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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 42e Législature
Volume 150, Numéro 211

Le mercredi 30 mai 2018
L’honorable George J. Furey, Président


LE SÉNAT

Le mercredi 30 mai 2018

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.


[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Le couloir d’icebergs

L’honorable Fabian Manning : Honorables sénateurs, c’est avec plaisir que je présente aujourd’hui le chapitre 33 de « Notre histoire ».

Au cours des dernières semaines, ici, à Ottawa, j’ai pu voir l’enthousiasme suscité par le festival des tulipes, alors que, dans l’Ouest, toute l’attention des agriculteurs est tournée vers la prochaine récolte de grain. Leurs homologues de l’Île-du-Prince-Édouard espèrent, pour leur part, une récolte de pommes de terre exceptionnelle cet été. À Terre-Neuve-et-Labrador, ce qui soulève l’enthousiasme à cette époque-ci de l’année, ce sont les icebergs, car, après tout, c’est chez nous qu’on trouve cette étendue d’eau particulière sur la côte Est qu’on appelle le couloir d’icebergs. Cette écozone marine de l’Atlantique est tristement célèbre pour l’abondance d’icebergs qu’elle recèle et les dangers que posent ces derniers pour les navires, l’un de ces icebergs, notamment, ayant coulé le RMS Titanic. C’est à la suite de cette catastrophe que cette zone a été surnommée le couloir d’icebergs.

Dans une année moyenne, de 400 à 800 icebergs environ descendent le long de la côte à partir du Groenland jusqu’à St. John’s et poursuivent leur chemin. Leur nombre peut varier grandement d’une année à l’autre. Ainsi, en 1984, on en a recensé plus de 2 200.

Les icebergs sont composés d’eau vieille de 10 000 à 12 000 ans. Le couloir d’icebergs offre un passage à ces gigantesques blocs de glace très vieux qui se sont détachés de leur glacier dans le Haut-Arctique. La forme et la taille des icebergs varient. Certains ressemblent à des arches ou à des dômes, d’autres à des pyramides, pour n’en donner que quelques exemples. Certains sont de couleur blanc neige, alors que d’autres sont plutôt turquoise. On peut même voir l’eau ruisseler en cascade sur les côtés de certains icebergs.

On dit que les icebergs « parlent », c’est-à-dire que, parce qu’ils fondent et changent constamment de forme, ils émettent un grondement sourd et d’autres bruits. On pourrait penser qu’ils sont ici, au Sénat, certains jours.

Plusieurs d’entre vous ont peut-être vu des vidéos ou des photos d’énormes icebergs. Croyez-le ou non, mais seulement 10 p. 100 d’un iceberg émerge de l’eau. C’est donc dire que près de 90 p. 100 d’un iceberg reste sous l’eau. Les icebergs peuvent être très instables et se renverser en quelques secondes à peine.

À certaines époques de l’histoire de Terre-Neuve-et-Labrador, on peut dire que la séparation était difficile, mais, à mesure que l’eau se réchauffe près du littoral, les icebergs finissent par fondre. Il faut donc profiter d’une courte période pour venir voir ces magnifiques géants de glace.

Les petits icebergs s’appellent des « fragments d’iceberg » et sont de la taille d’une petite maison. Puis, il y a les « bourguignons », dont la taille équivaut à un petit piano. Les icebergs exercent une telle fascination dans notre culture que la toute nouvelle équipe de hockey mineur de la Ligue de hockey de la côte Est établie à Terre-Neuve-et-Labrador s’appellera les « Growlers », ce qui signifie « bourguignons » en anglais.

On peut apercevoir de nombreux icebergs à partir de l’île. Pour les voir de plus près, nombre de visiteurs retiennent les services d’une des entreprises locales pour faire une excursion guidée en bateau. Si on est chanceux, on peut admirer une ou deux baleines dans la mer. L’an dernier, un courageux Terre-Neuvien s’est posé en hélicoptère sur un iceberg. Je ne pense pas, toutefois, que je serais prêt à faire cela.

Après avoir visité tous ces sites magiques, vous pourrez vous arrêter dans un établissement local pour relaxer en dégustant une bière Iceberg bien froide ou un bon verre de vodka Iceberg. Vous pourrez même la boire avec des glaçons, si vous préférez. La laitue iceberg ne fait pas partie de nos spécialités mais, si vous en voulez, nous allons nous débrouiller pour vous en trouver.

Si vous ne l’avez pas déjà fait, je vous recommande d’ajouter une visite du couloir d’icebergs à votre liste de choses à faire avant de mourir. Vous ne serez pas déçus.

[Français]

Visiteur à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Mme Sabine Bernier. Elle est l’invitée de l’honorable sénatrice Mégie.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Patrice Bernier

L’honorable Marie-Françoise Mégie : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour rendre hommage à un grand Canadien. Cette personne est née en 1979 de parents d’origine haïtienne, à Brossard, au Québec. Il s’agit du capitaine sortant de l’Impact de Montréal, Patrice Bernier. Sa sœur nous écoute aujourd’hui.

Vous décrire son parcours étonnant en moins de trois minutes relèverait de l’impossible. Cependant, je compte souligner quelques faits marquants de sa carrière sportive.

Dès l’âge de trois ans, Patrice démontrait déjà ses habiletés de footballeur dans le sous-sol de la résidence familiale. Aux dires de son père, les murs et les bibelots l’ont appris à leurs dépens. À l’âge de cinq ans, Patrice a effectué ses premiers coups de patin à l’aréna de son quartier. Cela l’a amené à pratiquer simultanément le hockey et son sport de prédilection : le soccer.

En 1995, alors qu’il n’était âgé que de 15 ans, il a joué dans l’équipe de sélection nationale du Canada en vue de participer à la Coupe du monde de soccer U-17 en Équateur. Patrice a marqué le premier et unique but du Canada dans l’histoire de cette compétition de haut niveau. C’est ainsi qu’il a été désigné le meilleur joueur de l’équipe canadienne.

En 1997, il gagne l’or aux Jeux du Canada avec l’équipe de soccer du Québec, et une autre médaille d’or avec la sélection canadienne aux Jeux de la Francophonie, à Madagascar, la même année.

Entre 2000 et 2002, il se joint à l’Impact de Montréal, avec lequel il marque son premier but au niveau professionnel. De 2003 à 2011, il part à la conquête de l’Europe où il joue dans différentes équipes prestigieuses, notamment en Norvège, en Allemagne et au Danemark.

Le 18 novembre 2011, Patrice est de retour à Montréal avec l’Impact, qui fait ses débuts dans la célèbre Major League Soccer (MLS). Rapidement, grâce à son jeu, à ses valeurs et à son leadership, l’athlète canadien d’origine haïtienne fait la fierté des Québécois.

Après avoir remporté plusieurs victoires, championnats, trophées et honneurs, Patrice Bernier dispute son dernier match le 22 octobre 2017. Dès le 25 novembre, il a été introduit au Temple de la renommée du soccer. Cet exploit demeure plutôt exceptionnel, car, selon les règlements de la Fédération de soccer du Québec, il faut attendre cinq ans après le départ à la retraite pour être intronisé.

Le 28 novembre, il a été félicité à l’Assemblée nationale du Québec, où les députés l’ont qualifié de « Maurice Richard du soccer » en raison de son extraordinaire carrière. Le 9 décembre, lors de la finale de la MLS, il a été ovationné à Toronto.

Au-delà du sport, Patrice demeure un mari aimant et un fantastique père de trois enfants en bas âge. Impliqué dans sa communauté, il représente un excellent modèle de dévouement, de discipline et de courage pour les jeunes. D’ailleurs, le 2 mai dernier, il est venu rencontrer les élèves de l’école primaire Saint-Paul, à Gatineau. Il leur a réitéré qu’ils peuvent réaliser leurs rêves en étant persévérants et en adoptant de saines habitudes de vie.

Honorables collègues, félicitons Patrice Bernier, ce Canadien, fils d’immigrants, qui a su faire rayonner notre pays à travers le monde.

[Traduction]

Le Titan d’Acadie-Bathurst

Félicitations pour avoir remporté la Coupe Memorial

L’honorable Rose-May Poirier : Honorables sénateurs, la ville a de nouveau de quoi être fière, comme le proclament les manchettes du Telegraph Journal après le point culminant de la saison du Titan d’Acadie-Bathurst, qui s’est terminée dimanche soir. Ses joueurs règnent maintenant en maîtres incontestés sur toutes les équipes de hockey junior au Canada à titre de champions de la Coupe Memorial.

Des voix : Bravo!

La sénatrice Poirier : Ils ont remporté la victoire sur les hôtes du tournoi, les Pats de Regina, et j’ai ceci à dire à ce sujet aux sénateurs Batters, Tkachuk, Andreychuk, Dyck et Wallin : désolée, cette victoire nous appartient. Bien que je ne sois pas une grande amatrice de hockey, l’enthousiasme suscité par cette victoire m’a été communiqué par Jeffrey, un employé de mon bureau qui vient de Bathurst et qui ne cesse de parler du sujet ces derniers jours.

Bathurst est une ville charmante dans le Nord du Nouveau-Brunswick qui compte approximativement 12 000 habitants et elle se trouve dans l’un des plus petits marchés de toute la Ligue canadienne de hockey junior. La façon dont son équipe a remporté la 100e Coupe Memorial constitue l’histoire vraie d’une équipe que l’on donnait perdante. Grâce au courage et à la détermination du capitaine Jeffrey Truchon-Viel, au filet de sécurité fourni par Evan Fitzpatrick, qui ressemblait à un mur de briques, et au contrôle de la ligne bleue par le duo dynamique d’Oliver Galipeau et de Noah Dobson, l’équipe était l’incarnation parfaite du travail d’équipe. Dès que l’équipe a entamé la première ronde des séries éliminatoires de la Ligue de hockey junior majeur du Québec, ses efforts ont électrisé la ville et unifié les habitants de Bathurst et des environs.

(1410)

Pour vraiment comprendre et reconnaître l’ampleur de cette histoire, honorables sénateurs, il faut remonter brièvement dans l’histoire de l’équipe. Le Titan s’est installé à Bathurst il y a 20 ans, en 1998, et, étant donné que cette ville et cette région ont toujours adoré le hockey, comme le témoignent les célèbres Papermakers dont le sénateur Munson a parlé à maintes reprises, ce fut le coup de foudre.

Le Titan a remporté sa première Coupe du Président lors de sa saison inaugurale et, au cours de ses trois premières années d’existence, il s’est rendu trois fois en finales. Malheureusement, les années suivantes ont été difficiles en raison de problèmes liés à la propriété de l’équipe. Enfin, il y a cinq ans, un groupe d’hommes d’affaires locaux se sont réunis et ont acheté l’équipe pour s’assurer qu’elle demeure à Bathurst. Leurs efforts et la confiance accordée au directeur général, Sylvain Couturier, ont porté leurs fruits. Il faut dire que, sans leur détermination et leur vision, tout cela n’aurait pas été possible.

Le slogan que l’équipe avait adopté pour les séries était « C’est à notre tour », et elle a prouvé à chaque match que Bathurst est vraiment une ville de hockey, comme nous le savions tous déjà. En définitive, le Titan et les habitants de Bathurst ont prouvé que c’est non seulement notre tour, mais aussi notre équipe.

Joignez-vous à moi, honorables sénateurs, pour féliciter l’organisation du Titan, les partisans de l’équipe et les habitants de Bathurst. Soyez fiers, soyez bruyants — ayoye, ayoye, ayoye!

Le décès de Vern Harper

L’honorable Frances Lankin : Honorables collègues, j’aimerais aujourd’hui saluer la mémoire de M. Vern Harper, qui s’est éteint le 12 mai.

Je ne l’ai appris que la semaine dernière. Quelqu’un m’a envoyé une lettre pour me parler de lui et de ce qu’il a accompli. Je suis attristée, et je sais que de nombreux Autochtones de partout au pays le sont aussi. Je sais également qu’il manquera à un grand nombre de Torontois, autochtones ou non.

Vernon Harper était un aîné cri, un guérisseur autochtone et un militant pour les droits des Autochtones. Il était aussi un spiritualiste, ce qui me fait penser à mon ami, le sénateur Sinclair. Je crois même qu’il était socialiste. Il m’a déjà expliqué qu’il rêvait du jour où les peuples autochtones créeraient leur propre branche du socialisme. Il était rempli d’idées extraordinaires.

Il a aussi fait partie des principaux organisateurs de la Caravane du peuple autochtone, qui a parcouru le pays de Vancouver à Ottawa en 1974. En fait, c’était son idée. Cette marche, qui faisait suite aux soulèvements et aux manifestations de Kenora et de Cache Creek, s’est terminée dans le tumulte ici même, sur la Colline du Parlement — d’aucuns parlent même d’émeute. Chose certaine, elle a permis d’attirer l’attention sur les doléances des Premières Nations contre le gouvernement fédéral et sur le fait que les traités avaient été bafoués.

Ce fut un tournant pour le Canada. C’est à partir de là que les Canadiens ont commencé à s’ouvrir les yeux et à comprendre la dure réalité des peuples autochtones et les obstacles qu’ils doivent surmonter. C’est là que nous avons entamé la route vers la réconciliation, même si nous sommes encore loin d’être à destination.

Vernon Harper a cofondé une école réservée aux Premières Nations, la First Nations School de Toronto. Il était aîné en résidence au Centre de toxicomanie et de santé mentale, dont il était membre à vie du personnel, et il a tâté du droit avec les Services juridiques autochtones. Je l’ai connu au Native Canadian Centre, où il intégrait un message de réconciliation aux cérémonies de purification et d’ouverture des réunions. Je l’ai aussi côtoyé à Anishnawbe Health Toronto, où nous discutions des problèmes de santé des Autochtones du centre-ville, ainsi qu’aux Native Child and Family Services et au centre pour hommes autochtones Na-Me-Res, auquel il était particulièrement attaché.

Il était un chef extraordinaire. On disait de lui qu’il était un aîné urbain. Il était une figure de proue de la communauté autochtone.

Le sénateur Sinclair m’a dit qu’il a participé à titre d’aîné aux audiences de la Commission de vérité et réconciliation à Toronto.

Il a écrit le livre Following the Red Path, qui porte sur la Caravane du peuple autochtone. Je termine en vous citant le dernier passage de son livre. Il était vraiment un homme remarquable. Si cela intéresse quelqu’un parmi vous, le livre se trouve à la bibliothèque.

À la fin du livre, il dit ce qui suit :

C’est dans la caravane que j’ai commencé à comprendre le véritable sens de la spiritualité autochtone, mais c’était déjà depuis longtemps une influence positive dans ma vie. Je crois que c’est la spiritualité qui m’a permis de tenir le coup pendant toutes ces années. Elle m’a aidé à survivre aux prisons, aux instituts psychiatriques, à la misère, à l’alcoolisme, à la toxicomanie et à la culpabilité qui m’a été inculquée. J’en suis maintenant à un niveau de conscience où j’apprends les aspects religieux de la spiritualité autochtone […]

Je termine avec la dernière phrase de son livre :

J’ai recommencé à apprendre ma langue maternelle comme je le faisais quand j’étais tout petit. J’apprends à redevenir un Amérindien. Je deviendrai alors un homme libre.

Il est libre maintenant et en compagnie du Créateur. Je vous remercie, meegwetch.


AFFAIRES COURANTES

Le directeur parlementaire du budget

Estimation des coûts d’un crédit d’impôt pour les droits de péage sur le pont de la Confédération—Dépôt du rapport

L’honorable Percy E. Downe : Honorables sénateurs, conformément à l’article 14-1(3) du Règlement, je demande le consentement de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport du Bureau du directeur parlementaire du budget intitulé Estimation des coûts d’un crédit d’impôt pour les droits de péage sur le pont de la Confédération, en date du 31 août 2016, préparé pour le sénateur Percy Downe conformément à la Loi sur le Parlement du Canada, L.R.C. 1985, ch. P-1, par. 79.2(4).

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Projet de loi no 1 d’exécution du budget de 2018

Dépôt du dix-huitième rapport du Comité des affaires étrangères et du commerce international sur la teneur du projet de loi

L’honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le dix-huitième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international, qui porte sur la teneur du projet de loi C-74, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 27 février 2018 et mettant en œuvre d’autres mesures.

(Conformément à l’ordre adopté le 24 avril 2018, le rapport est renvoyé d’office au Comité sénatorial permanent des finances nationales et l’étude de ce rapport est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

Projet de loi sur le cannabis

Projet de loi modificatif—Présentation du vingt-cinquième rapport du Comité des affaires sociales, des sciences et de la technologie

L’honorable Art Eggleton, président du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, présente le rapport suivant :

Le mercredi 30 mai 2018

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a l’honneur de présenter son

VINGT-CINQUIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-45, Loi concernant le cannabis et modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, le Code criminel et d’autres lois, a, conformément à l’ordre de renvoi du 22 mars 2018, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport avec les modifications suivantes :

1.Article 2, pages 1 et 5 :

a)À la page 1 :

(i)remplacer la ligne 12 par ce qui suit :

« teurs; »,

(ii)remplacer la ligne 14 par ce qui suit  :

« vir à la consommation de cannabis »;

b)à la page 5, remplacer les lignes 13 à 15, par ce qui suit :

« mation de cannabis est réputée être présentée comme pouvant servir à la consommation de cannabis lorsqu’elle est vendue au même ».

2. Nouvel article 5.1, page 6 : Ajouter, après la ligne 9, ce qui suit :

« 5.1 Il est entendu que la présente loi n’a pas pour effet de limiter l’application des mesures extrajudiciaires prévues par la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents. ».

3. Nouvel article 5.2, page 6 : Ajouter, avant l’intertitre « Sa Majesté », ce qui suit :

« 5.2 Il est entendu que la présente loi n’a pas pour effet de porter atteinte à l’application de toute disposition législative provinciale qui restreint davantage ou qui interdit la culture, la multiplication ou la récolte de plantes de cannabis dans une maison d’habitation. ».

4. Article 9, page 10 : Ajouter, après la ligne 4, ce qui suit :

« (2.1) Le sous-alinéa (1)a)(ii) ne s’applique pas :

a) si le cannabis est distribué par un individu âgé de dix-huit ans ou plus qui est de moins de deux ans l’aîné de l’individu à qui le cannabis est distribué;

b) si le cannabis est distribué à un individu âgé de seize ans ou plus par son père, sa mère ou son tuteur dans leur maison d’habitation. ».

5. Article 11, page 12 : Remplacer la ligne 33 par ce qui suit :

« maximale de trois cent mille dollars. ».

6. Article 12, page 13 : Remplacer la ligne 17, dans la version française, par ce qui suit :

« nabis provenant d’une graine ou d’une matière végétale qu’il ».

7. Nouvel article 15.1, page 16 : Ajouter, après la ligne 36, ce qui suit :

« 15.1 La déclaration de culpabilité à l’égard d’une infraction prévue aux articles 9, 10, 11, 12 ou 14 ne constitue pas de la grande criminalité pour l’application du paragraphe 36(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, sauf si la personne a été condamnée à une peine d’emprisonnement de plus de six mois pour cette infraction. ».

8. Article 33, page 24 : Remplacer la ligne 23 par ce qui suit :

« rie non visée à l’annexe 4 ou d’une puissance qui excède la puissance maximale prévue par règlement. ».

9. Article 43, page 26 : Remplacer la ligne 27, dans la version française, par ce qui suit  :

« notamment celle visée à l’alinéa 16d), au sujet de l’acces- ».

10. Article 51, pages 30 à 31 :

a)À la page 30 :

(i)ajouter, après la ligne 25, ce qui suit :

« d.1) une mention du fait que l’accusé peut payer un montant inférieur à celui calculé en application du paragraphe (4) s’il est payé dans un délai fixe plus court que celui fixé en vertu de l’alinéa d); »,

(ii)remplacer la ligne 27 par ce qui suit :

« dans le délai fixé en vertu des alinéas d) ou d.1): »,

(iii)Remplacer les lignes 28 à 33 par ce qui suit :

« (i) une déclaration de culpabilité sera inscrite au dossier judiciaire de l’accusé et il sera réputé avoir reçu une absolution inconditionnelle et ne pas avoir été condamné relativement à cette infraction,

(ii) ce dossier ne pourra être utilisé d’une manière qui permettrait de révéler que l’accusé a fait l’objet de mesures prises sous le ré- »,

(iv)remplacer la ligne 35 par ce qui suit :

« (iii) en cas de saisie de cannabis lié à l’infraction, ce »;

b)à la page 31, remplacer la ligne 5, par ce qui suit :

« fixé en vertu des alinéas d) ou d.1) : ».

11. Article 52, page 31 :

a)Remplacer la ligne 23 par ce qui suit :

« formulaire dans le délai fixé en vertu des alinéas 51(3)d) ou d.1) constitue un plaidoyer de »;

b)remplacer les lignes 26 et 27 par ce qui suit :

« a) une déclaration de culpabilité est inscrite au dossier judiciaire de l’accusé et l’accusé est réputé avoir reçu une absolution inconditionnelle et ne pas avoir été condamné relativement à cette infraction; »;

c)remplacer les lignes 29 à 31 par ce qui suit :

« infraction ne peut être utilisé d’une manière qui permettrait de révéler que l’accusé a ».

12. Article 53, page 32 : Remplacer les lignes 8 à 11 par ce qui suit :

« dossier judiciaire relativement à cette infraction ne peut être utilisé d’une manière qui permettrait de révéler que l’accusé a fait l’objet de mesures prises ».

