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
Des voix : D'accord.
(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)
(1740)
Budget et autorisation d'embaucher du personnel et de se déplacer—L'étude sur les faits nouveaux en matière de politique et d'économie en Argentine dans le cadre de leur répercussion possible sur les dynamiques régionale et globale—Adoption du quatrième rapport du comité
Le Sénat procède à l'examen du quatrième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international (Budget—étude sur les faits nouveaux en matière de politique et d'économie en Argentine—autorisation d'engager du personnel et de voyager), présenté au Sénat le 14 avril 2016.
L'honorable A. Raynell Andreychuk propose que le rapport soit adopté.
— Honorables sénateurs, j'ai déjà parlé du budget. Il s'agit ici d'une étude que le comité a décidé de poursuivre et qu'il a trouvée opportune. Nous continuerons d'entendre des témoins au Canada, après quoi nous envisageons d'en entendre en Argentine. Le déplacement aura probablement lieu au cours de l'automne.
L'honorable Joan Fraser (leader adjointe des libéraux du Sénat) : Combien coûtera-t-il?
La sénatrice Andreychuk : C'est une question intéressante. On nous a demandé de présenter un budget en prévoyant le déplacement des 12 membres du comité et en maximisant tous les coûts. Nous sommes ainsi arrivés à un chiffre d'environ 240 000 $ qui, je crois, correspond au budget d'autres comités. Nous ne nous attendons pas à tout dépenser parce que ce budget est basé sur la participation de tous les membres. Malheureusement, un sénateur qui partira à la retraite en avril et un autre en juillet, si je ne m'abuse. Notre effectif sera donc réduit. Il est d'usage au sein du comité que, si on n'en faisait pas partie au moment du début d'une étude ou, pour le moins, à partir d'une date proche de ce début, on ne participe pas aux déplacements. Autrement, les fonds ne seraient pas utilisés de la façon la plus efficace.
Nous prévoyons donc dépenser un montant inférieur au budget. Il faudra faire les calculs nécessaires au moment opportun. J'ai reçu l'assurance que les chiffres correspondent à ceux d'autres comités analogues qui font un travail comparable au nôtre.
La sénatrice Fraser : Il n'existe pas de comité comparable, à ma connaissance. Il s'agit d'une somme considérable. J'attends avec impatience de voir comment vous réussirez à réduire ce budget. Vous vous souviendrez, sénatrice Andreychuk, que je siège au Comité du Règlement et au Comité des affaires juridiques. Je frémis quand j'entends déclarer qu'un voyage coûtera un quart de million de dollars. J'espère que vous pourrez réduire considérablement cette somme.
La sénatrice Andreychuk : En fait, notre comité utilise toujours les chiffres réels auxquels il est arrivé. D'autres comités responsables de ce dossier nous ont recommandé de ne pas réduire le nombre de participants, parce qu'une telle réduction serait injuste envers certains sénateurs. Nous avons donc établi un budget maximal, mais nous encourageons tous les sénateurs à regarder les chiffres réels.
Nous avons comparé nos chiffres à ceux d'autres comités qui se sont rendus à l'étranger, et les chiffres réels du Comité des affaires étrangères étaient toujours beaucoup moins élevés. Nous n'avons aucun contrôle sur le coût des billets d'avion ou d'autres éléments du genre, mais nous savons comment obtenir des tarifs économiques. Signalons aussi que nous n'avons pas inclus de frais de représentation. Notre comité travaille généralement pendant toute la journée. Nous n'avons pas de déjeuners de travail, sauf si c'est le seul moment où il est possible de rencontrer certains membres de la société civile ou des journalistes.
Nous voulons profiter au maximum du temps que nous passons sur les lieux. Nous ne demandons pas de réceptions, ni de soupers. Nous ne voulons pas être invités à un événement, à moins que l'activité en question soit dans l'intérêt de la politique étrangère du gouvernement du Canada. Nous tenons compte du fait que l'ambassadeur ou l'ambassadrice pourrait vouloir profiter de la présence d'une délégation parlementaire pour soutenir ses efforts de diplomatie parlementaire.
L'honorable Serge Joyal : L'honorable sénatrice accepterait-elle de répondre à une autre question? L'honorable sénatrice sait certainement que le leader de l'opposition, le sénateur Carignan, et le leader des libéraux au Sénat ont fait une annonce hier selon laquelle les deux groupes offriraient un siège aux sénateurs indépendants au sein de divers comités.
Pour ce qui est des sièges qui deviendront vacants, comme vous l'avez mentionné dans votre réponse précédente, en raison du départ à la retraite de certains sénateurs, je présume qu'ils seront occupés par des sénateurs indépendants. Avez-vous compté ces sièges qui existent déjà mais qui seront occupés par de nouveaux sénateurs dans le budget que vous demandez à la Chambre d'approuver?
