Débats du Sénat (Hansard)
1re Session, 44e Législature
Volume 153, Numéro 185
Le mardi 19 mars 2024
L’honorable Raymonde Gagné, Présidente
- DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
- AFFAIRES COURANTES
- PÉRIODE DES QUESTIONS
- ORDRE DU JOUR
- Projet de loi sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants au Canada
- Les travaux du Sénat
- Projet de loi modifiant le Code criminel et la Loi sur la protection d’espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international et interprovincial
- Le Budget des dépenses de 2024-2025
- La Loi électorale du Canada
- Les travaux du Sénat
- Projet de loi de mise en œuvre de l’Accord de libre-échange Canada-Ukraine de 2023
- La Loi électorale du Canada
- Projet de loi sur les droits de la personne à l’échelle internationale
- Projet de loi sur la stratégie nationale sur les soins oculaires
- L’étude sur les nouvelles questions liées à son mandat
- Bibliothèque du Parlement
- L’étude sur le service extérieur canadien et d’autres éléments de l’appareil de politique étrangère au sein d’Affaires mondiales Canada
- La sanction royale
- Le Sénat
- Le centième anniversaire de la Loi d’exclusion des Chinois
- Pêches et océans
LE SÉNAT
Le mardi 19 mars 2024
La séance est ouverte à 14 heures, la Présidente étant au fauteuil.
Prière.
[Traduction]
Les travaux du Sénat
L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5k) du Règlement, je propose :
Que, nonobstant toute disposition du Règlement ou tout ordre antérieur, pour la séance d’aujourd’hui, la durée des déclarations de sénateurs soit de 60 minutes, afin de rendre hommage à feu le très honorable Brian Mulroney, c.p., qui est décédé le 29 février 2024;
Que, nonobstant l’article 5-6(2) du Règlement, l’interpellation suivante soit inscrite au Feuilleton des préavis, sous la rubrique Interpellations des Affaires du gouvernement, plus tard aujourd’hui :
« Par l’honorable sénatrice LaBoucane-Benson : Qu’elle attirera l’attention du Sénat sur la vie de feu le très honorable Brian Mulroney, c.p. ».
Son Honneur la Présidente : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?
Des voix : D’accord.
Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?
Des voix : D’accord.
(La motion est adoptée.)
DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
Hommages
Le décès du très honorable Brian Mulroney, c.p., C.C., G.O.Q.
L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, je veux rendre hommage aujourd’hui au 18e premier ministre du Canada, le très honorable Brian Mulroney. J’ajoute ma voix à celles des nombreux Canadiens qui disent adieu à un des meilleurs hommes d’État de l’histoire du Canada et qui soulignent ses formidables réalisations.
Le très honorable Brian Mulroney est un géant de la politique canadienne. Il a frappé l’imagination des Canadiens avec sa vision d’avenir ambitieuse lorsqu’il a pris les commandes du Parti progressiste-conservateur en 1983. Son plus grand succès est survenu lors de l’élection générale fédérale de 1984 : il a alors mené son parti vers une victoire écrasante, avec le plus grand nombre de sièges dans l’histoire du Canada et plus de 50 % du vote populaire.
L’ancien premier ministre Mulroney a lancé un vaste chantier de transformation caractérisé par de vastes réformes économiques et des politiques visionnaires visant à assurer la prospérité et la compétitivité mondiale du Canada. Le point central de ce programme était l’Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis. Lors du fameux « sommet irlandais » de 1985, Brian Mulroney, accompagné de l’ancien président américain Ronald Reagan, a déclaré : « Notre message, ici et partout dans le monde, est clair : le Canada est de nouveau prêt à faire des affaires. » Ces mots reflétaient la vision qu’avait M. Mulroney pour le Canada, un Canada où l’innovation, l’entrepreneuriat et la présence sur la scène internationale occuperaient une place prépondérante. C’est une vision qui continue à façonner l’identité et la trajectoire du Canada à ce jour.
Cependant, Brian Mulroney n’a pas laissé seulement un héritage économique. Cet homme d’État était guidé par des principes solides, notamment la compassion et la rigueur morale. Il a défendu sans relâche les droits de la personne, la justice et l’égalité. D’ailleurs, son combat contre l’apartheid en Afrique du Sud en est l’illustration parfaite.
Personnalité respectée sur la scène internationale, il avait des contacts directs et personnels avec le président des États-Unis et le premier ministre du Royaume-Uni, pour n’en citer que deux. Pourtant, M. Mulroney était aussi un homme attentionné, qui vous appelait pour savoir comment vous et les membres de votre famille alliez lorsque les temps étaient difficiles. Aucun autre dirigeant canadien n’a fait usage d’un fichier de contacts comme il le faisait. En fait, il n’était pas seulement enchanté de côtoyer des présidents et des rois, il était tout aussi drôle et charmant avec n’importe quelle assemblée. Brian Mulroney était aussi à l’aise dans une taverne de Baie-Comeau qu’à la Maison-Blanche.
Chers collègues, alors que nous faisons nos adieux à un géant de la politique canadienne, souvenons-nous de la vie incroyable de Brian Mulroney et de sa contribution à notre nation. Puisse sa mémoire être une source d’espoir et d’inspiration pour tous les Canadiens, et nous rappeler le pouvoir transformateur d’un leadership fondé sur l’intégrité, la compassion et la poursuite inlassable du progrès.
Je suis persuadé que ces yeux irlandais nous observent avec bienveillance aujourd’hui.
Merci.
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, j’interviens moi aussi pour rendre hommage au 18e premier ministre du Canada, le très honorable Brian Mulroney, qui est décédé le 29 février.
[Français]
Martin Brian Mulroney est né à Baie-Comeau — un anglophone qui a été accueilli comme un membre de la famille québécoise francophone. Il a étudié le droit à l’Université Laval et a exercé avec succès le métier d’avocat spécialisé dans le droit du travail. Son intérêt et son engagement en politique ont commencé très tôt, au moment où il a rejoint le Tory Club lorsqu’il était étudiant à l’Université St. Francis Xavier, en Nouvelle-Écosse. Son ambition de diriger le parti s’est concrétisée en 1983. En 1984, les progressistes-conservateurs ont remporté plus de 50 % du vote populaire dans l’une des plus écrasantes victoires obtenues au Canada, et Brian Mulroney est devenu premier ministre.
[Traduction]
Que l’on soit d’accord ou non avec toutes les politiques de Brian Mulroney, voici deux éléments marquants de son héritage : il a négocié l’accord de libre-échange avec les États-Unis, et son gouvernement a instauré la taxe sur les produits et services. Toutefois, je suis sûr que le point sur lequel nous pouvons tous nous entendre, c’est le refus de l’ancien premier ministre Mulroney d’être accommodant juste pour éviter de faire des vagues sur la question de l’apartheid en Afrique du Sud. Trois mois après les élections de 1984, M. Mulroney a accueilli l’évêque Desmond Tutu, et c’est ainsi qu’a commencé la lutte contre l’apartheid. Le Canada est devenu le leader de facto de ces efforts, alors que Brian Mulroney tentait de rallier les pays occidentaux et les pays du Commonwealth à l’idée d’imposer des sanctions à l’Afrique du Sud.
En 1985, dans son discours devant l’Assemblée générale des Nations unies, l’ancien premier ministre Mulroney a déclaré sans équivoque :
S’il n’y a pas de progrès dans l’abolition de l’apartheid, le Canada pourrait devoir rompre complètement le lien qu’il entretient avec l’Afrique du Sud.
Alors que l’ancien président Reagan et l’ancienne première ministre Thatcher refusaient tous les deux d’imposer des sanctions à l’Afrique du Sud, l’ancien premier ministre Mulroney, lui, ne se laissait pas influencer.
Moins de 24 heures après sa libération en 1990, Nelson Mandela a appelé l’ancien premier ministre Mulroney pour le remercier de son soutien. Quatre mois plus tard, Nelson Mandela s’est adressé à la Chambre des communes et au Sénat lors d’une séance conjointe, où il a déclaré ceci :
Je voudrais profiter de l’occasion pour rendre hommage au grand peuple canadien [...] Les Canadiens se sont révélés non seulement des amis loyaux de notre peuple en lutte, mais aussi de grands défenseurs des droits de l’homme et de l’idée même de démocratie.
Comme nous le savons tous, Brian Mulroney savait raconter une bonne histoire et aimait faire rire les gens, souvent à ses propres dépens. Dans un discours prononcé lors d’une collecte de fonds pour un centre pour enfants, 20 ans après son départ d’Ottawa, il a dit ceci à la fin de son discours pour expliquer pourquoi, en 1993, il avait décidé de démissionner :
J’ai décidé qu’il était temps de partir lorsque je me suis rendu compte qu’il y avait plus de gens qui croyaient qu’Elvis était toujours vivant que de gens qui m’approuvaient.
Chers collègues, il faut regarder le passé pour évaluer l’ampleur et l’héritage du travail des leaders. Dans l’un de ses derniers discours, le premier ministre Mulroney a déclaré que,
Avec le temps, j’ai appris que l’histoire ne se soucie pas des anecdotes, des propos orduriers, des rumeurs, ou des commérages qui circulent au Parlement : elle ne retient que les grandes réalisations qui façonnent le pays.
(1410)
Au cours de son mandat, le premier ministre Brian Mulroney a bel et bien façonner notre avenir.
[Français]
Au nom du Sénat du Canada, je présente mes sincères condoléances à l’épouse du premier ministre Mulroney, Mila, et à ses enfants, Ben, Caroline, Mark et Nicolas.
[Traduction]
Que son souvenir soit une source de réconfort.
[Français]
L’honorable Raymonde Saint-Germain : Honorables sénatrices et sénateurs, au nom de tous les membres du Groupe des sénateurs indépendants, j’offre mes sincères condoléances à la famille du très honorable Brian Mulroney.
Dix-huitième premier ministre du Canada, il nous laisse un legs majeur, tant à l’échelle nationale qu’à l’échelle internationale. Il a notamment présidé à la relance de l’économie canadienne qui a suivi la récession et aux négociations qui ont mené à la ratification du premier Accord de libre-échange entre le Canada et les États‑Unis, puis de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA). Les historiens sauront lui rendre la place considérable qui lui revient non seulement dans l’histoire du pays, mais aussi dans celle du monde.
Premier ministre, Brian Mulroney s’est montré à la hauteur des attentes que ses électeurs avaient placées en lui — des attentes liées à la bonne gouvernance du pays aux plans économique et social, à la solidification des relations fédérales-provinciales, de même qu’à l’essor de la paix mondiale.
À cet effet, il s’est mérité l’appui de tous et a suscité la fierté partout au pays, auquel il a fait un grand honneur quand, en 1985, devant le parterre bondé de l’Organisation des Nations unies, il s’est élevé avec courage au-dessus des divisions idéologiques entre les blocs de l’Est et de l’Ouest, condamnant avec force et brio le régime de l’apartheid et plaidant avec vigueur pour que prévalent les droits de la personne et la dignité humaine. Il a alors amorcé un tournant dans la lutte contre l’apartheid.
Mandela, Tutu et Boesak ont fini par avoir raison et l’Histoire a déjà placé Brian Mulroney, premier ministre du Canada, à leurs côtés.
[Traduction]
Il a également consacré toute son énergie à rendre les relations fédérales-provinciales plus fortes et plus amicales et il a investi beaucoup de son temps dans la négociation d’ententes constitutionnelles. Même si ces négociations n’ont pas toujours eu le succès escompté, il a réussi à mieux répartir les pouvoirs, à respecter les compétences de chacun et à reconnaître la place du Québec dans la nation confédérée — une nation qu’il continuera de servir après sa vie politique et jusqu’à la limite de ses capacités.
Pour tout dire, les mandats qui lui ont été confiés étaient aussi nombreux que diversifiés : il a notamment été médiateur, mais aussi conseiller pour ses successeurs ainsi que pour différentes personnalités et intellectuels de renom, que ce soit ici ou à l’étranger. Aujourd’hui, nous rendons hommage à un grand homme d’État qui avait un sens exceptionnel du devoir envers son pays, un politicien et un parlementaire qui, malgré le cynisme à l’endroit des personnalités publiques qui caractérise notre époque, continue d’inspirer la reconnaissance, la gratitude et le respect.
L’homme que l’on pleure aujourd’hui d’un océan à l’autre s’est aussi distingué par son humilité, son charisme, sa bienveillance et son sens de la famille. Qu’il soit le « p’tit gars de Baie-Comeau », le grand Québécois ou le fier Canadien, c’est à lui que nous exprimons notre gratitude pour les services qu’il a rendus à son pays et pour sa contribution à la démocratie, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur de nos frontières. Par-dessus tout, nous lui exprimons notre admiration la plus profonde pour n’avoir jamais oublié ses racines et pour être demeuré, quelles que soient les circonstances, un homme du peuple.
Qu’il repose en paix.
L’honorable Pamela Wallin : Honorables sénateurs, j’ai grandi dans un Canada qui possédait tous les avantages au monde, mais qui souffrait d’un complexe d’infériorité. Nous étions jaloux de nos voisins, plus confiants, et nous refusions de reconnaître notre propre potentiel.
On se querellait pour savoir à qui appartenait le pétrole de l’Ouest, et les séparatistes du Québec étaient mécontents. En 1984, l’expression « c’est le temps d’un changement » était devenue un euphémisme. « Le p’tit gars de Baie-Comeau » a remporté la plus importante victoire de l’histoire.
Le très honorable Brian Mulroney est devenu un leader de grande importance, le père fondateur moderne d’un nouveau Canada.
Grâce à sa volonté de fer, son sens de la discipline et un incroyable talent pour les relations humaines, il a effectivement transformé notre nation.
Il avait compris que les relations étaient la clé. Il a conçu le traité sur les pluies acides avant que l’environnement ne soit à la mode et convaincu Reagan et Thatcher de mettre fin à l’apartheid. Nelson Mandela a dit de lui qu’il était un héros.
Selon Mandela, « On ne peut pas être passionné quand on voit petit. » Brian Mulroney n’a jamais vu petit. Il a mis en pratique ce que disait son ami Wayne Gretzky : Il faut « [...] patiner là où va aller la rondelle [...] »
Il a donc tout misé sur l’accord de libre-échange. Cet accord allait nous définir et enfin nous faire entrer dans le grand jeu de l’économie.
La taxe sur les biens et services — la TPS —, dont aucun dirigeant ne se priverait aujourd’hui, a fait partie intégrante de notre évolution. Son audace lui a coûté sa popularité. Elle lui a coûté sa vie politique, mais nous étions devenus un Canada confiant, et nous n’étions plus complexés.
J’ai souri lorsque certains ont prétendu qu’il avait été le premier ministre qui a le plus suscité la division de l’histoire du pays, avec ses scandales et ses congédiements de ministres.
Eh bien, puisque j’étais là pour tout couvrir, je peux dire qu’il y a effectivement eu des démissions parce que Brian Mulroney croyait en la responsabilité et en l’idée que les ministres devaient assumer leur responsabilité — un principe qui semble malheureusement avoir été perdu. Lorsque les principes résistent à l’élixir du pouvoir, cela témoigne de la force du leadership.
Sa partisanerie était toujours empreinte de respect, puisqu’il savait que les rôles finissent inévitablement par s’inverser.
Il a accueilli ceux qui lui ont dit la vérité.
Il avait une empathie naturelle. Il y allait toujours d’un appel, d’une note ou d’une main sur l’épaule.
Il n’a jamais oublié un nom, un visage — ni une rancune ou un affront, mais il avait du cœur.
Il respectait et écoutait les femmes, en particulier Mila, sa conseillère la plus intelligente et sa véritable partenaire, avec qui il a élevé quatre bons citoyens.
Alors que nous pleurons la perte d’un homme bon, nous nous souvenons du plaidoyer de Mandela :
Ne me jugez pas à mes succès, jugez-moi au nombre de fois où je suis tombé et où je me suis relevé.
S’il y a un moment pour évoquer les éloges de Theodore Roosevelt pour une vie vécue « dans l’arène », c’est bien lorsqu’on parle de Martin Brian Mulroney. Vous connaissez les mots :
Tout le mérite appartient à l’homme [...] qui se consacre à une noble cause, qui [...] saura que sa place n’a jamais été parmi les âmes [...] timorées qui ne connaissent ni la victoire ni l’échec.
Monsieur le premier ministre, reposez en paix. Vous l’avez bien mérité.
[Français]
L’honorable Pierre J. Dalphond : Honorables sénateurs, dans l’esprit de ceux qui ont suivi la politique dans les années 1980 et 1990, le nom de Brian Mulroney est forcément associé à l’arrivée de la TPS, au premier Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis, à la privatisation de Petro-Canada, d’Air Canada et du CN, et j’en passe.
Sur la question constitutionnelle, dans la lignée de leaders progressistes-conservateurs précédents, comme Bob Stanfield et Joe Clark, il a mis de l’avant une idée différente qui a donné lieu à l’accord du lac Meech, après avoir séduit une majorité de Québécois; malheureusement, cet accord est resté sans suite.
[Traduction]
Le talent de Brian Mulroney pour poser les bonnes questions ou dire la bonne phrase était également bien connu. En 1987, il a dit ceci aux Américains :
[...] pourquoi les États-Unis peuvent-ils conclure un traité de réduction des armes nucléaires avec leur pire ennemi, l’Union soviétique, mais ne peuvent-ils pas conclure un accord de libre-échange avec leurs meilleurs amis, les Canadiens?
C’était une bonne question. Elle mènerait au premier Accord de libre-échange nord-américain, ou ALENA.
Je me souviens aussi qu’en 1990, il a été le seul premier ministre du Canada à utiliser un article de la Constitution pour nommer huit sénateurs supplémentaires en plus des 105 habituels. Il a pris cette mesure afin de contrer les manœuvres d’obstruction partisanes à la TPS. D’importantes modifications du Règlement du Sénat ont suivi, y compris l’attribution de temps pour les affaires émanant du gouvernement, et continuent de laisser leur marque dans l’histoire.
(1420)
Le premier ministre Mulroney était également en avance sur son temps en matière d’environnement; il était conscient des dommages causés par les pluies acides aux lacs et aux rivières du Canada. En 1991, il a conclu un traité avec nos voisins et amis, les États-Unis. Ses compétences et ses contacts ont continué à profiter aux Canadiens après qu’il a quitté le poste de premier ministre. Le gouvernement libéral actuel l’a chargé de participer à la négociation du plus récent accord de libre-échange avec les États-Unis et le Mexique.
En conclusion, de ses débuts modestes à son leadership sur la scène mondiale, il est resté dévoué à son pays, à sa province, à ses amis et à sa famille.
[Français]
Au nom du Groupe progressiste du Sénat, j’offre nos sincères condoléances à son épouse, Mila, à ses 4 enfants et à ses 16 petits-enfants, ainsi qu’à tous ceux qui vivent avec eux la perte d’un être cher.
Merci.
[Traduction]
L’honorable Denise Batters : Honorables sénateurs, je prends la parole pour rendre hommage à un titan de la politique : l’ancien premier ministre conservateur, le très honorable Brian Mulroney.
Brian Mulroney était comme une vedette du rock pour cette jeune Saskatchewanaise mordue de la politique que j’étais. Je regardais fidèlement This Week in Parliament à la télévision tous les samedis soirs, et j’étais muette d’admiration devant M. Mulroney. Il était fièrement et ouvertement conservateur. Il rabattait le caquet aux libéraux qui siégeaient en face de lui à la Chambre des communes, d’abord en tant que chef de l’opposition, puis en tant que premier ministre, mais il le faisait toujours avec une dose d’esprit et le charme irlandais qui le caractérisait.
M. Mulroney a mené l’une des batailles électorales les plus rudes au Canada, à savoir la campagne électorale de 1988 sur l’accord de libre-échange. Il s’agissait des premières élections auxquelles je participais à titre d’électrice et de bénévole pour la campagne des jeunes progressistes-conservateurs. J’ai assisté à deux congrès nationaux très importants du Parti progressiste-conservateur en 1989 et en 1991. C’était comme Disneyland pour moi, et j’ai eu la chance d’entendre en direct des discours incroyables du premier ministre Mulroney, l’un des meilleurs orateurs politiques de l’histoire canadienne. Ses paroles étaient émouvantes pour une jeune personne comme moi, car elles évoquaient un avenir où le Canada serait uni, libre et prospère.
Le premier ministre Mulroney était un politicien conservateur remarquablement habile, qui a obtenu un mandat majoritaire lors de deux élections consécutives, un exploit inégalé depuis sir John A. Macdonald. Mulroney avait une grande vision. Il a pris des mesures concrètes sur des questions d’importance vitale parce que, comme il l’a dit lors de son discours à notre congrès de 1991 :
[...] nous ne faisons pas toutes ces choses difficiles parce qu’elles sont populaires. Nous les faisons parce qu’elles sont bonnes pour le Canada.
Le premier ministre Mulroney restera dans les mémoires pour avoir nommé des femmes fortes à des postes de premier plan au sein de son Cabinet conservateur et dans l’ensemble de son gouvernement, ce qui a incité une jeune femme intéressée par la politique comme moi à rêver en grand de son propre avenir politique. Dès l’âge de 12 ans, je voulais devenir sénatrice. Mon admiration pour M. Mulroney et les femmes talentueuses qu’il a promues y est pour beaucoup.
Le premier ministre Mulroney a également été l’un des premiers à soutenir l’Ukraine. Sous sa direction, en 1991, le Canada est devenu le premier gouvernement occidental à reconnaître l’indépendance de l’Ukraine. Le premier ministre Mulroney a également nommé d’excellents Canadiens d’origine ukrainienne, comme Ray Hnatyshyn, Don Mazankowski et les sénateurs Raynell Andreychuk et David Tkachuk.
Ce premier ministre a également eu un impact important sur ma province, la Saskatchewan. En 1986, le gouvernement Mulroney a accordé aux agriculteurs de la province un programme d’aide de 1 milliard de dollars, alors qu’ils en avaient grandement besoin. M. Mulroney et Grant Devine, premier ministre progressiste-conservateur de la Saskatchewan, ont ensuite travaillé ensemble pour créer la société Cameco, qui est aujourd’hui la plus grande entreprise d’uranium au monde. M. Mulroney a également surmonté l’opposition pour construire le barrage Rafferty, une source majeure d’irrigation et d’énergie dans le Sud-Est de la Saskatchewan.
Je n’ai rencontré Brian Mulroney en personne qu’une seule fois, mais cette rencontre a été mémorable non seulement en raison de sa forte présence politique, mais aussi parce que j’ai découvert sa chaleur et son charme légendaires. J’avais l’impression d’avoir à nouveau 12 ans, impressionnée par la présence d’un grand homme.
Malgré toutes ses réalisations, je suis certain que M. Mulroney dirait que sa famille exceptionnelle est sa plus grande réussite. Mila, Mark, Ben, Nicolas et Caroline, ainsi que vos familles, le Canada pleure avec vous la perte de ce grand homme et de ce grand dirigeant canadien. Merci.
[Français]
L’honorable Tony Loffreda : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour rendre hommage au 18e premier ministre du Canada, le très honorable Brian Mulroney. Son départ nous a frappés comme une onde de choc.
M. Mulroney, qui a gouverné notre pays de 1984 à 1993, a laissé une empreinte impérissable sur notre nation. Il était un grand homme d’État et un diplomate chevronné avec une vision unificatrice du pays.
[Traduction]
Au cours de son mandat de premier ministre du Canada, M. Mulroney a énormément contribué à notre paysage politique — pensons par exemple à l’accord de libre-échange et au traité sur les pluies acides — tout en favorisant la croissance économique et la coopération environnementale.
