Débats du Sénat (Hansard)
1re Session, 44e Législature
Volume 153, Numéro 89
Le mercredi 7 décembre 2022
L’honorable George J. Furey, Président
- DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
- AFFAIRES COURANTES
- PÉRIODE DES QUESTIONS
- ORDRE DU JOUR
LE SÉNAT
Le mercredi 7 décembre 2022
La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.
Prière.
[Traduction]
DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
Les programmes d’entrepreneuriat
L’honorable Colin Deacon : Honorables sénateurs, comme certains d’entre vous le savent, j’ai eu un plaisir fou à l’université. De toute évidence, vous vous en souvenez. J’ai eu tellement de plaisir d’ailleurs qu’à la fin de ma première année, le doyen des sciences agricoles de l’Université de Guelph m’a encouragé à réévaluer mon engagement. C’est ce que j’ai fait et je me suis vite rendu compte que j’étais beaucoup plus apte à relever les défis pratiques du monde du travail.
Cependant, comme je n’avais pas de diplôme postsecondaire, j’ai souvent dû créer mon propre emploi; c’est ainsi que je suis tombé sur la voie de l’entrepreneuriat. J’ai appris à transformer des idées en entreprises et j’ai découvert les innombrables écueils qui se dressent sur le chemin de la réussite, ce qui m’a enseigné l’importance de la ténacité, de la prise de risque, de la créativité et de la résilience.
L’entrepreneuriat exige que vous transformiez d’instinct vos problèmes en possibilités. Nous vivons dans un monde où cette qualité est une compétence de plus en plus essentielle. C’est pourquoi j’aime découvrir des programmes qui forment la relève entrepreneuriale, des programmes qui prouvent aux adolescents qu’ils sont capables de créer des possibilités intéressantes et qui leur apprennent à éviter les nombreux écueils sur lesquels je semblais toujours buter.
Prenons l’exemple de Shad Canada, un programme national d’entrepreneuriat destiné aux élèves de 10e et 11e année, qui est offert dans 22 établissements d’enseignement postsecondaire au pays. Shad donne aux participants les moyens de se concentrer sur un vrai problème, un problème qu’ils éprouvent dans leur vie ou dont ils ont pris conscience aux nouvelles. Le personnel de Shad encadre chaque équipe d’élèves pendant qu’elle conçoit des solutions novatrices et pratiques avec l’aide d’experts en la matière. Cela n’a rien d’hypothétique.
Bethany Deshpande, une ancienne participante de ce programme, qui est installée à Halifax et est maintenant la PDG de SomaDetect, une entreprise de technologie agricole. Elle m’a parlé de ses expériences dans le programme Shad, expériences qui continuent de la guider, de façonner la culture organisationnelle, et de contribuer au caractère novateur et à la réussite de son entreprise. Bethany a résumé éloquemment sa participation au programme en disant qu’elle ne sait pas ce qu’elle serait devenue si elle n’y avait pas pris part.
Puis, il y a le programme Outward Bound, qui équipe les jeunes pour l’avenir en leur faisant vivre des aventures dans la nature qui les mettent à l’épreuve physiquement et mentalement. Ce programme permet aux élèves d’accomplir des choses qu’ils n’auraient jamais cru possibles, et ce, à un stade crucial de leur vie. Il permet aux jeunes d’acquérir de la confiance afin de pouvoir devenir une force dans le monde.
Honorables collègues, à cause des changements climatiques, notre génération laissera un défi sans précédent aux générations futures. Investir dans des programmes qui renforcent la culture entrepreneuriale au Canada contribuera à créer beaucoup plus d’esprits créatifs qui sont en mesure de résoudre des problèmes, qui n’ont pas peur de prendre des risques, qui remettent en question le statu quo et qui sont capables d’innover.
Merci, chers collègues.
Des voix : Bravo!
Le décès de Donald Sudden
L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Honorables sénateurs, je rends aujourd’hui hommage à un homme exceptionnel, un héros canadien et un estimé vétéran de la guerre de Corée, le regretté Donald Sudden, qui est décédé le 22 novembre 2022, peu avant son 90e anniversaire de naissance. M. Sudden a été le dernier président de l’unité du patrimoine de l’Association canadienne des vétérans de la Corée, qui a été abolie à la fin août 2021.
Le 7 juin 1951, Don a fièrement joint les rangs de l’armée canadienne, où il a servi dans la 216e batterie de l’Artillerie royale canadienne à Petawawa, pour se préparer à aller combattre en Corée. En janvier 1953, il est parti pour la Corée, où il a participé au combat corps à corps de la bataille de la colline 187 à titre d’artilleur de première ligne, aux côtés du 3e bataillon du Royal Canadian Regiment. Il a fait partie de l’équipe de piste avancée jusqu’à la signature de l’armistice, le 27 juillet 1953. Il a ensuite été affecté à des opérations de maintien de la paix sur le front White, maintenant désigné zone démilitarisée.
M. Sudden a quitté la Corée en mars 1954 pour rentrer au Canada. De 1965 à 1966, il a servi au Vietnam dans le cadre de la Commission internationale de surveillance et de contrôle et, en 1966 et 1967, il a participé à une mission de maintien de la paix à Chypre.
(1410)
Il a pris sa retraite des Forces armées canadiennes en 1972, après 21 ans de service.
Le sourire de Don illuminait une pièce. Son rire était contagieux et il avait une attitude positive à l’égard de la vie. Il était extrêmement humble, appréciant toujours les bienfaits de la vie. Il était un de mes amis les plus actifs sur Facebook. Je vais m’ennuyer de ses pouces tournés vers le haut et de ses commentaires après chacune de mes publications. Je vais aussi m’ennuyer de nos conversations sur Zoom, de son sourire caractéristique et de sa voix rauque.
J’offre mes plus sincères condoléances à sa veuve Grace. Don était un mari dévoué, et votre amour était une inspiration. Je vais m’ennuyer de nos visites et des anecdotes de Don. N’oubliez pas que vous n’êtes pas seule. Don a touché d’innombrables vies et son héritage se perpétuera en chacun de nous. Nous allons continuer de partager ses récits et son amour de la vie, et conserver une petite part de lui dans nos cœurs. Grâce à mes efforts et ceux d’autres personnes, nous promettons de tenir bien haut le flambeau et de préserver le souvenir de la guerre de Corée et du sacrifice désintéressé de nos vétérans de la guerre de Corée.
Honorables sénateurs, veuillez vous joindre à moi pour rendre hommage à Don Sudden, un héros canadien de la guerre de Corée. Qu’il repose en paix.
Des voix : Bravo!
Les changements climatiques et la culture
L’honorable Patricia Bovey : Honorables collègues, les changements climatiques sont dramatiques et dévastateurs — l’ouragan sur la côte Est; le dôme de chaleur et les inondations en Colombie-Britannique; la fonte de la glace et du pergélisol plus rapide que prévu dans le Nord. Les groupes d’experts et les discussions dans le cadre de la COP 27 et de la COP 15 ont mis — et continueront de mettre — en lumière les crises humanitaires qui en résultent.
Des sites du patrimoine mondial de l’UNESCO sont en péril ou déjà endommagés par la sécheresse, les pluies acides, les incendies et les inondations : les pyramides d’Égypte, les statues monolithiques de l’île de Pâques, le Machu Picchu au Pérou, et même certains de nos propres lieux historiques nationaux comme la forteresse de Louisbourg, le fort Prince-de-Galles dans le Nord du Manitoba et Dawson City au Yukon.
Les artistes tirent la sonnette d’alarme depuis des décennies. Voyez les œuvres d’Ed Burtynsky et de Roberta Bondar dans le foyer du Sénat, ou les peintures d’Emily Carr sur les coupes à blanc en Colombie-Britannique dans les années 1930. Quel rôle la culture peut-elle donc jouer dans la résolution de cette crise? Chers collègues, les musées ont la responsabilité, au moyen de leurs collections, de leurs mandats d’éducation et de leurs expositions, d’accroître la sensibilisation. Ils peuvent aussi sensibiliser la population à l’égard des changements climatiques. N’oubliez pas que les gens vont au musée en famille; ils ne vont pas à l’école en famille.
Je pense également que les institutions peuvent facilement réduire leur empreinte. Certaines l’ont déjà fait. Des discussions sont en cours pour savoir quels effets positifs peuvent découler de légers assouplissements des niveaux de température et d’humidité requis dans les galeries.
Je pense que les scientifiques et les artistes ont 20 ans d’avance sur la société en matière de collaboration sur un certain nombre de questions, allant de la santé à l’éducation en passant par l’ingénierie et plus encore. Pourquoi ne serait-ce donc pas le cas aussi pour les solutions aux changements climatiques?
À la fin de la COP 27, les représentants des organismes voués à la culture et au patrimoine ont enfin réussi à se rencontrer en personne. Le rassemblement, présidé par la princesse Dana de Jordanie, a été tenu au pavillon égyptien devant une salle comble. Des ministres venant de la Jordanie, de l’Égypte et des Tonga, ainsi que du National Trust du Royaume-Uni, ont tous participé. C’était électrisant et très bien accueilli.
Chers collègues, cette question nous touche tous — nos cultures, nos patrimoines, nos traditions et nos moyens de subsistance —, mais aucun de nous ne peut s’y attaquer seul. La culture n’a pas fait l’objet de discussions, mais elle doit en faire partie. Elle doit faire partie des remue-méninges et des solutions. Les approches créatrices des gens du milieu de la culture contribueront à la recherche de solutions pour résoudre cette crise mondiale. Or, ils ne pourront pas participer aux discussions si nous leur permettons de continuer d’agir en vase clos.
Pour le bien de nous tous, du milieu de la culture et de la société toute entière, cherchons ensemble des solutions créatives. Merci.
Des voix : Bravo!
Visiteur à la tribune
Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Craig Pollett. Il est l’invité de l’honorable sénateur Ravalia.
Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.
Des voix : Bravo!
Craig Pollett
Félicitations à l’occasion de sa retraite
L’honorable Mohamed-Iqbal Ravalia : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour souligner la carrière exceptionnelle de Craig Pollett, PDG de l’organisation Municipalities Newfoundland and Labrador, qui s’apprête à prendre sa retraite à la fin de décembre.
Fondée en 1951, l’organisation Municipalities Newfoundland and Labrador défend les intérêts d’un nombre grandissant de conseils municipaux qui, ensemble, représentent près de 90 % de la population de la province.
Tout au long de ses 21 années de service au sein de l’organisation, M. Pollett a offert du soutien à des localités urbaines ou de petite taille afin qu’elles puissent mieux répondre aux questions en constante évolution soulevées par leurs habitants.
Avec l’appui de centaines de dirigeants municipaux, y compris les membres du conseil d’administration de Municipalities Newfoundland and Labrador, M. Pollett a enrichi le monde de la gouvernance municipale. Il a contribué à ce que cette organisation devienne une cheffe de file dans la recherche et la défense des intérêts de ses membres. Municipalities Newfoundland and Labrador œuvre directement auprès des municipalités, notamment en offrant des ateliers et en tenant un colloque annuel pour discuter des défis pressants que les collectivités doivent relever, comme les changements climatiques et le vieillissement de la population.
Par ailleurs, M. Pollett a déployé des efforts constants pour renforcer le cadre législatif municipal afin d’accroître et de clarifier les pouvoirs des conseils dans leur réponse aux inquiétudes des habitants. Il a examiné les principes de la régionalisation afin d’établir une stratégie visant à assurer la viabilité à long terme de la province. M. Pollett continue de militer pour que les gouvernements modifient leur réglementation sur les effluents des systèmes d’assainissement des eaux usées pour permettre à des centaines de collectivités de s’y conformer. Honorables sénateurs, l’Organisation de coopération de développement économiques a reconnu que la méthode de développement économique employée par Municipalities Newfoundland and Labrador est une pratique exemplaire.
M. Pollett remercie chaleureusement sa famille pour son soutien, en particulier ses parents, Earl et Ruth Pollett, sa compagne, Gail, et ses enfants, Grace et Abby.
Chers collègues, des collectivités saines et durables sont les éléments constitutifs d’une province et d’un pays prospères. Joignez-vous à moi pour remercier Craig Pollett de ses formidables réalisations et de sa contribution directe au soutien des collectivités dynamiques du beau rocher de Terre-Neuve-et-Labrador, que nous connaissons et aimons tous. Monsieur, nous vous souhaitons la meilleure des chances dans le prochain chapitre de votre vie.
Merci, wela’lioq.
Des voix : Bravo!
Le capitaine Job Barbour
L’honorable Fabian Manning : Honorables sénateurs, j’ai le plaisir de vous présenter le chapitre 68 de « Notre histoire ».
Dans le monde moderne d’aujourd’hui, rempli de tous les types de technologies imaginables, où presque tout le monde possède un téléphone intelligent avec une application Google Maps intégrée, en plus d’un GPS dans son véhicule, il est difficile d’imaginer comment quelqu’un pourrait se perdre totalement et n’avoir aucune idée de l’endroit où il se trouve, à n’importe quel moment.
Cela dit, il est presque impossible pour nous d’imaginer ce que l’on ressent lorsque l’on est à la dérive sur l’océan Atlantique pendant 48 jours sans aucun moyen de communiquer avec sa famille et ses amis. Or, c’est exactement ce qui s’est passé en 1929.
