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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 44e Législature
Volume 153, Numéro 88

Le mardi 6 décembre 2022
L’honorable George J. Furey, Président


LE SÉNAT

Le mardi 6 décembre 2022

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

L’École Polytechnique de Montréal

La commémoration de la tragédie—Minute de silence

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, avant de commencer nos travaux, j’invite les sénateurs à se lever pour observer une minute de silence à la mémoire des victimes de la tragédie qui est survenue il y a 33 ans, le 6 décembre 1989 à l’École Polytechnique de Montréal.

(Les honorables sénateurs observent une minute de silence.)


[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Al MacPhee

Félicitations à l’occasion de son quatre-vingtième anniversaire de naissance

L’honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, je tiens à parler d’une personne qui a grandement contribué à ma ville, Dartmouth, et à ma province, la Nouvelle-Écosse, soit Al MacPhee, un entrepreneur bien connu et respecté.

Dès son plus jeune âge, Al était déterminé à voler de ses propres ailes. Dixième d’une fratrie de 14 enfants, Al a quitté la ferme familiale à French Road, au Cap-Breton, pour s’installer en ville, où il a trouvé un emploi à temps partiel chez un concessionnaire d’automobiles local.

Il s’est rapidement mis à vendre des voitures et il a découvert que cela lui plaisait vraiment. En 1983, Al possédait sa propre concession, qui a fini par devenir la troisième concession General Motors en importance au Canada.

Le succès d’Al dans l’industrie de l’automobile lui a permis de soutenir sa ville, Dartmouth, et de vraiment faire une différence. Au fil des ans, il a en a fait beaucoup pour l’Hôpital général de Dartmouth. Il a aussi présidé la campagne de capitalisation pour construire Alderney Landing, à Dartmouth, qui réunit sous un même toit un centre des congrès, une galerie d’art, un marché, un théâtre ainsi qu’une place publique qui accueillent des activités et qui a contribué à revitaliser le secteur riverain de la ville.

La générosité d’Al à l’égard de sa collectivité ne s’arrête pas là. Al et sa femme, Mary, appuient depuis longtemps un centre d’éducation pour les jeunes sans but lucratif dans le centre-ville de Dartmouth, qui a été créé pour combler l’écart d’apprentissage chez les jeunes venant de milieux marginalisés et défavorisés qui n’obtiennent pas de bons résultats dans le milieu scolaire traditionnel et qui risquent fort d’abandonner complètement leurs études.

En reconnaissance de leur générosité, cet établissement porte maintenant leur nom et s’appelle désormais le centre MacPhee pour l’apprentissage créatif.

En 2018, Al a reçu le prestigieux prix Salute to Dealers de la société Ford, qui est décerné à un nombre restreint de concessionnaires partout dans le monde en reconnaissance de leurs contributions exceptionnelles à leur collectivité durant leur carrière.

(1410)

Quand on l’a interrogé sur sa participation à des projets communautaires, Al a répondu : « Je n’ai pas besoin de luxe. Je préfère réinvestir dans ma collectivité. »

On peut encore trouver Al, qui aura 80 ans cette semaine, à sa concessionnaire à Dartmouth, où il travaille 10 heures par jour du lundi au samedi. Il fait ce qu’il aime et aide la ville qui lui est chère. Joyeux anniversaire, Al.

Des voix : Bravo!

La libération de l’équipage détenu en République dominicaine

L’honorable David M. Wells : Honorables sénateurs, comme vous le savez peut-être grâce à mes interventions durant la période des questions au cours des huit derniers mois, les membres d’un équipage de Pivot Airlines, une compagnie canadienne, ont été détenus arbitrairement en République dominicaine, en avril dernier, après avoir signalé aux autorités la découverte de 210 kilogrammes de cocaïne à bord de leur avion durant une vérification prévol.

Les membres de l’équipage ont été incarcérés avec des trafiquants de drogue, ont reçu des menaces de mort et se sont fait confisquer leur passeport. On a laissé un cadavre à l’extérieur de leur cellule, en leur disant qu’ils seraient les prochains à mourir.

Après leur libération, les membres de l’équipage ont dû être transférés d’une installation secrète à une autre. En août, on a découvert des enregistrements vidéo montrant que les drogues avaient été mises à bord de l’avion par un tiers, tôt le matin du départ, alors que l’équipage était à l’hôtel.

Chers collègues, comme vous l’avez peut-être entendu, après de multiples interventions et des pressions constantes, les membres de l’équipage sont enfin de retour chez eux après huit mois.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Wells : J’ai été invité à accueillir les membres de l’équipage lors de leur arrivée à Toronto, la fin de la semaine dernière. J’ai eu l’occasion de les rencontrer ainsi que leurs familles et d’être témoin de leurs retrouvailles pleines d’émotions. Je suis soulagé que ces Canadiens soient rentrés sains et saufs au pays, mais je suis déçu qu’il ait fallu tant de temps avant que le gouvernement intervienne pour exiger, à juste titre, leur libération. Ces Canadiens se retrouvent de nouveau en sécurité, mais l’épreuve émotive à laquelle ils ont été soumis n’est pas terminée.

Comme l’a déclaré Eric Edmondson, le président de Pivot Airlines, l’équipage a croupi injustement en prison pendant des mois à cause de l’inaction du gouvernement. Transports Canada s’est engagé à commander une enquête en bonne et due forme sur cette affaire et, dans les mois à venir, je m’informerai de l’évolution de la situation auprès du leader du gouvernement au Sénat. Les membres de l’équipage m’ont demandé d’exprimer leur gratitude à toutes les personnes qui ont plaidé leur cause, notamment l’Association des pilotes de ligne, le Syndicat canadien de la fonction publique, Unifor et, bien sûr, Pivot Airlines. Le capitaine de l’avion, Rob Di Venanzo, a déclaré que son retour était le meilleur cadeau de Noël qu’il pouvait recevoir. Merci, chers collègues.

Des voix : Bravo!

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Lynn Francis, qui est accompagnée d’une délégation de la Première Nation Elsipogtog. Ils sont les invités de l’honorable sénatrice Hartling.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

La Première Nation Elsipogtog

Félicitations à l’occasion de l’obtention du Prix du tourisme autochtone

L’honorable Nancy J. Hartling : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour féliciter et honorer mes amis de la Première Nation Elsipogtog, au Nouveau-Brunswick. Elsipogtog, qui signifie « rivière de feu » en langue mi’kmaq, est située près de la rivière Richibucto, à environ une heure de ma maison, à Moncton.

Cette année, l’organisation mi’kmaq d’Elsipogtog qui réunit un centre culturel, une boutique d’artisanat et des visites, dont la Mi’kmaq Heritage Path Tour, a remporté le prestigieux Prix du tourisme autochtone de l’Association de l’industrie touristique du Canada. Le prix est décerné aux entreprises autochtones qui font preuve d’un engagement à développer, à promouvoir et à offrir une expérience authentique et inédite qui favorise l’avancement du tourisme et de la culture autochtone dans la région.

C’est une marque de reconnaissance bien méritée, et nous vous souhaitons la bienvenue au Sénat. Je crois comprendre que d’autres sénateurs vous ont invités à assister à leur match de ce soir à Ottawa et à installer un kiosque pour présenter vos produits.

L’été dernier, mon mari et moi avons eu le plaisir de rencontrer Lynn Francis, la directrice de l’organisme de développement économique d’Elsipogtog, des membres de son personnel ainsi que Chrissy Guitard, qui est copropriétaire de l’entreprise de construction SheBuilds.

Nous avons rencontré l’équipe de Mme Francis pour en apprendre davantage sur les divers projets de développement économique à la Première Nation Elsipogtog. Notre rencontre a commencé par une cérémonie de purification dirigée par un aîné. Nous avons ensuite eu la chance d’en savoir plus sur la Mi’kmaq Heritage Path Tour, une visite guidée des terres traditionnelles de la communauté.

La visite comprend des enseignements historiques, culturels et spirituels destinés à la fois aux Autochtones et aux non‑Autochtones. On y trouve un wigwam, une longue maison et une hutte de sudation construits dans les règles de l’art par un sage local, gardien du savoir.

La visite se termine à l’intérieur du centre culturel, où nous avons été accueillis par un groupe de jeunes femmes portant des jupes à rubans traditionnelles. Ce centre offre aux visiteurs la possibilité de poser des questions sur la culture mi’kmaq en toute tranquillité, ce qui constitue un excellent moyen d’entrer en contact pour des personnes qui ne connaissent peut-être pas cette partie importante de l’histoire du Nouveau-Brunswick. La boutique de cadeaux artisanaux propose de très beaux produits à la vente. Nous avons également dégusté une gâterie spéciale à base de bannique et de bleuets frais.

Ensuite, nous avons eu la chance de voir plusieurs nouveaux bâtiments dans la communauté, comme un nouvel aréna de hockey, et nous sommes allés visiter l’un des chantiers de construction de SheBuilds. SheBuilds, en partenariat avec Elsipogtog Economic Development, offre aux femmes micmaques la possibilité d’apprendre des métiers spécialisés tout en construisant des maisons dans leur propre communauté. Les charpentiers et les apprenties que nous avons rencontrés étaient très fiers de leur travail, qui contribuera à remédier à la pénurie de logements dans la communauté tout en améliorant les débouchés pour les nouvelles travailleuses qualifiées.

J’ai été très heureuse d’avoir l’occasion de visiter la Première Nation d’Elsipogtog après tant d’années. C’est un endroit très progressiste et certainement une destination touristique. Notez sur votre agenda qu’il faut venir visiter cet endroit lorsque vous viendrez au Nouveau-Brunswick.

Mes amis, encore une fois, je vous félicite d’avoir réussi à créer une merveilleuse expérience culturelle à partager avec nous et je vous remercie de vous être joints à nous aujourd’hui. Wela’lioq, merci.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de la professeure Kelly Saunders et de stagiaires du Programme de stages de l’Assemblée législative du Manitoba et du Programme de stage parlementaire. Ils sont les invités de l’honorable sénatrice Osler.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Les programmes de stages législatifs

L’honorable F. Gigi Osler : Honorables sénateurs, aujourd’hui, je suis fière d’accueillir au Sénat six membres du Programme de stages à l’Assemblée législative du Manitoba. Ces jeunes stagiaires inspirants sont Alina Hart, Bea Basaran, Tayla Gudnason, Cheta Akaluka, Dane Monkman et Hannah Drudge. Ils sont accompagnés de la directrice des études, la professeure Kelly Saunders.

Le Programme de stages à l’Assemblée législative du Manitoba a été créé en 1985 par l’Assemblée législative du Manitoba et vise trois grands objectifs.

Le programme permet d’abord aux diplômés des universités manitobaines et aux diplômés des autres universités qui ont la chance d’être résidents permanents du Manitoba d’acquérir une expérience du processus législatif. Les stagiaires doivent travailler avec le gouvernement et les caucus de l’opposition, où ils accomplissent diverses tâches. En plus de prendre part directement au processus législatif, les stagiaires participent à une série de séminaires visant à améliorer leur connaissance des activités gouvernementales, de l’économie, des médias, du journalisme et du secteur sans but lucratif au Manitoba.

Le programme met également à la disposition des députés provinciaux le savoir-faire de personnes compétentes et qualifiées afin de les aider à effectuer des recherches en matière de politiques et de les appuyer dans le travail à faire pour leur circonscription. De plus, il permet aux députés de déléguer des tâches aux stagiaires, ce qui les laisse ainsi plus libres de traiter plus efficacement de questions législatives spécialisées.

À long terme, l’objectif du programme est de former un certain nombre de jeunes Manitobains qui comprennent le système parlementaire et le travail des représentants élus. En favorisant une connaissance et une reconnaissance du rôle de notre système politique, le programme est avantageux tant pour la province que pour ces futurs dirigeants.

Chaque cohorte de stagiaires peut choisir entre un voyage d’études à Westminster ou une visite d’étude dans deux administrations canadiennes. Cette année, ils ont choisi Ottawa. L’objectif de la visite consiste à familiariser les stagiaires avec le processus parlementaire fédéral, provincial ou territorial. La visite se compose d’un programme intensif de séminaires, de rencontres et de visites guidées en compagnie de personnalités gouvernementales et politiques, de représentants des milieux parlementaire et législatif, de journalistes, d’universitaires, d’organisations communautaires et d’autres stagiaires parlementaires et législatifs.

Ils sont accompagnés aujourd’hui de Madeleine Martin et de Sarah Rollason-MacAulay, qui sont toutes deux des stagiaires du Programme de stages parlementaires, ici à Ottawa. Je suis particulièrement heureuse d’accueillir Sarah, car elle est originaire de Winnipeg, et je l’ai rencontrée pour la première fois il y a des années par l’intermédiaire de sa remarquable famille.

Les stagiaires nous ont tous dit que le programme était une expérience d’apprentissage inestimable et une occasion unique.

Honorables collègues, je vous invite à vous joindre à moi pour leur souhaiter la bienvenue au Sénat du Canada. Merci, meegwetch.

Des voix : Bravo!

La Journée nationale de commémoration et d’action contre la violence faite aux femmes

L’honorable Judith G. Seidman : Honorables sénateurs, c’est par un froid mercredi après-midi qu’un jeune homme est entré à l’École Polytechnique de Montréal armé d’une carabine de calibre .223. C’était le 6 décembre 1989. Il est entré dans une classe remplie d’étudiants en génie et il a immédiatement ordonné aux six femmes qui s’y trouvaient de se diriger à l’arrière du local et aux hommes de partir. Il a aligné les femmes côte à côte en criant : « Vous êtes toutes une gang de féministes, j’haïs les féministes. » Il a brandi son fusil, l’a pointé vers la tête de la première femme et lui a tiré une balle dans le front. Il a fait de même aux cinq autres femmes à ses côtés. Les coups de feu ont retenti dans les couloirs. Les étudiants qui se trouvaient aux alentours ont entendu les hurlements d’horreur et se sont précipités pour trouver de l’aide.

(1420)

En ce jour sombre, 14 femmes ont péri. Dans sa note de suicide, le tireur a déclaré que les femmes n’avaient pas leur place en génie, parce qu’elles prendraient des emplois aux hommes, que les féministes lui gâchaient la vie et que son intention était de mettre fin aux jours de toutes les femmes du Département de génie.

Aujourd’hui, en cette Journée nationale de commémoration et d’action contre la violence faite aux femmes, je veux rendre hommage à ces 14 femmes courageuses qui ont perdu la vie il y a 33 ans. Leur seule faute a été d’avoir osé rêver d’être ingénieure. Michèle Thibodeau-DeGuire a été la première femme à obtenir un diplôme du programme de génie civil à l’École Polytechnique de Montréal. Lorsqu’on lui a demandé quel serait un remède possible à la violence faite aux femmes, elle a dit qu’une façon d’aller de l’avant après un événement comme celui-là est de continuer à encourager les filles et les femmes à rester dans des domaines comme le génie.

Les femmes demeurent sous-représentées dans le domaine du génie, mais, en 2020, le département de génie de la Polytechnique a franchi un cap important. Cette année-là, un peu plus de 30 % des diplômés en génie étaient des femmes.

Honorables sénateurs, étonnamment, la violence contre les femmes demeure, aujourd’hui encore, bien trop courante. Selon l’Organisation mondiale de la santé, une femme sur trois subira une forme de violence dans sa vie, la plupart du temps de la part de son partenaire. Il ne faut pas réfléchir bien longtemps pour se rappeler toutes les attaques et les actes de violence perpétrés récemment contre des jeunes femmes dans le monde. Vous-mêmes, vous vous souvenez sans doute de quelqu’un, peut-être même d’une personne que vous connaissez.

Le 6 décembre est une occasion pour les Canadiens de réfléchir au phénomène de la violence contre les femmes dans notre société et de rendre hommage aux femmes, comme les 14 étudiantes mortes un mercredi après-midi, à Montréal, il y a 33 ans. Voici leurs noms : Geneviève Bergeron, Hélène Colgan, Nathalie Croteau, Barbara Daigneault, Anne-Marie Edward, Maud Haviernick, Barbara Klucznik-Widajewicz, Maryse Laganière, Maryse Leclair, Anne-Marie Lemay, Sonia Pelletier, Michèle Richard, Annie St-Arneault et Annie Turcotte. Merci.

Des voix : Bravo!

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Jennifer Arp, de David Awosoga et de Ken Lima-Coelho. Ils sont les invités de l’honorable sénatrice Pate.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

[Français]

L’École Polytechnique de Montréal

La commémoration de la tragédie

L’honorable Rosa Galvez : Chers collègues, je prends la parole aujourd’hui pour commémorer la tragédie qui a eu lieu le 6 décembre 1989 à l’École Polytechnique de Montréal.

Il y a de cela 33 ans, le Québec apprenait avec horreur ce crime qui a eu lieu dans un endroit de haut savoir. Ce multiple féminicide a été perpétré par un tueur misogyne qui a éteint les voix et le merveilleux potentiel de 14 étudiantes en génie.

