Débats du Sénat (Hansard)
1re Session, 42e Législature
Volume 150, Numéro 194
Le mercredi 18 avril 2018
L’honorable George J. Furey, Président
- DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
- AFFAIRES COURANTES
- PÉRIODE DES QUESTIONS
- ORDRE dU JOUR
LE SÉNAT
Le mercredi 18 avril 2018
La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.
Prière.
[Traduction]
DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
Hommages
Le décès de l’honorable Douglas Everett
Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, en vertu de l’article 4-3(1) du Règlement, le leader des libéraux indépendants au Sénat a demandé que la période des déclarations des sénateurs soit prolongée aujourd’hui afin que l’on puisse rendre hommage à l’honorable sénateur Douglas Everett, qui est décédé le 27 mars 2018.
Je rappelle aux sénateurs que, en vertu du Règlement, chaque intervention ne peut dépasser trois minutes, qu’aucun sénateur ne peut parler plus d’une fois et qu’ils disposent d’au plus 15 minutes.
L’honorable Joseph A. Day (leader des libéraux au Sénat) : Honorables sénateurs, je tiens à souligner aujourd’hui le décès de Douglas Everett, un ancien sénateur, et à lui rendre hommage pour ses années de travail au Sénat du Canada.
Comme le Président vient de le mentionner, M. Everett s’est éteint le mois dernier. Il avait 90 ans. Même si je ne l’ai pas connu personnellement, puisque son mandat ici s’est terminé avant le début du mien, je me rends compte que nous avions beaucoup en commun.
Il était lui aussi diplômé d’un collège militaire royal. Il est allé au Collège de la marine royale du Canada de Royal Roads à Victoria, en Colombie-Britannique, alors que je suis diplômé du Collège militaire royal du Canada, à Kingston. Comme moi, il avait un diplôme en droit de l’école de droit Osgoode Hall. Lui aussi a siégé au Sénat comme indépendant, sénateur libéral indépendant. Tous les deux, nous avons été présidents du Comité sénatorial permanent des finances nationales pendant de nombreuses années.
Avant d’être nommé au Sénat, M. Everett était un homme d’affaires prospère dans le domaine des stations d’essence, une carrière qui a commencé avec les pompes à essence de la concession automobile familiale au Manitoba. L’entreprise en question, Domo Gas, compte aujourd’hui quelque 80 détaillants dans les provinces de l’Ouest.
En 1966, M. Everett a été nommé au Sénat par le premier ministre de l’époque, Lester B. Pearson, pour représenter la division sénatoriale de Fort Rouge, au Manitoba. À 39 ans, il devenait alors la plus jeune personne jamais nommée à la Chambre haute.
M. Everett a siégé comme sénateur libéral pendant 24 ans. Il a décidé de devenir un sénateur libéral indépendant en raison du profond désaccord causé par son appui à la taxe sur les produits et services. Il a démissionné du Sénat en 1994, à la suite des élections générales tenues cette année-là.
Dans son allocution de démission, il a déclaré ceci :
À mon avis, une nomination au Sénat du Canada est le plus grand honneur qu’on puisse conférer à un Canadien. Les sénateurs sont des gens dévoués et la plupart d’entre eux travaillent extrêmement fort. Ce n’est peut-être pas ce que les gens croient, mais les plus gros travailleurs sont souvent ceux qui ont des antécédents politiques.
En tant que sénateur libéral indépendant, Douglas Everett était de ceux qui consacraient beaucoup d’énergie à des questions touchant leur province et leur pays. Au nom des libéraux indépendants au Sénat, je tiens à offrir mes plus sincères condoléances à son épouse, Lila, à ses six enfants, à ses beaux-enfants, ainsi qu’à ses nombreux petits-enfants et arrière-petits-enfants.
Des voix : Bravo!
L’honorable Larry W. Smith (leader de l’opposition) : En fait, j’ai une partie du texte auquel le sénateur Day a fait allusion.
J’aimerais dire aux sénateurs réunis dans cette enceinte que l’une des choses que j’ai le plus appréciées à mon arrivée au Sénat fut la possibilité de rencontrer des sénateurs qui siégeaient depuis assez longtemps pour me dire quels collègues pourraient agir comme mentors et m’enseigner l’histoire du Sénat en tant qu’institution. Par conséquent, lorsque nous abordons des questions historiques comme cet hommage rendu à l’honorable Douglas Everett, ce sont les liens évoqués entre le passé et le présent qui nous permettent de mieux comprendre ce qu’est le Sénat aujourd’hui et ce qu’il était hier. Espérons que, pendant notre mandat, nous pourrons contribuer le mieux possible au Sénat d’aujourd’hui et de demain.
Honorables sénateurs, j’aimerais ajouter quelques mots à ce qu’a dit le sénateur Day pour rendre hommage à l’ancien sénateur Douglas Everett, qui nous a quittés le mois dernier. Même s’il a pris sa retraite il y a près d’un quart de siècle, je veux que sa famille et ses amis sachent que le Sénat du Canada se souvient de lui aujourd’hui et qu’il le remercie de sa vie passée au service de la population.
[Français]
Douglas Everett n’était âgé que de 39 ans lorsqu’il a été nommé au Sénat sur la recommandation du très honorable Lester B. Pearson, en novembre 1966. Malgré son jeune âge, il arrivait au Sénat avec une foule de réalisations variées. Il avait servi dans la Marine royale canadienne, fait une formation d’avocat et fondé la chaîne de stations-service Domo Gas, dans l’Ouest du Canada.
[Traduction]
C’est plutôt bien. Je suis sur une bonne lancée en français aujourd’hui.
Le sénateur Everett a représenté le Manitoba pendant plus de 27 ans. Quand on y pense, 27 ans au Sénat, c’est remarquable. Au football, lorsqu’on durait plus de six ans, on était qualifié d’homme de fer. Il participait tant aux travaux du Sénat qu’à ceux des comités. Il a notamment présidé pendant 14 ans le Comité sénatorial permanent des finances nationales. On peut donc constater un lien entre l’ancien président, le président actuel et un très ancien président du comité. J’en félicite d’ailleurs le sénateur. Indépendamment des convictions et des opinions personnelles des membres du comité, il y avait une excellente collaboration entre eux.
Avant de prendre sa retraite, le 20 janvier 1994, le sénateur Everett a rappelé, dans un discours que le sénateur Day a déjà cité, que c’est un grand honneur d’être nommé au Sénat. Quand on y pense, c’est un très grand honneur. Je suis persuadé que nous l’admettons tous.
(1410)
Au nom de tous les sénateurs conservateurs et de notre caucus, si on me le permet, j’offre mes plus sincères condoléances aux membres de la grande famille Everett et à leurs nombreux amis.
Des voix : Bravo!
L’honorable Patricia Bovey : Honorables sénateurs, j’aimerais aujourd’hui rendre hommage, au nom du Groupe des sénateurs indépendants et de nombreux Manitobains, à l’honorable sénateur Douglas Everett, qui a représenté le Manitoba au Sénat de 1966 à 1994. Serviteur dévoué de la cause publique, visionnaire, homme d’affaires innovateur, philanthrope généreux, père de famille aimant, fier et loyal Winnipégois, Manitobain et Canadien, la liste de ses réalisations est longue.
J’approchais la vingtaine quand il a été nommé au Sénat par le premier ministre Pearson à l’âge de 39 ans, devenant ainsi le plus jeune sénateur en exercice. Le sénateur Everett, comme tout le monde l’a appelé, y compris ses gendres, jusqu’à l’âge de 90 ans, était l’oncle de l’une de mes plus proches amies. Le jour où il a été nommé, mon père m’a demandé d’un ton qui n’admettait pas la réplique de faire des recherches afin d’apprendre tout ce qu’il y avait à apprendre sur le Sénat, sur son rôle et sur le service public en général. Chaque fois que j’ai croisé le sénateur Everett par la suite — ce qui arrivait fréquemment ces dernières années, puisque nous habitions dans le même immeuble —, je me rappelais les recommandations que m’avait faites mon père en 1966.
Le sénateur Everett a été à la tête du Comité sénatorial permanent des finances nationales durant 14 ans, et il a produit cinq rapports financiers pour le Sénat. Il est devenu indépendant en 1990 parce qu’il était en porte à faux avec la position du Parti libéral sur la TPS. Dans son discours inaugural, il a parlé des devoirs civiques et du rôle des sénateurs et du fait que le Sénat est là pour représenter tous les Canadiens. Il a repris ces mêmes thèmes la dernière fois qu’il s’est adressé à notre assemblée, 9 ans avant son 75e anniversaire.
Le sénateur Everett a fait partie de la marine. Il a étudié au Collège militaire Royal Roads et il a obtenu un diplôme en droit de l’école Osgoode Hall. Il dirigé l’entreprise familiale, Dominion Motors, durant des décennies et, grâce à son excellent sens des affaires, il lui a fait atteindre de nouveaux sommets, y compris un changement de nom pour Domo Gas.
Sa générosité pour ses concitoyens de Winnipeg s’étendait à de nombreux domaines. Collectionneur avide et avisé d’œuvres d’art, il a, pendant les dernières années de sa vie, fait don d’œuvres importantes au Musée des beaux-arts de Winnipeg. À l’automne 2017, l’Université du Manitoba lui a remis la plus haute distinction qui soit, c’est-à-dire un doctorat honorifique en droit. C’est aussi cette année-là qu’il a été intronisé au temple de la renommée du monde des affaires du Manitoba.
Par-dessus tout, le sénateur Everett était dévoué à sa famille et il était toujours prêt à accueillir chez lui des amis de toutes les générations. Les multiples facettes du sénateur Everett étaient au cœur de ses funérailles et de la célébration de sa vie. La Musique de l’Aviation royale canadienne a joué des chansons s’étendant sur de nombreuses décennies, des chansons qu’il adorait. Son sens de l’humour, son amour de la nature, son intégrité, son humilité et sa stature ont tous été évoqués par sa famille et ses amis, surtout par ceux qui le connaissaient depuis plus de 65 ans.
C’est un grand honneur pour moi de rendre hommage à ce visionnaire déterminé qui a siégé au Sénat pendant presque 30 ans. Tout en honorant sa mémoire et celle de Patty, sa première épouse pendant 66 ans, j’offre mes condoléances et celles du Groupe des sénateurs indépendants à son épouse, Lila, qu’il a épousée en octobre dernier, tout juste après son 90e anniversaire, et à ses six enfants, ses beaux-enfants, ses petits-enfants et ses arrière-petits-enfants.
Il a mené une vie bien remplie et généreuse et beaucoup de gens dans sa région et dans l’ensemble du Canada se souviendront de lui.
Sénateur Everett, Doug, nous vous remercions et vous nous manquerez.
Des voix : Bravo!
L’autisme
L’honorable Jim Munson : Honorables sénateurs, au moment où je vous parle, un important forum des experts en autisme se déroule au Centre Shaw, ici à Ottawa. Il est en cours depuis deux jours. En tant que société bienveillante et compatissante, nous tentons sans cesse de trouver des moyens innovateurs et concertés d’améliorer la vie des personnes atteintes d’autisme.
Honorables sénateurs, presque 11 ans se sont écoulés depuis la publication du rapport d’enquête intitulé Payer maintenant ou payer plus tard: les familles d’enfants autistes en crise, et je suis de plus en plus convaincu qu’ensemble nous pouvons changer notre société. Il s’agit de mieux collaborer. C’est une question de transformation, et nous offrons aux Canadiens de nouvelles façons de voir afin qu’ils se concentrent davantage sur les capacités que sur l’invalidité.
Grâce aux efforts soutenus de parents, de défenseurs des droits des personnes autistes et d’intervenants politiques éclairés, qui communiquent leurs idées et des solutions, sont pleins d’énergie et novateurs et lancent des initiatives, la situation des personnes autistes au Canada évolue. La société canadienne est plus que jamais sensibilisée à l’autisme. Les réseaux de santé veillent au développement et à la formation de spécialistes et multiplient les ressources relatives aux services — si, bien sûr, on vit dans la bonne collectivité au Canada.
Le milieu de l’autisme demande au gouvernement fédéral d’adopter une approche intégrée afin d’apporter de l’espoir aux personnes autistes et à leur famille. Au cours des 10 dernières années, plutôt que de travailler en vase clos, familles, collectivités et groupes ont commencé à communiquer entre eux, à échanger des idées, à créer et à élaborer des stratégies. Il est devenu évident qu’il serait plus efficace de parler d’une seule voix avec les gouvernements et d’autres intervenants.