13. Article 54, page 32 :

a)Remplacer la ligne 14 par ce qui suit :

« mulaire dans le délai fixé en vertu des alinéas 51(3)d) ou d.1), l’accusé est tenu au paiement »;

b)remplacer la ligne 22 par ce qui suit :

« d) le montant indiqué est à payer dans les soixante jours »;

c) remplacer les lignes 31 à 34 par ce qui suit :

« dossier judiciaire relativement à cette infraction ne peut être utilisé d’une manière qui permettrait de révéler que l’accusé a fait l’objet de mesures prises sous le ré- ».

14. Nouvel article 55.1, page 33 : Ajouter, après la ligne 2, ce qui suit :

« 55.1 Dans le cas où le montant à payer en application de la présente partie est redevable à Sa Majesté du chef du Canada, la personne responsable, sous le régime d’une loi ou ordonnance de la législature d’un territoire, de la délivrance ou du renouvellement d’un document, notamment, une licence ou un permis, en ce qui concerne le contrevenant, peut refuser de délivrer ou de renouveler tel document ou peut le suspendre jusqu’au paiement intégral de l’amende, dont la preuve incombe au contrevenant. ».

15. Article 58, page 33 :

a)Ajouter, après ligne 20, ce qui suit :

« b.1) une mention du fait que l’accusé peut payer un montant inférieur à celui calculé en application des alinéas 51(4)a) ou b), selon le cas, s’il est payé dans un délai fixe plus court que celui fixé en vertu de l’alinéa b); »;

b)remplacer la ligne 22 par ce qui suit :

« dans le délai fixé en application des alinéas b) ou b.1), »;

c)remplacer les lignes 23 à 28 par ce qui suit :

« (i) une déclaration de culpabilité sera inscrite au dossier judiciaire de l’accusé et il sera réputé avoir reçu une absolution inconditionnelle et ne pas avoir été condamné relativement à cette infraction,

(ii) ce dossier ne pourra être utilisé d’une manière qui permettrait de révéler que l’accusé a fait l’objet de mesures prises sous le ré- »;

d)remplacer la ligne 30 par ce qui suit :

« (iii) en cas de saisie de cannabis lié à l’infraction, ce »;

e)remplacer la ligne 33 par ce qui suit :

« non-culpabilité ou de non-paiement dans le délai fixé en vertu des alinéas b) ou b.1), ».

16.Article 62, page 37 : Remplacer les lignes 34 et 35 par ce qui suit :

« (10) Le ministre peut, sous réserve des règlements, assortir la licence ou le permis des conditions qu’il estime indiquées. ».

17.Article 64, page 38 : Remplacer les lignes 9 à 16 par ce qui suit :

« 64 (1) Le ministre peut, sans préavis et sous réserve des règlements, suspendre une licence ou un permis à l’égard de certaines ou de l’ensemble des activités autorisées qui sont liées à tout cannabis qu’il précise si, selon le cas :

a) il a des motifs raisonnables de croire qu’il est nécessaire de le faire pour protéger la santé ou la sécurité publiques, notamment pour empêcher le détournement du cannabis vers un marché ou pour une activité illicites;

b) un autre cas prévu par règlement justifie la suspension. ».

18.Article 65, page 39 : Remplacer la ligne 28 par ce qui suit :

« été annulée; ».

19.Article 67, page 39 :

a)Remplacer la ligne 37 par ce qui suit :

« 67 (1) Le ministre peut, sous réserve des règlements, accor- »;

b)ajouter, après la ligne 39, ce qui suit :

« (2) Le ministre peut obliger toute personne qu’il précise, par son nom ou par indication de son poste, autre qu’une personne déjà visée par règlement, à être titulaire d’une habilitation de sécurité, s’il est d’avis que cette dernière, selon le cas :

a) exerce, a exercé ou est sur le point d’exercer des activités liées à une licence ou à un permis délivré sous le régime de la présente partie ou à une licence ou à un permis visé par une demande de délivrance sous le régime de la présente partie;

b) a, a déjà eu ou est sur le point d’avoir la garde, la gestion ou le contrôle d’un lieu où sont ou seront exercées des activités liées à une licence ou à un permis délivré sous le régime de la présente partie ou à une licence ou à un permis visé par une demande de délivrance sous le régime de la présente partie.

(3) Si le ministre exerce le pouvoir prévu au paragraphe (2), il en avise, par écrit, le demandeur ou le titulaire de la licence ou du permis lié à cette personne. ».

20.Article 71, page 41 :

a) Remplacer la ligne 22, par ce qui suit :

« (2) Sauf exception prévue par règlement, toute personne »;

b)ajouter, après la ligne 29, ce qui suit :

« (3) Sauf exception prévue par règlement, toute personne qui agit au titre d’un contrat conclu avec une personne autorisée à posséder, à vendre, à distribuer ou à produire du cannabis sous le régime de la présente loi — autre qu’un employé ou un mandataire de cette personne autorisée — peut faire toute chose interdite au titre d’une disposition de la section 1 de la partie 1, dans la mesure où elle le fait dans le cadre de ce contrat et si elle respecte les conditions applicables à l’autorisation de la personne autorisée. ».

21.Article 72, pages 41 et 42 :

a)À la page 41 :

(i)remplacer les lignes 32 et 33, par ce qui suit :

« faire toute chose interdite au titre des articles 8, 9 ou »,

(ii)remplacer la ligne 36, par ce qui suit :

« (2) Toute personne qui agit en tant que mandataire d’une »,

(iii) remplacer la ligne 39, par ce qui suit :

« titre des articles 8, 9 ou 10, dans la mesure où il le fait »;

b)à la page 42, ajouter, après la ligne 2, ce qui suit :

« (3) Toute personne qui agit au titre d’un contrat conclu avec une personne autorisée à vendre du cannabis sous le régime d’une loi provinciale — autre qu’un employé ou un mandataire de cette personne autorisée — peut faire toute chose interdite au titre des articles 8, 9 et 10, dans la mesure où elle le fait dans le cadre de ce contrat et si elle respecte les conditions applicables à l’autorisation de la personne autorisée. ».

22. Article 112, page 71 :

a)Remplacer la ligne 22 dans la version française, par ce qui suit :

« c) les efforts raisonnables que l’intéressé a déployés afin d’atténuer »;

b)remplacer la ligne 26 dans la version française, par ce qui suit :

« l’intéressé a retirés de la violation commise; ».

23.Nouveaux articles 139.1 et 139.2, page 87 : Ajouter, après la ligne 28, ce qui suit :

« 139.1 (1) Le ministre, avant de prendre un règlement en vertu du paragraphe 139(1) relativement à toute catégorie de cannabis ajoutée à l’annexe 4 après la date de la sanction de la présente loi, incluant toute catégorie de cannabis ajoutée à l’annexe 4 en raison de l’entrée en vigueur de l’article 193.1, fait déposer tout projet de règlement devant chaque chambre du Parlement.

(2) Tout comité compétent, d’après le règlement de chacune des chambres du Parlement, est automatiquement saisi du projet de règlement et peut effectuer une enquête ou tenir des audiences publiques à cet égard et faire rapport de ses conclusions à la chambre en cause.

(3) Le règlement peut être pris :

a) soit dans un délai de trente jours de séance suivant le dépôt;

b) soit au moment, pour chaque chambre du Parlement, où, selon le cas :

(i) le comité fait rapport,

(ii) le comité décide de ne pas effectuer d’enquête ou de ne pas tenir d’audiences publiques.

139.2 (1) Il n’est pas nécessaire de déposer de nouveau le projet de règlement devant le Parlement même s’il a subi des modifications.

(2) Si le projet de règlement déposé au titre du paragraphe 139.1(1) est pris sans inclure les modifications recommandées par un comité de l’une ou l’autre des chambres du Parlement concernant le projet de règlement en question, le ministre fait déposer devant chaque chambre du Parlement un rapport dans lequel il explique pourquoi les modifications n’ont pas été apportées.

(3) L’obligation de dépôt prévue à l’article 139.1 ne s’applique pas aux projets de règlements d’application du paragraphe 139(1), si le ministre estime que ceux-ci n’apportent pas de modification de fond notable à des règlements existants.

(4) Les règlements d’application pris en vertu du paragraphe 139(1) peuvent être pris sans avoir auparavant été déposés devant l’une ou l’autre chambre du Parlement, si le ministre estime que l’urgence de la situation justifie une dérogation à l’article 139.1.

(5) Le ministre fait déposer devant chaque chambre du Parlement un rapport énonçant les motifs sur lesquels il fonde, en application des paragraphes (3) ou (4), sa dérogation à l’article 139.1. ».

24.Article 140, pages 87 et 88 :

a)À la page 87, ajouter, après la ligne 35, ce qui suit :

« (1.1) Il est entendu que le ministre peut, par arrêté, modifier ou révoquer un arrêté pris en vertu du paragraphe (1) ou suspendre son application en tout ou en partie. »;

b)à la page 88, ajouter, après la ligne 2, ce qui suit :

« (2.1) Le ministre peut, par arrêté, suspendre l’application, en tout ou en partie, d’un arrêté pris en vertu du paragraphe (2). ».

25. Article 141, page 88 : Remplacer la ligne 3 par ce qui suit :

« 141 L’arrêté pris en vertu des paragraphes 140(1) ou (1.1) n’est pas ».

26.Article 142, page 88 :

a)Remplacer la ligne 11, dans la version française, par ce qui suit :

« taires ou de l’attribution d’approbations, d’autorisations ou d’exemp- »;

b)remplacer la ligne 25 ,dans la version française, par ce qui suit :

« procédés réglementaires ou de l’attribution des approbations, des autorisa- ».

27.Article 145, page 89 : Remplacer les lignes 6 à 11 par ce qui suit :

« 145 Dans le cas où une personne omet de payer en vertu du paragraphe 142(1) le ministre peut, par avis écrit et pour le délai qu’il précise, retirer ou ne pas fournir un service, ne pas permettre l’utilisation d’une installation, ne pas fournir ou suspendre un procédé réglementaire, retirer ou ne pas attribuer une approbation, une autorisation ou une exemption, retirer ou ne pas fournir un produit ou retirer ou ne pas attribuer un droit ou un avantage. ».

28. Article 151.1, page 91 : Remplacer les lignes 6 à 9 par ce qui suit :

« (2) Au plus tard dix-huit mois après le début de l’examen, le ministre fait déposer devant chaque chambre du Parlement un rapport sur celui-ci, lequel rapport comporte notamment toute conclusion ou recommandation qui en découle. ».

29.Nouvel article 151.2, page 91 : Ajouter, après la ligne 9, ce qui suit :

« 151.2 (1) Trois ans après l’entrée en vigueur du présent article, le ministre de la Santé veille à ce qu’un à l’examen portant sur l’impact de la présente loi sur la santé publique et, notamment, sur la santé et les habitudes de consommation des jeunes à l’égard de l’usage de cannabis soit entrepris.

(2) Au plus tard dix-huit mois après le début de l’examen, le ministre de la Santé fait déposer devant chaque chambre du Parlement un rapport sur celui-ci, lequel rapport comporte notamment toute conclusion ou recommandation qui en découle. ».

30.Nouvel article 151.3, page 91 : Ajouter, avant l’intertitre « PARTIE 12 », ce qui suit :

« 151.3 (1) Cinq ans après l’entrée en vigueur du présent article, le comité du Sénat, de la Chambre des communes ou des deux chambres désigné ou constitué à cette fin entreprend l’examen de l’application de la présente loi.

(2) Le comité visé au paragraphe (1) examine à fond la présente loi et son application, et dépose, dans un délai raisonnable après l’examen, devant chaque chambre du Parlement un rapport sur celui-ci, lequel rapport comporte notamment toute conclusion ou recommandation qui en découle. ».

31.Article 160, page 98 : Remplacer la ligne 17, dans la version anglaise, par ce qui suit :

« fore the commencement day is deemed to be a permit is- ».

32.Nouvel article 160.1, page 99 : Ajouter, après la ligne 3, ce qui suit :

« 160.1 (1) Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article.

cannabis Marihuana séchée, marihuana fraîche ou huile de chanvre indien au sens du paragraphe 1(1) du Règlement sur l’accès au cannabis à des fins médicales ou des plants ou des graines de marihuana au sens de ce règlement. (cannabis)

fournir S’entend au sens du paragraphe 2(1) de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. (provide)

producteur autorisé Producteur autorisé au sens du paragraphe 1(1) du Règlement sur l’accès au cannabis à des fins médicales qui détient une licence qui n’a pas été suspendue au titre de l’article 43 de ce règlement. (licensed producer)

vente S’entend au sens du paragraphe 2(1) de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. (sell)

(2) Dès l’entrée en vigueur du présent article et jusqu’à l’entrée en vigueur du paragraphe 204(1), tout producteur autorisé peut, malgré les interdictions prévues aux articles 4, 5, 7 et 7.1 de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, vendre, fournir, expédier ou livrer du cannabis à toute personne qui est le titulaire d’une autorisation au titre du paragraphe (5), à le transporter dans le but de le vendre, de le fournir, de l’expédier ou de le livrer à cette personne ou offrir d’exercer l’une de ces activités.

(3) Le producteur autorisé peut exercer une activité visée au paragraphe (2) si les conditions suivantes sont respectées :

a) l’activité est exercée à l’égard de la marihuana, l’huile de chanvre indien, des plants ou des graines qui sont visés par la licence qui lui a été délivrée au titre de l’article 35 du Règlement sur l’accès au cannabis à des fins médicales et qui sont du cannabis;

b) l’exercice de l’activité est autorisé au titre de sa licence.

(4) Dès l’entrée en vigueur du présent article et jusqu’à l’entrée en vigueur du paragraphe 204(1), les alinéas 18(1)b) et 19(1)b) du Règlement sur l’accès au cannabis à des fins médicales ne s’appliquent pas au producteur autorisé qui agit au titre du paragraphe (2).

(5) Dès l’entrée en vigueur du présent article et jusqu’à l’entrée en vigueur du paragraphe 204(1), toute personne peut, malgré les interdictions prévues aux articles 4, 5, 7 et 7.1 de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances et sous réserve du paragraphe (6), posséder, vendre, fournir, expédier, livrer ou transporter du cannabis — ou offrir d’exercer l’une de ces activités — si une province lui en donne l’autorisation.

(6) Le paragraphe (5) ne s’applique que si la personne respecte les conditions suivantes :

a) elle limite sa possession ou sa vente de cannabis à celui qui lui a été vendu ou fourni par un producteur autorisé qui agit au titre du paragraphe (2) ou par une personne autorisée, en vertu du paragraphe (5), à vendre, à fournir, à expédier, à livrer ou à transporter du cannabis;

b) elle limite sa vente, sa fourniture, son expédition ou sa livraison de cannabis — et son transport de cannabis dans le but de le vendre, de le fournir, de l’expédier ou de le livrer — aux personnes suivantes :

(i) toute personne qui est le titulaire d’une autorisation au titre du paragraphe (5),

(ii) tout producteur autorisé qui procède à des essais sur ce cannabis ou tout distributeur autorisé au sens du paragraphe 2(1) du Règlement sur les stupéfiants qui est titulaire d’une licence visant le cannabis et qui procède à de tels essais;

c) elle conserve la documentation pertinente en ce qui a trait aux activités liées au cannabis en sa possession à des fins commerciales;

d) elle prend des mesures adéquates afin de réduire le risque que le cannabis en sa possession à des fins commerciales soit détourné vers un marché ou pour une activité illicites.

(7) Le paragraphe 8(1) du Règlement sur les stupéfiants ne s’applique pas :

a) au producteur autorisé qui agit au titre du paragraphe (2) en ce qui a trait à sa production, à sa fabrication ou à son assemblage de cannabis;

b) au producteur autorisé qui agit au titre du paragraphe (2) et à la personne autorisée à vendre ou à fournir du cannabis au titre du paragraphe (5) en ce qui a trait à leur vente, à leur fourniture, à leur transport, à leur expédition ou à leur livraison de cannabis.

(8) Tout employé ou mandataire d’une personne autorisée à exercer ou à offrir d’exercer toute activité au titre du présent article peut, malgré les interdictions prévues aux articles 4, 5, 7 et 7.1 de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, exercer ou offrir d’exercer toute activité que son employeur ou mandant peut exercer ou offrir d’exercer, dans la mesure où il le fait dans le cadre de ses fonctions ou de son mandat et qu’il respecte les conditions applicables à l’autorisation de son employeur ou de son mandant.

(9) Toute personne qui agit au titre d’un contrat conclu avec une personne autorisée à exercer ou à offrir d’exercer toute activité au titre du présent article — autre qu’un employé ou un mandataire de cette personne autorisée — peut, malgré les interdictions prévues aux articles 4, 5, 7 et 7.1 de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, exercer ou offrir d’exercer toute activité que la personne autorisée peut exercer ou offrir d’exercer, dans la mesure où elle le fait dans le cadre de ce contrat et qu’elle respecte les conditions applicables à l’autorisation de la personne autorisée.

(10) Il est entendu que le présent article n’autorise pas la vente au détail du cannabis. ».

33.Article 195.1, page 114 : Remplacer la ligne 16, dans la version française, par ce qui suit :

« 195.1 L’article 4.1 de la même loi est remplacé ».

34.Article 226, page 124 : Remplacer la ligne 22 par ce qui suit :

« positions de la présente loi, sauf les articles 160.1, 161, ».

Votre comité a aussi fait certaines observations qui sont annexées au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,

ART EGGLETON

(Le texte des observations figure aux Journaux du Sénat d’aujourd’hui, p. 3488.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

Le sénateur Eggleton : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5f) du Règlement, je propose que l’étude du rapport soit inscrite à l’ordre du jour de la présente séance.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(Sur la motion du sénateur Eggleton, l’étude du rapport est inscrite à l’ordre du jour de la présente séance.)

[Français]

Le Sénat

Préavis de motion concernant la période des questions de la séance du 5 juin 2018

L’honorable Diane Bellemare (coordonnatrice législative du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, pour permettre au Sénat de recevoir un ministre de la Couronne au cours de la période des questions tel qu’autorisé par le Sénat le 10 décembre 2015, et nonobstant ce que prévoit l’article 4-7 du Règlement, lorsque le Sénat siégera le mardi 5 juin 2018, la période des questions commence à 15 h 30, toutes les délibérations alors en cours au Sénat étant interrompues jusqu’à la fin de la période des questions, qui sera d’une durée maximale de 40 minutes;

Que, si un vote par appel nominal coïncide avec la période des questions tenue à 15 h 30 ce jour-là, ce vote soit reporté et ait lieu immédiatement après la période des questions;

Que, si la sonnerie d’appel pour un vote retentit à 15 h 30 ce jour-là, elle cesse de se faire entendre pendant la période des questions et qu’elle retentisse de nouveau à la fin de la période des questions pour le temps restant;

Que, si le Sénat termine ses travaux avant 15 h 30 ce jour-là, la séance soit suspendue jusqu’à 15 h 30, heure de la période des questions.

(1420)

Projet de loi no 1 d’exécution du budget de 2018

Autorisation au Comité de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles de déposer son rapport sur la teneur du projet de loi auprès du greffier pendant l’ajournement du Sénat

L’honorable Rosa Galvez : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5a) du Règlement, je propose :

Que le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer auprès du greffier du Sénat, au plus tard le 31 mai 2018, son rapport sur la teneur des éléments de la partie 5 du projet de loi C-74, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 27 février 2018 et mettant en œuvre d’autres mesures, si le Sénat ne siège pas, et que ledit rapport soit réputé avoir été déposé au Sénat.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

Peuples autochtones

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

L’honorable Lillian Eva Dyck : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5j) du Règlement, je propose :

Que le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones soit autorisé à se réunir le mercredi 30 mai 2018, à 18 h 45, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l’application de l’article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Affaires étrangères et commerce international

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

L’honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5j) du Règlement, je propose :

Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international soit autorisé à se réunir aujourd’hui, le mercredi 30 mai 2018, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l’application de l’article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Projet de loi no 1 d’exécution du budget de 2018

Dépôt du premier rapport du Comité spécial sur l’Arctique sur la teneur du projet de loi

Consentement ayant été accordé de revenir à la présentation ou au dépôt de rapports de comités :

L’honorable Dennis Glen Patterson : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le premier rapport du Comité spécial sur l’Arctique, qui porte sur la teneur du projet de loi C-74, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 27 février 2018 et mettant en œuvre d’autres mesures.

(Conformément à l’ordre adopté le 24 avril 2018, le rapport est renvoyé d’office au Comité sénatorial permanent des finances nationales et l’étude de ce rapport est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)


PÉRIODE DES QUESTIONS

Les ressources naturelles

L’oléoduc Trans Mountain

L’honorable Larry W. Smith (leader de l’opposition) : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat. Elle porte sur le sujet de l’heure, l’oléoduc Trans Mountain.

Comme nous le savons tous, le gouvernement du Canada a annoncé hier sa décision d’acheter, de Kinder Morgan, cet oléoduc, les actifs qui y sont rattachés et l’équipe de gestion du projet pour environ 4,5 milliards de dollars à même l’argent des contribuables. Toutefois, ce n’est pas le total de la note que les contribuables devront payer. En effet, on ne connaît ni les coûts des travaux d’expansion ni le montant des indemnités que le gouvernement devra éventuellement accorder à un nouvel acheteur en cas d’obstruction de la part des autorités provinciales ou en cas de décisions judiciaires défavorables. Enfin, on ignore combien le gouvernement sera disposé à payer pour se porter de nouveau acquéreur du projet, au besoin.