Depuis, le taux de féminicide a augmenté selon l’Observatoire canadien du féminicide pour la justice et la responsabilisation. En 2021, au Canada, 173 femmes et jeunes filles ont été victimes d’actes violents causant la mort. En moyenne, tous les deux jours, un crime contre une femme se produit au Canada, ce qui représente une augmentation de 26 % depuis 2019.

[Traduction]

Les femmes et les filles autochtones sont encore aujourd’hui victimes d’une violence atroce qui jette des communautés de partout au pays dans le deuil et leur donne un sentiment de vulnérabilité. Encore la semaine dernière, nous avons appris qu’un autre déséquilibré avait tué plusieurs jeunes femmes dont la vie était précieuse. Il faut que cela cesse.

Depuis 1991, nous soulignons le 6 décembre la Journée nationale de commémoration et d’action contre la violence faite aux femmes. Cette journée a été instaurée pour nous encourager à continuer de prendre la parole, haut et fort, afin de trouver des façons de prévenir ce genre de violence. C’est un enjeu qui trouve un écho non seulement au Canada, mais aussi ailleurs dans le monde. En septembre, des Iraniennes et des militants pour les droits de la personne ont participé à des manifestations d’envergure nationale pour dénoncer la mort d’une jeune femme alors qu’elle était aux mains de la police des mœurs iranienne pour n’avoir pas respecté le code vestimentaire très rigoureux imposé aux femmes.

[Français]

Remémorons-nous la douleur qui est infligée aux femmes uniquement parce qu’elles sont des femmes. Souvenons-nous qu’être femme ne devrait pas être un obstacle à la liberté d’expression, à la liberté de décider quoi faire avec son corps, à l’égalité et au droit d’exister.

J’aimerais remercier les sénateurs Pate, Audette, Boisvenu, Bernard, Miville-Dechêne, McPhedran, Ataullahjan et tous les autres qui se battent dans cette enceinte contre toute forme de violence faite aux femmes et aux filles.

Aujourd’hui, nous tenons à honorer la mémoire de toutes les victimes de la tragédie de l’École Polytechnique de Montréal. C’est pour moi un moment très chargé d’émotions. Rappelons-nous toutes les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, et toutes celles qui sont victimes de féminicide partout dans le monde. Nous nous souviendrons toujours d’elles.

Merci. Meegwetch.

[Traduction]

Remerciements

L’honorable Larry W. Smith : Honorables sénateurs, comme c’est la première occasion que j’ai d’intervenir, j’aimerais revenir sur ma malheureuse tentative d’effectuer un triple Salchow ici la semaine dernière.

Même si le bruit sourd que vous avez peut-être entendu a été beaucoup plus douloureux pour mon ego que pour ma tête, je peux vous assurer que je n’ai pas reçu de coup aussi violent à la tête lors des quelque 200 parties de football que j’ai jouées, tant au niveau amateur, collégial que professionnel. J’aimerais remercier les sénateurs Ravalia, Osler, Kutcher et Mégie, ainsi que Greg Peters et d’autres qui sont immédiatement venus m’aider.

En plus d’évaluer rapidement ma condition, ces remarquables médecins ont régulièrement effectué un suivi en me téléphonant et en venant me voir en personne, autant pendant la soirée que le lendemain. Ma visite à la clinique improvisée du sénateur Kutcher, au premier étage du Château Laurier, le soir de l’incident, a été un moment marquant. J’ai été impressionné par le travail d’équipe dont ont fait preuve ces personnes exceptionnelles, et je leur suis redevable pour leur réaction ultrarapide.

Chers collègues, ma performance ratée de la semaine dernière souligne encore plus l’importance d’être conscients de notre environnement, en particulier pendant les mois d’hiver, qui peuvent être impardonnables pour bon nombre d’entre nous dans cette pièce. En terminant, j’aimerais tous vous remercier pour vos aimables messages et l’attention que vous m’avez portée ces derniers jours. Je vous en suis extrêmement reconnaissant. Merci.

Des voix : Bravo!


AFFAIRES COURANTES

La vérificatrice générale

Dépôt du rapport sur les vaccins contre la COVID-19

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la vérificatrice générale du Canada au Parlement du Canada sur les vaccins contre la COVID-19, conformément à la Loi sur le vérificateur général, L.R.C., 1985, ch. A-17, art. 8.

Dépôt du rapport sur les prestations spécifiques liées à la COVID-19

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la vérificatrice générale du Canada au Parlement du Canada sur les prestations spécifiques liées à la COVID-19, conformément à la Loi visant à fournir un soutien supplémentaire en réponse à la COVID-19, L.C. 2021, ch. 26, art. 19.1.

La santé

Dépôt du rapport sur l’achat et la distribution de tests rapides pour la COVID-19

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport du ministre de la Santé sur l’achat et la distribution de tests rapides pour la COVID-19.

Projet de loi d’exécution de l’énoncé économique de l’automne 2022

Dépôt du neuvième rapport du Comité des peuples autochtones sur la teneur du projet de loi auprès du greffier pendant l’ajournement du Sénat

L’honorable Brian Francis : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur d’informer le Sénat que, conformément à l’ordre adopté par le Sénat le 17 novembre 2022, le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones a déposé auprès du greffier du Sénat, le 5 décembre 2022, son neuvième rapport, qui porte sur la teneur des éléments des sous-sections A et B de la section 3 de la partie 4 du projet de loi C-32, Loi portant exécution de certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne déposé au Parlement le 3 novembre 2022 et de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 7 avril 2022. Je propose que l’étude du rapport soit inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.

(Sur la motion du sénateur Francis, l’étude du rapport est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

(1430)

Transports et communications

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

L’honorable Leo Housakos : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5a) du Règlement, je propose :

Que le Comité sénatorial permanent des transports et des communications soit autorisé à se réunir le mardi 6 décembre 2022, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l’application de l’article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)


PÉRIODE DES QUESTIONS

Les finances

L’Énoncé économique de l’automne 2022

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Monsieur le leader du gouvernement, dans son rapport du 15 novembre, le directeur parlementaire du budget, Yves Giroux, a relevé 14,2 milliards de dollars de nouvelles mesures annoncées dans l’énoncé économique de l’automne, pour lesquelles aucun renseignement précis n’a été fourni.

Ces dépenses représentent 17 % de toutes les nouvelles mesures comprises dans l’énoncé économique de l’automne. Comme l’a dit M. Giroux au Comité des finances de la Chambre des communes : « Ce manque de transparence représente des défis pour les parlementaires et les membres du public au cours de l’examen des plans de dépenses du gouvernement ». Il a également déclaré : « Le gouvernement semble savoir, en bonne partie, les mesures qui vont être financées, mais ne les dévoile pas encore. »

Je répète : « Le gouvernement semble savoir, en bonne partie, les mesures qui vont être financées, mais ne les dévoile pas encore. »

Sénateur Gold, pourquoi votre gouvernement n’est-il pas honnête et ne dit-il pas aux Canadiens à quoi servent ces 14,2 milliards de dollars de nouvelles dépenses?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de la question, sénateur. Le gouvernement croit en la transparence. Il croit aussi qu’il faut être clair avec les Canadiens. Il y a certaines dépenses dont la destination n’est pas déterminée. Dès que ces détails seront finalisés, ils seront communiqués non seulement au Sénat, mais aussi aux Canadiens.

Le sénateur Plett : Il est surprenant de voir le nombre de principes auxquels le gouvernement dit croire, sans toutefois les mettre en application, et en voilà un autre exemple.

L’examen et l’approbation des dépenses sont des fonctions parlementaires fondamentales. Sénateur Gold, les sénateurs et les députés ne peuvent pas examiner le plan de dépenses du gouvernement comme il se doit si les détails concernant 17 % des dépenses demeurent secrets.

Sénateur Gold, quand le gouvernement va-t-il cesser de tenir l’approbation du Parlement pour acquise et fournir aux parlementaires l’information dont ils ont besoin pour faire leur travail?

Le sénateur Gold : Monsieur le sénateur, il est tout simplement inexact d’affirmer, comme vous le faites, que le gouvernement tient l’approbation du Parlement, du Sénat ou de la Chambre des communes pour acquise. Le gouvernement fait régulièrement rapport au Sénat et à l’autre endroit sur un certain nombre de mesures afin que nous puissions assumer nos responsabilités.

Les résultats financiers mensuels sont publiés dans La revue financière. Les ministères présentent des rapports financiers trimestriels. Des états financiers vérifiés sont publiés dans les Comptes publics du Canada, et le gouvernement dépose annuellement des plans ministériels et des rapports sur les résultats ministériels. Plus important encore, les mesures comme celles qui se trouvent dans l’énoncé économique de l’automne et dans le projet de loi C-32 font l’objet d’une étude et d’un débat au Sénat.

Les affaires étrangères

La crise en Afghanistan

L’honorable Salma Ataullahjan : Monsieur le leader du gouvernement, hier, le Comité sénatorial permanent des droits de la personne a commencé à recevoir des témoins au sujet des règles en matière de lutte contre le terrorisme qui empêchent des groupes humanitaires de travailler en Afghanistan. Les membres du comité ont reçu des avocats, des professeurs et des représentants d’organismes de bienfaisance, mais aucun des trois ministres libéraux que nous avions invités n’a accepté de venir. Les ministres Lametti, Mendicino et Sajjan ont préféré envoyer des bureaucrates de Sécurité publique Canada, du ministère de la Justice du Canada et d’Affaires mondiales Canada.

Sénateur Gold, on nous a dit à plusieurs reprises dans les témoignages entendus hier que le gouvernement avait été saisi — je vais le répéter, parce qu’on nous l’a dit cinq fois, « saisi » — de la question, mais il ne fait rien. Je n’ose pas imaginer ce qui arrive des questions dont le gouvernement n’a pas été saisi. Entretemps, les alliés du Canada ont modifié leurs règles afin que de l’aide humanitaire puisse être acheminée en Afghanistan.

Qu’est-ce que ces ministres ont à cacher? Pourquoi nous ont-ils envoyé des bureaucrates empêtrés dans les formalités administratives dont certains ne sont en poste que depuis six mois?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Le gouvernement n’a rien à cacher, sénatrice. Merci de votre question. De ce que j’en sais, les ministres dont vous avez parlé avaient tous d’autres engagements au moment où on les invitait à venir témoigner au comité. Des fonctionnaires du ministère de la Justice et de Sécurité publique Canada ont participé à la réunion et communiqué les informations qu’ils étaient en mesure de communiquer, et je suis certain qu’ils ont été d’un grand secours au comité. Le gouvernement est conscient de l’importance du travail mené par le comité et il attend avec intérêt le rapport du comité sur cette importante question.

La sénatrice Ataullahjan : Sénateur Gold, nous avons entendu le témoignage du professeur Kent Roach de l’Université de Toronto, qui a pris le temps d’expliquer au Comité des droits de la personne que, selon son avis professionnel, le gouvernement interprète mal ses propres lois, et qu’il serait possible d’éviter des souffrances inutiles en Afghanistan grâce à des solutions comme des exemptions aux accords de poursuite suspendue.

Sénateur Gold, le professeur Roach a proposé trois solutions concrètes et simples pour mettre fin aux restrictions imposées à l’aide humanitaire en Afghanistan. Pourquoi le gouvernement n’a‑t‑il pas envisagé ces solutions plus tôt?

Le sénateur Gold : Merci de votre question. Effectivement, le professeur Roach est un expert remarquable. Le gouvernement et notre pays ont bénéficié de son apport sur cette question et bien d’autres au fil des ans. Le gouvernement se penchera attentivement sur ses recommandations, car il reconnaît l’importance des travaux effectués par le comité et des témoins qui viennent y comparaître.

L’emploi et le développement social

L’assurance-emploi

L’honorable Pat Duncan : Ma question aujourd’hui s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat.

Sénateur Gold, l’information transmise aux sénateurs à l’appui de la motion sur la Loi sur l’abrogation des lois précise notamment que, « conformément au budget de 2021, des consultations ont été menées pour éclairer d’éventuelles modifications au programme d’assurance-emploi ». Plus loin, on peut lire que « les consultations ont pris fin et le plan de modernisation du programme d’assurance-emploi est toujours en cours d’élaboration ».

Sénateur Gold, pouvez-vous indiquer à la Chambre ce que signifie l’expression « toujours en cours d’élaboration »?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question, madame la sénatrice. Le gouvernement sait très bien qu’il faut élaborer un système d’assurance-emploi modernisé qui pourra répondre aux besoins du XXIe siècle.

Le gouvernement est toujours résolu à renforcer les droits des travailleurs qui ont été embauchés, par exemple, par des plateformes numériques, et à ajouter de nouvelles dispositions à la Loi de l’impôt sur le revenu afin qu’on tienne compte de leur travail aux fins de l’assurance-emploi et du Régime de pensions du Canada. Dans le budget de 2022, le gouvernement investit d’ailleurs 110 millions de dollars pour prolonger le projet pilote pour les travailleurs saisonniers jusqu’en octobre 2023.

Je tiens aussi à souligner que le gouvernement a mené de vastes consultations auprès de syndicats, de travailleurs, d’employeurs et d’autres partenaires dans le but de bâtir un système d’assurance-emploi qui répondra aux besoins des Canadiens. Comme vous l’avez mentionné dans votre question, les consultations sont terminées. Le gouvernement analyse maintenant les renseignements qu’il a recueillis.

Ce n’est pas une mince affaire de moderniser le système d’assurance-emploi, un système auquel des millions de Canadiens ont recours chaque année. Le gouvernement a hâte de présenter son plan à long terme pour la modernisation en profondeur de l’assurance-emploi. Il prend le temps de bien faire les choses.

La sénatrice Duncan : Merci de cette réponse, sénateur Gold. Je suis consciente qu’il faut du temps pour apporter des changements essentiels. Par ailleurs, je préviens le représentant du gouvernement au Sénat qu’il n’y a pas d’approche universelle qui convient à tout le monde dans ce pays.

Le représentant du gouvernement au Sénat peut-il nous indiquer quand nous pouvons nous attendre à voir le plan de développement? Un échéancier a-t-il été établi pour les travaux du Cabinet?

(1440)

Le sénateur Gold : Je vous remercie de la question.

Je n’ai pas été informé d’un échéancier comme tel. Étant donné que les consultations sont terminées, on m’a indiqué qu’une analyse est en cours et que les travaux seront entamés promptement.

Je vais certainement transmettre vos observations. Le gouvernement serait ouvert à l’idée d’adapter le système en fonction des différences entre les industries, les régions et les circonstances qui touchent les travailleurs et les entreprises.

Dès qu’une date sera prévue pour fournir de plus amples renseignements, je serai ravi de vous en faire part.

Le patrimoine canadien

Le Musée des beaux-arts du Canada

L’honorable Patricia Bovey : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat.

Sénateur Gold, récemment, le congédiement soudain et inattendu de quatre membres de la haute direction du Musée des beaux-arts du Canada a créé la controverse au sein des artistes, des professionnels du monde artistique et de nombreux donateurs à l’échelle nationale et internationale. Trois de ces personnes étaient des employés de longue date, y compris une personne qui travaillait au musée depuis plus de 20 ans. Leurs efforts, leurs expositions, leurs acquisitions, leurs publications et leur travail de conservation spécialisé ont été largement salués tant au Canada qu’à l’étranger.

Le ministre s’est-il informé auprès de la directrice générale par intérim et de la présidente du conseil d’administration pour pouvoir expliquer aux contribuables et au public pourquoi on a pris ces décisions? De façon générale, quelles seront les conséquences de ces décisions pour les prochains programmes de ce musée emblématique du Canada?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question.

Nous avons tous suivi l’évolution de la situation au musée avec beaucoup d’intérêt. Je ne connais pas la réponse à votre question, mais je vais m’informer et je reviendrai avec une réponse.

La sénatrice Bovey : Sénateur Gold, peut-être qu’en vous informant, vous pourriez demander si le ministre a répondu aux lettres exprimant les préoccupations des syndicats des employés du musée, qui avaient été envoyées avant les mises à pied, ainsi qu’aux lettres qu’il a reçues depuis de la part d’anciens employés.

Le sénateur Gold : Certainement, je serai heureux de le faire. Merci.

Les transports

Le Fonds national des corridors commerciaux

L’honorable Dennis Glen Patterson : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Sénateur Gold, nous continuons de subir les conséquences de la pandémie. Les régions du Nord sont particulièrement touchées, car c’est là où les mesures de confinement les plus strictes ont été appliquées pour réussir à atténuer la propagation de la COVID-19.