M. Mulroney était un homme de principes. L’une de ses plus grandes réussites a été son engagement pour lutter contre l’apartheid en Afrique du Sud. Alors que les voix s’élevaient partout dans le monde pour dénoncer l’apartheid, M. Mulroney a préconisé la mise en place de sanctions. Il a harmonisé la position du Canada avec celle de la communauté internationale en matière de droits fondamentaux, mettant ainsi en évidence son approche fondée sur des principes pour tout ce qui touche la politique étrangère. Avec ses compétences de leader, il a montré qu’un pays comme le nôtre peut avoir de l’influence quand il est guidé par ses valeurs.
L’héritage de Brian Mulroney va bien au-delà de la politique : c’est une leçon d’engagement envers la population et de sens des responsabilités. M. Mulroney incarnait ces valeurs. Il a su naviguer entre les écueils du leadership avec un dévouement inébranlable et a marqué à jamais l’histoire de notre pays. L’attention qu’il a portée à la croissance économique n’était pas seulement un choix politique; cela reflétait l’importance qu’il accordait à sa responsabilité de veiller à la prospérité de tous les Canadiens.
Durant une période où il fallait être visionnaire, il a fait preuve d’un remarquable sens des responsabilités, amenant notre pays à passer à travers de nombreux obstacles. Aujourd’hui, alors que nous lui faisons nos adieux, gardons en mémoire et célébrons les valeurs dont il a fait preuve pendant sa carrière politique et qui ont encore un écho aujourd’hui.
J’ai eu le privilège de rencontrer Brian Mulroney à de nombreuses reprises. Nous travaillions tous deux dans le même édifice à bureaux à Montréal. Nous avons eu bien des discussions pertinentes sur la politique et l’économie, mais ce qui m’a le plus impressionné, c’est la façon dont on se sentait en sa présence. Il était passé maître dans l’art de l’intimité immédiate. Il vous posait des questions sur votre famille et votre travail. Il vous faisait sentir important. Chaque fois que nous étions ensemble, nous étions rapidement entourés de passants qui souhaitaient rencontrer l’ancien premier ministre. Il était toujours aimable et réceptif. Parfois, il disait en plaisantant : « Attendez, je suis en train de parler à Tony. » Tout le monde voulait lui serrer la main. D’autres voulaient son autographe.
Honorables sénateurs, alors que nous pleurons la disparition d’un homme qui a tant contribué à la prospérité économique, sociale et environnementale du pays, j’offre mes plus sincères condoléances à sa famille, à ses amis et à tous les Canadiens.
M. Mulroney, reposez en paix, et que votre héritage nous rappelle à tous que des gens bien intentionnés peuvent accomplir des choses extraordinaires. Reposez en paix.
L’honorable Colin Deacon : Honorables sénateurs, le début des années 1990 a été très difficile. Pour être honnête, à l’époque, je n’aimais pas tellement le premier ministre Mulroney. La croissance du PIB du Canada avait diminué, notre ratio dette-PIB avait augmenté, les taux hypothécaires avaient baissé, mais ils étaient encore à plus de 11 %. L’inflation était bien installée, malgré l’éclatement de la bulle immobilière en 1989. Beaucoup de gens voyaient leurs revenus et leurs épargnes se détériorer et leurs dettes, augmenter.
Je me trompais toutefois à propos de l’ancien premier ministre Brian Mulroney. C’était, en fait, un leader politique hors du commun. Il se concentrait sur la prospérité à long terme du Canada et sur sa place dans le monde. Plutôt que de se concentrer sur les priorités à court terme, Brian Mulroney a investi l’essentiel de son capital politique dans de grands objectifs politiques. Lorsqu’il a adopté ces priorités, elles ne faisaient vraiment pas l’unanimité. Qu’il s’agisse d’établir le libre-échange avec les États-Unis, de mettre en œuvre la taxe sur les produits et services, la TPS, sur pratiquement tout ce que nous consommons ou d’étendre le libre‑échange au Mexique, les progressistes-conservateurs et les Canadiens avaient besoin qu’on les convainque.
Bien que le premier ministre Mulroney ait finalement remporté la plupart de ses grandes batailles politiques, il a souffert politiquement. Ses choix politiques sont tout de même restés en place, et nous avons tous bénéficié d’une génération de prospérité concurrentielle grâce aux fondations qu’il a construites. Fait remarquable, Brian Mulroney est également considéré comme le premier ministre le plus écologique du Canada. Pensons, par exemple, au traité sur les pluies acides, au Protocole de Montréal et au Sommet de la Terre de Rio. Contrairement à tant d’autres aujourd’hui, il craignait que le temps soit compté pour lutter contre le changement climatique. Voici certains de ses propos à ce sujet :
Qu’il s’agisse de Kyoto ou de quoi que ce soit d’autre, reconnaissons l’urgence du réchauffement planétaire et unissons nos efforts pour convaincre les États-Unis de s’asseoir à la table. Ce n’est pas en leur faisant la leçon sur la réduction de leurs émissions que nous parviendrons à nos fins, surtout quand on sait que notre bilan est quasiment deux fois pire que le leur.
En terminant, j’aimerais reprendre à mon compte les propos de Nelson Mandela la première fois qu’il s’est adressé au Parlement du Canada, quelques mois après avoir passé l’équivalent d’une génération en prison. Il avait alors salué le leadership de Brian Mulroney et le fait qu’il avait personnellement contribué à faire tomber l’apartheid. Étonnamment, M. Mulroney a réussi cet exploit sans nuire aux relations du Canada avec ses deux plus proches alliés et malgré leurs protestations véhémentes.
Brian Mulroney s’est distingué autant dans le domaine de la prospérité que du développement durable et de l’équité, trois priorités encore aussi cruciales aujourd’hui qu’à l’époque. Le bilan de l’ancien premier ministre nous prouve qu’on peut accomplir de grandes choses. À nous maintenant de suivre ses traces. Je vous remercie.
(1430)
L’honorable Andrew Cardozo : Honorables sénateurs, c’est un honneur pour moi de m’adresser aujourd’hui à notre auguste assemblée pour rendre hommage au regretté premier ministre Brian Mulroney. J’ai eu la chance de travailler avec son gouvernement dans plusieurs dossiers d’envergure, que ce soit en tentant de faire pression sur lui de l’extérieur ou en collaborant de près avec ses ministres et ses collaborateurs à l’élaboration de différentes politiques et mesures législatives.
M. Mulroney comprenait comme pas un les identités et la diversité des Canadiens, et c’est là-dessus que j’aimerais insister aujourd’hui. Commençons par la grande mosaïque d’opinions — conservateurs des Prairies, nationalistes du Québec, conservateurs modérés de l’Ontario et de l’Atlantique et minorités ethniques des grandes villes — qu’il a réussi à coaliser, du jamais vu pour le Parti progressiste-conservateur, et par la victoire électorale éclatante qui en a résulté.
Chose certaine, parlant du Québec, l’accord du lac Meech nous a montré à quel point l’unité nationale était importante pour lui, et même si cet accord s’est finalement conclu par un échec, il aura à tout le moins permis au Canada de tenir un grand débat sur son identité.
[Français]
Il est important de rappeler que, au cœur de l’accord du lac Meech, on trouvait la disposition suivante :
2.(1) Toute interprétation de la Constitution du Canada doit concorder avec : […]
2. la reconnaissance de ce que le Québec forme au sein du Canada une société distincte.
[Traduction]
Au-delà de cela, son gouvernement a mis sur pied le Programme de contestation judiciaire, qui aidait les Canadiens, notamment les femmes, les personnes handicapées ainsi que les minorités ethniques, raciales, religieuses et linguistiques, à faire valoir devant les tribunaux leurs droits garantis par la Charte.
Son gouvernement a promulgué la Loi sur le multiculturalisme canadien, en 1988. Il a été le premier premier ministre à présenter des excuses pour des injustices commises par le gouvernement du Canada — aux Canadiens d’origine japonaise, en l’occurrence. Dans le cadre de ce règlement, il a mis sur pied la Fondation canadienne des relations raciales.
Dans le dossier de l’immigration, son gouvernement a augmenté considérablement les niveaux annuels, les faisant passer de 84 000 personnes seulement à son arrivée au pouvoir, en 1984, à 256 000 personnes en 1993, sa dernière année au pouvoir.
En 1990, son gouvernement a annoncé que les agents de la GRC pourraient porter des coiffures religieuses ou traditionnelles, comme le turban, la kippa ou une tresse. Les Forces armées canadiennes étaient également concernées.
En 1991, il a mis sur pied la Commission royale sur les peuples autochtones.
Enfin, le rôle majeur qu’a joué le Canada, sous sa direction personnelle, pour mettre fin à l’apartheid en Afrique du Sud a été largement reconnu.
Le premier ministre Mulroney avait conscience que le gouvernement pouvait être une force positive et il était sensible aux enjeux des années 1980 et 1990 qui ont défini le Canada moderne et qui ont fait progresser l’égalité en matière de droits de la personne. Même si la diversité, l’équité et l’inclusion font aujourd’hui l’objet d’attaques dans certains milieux, c’est au gouvernement Mulroney que l’on doit la mise en place de nombreuses politiques visant à rassembler les Canadiens d’une manière respectueuse. Son héritage mérite d’être préservé.
L’honorable Victor Oh : Honorables sénateurs, on a beaucoup parlé de feu le premier ministre Brian Mulroney et de ses nombreuses réalisations. Pour ma part, je souhaite raconter une histoire personnelle qui montre comment un moment inattendu de curiosité et de chaleur a façonné mes premières opinions sur les hommes politiques canadiens.
Au cours de l’hiver 1985, ma jeune famille et moi-même étions en vacances à la Barbade. Vers la moitié du séjour, nous avons remarqué que le nombre d’hommes aux épaules larges en costume et lunettes de soleil sombres dépassait celui des hommes en sandales et maillots de bain. À notre insu, un sommet international se tenait sur le site.
Lors de notre dernière journée à la plage, mon fils Derek a pointé du doigt, par-dessus mon épaule, un homme élégant vêtu d’un costume pâle et suivi par d’imposants gardes du corps. Dans les minutes qui ont suivi, j’ai appris qu’il s’agissait de Brian Mulroney, premier ministre progressiste-conservateur nouvellement élu du Canada. Il se trouvait à la Barbade pour le sommet et souhaitait prendre l’air avant de retourner aux séances.
Ce que je n’aurais jamais pu imaginer de cette rencontre fortuite, c’est la chaleur et l’accueil qu’il nous a réservés. Il a échangé avec nous avec aisance et, quand il nous a demandé d’où nous venions, il a été agréablement surpris lorsque nous avons répondu « Toronto, Canada ». Avant de nous quitter, il nous a gentiment proposé de prendre une photo avec nous. Cette photo, qui témoigne de ce moment important, m’est très chère. Sénateurs, je vous montrerais cette photo si le premier ministre n’y était pas élégamment vêtu d’un costume trois-pièces alors que je figure à côté de lui, avec ma famille, ne portant que mon maillot de bain fluo. Ce moment, aussi bref fût-il, est resté gravé dans ma mémoire.
J’en suis venu à croire que les politiciens canadiens étaient fidèles à leur réputation internationale de chaleur et d’ouverture d’esprit. Il a fait preuve d’une véritable curiosité à mon égard et à l’égard de ma famille et, indépendamment de son statut professionnel monumental, j’ai eu l’impression que nous étions sur un pied d’égalité. À ce moment-là, je crois que j’ai saisi sa personnalité. Ce véritable homme d’État, audacieux sur le plan politique et ambitieux sur le plan législatif, était aussi un père de famille et un compatriote respectueux. J’aime à penser que les Canadiens se souviendront de ces aspects positifs, car c’est certainement ce dont je me souviendrai de lui. Il a vraiment été le premier ministre du peuple.
Reposez en paix.
Des voix : Bravo!
L’honorable Mary Coyle : Honorables sénateurs, nous sommes réunis aujourd’hui pour pleurer le décès du très honorable Brian Mulroney, 18e premier ministre du Canada, et pour lui rendre hommage.
C’est en 1999 que j’ai rencontré pour la première fois Brian Mulroney et sa merveilleuse conjointe, Mila Mulroney, qui était sa partenaire dans tout ce qu’il entreprenait. Ils étaient à l’Université St. Francis Xavier, où Brian assistait aux retrouvailles des anciens étudiants qui avaient obtenu leur diplôme 40 ans auparavant, et ces retrouvailles coïncidaient avec le 40e anniversaire du Coady International Institute. Lors d’un événement organisé un vendredi pour rendre hommage à Brian Mulroney, Jabulani Manombe‑Ncube, un grand leader d’Afrique du Sud qui a fréquenté le Coady International Institute, a remercié avec émotion M. Mulroney d’avoir contribué à mettre fin à l’apartheid en Afrique du Sud.
Le lendemain, alors que j’assistais au match de football de la rentrée avec M. et Mme Mulroney ainsi que Sean Riley, président de l’Université St. Francis Xavier, Brian s’est penché vers moi et a pointé du doigt un endroit sur une colline qui se trouvait de l’autre côté du terrain et m’a dit que c’était l’endroit idéal où construire sa bibliothèque du premier ministre. Cette bibliothèque n’a jamais été construite, mais M. Mulroney, avec l’aide de sa fille, Caroline, a créé quelque chose de beaucoup plus important encore.
La semaine dernière, j’ai emmené mon petit-fils adolescent, Niko Brown, visiter le Brian Mulroney Institute of Government à l’Université St. Francis Xavier, un centre innovateur pour l’étude du gouvernement, de la politique publique et du leadership. Nous avons signé le livre de condoléances dans le bureau reconstitué du premier ministre, avec le mobilier et la vue d’origine. Il y avait plein de monde venu se recueillir à l’Institut Mulroney — des étudiants et des professeurs, ainsi que par des personnes comme Niko et moi. Un peu partout dans l’édifice, des expositions mettent en lumière la carrière politique de Brian Mulroney, notamment ses nombreuses contributions au libre-échange nord-américain, en tant qu’allié des États-Unis, en tant que premier ministre le plus écologiste du Canada, en tant que bâtisseur de ponts avec le Québec et la francophonie, en tant que personnage humanitaire et en tant qu’homme d’État.
Parmi ses nombreux prix, trésors et photos avec des dirigeants du monde entier, une lettre de Nelson Mandela datant de 2004 est exposée. Elle dit :
Cher Brian,
À l’occasion du 10e anniversaire de notre démocratie, nous nous souvenons de l’époque cruciale de notre transition et des personnes impliquées, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’Afrique du Sud.
En tant que premier ministre du Canada et président du Commonwealth, vous avez exercé un leadership fort et fondé sur des principes dans la lutte contre l’apartheid. Cette position n’était pas très populaire dans tous les milieux, mais les Sud‑Africains reconnaissent aujourd’hui l’importance de votre contribution à notre libération et à notre réussite.
(1440)
Chers collègues, comme l’a dit M. Mulroney :
Les dirigeants doivent avoir une vision et trouver le courage de se battre pour les politiques qui donneront vie à cette vision. Les dirigeants doivent gouverner non pas pour faire la une des journaux dans dix jours, mais pour améliorer le Canada dans dix ans. [...]
Chers collègues, faisons vivre l’héritage de Brian Mulroney en luttant avec audace pour un Canada et un monde meilleurs.
Repose en paix, Brian Mulroney. Chers collègues, son institut à l’Université St. Francis Xavier attend votre visite.
Des voix : Bravo!
L’honorable Peter Harder : Honorables sénateurs, je voudrais dire quelques mots au nom de ceux qui ont commencé leur carrière dans le service public et la politique à l’époque où Brian Mulroney était premier ministre. Cela remonte à plus loin qu’un an ou deux.
Je voudrais dire trois choses. Premièrement, Brian Mulroney était un adepte de la politique du rassemblement, pas de la politique de la division. Lors de la course à la direction du parti, en 1983, j’appuyais le chef précédent. J’avais été chef de cabinet de M. Clark et, quand ce dernier a quitté son poste de chef pour se présenter de nouveau, et j’ai été chef de cabinet d’Erik Nielsen, le chef intérimaire. Alors qu’il se rendait à l’isoloir pour voter au dernier tour, M. Mulroney est venu me voir et m’a dit : « Peter, tout va bien aller. »
Le lendemain matin, je suis allé le voir pour lui remettre ma lettre de démission. Il a dit : « Garde-la. » Nous avons commencé à parler de la nécessité d’être rassembleur en politique. Je lui ai alors demandé : « Donc, il n’y aura pas de représailles? » Sa réponse a été la suivante : « J’admire John Kennedy. Quand John Kennedy a remporté l’investiture du Parti démocrate, en 1960, quelqu’un lui a demandé : “Monsieur Kennedy, y aura-t-il des représailles?” Ce à quoi il a répondu : “Seulement au Massachusetts.” »
Je pense que nous pourrions tous renouer avec la politique du rassemblement et apprendre de cette approche. Il l’a suivie non seulement ce jour-là, mais également plus tard ce soir-là. Vous vous souviendrez qu’il a parlé publiquement à Erik Nielsen, un échange qui a été diffusé à la télévision. Il lui a dit : « Je sais que je n’étais pas votre premier choix, mais vous étiez le mien en tant que leader adjoint. » En posant ce geste, il a mis en pratique la politique du rassemblement et a rallié un caucus qui ne l’avait pas soutenu, du moins lors des premiers votes.
Ce que je veux dire, c’est que nous avons beaucoup à apprendre de l’approche du rassemblement en politique.
Ensuite, Brian Mulroney a été un homme remarquable, que l’on pense à son mandat ou à ses réussites. Pour réussir en politique, contrairement au secteur privé, il faut dépenser son capital politique. Il ne faut pas l’accumuler, mais l’utiliser. Beaucoup d’entre vous ont parlé des réussites. Je ne vais donc pas répéter cette liste. Je me contenterai de souligner qu’elles sont nombreuses.
La sénatrice Batters a parlé de l’Ukraine. Brian Mulroney a annoncé cette décision pendant une visite à Kennebunkport, en compagnie d’un président américain qu’il l’a prié de ne pas le faire, d’attendre deux semaines. Il l’a fait tout de suite.
Que l’on pense à l’Afrique du Sud, à l’ALENA, à l’accord du lac Meech ou à la TPS, il s’agissait toujours d’utiliser le capital politique pour accomplir quelque chose. C’est encore une fois un talent et une perspicacité qui mériteraient un peu plus d’attention, même dans le contexte actuel.
Le dernier point est le suivant : la politique est toujours personnelle. Partout où je suis allé au cours de la dernière semaine, j’ai rencontré des gens qui m’ont raconté une histoire au sujet d’un appel de Brian Mulroney ou quelque chose du genre. Je voudrais terminer avec ma propre anecdote. Lorsque j’ai reçu un appel un vendredi en fin d’après-midi et que je suis sorti d’une réunion pour le prendre, j’ai cru que mon fils s’était cassé la jambe. Mais j’ai entendu : « Bonjour, Peter. C’est Brian ». Il m’a lu ensuite le décret me nommant sous-ministre de l’Immigration — un poste que je n’avais pas demandé et auquel je ne savais pas que j’étais sur le point d’être nommé. La politique était toujours personnelle.
Des voix : Bravo!
[Français]
L’honorable Éric Forest : C’est avec tristesse que nous avons appris, le 29 février dernier, le décès d’un homme d’État émérite, un leader visionnaire et un fervent défenseur des régions du Canada.
[Traduction]
Brian Mulroney, ancien premier ministre du Canada, est décédé, laissant derrière lui un héritage indélébile qui a profondément marqué notre pays.
[Français]
M. Mulroney comprenait l’importance vitale de garantir que les citoyens de chaque coin du Canada se sentent représentés, entendus et inclus à l’échelle fédérale. Son approche collaborative et sa volonté de travailler en partenariat avec les gouvernements provinciaux et territoriaux ont renforcé les liens qui unissent notre pays si diversifié.
On notera qu’il a choisi de se faire élire dans deux circonscriptions rurales, puisqu’il a d’abord été élu dans la circonscription néo-écossaise de Central Nova, puis dans la circonscription de Manicouagan, nos voisins d’en face de l’autre côté du golfe. Cette circonscription de Manicouagan est, surtout, une circonscription naturelle pour le « petit gars de Baie-Comeau ». Son leadership, ancré dans ses valeurs fondamentales de justice et d’équité, a été marqué par des réalisations considérables dans des domaines comme les réformes économiques, les relations internationales et la promotion des droits de la personne. Personnellement, je retiens surtout — et on l’a mentionné à maintes reprises — l’entente de libre-échange avec les États-Unis; ses efforts courageux pour mettre fin à l’apartheid en Afrique du Sud, alors qu’il n’hésita pas à faire bande à part et à assumer un rôle de leader face à nos alliés naturels que sont les États-Unis et le Royaume-Uni; enfin, la signature d’un accord sur les pluies acides avec les États-Unis. C’était là un engagement fort important sur le plan de l’écologie.
Son engagement envers les régions du Canada s’est manifesté au moyen d’initiatives visant à stimuler le développement économique régional, à investir dans les infrastructures et à promouvoir la diversité culturelle et linguistique qui fait la richesse de notre nation.
Bilingue et biculturel, il a fait un effort réel pour rejoindre les deux communautés linguistiques qui ont fondé notre pays.
Du point de vue du Québec, on se rappellera que c’est probablement le premier et le dernier premier ministre qui a intégré les nationalistes québécois au sein du cabinet fédéral, dans un effort sincère visant à réparer les pots cassés de 1982 et à réintégrer le Québec dans la Constitution « dans l’honneur et l’enthousiasme ».
[Traduction]
En cette période de deuil national, nous nous souvenons avec gratitude du leadership exemplaire de Brian Mulroney, de son dévouement et de sa contribution à l’édification d’un Canada plus respectueux et plus uni.
[Français]
Son héritage perdurera à travers les politiques qu’il a défendues, les ponts qu’il a construits et les vies qu’il a touchées. En ce moment de tristesse, nos pensées et nos prières accompagnent la famille et les proches de Brian Mulroney. Puissent-ils trouver réconfort dans les souvenirs précieux qu’ils ont partagés avec lui et dans l’héritage durable qu’il laisse derrière lui. Que son esprit de service et de dévouement continue d’inspirer les générations futures à travailler ensemble pour un avenir meilleur pour un Canada plus respectueux et plus solidaire dans l’ensemble de ses régions.
Des voix : Bravo!
L’honorable Diane Bellemare : Honorables sénateurs, à l’occasion du départ du très honorable Brian Mulroney, je veux offrir mes sincères condoléances à son épouse, Mila, à ses enfants et à ses amis et lui rendre hommage. Ce Québécois de souche irlandaise maîtrisait l’art du dialogue et de l’écoute comme peu savent le faire aujourd’hui. J’ai eu l’occasion de le constater à trois reprises. Peu de temps après son arrivée au pouvoir, en 1984, le premier ministre Mulroney a voulu montrer qu’il allait gouverner pour tous les Canadiens et chercher à obtenir des consensus. Il a organisé à Ottawa un grand rassemblement de plus de 300 acteurs économiques issus des organisations d’affaires et des syndicats. J’étais alors professeure à l’université et j’accompagnais la délégation syndicale de ma province à titre de rapporteure dans les ateliers.
À l’ouverture de l’événement, Brian Mulroney a été très clair : il était là pour écouter. Je l’ai vu aussi à l’œuvre à l’étranger, en 1989, alors qu’il parrainait une délégation canadienne de gens d’affaires qui étaient à Moscou pour soutenir la perestroïka du président Gorbatchev. J’y accompagnais mon conjoint. J’ai été très impressionnée par l’envergure de ses propos et par l’espoir bienveillant qu’il manifestait devant la décentralisation de l’Empire soviétique. Les grands défis ne lui faisaient pas peur.
Enfin, à l’été 2015, j’ai eu le privilège de m’entretenir seule à seul pendant au moins une heure avec lui sur le sujet de la modernisation du Sénat. Je voulais tester mes idées auprès de cet ex-premier ministre qui a dû faire face à un Sénat peu réceptif à ses projets de libre-échange et de taxe sur les produits et services — des projets qui étaient révolutionnaires à l’époque.