Job Barbour est né en 1898, à Newtown, un village de pêcheurs. Il a commencé à naviguer dès son enfance et, à l’âge de 21 ans, il a pris le commandement d’un navire pour la première fois. Pendant de nombreuses années, il a navigué dans les eaux dangereuses de la côte nord-est de Terre-Neuve, transportant des provisions de St. John’s à de nombreux petits ports isolés qui parsèment ce littoral accidenté.
À la fin de l’automne 1929, à bord de sa goélette à trois mâts, le Neptune II, le capitaine Barbour et son équipage ont livré un chargement de morue salée et d’huile de morue à la ville de St. John’s. Le 29 novembre, ils ont entamé leur voyage de retour avec une cargaison comprenant des pommes, des oranges et des raisins secs pour le magasin général de Newtown, dans la baie de Bonavista. Le capitaine Barbour connaissait très bien le trajet de 100 milles qui, dans des circonstances normales, ne prendrait que quelques jours, mais dame Nature en avait décidé autrement. Tôt le lendemain matin, le 30 novembre, les vents ont atteint la force d’un ouragan et le Neptune II, son équipage et ses passagers ont été déviés de leur route, et de loin. Ils étaient sur le point de traverser l’océan Atlantique.
Dans une entrevue accordée à la CBC en 1979, à l’âge de 81 ans, le capitaine Barbour a déclaré :
Comme un démon vivant affamé de nos vies, la mer se précipitait sur nos pavois et balayait le pont de la proue à la poupe. Elle vous fascinait dès qu’elle approchait. L’eau semblait avoir toutes les couleurs de l’arc-en-ciel lorsqu’elle arrivait dans ses cumulus fous et crêtés. Je n’avais jamais pensé que la mer pouvait être aussi haute. On aurait dit d’énormes icebergs qui auraient été soudainement liquéfiés et poussés par un démon de la mer à se précipiter sur nous pour nous écraser à mort.
Il a poursuivi ainsi :
Je pouvais lire toute l’angoisse sur le visage de Mme Humphries. Elle pensait certainement qu’elle vivait les derniers moments de sa vie.
Pendant la traversée, les vents violents et la mer agitée ont malmené la goélette; des conditions qui ont notamment fait en sorte que des membres de l’équipage ont été blessés et que la passagère, Mme Humphries, s’est sentie très malade, au point où on avait discuté des mesures qui seraient prises si elle devait mourir en mer. Les réserves d’eau, qui avaient été contaminées par l’eau salée, étaient devenues impropres à la consommation. La timonerie avait été emportée par-dessus bord, et l’habitacle, réduit en miettes. Alors que la mer se déchaînait, l’équipage n’était pas en mesure d’accéder aux provisions qui avaient été arrimées dans la coque de la goélette. En plus de tout cela, le voyant du compas s’était éteint. Ce ne sont là que quelques-uns des problèmes que le capitaine et l’équipage ont dû affronter. Or, comme l’a dit un jour le capitaine Barbour :
Les matelots de Terre-Neuve sont connus pour leur ingéniosité. Lorsque l’outil approprié est perdu ou ne fonctionne plus, ils essaient de créer quelque chose pour le remplacer.
C’est cette ingéniosité, conjuguée à la résilience et au courage de l’équipage, qui a permis au Neptune II de rester à flot. Le 16 janvier 1930, 48 jours après avoir quitté le port de St. John’s, à Terre-Neuve, le navire endommagé a été aperçu au large des côtes de l’Écosse. Un bateau à vapeur, le Hesperus, y a attaché un câble de remorquage et a toué la goélette et son équipage en lieu sûr.
(1420)
À Terre-Neuve, les familles avaient commencé à se faire à l’idée qu’elles ne reverraient plus leurs êtres chers. Elles ont dû ressentir un grand soulagement lorsque la mère du capitaine Barbour a reçu un télégramme disant : « Arrivé sain et sauf, Tobermory, Écosse. Tout va bien. Job K. Barbour. »
Le capitaine Job Barbour a consigné son histoire par écrit. En 1932, Forty-eight Days Adrift, le récit de ses 48 jours à la dérive, a été publié à Londres, en Angleterre. La maison d’édition terre-neuvienne Breakwater Books a permis de redécouvrir cette histoire en la publiant en 1981, avec un deuxième tirage en 1983 et une réimpression en 2001. Le livre, qui fait le récit incroyable du courage, de la résilience et de l’humanité des Terre-Neuviens, ainsi que de leur capacité à surmonter les obstacles, demeure toujours très populaire.
Des voix : Bravo!
Félicitations à l’Équipe Canada
L’honorable Marty Deacon : Honorables sénateurs, quelle intervention fascinante a précédé la mienne!
Alors que 2022 tire à sa fin, j’aimerais en profiter pour célébrer le travail formidable de l’Équipe Canada au cours de la dernière année. N’oublions pas : nous sommes tous partisans de l’Équipe Canada.
Aux Jeux du Commonwealth, qui se sont tenus à Birmingham cet été, l’Équipe Canada a remporté 92 médailles. Cette récolte, sa meilleure depuis les Jeux du Commonwealth de 2002, lui a permis de terminer au troisième rang au tableau des médailles. L’équipe était inclusive, comptant un nombre record de 28 para-athlètes, dont 7 ont gagné une médaille. Il convient également de souligner que le Canada était la seule équipe carboneutre aux jeux. La diffusion des Jeux du Commonwealth n’avait jamais été aussi large, notamment grâce à une incroyable diffusion en continu.
Ces jeux sont de bon augure pour les Jeux olympiques de Paris, en 2024, puisque, en général, les athlètes canadiens ayant participé aux Jeux du Commonwealth gagnent 70 % des médailles récoltées par le Canada aux Jeux olympiques d’été. De plus, nos athlètes qui participent aux Jeux olympiques spéciaux se préparent activement aux jeux internationaux de Berlin, qui auront lieu le printemps prochain.
Honorables sénateurs, c’était un véritable honneur de rencontrer, il y a quelques semaines, des athlètes, des entraîneurs et des bénévoles en compagnie de notre ami et ancien collègue, le sénateur Munson, ainsi que de Frank Hayden, père du mouvement des Jeux olympiques spéciaux. Il était très encourageant de voir ces athlètes dans la salle, rassemblés pour la première fois en personne depuis trois ans. Bien que la pandémie ait entraîné une diminution du nombre de bénévoles — ce qui pose problème —, nous avons des raisons d’espérer que la situation s’améliorera en temps et lieu.
Sur le terrain, vous savez tous pertinemment que nos équipes de football masculines et féminines ont remporté des victoires. Il y a deux jours à peine, les vedettes du soccer canadien Christine Sinclair et Diana Matheson ont annoncé la création d’une ligue féminine canadienne, qui sera lancée en 2025. C’est très encourageant.
Un peu moins connus, mais tout aussi remarquables, les joueurs de tennis canadiens ont fait bonne figure en remportant la Coupe Davis il y a quelques semaines à peine. C’est le fruit de 15 ans de travail, l’histoire d’une organisation qui a dû changer ses façons de faire, en se concentrant sur la haute performance, en ouvrant un centre d’entraînement national et en recrutant des entraîneurs internationaux pour amener le tennis à un niveau supérieur. Nous félicitons Denis Shapovalov et Félix Auger-Aliassime pour cette première victoire en 109 ans, mais aussi Milos Raonic, Genie Bouchard, Vasek Pospisil, Leylah Annie Fernandez et Bianca Andreescu.
Enfin, cette année, le sport a été scruté à la loupe en raison des actes de maltraitance dont sont victimes un trop grand nombre d’athlètes et qui sont commis par ceux en qui ils avaient confiance. Les témoignages sont en train d’être recueillis et le travail est en cours pour mieux garantir que chaque athlète, entraîneur et bénévole se sente accepté et en sécurité dans le milieu sportif. Il faut pour cela des efforts et une volonté collective dans plusieurs domaines.
Dans le cadre de cet appel à l’action, je vous invite à me rejoindre pour un direct sur Facebook Live jeudi prochain, alors que je m’entretiendrai avec des chefs de file qui font tout ce qu’ils peuvent pour apporter des solutions urgentes aux problèmes de sécurité dans le sport.
Sur une note plus festive, nous nous réjouissons également de vous retrouver pour des activités hivernales le mardi 7 février à 12 h 30, et bien d’autres événements à venir. Merci. Meegwetch.
Des voix : Bravo!
AFFAIRES COURANTES
La justice
L’Énoncé concernant la Charte en ce qui a trait au projet de loi C-29—Dépôt de document
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, un énoncé concernant la Charte préparé par le ministre de la Justice ayant trait au projet de loi C-29, Loi prévoyant la constitution d’un conseil national de réconciliation, conformément à la Loi sur le ministère de la Justice, L.R.C. 1985, ch. J-2, par. 4.2(1).
Le Conseil du Trésor
Dépôt des Rapports sur les résultats ministériels de 2021-2022
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, les Rapports sur les résultats ministériels pour la période se terminant le 31 mars 2022.
Transports et communications
Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat
L’honorable Leo Housakos : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5a) du Règlement, je propose :
Que le Comité sénatorial permanent des transports et des communications soit autorisé à se réunir le jeudi 8 décembre 2022, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l’application de l’article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.
Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?
Des voix : D’accord.
Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?
Des voix : D’accord.
(La motion est adoptée.)
PÉRIODE DES QUESTIONS
Les finances
Les dépenses du gouvernement
L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : La question que j’adresse au sénateur Gold cet après-midi concerne la dette incroyable qu’accumule le gouvernement sur le dos des contribuables.
Le mois dernier, le directeur parlementaire du budget publiait un rapport contenant une analyse de scénario de risque « pour aider les parlementaires à évaluer les possibles répercussions économiques et financières d’un resserrement excessif de la politique monétaire par les banques centrales ». D’après cette analyse menée par le directeur parlementaire du budget, le service de la dette publique pourrait atteindre 53,4 milliards de dollars en 2024-2025. Il s’agirait, sénateur Gold, d’une augmentation de 118 % comparativement à 2021-2022. Pour mettre les choses en perspective, sur deux ans, le service de la dette équivaudrait à l’ensemble des dépenses du pays pour la défense et les services aux collectivités autochtones et nordiques.
Sénateur Gold, quel est le plan à long terme du gouvernement dont vous faites partie pour réussir à payer les intérêts générés par l’immense dette accumulée par Justin Trudeau et Jagmeet Singh? Prévoyez-vous sabrer les services aux Canadiens vulnérables? Allez-vous augmenter les impôts? Allez-vous simplement continuer à enregistrer des déficits à répétition?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question et de souligner les défis auxquels notre économie demeure confrontée. Le gouvernement continuera d’agir de façon prudente et responsable pour aider les Canadiens à traverser cette période, et pour soutenir la croissance économique.
Comme je l’ai dit à maintes reprises dans cette enceinte, la hausse des taux d’intérêt et l’inflation sont attribuables à de nombreux facteurs, et les dépenses gouvernementales n’en sont qu’un.
(1430)
Il va sans dire que j’étais heureux de lire que les économistes de la Banque Scotia — qui ont signalé que la hausse de l’inflation est due à de nombreux facteurs dont la grande majorité sont mondiaux, notamment les chaînes d’approvisionnement — souscrivent à cette analyse. Cette hausse est attribuable aux dépenses engagées par le gouvernement pour aider les Canadiens à traverser la pandémie, dans une proportion de 15 % seulement.
Évidemment, les économistes ont également affirmé que ces programmes ont eu de vastes répercussions positives sur notre économie. La cote de crédit du gouvernement est forte et le Canada est bien positionné pour l’avenir.
Le sénateur Plett : Je suis surpris de voir que vous vous consolez en vous disant que tout n’est pas de votre faute. Bien que ce ne soit peut-être pas entièrement le cas, vous êtes certainement responsable du problème dans une large mesure, et quand je dis « vous », je fais référence au gouvernement libéral—néo‑démocrate. Le plan économique de l’équipe Trudeau-Freeland reposait entièrement sur l’idée d’alimenter la croissance grâce à de l’argent emprunté à faible taux. Le budget, sénateur Gold, je vous le rappelle, était censé s’équilibrer de lui-même.
Monsieur le leader du gouvernement au Sénat, la fête est maintenant terminée. La Banque du Canada vient d’augmenter aujourd’hui son taux directeur pour la septième fois cette année. Malheureusement, ce sont les générations futures — vos petits‑enfants, mes petits-enfants et nos arrière-petits-enfants — qui paieront le prix des politiques économiques mal avisées de votre gouvernement, oui, le vôtre.
Sénateur Gold, quand le budget fédéral va-t-il s’équilibrer de lui‑même?
Le sénateur Gold : Merci de votre question.
Comme la ministre des Finances l’a annoncé à plusieurs reprises dans ses interventions concernant l’énoncé économique de l’automne, et selon les prévisions du gouvernement, le déficit budgétaire va continuer à diminuer.
Le gouvernement du Canada, je le répète, a agi de façon prudente et responsable. En effet, David Dodge, ancien gouverneur de la Banque du Canada, qui a exprimé son accord avec la rapidité et l’efficacité avec lesquelles le gouvernement du Canada a réagi aux défis de la pandémie, a fait remarquer récemment que « nous n’avons jamais connu de reprise aussi rapide que celle de 2021. C’était incroyable. »
À cet égard, sénateur Plett, le gouvernement continuera de travailler dans l’intérêt des Canadiens, comme on l’a élu pour le faire.