La sénatrice Andreychuk : Absolument, car nous travaillons en fonction des règles telles qu'elles sont aujourd'hui. D'ailleurs, le comité compte actuellement un sénateur indépendant. Je ne vais pas parler de la manière dont un sénateur devient indépendant, mais nous comptons bel et bien un sénateur indépendant désigné et en compterons probablement plus en raison des deux départs à la retraite à venir. Alors ce ne sera pas une tâche difficile si le Comité de sélection souhaite désigner des remplaçants puisque des sièges seront vacants.
Puisque vous soulevez la question, je suis préoccupée par le remplacement de personnes qui sont très engagées au sein du comité. Je rends toujours hommage au sénateur Stewart, qui a présidé le comité pendant de nombreuses années. Son savoir-faire a fait en sorte que c'était une expérience enrichissante pour chacun de nous qui nous a permis d'acquérir de la crédibilité. Nous avons fait nos devoirs et nous n'avons pas perdu de temps ni gaspillé d'argent. Le comité travaille toujours d'une manière non partisane.
De temps à autre, nous recevons des projets de loi. Bien entendu, différents points de vue sont alors présentés.
C'est ainsi que nous avons toujours travaillé, mais nous sommes ouverts. Si le Règlement change ici, nous changerons aussi, et il y a actuellement suffisamment d'argent et de marge de manœuvre dans le budget pour tenir compte de tous les points de vue. Les membres du comité poursuivront donc la discussion.
Le sénateur Joyal : Merci beaucoup, sénatrice.
Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
Des voix : D'accord.
(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)
Les travaux du Sénat
L'honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, c'est au sujet d'une question touchant les travaux du Sénat.
Je désire informer le Sénat que le ministre qui participera à la période des questions demain sera le ministre Sohi, ministre de l'Infrastructure et des Collectivités. Dans la précipitation avec laquelle la motion a été adoptée plus tôt, j'étais tellement submergé par l'émotion que j'ai omis d'en informer les sénateurs.
Transports et communications
Budget et autorisation d'embaucher du personnel et de se déplacer—L'étude sur l'élaboration d'une stratégie pour faciliter le transport du pétrole brut vers les raffineries de l'Est du Canada et vers les ports situés sur les côtes Atlantique et Pacifique—Adoption du troisième rapport du comité
Le Sénat passe à l'étude du troisième rapport du Comité sénatorial permanent des transports et des communications (Budget—étude sur le transport du pétrole brut au Canada—autorisation d'embaucher du personnel et de se déplacer), présenté au Sénat le 14 avril 2016.
L'honorable Dennis Dawson propose que le rapport soit adopté.
— Sénatrice Fraser, par respect pour vous, comme j'ai déposé un budget détaillé la dernière fois, je suis venu aujourd'hui avec un plan de communications et le nom de toutes les villes où le comité se rendra. Par contre, je n'ai pas le montant total.
Sénatrice Fraser, étant donné que les questions qui reviennent souvent concernent nos intentions et nos objectifs de communication, je suis venu préparé. Comme vous le savez, nous étudions le transport du pétrole brut. Cette question a de quoi susciter de l'intérêt d'un bout à l'autre du pays, de Vancouver à Halifax. Ce sera la première fois que le Comité sénatorial permanent des transports et des communications voyagera en séance plénière, en faisant participer le plus grand nombre possible de ses membres. Nous organiserons des audiences à Calgary, à Edmonton et à Vancouver, après quoi nous irons vers l'est. L'automne prochain, nous tiendrons des audiences dans l'Est du Canada et dans les Maritimes — si je dis « l'Est », c'est parce que je considère que le Québec se trouve dans l'Est, mais l'honorable sénatrice n'est pas du même avis.
Nous avons déjà tenu sept audiences ici, à Ottawa. Nous en organiserons d'autres au cours des prochaines semaines. Nous nous rendrons dans l'Ouest, comme je l'ai dit, au mois de juin, et nous espérons que le plus grand nombre possible de membres prendront part à ces audiences. Notre comité compte aussi un membre indépendant et, si on recommande l'ajout d'un autre sénateur indépendant, nous nous ferons un plaisir de l'accepter au sein de notre comité.
La sénatrice Fraser : Je m'avoue vaincue, Votre Honneur.
Son Honneur le Président : Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer? Le sénateur Joyal veut intervenir.
L'honorable Serge Joyal : L'honorable sénateur accepterait-il de répondre à une question? Pourrait-il nous informer de l'ampleur du budget nécessaire pour mener l'enquête intégrale partout au Canada?
Le sénateur Dawson : J'ai plaidé coupable dès le début. J'ai déposé le budget au grand complet lorsque j'ai présenté la motion, mais je dois admettre que je ne l'ai pas sous les yeux aujourd'hui.
Le sénateur Joyal : Vous n'avez pas d'ordre de grandeur?
Le sénateur Dawson : Approximativement 354 652 $ pour un an.
Le sénateur Joyal : Merci.
Le sénateur Dawson : Cela pourrait approcher ce total.
Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
Des voix : D'accord.
(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)
(La séance est levée, et le Sénat s'ajourne à 14 heures demain.)