(1450)
Nous avons discuté du rôle du Sénat et des conditions institutionnelles nécessaires pour qu’il puisse mieux jouer son rôle de second examen attentif. Il m’a d’abord écoutée attentivement. Puis, avant même que j’aie terminé de présenter mes analyses, il m’a interrompue en déclarant qu’il fallait en finir avec le bipartisme au Sénat, que la tentation était trop forte pour les gouvernements au pouvoir de vouloir contrôler le Sénat et que c’était trop facile quand les sénateurs étaient nommés et qu’il n’y avait que deux groupes de sénateurs. Brian Mulroney confirmait mon analyse et en a même rajouté.
Je lui ai demandé s’il m’encourageait à essayer de créer un troisième groupe de sénateurs indépendants, comme il en existe un à la Chambre des lords. Il m’a répondu par l’affirmative en ajoutant d’un ton sérieux et grave : « Mais attendez après la prochaine élection. » J’ai suivi son conseil.
Brian Mulroney maîtrisait l’art du dialogue et de la négociation, car il savait écouter les groupes comme les individus, ce qui est une condition nécessaire à tout changement profond. Je remercie le très honorable Brian Mulroney de sa contribution mémorable au développement du Canada.
Des voix : Bravo!
L’honorable Percy Mockler : Honorables sénateurs, c’est avec une grande tristesse que je m’adresse à vous aujourd’hui dans cette auguste Chambre du Sénat du Canada, à la suite du décès d’un ami, un mentor, un bâtisseur, un visionnaire et un vrai homme d’État à l’échelle nationale et internationale.
Pour moi, Brian Mulroney était synonyme d’amitié, de loyauté et de principes. Il était aussi un leader très engagé à faire de sa région, son petit Baie-Comeau, de sa province et de son pays un meilleur endroit où vivre, où travailler, où élever ses enfants, un meilleur endroit où tendre la main aux plus vulnérables.
[Traduction]
Honorables sénateurs, personne ne peut douter qu’au cours des 40 dernières années, j’ai suivi de très près le premier ministre Mulroney et j’ai collaboré étroitement avec lui. Le « petit gars de Baie-Comeau » a captivé les Canadiens de toutes les allégeances et a influencé les dirigeants du monde entier quant à l’importance de respecter les droits et les libertés des individus. À cet égard, je pense également à Nelson Mandela.
Trois principes du premier ministre Mulroney me seront toujours chers :
La coopération internationale est essentielle pour faire face aux problèmes mondiaux tels que le changement climatique et la pauvreté.
Diriger, c’est prendre des décisions difficiles dans l’intérêt du pays, même si elles sont impopulaires.
Les Canadiens autochtones ont un « droit inhérent à l’autonomie gouvernementale ».
[Français]
Le premier ministre Mulroney avait à cœur un élément incontournable : le peuple de l’Acadie occupait une place spéciale dans son gouvernement, tout comme les francophones hors Québec.
Prenons quelques instants pour nous remémorer quelques faits saillants. Sous son leadership, le Nouveau-Brunswick est devenu un membre permanent de l’Organisation internationale de la Francophonie. Soulignons également l’enchâssement du projet de loi no 88 du Nouveau-Brunswick dans la Charte canadienne des droits et libertés, reconnaissant l’égalité des deux peuples. Le premier ministre Mulroney a aussi piloté les premières modifications à la Loi sur les langues officielles du Canada. Il a été à l’origine de la nomination du premier juge francophone acadien à la Cour suprême du Canada, l’honorable Gérard La Forest.
[Traduction]
Pour ce qui est du Canada atlantique, honorables sénateurs, nous ne pouvons pas oublier le leadership inébranlable du premier ministre Mulroney et de son gouvernement : pensons au projet Hibernia à Terre-Neuve-et-Labrador et au pont de la Confédération, qui relie l’Île-du-Prince-Édouard au reste du Canada.
Pensons aussi à la construction de 12 frégates au Nouveau-Brunswick, qui a donné un élan à cette extraordinaire industrie pour les Canadiens de l’Atlantique et de tout le pays.
Les sénateurs de l’Atlantique n’oublieront pas non plus la création de l’Agence de promotion économique du Canada atlantique, l’APECA, qui s’est avérée un outil incroyable de création et de renforcement du développement économique.
J’offre mes plus sincères condoléances à sa famille, à Mila et à leurs quatre enfants.
Des voix : Bravo!
L’honorable Leo Housakos : Honorables sénateurs, je prends la parole pour rendre hommage à un grand premier ministre, à un mentor et à un ami.
À mes yeux, il y a trois éléments essentiels qui définissent Brian Mulroney. Il était évidemment un grand homme d’État et un grand dirigeant. Il a été élu avec une majorité écrasante en 1984. Il a accompli de grandes choses au cours de la décennie suivante. Nous en avons mentionné quelques-unes aujourd’hui : le libre-échange, la TPS et les accords sur les pluies acides. Sur la scène internationale, il a reconnu l’Ukraine, il a lutté contre l’apartheid et il a été le premier premier ministre canadien à reconnaître le génocide arménien. Oui, il a fait de grandes choses.
Le premier ministre Mulroney disait toujours qu’être un leader, ce n’était pas pour les timides et les timorés, les faibles et les doux : c’était pour les braves et les fonceurs. Quand on siège au Sénat ou à la Chambre des communes ou qu’on fait partie du gouvernement, il faut faire des choses qui vont rester dans la mémoire des gens. C’était cela, Brian Mulroney.
Le deuxième élément qui définit Brian Mulroney était son sens de la famille. Il était très fier de Mila et de ses enfants.
Il y a un an, j’ai eu l’occasion de m’entretenir avec l’ancien premier ministre Mulroney. Fidèle à son habitude, il m’a accueilli chez lui et nous avons passé un bon moment ensemble. Contrairement à toutes nos rencontres précédentes — je suppose que, en rétrospective, c’était un signe —, nous n’avons pas évoqué beaucoup de souvenirs sur les campagnes électorales, la situation avec Ronald Reagan et Margaret Thatcher, la lutte contre le rideau de fer et toutes ces merveilleuses histoires qu’il racontait régulièrement à un jeune conservateur. Il a plutôt passé beaucoup de temps à parler de sa famille — Mila, Caroline, Ben, Mark, Nicolas et ses 11 petits-enfants. Il était radieux. Bien sûr, il a toujours été plus grand que nature quand la conversation déviait sur la politique, mais parler de sa famille le faisait rayonner. Il m’a dit : « Leo, quand les lumières et les caméras s’éteignent, peu importe ce que l’on fait dans la vie, ce qui reste, c’est la famille. C’est la chose la plus importante et l’héritage le plus précieux. » J’ai compris qu’il me lançait un message.
Le troisième élément était sa gentillesse. Brian Mulroney était un grand homme. Pour ceux d’entre nous qui sont dans la sphère politique depuis longtemps, il est parfois difficile de combiner la politique et l’humanité, mais Brian Mulroney l’a fait probablement mieux que quiconque. Il était gentil avec ses amis tout comme avec ses adversaires.
Dans la vie comme dans le monde politique, il y a des hauts et des bas. D’après mon expérience, chaque fois que vous viviez une réussite, Brian Mulroney envoyait toujours un petit mot de félicitations. Plus important encore, et nous avons entendu d’innombrables histoires de ce genre d’un bout à l’autre du pays, lorsque vous traversiez un moment difficile ou que vous aviez du chagrin, avec Brian Mulroney, vous n’étiez jamais seul. Il vous appelait toujours pour vous encourager, pour vous dire de tenir le coup et de continuer de défendre la juste cause. En politique, la bienséance est de moins en moins manifeste de nos jours, mais il incarnait tout cela.
Je rends hommage à quelqu’un qui a toujours ouvert son cœur et sa porte aux jeunes conservateurs. Lorsqu’il était premier ministre, je faisais défiler dans son bureau une foule de jeunes conservateurs du Cégep Vanier et de l’Université McGill. Il trouvait toujours du temps pour eux. La semaine dernière, j’ai reçu une quantité incroyable de lettres d’un grand nombre d’entre eux. Ils se souvenaient de ces moments où il a pris le temps de leur transmettre sa sagesse, autant lorsqu’il était premier ministre qu’après avoir quitté ses fonctions.
Au nom de tous les Canadiens et de tous les jeunes conservateurs qu’il a touchés, monsieur le premier ministre, puissiez-vous reposer en paix.
Des voix : Bravo!
[Français]
Son Honneur la Présidente : Au nom de tous les sénateurs et de tous ceux et celles qui sont associés à cette enceinte, je présente mes plus sincères condoléances à la famille et aux amis du très honorable Brian Mulroney.
[Traduction]
Honorables sénateurs, je vous invite à vous lever et à vous joindre à moi pour observer une minute de silence en sa mémoire.
(Les honorables sénateurs observent une minute de silence.)
(1500)
Visiteur de marque à la tribune
Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de notre ancien collègue l’honorable David Tkachuk.
Au nom de tous les honorables sénateurs, je suis heureuse de vous revoir au Sénat du Canada.
Des voix : Bravo!
Visiteurs à la tribune
Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de participants au 15e Colloque parlementaire canadien de l’Association parlementaire du Commonwealth.
Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.
Des voix : Bravo!
Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de représentants de l’organisme Zoos et aquariums accrédités du Canada. Ils sont les invités de l’honorable sénateur Plett.
Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.
Des voix : Bravo!
Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune du Dr Yipeng Ge. Il est l’invité de l’honorable sénateur Woo.
Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.
Des voix : Bravo!
Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Gina Valle. Elle est l’invitée de l’honorable sénateur Loffreda.
Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.
Des voix : Bravo!
Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Ruifeng Zhen, président de la Chinese Association of Mississauga, et de membres du conseil d’administration de l’association. Ils sont les invités de l’honorable sénateur Oh.
Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.
Des voix : Bravo!
[Français]
AFFAIRES COURANTES
La vérificatrice générale
Dépôt des rapports du printemps 2024
Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, les rapports du printemps 2024 de la vérificatrice générale du Canada au Parlement du Canada, conformément à la Loi sur le vérificateur général, L.R.C. 1985, ch. A-17,par. 7(5).
[Traduction]
Le Sénat
Préavis de motion concernant les séances des 21 et 22 mars 2024
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :
Que, nonobstant toute disposition du Règlement, et relativement à tout projet de loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l’administration publique fédérale pendant l’exercice se terminant soit le 31 mars 2024, soit le 31 mars 2025 :
1.si le Sénat reçoit tout message de la Chambre des communes avec un tel projet de loi au cours de la séance du 21 mars 2024, le projet de loi soit inscrit à l’ordre du jour pour une deuxième lecture à la prochaine séance;
2.si le Sénat reçoit tout message de la Chambre des communes avec un tel projet de loi au cours de la séance du 22 mars 2024, le projet de loi soit inscrit à l’ordre du jour pour une deuxième lecture plus tard au cours de cette séance, à condition que si le message est reçu après le moment où le Sénat aurait normalement traité du projet de loi à l’étape de la deuxième lecture, le projet de loi soit pris en considération à l’étape de la deuxième lecture immédiatement, ou, si une autre affaire est à l’étude au moment où le message est lu, le projet de loi soit inscrit à l’ordre du jour pour une deuxième lecture en tant que l’affaire suivante;
3.au cours de la séance du 22 mars 2024 :
a)si un tel projet de loi est lu une deuxième fois, il soit pris en considération à l’étape de la troisième lecture immédiatement;
b)si le Sénat traite d’un tel projet de loi à 16 heures, ou un tel projet de loi est à l’ordre du jour à ce moment-là, la levée de la séance soit retardée jusqu’à ce que toutes les délibérations concernant de tels projets de loi soient terminées pour la séance, sous réserve des dispositions du présent ordre;
c)si, à un moment quelconque de la séance, le représentant du gouvernement ou la coordonnatrice législative du représentant du gouvernement déclare que la réception d’un message avec un tel projet de loi est attendue au cours de la séance, toute motion visant à lever la séance soit irrecevable, et soient en outre suspendues les dispositions du Règlement régissant l’heure fixée pour la clôture ou la suspension de la séance ainsi que toute décision antérieure relative à la levée de la séance, et ce jusqu’à ce que l’un ou l’autre des événements suivants se produise :
(i)le message est reçu et toutes les délibérations subséquentes, celles en vertu du présent ordre y comprises, sont terminées, à condition que si le Sénat termine ses travaux avant la réception du message, la séance soit suspendue jusqu’à la convocation de la Présidente, la sonnerie se faisant entendre pendant 15 minutes avant la reprise des travaux;
(ii)le représentant du gouvernement ou la coordonnatrice législative du représentant du gouvernement indique que la réception d’un tel message n’est plus prévue;
d)le représentant du gouvernement ou la coordonnatrice législative du représentant du gouvernement soit autorisé à invoquer les dispositions de l’article 16-1(8) du Règlement à tout moment de la séance s’il y a un projet de loi en attente de la sanction royale;
e)le Sénat ne traite que des affaires du gouvernement ce jour-là.
[Français]
Projet de loi corrective de 2023
Première lecture
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) dépose le projet de loi S-17, Loi visant à corriger des anomalies, contradictions, archaïsmes ou erreurs relevées dans les lois et règlements du Canada et à y apporter d’autres modifications mineures et non controversables ainsi qu’à abroger certaines dispositions ayant cessé d’avoir effet.
(Le projet de loi est lu pour la première fois.)
Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?
(Sur la motion du sénateur Gold, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la séance d’après-demain.)
Langues officielles
Préavis de motion tendant à autoriser le comité à reporter la date du dépôt de son rapport final sur l’étude des services de santé dans la langue de la minorité
L’honorable René Cormier : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :
Que, nonobstant l’ordre du Sénat adopté le jeudi 9 mars 2023, la date du rapport final du Comité sénatorial permanent des langues officielles concernant son étude sur les services de santé dans la langue de la minorité soit reportée du 31 octobre 2024 au 31 mars 2025.
(1510)
PÉRIODE DES QUESTIONS
Les travaux du Sénat
Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, après avoir consulté les leaders et les facilitateurs, il a été convenu que nous devrions respecter plus strictement les temps alloués au cours de la période des questions. Le greffier lecteur se lève 10 secondes avant l’expiration des temps alloués pendant la période des questions, et la Présidente se lèvera une fois le temps écoulé, qu’une question ou une réponse soit terminée ou non. Les sénateurs doivent reprendre leur place à ce moment-là.
Les opérateurs de console ont reçu l’instruction générale de couper les microphones lorsque la Présidente se lève, que ce soit pendant la période des questions ou à d’autres moments. Cela respecte le fait que, en vertu de l’article 2-7(2) du Règlement, lorsque la Présidente se lève, les sénateurs doivent reprendre leur place, ce qui veut dire que toute intervention doit également cesser.
[Traduction]
Les affaires mondiales
Le soutien à l’Ukraine
L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Monsieur le leader, en octobre 2022, le gouvernement Trudeau a promis de fournir des services de communication par satellite au gouvernement de l’Ukraine et à des partenaires non gouvernementaux. Le gouvernement affirme qu’il est en train de donner suite à cette promesse. En janvier 2023, le gouvernement Trudeau a annoncé qu’il allait faire don d’un système national de missiles surface-air perfectionné à l’Ukraine, mais celui-ci n’a pas été livré. En octobre 2023, le gouvernement Trudeau a annoncé qu’il allait faire don de munitions navales ainsi que de projectiles fumigènes d’artillerie et de mortier à l’Ukraine. Cela n’a pas encore été livré. Voyez-vous une tendance se dessiner, monsieur le leader? Quand l’inefficace gouvernement Trudeau va-t-il donner suite à ces promesses qui ont été faites à l’Ukraine?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question. Le soutien du Canada à l’Ukraine demeure ferme et inébranlable. Le gouvernement du Canada s’est engagé à offrir plus de 2,4 milliards de dollars en aide militaire, ce qui comprend des chars, des véhicules blindés et des munitions, et il a annoncé une aide supplémentaire de 3,02 milliards de dollars. Le gouvernement continuera de respecter ses engagements.
Le sénateur Plett : Le mois dernier, en réponse au sénateur Dagenais, vous avez dit que le gouvernement Trudeau était un partenaire fidèle de l’Ukraine. Quelques jours plus tard, le 19 février, Le Devoir nous apprenait que 58 % de l’aide promise à l’Ukraine par le gouvernement Trudeau n’avait pas été acheminée. Est-ce ainsi qu’agissent les partenaires fidèles, sénateur Gold? Quel pourcentage de l’aide promise par votre gouvernement n’a pas été transmis, sénateur Gold?
Le sénateur Gold : Bien que j’ignore le pourcentage exact, je sais que les efforts se poursuivent entre le Canada et l’Ukraine relativement aux engagements que nous avons pris et que nous continuerons de soutenir l’Ukraine pendant cette période difficile.
L’Accord de libre-échange Canada-Ukraine
L’honorable Denise Batters : Sénateur Gold, la taxe sur le carbone du gouvernement Trudeau augmentera à nouveau de 80 $ la tonne la semaine prochaine, pour atteindre la somme faramineuse de 170 $ la tonne. À l’opposé, il semblerait que la taxe sur le carbone instaurée par l’Ukraine est très peu élevée, mais le gouvernement Trudeau refuse de nous dire à combien elle s’élève. Il y a trois semaines, la ministre du Commerce international, Mary Ng, est venue parler de l’Accord de libre-échange Canada-Ukraine avec le comité du Sénat. Elle a dit ignorer à combien s’élève la taxe sur le carbone ukrainienne. Aucun des cadres supérieurs qui l’accompagnaient, pas même son directeur et négociateur en chef adjoint, n’en savait plus. Ils ont dit qu’ils transmettraient l’information au comité. La troisième lecture du projet de loi a eu lieu le jour même, et le comité n’avait toujours pas eu sa réponse.
Sénateur Gold, trois semaines se sont écoulées depuis. Vous vous attendez à ce que nous nous prononcions sur ce projet de loi d’ici quelques heures, mais le gouvernement est incapable de nous fournir une réponse pourtant simple sur un amendement qui fait débat. Quelle est la réponse? À combien s’élève la taxe sur le carbone de l’Ukraine?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question. Je ne sais pas à combien s’élève la taxe sur le carbone de l’Ukraine. Ce que je sais, c’est que l’Ukraine a décidé d’instaurer une taxe sur le carbone. Ce que je sais, c’est que cette décision n’a pas été imposée à l’Ukraine, malgré les propos trompeurs que nous entendons à ce sujet depuis plusieurs mois. Je suis surpris qu’il en soit encore question. Il s’agit plutôt d’un élément contenu dans un accord négocié entre deux pays souverains qui respectent et poursuivent leurs intérêts respectifs.
La sénatrice Batters : Sénateur Gold, le gouvernement Trudeau a affirmé à maintes reprises que l’Ukraine dispose d’une taxe sur le carbone depuis longtemps. Le gouvernement explique souvent que l’Ukraine veut entrer dans l’Union européenne et que celle-ci veut que l’Ukraine dispose d’une taxe sur le carbone. Or, vous avez dit que l’Ukraine dispose déjà d’une taxe sur le carbone. En quoi cette disposition controversée aide-t-elle ce pays à entrer dans l’Union européenne? Pourquoi ne pas admettre la vérité? Le gouvernement Trudeau insiste honteusement sur ce point uniquement pour semer la discorde au Canada.
Le sénateur Gold : Non, ce n’est pas la vérité, avec tout le respect que je vous dois, sénatrice Batters. L’Ukraine ne fait que poursuivre ses intérêts comme bon lui semble en tant que pays souverain, et le Canada respecte les décisions qu’elle prend à ce titre, car il considère ce pays comme un partenaire commercial précieux.
[Français]
Le patrimoine canadien
Les langues officielles
L’honorable René Cormier : Sénateur Gold, les impacts négatifs de la décision de votre gouvernement de plafonner le nombre d’étudiants étrangers acceptés au pays continuent de se faire ressentir dans la sphère publique et mettent en péril la prochaine session universitaire et collégiale de plusieurs établissements.
En ce Mois de la Francophonie, où l’on reconnaît le rôle vital des établissements postsecondaires francophones en contexte minoritaire dans l’épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire, quelles mesures positives concrètes votre gouvernement entend-il prendre pour contrer les effets négatifs directs de cette décision, et ce, afin de respecter les nouvelles exigences de la Loi sur les langues officielles?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de votre question. Les établissements francophones sont essentiels au renforcement des communautés francophones en situation minoritaire dans l’ensemble du pays et sont très importants. C’est la raison pour laquelle le gouvernement a investi des sommes sans précédent depuis 2021 et que ces investissements ont été rendus permanents dans le nouveau plan d’action. Le plafond proposé pour les nouveaux permis d’études est une mesure nécessaire pour garantir l’intégrité du Programme des étudiants étrangers.
Le sénateur Cormier : Sénateur Gold, bien que le Plan d’action pour les langues officielles de 2023-2028 prévoie des mesures novatrices, il ne respecte toujours pas la promesse électorale de 2021 de votre gouvernement, selon laquelle un financement permanent de 80 millions de dollars par année serait destiné aux établissements d’enseignement postsecondaire dans les communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Votre gouvernement a-t-il l’intention d’honorer cette promesse? Devrons-nous attendre aux prochaines élections fédérales de 2025 pour que cet engagement se concrétise?
Le sénateur Gold : Le gouvernement a lancé le premier programme fédéral de soutien aux établissements d’enseignement postsecondaire dans les communautés minoritaires et, cette année, le gouvernement a annoncé un investissement supplémentaire pouvant atteindre 128 millions de dollars pour les quatre années du plan d’action de 2023-2028, afin de soutenir le financement des établissements d’enseignement postsecondaire en milieu minoritaire.
[Traduction]
L’innovation, les sciences et le développement économique
Le Programme canadien d’adoption du numérique
L’honorable Tony Loffreda : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat. Sénateur Gold, nous avons appris le mois dernier que la majeure partie du Programme canadien d’adoption du numérique sera annulée. Annoncé pour la première fois dans le budget de 2021, le Programme canadien d’adoption du numérique s’inscrivait dans un vaste effort de 4 milliards de dollars pour aider les petites entreprises canadiennes à devenir plus efficaces, à passer au numérique, à tirer parti du commerce électronique et à devenir plus compétitives au Canada et à l’étranger. Je suis fermement convaincu qu’il est essentiel d’aider nos petites et moyennes entreprises à accroître leur présence en ligne pour aider nos entrepreneurs à créer de la richesse et des emplois bien rémunérés.
Pourriez-vous nous expliquer pourquoi le gouvernement a soudainement décidé de réduire progressivement ce programme? Qu’adviendra-t-il des millions de dollars affectés au programme qui n’ont pas été dépensés?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question. J’ai été informé que le Programme canadien d’adoption du numérique du gouvernement fédéral n’accepte plus de nouvelles demandes pour la subvention Améliorez les technologies de votre entreprise, puisque le nombre maximal de participants a été atteint. Il est important de noter, chers collègues, qu’il est toujours possible de présenter une demande pour obtenir la subvention Développez vos activités commerciales en ligne, et que les entreprises qui ont signé leur accord de subvention Améliorez les technologies de votre entreprise avant lundi continueront de bénéficier du programme, y compris du financement de la Banque de développement du Canada, malgré la fermeture du processus de demande.
Je ne connais pas les détails des plans du gouvernement pour le reste éventuel des fonds affectés. Toutefois, le gouvernement continuera d’examiner ce qui peut être fait pour soutenir les petites et moyennes entreprises.
(1520)
Le sénateur Loffreda : Je vous remercie de votre réponse. Pouvez-vous nous assurer que le Programme canadien d’adoption du numérique fera l’objet d’une évaluation adéquate afin de mesurer son rendement global, y compris les taux de participation, les avantages et les lacunes du programme, ainsi que la valeur produite par les investissements?
Selon le personnel du cabinet du ministre, ce programme a permis de fournir une aide extrêmement efficace à des dizaines de milliers de petites entreprises de partout au Canada, ce qui rend cette décision quelque peu étonnante. Elle s’appuie sûrement sur une bonne raison.