Cette voix a donné lieu à la mise en place de nombreuses initiatives sous le gouvernement conservateur. Sous le gouvernement actuel, nous avons eu droit, au cours des derniers jours, au premier rapport jamais publié par l’Agence de la santé publique du Canada sur les statistiques en matière d’autisme dans ce pays. Je tiens à en féliciter le gouvernement. Le rapport fournira également les données nécessaires pour éclairer les politiques et les programmes. J’espère que les deux nouveaux programmes prévus dans le budget de 2018 constituent le début d’une nouvelle stratégie nationale en matière d’autisme.
À quoi ressemblerait une nouvelle stratégie? Nous en avons déjà parlé au Sénat. Elle désigne les partenaires, établit quel est leur rôle et met l’accent sur la collaboration. Cette stratégie tient compte des compétences fédérales, provinciales et territoriales et des secteurs de collaboration. Elle donne un sens à la recherche scientifique. Elle définit ce qu’est le leadership fédéral. Elle cerne les lacunes en matière de politiques et de financement. Elle tient compte des pratiques exemplaires dans de multiples secteurs.
Une stratégie nationale en matière d’autisme est un moyen de répondre à des besoins complexes et de favoriser la participation de multiples secteurs et partenaires, que ce soit des gouvernements, des cliniciens, des praticiens, des chercheurs, des organismes communautaires d’appui et des entreprises. Elle inspire des organismes gouvernementaux dans les domaines de la santé, de la santé mentale, de l’éducation, des services sociaux, de la justice, de l’emploi et du logement, qui doivent tous travailler en collaboration en se fondant sur une compréhension et des objectifs communs.
Une stratégie nationale en matière d’autisme, honorables sénateurs, est une déclaration de leadership. Nous pouvons changer les choses, mais il reste encore beaucoup à faire. J’invite les honorables sénateurs à assister à une réception ce soir au Manoir Ronald McDonald, de 17 heures à 19 heures, pendant laquelle ils pourront faire la connaissance de chefs de file canadiens en matière d’autisme.
Des voix : Bravo!
Visiteurs à la tribune
Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune des représentants de SOS Villages d’Enfants : Thomas Bauer, Andreas Papp, Benoit Piot, Nadia Garida, Sofia Garcia Garcia et Marc Bonomo. Ils sont les invités de l’honorable sénateur Tannas.
Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.
Des voix : Bravo!
Les Jeux du Commonwealth de 2018
Félicitations à l’Équipe Canada
L’honorable Chantal Petitclerc : Honorables sénateurs, la semaine dernière, une page de l’histoire sportive a été écrite sur la Gold Coast de l’Australie, et le Canada y a joué un rôle. En effet, Équipe Canada représentait l’un des 71 pays qui ont participé aux Jeux du Commonwealth. Un mois à peine après les Jeux olympiques et paralympiques en Corée, les athlètes canadiens nous ont rendus fiers une fois encore, en rapportant un nombre impressionnant de 88 médailles et, surtout, en réalisant des performances éblouissantes et en vivant des expériences fantastiques.
[Français]
Les Jeux du Commonwealth ont toujours occupé une place importante dans mon cœur. En 1991, à Auckland, en Nouvelle-Zélande, l’importance de l’inclusion dans ces jeux a pris naissance, grâce à une épreuve de démonstration en fauteuil roulant qui se tenait pour la première fois de l’histoire.
[Traduction]
En 2002, à Manchester, les Jeux du Commonwealth sont devenus le premier événement sportif international à offrir le statut de médaillé à part entière aux athlètes handicapés, dans une course de 800 mètres en fauteuil roulant. J’espère que les honorables sénateurs me pardonneront de me vanter un peu, mais je dois mentionner que j’étais la fière gagnante de cette médaille d’or historique.
Depuis lors, ces jeux demeurent fidèles à l’idée que non seulement la performance est importante, mais aussi que le sport peut s’avérer un puissant agent de changement. La vraie valeur des Jeux du Commonwealth repose dans l’engagement envers la diversité et l’inclusion. C’est tout à fait remarquable. La Gold Coast a accueilli le plus grand programme parasportif intégré jamais organisé dans un grand événement sportif, avec 38 épreuves récompensées de médaille au total.
[Français]
C’est aussi le premier événement sportif de l’histoire à atteindre la parité des genres en proposant autant d’épreuves pour les femmes que pour les hommes.
[Traduction]
Surtout, l’Australie deviendra un modèle dans l’organisation d’événements sportifs grâce à son intégration d’un plan d’action pour la réconciliation concret et bien défini.
(1420)
Ce plan visait à offrir aux peuples aborigènes une occasion concrète de participer de façon significative aux Jeux du Commonwealth de 2018 à Gold Coast, ce qu’ils ont fait. Leur présence est allée bien au-delà de la traditionnelle inclusion d’éléments de leur culture dans les cérémonies d’ouverture et de clôture.
Le Canada a été l’instigateur des Jeux du Commonwealth et l’hôte de la première édition tenue à Hamilton, en Ontario, en 1930. Quand je constate à quel point ces jeux ont évolué, je suis très fière que nous en soyons les fondateurs et, si je puis me permettre, j’espère vraiment, comme de nombreuses personnes, que nous aurons le privilège de les accueillir à nouveau à l’occasion de leur centenaire en 2030.
La couverture des finales de la Coupe Stanley par CBC/Radio-Canada
L’honorable Donald Neil Plett : Honorables sénateurs, il est excitant d’être Manitobain par les temps qui courent. Ce printemps, il y aura 25 ans qu’une équipe canadienne de la LNH n’a pas remporté la Coupe Stanley. Avec des probabilités de huit contre un, les preneurs de paris vous diront que ce sont les Jets de Winnipeg qui ont les meilleures chances au Canada de mettre un terme à la disette qui dure depuis 25 ans.
Comme l’a mentionné le chroniqueur Paul Wiecek dans le Winnipeg Free Press:
Ce serait toute une histoire : une petite ville des Prairies possédant le plus petit marché de la LNH perd son équipe en 1996, en obtient une nouvelle en 2011 et, sept ans plus tard, remporte la Coupe Stanley, mettant fin à la plus longue disette de l’histoire du pays.
Il me semble que c’est exactement le genre d’histoire typiquement canadienne que les contribuables du pays veulent voir racontée par CBC/Radio-Canada, à qui ils donnent 1 milliard de dollars par année.
Toutefois, chers collègues, ce n’est pas l’histoire que CBC/Radio-Canada a décidé de raconter. Le radiodiffuseur public a plutôt décidé de diffuser une série purement américaine entre les Penguins de Pittsburgh et les Flyers de Philadelphie.
Pour les Canadiens, la seule façon d’assister à la réussite des Jets, c’est de payer 10 $ de plus par mois pour s’abonner à la chaîne Sportsnet de Rogers.
Cependant, CBC/Radio-Canada a continué à diffuser la série des Maple Leafs de Toronto. M. Wiecek indique ceci :
Fait qui ne surprend guère, les partisans des Jets sont indignés. Ils ont bien raison : pourquoi devraient-ils payer un supplément pour regarder leur équipe jouer, alors qu’ils versent aussi à CBC/Radio-Canada une subvention annuelle équivalant à 27 $ par homme, femme et enfant, afin de permettre aux amateurs des Leafs de voir les matchs de leur équipe gratuitement?
Ce genre de situation exaspère tout particulièrement les gens de Winnipeg, qui ont l’impression qu’on profite d’eux et qui se sentent insultés, comme si Toronto se moquait d’eux encore une fois.
En guise d’explication, Sportsnet a déclaré que « [. . .] Winnipeg est une priorité absolue pour Sportsnet ».
À juste titre, Wiecek affirme que :
[…] il est ridicule de penser que Sportsnet choisit de diffuser les matchs des Jets en série parce qu’il nous aime. Les Jets sont relégués à Sportsnet parce que les Maple Leafs attirent un plus grand auditoire à l’échelle nationale. Il est donc logique que leur série de matchs soit présentée sur le réseau qui rejoint le plus de monde, la CBC.
Chers collègues, le rôle d’un diffuseur public est de raconter des histoires canadiennes que les chaînes privées ne présentent pas ou de combler, dans l’intérêt des Canadiens, une lacune que les diffuseurs privés négligent ou n’arrivent pas à combler. La société d’État continue toutefois d’empocher de l’argent public pour diffuser le même contenu que celui offert par les chaînes privées américaines ou, comme le souligne Wiecek, « […] une pâle imitation canadienne où, par souci d’authenticité, on ponctue les commentaires de quelques “eh” ».
Il termine son article ainsi :
Quand on considère l’ensemble de la situation, la question qu’on se pose n’est pas « Pourquoi nous obliger à verser 10 $ à Sportsnet? », mais plutôt « Pourquoi verser quoi que ce soit à CBC/Radio-Canada? ».
Soit dit en passant, les Jets mènent trois à un dans leur série de matchs contre Minnesota, alors que les Leafs de Toronto ont perdu deux des trois matchs disputés contre Boston.
Des voix : Bravo!
Une voix : CBC/Radio-Canada devrait avoir honte.
La cyberexploitation sexuelle des enfants
L’honorable Mobina S. B. Jaffer : Sénateur Plett, sachez que c’est Rogers qui détient les droits, et non CBC/Radio-Canada.
Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet de l’horrible industrie de la cyberexploitation sexuelle des enfants.
Depuis 2012, plus de 2 millions de mineurs ont été victimes de cyberexploitation sexuelle dans le contexte du commerce mondial du sexe. Aujourd’hui, en 2018, six ans plus tard, les chiffres, malheureusement, ne cessent d’augmenter.
Depuis plus de 30 ans, je m’efforce de mettre fin à la l’exploitation sexuelle des enfants sur Internet. Je collabore avec International Justice Mission Canada, un organisme à but non lucratif qui fait de l’excellent travail et œuvre avec les autorités pour secourir les victimes de cyberexploitation sexuelle et les aider à réintégrer dans la société. Il y a quelques années, j’étais avec eux à Calcutta lorsqu’ils ont secouru des jeunes filles.
Parmi 60 pays, le Canada fait partie des trois principaux qui hébergent des sites web et des images et qui vendent du matériel où des enfants sont victimes d’abus sexuels.
En novembre 2017, neuf enfants ont été secourus aux Philippines. Victimes de cyberexploitation sexuelle, ces sept filles et ces deux garçons étaient âgés de deux à neuf ans.
Grâce au travail de la police nationale des Philippines, en collaboration avec les autorités policières locales, appuyée par l’International Justice Mission, et agissant selon les recommandations de la Gendarmerie royale du Canada, ces enfants sont aujourd’hui protégés de la cyberexploitation sexuelle.
En échange d’argent, le suspect, arrêté aux Philippines, aurait produit et envoyé des images sexuellement explicites de très jeunes enfants à des étrangers à l’extérieur du pays, par l’intermédiaire des médias sociaux. Parmi les étrangers, on compte notamment un Saskatchewanais qui a été condamné à 12 ans de prison pour avoir participé à ce crime.
Honorables sénateurs, l’exploitation sexuelle de mineurs et la vente de contenu sur Internet sont des crimes graves et sont simplement inacceptables. Notre pays joue un rôle destructeur en soutenant la cyberexploitation sexuelle des enfants. Cependant, au Sénat, nous pouvons jouer un rôle encore plus proactif pour y mettre fin.
Au cours des derniers mois, j’ai envoyé aux sénateurs et aux députés de la documentation au sujet de la crise que représente la cyberexploitation sexuelle des enfants, un phénomène aux effets destructeurs. Vendredi dernier, j’ai fait un troisième envoi afin de poursuivre ce travail de sensibilisation.
La cyberexploitation sexuelle des enfants ne doit pas tomber dans l’oubli. Il faut y mettre fin. Il faut continuer de penser aux victimes, qui ne sont parfois que des bambins.
Honorables sénateurs, je vous encourage vivement à suivre mon exemple et à afficher sur vos appareils l’autocollant #NotOnMyScreen, ce qui signifie « pas sur mon écran », qui était joint à la documentation envoyée.
Honorables sénateurs, les jeunes filles et les jeunes garçons du Canada et du monde entier ont besoin de notre soutien. Je vous invite à participer aux efforts de sensibilisation qui ciblent ce crime aux effets dévastateurs.
Affichez, comme moi, vos autocollants #NotOnMyScreen, et faites votre part pour mettre fin à la cyberexploitation sexuelle des enfants, au Canada et dans le monde entier.
Merci.
La Semaine nationale de l’action bénévole
L’honorable Robert Black : Honorables sénateurs, je suis heureux d’avoir l’occasion de m’adresser à vous aujourd’hui.
Je suis désolé de n’avoir pas pu assister à la réception qu’offraient, hier soir, l’honorable sénatrice Bovey et Bénévoles Canada pour souligner la Semaine nationale de l’action bénévole.
Cette semaine spéciale, qui a commencé le dimanche 15 avril, se veut l’occasion de rendre hommage aux 13 millions de bénévoles du Canada et de les féliciter pour le temps, le talent, les trésors, l’énergie et le soutien qu’ils apportent, de mille et une façons, à d’innombrables organisations et à leurs collectivités, qui sont aussi les nôtres.