Le processus d’application de la réglementation
L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : En fait, le mois dernier, un autre ancien gouverneur de la Banque du Canada, Stephen Poloz, a indiqué que le Canada se classe à l’avant‑dernier rang parmi les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques, ou OCDE, en ce qui a trait à la productivité. Il a dit que les tracasseries administratives et la réglementation excessive imposées par le gouvernement nuisent à la productivité économique du Canada et ont créé trop d’incertitude pour les entreprises.
Il a déclaré ceci :
Je crois qu’il serait particulièrement judicieux de mettre de l’ordre dans la réglementation afin d’éliminer les tracasseries administratives qui nous ralentissent.
Sénateur Gold, convenez-vous que nous devons réduire les tracasseries administratives qui sont imposées par le gouvernement? Que compte faire le gouvernement Trudeau pour réduire les formalités administratives et alléger le fardeau réglementaire?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je pense que le gouvernement actuel, comme tous le gouvernements, y compris à l’échelle provinciale et territoriale, reconnaissent l’importance de moderniser le cadre de réglementation pour le rendre plus efficace afin d’aider les entreprises à faire des affaires, à croître et à prendre leur essor, et ce, tout en prévoyant des mesures rigoureuses, notamment à l’égard de la fraude et des produits de consommation, pour protéger les Canadiens. Comme nous l’avons constaté dans cette enceinte il n’y a pas si longtemps, le gouvernement fédéral s’efforce de mettre en place des mesures législatives afin de moderniser la réglementation qui encadre bon nombre de secteurs relevant de sa compétence.
Évidemment, la réglementation des entreprises relève des provinces, et chaque province a un rôle à jouer pour alléger, au besoin, le fardeau réglementaire des particuliers et des entreprises.
La sénatrice Martin : L’été dernier, l’Institut C.D. Howe a publié un rapport dans lequel il a conclu que le Canada était à la traîne des autres pays de l’OCDE pour ce qui est d’attirer les investissements. Les chercheurs ont écrit :
L’investissement des entreprises est si faible que le capital par membre de la population active est en baisse, et les conséquences pour les revenus et la compétitivité sont inquiétantes.
William B.P. Robson a écrit :
Le fait que l’investissement par travailleur disponible est plus faible au Canada qu’à l’étranger nous indique que les entreprises voient moins de débouchés au Canada et préfigure une croissance plus faible des revenus et du niveau de vie au Canada que dans les autres pays de l’OCDE.
Sénateur Gold, êtes-vous d’accord avec tous les experts qui disent que le Canada, sous la direction de Justin Trudeau, n’est plus attrayant aux yeux des investisseurs étrangers? Quel est le plan de votre gouvernement pour remédier à cette situation?
Le sénateur Gold : Je vous remercie de votre question.
L’Institut C.D. Howe joue un rôle important. C’est l’un des nombreux groupes de réflexion au pays, lesquels ont tout un éventail de tendances idéologiques.
Le fait est que le Canada demeure un endroit attrayant. C’est un pays stable et démocratique qui est doté d’une économie saine et d’une main-d’œuvre instruite, et il continuera d’être un endroit où les entreprises peuvent prospérer.
La santé
La pandémie de COVID-19—La commission d’enquête
L’honorable Marty Deacon : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat. Elle porte sur la réponse du gouvernement fédéral à la pandémie de COVID-19.
Sénateur Gold, la vérificatrice générale a publié hier deux rapports importants concernant la réponse du gouvernement fédéral à la pandémie de COVID-19. L’un est consacré à l’approvisionnement en vaccins, l’autre aux prestations liées à la COVID-19. Ils se concentrent donc sur quelques éléments importants d’un vaste ensemble d’interventions.
Tout au long de la pandémie, j’ai souvent entendu dire que le gouvernement devait, en quelque sorte, bâtir un avion en plein vol, et que personne n’était à blâmer pour cette réalité. Il y a des leçons à tirer de cette expérience, des leçons qu’il ne faudrait pas oublier. Nous avons besoin d’un plan en prévision de la prochaine grande pandémie ou du prochain grand défi.
Comme nous l’a rappelé le travail quotidien du juge Rouleau, les commissions d’enquête permettent de passer en revue des événements d’une manière extrêmement efficace, systématique et transparente.
Le gouvernement a-t-il l’intention de créer une commission d’enquête sur la réponse du gouvernement fédéral à la pandémie de COVID-19? Si oui, à quel moment cela pourrait-il se faire?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci beaucoup pour votre question.
Le gouvernement sait qu’il est très important pour nous de faire le point sur les leçons que nous avons tirées de cette pandémie et de nous préparer aux futures urgences sanitaires et, d’ailleurs, à tout type d’urgence.
On m’informe qu’une partie de ce travail est en fait déjà en cours, chers collègues, par l’entremise d’examens internes de l’Agence de la santé publique du Canada, en plus des examens externes et indépendants du Réseau mondial d’information en santé publique et de la vérificatrice générale.
Aujourd’hui, le gouvernement sait, lui aussi, qu’il est possible d’en faire plus, et c’est pourquoi on m’informe qu’il procédera à un examen de la réponse à la COVID-19 dans un format qui reste à déterminer et qui sera annoncé lorsque tous les détails seront réglés. Entretemps, on me dit que le gouvernement continuera de travailler avec les provinces et les territoires pour améliorer notre système de santé afin d’assurer la sécurité des Canadiens.
La sénatrice M. Deacon : Merci.
J’espère que ces processus et les nombreux exemples que vous avez décrits cet après-midi nous maintiennent sur la voie de la transparence et nous permettront d’avoir un portrait aussi clair, ouvert et honnête que possible. Je vous remercie.
L’innovation, les sciences et le développement économique
Le financement de la recherche
L’honorable Stan Kutcher : Sénateur Gold, le rapport d’octobre 2022 du Comité permanent de la science et de la recherche de la Chambre des communes contient la recommandation suivante :
Que le gouvernement du Canada augmente le nombre des bourses offertes aux étudiants des cycles supérieurs et aux chercheurs postdoctoraux, hausse leur valeur de 25 % afin de refléter les hausses du coût de la vie observées depuis le dernier rajustement effectué en 2003, et s’assure qu’elles soient indexées sur l’Indice des prix à la consommation.
Le gouvernement du Canada va-t-il donner suite à cette recommandation dans le prochain budget?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de votre question, sénateur.
Comme je l’ai déjà dit ici, le gouvernement comprend l’importance d’investir dans la recherche, dans nos étudiants et dans nos diplômés. Le gouvernement a d’ailleurs effectué des investissements record dans la recherche fondamentale au cours des cinq dernières années.
Chers collègues, je signale que le Comité consultatif sur le système fédéral de soutien à la recherche a été lancé le 6 octobre dernier. Il fournira au ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie ainsi qu’au ministre de la Santé des conseils stratégiques sur la structure, la gouvernance et la gestion du système fédéral de soutien à la recherche et aux talents. Il fournira aussi des conseils sur la façon de veiller à ce que les mesures de soutien au milieu de la recherche universitaire au Canada soient coordonnées, cohésives, réactives et agiles.
Le gouvernement est impatient de bénéficier du fruit du travail du comité et cherche constamment des moyens de mieux servir les Canadiens.
(1440)
Les détails entourant le budget prévu pour cette initiative seront dévoilés quand il aura été déposé.
Le sénateur Kutcher : Je vous remercie, sénateur Gold. Malheureusement, nous savons tous qu’un grand nombre de recommandations de groupes d’experts et de rapports n’ont eu pratiquement aucune suite par le passé. J’ai espoir que cette fois-ci, ce scénario ne se reproduira pas.
Dans ce même rapport, on déplore que les investissements du Canada dans la recherche fondamentale soient inadéquats et insuffisants. En fait, le Canada est loin derrière d’autres pays. Voici ce qui est recommandé :
Que le gouvernement du Canada examine et accroisse ses investissements dans la recherche fondamentale à travers une augmentation du budget des trois conseils subventionnaires.
Des milliers de scientifiques d’un bout à l’autre de notre pays demandent au gouvernement du Canada de doubler le financement des trois conseils subventionnaires. Le gouvernement du Canada entendra-t-il cet appel à l’aide et fournira-t-il les fonds nécessaires dans le budget à venir, ou laissera-t-il le Canada continuer d’accumuler du retard par rapport à d’autres pays?
Le sénateur Gold : Je vous remercie de votre question.
Le gouvernement a maintenu le soutien financier pour les scientifiques et la recherche. Voilà pourquoi le budget de 2022 propose de verser 38,3 millions de dollars sur quatre ans aux conseils subventionnaires fédéraux pour qu’ils ajoutent de nouvelles chaires d’excellence en recherche du Canada qui recruteront à l’étranger dans les domaines de la science, des technologies, de l’ingénierie et des mathématiques. Depuis 2016, le gouvernement a fourni plus de 14 milliards de dollars en nouvelles ressources pour soutenir la science et la recherche.
Comme je l’ai déjà dit, le gouvernement est déterminé à continuer de soutenir un milieu stimulant pour la recherche scientifique qui reflète les forces du Canada et qui favorise ses intérêts. Comme je l’ai dit il y a un instant, lorsque le prochain budget aura été présenté, les détails de celui-ci seront fournis à tous les sénateurs.
Droits de la personne
Les travaux du comité
L’honorable Robert Black : Ma question s’adresse à la présidente du Comité sénatorial des droits de la personne.
Le comité a entrepris une étude approfondie de l’islamophobie au Canada, étude qui arrive à point nommé. En effet, d’après une recherche de Statistique Canada publiée en août 2022, les données policières montrent que les crimes haineux ciblant la communauté musulmane ont augmenté de 71 % de 2020 à 2021. Ce chiffre reflète une tendance inquiétante concernant les crimes haineux commis contre des personnes musulmanes au Canada, parmi lesquels figurent la terrible fusillade survenue à la mosquée de Québec en 2017 et l’agression brutale dont une famille de London, en Ontario, a été victime l’année dernière.
Nous convenons tous que l’islamophobie est un problème pressant au Canada, et nous sommes impatients d’en apprendre davantage grâce à l’étude de votre comité. Pourriez-vous dire aux sénateurs où en est votre étude et à quel moment vous prévoyez en faire rapport au Sénat?
L’honorable Salma Ataullahjan : Je vous remercie de votre question.
Le comité a tenu 20 réunions, pour un total de plus de 36 heures. Nous avons entendu 111 témoins. Nous nous sommes rendus à Vancouver, à Edmonton, à Québec, où nous avons visité la mosquée où l’attaque terroriste a eu lieu, et à Toronto.
Nous entendons la même chose dans pratiquement toutes les villes que nous visitons. Nous avons entendu des témoignages déchirants de Canadiens musulmans qui continuent de lutter pour se sentir acceptés et en sécurité dans leurs collectivités. Les agressions physiques et verbales, les stéréotypes blessants dans les médias — le rôle joué par les médias revenait constamment —, le profilage racial et la discrimination causent à nombre d’entre eux un traumatisme qui est également transmis aux jeunes générations sous forme de traumatisme multigénérationnel.
J’aimerais ajouter que les femmes, en particulier les musulmanes noires, subissent davantage de discrimination et de harcèlement, surtout si elles choisissent de porter le hidjab.
Nous avons encore beaucoup d’autres témoins à entendre. Nous demandons aux médias de comparaître. Si tout va bien, nous devrions terminer l’étude d’ici le printemps de l’année prochaine. Merci.
[Français]
Le revenu national
La vérificatrice générale—Les rapports liés à la pandémie de COVID-19
L’honorable Leo Housakos : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat.
La vérificatrice générale a publié hier un rapport dévastateur sur les dépenses du gouvernement Trudeau pendant la pandémie. Elle a révélé que plus de 4 milliards de dollars ont été versés à des personnes qui étaient inadmissibles aux prestations. Elle a ajouté que des dépenses de 27 milliards de dollars soulevaient des doutes.
À la Chambre des communes, la ministre du Revenu national a parlé de jeux politiques de la part de la vérificatrice générale. Elle a dit que la vérificatrice générale a été pressée par l’opposition de produire ce rapport, ce qui est évidemment complètement faux et ridicule. C’est honteux de s’attaquer à une agente du Parlement de cette façon.
Sénateur Gold, pourquoi le gouvernement tente-t-il de discréditer le travail de la vérificatrice générale?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de la question.
Le gouvernement a un respect très profond pour le rôle de la vérificatrice générale et l’indépendance de son bureau. Cela n’a jamais été l’intention de la ministre de suggérer le contraire.
Comme la ministre l’a déjà dit à plusieurs reprises, nous sommes reconnaissants du travail de la vérificatrice générale; d’ailleurs, elle a confirmé que les avantages accordés aux Canadiens et Canadiennes pendant la pandémie ont été très efficaces.
Le gouvernement va continuer à travailler pour favoriser le bien-être des Canadiens.
Le sénateur Housakos : Sénateur Gold, la vérificatrice générale a dit que ce n’était pas efficace du tout. Des dépenses de 27 milliards de dollars sont actuellement en cause.
Comme plusieurs de ses collègues, la ministre Diane Lebouthillier cumule les gaffes et, comme ses collègues, elle ne s’excuse jamais. Votre gouvernement est toujours prêt à s’excuser pour des erreurs commises par d’autres personnes il y a des années, mais n’est jamais prêt à prendre ses responsabilités.