Le sénateur Gold : Je vous remercie. Comme vous le savez, la subvention a permis de fournir une aide extrêmement efficace à des dizaines de milliers de petites entreprises de partout au Canada qui ont besoin de soutien pour croître et réussir. Le gouvernement est toujours prêt à tirer des leçons de programmes antérieurs dans le but d’améliorer la prestation et la conception de ses programmes. Cela dit, je ne sais pas si le programme en question a été ou sera soumis à une évaluation complète. Je m’informerai auprès du ministre.
Les relations Couronne-Autochtones
La Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones
L’honorable Paul J. Prosper : Sénateur Gold, il y a huit ans, le premier ministre Trudeau a déclaré qu’aucune relation n’était plus importante pour lui que celle avec les peuples autochtones. Le gouvernement a souvent souligné l’importance de relations de nation à nation, mais les décisions unilatérales prises par divers ministères, notamment Pêches et Océans Canada, n’ont fait que nuire aux pêcheries des Premières Nations. Je songe notamment à la fermeture de la pêche à la civelle, au refus d’augmenter le total autorisé des captures pour les entreprises autochtones comme Clearwater, malgré des signes justifiant une augmentation, et à la création possible de zones de protection marines dont les limites réduiraient de 10 % la pêche au homard pratiquée par Clearwater.
Honorables sénateurs, des traités protègent clairement les droits des Mi’kmaqs en matière de ressources naturelles. En outre, aux termes de la loi de mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones le gouvernement est tenu d’harmoniser les lois et les politiques canadiennes avec cette déclaration. Le gouvernement s’engage-t-il à adopter une approche fondée sur les droits dans toutes les discussions et politiques relatives à la pêche...
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de la question. Il va sans dire que la réconciliation avec les peuples autochtones demeure une priorité de premier plan pour le gouvernement et qu’il en est de même de la reconnaissance et du respect des droits des Autochtones ainsi que de leurs détenteurs. J’ai été informé que le ministère des Pêches et des Océans privilégie les relations de collaboration avec les pêcheurs autochtones dans le cadre d’accords, d’ententes et de dialogues. Toutefois, comme dans tous ces secteurs, il reste encore beaucoup de travail à faire.
On m’a assuré que Pêches et Océans Canada s’engageait à travailler en partenariat avec les communautés autochtones, à faire respecter leurs droits, et qu’il s’engageait à ce que ce travail important se poursuive dans les années à venir.
Le sénateur Prosper : Sénateur, depuis février, je fais une tournée partout dans le Mi’kma’ki pour écouter des chefs de bande, des chefs de conseil et des experts parler de leurs difficultés et de leurs priorités. À Terre-Neuve, plusieurs chefs mik’maqs m’ont parlé de leur participation à une évaluation de l’industrie de la pêche au sébaste en 2017. Ils ont demandé 25 000 tonnes métriques, mais ces 25 000 tonnes métriques ont été accordées à l’ensemble des pêcheurs de sébaste. Seulement 10 % ont été réservés aux Autochtones.
Le sénateur Gold : Merci. Je comprends l’essentiel de votre question, sénateur. Le gouvernement est conscient de l’importance de l’industrie de la pêche au sébaste pour les communautés côtières et autochtones. C’est pourquoi, après des consultations approfondies et se fondant sur les plus récentes données scientifiques, la ministre Lebouthillier a annoncé la réouverture de la pêche commerciale au sébaste en 2024. Toutefois, comme cette pêche a fait l’objet d’un moratoire pendant 30 ans, il est essentiel de faire les choses correctement, et c’est pour cela que nous suivons ce processus.
Les finances
La Remise canadienne sur le carbone
L’honorable Andrew Cardozo : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement et elle porte sur la Remise canadienne sur le carbone.
J’ai l’impression que, depuis un certain temps, le débat s’est égaré. Pouvez-vous nous ramener à la case départ, sénateur? Quel est le message que le gouvernement veut transmettre aux Canadiens? Je n’essaie pas de vous piéger, je veux savoir ce que le gouvernement souhaite transmettre comme information sur les objectifs de cette politique et sur la politique elle-même.
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie. Le gouvernement a clairement dit dès le début que la tarification du carbone constituait la solution axée sur le marché la plus efficace et la plus efficiente aux changements climatiques. Comme il est conscient des répercussions d’une telle mesure sur les Canadiens, le gouvernement a décidé de l’accompagner d’une remise. Ce programme, essentiellement, permet de redonner de l’argent aux citoyens et aux familles. En fait, dans 8 cas sur 10, la somme reçue est équivalente, ou à peu près, à ce qu’aurait coûté la tarification du carbone. Pour une famille de quatre, on parle de 1 800 $ en Alberta, de 1 200 $ au Manitoba, et ainsi de suite. Il s’agit d’une mesure efficace qui vise à convaincre les gens de modifier leurs comportements, mais sans constituer un fardeau financier pour les Canadiens.
Le sénateur Cardozo : Ma question complémentaire porte sur les prochaines étapes. Étant donné qu’un certain nombre de premiers ministres provinciaux demandent au gouvernement de geler la taxe sur le carbone, qu’entend faire le gouvernement? Quelle est sa position par rapport à l’approche adoptée par la Saskatchewan, qui consiste à ne pas rembourser la taxe qu’elle perçoit?
Le sénateur Gold : Comme tous les gouvernements, le gouvernement du Canada s’attend à ce que tous les Canadiens et toutes les administrations publiques au Canada observent la loi. D’ailleurs, la Cour suprême du Canada a confirmé la constitutionnalité du cadre de tarification de la pollution. Comme je l’ai mentionné, les familles de la Saskatchewan toucheraient en moyenne un remboursement de 1 800 $. Si le gouvernement de la Saskatchewan ne respecte pas ce régime, je crains que les gens de la Saskatchewan en souffrent.
[Français]
Les affaires mondiales
La Loi sur les mesures économiques spéciales
L’honorable Claude Carignan : Ma question s’adresse au leader du gouvernement. Monsieur le leader, en décembre 2022, le gouvernement Trudeau a publié un communiqué de presse intitulé « Le Canada entame le premier processus pour bloquer et confisquer les biens d’un oligarque russe sanctionné », visant le Russe bien connu Roman Abramovich.
Le communiqué disait ce qui suit :
C’est la première fois que le Canada utilise ses nouveaux pouvoirs qui permettent au gouvernement de procéder au blocage d’actifs appartenant à des personnes sanctionnées. Cela signifie que la ministre Joly envisagera maintenant de présenter une demande au tribunal pour confisquer définitivement les biens au profit de la Couronne.
Cela fait déjà un an et demi, et il ne s’est encore rien passé. Pourquoi est-ce si long? Combien de temps la ministre Joly continuera-t-elle d’envisager et quand passera-t-elle à l’action?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de votre question. Je ne peux pas vous donner un échéancier pour les actions du gouvernement. Le Canada a un système robuste de sanctions et a mis en place une loi pour faire en sorte qu’on puisse progresser. J’ai confiance que la ministre et le gouvernement feront en sorte que les sanctions soient appliquées de façon raisonnable.
Le sénateur Carignan : Un avion-cargo russe est immobilisé à l’aéroport Pearson de Toronto depuis déjà deux ans. Le gouvernement Trudeau ne veut pas nous dire ce qui se passe avec cet avion-cargo. Une rumeur veut que le Canada attende la permission d’autres pays avant de remettre l’avion à l’Ukraine. Sénateur Gold, est-ce exact? Est-ce que le gouvernement Trudeau a besoin de la permission d’autres pays pour décider de comment aider l’Ukraine?
Le sénateur Gold : La réponse est non. Le Canada travaille en étroite collaboration avec ses alliés partout dans le monde pour faire en sorte que nos actions soient coordonnées et efficaces. Le Canada fait partie d’une coalition de pays démocratiques qui travaillent ensemble pour faire en sorte que l’Ukraine soit protégée et appuyée.
[Traduction]
Le soutien à l’Ukraine
L’honorable Leo Housakos : Sénateur Gold, il y a quelques semaines, je vous ai posé une question sur la demande de l’Ukraine de faire don de roquettes CRV7 excédentaires, qui sont actuellement stockées par les Forces armées canadiennes. Encore aujourd’hui, vous avez répondu à une question du sénateur Plett sur l’Ukraine. Vos réponses semblent toujours se résumer à des engagements ou à des annonces du gouvernement. Pouvez-vous nous dire ce qui a été livré par le gouvernement? Je soupçonne que la seule chose que le gouvernement a offerte à l’Ukraine et aux Canadiens, ce sont des paroles creuses et des promesses en l’air.
Écoutez bien ceci. Vous avez annulé le programme permettant de fournir des images RADARSAT. Vous n’avez imposé aucune sanction en vertu de la loi de Magnitski par crainte d’offenser la Russie en disant son nom. Vous avez refusé de fournir du matériel létal avant la guerre pour décourager l’invasion par la Russie. Vous n’avez pas accéléré la production de munitions. Vous avez contourné vos propres sanctions en retournant une turbine à gaz en Russie, ce qui a maintenu la dépendance de l’Europe envers l’énergie russe de Poutine. Vous avez rejeté les propositions d’envoyer de l’équipement excédentaire et usagé du Canada. Ce sont les faits.
Par conséquent, sénateur Gold, pouvez-vous tout simplement me dire quand le gouvernement pourrait enfin envoyer une quelconque aide militaire à l’Ukraine?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de la question.
(1530)
Comme je l’ai dit à maintes reprises, le Canada a fourni une aide militaire considérable à l’Ukraine, et il continuera à travailler avec l’Ukraine en tant que partenaire précieux pour la soutenir dans sa lutte contre l’agression illégale de la Russie.
Le sénateur Housakos : Vous êtes doués avec les mots. Sénateur Gold, je viens de mentionner l’annulation par le gouvernement du programme visant à fournir à l’Ukraine des images RADARSAT. Il s’agissait d’un programme du précédent gouvernement conservateur que vous avez presque immédiatement supprimé en janvier 2016 dans votre empressement à vous débarrasser de tout ce qui avait été apporté par vos adversaires.
Pourquoi le gouvernement donne-t-il la priorité à ses intérêts politiques intérieurs lorsqu’il s’agit d’élaborer sa politique étrangère? Veuillez répondre à la question suivante : qu’avez-vous concrètement apporté à l’Ukraine, autre que de belles paroles?
Le sénateur Gold : J’essaie d’éviter de jouer au ping-pong politique avec vous, sénateur Housakos, mais vous ne me rendez pas la tâche facile. Je vais toutefois m’abstenir.
Le gouvernement a pris des mesures importantes pour aider l’Ukraine, et il continuera de le faire. Les changements que le gouvernement a introduits en 2016 n’ont pas consisté seulement à annuler ou à modifier certaines décisions du gouvernement précédent, mais aussi à rétablir le financement et à soutenir comme il se doit les secteurs de l’économie canadienne qui avaient été tristement et honteusement négligés par le gouvernement précédent.
Les finances
La croissance économique
L’honorable Iris Petten : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat.
La Coalition pour un avenir meilleur, qui est présidée par l’honorable Anne McLellan et l’honorable Lisa Raitt, a publié ce mois-ci une version actualisée de son tableau de bord, qu’elle a intitulé Croissance fragile : il est urgent de poser des assises solides. Dans celui-ci, elle insiste sur le fait que nous devons faire de la croissance économique une priorité pour tous. Elle y recense également une série d’objectifs que le pays devrait tâcher d’atteindre d’ici la fin de la décennie. Ces 21 indicateurs permettent d’évaluer la compétitivité du Canada et de déterminer si le pays est en bonne voie d’atteindre son plein potentiel économique.
Le budget de 2024 misera-t-il sur la croissance économique du Canada pour régler certains des problèmes relevés dans ce rapport?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie, madame la sénatrice.
Comme vous le savez, je ne peux pas m’avancer, même hypothétiquement, sur les mesures qui pourraient se retrouver dans le prochain budget. Je peux toutefois vous dire que le gouvernement cherchera des moyens de bâtir plus de maisons et de les bâtir plus rapidement, de rendre la vie plus abordable pour les Canadiens et de créer de bons emplois. J’en profite d’ailleurs pour rappeler que, selon les prévisions du Fonds monétaire international et de l’Organisation de coopération et de développement économiques, le Canada devrait connaître la croissance économique la plus vigoureuse du G7 en moyenne en 2025.
Le gouvernement entend continuer à faire en sorte que ses efforts bénéficient à tous les Canadiens, qui méritent que l’économie soit en bonne santé, pour leur bien-être et celui de leurs proches.
La sénatrice Petten : Sénateur Gold, en ce qui concerne les importants indicateurs du niveau de vie, à savoir la production par habitant et la productivité de la main-d’œuvre, le rapport indique que le Canada va dans la mauvaise direction :
Les résultats du Canada en matière de productivité sont lamentables. Nous connaissons actuellement la plus forte baisse de productivité hors récession depuis au moins les années 1950.
Que fait le gouvernement pour s’attaquer à ce grave problème?
Le sénateur Gold : Je vous remercie de votre question.
Il est juste de dire que la question de la productivité demeure un enjeu récurrent au Canada. Il y a de nombreux problèmes à l’origine de la baisse de la productivité. Cela dit, le gouvernement a lancé plusieurs programmes et a offert des moyens de financement aux industries et aux secteurs afin qu’ils puissent innover et accroître la productivité au Canada. À titre d’exemple, le gouvernement a lancé les Grappes d’innovation mondiales, qui renforcent les industries les plus importantes du Canada en permettant au secteur privé, aux établissements universitaires, etc. de travailler ensemble.
L’agriculture et l’agroalimentaire
L’étiquetage indiquant le pays d’origine
L’honorable Robert Black : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement.
L’annonce récente du département de l’Agriculture des États‑Unis concernant les étiquettes « Product of USA » sur la viande, la volaille et les œufs soulève d’importantes préoccupations pour les producteurs canadiens et l’intégrité de nos chaînes d’approvisionnement, la règle finale stipulant que les étiquettes « Produit des États-Unis » ne pourront être apposées que sur les produits dérivés d’animaux nés, élevés, abattus et transformés aux États-Unis.
Quelles mesures le gouvernement canadien prévoit-il prendre pour faire face aux perturbations potentielles dans les chaînes d’approvisionnement et protéger les intérêts des producteurs canadiens tout en assurant la poursuite de la coopération et du commerce entre le Canada et les États-Unis dans le secteur agricole? Merci.
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de cette importante question, monsieur le sénateur.
Le gouvernement demeure très préoccupé par toute mesure susceptible de perturber la chaîne d’approvisionnement nord‑américaine de la viande et du bétail, qui est très fortement intégrée. On m’a informé que le gouvernement est déçu que la règle finale ne semble pas tenir compte des préoccupations qu’il a soulevées à maintes reprises à cet égard. Je crois comprendre que le gouvernement examine très minutieusement la règle finale et qu’il surveillera de près son incidence et sa mise en œuvre afin que le secteur canadien de la viande puisse continuer de bénéficier d’un accès prévisible et sans entrave au marché américain.
Le sénateur Black : Merci, sénateur Gold.
Compte tenu de la déception exprimée par le ministre de l’Agriculture et la ministre du Commerce international concernant l’apparente négligence des préoccupations soulevées par le Canada, pourriez-vous nous donner un aperçu de la manière dont le gouvernement canadien a l’intention d’intervenir auprès de ses homologues américains pour que les préoccupations soulevées dans le cadre des relations commerciales bilatérales soient prises en compte de manière adéquate? Merci.
Le sénateur Gold : Merci de votre question, monsieur le sénateur.
J’ai été informé que la délégation canadienne a l’intention de soulever cette question avec ses homologues lors de la réunion trilatérale avec les ministres de l’agriculture des États-Unis et du Mexique qui doit se tenir au Colorado, à la fin du mois.
Les affaires mondiales
Le gaz naturel liquéfié
L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Monsieur le leader, l’Ukraine a demandé au Canada de l’aider à réduire la dépendance de l’Europe au gaz naturel de la Russie. Malheureusement, sa demande est restée lettre morte. Voilà un autre exemple de la façon dont le gouvernement Trudeau a laissé tomber l’Ukraine, sans parler de nos alliés européens et des travailleurs du secteur canadien de l’énergie. En août 2022, le chancelier allemand a dirigé une délégation au Canada dans le but précis d’obtenir du gaz naturel liquéfié canadien. Le premier ministre Trudeau ne les a pas écoutés, affirmant qu’il n’existait pas d’argument de poids pour justifier l’exportation de gaz naturel canadien vers l’Europe.
Monsieur le leader, l’Allemagne a fini par construire un terminal de gaz naturel liquéfié en 194 jours et signer un contrat d’approvisionnement de 15 ans avec le Qatar. Le premier ministre va-t-il admettre qu’il avait tort?
Le sénateur Housakos : Trudeau va leur vendre des voitures électriques. Envoyez-leur la mienne.
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question.
Non, je ne dirais pas que le premier ministre croit avoir eu tort. Comme je l’ai dit, nous travaillons en étroite collaboration avec l’Ukraine.
Je suis toutefois frappé par le nombre de questions, et je suis content que vous souleviez d’importantes questions au Sénat au sujet du soutien fourni par le Canada à l’Ukraine. Je me demande si cela est un signe avant-coureur de la façon dont vous allez voter au sujet de l’accord de libre-échange plus tard aujourd’hui, car vous cherchez à rétablir votre réputation à la suite de votre comportement honteux de l’automne dernier, alors que vous aviez voté encore et encore contre des mesures idéologiquement opposées à la tarification de la pollution. Mais je ne fais qu’émettre une hypothèse.
La sénatrice Martin : Il y a deux ans cette semaine, peu de temps après le début de l’invasion de l’Ukraine par Poutine, les libéraux de Trudeau ont voté contre une motion conservatrice à la Chambre, qui demandait au gouvernement de prendre des mesures pour approuver la construction de gazoducs jusqu’aux côtes de l’Atlantique.
Monsieur le leader, n’est-il pas vrai que le premier ministre a refusé d’aider l’Europe à remplacer le gaz russe à cause du programme et des politiques anti-énergie du gouvernement?
Le sénateur Gold : La réponse est non. Le gouvernement a investi du capital financier et politique pour s’assurer que les ressources occidentales peuvent être acheminées vers les marchés de manière efficace et efficiente. Toutefois, il faut le soutien et le consentement des provinces et des territoires où se trouveront les installations nécessaires, et cela demeure difficile dans notre fédération.
Le soutien à l’Ukraine
L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Ce qui est honteux, sénateur Gold, c’est que vous doutiez de nos intentions lorsque nous posons d’importantes questions au sujet de l’Ukraine.
Monsieur le leader, le gouvernement Trudeau a annoncé un financement de 4,4 millions de dollars pour que deux fabricants canadiens élaborent des plans pour augmenter la production d’obus d’artillerie de 155 millimètres. Or, cette annonce n’a pas été faite en février 2022, dans la foulée de l’invasion de l’Ukraine par Poutine. Elle n’a pas été faite l’automne dernier non plus, quand on a appris qu’il restait aux Forces armées canadiennes l’équivalent de trois jours d’approvisionnement en munitions d’artillerie pour sa défense du Canada. Non, monsieur le leader, l’annonce a été faite il y a deux semaines, le 7 mars, soit plus de deux ans après le début de la guerre en Ukraine.
Je suis désolé que vous considériez ces questions honteuses, sénateur Gold. Comment justifiez-vous une telle inaction?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question.
En réponse à une question précédente, j’ai commencé par dire que j’étais content que vous souleviez d’importantes questions au sujet de l’Ukraine. Je ne minimise nullement l’importance de la question. Je suis simplement surpris que vous vous concentriez sur ce dossier avec une telle intensité le jour même où nous allons tenir le vote que vous avez reporté.
(1540)
Pour répondre à votre question, je n’ai pas de renseignements détaillés sur les raisons entourant la conclusion de ce marché et le lancement de ce projet. Cela dit, je répète que le gouvernement soutient l’Ukraine depuis le début et qu’il continuera de le faire.
Le sénateur Plett : C’est de la poudre aux yeux. C’est toujours la même histoire avec ce premier ministre : c’est un grand parleur, mais un petit faiseur.
L’Ukraine a besoin d’une assistance militaire plus importante, mais le premier ministre ne donne pas suite à ces promesses. Où est l’empressement, monsieur le leader? Pourquoi y a-t-il eu de nombreux contrats pour « ArnaqueCAN », mais pas pour la fabrication des munitions dont nos soldats et l’Ukraine ont désespérément besoin?
Une voix : Bravo!
Le sénateur Gold : Contrairement à ses prédécesseurs, le gouvernement actuel augmente ses dépenses en défense année après année, si bien qu’il en a nettement rehaussé la proportion par rapport au PIB, qui, si ma mémoire est bonne, n’était plus que d’environ 1 % lorsqu’il est arrivé au pouvoir. Le gouvernement poursuit les efforts en ce sens. Voilà ce qu’il fait. Ce n’est pas de la poudre aux yeux. Ce ne sont pas simplement de belles paroles. C’est de l’argent qui est bel et bien investi dans la défense.
Le conflit dans la bande de Gaza
L’honorable Marilou McPhedran : Ma question s’adresse au sénateur Gold.
Le 26 janvier, la Cour internationale de Justice a ordonné à Israël de respecter des mesures conservatoires pour prévenir un génocide à Gaza. Depuis, nous entendons des discours pacifiques, mais observons des actes belliqueux. Le soutien matériel que de grandes puissances mondiales continuent de fournir à l’armée israélienne est le signe d’une complicité inquiétante dans la crise qui s’aggrave à Gaza — le transfert d’armes, l’obstruction diplomatique aux résolutions et le silence —, alors que la famine s’installe et que des milliers de personnes de plus sont mortes à Gaza.
Les États ont la responsabilité juridique et morale de protéger les civils, de prévenir les crimes de guerre et de faire respecter le droit international. Pouvez-vous confirmer que le Canada ne fournit pas d’armes et de munitions à Israël en ce moment? Quand le gouvernement du Canada appellera-t-il à un cessez-le-feu permanent lié au désarmement du Hamas?
L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de la question.
Comme la ministre des Affaires étrangères l’a annoncé, le Canada a cessé d’envoyer tout équipement militaire à l’État d’Israël depuis un bon moment.
Pour ce qui est de la question sur le cessez-le-feu, le Canada a demandé publiquement une pause humanitaire et un cessez-le-feu. Il ne suffit pas que le Hamas dépose les armes. Cet appel exige la libération des otages et le respect de nombreuses autres mesures afin de ne pas récompenser le Hamas, une organisation terroriste et génocidaire qui a lancé une attaque génocidaire contre des civils israéliens innocents le 7 octobre.
La sénatrice McPhedran : Il y a environ un mois, Amnistie internationale, le Conseil danois pour les réfugiés, Humanité et Inclusion, Oxfam International, ActionAid International et l’Association des agences de développement international ont publié un communiqué commun dans lequel ils demandaient ce que le Canada fait réellement en ce moment pour protéger la vie des civils, obtenir la libération des otages israéliens ainsi que celle des Palestiniens détenus illégalement, et obtenir un accès total et libre pour acheminer l’aide humanitaire...
Le sénateur Gold : Les allégations contenues dans cette déclaration ne sont pas nécessairement vraies. Ce sont des allégations. Le Canada travaille avec ses alliés. Il travaille dans la région avec Israël et d’autres partenaires afin de fournir une aide humanitaire et de veiller au respect du droit international.
[Français]
ORDRE DU JOUR
Projet de loi sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants au Canada
Message des Communes—Adoption de l’amendement du Sénat
Son Honneur la Présidente annonce qu’elle a reçu de la Chambre des communes un message informant le Sénat qu’elle a adopté l’amendement apporté par le Sénat au projet de loi C-35, Loi relative à l’apprentissage et à la garde des jeunes enfants au Canada, sans y apporter d’autres amendements.