Récemment, j’ai été informé que l’Association inuite du Qikiqtani se retrouve avec d’énormes dépassements de coûts pour la construction des infrastructures qui ont été promises dans l’Entente sur les répercussions et les avantages pour les Inuits de l’aire marine nationale de conservation Tallurutiup Imanga. Ces dépassements de coûts sont attribuables aux retards, à l’augmentation des prix des matériaux et à la pénurie de main‑d’œuvre liés à la pandémie. La construction d’autres infrastructures prévues dans le cadre de cette entente sur les répercussions et les avantages ne peut être lancée, car les budgets d’origine doivent être révisés afin de lancer un processus d’appel d’offres adéquat à l’intention des entrepreneurs.

À l’autre extrémité du territoire, la Kitikmeot Inuit Association a dû interrompre le projet de construction d’une route et d’un port à Grays Bay afin de concentrer ses efforts sur la réponse à la pandémie de COVID-19. Il était essentiel d’accorder la priorité à ces programmes. Toutefois, l’investissement d’un peu plus de 20 millions de dollars prévu dans le Fonds national des corridors commerciaux arrivera à échéance à la fin de l’exercice en cours. Cela signifie que les projets planifiés risquent de ne pas être mis en œuvre, notamment l’achèvement de l’évaluation environnementale à l’intention de la Commission du Nunavut chargée de l’examen des répercussions.

Étant donné que ces problèmes sont indépendants de la volonté des deux associations inuites régionales, voici ma question : le gouvernement sera-t-il disposé à augmenter le financement pour compenser les dépassements de coûts du programme d’infrastructure de l’Association inuite du Qikiqtani et à repousser l’échéance pour les dépenses au titre du Fonds national des corridors commerciaux?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question, sénateur.

Le gouvernement collabore de près avec ses partenaires territoriaux et autochtones pour bâtir les éléments d’infrastructure que les collectivités ont désignés comme étant des priorités. Le gouvernement est au courant que certains de ces projets sont confrontés à de véritables défis à cause des perturbations dans la chaîne d’approvisionnement mondiale ou d’une pénurie de travailleurs qualifiés. Comme vous l’avez indiqué à juste titre, la situation est particulièrement difficile dans les communautés nordiques et autochtones. De plus, le gouvernement sait aussi que la pandémie a affecté de manière disproportionnée les collectivités éloignées et nordiques.

On m’assure que le gouvernement travaille en étroite collaboration avec les promoteurs de projets d’infrastructure pour régler divers problèmes, notamment en matière de financement. Si j’ai bien compris, des représentants de Transports Canada demeurent disponibles pour discuter de l’incidence de ces facteurs sur ces projets.

Les finances

Les petites et moyennes entreprises

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat.

La semaine dernière, le Comité sénatorial des banques a entendu le témoignage de Kevin Page, ancien directeur parlementaire du budget. M. Page a déclaré au comité qu’une récession hivernale attendue nuira considérablement aux petites entreprises. La combinaison de trois facteurs, soit une récession, des taux d’intérêt élevés et l’inflation, nuira aux petites entreprises, qui sont l’épine dorsale de l’économie canadienne. Ces facteurs signifient des coûts plus élevés pour les entreprises et moins d’argent pour les consommateurs.

M. Page l’a confirmé en disant ceci :

[...] Cela nuira considérablement aux petites entreprises parce qu’en raison des taux d’intérêt plus élevés, les gens ne voudront pas avoir recours au crédit pour sortir et dépenser.

Cette récession sera causée par les taux d’intérêt élevés, qui découlent directement des dépenses inconsidérées des libéraux. Monsieur le leader, quel est le plan du gouvernement pour aider les petites entreprises qui souffriront en 2023?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Le gouvernement du Canada a démontré qu’il était là pour les Canadiens, les petites entreprises, les travailleurs et d’autres personnes pendant tous les bouleversements qui se sont produits en raison de la pandémie et de la hausse du coût de la vie, ce qui inclut la hausse des taux d’intérêt. Le gouvernement continuera d’être là pour les entreprises et les gens à mesure que la situation évoluera.

La bonne nouvelle, c’est que l’économie du Canada est en très bonne position. Notre situation financière est solide et stable. Le Canada aura la capacité de fournir de l’aide au besoin.

La sénatrice Martin : En plus de l’augmentation des coûts causée par l’inflation et la hausse des taux d’intérêt, le gouvernement nuira aux petites entreprises en augmentant les coûts énergétiques et les charges sociales. Il semble que le gouvernement soit sourd aux demandes du milieu des affaires ou qu’il n’ait aucun intérêt à aider les petites entreprises.

Monsieur le leader, pourquoi le gouvernement n’annule-t-il pas les hausses prévues de la taxe sur le carbone et des charges sociales qui nuiront aux petites entreprises?

Le sénateur Gold : Merci de votre question.

Comme je l’ai répété à plusieurs occasions en répondant à cette question, le gouvernement croit que sa tarification de la pollution et les autres mesures qu’il a mises en place pour assurer la durabilité de ces fonds et des programmes dont les Canadiens dépendent pour leur sécurité sont des initiatives appropriées, prudentes et responsables. Il continuera d’agir en ce sens.

Les transports

La présence du ministre à un événement organisé par un groupe d’amitié interparlementaire

L’honorable Leo Housakos : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat.

La semaine dernière, le ministre Omar Alghabra a participé à un rassemblement organisé par le Groupe d’amitié parlementaire Canada-Palestine. Parmi les invités se trouvait Nazih Khatatba, l’éditeur de Meshwar Media, un journal arabophone. M. Khatatba est un dangereux antisémite qui nie l’existence de l’Holocauste et qui sympathise avec des terroristes. Son journal a notamment qualifié l’Holocauste de canular et du plus grand mensonge de l’histoire.

Le ministre Alghabra a refusé de présenter des excuses pour avoir côtoyé M. Khatatba lors de cet événement.

Ce n’est pas la première fois que des députés et des ministres libéraux sont surpris à participer à des événements avec de tels individus qui sympathisent avec des terroristes antisémites. Ils ont toujours été désolés d’avoir été surpris, mais il n’en demeure pas moins que ce genre d’individus odieux continuent de se présenter aux mêmes événements que des ministres libéraux.

Sénateur Gold, pensez-vous que le ministre Alghabra devrait présenter des excuses pour avoir participé à cet événement avec M. Khatatba?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question.

Le gouvernement condamne l’antisémitisme, ainsi que les propos et les comportements offensants et abusifs sous toutes leurs formes. Il sait qu’il faut dénoncer ce genre de comportements.

Comme le savent les sénateurs, l’événement auquel le ministre des Transports a participé était organisé par un groupe d’amitié parlementaire, qui y a invité des députés et des membres de la communauté palestinienne. L’invitation — et cela relève du domaine public — a été transmise de façon générale aux membres de la communauté. Le groupe d’amitié parlementaire n’a pas vérifié qui serait présent.

Je crois aussi comprendre que le ministre n’a pas eu de contact personnel avec cette personne et qu’il ne savait pas qui elle était ni qu’elle serait présente à l’événement.

Les actes que vous avez décrits, sénateur Housakos, non pas ceux du ministre, mais de l’invité, sont tout à fait inacceptables.

(1450)

Le gouvernement tient à affirmer à tous les Canadiens que les opinions exprimées par cette personne sont tout à fait inacceptables et qu’elles ne correspondent aucunement aux positions du gouvernement. Le gouvernement est déterminé à continuer de dénoncer ce genre de comportements et de condamner la haine et toutes les formes d’antisémitisme au Canada.

Le sénateur Housakos : Monsieur le leader, avec tout le respect que je vous dois, le ministre s’est fait prendre en photo avec lui, sachant très bien qu’il s’agit d’un antisémite connu. Comme je l’ai dit, sénateur Gold, ce n’est pas la première fois que l’on voit des libéraux et des ministres du gouvernement Trudeau aux côtés d’antisémites et de sympathisants terroristes.

La question que je vous pose, monsieur le leader du gouvernement, est la suivante. Si vous étiez autorisé à participer au caucus national du parti au pouvoir — ce qui devrait être le cas, étant donné que vous êtes le leader du gouvernement et que vous représentez le gouvernement dans cette enceinte —, conseilleriez-vous au caucus du gouvernement national libéral de se tenir à l’écart d’antisémites et de sympathisants terroristes bien connus?

Le sénateur Gold : Le ministre ne s’est pas sciemment associé à des antisémites connus. Je choisis mes mots avec beaucoup de soin, sénateur Housakos. Vous savez qui je suis et quelles sont mes origines. Je pense que nous devons être prudents, d’autant plus que les chefs de tous les partis se sont réunis hier pour allumer la hanoukkia, ou la menora de la Hanoukka, et exprimer leur solidarité dans la lutte que nous devons tous mener contre l’antisémitisme et toutes les formes de haine. Tous les chefs politiques, y compris le vôtre, ont parlé avec émotion et ardeur de la nécessité de faire de cette question un enjeu non partisan. Sur ce, je conclus ma réponse.

La sécurité publique

La législation sur les armes à feu

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Sénateur Gold, de façon très sournoise, le gouvernement libéral a déposé des amendements au projet de loi C-21 pour interdire des armes à feu utilisées depuis des décennies par les chasseurs canadiens, y compris les membres des communautés autochtones. À titre d’exemple, les libéraux veulent interdire la SKS, une carabine très populaire et couramment utilisée par les chasseurs autochtones. Dans une entrevue à la CBC hier, le ministre Mendicino a confirmé que le gouvernement a l’intention de bannir la SKS parce que cette arme a été utilisée — écoutez bien ce que je vais dire — durant une guerre en 1945.

Sénateur Gold, votre gouvernement a-t-il consulté les chasseurs autochtones avant de décider de leur enlever leurs carabines SKS?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Les amendements n’ont pas été présentés « sournoisement »; ils ont été apportés par un comité de l’autre endroit. En outre, le gouvernement respectera toujours les chasseurs, les tireurs sportifs, les peuples autochtones et leurs traditions. Le gouvernement ne vise pas à interdire les fusils de chasse ou les carabines.

Je sais qu’il y a confusion sur ce point, alors permettez-moi de clarifier les choses. Bon nombre des fusils de chasse mentionnés récemment dans les médias ne sont pas interdits, et cela inclut celui qui figure sur la fameuse photo d’une personnalité très connue de ma ville natale, Montréal. Il s’agit en grande partie d’un malentendu, car, par exemple, un fusil de chasse ordinaire existe aussi en version plus puissante. Ce n’est que la version plus puissante qui serait interdite en vertu des amendements apportés au projet de loi.

Cela dit, comme le premier ministre l’a clairement indiqué, lui et le gouvernement sont ouverts aux commentaires pour s’assurer que les armes à feu utilisées essentiellement pour la chasse ne sont pas visées par l’interdiction. Le projet de loi, que nous recevrons, je l’espère, et que nous aurons l’occasion d’étudier correctement et complètement comme nous l’avons toujours fait, concerne les armes à feu qui ont été utilisées lors du massacre à l’École Polytechnique, dans une mosquée de Québec et à Simcoe-Sud. Il s’agit d’un projet de loi visant à rendre nos collectivités plus sûres pour les Canadiens.

Le sénateur Plett : Évidemment, sénateur Gold, je répétais simplement ce qu’a dit le ministre Mendicino. Les conservateurs n’ont rien inventé. C’est ce qu’a dit le ministre Mendicino sur les ondes de la CBC hier.

Sénateur Gold, c’est toujours la même histoire. Que ce soit pour le projet de loi C-11, l’expansion du régime de suicide assisté et maintenant l’interdiction d’outils de chasse dont les Autochtones se servent pour assurer leur survie, le gouvernement refuse ou néglige de consulter véritablement les communautés autochtones.

Sénateur Gold, pourquoi le gouvernement ne manifeste-t-il qu’un intérêt de pure forme pour la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones? Pourquoi ne prend-il pas plus au sérieux ses responsabilités?

Le sénateur Gold : Le gouvernement prend très au sérieux ses responsabilités envers les Autochtones et relativement à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. À preuve, c’est lui qui a présenté le projet de loi à ce sujet, que la majorité des sénateurs ont appuyé, quoique pas ceux de votre groupe. Le gouvernement fait plus que manifester un intérêt de pure forme; il fait beaucoup pour faire progresser le pays sur la voie de la réconciliation en collaboration avec les partenaires et les communautés autochtones. La tâche est colossale. Elle s’échelonnera sur des générations. C’est le gouvernement actuel qui a entrepris les démarches sérieuses à cette fin.

Les transports

L’Office des transports du Canada

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Sénateur Gold, le 27 octobre, j’ai posé une question à votre collègue le ministre Alghabra au sujet de l’arriéré dans le traitement des plaintes relatives aux retards et aux annulations de vols présentées à l’Office des transports du Canada.

La réponse de votre collègue avait été la suivante :

J’ai rencontré la présidente de l’OTC récemment. Je voulais d’abord qu’elle m’informe de l’état de la situation, du nombre de plaintes et des ressources nécessaires. Le gouvernement travaille maintenant avec l’OTC pour s’assurer qu’il a les ressources dont il a besoin.

Pourtant, on pouvait lire, ce matin, dans Blacklock’s que l’arriéré de plaintes est maintenant de 30 000 et que le ministre affirme que le Cabinet « est à trouver une solution pour améliorer le système ».

Sénateur Gold, le gouvernement avance toujours à pas de tortue quand vient le temps d’offrir des services aux Canadiens. Auriez‑vous l’obligeance de nous dire ce que fait le gouvernement pour « trouver une solution » pour améliorer le système?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Comme le sait mon honorable collègue, je ne peux m’exprimer sur les discussions du Cabinet. Cependant, je peux assurer aux Canadiens que le gouvernement s’occupe de ce problème urgent du mieux qu’il le peut.

Le sénateur Plett : Sénateur Gold, j’ai posé cette question il y a 40 jours. Les Canadiens s’attendent à ce que le ministre ait déjà pris des décisions sur la façon de remédier à cette situation scandaleuse.

Ce n’est pas suffisant pour le ministre de dire que cette période a mis le réseau à rude épreuve et qu’elle a révélé certaines failles. Le leadership, ce n’est pas de rejeter la faute sur les autres et de trouver des excuses; c’est d’avoir un plan et de veiller à ce que les Canadiens obtiennent les services et l’aide qu’ils méritent, des services pour lesquels ils paient, à vrai dire.

Sénateur Gold, je vais poser de nouveau ma question : que fait le ministre des Transports? Que fait le gouvernement pour s’attaquer à cet arriéré? Quel est le plan du gouvernement pour traiter le nombre croissant de plaintes auprès de l’Office des transports du Canada?

Le sénateur Gold : Je vous remercie de vos questions. Je vais soumettre toutes ces questions au gouvernement et j’espère obtenir une réponse en temps opportun.

Les affaires étrangères

Les relations sino-canadiennes

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : J’imagine que nous devrons patienter 40 jours supplémentaires. Je poserai alors la même question en espérant ne pas obtenir la même réponse.

Dans un nouveau rapport intitulé Patrol and Persuade, Safeguard Defenders, une organisation de défense des droits de la personne qui est basée en Espagne, a découvert des dizaines de centres de services policiers chinois supplémentaires aux quatre coins du monde, dont au moins deux ici même, au Canada.

Sénateur Gold, le gouvernement nous a dit qu’il prend la situation au sérieux et qu’il fait enquête. Pourquoi donc devons-nous nous en remettre à une organisation étrangère pour savoir ce qui se passe dans notre propre pays? Le gouvernement avait-il relevé ces autres postes avant la publication de ce rapport? Si tel est le cas, pourquoi n’a-t-il pas rendu cette information publique? Plus important encore, pourquoi ces postes de police illégaux poursuivent-ils toujours leurs activités en sol canadien?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de votre question, monsieur le sénateur. Je crois avoir déjà mentionné dans cette enceinte que la GRC a confirmé avoir lancé une enquête portant sur les allégations de prétendus postes de police chinois et on m’a également informé qu’Affaires mondiales Canada a fait des démarches auprès de l’ambassadeur de Chine au Canada au sujet de ces allégations.

Je tiens à souligner, chers collègues, comme nous le savons tous, que c’est la communauté chinoise du Canada qui est souvent visée par ce genre d’ingérence. Nous travaillerons avec la communauté pour combattre cette ingérence et la protéger, ainsi que tous les Canadiens. Le gouvernement emploie tous ses outils et en utilisera de nouveaux, au besoin, pour lutter contre toute ingérence étrangère dans notre pays.

(1500)

Comme l’a dit un représentant d’Affaires mondiales Canada et comme on l’a réitéré récemment au Sénat :

Les activités alléguées [...]

 — c’est-à-dire les postes de police, chers collègues —

[...] seraient complètement illégales et tout à fait inadmissibles, et je vous assure que nous les dénoncerions très fermement.

Le sénateur Plett : Sénateur Gold, le rapport en question affirme également que la grande majorité des nouveaux postes documentés qui ont été découverts dans le monde ont été établis à partir de 2016. Le gouvernement sait-il quand ces postes ont entamé leurs activités au Canada ou ces activités sont-elles passées inaperçues pendant six ans? Je répète : pourquoi sont-ils toujours en activité au Canada?