Quand la ministre va-t-elle s’excuser auprès de la vérificatrice générale du Canada?
Le sénateur Gold : Merci de la question.
Comme je l’ai dit, la ministre n’avait pas l’intention d’insulter la vérificatrice générale. Elle a exprimé son appui et son respect à l’égard de son rôle et elle va continuer à faire son bon travail pour le bien-être des Canadiens.
La sécurité publique
Le contrat octroyé à une entreprise chinoise
L’honorable Claude Carignan : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat.
Monsieur le leader, on apprenait ce matin dans un reportage de Marc Godbout à Radio-Canada que le gouvernement a accordé un contrat de systèmes de filtrage RF à une entreprise. Ces systèmes de filtrage RF permettent de sécuriser les télécommunications de la GRC.
Pourquoi le gouvernement a-t-il accordé un contrat de systèmes de filtrage pour sécuriser les fréquences de la GRC à une entreprise chinoise? Monsieur le leader, qu’est-ce qui se passe au sein de votre gouvernement? Ça ne va pas, je crois.
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de la question.
Le gouvernement prend au sérieux toute allégation d’ingérence dans notre système par des acteurs étrangers.
Le gouvernement compte sur un système d’évaluation rigoureux pour tous les partenaires, toutes les initiatives, y compris les processus d’approvisionnement. On m’a avisé que le gouvernement est conscient des allégations concernant le contrat que vous venez de mentionner avec Sinclair Technologies. Comme l’a dit le premier ministre, le gouvernement a fait des recherches à la suite de ces allégations et il prendra toutes les mesures nécessaires pour assurer l’intégrité de nos infrastructures essentielles.
On m’a également avisé que le ministre Mendicino a donné des directives à ses hauts fonctionnaires pour qu’ils vérifient de près les détails de ce contrat et afin de réévaluer le processus par lequel le contrat a été accordé.
Le sénateur Carignan : Monsieur le leader, êtes-vous conscient du fait que les systèmes de filtrage seront installés dans toutes les provinces du Canada, y compris en Ontario? Où la majorité des communications de la GRC a-t-elle lieu, en Ontario? C’est ici, à Ottawa. À quoi servent les communications de la GRC ici, à Ottawa, sur des fréquences confidentielles qui servent donc aux fonctionnaires, aux ambassadeurs et aux visiteurs étrangers?
Savez-vous que vous avez donné accès à ces communications à une entreprise chinoise et que cela pose un risque à la sécurité nationale pour toutes les communications du gouvernement?
Le sénateur Gold : Comme je l’ai dit, le gouvernement, le ministre et le premier ministre se sont déjà prononcés à ce sujet. Nous allons faire des recherches pour nous assurer que l’intégrité de nos systèmes est protégée.
(1450)
[Traduction]
Les anciens combattants
L’aide médicale à mourir
L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Sénateur Gold, ma prochaine question porte sur une réalité bouleversante et très délicate. On compte maintenant quatre cas d’anciens combattants qui se sont vu offrir l’aide au suicide par le gouvernement fédéral, et on s’attend à découvrir d’autres cas.
Sur le site Web du ministère des Anciens Combattants, on peut voir le message suivant bien en évidence :
Si vous êtes un membre ou un vétéran des FAC ou de la GRC, ou un membre de la famille, nous offrons des services et des avantages pour améliorer votre bien-être.
Je suis estomaqué. J’ai du mal à digérer cela, sénateur Gold. Le ministère chargé de fournir de l’aide et des services aux membres des Forces canadiennes, à des soldats qui ont mis leur vie en danger pour nous et pour d’autres, offre l’aide au suicide aux anciens combattants pour qu’ils puissent mettre fin à leurs jours, sénateur Gold.
Des voix : C’est une honte.
Le sénateur Plett : Sénateur Gold, comment pouvez-vous justifier le fait d’inclure l’aide au suicide dans les services censés améliorer le bien-être des anciens combattants?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je me permets de commencer par dire que ce qui est arrivé à ces anciens combattants est totalement inacceptable. Cela n’aurait jamais dû se produire.
La sénatrice Batters : Il devrait être renvoyé.
Le sénateur Gold : Toutefois, à ce que je sache, les services auxquels vous faites référence sur le site Web ne comprennent pas l’aide médicale à mourir. On m’assure que la prestation de conseils sur l’aide médicale à mourir ne fait absolument pas partie des services offerts par Anciens Combattants Canada. Vous ne l’avez pas exprimé ainsi, sénateur Plett, mais vous l’avez laissé entendre, alors je suis heureux d’avoir l’occasion de corriger le compte rendu.
Chers collègues, cette affaire est sérieuse. J’aimerais terminer ma réponse. Je crois savoir que le ministre a demandé au ministère de mener une enquête approfondie, qui est d’ailleurs en cours, afin de s’assurer que tout le personnel de première ligne est formé pour faire face à tout problème, y compris ceux qui sont liés à l’aide médicale à mourir, et pour veiller à ce que cela ne se reproduise jamais. Le gouvernement prend toutes les mesures nécessaires pour s’assurer qu’aucun ancien combattant n’ait plus à vivre une telle situation.
Le sénateur Plett : Permettez-moi de revenir sur ce que la sénatrice Batters a dit : qui sera congédié, sénateur Gold? Il s’est passé quelque chose. Quelqu’un a failli à la tâche, sénateur Gold. Vous pouvez bien dire que cela ne se reproduira plus jamais, mais le fait est que ce type de situation arrive encore et encore. La vie des anciens combattants n’a aucune valeur pour le gouvernement. Ils ont mis leur vie en danger pour vous et moi, sénateur Gold. Comment une telle chose peut-elle bien se passer? C’est arrivé non pas une ou deux fois, mais quatre — je dis bien quatre — fois, et on s’attend à ce que d’autres cas soient rapportés.
La lettre de mandat du ministre MacAulay prévoit ce qui suit :
Votre priorité absolue est de vous assurer que les services et prestations nécessaires au bien-être physique, mental et économique des anciens combattants et de leurs familles sont facilement accessibles, adaptés aux besoins et disponibles en temps opportun.
De toute évidence, ce ne sont que de beaux discours, des paroles en l’air. La réalité — laissez-moi terminer — est tout autre, sénateur Gold. Sous le gouvernement Trudeau, les temps d’attente ont augmenté, d’anciens combattants ont été traînés devant les tribunaux, et, maintenant, le suicide assisté est offert à nos courageux anciens combattants.
Sénateur Gold, le fait de changer de ministre responsable de ce portefeuille n’a pas donné de bons résultats pour le gouvernement. Quand les anciens combattants obtiendront-ils le respect et les services dont ils ont besoin et pour lesquels ils ont mis leur vie en danger?
Une voix : Bravo!
Le sénateur Gold : Votre dévouement envers les anciens combattants est justifié. Cependant, votre insinuation que le gouvernement ne se soucie pas d’eux est odieuse. Ce n’est tout simplement pas le cas. Je vous prie de me laisser exprimer mes sentiments et dire ce que j’ai à dire.
J’ai cru comprendre que cette offre a peut-être été faite par une seule personne. Une enquête est en cours. Le gouvernement prend cette situation au sérieux...
Une voix : Laissez-le terminer!
Le sénateur Gold : Je vais reprendre du début, chers collègues.
Le sénateur Plett : Il va rembobiner la cassette.
Une voix : À l’ordre, s’il vous plaît.
Le sénateur Gold : Ce qui s’est produit est inacceptable. Le gouvernement fait tout son possible pour découvrir ce qui s’est passé et pour déterminer qui est responsable. Il se peut fort bien que ce soit une seule personne, mais je ne peux pas le confirmer parce que l’enquête n’est pas terminée.
Le gouvernement se soucie grandement du sort des anciens combattants canadiens, et il a à cœur leur bien-être, parce qu’ils ont risqué leur vie pour nous tous. Il est tout simplement répugnant que le leader de l’opposition au Sénat suggère le contraire. Le gouvernement considère que ce qui s’est passé est inacceptable. Il n’est pas question ici d’un service offert par le ministère des Anciens Combattants, mais d’une personne qui a fait quelque chose qui n’aurait pas dû être fait. Quand l’enquête sera terminée, je suis convaincu que le gouvernement prendra les dispositions nécessaires.
[Français]
La santé
L’admissibilité à l’aide médicale à mourir
L’honorable Julie Miville-Dechêne : Sénateur Gold, la question de l’opposition m’a fait penser au débat sur l’aide médicale à mourir. J’avais de sérieuses réserves sur le fait d’élargir l’admissibilité à l’aide médicale à mourir aux personnes souffrant seulement de maladies mentales.
Au cours des dernières semaines et des derniers jours, des voix se sont élevées pour dénoncer le fait que ce changement doit survenir à la mi-mars. Certains disent que nous ne sommes pas prêts et ce n’est pas n’importe qui.
[Traduction]
Elle comprend l’Association des directeurs de services psychiatriques du Canada, qui regroupe les responsables des services de psychiatrie des 17 écoles de médecine existant au Canada.
[Français]
Allez-vous retarder l’entrée en vigueur de ce changement?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de la question. C’est un sujet sérieux.
Le gouvernement est conscient des préoccupations exprimées non seulement par plusieurs médecins et plusieurs groupes de médecins, mais aussi par quelques provinces et territoires, qui prennent la question au sérieux et sont en train de réfléchir à ce qu’il faut faire.
Cela dit, il y a un rapport prévu pour le mois de février qui contiendra des recommandations à ce sujet, et le gouvernement prendra tout cela en considération avant de prendre une décision.
[Traduction]
Réponses différées à des questions orales
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer les réponses aux questions orales suivantes :
Réponse à la question orale posée au Sénat le 15 juin 2022 par l’honorable sénatrice Lankin, c.p., concernant la mutilation génitale féminine.
Réponse à la question orale posée au Sénat le 26 octobre 2022 par l’honorable sénatrice Saint-Germain, concernant le Programme canadien de soutien aux survivants de la thalidomide.
La justice
La mutilation des organes génitaux féminins
(Réponse à la question posée le 15 juin 2022 par l’honorable Frances Lankin)
Ministère de la Justice
La mutilation génitale féminine/excision (MGF/E) constitue une menace sérieuse pour la santé des femmes et des filles. Le ministère de la Justice n’est au courant d’aucune accusation ou poursuite reliée à cette pratique. Les provinces sont responsables de l’application des infractions au Code criminel dans leurs juridictions respectives et le Service des poursuites pénales du Canada poursuit les infractions criminelles dans les territoires.
L’approche du gouvernement fédéral en matière de lutte contre la MGF/E au niveau national comprend le soutien des efforts communautaires. Par le biais de la Stratégie canadienne de prévention et de lutte contre la violence fondée sur le sexe, Femmes et Égalité des genres Canada (FEGC) travaille à la prévention et à la lutte contre toutes les formes de violence fondée sur le sexe, y compris la MGF/E. Actuellement, FEGC fournit un financement aux organismes suivants : le réseau End FGM Network pour combler les lacunes en matière de connaissances dans les domaines de la médecine, de l’éducation et de la protection de l’enfance; le centre de santé communautaire Women’s Health in Women’s Hands pour élaborer une trousse d’outils à l’intention des survivantes, des fournisseurs de soins de santé et des fournisseurs de services communautaires en ce qui concerne les MGF/E; le Centre d’établissement des nouveaux immigrants de Peel pour accroître la sensibilisation aux MGF/E.
La santé
Le Programme canadien de soutien aux survivants de la thalidomide
(Réponse à la question posée le 26 octobre 2022 par l’honorable Raymonde Saint-Germain)
Santé Canada
Le gouvernement fédéral est déterminé à soutenir les survivants canadiens de la thalidomide. Cela comprend une approche équitable et sensible pour évaluer les personnes non confirmées qui présentent une demande au Programme canadien de soutien aux survivants de la thalidomide.
Les services d’actions collectives Epiq Canada, un fournisseur de services bien établi, agissent à titre de tiers administrateur indépendant responsable de la mise en œuvre du programme et apportent leur expertise et leur impartialité au processus. Epiq a mis en place un processus de réexamen pour s’assurer que les demandeurs dont la demande a été rejetée à n’importe quelle étape du processus d’évaluation ont la possibilité de soumettre des informations supplémentaires à l’appui de leur demande, sans avoir à présenter une nouvelle demande.
À la dernière étape du processus d’évaluation, le comité multidisciplinaire d’experts médicaux et juridiques examinera toutes les informations disponibles avant de faire une recommandation à l’administrateur du programme sur l’admissibilité du demandeur au programme. Les candidats refusés à cette dernière étape auront la possibilité de demander un réexamen par écrit, via une réunion virtuelle ou en personne. Pour plus de détails sur les options de réexamen à l’étape 3, les candidats sont invités à contacter directement l’administrateur. Tous les individus sont traités avec respect et compassion.
[Français]
ORDRE DU JOUR
Les travaux du Sénat
L’honorable Raymonde Gagné (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, conformément à l’article 4-13(3) du Règlement, j’informe le Sénat que, lorsque nous passerons aux affaires du gouvernement, le Sénat abordera les travaux dans l’ordre suivant : l’étude de la motion no 72, suivie de la deuxième lecture du projet de loi S-11, suivie de tous les autres articles dans l’ordre où ils figurent au Feuilleton.