[Traduction]
Les travaux du Sénat
L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, conformément à l’ordre adopté le 7 décembre 2021, je souhaite aviser le Sénat que la période des questions avec l’honorable Ya’ara Saks, c.p., députée, ministre de la Santé mentale et des Dépendances et ministre associée de la Santé, aura lieu le jeudi 21 mars 2024, à 16 heures.
[Français]
Projet de loi modifiant le Code criminel et la Loi sur la protection d’espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international et interprovincial
Deuxième lecture
L’ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Klyne, appuyée par l’honorable sénateur Harder, c.p., tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-15, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur la protection d’espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international et interprovincial.
L’honorable Claude Carignan : Honorables sénateurs, je ne pensais pas intervenir dans ce débat jusqu’à tout récemment. Cependant, à la lecture du projet de loi, en écoutant les discours et en voyant la pression énorme qu’on a mise sur les sénateurs pour le faire progresser, j’ai décidé que je devais exprimer ma pensée sur ce qui se passe ici avec cette pièce législative. Il me semble assez évident qu’avec ce projet de loi, le gouvernement se moque des Canadiens en général et des sénateurs en particulier. Évidemment, que l’on me comprenne bien, je n’ai rien contre les animaux et j’aime les éléphants et les grands singes.
Avant toute chose, permettez-moi cependant de parler des trois principales causes de disparition des éléphants. Tout d’abord, il y a le braconnage. Les éléphants sont abattus illégalement pour leur viande, pour leur peau, mais aussi et surtout pour leur ivoire. De 20 000 à 30 000 éléphants sont ainsi tués chaque année par des braconniers.
Puis, il y a la conversion des zones forestières à des fins agricoles ainsi que le développement de divers projets d’aménagement : les routes, barrages, mines et autres complexes industriels ont fragmenté l’habitat des éléphants, diminuant ainsi considérablement leurs chances de survie.
Enfin, à cause de l’accroissement des populations humaines et de la baisse des surfaces d’habitats naturels, aussi bien en Afrique qu’en Asie, les hommes et les éléphants sont de plus en plus en rivalité pour l’espace et la nourriture, ce qui a souvent des conséquences dramatiques; des personnes perdent leurs récoltes, leurs bétails et parfois même la vie. Il y a aussi des animaux, déjà menacés ou en danger, qui sont tués pour exercer des représailles ou éviter de futurs conflits.
Chers collègues, le Code criminel du Canada ne fait assurément pas partie des causes liées à la diminution dramatique des populations d’éléphants ni aux solutions visant à les protéger. Il ne s’agit pas de régler un problème qui met la santé, la sécurité ou le bien-être financier des Canadiens en péril. Il ne s’agit pas non plus de répondre à une décision d’un tribunal imposant une date limite. Il s’agit, théoriquement, de donner une protection juridique à 23 éléphants et aux 30 grands singes qui vivent au Canada.
Je tiens à rassurer tout le monde : aucun être humain ne souffrira du fait que le projet de loi S-15 soit adopté ou non, qu’il soit adopté maintenant ou dans deux ans. Seuls 53 animaux seraient théoriquement, et je dis bien théoriquement, affectés, comme je l’ai souligné précédemment, puisqu’ils bénéficient déjà d’une clause de droits acquis qui les protège. De plus, en ce qui a trait à l’importation future, une autorisation ministérielle est requise. Donc, essentiellement, ce projet de loi n’a absolument aucune utilité, sinon de donner bonne conscience à certains.
Le seul zoo qui prévoit de continuer à garder ou à élever des éléphants à l’avenir, donc le seul zoo touché par le projet de loi, est l’African Lion Safari, et il obtiendra une exemption en vertu du projet de loi. Ainsi donc, le projet de loi n’offre pas de protection supplémentaire et n’améliore pas le bien-être d’un seul grand singe ou d’un seul éléphant au Canada.
En outre, honorables sénateurs, en vertu de la loi en vigueur, aucun éléphant ou grand singe ne peut être importé dans le pays sans l’autorisation expresse du ministre. Aucun. De plus, le ministre a déjà toute latitude pour refuser ces importations ou exportations, peu importe la raison.
Le projet de loi S-15 ne fait littéralement rien pour le bien-être des animaux, si ce n’est cocher une case sur la lettre de mandat du ministre. Serons-nous des partenaires d’un simulacre d’action gouvernementale, chers collègues?
Je déplore que le gouvernement impose une pression énorme sur les membres du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles pour que ce dernier entame son étude du projet de loi le plus rapidement possible. Le sénateur Klyne s’est félicité du fait que le projet de loi S-15 passe avant tout autre projet de loi au comité. Encore une fois, quelle est l’urgence? Je le répète : aucun Canadien ne verra sa vie, sa santé ou sa situation matérielle affectée ou améliorée au moyen de ce projet de loi.
(1550)
Sérieusement, je ne vois qu’une seule explication à cet entêtement du sénateur Gold à faire avancer le projet de loi S-15. Ce projet de loi, à mon avis, n’est qu’une mauvaise orientation que le gouvernement demande au Sénat de prendre pour calmer une poignée d’activistes et parce que le gouvernement ne fait pas preuve d’une grande compétence législative.
Afin de ne pas montrer aux sénateurs et aux Canadiens que ce gouvernement est toujours incapable, après huit ans, de mener sa barque législative, les libéraux inventent des urgences; vite, il faut adopter le projet de loi S-15 cette semaine!
Or, ce qui est triste, chers collègues, c’est que ce projet de loi repoussera, au Comité des affaires juridiques, l’étude de huit projets de loi qui, eux, affecteraient directement la vie des Canadiens. Il y a notamment le projet de loi C-291, qui fait du surplace au Sénat depuis plus d’un an, bien qu’il ait été adopté par un vote unanime de 323 à 0 par les élus à l’autre endroit.
Honorables sénateurs, une fois que le projet de loi S-15 aura été adopté par le Sénat, il ira rejoindre à la Chambre des communes les projets de loi suivants : les projets de loi S-6, S-7 et S-9 — adoptés par le Sénat en juin 2022 — et les projets de loi S-11, S-13 et S-14 — adoptés par le Sénat en décembre dernier.
Sans le moindre égard pour le travail rigoureux du Sénat, tous ces projets de loi ont deux caractéristiques : le leader du gouvernement les a décrits comme urgents, mais ils languissent toujours à l’étape de la première ou de la deuxième lecture à l’autre endroit; c’est désolant et peu édifiant pour l’institution que nous représentons.
Peut-être suis-je trop cynique; peut-être le gouvernement croit-il vraiment que le projet de loi S-15 répond à un besoin urgent. Si tel est le cas, je me questionne sincèrement sur la capacité de ce gouvernement à se connecter à la réalité.
Plus de 70 % des Canadiens sont d’accord avec l’énoncé selon lequel le Canada est brisé. Ce constat me semble conforme à la réalité. Je ne comprends pas comment le gouvernement peut faire de la protection théorique de 23 éléphants et de 30 grands singes une priorité législative. Comment les libéraux en sont-ils arrivés là, dans une telle panne d’imagination, pour penser que le Canada a un grave problème de singes?
Honorables sénateurs, nos forces armées sont sous-équipées, nos soldats doivent acheter eux-mêmes leurs vêtements en Lettonie, mais le gouvernement donne la priorité au confort des grands singes.
La réputation du Canada à l’échelle internationale est la plus mauvaise qu’elle l’a été depuis plus d’un siècle. La solution? Faire du Canada un modèle pour la protection des éléphants, pour citer le sénateur Klyne.
La Chine, la Russie et d’autres pays agissent impunément au Canada pour nous espionner ou influencer notre système politique. Ce n’est pas grave; les zoos seront bien surveillés.
Notre système d’immigration est en déroute. Les réfugiés, les faux étudiants, les travailleurs temporaires qui deviennent permanents, tout le monde peut entrer au Canada. Alors, la première chose à faire, c’est de resserrer les règles sur l’arrivée des éléphants. C’est décourageant.
Pire, il y a au Canada un féminicide tous les deux jours. Depuis 2015, les crimes violents ont augmenté de 39 %. Le taux national d’homicide n’a jamais été aussi élevé depuis plus de 30 ans. L’an dernier, 874 Canadiens ont été victimes d’homicide.
Six millions de Canadiens n’ont pas de médecin de famille. L’attente pour voir un médecin spécialiste est à un niveau record. Plus de 31 000 Canadiens sont morts en attente d’une chirurgie l’an dernier.
Cependant, les Canadiens peuvent se consoler en se rappelant les paroles du sénateur Klyne, et je cite :
Par ailleurs, les éléphants sont altruistes. Ils essaient de réanimer les individus malades ou mourants, même les étrangers, en les soulevant avec leurs défenses pour les remettre sur leurs pattes.
Un nouveau rapport indique que le prix moyen demandé pour un logement locatif au Canada était de 2 193 $ par mois en février, ce qui représente une hausse de 10,5 % d’une année à l’autre. Quelle est la priorité du gouvernement? L’habitat des éléphants.
Le nombre de faillites au Canada a augmenté de 41,4 % en 2023. Les banques alimentaires s’attendent à une augmentation de 18 % de la demande en 2024, ce qui signifie qu’un million de personnes de plus devront faire appel à leurs services pour survivre. Le Sénat va débattre du sort des orangs-outans. Pour la seule ville de Toronto, il y a eu 2,53 millions de visites aux banques alimentaires entre avril 2022 et mars 2023, et une personne sur dix a dû faire appel à une banque alimentaire.
Rassurons-nous : le gouvernement va serrer la vis à l’African Lion Safari, mais pas à Loblaw ni à Metro.
Les ports, les aéroports et toutes les infrastructures au pays tombent en ruine, mais on va s’occuper des zoos.
Le gouvernement aura toutes les misères du monde à limiter le déficit à 40 milliards de dollars et devra couper dans les services, mais ne craignons rien, il y aura des fonctionnaires pour gérer les 30 grands singes.
Les actes antisémites et islamophobes se multiplient. La police peine à mener des interventions structurées à cause des messages contradictoires du gouvernement libéral, mais on peut avoir confiance : les ordres seront clairs lorsqu’il s’agira d’intervenir contre les gardiens de zoo.
Le gouvernement est au plus bas dans les sondages. Seulement 3 % des Canadiens veulent que Justin Trudeau se représente — 3 % —, mais il a trouvé la solution pour réunir les Canadiens autour de sa vision : un grand débat sur les singes et les éléphants.
Honorables sénateurs, vous aurez compris que je pourrais continuer ainsi tout l’après-midi.
En tout respect pour celles et ceux qui y croient, j’estime que ce projet de loi est inefficace et frise le ridicule. De tels changements mineurs au Code criminel devraient être inclus dans un projet de loi contenant plusieurs autres modifications.
Si le ministre de la Justice manquait d’imagination sur les changements à apporter au Code criminel, il n’avait qu’à nous faire signe. Nous avons une liste complète de changements pertinents qui touchent des problèmes autrement plus actuels, concrets et urgents que les singes et les éléphants.
Comme je le disais plus tôt, je ne sais pas si le gouvernement utilise ce simulacre de projet de loi pour donner le change et occuper le temps du Sénat ou s’il est tellement à bout de souffle et déconnecté de la vie des Canadiens qu’il s’imagine que le projet de loi S-15 va améliorer le sort d’un seul d’entre eux.
Quelle que soit la réponse à cette question, deux conclusions s’imposent.
La première est la suivante : il faut des élections générales le plus tôt possible afin que le Canada se donne un gouvernement sérieux qui saura utiliser le Sénat de façon adéquate. À 130 millions de dollars par année, le Sénat devrait avoir d’autres priorités.
La deuxième conclusion est la suivante : le Sénat doit se tenir debout et voter contre le projet de loi S-15 dès l’étape de la deuxième lecture, afin de montrer au gouvernement que le Sénat est une institution sérieuse qui n’a pas de temps à perdre avec un projet de loi futile, qui n’a aucune prise dans la réalité des Canadiennes et des Canadiens. Nous devons aussi montrer que nous préférons travailler à trouver des solutions concrètes à de vrais problèmes vécus par les Canadiens. Cela me semble être le gros bon sens.
Merci.
L’honorable Chantal Petitclerc : Honorables sénatrices et sénateurs, j’interviens à nouveau aujourd’hui pour appuyer le bien‑être et la protection des animaux. Je le fais cette fois en apportant mon soutien au projet de loi S-15.
Vous aurez compris que mon discours sera différent de celui du sénateur Carignan.
Mon intérêt pour la défense et la protection du bien-être des animaux existait bien avant ma nomination au Sénat. Je dois dire que cet intérêt s’est transformé en priorité grâce à plusieurs de mes collègues : le sénateur Moore, avec son projet de loi S-203, qui a mis fin à la captivité des baleines et des dauphins; la sénatrice Stewart Olsen, pour ses efforts visant à mettre fin aux essais de cosmétiques sur les animaux au Canada; le sénateur Sinclair, bien sûr, qui, avec le projet de loi S-218, nous a rendus encore plus sensibles et mieux informés sur la réalité des éléphants et des grands mammifères.
[Traduction]
Sénateur Klyne, je vous remercie d’avoir maintenu ce projet en vie en présentant et parrainant le projet de loi S-241.
(1600)
Selon moi, une des grandes forces du Sénat, c’est qu’il nous permet d’avoir accès à un trésor de sagesse, qui, une fois combiné à des données fiables et vérifiées, peut nous amener à changer. Ma sensibilité à cette question a également été aiguisée par mon rôle de parent.
Je l’ai déjà dit dans d’autres discours, mais je tiens à insister sur le point suivant : mon fils et les jeunes de son âge m’impressionnent par la relation qu’ils entretiennent avec les animaux et la nature, qui n’est pas une relation de domination, mais une relation de respect et d’inclusion. Ils grandissent en étant conscients de faire partie de la nature et en sachant déjà qu’elle est très fragile. Cela me remplit d’espoir, et j’ai le sentiment profond que j’ai le devoir de ne pas les laisser tomber.
Chaque fois que nous sommes saisis d’un projet de loi visant à assurer le bien-être des animaux et à protéger la nature, je ne peux m’empêcher de penser que nous agissons aussi pour nos enfants et le monde dans lequel nous voulons qu’ils grandissent.
[Français]
Quand il s’agit du bien-être des animaux au Canada, il faut être bien conscient qu’il y a plusieurs joueurs et différentes approches selon les ordres de gouvernement. Les mesures proposées dans le projet de loi S-15 s’ajoutent donc à un écosystème de protection animale au sein duquel plusieurs lois et règlements sont adoptés par les provinces et les territoires, à qui revient principalement la responsabilité de protéger les animaux.
À ces lois provinciales et territoriales qui portent sur des aspects ciblés du bien-être des animaux ou visent des espèces spécifiques s’ajoute le Code criminel, qui les protège également contre la cruauté et la négligence. Parallèlement, de nombreux autres mécanismes fédéraux ont été mis en place pour renforcer la protection des animaux partout au pays. Ces dispositifs juridiques et réglementaires sont complétés par les attestations octroyées par les organismes de certification en matière de pratiques de soins et de traitement des animaux.
De plus, il ne faut évidemment pas oublier les organismes de défense des droits des animaux, qui effectuent un excellent travail pour non seulement faciliter l’application des lois, mais aussi pour sensibiliser la population à l’importance de la vie animale.
[Traduction]
C’est dans ce contexte que s’inscrivent les mesures prévues par le projet de loi S-15.
Je ne reviendrai pas sur le fait que les éléphants et les grands singes sont des animaux très intelligents et sensibles, qu’ils ont besoin d’un environnement qui respecte leur comportement et leurs besoins naturels et qu’ils n’ont pas leur place en captivité. Ces dernières années, nous avons pris connaissance d’un grand nombre de données et de documents scientifiques convaincants. Examinons l’objet du projet de loi.
[Français]
En ajoutant une nouvelle infraction au Code criminel, le gouvernement vise à interdire la possession, la reproduction ou la fécondation d’éléphants et de grands singes en captivité. Il incomberait aussi aux propriétaires de ces animaux d’empêcher leur reproduction naturelle en captivité. Par ailleurs, une nouvelle infraction interdirait l’utilisation d’éléphants et de grands singes en captivité dans le cadre de spectacles; cette infraction serait passible d’une amende maximale de 200 000 $. L’autre modification porte sur la Loi sur la protection d’espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international et interprovincial. Cette loi, une fois modifiée, prohiberait l’importation au Canada ou l’exportation à l’extérieur du Canada d’un éléphant ou d’un grand singe.
[Traduction]
Il existe toutefois plusieurs exceptions à toutes ces interdictions. Par exemple, une exception peut être accordée si elle est dans l’intérêt de l’animal ou dans le cadre d’un programme de conservation ou d’un programme scientifique autorisé par le gouvernement fédéral ou provincial. Comme il ne s’agit pas d’une interdiction totale, il sera essentiel de veiller à ce que les mesures de protection soient solides et rigoureuses lorsque ces exceptions seront autorisées. Les critères doivent être rigoureux et fondés sur des faits, car il est clair que c’est là que tout se jouera.
À cet égard, je suis rassurée par la déclaration du ministre de l’Environnement et du Changement climatique, l’honorable Steven Guilbeault :
La nouvelle mise en captivité de tout éléphant ou grand singe au Canada devrait respecter des critères très stricts prouvant qu’une telle activité soit dans l’intérêt supérieur du bien-être de l’animal, de la conservation ou de la science, compte tenu des données probantes et d’une analyse des solutions de rechange.
Lors de l’annonce du dépôt de ce projet de loi, le ministre Guilbeault s’est également dit ouvert à « discuter avec les sénateurs des possibles amendements à ce projet de loi ». Son ouverture à l’amélioration du projet de loi m’amène à aborder la portée limitée du projet de loi S-15 par rapport à ce qui nous a déjà été proposé dans le projet de loi S-241.
[Français]
En réponse au rappel au Règlement sur le projet de loi S-241, les sénateurs Gold, Dalphond et Klyne ont clairement énuméré les différences entre les deux projets de loi. J’étais, pour ma part, à l’aise avec l’intention inclusive du projet de loi S-241 qui était de protéger, en plus des éléphants et des grands singes, près de 800 autres espèces animales sauvages en captivité qui auraient, à leur tour, bénéficié de nouvelles mesures de protection juridique. Je soutenais aussi le mécanisme qui aurait permis par décret de retirer ou d’ajouter certaines mesures de protection en tenant compte de facteurs liés au bien-être des animaux en captivité, ce que ne fait pas le projet de loi S-15.
Vous vous rappelez peut-être la tragédie qui est survenue en 2013 au Nouveau-Brunswick, durant laquelle deux garçons ont été tués par un python. Cette tragédie avait incité le sénateur Klyne à introduire dans son projet de loi des mesures de protection pour tous les reptiles venimeux et les reptiles dangereux, notamment les crocodiles, les alligators, 12 espèces d’anacondas, de pythons et de boas constricteurs. Ces mesures établies pour des motifs de sécurité publique n’ont pas trouvé de place dans le projet de loi S-15.
[Traduction]
Le sénateur Klyne a souligné que le projet de loi S-15 n’interdit pas la possession, l’importation, ni l’exportation de matériel reproductif provenant d’éléphants et de grands singes. Il nous informe que cette omission pourrait avoir des effets concrets sur l’utilisation possible de ce matériel pour l’insémination artificielle des éléphants asiatiques.
Il nous a également informés que, contrairement au projet de loi S-241, le projet de loi S-15 ne prévoit pas d’exception concernant l’aide aux espèces en détresse sans permis. Ce sont toutes des observations valables, et je n’ai aucun doute qu’elles feront l’objet d’une étude plus approfondie en comité.
Le projet de loi S-241 était certainement complexe, mais il couvrait plus d’espèces animales. Le projet de loi S-15 est essentiellement une initiative qui pourrait, au fil des ans, mener à la disparition progressive des éléphants et des grands singes gardés en captivité.
[Français]
Durant la campagne électorale de 2021, les partis ont inclus dans leurs plateformes des mesures en vue de protéger les animaux. Le sénateur Gold nous l’a rappelé :
Les animaux sauvages en captivité demeurent un sujet de préoccupation croissante pour les Canadiennes et les Canadiens, ainsi que pour bien des gens partout dans le monde.
Plusieurs zoos, sanctuaires et parcs, ici et ailleurs, ont eux-mêmes choisi d’aller de l’avant pour assurer un plus grand respect des milieux naturels des animaux qu’ils gardent en captivité.
[Traduction]
En 2011, le conseil municipal de Toronto a voté en faveur de l’envoi des trois derniers éléphants d’Afrique du zoo de Toronto dans un sanctuaire en Californie.
[Français]
Le Zoo de Granby, de son côté, a déjà pris l’initiative de ne plus accueillir d’éléphant à l’avenir. Nous en sommes là. Quand on pense au bien-être des animaux, il est clair que ce qui était pratiqué et accepté il y a à peine quelques décennies ne l’est plus.
Il faut imaginer une ligne qui sépare ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas ou ne l’est plus. Cette ligne n’est pas fixe dans le temps. Elle se déplace. Ce qui nous semblait tout à fait correct quand nous étions enfants, comme les animaux dans de petites cages inadéquates, sans stimuli, les spectacles de cirque où l’on entendait le son des fouets entre deux tours acrobatiques, la possibilité d’être à dos d’éléphant alors que celui-ci était discipliné par un crochet acéré avec lequel les dresseurs contrôlent les éléphants, tout cela, c’est du passé. C’est normal que nos pratiques changent à mesure que l’on apprend et que l’on se sensibilise.
[Traduction]
Ainsi, la ligne qui sépare ce qui est acceptable de ce qui ne l’est pas se déplace. On peut présumer qu’elle continuera de se déplacer et que ce qui semble juste aujourd’hui ne le sera peut-être plus dans quelques décennies.
(1610)
Nos lois doivent être en harmonie avec les renseignements et les données scientifiques dont nous disposons aujourd’hui, ainsi qu’avec notre degré d’acceptation sociale.
[Français]
World Animal Protection, une organisation à but non lucratif vouée à la protection des animaux dont le bureau canadien est situé à Toronto, a déclaré ce qui suit :
Bien que ce projet de loi ne traite que de la protection des éléphants et des grands singes, il représente tout de même un important pas en avant. S’il est adopté, il fera du Canada le premier pays du monde à mettre en place une telle loi sur le plan national.
Je suis en phase avec cette déclaration.
[Traduction]
Ce projet de loi aurait-il pu aller plus loin? Bien sûr. Cela dit, le projet de loi S-15 n’est pas censé tout résoudre. Il est pointu et, grâce à ses objectifs précis, il peut changer les choses.
En vérité, chers collègues, ce projet de loi est important et, à mon avis, correspond au strict minimum. Il est grand temps de l’adopter. Nous avons débattu de cette question d’un projet de loi à l’autre. Je suis certaine que nous sommes tous d’accord pour dire que nous en savons plus sur les éléphants que nous ne l’aurions cru possible ou nécessaire. Il est temps de prendre position et de légiférer.
[Français]
Chers collègues, je vous invite à appuyer le renvoi de ce projet de loi en comité pour qu’on en fasse une étude approfondie.
Merci.
[Traduction]
L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, bien entendu, ce projet de loi n’a pas été soumis à un débat en profondeur. Nous avons débattu d’un tout autre projet de loi, mais il a été retiré. Nous sommes, en fait, au tout début du débat sur ce projet de loi.
Chers collègues, je prends la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi S-15, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur la protection d’espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international et interprovincial. Ce projet de loi modifie deux lois afin d’interdire la mise en captivité, la reproduction et le commerce d’éléphants et de grands singes vivants, sauf dans un nombre restreint de circonstances.