L’édition 2018 de cette semaine spéciale se déroulera sous le thème « Célébrons la valeur du bénévolat — Renforçons la confiance, la compétence, les liens et la collectivité ».
Quand les Canadiens font du bénévolat, tout le monde y gagne. Le bénévolat est fondamentalement un acte de civisme. Il est souvent perçu comme un acte altruiste, car les bénévoles font don de leur temps, de leurs compétences, de leur expérience et de leur passion pour aider autrui, sans rien attendre en retour.
Par ailleurs, même si le bénévolat est une forme de service, nombre de bénévoles nous diront qu’ils reçoivent plus qu’ils ne donnent. Qu’il s’agisse d’acquérir de nouvelles compétences ou de tisser des liens profonds et enrichissants avec d’autres personnes, le bénévolat a ceci de formidable qu’il est avantageux pour tous tant sur le plan social qu’économique.
Même si le bénévolat présente des avantages économiques, sa valeur se mesure à ses autres avantages essentiels plus difficilement quantifiables, soit à sa capacité de bâtir la confiance, de favoriser l’acquisition de compétences, de faciliter les relations et de renforcer l’esprit communautaire; bref, les bénévoles contribuent à faire du Canada un pays plus juste et plus solidaire pour tous.
Les bienfaits du bénévolat et du don de soi pour la société sont encore plus étendus. En effet, des recherches ont déjà indiqué que, en réunissant des gens de tous les milieux qui unissent leurs efforts aux fins d’un projet ou d’un objectif commun, le bénévolat contribue à la cohésion et au capital sociaux.
Chaque jour, des Canadiens donnent de leur argent et de leur temps pour contribuer au bien-être de leur collectivité. Leurs efforts exceptionnels et leurs contributions financières soutiennent une foule de causes, que ce soit en aidant des refuges, des organismes de services sociaux et des banques alimentaires à offrir leurs services, en aidant les universités et les hôpitaux à faire avancer la recherche médicale, en aidant des groupes politiques, religieux et environnementaux à se faire entendre, ou en offrant aux jeunes des occasions de s’engager et d’apporter leur contribution à la société.
Partout dans les régions rurales du pays, les bénévoles jouent un rôle extrêmement important. En milieu rural, des organismes comme les 4-H, les associations de scouts et de guides et les organisations sportives, ainsi que des événements comme les festivals communautaires et les foires agricoles, ne pourraient pas exister sans une armée de bénévoles prête à soutenir ces initiatives. Le bénévolat permet donc, entre mille autres choses, de bâtir des communautés fortes, dynamiques et stables.
(1430)
Les retombées du bénévolat sont loin de se limiter à une personne, à un quartier, à un organisme ou à une cause. La contribution des bénévoles peut laisser sa trace pendant des générations au sein d’une communauté.
Honorables collègues, cette semaine et toute l’année durant, je vous encourage tous à réfléchir aux répercussions sociales et économiques à l’échelle de notre grand pays des actions des bénévoles sur notre qualité de vie et sur celle des personnes qui nous entourent. Prenez ensuite le temps de remercier des bénévoles pour leur apport exceptionnel à la société canadienne.
La Royal St. John’s Regatta
L’honorable Fabian Manning : Honorables sénateurs, je suis heureux de vous présenter aujourd’hui le chapitre 29 de « Notre histoire ». Le plus ancien événement sportif organisé de l’Amérique du Nord a lieu à Terre-Neuve-et-Labrador. En août 2018, la Royal St. John’s Regatta célébrera son 200e anniversaire. Les premières courses documentées se sont déroulées le 22 septembre 1818 en l’honneur du 57e anniversaire du couronnement officiel du roi George III, le 22 septembre 1761.
Les organisateurs des courses de régates ont toujours tiré une grande fierté des liens étroits qu’ils entretiennent avec la monarchie. L’événement sportif a attiré plusieurs membres de la famille royale, y compris le prince Albert Edward, le futur roi Edward, en 1860, et la reine Elizabeth II et le prince Philip, en 1978.
Depuis 1818, les courses de régates sont devenues un élément important de notre histoire et de notre culture. Maintenant organisées le premier mercredi d’août tous les ans, elles sont souvent décrites comme la plus grande fête en plein air du monde. Des foules de plus de 50 000 personnes se rassemblent sur les berges du lac Quidi Vidi, au cœur de St. John’s, pour assister aux courses et baigner dans l’atmosphère festive.
La Royal St. John’s Regatta est une curieuse entité. C’est le seul jour férié en Amérique du Nord à avoir été désigné par un comité de personnes qui n’est pas associé à un organisme gouvernemental. Il s’agit également du seul congé qui dépend du temps qu’il fait à l'extérieur. C’est aussi l’une des dernières compétitions d’aviron à siège fixe dans le monde et la seule où des équipes doivent contourner des bouées et retourner à la ligne de départ pour terminer la course. Enfin, c’est l’une des quatre organisations à Terre-Neuve-et-Labrador qui a le rare privilège de porter le titre « royal ».
Aucune régate n’a eu lieu de 1861 à 1870 en raison de l’agitation politique et religieuse qui régnait à Terre-Neuve. On craignait qu’un rassemblement de la sorte n'entraîne des émeutes et des troubles. Après le Grand Feu de 1892, il n’y a pas eu de régate non plus, car les berges du lac Quidi Vidi servaient à loger provisoirement des gens qui avaient perdu leur maison.
Toutefois, une fête qui promet de rester dans les annales aura lieu le 1er août prochain. Vous y êtes tous invités. Arrivez quelques jours plus tôt, si vous voulez, pour assister à un autre événement marquant, le festival de la rue George, qui commence le 26 juillet et se termine le jour des régates. Il dure cinq jours. Disons que ce sera un excellent début pour le 200e anniversaire des régates. Les histoires, les chansons, les récits, les poèmes et les anecdotes sont trop nombreux pour tous les mentionner ici aujourd’hui. La Royal St. John’s Regatta est une tradition dont nous sommes fiers et que nous honorons à Terre-Neuve-et-Labrador. Je demande à tous mes collègues de se joindre à moi pour souhaiter la meilleure des chances en août prochain au comité responsable du 200e anniversaire — moment où nous célébrerons 200 ans de succès, d’histoire et de culture ainsi que la fierté des Terre-Neuviens et des Labradoriens.
[Français]
AFFAIRES COURANTES
Le Sénat
Préavis de motion concernant la période des questions de la séance du 24 avril 2018
L’honorable Diane Bellemare (coordonnatrice législative du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :
Que, pour permettre au Sénat de recevoir un ministre de la Couronne au cours de la période des questions tel qu’autorisé par le Sénat le 10 décembre 2015, et nonobstant ce que prévoit l’article 4-7 du Règlement, lorsque le Sénat siégera le mardi 24 avril 2018, la période des questions commence à 15 h 30, toutes les délibérations alors en cours au Sénat étant interrompues jusqu’à la fin de la période des questions, qui sera d’une durée maximale de 40 minutes;
Que, si un vote par appel nominal coïncide avec la période des questions tenue à 15 h 30 ce jour-là, ce vote soit reporté et ait lieu immédiatement après la période des questions;
Que, si la sonnerie d’appel pour un vote retentit à 15 h 30 ce jour-là, elle cesse de se faire entendre pendant la période des questions et qu’elle retentisse de nouveau à la fin de la période des questions pour le temps restant;
Que, si le Sénat termine ses travaux avant 15 h 30 ce jour-là, la séance soit suspendue jusqu’à 15 h 30, heure de la période des questions.
L’ajournement
Préavis de motion
L’honorable Diane Bellemare (coordonnatrice législative du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :
Que, lorsque le Sénat s’ajournera après l’adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu’au mardi 24 avril 2018, à 14 heures.
[Traduction]
Agriculture et forêts
Préavis de motion tendant à autoriser le comité à siéger en même temps que le Sénat
L’honorable Diane F. Griffin : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :
Que le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts soit autorisé à se réunir le mardi 24 avril 2018, à 17 heures, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l’application de l’article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.
Pêches et océans
Préavis de motion tendant à autoriser le comité à siéger en même temps que le Sénat
L’honorable Fabian Manning : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :
Que le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans soit autorisé à se réunir le mardi 24 avril 2018, à 17 heures, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l’application de l’article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.
PÉRIODE DES QUESTIONS
Les ressources naturelles
L’industrie pétrolière et gazière
L’honorable Larry W. Smith (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat et porte sur le projet de pipeline Trans Mountain. Hier, en France, on a interrogé le premier ministre au sujet de la crise qui se dessine autour de ce projet.
En réponse, le premier ministre a déclaré ce qui suit :
[Français]
[...] il faut financer la transition vers la réduction de l’utilisation de produits pétroliers. On ne peut pas tout changer dans nos économies du jour au lendemain.
[Traduction]
Cette récente déclaration n’a rien de surprenant. D’ailleurs, en janvier l’an dernier, le premier ministre avait déclaré, au sujet des sables bitumineux de l’Alberta :
Nous devons réduire progressivement l’exploitation de cette ressource.
Si le premier ministre croit réellement que l’expansion du réseau Trans Mountain est dans l’intérêt national et sera concrétisée, s’il souhaite réellement que les investisseurs canadiens et étrangers investissent au Canada, pourquoi continue-t-il de parler de transition en vue d’abandonner l’exploitation de nos sables bitumineux?
L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénateur de sa question. Le premier ministre et son gouvernement ont dit très clairement que le pipeline Trans Mountain est dans l’intérêt national, et d’une importance stratégique. C’est la raison pour laquelle le gouvernement a si activement assuré la promotion de ce pipeline. C’est la raison pour laquelle le premier ministre a réuni, pendant le week-end, les premiers ministres en désaccord à propos de ce projet. C’est la raison pour laquelle le premier ministre a demandé au ministre des Finances de lancer officiellement une discussion d’ordre financier avec l’entreprise Kinder Morgan afin que ses dirigeants sachent que le gouvernement du Canada est prêt à mettre fin à l’incertitude qui pourrait les préoccuper.
C’est dans l’intérêt du Canada et dans notre intérêt à tous, en effet, de faire de ce que nous pouvons pour faire avancer le projet. Je suis content de voir que les parlementaires de part et d’autre sont d’accord là-dessus.
Concernant précisément la transition vers une économie où les émissions de carbone seraient moindres, je puise simplement l’inspiration dans le discours que l’honorable sénateur Neufeld a prononcé hier.
Le sénateur Smith : Je vous remercie pour votre réponse. Je pensais, étant donné que vous êtes leader du gouvernement dans cette Chambre, que vous auriez peut-être l’occasion de lui suggérer d’éviter de dresser les provinces les unes contre les autres par ses commentaires. Nous voulons, en effet, nous orienter vers de nouvelles économies et de nouvelles techniques qui ne seront pas nécessairement dépendantes du pétrole à l’avenir.
(1440)
Lundi, le gouvernement de la Colombie-Britannique a rendu publique une liste de six exigences de protection environnementale qui auraient été communiquées au gouvernement fédéral en février. Cela contredit les dires du premier ministre, qui affirme que la Colombie-Britannique n’a toujours pas présenté de proposition concernant ce qu’elle attend du gouvernement fédéral quant à l’amélioration du Plan de protection des océans.
Il s’agit, je suppose, d’un autre exemple montrant que le premier ministre — je me demande bien quelle peut être sa stratégie — ne prend pas au sérieux la menace qui pèse sur le projet Trans Mountain.
Pourquoi le premier ministre a-t-il laissé ce projet s’embourber à ce point et la crise exploser avant de, finalement, n’avoir plus d’autre choix que d’intervenir?
Le sénateur Harder : Encore une fois, l’appui du premier ministre et du gouvernement à ce projet ne date pas d’hier. Le gouvernement a soutenu le projet, notamment pendant le processus d’attribution des approbations réglementaires. Le premier ministre et le gouvernement ont affirmé clairement qu’ils prendraient les mesures nécessaires pour que ce projet se réalise.
[Français]
L’honorable Pierre-Hugues Boisvenu : Ma question s’adresse également au représentant du gouvernement au Sénat, et s’inscrit dans le même ordre d’idées que les questions du sénateur Smith.
On sait que le premier ministre du Canada a laissé tomber le projet d’oléoduc Énergie Est, en choisissant de ne pas intervenir comme il le fait en ce moment dans l’Ouest canadien. En plus de l’avoir laissé tomber, il a même reproché aux administrateurs du projet de ne pas avoir poursuivi leurs démarches.