Sénateur Harder, quel est le coût total pour les contribuables de la décision du gouvernement de faire l’acquisition de Trans Mountain? Si vous ne connaissez pas la réponse pour le moment, je vous serais très reconnaissant de vous informer.

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénateur de sa question. Manifestement, le gouvernement a l’intention de faire ce qu’il avait dit qu’il ferait, c’est-à-dire veiller à ce que l’oléoduc soit construit. Le projet d’oléoduc doit aller de l’avant. C’est dans l’intérêt du pays.

Le gouvernement a pris une mesure extraordinaire, mais celle-ci n’est pas sans précédent. Les sénateurs ont souvent fait référence aux mesures prises pour bâtir le pays par des gouvernements précédents qui ont construit l’infrastructure qui était nécessaire à l’époque. Il n’y a pas si longtemps, autant que je puisse m’en souvenir, des premiers ministres courageux ont investi dans le projet Hibernia, ainsi que dans le secteur de l’automobile. Le courageux premier ministre actuel a pris une mesure afin que l’oléoduc soit construit.

De toute évidence, les questions que pose l’honorable sénateur sont importantes, mais il est trop tôt pour s’attendre à ce que le gouvernement fournisse des précisions sur tous ces points, puisqu’un certain nombre d’entre eux sont liés à la nature des négociations et des options qui s’offrent à nous.

Il suffit pour le moment de savoir que le gouvernement est déterminé. Ses objectifs sont bien compris. L’objectif à court terme est de veiller à ce que le projet aille de l’avant et que la construction soit amorcée au cours de la saison de la construction qui commence, et de faire en sorte que l’oléoduc soit construit, afin que le Canada puisse profiter des installations portuaires pour l’exportation de ses importantes ressources.

Le sénateur Smith : Merci beaucoup, monsieur. Je vous suis reconnaissant de nous avoir fait part des mesures prises par le gouvernement. Manifestement, le gouvernement, en dernier recours, n’a eu d’autre choix que d’utiliser l’argent des contribuables pour faire l’acquisition de Kinder Morgan.

Au cours des prochaines semaines, et peut-être avant le congé d’été, il nous serait très utile d’obtenir quelques prévisions. La transparence est essentielle pour assurer la crédibilité du gouvernement dans ce cas-ci. Je vous demande donc votre aide à cet égard.

Le sénateur Harder : Je suis bien prêt à aider le sénateur, tout en sachant qu’il faudra attendre le déroulement de divers scénarios avant d’obtenir la transparence qu’il exige. Le gouvernement n’est pas le seul intervenant en cause, mais son intention est claire. Le ministre des Finances est à Calgary aujourd’hui pour parler de la question et fournir des détails supplémentaires pour le projet.

À l’instar de tous les sénateurs, j’ai hâte de suivre le débat et de m’assurer que l’intérêt des Canadiens est bien servi par cette annonce importante.

L’honorable David Tkachuk : Je vais donner suite à cette question. Il y a quatre mois, le Sénat a jugé nécessaire de tenir un débat d’urgence sur Trans Mountain. Ce débat a fait suite à l’annonce du premier ministre Horgan indiquant qu’il entendait prendre le projet en otage, bien que celui-ci ait passé par un processus d’approbation pluriannuel. Environ deux mois plus tard, le premier ministre a convaincu les premiers ministres Notley et Horgan de se réunir et a annoncé que le ministre des Finances entamerait des négociations avec Kinder Morgan. Il a fallu attendre encore presque deux autres mois après cela pour que le gouvernement annonce que les négociations avec Kinder Morgan avaient échoué et que la pétrolière abandonnait le projet.

Des gens comparent la situation actuelle à celle d’Hibernia et affirment que nous avons déjà pris de telles mesures. La différence entre Hibernia et Kinder Morgan est que, dans le cas du dernier, nous achetons un actif qui est déjà sur le terrain et auquel les investisseurs maintiendraient leur engagement si seulement le gouvernement pouvait leur garantir qu’il leur permettrait d’achever le projet. En ce qui concerne le projet Hibernia, nous sommes intervenus parce que les investisseurs s’étaient retirés et que le projet était aux trois quarts terminé. Il existe une grosse différence entre sauver un projet qui n’a pas été commencé et dépenser de l’argent sur un projet qui est déjà en cours.

(1430)

J’aimerais savoir à combien on évalue le coût de la construction du pipeline, si le gouvernement a réalisé une analyse des coûts et, le cas échéant, si vous seriez disposé à déposer cette analyse ici, au Sénat.

Le sénateur Harder : Je remercie mon collègue pour son intervention et sa question.

Je me contenterai de dire que le gouvernement continuera de faire preuve de transparence et d’ouverture relativement aux investissements qui découlent de cette décision. La décision est toutefois claire. Le gouvernement fera ce qu’il convient de faire pour que le pipeline voie le jour, que le Canada se dote des infrastructures nécessaires à l’exportation et à l’obtention d’un bon prix pour son produit provenant de l’Alberta, et la voie à suivre sera annoncée en cours de route. Chose certaine, l’intention y est, et tous s’attendent à ce que le gouvernement mène à bien ce projet.

Le sénateur Tkachuk : Qu’est-ce qui a changé exactement entre lundi et hier en ce qui concerne la construction du pipeline? Vous savez peut-être quelque chose que l’on ignore, et vous pourriez peut-être nous donner la date du début des travaux, ou, du moins, la date d’achèvement prévue.

Le sénateur Harder : Encore une fois, cher collègue, le ministre des Finances est en Alberta aujourd’hui pour discuter du projet. Il faudra voir au cours des prochains jours ce qui sera annoncé.

Évidemment, la différence entre lundi et aujourd’hui, c’est que le gouvernement a annoncé un plan d’action précis qui correspond à ce qu’il avait annoncé plus tôt à tous les intervenants, c’est-à-dire qu’il fera tout le nécessaire pour que ce projet soit réalisé.

Les transports

Les droits de péage

L’honorable Percy E. Downe : Sénateur Harder, hier, le vérificateur général a indiqué dans son rapport que la décision d’annuler le péage du pont Champlain entraînera une perte de revenus d’au moins 3 milliards de dollars pendant les 30 premières années d’exploitation du pont. Autrement dit, ce sont 100 millions de dollars que devront débourser chaque année le gouvernement et les contribuables canadiens en renonçant au péage du nouveau pont Champlain. Le gouvernement pense-t-il réellement que c’est avantageux financièrement?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénateur de sa question et je soupçonne qu’il a un autre pont en tête dans le contexte de cette question. Je dirai simplement que, comme le sénateur le sait pertinemment, la décision relative aux péages a été prise pour donner suite à des engagements pris lors de la dernière campagne électorale.

Le sénateur Downe : Merci beaucoup.

Tout à l’heure, j’ai déposé un rapport du directeur parlementaire du budget, qui se penche sur l’estimation des coûts du pont de la Confédération. Il a conclu que l’élimination du péage sur ce pont coûterait moins de 17 millions de dollars par année.

Le gouvernement du Canada possède deux ponts, les deux étant payés par les contribuables canadiens. Sur l’un d’entre eux, il n’y a aucun péage, et il coûte 100 millions de dollars par année, alors que sur l’autre, tous les Prince-Édouardiens et les autres Canadiens qui veulent quitter l’Île-du-Prince-Édouard doivent payer 47 $ pour le traverser, alors que l’élimination de ce péage coûterait moins de 17 millions de dollars. Pourquoi le gouvernement traite-t-il ces deux ponts et ces deux groupes de Canadiens différemment, selon l’endroit où ils se trouvent?

Le sénateur Harder : Je remercie une fois de plus l’honorable sénateur de sa question. Bien sûr, je la traiterai comme une proposition et je ferai de nouveau connaître son opinion au gouvernement.

Je dirai simplement que, comme le sénateur le sait pertinemment, les deux projets ont été construits selon des formules différentes, ce qui se reflète dans les péages. Toutefois, le sénateur a toujours raison d’attirer l’attention du gouvernement et du Sénat sur le point de vue de ses concitoyens.

L’infrastructure et les collectivités

Les crises qui sévissent à Churchill, au Manitoba

L’honorable Pamela Wallin : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement et elle porte, en quelque sorte, sur les dépenses liées à l’oléoduc.

Le gouvernement semble être d’humeur à dépenser. Par conséquent, pourrait-on me dire ce qu’ils comptent faire pour régler la crise du port de Churchill, qui faisait autrefois notre fierté? Le coût de la vie pour les habitants, les agriculteurs, les producteurs de légumineuses et de potasse et les exploitants des ressources naturelles de la Saskatchewan a beaucoup augmenté, et c’est sans parler de la stratégie sur l’Arctique qu’Ottawa met en œuvre. Où en sont les négociations?

La seule liaison terrestre vers Churchill a été coupée et le port a été laissé à l’abandon. Quand le gouvernement cherchera-t-il à protéger cette infrastructure stratégique en négociant avec les entreprises canadiennes — à moins qu’il ne l’achète?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénatrice de sa question, qui préoccupe un certain nombre de sénateurs. La situation actuelle de Churchill et du Nord du Manitoba nous préoccupe tous.

Je peux dire que le gouvernement appuie toujours son négociateur en chef, l’ancien greffier du Conseil privé, Wayne Wouters, qui est actuellement en pourparlers avec les acheteurs intéressés, les organismes autochtones et les dirigeants locaux. Le gouvernement garde espoir que les acheteurs possibles puissent élaborer un plan d’affaires viable à long terme qui leur permettra d’exploiter cette liaison. Le ministre a rappelé dernièrement que le gouvernement se soucie avant tout du bien-être et de la sécurité des gens de la région. Les négociations se poursuivent.

La sénatrice Wallin : Le gouvernement a-t-il prévu un calendrier, une date butoir, voire un objectif quant à la fin des négociations?

Le sénateur Harder : Selon les renseignements dont je dispose, les négociations sont en cours. Il ne serait donc pas utile de commenter publiquement l’état des négociations.

Les ressources naturelles

L’oléoduc Trans Mountain

L’honorable Richard Neufeld : Ma question s’adresse au leader du gouvernement et porte sur le projet d’expansion de l’oléoduc Trans Mountain.

Le mois dernier, la société Kinder Morgan a dit qu’elle voulait la voie libre pour son projet de construction en Colombie-Britannique. Le premier ministre a répondu en promettant aux Canadiens un projet de loi visant à réaffirmer et renforcer la compétence et le rôle du gouvernement fédéral dans ce dossier.

Sénateur Harder, depuis ce temps, le gouvernement n’a présenté aucun projet de loi. La semaine dernière, la grande majorité des sénateurs ont voté en faveur du projet de loi S-245, du sénateur Doug Black. Non seulement le gouvernement n’a pas déployé tous les efforts en vue de faire adopter rapidement cette mesure législative à l’autre endroit, mais nous ignorons même s’il appuie cette mesure.

Pourquoi le gouvernement n’a-t-il pas choisi de donner une certitude à Kinder Morgan au moyen d’une loi, comme il l’avait promis à l’origine, plutôt que d’utiliser l’argent des contribuables pour nationaliser Trans Mountain, et pourquoi n’a-t-il pas appuyé le projet de loi S-245?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénateur de sa question et de son intérêt continu dans ce projet.

Laissez-moi répéter que le gouvernement du Canada a déclaré fermement que son objectif est de veiller à la construction de l’infrastructure nécessaire à l’acheminement de nos ressources jusqu’aux côtes.

Au nom du gouvernement, le premier ministre a indiqué plus tôt que le gouvernement est ouvert à un certain nombre de moyens pour y arriver, notamment, s’il y a lieu, une loi. Les négociations avec Kinder Morgan annoncées par le gouvernement ont été menées sous la direction du ministre des Finances. Elles ont donné lieu à l’annonce que le gouvernement a faite, et ce dernier continuera de faire tout ce qui est nécessaire pour s’assurer que ce pipeline soit construit.

Transports et communications

L’oléoduc Trans Mountain

L’honorable Michael L. MacDonald : J’ai aussi une question sur le pipeline Trans Mountain, mais je pense que je la poserai au président du Comité des transports, le sénateur Tkachuk.

Il y a quelques mois, en février, le sénateur Tkachuk a lancé un débat d’urgence portant sur le pipeline Trans Mountain alors que personne ne faisait grand-chose à cet égard.

Par la suite, le sénateur Doug Black a présenté le projet de loi S-245, que le Sénat a rapidement adopté et renvoyé à la Chambre des communes.

De son côté, le gouvernement a promis de présenter un projet de loi, mais il ne l’a pas fait. L’autre endroit est actuellement saisi de notre projet de loi.

Hier, le gouvernement a consacré 4,5 milliards de dollars à l’achat d’un oléoduc construit il y a 65 ans; c’est le seul actif qu’il acquiert. Le coût de construction du nouveau pipeline dépassera les 7 milliards de dollars en matériaux et en main-d’œuvre. Nous ne savons pas à combien s’élèveront les coûts réels.

Sénateur Tkachuk, pourriez-vous proposer au comité directeur du Comité des transports la tenue de plusieurs audiences — trois, peut-être — pour que nous puissions inviter le ministre des Transports, le ministre des Ressources naturelles et peut-être aussi le ministre des Finances à comparaître? Les Canadiens veulent savoir ce qu’il en est du pipeline et combien il coûtera.

L’honorable David Tkachuk : À mon avis, c’est une excellente idée, sénateur MacDonald.

(1440)

Des voix : Bravo!

Le sénateur Tkachuk : Comme un économiste l’a indiqué aujourd’hui dans un gazouillis, pourquoi une entreprise prendrait-elle en charge un projet incomplet, où persistent des problèmes et des risques? Les prix augmenteront-ils au point de pousser les expéditeurs à s’adresser ailleurs, ou bien le fédéral absorbera-t-il les coûts supplémentaires?

C’est ce que je ferai. Je demanderai la convocation d’un comité directeur du Comité des transports qui, espérons-le, acceptera de tenir des audiences. J’en parlerai également à la prochaine séance du Comité des transports afin de voir si des audiences peuvent être organisées pour obtenir un complément d’information que ne nous donnent pas le gouvernement du Canada et le leader du gouvernement au Sénat.

Le vérificateur général

Le rapport sur le système de paie Phénix

L’honorable Joseph A. Day (leader des libéraux au Sénat) : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Elle concerne, encore une fois, le rapport du vérificateur général et le système de paie Phénix. Le vérificateur général a indiqué qu’il y avait trois cadres dont l’action frisait l’incompétence. Disons que c’est une façon gentille d’exprimer les constatations du vérificateur général. Je me demande si, en refusant de nommer ces fonctionnaires, le vérificateur général n’applique pas une norme différente. Lorsque nous avons convoqué le vérificateur général pour examiner notre…

Des voix : Bravo!

Le sénateur Day : Il n’avait pas hésité à dénoncer des sénateurs et à attaquer, à tort, leur crédibilité. Peut-on savoir pourquoi, en l’occurrence, le vérificateur général protège la fonction publique, alors qu’il était prêt à sacrifier de bons sénateurs compétents?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénateur de sa question. Comme les sénateurs le savent, le vérificateur général est, pour le meilleur ou pour le pire, un mandataire indépendant du Parlement. Loin de moi, donc, l’idée de parler en son nom ou au nom du gouvernement à propos de la question soulevée par l’honorable sénateur, mais je la porterai certainement à l’attention du vérificateur général et j’invite les comités qui examinent le rapport à soulever la question directement.

[Français]

La sécurité publique

L’ombudsman des victimes d’actes criminels

L’honorable Pierre-Hugues Boisvenu : Avant de poser ma question, je tiens à souligner que la Semaine des victimes et survivants d’actes criminels se déroule en ce moment. J’aimerais préciser également que le poste d’ombudsman fédéral des victimes d’actes criminels est complètement différent de celui d’ombudsman des services correctionnels. L’ombudsman des services correctionnels tient ses pouvoirs d’une loi et de la Chambre des communes, alors que l’ombudsman fédéral des victimes d’actes criminels relève tout simplement d’un programme du ministère de la Justice.

À l’autre endroit, le gouvernement fédéral a rejeté le projet de loi C-343, qui visait à octroyer à l’ombudsman des victimes d’actes criminels les mêmes pouvoirs que ceux de l’ombudsman des services correctionnels.

Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat. Pouvez-vous me confirmer que la ministre de la Justice n’a pas l’intention d’abolir le poste d’ombudsman des victimes d’actes criminels, même si ce poste est encore vacant, et ce, depuis bientôt un an?

[Traduction]

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie le sénateur de sa question. Je ne peux pas lui donner cette confirmation, mais je peux l’assurer que le gouvernement a bel et bien l’intention de prendre une décision au moment opportun.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Si votre raisonnement est juste et que je le comprends bien, et si le gouvernement ne veut pas abolir le poste d’ombudsman des victimes d’actes criminels, pourquoi n’a-t-il fallu que deux semaines afin de pourvoir le poste d’ombudsman des services correctionnels, alors que cela fait huit mois que le gouvernement fédéral est privé d’un porte-parole des victimes d’actes criminels? Le processus de sélection a démarré en juillet 2017 et, à ce jour, aucun ombudsman n’a encore été nommé à ce poste.

[Traduction]

Le sénateur Harder : Comme je l’ai déjà dit, je porterai certainement à l’attention de la ministre l’inquiétude au sujet du temps écoulé, relativement à cette importante nomination, mais je voudrais donner à la Chambre l’assurance que la ministre s’occupe de ce dossier.

[Français]

Les ressources naturelles

L’oléoduc Trans Mountain

L’honorable Claude Carignan : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat et porte sur l’oléoduc Trans Mountain. Nous ne savons pas quand le gouvernement achèvera les travaux afin d’augmenter la capacité de ce pipeline; toutefois, le sénateur Harder pourrait-il nous dire quelles règles le gouvernement entend suivre pour la construction du pipeline?

Une société privée peut négocier avec qui elle veut en ce qui a trait aux constructeurs et aux sous-traitants, mais le gouvernement du Canada, lui, doit normalement suivre un processus d’appel d’offres public. Pouvez-vous nous confirmer quelles sont les règles que le gouvernement entend suivre afin d’octroyer des contrats dans le cadre de la construction du pipeline?

[Traduction]

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie le sénateur de sa question. Ses questions sont prématurées, comme il s’en doute, étant donné que l’annonce vient d’être faite, mais je tiens à lui donner l’assurance, ainsi qu’à tous les Canadiens, que le gouvernement fera le nécessaire pour que la nouvelle canalisation de l’oléoduc soit construite aussi vite que possible.

[Français]

Le sénateur Carignan : Le gouvernement a promis des emplois à des Canadiens à l’occasion de cette acquisition. Peut-il nous garantir que ce ne seront pas des compagnies étrangères qui obtiendront des contrats pour la construction du pipeline et qu’il s’agira uniquement de compagnies canadiennes ou d’employés canadiens qui participeront à sa construction?

[Traduction]

Le sénateur Harder : J’apprécie la question encore une fois, monsieur le sénateur, mais je dois vous répéter qu’il est prématuré pour moi d’y répondre et que je ne peux conjecturer au sujet des détails que le gouvernement donnera plus tard. Je dois m’en tenir aux décisions prises, aux annonces faites ainsi qu’à la garantie que le ministre continuera de faire preuve de transparence et de franchise envers les Canadiens au sujet de cet investissement.

Les transports

Le pont Champlain

L’honorable Leo Housakos : Honorables sénateurs, ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat. Elle fait suite à celle qui a été posée par mon collègue, le sénateur Downe, au sujet de la construction du nouveau pont Champlain. C’est une chose de prendre la décision malavisée mais politiquement rentable d’enlever les péages au beau milieu d’une campagne électorale, mais c’est autrement plus important de savoir que le contrat conclu par le gouvernement précédent avec le consortium prévoyait que les travaux devaient être achevés le 1er décembre et que des indemnités et des frais allaient être exigibles pour chaque jour de retard.

À de nombreuses occasions, j’ai pris la parole dans cette enceinte et j’ai demandé au leader du gouvernement de confirmer si le gouvernement respecterait ce contrat coulé dans le béton et si des frais s’appliqueraient dans l’éventualité où la date limite du contrat, soit le 1er décembre, ne serait pas respectée. J’ai justement reçu hier une réponse écrite de la part du leader du gouvernement. Non seulement la date limite du 1er décembre ne sera pas respectée, mais le gouvernement a accepté de prolonger le contrat jusqu’au 21 décembre. Le gouvernement n’a pas répondu à ma question, à savoir s’il imposera des amendes au consortium parce que celui-ci n’a pas respecté la date limite. Il se trouve que c’est le gouvernement qui paiera au consortium des amendes totalisant 225 millions de dollars.

Pourquoi le contrat original n’a-t-il pas été respecté, de sorte que, si le pont n’était pas construit avant la date limite du 1er décembre, le consortium serait tenu de payer les amendes prévues? Pourquoi le gouvernement a-t-il jugé bon de payer des amendes à une entreprise qui ne livrera pas le produit demandé dans le délai prévu, plutôt que d’imposer à celle-ci des amendes au nom des contribuables?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénateur de sa question au sujet du pont Champlain. J’ai, dans une réponse à des questions précédentes, souligné que le gouvernement s’attend toujours à ce que la date limite du mois de décembre soit respectée. Le ministre responsable a visité les lieux à la fin de la semaine dernière. Il a confirmé l’attente du gouvernement et le fait que le contrat sera respecté.

Je propose aussi à l’honorable sénateur de lire le rapport du vérificateur général sur le pont Champlain. Il constatera que le vérificateur général a reproché au gouvernement précédent d’avoir tardé à prendre des décisions quant à la construction du pont, ce qui a donné lieu à des retards et a fait augmenter les coûts.