[Traduction]
La justice
La Loi sur l’abrogation des lois—Adoption de la motion tendant à faire opposition à l’abrogation de la loi et de dispositions d’autres lois
L’ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Gagné, appuyée par l’honorable sénatrice LaBoucane-Benson,
Que, conformément à l’article 3 de la Loi sur l’abrogation des lois, L.C. 2008, ch. 20, le Sénat adopte une résolution faisant opposition à l’abrogation de la loi et des dispositions des autres lois ci-après, qui ne sont pas entrées en vigueur depuis leur adoption :
1.Loi sur les relations de travail au Parlement, L.R., ch. 33 (2e suppl.) :
-partie II;
2.Loi sur les contraventions, L.C. 1992, ch. 47 :
-alinéa 8(1)d), articles 9, 10 et 12 à 16, paragraphes 17(1) à (3), articles 18 et 19, paragraphe 21(1) et articles 22, 23, 25, 26, 28 à 38, 40, 41, 44 à 47, 50 à 53, 56, 57, 60 à 62, 84 (en ce qui concerne les articles suivants de l’annexe : 2.1, 2.2, 3, 4, 5, 7, 7.1, 9, 10, 11, 12, 14 et 16) et 85;
3.Loi de mise en œuvre du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires, L.C. 1998, ch. 32;
4.Loi sur l’Office d’investissement des régimes de pensions du secteur public, L.C. 1999, ch. 34 :
-articles 155, 157, 158 et 160, paragraphes 161(1) et (4) et article 168;
5.Loi sur la modernisation de certains régimes d’avantages et d’obligations, L.C. 2000, ch. 12 :
-paragraphes 107(1) et (3) et article 109;
6.Loi sur le Yukon, L.C. 2002, ch. 7 :
-articles 70 à 75 et 77, paragraphe 117(2) et articles 167, 168, 210, 211, 221, 227, 233 et 283;
7.Loi modifiant la Loi sur la pension de retraite des Forces canadiennes et d’autres lois en conséquence, L.C. 2003, ch. 26 :
-articles 4 et 5, paragraphe 13(3), article 21, paragraphes 26(1) à (3) et articles 30, 32, 34, 36 (en ce qui concerne l’article 81 de la Loi sur la pension de retraite des Forces canadiennes), 42 et 43;
8.Loi d’exécution du budget de 2005, L.C. 2005, ch. 30 :
-partie 18 à l’exception de l’article 125;
9.Loi modifiant certaines lois relatives aux institutions financières, L.C. 2005, ch. 54 :
-paragraphe 27(2), article 102, paragraphes 239(2), 322(2) et 392(2);
10.Loi d’exécution du budget de 2009, L.C. 2009, ch. 2 :
-articles 394, 399 et 401 à 404;
11.Loi sur les réseaux de cartes de paiements, L.C. 2010, ch. 12, art. 1834 :
-articles 6 et 7;
12.Loi visant à promouvoir l’efficacité et la capacité d’adaptation de l’économie canadienne par la réglementation de certaines pratiques qui découragent l’exercice des activités commerciales par voie électronique et modifiant la Loi sur le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, la Loi sur la concurrence, la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques et la Loi sur les télécommunications, L.C. 2010, ch. 23 :
-articles 47 à 51, 55 et 68, paragraphe 89(2) et article 90.
13.Loi sur la révision du système financier, L.C. 2012, ch. 5 :
-articles 54 et 56 à 59;
14.Loi améliorant la sécurité ferroviaire, L.C. 2012, ch. 7 :
-paragraphes 7(2) et 14(2) à (5);
15.Loi visant à protéger le système d’immigration du Canada, L.C. 2012, ch. 17 :
-articles 70 à 77;
16.Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durable, L.C. 2012, ch. 19 :
-articles 432, 433, 459, 460, 462 et 463;
17. Loi de 2012 sur l’emploi et la croissance, L.C. 2012, ch. 31 :
-articles 361 à 364.
L’honorable Pat Duncan : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour parler de la motion no 72 du gouvernement, qui propose de reporter l’abrogation de certaines lois au titre de la Loi sur l’abrogation des lois.
Comme nous le savons, il s’agit d’un exercice annuel, et je tiens à dire quelques mots, surtout en ce qui concerne les articles se rapportant au Yukon. Les sénateurs doivent savoir que j’appuie l’adoption immédiate de la motion et que mes remarques seront brèves.
Honorables sénateurs, je suis vraiment reconnaissante envers la coordinatrice législative du représentant du gouvernement d’avoir distribué un document comprenant les recommandations et les explications des ministres responsables quant aux raisons pour lesquelles les diverses dispositions devraient être maintenues dans les Lois du Canada, même si elles ne sont pas encore en vigueur.
Honorables sénateurs, hier, j’ai interrogé le représentant du gouvernement sur la modernisation de l’assurance-emploi au Canada. Je constate que trois dispositions de la Loi sur la modernisation de certains régimes d’avantages et d’obligations sont incluses dans la motion qui nous occupe. Elles le sont depuis 2011. L’article porte sur l’élargissement des catégories de parents admissibles à des prestations parentales dans le cadre du régime d’assurance-emploi dans les situations où la filiation juridique pourrait être refusée en vertu du droit provincial ou territorial.
(1500)
Soit dit en passant, une autre situation où des changements s’imposent est celle des travailleurs autonomes qui doivent cotiser à l’assurance-emploi. Cela concerne les chauffeurs de taxi ainsi que les coiffeurs et les barbiers qui louent une chaise dans un salon. J’ai entendu parler, comme d’autres d’ailleurs, des obstacles auxquels se heurtent ces travailleurs autonomes lorsqu’ils tentent de réclamer des prestations d’assurance-emploi telles que des prestations parentales. Il faut moderniser le régime d’assurance-emploi, notamment en le simplifiant et en établissant des lignes directrices claires. C’est un problème parmi tant d’autres qui montre l’urgence de réformer complètement le régime. Honorables sénateurs, les Canadiens sont anxieux et attendent avec impatience les résultats des efforts déployés par le gouvernement pour moderniser le régime. C’est un dossier très important.
Honorables sénateurs, passons de mesures nationales à des mesures concernant précisément le Yukon. Il y a plusieurs articles de diverses lois dont l’abrogation doit être reportée. Certaines dispositions de la Loi sur le Yukon sont des modifications connexes à d’autres lois qui entreront en vigueur lorsque la Loi sur l’Office des droits de surface du Yukon sera abrogée et que l’assemblée législative du territoire édictera sa propre loi pour la remplacer.
J’aimerais expliquer le contexte de cet élément précis de la motion à l’étude. J’aimerais expliquer pourquoi il n’est toujours pas entré en vigueur.
En 1998, le Canada, le Yukon, le grand chef du Conseil des Premières Nations du Yukon, au nom de 11 des 14 Premières Nations du Yukon, et des représentants des trois Premières Nations du Yukon qui n’avaient pas signé d’accord sur les revendications territoriales signaient le Protocole d’entente sur le transfert d’attributions au Yukon. Cet accord établissait un cadre pour les négociations sur le transfert et pour la négociation simultanée de règlements territoriaux. Le 29 octobre 2001, ce processus conduisait à la signature par le Canada et le Yukon de l’Accord de transfert au Yukon d’attributions relevant du Programme des affaires du Nord. J’ai moi-même signé ce document.
Je dois expliquer aux sénateurs qui ne connaissent pas le processus de transfert d’attributions à quel point ce dernier est important pour les trois territoires. C’est un peu comme leur Constitution. C’est ce qui leur a conféré des pouvoirs comparables à ceux des provinces en ce qui concerne le territoire et les ressources. Je dois, une fois de plus, mettre l’accent sur l’accord de consultation et mentionner que ce document a été produit en consultation avec les Premières Nations du Yukon et avec leur appui entier.
Comme je l’ai dit, le cadre a été établi en 1998 à la suite d’un processus de consultation. Ces consultations se poursuivent à ce jour, tout comme le dialogue entre les gouvernements du Canada et du Yukon et les dirigeants des Premières Nations. Elles mèneront à une solution et feront en sorte que la Loi sur l’Office des droits de surface du Yukon soit adéquate.
Honorables sénateurs, la Loi sur le Yukon comprend également des dispositions relatives à un vérificateur général du Yukon. À l’heure actuelle, la vérificatrice générale du Canada est responsable de vérifier toutes les dépenses des gouvernements territoriaux. Les compétences uniques nécessaires à un vérificateur général, comme celles que possède notre collègue, la sénatrice Elizabeth Marshall, ne sont pas monnaie courante. Le bassin de candidats en mesure de s’acquitter avec excellence de cette tâche colossale est limité, comme en témoigne la rareté des sénatrices Marshall. Par conséquent, il est difficile de trouver la bonne personne et le processus de recrutement exige des ressources considérables, tout comme la mise en place de toute la structure de soutien nécessaire. Il est beaucoup plus logique de mettre nos ressources en commun et d’avoir recours à l’actuelle vérificatrice générale du Canada plutôt qu’à des vérificateurs distincts pour chaque territoire du Nord, dont la population et les ressources sont limitées.
Honorables sénateurs, le Yukon, grâce à la Loi sur la protection des contribuables du Yukon, offre un cadre favorable au contrôle des dépenses publiques. La loi indique notamment — puisque vous êtes friands de lectures législatives :
3(1) Il est interdit de créer un déficit accumulé ou de l’augmenter.
(2) Il est interdit de demander à l’Assemblée législative de voter un crédit qui aurait pour résultat de créer un déficit accumulé ou de l’augmenter.
(4) Un mandat spécial ne peut être établi, s’il en résulte un déficit accumulé ou une augmentation de ce déficit.
Plus loin, la loi indique :
6(1) Si les comptes publics non consolidés déposés devant l’Assemblée législative ou distribués aux députés révèlent qu’un déficit accumulé a été créé ou qu’il a augmenté […] le chef du gouvernement est alors tenu
a) de demander, avant le 1er février de l’année suivante, la dissolution de l’Assemblée;
b) s’il y a dissolution de l’Assemblée, de demander dès lors la délivrance de brefs d’élection.
Autrement dit, honorables sénateurs, si le premier ministre — qui est généralement aussi ministre des Finances — souhaite endetter le territoire, il doit en demander l’autorisation à la population dans le cadre d’élections. Cette façon de procéder assure que le gouvernement gère les fonds publics de façon responsable.
Lors de son témoignage cette semaine devant le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants, l’honorable Sandy Silver, premier ministre du Yukon, a déclaré :
Nous avons présenté un budget excédentaire chaque année depuis six ans [...]
L’Institut C.D. Howe a souligné l’ouverture et la transparence de notre administration au Canada en matière de finances. Nous nous classons au deuxième rang sur la scène nationale pour ce qui est de l’établissement des budgets.
Dans cet extrait, « Nous » désigne le gouvernement du Yukon.
Ce témoignage confirme le solide appui que reçoit le Yukon du Bureau du vérificateur général et la nécessité de ne rien modifier dans la loi. J’espère qu’il convainc mes collègues d’adopter la motion concernant le recours aux services du Bureau du vérificateur général du Canada.
Honorables sénateurs, il va sans dire que j’appuie l’adoption de cette motion. J’ose espérer que les explications que j’ai données concernant les dispositions sur le Yukon justifient en partie la nécessité de les conserver dans la loi. Je vous remercie de votre compréhension et du temps et de l’attention que vous m’avez accordés. Je suis impatient de voir l’adoption de cette motion.
Merci. Mahsi’cho. Gùnáłchîsh.
Des voix : Bravo!
L’honorable Dennis Glen Patterson : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au nom du Groupe des sénateurs canadiens, dont je fais partie. Nous avons, au sujet de la motion annuelle concernant la Loi sur l’abrogation des lois, plusieurs préoccupations qui touchent, selon nous, au fondement même de notre devoir de sénateurs, selon lequel il nous incombe de protéger les droits du Parlement et de voir à ce que le gouvernement rende des comptes au pouvoir législatif.
La Loi sur l’abrogation des lois est une initiative du Sénat. Le regretté Tommy Banks, alors sénateur, dirigeait cette initiative à l’origine. Chaque année, le Parlement adopte des mesures législatives dont la date d’entrée en vigueur est laissée à la discrétion du gouvernement. On procède ainsi parce que, comme on le sait, le gouvernement doit parfois élaborer des règlements connexes ou terminer les consultations auprès des intervenants. Qu’arrive-t-il, toutefois, si un gouvernement ne fait pas entrer en vigueur une loi ou certaines dispositions?
Quand le Parlement adopte une loi, ce n’est pas une simple suggestion. Les gouvernements ne peuvent pas décider quelles parties des lois faire entrer en vigueur ni les laisser de côté complètement et indéfiniment. Toutes les mesures législatives qui reçoivent la sanction royale doivent, tôt ou tard, entrer en vigueur ou être abrogées.
C’est là que la Loi sur l’abrogation des lois entre en jeu. Elle constitue, selon nous, un important mécanisme de reddition de comptes qui permet de s’assurer que la volonté du Parlement est respectée et qu’aucun gouvernement actuel ou futur ne fera fi de mesures législatives qui ont été dûment adoptées à l’issue de notre processus législatif rigoureux. La loi exige que le gouvernement dépose, chaque année, un rapport au Parlement dans lequel il dresse la liste de toutes les dispositions législatives qui ne sont toujours pas en vigueur neuf ans après leur édiction.