En fin de semaine, le premier ministre rencontrait les représentants des deux provinces de l’Ouest canadien; il était même prêt à utiliser l’argent des contribuables pour ce faire. Monsieur le leader, ne croyez-vous pas que, en intervenant de cette façon et en créant de l’opposition, pas seulement entre la Colombie-Britannique et l’Alberta, mais aussi avec le Québec, le premier ministre, dans le développement du secteur de l’énergie pétrolière au Canada, joue mal son rôle de leader?
[Traduction]
Le sénateur Harder : Évidemment que non. Je ne suis pas d’accord sur la prémisse de la question. Ce n’est pas la faute du premier ministre du Canada si le projet Énergie Est a été annulé. La décision a été prise par TransCanada en raison des conditions changeantes du marché; c’est l’entreprise elle-même qui l’a affirmé.
Quant au reste de la question, je le répète : le gouvernement du Canada et le premier ministre du Canada soutiennent ce projet et ils prennent les mesures requises pour qu’il se réalise.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Monsieur le leader, le premier ministre du Canada s’est présenté sur la place publique — on l’a vu dans les médias en fin de semaine — en déchirant presque sa chemise pour dire que le projet allait être réalisé. Au départ, lorsqu’il a été élu en 2015, le premier ministre a dit qu’il appuyait le projet d’oléoduc Énergie Est qui acheminerait le pétrole vers le Nouveau-Brunswick. Ma question est simple : pourquoi le premier ministre s’implique-t-il autant dans l’Ouest canadien pour réaliser ce projet, alors qu’il a fermé les yeux sur un projet tout aussi important dans l’Est du Québec?
[Traduction]
Le sénateur Harder : Je répète encore une fois que c’est la société TransCanada qui a décidé d’abandonner le projet Énergie Est parce que, si j’ai bien compris, les conditions du marché avaient changé.
Le premier ministre s’efforce d’assurer à Kinder Morgan que le gouvernement du Canada est prêt à répondre à toutes les préoccupations que pourrait avoir l’entreprise en ce qui concerne les risques associés au projet. Pour sa part, le ministre des Finances a amorcé des discussions pour atteindre cet objectif.
La sécurité publique
L’Agence des services frontaliers du Canada—La détention d’enfants réfugiés
L’honorable Joseph A. Day (leader des libéraux au Sénat) : Sénateur Harder, je pose une question au nom de la sénatrice Jaffer, qui est retenue ailleurs.
Selon un récent rapport de la Société canadienne de la Croix-Rouge, en 2017, le Canada a détenu quelque 291 personnes mineures, en vertu de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. Il appert que 288 de ces enfants ont été détenus dans des établissements fédéraux ou provinciaux, en Ontario et en Colombie-Britannique.
La Société canadienne de la Croix-Rouge craint que ces chiffres ne tiennent pas compte des mineurs qui possèdent la citoyenneté canadienne et qui, par conséquent, ne sont pas visés par une ordonnance de détention, mais qui sont tout de même détenus. Les enfants détenus font l’objet d’une ordonnance de détention officielle ou accompagnent un parent ou leur tuteur légal, auquel cas ils ne sont pas visés par une ordonnance de détention.
Je pose deux questions au gouvernement au sujet de la détention d’enfants. Premièrement, combien de mineurs sont actuellement détenus, qu’ils aient ou non la citoyenneté canadienne? Deuxièmement, quelle est l’approche du gouvernement à l’égard des droits des mineurs qui sont détenus, quelle que soit leur citoyenneté?
L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l'honorable sénateur de sa question. Je m’apprêtais à souhaiter bon retour à la sénatrice Jaffer, parce qu’il s’agit d’un dossier auquel elle s’est intéressée par le passé, comme les sénateurs le savent. Tous les sénateurs, sans égard à leur allégeance, apprécient la vigilance dont elle fait preuve dans ce dossier.
Je veux rappeler au Sénat que, à l’automne, le gouvernement a annoncé une nouvelle directive qui inclut la protection des intérêts de l’enfant parmi les principaux facteurs à prendre en compte lorsque l’Agence des services frontaliers du Canada doit décider s’il faut ou non détenir des gens.
Je voudrais informer la Chambre que, selon le Conseil canadien pour les réfugiés, « ces nouvelles instructions constituent une étape concrète vers la fin de la détention des enfants en vertu de la loi d’immigration au Canada ». Évidemment, il s’agit d’éviter, autant que possible, de loger des enfants dans des établissements de détention. Les mineurs sont parfois autorisés à rester dans un centre de surveillance avec leurs parents, pourvu que ce soit dans l’intérêt des enfants de ne pas être séparés de leurs parents qui sont détenus. Une telle autorisation n’est accordée qu’avec le consentement des parents, et l’Agence des services frontaliers du Canada considère toujours la possibilité de prendre d’autres dispositions en collaboration avec les organismes de protection de la jeunesse.
Honorables sénateurs, je suis heureux de pouvoir dire que le nombre de personnes se trouvant dans les centres de détention pour immigrants a baissé de presque 30 p. 100 au cours des dernières années. J’attire aussi votre attention sur le Cadre national en matière de détention liée à l’immigration, qui est accompagné d’une enveloppe de 138 millions de dollars et qui améliorera encore davantage le système en élargissant le recours aux solutions de rechange, plutôt qu'à la détention, en améliorant considérablement les conditions de vie dans les centres de détention, où se trouvent les personnes pour lesquelles il n’y a pas d’autre choix, en fournissant de meilleurs services médicaux pour la santé physique et mentale, en ayant moins recours aux établissements provinciaux ainsi qu’en renforçant les partenariats entre l’Agence des services frontaliers du Canada, la Croix-Rouge et les Nations Unies. Je cite encore une fois le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, qui est d’avis que le système canadien reste largement un exemple à suivre dans le monde.
En ce qui concerne les statistiques demandées par le sénateur, elles sont accessibles publiquement et je suis heureux de pouvoir dire qu’elles sont mises à jour quotidiennement. Les dernières statistiques trimestrielles indiquent qu’un seul mineur non accompagné a été détenu, tandis que 37 mineurs accompagnés l’ont été, y compris un Canadien.
Les ressources naturelles
L’industrie pétrolière et gazière
L’honorable Pamela Wallin : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement et concerne la saga relative au projet d’expansion de l’oléoduc de Trans Mountain.
Premièrement, nous avons été choqués d’entendre le premier ministre regretter — en fait s’excuser et, en plus, à l’étranger, devant le Parlement français — de ne pas pouvoir renoncer aussi vite qu’il le voudrait à l’économie du pétrole alors que, chez lui, il affirme appuyer entièrement l’oléoduc.
Deuxièmement, après la rencontre de dimanche avec les premiers ministres de l’Alberta et de la Colombie-Britannique, les gouvernement fédéral et albertain ont annoncé un éventuel financement de Trans Mountain, ce qui a amené certains à affirmer que le premier ministre crée ainsi un dangereux précédent, laissant entendre aux entreprises que, en tolérant la contestation, on peut compter sur du financement fédéral ou, ce qui est encore pire, sur une nationalisation.
Troisièmement, comme l’a souligné le premier ministre de la Saskatchewan, Scott Moe, cette province se voit punie par la perte de 62 millions de dollars de financement fédéral parce qu’elle s’oppose à la taxe sur le carbone, qu’il qualifie de néfaste pour l’emploi. De son côté, la Colombie-Britannique se voit offrir plus de 4 milliards de dollars pour des projets d’infrastructures verts, alors même qu’elle essaie d’empêcher la mise sur pied d’un projet qui est dans l’intérêt national.
J’ai deux questions à poser à ce sujet. Premièrement, le gouvernement envisage-t-il de prendre des mesures, dont des sanctions financières, contre la Colombie-Britannique, si cette dernière s’obstine dans son opposition? Deuxièmement, croyez-vous que le gouvernement accueillera favorablement le projet de loi dont le Sénat est saisi et qui vise à appuyer l’expansion de l’oléoduc de Trans Mountain — qui sera synonyme d’emplois pour de nombreuses familles — ou bien le gouvernement est-il de l’avis du sénateur Pratte, qui a affirmé hier que le projet de loi serait contreproductif?
(1450)
L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénatrice de sa question. J’aimerais revenir un instant sur le préambule de la question. Il n’y a rien d’incohérent dans le fait que le Canada considère que, pour atteindre ses objectifs en matière de gaz à effet de serre et de changements climatiques, il doit, à long terme, arriver à ne plus dépendre autant des combustibles fossiles. Le sénateur Neufeld l’a mentionné dans son allocution hier.
Il faut donc veiller à ne pas créer de fausses dichotomies dans cette enceinte lorsque nous sommes en faveur ou pas de certaines choses. D’une certaine façon, la voie de l’avenir, c’est le recours à des solutions axées sur de multiples sources d’énergie, si je puis m’exprimer ainsi. J’espère que le travail accompli par le Sénat, qu’il s’agisse de l’étude des répercussions de la transition vers une économie à faibles émissions de carbone ou de celle sur les effets des changements climatiques sur l’agriculture, nous amènera tous à conclure que le changement fait partie de ce que nous devons gérer et qu’il nous faut bien le gérer. Ce n’est pas être incohérent que d’appuyer la construction de pipelines et l’exportation des ressources en carbone du Canada, tout en reconnaissant que, avec les années, d’autres technologies et sources d’énergie seront nécessaires pour réduire notre empreinte carbone.
En ce qui concerne les questions précises, le premier ministre a demandé au ministre des Finances d’entamer des discussions avec Kinder Morgan. Je ne veux pas me prononcer sur ce qui sera abordé ou pas, mais je peux affirmer que les discussions officielles sur les questions financières ont pour objet de dissiper les incertitudes qui subsistent chez Kinder Morgan. C’est important.
Le premier ministre a aussi déclaré et répété que le gouvernement examine activement des options législatives qui permettront d’affirmer et de renforcer la compétence du gouvernement fédéral dans ce dossier, même si le gouvernement est déjà convaincu d’avoir la compétence dans ce domaine. Ce que j’en conclus, c’est que toutes les options seront examinées. Je suis convaincu que le gouvernement du Canada fera des annonces à cet égard en temps et lieu.
La sénatrice Wallin : J’aimerais revenir au dernier point que j’ai soulevé à propos du projet de loi dont le Sénat est saisi et j’aimerais savoir ce que pense le gouvernement : est-ce une bonne idée qui pourrait les aider ou les encourager, ou est-ce contreproductif?
Le sénateur Harder : Encore une fois, cela s’inscrit totalement dans l’évaluation que fait le gouvernement du Canada des pouvoirs législatifs qu’il pourrait proposer. Ils sont tout à fait conscients du projet de loi qui est présenté et débattu, et auquel nos délibérations peuvent contribuer.
Le Sénat
Les droits et les responsabilités des sénateurs
L’honorable Donald Neil Plett : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat. Ces dernières semaines, sénateur Harder, vous avez été très présent dans les médias. Plusieurs d’entre nous avons trouvé vos commentaires plutôt intéressants, notamment ceux qui portaient sur les intentions et les motivations des conservateurs. Vous avez notamment affirmé ceci :
[…] Certains sénateurs conservateurs voudraient que l’adoption au Sénat soit une simple formalité quand leur parti est au pouvoir et que l’institution rivalise agressivement avec la Chambre élue quand leur parti est dans l’opposition.
Vous avez également affirmé que la procédure d’adoption au Sénat n’était qu’une formalité avant la grande révélation qui a suivi l’élection du gouvernement Trudeau.
Voilà de curieuses accusations, sénateur.
Comment pouvez-vous justifier ces affirmations, alors que 96 p. 100 des sénateurs nommés par M. Trudeau votent en faveur du gouvernement?
Par ailleurs, sénateur Harder, pourriez-vous nommer les sénateurs qui souhaiteraient que le Sénat soit une simple formalité? Nous serions ravis de savoir qui ils sont — ou s’agit-il, comme je le pense, de suppositions?
L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénateur de ses questions et je suis ravi d’avoir été le sujet de ses lectures. Je dirai simplement que le document que j’ai présenté a été préparé pour favoriser un débat documenté sur ce qu’on entend par « institution complémentaire » et sur le rôle que joue le Sénat au sein d’un Parlement bicaméral. C’est dans ce contexte que nous pouvons, je l’espère, conjuguer nos efforts afin de moderniser cette institution.
Le sénateur Plett : Sénateur Harder, vous avez également dit que les conservateurs se « donnaient beaucoup de mal » pour tenter de faire la preuve de l’échec de la réforme du Sénat de M. Trudeau afin de s’en servir « comme munition dans la prochaine campagne électorale ». Vous faisiez allusion ici au fait que nous avons voté contre un projet de loi auquel notre caucus tout entier s’opposait fondamentalement — le projet de loi C-45 —, un projet de loi dont, selon vous, nous avons tenté d’empêcher l’adoption. Comme vous le savez, sénateur Harder, notre parti ne compte que 33 sénateurs sur 105. Nous sommes en minorité. Nous ne pouvons pas empêcher l’adoption d’un projet de loi.