Le sénateur Housakos : J’ai lu le rapport, monsieur le leader du gouvernement. Le gouvernement précédent a tardé à prendre une décision parce que c’était dans l’intérêt des contribuables. Le fait que le gouvernement actuel n’applique pas le contrat, qui prévoit l’imposition d’amendes si la date limite du 1er décembre n’est pas respectée, est tout à fait irresponsable.

Ma question est très simple. Pourquoi le gouvernement a-t-il payé au consortium des amendes totalisant 225 millions de dollars plutôt que d’imposer à ce consortium des amendes parce qu’il accusera un retard de 21 jours?

Le sénateur Harder : Permettez-moi de dire que le vérificateur général a pu constater que les retards indus présentés par le sénateur comme un moyen d’économiser les deniers publics engendrent en fait des coûts, en raison de la détérioration du pont existant et de l’inefficacité des travaux lorsqu’ils ne se déroulent pas comme prévu.

Le gouvernement respecte les obligations contractuelles de l’État, et les attentes sont claires.

[Français]

Les ressources naturelles

L’oléoduc Trans Mountain

L’honorable Claude Carignan : La compagnie Kinder Morgan a payé ce pipeline 500 millions de dollars, alors qu’elle le revend maintenant 4,5 milliards de dollars. Je ne sais pas s’il s’agit de devises américaines ou canadiennes; peut-être que vous pourrez nous le préciser.

(1450)

Pourriez-vous nous dire quel sera le montant de l’impôt que paiera Kinder Morgan sur ces profits faramineux? Le ministre des Finances a-t-il prévu de retenir l’impôt dans la transaction ou compte-t-il envoyer le chèque directement à Houston?

[Traduction]

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénateur de sa question. Je pense qu’elle est encore une fois quelque peu prématurée, étant donné que les annonces viennent d’être faites et que les ministres doivent se pencher sur les détails, sur tous les aspects des modalités. Je répète que le gouvernement est toujours déterminé à prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la construction de l’oléoduc. Il est convaincu que l’entente conclue avec Kinder Morgan est dans l’intérêt national. Le gouvernement a la ferme intention de voir la construction de l’oléoduc.


ORDRE DU JOUR

Projet de loi sur la radiation de condamnations constituant des injustices historiques

Projet de loi modificatif—Troisième lecture

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Cormier, appuyée par l’honorable sénateur Wetston, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-66, Loi établissant une procédure de radiation de certaines condamnations constituant des injustices historiques et apportant des modifications connexes à d’autres lois.

L’honorable Serge Joyal : Honorables sénateurs, je souhaite préciser, dès le départ, que j’appuie le principe du projet de loi C-66, qui est, comme son titre l’indique, une loi établissant une procédure de radiation de certaines condamnations constituant des injustices historiques pour les personnes de même sexe ayant des relations sexuelles. J’en suis toutefois venu à la conclusion que le projet de loi comporte des lacunes et qu’il contrevient au paragraphe 15(1) de la Charte des droits et libertés.

Je vais expliquer pourquoi. J’ai écouté attentivement le sénateur Cormier lorsqu’il a présenté le projet de loi. Bien sûr, j’ai également été à l’écoute des remarques de la sénatrice Cordy la semaine dernière. Je n’étais pas au Sénat hier, mais j’ai lu le discours que la sénatrice Lankin a prononcé. J’ai aussi lu le témoignage des gens qui ont pris la parole devant le Comité des droits de la personne dans le cadre de son examen du projet de loi.

Je ne puis m’empêcher de penser aux très nombreuses personnes qui ont des réserves à son sujet. En soi, ce texte est tout à fait valable, puisqu’il permet d’effacer le casier judiciaire d’un certain nombre de personnes qui ont été reconnues coupables d’avoir eu une relation sexuelle avec une personne du même sexe qu’elles. Cela dit, il laisse aussi sur la touche un autre groupe de personnes, qui ont, elles aussi, été reconnues coupables d’avoir entretenu une relation consensuelle avec une personne du même sexe qu’elles. Le projet de loi ne fait rien pour elles, même si elles font partie de la même catégorie de Canadiens qui ont été ostracisés par la justice et qui veulent laver leur nom et leur réputation en faisant effacer leur casier judiciaire. Certains d’entre eux voudraient même que, après leur mort, leurs héritiers s’adressent à la Commission des libérations conditionnelles afin de rétablir leur réputation auprès de leurs proches, de leurs amis et de leurs voisins.

J’ai pris l’initiative de lire les décisions de la Cour suprême sur l’application du paragraphe 15(1) de la Charte, ou du moins sur les principes qui le sous-tendent, afin de déterminer comment il s’applique au projet de loi. Je vous le lis :

La loi ne fait acception de personne et s’applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l’âge ou les déficiences mentales ou physiques.

Autrement dit, tout le monde a droit au même bénéfice de la loi. S’il est tout à fait vrai que le projet de loi C-66 établit un bénéfice pour un certain groupe de personnes qui ont eu des relations sexuelles avec une personne consentante et ainsi de suite — la définition exacte se trouve à l’article 25 du texte —, certaines autres qui ont elles aussi été reconnues coupables par les tribunaux sont laissées pour compte. Les sénatrices Lankin et Cordy, et même le premier ministre dans sa déclaration, ont admis sans équivoque que les hommes qui ont été arrêtés lors des rafles qui ont eu lieu dans les saunas au cours des années 1970 et 1980 avaient été injustement condamnés.

Je me suis donc demandé : « Quels sont les principes en jeu ici? Comment notre système peut-il s’attaquer à ce problème? » Je me suis reporté à la décision que la juge McLachlin a rendue en 1993 dans l’affaire Rodriguez. Pour ceux d’entre vous qui sont assez vieux, comme moi, pour se souvenir de l’affaire Rodriguez, je me permets de faire lecture d’un critère établi par la juge McLachlin :

La seule question est de savoir si, ayant décidé d’agir dans ce domaine délicat qui touche l’autonomie des gens sur leur personne, le législateur a agi d’une manière fondamentalement équitable pour tous.

La juge a bien dit « d’une manière fondamentalement équitable pour tous ». On ne doit pas mettre l’accent sur les motifs qui ont incité le Parlement à agir, mais plutôt sur la façon dont il a agi. Par conséquent, honorables sénateurs, voici la question qu’il faut se poser. Comment le projet de loi C-66 traite-t-il un groupe de personnes qui, par le passé, a été injustement condamné? Malheureusement, le projet de loi fait une distinction en ce qui concerne un certain groupe, en vertu d’un article du Code criminel, et laisse l’autre groupe dans un vide juridique. Je cite l’article 23 du projet de loi où il est dit assez clairement que la radiation d’une condamnation est possible :

Sous réserve des conditions prévues au paragraphe (2), le gouverneur en conseil peut, par décret, ajouter à l’annexe un article ou une partie d’article.

Autrement dit, la décision est laissée à la discrétion du gouverneur général, sans autres précisions. Le projet de loi ne prévoit ni cadre temporel ni critères additionnels à respecter. Il laisse simplement la discrétion au gouverneur en conseil de décider, un jour, à un moment donné, si ces personnes qui, par le passé, ont été injustement traitées obtiendront la radiation de leur condamnation. En cas de discrimination aux termes de l’article 15(1) de la Charte, dont je viens de faire lecture et qui a le même poids que la loi, le tribunal a établi des critères pour mesurer la discrimination. En fait, nous sommes assez chanceux, car la décision la plus récente remonte à moins de 20 jours. Elle a été rendue le 10 mai 2018 dans l’affaire entre la Centrale des syndicats du Québec et la procureure générale du Québec et entre la Confédération des syndicats nationaux et la procureure générale du Québec et le procureur général de l’Ontario.

(1500)

La juge Abella, qui a rédigé les décisions rendues à la majorité, a déterminé très clairement, au paragraphe 22, il y a moins de deux semaines, les critères servant à mesurer la discrimination selon le paragraphe 15(1), c’est-à-dire refuser à une personne de la même catégorie que toutes les autres le même bénéfice de la loi. La juge a écrit ceci :

Pour l’examen d’une demande fondée sur le par. 15(1), la jurisprudence de notre Cour établit une démarche en deux étapes : à première vue ou de par son effet, la loi contestée établit-elle une distinction fondée sur un motif énuméré ou analogue, et, dans l’affirmative, impose-t-elle « un fardeau ou [nie-t-elle] un avantage d’une manière qui a pour effet de renforcer, de perpétuer ou d’accentuer le désavantage », y compris le désavantage « historique » subi?

Elle parle de « désavantage historique », comme le projet de loi C-66.

L’objectif du projet de loi est donc bon. Il met en place une procédure pour supprimer les casiers judiciaires, mais seulement pour un groupe de personnes homosexuelles, et non pour un autre groupe, les personnes qui ont été arrêtées lors de descentes dans des bains publics. C’est la sénatrice Cordy qui a fourni les chiffres : 1 200 ont été pris dans une maison de débauche, 53 ont été accusés d’action indécente et 61, de grossière indécence.

En d’autres termes, toutes ces personnes injustement traitées ne sont plus reconnues coupables, et ce, en raison de décisions de la cour que j’ai mentionnées à l’étape de la deuxième lecture, la décision Labaye et la décision Bedford, lesquelles ont fixé, dans le contexte particulier de l’interprétation du Code criminel par la Cour suprême, les critères relatifs à toute personne ayant des relations sexuelles avec une personne du même sexe. Il n’y a plus de descentes dans les bains publics. On n’arrête plus les gens parce qu’ils ont eu des rapports consensuels dans des clubs échangistes. La jurisprudence l’établit clairement.

Il s’agit d’un enjeu crucial, honorables sénateurs. J’ai donc pris l’initiative de communiquer avec quelques personnes qui ont été exclues du projet de loi à l’étude. Je leur ai dit : « Vous êtes dans une situation difficile. Ce projet de loi est discriminatoire à votre endroit, puisque vous faites partie d’une catégorie de gens qui ont été reconnus coupables d’une infraction qui n’en est plus une, et que nous avons décidé que, étant donné la nature de l’infraction, vous ne bénéficieriez pas d’une radiation de condamnation. Vous subissez donc une double discrimination. »

Ce qui compte en ce moment, ce n’est pas la raison pour laquelle le Parlement a agi, mais sa façon d’agir, comme la juge McLaughlin l’a clairement établi. Dans le cas du projet de loi C-66, notre façon d’agir signifie que nous ne tenons pas compte des personnes reconnues coupables d’avoir participé à une activité sexuelle consensuelle exercée entre des personnes de même sexe, comme le définit l’article 25 du projet de loi. Cet article indique qu’il faut satisfaire aux critères suivants :

a)  l’activité visée par la condamnation était exercée entre des personnes du même sexe;

b) les personnes autres que celle visée par la condamnation avaient consenti à participer à cette activité;

c) les participants à l’activité visée par la condamnation étaient âgés de seize ans ou plus au moment de cette activité […]

Fixer l’âge minimum à 16 ans pose problème puisque, à une certaine époque, soit avant 2005, l’âge du consentement était de 14 ans. J’espère que ma collègue, la sénatrice Andreychuk, se penchera sur ce problème. Je sais que la sénatrice Lankin l’a déjà fait.

Bref, cela ajoute une autre couche de discrimination à la double discrimination que nous faisons subir aux personnes arrêtées pendant les descentes policières effectuées dans les saunas pendant les années 1970 et 1980.

La question est très grave, honorables sénateurs. Nous nions un bénéfice sans fixer d’échéance pour la résolution du problème, qui permettra d’entreprendre des démarches pour faire radier les condamnations.

La Cour suprême — et ce sera ma dernière citation, car je ne veux pas les multiplier inutilement — a établi assez nettement le contexte dans lequel la discrimination est justifiable au regard de l’article premier de la Charte.

Je cite la déclaration de l’ancienne juge McLachlin dans la décision que j’ai déjà citée et qui a été rendue il y a deux semaines. Voici ce que la juge a mentionné à propos de la discrimination comme on l’entend au paragraphe 15(1). Comment appliquer les limites raisonnables dans le cadre d’une société libre et démocratique?

La juge McLaughlin établit trois critères :

La procureure générale doit d’abord établir que le fait d’avoir différé l’accès des femmes touchées au droit à l’équité salariale et de les avoir privées de cet accès — lequel est aggravé en l’espèce par l’absence d’ajustements rétroactifs établie par la Loi — répondait à un objectif urgent et réel.

Autrement dit, est-ce pour répondre à un objectif urgent et réel que nous nions aux personnes déclarées coupables il y a 40 ans un bénéfice accordé à des personnes visées par un autre article du Code criminel? C’est le premier critère. Selon moi, la réponse à cette question est non.

Le deuxième est le suivant :

Il ne peut être satisfait au critère de l’atteinte minimale simplement en affirmant qu’un long délai était nécessaire un point c’est tout […]

Autrement dit, lorsque le gouvernement porte atteinte aux droits d’une personne en légiférant, il doit établir qu’il a pris toutes les précautions nécessaires pour répondre au critère de l’atteinte minimale.

Son Honneur le Président : Sénateur Joyal, je suis désolé, mais votre temps de parole est écoulé. Demandez-vous cinq minutes de plus?

Le sénateur Joyal : Oui.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé?

Des voix : Oui.

Le sénateur Joyal : La juge McLachlin a affirmé ceci :

Il ne peut être satisfait au critère de l’atteinte minimale simplement en affirmant qu’un long délai était nécessaire […]

En d’autres termes, nous avons besoin de plus de temps. C’est ce que dit l’article 23 du projet de loi. Le gouverneur en conseil peut revenir plus tard sur cette question pour modifier la procédure et donner les mêmes droits à ceux qui ont été victimes des descentes qu’à ceux qui sont visés par d’autres articles du Code criminel.

Enfin, la question est la suivante : l’intervention est-elle proportionnée à l’intérêt public à ce qu’on refuse réparation à ces gens? Autrement dit, quel est l’intérêt public aujourd’hui de nier à ces gens l’accès au même processus de radiation auquel ont accès ceux qui sont visés par le projet de loi?

À mon avis, les trois critères qui ont été établis et repris par la Cour suprême il y a deux semaines ne permettent pas de justifier la discrimination qui est, malheureusement, perpétuée par le projet de loi envers un groupe de personnes qui devraient avoir exactement le même accès, dans le même contexte, que les personnes qui sont visées par les infractions énoncées à l’annexe du projet de loi.

Permettez-moi de conclure sur ce point : heureusement, nous sommes un pays démocratique et, heureusement, il y a le Programme de contestation judiciaire. Ce programme, annoncé en février dernier, couvre — je l’ai vérifié; cela vous a peut-être échappé — l’article 15 de la Charte des droits et libertés. Ainsi, une personne privée de la protection du projet de loi C-66 peut avoir accès au Programme de contestation judiciaire, qui, selon certains critères bien définis, fournit un appui financier pour que la personne présente sa cause devant les tribunaux. Elle aura accès à cet appui financier pour contester le projet de loi C-66 et obtenir le même bénéfice de la loi que les personnes visées par le projet de loi. Encore une fois, je ne mentionnerai pas le fait que l’âge du consentement a été modifié dans le projet de loi par rapport à l’âge qui était légal à l’époque où ces accusations ont été déposées il y a quelques années. Comme vous le savez, l’âge du consentement a été modifié en 2005, si ma mémoire est bonne.

(1510)

Autrement dit, honorables sénateurs, l’objet du projet de loi est louable. Je vais donc voter en faveur de cette mesure législative, mais en m’engageant à soutenir toute procédure judiciaire au Canada qui dénonce le fait que ce projet de loi maintient une forme de discrimination à l’égard des gais et des lesbiennes qui devraient avoir droit aux mêmes avantages que les autres. Si l’on s’en tient aux propos du premier ministre, de nos jours, des descentes dans les bains publics ne devraient plus jamais se produire.

Honorables sénateurs, je tiens à remercier le comité, sous la présidence du sénateur Cormier, d’avoir donné la possibilité aux témoins de s’exprimer — cette possibilité leur avait été refusée à l’autre endroit — et d’avoir mis en relief ces enjeux, grâce aux questions posées par les sénateurs, afin de nous aider à comprendre ce sur quoi nous votons. En fait, il s’agit toujours de corriger une injustice, mais, comme je l’ai dit, nous avons corrigé à peine la moitié du problème. On donne réparation seulement à la moitié des gens qui devaient, au départ, bénéficier de cette procédure.

Chers collègues, je tenais à porter cette réflexion à votre attention. Je considère qu’il s’agit d’un enjeu très important, car il est question de l’article 15 de la Charte, soit un article qui traite d’égalité — et je regarde la sénatrice McPhedran — et du droit des femmes à un salaire égal. Lorsqu’on refuse l’égalité au titre de l’article 15, comme la Cour suprême l’a dit récemment, il faut satisfaire à des critères très clairs. En l’espèce, il s’agit d’une inégalité fort préoccupante pour les gais et lesbiennes.

Je vous remercie beaucoup de votre attention, honorables sénateurs.

L’honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, j’aimerais également intervenir dans le débat à l’étape de la troisième lecture du projet de loi C-66, Loi établissant une procédure de radiation de certaines condamnations constituant des injustices historiques et apportant des modifications connexes à d’autres lois.

Le projet de loi C-66 a été présenté à l’autre endroit dans la foulée des excuses officielles que le premier ministre a présentées, le 28 novembre 2017, à la communauté LGBTQ2 du Canada. Le projet de loi a reçu l’appui de tous les partis à l’autre endroit.

Lorsqu’il a présenté ses excuses, le premier ministre a parlé en détail de la persécution et de la discrimination dont la communauté LGBTQ2 a été victime au fil de l’histoire du pays. Le premier ministre a parlé des politiques, des pratiques et des lois discriminatoires. Il a plus particulièrement parlé des condamnations constituant des injustices historiques.

À cet égard, le projet de loi C-66 établirait une procédure selon laquelle des condamnations pour activités sexuelles consensuelles entre partenaires de même sexe, qui constituent des injustices historiques, seraient admissibles à la radiation.

Le problème avec le projet de loi C-66, c’est qu’il ne couvre qu’une modeste partie des injustices dont le premier ministre a parlé en présentant ses excuses. En ce qui concerne le Code criminel, le premier ministre a parlé plus particulièrement de trois dispositions du Code criminel qui ciblaient auparavant la communauté LGBTQ2 du pays, c’est-à-dire les dispositions sur la sodomie, la grossière indécence et les maisons de débauche.

Si on compare cela aux infractions énumérées à l’annexe du projet de loi, on constate que l’admissibilité à la radiation ne concerne que les dispositions du Code criminel relatives à trois infractions, soit la grossière indécence, la sodomie et les relations sexuelles anales. Même s’ils étaient reconnaissants des excuses, les témoins qui ont comparu devant le Comité sénatorial permanent des droits de la personne étaient déçus que le projet de loi n’honore pas toutes les promesses qui ont été faites. L’une des principales préoccupations soulevées par les témoins était le manque de cohérence entre le projet de loi et les excuses officielles.

Aujourd’hui, j’aimerais non pas présenter une analyse exhaustive de la teneur des témoignages, puisque notre collègue, le sénateur Cormier, s’y est déjà employé plus tôt, mais plutôt attirer l’attention sur certaines déclarations clés.

Lors de son témoignage devant le comité, le professeur Gary Kinsman a déclaré ce qui suit :

Par conséquent, à l’heure actuelle, le projet de loi C-66 n’englobe qu’une petite fraction des condamnations historiquement injustes que les LGBTQ2S+ ont effectivement subies. Il s’agit d’un problème fondamental auquel il faut s’attaquer.

Des témoins ont avancé que la portée de l’annexe est trop réduite pour couvrir les injustices subies. Ils ont recommandé que la liste des infractions à l’annexe soit étendue. D’autres témoins ont proposé de tout simplement supprimer l’annexe. Il a été aussi suggéré d’amender le projet de loi pour y ajouter une définition claire de ce que sont les « condamnations constituant des injustices historiques », qui pourrait ensuite s’appliquer à un vaste éventail d’infractions.

Les témoins étaient particulièrement préoccupés par les questions entourant les dispositions du Code criminel sur les maisons de débauche. Le premier ministre en a parlé dans ses excuses, mais elles ont été exclues de l’annexe du projet de loi. L’alinéa 12b) du projet de loi C-66 prévoie que :

[…] la Commission examine la demande et toute preuve recueillie dans le cadre d’une enquête et détermine s’ils révèlent des éléments de preuve selon lesquels […]

b) l’activité qui fait l’objet de la demande est interdite en vertu du Code criminel au moment de l’examen de la demande.

Autrement dit, le projet de loi C-66 vise à radier les condamnations pour des infractions qui seraient considérées comme légales selon le Code criminel aujourd’hui.

En ce qui concerne l’inclusion de dispositions sur les maisons de débauche, M. James Lockyer, avocat principal à Innocence Canada, a affirmé ce qui suit :

Elles ont été déclarées inconstitutionnelles par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Bedford, si bien qu’en arguant qu’elles existent toujours comme justification pour ne pas les inclure dans la loi, on se trouve tout simplement dans une impasse.

Cependant, lors de son témoignage devant le comité, le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Ralph Goodale, a précisé ce qui suit dans ses remarques préliminaires :

La difficulté, c’est que dans ces cas-là…

Ces « cas-là » sont tous ceux dont on n’a pas parlé et les infractions aux dispositions sur les maisons de débauche. Je reprends la citation :

La difficulté, c’est que dans ces cas-là, on parle de problèmes associés à des lois qui ne sont pas inconstitutionnelles par nature. En effet, ces lois demeurent en vigueur. Il devient alors beaucoup plus difficile de déterminer, des décennies plus tard dans de nombreux cas, si une condamnation en vertu de l’une de ces lois était légitime.