Chers collègues, comme l’a souligné le sénateur Klyne dans son discours à l’étape de la deuxième lecture : « [...] le projet de loi S-15 est essentiellement une partie du projet de loi S-241 [...]. » C’est effectivement une partie. Mon opposition au projet de loi S-241 n’était un secret pour personne. C’était un projet de loi horrible, futile et qui n’apportait absolument rien à notre pays. Le sénateur l’a retiré.
Je suis heureux de constater que la majorité des propositions problématiques contenues dans ce projet de loi n’ont pas été incluses dans le nouveau projet de loi, parce qu’il est évident que le gouvernement a également compris qu’elles étaient problématiques. Le projet de loi a été retiré à la suite — et en raison — de mon recours au Règlement.
Néanmoins, je continue d’avoir un certain nombre d’inquiétudes au sujet de ce projet de loi. À mon avis, il faut le soumettre à une étude en comité. Le sénateur Carignan a fait un excellent travail pour faire reconnaître le caractère ridicule de notre débat à cette étape-ci. J’aimerais vous rappeler certaines de ces inquiétudes.
Avant que je me penche sur ce que l’on doit étudier, je tiens à rappeler que je suis tout à fait favorable à ce que l’on remédie au peu de protection qu’ont les animaux détenus en captivité, et non les animaux sous la garde d’êtres humains.
En fait, je suis tout à fait d’accord avec la déclaration faite par le sénateur Gold dans son discours lors de la deuxième lecture de ce projet de loi :
Les provinces et les territoires sont les premiers responsables d’assurer le bien-être des animaux, et le gouvernement fédéral reconnaît le rôle important que jouent de nombreuses provinces dans la réglementation visant les animaux en captivité. Cependant, il a été bien établi qu’il existe des différences d’une province à l’autre, et que ces écarts peuvent entraîner des lacunes dans la protection des animaux sauvages en captivité au Canada.
Ce sont les mots du sénateur Gold.
J’ai également été heureux d’entendre que, comme je l’ai recommandé dans mon discours de deuxième lecture, le gouvernement va mener une consultation afin de résoudre ce problème, comme l’a indiqué le sénateur Gold :
[...] le gouvernement du Canada s’est engagé à collaborer avec les provinces, les territoires et les intervenants et à tenir une discussion pour établir s’il y a lieu d’adopter une stratégie nationale pour assurer le bien-être des animaux et protéger le public des animaux sauvages en captivité en tenant compte des responsabilités fédérales et provinciales actuelles et des pratiques exemplaires.
En consultant des partenaires et des intervenants pour faire avancer les discussions sur des questions comme les petits zoos privés ou les animaux sauvages dangereux qui sont gardés en captivité par des particuliers, on pourra améliorer le sort des animaux sauvages en captivité. La portée et l’objet de la mobilisation nationale seront déterminés à la suite des consultations initiales avec les provinces et les territoires.
Voilà précisément l’approche que nous devrions adopter dans ce dossier.
Je dois toutefois avouer que le fait qu’on se retrouve aujourd’hui à étudier cette mesure législative alors que les consultations en question n’ont pas encore eu lieu me fait quelque peu sourciller. Il faut dire que c’est devenu une habitude de la part du gouvernement. Une bande de grands parleurs.
Deuxièmement, chers collègues, à part le fait qu’il va permettre au ministre de cocher une case sur sa lettre de mandat, je saisis mal ce que le projet de loi S-15 va permettre d’accomplir.
Le document d’information préparé par le gouvernement débute ainsi :
Au nombre des engagements énumérés dans la lettre de mandat qu’il a reçue [...] le ministre de l’Environnement et du Changement climatique a été chargé de présenter un projet de loi pour « protéger les animaux en captivité » [...]
Voilà, chers collègues, ce qui justifie l’existence de cette mesure législative aux yeux du gouvernement. Ce qui veut dire essentiellement que c’est aussi à cette aune que nous devrons l’évaluer.
Ce projet de loi permettra-t-il de protéger les animaux en captivité? Comme je le disais plus tôt, le projet de loi S-15 interdit la captivité et le commerce de deux espèces, les grands singes et les éléphants, sauf dans certaines circonstances bien précises. Il crée trois infractions à cette fin.
Est érigé en infraction criminelle le fait, primo, de posséder un éléphant ou un grand singe en captivité; secundo, de reproduire ou de féconder un éléphant ou un grand singe en captivité; et tertio, d’omettre de prendre des mesures raisonnables pour empêcher la reproduction naturelle des éléphants et des grands singes en captivité.
Le projet de loi érige également en infraction le fait de donner des éléphants ou des grands singes en spectacle.
À priori, vous pourriez être d’accord avec ces mesures. Je sais que c’est le cas de certains Canadiens, car ma boîte de réception — comme la vôtre, j’en suis sûr — a été inondée de courriels au sujet du projet de loi. Le seul problème, c’est que les préoccupations exprimées par les auteurs de ces messages sont fondées sur des informations inexactes. Je m’explique, en commençant par les grands singes.
Comme l’a déclaré le sénateur Klyne :
Approximativement 30 grands singes vivent au Canada à quatre endroits. Il s’agit notamment de chimpanzés au sanctuaire de la Fondation Fauna près de Montréal, de gorilles et d’orangs-outans au zoo de Toronto et de gorilles aux zoos de Calgary et de Granby.
Il a poursuivi en disant :
Je félicite ces organisations pour leur excellent travail et leur engagement à assurer le bien-être des grands singes dont ils ont la garde.
Chers collègues, il y a lieu de se demander où sont les grands singes qui doivent être protégés au Canada. Le sénateur Klyne lui‑même affirme que tous ceux qui sont en captivité sont bien traités. Tous les grands singes du pays sont déjà détenus dans des établissements accrédités, approuvés à la fois par le sénateur Klyne et par Jane Goodall elle-même.
De plus, chers collègues, outre les installations de premier ordre qui hébergent de grands singes au Canada, il est déjà interdit par la loi fédérale d’importer un grand singe sans l’approbation expresse du gouvernement fédéral. Aujourd’hui, c’est tout simplement impossible.
Pour comprendre cela, nous devons parler de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction, ou CITES. Il s’agit d’un accord international entre gouvernements qui vise à garantir que le commerce international de spécimens d’animaux et de plantes sauvages ne menace pas leur survie.
(1620)
La CITES a été rédigée après une réunion des membres de l’Union internationale pour la conservation de la nature en 1963, et elle est officiellement entrée en vigueur sur le plan international le 1er juillet 1975. Le Canada avait déjà ratifié le traité le 10 avril de cette année-là, et il est entré en vigueur le 9 juillet.
La convention classe les plantes et les animaux selon trois annexes, en fonction du degré de protection dont ils ont besoin.
L’annexe I représente la protection la plus forte. Elle comprend les espèces menacées d’extinction. Le commerce de spécimens de ces espèces n’est autorisé que dans des circonstances exceptionnelles.
L’annexe II comprend des espèces qui ne sont pas nécessairement menacées d’extinction, mais dont le commerce doit être contrôlé pour éviter une utilisation incompatible avec leur survie.
L’annexe III contient des espèces protégées dans au moins un pays, qui a demandé aux autres parties à la CITES de l’aider à en contrôler le commerce.
Chers collègues, voici pourquoi ceci est important et pertinent au regard du projet de loi S-15. Toutes les espèces de grands singes — y compris les gorilles, les chimpanzés, les orangs-outans, les chimpanzés nains et les gibbons — ont été inscrites à l’annexe I de la CITES le 7 janvier 1975, soit il y a près de 50 ans. Comme pour toutes les espèces inscrites à l’annexe I, « le commerce des spécimens de ces espèces [...] ne doit être autorisé que dans des conditions exceptionnelles », et jamais sans l’approbation expresse du gouvernement fédéral.
Je sais que le sénateur Gold a dit dans son discours que « le projet de loi S-15 renforcerait les mesures de protection prévues dans les lois fédérales pour les éléphants et les grands singes ».
Honorables collègues, c’est tout simplement faux. Selon les dispositions législatives en place, le ministre a déjà toute la marge de manœuvre voulue pour refuser un permis, puisque le paragraphe 10(1) permet au ministre d’accorder ou de refuser le permis « aux conditions qu’il estime indiquées ».
Autrement dit, il n’y a actuellement rien qui oblige le ministre à accorder un permis pour l’importation de grands singes, quelles que soient les circonstances. Par conséquent, si le projet de loi S-15 était adopté dès demain, il ne ferait rien pour améliorer la protection des grands singes qui se trouvent actuellement au Canada et n’ajouterait rien à l’interdiction déjà en place pour empêcher l’importation de grands singes au Canada.
Honorables collègues, c’est un exemple classique d’attitude moralisatrice qui donne l’impression de faire quelque chose d’important sans accomplir quoi que ce soit. Nous nous rappelons certainement qu’il y a à peine quelques mois, nous avons étudié le projet de loi C-21. C’est exactement la même chose.
Tous les grands singes au Canada sont très bien traités, selon le sénateur Klyne et Jane Goodall, et aucun autre ne peut être importé sans l’autorisation expresse du gouvernement fédéral. En ce qui concerne les grands singes, le projet de loi S-15 ne fait rien pour remplir l’engagement de présenter un projet de loi visant à protéger les animaux en captivité qui se trouve dans la lettre de mandat du ministre de l’Environnement.
Qu’en est-il des éléphants? Le sénateur Klyne nous a dit que 23 éléphants vivent en captivité au Canada. Il a poursuivi en disant :
L’African Lion Safari, près d’Hamilton, compte 17 éléphants d’Asie, soit le plus grand troupeau d’Amérique du Nord. Au moins deux d’entre eux sont nés à l’état sauvage. L’Edmonton Valley Zoo compte une éléphante d’Asie du nom de Lucy, qui est née à l’état sauvage. Au Québec, le Parc Safari possède deux éléphants d’Afrique, tous deux nés à l’état sauvage. Le Zoo de Granby possède trois éléphants d’Afrique, dont deux sont nés à l’état sauvage. [...]
Tous ces chiffres et ces lieux étaient corrects, mais le sénateur Klyne a conclu cette réflexion en disant :
Il est évident que l’enlèvement d’éléphants d’Afrique et d’Asie pour les exposer dans des zoos d’Amérique du Nord va à l’encontre des efforts de conservation des éléphants.
Chers collègues, il y a un problème avec cette affirmation. Si sept des éléphants au Canada sont nés à l’état sauvage, aucun d’entre eux n’a été obtenu à l’état sauvage par son propriétaire actuel — aucun. Aucun des éléphants sous la garde de Canadiens n’a été rapporté d’Afrique ou d’Asie pour être gardé en captivité dans un zoo canadien.
Non seulement cela ne s’est pas produit, chers collègues, mais cela ne peut pas se produire dans le cadre de la législation actuelle. En effet, depuis 1975, les éléphants d’Asie sont inscrits à l’annexe I de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction, et la plupart des éléphants d’Afrique y ont été inscrits en 1989.
Seuls les éléphants du Botswana, de la Namibie, de l’Afrique du Sud et du Zimbabwe sont actuellement inscrits à l’Annexe II. Même dans ce contexte, si vous souhaitez importer un éléphant au Canada, vous devrez obtenir l’autorisation du pays d’origine et du gouvernement canadien, et vous pouvez être certains, chers collègues, que cela n’arrivera pas.
Aucun des éléphants en captivité au Canada n’a été capturé dans son milieu naturel pour être placé dans un zoo canadien et, comme c’est le cas pour les grands singes, une telle chose est impossible aujourd’hui sans l’autorisation expresse du gouvernement.
Chers collègues, l’Edmonton Valley Zoo s’est engagé depuis longtemps à ne plus acquérir d’éléphants après le décès de Lucy. Le Zoo de Granby s’est également engagé à cesser progressivement de garder des éléphants. Le Parc Safari n’élève pas d’éléphants et n’a pas l’intention d’en acquérir de nouveaux.
C’est donc dire que la seule institution zoologique du Canada dont les activités seraient affectées par cette loi serait l’African Lion Safari, qui est situé près d’Hamilton, en Ontario. Si vous ne l’avez jamais visité, vous devriez y aller. Sa directrice générale, Trish Gerth, lance une invitation à tous les sénateurs. Elle est d’ailleurs au Sénat aujourd’hui. Je suis certain qu’elle serait ravie que vous alliez visiter l’African Lion Safari.
Vous en reviendrez transformés. C’est étonnant combien de personnes ici présentes savent tout ce qu’il y a à savoir sur les éléphants, mais n’en ont jamais vu un de leur vie. Ils ne sont jamais allés dans un jardin zoologique, mais ce sont eux les experts. Une visite vous en apprendra plus sur la réalité des éléphants en captivité que n’importe quel discours.
Si vous y allez, cela dit, n’oubliez pas de raconter votre expérience au sénateur Klyne parce que, même si c’est lui qui parraine ce projet de loi, il ne s’est jamais donné la peine de faire cette brève visite, et les notions erronées qu’il entretient à l’égard des éléphants en sont la preuve.
Pourquoi vouloir parrainer une mesure législative si on n’en évalue ni l’incidence ni la raison d’être? Il ne s’est jamais rendu là‑bas.
African Lion Safari n’est pas un jardin zoologique comme les autres, chers collègues. Il s’étend sur plus de 750 acres, dont 250 offrent de vastes étendues de brousse, de prés et de forêts où les animaux peuvent interagir naturellement entre eux. Les 19 éléphants d’Asie qu’on y trouve, chers collègues, disposent de plus de 200 acres où circuler librement.
J’étais sur place il y a quelques mois. J’ai pu observer les éléphants jouer dans la brousse et cueillir des pommes. Ils n’étaient pas en punition. Ils s’amusaient. Je n’ai vu aucun crochet nulle part, soit dit en passant.
Ce parc accueille plus d’un demi-million de visiteurs chaque année pendant les six mois qu’il est ouvert au public. Il peut compter sur une cinquantaine d’employés à temps plein et sur 400 autres en saison. Il a plus d’un millier de bêtes représentant plus d’une centaine d’espèces, dont le tiers sont en péril.
(1630)
Le parc a réussi à reproduire 30 espèces considérées en voie de disparition et 20 espèces considérées comme menacées. Il est réputé pour ses efforts de recherche et de conservation, notamment en ce qui concerne les girafes, les éléphants d’Asie, les aras canindés, les pies-grièches migratrices de l’Est, les effraies des clochers, les pygargues à tête blanche et les rhinocéros. En outre, l’African Lion Safari et d’autres zoos comme lui jouent un rôle essentiel pour les générations successives de jeunes zoologistes et agents de protection de la nature canadiens en facilitant l’accès à l’enseignement sur ces animaux dans notre vaste pays. Les activités de l’African Lion Safari jouent un rôle important en inculquant un sentiment d’émerveillement et en donnant un but à la prochaine génération de zootechniciens canadiens, ce qui a une valeur intrinsèque pour la conversation.
Dans le cadre de ses recherches, le parc a collaboré avec des universités prestigieuses, comme l’Université McGill, l’Université Queen’s, l’Université Cornell, l’Université d’agriculture et de technologie de Tokyo, l’Université de Floride, l’Université de Guelph, l’Université de Melbourne, l’Université de Pretoria, et bien d’autres encore. Le parc prend son rôle au sérieux.
Pourtant, malgré ce bilan impressionnant, ni les rédacteurs du projet de loi S-15 ni ceux du projet de loi S-241 ne se sont donné la peine de visiter l’African Lion Safari ou de consulter ses administrateurs. Par conséquent, lorsqu’il s’agit des éléphants, ils continuent de répéter une longue liste d’informations erronées.
Commençons par la question de savoir si les éléphants doivent être gardés en captivité. N’oubliez pas qu’il ne s’agit pas de savoir s’il faut placer des éléphants sauvages en captivité. Cette pratique est déjà chose du passé au Canada. Il s’agit de savoir si les éléphants qui se trouvent actuellement en captivité souffrent et s’il faut les empêcher de se reproduire uniquement parce qu’ils sont confiés à des humains.
Dans son discours, le sénateur Klyne a déclaré ceci :
Les scientifiques et d’autres experts indépendants recommandent l’abandon progressif des droits acquis en raison des graves problèmes de santé, de comportement et de reproduction que connaissent les éléphants en captivité.
Comme je l’ai dit, il ne faut pas oublier qu’il ne s’est jamais rendu sur place.
Je suppose que les scientifiques et les experts indépendants dont parle le sénateur Klyne sont ceux qui sont parvenus à la conclusion suivante dans les lettres qu’il a fournies sur cette question :
Les éléphants ne sont adaptés à aucune forme de captivité, car aucune installation ne peut répondre à leurs besoins biologiques, sociaux, cognitifs, en matière d’espace et intrinsèques de base.
Chers collègues, il existe une abondance de données scientifiques qui prouvent tout le contraire. D’ailleurs, selon d’autres experts, « l’idée que les éléphants ne sont pas ou ne peuvent pas être florissants de santé dans les zoos est un point de vue dépassé et subjectif ». Ils soulignent qu’au contraire, « les populations d’éléphants en captivité sont devenues vitales pour la survie de l’espèce ».
En réponse à la lettre citée par le sénateur Klyne, ces experts déclarent ceci :
Malheureusement, la plupart, sinon la totalité, des affirmations faites dans la [...] lettre sont délibérément trompeuses et ne sont pas suffisamment étayées par les données scientifiques actuelles.
Chers collègues, ce n’est pas seulement leur point de vue. C’est la conclusion tirée de nombreuses études sur cette question, dont bon nombre sont citées dans leur lettre qui a été remise à tous les sénateurs le 27 novembre dernier.
Même si je dispose d’un temps illimité, je ne passerai pas en revue tous les contre-arguments, mais je vous encourage à lire la lettre avec attention et ouverture d’esprit. Si vous le faites, vous constaterez que les faits parlent d’eux-mêmes et réfutent de façon convaincante les arguments avancés dans la lettre du sénateur Klyne.
Cependant, je me permets de lire quelques extraits :
D’abord, les zoos participent activement à la conservation en gérant les populations pour la reproduction ex situ et en contribuant au soutien des programmes de rétablissement sur le terrain.
Ensuite, le groupe des spécialistes de l’éléphant d’Asie de la Commission de la sauvegarde des espèces (CSE) de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) parle ouvertement de l’importance de la gestion ex situ des éléphants d’Asie, qui concerne près du tiers de la population de cette espèce.
Enfin, dans son énoncé de position d’octobre 2023, la CSE de l’UICN souligne l’importance des zoos, des jardins botaniques et des aquariums. Les zoos permettent à des gens qui n’auraient jamais rencontré d’éléphants autrement de voir ceux-ci en personne. Ils soutiennent la recherche sur divers projets propres aux éléphants qui profitent au bien-être des populations, dans leur milieu naturel ou non, et ils sont un gage de sécurité pour l’avenir des éléphants sauvages.
Chers collègues, au cas où vous ne l’auriez pas remarqué, l’acronyme UICN-CSE désigne la Commission pour la sauvegarde des espèces de l’Union internationale pour la conservation de la nature. Il s’agit de la principale autorité mondiale chargée d’évaluer l’état de conservation des espèces biologiques. C’est l’organisation que j’ai mentionnée précédemment, qui a joué un rôle essentiel dans l’élaboration de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction, ou CITES, et qui continue de jouer un rôle crucial en fournissant des conseils scientifiques et des lignes directrices sur la conservation de la biodiversité, en particulier sur l’évaluation et la surveillance des risques d’extinction des espèces.
En octobre dernier, la Commission pour la sauvegarde des espèces de l’Union internationale pour la conservation de la nature a publié un énoncé de position sur le rôle important des zoos dans la conservation des espèces. J’ai été heureux d’entendre le sénateur Gold mentionner ce fait dans son discours lorsqu’il a dit :
La Commission pour la sauvegarde des espèces de l’Union internationale pour la conservation de la nature a récemment publié un rapport appuyant le rôle que jouent les jardins botaniques, les aquariums et les zoos dans la conservation des espèces. Par ailleurs, les recherches scientifiques peuvent être essentielles pour comprendre ces animaux et nous aider à assurer leur survie à l’état sauvage. Enfin, dans certains cas, la captivité peut être dans l’intérêt du bien-être des éléphants ou des grands singes.
Le sénateur Klyne a dit clairement à maintes reprises que la captivité des éléphants ne présente aucun avantage du point de vue de la conservation. Or, cette position va directement à l’encontre de celle des autorités les plus compétentes dans ce domaine et même de la position du gouvernement.
Dans son discours à l’étape de la deuxième lecture, le sénateur Klyne a tenté de brosser un tableau qui suggère que les éléphants dans les zoos canadiens souffrent. Il a fait la déclaration suivante :
Dans les zoos nord-américains, les décès d’éléphants sont deux fois plus nombreux que les naissances, ce qui signifie que leur captivité n’a pas de valeur de conservation.
Il a aussi parlé de mortinaissances, de troubles de la reproduction, de mortalité infantile, de rejet des éléphanteaux et d’infanticide.
Chers collègues, les statistiques utilisées par le sénateur Klyne étaient tirées d’un article de 2012 du Seattle Times. Le Seattle Times s’était penché sur les zoos possédant des éléphants sur une période de 50 ans, avait comptabilisé les naissances et les décès, et en était arrivé à un rapport de deux pour un. Ce rapport est exact, mais le portrait qui est brossé ne l’est pas.
Premièrement, même si le sénateur Klyne a dit que ce rapport représentait la situation dans les zoos d’Amérique du Nord, mais ce n’est pas le cas. Ce rapport ne s’applique qu’aux zoos des États-Unis, et non de l’Amérique du Nord. C’est de la mésinformation. La réalité du Canada est très différente, comme je vais bientôt vous le démontrer.
Deuxièmement, le rapport qui indique que les décès d’éléphants sont supérieurs aux naissances est faussé en raison du profil démographique des éléphants en captivité aux États-Unis. Pour être franc, la majorité de ces éléphants sont vieux. Les personnes âgées meurent, et les éléphants âgés aussi.
C’est parce que 520 éléphants sauvages d’Asie ont été importés au Canada et aux États-Unis entre 1960 et 1975. Alors que de 1976 à 1999, il y en a eu seulement 24. Gardez bien ces chiffres en tête : 520 contre 24.
(1640)
Résultat : la population d’éléphants était surtout composée d’individus âgés, ce qui a fait augmenter la proportion de morts par rapport aux naissances. Cette statistique peut donner une fausse image de la manière dont les éléphants sont traités au Canada.
Troisièmement, cette statistique est aussi fortement biaisée parce qu’elle ne tient pas compte du fait que le bien-être général et le taux de natalité des éléphants dans les jardins zoologiques se sont considérablement améliorés avec le temps. Elle nous ramène à une époque très différente pour les éléphants en captivité et les jardins zoologiques en général. Les jardins zoologiques autorisés d’aujourd’hui ne sont plus du tout comme il y a 30, 40 ou 50 ans. Les améliorations liées au bien-être des bêtes et la contribution des zoos à la conservation des espèces sont notables, comme l’a lui‑même admis le sénateur Klyne lorsqu’il a rappelé que :
[...] la reproduction en captivité a notamment joué un rôle dans plus de la moitié des cas où on a évité l’extinction d’oiseaux et de mammifères.
African Lion Safari fait partie des établissements qui ont grandement contribué à la conservation des espèces, y compris des éléphants d’Asie. Depuis 1991, le troupeau d’éléphants du parc a connu 27 naissances vivantes. Il n’y a pas eu d’infanticide ni de bébés mort-nés. Encore cette année, le parc a accueilli deux éléphanteaux en parfaite santé. Le bilan d’African Lion Safari n’est pas seulement impressionnant, c’est le meilleur de toute l’Amérique du Nord. Comme l’ont fait remarquer une dizaine de spécialistes des éléphants, ce bilan :
[...] indique que ces éléphants s’épanouissent dans leur environnement et que l’organisation African Lion Safari leur offre des conditions optimales pour leur reproduction et leur bien-être général. Des 17 éléphants dans le troupeau à l’heure actuelle, 14 sont nés dans les installations de l’organisation. De plus, le troupeau a accueilli la naissance d’éléphanteaux de la deuxième et de la troisième génération.