Le rapport préparé cette année en application de la Loi sur l’abrogation des lois, dont traite cette motion, est le 12e rapport annuel. On y retrouve bon nombre des mêmes dispositions qui figuraient dans le premier rapport annuel, présenté il y a plus d’une décennie. Nous devons donc nous demander ce qu’a fait le gouvernement au cours des 12 dernières années pour assurer l’entrée en vigueur de ces dispositions. Dans certains cas, des décennies ont passé, alors que s’empoussièrent des parties de lois adoptées par le Parlement. Dans la plupart des cas, nous ne savons pas ce que fait le gouvernement, le cas échéant, pour les faire entrer en vigueur. Lorsque la motion sur la Loi sur l’abrogation des lois a été présentée au Sénat l’an dernier, le sénateur Downe a posé une question à la sénatrice Gagné au sujet des dispositions reportées liées aux prestations pour les Forces armées canadiennes, qui ont été adoptées en 2003. Nous sommes à nouveau saisis de cette disposition cette année, mais nous n’en savons pas plus sur ce qui a été fait pour compléter le règlement nécessaire.
(1510)
Il y a d’autres dispositions qu’on nous demande de reporter d’une autre année et qui ont été adoptées il y a encore plus longtemps. La partie II de la Loi sur les relations de travail au Parlement a été promulguée en 1985. Le gouvernement a demandé de reporter son entrée en vigueur une fois de plus parce qu’il doit — tenez-vous bien — réaliser « un travail stratégique convenable et une consultation appropriée auprès des parties prenantes parlementaires ». Après 37 ans, on commence à se demander si ce travail d’élaboration des politiques a déjà été entamé ou si le gouvernement ne fait que remettre les choses à plus tard, si j’ose dire.
On pourrait en dire autant de beaucoup d’autres lois dont on nous demande de reporter la date d’entrée en vigueur d’une année supplémentaire au moyen de cette motion. Par exemple, si nous lisons les explications du gouvernement pour les reports demandés dans la motion, nous constatons qu’il faut encore élaborer un règlement pour qu’une modification à la Loi sur les banques, qui a été adoptée par le Parlement en 2005, puisse entrer en vigueur. En outre, il faut apparemment mener plus de consultations auprès des intervenants de l’industrie concernant une modification importante de la Loi canadienne anti-pourriel, qui a été adoptée par le Parlement en 2010.
Nous craignons que cet important exercice de reddition de comptes ne devienne une routine parlementaire automatisée si nous n’exerçons pas un rôle de surveillance plus rigoureux. Si le gouvernement a l’intention de continuer à ne pas exercer la volonté du Parlement année après année, il doit fournir de meilleures explications.
Je souligne que le Règlement du Sénat australien oblige le gouvernement à ne pas se contenter d’indiquer au Parlement les lois qui ne sont pas entrées en vigueur, mais à inclure également un exposé des motifs de leur non-proclamation et un calendrier de mise en application. En d’autres termes, le gouvernement ne peut pas se contenter de dire que certaines lois ne sont pas encore entrées en vigueur. Il doit aussi indiquer quand la volonté du Parlement sera respectée.
Honorables sénateurs, lorsque nous serons saisis à nouveau de la motion à propos de la Loi sur l’abrogation des lois l’an prochain — ce qui ne manquera pas d’arriver —, nous verrons probablement plusieurs des projets de loi énumérés dans la motion de cette année être reportés de nouveau. Je suggère qu’avant de l’approuver, nous prenions le temps d’obtenir des réponses du gouvernement sur l’état des consultations ou de la rédaction des règlements. Nous pourrions renvoyer la motion à un comité pour obtenir directement ces réponses. Pour que la Loi sur l’abrogation des lois fonctionne comme il était prévu lors de son adoption par le Sénat, nous devons garder un œil sur l’état des lois non appliquées que nous avons accepté de reporter année après année.
Comme l’a dit notre cher ancien collègue, le regretté sénateur Tommy Banks, lorsqu’il a présenté le projet de loi :
[L]e Parlement n’est pas une fonction accessoire du gouvernement [...] Lorsque le Parlement exprime sa volonté, cela constitue une forme de directive [...] à l’endroit du Cabinet : il lui dit ce qu’il veut que le Cabinet fasse et il incombe au pouvoir exécutif d’obtempérer.
Honorables sénateurs, à l’avenir, faisons preuve de diligence raisonnable pour faire en sorte que la volonté du Parlement soit respectée. Merci.
Des voix : Bravo!
Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?
Des voix : D’accord.
(La motion est adoptée.)
[Français]
Projet de loi d’harmonisation no 4 du droit fédéral avec le droit civil
Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat
L’ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Clement, appuyée par l’honorable sénatrice Petitclerc, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-11, Loi no 4 visant à harmoniser le droit fédéral avec le droit civil du Québec et modifiant certaines lois pour que chaque version linguistique tienne compte du droit civil et de la common law.
L’honorable Pierre J. Dalphond : Honorables sénateurs, j’ai le plaisir de prendre la parole aujourd’hui pour appuyer l’adoption de principe du projet de loi S-11, qui porte le titre Loi n° 4 visant à harmoniser le droit fédéral avec le droit civil du Québec et modifiant certaines lois pour que chaque version linguistique tienne compte du droit civil et de la common law.
Avec un titre aussi long, il fallait bien inclure au moins quelques centaines d’articles — 642 plus exactement —, qui donnent en fin de compte un projet de loi de 224 pages, auxquelles on a ajouté 161 pages de notes explicatives.
Plus sérieusement, je veux féliciter la sénatrice Clement, la marraine du projet de loi, d’avoir réussi durant sa présentation non seulement à faire ressortir les objectifs du projet de loi, mais aussi à maintenir l’attention des collègues qui étaient présents, grâce à des pointes d’humour bien appréciées.
Comme elle l’a souligné, il s’agit du quatrième projet de loi du genre, qui incorpore les fruits de la révision méticuleuse d’un autre bloc de lois fédérales qui a pris fin en 2017. Plus précisément, on parle de 52 lois qui s’ajoutent aux 90 autres lois révisées précédemment et qui ont donné lieu aux trois premières lois d’harmonisation.
Le travail achevé à ce jour est impressionnant et reflète l’engagement du gouvernement fédéral en matière de rédaction des lois soumises au Parlement du Canada. Comme vous le savez, en vertu de la Loi constitutionnelle de 1867, les lois fédérales doivent être rédigées en français et anglais, afin qu’elles soient comprises par la plupart des citoyens du Canada. C’est, en somme, une question d’accès à la justice visant à refléter la dualité linguistique de ce pays.
Sur ce point, il m’apparaît important de mentionner de nouveau que le texte le plus fondamental du pays, la Loi constitutionnelle de 1867, n’existe officiellement en grande partie qu’en anglais. En fait, à ce jour, seuls les articles 1, 29, 51, 90Q.1, 90Q.2, 92A et 93A — donc sept articles au total — ont été adoptés en anglais et en français et ont force de loi dans les deux langues. En d’autres mots, pratiquement tous les articles de la Loi constitutionnelle fondamentale du pays n’ont de valeur officielle qu’en anglais.
Cette déplorable situation dans un État qui se déclare officiellement bilingue se prolonge, malgré la promesse qui a été faite aux francophones de ce pays en 1982, lors du rapatriement de la Constitution. En effet, malgré l’article 55 de la Loi constitutionnelle de 1982, 40 ans plus tard, cette promesse n’est toujours pas respectée et le gouvernement actuel refuse, à ce jour, de faire quoi que ce soit pour qu’elle soit enfin honorée.
Dans le cadre de la modernisation de la Loi sur les langues officielles, il faudra s’assurer que celle-ci contient des dispositions qui forceront le gouvernement à cesser d’ignorer son obligation constitutionnelle de doter le pays d’une Constitution bilingue, et ce, afin que les francophones aient enfin accès à une version dans leur langue de la loi la plus importante du pays.
De même, j’encourage les peuples autochtones à reprendre la maîtrise de leurs langues traditionnelles et j’invite le gouvernement du Canada à faire en sorte que nos lois les plus importantes deviennent accessibles dans ces langues. Là, encore, il s’agit d’une question d’égalité d’accès.
Pour refléter la réalité de notre pays, il ne suffit pas d’avoir des lois dans les deux langues officielles. Il faut aller plus loin, comme l’a rappelé éloquemment la sénatrice Dupuis dans l’historique qu’elle nous a donné la semaine dernière. Il faut avoir des lois qui respectent le fait qu’au Québec, comme c’était le cas au Bas‑Canada avant la Confédération, les rapports de droit privé découlent d’un système dont l’origine n’est pas la common law britannique, mais un droit civil dont l’origine remonte à la coutume de Paris, suivie en 1866 de l’entrée en vigueur du Code civil du Bas-Canada, lui-même issu du Code civil français, qui a été adopté en 1804 après la Révolution française sous la gouverne de l’empereur Napoléon. Déchu de son pouvoir, exilé à Sainte-Hélène, Bonaparte aurait dit ce qui suit :
Ma vraie gloire n’est pas d’avoir gagné quarante batailles ; Waterloo effacera le souvenir de tant de victoires ; ce que rien n’effacera, ce qui vivra éternellement, c’est mon code civil.
(1520)
Il avait raison, puisque le code civil révolutionnaire, appelé par la suite le Code Napoléon, est la source du droit privé dans la majeure partie de l’Europe. Pour le Québec, l’adoption en 1865 du Code civil du Bas-Canada reflète le désir d’assurer la pérennité de notre attachement au Code Napoléon en matière de droit privé québécois, et ce, au moment où la Confédération montrait son nez.
Sur le plan fédéral, pour tenir compte de la spécificité juridique québécoise, depuis 1978 les projets de loi et les règlements sont rédigés par une équipe de deux rédacteurs, soit un juriste anglophone, expert de la common law, et un juriste francophone, habituellement civiliste. Le produit final de cette corédaction reflète ainsi les deux systèmes juridiques canadiens.
En 1991, après des dizaines d’années de discussions et de rédaction, l’Assemblée nationale du Québec a adopté un nouveau code civil, qui a remplacé le Code civil du Bas-Canada à compter du 1er janvier 1994. Le Code civil du Québec reprend une organisation et des principes qui trouvent leur origine dans la France révolutionnaire, tout en les adaptant à la nouvelle réalité, notamment commerciale.
Ce code est si moderne qu’il a inspiré de nombreux civilistes dans d’autres pays. Il a même servi de modèle aux codes civils d’Argentine et de Roumanie et a inspiré de nouveaux chapitres aux codes civils actuels de la Belgique, de la France et de la République tchèque.
L’adoption par le Québec d’un nouveau code civil a aussi forcé le législateur fédéral à décider, en 1993, de moderniser ses textes afin de les harmoniser avec ce nouveau code.
Je souligne aussi qu’après le référendum de 1995, le premier ministre Chrétien a déposé à la Chambre des communes une motion dans laquelle il a proposé la reconnaissance du Québec comme [...] société distincte comprenant, notamment, une majorité d’expression française, une culture qui est unique et une tradition de droit civil.
Dans cette foulée, toujours en 1995, le ministère de la Justice du Canada a adopté la politique sur le bijuridisme législatif. L’objectif de cette politique est de fournir aux Canadiennes et aux Canadiens l’accès à des textes législatifs fédéraux qui soient respectueux du système de droit qui les régit, et ce, dans chacune des versions linguistiques des textes législatifs.
On parle désormais non seulement de lois bilingues, mais de lois bijuridiques, c’est-à-dire qui utilisent des concepts qui sont propres aux deux systèmes de droit de notre pays. Comme le soulignait la ministre de la Justice Anne McLellan lors de l’adoption de la première loi d’harmonisation en 2001, et je cite :
Les lois fédérales sont uniformes, en ce sens qu’elles appliquent une règle unique à la grandeur du Canada. Elles sont également harmonisées, dans la mesure où elles respectent les particularités du droit civil ou de la common law relativement aux questions de propriété et de droit civil dans la mesure où ils s’appliquent sur un territoire donné.
En d’autres mots, les lois fédérales ne visent pas l’uniformité dans le détail à travers le pays, mais plutôt une harmonisation avec le droit privé qui s’applique dans la province pertinente.
Il en résulte des lois fédérales qui ont en réalité quatre dimensions : une version anglaise applicable dans les provinces qui pratiquent la common law, une version française applicable dans ces mêmes provinces et rédigée à l’aide de la terminologie de la common law en français — une innovation qui n’existait nulle part ailleurs au monde —, une version qui reprend les concepts de droit civil propres au Québec et une quatrième version qui utilise la terminologie de droit civil en anglais, appliquée au Québec.
La mise en application de cette importante politique a donné lieu, en 2001, à l’adoption de la première loi d’harmonisation qui touchait près de 50 lois et qui a ajouté, de façon importante, deux articles à la Loi d’interprétation du Canada, soit les articles 8.1 et 8.2, qui affirment le bijuridisme comme principe interprétatif de toutes les lois fédérales.
Pour commenter le bijuridisme sous-jacent à la rédaction des lois fédérales, mon ami l’honorable Jacques Dufresne, juge récemment retraité, a écrit ce qui suit dans un arrêt unanime de la Cour d’appel du Québec, intitulé Salaberry-de-Valleyfield (Ville de) c. Lavigne et rendu en 2014, et je cite :
La technique de rédaction utilisée par le législateur pour harmoniser, à la fois au droit civil québécois et à la common law […] qui consiste à rendre par des termes différents la règle de droit applicable à chaque système de droit, est un indicateur puissant du fait que les concepts juridiques applicables peuvent comporter des nuances ou distinctions, même significatives.