En ce qui concerne la décision de la Cour suprême du Canada dans l’affaire Procureur général c. Bedford, la portée de l’article 210 du Code criminel portant sur les maisons de débauche a été restreint, mais l’article en soi n’a pas été jugé complètement inconstitutionnel, si on se fie au témoignage du ministre.

Je vais citer directement le jugement de la cour :

L’article 210, en ce qui concerne la prostitution, et les al. 212(1)j) et 213(1)c) du Code criminel sont déclarés incompatibles avec la Charte. Le mot « prostitution » est supprimé de la définition de « maison de débauche » figurant au par. 197(1) du Code criminel pour les besoins de l’art. 210 uniquement.

Ainsi, les parties de l’article 210 portant sur la prostitution ont été déclarées inconstitutionnelles, mais les parties touchant la communauté LGBTQ2 demeurent dans le Code criminel.

De la même façon, le comité a appris grâce à Shawn Scromeda, un avocat-conseil du ministère de la Justice, que la définition de « geste indécent » a été restreinte dans l’arrêt de la Cour suprême R. c. Labaye. Interrogé sur l’intention du gouvernement concernant la loi sur les maisons de débauche, le ministre Goodale a dit ceci :

Nous n’en sommes pas à la rédaction d’un projet de loi. Nous examinons les enjeux, mais aucun autre projet de loi n’est en préparation pour le moment.

(1520)

Comme il tient compte de l’âge du consentement prévu actuellement dans le Code criminel, ce qui restreint encore davantage sa portée, le projet de loi C-66 permettrait, au titre de l’alinéa 25c), la radiation des casiers judiciaires des personnes qui étaient âgées de 16 ans ou plus au moment de l’activité visée par la condamnation.

Avant 2008, le Code criminel avait fixé l’âge du consentement à 14 ans. En présentant le projet de loi C-66, le gouvernement cherche à radier les casiers judiciaires pour des infractions qui ne sont plus considérées aujourd’hui comme des infractions criminelles à la loi fédérale.

Toutefois, en appliquant l’âge actuel du consentement, la mesure législative crée un écart qui rendra certaines personnes inadmissibles à la radiation.

Mme Angela Chaisson, de la Criminal Lawyers' Association, a contextualisé l’écart comme suit :

Cela signifie que deux personnes de même sexe de 15 ans qui ont eu des relations sexuelles en 2007, par exemple, et qui ont fait l’objet d’une accusation criminelle et d’une condamnation criminelle, ne sont pas admissibles à la radiation. Toutefois, si ces personnes avaient été hétérosexuelles, aucun crime n’aurait été commis.

Par contre, le projet de loi C-66 prévoit une exception de proximité d’âge au titre du Code criminel. Plusieurs témoins ont soutenu que l’écart perpétue le stéréotype selon lequel les activités homosexuelles sont plus dangereuses que les activités hétérosexuelles chez les jeunes, ce qui va manifestement à l’encontre de l’objectif que nous visions en présentant des excuses.

Mme Chaisson ajoute que le projet de loi :

[…] viole un principe fondamental du droit canadien en [appliquant de façon rétroactive] l’âge de consentement [d’aujourd’hui] aux actes commis par le passé.

Elle fait référence à l’alinéa 11g) de la Charte canadienne des droits et libertés, qui dit ce qui suit :

Tout inculpé a le droit :

g) de ne pas être déclaré coupable en raison d’une action ou d’une omission qui, au moment où elle est survenue, ne constituait pas une infraction d’après le droit interne du Canada ou le droit international et n’avait pas de caractère criminel d’après les principes généraux de droit reconnus par l’ensemble des nations;

Il a été recommandé par des témoins et dans des mémoires de modifier l’exigence relative à l’âge par souci de cohérence.

Je crois que les difficultés d’ordre constitutionnel ont été prises en note et examinées à fond par les membres du comité, que je remercie d’ailleurs de leur participation. Cela a grandement facilité ma tâche, car je crois que nous étions tous d’accord au sujet des dilemmes soulevés.

Le sénateur Joyal vient de soulever d’autres questions, mais je crois qu’il faut comprendre que le projet de loi ne prévoit qu’un petit nombre de mesures correctives, ce qui crée peut-être d’autres violations. D’ailleurs, le projet de loi ne traite pas de toutes les violations dont il était question dans les propos du premier ministre.

J’aimerais souligner d’autres difficultés relatives au projet de loi qui ont été soulevées par des témoins. Des témoins ont fait remarquer que l’obtention de la documentation nécessaire pour satisfaire aux critères d’admissibilité risque probablement d’être longue et pénible pour de nombreuses personnes présentant une demande. La difficulté, c’est que plus on retourne loin en arrière, plus il est difficile d’obtenir de la documentation. Cette préoccupation se reflète dans les observations du comité, que je cite :

L’âge des dossiers signifie également que ces derniers sont si vieux que, si les personnes étaient tenues de présenter une demande conformément aux dispositions actuelles de suspension du casier ou aux dispositions relatives au pardon qu’elles ont remplacé, le temps qui s’est écoulé depuis la condamnation et la fin de la peine dépasserait le temps d’attente de plusieurs dizaines d’années.

À la lumière de ces difficultés, le comité a obtenu l’assurance, par les fonctionnaires du ministère, que le personnel fournirait une formation adéquate pour aider dans la prise de décisions liées aux demandes soumises.

La conservation des documents historiques constitue une autre question soulevée par la radiation des casiers judiciaires. De nombreux témoins ont parlé de l’importance de conserver certains documents qui ont une valeur historique. D’autres ont mentionné qu’il s’agit de documents privés et que seules les personnes concernées devraient décider si on doit les éliminer ou pas. Il y a donc opposition entre la protection de la vie privée des gens et le droit du public à l’information.

Le Centre canadien de la diversité des genres et de la sexualité et les Archives gaies du Québec ont proposé que le projet de loi soit modifié afin de prévoir la mise en place d’un processus de conservation des documents d’importance historique permettant de protéger la vie privée des gens. D’autres témoins ont suggéré que les personnes qui font une demande de radiation de leur casier judiciaire puissent décider si les documents qui les concernent seront rendus publics en raison de leur importance historique.

Je veux souligner que seul le casier judiciaire sera éliminé, donc les dossiers de la police et ceux des tribunaux demeureront. Ces derniers ne sont pas touchés. Il n’est question que de la radiation du casier judiciaire.

Enfin, je veux aussi parler des consultations. Pendant les audiences, nous avons constaté que les principaux intervenants et les membres de la communauté n’avaient pas été consultés adéquatement pendant l’élaboration du projet de loi. S’ils l’avaient été, le projet de loi aurait peut-être permis de mieux répondre aux besoins de la communauté.

Des fonctionnaires de Sécurité publique Canada ont informé le comité que des consultations avec des intervenants externes n’avaient pas encore été prévues.

Honorables sénateurs, le comité se trouvait donc devant la même alternative que celle qui a été mentionnée par les témoins : accepter le projet de loi comme un point de départ pour le redressement des injustices commises à l’endroit des membres de la communauté LGBTQ2 ou s’y opposer dans le but de donner pleinement suite aux excuses du premier ministre.

Le comité, tout comme les témoins, était enclin à appuyer le projet de loi et l’inclusion d’une certaine réparation, malgré l’absence d’assurance quant à l’adoption de mesures éventuelles. En appuyant le projet de loi C-66, le comité a formulé neuf observations, auxquelles le gouvernement devrait donner suite immédiatement.

Dans ce contexte, je tiens à souligner l’excellent travail réalisé par le sénateur René Cormier, qui, en tant que parrain du projet de loi, a collaboré avec la communauté LGBTQ pour défendre ses intérêts. En consultant les membres de cette communauté, les membres du comité et d’autres intervenants, il a montré à quel point les sénateurs peuvent, dans le cadre de leur travail au sein des comités, apporter une contribution importante aux projets de loi.

Des voix : Bravo!

La sénatrice Andreychuk : Comme je l’ai dit, je remercie également les membres du Comité sénatorial permanent des droits de la personne, présidé par la sénatrice Bernard, des préoccupations qu’ils ont soulevées et de la contribution qu’ils ont apportée.

Honorables sénateurs, le mot « excuses » suscite des attentes. Des mesures concrètes doivent s’ensuivre. Les Canadiens qui ont subi de la discrimination et un traitement injustes demandent réparation et s’attendent à ce que justice soit faite. Si le gouvernement ne leur accorde qu’une partie des mesures qui s’imposent, je tiens à assurer la communauté LGBTQ que, selon moi — et vous avez entendu d’autres sénateurs s’exprimer là-dessus —, le comité, si l’on se fie à ses observations, va réagir.

On ne peut pas présenter des excuses sans réfléchir sérieusement au plan d’action et de suivi qui s’impose, sinon on ne fait qu’alimenter le problème. Nous ne voulons pas voir de nouvelles poursuites judiciaires au nom de cette communauté. Nous devrions donc veiller à ce que les excuses soient assorties de toutes les mesures qui s’imposent.

(1530)

Le projet de loi C-66 ne fait qu’effleurer la question des injustices au chapitre de la criminalisation, mais les politiques et les façons de procéder faisant suite aux excuses n’ont pas encore été abordées. Je pense que la communauté et les Canadiens s’attendent à ce que ces excuses se concrétisent.

Merci.

Des voix : Bravo!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

Projet de loi sur le cannabis

Projet de loi modificatif—Adoption du vingt-cinquième rapport du Comité des affaires sociales, des sciences et de la technologie

Le Sénat passe à l’étude du vingt-cinquième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie (Projet de loi C-45, Loi concernant le cannabis et modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, le Code criminel et d’autres lois, avec des amendements et des observations), présenté au Sénat le 30 mai 2018.

L’honorable Art Eggleton propose que le rapport soit adopté.

— Chers collègues, le projet de loi C-45 a fait l’objet de vastes discussions aux comités. Le 15 février, le Sénat a d’abord renvoyé l’étude de divers éléments de ce projet de loi sur le cannabis à quatre autres comités sénatoriaux.

Nos collègues du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international et du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones ont tenu, globalement, quelque 29 réunions sur le projet de loi. Ils ont siégé pendant plus de 50 heures et entendu 104 témoins avant de déposer chacun un rapport, que le Comité des affaires sociales a pris en compte dans son étude.

Le 22 mars, le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a entamé son étude du projet de loi dans son ensemble. Il a tenu quelque 19 réunions, a siégé pendant 53 heures et a entendu 136 témoins à propos de ce projet de loi. Nous avons reçu plus de 60 mémoires en plus des rapports produits par nos collègues des quatre autres comités.

Le présent rapport, qui comporte des modifications à 34 articles, est le fruit de notre étude. Le comité s’est réuni lundi pour procéder à l’étude article par article du projet de loi et s’est penché sur une cinquantaine d’amendements. Il a adopté 21 observations découlant de témoignages entendus au Comité des affaires sociales, ainsi que d’autres recommandations clés faites par d’autres comités.

J’aimerais vous parler de quelques changements clés qui ont été apportés. Je ne les passerai pas tous en revue, mais je dirais que 12 d’entre eux sont des amendements substantiels qui ont donné lieu à 6 amendements corrélatifs. Enfin, il y a 24 changements mineurs ou de forme. Je vais donc passer en revue les amendements substantiels et parler de quelques-unes des observations, si le temps me le permet.

Le premier amendement vise le paragraphe 5(1). Il a été proposé par la sénatrice Seidman qui, concernant l’application du projet de loi aux jeunes et le recours au système de justice pénale pour les adolescents, a proposé qu’il soit entendu que la présente loi ne porte pas atteinte à l’application des mesures extrajudiciaires prévues par la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents.

Cet amendement a pour objet de préciser que nous ne voulons pas criminaliser la possession ou la consommation de marijuana par les jeunes et que nous voulons trouver d’autres solutions qui vont dans le sens des mesures extrajudiciaires prévues par la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents. Les fonctionnaires ont fait remarquer que cette disposition figurait déjà dans le projet de loi, selon eux, mais nous voulions ajouter les mots « il est entendu » pour bien préciser que nous ne voulons pas traiter les jeunes comme des criminels.

Le deuxième amendement a trait à la culture à domicile. Ce point a suscité énormément d’attention, notamment le maximum de quatre plants — ou moins, selon les provinces. On se demandait s’il était possible de choisir l’option zéro. On sait que l’on peut en cultiver de un à quatre plants, mais l’option zéro est-elle possible? Deux provinces ont indiqué leur volonté de fixer ce nombre à zéro — le Québec et le Manitoba.

Deux motions de base ont été présentées à ce sujet. L’une d’elles visait à éliminer complètement la culture à domicile. Le comité n’a pas adopté cet amendement, mais il en a toutefois adopté un qui fera en sorte que la question de la culture à domicile relève des provinces, et celles-ci pourraient choisir de l’interdire complètement. Si cet amendement est adopté, le Québec, le Manitoba et toute autre province qui souhaite interdire la culture à domicile pourront le faire.

Un autre amendement portait sur la question du partage dans un contexte social. Il y a eu beaucoup de discussions et un grand nombre de préoccupations ont été soulevées en ce qui concerne les personnes qui ont presque l’âge de la majorité et qui pourraient donc être judiciarisées. Si un jeune âgé de 18 ans donne un joint à un autre jeune, celui-ci âgé de 17 ans, par exemple, le jeune de 18 ans pourrait se retrouver avec un casier judiciaire. Dans le même ordre d’idées, lorsqu’une famille est à la maison et qu’un parent ou les parents sont présents, il pourrait arriver qu’un membre de la famille donne du cannabis à un jeune âgé de 16 ans ou moins, par exemple, tout comme on peut offrir à quelqu’un un verre de vin ou une bouteille de bière, comme cela se fait dans un contexte social. Ce genre de situation se produit. Nous en sommes conscients. L’amendement autorisera la distribution par un jeune de 18 ans ou plus et ayant moins de 2 ans de plus que le jeune auquel il offre le cannabis. Il autorisera également un parent à distribuer du cannabis à une personne plus jeune se trouvant dans sa résidence.

Il s’agit de la notion de partage dans un contexte social, et c’est très semblable à ce qui se produit dans le cas de l’alcool. La mesure législative contient toujours de nombreux éléments de criminalisation. On a simplement cherché à faire en sorte que les dispositions soient semblables à celles qui sont prévues pour d’autres substances, notamment l’alcool et le tabac.

Un autre amendement prévoit une augmentation de l’amende pour les organisations reconnues coupables d’avoir exporté du cannabis illégalement. L’amende prévue dans le projet de loi est de 100 000 $. Notre modification proposée vise une organisation, et non un particulier — quelqu’un qui a enfreint la loi et qui exporte du cannabis en vue de le vendre. L’amendement prévoit une amende de 300 000 $. On nous a dit que ce montant est conforme à d’autres dispositions et à d’autres lois en ce qui concerne les peines prévues. Dans certains cas, la peine prévue est de 100 000 $, mais, dans ce cas-ci, le comité a conclu que le montant de la peine doit être plus élevé pour les organisations et les entreprises.

Un autre amendement vise à protéger contre l’expulsion les résidents permanents qui ont été condamnés à une peine d’emprisonnement de six mois et moins en application du projet de loi sur le cannabis. Si, conformément à la mesure législative, quelqu’un est accusé d’une infraction passible d’une peine d’emprisonnement de plus de 10 ans — 14 ans est une durée qui revient couramment dans ce projet de loi —, mais que le tribunal a jugé que le délinquant ne méritait ni la peine maximale ni rien qui s’en rapproche, cette personne est quand même sujette à des sanctions supplémentaires, comme l’expulsion. Selon la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, si une personne est déclarée coupable d’une infraction à une quelconque loi punissable d’un emprisonnement maximal de 10 ans ou d’au moins 10 ans, elle pourrait être déportée.

(1540)

Cet amendement prévoit que, si la peine d’emprisonnement est de six mois ou moins, elle ne serait pas prise en compte dans les procédures pouvant mener à la déportation. Toutefois, si la peine d’emprisonnement est plus longue et qu’il s’agit d’une infraction plus grave, la personne pourrait être déportée si elle est résidente permanente et qu’elle n’a pas le statut de citoyen.

Une autre recommandation porte sur un amendement exigeant que l’on prévoie par règlement une puissance maximale pour tous les produits du cannabis. L’amendement n’indique pas quelle est cette puissance maximale, mais il y a eu beaucoup de discussions en vue de déterminer un niveau approprié, car nous ne voulions pas que les produits aient une puissance trop élevée qui les rende dangereux pour la consommation. Le comité a aussi adopté cet amendement.

Nous avons apporté d’autres amendements au projet de loi afin que, si une personne plaide coupable à une contravention, elle reçoive une absolution inconditionnelle sans risque d’avoir de casier judiciaire. Le problème, c’est que les contraventions — et il pourrait tout aussi bien y en avoir une pour l’alcool — ne devraient pas entraîner la création d’un casier judiciaire. Au titre de cet amendement, la personne recevrait une absolution inconditionnelle sans risque d’avoir de casier judiciaire.

Un autre amendement fait passer le temps requis pour payer une contravention de 30 à 60 jours. D’aucuns ont soutenu que les Canadiens à faible revenu et les personnes vivant dans les collectivités éloignées avaient peut-être besoin de plus de temps pour pouvoir les payer, et c’est donc pour cette raison qu’on a proposé de modifier la disposition prévue dans le projet de loi en la faisant passer de 30 à 60 jours.

Pour ce qui est des règlements — pas ceux qui seront pris immédiatement après la sanction royale, mais ceux qui suivront après, quand nous nous pencherons sur la question des produits comestibles —, l’amendement prévoit que tout ajout à l’annexe 4 que souhaite faire le ministre doit être soumis à l’examen des deux Chambres. C’est dans cette annexe que se trouvera l’ensemble de la réglementation. Ainsi, tous les ajouts que le ministre voudrait faire une fois la loi en vigueur devront être soumis à l’examen des deux Chambres.

La motion fait exception en cas d’urgence ou dans une série de circonstances bien précises, les mêmes que dans la plupart des règlements. Elle précise par ailleurs que l’examen en question ne devra pas durer plus de 30 jours de séance. Je répète que ce n’est pas suffisant pour retarder l’entrée en vigueur des règlements. Comme je viens de le dire, la motion prévoit aussi une exception en cas d’urgence, si le ministre estime qu’un ajout doit être fait sans tarder. La Chambre des communes et le Sénat auront alors 30 jours de séance pour étudier les règlements s’appliquant aux produits comestibles et aux produits de vapotage attendus l’an prochain avant que ceux-ci ne soient pris.

Plusieurs ont déploré que les règlements ne nous soient pas soumis en même temps que le projet de loi. Une version préliminaire a déjà été rédigée, et elle a fait l’objet de consultations. Santé Canada a produit des rapports, mais les responsables ne peuvent pas mettre la dernière main aux règlements tant qu’ils n’auront pas accès à la version définitive de la loi. Parmi les amendements que nous proposons, un certain nombre se répercutent sur les règlements. N’oublions pas que le gouvernement souhaite que la loi entre en vigueur de 8 à 12 semaines après la sanction royale. Il aura besoin de temps pour voir à tout, y compris pour prendre les règlements nécessaires, mais, pour le moment, il ne peut pas nous les présenter. Cela dit, tous les autres ajouts, comme les changements relatifs aux produits comestibles et aux produits de vapotage qui sont envisagés l’année suivante, devront être soumis aux deux Chambres.

Enfin, il y en a trois pour compléter la douzaine d’amendements qui traitent des examens subséquents de la loi. Il y a une disposition qui prévoit un examen dans trois ans. Nous avons adopté un amendement qui fixe une limite de 18 mois à l’examen obligatoire, afin que nous puissions véritablement nous assurer que les choses se déroulent dans un délai raisonnable.

Dans la même partie du projet de loi, une seconde recommandation précise que le ministre de la Santé devra ordonner son propre examen parallèle de l’incidence sur la santé publique, en particulier sur la consommation des jeunes. Il s’avère que c’est le même ministre dans les deux cas, mais si la responsabilité de la Loi sur le cannabis était confiée à un autre ministre, les questions de santé publique, en particulier celles qui sont liées à la consommation des jeunes, continueraient de relever directement du ministre de la Santé. Ce rapport sera présenté aux deux Chambres du Parlement et le délai de 18 mois s’appliquera à partir du moment où elles entreprendront l’examen.

Puis, un autre examen doit avoir lieu dans cinq ans. Pourquoi doit-il y avoir un examen après trois ans et un autre après cinq ans? L’examen fixé à trois ans est exigé par le ministre. Celui qui est fixé à cinq ans concerne les comités parlementaires. Il est possible que la tâche d’examiner la loi elle-même revienne aux deux Chambres, à une seule Chambre ou à un comité mixte. Une ou l’autre des Chambres pourra effectuer l’examen, ou encore un comité de l’une ou l’autre des Chambres, ou un comité mixte. Cela ressemble beaucoup à ce qui a été fait dans le dossier du projet de loi portant sur l’aide médicale à mourir.

Il y en a 12 amendements. Comme je l’ai dit, les autres sont soit des amendements corrélatifs, soit des amendements d’ordre technique. Il y avait un certain nombre d’amendements d’ordre technique; il y en avait même un visant à ajouter une virgule, ce qui est très technique.