Le sombre tableau que le sénateur Klyne a peint en ce qui concerne le bien-être des éléphants au Canada est tout simplement faux.
Le sénateur Klyne a ajouté :
Parmi les autres considérations, citons le fait que tous les zoos canadiens possédant des éléphants ont des individus qui ont été prélevés dans la nature; la nécessité de garder ces créatures énormes et aux vastes territoires à l’intérieur pendant une grande partie de l’hiver canadien; le risque permanent de séparer cruellement les mères des filles lors des transactions commerciales; l’utilisation au Canada de crochets à éléphants, qui sont des instruments utilisés pour contrôler les éléphants par la douleur et la peur; et l’utilisation d’éléphants ces dernières années au Canada pour des promenades et des spectacles de divertissement.
J’aimerais aborder ces points un par un, en commençant par l’affirmation selon laquelle tous les zoos canadiens possédant des éléphants ont des individus qui ont été prélevés dans la nature. Étant donné que nous avons déjà abordé ce point, je ne vais pas revenir là-dessus. Toutefois, j’aimerais citer un extrait de la lettre que les spécialistes des éléphants ont fait parvenir à tous les sénateurs :
Affirmer que des éléphants sont encore arrachés à des populations sauvages afin de remplir les zoos n’est pas fondé. Les importations d’éléphants sauvages dans les installations zoologiques occidentales sont pour ainsi dire interdites. En outre, de telles captures sont généralement effectuées à l’initiative des gouvernements de ces pays et résultent de conflits entre l’homme et l’éléphant et de la destruction des habitats. Des règles strictes s’appliquent lorsqu’un animal est transféré d’un milieu naturel à une population captive.
Chers collègues, la deuxième fausseté, c’est d’affirmer que les éléphants doivent demeurer à l’intérieur pendant la majorité de l’hiver canadien. Si vous parlez à ceux qui s’occupent des éléphants de l’African Lion Safari, ou si vous allez sur place, vous découvrirez que les éléphants dont ils s’occupent adorent les quatre saisons. Cela s’explique en partie par le fait que la plupart des éléphants d’Asie de leur troupeau sont nés et ont grandi au Canada, et qu’ils se sont très bien acclimatés aux hivers d’ici. En fait, les éléphants préfèrent le froid à la chaleur, en partie parce qu’il n’y a pas d’insectes. Ils adorent également courir et jouer dans la neige, casser la glace du lac et se baigner. Bon nombre d’entre nous ont vu la vidéo qu’African Lion Safari a envoyée à tous les sénateurs. Si vous ne l’avez pas et que vous souhaitez la regarder, je me ferai un plaisir de la mettre à votre disposition.
Ils disposent d’un enclos chauffé en hiver où ils peuvent aller et venir à leur guise, et ils n’hésitent pas à s’aventurer à l’extérieur pour profiter de l’hiver, autant de choses que les sénateurs Klyne et Gold auraient pu savoir s’ils avaient visité l’African Lion Safari.
J’ai visité leur habitat intérieur. Dire qu’il a la taille de cette Chambre serait peut-être un peu exagéré, mais à peine. C’est un énorme habitat, où ils peuvent aller et venir à leur guise. Voici ce que nous disent les experts en éléphants :
Les affirmations selon lesquelles les éléphants ne se portent pas bien dans des conditions fraîches ou froides ont été réfutées à maintes reprises. La littérature scientifique ne fait état d’aucun cas d’hypothermie chez les éléphants. Au contraire, le véritable problème est leur vulnérabilité à la surchauffe. Les éléphants étant des animaux de grande taille, le rapport entre leur surface et leur volume est faible. De plus, leur peau est épaisse et ils sont incapables de transpirer. Il leur est donc très difficile de se rafraîchir en cas de chaleur excessive.
Chers collègues, vous devez également savoir que, parmi les recherches évaluées par des pairs consacrées à la façon dont les éléphants composent avec le temps froid, les meilleures recherches au monde sont issues des travaux de l’African Lion Safari.
Troisièmement, l’affirmation selon laquelle les éléphants du Canada sont maltraités par l’utilisation de crochets est également dépassée et n’est pas représentative des pratiques actuelles. L’African Lion Safari n’utilise pas de crochets. Il utilise un outil appelé « guide » pour donner des indications sur la direction à prendre. Cet outil est employé sans exercer de force.
La quatrième affirmation veut que des éléphants aient été utilisés ces dernières années au Canada pour des promenades et des spectacles à des fins de divertissement. Encore une fois, bien que cela se soit produit à une certaine époque, il n’y a pas un seul zoo au Canada qui propose des promenades à dos d’éléphant, et ce depuis un certain temps. L’idée selon laquelle le projet de loi S-15 mettra fin aux promenades à dos d’éléphant n’est pas fondée; il n’y a effectivement aucune promenade à dos d’éléphant. Si vous voulez faire une promenade à dos d’éléphant, allez voir les éléphants en Asie ou en Afrique. Là-bas, on utilise les éléphants comme bêtes de somme. Ils portent des charges beaucoup plus lourdes sur leurs dos et leurs cous que les petits enfants qui montaient autrefois sur des éléphants au Canada.
Enfin, dans son discours sur le projet de loi S-241, le sénateur Klyne a évoqué l’incident survenu en 2019 à l’African Lion Safari, au cours duquel un éléphant a blessé un dresseur. Comme je l’ai indiqué dans mon discours sur le projet de loi S-241, un incident isolé impliquant un éléphant s’est produit en 2019 à l’African Lion Safari, mais le ministère du Travail de l’Ontario a mené une enquête approfondie sur l’incident et l’African Lion Safari n’a jamais été inculpé ni reconnu coupable d’une quelconque inconduite ou de mauvais traitements envers les animaux.
Malheureusement, de tels incidents peuvent parfois se produire même dans les meilleurs établissements zoologiques, et cela vaut pour tous les animaux. Par exemple, en 2013, un gardien du zoo de Calgary — que le sénateur Klyne considère comme un excellent établissement qui devrait accueillir des grands singes — a été blessé lorsqu’il a été attaqué par un gorille dans l’enclos. Cela s’est produit à la suite d’autres incidents impliquant un gorille qui sont survenus au zoo de Calgary, et pendant lesquels il n’y a eu, heureusement, aucun blessé. Cependant, dans le cas que j’ai mentionné, le gardien a été blessé. Le sénateur Klyne n’a pas mentionné ces multiples incidents survenus au zoo de Calgary, mais seulement celui qui s’est produit à l’établissement African Lion Safari.
Je me demande pourquoi.
Il se sert d’un incident en particulier pour défendre sa position selon laquelle personne au Canada ne devrait garder des éléphants en captivité, mais, pour une raison que j’ignore, il n’applique pas le même principe aux établissements où on trouve des grands singes.
Honorables collègues, en ce qui a trait à la protection des animaux, la lettre de mandat du ministre de l’Environnement et du Changement climatique dit que le ministre doit faire deux choses. La première est de travailler avec des partenaires pour contrer le commerce illégal des espèces sauvages et pour mettre fin au commerce de l’ivoire de l’éléphant et de la corne de rhinocéros au Canada. Cela ne se produit plus depuis des années. La deuxième consiste à présenter un projet de loi pour protéger les animaux en captivité. Le projet de loi ne fait rien de tout cela.
(1650)
Il modifie deux textes législatifs prétendument pour interdire la captivité et le commerce d’éléphants et de grands singes vivants, sauf dans des circonstances bien précises. En réalité, il ne fait rien pour les grands singes et il limite la captivité et le commerce d’éléphants vivants dans un seul cas, celui d’African Lion Safari, où les éléphants se portent très bien et où l’on contribue au bassin de connaissances essentielles à la conservation des populations d’éléphants à l’état sauvage.
Chers collègues, le projet de loi S-241 tentait de régler un problème réel d’une manière qui aurait été extrêmement contre‑productive. Le projet de loi S-15, quant à lui, ne prétend même pas s’attaquer à un problème.
En fait, j’ai du mal à comprendre pourquoi le sénateur Klyne a affirmé, dans un discours au sujet du projet de loi, que c’était « un grand jour pour le bien-être animal au Canada » et que « ce projet de loi sur le bien-être des animaux est l’un des plus stricts de l’histoire du Parlement », alors qu’il ne fait absolument rien pour le bien-être des animaux.
Ce qu’il décrit comme la promotion du bien-être des animaux ressemble davantage à favoriser la cruauté envers les animaux en empêchant le troupeau d’éléphants de l’African Lion Safari de continuer à procréer et d’accueillir de nouveaux membres dans leur famille. Le projet de loi soumettrait plutôt le troupeau à un avenir de deuil. On a souvent entendu dire — comme plus tôt aujourd’hui de la part de la sénatrice Petitclerc — que ce sont des animaux sociaux et intelligents. Pourtant, on veut les soumettre à un avenir de deuil, puisqu’ils devront graduellement dire au revoir aux membres de leur famille qui mourront, un par un, au cours des 50 à 60 prochaines années, jusqu’à ce que le dernier éléphant soit laissé à son chagrin et qu’il meure seul. Voilà ce que ferait ce projet de loi.
Le sénateur Klyne l’a dit lui-même :
Les éléphants et les grands singes sont conscients d’eux‑‑mêmes, très intelligents, émotifs et sociaux. Ils aiment leurs amis et leurs familles, pleurent leurs morts et utilisent des outils. [...] À bien des égards, ces créatures remarquables nous ressemblent beaucoup.
Pourtant, il veut les soumettre, esseulés, à une mort lente.
Je comprends le désir d’empêcher toute nouvelle captivité d’éléphants et de grands singes enlevés de l’état sauvage, mais ce projet de loi ne va pas dans ce sens. Ces mesures sont déjà en place.
Le bien-être des animaux n’est pas une question partisane ni un enjeu politique. Il est soutenu par tous les partis politiques et par les Canadiens d’un océan à l’autre. Il faut néanmoins faire les choses correctement.
Le gouvernement s’est engagé à mener des consultations à l’échelle nationale pour combler les lacunes dans la protection des animaux en captivité. À mon avis, la meilleure approche serait d’attendre la fin de ces consultations avant de mettre en œuvre quelque mesure législative que ce soit. De cette façon, la mesure législative recevra un vaste appui et les animaux bénéficieront de la protection qu’ils méritent.
Chers collègues, j’ai toujours dit que je suis en faveur du renvoi des projets de loi aux comités. Il serait incohérent et hypocrite de ma part de tenter d’empêcher le renvoi au comité dans ce cas-ci. Je serai en faveur qu’on adopte avec dissidence le renvoi du projet de loi au comité pour qu’il soit étudié plus en profondeur. Je demande toutefois aux membres du comité d’examiner attentivement ces questions. J’attends avec impatience le rapport que le comité présentera au Sénat. Merci, chers collègues.
Des voix : Bravo!
Son Honneur la Présidente intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?
Des voix : Le vote!
Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?
Des voix : D’accord.
Une voix : Avec dissidence.
(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois, avec dissidence.)
[Français]
Renvoi au comité
Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?
(Sur la motion du sénateur Klyne, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, avec dissidence.)
[Traduction]
Le Budget des dépenses de 2024-2025
Autorisation au Comité des finances nationales d’étudier le Budget principal des dépenses à l’exception du crédit 1, qui sera étudié par le Comité mixte de la Bibliothèque du Parlement
L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat), conformément au préavis donné le 29 février 2024, propose :
Que le Comité sénatorial permanent des finances nationales soit autorisé à étudier, afin d’en faire rapport, les dépenses prévues dans le Budget principal des dépenses pour l’exercice se terminant le 31 mars 2025, à l’exception du crédit 1 de la Bibliothèque du Parlement;
Que, aux fins de cette étude, le Comité sénatorial permanent des finances nationales soit autorisé à se réunir même si le Sénat siège à ce moment-là ou est ajourné, l’application des articles 12-18(1) et 12-18(2) du Règlement étant suspendue à cet égard;
Que le Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement soit autorisé à étudier, afin d’en faire rapport, les dépenses prévues au crédit 1 de la Bibliothèque du Parlement dans le Budget principal des dépenses pour l’exercice se terminant le 31 mars 2025;
Que, relativement aux dépenses prévues au crédit 1 de la Bibliothèque du Parlement, un message soit transmis à la Chambre des communes pour l’en informer.
Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?
Des voix : D’accord.
(La motion est adoptée.)
(1700)
La Loi électorale du Canada
Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Débat
L’honorable Donna Dasko propose que le projet de loi S-283, Loi modifiant la Loi électorale du Canada (données démographiques), soit lu pour la deuxième fois.
— Honorables sénateurs, je prends la parole sur le projet de loi S-283, Loi modifiant la Loi électorale du Canada (données démographiques).
Le projet de loi S-283 renforcera notre démocratie en augmentant la transparence du Parlement et des partis politiques, dans l’intérêt de tous les Canadiens. Premièrement, nous aurons plus d’information sur les candidats aux élections fédérales. Deuxièmement, nous disposerons de plus d’information sur ce que font les partis politiques pour élire davantage de femmes et de candidats issus d’autres groupes diversifiés.
Comment se porte le Canada? En 1991, le rapport de la Commission royale sur la réforme électorale et le financement des partis déclarait : « Toutes choses égales d’ailleurs, la Chambre des communes devrait raisonnablement refléter la diversité du pays. »
Mais les choses ne sont pas égales. Depuis 1921, première élection à laquelle les femmes pouvaient se présenter au niveau fédéral, il y a eu 38 614 candidats, dont 83 % étaient des hommes et 17 %, des femmes. Il y a eu 25 candidats d’une autre identité de genre. Aujourd’hui, les femmes occupent 30,4 % des sièges de la Chambre des communes, alors qu’elles représentaient 50,9 % de la population totale du Canada lors du recensement de 2021. Plus d’une femme sur quatre, soit 25,8 %, fait partie de la population racialisée et 4,5 % sont autochtones.
En 1997, lorsque l’Union interparlementaire a publié son premier classement mondial du nombre de sièges détenus par des femmes dans les Parlements de la planète, le Canada arrivait au 21e rang. Aujourd’hui, le Canada se classe 64e. Le Canada recule au classement parce que d’autres pays accélèrent leur transformation. Les mesures délibérées, qui sont inscrites dans la loi, ont été essentielles pour l’amélioration de la représentation des femmes dans les pays de toute la planète, quel que soit leur système électoral.
Le fossé en matière de représentation des femmes est peut-être le plus important, mais il n’y a pas que les femmes qui soient sous‑représentées à la Chambre. D’autres groupes de la diversité canadienne sont également sous-représentés. D’après le recensement de 2021, les membres des Premières Nations, les Métis et les Inuits représentent 5 % de la population. Les informations de la Bibliothèque du Parlement indiquent que 3,3 % des députés élus en 2021 sont d’origine autochtone. Dans la même veine, le recensement de 2021 indique que les personnes racisées représentent 26,5 % de la population, alors que, aux élections de 2021, 15,7 % des députés élus sont des personnes racisées, même si ce nombre varie selon les sources.
En ce qui concerne les membres de la communauté LGBTQ2+ au Canada, ces derniers représentent 4 % de la population et, selon la Bibliothèque du Parlement, 2,4 % des députés élus en 2021 font partie de cette communauté. Selon l’Enquête canadienne sur l’incapacité de 2022, 27 % des Canadiens âgés de 15 ans ou plus vivent avec au moins un problème de santé qui les limite dans leurs activités quotidiennes. Cependant, nous n’avons pas de données au sujet de leur représentation.
Alors, pourquoi ai-je décidé de présenter ce projet de loi?
Chers collègues, l’augmentation du nombre de femmes élues à une charge publique fait partie de mes objectifs de vie depuis plus d’une trentaine d’années. À l’époque où je commençais à peine ma carrière de sondeuse, en 1988, je me suis jointe à un groupe de femmes appelé le « Committee for ‘94 ». Notre objectif : faire en sorte qu’en 1994, la moitié des députés de la Chambre des communes soient des femmes. Quel objectif, quand même. Le groupe s’est malheureusement dissous après quelques années, exaspéré du peu de progrès réalisé.
En 2001, une quarantaine de femmes de tous les horizons politiques se sont réunies chez moi pour tenter de nouveau l’expérience. C’est ainsi qu’est né À voix égales, un groupe résolument transpartisan qui s’emploie à faire élire davantage de femmes à tous les échelons du pays. Je suis très fière qu’À voix égales connaisse autant de succès et je sais que vous êtes nombreux ici aujourd’hui à soutenir cet organisme et à en appuyer les objectifs.
Depuis ma nomination au Sénat, en 2018, je puise dans mon parcours comme fondatrice et ancienne présidente nationale d’À voix égales pour trouver des moyens qui permettront au Parlement de s’attaquer à la faible représentation des femmes. Accroître la diversité de la Chambre des communes, à tous les chapitres, est un objectif important, et nous le ferions clairement connaître si nous légiférions en ce sens.
Je suis également motivée par le désir d’améliorer et de renforcer nos institutions démocratiques en cette période trouble où le monde fait face à des menaces sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale. Bâtir un Parlement qui reflète mieux l’ensemble des Canadiens améliorera les résultats et la prise de décision et renforcera la confiance dans nos institutions démocratiques.
Ce sujet est tout à fait approprié pour un projet de loi d’intérêt public du Sénat. J’ai déjà dit à maintes reprises que le Sénat a non seulement le droit mais aussi la responsabilité de délibérer et de faire preuve de leadership sur tous les aspects de notre démocratie et de nos institutions démocratiques.
Le projet de loi S-283 comprend deux parties principales. La première concerne la collecte de données et la communication par le directeur général des élections du Canada de données démographiques sur les participants aux élections, y compris les candidats, les candidats à l’investiture et les candidats à la direction. La deuxième concerne la divulgation des plans d’action des principaux partis politiques enregistrés aux termes de la Loi électorale du Canada, qui décrivent les mesures prises par ces partis pour accroître la diversité des candidats qu’ils désignent, y compris les cibles qu’ils se proposent d’atteindre à une date précise quant au nombre de femmes candidates.
Ce projet de loi repose sur des recommandations faites au Parlement par deux entités parlementaires : le directeur général des élections du Canada et le Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes.
Commençons par la collecte des données. Depuis près de six ans que je suis ici, j’entends souvent les sénateurs demander qu’il y ait davantage de données permettant d’évaluer les progrès réalisés dans de nombreux domaines et que les données recueillies soient de meilleure qualité. Pour ce qui est du Parlement, c’est nul autre que le principal responsable électoral du pays qui réclame de meilleures données. Dans le rapport au Parlement qu’il a produit en 2022 à la suite des 43e et 44e élections générales, le directeur général des élections, Stéphane Perrault, a déclaré ceci :
L’importance de déployer des efforts pour que le Parlement reflète véritablement la diversité de la société canadienne fait peu de doute. Toutefois, il faut avant toute chose disposer de données de qualité, non seulement sur les députés, mais aussi sur tous les participants au processus électoral.
Voici ce que dit la recommandation 9.4.1 de son rapport :
Pour bâtir un système électoral plus inclusif et représentatif, donner à Élections Canada, dans la Loi, le mandat de recueillir, sur une base volontaire, et de rendre publiques des données démographiques anonymisées sur les participants aux élections, dont des données sur le genre, l’origine ethnique, l’âge, le statut d’Autochtone et les handicaps.
(1710)
M. Perrault a indiqué clairement que la Loi électorale du Canada ne lui accorde pas actuellement le pouvoir législatif de recueillir ces importantes données démographiques sur les candidats et les autres participants aux élections. Il demande que ce mandat lui soit accordé, et le projet de loi S-283 le lui donnera.
Je note que le Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes a fait une recommandation semblable sur la nécessité de disposer de meilleures données. Ce comité, présidé par la députée Karen Vecchio, a mené une importante étude sur les possibilités et les obstacles pour les femmes en politique électorale au Canada. Il a présenté ses conclusions en avril 2019, dans un rapport publié intitulé Élisez-la : feuille de route pour accroître la représentation des femmes sur la scène politique canadienne. On peut notamment y lire la recommandation 11 :
Que le gouvernement du Canada considère apporter des modifications afin de permettre, avec le consentement des candidats aux investitures, que soient recueillies des données intersectionnelles sur eux, notamment des données sur l’identité de genre.
Cette recommandation vient de deux sources.
La deuxième partie du projet de loi S-283 exige que les principaux partis politiques enregistrés conformément à la Loi électorale du Canada informent les Canadiens des mesures qu’ils prennent pour accroître la diversité dans la sélection des candidats, y compris leurs objectifs et leurs échéanciers pour les femmes candidates.
Cette partie du projet de loi s’appuie également sur les recommandations du rapport du Comité permanent de la condition féminine.
La recommandation 8 du rapport dit notamment ceci :
Que le gouvernement du Canada considère apporter des modifications afin de favoriser l’égalité des sexes et la diversité en politique [...] et d’obliger les partis enregistrés à rendre publiquement compte de leurs efforts pour recruter des candidates de divers horizons à la suite de toutes les élections générales fédérales.
La recommandation 9 du rapport dit notamment ceci :
Que le gouvernement du Canada encourage les partis enregistrés et les associations de circonscription enregistrées à se fixer des objectifs et à faire rapport publiquement de leurs efforts visant à désigner plus de candidates [...] ainsi qu’à établir des comités de recherche de candidates en vue des élections générales et des élections partielles fédérales.
Chers collègues, je fais confiance aux deux sources de ces recommandations, à savoir le directeur général des élections et le rapport du comité permanent. J’espère que vous ferez également confiance à ces sources, ainsi qu’à l’expertise, à l’expérience et à l’étude qui les sous-tendent.
Lors de la rédaction du projet de loi S-283, je me suis délibérément inspirée des lois et des pratiques canadiennes établies qui sont conçues pour suivre et accroître la diversité au Canada, y compris la Loi sur l’équité en matière d’emploi et la Loi canadienne sur les sociétés par actions.
D’abord, pour établir la portée du projet de loi, j’ai inclus au paragraphe 1 la définition de « groupes désignés » donnée dans la Loi sur l’équité en matière d’emploi. Les ensembles de données démographiques colligées par le directeur général des élections au sujet des participants aux élections et les rapports sur les plans d’action des partis politiques doivent être inclusifs. Il faut le faire au moins pour les quatre « groupes désignés », soit, à l’heure actuelle selon la Loi sur l’équité en matière d’emploi, les femmes, les personnes handicapées, les minorités visibles et les Autochtones — qu’on désigne dans la pratique par « peuples autochtones ». Le directeur général des élections et les partis politiques peuvent choisir d’inclure d’autres groupes s’ils le veulent.
Toute modification apportée à la définition de « groupes désignés » par le groupe de travail chargé de l’examen de l’équité en matière d’emploi a pour objectif...
Les travaux du Sénat
Son Honneur la Présidente : Je suis désolée de vous interrompre, sénatrice Dasko.
Honorables sénateurs, comme il est 17 h 15, je dois interrompre les travaux. Conformément à l’article 9-6 du Règlement, la sonnerie se fera entendre afin de convoquer les sénateurs au vote reporté à 17 h 30 sur la troisième lecture du projet de loi C-57.
Convoquez les sénateurs.
(1730)
Projet de loi de mise en œuvre de l’Accord de libre-échange Canada-Ukraine de 2023
Troisième lecture
L’ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Harder, c.p., appuyée par l’honorable sénateur Francis, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-57, Loi portant mise en œuvre de l’Accord de libre-échange entre le Canada et l’Ukraine de 2023.
Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, le vote porte sur la motion suivante : L’honorable sénateur Harder, c.p., propose, avec l’appui de l’honorable sénateur Francis :
Que le projet de loi C-57, Loi portant mise en œuvre de l’Accord de libre-échange entre le Canada et l’Ukraine de 2023, soit lu pour la troisième fois.