Le sénateur Gold : Monsieur le sénateur, je ne peux pas répondre à cette question pour plusieurs raisons, la moindre n’étant pas que le moment où le Canada a été mis au courant et ce dont il a pris connaissance relève de ses services de sécurité. Tous les sénateurs comprendront que ces questions ne peuvent faire l’objet d’une divulgation publique.

La défense nationale

L’examen externe complet et indépendant

L’honorable Marilou McPhedran : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement.

Il y a plus de six mois, l’honorable Louise Arbour, dans son examen externe indépendant et complet du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes, a formulé 48 recommandations sur la façon de changer le signalement et le traitement des allégations d’inconduite sexuelle au sein des forces armées. Quelques jours après la publication du rapport Arbour en mai, la ministre de la Défense nationale, Anita Anand, a promis de faire rapport au Parlement d’ici la fin de l’année sur le plan de mise en œuvre du gouvernement.

Sénateur Gold, nous sommes maintenant le 6 décembre, une journée qui permet de se concentrer sur le continuum de la violence contre les femmes et les filles. Alors qu’il reste moins de 10 jours de séance au calendrier parlementaire, pouvez-vous indiquer au Sénat quand nous recevrons le rapport promis par la ministre Anand sur la mise en œuvre des recommandations de Mme Arbour et, en particulier, sur les recommandations qui sont rejetées par le gouvernement?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question. Je ne connais pas la date exacte, mais je rappelle au Sénat que la ministre a accueilli le rapport final de la juge Arbour dans son intégralité, qu’elle a accepté toutes ses recommandations et qu’elle s’est engagée à en mettre 17 en œuvre immédiatement.

Je vais me renseigner. Si j’obtiens une réponse avant le congé parlementaire, je serai heureux de la communiquer au Sénat.


[Français]

ORDRE DU JOUR

Projet de loi portant sur un conseil national de réconciliation

Deuxième lecture—Ajournement du débat

L’honorable Michèle Audette propose que le projet de loi C-29, Loi prévoyant la constitution d’un conseil national de réconciliation, soit lu pour la deuxième fois.

[Note de la rédaction : La sénatrice Audette s’exprime en innu.]

— Honorables sénateurs et sénatrices, j’interviens pour la première fois en 12 mois en tant que sénatrice pour vous parler du projet de loi C-29, Loi prévoyant la constitution d’un conseil national de réconciliation.

C’est une semaine lourde pour les femmes autochtones, c’est une semaine remplie d’émotions, mais également remplie d’histoire. Voilà pourquoi je trouve important que ce projet de loi puisse obtenir l’appui de mes collègues. Il s’agit d’une étape importante pour beaucoup d’entre nous partout au Canada, non seulement pour faire avancer la réconciliation, mais surtout pour renforcer le tissu social, ici au pays.

C’est aussi l’aboutissement de nombreuses années de mobilisation pour toutes sortes de gens, de groupes, d’experts, de penseurs, de philosophes, de survivants et de survivantes, pour nos gardiens du savoir et, bien sûr, pour nos communautés. Nous réclamons depuis longtemps une plus grande responsabilité; ce n’est pas nouveau. Nous réclamons aussi une plus grande responsabilité pour tous, ce qui m’inclut également. J’ai ce rôle et cette responsabilité.

À mes yeux et dans mon cœur, ce projet de loi est plus que nécessaire; c’est un pas vers la guérison et la réparation. Il nous amène à être en action; cela est important, car c’est plus que de simples mots. C’est surtout pour honorer tous ceux et celles qui sont venus parler et partager leur vérité durant les audiences de la Commission de vérité et réconciliation. C’est aussi pour les familles qui sont encore là ou qui ne le sont plus, et entre autres, pour les petits êtres de lumière qui sont partis trop tôt.

[Traduction]

Si le projet de loi C-29 est adopté, le Conseil national de réconciliation fera le suivi des progrès à long terme, il les évaluera, ce qui est très important, et il fera rapport sur la mise en œuvre des 94 appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation.

[Français]

Cela est vraiment important.

[Traduction]

Il répondra également à l’appel à l’action no 53 visant à créer ce conseil. Je pense qu’il est très important qu’il réponde aussi aux appels nos 54, 55 et 56, qui traitent du financement, des responsabilités et des accords de transparence conclus entre le gouvernement et le conseil.

[Français]

Il y a des vérités difficiles à entendre, mais il est important pour nous de continuer à les faire connaître; nous avons ce devoir.

Vous le savez, chers collègues, les premiers peuples, avant les premiers contacts avec les Européens, formaient une société souveraine possédant ses propres systèmes de gouvernance. Nous vivions selon des règles de réciprocité, d’interdépendance, et de respect avec le territoire et ce qu’il nous offre. Déjà à cette époque, cela représentait la diversité au sein des premiers peuples. Je le dis et je le répète, nos ancêtres ont accueilli ceux qu’on appelle les grands explorateurs. Nous avons partagé avec eux notre savoir, nos sciences, notre médecine et notre façon de vivre sur le territoire, mais aussi de survivre.

Les choses ont changé lorsque l’appât du gain a pris le dessus sur les relations qui existaient entre nos nations. Nous sommes passés d’une alliance économique et militaire à un statut de problèmes d’Indiens. On apprend cela plus tard, lorsqu’on devient autodidacte de notre histoire. Ce que je sais aussi, c’est que nous sommes passés de peuples accueillants, chaleureux et forts à des peuples païens, sauvages, inférieurs, fainéants et paresseux; la liste est longue.

[Traduction]

Comme tant d’autres, je suis le fruit du système des pensionnats autochtones. En effet, ma mère, Evelyne, est survivante des pensionnats autochtones. Certains de mes collègues ici, au Sénat, sont aussi des survivants de ces pensionnats. Ces pensionnats font partie de l’histoire de ma mère, de ma tante, de mes oncles et de ma belle-mère. Ils font également partie de l’histoire de mes chers collègues autochtones. D’ailleurs, ne font-ils pas partie de notre histoire à tous?

[Français]

Pendant toute mon enfance, dans mon beau Mani-Utenam, sur la belle Côte-Nord, près de Sept-Îles, j’ai normalisé les effets de la violence coloniale. Longtemps, j’ai pensé que c’était cela, notre vie, les effets des politiques destructives; c’était cela, au quotidien, qui ébranlait mes cinq sens. Savez-vous pourquoi je pensais que c’était comme cela? Parce que je ne savais pas d’où venait cette violence, cette façon d’être ou ce mal-être; je ne le savais pas. Pourtant, en vieillissant, on finit par comprendre que nous avons tous ce même petit fil qui nous relie. Puis, l’effet domino s’enclenche et on réalise qu’on nous arrache notre identité, notre langue — mon innu‑aimun —, notre relation avec le territoire et surtout, notre dignité.

(1510)

Un Atikamekw a écrit un livre; il est aussi un ancien pensionnaire. Je vais citer l’introduction de son livre, qui s’intitule Je reviens :

Mon histoire est votre histoire, nous n’avons pas à avoir honte. Nos enfants et nos petits enfants ont le droit de savoir. Enlevés de notre milieu familial, déracinés de notre culture et de nos traditions, nous avons cru que nous avions tout perdu de nos origines, si bien, que nous avons cru que ces pertes étaient profondément ancrées dans nos cœurs.

Les non-Autochtones n’ont jamais su la véritable histoire des pensionnats. Ceux qui l’ont connue n’ont jamais osé en parler.

Puis un jour, il y a eu des anciens qui ont eu assez de courage et de bravoure pour faire les dévoilements et des dénonciations pour que tout le monde sache. Je salue ceux qui ont voulu parler et pour cela, je vous remercie infiniment.

La vérité sera notre guérison.

Vous comprendrez donc que la vérité est une guérison pour moi aussi, et comprendre le passé des peuples autochtones est une guérison.

Comment changer mon sentiment de rage et de honte? Comment arrêter de normaliser ce que nous entendons dire sur nous, soit que nous sommes des « sauvages », des êtres inférieurs, des fainéants ou des paresseux? À un moment donné, la façon pour moi d’arrêter de faire cela a été de frayer mon portage douloureux de la dévictimisation vers la reconstruction. J’ai dû comprendre, me réapproprier mon histoire, l’histoire des peuples autochtones, mais surtout comprendre les causes systémiques de toute cette histoire.

Ce n’est pas à l’école qu’on me l’a enseigné; je l’ai compris par l’écoute, la lecture et les rapports des commissions d’enquête. D’ailleurs, j’ai appris, en lisant un rapport de la Commission Bagot paru en 1844, que l’on croyait alors que si l’on séparait les enfants autochtones de leurs parents, on allait assurer leur assimilation.

Plus tard, alors que j’étais présidente de Femmes autochtones du Québec, j’ai appris l’existence de l’Acte pour encourager la civilisation graduelle des tribus sauvages de 1857. On parle de nous, qui avons un savoir millénaire, et pourtant, on voulait nous assimiler graduellement, comme si nous étions incapables de faire quoi que ce soit... Cela fait mal et cela devient lourd à porter.

Plus tard, toujours grâce à cette façon d’apprendre, j’ai su qu’en 1867, le gouvernement fédéral avait assumé le contrôle des Premières Nations, et cette autorité s’étendait aussi à l’éducation des Indiens.

Tout cela est devenu officiel en 1883, quand le premier ministre John A. Macdonald a mis en place les pensionnats pour Autochtones pour régler la question des Indiens et, ainsi, « tuer l’Indien au cœur de l’enfant ».

Plus de 150 000 enfants ont été amenés de force dans ces lieux. Vous l’avez vu et entendu : nos ancêtres ont été amenés de force dans ces pensionnats, dans des lieux maudits, comme certains vont le dire, où des sévices ont été exercés sur leurs âmes, leur corps et leur façon d’être, des lieux où on était puni si on parlait nos langues vernaculaires, nos si belles langues.

Aujourd’hui, à 51 ans, comme bien d’autres personnes, je dois réapprendre notre langue.

Pourtant, en 1922, le Dr Peter Henderson Bryce a publié The Story of a National Crime, un livre exposant la négligence dont les élèves étaient victimes. J’aurais aimé savoir cela à un plus jeune âge dans mon processus. J’aurais voulu comprendre pourquoi de petits êtres de lumière ne reviendront jamais dans nos territoires, parce qu’ils ont été des cobayes pour la recherche, qu’ils sont morts de faim ou ont subi des sévices physiques, sexuels et psychologiques qui les ont fait partir trop tôt.

En même temps, ma grand-mère, ma petite nukum, m’a expliqué aussi le souvenir qu’elle garde, comme bien d’autres femmes et hommes de cette époque, et m’a dit à quel point tout cela a laissé des silences dans nos communautés. Cela a fait sombrer les aînés et les parents dans la noirceur de l’abysse et cela a brisé le lien parental; cela a brisé nos valeurs en effritant nos valeurs familiales, cela a brisé et anéanti notre relation et notre réciprocité, l’interdépendance qui existe entre une mère et ses enfants et celle qui existe entre une communauté et ses enfants, mais aussi entre parents. Tout cela est venu briser plein de choses.

Maintenant, je commence à comprendre. On a vu aussi, il y a quelques lunes de cela l’année dernière, que cela a frappé l’imaginaire de tout le monde quand on a su que de petits êtres de lumière se trouvaient dans des tombes non marquées. On a réagi, mais pour plusieurs d’entre nous, c’était quelque chose que nous avions déjà exprimé et expliqué.

Heureusement, les communautés ont fait un travail incroyable. Oui, ce travail les a fait souffrir, mais il était important de parler de la localisation et de la commémoration de ces petits êtres de lumière qui nous ont quittés pendant la période des pensionnats.

Aussi dévastatrices et difficiles ces réalités soient-elles, elles font partie de l’histoire du Canada. Nous ne pouvons pas défaire le passé, mais nous devons utiliser ces vérités pour réparer et pour faire mieux ici et maintenant, et surtout demain.

Je sais que je n’ai pas à vous convaincre de ce pan noir de l’histoire du Canada, car vous avez fait certaines choses. Rappelons-nous aussi pourquoi il est important que je vous le dise, parce qu’il y a plusieurs personnes ici, à l’autre Chambre, à d’autres endroits et dans d’autres espaces, partout au Canada et même partout sur Terre, qui viennent de ces territoires et qui se lèvent aujourd’hui, qui sont debout et qui sont les pédagogues qui nous rappellent cette histoire importante.

Tous les jours, je porte aussi dans mon cœur, comme beaucoup d’entre nous, les personnes courageuses qui sont encore vivantes; elles sont fortes, elles sont résilientes, elles ont souffert et elles continuent de souffrir. Elles nous transmettent leurs langues, leurs savoirs, leurs cérémonies, leur spiritualité et leurs connaissances. Je leur dis merci.

Les chemins de la guérison, il n’y en a pas qu’un seul; ils sont multiples, et il faut respecter ces différences et avancer au rythme de chaque personne. Ce n’est pas une solution unique qui va tout régler, mais plusieurs. Ensemble, nous pourrons en faire plus, c’est sûr.

Chers collègues, j’aimerais partager avec vous le pourquoi et le comment de ce projet de loi, qui est arrivé en juin dernier à l’autre endroit. Il y a un beau portage, quand même, et je le trouve important.

En 2019, on a créé un conseil intérimaire composé de six personnes issues des premiers peuples, soit les Métis, les Inuits et les Premières Nations. Dans ce groupe de personnes, il y a aussi un ancien commissaire, Wilton Littlechild.

On leur a donné le mandat de réfléchir, de proposer des recommandations pour ce Conseil national de réconciliation, de le nommer, d’orienter sa vision, sa mission, son mandat, sa structure et son financement et d’établir un cadre législatif de consultation qui pourrait servir de base dans les réflexions.

En plus de ce qu’ils ont fait, ils ont voyagé virtuellement dans plusieurs pays, depuis 1973 jusqu’à tout récemment, pour répertorier une trentaine de commissions de vérité et réconciliation. Ils sont allés voir ce qui se fait ailleurs. Ils sont allés voir ailleurs ce qui existe une fois que l’on termine un exercice comme celui-ci et quel type d’entité fait ce travail de reddition de comptes.

J’attire votre attention sur le fait que plusieurs entités ont été créées pour donner suite aux recommandations de ces commissions. Ces entités ont fourni divers modèles servant à les guider. Lorsqu’ils ont déposé leur rapport, ils ont même ajouté une recommandation; nous avons donc eu un mandat avec un début et une fin. Étant donné qu’on ne veut pas perdre le momentum, nous proposons d’établir un comité de transition pour s’assurer que la question reste au calendrier et à l’agenda politique et pour ne plus que cela fasse — et je le dis dans mes mots : « Pouf, on n’en entend plus parler. »

En décembre prochain, ce comité de transition verra le jour et examinera le projet de loi ou le cadre législatif, le modèle. Il consultera des gens du milieu académique : nos experts et expertes autochtones qui travaillent dans les universités, qui sont des avocats, des penseurs, des visionnaires, hommes et femmes, dans différentes régions — il y a même des artistes —, pour être sûr de faire la bonne chose de la bonne manière.

(1520)

Le comité de transition proposera des recommandations, mais exercera aussi une pression pour que le projet de loi voie le jour. Pourquoi? Parce qu’il y a beaucoup de gens qui, de leur vivant, aimeraient voir à quoi cela pourrait ressembler et comment évoluera ce conseil de la réconciliation.

Je remercie tous ceux et celles qui ont participé aux travaux depuis le début. Vous avez exercé un leadership important; je pense au conseil provisoire et au comité de transition. Vous avez joué un rôle important et, pour ce processus, je vous remercie.

Le 22 juin dernier, à l’autre endroit, le projet de loi C-29 a été déposé. Ensuite, pendant l’automne, il a passé l’étape de la deuxième lecture et a été renvoyé au Comité permanent des affaires autochtones et du Nord de la Chambre des communes le 6 octobre. Le comité a entendu 32 témoins : des individus, des organisations, des chefs, des hommes et des femmes lui ont formulé des recommandations en vue d’améliorer ce projet de loi. Un bon nombre de changements ont été apportés; on peut les voir aujourd’hui dans le contenu de cette version du projet de loi.

Honorables sénateurs et sénatrices, le projet de loi propose une structure formelle. Il s’agit d’un élément essentiel pour réaliser des progrès durables et, surtout, pour ancrer les progrès qui doivent être faits, au quotidien et à long terme, dans une culture organisationnelle, qu’elle soit politique ou gouvernementale, à travers ce grand pays.

Imaginez la situation si nous avions mis sur pied ce genre de mécanisme lorsqu’on a vécu l’expérience et l’implication de la Commission royale sur les peuples autochtones en 1996. Imaginez-le. J’étais là, moi; j’étais témoin avec mon premier fils. On pourrait faire état aujourd’hui de sa mise à œuvre 1 an, 5 ans, 10 ans, 20 ans et 30 ans plus tard.