En ce qui concerne les observations, je veux en signaler certaines. Elles n’ont pas le même effet que les amendements au projet de loi, mais elles sont jointes au rapport. Il y en a 21, et certaines en sont très bonnes; je voudrais en souligner quelques-unes.

Son Honneur le Président : Avant que vous ne commenciez, votre temps de parole est presque écoulé. Demandez-vous cinq minutes de plus?

Le sénateur Eggleton : Oui, s’il vous plaît.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Le sénateur Eggleton : Merci.

Une d’entre elles est de proposer que la ministre mette sur pied un groupe de travail indépendant pour surveiller et évaluer la mise en œuvre de la mesure législative et pour fournir des rapports publics sur la mise en œuvre et les résultats du projet au regard des principes de ce dernier. Cette observation découle du fait que nous entrons en terrain inconnu à plusieurs égards. Même si la majeure partie des membres du comité était d’avis que c’est la voie à suivre, c’est-à-dire que nous devons adopter le projet de loi avec des amendements, dans ce cas précis, nous avons besoin d’un élément supplémentaire. C’est pourquoi nous proposons au comité la création d’un groupe de travail indépendant.

Une autre proposition suggère que la ministre de la Santé exige la présence de messages de santé obligatoires, notamment sur le danger que représente le fait de fumer du cannabis et l’exposition à la fumée secondaire du cannabis, de même que sur les risques associés à la combinaison du cannabis et du tabac. Cette proposition découle des préoccupations liées au tabac, car nous avons mené de grosses campagnes pour convaincre les gens, surtout les jeunes, de cesser de fumer, et la consommation de ces produits, qu’il s’agisse du tabac ou du cannabis, est une source de préoccupation.

Je voudrais insister sur deux observations concernant les collectivités autochtones. L’une d’elles, inspirée par le rapport et le travail du Comité des peuples autochtones, est que la ministre de la Santé favorise la création d’un marché diversifié et compétitif du cannabis et qu’elle veille à ce que les peuples autochtones soient dans une position concurrentielle qui leur permet de produire leur propre source de revenus et leurs propres possibilités d’emplois au sein de cette nouvelle industrie. Il s’agirait de tendre la main et de créer un système pour guider les peuples autochtones dans ce processus en particulier.

(1550)

Par ailleurs, vous vous rappellerez que la principale recommandation du Comité des peuples autochtones, dans son rapport, était de retarder l’entrée en vigueur des dispositions du projet de loi tant que certaines consultations n’auraient pas eu lieu et il a été suggéré que cela prenne jusqu’à un an, bien que les estimations diffèrent à cet égard.

Un amendement semblable a été proposé au comité. Il suggérait que les mêmes dispositions soient appliquées, comme celles sur l’élaboration de matériel pédagogique, le besoin d’établir des programmes de santé mentale et de traitement des dépendances, le besoin de services infirmiers et policiers, l’opportunité pour les communautés autochtones d’adopter leurs propres mesures relativement à la légalisation, la perception des recettes fiscales et leur partage.

Ces dispositions ont été insérées dans une autre motion de report non assortie d’une date limite. Le comité a rejeté le report. Il avait l’impression que trop de gens seraient exposés en attendant, du fait que la vieille loi demeurerait en vigueur, alors que la plupart des gens penseraient que la nouvelle loi était entrée en vigueur la journée de la sanction royale. Nous avons dit — ou, du moins, la majorité a dit — que nous ne pouvions pas attendre. Nous devons mettre ce projet de loi en vigueur dès que possible, mais nous avons également dit qu’il fallait faire ces choses convenablement. Nous les avons mises dans une autre motion et avons recommandé, dans une observation, au gouvernement de les faire. Nous pensons que c’est une importante observation et recommandation.

Je n’en dirai pas plus. Il s’agit au total de 21 observations, comme je l’ai dit. Il y a beaucoup d’amendements — 42 en tout — et j’espère que le rapport pourra être adopté rapidement pour que nous puissions passer à l’étape de la troisième lecture et discuter sérieusement de ces amendements ou de tout autre amendement présenté à l’étape de la troisième lecture du projet de loi.

Des voix : Bravo!

L’honorable Judith Seidman : Honorables sénateurs, je remercie le sénateur Eggleton d’avoir présenté au Sénat les amendements que le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a apportés au projet de loi C-45, Loi concernant le cannabis et modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, le Code criminel et d’autres lois.

En ma qualité de vice-présidente du comité, je tiens aussi à souligner le travail que le sénateur Eggleton a accompli en tant que président pendant l’examen de cette mesure législative cruciale.

Je souhaite également souligner le travail important qu’ont accompli le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international et le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, qui étaient chargés d’effectuer une étude préalable du projet de loi C-45.

L’examen minutieux et exhaustif qu’ils ont mené a conduit à l’élaboration de recommandations unanimes fondées sur les témoignages d’experts qui portaient sur des aspects du projet de loi étroitement liés à l’expertise de chaque comité. Je m’en tiendrai aujourd’hui à une intervention très brève, mais je présenterai quelques points qu’il convient de garder à l’esprit en vue du débat à l’étape de la troisième lecture.

Tout d’abord, j’ai trouvé terriblement décevant que la majorité des sénateurs siégeant au comité aient refusé bon nombre des recommandations non partisanes et unanimes qui visaient à améliorer le projet de loi et avaient été présentées par leurs propres collègues. J’espère sincèrement que le Sénat accordera à ces recommandations l’attention qu’elles méritent, comme il se doit.

Si je me réjouis des progrès que le comité a réalisés à certains égards, la multitude d’amendements proposés par les sénateurs de tous les horizons politiques a mis en lumière l’ampleur des faiblesses du projet de loi C-45. L’examen mené par le comité a fait ressortir de graves préoccupations concernant la santé publique, la sécurité publique, les peuples autochtones, les obligations du Canada en vertu de traités internationaux et la constitutionalité même du projet de loi.

Nous n’avons pas de réponses satisfaisantes à nombre de ces questions. Il est donc crucial que tous les sénateurs en débattent pleinement à l’étape de la troisième lecture. De plus, les sénateurs devraient tenir compte du nombre d’amendements que le parrain du projet de loi C-45 a proposés en comité. Le gouvernement a beau avoir passé les 12 derniers mois à assurer aux Canadiens que le pays est prêt à légaliser la marijuana, les quelque 30 erreurs de rédaction repérées, qui s’ajoutent aux 20 erreurs corrigées à l’autre endroit, nous donnent un autre son de cloche. Nous précipitons l’adoption du projet de loi pour respecter une échéance fondée sur des motifs purement politiques et les Canadiens auraient raison de s’inquiéter des conséquences.

Enfin, je tiens à dire à quel point je suis déçue que nous n’ayons pas tenu compte des faits accablants qui ont été présentés à notre comité, entre autres, et qui montrent les méfaits du cannabis pour la santé, en particulier chez les jeunes. Au cours de l’étude du projet de loi, nous devons éviter de minimiser ou négliger les dangers bien réels de la consommation de marijuana pour les adolescents et les jeunes adultes. Après tout, c’est la raison pour laquelle le gouvernement prétend avoir présenté le projet de loi à l’origine.

Je tiens à rappeler, aux fins du compte rendu, les données actuelles de Santé Canada sur les effets à long terme de la consommation du cannabis. Ces données proviennent de Santé Canada et méritent donc votre attention. Le cannabis augmente les risques de toxicomanie et de problèmes de mémoire et de concentration. Quand on le fume, le cannabis a des effets semblables à ceux du tabac sur la respiration. Le cannabis augmente le risque de suicide et de troubles mentaux comme la psychose, la schizophrénie, la dépression et l’anxiété.

Ces conclusions sont bien étayées. Il est faux et délibérément trompeur de prétendre qu’une seule et unique étude ou analyse vient contredire des années de travaux de recherche.

Alors que nous étudions les propositions en vue d’atténuer les effets de la consommation sur les jeunes, y compris les amendements réfléchis visant à réduire au minimum l’exposition des enfants et des adolescents à la publicité et à la promotion de la marijuana, nous ne devons pas mettre de côté les données probantes et céder devant les impératifs politiques et les grandes entreprises.

Je remercie les honorables sénateurs du travail qu’ils ont réalisé jusqu’à présent, et j’encourage mes collègues à accorder à ces questions l’attention qu’elles méritent à l’étape de la troisième lecture.

L’honorable Dennis Glen Patterson : Honorables sénateurs, je souhaite intervenir aujourd’hui dans le débat à l’étape du rapport sur le projet de loi C-45, Loi concernant le cannabis et modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, le Code criminel et d’autres lois. À cette étape, j’estime qu’il convient de parler de l’étude en comité qui a précédé la présentation de ce rapport.

Je tiens d’abord à remercier le sénateur Eggleton, qui, à l’étape de l’étude article par article de ce projet de loi, a su gérer notre emploi du temps serré de manière fort équitable envers tous les membres du comité. Je pense qu’il a parfois fait des pieds et des mains pour que tous puissent prendre la parole.

D’ailleurs, le sénateur Dean a trouvé le moyen de profiter d’un recours au Règlement pour alimenter le débat en présentant de nouvelles données en réponse à d’autres faits qui avaient été présentés au sujet des données scientifiques qui touchent la vulnérabilité des jeunes à la marijuana.

J’ai cependant certaines préoccupations concernant les délibérations au comité. J’ai d’abord certaines réserves quant au rôle des fonctionnaires dans le cadre de l’étude article par article. Je m’explique, chers collègues : les fonctionnaires qui ont témoigné au nom du gouvernement sont intervenus dans les délibérations du comité. Lors de l’étude article par article au comité, un détachement de 10 fonctionnaires a participé activement au débat politique. La présidence leur a demandé à maintes reprises de faire des commentaires sur des questions de nature politique.

Par exemple, au cours de l’étude article par article, la sénatrice Seidman a proposé un amendement qui aurait empêché ce qu’on appelle l’« extension de marque » dans le but de restreindre la promotion auprès des jeunes et la publicité axée sur le style de vie. L’amendement aurait interdit l’utilisation d’éléments de marque de cannabis sur des articles qui ne sont pas du cannabis ou des accessoires. Autrement dit, conformément à l’amendement, il aurait été interdit de placer le logo d’une marque de cannabis sur un t-shirt.

Après que l’amendement a été proposé, le président a tourné son regard vers les fonctionnaires et posé les questions suivantes :

Y a-t-il d’autres commentaires? Permettez-moi de demander aux fonctionnaires quelles seraient les répercussions du retrait de toute cette partie. Est-ce que cela crée de l’incertitude quant à savoir si cet élément est permis ou non? Comment fonctionne le projet de loi en l’absence de cette partie?

(1600)

Deux fonctionnaires, un du ministère de la Santé et l’autre du ministère de la Justice, ont alors été invités à donner leur point de vue. Le représentant de Santé Canada a fait état de possibles conséquences imprévues alors que la représentante de Justice Canada a déclaré que, selon elle, le projet de loi respecte la Charte, mais elle a ajouté ne pas être en mesure de dire si l’amendement proposé résisterait ou non à une contestation judiciaire aux termes de la Charte.

Après ces interventions, le vote a été demandé sans autre participation ou débat de la part des sénateurs. L’amendement a été rejeté par une égalité des voix, soit cinq « oui » et cinq « non », et deux abstentions. Le sénateur Dean, le parrain du projet de loi, et la sénatrice Petitclerc se sont abstenus de voter.

De toute évidence, chers collègues, les sénateurs étaient divisés à l’égard de cette question. Cependant, aucun d’entre nous n’est intervenu pour en débattre.

Le Sénat fait l’objet de critiques parce qu’il n’est pas une assemblée élue. Cependant, il est tenu de rendre des comptes à la population canadienne. Lorsqu’un sénateur est assermenté, il jure de défendre les droits des Canadiens, à titre de législateur. Les fonctionnaires ne sont ni élus ni tenus de rendre des comptes au public. En dernier ressort, ils doivent rendre des comptes au ministre ― dans certains cas, à plusieurs ministres ― qui souhaite faire adopter la mesure législative visée dans un délai très serré.

Je siège au Sénat depuis neuf ans et, à la lumière de mon expérience à titre de parrain de nombreux projets de loi d’initiative ministérielle, j’affirme que le rôle des fonctionnaires consiste à témoigner au nom du gouvernement dans le cadre de l’étude des projets de loi avant l’étude article par article, et à donner des conseils sur des aspects techniques lors de l’étude article par article. Il n’appartient certainement pas aux fonctionnaires de participer activement aux discussions politiques, à l’examen des amendements et à l’analyse des interventions lors de l’étude article par article.

Or, c’est précisément ce qui arrivé dans ce cas-ci. C’était injuste pour les fonctionnaires concernés. Le président les a placés dans une position difficile : ils devaient faire leur devoir, soit fournir un avis technique et de l’information générale et répondre aux questions qui leur étaient posées, tout en sachant que leurs supérieurs politiques considéraient comme une priorité l’adoption rapide et sans amendement du projet de loi.

Je tiens aussi à appuyer les propos de la sénatrice Seidman, qui a fait valoir que le travail des membres des quatre autres comités sénatoriaux méritent notre respect. Selon moi, ils ont pris très au sérieux leur tâche d’étudier les divers aspects du projet de loi. J’ai été stupéfait de découvrir que le travail des autres comités ne semble pas être reconnu à sa juste valeur. J’étais convaincu que, si un comité au fonctionnement non partisan, ce qui est le cas de tous les comités, proposait une recommandation unanime sur un amendement, les membres du Comité des affaires sociales l’appuieraient lorsqu’ils en seraient saisis. À plusieurs occasions, ce ne fut pas le cas.

Honorables sénateurs, je ne pense pas que ce rapport reflète fidèlement les préoccupations soulevées à l’unanimité dans les rapports des quatre comités qui ont été soumis au Comité des affaires sociales. Il est important de noter que les études menées par le Comité des peuples autochtones, le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles, le Comité des affaires étrangères et le Comité de la sécurité nationale ont été aussi complètes que le court délai le permettait. Chacun des rapports a porté sur la légalisation de la marijuana d’un point de vue spécifique. On a demandé à ces comités de mener des études en parallèle, parce que leurs membres détiennent une expertise sur les différents domaines que touche cette mesure législative complexe. C’est grâce à une telle expertise que les recommandations, les amendements et les débats reposent sur des données réfléchies.

Par exemple, j’ai proposé un amendement, à titre de membre du Comité des peuples autochtones, qui portait sur le respect de l’article 35 de la Loi constitutionnelle, lequel inclut les droits inhérents à l’autonomie gouvernementale, le pouvoir des Premières Nations de se gouverner et l’obligation de les consulter. Au cours du débat sur l’amendement, le seul membre du comité siégeant au Comité des affaires sociales, le sénateur Gold, a affirmé ce qui suit à propos de la notion de consultation :

On ne sait même pas clairement ce en quoi consiste exactement l’obligation de consulter. Aux termes de la loi canadienne, l’obligation de consulter ne s’applique pas actuellement au processus législatif. Je pense que cela pourrait changer. En effet, les tribunaux sont saisis en ce moment d’une affaire portant sur cette question. Je ne suis pas du tout en train de suggérer que nous nous en tenions aux paramètres stricts de la loi. Cependant, on ne peut pas nier qu’il y a eu des discussions et des consultations. Certains trouvent que c’est suffisant et d’autres, non. Nous devons toutefois nous rendre compte que cette question tombe dans une zone grise de la loi.

Honorables sénateurs, l’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut oblige clairement le gouvernement à mener des consultations sur toute mesure qui propose des changements sociaux majeurs aux termes de l’article 32.21. Par conséquent, le projet de loi sur la légalisation du cannabis — qui, selon le gouvernement lui-même, entraînera d’énormes changements sociaux transformateurs — aura une incidence sur les droits définis dans la Constitution et exprimés dans l’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut.

Par ailleurs, j’ai consulté le site web du ministère des Affaires autochtones, et j’y ai trouvé un document intitulé Consultation et accommodement des Autochtones — Lignes directrices actualisées à l’intention des fonctionnaires fédéraux pour respecter l’obligation de consulter. On peut y lire ceci :

[…] l’obligation de consulter est un devoir constitutionnel; s’applique dans le contexte des traités modernes; les fonctionnaires doivent d’abord examiner les dispositions des traités; et si les dispositions sur la consultation prévues dans les traités ne s’appliquent pas à l’activité proposée, il existe une obligation « parallèle » de consulter.

On trouve cela sur un site web du gouvernement du Canada. Le sénateur Gold a aussi tenu les propos suivants :

Les diverses communautés ont des pouvoirs juridiques différents, par l’entremise de règlements ou d’autres mesures législatives, qui leur permettent de restreindre ou de réglementer le cannabis sur les terres qu’elles contrôlent. Ces pouvoirs englobent notamment le plein droit à l’autonomie gouvernementale, qui est reconnu dans des traités ou en vertu de droits n’ayant jamais été cédés, et les droits sous l’égide de la Loi sur les Indiens. Les pouvoirs réglementaires sur les substances intoxicantes provoquent d’importants désaccords, du moins entre certains communautés et le gouvernement.

Eh bien, honorables sénateurs, le Comité des peuples autochtones a reçu un témoignage clair de Stefan Matiation, directeur et avocat général au ministère de la Justice du Canada, qui contredit explicitement cette affirmation du sénateur Gold. En effet, lors de sa comparution devant le comité le 17 avril 2018, en réponse à une question de la sénatrice Boniface concernant le pouvoir des collectivités d’interdire la marijuana par la voie d’un règlement, M. Matiation a dit ce qui suit :

La Loi sur le cannabis est une loi d’application générale, de sorte qu’une Première Nation ne pourrait pas utiliser un règlement pour contrecarrer l’application de la Loi sur le cannabis.

Ainsi, fort de mes neuf années d’expérience au sein du Comité des peuples autochtones à traiter de questions liées aux droits des Autochtones, j’ai proposé l’amendement fondé sur le vote unanime du Comité des peuples autochtones. L’amendement prévoit la reconnaissance du droit inhérent de gouverner, conformément à la relation de nation à nation que le gouvernement fait valoir comme étant pour lui la plus importante. En effet, si le projet de loi C-45 ne confère pas ce droit, on nous a dit au Comité des peuples autochtones que... Je sais que je me dois de remercier le sénateur Woo d’avoir allégé la situation à ce moment-là. La séance avait commencé à 13 heures et s’est poursuivie jusqu’à 22 heures sans interruption, sauf une pause d’une demi-heure pour avaler un sandwich. Peut-être que nous commencions à être étourdis. Je l’ignore. Mais le sénateur nous a déridés en qualifiant ma motion— écoutez bien cela — de « platitudinous ». Je sais ce qu’est une platitude. Toutefois, je ne savais pas ce qu’il voulait dire par « platitudinous ». J’ai eu l’occasion de le vérifier dans le dictionnaire Canadian Oxford. On s’en sert pour décrire un cliché, un lieu commun, quelque chose d’ennuyeux, d’insipide ou de banal. Je suis déçu et peut-être un peu surpris et, en fait, cela m’a amusé à cette étape-là du débat, que le chef du Groupe des sénateurs indépendants ait qualifié de cliché, de lieu commun, d’ennuyeux, d’insipide et de banal un amendement qui visait à répondre aux craintes légitimes soulevées par des membres des peuples autochtones devant le Comité des peuples autochtones.

(1610)

Chers collègues, je m’oppose fondamentalement à ce projet de loi. Il est mal rédigé. Il aura un effet très négatif sur ma région, le Nunavut, où le tissu social est déjà très fragile, où, dans de nombreuses communautés, la moitié des enfants ne vont pas à l’école, où les programmes de santé mentale et de mieux-être communautaire se font rares, ne font pas forcément preuve de sensibilité culturelle et n’incluent pas toujours des membres de la communauté en qui les gens ont confiance. Vous m’avez déjà entendu le dire : il n’y a pas un seul centre de traitement de la toxicomanie dans les trois territoires.

Cela me met en colère qu’on fasse pression pour que ce projet de loi soit adopté rapidement. Je suis déçu que la recommandation unanime du Comité des peuples autochtones ait été rejetée. Celle-ci voulait que l’on intervienne pour régler ces questions pressantes et répondre à l’urgence qui se fait ressentir. Ces questions ont également été soulevées par l’Assemblée des Premières Nations, par la Nunavut Tunngavik à son assemblée générale annuelle, par des témoins qui ont comparu devant le comité ainsi que par des gens des 25 communautés de ma région, le Nunavut. J’ai pris la peine de visiter chacune d’elles au mois de mars. Je les ai trouvées inquiètes. Elles ont l’impression de n’être pas prêtes et d’être bousculées. Elles se demandent pourquoi le Canada décide d’aller de l’avant sans consultation. La mairesse de Resolute Bay a dit : « J’ai l’impression de ne plus faire partie du Canada. »

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour parler du rapport du comité et critiquer respectueusement le processus, notamment le fait que les fonctionnaires ont fait partie d’un débat politique essentiel à l’étape de l’étude article par article. J’avance respectueusement que cela n’est pas approprié.

Le sénateur Eggleton a accompli un travail remarquable en pilotant la production de ces quelque 40 amendements, mais le processus n’était pas parfait. Merci, honorables sénateurs.