Sénateur, en ma qualité de whip du caucus conservateur, j’ai parlé au whip du gouvernement. J’ai parlé au whip du caucus des indépendants au Sénat. Je les ai avertis que nous allions voter contre le projet de loi. Je leur ai également assuré que nous n’allions pas faire revenir les membres des comités en déplacement, même si c’est exactement ce qu’on fait les autres whips, qui ont donné des consignes pour le vote.
Sénateur Harder, cela ne suffit-il plus que le whip du caucus minoritaire de l’opposition indique aux autres whips de quel côté les membres de son caucus vont voter? Êtes-vous en train de dire que l’opposition officielle doit, à présent, aussi voter en faveur des projets de loi du gouvernement?
Le sénateur Harder : Encore une fois, je remercie l’honorable whip de son intervention. Je dirai simplement que je m’attends à ce que les sénateurs conservateurs votent comme il convient de le faire à leurs yeux et à ce qu’ils continuent de faire ainsi.
Le sénateur Plett : C’est ce que nous avons fait.
Le sénateur Harder : Ce qui me préoccupe, monsieur, c’est le fait que, sur un vote visant à déterminer si un projet de loi de cette importance sera renvoyé au comité, l’opposition vote en bloc pour s’opposer à ce qu’il soit même renvoyé au comité, surtout après que nous nous soyons tous entendus…
Le sénateur Neufeld : Qu’avez-vous fait hier?
Le sénateur Harder : Tenons-nous-en à une question à la fois.
Le sénateur Neufeld : Qu’avez-vous fait hier?
Son Honneur le Président : À l’ordre.
Le sénateur Harder : Si vous vous calmez, je pourrai répondre à la question.
D’après mon expérience limitée, j’estime qu’il est très inhabituel que l’on rejette ou tente de rejeter un projet de loi à l’étape de la deuxième lecture, surtout après que l’on se soit entendu sur le renvoi à un comité. À vrai dire, je suis très sceptique…
Passons à la prochaine question.
[Français]
L’honorable Jean-Guy Dagenais : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat. D’abord, je tiens à vous exprimer mon étonnement et ma plus grande désapprobation quant à la vision que vous avez proposée la semaine dernière du Sénat et du rôle des sénateurs. À ce que je sache, la Constitution canadienne n’a pas été modifiée depuis l’arrivée au pouvoir de votre gouvernement et celle-ci dicte clairement les règles et les devoirs des deux Chambres au sein de notre système de politique démocratique. La démocratie, le désaccord et la liberté d’expression sont et doivent demeurer dans notre système politique.
J’ai été nommé sénateur conservateur, et je demeure un sénateur conservateur qui porte cette étiquette. Je me sens libre d’exprimer mes opinions dans cette Chambre et je n’ai pas l’intention de changer. Sans vouloir vous manquer de respect, je crois que le sénateur qui n’est pas libre de ses idées, c’est vous. J’ai l’impression que toutes vos actions sont guidées par le Bureau du premier ministre. Est-ce là travailler dans l’intérêt de tous les Canadiens?
J’irais même jusqu’à me demander si vous cherchez à entraîner dans votre démarche libérale les sénateurs indépendants en leur dictant des consignes qui proviennent de votre patron, de sorte que les sénateurs ont le droit de s’exprimer tant qu’ils votent comme on le leur indique. Peut-être qu’il est possible d’avoir honte de porter le vrai insigne libéral par les temps qui courent, mais la situation ne s’améliorera sûrement pas.
Monsieur le leader du gouvernement, les idées que vous avez exprimées récemment sur le rôle du Sénat et des sénateurs ont-elles été télécommandées par le Bureau du premier ministre ou sont-elles le reflet de la pauvre opinion personnelle que vous avez des membres de cette Chambre et du rôle démocratique que la Constitution canadienne nous accorde?
[Traduction]
Le sénateur Harder : Je remercie l’honorable sénateur de sa question. J’aimerais seulement dire que le document de travail que j’ai présenté visait à encourager les sénateurs à débattre de la façon dont le Sénat pourrait s’exprimer de façon moins partisane, être plus indépendant, transparent, responsable et jouer un rôle complémentaire par rapport à la Chambre des communes.
(1500)
Ce sont des observations et, souhaitons-le, des balises qui pourraient être utiles à l’avenir. Pour ce qui est de leur paternité, j’assure à l’honorable sénateur que ces pensées sont, pour reprendre vos paroles, le fruit de ma pauvre opinion personnelle.
Le cabinet du premier ministre
Le voyage du premier ministre en Inde
L’honorable Denise Batters : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat.
Sénateur Harder, il y a six semaines, je vous ai posé des questions fort simples. Je vous ai demandé quel sénateur faisait partie de l’entourage du premier ministre lors du voyage en Inde, qui a payé le voyage de ce sénateur et si le sénateur en question a voyagé dans l’avion du premier ministre.
Comme je l’avais indiqué ce jour-là, les médias ont posé les mêmes questions au sujet des députés qui ont participé à ce voyage en Inde, et le cabinet du premier ministre leur a fourni une liste alors que le voyage n’était pas terminé. Or, cela fait maintenant six semaines que je vous ai posé ces questions mais vous ne m’avez toujours pas répondu. Je n’arrive pas à comprendre pourquoi il vous faut des mois pour répondre à des questions on ne peut plus simples.
Votre bureau reçoit un financement annuel de 1,5 million de dollars et compte un important effectif. Par surcroît, vous avez eu amplement de temps pour communiquer avec le cabinet du premier ministre. Qui ne veut pas donner ces réponses aux Canadiens? Est-ce le cabinet du premier ministre ou vous? Sénateur Harder, quelles sont les réponses aux questions que j’ai posées au sujet du voyage en Inde?
L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie la sénatrice de me rappeler cette demande de renseignements. En toute franchise, comme je ne sais pas où en est le processus, je vais me renseigner et je vous fournirai une réponse plus tard.
[Français]
Le Sénat
La délégation sénatoriale à Washington—Le rôle du représentant du gouvernement
L’honorable Claude Carignan : Honorables sénateurs, ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat. Sénateur, vous avez critiqué un voyage à Washington. Je le fais rarement, mais j’ai décidé de consulter la publication de vos voyages. Pouvez-vous nous confirmer que vous êtes allé à Washington et, avec la même transparence dont nous faisons preuve, nous expliquer qui vous avez rencontré et quel était l’objet de ce voyage à Washington? De plus, j’ai déjà été leader du gouvernement au Sénat et je ne me souviens pas d’être allé aussi souvent à Toronto que vous. Pouvez-vous nous expliquer les voyages hautement irréguliers que vous faites à Toronto?
[Traduction]
L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie le sénateur de sa question. Je suis effectivement allé à Washington il y a environ un an en compagnie de la sénatrice Frum, pour participer à une conférence, dont il me fait plaisir de présenter le rapport.
Il n’est pas inhabituel que des sénateurs effectuent des visites ou qu’ils le fassent en groupe. Il est toutefois inhabituel que des sénateurs d’un parti prennent part à une visite, qui porte sur un sujet faisant l’objet de débats au Sénat, avec des gens haut placés d’une administration dont les points de vue sont bien connus et sur lesquels on peut facilement se renseigner sur Google.
[Français]
Le sénateur Carignan : Je lisais également votre document de 51 pages. Heureusement, votre histoire ne correspond pas nécessairement à l’histoire.
Pouvez-vous nous décrire votre vision du rôle d’un leader du gouvernement au Sénat? Lorsqu’il s’agit d’un leader du gouvernement conservateur, c’est nécessairement un rôle partisan, mais lorsqu’il s’agit d’un leader du gouvernement libéral nommé par Trudeau, comme vous, ici, qui êtes le porte-voix du gouvernement Trudeau, n’est-ce pas partisan? J’ai de la difficulté à comprendre votre double discours et votre double vision.
[Traduction]
Le sénateur Harder : Je remercie l’honorable sénateur de me donner l’occasion de me répéter. L’objectif est d’avoir un Sénat qui est moins partisan et plus indépendant. À cet égard, comme vous le savez, je ne fais pas partie du caucus du gouvernement. Je ne suis pas membre du Cabinet, bien que je sois membre du Conseil privé et que, à l’instar de l’honorable sénateur, j’assiste à des réunions du Cabinet de temps à autre, au besoin.
En réalité, la question repose entièrement sur la façon dont nous évoluons à titre d’institution. J’espère que nous pouvons devenir une institution qui respecte l’indépendance de tous les sénateurs dans l’exercice de leurs responsabilités, qui consistent à évaluer les projets de loi d’initiative ministérielle et à se prononcer sur ceux-ci.
[Français]
Le sénateur Carignan : Sénateur Harder, en ce qui a trait à votre position au sujet du voyage à Washington, est-ce que c’est l’intention du gouvernement Trudeau de modifier les règles administratives du Sénat pour empêcher les sénateurs de voyager à Washington et à New York?
[Traduction]
Le sénateur Harder : C’est la première fois que j’entends parler d’une telle mesure. Si l’honorable sénateur suggère que les règles soient passées en revue, je serais heureux de communiquer sa suggestion aux personnes responsables, mais je ne suis certainement pas de cet avis.
ORDRE dU JOUR
La Loi sur les traitements
La Loi sur la gestion des finances publiques
Projet de loi modificatif—Troisième lecture—Ajournement du débat
L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) propose que le projet de loi C-24, Loi modifiant la Loi sur les traitements et apportant une modification corrélative à la Loi sur la gestion des finances publiques, soit lu pour la troisième fois.
— Honorables sénateurs, c’est un plaisir pour moi de parler de nouveau du projet de loi C-24, qui modifierait la Loi sur les traitements. Je tiens à remercier le Comité sénatorial permanent des finances nationales de son étude et des excellentes questions qu’il a posées aux témoins.
Ce projet de loi est de nature technique et administrative. Il remplit une promesse faite par le premier ministre, qui s’était engagé à inscrire dans la loi que tous les ministres sont officiellement égaux.
Ce texte législatif ajoute cinq postes à la Loi sur les traitements qui correspondent actuellement à des postes de ministre d’État et il crée un cadre afin que les ministres en question puissent compter sur l’aide des ministères existants dans l’exercice de leurs fonctions. Aucun nouveau ministère ne sera créé. Les postes de ministre s’équivalent tous, et tous les ministres relèvent directement du premier ministre.
[Français]
Il s’agit des postes du ministre de la Francophonie, du ministre des Sciences, du ministre de la Petite Entreprise et du Tourisme, du ministre des Sports et des Personnes handicapées, et du ministre de la Condition féminine.
[Traduction]
Ces ministres doivent rendre compte des résultats qu’ils obtiennent directement au premier ministre et au Parlement. Ils ont le même statut que les autres membres du Cabinet.
L’augmentation du nombre de ministres sera compensée par la suppression de six postes de ministres responsables du développement régional.
Le ministre de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique demeurera le ministre de tutelle des agences de développement régional.
[Français]
De plus, le projet de loi propose de remplacer le titre de ministre de l’Infrastructure, des Collectivités et des Affaires intergouvernementales par le titre de ministre de l’Infrastructure et des Collectivités. Ce changement reflète la répartition des responsabilités actuelles au sein du Cabinet ainsi que le fait que le premier ministre joue le rôle de ministre des Affaires intergouvernementales.
[Traduction]
J’aimerais, en terminant, parler des coûts associés au projet de loi C-24. Les modifications qu’il propose d’apporter à la Loi sur les traitements ne feront pas augmenter le coût total que représente déjà le salaire des ministres. Les personnes qui sont actuellement ministres d’État reçoivent présentement le même salaire que leurs autres collègues du Cabinet et leur budget de fonctionnement est à la hauteur de leurs responsabilités. Le projet de loi C-24 n’y changera strictement rien.
[Français]
Permettez-moi d’en faire un résumé. Tout d’abord, la Loi sur les traitements permet d’honorer l’engagement du premier ministre de créer un conseil des ministres paritaire. Ensuite, l’établissement d’un cadre législatif de soutien des huit nouveaux postes ministériels grâce aux ministères existants élimine la nécessité de créer de nouveaux ministères. Enfin, le retrait de postes de développement régional compense l’augmentation du nombre de postes ministériels sans avoir de répercussions sur les organismes de développement régional eux-mêmes.
[Traduction]
Honorables sénateurs, j’espère que, à l’issue de la troisième lecture, vous aurez entendu le message que vous envoie le comité permanent et que vous adopterez ce projet de loi. Je vous remercie.
[Français]
L’honorable Claude Carignan : Est-ce que le sénateur parlait en son nom ou au nom du gouvernement Trudeau?