Voilà pourquoi il est important de mettre sur pied les mécanismes nécessaires pour assurer la mise en œuvre des appels à l’action. Pour moi, c’est fondamental, afin d’améliorer, bien sûr, le mieux-être des premiers peuples, mais aussi pour rebâtir nos relations. On ne se connaît pas assez. Il y a des fossés qui existent; ils sont là et on doit rebâtir les relations parce qu’elles sont importantes.

Il faut également une reddition de comptes, et pas seulement entre nous. Il y a beaucoup de Canadiens et de Canadiennes, de Québécois et de Québécoises qui sont plus informés, mieux informés et conscientisés à nos défis, aux défis des premiers peuples. Ils méritent cela eux aussi.

J’aimerais aussi vous présenter les objectifs et les principes du projet de loi proposé. On parle de créer ce conseil, mais c’est aussi dans un espace d’organisme indépendant, apolitique, permanent et dirigé par des Autochtones.

Ce projet de loi servira aussi de cadre juridique pour le Conseil national de réconciliation. Il servira également à définir les fonctions du conseil, y compris lorsqu’il s’agit de faire le suivi des progrès sur la réconciliation et de rendre compte annuellement au Parlement et aux Canadiens et Canadiennes.

Le projet de loi servira en outre à énoncer les obligations du gouvernement fédéral pour aider le conseil à réaliser sa mission. Il vise à établir la marche à suivre pour la constitution du conseil, par exemple, pour les premiers administrateurs et administratrices, les statuts constitutifs, le rôle et les fonctions du conseil, ainsi que les obligations du conseil d’administration.

Tout cela est important, surtout d’où je viens, moi. Il faut s’assurer que, dans ce conseil d’administration, il y ait des Inuits, des membres des Premières Nations, des Métis, des aînés, des survivants et survivantes des pensionnats et leurs descendants — des gens qui ont vécu les effets des politiques discriminatoires —, des organisations autochtones; des jeunes et moins jeunes, femmes, hommes, personnes de diverses identités de genre et issus des différentes régions du Canada, y compris les régions urbaines, rurales et éloignées. Dans celles-ci, il y a des nations au Québec où les missionnaires parlaient français. On nous a imposé le français ou on a accueilli le français; aujourd’hui, on parle français, comme plusieurs nations au Québec. Dans le projet de loi, on devra aussi s’assurer que ceux et celles qui parlent le français comme première ou deuxième langue aient leur petite place dans cette grande famille.

Chers collègues, les 94 appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation du Canada constituent une voie à suivre. Ils présentent une feuille de route pour tous les ordres de gouvernement, pour la société civile, pour les établissements d’enseignement et du milieu de la santé, et pour le secteur privé.

Comme le dit si bien Mme Edith Cloutier, qui a témoigné au Comité permanent des affaires autochtones et du Nord de l’autre endroit, et je cite :

[...] la réconciliation exige des efforts collectifs et soutenus dans le temps, mais aussi la volonté de s’aventurer sur des sentiers inexplorés pour travailler ensemble. Il faut faire preuve d’innovation pour faire progresser la réconciliation, et cela repose sur la confiance et la complémentarité des personnes qui souhaitent participer à cette grande réconciliation.

Entre parenthèses, cette femme représente plusieurs réalités. Elle est Anishinabe, femme, urbaine et francophone.

Mme Cloutier poursuit son témoignage comme suit, et je cite :

La diversité est représentée ici, puisque nous sommes autant d’hommes que de femmes. Nous devons avoir confiance que nous aurons la capacité, la possibilité, la volonté et l’innovation nécessaires pour choisir un conseil d’administration représentatif des peuples autochtones du Canada.

J’ai trouvé ce témoignage beau et je devais le partager avec vous.

Cette initiative est importante et demande l’engagement de tout le monde. Il est sûr qu’on a le droit de dire « non ». On a le droit de se proposer ou d’être seulement témoin et de regarder les choses passer. Je suis la marraine de ce projet de loi, et il y a des raisons derrière cela; ce projet de loi m’amène moi aussi à m’engager à l’égard de mon passé, de notre passé. Cela m’amène aussi à m’engager pour le présent, mais surtout pour construire des choses ensemble. C’est ce qui m’emballe; il faut co-construire des choses.

Nous sommes des milliers de personnes à participer au processus de décolonisation. Permettez-moi de vous dire un petit secret : j’invente beaucoup de mots en français. Pour moi, en tant qu’Innue — et je déborde de créativité —, je m’amène souvent à dire qu’il faut « innu-i-ser » au lieu de décoloniser. Mes enfants sont aussi Wendat; peut-être qu’ils diraient : « Il faut “wendatiser”, maman », au lieu de dire « décoloniser ». Il faut faire en sorte que, pour moi, cela m’amène à « innu-i-ser » un espace, pour comprendre la véritable histoire du Canada et celle des peuples autochtones. Il y a de belles choses aussi qui méritent d’être connues.

Chaque jour, sur Facebook, Twitter — je n’ai pas de compte TikTok, mais je sais que cela existe autour de moi —, on voit dans les réseaux sociaux, dans nos relations amicales et professionnelles, la beauté des nations partout au Canada, la célébration des langues autochtones. On le voit. On voit beaucoup de jeunes qui nous rappellent que nous sommes beaux, belles, fières et fiers de nous et que nous devons honorer cela.

Je le sens, le vent de changement. Il était peut-être là auparavant, mais je le sens davantage; je sais qu’il est là. Merci au sacrifice de mes parents, de nos ancêtres, et merci de leur force. Merci beaucoup. Merci aussi, car, grâce à vous, chers collègues, avant que j’arrive ici, je vous écoutais, je regardais, je lisais, et j’ai vu qu’il y avait des gens ici qui avaient le cœur, les yeux et les oreilles ouverts, prêts à accueillir nos vérités. C’était alors moins stressant de devenir sénatrice.

J’ai entendu aussi souvent, dans cette Chambre, qu’on a une responsabilité collective. Les institutions ont, elles aussi, une responsabilité.

(1530)

[Traduction]

Il est important de surveiller continuellement la mise en œuvre de chaque appel à l’action afin de déterminer les changements structurels significatifs nécessaires pour améliorer la vie des personnes — ou, je devrais dire, la vie des personnes autochtones. La Commission de vérité et réconciliation souligne que l’éducation est fondamentale pour sensibiliser les gens à ce qui doit se produire en vue de parvenir à une véritable réconciliation.

[Français]

Je suis tout à fait d’accord avec cela. L’éducation joue un premier rôle de plan pour enrayer l’ignorance et les biais inconscients par rapport à ce qui se passe entre nous sur les Premières Nations, les Métis et les Inuits. Il y a de plus en plus d’institutions d’enseignement qui intègrent ces questions dans les programmes d’études, qui tiennent compte de l’histoire ou des histoires, des réalités et des enjeux contemporains des premiers peuples. Cela a donc un effet direct, parce que les professeurs, les infirmiers et infirmières, les professionnels des divers domaines sont mieux outillés, mieux formés et mieux informés.

Par conséquent, quand nous, sénateurs autochtones, arrivons ici, nous sommes moins sollicités par des demandes d’aide. La prochaine génération aura beaucoup d’information. Je dis merci à toutes ces institutions qui font ce travail d’enseignement. On verra de plus en plus de maisons d’édition faire des pas importants et nous donner cet espace. On pourrait aussi en encourager certaines à emboîter le pas en intégrant l’histoire des premiers peuples, par et pour les premiers peuples, dans des livres éducatifs, afin que cela ne repose pas seulement sur la volonté d’un professeur ou d’une faculté, mais que cela fasse partie de la culture organisationnelle.

On sait aussi que les municipalités, de concert avec les communautés, pourraient faire de belles choses, si ce n’est pas déjà le cas, et fournir un espace où l’on pourrait se dire les vraies choses, pour que nous puissions cohabiter et faire des choses ensemble.

Imaginez les survivants et les survivantes qui, chaque année, écouteront le gouvernement. Ils pourront entendre ce qui se passe de la bouche même de celui-ci : ce qui ne se fait pas, ce qui fonctionne, ce qui est plus difficile. Quand on sait pourquoi les choses n’ont pas progressé et qu’on nous dit la vérité, quand on nous explique pourquoi les choses n’ont pas progressé, nous sommes capables de comprendre. Par contre, quand on ne nous dit pas la vérité, c’est sûr que nous allons nous lever. Ici, je sens que cela nous permettra d’organiser tout cela.

Pour tous ceux et celles qui veulent comprendre, comme moi. J’ai besoin de comprendre, pas parce que je suis sénatrice, mais avant tout je suis une maman, une amoureuse, une kukum — une grand‑mère. Je suis aussi la fille d’Évelyne et j’ai besoin de comprendre. Le gouvernement va créer des commissions importantes. Elles nous permettront d’écrire de nouveaux chapitres, mais on ne prévoit pas de mécanisme de reddition de comptes. On vote pour créer des commissions, mais il faudrait qu’elles soient attachées à cette culture, à cette reddition de comptes. Que faire ensuite?

Pour moi, le projet de loi C-29 nous donne l’occasion de poser le premier montant du shaputuan — la grande tente des Innus — ou de faire un pas vers notre responsabilité collective. Vous vous souviendrez que j’ai mentionné dans mon discours inaugural que j’aimais beaucoup perler. J’ai réalisé qu’au Sénat, ce sera plus difficile de perler, parce qu’on y travaille fort. Cependant, il arrive parfois que je puisse prendre quelques minutes pour le faire.

Je vous demande de vous rappeler ce que je vous ai dit : par moments, je déposerai des perles sur votre chemin. Si vous êtes en mesure de les rassembler et de les prendre pour que l’on crée ensemble un projet de société juste et équitable, où chaque personne sera valorisée dans sa diversité, sa langue, sa culture, ses valeurs et son histoire, eh bien, je dépose plein de petites perles pour vous.

Honorables sénateurs et sénatrices, c’était pour moi une première expérience. Je vous remercie de m’avoir écoutée, d’avoir accueilli certaines de mes vérités ou les vérités de ceux et celles que je porte dans mon cœur. Vos questions, vos commentaires et le chemin que ce projet de loi prendra, je suis convaincue que ce sera dans le but de l’améliorer. Merci beaucoup.

Des voix : Bravo!

L’honorable Marilou McPhedran : Merci beaucoup, sénatrice Audette. Êtes-vous convaincue que le financement de ce conseil est suffisant pour assurer une durabilité à long terme?

La sénatrice Audette : Je vous remercie de votre question. À long terme? Je n’ai pas de baguette magique pour voir si c’est ce qu’il nous faut, mais je peux vous dire que l’engagement doit se faire à long terme. Le financement sera une réalité au quotidien pour cette organisation à but non lucratif. L’engagement que nous avons en ce moment, l’information que j’ai en ce moment, vise à nous rassurer sur le fait que c’est un commencement. Ce que je comprends aussi, c’est que l’organisation recevra, si ce n’est pas déjà le cas, un numéro d’organisme de bienfaisance, qui lui permettra d’obtenir du financement ailleurs qu’auprès du gouvernement fédéral.

Oui, le gouvernement fédéral devrait financer le conseil à long terme, mais l’engagement que nous avons et les chiffres que j’ai en ce moment serviront à commencer les travaux et à investir.

[Traduction]

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : J’aurais quelques questions à poser à la sénatrice Audette, si elle accepte d’y répondre.

La sénatrice Audette : Bien sûr.

La sénatrice Martin : Tout d’abord, merci pour votre discours, qui nous fait comprendre le contexte de ce projet de loi. Il a fallu beaucoup de temps pour en arriver là. Je suis vraiment heureuse que vous ayez parlé de votre expérience personnelle en plus de nous aider à comprendre le contenu du projet de loi.

Je me concentrerai sur des éléments qui ne figurent pas dans le projet de loi et sur lesquels nous pourrions nous pencher dans le cadre d’une étude et d’amendements.

Vous avez mentionné l’idée d’« innu-i-ser » un espace. Ma première question portera donc sur la représentation des Inuits. Natan Obed, président de l’organisation nationale Inuit Tapiriit Kanatami, ou ITK, s’est dit déçu du projet de loi vendredi dernier, pendant une conférence de presse. Il a dit que cette mesure pourrait donner lieu à des recommandations qui ne concorderaient absolument pas avec les positions des Inuits, puisque seulement un des 9 à 13 administrateurs sera nommé par ITK. Selon M. Obed, si on les avait consultés au début de l’élaboration du projet de loi, le résultat aurait été différent.

Je suis curieuse, madame la sénatrice. Comment répondriez-vous à ces préoccupations et à M. Obed?

[Français]

La sénatrice Audette : Je serai sincère avec vous. Je comprends cette position et cette réaction; je les comprends. Dans le meilleur des mondes, depuis que le projet de loi a été déposé à l’autre endroit, on laisse la démocratie ou le pouvoir et la discrétion à nos leaders autochtones, qui détermineront si un jour nous serons en mesure de créer quelque chose qui répond aux besoins des Inuits, plutôt que de créer de grandes entités où nous devons ensuite nous faire une place entre nous. Malheureusement, tout cela nous déchire et nous place dans des situations où l’on se demande : pourquoi lui, et pas elle?

Dans mon cœur, M. Obed a le droit de transmettre ce message. Il faut déterminer comment nous pourrons ensuite, lorsque nous en serons aux étapes de l’étude et de la réflexion, trouver quelque chose avec quoi il sera à l’aise ou non, comme leader et comme représentant des Inuits.

(1540)

Ensuite, il s’agit de se rappeler que cette organisation ne doit pas prendre la place de la relation qu’il a avec le ministre des Relations Couronne-Autochtones. Les gouvernements de nation à nation doivent rester et être maintenus, et ce conseil ne doit pas y faire ombrage. Si j’étais en mesure de faire des recommandations — cela relèvera de vous —, je dirais qu’il faudra veiller à ce que la porte soit toujours ouverte aux nations qui se retirent ou qui reviennent, et qu’il faudra respecter le fait qu’elles décident de ne plus revenir.

[Traduction]

La sénatrice Martin : À la lumière de vos conversations, pensez-vous que le gouvernement est disposé à accepter des amendements du Sénat à ce projet de loi?

[Français]

La sénatrice Audette : Dans mon cœur, officiellement, oui, il faut qu’il le soit. Si j’accepte de participer à une initiative, je ne veux pas simplement être la personne qui servira d’étampe. Si nous sommes capables d’améliorer des choses ou d’être en désaccord et qu’on nous le permet dans cette enceinte, il faut l’honorer, sénatrice Martin.

[Traduction]

La sénatrice Martin : Lors de l’étude par le comité de la Chambre des communes, de nombreux témoins ont suggéré qu’un siège soit réservé à ce conseil pour une organisation nationale spécialiste en matière de réconciliation économique, et un amendement a été proposé à cet effet. Certains témoins ont expressément demandé un tel amendement, alors que d’autres se sont contentés d’en souligner l’importance. Par exemple, Karen Restoule, PDG de la société Shared Value Solutions, et membre de la Première Nation de Dokis a déclaré :

La réconciliation économique constitue le moyen par lequel nos peuples ou nos communautés pourront retrouver le chemin de la prospérité.

Compte tenu de l’importance de la réconciliation économique, savez-vous pourquoi cet amendement n’a pas été inclus dans le projet de loi et pourquoi il a été rejeté par les libéraux et les néo‑démocrates qui siègent au comité de la Chambre des communes?

Cette phrase sur le rôle de la réconciliation économique, prononcée devant le comité, revêt une grande importance.

La sénatrice Audette : Pour être honnête avec vous, sénatrice Martin, je n’ai pas posé cette question précise, mais j’ai demandé à un membre du comité pourquoi la décision a été prise, qui l’a prise et quel processus a été suivi.

Pour l’instant, je crois comprendre que le conseil d’administration est une chose, mais que l’activité, le chantier, la réconciliation en matière de justice, de droits de la personne et d’économie sont tous des enjeux importants, ce qui me rassure.

On m’a dit qu’il sera très dynamique et investi si le conseil est officiellement approuvé et constitué.

L’honorable Ratna Omidvar : L’honorable sénatrice Audette accepterait-elle de répondre à une question?

[Français]

La sénatrice Audette : Oui, bien sûr.

[Traduction]

La sénatrice Omidvar : Je vous remercie d’avoir parrainé le projet de loi, de l’avoir expliqué et, surtout, de vous être investie de manière très personnelle dans cette histoire. Je l’apprécie vraiment et j’appuie évidemment la création d’un conseil national de réconciliation.

Ma question fait suite à celle qui a été posée par la sénatrice McPhedran. Je dois avouer que j’ai maintenant des réserves au sujet du financement d’un conseil national de réconciliation. Vous avez dit que cet organisme cherchera à se faire accorder le statut d’organisme de bienfaisance et à obtenir des fonds d’organismes de bienfaisance pour compléter son financement.