Son Honneur le Président : Sénateur Woo, avez-vous une question? Le sénateur Eggleton a une question. Par contre, son temps de parole est écoulé. Demandez-vous cinq minutes pour répondre aux questions? Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

L’honorable Yuen Pau Woo : Sénateur Patterson, pourriez-vous clarifier une chose que vous avez dite et nous confirmer que l’amendement que vous avez déposé hier au Comité des affaires sociales n’était pas l’une des recommandations du Comité des peuples autochtones, mais plutôt une variation, qui demandait simplement au gouvernement de produire un rapport sur les résultats des consultations plutôt que de lui demander de faire ce que le Comité des peuples autochtones demandait, soit de mettre en place des établissements de traitement, de faire de la sensibilisation, de prévoir des solutions pour aider les jeunes Autochtones dans les territoires autochtones, ainsi que les non-Autochtones, à obtenir les soins et les traitements auxquels ils ont droit et qui pourront être offerts une fois que le projet de loi C-45 aura été adopté? Pouvez-vous confirmer au Sénat que l’amendement que vous avez proposé ne correspond pas à ce que demandait le Comité des peuples autochtones, mais qu’il s’agit d’un amendement distinct?

Le sénateur Patterson : Bon sang, sénateur Woo, vous m’avez fait peur. Vous avez répété mes préoccupations en ce qui concerne le projet de loi et je vous en remercie. Ces services devraient être mis en place ou prévus avant l’adoption du projet de loi. La motion du Comité des peuples autochtones visait à retarder l’entrée en vigueur du projet de loi jusqu’à ce que ces questions soient réglées.

Mon idée de rapport, qui a suivi une série de votes à sept contre cinq qui ont mené au rejet des motions présentées, dont plusieurs étaient fondées sur des recommandations proposées à l’unanimité par les comités, tenait compte du manque de volonté apparent au comité quant à l’acceptation des motions et des recommandations d’amendement, même celles qui avaient été proposées à l’unanimité.

J’ai donc édulcoré quelque peu ma motion. Je ne vais pas citer textuellement ma motion, mais je pense qu’elle disait que, avant l’entrée en vigueur du projet de loi, le gouvernement devrait faire rapport aux deux Chambres du Parlement sur l’évolution de ces enjeux. Évidemment, c’était une version moins catégorique que la recommandation du comité, qui souhaitait que l’entrée en vigueur du projet de loi soit suspendue pendant un an au maximum, ce qui, je le sais, a causé beaucoup de consternation chez les sénateurs d’en face.

L’honorable David Tkachuk : Vous pourriez toutefois la proposer à l’étape de la troisième lecture.

Le sénateur Patterson : J’ai donc édulcoré ma motion parce que, à ma grande surprise, j’ai senti que les membres du Groupe des sénateurs indépendants s’opposeraient à toute proposition d’amendement, et ce, même si elle reposait sur des rapports unanimes de comités.

Le sénateur Tkachuk : Des libéraux. Ils sont tous des libéraux.

Le sénateur Patterson : Plusieurs membres du Groupe des sénateurs indépendants qui font partie du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles ont voté contre la recommandation unanime de leur propre comité quand ils se sont retrouvés au sein du Comité des affaires sociales.

Le sénateur Tkachuk : Des libéraux. Ce sont des libéraux. À quoi vous attendiez-vous? Ils se comportent comme des libéraux; ce sont des libéraux.

Le sénateur Patterson : J’ai donc édulcoré ma motion. Excusez-moi. Je dois avouer qu’elle était insipide et banale. C’est ce que j’ai fait. J’ai tenté de faire adopter une motion, mais même la version édulcorée a été rejetée. Voilà ce qui s’est passé.

Le sénateur Tkachuk : Il va peut-être l’appuyer à l’étape de la troisième lecture.

Le sénateur Woo : Sénateur Patterson, je vous remercie d’avoir confirmé que vous n’avez pas proposé un amendement conforme aux recommandations du Comité des peuples autochtones. Ne convenez-vous pas que votre proposition d’amendement, qui aurait retardé les choses dans le but de produire un rapport…

Son Honneur le Président : Sénateur Tkachuk, le sénateur Woo a la parole. À l’ordre, s’il vous plaît. C’est difficile d’entendre le sénateur Woo quand vous criez. Sénateur Woo, vous avez la parole.

Le sénateur Woo : Ne diriez-vous pas que le fait de proposer un amendement qui ne ferait que mener à la production d’un rapport, plutôt qu’à des mesures concrètes, aurait en réalité pour effet de retarder la concrétisation des services grandement nécessaires et des mesures qui s’imposent pour faire face au défi que représente la consommation de drogue au Canada à l’heure actuelle, y compris dans les communautés des Premières Nations?

Le sénateur Patterson : Je vous remercie de votre question, honorable sénateur. En fait, j’ai demandé au secrétaire parlementaire, Bill Blair, où les choses en étaient relativement à toutes ces mesures — les centres de traitement de la toxicomanie, la documentation adaptée à la culture, la Loi sur la taxe d’accise, dans laquelle le Canada et les ministres des Finances fédéral, provinciaux et territoriaux ont omis de tenir compte des Autochtones.

M. Blair m’a dit — et je vais paraphraser — :« Faites-moi confiance, nous avons les choses bien en main. Tout va bien. Vous serez mis au courant à un moment donné des mesures adoptées. » Je lui ai dit que cette réponse n’était pas acceptable. Nous ne pouvons pas régler la question de la taxe d’accise une fois que le projet de loi aura été adopté. Personne n’acceptera jamais de partager le gâteau après que le projet de loi aura été adopté. Les Autochtones ont été laissés de côté par un gouvernement qui, supposément, accorde une grande importance à sa relation avec eux. La Commission de la fiscalité des premières nations nous a dit on ne peut plus clairement qu’elle avait bien essayé d’organiser une rencontre au niveau ministériel, mais qu’elle n’y était pas arrivée.

La consultation a été menée de manière lamentable. Les Autochtones se sentent exclus. La production du rapport que je demande, une mesure bien modeste, serait complètement entre les mains du gouvernement quant au délai. Il pourrait le faire en 30 jours s’il voulait en faire une priorité, une priorité qu’il ne semble pas avoir accordée aux questions relatives aux Autochtones rattachées à ce projet de loi jusqu’ici.

Son Honneur le Président : Sénateur Patterson, votre temps de parole est écoulé, mais le sénateur Eggleton, qui a déposé le rapport, voulait vous poser une question. Demandez-vous du temps pour répondre à cette question?

Le sénateur Patterson : Si on veut bien me l’accorder, oui.

Son Honneur le Président : Est-ce d’accord, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

L’honorable Art Eggleton : Sénateur Patterson, j’ai du mal à comprendre quelques-unes de vos observations. L’une d’entre elles est celle-ci, et la sénatrice Seidman a un peu dit la même chose, et c'est qu’un grand nombre des recommandations des comités, les quatre autres comités, n’ont pas été prises en compte. Sur les 21 observations, un grand nombre n’ont pas été prises en considération.

(1620)

Bon nombre des recommandations du comité n’étaient pas des amendements au projet de loi, mais évoquaient plutôt des mesures que le gouvernement devrait prendre. Par exemple, le Comité des affaires étrangères a recommandé que le gouvernement du Canada collabore avec les autorités fédérales des États-Unis concernées en vue de favoriser, au sein de la population canadienne et américaine, une compréhension commune des modifications apportées à la politique intérieure du Canada, des conséquences de ces modifications, et cetera. Plusieurs recommandations n’ont pas été présentées comme des amendements au projet de loi, mais plutôt comme des recommandations.

J’ai du mal à comprendre pourquoi vous nous avez tous deux reproché de ne pas avoir tenu compte des recommandations. Je pensais que nous avions montré du respect pour ces observations et ces recommandations.

Il faut également mentionner les recommandations du Comité des peuples autochtones. Mis à part le report, nous avons formulé des recommandations semblables. Je me demande si vous pourriez nous en parler un peu.

Enfin, j’ai de la difficulté à comprendre votre préoccupation au sujet des fonctionnaires. À plusieurs reprises, j’ai dit clairement aux fonctionnaires qu’ils n’étaient pas là pour commenter la politique. Ils devaient nous informer des conséquences de certains amendements, lorsqu’on le leur demandait. C’était dans le but d’en avoir une compréhension officielle. Qu’y a-t-il de mal à cela? On ne leur a pas demandé de s’exprimer sur la politique. Ils le savent très bien. C’est une insulte à l’endroit des fonctionnaires. Ils savent où est la limite à ne pas franchir.

Des voix : Posez votre question.

Le sénateur Eggleton : Qu’en pensez-vous?

Le sénateur Patterson : Je vous remercie de votre question. Je ne voulais surtout pas prendre à partie les fonctionnaires. J’ai dit que le président les avait mis dans une situation impossible, tout d’abord, en les faisant asseoir à la table, aux côtés des sénateurs, à la place des témoins. D’après mon expérience, les fonctionnaires ne s’assoient pas à la table du comité. Ils se tiennent en retrait, et on peut les consulter de temps à autre sur des questions techniques.

Avec tout le respect que je vous dois, je crois que certaines des questions relevaient plutôt de la politique. J’en ai énuméré quelques-unes. Les fonctionnaires se sont retrouvés dans une situation intenable, à mon avis. Ce n’est pas la façon dont nous procédons habituellement en comité, et j’ai souligné que c’était inhabituel. Qu’on me pardonne d’avoir fait un commentaire à cet égard.

En ce qui concerne les recommandations mentionnées dans les observations, j’aurais dû en parler, effectivement. Ma motion d’amendement, qui a été rejetée, a été consignée en tant qu’observation. Je vous en remercie. C’est mieux que rien. Ce n’est toutefois qu’une observation, et non un amendement au projet de loi. J’aurais préféré que l’amendement soit adopté. Pardonnez-moi d’accorder moins d’importance aux observations. Elles sont importantes, et un certain nombre d’entre elles font état des motions présentées en comité.

Ce qui me préoccupe particulièrement, toutefois, c’est que, lorsqu’un comité formulait une recommandation unanime relativement à un amendement, cette recommandation n’était pas respectée et, dans la plupart des cas, était rejetée. La question était effectivement consignée dans les observations, mais ce n’est pas suffisant, honorables sénateurs.

L’honorable Denise Batters : J’aimerais intervenir.

Son Honneur le Président : Le temps de parole du sénateur Patterson est encore une fois écoulé. Il devra demander le consentement du Sénat si vous voulez lui poser une question.

Voulez-vous plus de temps?

Le sénateur Patterson : Je m’en remets au Sénat, Votre Honneur. Je sais que nous avons d’autres dossiers urgents à traiter.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Une voix : Non.

Son Honneur le Président : J’ai entendu un « non ».

La sénatrice Batters a la parole.

La sénatrice Batters : Honorables sénateurs, je prends aujourd’hui la parole au sujet du vingt-cinquième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires sociales sur le projet de loi C-45.

Je m’oppose à ce projet de loi. À mon avis, le gouvernement lance une initiative inutile alors que le Canada n’est tout simplement pas prêt. Malheureusement, je crois que les Canadiens feront les frais de ce projet de loi insensé et qu’ils y laisseront leur santé et leur sécurité. Le gouvernement Trudeau agit de façon irresponsable en rendant la marijuana facilement accessible, tout particulièrement pour les jeunes de 18 ans. Il ne semble pas avoir tenu compte des répercussions sur le plan social et sur le plan de la santé. Comme on a pu le constater à maintes reprises, la notion de second examen objectif ne semble pas figurer parmi les grandes priorités de ce premier ministre.

À titre de membre du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, j’ai entendu beaucoup de témoignages sur les raisons pour lesquelles ce projet de loi ne prépare tout simplement pas le pays à gérer les problèmes engendrés par la légalisation de la marijuana. Au cours du débat sur le projet de loi C-45 et sur son projet de loi complémentaire, le projet de loi C-46, de nouveaux problèmes engendrés par ces projets de loi ont été mis en lumière pratiquement chaque jour et à chaque réunion.

Les dispositions du projet de loi C-45 qui permettent la culture de la marijuana à domicile posent un problème particulièrement important. Elles sont incompatibles avec les objectifs du projet de loi énoncés par le gouvernement Trudeau lui-même. Le projet de loi vise à restreindre l’accès des enfants au cannabis, mais certaines de ses dispositions en permettent la culture dans les maisons où vivent des enfants.

Le projet de loi a aussi pour objectif déclaré de donner accès à du cannabis dont la qualité est contrôlée, mais est-ce que ce sera le cas du cannabis cultivé à domicile sans être réglementé? C’est tout simplement insensé, honorables collègues.

En outre, si on légalise la culture de la marijuana à domicile, on prive les policiers d’un outil précieux. Actuellement, la simple présence d’un plant de marijuana illégal dans un domicile fournit à la police un motif raisonnable de porter des accusations ou d’effectuer une enquête plus approfondie susceptible de mettre à jour d’autres types d’activités criminelles. Cependant, comme ce projet de loi permettra la culture de quatre plants à domicile en toute légalité, les policiers ne pourront plus se servir aussi aisément de cet outil.

C’est pourquoi la majorité des membres du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles recommandent l’interdiction de la culture à domicile. Dans ce rapport, une majorité de membres du Comité des affaires sociales a choisi de rejeter notre recommandation. Ce comité a plutôt voté pour une mesure permettant aux provinces d’interdire la culture à domicile. Comme vous le savez, le Québec et le Manitoba ont déjà indiqué qu’ils allaient interdire la culture de la marijuana à domicile. Néanmoins, en n’interdisant pas la culture à domicile à l’échelle fédérale, nous provoquerons l’apparition d’un salmigondis de lois sur la marijuana au pays, ce qui engendrera une confusion énorme. La loi envisagée n’est pas claire du tout, et c’est profondément injuste pour les Canadiens qui essaient de s’aventurer sur ce terrain inconnu sans enfreindre la loi. Même les gens qui ont étudié et rédigé le projet de loi C-45 n’ont pas de réponses à certaines questions. Si c’est le cas, comment peut-il être raisonnable de s’attendre à ce que des Canadiens ordinaires sachent s’ils enfreignent la loi ou non?

Permettez-moi d’illustrer ce point avec un exemple que j’ai découvert lors des audiences du Comité des affaires juridiques sur le projet de loi. Lorsque plusieurs hauts fonctionnaires de Santé Canada, de Sécurité publique Canada et de Justice Canada ont comparu devant le comité le 22 mars, je leur ai demandé de m’expliquer si l’alinéa 8(1)e), c’est-à-dire la disposition du projet de loi C-45 qui régit la possession de plantes en bourgeons ou en fleurs, permettait à une personne d’avoir en sa possession plus de quatre plantes si celles-ci sont en bourgeons ou en fleurs. Voici ce que dit la disposition du projet de loi :

8(1) Sauf autorisation prévue sous le régime de la présente loi [...]

e) il est interdit à tout individu d’avoir en sa possession plus de quatre plantes de cannabis qui sont ni en train de bourgeonner ni en train de fleurir [...]

C’est à n’y rien comprendre, honorables sénateurs? Ne le prenez pas mal, les fonctionnaires de Sécurité publique Canada non plus n’avaient aucune idée de comment répondre. Après une pause d’une longueur déconcertante, où les fonctionnaires se sont jeté des regards qui en disaient long, ils ont refilé la question aux fonctionnaires du ministère de la Justice qui trouvaient derrière eux. Ceux-ci ont ensuite essayé de fournir une réponse. Je leur ai demandé ceci :

Doit-on en conclure que l’on pourrait posséder légalement plus de quatre plantes en bourgeons ou en fleurs?

L’un des fonctionnaires de Justice Canada a répondu ceci :

Non. En fait, c’est le contraire. On peut posséder jusqu’à quatre plantes tant qu’elles ne sont pas en bourgeons. Il est interdit de posséder une plante en bourgeons.

J’ai précisé :

Il est interdit de posséder une plante en bourgeons ou en fleurs? Aucune?

Le fonctionnaire de Justice Canada m’a confirmé à deux autres reprises que je l’avais bel et bien compris correctement. Il a ensuite ajouté que la limite sur le nombre de plantes en bourgeons ou en fleurs s’applique à un lieu public, bien qu’il n’existe aucune référence de ce genre dans l’alinéa 8(1)e).

Le représentant de Santé Canada s’est ensuite inséré dans la discussion, on ne peut plus serviable, et il a insisté sur le fait que la disposition prévoyait qu’une personne ne pouvait pas posséder plus de quatre plantes en bourgeons ou en fleurs n’importe où, ce qui contredisait directement le témoignage du représentant du ministère de la Justice qui venait de parler.

Ma discussion avec ces fonctionnaires, qui ressemblait à un épisode de l’émission d’Abbott et Costello, a duré un certain temps — six minutes, pour être exacte.

Frustrée par l’incapacité de ces représentants de me donner une réponse claire, j’ai demandé qu’on me donne d’autres clarifications sur ce point plus tard. Personne ne s’est montré disposé à répondre — même pas quand les mêmes représentants du ministère ont comparu de nouveau devant le comité à la fin de l’étude, même pas quand ils ont présenté des réponses par écrit au comité —, personne en plus de deux mois.

Imaginez alors ma surprise quand j’ai appris, cette semaine, au Comité des affaires sociales, que le gouvernement Trudeau a proposé 29 amendements à sa propre mesure législative et qu’aucun d’entre eux ne clarifie la question des plants en train de bourgeonner ou de fleurir.

Je siège au Sénat depuis maintenant cinq ans et je n’ai pas souvenir qu’un gouvernement a déjà tenté d’amender de manière si significative sa propre mesure législative quelques heures avant son adoption à l’étape du comité au Sénat. Il ne faut pas oublier que le ministère de la Justice a passé des mois à rédiger le projet de loi et que la Chambre des communes et ses comités en ont été saisis pendant six mois, à l’instar du Sénat et de ses comités.

Il est parfaitement clair que le gouvernement Trudeau ne sait tout simplement pas ce qu’il fait. Je suis extrêmement troublée par le fait que ces fonctionnaires n’arrivent pas à répondre à des questions simples en vue de clarifier cette mesure législative. Si les rédacteurs et les chargés de recherche — qui devraient être des spécialistes du projet de loi — n’en comprennent pas les dispositions et que nombre d’entre eux, même s’ils se mettent à plusieurs, sont incapables de me les expliquer à moi, qui ai étudié en droit, comment diable peuvent-ils s’attendre à ce que les Canadiens comprennent? C’est injuste pour les Canadiens. Ils ne pourront même pas savoir s’ils violent la nouvelle loi s’ils cultivent un plant de marijuana à la maison et que la plante bourgeonne ou fleurit. Honorables sénateurs, je vis en Saskatchewan. Je sais que les gens de la province, qui compte beaucoup de travailleurs du secteur agricole, vous diraient que le but de cultiver une plante est d’obtenir des bourgeons ou des fleurs.

(1630)

Voilà le parfait exemple d’une mesure législative qui n’est pas tout à fait au point. Pourtant, malgré les problèmes flagrants qu’on y trouve, le gouvernement Trudeau continue de faire pression pour qu’elle soit adoptée rapidement et qu’on respecte ainsi son échéancier politique artificiel. Le premier ministre a mis de côté les préoccupations exprimées par des groupes médicaux tels que l’Association médicale canadienne, l’Association des psychiatres du Canada et la Société canadienne de pédiatrie, qui ont affirmé que l’âge pour avoir accès à la marijuana devrait être considérablement augmenté pour protéger les cerveaux toujours en développement des jeunes âgés de moins de 25 ans.

Le rapport du Comité des affaires sociales renferme une recommandation selon laquelle on autoriserait les adolescents à partager de la marijuana dans un contexte social. En fait, cela baisse l’âge minimal pour avoir accès à la marijuana, qui passe à 16 ans. C’est totalement inacceptable. Des études ont démontré que plus la marijuana devient normale, plus les adolescents risquent d’en consommer une première fois. Concrètement, la légalisation est la façon ultime de normaliser cette drogue auprès des jeunes. Si c’est légal, ce n’est sûrement pas dangereux, n’est-ce pas? Même le gouvernement lui-même a admis que c’est faux.

Ce projet de loi mal pensé du gouvernement Trudeau sur la légalisation de la marijuana n’atteint même pas l’objectif qu’il s’est fixé. Il ne protège pas les enfants en ne restreignant pas l’accès de ces derniers à la marijuana et ne permet pas un approvisionnement de cannabis dont la qualité fait l’objet d’un contrôle, à cause de la culture à domicile qui n’est pas réglementée. Je m’oppose à certains des amendements proposés par le Comité des affaires sociales, notamment les nouvelles dispositions sur les échanges entre adolescents plus âgés qui, à mon avis, faciliteront la circulation de la marijuana chez les jeunes. Honorables sénateurs, la santé et la sécurité des jeunes Canadiens constituent un élément primordial de tout débat sur la légalisation de la marijuana. J’espère que nous n’oublierons pas ce principe dans nos prochains débats sur ces projets de loi. Merci.

L’honorable Lillian Eva Dyck : Je n’avais pas l’intention de prendre la parole, mais les dernières interventions m’ont fait changer d’avis.

Premièrement, je tiens à remercier le sénateur Eggleton et les membres du comité de l’immense travail qu’ils ont accompli à l’occasion de séances marathons qui ont abouti à un rapport et à de nombreux amendements. Je vous suis très reconnaissante d’avoir examiné attentivement le rapport du Comité des peuples autochtones. Vous en avez parlé dans vos observations, ce qui est bien, mais, comme l’a dit mon collègue, le sénateur Patterson, ce n’est pas suffisant.

C’est vraiment fâcheux de se trouver dans cette situation, en partie à cause de la façon dont notre Parlement est structuré. Il se trouve que nous avons une loi d’application générale — la loi relative au cannabis, qui modifie la Loi réglementant certaines drogues et autres substances — qui vise donc tout le pays, et notamment les réserves, retirant ainsi aux peuples autochtones certains des droits à l’autonomie qui sont prévus à l’article 35 de la Constitution.