Le sénateur Harder : Je parlais en tant que représentant du gouvernement.
(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)
(1510)
[Traduction]
La Loi sur l’accès à l’information
La Loi sur la protection des renseignements personnels
Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat
L’ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Ringuette, appuyée par l’honorable sénatrice Cools, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-58, Loi modifiant la Loi sur l’accès à l’information, la Loi sur la protection des renseignements personnels et d’autres lois en conséquence.
L’honorable Elaine McCoy : Honorables sénateurs, j’aimerais d’abord préciser certaines choses à votre intention. Comme plusieurs d’entre vous le savent, je suis atteinte d’une affection qui touche ma respiration et, lorsque je me déplace trop ou que je bouge trop rapidement, je suis atteinte d’un phénomène que les médecins appellent la désoxygénation. Je dois alors faire une pause pour reprendre mon souffle. Cela peut aussi m’arriver lorsque je parle debout trop longtemps.
J’ai été un peu décontenancée la dernière fois que j’ai pris la parole dans cette enceinte. Cette situation s’est produite, et ma voix s’est mise à trembler. Après mon discours, un sénateur est venu me voir pour me dire : « Je peux comprendre que cette question vous tient tellement à cœur que vous devenez très émotive, mais je pense que vous avez eu tort de voter contre moi. »
Sachez que, même si ma voix tremble, je suis encore en pleine possession de mes facultés de logique et d’analyse. Il s’agit d’une affection purement physique. Il ne faut donc pas penser qu’il s’agit d’un signe de faiblesse de ma part ou que l’émotion me fait perdre ma capacité de procéder à un second examen objectif. Si cela se produit aujourd’hui, j’espère que vous comprendrez les raisons de mon état très agaçant. C’est très ennuyeux.
Maintenant, je vous saurais gré de vous concentrer pendant au moins deux minutes sur le projet de loi C-58, qui vise à modifier le régime d’accès à l’information au sein du gouvernement fédéral.
Je tiens à ce que vous sachiez que, selon moi, ce projet de loi est le plus important que nous ayons à étudier cette session-ci. Ce projet de loi est un rempart, il est absolument nécessaire au fonctionnement démocratique du pays, ou du moins au meilleur fonctionnement démocratique possible, et il mérite l’attention de tout le monde.
En fait, la Cour suprême du Canada qualifie la Loi sur l’accès à l’information de loi quasi constitutionnelle. En 1997, dans l’arrêt Dagg, elle a déclaré ceci :
La loi en matière d’accès à l’information a pour objet général de favoriser la démocratie en aidant à garantir que les citoyens possèdent l’information nécessaire pour participer utilement au processus démocratique, et que les politiciens et bureaucrates demeurent comptables envers l’ensemble de la population.
Plusieurs années plus tard, en 2010, la Cour suprême a renforcé cette approche en qualifiant l’accès de :
[…] droit dérivé qui peut intervenir lorsqu’il constitue une condition qui doit nécessairement être réalisée pour qu’il soit possible de s’exprimer de manière significative sur le fonctionnement du gouvernement.
L’information est synonyme de pouvoir. Si on ne sait pas ce qui se passe, on ne peut pas demander des comptes au gouvernement.
À mon avis, le projet de loi C-58 n’appuie malheureusement pas le principe de l’accès à l’information. En fait, le projet de loi C-58 le bafoue.
J’aimerais pouvoir dire que nous devrions bloquer ce projet de loi dès maintenant au Sénat, mais nous en sommes à l’étape de la deuxième lecture, et le Sénat du Canada a une tradition de longue date selon laquelle il ne rejette jamais une mesure législative à cette étape.
Peu importe s’il s’agit d’un important projet de loi d’initiative ministérielle ou du projet de loi le moins bien ficelé que puisse présenter un député d’arrière-ban. Nous le renvoyons toujours au comité et nous procédons ainsi parce que nous estimons que tout le monde a le droit d’être entendu et que les Canadiens doivent aussi participer à nos délibérations, ce qu’ils peuvent faire au comité.
Nous croyons aussi que nous devrions prendre le temps de nous renseigner en consultant les experts et les gens que le sujet intéresse particulièrement.
Alors, je ne suis pas en faveur du rejet du projet de loi à l’étape de la deuxième lecture. Je pense que nous devrions le renvoyer au comité pour qu’il puisse l’étudier très attentivement.
Toutefois, nous devons vraiment nous poser la seule question qui mérite d’être posée à cette étape-ci : serons-nous capables de sauver ce projet de loi de manière à ce que, dans les faits, il puisse vraiment engendrer un système robuste d’accès à l’information au Canada?
Si nous jugeons que cela est possible, alors poursuivons le travail, mais, dans le cas contraire, nous devrions nous demander quelle orientation prendre et envisager notamment ce que nous recommande l’Assemblée des Premières Nations, qui souhaite que le gouvernement retire le projet de loi afin que des discussions de gouvernement à gouvernement ou, si vous préférez, de nation à nation puissent avoir lieu avec les peuples autochtones, ce qui n’a pas été fait. Je serais pour cette idée si elle pouvait être retenue.
Aujourd’hui, je n’entrerai pas trop dans les détails de ce qui devrait être corrigé. Vous avez entendu deux excellents discours prononcés par la sénatrice Pate et le sénateur Pratte. Ils ont énuméré un certain nombre de problèmes, qui ne sont d’ailleurs pas les seuls.
Je pense que vous saisissez ce qui est en jeu, pour l’essentiel, mais c’est un projet de loi très détaillé. Il n’a pas le même retentissement que d’autres projets de loi actuellement étudiés. Ce n’est pas le genre de projet de loi qui va susciter des discussions pendant les repas. C’est un projet de loi détaillé, et ce sont les comités qui sont les mieux placés pour traiter des détails. Par conséquent, je préconise le renvoi du projet de loi à un comité sans tarder.
La seule question qui n’a pas encore été abordée jusqu’à maintenant et qui mérite, selon moi, de l’être est la proposition présentée dans le projet de loi C-58 qui prévoit l’ajout d’une nouvelle partie à la Loi sur l’accès à l’information, la partie 2.
Tout d’abord, laissez-moi vous dire que la nouvelle partie 2 est l’un des gestes les plus vides de sens que j’aie jamais vus dans un projet de loi. Il propose d’insister sur la publication proactive par les députés et les sénateurs; tout cela est très beau et nous pouvons vivre avec cela. Ce n’est pas un problème. C’est ce que nous faisons déjà; nous en avons pris l’initiative nous-mêmes. Ce n’est pas un problème.
Sachez que ce n’est pas la recommandation qu’a formulée la commissaire à l’information. À la page 12 de son rapport de 2015, Viser juste pour la transparence, la commissaire formule la recommandation suivante :
[…] que le champ d’application de la Loi s’étende aux organismes de soutien du parlement […]
Le Bureau de régie interne, la Bibliothèque du Parlement, le commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique et le commissaire à l’éthique du Sénat sont les exemples qu’elle donne.
Ce sont tous des postes administratifs. Or, rien n’a changé en ce sens. Même au moyen de la Loi sur l’accès à l’information, ni vous ni moi ne pouvons trouver une quelconque information détenue par l’Administration du Sénat.
Nos employés sont incapables de trouver des renseignements par ce moyen. Ils sont complètement laissés à eux-mêmes, sans outils pour protéger leurs propres intérêts.
C’est sur ce genre d’information que portaient les recommandations de la plus grande experte en la matière, mais ses recommandations ont été totalement ignorées. Au lieu de cela, quelqu’un a dit : « Demandons aux parlementaires élus et nommés de divulguer leurs dépenses de façon proactive. »
Comme je l’ai dit, nous pouvons nous y faire; toutefois, il s'agit réellement d'une mesure sans contenu. Par contre, ce que nous ne pouvons pas accepter, c’est la prise de pouvoir que représente le projet de loi C-58 pour le Sénat du Canada. Cette prise de pouvoir menace d’enlever des droits et des responsabilités aux sénateurs pour les donner à une personne qui pourra, ensuite, déterminer s’il y a ou non privilège.
(1520)
Selon une pratique de longue date que nous connaissons tous, nous avons l’habitude de demander au Président du Sénat de décider si une question de privilège paraît fondée à première vue. Cette approche très efficace et réfléchie nous empêche de perdre du temps. C’est une procédure extrêmement utile, mais ce n’est pas ce qui est proposé dans le projet de loi. Selon la mesure législative, au lieu de laisser le Sénat déterminer s’il y a une atteinte au privilège, comme nous l’avons toujours fait, nous pourrions renvoyer la question au Comité du Règlement, qui communiquerait sa décision au Sénat. Voilà qui est extrêmement important. Ce changement cible le cœur même de notre responsabilité, et nous assumons cette responsabilité collectivement.
Il est possible que ce changement ait été proposé par inadvertance. C’est ce que j’ai choisi de croire en me disant que cette conséquence imprévue est le fait d’une personne qui ne comprend pas bien les rouages du Sénat. Selon moi, il serait facile de corriger cet aspect, mais je crois qu’il n’a pas encore été relevé. Je vous le signale donc aujourd’hui. J’insiste sur le fait que nous ne devons pas accepter une pareille ingérence dans les droits et les responsabilités de l’ensemble des sénateurs. La question touche l’un des principes qui nous sont très chers : l’égalité de tous les sénateurs et la responsabilité de participer qui revient à chacun d’entre eux.
En conclusion, je vous prie d’examiner de près le projet de loi. Je ne vous demande pas de présenter de nombreux discours sur le sujet, mais plutôt d’effectuer un examen en profondeur. Si vous siégez au comité, veuillez faire preuve de diligence. Faisons en sorte d’entendre les meilleurs témoins. Nous pouvons faire mieux que l’autre endroit. J’ai consulté la liste des témoins, et des intervenants incontournables ne s’y trouvaient pas. Il faut faire mieux.
Nous voulons également que tous ceux qui ne siègent pas au comité soient au courant des amendements renvoyés — et je m’attends à ce que le comité en renvoie ou en propose à l’étape de la troisième lecture. Nous devons aussi, encore une fois, être prêts à décider si nous en avons fait suffisamment pour sauver le projet de loi afin qu’il y ait un solide régime d’accès à l’information au Canada. Si vous pensez que nous n’avons pas fait cela, alors j’espère que vous défendrez fermement un des outils de la démocratie et un des mécanismes qui contribuent à empêcher la tyrannie, la corruption et l’abus de pouvoir, que ce soit au niveau que la sénatrice Pate a décrit si éloquemment hier, le niveau individuel, ou bien à un niveau d’un ordre bien plus grand.
Merci beaucoup.
Son Honneur le Président : Sénatrice McCoy, votre temps de parole est écoulé. Une sénatrice aimerait vous poser une question. Demandez-vous du temps pour y répondre?
La sénatrice McCoy : Oui.
Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?
Des voix : D’accord.
L’honorable Pierrette Ringuette : Honorables sénateurs, si vous le permettez, étant donné ce qu’a dit la sénatrice McCoy au début de son intervention, peut-elle rester assise pendant cet échange?
Je tiens à vous remercier de votre contribution au débat sur le projet de loi C-58. Je suis quelque peu perplexe de vous entendre dire que cette prise de pouvoir sur le Sénat concernant le privilège des sénateurs doit disparaître. Je sais que, tout comme moi, vous avez toujours porté une attention spéciale à la question du privilège. Quand j’ai entamé l’étude du projet de loi C-58, j’ai consulté des experts, dont un que vous avez consulté à plusieurs reprises, sénatrice McCoy. En ce qui concerne son analyse du privilège, je lirai une courte citation que je vous demanderai de commenter.
Voici la citation :
Les articles pertinents du projet de loi C-58 sont ceux qui parlent de ceci : « e) d’y créer une nouvelle partie prévoyant la publication proactive de renseignements ou de documents afférents au Sénat, à la Chambre des communes, à des entités parlementaires, aux bureaux de ministre […] ». Dans le cas du Sénat et des sénateurs, ces articles touchent les dépenses afférentes aux déplacements, les frais d’accueil et les contrats, donc des questions administratives et financières qui relèvent normalement de la compétence du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration, en vertu de la Loi sur le Parlement du Canada.
Il est important de noter qu’il est question de la Loi sur le Parlement du Canada.
Autrement dit, normalement, ces questions ne font pas partie des travaux du Sénat et ne sont pas couvertes par le privilège parlementaire. Le droit qu’a le Sénat de gérer ses affaires internes ne comprend pas, selon moi, les questions administratives et financières.
Pourriez-vous répondre à ces observations, sénatrice McCoy?