De nombreux Canadiens, en particulier les membres des communautés autochtones, estiment maintenant que les dons de charité au Canada découlent de la mentalité coloniale. Si le conseil s’engage à obtenir des fonds caritatifs, il pourrait essentiellement s’engager dans une voie coloniale.

Ne pensez-vous pas qu’il est important que le gouvernement fédéral finance pleinement le Conseil national de réconciliation et s’engage à le faire dans ce projet de loi?

La sénatrice Audette : J’ai posé la question, sénatrice Omidvar. Je pensais que cela passerait par un organe semblable à la Commission de vérité et réconciliation, par exemple.

En ayant pour interlocuteur non pas le gouvernement, mais les intervenants concernés, le Conseil national de réconciliation souhaite maintenant s’assurer de ne pas être rattaché officiellement au gouvernement fédéral afin de conserver son indépendance, tout en sachant que le financement pourra être maintenu ou qu’il pourra progressivement diminuer ou augmenter. C’est quelque chose dont ils étaient conscients lorsque ces discussions ont eu lieu.

C’est une question que nous pouvons poser, mais c’est ce qui m’a été expliqué. Je vais terminer en français pour m’assurer d’être bien comprise.

[Français]

L’important, c’est qu’il y a d’autres groupes que les Premières Nations, les Métis et les Inuits ou des groupes en particulier de leaders autochtones, par exemple. Ils ont déjà entamé des pourparlers pour avoir des entités formelles de relations avec le gouvernement fédéral, pour prévoir un tribunal sur les droits de la personne pour les Premières Nations, les Métis et les Inuits, un espace où un ombudsman puisse répondre. Cet exercice s’adresse à une organisation à but non lucratif, qui est le Centre national de réconciliation, mais il y a déjà des pourparlers qui sont engagés ailleurs et il y a une relation directe avec le gouvernement fédéral.

Je vois que vous grimacez. Je ne crois pas avoir été comprise. Je serai heureuse de mieux vous expliquer mes propos.

[Traduction]

La sénatrice Omidvar : Merci de m’avoir expliqué la démarche suivie pour la création du Conseil national de réconciliation. Si je puis me permettre de faire une suggestion, la question du financement et de l’indépendance doit être sérieusement étudiée par le comité. Par le passé, des institutions ont été mises sur pied par le gouvernement fédéral, puis abandonnées en raison du manque de financement et parce que l’on comptait sur les organismes de bienfaisance pour s’en charger. Les ombudsmans et les tribunaux administratifs ne sont pas financés par des organismes de bienfaisance, mais bien par les gouvernements.

Je vous remercie, sénatrice Audette, d’avoir répondu à ma question.

L’honorable Percy E. Downe : Merci, sénatrice Audette, de votre beau discours, que j’ai apprécié énormément.

Je tiens à vous signaler que le Native Council of Prince Edward Island a exprimé plusieurs préoccupations et que la représentation fait aussi partie de celles-ci. Il représente 1 244 membres, ainsi que 3 385 Autochtones qui habitent hors des réserves de l’Île-du-Prince-Édouard. Il partage les mêmes préoccupations que d’autres ont exprimées.

Il veut s’assurer que tous les groupes intéressés soient représentés. Je voulais simplement vous le dire. C’est plus qu’une question. La question serait la suivante : êtes-vous d’accord ou prendrez-vous cette question en délibéré? Il ne nous reste que quelques secondes.

[Français]

La sénatrice Audette : Je vous réponds en quelques secondes. Je veux croire que les gens qui seront proposés pour siéger à ce nouveau conseil d’administration auront une connaissance, une expertise et un savoir qui serviront l’ensemble des gens partout au Canada. C’est la confiance que j’ai en ce moment.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

(1550)

Projet de loi sur le Mois du patrimoine libanais

Troisième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Cordy, appuyée par l’honorable sénateur Dalphond, tendant à la troisième lecture du projet de loi S-246, Loi instituant le Mois du patrimoine libanais.

L’honorable Pierrette Ringuette : Honorables sénateurs, je dois vous avouer que, après avoir entendu l’excellent discours de la sénatrice Audette, je suis un peu gênée de prendre la parole. Toutefois, je tenais à vous parler de ce que je considère comme un événement personnel qui contribue à la discussion sur ce projet de loi concernant le Mois du patrimoine libanais.

Effectivement, dans notre petite région rurale du nord-ouest du Nouveau-Brunswick, nous avons une famille de Libanais. Ils sont des entrepreneurs, mais surtout des gens dévoués à la communauté, des bénévoles à l’église et membres de toutes les organisations culturelles. Ils seront toujours dans ma mémoire.

Par contre, je veux rappeler aujourd’hui à certains d’entre vous — à plusieurs d’entre vous qui n’étiez pas ici il y a 10 ans — un événement qui concerne un producteur de pommes de terre de ma grande région du nord-ouest du Nouveau-Brunswick.

[Traduction]

Ce producteur de pommes de terre s’appelait Henk Tepper. Il a été emprisonné au Liban il y a 10 ans après exécution d’une demande d’extradition du gouvernement d’Algérie pour la prétendue expédition de pommes de terre avariées, qui avaient été vendues un mois plus tard à la Syrie. Nous n’avons jamais eu vent de Syriens qui seraient morts après avoir consommé ces pommes de terre du Nouveau-Brunswick.

Cependant, depuis le mois de mai, lorsque la famille de M. Tepper est venue chez moi pour me demander de l’aider à trouver une façon de le faire rentrer au Canada, je me suis lancée dans une aventure qui m’a présenté plus de défis — personnels et politiques — que j’aurais pensé rencontrer dans toute ma vie. D’ailleurs, après dix mois, je ne dormais presque plus, parce que je n’arrêtais pas de me demander : que pourrais-je faire? Qu’est-ce que j’ai manqué? Que dois-je faire maintenant?

Le problème était que M. Tepper se trouvait dans une prison au Liban. Même si beaucoup de mes collègues sénateurs et moi avions exposé la situation à la ministre des Affaires étrangères et à son cabinet, de mon point de vue, aucune aide concrète n’avait été apportée à M. Tepper pendant qu’il était emprisonné au Liban. Il n’y avait pas grand chose à faire de ce côté-là.

Nous avons également fait des démarches auprès du gouvernement de l’Algérie pour tenter de voir si nous pourrions lui fournir des preuves que les pommes de terre n’étaient pas pourries. Ces démarches n’ont mené nulle part elles non plus. J’ai appelé le sénateur algérien responsable de l’agriculture, mais il s’est avéré que son neveu était le ministre de l’Agriculture. Cela a piqué ma curiosité, alors j’ai fait des recherches sur tout ce qui s’est passé dans le domaine de l’agriculture en Algérie l’année qui a précédé l’incident. J’ai découvert dans la presse algérienne la notion d’un consortium des cultivateurs de pomme de terre en Algérie. J’étais donc de nouveau dans une impasse.

La seule option que nous avions était de donner au gouvernement du Liban toutes les preuves que nous pouvions trouver. Nous avons réussi à les livrer au premier ministre, au ministre de la Justice, au procureur général ainsi qu’à quelques juges qui comprenaient cette affaire. Ces démarches ont commencé en mai et se sont poursuivies jusqu’en décembre, lorsque l’avocat de M. Tepper au Nouveau‑Brunswick et moi sommes allés au Liban. À notre arrivée, l’ambassade canadienne nous a fait savoir que nous devions quitter le Liban, que nous n’avions rien à faire là.

Ceux d’entre vous qui me connaissent savent certainement que je suis plus déterminée et persévérante que cela. Le lendemain, nous avons donc rendu visite à M. Tepper dans sa prison. Bon sang, ce n’était certainement pas le géant jovial que j’avais connu l’année précédente. Toutefois, grâce à nos efforts, nous avons passé cinq jours à rencontrer des ministres, dont le ministre du Tourisme de l’époque, qui avait la double citoyenneté. C’était aussi un Canadien de Montréal.

Chers collègues, sans la relation très étroite et le respect mutuel entre les Canadiens et les Libanais, qui comprennent et partagent nos valeurs, M. Tepper aurait été envoyé en Algérie et on ne l’aurait jamais revu.

Deux mois après notre visite à toutes ces autorités libanaises, on a rendu à M. Tepper son passeport canadien et on l’a mis dans un avion pour le renvoyer au Canada. Telle est mon expérience avec la communauté libanaise : nos valeurs et notre amitié nous unissent.

Je suis très reconnaissante envers la sénatrice Cordy d’avoir présenté ce projet de loi. J’espère que son adoption sera rapide. Chers collègues, ne retardez pas son adoption pour le plaisir de faire traîner les choses en longueur. Cela ne donne rien au bout du compte.

Je serai extrêmement reconnaissante si nous pouvions adopter le projet de loi avant Noël, et je ne serai pas la seule. Tous les habitants de la région du nord-ouest du Nouveau-Brunswick voulaient le rapatriement de leur producteur de pommes de terre local. Si leur souhait a été exaucé, c’est grâce à l’amitié que les autorités libanaises entretiennent avec notre pays. Je désire que ce projet de loi soit adopté avant Noël, en signe de bonne volonté pour ce geste profondément altruiste qu’elles ont posé en vue d’aider un producteur canadien de pommes de terre. Adoptons ce projet de loi avant Noël. Merci.

Des voix : Bravo!

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

(1600)

[Français]

La Loi constitutionnelle de 1867
La Loi sur le Parlement du Canada

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat

À l’appel des autres affaires, projets de loi d’intérêt public du Sénat, deuxième lecture, article no 6 :

Deuxième lecture du projet de loi S-226, Loi modifiant la Loi constitutionnelle de 1867 et la Loi sur le Parlement du Canada (présidence du Sénat).

L’honorable Pierre J. Dalphond : Honorables sénateurs, je constate que cet article en est au 15e jour. Par conséquent, avec le consentement du Sénat, je demande que l’étude de cet article soit reportée à la prochaine séance du Sénat.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(Le débat est reporté à la prochaine séance du Sénat.)

[Traduction]

La Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999)

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Carignan, c.p., appuyée par l’honorable sénatrice Seidman, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-234, Loi modifiant la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999) (élimination définitive de déchets plastiques).

(Sur la motion de la sénatrice Clement, le débat est ajourné.)

Le Code criminel

Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Kutcher, appuyée par l’honorable sénateur Boehm, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-251, Loi abrogeant l’article 43 du Code criminel (appel à l’action numéro 6 de la Commission de vérité et réconciliation du Canada).

L’honorable Marty Klyne : Honorables sénateurs, je prends la parole pour appuyer le projet de loi S-251, Loi abrogeant l’article 43 du Code criminel (appel à l’action numéro 6 de la Commission de vérité et réconciliation du Canada). Le projet de loi propose d’abroger la disposition qui autorise le recours aux châtiments corporels pour corriger un enfant au Canada.

Aujourd’hui, j’ajouterai les éléments suivants à notre débat : des renseignements additionnels sur le motif de la Commission de vérité et réconciliation justifiant cette modification, quelques observations sur des détails de politique et des réflexions sur le rôle du Sénat pour donner suite à cet appel à l’action.

D’abord, je remercie le parrain, le sénateur Kutcher, d’avoir défendu cette mesure législative visant à donner suite à l’appel à l’action no 6. Votre savoir et votre compassion en tant que psychiatre de renom permettent d’espérer que nous réussirons enfin à abroger l’article 43. Cette modification fera progresser la réconciliation et profitera aux enfants de partout au Canada.

Le sénateur Kutcher a livré un plaidoyer complet pour l’adoption de ce projet de loi fondé sur des données probantes. Comme il l’a notamment indiqué, les recherches scientifiques montrent que la pratique de frapper les enfants pour les discipliner — ce qui inclut la fessée — augmente le risque qu’ils deviennent agressifs et qu’ils développent des problèmes de santé mentale.

Le sénateur Kutcher nous a dit que, en adoptant le projet de loi et en faisant la promotion de mesures de soutien pour les parents, nous pouvons protéger les enfants contre cette forme de violence en plus d’aider les parents canadiens à apprendre et à appliquer des pratiques éducatives efficaces et beaucoup moins dommageables.

Nous avons aussi appris que le projet de loi S-251 permettra au Canada de rejoindre les rangs de 63 autres pays ayant adopté des lois interdisant les châtiments corporels infligés aux enfants dans toutes les circonstances.

En adoptant ce projet de loi, le Canada respecterait ses engagements internationaux sur le plan juridique relativement à la Convention des Nations unies relatives aux droits de l’enfant, que notre pays a ratifiée en 1991.

Dans son discours, la sénatrice Moodie, une pédiatre de renom, a soutenu le projet de loi S-251. Elle a présenté des témoignages d’experts et des expériences internationales portant sur le sujet. Elle a fait remarquer que dans les pays ayant interdit les châtiments corporels contre les enfants — notamment la Suède, l’Allemagne et la Nouvelle-Zélande —, les interdictions ont entraîné une baisse importante des signalements de cette pratique. En Allemagne et en Finlande, par exemple, cette baisse a atteint près de 50 %.

La sénatrice Moodie a souligné que ces pays conviennent qu’il faut sensibiliser le public et offrir des mesures de soutien adéquates aux familles en plus d’interdire les châtiments corporels. Il s’agit d’un point qui requiert l’attention du Parlement et du gouvernement. J’espère qu’un comité du Sénat pourra examiner ce projet de loi, peut-être en émettant des recommandations pour accompagner à l’abrogation de l’article 43.

Chers collègues, on peut résumer le projet de loi S-251 en trois mots : chaque enfant compte. Il s’agit d’un principe que la société canadienne apprend et s’efforce de respecter.

Dans les médias, nous avons tous été témoins de la vérité de l’histoire de notre pays dans des endroits comme Kamloops, la Première Nation de Cowessess, Cranbrook, l’île Penelakut, la nation crie de Saddle Lake, la Première Nation de Williams Lake et la Première Nation de Keeseekoose. Nous gardons dans nos cœurs les milliers d’enfants qui ne sont jamais revenus des pensionnats et les survivants qui ont été marqués à vie.

Nous les garderons toujours dans nos cœurs.

Les punitions corporelles constituaient une partie importante de la vie dans ces établissements. Les expériences des formes coloniales de discipline ont traumatisé les Autochtones du Canada et elles ont contribué à bâtir un héritage de préjudices multigénérationnels.

Nous savons que l’article 43 du Code criminel est lié aux valeurs des premiers jours de l’ère des pensionnats. Comme le sénateur Kutcher nous l’a dit :

L’article 43 est un anachronisme, un vestige archaïque de lois rédigées en 1892 qui autorisaient le recours à la punition corporelle contre les employés, les épouses et les enfants.

Honorables sénateurs, j’aimerais citer deux extraits du rapport final de la Commission de vérité et réconciliation, afin d’éclairer notre débat d’un point de vue historique. Dans le volume 4, intitulé Enfants disparus et lieux de sépulture non marqués, un passage explique le choc culturel subi par les Autochtones qui ont été soumis à des punitions corporelles :

Les Églises et les ordres religieux qui administrent les pensionnats du Canada ont de solides conceptions imbriquées de l’ordre, de la discipline, de l’obéissance et du péché. Ils croient que les êtres humains sont des créatures déchues et pécheresses qui doivent mériter leur salut en obéissant à Dieu pour maîtriser leur nature. L’approche de la discipline qu’utilisent les pensionnats repose sur les textes sacrés : le châtiment corporel est une façon autorisée par la Bible de maintenir l’ordre, mais également de mettre les enfants sur le droit chemin. Le recours au châtiment corporel infligé par les dirigeants religieux recueille le soutien des pédagogues bureaucrates du XIXe siècle comme Egerton Ryerson, qui croit que l’opposition au châtiment corporel est « contraire aux Écritures ».

Le rapport dit également ceci :

Cependant, historiquement, le châtiment corporel n’est pas aussi acceptable chez les peuples autochtones. Le grand nombre de plaintes de parents, combinées à la difficulté constante des écoles à recruter des élèves, montre les occasions où la discipline imposée par les écoles dépasse ce qui serait acceptable dans les collectivités européennes ou autochtones.

Les élèves sont punis parce qu’ils n’ont pas terminé leurs leçons, parce qu’ils mouillent leur lit, parce qu’ils parlent sans y être autorisés, parce qu’ils lancent des pierres sur la clôture du pensionnat, parce qu’ils agissent de façon immorale, parce qu’ils refusent de manger leur repas, parce qu’ils parlent leur propre langue, parce qu’ils négligent leurs corvées et parce qu’ils volent (souvent de la nourriture).