[Traduction]
Chers collègues, ce projet de loi contient beaucoup plus de choses qu’il n’y paraît. Au-delà de la longue liste de lois qui sont modifiées de façon très technique, ce projet de loi tient compte d’une des caractéristiques distinctives du Québec : son Code civil et la tradition de droit civil. Cela démontre aussi que notre fédération est capable de respecter cette distinction.
Comme le sénateur Joyal l’avait dit en 2004 au sujet d’un projet de loi d’harmonisation précédent :
C’est essentiellement conforme à la philosophie du pays qui veut que nous conservions nos identités tout en progressant ensemble.
C’est aussi pourquoi, selon la loi, trois juges du Québec siègent à la Cour suprême du Canada, et que le juge en chef et le juge en chef adjoint de la Cour d’appel fédérale, de la Cour fédérale et de la Cour canadienne de l’impôt ne proviennent pas de la même tradition juridique.
En conclusion, chers collègues, je vous invite à adopter en principe ce projet de loi afin de réaffirmer l’importance de la nature bijuridique du Canada. Il pourra alors être renvoyé au Comité permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, qui en examinera soigneusement le contenu, y compris les aspects techniques.
Merci. Meegwetch.
[Français]
Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénatrice Clement, avez-vous une question?
L’honorable Bernadette Clement : Oui. Le sénateur Dalphond accepterait-il de répondre à une question?
Le sénateur Dalphond : Oui, bien sûr, avec la peur que cela entraîne puisque la question provient de la marraine du projet de loi.
La sénatrice Clement : Merci pour ce beau discours, où vous avez abordé la dualité linguistique, la reconnaissance des langues autochtones et la Loi sur l’interprétation. Vous avez soulevé de très bons points.
Avez-vous connaissance de la réaction des civilistes en général face à ce genre de projet d’harmonisation qui se poursuit?
Le sénateur Dalphond : Le bijuridisme est un concept assez québécois. Quand j’étais à l’université, on n’avait pas encore la Charte canadienne des droits et libertés, mais on avait de grandes discussions sur le bijuridisme et sur la nécessité d’avoir des lois fédérales harmonisées au droit civil québécois. Mon professeur André Morel a écrit maints articles sur la question.
Lorsque la politique fédérale d’harmonisation a été adoptée en 1991 ou en 1993, et avant qu’on annonce qu’il y aurait une rédaction bilingue, une section de droit civil a été créée de façon distincte au ministère de la Justice, en 1991, je crois. Cela a envoyé un signe positif, une sous-ministre en droit civil a été nommée — je crois que c’était la juge Anne-Marie Trahan, à l’époque. Par la suite, la politique du bijuridisme a été énoncée en 1995, et tout cela a été applaudi au Québec. J’ai assisté à de nombreuses conférences dans les facultés de droit, et je dois dire que j’ai la collection des trois livres publiés par le ministère de la Justice sur la lexicologie, l’histoire et le bijuridisme.
On ne comprend pas assez cette contribution d’un État, comme le Canada, qui est fédératif et bijuridique; il n’y en a pas beaucoup dans le monde. Notre contribution, non seulement en common law en français, en droit civil en anglais et en ce qui a trait au bijuridisme en même temps, est tout à fait unique, à mon avis. Dans ce sens, au Québec comme ailleurs au Canada, je pense qu’on peut en être fier. Puis, on participe aux deux grandes traditions juridiques dans le monde entier, ce qui est fantastique également. J’espère que cela répond à votre question.
(1530)
[Traduction]
Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénateur Cotter, vous disposez de huit secondes.
L’honorable Brent Cotter : Je vais garder ma question pour une prochaine intervention.
Son Honneur la Présidente intérimaire : À moins que le sénateur Dalphond ne demande cinq minutes de plus.
[Français]
Sénateur Dalphond, est-ce que vous demandez cinq minutes de plus?
Le sénateur Dalphond : Si le Sénat y consent.
Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, consentez-vous à accorder cinq minutes de plus?
Des voix : D’accord.
[Traduction]
Le sénateur Cotter : Ma brève question porte sur le caractère bijuridique du Canada, plutôt que sur le projet de loi, même si elle a un lien avec celui-ci.
Sénateur Dalphond, comme vous le savez, on dit parfois de Paul‑André Crépeau, un Canadien renommé, qu’il est le père de la version moderne du Code civil du Québec. Si je parle de lui en particulier, c’est parce qu’il est né à Gravelbourg, en Saskatchewan, comme vous le savez probablement. Titulaire d’un doctorat en droit de la Sorbonne, il a en outre reçu des doctorats honorifiques de l’Université Dalhousie et de l’Université de la Saskatchewan. Ma question porte principalement sur le caractère bijuridique fondamental du Canada, que M. Crépeau a mis de l’avant dans ses travaux. À votre avis, se serait-il attendu à la nécessité de mener l’exercice auquel nous procédons présentement ou aurait-il appuyé notre démarche comme une exigence accessoire pour soutenir le bijuridisme que vous avez mentionné?
Le sénateur Dalphond : Une fois de plus, vous m’apprenez quelque chose. Évidemment, toutes les personnes célèbres viennent de la Saskatchewan. On le prouve quotidiennement dans cette enceinte.
Paul-André Crépeau était un grand juriste qui nous a quittés trop tôt. Il a laissé un héritage non seulement dans ses livres, mais il a aussi fondé le Centre de droit privé et comparé à l’Université McGill, qui est à mon avis l’une des institutions de premier plan. Il a déjà été dirigé par le juge Kasirer, qui siège aujourd’hui à la Cour suprême.
Je suis d’avis que la contribution et l’héritage de M. Crépeau sont importants. S’il nous voyait aujourd’hui débattre au Sénat du bijuridisme du Canada, je pense qu’il serait fier de nous — fier d’une question posée par quelqu’un de la Saskatchewan et fier de voir que les idées venant des Saskatchewanais sont celles qui sont adoptées au Québec et celles qui régissent la législation fédérale de nos jours. C’est tout un exploit, et il serait fier de nous.
(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)
Projet de loi d’exécution de l’énoncé économique de l’automne 2022
Neuvième rapport du Comité des peuples autochtones sur la teneur du projet de loi—Ajournement du débat
Le Sénat passe à l’étude du neuvième rapport du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones (teneur du projet de loi C-32, Loi portant exécution de certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne déposé au Parlement le 3 novembre 2022 et de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 7 avril 2022), déposé au Sénat le 6 décembre 2022.
L’honorable Dennis Glen Patterson : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour faire part de mes préoccupations à l’égard de ce rapport. Je tiens à préciser que ces inquiétudes ne concernent pas les travaux du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, dont je fais partie.
Malheureusement, j’estime que le rapport ne tient plus compte de tous les aspects à considérer en ce qui a trait aux sous-sections A et B de la section 3 de la partie 4 du projet de loi C-32, qui proposent des modifications à la Loi sur la gestion des terres des premières nations.
Le jeudi 17 novembre, à 19 h 30, le Sénat a adopté un ordre de renvoi donnant instruction au Comité des peuples autochtones de mener une étude préalable sur cette section et d’en faire rapport le 5 décembre.
Nous avons aussitôt entrepris les travaux. Nous avons trouvé des témoins et leur avons demandé de comparaître devant le comité. Nous avons entendu les deux premiers témoins — qui représentent des organisations qui ont réclamé ces modifications — le 22 novembre, et les ministres Miller et Hajdu le 30 novembre. Nous avons dû donner les dernières instructions relatives à la rédaction immédiatement après le témoignage des ministres afin que le rapport soit préparé, rédigé et traduit avant la date de dépôt du rapport, soit le 5 décembre. Nous avons donc disposé d’un total de 12 jours ouvrables pour réaliser l’étude et en faire rapport.
Malheureusement, deux des communautés des Premières Nations que nous avons jointes ont décliné l’invitation, et quatre autres n’y ont pas répondu. Comme nous n’avions pas beaucoup de temps et nous devions prévoir assez de temps pour les approbations et la traduction avant la date du dépôt, nous n’avons pas eu le temps de trouver d’autres communautés à consulter.
Le 1er décembre, soit un jour après que nous avons finalisé la rédaction de lignes directrices au comité, nous avons reçu un message des Manitoba Keewatinowi Okimakanak demandant à témoigner. Nous savions que nous n’avions pas le temps d’en faire témoigner des représentants puisque nous devions déposer notre rapport le lundi suivant, mais j’ai insisté pour que nous demandions un mémoire, et nous avons suggéré qu’un mémoire soit également envoyé au Comité sénatorial des finances nationales.
Je sais que la sénatrice McCallum a l’intention de parler elle aussi de ces préoccupations, mais je dirai que dans le mémoire que nous avons reçu dimanche dernier, on retrouve des termes forts sur les lacunes dans l’application des règlements créés grâce aux pouvoirs accordés aux communautés des Premières Nations par la Loi sur la gestion des terres des premières nations. Les Manitoba Keewatinowi Okimakanak ont suggéré de coordonner les modifications apportées à diverses lois connexes afin de répondre à ces préoccupations majeures concernant l’application des dispositions de la nouvelle Loi sur la gestion des terres des premières nations.
Chers collègues, je profite de l’occasion qui m’est donnée aujourd’hui de parler de ce rapport pour souligner pourquoi notre nouvelle approche d’examen du projet de loi devrait s’avérer une préoccupation majeure pour tous. À mon avis, il y a eu une tendance au cours des deux dernières sessions à adopter les projets de loi à la hâte. Tout est en quelque sorte une priorité qui doit toujours être adoptée avant une certaine date, et le recours aux études préalables — un outil autrefois réservé aux projets de loi extrêmement complexes et aux budgets — devient maintenant la norme.
Ce n’est pas sans raison qu’il est prévu que le Sénat et l’autre endroit mènent des études consécutives des projets de loi : les études faites en parallèle entraînent de graves lacunes dans le processus entourant les témoignages et ne permettent pas d’optimiser le temps qui est offert aux parties intéressées pour se prononcer sur des mesures législatives relevant peut-être de leur expertise.
L’organisation Manitoba Keewatinowi Okimakanak n’est pas un regroupement de Premières Nations parmi tant d’autres. Elle représente 26 communautés des Premières Nations du Nord du Manitoba, dont les territoires couvrent les deux tiers de la province. Les quatre Premières Nations avec des codes fonciers représentées par les Manitoba Keewatinowi Okimakanak incluent une Première Nation faisant partie des premiers signataires d’une entente, et elles comptent parmi les entités qui ont la plus longue expérience pratique de la mise en œuvre de la Loi sur la gestion des terres des premières nations. C’est notamment en s’appuyant sur cette expérience pratique que l’organisation a présenté son mémoire. Cependant, à cause d’échéanciers que nous nous sommes imposés, nous n’avons pas eu suffisamment de temps pour la recevoir au Comité des peuples autochtones. En fait, les représentants de l’organisation m’ont dit qu’ils n’avaient été informés de l’étude qu’au début de la semaine passée et qu’ils ont immédiatement demandé à témoigner devant le comité sénatorial et le comité de l’autre endroit qui examinait le projet de loi.
Chers collègues, j’espère que le Comité des finances sera en mesure d’accorder du temps au grand chef des Manitoba Keewatinowi Okimakanak, qui est en ce moment à Ottawa pour un autre événement. Cependant, je sais que ce comité est lui aussi pressé par le temps.
J’ai pris la parole aujourd’hui parce que je suis agacé par le nombre de fois où nous avons dû manquer des témoignages importants ou réduire nos listes de témoins en raison de délais trop serrés. Si certains peuvent penser que 12 jours ouvrables représentent beaucoup de temps, ceux qui connaissent les procédures du Sénat savent que c’est à peine suffisant si l’on tient compte du temps de réponse des témoins et du temps nécessaire pour la traduction.
C’est particulièrement le cas pour les organisations autochtones ou communautaires qui ont déjà des ressources limitées. Nous devons donner un préavis aussi long que possible aux témoins potentiels. Nous devons ralentir et nous assurer que nous examinons correctement les projets de loi, en prenant le temps d’entendre le plus grand nombre possible de personnes et de points de vue différents.
(1540)
Il est temps que le Sénat redevienne maître de son calendrier et de ses affaires au lieu d’être à la merci des ministres qui ne connaissent ni notre procédure, ni les délais dont nous avons besoin, ni les diverses priorités que nous devons concilier.
Merci.
L’honorable Mary Jane McCallum : Honorables sénateurs, je vais citer le mémoire de Garrison Settee, grand chef des Manitoba Keewatinowi Okimakanak Inc., ou MKO, à l’intention du Comité sénatorial permanent des finances nationales concernant le projet de loi C-32, et plus particulièrement la section 3 de la partie 4, loi sur l’Accord-cadre relatif à la gestion des terres de premières nations :
Les efforts déployés par les Premières Nations membres des MKO en vue de prendre et d’appliquer des lois et des règlements municipaux en réponse à la pandémie de COVID-19 ont révélé et mis vivement en lumière le fait que, à la suite des deux tentatives précédentes du Parlement en vue de conférer ou d’appuyer l’autonomie gouvernementale autochtone par la voie du projet de loi C-428 en 2015 et du projet de loi C-49 en 1999, certains régimes sont en suspens : des lois et des règlements municipaux des Premières Nations ne peuvent donner lieu à aucune poursuite et sont donc impossibles à appliquer par les services de police.