La sénatrice McCoy : J’établis une distinction. Je ne dis pas que les articles en question portent atteinte au privilège. Ce n’est vraiment pas mon propos. Vous parlez peut-être de Thomas Hall, que vous avez consulté. Je lui ai parlé de ces questions, moi aussi, et il a tout à fait raison. Plus il existe un lien étroit entre un élément, comme le présent débat, et les travaux du Sénat, plus cet élément peut devenir une question de privilège.
Ce n’est pas mon propos. Je dis simplement que la présence de cette disposition dans la loi nous enlève, à moi, à vous, au sénateur Gold, et à tous les sénateurs, la possibilité de définir la notion de privilège, et qu’elle donne ce pouvoir à un seul sénateur, le Président, ce qui va à l’encontre de notre tradition. Il s’agit d’une concentration du pouvoir. Chaque fois que nous acceptons de concentrer le pouvoir, si nous sommes placés en situation de duopole ou si une hiérarchie permet au comité directeur de prendre le contrôle de la conduite de l’institution, nous nous retrouvons en difficulté. En fait, nous faisons de notre mieux. Nous faisons de notre mieux, et nous travaillons comme une coopérative de 105 sénateurs.
La sénatrice Ringuette : J’ajoute que, depuis les 15 ans que je siège au Sénat, au moins deux fois par année, on soulève la question de privilège et le Président évoque les quatre critères énoncés dans le Règlement.
Cependant, en 15 ans, jamais je n’ai vu un comité sénatorial résoudre une question de privilège d’un sénateur. Le fait est que, dans le projet de loi, une personne, le titulaire d’une fonction, comme le Président au Sénat ou le greffier de la Cour suprême…
(1530)
La sénatrice McCoy : Êtes-vous en train de vous lancer dans un discours dans le cadre du débat?
La sénatrice Ringuette : Non. Je vais poser une question, sénatrice McCoy. Merci de votre patience.
Cela ne veut pas dire que ce pouvoir ne peut pas être délégué à une entité.
Son Honneur le Président : Excusez-moi, sénatrice Ringuette. Le temps de parole de la sénatrice McCoy est, encore une fois, écoulé. Demandez-vous plus de temps, sénatrice McCoy? Le consentement est-il accordé?
Une voix : Non.
Son Honneur le Président : J’ai entendu un « non ».
(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)
[Français]
Le Budget des dépenses de 2018-2019
Autorisation au Comité mixte de la Bibliothèque du Parlement d’étudier le crédit 1 du Budget principal des dépenses
L’honorable Diane Bellemare (coordonnatrice législative du gouvernement au Sénat), conformément au préavis donné le 17 avril 2018, propose :
Que le Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement soit autorisé à étudier, afin d’en faire rapport, les dépenses prévues au crédit 1 de la Bibliothèque du Parlement dans le Budget principal des dépenses pour l’exercice se terminant le 31 mars 2019;
Qu’un message soit transmis à la Chambre des communes pour l’en informer.
— Honorables sénateurs, je propose l’adoption de la motion inscrite à mon nom.
[Traduction]
L’honorable Terry M. Mercer (leader adjoint des libéraux au Sénat) : J’aimerais que la sénatrice Bellemare nous donne un peu plus d’explications, car, selon moi, elle s’apprête à embarquer dans une mission pratiquement impossible au Sénat. Je suis membre du Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement depuis à peu près six ans. Je n’ai aucune difficulté à me souvenir des réunions auxquelles j’ai assisté au cours des six dernières années, car il n’y en a eu que deux. Lors de ces deux réunions, j’ai levé ma main pour poser une question. Soit dit en passant, l’objet de ces réunions était d’élire un président de la Chambre des communes et un coprésident du Sénat. Dès que cela fut accompli, le marteau est tombé et tout le monde est parti.
Sans vouloir être partisan, je tiens tout de même à dire que ce sont les conservateurs qui ont mené le jeu à la première réunion et les libéraux à la deuxième. Personne ne voulait entendre ce que j’avais à dire en tant que sénateur. La raison pour laquelle je souhaitais intervenir à l’époque était pour demander au comité de faire son travail et d’inviter le directeur parlementaire du budget à comparaître devant lui. À ce moment-là, dans les deux cas, en fait, le directeur parlementaire du budget a fait rapport au Parlement par l’entremise du Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement. Il ne le fait plus, car on a changé les règles. Toutefois, demain midi, le Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement va de nouveau se réunir. Il va élire un coprésident de la Chambre des communes et un du Sénat. J’ai déjà fait savoir au greffier du comité que j’aimerais prendre la parole une fois qu’ils auront été élus. Je vais en profiter pour demander au comité de faire exactement ce que je demande qu’il fasse depuis maintenant six ans.
Voici ma question : vous proposez de soumettre ce projet de loi au Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement pour qu’il étudie les dépenses de la Bibliothèque du Parlement et en fasse rapport. Toutefois, s’il n’y a pas vraiment de réunion, si l’on ne donne pas la parole à l’un des membres du comité — en l’occurrence, moi —, il s’agit, selon moi, d’une perte de temps. Pour revenir à l’argument de la sénatrice Ringuette à propos des privilèges parlementaires, si on m’ignore encore une fois, je pourrais revenir demain, après la réunion, et soulever la question de privilège en faisant valoir que le comité porte atteinte à mes droits, non pas à titre personnel, mais à titre de représentant du Sénat au comité.
Son Honneur le Président : Quelle est votre question, sénateur Mercer?
Le sénateur Mercer : Croyez-vous que le comité fera ce travail? Et comment?
[Français]
La sénatrice Bellemare : Je n’ai aucune idée, cher sénateur Mercer, de ce que décidera le comité. Cela fait plusieurs fois que nous avons la possibilité de demander au Comité de la Bibliothèque du Parlement d’étudier les dépenses prévues à ce sujet. Les dernières fois, nous n’avons pas présenté les crédits à la Bibliothèque du Parlement. C’est le Comité des finances nationales qui les a étudiés.
Cette fois-ci, étant donné que le Comité de la Bibliothèque du Parlement a convenu de se rencontrer demain, nous avons décidé de lui confier l’étude du crédit 1. Si le comité n’étudie pas la question en bonne et due forme, l’étude des crédits retournera automatiquement au Comité sénatorial permanent des finances nationales.
C’est pour cette raison que nous avons pris la liberté de proposer à cette Chambre de transmettre l’étude des crédits au Comité mixte de la Bibliothèque du Parlement.
[Traduction]
Le sénateur Mercer : Le comité se réunira demain à midi, dans la pièce 237-C de l’édifice du Centre. Je vous préviens : ne vous tenez pas près de la porte vers 12 h 15, au moment où les membres décamperont à toute vitesse. Vous pourriez être blessé. Si je vous avertis, c’est pour votre bien, car c’est ce qui s’est produit la dernière fois. À quelques reprises auparavant, c’étaient les conservateurs qui se ruaient vers la porte; la dernière fois, ce fut les libéraux. Dieu sait ce qui arrivera cette fois-ci. Je vous préviens : ne vous tenez pas devant cette porte demain midi. Vous pourriez être blessé.
L’honorable Lucie Moncion : Pour votre gouverne, sénateur Mercer, je siégerai à ce comité à titre de nouveau membre. Si la réunion ne dure que 15 minutes, je vous informerai de ce qui s’y est passé.
L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : J’essayais de suivre, mais j’entretenais aussi une autre conversation. Je voudrais juste obtenir des précisions. Le Comité de la Bibliothèque du Parlement se réunira donc demain, madame la sénatrice, et il faut que cette motion soit adoptée pour que le comité l’examine? Je comprends. Nous devrions donc nous pencher là-dessus. Je me demande si nous ne devrions pas ajourner le débat aujourd’hui, étant donné qu’il semble qu’il y ait eu des questions.
Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?
Des voix : D’accord.
(La motion est adoptée.)
[Français]
Autorisation au Comité des finances nationales d’étudier le Budget principal des dépenses
L’honorable Diane Bellemare (coordonnatrice législative du gouvernement au Sénat), conformément au préavis donné le 17 avril 2018, propose :
Que le Comité sénatorial permanent des finances nationales soit autorisé à étudier, afin d’en faire rapport, les dépenses prévues dans le Budget principal des dépenses pour l’exercice se terminant le 31 mars 2019, à l’exception du crédit 1 de la Bibliothèque du Parlement;
Que, aux fins de cette étude, le comité soit autorisé à siéger, même si le Sénat siège à ce moment-là, l’application de l’article 12-18(1) du Règlement étant suspendue à cet égard.
— Honorables sénateurs, je propose l’adoption de la motion inscrite à mon nom.
Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?
Des voix : D’accord.
(La motion est adoptée.)
[Traduction]
Projet de loi visant à mettre fin à la captivité des baleines et des dauphins
Projet de loi modificatif—Septième rapport du Comité des pêches et des océans—Débat
L’ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Manning, appuyée par l’honorable sénateur Housakos, tendant à l’adoption du septième rapport du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans (Projet de loi S-203, Loi modifiant le Code criminel et d’autres lois (fin de la captivité des baleines et des dauphins), avec des amendements), présenté au Sénat le 31 octobre 2017.
L’honorable Thomas J. McInnis : Je vous remercie, honorables sénateurs. Je vais enfin pouvoir faire le discours que j’ai écrit il y a quatre mois, ou quelque chose comme ça. Je vous remercie de me donner l’occasion de participer au débat sur le rapport relatif au projet de loi S-203.
Après avoir entendu pour la première fois notre collègue et ami aujourd’hui retraité, l’honorable Wilfred Moore, j’ai tout de suite pensé que cette mesure législative était nécessaire. C’était la chose à faire. Cependant, après avoir entendu les nombreux témoins qui ont comparu devant notre Comité des pêches, j’ai changé d’avis, en partie parce que la plupart des témoignages de ceux qui sont en faveur de cette mesure législative ne sont pas étayés. Il s’agit de croyances ou d’opinions personnelles. De plus, des experts contredisaient une grande partie de ces témoignages.
(1540)
Ce qui me préoccupe dans le cas des projets de loi d’initiative parlementaire, c’est de savoir si des ministères seront touchés par la loi et, le cas échéant, si les ministères et organismes concernés ont été consultés pendant la rédaction du projet de loi. Le projet de loi S-203 concerne directement trois ministères : le ministère de la Justice, le ministère des Pêches et des Océans et Environnement et Changement climatique Canada. Honorables sénateurs, aucun de ces ministères n’a été consulté avant le dépôt au Sénat du projet de loi S-203. Il semble, en fait, que le premier à leur en avoir parlé a été le Comité sénatorial des pêches.
Il est tout aussi important de souligner que l’examen approfondi effectué par les témoins provenant de ces ministères a montré que pratiquement tout ce que le projet de loi tente d’accomplir pourrait être effectué au moyen des lois actuelles et des politiques des ministères en question. D’ailleurs, les provinces, les territoires et les municipalités sont les premiers responsables de la protection du bien-être des animaux. L’ensemble des provinces et territoires ont déjà des lois de protection des animaux. Je reviendrai plus tard sur la question des compétences.
La législation ontarienne permet la possession et l’élevage d’espèces autres que les épaulards. Encore là, ni les provinces ni les territoires n’ont été consultés avant ou après le dépôt du projet de loi.
Le Code criminel du Canada interdit de faire souffrir délibérément des animaux en les négligeant, en leur causant de la douleur ou en les blessant. Le ministère de la Justice n’a pas été consulté. La Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction, ou CITES, est un accord réunissant 183 pays, dont le Canada est signataire depuis 1975. Les décisions concernant la mise en œuvre de la CITES sont prises par l’ensemble des parties. Le Secrétariat de la CITES est responsable du comité chargé des animaux, un organe qui donne des conseils d’ordre scientifique et, tout aussi important, qui donne son avis lorsque le commerce d’une espèce est non durable, et qui fait des recommandations en conséquence.
Les baleines sont une espèce qui attire beaucoup l’attention. L’agent des affaires parlementaires pour Environnement et Changement climatique Canada a indiqué que, à la connaissance du ministère, ni le Secrétariat de la CITES, ni les autorités scientifiques d’Environnement et Changement climatique Canada, ni sa direction n’ont été consultés à l’égard du projet de loi S-203.
Honorables sénateurs, cela m’a amené à poser la question : qui donc est à l’origine de ce projet de loi d’initiative parlementaire si aucune communication n’a pu être établie avec les trois ministères directement concernés, les provinces, le Secrétariat de la CITES ou les Inuits, pour qui la pêche annuelle de narvals est une source majeure de revenu conforme à l’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut? Le projet de loi, dans sa forme initiale, empêcherait cette pêche.
Parlons davantage des champs de compétence. En général, le bien-être des animaux relève des provinces. Ces dernières peuvent ainsi adopter des lois telles que celle régissant la SPCA de l’Ontario afin de réglementer la garde d’animaux. Cela explique pourquoi elles peuvent commander une étude sur le sujet, comme l’a fait David Rosen en 2013 en Ontario. Les provinces sont également l’autorité compétente en matière de travail et d’emploi. C’est pourquoi le ministère du Travail de l’Ontario peut effectuer des inspections.