(1610)

Dans le volume 5, Les séquelles, on apprend comment les punitions infligées par les colonialistes étaient contraires à l’éducation traditionnelle des Inuits :

L’art parental traditionnel repose sur les liens de parenté, et sur les croyances culturelles et spirituelles. Les Inuits croient qu’un nouveau-né à qui on donne le nom d’un parent défunt prend possession de l’âme ou l’esprit de ce défunt, et que la relation des parents avec l’enfant s’en ressent. Selon Pauktuutit, l’association nationale des femmes inuites, il « serait jugé inconvenant [...] de donner des ordres à un enfant, car cela reviendrait à donner des ordres à un aîné ou à un autre adulte, brisant ainsi une importante règle sociale de la culture inuite ».

L’ignorance de cet aspect de la culture inuite a incité bien des non-Autochtones, notamment des administrateurs de pensionnats et des agents de protection de l’enfance, à porter des jugements entachés de préjugés culturels. Les parents inuits leur paraissaient souvent laxistes à l’extrême et peu enclins à la discipline. Dans les pensionnats, au contraire, les enseignants s’efforçaient de maîtriser le comportement de l’enfant au moyen du châtiment corporel et d’autres mesures disciplinaires rudes, peu au goût des parents inuits.

Honorables sénateurs, la Commission de vérité et réconciliation recommande l’abrogation de l’article 43 avec l’appel à l’action no 6, comme l’a souligné le sénateur Kutcher :

La Commission croit que les châtiments corporels sont des reliques d’un passé révolu qui n’ont plus leur place dans les écoles et les foyers canadiens.

En abrogeant l’article 43 pour répondre à l’appel à l’action no 6, nous pouvons condamner les punitions corporelles étrangères à la culture ancestrale des Autochtones qui ont été infligées historiquement à leurs enfants par les autorités coloniales. Une telle décision du Parlement constituerait un geste important pour la réconciliation — après les excuses unanimes présentées par le Sénat le 29 septembre dernier, au moyen d’une motion de la sénatrice McCallum, pour le rôle du gouvernement du Canada dans le système des pensionnats autochtones.

Par ailleurs, en adoptant le projet de loi S-251, le Parlement fédéral veillerait à protéger tous les enfants du Canada contre la peur, la douleur et l’humiliation des punitions corporelles. Un rôle clé du Sénat est de protéger les personnes vulnérables dans notre pays et il est temps d’agir.

J’aimerais ajouter quelques observations judicieuses, du moins je l’espère, sur les aspects juridiques : en 2004, la Cour suprême du Canada a conclu à la constitutionnalité de l’article 43, en précisant qu’elle interprète l’article comme une restriction sur les formes de punitions corporelles acceptables envers les enfants. La Cour suprême a déclaré que l’article 43 ne permet d’employer qu’« une force légère — ou ayant un effet transitoire et insignifiant. » De telles punitions ne peuvent être utilisées que sur des enfants de 2 à 12 ans. Les enseignants peuvent employer une force raisonnable pour expulser un enfant de la salle de classe. Cependant, la loi interdit de frapper ou de gifler un enfant au visage où à la tête, d’utiliser un objet pour frapper un enfant, et d’infliger une punition corporelle sous l’effet de la colère ou sur un enfant ayant une déficience cognitive.

Pendant le débat, le sénateur Plett a dit craindre que l’abrogation de l’article 43 puisse rendre criminel le fait de prendre un enfant qui pique une crise de colère et de l’asseoir dans un siège d’auto ou ailleurs dans la voiture. Je réagis à ces préoccupations avec un optimisme fondé sur le sens commun. Je ne voudrais pas criminaliser le geste que le sénateur Plett décrit, qui m’apparaît être un geste acceptable de la part de parents. D’après ce que je comprends, l’abrogation de l’article 43 vise plutôt à éliminer l’usage de la force à des fins de correction. Ainsi, le projet de loi interdirait la fessée et d’autres gestes semblables qui visent à influencer le comportement de l’enfant par un emploi négatif de la force associé à la peur, à la douleur ou à l’embarras.

Le projet de loi S-251 n’a pas pour but de criminaliser l’emploi accessoire de la force par des parents ou des enseignants qui cherchent à s’acquitter de leurs responsabilités légitimes, par exemple à assurer le transport sécuritaire d’un enfant. Selon moi, les exemples présentés pendant le débat appartiennent à cette dernière catégorie; ils ne décrivent pas un usage de la force qui serait punitif ou dissuasif.

En 2017, pendant le débat sur le projet de loi S-206 — la dernière version de la mesure à l’étude — son nouveau parrain, le sénateur Sinclair, a fourni les précisions que voici :

[...] nous ne devons pas oublier que les contacts physiques mineurs ne sont de toute façon pas criminalisés, en vertu du principe dit de minimis. Si une infraction est à ce point mineure, elle ne mérite pas l’attention du droit criminel ni une sanction.

La loi reconnaît également que certains recours à la force sont socialement et légalement acceptables. Pour attirer l’attention de quelqu’un, par exemple, il faut parfois toucher cette personne à l’épaule ou au bras. Un match de boxe ou une mise en échec au hockey ne sont pas des agressions, car il y a consentement. Le contact physique accidentel n’est pas illégal, pas plus que l’usage d’une force raisonnable pour se défendre ou se protéger ou pour défendre ou protéger une autre personne, voire un bien.

L’article 43 prévoit que, si on agresse un enfant à des fins de correction de son comportement, on peut avoir une défense particulière si on fait usage d’une force raisonnable. La société commence à accepter qu’aucun degré de force n’est raisonnable.

Chers collègues, il me semble qu’il faudrait se pencher sur des préoccupations d’ordre pratique au comité, qui pourrait émettre des observations ou même proposer un amendement afin d’établir avec davantage de certitude dans le Code criminel ce qui est ou n’est pas permis tout en abrogeant l’article 43. Par contre, cette abrogation est nécessaire afin d’éliminer les impositions négatives de force que nous voulons cibler, comme la fessée, qui est actuellement permise par l’article 43. Un comité devrait entreprendre un tel effort constructif afin que le Sénat ne propose pas une loi qui irait à l’encontre du bon sens tout en interdisant les châtiments corporels contre les enfants. Je recommande donc le renvoi rapide du projet de loi S-251 au comité, comme le Sénat l’avait fait avec le projet de loi S-206 en 2018.

Je veux maintenant parler du rôle du Sénat dans la réponse à cet appel à l’action. Sur le plan législatif, l’appel à l’action no 6 est peut-être celui auquel il est le plus simple de répondre. Avec la Chambre des communes, le Sénat est l’un des deux organes ayant un pouvoir de décision et une responsabilité en la matière. Nous sommes aux commandes — et si nous n’agissons pas, personne ne le pourra.

Ces dernières années, le Sénat a obtenu des résultats en répondant aux appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation : nous avons adopté des projets de loi visant à protéger et à raviver les langues autochtones, à rétablir la compétence autochtone en matière de services à l’enfance et à la famille, à faire respecter la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, à instaurer la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation et à réaliser un nouveau serment de citoyenneté.

Nous avons également reçu — de l’autre endroit — le projet de loi C-29, un projet de loi émanant du gouvernement parrainé par la sénatrice Audette, qui vise à établir un conseil national de réconciliation, répondant ainsi aux appels à l’action no 53 à 56. De nombreux sénateurs ont exprimé leur détermination à en faire plus. Je souhaite en faire plus. Le projet de loi S-251 nous en donne l’occasion. Montrons au Canada et au monde entier que chaque enfant compte. Merci. Hiy kitatamihin.

Des voix : Bravo!

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

(1620)

La Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat

L’honorable Victor Oh propose que le projet de loi C-242, Loi modifiant la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (visas de résident temporaire pour les parents et les grands-parents), soit lu pour la deuxième fois.

 — Honorables sénateurs, j’interviens aujourd’hui à titre de parrain du projet de loi C-242, Loi modifiant la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (visas de résident temporaire pour les parents et les grands-parents), présenté à la Chambre des communes par M. Kyle Seeback, député de Dufferin-Caledon.

J’ai le privilège d’appuyer une mesure législative qui ferait avancer les droits en matière de réunification familiale, notamment des parents et des grands-parents avec des enfants et petits-enfants qui sont citoyens canadiens ou résidents permanents au Canada.

Le projet de loi C-242 vise à modifier la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés en ce qui concerne le super visa introduit par le gouvernement conservateur en 2011. À l’heure actuelle, il s’agit d’un visa de 10 ans autorisant des entrées multiples et permettant aux grands-parents et aux parents de se réunir avec leurs enfants et leurs petits-enfants qui se trouvent au Canada.

L’approbation d’une demande de super visa présuppose que le demandeur a reçu une invitation écrite officielle à venir au Canada, signée par un enfant ou un petit-enfant. Le signataire de cette lettre doit être en mesure de prouver qu’il a la capacité financière de subvenir aux besoins du demandeur pendant la durée du séjour de ce dernier.

Le demandeur doit également répondre à des critères d’admissibilité médicaux dans le cadre d’un examen médical et avoir souscrit une assurance médicale privée auprès d’une compagnie d’assurance canadienne. Cette assurance doit offrir une protection en cas d’urgence d’au moins 100 000 $ et être valable pour une année à compter de la date d’entrée au Canada. Une preuve du paiement intégral de cette assurance est également exigée.

Le projet de loi C-242 apporte deux modifications concernant le super visa à la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. La première modification vise à permettre aux demandeurs d’acheter une assurance-maladie d’une compagnie située à l’extérieur du Canada. Notons que ces compagnies devront être approuvées au préalable par le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté. Cette mesure permettrait d’accroître la concurrence entre les compagnies d’assurance canadiennes et étrangères, ce qui réduirait le prix des primes.

L’une des raisons pour lesquelles il est important de réduire ces prix est le fait que le coût de l’assurance-maladie privée peut être élevé, surtout pour les personnes à faible revenu. Ce coût s’ajoute aux frais de demande du super visa, au coût des billets d’avion, aux frais d’examen médical et à d’autres dépenses. Ensemble, ces coûts pourraient empêcher des parents et des grands-parents de retrouver leurs enfants et petits-enfants ici au Canada.

Il est important de souligner que pour être admissibles au super visa, les demandeurs doivent se soumettre à un examen médical. Les demandeurs auront subi cet examen et prouvé qu’ils n’ont pas de problèmes de santé préexistants, de problèmes majeurs ou de préoccupations qui pourraient imposer un fardeau au système de santé canadien.

J’aimerais également souligner que le projet de loi réduit la possibilité que la compagnie d’assurance étrangère ne paie pas le système de santé canadien ou le fournisseur de soins de santé canadien en exigeant que le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté approuve la police d’assurance-maladie avant que le super visa soit approuvé. Cette mesure atténuera considérablement le risque de réclamations non payées.

En outre, cette modification diminuerait le coût de l’assurance pour les personnes qui tentent de se prévaloir du super visa, et la mesure de sauvegarde proposée protégerait le système de soins de santé du Canada et ses fournisseurs de soins en cas de réclamation impayée.

La deuxième modification proposée vise à faire passer de deux à cinq ans, échelonnés sur 10 ans, la période de séjour au Canada autorisée pour un grand-parent ou un parent.

Je me dois de mentionner un changement récent. Toute personne ayant présenté une demande le 4 juillet 2022 ou ultérieurement peut être admissible à séjourner au Canada cinq ans à la fois. De plus, certaines personnes pourraient être admissibles à un séjour de cinq ans si elles ont présenté leur demande avant le 4 juillet, mais ne sont arrivées au Canada qu’après cette date. Pour ce qui est des personnes ayant reçu leur visa ou étant entrées au Canada avant le 4 juillet, leur période de séjour autorisée demeure de deux ans. Cette modification visant à faire passer en permanence à cinq ans la période de séjour autorisée est importante pour que toutes les personnes qui présentent une demande dans le futur puissent jouir de cet avantage.

La modification permettrait à un parent ou grand-parent de passer plus de temps avec sa famille sans avoir à se soucier de l’obligation de quitter le Canada aussi fréquemment. De plus, cela permettrait au grand-parent d’économiser en lui évitant de devoir acheter un billet d’avion pour quitter le Canada. Ainsi, il pourra plutôt consacrer cet argent à sa famille. Encore là, cette considération est d’autant plus importante quand on pense aux personnes à revenu inférieur qui visitent le Canada ou qui y habitent.

Une autre amélioration prévue dans le projet de loi consiste à exiger que le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté prépare un rapport sur la réduction du revenu minimum que doit toucher l’enfant ou le petit-enfant d’un ressortissant étranger pour que la demande de super visa de ce dernier soit approuvée.

Je crois fortement que cet élément mérite un examen attentif de notre part, étant donné les répercussions possibles sur de nombreuses familles néo-canadiennes. Comme vous le savez sans doute, il n’est pas rare que les familles de nouveaux immigrants connaissent des difficultés lorsqu’ils arrivent au Canada. Peut-être que le salaire des emplois pour lesquels ils sont qualifiés n’est pas suffisant, ou que les titres de compétence de leur pays d’origine ne sont pas acceptés et qu’ils doivent accepter un emploi moins bien rémunéré. Peu importe la raison, de nombreuses familles d’immigrants ne peuvent pas demander un super visa parce qu’elles ne répondent pas au critère du revenu minimal.

(1630)

Certains pourraient dire que les grands-parents ou les parents ne contribueraient pas à l’économie canadienne. Or, les grands-parents soutiennent l’économie en aidant les familles et en permettant aux parents canadiens de travailler. Dans bien des cas, les familles qui parrainent leurs parents ou leurs grands-parents pour l’obtention du super visa sont sur le marché du travail au Canada ou ont leur propre entreprise familiale. Si on fait venir les parents ou les grands-parents au Canada, ceux-ci peuvent surveiller les enfants pendant que les parents sont au travail. Les grands-parents peuvent même aider directement l’entreprise familiale.

Les parents peuvent ainsi continuer de contribuer à l’économie canadienne grâce à ce soutien supplémentaire. Par ailleurs, des parents qui, autrement, n’auraient pas les moyens de payer des services de garde et ne pourraient donc pas travailler pourraient confier la garde de leurs enfants aux grands-parents pour aller travailler.

Voici ce que dit le rapport d’étude de Madine VanderPlaat, Howard Ramos et Yoko Yoshida, intitulé What do Sponsored Parents and Grandparents Contribute? :

[E]n plus de contribuer au bien-être de la personne, la famille est bénéfique pour l’ensemble de la société parce qu’elle permet de tisser des liens et des réseaux de soutien et de faciliter le processus d’établissement et d’intégration. En fournissant des services de garde et/ou de la main-d’œuvre aux entreprises familiales, les parents et/ou grands-parents parrainés peuvent contribuer au bien-être économique général de la famille et favoriser les études et les activités professionnelles des autres membres de la famille. […] De plus, la possibilité de parrainer des parents peut constituer un élément important pour attirer les immigrants et les inciter à rester.

Chers collègues, le projet de loi C-242 est important pour notre pays et pour les Canadiens qui ont des membres de leur famille partout dans le monde. S’il est adopté, ce projet de loi réduira les obstacles à la réunification des familles et permettra aux Canadiens de bénéficier du soutien de leur famille tout en contribuant plus activement à l’économie canadienne.

Les avantages de ce projet de loi sont importants pour ces familles. C’est pourquoi je prends la parole aujourd’hui pour appuyer le projet de loi C-242. Je vous invite à en faire de même.

Je vous remercie.

(Sur la motion de la sénatrice Omidvar, le débat est ajourné.)

[Français]

Les défis et possibilités auxquels font face les municipalités canadiennes

Interpellation—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l’interpellation de l’honorable sénatrice Simons, attirant l’attention du Sénat sur les défis et possibilités auxquels font face les municipalités canadiennes, et sur l’importance de comprendre et de redéfinir les relations entre les municipalités du Canada et le gouvernement fédéral.

L’honorable René Cormier : Honorables sénatrices et sénateurs, Périclès, un homme politique de la Grèce antique né vers 495 avant notre ère, affirmait, et je cite : « Toutes les bonnes choses de ce monde affluent dans la cité en raison de la grandeur de la cité. »

Cet homme d’État a sans doute offert à la capitale grecque, Athènes, sa période la plus éclatante. En plus du soutien qu’il a apporté aux arts, à l’architecture, à la philosophie et à l’instauration de la démocratie, il possédait une vision dont nous pouvons sans doute nous inspirer aujourd’hui.

C’est avec cette pensée en tête que je prends la parole au sujet de l’interpellation de la sénatrice Paula Simons, attirant l’attention de cette Chambre sur les défis et possibilités auxquels font face les municipalités canadiennes, et sur l’importance de comprendre et de redéfinir les relations entre les municipalités et le gouvernement fédéral.

Je tiens d’abord à reconnaître que nous sommes situés sur les territoires non cédés de la nation algonquine anishinabe, un endroit où plusieurs municipalités sont nées.

Chers collègues, nous sommes tous conscients que les municipalités canadiennes font actuellement face à de nombreux défis, qu’ils soient économiques, sociaux ou culturels, des enjeux qui m’interpellent particulièrement en ce qui concerne les droits de la personne.