Certes, nous vivons à une époque où l’on parle de rapports de nation à nation et d’autonomie des peuples autochtones. Cette loi d’application générale va totalement à l’encontre de ces principes. Cette loi et ces principes comportent des contradictions que nous n’avons pas encore réglées. Voilà pourquoi nous nous trouvons dans cette situation délicate, avec une loi qui va à l’encontre des droits prévus à l’article 35. Nous devons par ailleurs composer avec la Loi sur les Indiens, qui réglemente ce qui se passe dans les réserves et, comme cette loi ne dit rien du cannabis ou de la marijuana, les diverses bandes, réserves et Premières Nations ne peuvent adopter de règlement interdisant le cannabis en leur sein.

La loi ne leur permet pas non plus d’en vendre, même si certains le font. Dans certaines réserves mohawks, il y a déjà des comptoirs où on vend du cannabis, mais c’est ce qu’on appelle le « marché gris ». Ce n’est pas légal, mais certains le font.

Certaines lois sont contradictoires, mais le Sénat se retrouve aussi dans une impasse, car nous savons que les Premières Nations devraient avoir le droit de tirer des recettes de la taxe d’accise, au même titre que les provinces, mais le Sénat ne peut pas proposer un amendement en ce sens. Le comité dont je suis membre ne le peut pas, et le Comité des finances non plus. Les dispositions relatives aux mesures fiscales se trouvent dans le projet de loi C-74. Lorsque nous en serons saisis, nous ne pourrons pas, non plus, l’amender pour y ajouter ce que nous voulons. À bien des égards, nous ne pouvons pas faire ce qui s’impose, selon nous. Voilà l’impasse dans laquelle nous nous trouvons.

C’est frustrant et parfois même ahurissant. Toutes ces contraintes nous empêchent d’amender le projet de loi. Il ne s’agit pas simplement de l’amender pour que les gouvernements puissent tirer des recettes, car, lorsqu’on intègre les dispositions relatives à la taxe d’accise dans la loi, c’est-à-dire la Loi sur la taxe d’accise et la Loi sur la gestion financière des premières nations, les Premières Nations n’obtiennent alors pas seulement le pouvoir de tirer des recettes de la vente de cannabis, mais aussi celui de réglementer et d’adopter, par exemple, des règlements qui interdisent le cannabis dans les réserves.

La question de savoir si les mesures prohibitives sont efficaces fait actuellement l’objet d’un débat. Je ne crois pas que quiconque ait déjà mené une étude afin de déterminer si les mesures prohibitives sont efficaces dans les réserves. Elles ne fonctionnent peut-être pas dans la société en général, mais, à mon avis, on ne peut rien en conclure pour ce qui est des réserves. En fait, le sénateur White a dit au comité que, selon son expérience d’agent de la GRC, le taux de criminalité est plus faible dans les réserves qui interdisent l’alcool.

L’autre problème, c’est qu’on n’a pas examiné le projet de loi en tenant compte des réalités des peuples autochtones. On aurait pourtant dû, car on sait que les effets de la consommation de drogues sont accentués chez les communautés autochtones. Pas parce que nous sommes génétiquement inférieurs, mais plutôt en raison des conditions socioéconomiques qui existent dans bon nombre de réserves éloignées. Malheureusement, certaines communautés peinent à composer avec les séquelles laissées par les pensionnats autochtones et le colonialisme, et c’est pourquoi des membres de ces communautés se tournent vers les drogues et l’alcool pour tenter d’alléger leurs souffrances.

Il s’agit donc d’un groupe vulnérable et nous devons en tenir compte dans notre examen du projet de loi. Le gouvernement nous a promis qu’il travaillait à l’établissement d’un nouveau cadre de gestion des finances pour les Premières Nations. Cela s’inscrit parfaitement dans ce cadre.

Le secrétariat sur la légalisation et la réglementation du cannabis, dans le document qu’il a transmis aux divers comités — et le sénateur Dean l’a distribué — parle de l’engagement du gouvernement du Canada envers une nouvelle relation de nation à nation. En ce qui concerne le projet de loi sur le cannabis, il dit que le Canada collaborera étroitement avec des organisations représentatives des communautés autochtones sur des questions qui les préoccupent tout particulièrement, y compris les questions de santé publique, les perspectives économiques et la sensibilisation de la population.

Cela se trouve dans un document écrit, une belle présentation PowerPoint, et pourtant, cela n’a pas eu lieu. Nous avons le groupe de travail, qui nous dit qu’il a tenu des consultations. Aux informations, Anne McLellan a dit qu’on avait pris connaissance des préoccupations des Autochtones. Ils s’inquiétaient de la taxe d’accise et des répercussions sur leurs communautés, et pourtant, cela ne figure pas dans le rapport. Cela se trouve dans notre rapport.

C’est nous qui avons mené les véritables consultations. Pour nous, consulter signifie écouter les gens et tenter de répondre à leurs préoccupations. Les gens soulèvent des questions. On tente de trouver des solutions. C’est davantage une collaboration. Le groupe de travail, quel que soit son nom, peut avoir parlé aux gens, mais, manifestement, il a oublié ce qu’ils ont dit. Notre comité a entendu ces préoccupations très clairement. Nous avions des solutions. Nous avons appris que nous ne pouvions pas mettre en œuvre ce qu’on nous avait dit.

Nous savons désormais ce qui doit être fait. La taxe d’accise n’est pas simplement une question d’argent; c’est une question de contrôle. Ainsi, chaque communauté a le pouvoir d’interdire et de réglementer le cannabis. Ces recettes fiscales pourraient servir à offrir des traitements en établissement aux personnes dépendantes ou à élaborer et à offrir des campagnes d’information culturellement adaptées sur les effets nuisibles potentiels du cannabis.

(1640)

Voyez où nous en sommes, honorables sénateurs. Voyez les taux de tabagisme et d’alcoolisme dans les réserves. Les campagnes d’information n’ont rien donné parce qu’elles ne sont pas adaptées à notre culture. Des produits qui ne sont pas adaptés culturellement ne sont pas utiles. Il se peut aussi que certaines communautés soient tellement mal en point que cela ne fonctionne pas. Alors je regrette, mais, selon moi, il faut attendre. Quant aux 60 000 Canadiens, ou presque, qui ont été mis en accusation, même si leur situation n’est pas à balayer du revers de la main, n’oublions pas qu’ils pourront faire effacer leur casier judiciaire. Il leur suffira de payer des frais de 631 $ et le tour est joué.

Il est aussi question d’amnistie. Je demeure convaincu qu’il faut attendre, parce qu’il pourrait y avoir des répercussions négatives. Il faut tenir compte des torts que subiront les personnes vulnérables, surtout dans le Nord, où les taux de problèmes de santé mentale et de suicide sont terriblement élevés. La représentante du Programme national de lutte contre l’abus de l’alcool et des drogues chez les Autochtones est venue nous parler des enfants qui doivent aller en établissement pour être traités. Honorables sénateurs, 79 ou 80 p. 100 d’entre eux consomment du cannabis. En quoi cela nous aidera-t-il si nous ne prenons pas les moyens appropriés? Voilà pourquoi nous avons demandé d’emblée que l’entrée en vigueur de la loi soit retardée. Nous savions que nous allions essuyer un refus, mais c’est quand même pour cette raison que nous l’avons demandé. Je vous remercie.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Patterson : La sénatrice accepterait-elle de répondre à une question?

La sénatrice Dyck : Oui.

Le sénateur Patterson : Sénatrice, de nombreuses nations autochtones veulent profiter des débouchés économiques que représente la production de cannabis. D’après ce que vous avez entendu au comité, croyez-vous que, à moins que la loi ne soit changée afin que les Premières Nations obtiennent une part de la taxe d’accise pour la production de marijuana dans les réserves, les nations qui produiront du cannabis devront collecter la taxe d’accise et la remettre à l’État canadien?

La sénatrice Dyck : Je ne pense pas vous avoir bien entendu. Pourriez-vous répéter la dernière partie de votre question?

Le sénateur Patterson : Je disais que, à moins de régler la question de la taxe d’accise et si le projet de loi est adopté tel quel, les Premières Nations qui produiront de la marijuana dans les réserves devront payer la taxe d’accise comme tous les autres producteurs de marijuana devront le faire en vertu de cette loi d’application générale.

Croyez-vous que, en vertu de la loi, les Premières Nations qui produisent de la marijuana dans les réserves devront percevoir la taxe d’accise pour le Canada et la remettre au gouvernement du Canada?

La sénatrice Dyck : Oui, c’est ce que je comprends, bien que je croie que certaines communautés refuseront de le faire et qu’elles exploiteront leur commerce sur un marché gris, comme cela s’est fait pour les cigarettes et d’autres produits. Cela donnera lieu à des situations qui ne sont pas bonnes pour qui que ce soit.

L’honorable Leo Housakos : Honorables sénateurs, je prends la parole pour participer au débat. La beauté de la démocratie dans cette enceinte est qu’on peut nous empêcher de demander une prolongation du temps de parole pour poser des questions, mais on ne peut pas nous empêcher de prendre la parole durant un débat.

Je prends la parole parce que je suis très inquiet. Après avoir entendu les sénateurs Patterson et Woo, je suis déçu — et je me gratte la tête — de voir à quel point cet endroit a dégénéré jusqu’à un certain point. Nous sommes connus dans tout le pays pour la qualité du travail de nos comités. Les comités sénatoriaux sont cités par la Cour suprême, plus souvent même que ceux de la Chambre des communes. Nous tirons beaucoup de fierté de la minutie avec laquelle nos comités font leur travail et nous faisons immensément confiance à tous nos collègues qui accomplissent ce travail au sein des différents comités permanents.

Dans ce contexte, quand un comité comme le Comité sénatorial des peuples autochtones arrive à une conclusion unanime à propos d’un amendement, qu’il le transmet au comité qui coordonne ce projet de loi d’envergure, et que celui-ci détermine, pour une raison quelconque, qu’une décision rendue à l’unanimité par un comité sénatorial — qui regroupe des sénateurs de toutes allégeances — doit soudainement être rejetée et que l’amendement en question doit être écarté, je trouve cela très préoccupant.

J’aimerais que, pendant le débat, la présidence et la vice-présidence nous disent combien d’autres décisions unanimes ont été transmises par les divers comités, car les décisions unanimes ont du poids. Elles signifient que plusieurs sénateurs représentant divers groupes sont suffisamment préoccupés pour recommander au comité de prendre l’amendement en question au sérieux. Le Sénat doit donc accorder beaucoup plus d’attention aux amendements de ce genre qu’à ceux qui proviennent d’un parti spécifique ou qui sont guidés par une philosophie politique particulière ou par les visées personnelles du proposant.

Honorables sénateurs, on parle ici d’un comité sénatorial permanent. J’ai trouvé très préoccupant que le sénateur Patterson ait été obligé — ou se soit senti obligé — d’affaiblir le contenu de cet amendement lorsqu’il l’a proposé, et que le leader du Groupe des sénateurs indépendants ait pris, en quelque sorte, la responsabilité de repousser cette recommandation, pour une raison quelconque. Ultimement, il faut se demander pourquoi le leader et la leader adjointe du Groupe des sénateurs indépendants ont soudainement eu envie de devenir membres du comité qui menait l’étude, alors qu’ils n’en étaient pas membres. Le sénateur Smith y était-il? Le sénateur Day, le représentant du gouvernement et le représentant du caucus y étaient-ils?

Honorables sénateurs, je pense que chaque comité sénatorial a l’obligation et le privilège de travailler librement. Les membres des comités ont le droit d’accomplir leur travail librement. Lorsqu’un comité ou le Sénat reçoit d’un comité permanent une recommandation qui est unanime, nous avons l’obligation de l’entendre et d’en débattre en détail, puisqu’elle est manifestement le fruit d’études et de travaux menés probablement pendant des semaines, voire des mois. Je trouve troublant qu’on se débarrasse d’un seul coup de pareille recommandation dans le cadre de l’examen d’une série d’amendements proposés par un comité, et je tenais à le dire.

Son Honneur le Président : Le sénateur Eggleton a une question, sénateur Housakos. Accepteriez-vous d’y répondre?

Le sénateur Housakos : Certainement.

Le sénateur Eggleton : Je ne suis certainement pas d’accord avec vous lorsque vous dites que nous avons rejeté, que nous n’avons pas pris au sérieux ou que nous n’avons pas respecté les opinions provenant d’autres comités. Ne conviendrez-vous pas que le projet de loi a été réparti entre quatre comités — ceux des affaires autochtones, des affaires étrangères, de la sécurité nationale et défense et des affaires juridiques et constitutionnelles — selon les divers thèmes qu’il traitait, mais que l’ensemble du projet de loi a été renvoyé au Comité des affaires sociales? Ce dernier comité n’a-t-il pas l’obligation d’équilibrer l’ensemble? Je suis heureux que vous acquiesciez, car il se pourrait qu’il y ait, malgré toutes les bonnes intentions, des conflits entre les différents ordres du jour des comités. Le tableau d’ensemble doit être examiné par un seul comité, et c’est ce qui a été fait.

Le sénateur Housakos : J’en conviens tout à fait, et c’est précisément l’argument que j’essayais de présenter.

Je siégeais au Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international lorsqu’on nous a donné une partie de ce projet de loi à étudier au nom de votre comité et du Sénat.

Oui, vous avez tout à fait raison. Nombre des amendements que nous voulions proposer n’ont pas fait l’objet d’un consensus. Nous avions des points de vue variés. Le débat était litigieux et nombre de nos opinions ont été exprimées dans les observations qui figurent dans le rapport qui a été remis à votre comité.

Cependant, si vous avez reçu des recommandations et des amendements d’un comité sénatorial permanent qui a accompli un travail exhaustif, comme nous l’avons fait au Comité des affaires étrangères, et que les membres du Groupe des sénateurs indépendants, du caucus libéral et du caucus conservateur en sont arrivés à un consensus, alors le Comité des peuples autochtones et la sénatrice Dyck n’ont aucune excuse à faire. Nous savons que la question touche cette communauté de près. J’aimerais savoir sur quelle base et selon quels critères vous avez réussi à rejeter une décision unanime fondée sur un travail rigoureux effectué par un comité, et dans un délai beaucoup plus court. Sur quoi repose le rejet par votre comité d’une recommandation d’amendement unanime?

Son Honneur le Président : Je suis désolé, sénateur Eggleton, mais ce n’est pas le moment d’amorcer un débat ni de s’adresser des questions les uns aux autres. Si vous avez une autre question pour le sénateur Housakos, c’est très bien. Sinon, les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Des voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée avec dissidence, et le rapport est adopté.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Harder, la troisième lecture du projet de loi modifié est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

(1650)

Projet de loi sur la modernisation des élections

Projet de loi modificatif—Motion tendant à autoriser le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles à étudier la teneur du projet de loi—Ajournement du débat

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat), conformément au préavis donné le 29 mai 2018, propose :

Que, conformément à l’article 10-11(1) du Règlement, le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit autorisé à examiner la teneur du projet de loi C-76, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et d’autres lois et apportant des modifications corrélatives à d’autres textes législatifs, déposé à la Chambre des communes le 30 avril 2018, avant que ce projet de loi ne soit présenté au Sénat;

Que, aux fins de cette étude, le comité soit autorisé à siéger même si le Sénat siège à ce moment-là, l’application de l’article 12-18(1) du Règlement étant suspendue à cet égard.

— Merci pour l’excellente lecture de la motion. Je demande l’appui du Sénat pour autoriser le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles à examiner la teneur du projet de loi C-76, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et d’autres lois et apportant des modifications corrélatives à d’autres textes législatifs, avant que l’autre endroit renvoie ce projet de loi au Sénat et que commence l’étape de la première lecture. Le projet de loi C-76 est important. Il concerne les institutions démocratiques du Canada et la capacité des citoyens de participer pleinement à la vie démocratique.

Le jour des élections est peut-être le moment le plus important du cycle électoral, mais bien d’autres étapes de ce cycle qui précèdent le jour des élections ou qui viennent par la suite sont importantes pour assurer l’intégrité des résultats obtenus dans les urnes. Le projet de loi C-76 concerne justement plusieurs de ces étapes et comprend plusieurs parties portant sur des questions comme l’équité et l’accessibilité, la modernisation des services de vote, la protection de la confidentialité de l’information et les moyens de sécuriser les élections et de les rendre plus transparentes. Autrement dit, c’est un projet de loi important qui devra être soumis au second examen objectif qu’effectue normalement le Sénat, y compris l’étude qui devra être menée par le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, qui possède l’expertise nécessaire.

Toutefois, il s’agit aussi d’un projet de loi urgent. Le gouvernement espère, avec l’aide du Sénat, que le projet de loi recevra la sanction royale aussitôt que possible. L’objectif est de faire en sorte que la nouvelle Loi électorale du Canada fournisse au directeur général des élections la certitude nécessaire pour préparer les prochaines élections fédérales, qui approchent à grands pas, du moins pour les politiciens.

Le gouvernement souhaite toutefois que les deux Chambres procèdent à un examen rigoureux du projet de loi, afin d’offrir aux Canadiens la meilleure loi possible. À cet égard, il importe de souligner que le premier ministre a indiqué que le gouvernement se montrera ouvert et étudiera sérieusement les améliorations au projet de loi C-76 que proposeront les partis de l’opposition à l’autre endroit. Étant donné l’échéancier serré dont nous disposons pour traiter un projet de loi aussi complexe, et dans un contexte où le gouvernement se dit ouvert aux suggestions d’amendement, une étude préalable par le Sénat comporte un avantage évident.

Par exemple, le Comité sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles pourrait repérer des problèmes qui ont également été soulevés à l’autre endroit. De tels chevauchements justifient davantage un amendement et peuvent augmenter la probabilité qu’il soit adopté par nos collègues élus, comme ce fut le cas pour les dispositions relatives au directeur parlementaire du budget dans le projet de loi C-44.

Il est possible également que le comité sénatorial relève des points qui, pour une raison ou une autre, auraient échappé aux collègues de l’autre endroit. Ainsi, lorsque l’autre endroit renverra le projet de loi au Sénat, nous aurons une longueur d’avance et serons prêts à débattre des amendements proposés. Nous espérons ainsi voir le projet de loi C-76 adopté rapidement, après un examen rigoureux de la part du Sénat, qui aura procédé à une étude préalable à son arrivée de l’autre endroit.

Chers collègues, j’aimerais également souligner que le sénateur Dawson, qui parraine le projet de loi, ainsi que le sénateur Joyal, qui préside le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, sont tous deux favorables à cette motion.

Comme on l’a souligné à maintes reprises au fil des années, c’est au comité que le Sénat effectue la plus grande partie de son travail. Je ne puis qu’appuyer et encourager le désir des sénateurs Dawson et Joyal de relever le défi d’examiner de près le projet de loi le plus tôt possible.

Pour ces raisons, chers collègues, j’espère que vous appuierez l’étude préalable du projet de loi C-76, qui vise à modifier la Loi électorale du Canada.

[Français]

L’honorable Ghislain Maltais : J’aimerais obtenir une clarification de votre part, monsieur le Président. Je comprends très mal que le sénateur Harder nous demande d’étudier un projet de loi qui n’a pas encore été adopté à la Chambre des communes. Notre rôle constitutionnel est d’étudier les projets de loi qui émanent de la Chambre des communes. Je suis bien d’accord pour que nous procédions à une étude préalable, mais cela ne servirait absolument à rien, puisque le projet de loi n’est pas encore adopté. Le gouvernement n’a pas fait ses devoirs. Nous aurions dû recevoir ce projet de loi il y a trois ou quatre mois. Faire une étude préalable pour s’amuser, ça va, mais l’étude préalable sérieuse d’un projet de loi qui n’a pas été voté, c’est assez exceptionnel. Je vous remercie, monsieur le Président.

[Traduction]

Le sénateur Harder : Le sénateur sait, en raison de sa longue expérience, que cette Chambre mène à l’occasion des études préalables lorsque les circonstances s’y prêtent. Évidemment, le Sénat l’a fait plus régulièrement à l’égard des questions budgétaires.

Ma proposition, dont j’ai expliqué les raisons, est de profiter des avantages que le Sénat peut tirer d’une étude préalable et d’en faire également profiter l’autre endroit, puisque son étude pourrait prendre en compte la teneur des délibérations du Sénat.

C’est une mesure appropriée que je recommande.

[Français]

Le sénateur Maltais : Je regrette, sénateur Harder, vous tournez la question à l’envers et cela ne donne absolument rien. Vous nous demandez d’étudier ce projet de loi à la place de la Chambre des communes. Cela ne fonctionne pas. Nous pouvons faire une étude préalable des grandes lignes d’un projet de loi, mais nous ne pouvons pas étudier sérieusement, au sein d’un comité, un projet de loi qui n’a pas été adopté à l’autre endroit. Nous pouvons procéder à une étude préalable, mais elle n’aura aucune valeur constitutionnelle.

[Traduction]

Le sénateur Harder : Le sénateur a tout à fait raison de dire qu’une étude préalable du projet de loi d’exécution du budget ne dispense pas le Sénat de son obligation de mener une étude en bonne et due forme lorsque le projet de loi lui sera renvoyé, mais cette pratique a déjà permis au Sénat d’accélérer ses études et ses délibérations.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

(À 16 h 58, conformément aux ordres adoptés par le Sénat le 4 février 2016 et le 29 mai 2018, le Sénat s’ajourne jusqu’à 13 h 30 demain.)

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