Cette situation existe partout au Canada. J’ai entendu le sénateur dire que cela ne concerne qu’une seule bande. Or, toutes les bandes se retrouvent dans cette même situation.
Ce mémoire parle du fait que des régimes législatifs des Premières Nations sont en suspens depuis l’adoption du projet de loi C-49, Loi sur la gestion des terres des premières nations.
L’expérience des MKO et des Premières Nations qui en sont membres indique que la section 3 de la partie 4 du projet de loi C-32, qui propose la loi sur l’Accord-cadre relatif à la gestion des terres de premières nations, doit être amendée pour éliminer toute ambiguïté en matière d’application et de poursuites judiciaires de sorte qu’il ne reste aucun doute quant à l’obligation, en vertu de l’accord, d’appliquer les lois des Premières Nations et d’intenter des poursuites lorsqu’elles sont enfreintes. Autrement, l’incertitude se réinstallera ou se poursuivra, donnant lieu à ce que les MKO appellent les « régimes en suspens », où des lois sont édictées par les Premières Nations conformément à une loi du Parlement, mais les politiques du Canada et de la GRC n’en reconnaissent pas la validité, si bien qu’elles ne peuvent donner lieu à des poursuites et ne sont pas appliquées par la GRC ou la police.
Les MKO ont qualifié d’horribles les expériences vécues par la nation crie de Misipawistik, de Grand Rapids, au Manitoba — une nation assujettie à la Loi sur la gestion des terres des premières nations — dans le cadre de ses efforts pour appliquer une loi sur les mesures d’urgence liées à la COVID-19, qui a été adoptée en vertu de son code foncier, sans l’aide de la GRC.
Le 25 mai 2021, la cheffe Heidi Cook, de la nation crie de Misipawistik, a raconté au Comité permanent des affaires autochtones et du Nord de la Chambre des communes les expériences vécues par sa communauté durant une éclosion de COVID-19, au cours de l’hiver 2020-2021. Je la cite :
Les membres de notre équipe d’intervention d’urgence liée à la pandémie, de notre équipe de soins de santé et de notre équipe chargée de l’application des mesures ont affirmé qu’ils se sentaient abandonnés. Nous avions du mal à contrôler la propagation. Durant la deuxième vague, le nombre de cas a atteint 155 et nous avons tracé près de 300 contacts. Nous en avons tous subi personnellement les conséquences. Je crois que nous souffrons tous de stress post-traumatique en raison de la situation dans laquelle nous nous sommes retrouvés.
Depuis que notre loi sur les mesures d’urgence est venue à échéance, nous n’avons adopté aucune autre loi. À quoi bon adopter une loi si elle ne peut pas être appliquée? C’est pourquoi nous n’avons adopté aucune autre loi depuis.
Les expériences vécues par la nation crie de Misipawistik face au refus de la GRC de faire respecter les mesures établies dans la loi sur les mesures d’urgence liées à la COVID-19 adoptée par la nation ont poussé les MKO à communiquer, en janvier 2021, avec le président du Conseil consultatif des terres, Robert Louie, afin qu’il joigne ses efforts aux leurs. Les MKO et le conseil ont travaillé en étroite collaboration afin de transmettre ces enjeux pressants de santé et de sécurité publiques des Premières Nations aux ministres fédéraux et provinciaux responsables, à la commissaire de la GRC et aux parlementaires.
On pouvait lire ce qui suit dans une réponse que m’a envoyée, en ma qualité de grand chef des MKO, la commissaire de la GRC, Brenda Lucki, le 17 février 2020 :
La GRC reconnaît les pouvoirs des Premières Nations en vertu de la Loi sur la gestion des terres des premières nations, mais elle n’est pas certaine que les codes fonciers adoptés sous le régime de cette loi leur confèrent le pouvoir juridique d’adopter des lois liées à la COVID-19. D’ici à ce que de nouvelles directives soient reçues, la GRC continuera de suivre le processus en place quant à l’application des règlements administratifs relatifs à la COVID-19 adoptés conformément à la Loi sur les Indiens, et de faire observer les lois provinciales applicables.
Présentant une position similaire à celle de la commissaire de la GRC, Kelley Blanchette, sous-ministre adjointe, Terres et développement économique, Services aux Autochtones Canada, écrivait ceci au président Robert Louie, le 15 mars 2021 :
Je peux comprendre la frustration ressentie par les Premières Nations qui se sont approprié des aspects aussi fondamentaux de leur gouvernance au moyen de l’adoption d’un code foncier pour ensuite être contraintes de s’en remettre aux pouvoirs prévus dans la Loi sur les Indiens pour répondre à la pandémie de COVID-19.
Bien que d’autres analyses soient nécessaires, j’ai demandé à mon équipe de collaborer avec vous afin de trouver des solutions pour élargir et clarifier les pouvoirs par le biais des prochaines modifications à apporter à l’Accord-cadre.
Lors d’une réunion virtuelle organisée par Services aux Autochtones Canada le 21 mai 2021 et à laquelle participaient les MKO, le Conseil consultatif des terres, ainsi que plusieurs hauts fonctionnaires du gouvernement fédéral et du ministère de la Justice du Manitoba, David Antonyshyn, directeur adjoint des poursuites pénales, a recommandé notamment ce qui suit, comme l’indique le procès-verbal consigné par Service aux Autochtones Canada :
Le [Service des poursuites pénales du Canada] a pour mandat d’intenter des poursuites au nom du gouvernement du Canada, c’est-à-dire de faire respecter les lois adoptées par le Parlement et examinées par le procureur général (PG).
À l’exception des territoires où le [Service des poursuites pénales du Canada] offre des services complets de poursuites, le [service] partage avec les provinces les pouvoirs en matière de poursuites.
Le [Service des poursuites pénales du Canada] peut intenter des poursuites, conformément à la Loi sur les Indiens, puisqu’il s’agit d’une loi fédérale.
Le [Service des poursuites pénales du Canada] est d’avis qu’il n’a pas le mandat d’intenter des poursuites conformément à l’Accord-cadre (19.10)/la [Loi sur la gestion des terres des premières nations] (22(3)). La modification de ces cadres juridiques, afin que le [Service des poursuites pénales du Canada] puisse assumer un rôle, nécessiterait des discussions fédérales-provinciales, fédérales-Premières Nations et provinciales-Premières Nations.
La commissaire de la GRC et Services aux Autochtones Canada ont suggéré que les Premières Nations qui se sont dotées d’un code foncier appliquent un règlement administratif adopté par un conseil conformément à la Loi sur les Indiens pour remédier au problème que pose l’absence d’application et de poursuites dans le cas des lois adoptées par les Premières Nations, aux termes d’un code foncier, dans le cadre de la COVID-19. Comme les règlements administratifs pris sous le régime de la Loi sur les Indiens n’avaient pas été appliqués au Manitoba pendant 25 ans et n’avaient donc pas donné lieu à des poursuites, l’application d’un tel règlement devait se faire aux termes du Protocole relatif à l’exécution des règlements administratifs pris en vertu des articles 81 et 85.1 de la Loi sur les Indiens (le protocole) qui avait récemment été préparé par le Service des poursuites pénales du Canada et la GRC.
Cependant, comme la sanction royale accordée le 16 décembre 2015 au projet de loi C-428, Loi sur la modification et le remplacement de la Loi sur les Indiens, a abrogé le pouvoir ministériel d’annulation, le Service des poursuites pénales du Canada et la GRC ont fait savoir qu’aucun règlement administratif adopté après l’entrée en vigueur du projet de loi C-428 ne serait appliqué et ne donnerait lieu à des poursuites à moins qu’une « autorité fédérale compétente » en ait établi la validité et la conformité à la Charte dans le cadre d’un examen. Cela signifie que les règlements administratifs liés à la COVID-19 pris sous le régime de la Loi sur les Indiens et adoptés et publiés en bonne et due forme après janvier 2020 dans la cadre de la pandémie étaient en suspens. Ils ne seraient pas automatiquement applicables et ne donneraient pas lieu à des poursuites, même en vertu du protocole.
Il est important de dire ici qu’en 2021, les MKO, en partenariat avec le Centre juridique d’intérêt public du Manitoba, ont travaillé avec diligence pendant plusieurs mois avec de hauts fonctionnaires des Services aux Autochtones Canada et du ministère fédéral de la Justice. Cette collaboration a abouti, le 16 novembre 2021, à un règlement-cadre des MKO sur la protection de la santé dans le contexte de la COVID-19. Le Service des poursuites pénales du Canada et la GRC ont considéré que celui-ci était acceptable pour mettre en application de la loi et engager des poursuites conformément au protocole.
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Les MKO tiennent aussi à dire que, dès le moment où ils se sont résolument engagés à mettre en œuvre le protocole et à élaborer de toute urgence un règlement-cadre sur la protection de la santé dans le contexte de la COVID-19, que la GRC verrait à faire appliquer et qui prévoirait des infractions passibles de poursuites, ils se sont clairement objectés au fait que les politiques du Canada et de la GRC exigent qu’une loi ou un règlement dûment adopté par les Premières Nations soit examiné par le procureur général ou par une « autorité fédérale appropriée ». Selon les MKO, l’application des lois adoptées par les Premières Nations en vertu de l’autorité que leur confère la Loi sur la gestion des terres des premières nations et des règlements pris en vertu de l’autorité que leur confère la Loi sur les Indiens doit être assurée par la GRC et les services de police, et les infractions à ces lois sont passibles de poursuites.
C’est l’application des politiques du Canada et de la GRC voulant que le procureur général examine les lois adoptées et les règlements pris par les Premières Nations qui a eu pour effet de créer ce que les MKO appellent les deux régimes « en suspens » concernant les lois et règlements des Premières Nations qui ont été dûment adoptés en vertu de lois du Parlement visant expressément à concrétiser le droit inhérent d’une Première Nation à l’autonomie gouvernementale.
Le non-respect d’un code foncier applicable en vertu d’une loi des Premières Nations et l’absence de poursuites relativement à cette infraction a forcé la Première Nation K’omoks à recourir à une poursuite au privé pour appliquer son code foncier. Le coût de cette démarche s’est élevé à 178 000 $. La Cour provinciale de la Colombie-Britannique a indiqué qu’il était nécessaire de lancer une poursuite au privé parce que le détachement local de la GRC n’avait « aucune expérience avec ce type de cas » et que « les services de poursuites provinciaux et la Couronne fédérale avaient refusé de porter assistance à la Première Nation K’omoks ». Il faut assouplir les options de poursuite parce qu’il n’est pas viable à long terme pour les Premières Nations de faire respecter leurs lois en lançant une poursuite au privé pour toutes les infractions commises.
À la réunion du 22 novembre 2022 du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, Robert Louie, le président du Conseil consultatif des terres, a indiqué ce qui suit :
Les 20 dernières années nous ont permis de comprendre que le Canada et la GRC n’appliquent pas et n’appuient pas les lois qui ont été adoptées par les Premières Nations. [C’est un problème de plus en plus sérieux.] Nous n’avions pas anticipé cet accroc au départ, mais nous essayons d’y remédier en collaboration avec les gouvernements et les procureurs généraux au niveau fédéral et provincial. Il y a encore beaucoup à faire pour instaurer une pleine reconnaissance des forces de l’ordre afin que les lois des Premières Nations soient acceptées et appliquées et que des poursuites soient intentées dans certains cas. Cette question est très vaste.
Les MKO rappellent que, selon leur expérience vécue, à moins que la partie 4 de la section 3 du projet de loi C-32, soit la loi proposée sur l’Accord-cadre relatif à la gestion des terres de premières nations, ne soit modifiée pour assurer que les directives concernant l’application et les poursuites soient parfaitement claires quant à l’obligation d’appliquer les lois des Premières Nations promulguées en vertu de l’accord et d’intenter des poursuites dans le cas contraire, nous assisterons à un retour ou au maintien de l’incertitude de ce que les MKO ont décrit comme un « régime en suspens » de lois des Premières Nations promulguées par les Premières Nations en vertu d’une loi du Parlement, qui ne sont pas reconnues comme valides, en vertu desquelles aucune poursuite ne peut être intentée et qui ne sont pas appliquées par la GRC ou la police.
Voilà pourquoi les MKO voulaient témoigner devant le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones et le Comité sénatorial permanent des finances nationales : afin d’éclaircir les choses et mettre fin à l’incertitude. Je ne comprends pas pourquoi le Comité des peuples autochtones n’a pas apporté d’amendements à cet égard ni pourquoi il ne s’est pas attaqué aux problèmes soulevés par Robert Louie.
Je vous remercie de votre attention, honorables sénateurs. Je remercie les MKO d’avoir fourni toutes ces informations, afin que je puisse les présenter en leur nom. Merci. Kinanaskomitinowow.
(Sur la motion du sénateur Dalphond, le débat est ajourné.)
Les travaux du Sénat
L’honorable Raymonde Gagné (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-13(2) du Règlement, je propose :
Que la séance soit maintenant levée.
Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?
Des voix : D’accord.
(À 15 h 55, le Sénat s’ajourne jusqu’à 14 heures demain.)