Le gouvernement fédéral est l’autorité compétente exclusive en matière de droit pénal et utilise son pouvoir pour criminaliser certains comportements. La cruauté envers les animaux en est un exemple. Cela dit, bien que le pouvoir de légiférer en matière de droit pénal soit exclusivement fédéral, les provinces ont le pouvoir d’administrer et d’appliquer le droit pénal. Ainsi, l’application des interdictions prévues par le droit pénal relativement au bien-être des animaux est du ressort des gouvernements provinciaux. Cela limite davantage la participation du gouvernement fédéral dans ce domaine.
Où sont donc les comportements criminels à Marineland, l’un des principaux aquariums — celui situé à Niagara Falls? Je parlerai dans un instant des enquêtes, qui n’ont dévoilé aucun incident.
Honorables sénateurs, en tant que membres du Parlement fédéral, de quel droit pouvons-nous adopter des lois visant à fermer Marineland, en Ontario? Qui nous autorise à intervenir dans les activités de Marineland?
Les militants et d’autres auraient peut-être dû faire valoir leurs arguments auprès du gouvernement de l’Ontario, à moins qu’ils ne l’aient fait. Par conséquent, de nombreux organismes ont tout de suite mené des enquêtes approfondies à Marineland, dont la Société de protection des animaux de l’Ontario, la Société de protection des animaux de Niagara Falls, des experts indépendants de l’aquarium de Vancouver, des gens du zoo de Calgary, le ministère de l’Environnement de l’Ontario, le ministre du Travail de l’Ontario et une équipe d’experts indépendants de l’extérieur du gouvernement de l’Ontario. Ils ont tous mené des enquêtes à Marineland. Au terme du processus d’enquête, qui s’est étalé sur plus d’un an, pas une seule accusation n’a été déposée relativement à un mammifère marin hébergé à Marineland.
De plus, mesdames et messieurs les sénateurs, à présent, il y a de nouvelles équipes au sein de la Société de protection des animaux de l’Ontario qui procèdent régulièrement à des inspections sans préavis des zoos et des aquariums partout en Ontario. Tous les animaux ont été examinés, de même que les dossiers médicaux et toutes les installations. Aucun problème n’a été relevé.
A-t-on observé des comportements criminels, notamment de la cruauté envers les animaux ou de la négligence volontaire qui cause de la douleur, des souffrances ou des blessures inutiles à un animal à Marineland? Les experts n’ont rapporté aucun cas.
Honorables sénateurs, au Canada, nous avons deux grands aquariums qui hébergent des baleines : l’aquarium de Vancouver et Marineland, à Niagara Falls. L’ancien sénateur Moore et les témoins qui appuient ce projet de loi sont d’avis qu’il ne va pas nuire ni mettre un terme aux activités de Marineland, mais qu’il est nécessaire en raison de la situation des baleines à Marineland.
Le Comité des pêches a entendu des témoins affirmer que, selon des études scientifiques directes et à long terme, les bélugas de Marineland sont en bonne santé et se comportent normalement. En fait, David Rosen, un éminent expert sur le sujet qui a présidé la rédaction d’un rapport commandé par le gouvernement de l’Ontario sur de nouveaux règlements visant à assurer le bien-être des cétacés sous les soins d’êtres humains, a déclaré ceci :
[...] il n’y a aucune preuve scientifique que les cétacés souffrent inévitablement dans des aquariums bien entretenus [...]
Il a aussi ajouté ceci :
Le Canada a émergé comme un leader mondial dans les normes axées sur la science des soins pour les mammifères marins. Les zoos et aquariums accrédités du Canada ont adopté les Recommandations pour les soins et l’entretien des mammifères marins, produites par le Conseil canadien de protection des animaux, ou CCPA, à la suite de la commande par le ministère des Pêches et des Océans.
Par ailleurs, selon l’examen du gouvernement de l’Ontario, en 2013, sur l’ensemble de la réglementation entourant le bien-être des mammifères marins en captivité, les normes en matière d’espace minimal, de protection contre le bruit ainsi que de qualité de l’eau et de la nourriture sont respectées et contribuent bel et bien à la santé des animaux. Le rapport indique en outre qu’il est nécessaire d’assurer une exposition appropriée à la lumière, d’offrir des programmes d’enrichissement de l’environnement et de garantir que le contact avec le public ne cause aucun préjudice aux mammifères marins. Marineland répond à toutes ces exigences.
Fait intéressant, le rapport présente des données indiquant que des contacts étroits et fréquents avec des êtres humains peuvent être une forme d’enrichissement de l’environnement de l’animal. Des témoins en faveur du projet de loi ont souvent affirmé que les cétacés et d’autres mammifères marins dans les aquariums ou sous les soins d’êtres humains « souffrent psychologiquement en raison de leurs capacités cognitives inhabituelles ».
Honorables sénateurs, d’après une étude menée par des spécialistes et commandée par le gouvernement de l’Ontario, les cétacés qui vivent dans des installations où on les présente au public ne souffrent pas psychologiquement. Les conclusions de ce groupe d’experts contredisent totalement les affirmations de certains témoins et activistes.
M. Whitehead, un témoin, et le sénateur Moore ont décrit les piscines carrées en béton comme étant des chambres résonantes, et ont indiqué qu’elles occasionnent un stress. Ce qu’ils n’ont pas dit, c’est que les aquariums modernes ont une conception qui tient compte des propriétés acoustiques, un habitat complexe et des piscines de forme adéquate, des caractéristiques qui leur permettent de satisfaire à la norme de conception nord-américaine.
(1550)
M. Rosen, dont j’ai parlé plus tôt, a dit ceci :
[…] les zoos et les aquariums au Canada sont parmi les plus modernes du monde. Le Canada est également un leader dans la coordination des efforts de recherche globale pour améliorer la science du bien-être des cétacés.
Honorables sénateurs, il est à noter que, si ce projet de loi était adopté, il obligerait Marineland à briser les liens sociaux unissant les mammifères marins sains et actifs qui se trouvent dans ce parc. Il faudrait séparer les troupeaux, puisque le projet de loi interdit la reproduction. Cette mesure causerait beaucoup de stress et de tort à des groupes d’animaux sains et actifs. Cela compromettrait l’avenir de Marineland.
Sénateurs, la perte de la valeur éducative serait tout aussi navrante pour les étudiants de niveau collégial, les élèves des écoles, la population en général et l’économie de la région ontarienne du Niagara.
Sénateurs, l’adoption de ce projet de loi d’initiative parlementaire aurait de graves conséquences; je trouve donc ahurissant que nous en soyons saisis. Lori Marino, une militante spécialiste du développement comportemental et cognitif qui a comparu devant notre comité, a témoigné devant un tribunal de l’Ontario dans le cadre d’un procès opposant Sa Majesté la reine à Anita Krajnc, qu’on appelle plus communément le procès du porc. Lors de ce procès, Mme Marino a affirmé que les porcs sont bel et bien des personnes. Évidemment, le juge Harris, de la Cour de justice de l’Ontario, n’était pas d’accord avec elle, et son témoignage a été jugé peu crédible, voire pas du tout.
Je présume que Mme Marino et d’autres militants comme elle aimeraient faire avancer la cause idéologique voulant que les droits accordés aux personnes s’étendent également aux animaux. On peut alors se demander si ce projet de loi ne serait pas une tentative d’amorcer ce processus en accordant aux baleines les mêmes droits qu’aux humains.
Sénateurs, nombre d’espèces animales présentent des aptitudes intellectuelles et sociales d’une complexité similaire. Le Canada est-il donc prêt à affirmer qu’il est criminel pour un zoo de garder des dauphins à des fins reproductives, mais qu’il est acceptable de garder en captivité des loups, des ours, des chimpanzés ou des hippopotames?
Si nous adoptons ce projet de loi qui vise certaines espèces, quel genre de précédent allons-nous établir? À partir de ce moment, la Chambre haute, le Sénat du Canada, sera appelée à se prononcer sur des questions de cette nature, puisque le précédent nécessaire aura été établi. Est-ce bien ce que nous voulons? Je ne le crois pas. Je vous exhorte donc à rejeter le projet de loi S-203.
Son Honneur le Président : Sénateur Sinclair, avez-vous une question?
Sénateur McInnis, vous aurez besoin de plus de temps. Aimeriez-vous qu’on vous accorde cinq minutes pour répondre à quelques questions?
Le sénateur McInnis : Oui. Auriez-vous l’obligeance de me les donner?
Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?
Des voix : D’accord.
L’honorable Murray Sinclair : Je n’ai qu’une seule question liée au fait que nous sommes à une étape du processus législatif qui relève de la procédure, monsieur le sénateur. Pourquoi ne permettez-vous pas que le rapport soit adopté, afin que nous puissions avoir un débat de troisième lecture? Nous n’avons pas encore adopté le rapport. Vos commentaires seraient tout à fait pertinents à l’étape de la troisième lecture, et vous arriverez peut-être à convaincre les gens. Toutefois, je me pose la question suivante : pourquoi ne passerions-nous pas à l’étape de la troisième lecture, pour ensuite voter sur le projet de loi?
Le sénateur McInnis : Je n’ai aucun problème à passer à l’étape de la troisième lecture. En fait, j’étais très triste de ne pas pouvoir en discuter il y a trois ou quatre mois, lorsque ce sujet était plus d’actualité. Je ne voulais pas retarder les choses, au contraire. J’espère que tous les sénateurs prendront le temps de comprendre ce dossier et que nous aurons un débat ouvert et juste à l’étape de la troisième lecture, de même qu’un vote libre et équitable.
Ce projet de loi ne devrait pas être qu’une simple formalité, car il crée un précédent, et il aura de graves répercussions sur les localités de Niagara et sur des milliers d’emplois. N’empêche que je suis très ravi et prêt à en discuter à l’étape de la troisième lecture, puis à passer au vote.
Le sénateur Sinclair : Par conséquent, je demande le vote portant sur l’adoption du rapport et de la motion du sénateur Manning.
Son Honneur le Président : Le sénateur Patterson avait quelque chose à dire.
Le sénateur Patterson : Je propose l’ajournement du débat.
Son Honneur le Président : Je vais mettre la première question aux voix. Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?
Des voix : Oui.
Des voix : Non.
Son Honneur le Président : J’ai entendu un « non ».
L’honorable sénateur Patterson propose que le débat soit ajourné à la prochaine séance du Sénat.
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?
Des voix : Oui.
Des voix : Non.
Son Honneur le Président : Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix : Oui.
Son Honneur le Président : Que les sénateurs qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix : Non.
Son Honneur le Président : À mon avis, les oui l’emportent.
Et deux honorables sénateurs s’étant levés :
Son Honneur le Président : Y a-t-il entente au sujet de la sonnerie?
Le sénateur Plett : Nous n’avons pas de whip du gouvernement.
Son Honneur le Président : Y a-t-il entente au sujet de la sonnerie? Quinze minutes?
Le sénateur Plett : Une heure.
Le sénateur Mitchell : Je dirais 30 minutes.
Le sénateur Plett : Une heure.
Son Honneur le Président : Le vote aura lieu à 16 h 55. Convoquez les sénateurs.
(1650)
La motion, mise aux voix, est rejetée :
POUR
Les honorables sénateurs
Andreychuk | McIntyre |
Ataullahjan | Mockler |
Batters | Neufeld |
Beyak | Ngo |
Boisvenu | Oh |
Carignan | Patterson |
Dagenais | Plett |
Doyle | Poirier |
Eaton | Seidman |
MacDonald | Smith |
Maltais | Stewart Olsen |
Manning | Tannas |
Marshall | Tkachuk |
Martin | Unger |
McInnis | Wells—30 |
CONTRE
Les honorables sénateurs
Bellemare | Hartling |
Bernard | Jaffer |
Black (Alberta) | Joyal |
Black (Ontario) | Lovelace Nicholas |
Boniface | Marwah |
Bovey | Massicotte |
Boyer | McPhedran |
Campbell | Mercer |
Cools | Mitchell |
Cordy | Moncion |
Cormier | Munson |
Coyle | Omidvar |
Dawson | Pate |
Day | Petitclerc |
Duffy | Pratte |
Dupuis | Ringuette |
Eggleton | Saint-Germain |
Gagné | Sinclair |
Gold | Wetston |
Griffin | Woo—41 |
Harder |
ABSTENTIONS
Les honorables sénateurs
Galvez | Verner |
Greene | Wallin—5 |
Mégie |
(À 17 h 2, conformément à l’ordre adopté par le Sénat le 4 février 2016, le Sénat s’ajourne jusqu’à 13 h 30 demain.)