La pauvreté grandissante, le nombre de sans-abris dans certaines de nos villes — notamment ici, à Ottawa —, le manque de logements abordables, la violence envers les communautés marginalisées et les femmes — j’ai une pensée pour ces femmes de l’École Polytechnique de Montréal —, les besoins en transport collectif, l’impact des changements climatiques dans nos vies, voilà autant d’enjeux qui exigent des actions concrètes pour renforcer la capacité des villes à mettre tout en œuvre pour que les Canadiennes et les Canadiens qui y vivent puissent s’y épanouir en santé et en sécurité.

[Traduction]

Si Ottawa est l’endroit où nous travaillons ensemble à servir les intérêts de tous les Canadiens, les collectivités d’un bout à l’autre du pays jouent un rôle central dans notre vie. Que ce soit ma ville, Caraquet, au Nouveau-Brunswick, Kelowna, en Colombie‑Britannique, ou Iqaluit, au Nunavut, les municipalités contribuent à forger notre identité culturelle et linguistique. Elles sont notre chez‑nous; c’est là où nous vivons, où nous travaillons, où nous festoyons, où nous élevons nos enfants, où nous aimons et où nous imaginons notre avenir.

En tant que pouvoir de proximité, les municipalités sont également celles qui reçoivent les multiples doléances des citoyens sur une variété de questions comme le transport en commun, les services d’aqueduc et d’égout, le contrôle des animaux, l’entretien des routes et la gestion des déchets.

Chers collègues, il est tout à fait déplorable que ces entités démocratiques soient aujourd’hui aux prises avec autant de problèmes.

[Français]

Le premier de ces enjeux est sans contredit l’inégalité de statut des municipalités par rapport aux provinces, un statut inscrit dans la Constitution canadienne et réaffirmé par les tribunaux.

L’expression « créature des provinces », communément associée aux municipalités, émane du partage des pouvoirs législatifs conformément à l’article 92.8 de la Loi constitutionnelle de 1867, qui prévoit que les municipalités relèvent du pouvoir des législatures provinciales.

Ce sont donc des lois provinciales qui « créent » ces entités en délimitant notamment leurs pouvoirs d’intervention. Juridiquement, les provinces ont le pouvoir de modifier la structure et le mode de gouvernance des municipalités, que ce soit la composition d’un conseil municipal ou même les pouvoirs d’un maire.

Si ce manque d’autonomie politique est un frein à leur développement, ce n’est malheureusement pas l’unique enjeu auquel font face les municipalités canadiennes. Elles doivent notamment composer avec des sources limitées de revenus, qui dépendent largement des gains provenant des taxes foncières. Cette situation a des impacts démesurés sur la prestation des services publics.

De ce point de vue, bien des municipalités font face à des défis dans la livraison des services en matière culturelle et linguistique. Il est également indéniable que le soutien du gouvernement fédéral en ces matières est crucial et attendu.

Je veux donc attirer votre attention aujourd’hui sur le rôle essentiel que jouent les municipalités canadiennes à l’égard des langues officielles et du secteur des arts et de la culture, en donnant quelques exemples issus de ma province, le Nouveau-Brunswick, et en mettant en relief la façon dont le gouvernement fédéral peut et doit être un véritable partenaire de celles-ci.

Nos municipalités ont effectivement un rôle de premier plan à jouer dans la protection et la promotion de nos deux langues officielles.

Certains régimes linguistiques provinciaux et territoriaux prévoient d’ailleurs des obligations spécifiques en matière de langues officielles pour les institutions municipales.

(1640)

À titre d’exemple, au Nouveau-Brunswick, si la population de langue officielle minoritaire d’une municipalité atteint au moins 20 % de sa population totale, la loi provinciale sur les langues officielles exige l’adoption et la publication d’arrêtés municipaux, y compris l’offre de services et des communications prescrites par règlement, dans les deux langues officielles.

Mme Dawn Arnold, mairesse de Moncton, au Nouveau-Brunswick — seule ville officiellement bilingue du pays —, a d’ailleurs affirmé ceci quant à l’impact des langues officielles sur le développement économique, social et culturel de sa ville, et je la cite :

Moncton mise énormément sur le respect de ses deux communautés linguistiques et notre statut bilingue est un élément de grande fierté. L’économie de Moncton est florissante en grande partie grâce à la présence d’une main‑d’œuvre bilingue pour soutenir la capacité des entreprises à fournir un service exceptionnel à leur clientèle, à générer une plus grande activité économique et à favoriser la création d’emplois.

[Traduction]

Le bilinguisme mène également à la construction d’infrastructures comme des écoles, des établissements d’enseignement postsecondaire, des hôpitaux et plus encore pour répondre aux besoins de cette population en particulier. Il crée également un segment de marché pour des produits et services en français, par exemple pour des activités culturelles, des restaurants, des services comme la traduction, le service à la clientèle, les services bancaires, etc., qui permettent à la communauté de prospérer.

[Français]

Le gouvernement fédéral contribue aussi à la prospérité des municipalités canadiennes grâce à la Loi sur les langues officielles, qui est de nature quasi constitutionnelle, faut-il le rappeler.

La partie VII de cette loi est vitale pour assurer la pérennité et la survie des communautés de langue officielle en situation minoritaire, qui sont une partie intégrante des municipalités de notre pays. Elle prévoit notamment l’engagement explicite de la part du gouvernement fédéral de favoriser l’épanouissement des minorités francophones et anglophones et d’appuyer leur développement.

Au Nouveau-Brunswick, à titre d’exemple, la mise en œuvre de cet engagement s’est traduite, en 2018, par un investissement de la part du gouvernement fédéral de 776 000 $ pour appuyer un projet de gouvernance afin d’améliorer l’offre de services en français par l’intermédiaire de projets de regroupements municipaux. Il s’agit là d’une mesure positive qui valorise l’apport des municipalités au développement, à l’épanouissement et au rayonnement de la francophonie canadienne.

Il faut savoir que la modernisation actuelle de la gouvernance locale au Nouveau-Brunswick constitue la plus importante réforme entreprise dans cette province depuis le programme Chances égales pour tous adopté au cours des années 1960 sous le gouvernement du premier ministre acadien Louis J. Robichaud.

Avant la réforme actuelle, approximativement un tiers de la population du Nouveau-Brunswick ne vivait pas dans une municipalité, mais plutôt dans des districts de services locaux administrés par le ministère de l’Environnement et des Gouvernements locaux, soit une structure qui permettait l’administration et la prestation de services locaux aux régions de la province qui n’étaient pas constituées et qui donc n’avaient ni maire ni conseillers.

Cette réforme attendue depuis longtemps et qui aspire à un meilleur idéal démocratique assure une transformation majeure de la gouvernance de ma province grâce à une réduction du nombre d’entités locales et à une francisation des noms de certaines entités, réaffirmant ainsi l’importance du patrimoine linguistique et culturel de nos communautés. Cette initiative reconnaît explicitement l’apport des municipalités dans le développement et l’épanouissement linguistique, culturel, politique et économique de notre province et de nos régions acadiennes.

Je profite de l’occasion pour remercier le gouvernement du Nouveau-Brunswick d’avoir entrepris cette importante réforme, et j’offre mes plus sincères félicitations aux membres des conseils municipaux de ces nouvelles entités, qui ont été élus tout récemment.

[Traduction]

Pour revenir à la Loi sur les langues officielles, je soulignerai que la partie VII de cette loi prévoit également que le ministre du Patrimoine canadien peut prendre des mesures :

[...] pour encourager et aider les gouvernements provinciaux à favoriser le développement des minorités francophones et anglophones, et notamment à leur offrir des services provinciaux et municipaux en français et en anglais [...]

La mise en œuvre de cette disposition s’est notamment traduite par la signature d’ententes avec les gouvernements provinciaux pour aider les municipalités à fournir des services et des communications dans les deux langues officielles, comme pour la traduction des règlements municipaux. Nonobstant la partie VII, aux termes de la partie IV de la loi, le public a le droit de recevoir les services des institutions fédérales dans la langue officielle de son choix, notamment s’il existe une demande importante pour ces services dans la langue en question ou si la nature du service le justifie.

Comme nous le savons tous, chers collègues, le gouvernement fédéral est en train de moderniser la Loi sur les langues officielles pour mieux atteindre l’égalité entre les langues officielles du Canada par la voie du projet de loi C-13, qui comprend certaines dispositions qui touchent, directement ou indirectement, à la vitalité des municipalités.

[Français]

Le projet de loi C-13 apporte des précisions sur la nature de l’obligation qu’ont les institutions fédérales, y compris les ministères fédéraux, de prendre des mesures positives pour mettre en œuvre certains engagements du gouvernement fédéral, comme celui visant à favoriser l’épanouissement des minorités francophones et anglophones dans certains secteurs stratégiques.

[Traduction]

Honorables sénateurs, prendre des mesures positives pour soutenir des secteurs essentiels à l’épanouissement des minorités anglophones et francophones contribue également à rendre les municipalités plus dynamiques et florissantes. Autrement dit, le développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire est un moteur de croissance pour les municipalités canadiennes sur les plans économique, social, culturel et politique.

[Français]

Nos municipalités canadiennes, particulièrement en région, font face aussi à un défi important touchant le déclin démographique de leur population. L’immigration est déterminante pour affronter cette problématique qui ne fait que s’intensifier d’année en année.

Le projet de loi C-13 prévoit l’adoption d’une politique en matière d’immigration francophone. Cette disposition, qui contribuera sans doute à contrer le déclin démographique, aura vraisemblablement une incidence dans le fonctionnement des municipalités, y compris dans le milieu associatif francophone, que ce soit à l’étape de l’accueil, de l’intégration ou de la rétention des immigrants et immigrantes.

Au-delà des langues officielles, il est incontestable que les arts, la culture et les industries culturelles sont de véritables vecteurs de développement, d’épanouissement et de rayonnement de nos municipalités canadiennes, et que le gouvernement fédéral a aussi un rôle important à jouer dans ce domaine.

Avant mon arrivée au Sénat, j’ai eu le privilège de diriger les États généraux des arts et de la culture dans la société acadienne du Nouveau-Brunswick, un projet sociétal majeur visant l’aménagement culturel des territoires de la société acadienne de cette province. Il s’agissait d’une approche de développement selon laquelle tous les secteurs de la société ont été mis à contribution pour développer et réaliser des initiatives d’intégration de la culture, des arts et du patrimoine dans leur territoire.

Ce projet d’envergure, réalisé par l’Association acadienne des artistes professionnels du Nouveau-Brunswick et financé par les gouvernements fédéral et provincial, avait comme objectif d’élaborer une Stratégie globale pour l’intégration des arts et de la culture dans la société acadienne au Nouveau-Brunswick. En d’autres mots, il s’agissait de concevoir une politique culturelle nationale pour le peuple acadien.

Aujourd’hui, la mise en œuvre de cette stratégie globale est en cours et a provoqué des changements importants en Acadie. Des municipalités néo-brunswickoises de différentes tailles se sont dotées de politiques culturelles, grâce à un projet d’accompagnement et de formation financé partiellement par Patrimoine canadien. Ces politiques culturelles ont permis d’ancrer les arts et la culture dans plusieurs secteurs clés au sein des municipalités, comme les secteurs du tourisme, de la santé, de l’éducation ou de l’économie, contribuant ainsi au développement économique, social et culturel de nos régions.

M. Guy Chiasson, maire de la municipalité de Balmoral, au Nouveau-Brunswick, a bénéficié de ce projet et s’est doté d’une politique culturelle. Il a affirmé ceci, et je cite :

La mise en place d’une politique culturelle pour et par les gens a permis à notre municipalité de se développer dans plusieurs domaines tant au niveau économique, social, que culturellement.

Une évidence s’impose : le soutien aux partenaires communautaires des municipalités par le gouvernement fédéral est une manière concrète pour celui-ci de contribuer au développement et à l’essor de nos municipalités.

Je m’en voudrais de terminer cette allocution sans reconnaître le rôle que les municipalités canadiennes peuvent jouer dans la diplomatie culturelle du Canada. En 2019, le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international a effectué une étude importante à ce sujet. Dans son rapport intitulé La diplomatie culturelle à l’avant-scène de la politique étrangère du Canada, il recommande ceci, et je cite :

Que le gouvernement du Canada examine les possibilités permettant d’accroître ou d’améliorer la collaboration et la coordination avec les provinces, les territoires et les municipalités en matière de diplomatie culturelle.

L’utilisation des ressources culturelles présentes dans nos municipalités d’un bout à l’autre du pays peuvent et doivent être au cœur des initiatives de diplomatie culturelle qu’entreprend le gouvernement fédéral.

(1650)

À ce propos, si nous avons souvent tendance à cibler les grandes villes, je tiens à réaffirmer l’importance, pour le gouvernement fédéral, de faire tout en son pouvoir pour appuyer et soutenir davantage les villes de petite et moyenne taille, qui occupent l’ensemble du territoire canadien et sont de véritables moteurs de développement culturel, économique et social pour notre pays.

Chers collègues, voilà autant de façons, pour le gouvernement fédéral, de soutenir nos municipalités canadiennes. Il y aurait encore beaucoup à dire sur le rôle fondamental que jouent ces municipalités dans l’essor de notre pays.

Les relations fédérales, provinciales et territoriales sont déterminantes pour assurer le développement des municipalités. J’émets donc le souhait que les différents instruments dont disposent ces différents ordres de gouvernement prennent pleinement en compte les besoins de nos municipalités.

En terminant, je citerai à nouveau Périclès qui a dit, et je cite : « Il n’est point de bonheur sans liberté, ni de liberté sans courage. » Ayons donc le courage de travailler ensemble pour renforcer les relations entre le gouvernement fédéral et nos municipalités canadiennes, afin que nos concitoyennes et concitoyens puissent y vivre heureux et s’y épanouir en toute liberté. Puissions-nous y créer, comme l’a suggéré la sénatrice Audette, des espaces de rencontre, de reconstruction et de cocréation, où nous pourrons, ensemble, rêver du pays que nous appelons « chez nous ». Merci.

(Sur la motion de la sénatrice Clement, le débat est ajourné.)

[Traduction]

Affaires juridiques et constitutionnelles

Motion tendant à autoriser le comité à étudier l’impact du paragraphe 268(3) du Code criminel—Ajournement du débat

À l’appel de la motion no 68 par l’honorable Frances Lankin :

Que le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit autorisé à étudier, afin d’en faire rapport, l’impact du paragraphe 268(3) du Code criminel, promulgué en 1997, y compris mais sans s’y limiter :

a)les raisons pour lesquelles il n’y a pas eu de poursuites au titre de cette disposition depuis sa promulgation il y a 25 ans;

b)la mesure dans laquelle les mutilations génitales féminines sont actuellement pratiquées au Canada et sur les jeunes filles canadiennes emmenées à l’étranger pour de telles procédures;

Que le comité formule des recommandations, le cas échéant, pour s’assurer que la disposition du Code criminel ait l’effet souhaité, soit de mettre fin à de tels crimes perpétrés contre les filles au Canada;

Que le comité soumette son rapport final au Sénat au plus tard le 31 décembre 2023, et qu’il conserve tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions dans les 180 jours suivant le dépôt du rapport final.

L’honorable Bernadette Clement : Honorables sénateurs, je remarque que cet article en est au 15e jour. Par conséquent, avec la permission du Sénat, je demande que l’étude de cet article soit reportée à la prochaine séance au nom de la sénatrice Lankin.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Le consentement est‑il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(Le débat est reporté à la prochaine séance du Sénat.)

Affaires sociales, sciences et technologie

Autorisation au comité de reporter la date du dépôt de son rapport final sur l’étude du Cadre fédéral de prévention du suicide

L’honorable Ratna Omidvar, conformément au préavis donné le 30 novembre 2022, propose :

Que, nonobstant l’ordre du Sénat adopté le jeudi 28 avril 2022, la date du rapport final du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie concernant son étude du Cadre fédéral de prévention du suicide soit reportée du 16 décembre 2022 au 30 juin 2023.

 — Merci, Votre Honneur. Je serai brève. Le Comité sénatorial des affaires sociales mène actuellement une étude importante en vue d’évaluer le Cadre de prévention du suicide. Nous avons entendu 23 témoins, y compris l’un de nos collègues, le sénateur Brazeau. Nous avons aussi entendu le témoignage de la ministre de la Santé mentale et des Dépendances. Nous avons reçu beaucoup de mémoires et de correspondances. Les membres du comité directeur se sont tous entendus sur le fait que nous ne devons pas nous contenter de travailler rapidement. Nous devons faire un bon travail.

C’est dans cet esprit que je demande votre approbation pour prolonger l’étude jusqu’à juin 2023 afin que nous puissions vous présenter un rapport dont vous pourriez être fier à juste titre. Merci.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

(À 16 h 55, le Sénat s’ajourne jusqu’à 14 heures demain.)

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