La motion, mise aux voix, est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté :
POUR
Les honorables sénateurs
Al Zaibak | Kutcher |
Arnot | LaBoucane-Benson |
Aucoin | Loffreda |
Audette | MacAdam |
Bellemare | Massicotte |
Bernard | McBean |
Black | McCallum |
Boehm | McNair |
Boyer | McPhedran |
Brazeau | Mégie |
Burey | Moncion |
Busson | Moodie |
Cardozo | Omidvar |
Clement | Osler |
Cordy | Oudar |
Cormier | Pate |
Cotter | Patterson |
Coyle | Petitclerc |
Cuzner | Petten |
Dagenais | Prosper |
Dalphond | Quinn |
Dasko | Ravalia |
Deacon (Nouvelle-Écosse) | Ringuette |
Deacon (Ontario) | Robinson |
Dean | Ross |
Duncan | Saint-Germain |
Forest | Simons |
Francis | Smith |
Galvez | Sorensen |
Gerba | Tannas |
Gignac | Varone |
Gold | Verner |
Greene | Wallin |
Greenwood | White |
Harder | Woo |
Kingston | Yussuff—73 |
Klyne |
CONTRE
Les honorables sénateurs
Ataullahjan | Martin |
Batters | Mockler |
Carignan | Oh |
Housakos | Plett |
MacDonald | Poirier |
Manning | Seidman |
Marshall | Wells—14 |
ABSTENTIONS
Les honorables sénateurs
Aucun
La Loi électorale du Canada
Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat
L’ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Dasko, appuyée par l’honorable sénatrice Petitclerc, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-283, Loi modifiant la Loi électorale du Canada (données démographiques).
L’honorable Donna Dasko : Honorables sénateurs, j’avais terminé mon explication de la définition de « groupes désignés » aux fins du projet de loi S-283.
Je vais maintenant expliquer ce que fait le projet de loi pour mettre en œuvre les recommandations relatives aux données démographiques.
(1740)
Le directeur général des élections doit recueillir des renseignements démographiques auprès des participants aux élections, y compris les candidats aux investitures et les candidats à la direction d’un parti, au moyen d’un questionnaire d’auto‑identification volontaire et confidentiel. Les renseignements recueillis peuvent être utilisés par le directeur général des élections à des fins de production de rapports publics sur les élections générales, les élections partielles et les courses à la direction. Les rapports doivent être anonymisés. Ces dispositions tiennent compte de l’exactitude des données et de la protection de la vie privée.
Le directeur général des élections a l’entière discrétion pour décider du contenu et de la forme du questionnaire sous réserve que celui-ci inclue au moins des mesures sur les groupes désignés, comme je l’ai mentionné, et que la forme de la collecte des données permette la ventilation et l’analyse des variables qui se recoupent. Dès réception des rapports sur les données démographiques, le Président de la Chambre des communes doit les soumettre sans délai à la Chambre des communes.
Ces dispositions entreront en vigueur au moment de la sanction royale.
Permettez-moi maintenant de décrire comment le projet de loi prévoit mettre en œuvre les recommandations visant à améliorer les rapports publics sur les plans d’action en matière de sélection des candidats. Permettez-moi de vous donner un peu de contexte.
Tout Canadien qui souhaite devenir député à la Chambre des communes devra presque assurément le faire sous la bannière d’un parti politique en lice aux élections fédérales, conformément à la Loi électorale du Canada. Dans une étude réalisée en 2019, le Centre Samara pour la démocratie estimait que :
Plus de 99 % des députés [...] élus au Parlement canadien au cours des 30 dernières années ont agi à titre de représentants d’un parti politique.
Comme l’a souligné la Commission Lortie, les partis politiques nationaux « contrôlent l’accès à la fonction de candidat ».
Permettez-moi une parenthèse. Comme vous le savez peut-être, les entreprises publiques assujetties à la Loi canadienne sur les sociétés par actions sont tenues de rendre compte de la manière dont elles font progresser la diversité au sein de leur conseil d’administration et de la haute direction. Le projet de loi S-283 s’inspire de ce cadre : il propose de faire en sorte que les partis politiques rendent publics des renseignements sur leurs plans d’action en matière de diversité. J’examinerai d’abord les exigences du projet de loi en ce qui concerne les renseignements demandés aux partis politiques, puis j’expliquerai pourquoi je pense que ce cadre est le meilleur choix.
Tout parti qui souhaite participer aux élections fédérales et organiser des courses à la direction est assujetti, pour ces activités, à la Loi électorale du Canada. Si les partis souhaitent être admissibles à des avantages publics directs en vertu de la loi, y compris l’identification de leur candidat sur le bulletin de vote et le financement des dépenses électorales, ils peuvent demander au directeur général des élections d’être enregistrés.
N’oublions pas que les contribuables canadiens soutiennent aussi indirectement les partis politiques enregistrés, puisque le crédit d’impôt pour contributions politiques fédérales a pour effet de faire baisser les revenus du pays.
Il existe actuellement 16 partis politiques enregistrés dont la participation électorale et le succès varient. La Loi électorale du Canada exige que certains partis enregistrés déposent des états financiers trimestriels. Le projet de loi se fonde sur le même seuil pour exiger que les partis suivants fournissent des renseignements au sujet de la diversité et de la désignation des candidats. Il s’agit des partis :
[...] dont les candidats ont obtenu lors de l’élection générale la plus récente soit au moins 2 % du nombre de votes validement exprimés, soit au moins 5 % du nombre de votes validement exprimés dans les circonscriptions où le parti a soutenu un candidat.
Avec un tel seuil, ces partis sont déjà tenus de faire rapport. Cela représenterait pour eux une exigence de production de rapport supplémentaire.
Les cinq partis actuellement représentés à la Chambre des communes sont les seuls partis qui satisfont à ce critère. Selon les constitutions de ces partis, qui sont publiées sur leur site Web, il est clair que les règles en matière de candidature sont établies et contrôlées à l’échelon national du parti, et non à celui de l’association de circonscription ou de la circonscription.
Ce projet de loi obligera ces partis à rendre des comptes directement aux Canadiens en exigeant qu’ils publient leurs règles de candidature sur leur site. En ce moment, trois des cinq partis le font. De plus, ils devront publier sur leur site Internet leurs politiques, plans et mesures de mise en œuvre, et préciser si le recours à des comités de recrutement officiels est obligatoire « afin d’accroître la diversité des candidats qu’il[s] désigne[nt] ».
Par ailleurs, la recherche montre que les comités de recrutement officiels sont importants pour assurer la diversité chez les candidats, car ils vont au-delà des réseaux établis dont les femmes et d’autres personnes peuvent être exclues. Les partis sont tenus de rendre compte des progrès cumulatifs qu’ils ont réalisés pour accroître la diversité dans le processus de sélection des candidats, dans l’ensemble et par groupe. Lorsqu’un parti n’a pas pris l’une, voire la totalité, de ces initiatives, il doit expliquer aux Canadiens pourquoi il a choisi d’emprunter cette voie.
Le projet de loi prévoit que le directeur général des élections dispose des mêmes pouvoirs d’exécution en cas de non-respect de ces exigences en matière de rapports qu’en cas d’omission de remplir d’autres obligations légales. Ces dispositions entrent en vigueur deux ans après la sanction royale, ce qui donne aux partis enregistrés auxquels elles s’appliquent suffisamment de temps pour se préparer à faire rapport.
Comme je l’ai dit, les dispositions en matière de rapports pour les partis politiques s’inspirent directement de ce que l’on appelle les exigences de transparence en matière de « [p]résentation de renseignements relatifs à la diversité » qui sont prévues dans la Loi canadienne sur les sociétés par actions.
Depuis 2020, les sociétés publiques constituées en vertu d’une loi fédérale doivent informer chaque année leurs actionnaires des mesures qu’elles prennent pour accroître la diversité au sein de leurs conseils d’administration et de leurs équipes de cadres supérieurs. L’approche fédérale en matière de présentation de renseignements sur la diversité s’inspire des règles provinciales régissant les valeurs mobilières qui sont en place depuis décembre 2014.
Vous avez peut-être entendu ces régimes fédéral et provinciaux être qualifiés de systèmes du type « se conformer ou s’expliquer ». C’est la terminologie utilisée pour décrire, qualifier et expliquer ces régimes. Les entreprises ont la possibilité d’indiquer comment elles se conforment aux exigences de divulgation ou d’expliquer pourquoi elles choisissent de ne pas s’y conformer. Les entreprises établissent les politiques, les plans et les échéanciers qui leur conviennent le mieux, et les actionnaires leur demandent des comptes comme ils l’entendent.
Chers collègues, je me suis appuyée sur le régime de divulgation des sociétés parce qu’il fonctionne. Dans un éditorial publié le 22 janvier 2024 dans le Globe and Mail, on indique ceci à propos de l’approche « se conformer ou s’expliquer » : « Il s’agit d’une première étape fondamentale : il est essentiel de quantifier la situation actuelle. Les règles de divulgation ont contribué à faire avancer les choses [...] »
Nous disposons de neuf années de données sur la représentation des femmes et de trois années sur la représentation des minorités visibles, des Autochtones et des personnes handicapées. Le respecté rapport d’Osler intitulé Pratiques de divulgation en matière de diversité fait état de progrès dans plusieurs de ces domaines, même sur une période de trois ans. Le modèle « se conformer ou s’expliquer » produit des résultats.
Ce modèle fonctionne également d’une autre façon importante. L’expression « se conformer ou s’expliquer » a changé la donne dans le secteur des entreprises. Il a mis en évidence le manque de diversité au sein des conseils d’administration et parmi les cadres supérieurs. Il a relevé la barre de ce qui est considéré comme un résultat acceptable afin qu’il n’y ait pas de retour en arrière, qu’on ne puisse qu’avancer. C’est précisément ce que nous devons faire en ce qui concerne la diversité dans la sélection des candidats.
Permettez-moi de vous donner un exemple de ce phénomène qui consiste à relever la barre. Je cite cet exemple en mémoire du premier ministre Brian Mulroney. Le premier ministre Mulroney a nommé six femmes à son premier Cabinet en 1984. Ce faisant, il est allé bien au-delà d’une ou de deux femmes nommées pour la forme par ses prédécesseurs et il a relevé la barre pour les futurs premiers ministres. On ne pouvait alors plus revenir en arrière, et c’est le phénomène dont nous parlons lorsque nous parlons de ce processus.
(1750)
J’en arrive maintenant aux dispositions du projet de loi sur la mise en œuvre d’une autre recommandation du Comité permanent, qui porte sur l’établissement d’objectifs à l’égard des candidates. À la recommandation 9 énoncée dans son rapport, le Comité permanent encourage clairement les partis « [...] à se fixer des objectifs et à faire rapport publiquement de leurs efforts visant à désigner plus de candidates [...] »
Ici, il serait utile que je vous donne un peu plus de contexte. Qu’est-ce qui explique l’écart entre les sexes dans la représentation? Premièrement, il a été démontré que l’écart entre les sexes n’est pas la faute des électeurs. En effet, les électeurs ont peu ou pas de préjugés contre les femmes. Les gens votent pour les partis. Si la personne qui se présente pour un parti ayant la faveur du public est une femme, les électeurs ne seront pas réticents à voter pour une femme plutôt que pour un homme.
Selon une étude sur plus de 21 000 candidates depuis que les femmes ont commencé à être élues au Parlement du Canada, en 1921, les candidates aux élections reçoivent tout autant de votes que leurs homologues masculins, une fois ces facteurs importants pris en compte. Par conséquent, les électeurs n’y sont pour rien. Nous ne pouvons pas rejeter la faute sur eux.
Certains disent que la faute revient à la sous-représentation des femmes au sein de notre système électoral. Cependant, une vaste étude comparative entre les pays montre que tous les systèmes électoraux, même ceux qui sont fondés sur la représentation proportionnelle, doivent déployer des efforts ciblés pour améliorer la représentation législative des femmes.
L’écart entre les hommes et les femmes n’est pas non plus attribuable à un nombre insuffisant de femmes qui se présentent — un argument que j’entends souvent. Par exemple, selon les données de la Bibliothèque du Parlement, 762 femmes — 38 % de tous les candidats — se sont présentées aux élections fédérales de 2021. Ce nombre suffirait à remplir deux fois la Chambre des communes avec uniquement des femmes. Voilà combien il y avait de candidates. C’est beaucoup de candidates. Les femmes prêtes à se présenter ne manquent pas. C’est un fait qu’il faut comprendre.
Aux élections de 2021, parmi les candidats des 5 partis enregistrés actuellement représentés à la Chambre des communes, 44 % étaient des femmes. Je tiens à reconnaître et à souligner qu’en général, le nombre de candidates au sein des partis politiques du Canada a augmenté au cours des récentes élections. Il y a donc eu du progrès à cet égard, ce qui est bien.
Pourtant, bien que 44 % des candidates des 5 partis étaient des femmes, les femmes ont remporté seulement 30,5 % des sièges. Si on prend un peu de recul, la grande question devient : pourquoi?
La politicologue Jeanette Ashe a fourni la brève explication suivante lors de son témoignage devant le comité de la Chambre :
Les processus de sélection des partis sont la principale cause de la sous-représentation des femmes [...] Un nombre suffisant de femmes se présentent en politique, mais les responsables et les fonctionnaires du parti sélectionnent des hommes de manière disproportionnée.
Des données probantes indiquent deux choses importantes au sujet des sources d’inégalité dans la sélection des candidats. Premièrement, les personnes chargées de la sélection au sein des partis choisissent de manière disproportionnée des hommes pour se présenter dans les circonscriptions qui sont considérées comme des châteaux forts, où leur parti a de très bonnes chances de l’emporter. Les femmes sont plus susceptibles d’être candidates dans des circonscriptions où le parti est moins populaire. Voici ce qu’ont écrit Melanee Thomas et Marc André Bodet dans une étude canadienne reconnue :
Dans l’ensemble, nous avons constaté que les femmes sont nommées de façon disproportionnée dans des circonscriptions où elles ne peuvent pas être élues [...]
Si autant de femmes étaient portées candidates, mais réparties dans des circonscriptions où le niveau de concurrence était équivalent à celui des hommes, l’équilibre des sexes au Parlement canadien changerait considérablement [...]
C’est le premier facteur.
Deuxièmement, dans une circonscription, le parti sortant aura tendance à choisir un homme comme candidat, que ce soit le même candidat qui se représente ou que le parti propose une nouvelle personne dans une circonscription qu’il détenait déjà.
Par conséquent, la façon dont les femmes sont traitées dans les circonscriptions où les partis estiment avoir un avantage électoral est l’un des aspects clés à considérer pour réduire l’écart entre les sexes. Ce projet de loi s’appuie sur cette donnée. Les partis doivent indiquer s’ils ont adopté des règles sur la présentation de candidatures féminines dans les circonscriptions considérées comme des châteaux forts, c’est-à-dire les circonscriptions où l’écart du nombre de voix obtenues entre le candidat du parti et le candidat ayant remporté les dernières élections générales ou partielles est de 10 % ou moins.
Les partis doivent également indiquer s’ils ont adopté des règles sur la présentation de candidatures féminines dans les circonscriptions qu’ils détenaient lors des dernières élections générales ou partielles, c’est-à-dire les circonscriptions où leur candidat était le député sortant, mais dans lesquelles cette personne ne compte pas se porter candidat de nouveau.
Honorables collègues, ce sont là les principales dispositions du projet de loi S-283. Pour résumer, ce projet de loi vise à mettre en œuvre des recommandations du directeur général des élections du Canada afin de mesurer la diversité, ainsi que des recommandations que le Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes a faites dans son rapport d’avril 2019 afin d’accroître la diversité en matière de représentation féminine en politique électorale. Il se fonde sur une vaste expérience canadienne en ce qui a trait à la mise en œuvre de plans d’action visant à promouvoir la diversité en milieu de travail, au sein des conseils d’administration et dans les postes de direction, ainsi que sur des décennies de recherches sur la participation des femmes en politique.
Ce projet de loi ne prévoit pas de modifications structurelles obligatoires du système électoral ou des partis politiques, à l’exception de celles que les partis politiques choisissent d’apporter eux-mêmes. Alors que 93 pays ont établi des quotas de femmes en politique, selon les Nations unies, qui mesurent ces chiffres, ce projet de loi adopte une approche différente. Il ne fixe pas d’objectifs ni de calendriers pour les partis politiques. Il leur demande plutôt de rendre compte de leurs objectifs, de leurs calendriers et de leurs projets. Le projet de loi repose sur la collecte de données et l’établissement de rapports.
Je pense que le projet de loi S-283 améliorera la transparence, la responsabilité publique et la confiance dans les partis politiques en renforçant l’information sur leurs candidats et leurs processus de sélection de ceux-ci. Le projet de loi respecte les dirigeants des principaux partis politiques et les met au défi de veiller à ce que la Chambre des communes soit représentative du pays, mais il laisse aux partis une grande marge de manœuvre pour prendre des initiatives et innover.
Honorables sénateurs, je vous demande d’appuyer ce projet de loi à l’étape de la deuxième lecture. Merci beaucoup.
Son Honneur la Présidente : La sénatrice accepterait-elle de répondre à une question de la sénatrice Omidvar?
La sénatrice Dasko : Oui.
L’honorable Ratna Omidvar : Sénatrice Dasko, je vous remercie d’avoir proposé cette mesure législative et de l’avoir analysée comme vous l’avez fait. Cela met en évidence vos deux principales forces. Depuis que je vous connais, et cela fait déjà très longtemps, vous vous intéressez aux femmes en politique et aux données probantes. Le projet de loi à l’étude réunit vos deux points forts.
J’ai quelques questions sur l’utilisation des données. Le projet de loi que vous proposez permettra au directeur général des élections de recueillir des données au niveau national, puis d’en faire rapport. Pourrait-on procéder à la désagrégation de ces données à l’échelle des circonscriptions?
La sénatrice Dasko : Je vous remercie de votre question, sénatrice Omidvar. Les données peuvent être désagrégées dans la mesure où cela ne contrevient pas à la confidentialité ni à l’anonymat. Il s’agit en fait d’une question concernant l’analyse et la mesure dans laquelle il sera possible d’analyser les données de façon interactive. Les données seront analysées sur une base intersectionnelle dans la mesure où cela ne contrevient pas à l’anonymat et à la confidentialité.
Le directeur général des élections estime qu’il est fort important que les données soient confidentielles et anonymisées, car il veut s’assurer que cette mesure législative va fonctionner. Il pense que cela fonctionnera si les données sont traitées de cette manière, afin que les candidats puissent fournir les données en étant certains qu’elles ne seront pas divulguées au niveau des individus.
(1800)
Son Honneur la Présidente : Honorable sénateurs, il est maintenant 18 heures. Conformément à l’article 3-3(1) du Règlement, je dois quitter le fauteuil jusqu’à 20 heures, heure où nous reprendrons nos travaux, à moins que vous souhaitiez ne pas tenir compte de l’heure.
Vous plaît-il, honorables sénateurs, de ne pas tenir compte de l’heure?
Des voix : D’accord.
Son Honneur la Présidente : Je vais reposer la question. Vous plaît-il, honorables sénateurs, de faire abstraction de l’heure?
Des voix : D’accord.
Son Honneur la Présidente : Il en est ainsi ordonné. La sénatrice Dasko a la parole.
La sénatrice Dasko : Merci, Votre Honneur. C’est ainsi que l’anonymat et la confidentialité des questions seront garantis dans l’analyse. C’est tout ce qu’il faut savoir. Merci.
La sénatrice Omidvar : J’ai une deuxième question, qui est brève. Sénatrice Dasko, au cours de votre intervention, vous avez mentionné à plusieurs reprises les groupes désignés définis dans la Loi sur l’équité en matière d’emploi et leur lien avec le projet de loi S-283. Il est remarquable de constater à quel point le projet de loi dont j’ai parlé sur la gouvernance des organismes de bienfaisance est semblable à votre projet de loi. Je vais donc vous poser une question qui me préoccupe également.
Le gouvernement prévoit de modifier le libellé de la Loi sur l’équité en matière d’emploi afin d’élargir la définition des groupes désignés. Ces modifications pourraient être apportées après que votre projet de loi soit — espérons-le — adopté. Quelle incidence auraient-elles sur le projet de loi?
La sénatrice Dasko : Je vous remercie de la question, sénatrice. Évidemment, utiliser les groupes désignés dans la Loi sur l’équité en matière d’emploi est une très bonne façon de faire dans ce cas-ci et un excellent moyen de mesurer les groupes. Nous avons d’ailleurs de l’expérience à ce sujet dans le contexte de la Loi sur l’équité en matière d’emploi et de la Loi canadienne sur les sociétés par actions. Comme vous l’avez mentionné, votre projet de loi renvoie également à ces catégories.
La Loi sur l’équité en matière d’emploi fait actuellement l’objet d’un examen, et on a commencé à proposer certaines modifications. L’intention, en l’occurrence, c’est que les modifications qui découlent de ces efforts s’appliquent à ce projet de loi-ci. Cela peut se faire en apportant ce qu’on appelle des modifications corrélatives ou, dépendamment de celui des deux projets de loi qui sera adopté en premier, en amendant l’autre en conséquence. L’intention est certainement de les harmoniser.
Nous savons que le nombre de catégories de groupes désignés risque d’augmenter. Nous savons que certaines des définitions vont même être précisées. C’est ce qui découle de l’examen effectué par le comité.
L’espoir et l’intention, c’est que ce projet de loi-ci reflète les modifications. C’est dans cet esprit qu’il a été rédigé. Merci.
[Français]
L’honorable Lucie Moncion : Je voulais dire que la sénatrice McPhedran a bel et bien dit non, Votre Honneur. Je crois que vous ne l’avez pas vue ni entendue. Peut-être pourriez-vous reposer la question? En toute équité envers notre collègue, je pense que c’est notre devoir ici. Je l’ai vue à deux reprises.
Son Honneur la Présidente : J’ai posé la question deux fois. Il faut que les sénateurs puissent lever la voix ou même se lever, ou attendre que tout le monde ait fini de dire oui ou non pour exprimer leur désaccord. Nous allons donc poursuivre.
(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)
[Traduction]
Projet de loi sur les droits de la personne à l’échelle internationale
Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat
L’ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Housakos, appuyée par l’honorable sénatrice Seidman, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-281, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, la Loi sur la justice pour les victimes de dirigeants étrangers corrompus (loi de Sergueï Magnitski), la Loi sur la radiodiffusion et la Loi interdisant les armes à sous‑munitions.
(Sur la motion du sénateur Tannas, au nom de la sénatrice Patterson, le débat est ajourné.)
Projet de loi sur la stratégie nationale sur les soins oculaires
Deuxième lecture—Suite du débat
L’ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Ravalia, appuyée par l’honorable sénateur Woo, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-284, Loi prévoyant l’élaboration d’une stratégie nationale sur les soins oculaires.
L’honorable Andrew Cardozo : Honorables sénateurs, j’ai quelques observations à faire au sujet du projet de loi C-284. Je voudrais d’abord féliciter le parrain du projet de loi, le sénateur Mohamed-Iqbal Ravalia, ainsi que la députée à l’origine du projet de loi à la Chambre des communes, l’honorable Judy Sgro, qui a mis son importante expérience de parlementaire à contribution dans l’élaboration de ce projet de loi solide.
Je tiens également à saluer les organisations suivantes, qui représentent les Canadiens aveugles : le Conseil canadien des aveugles, l’Institut national canadien pour les aveugles, la Société canadienne d’ophtalmologie, Vaincre la cécité Canada et la OneSight EssilorLuxottica Foundation.
Les membres de ces organisations canadiennes réclamaient ce projet de loi et ils ont contribué à sa création. Officiellement, il s’agit du projet de loi C-284, Loi prévoyant l’élaboration d’une stratégie nationale sur les soins oculaires.
Comme on peut le lire dans son préambule, « des millions de Canadiens souffrent de maladies oculaires qui, sans traitement, pourraient entraîner une perte de vision ou la cécité ». Les soins oculaires sont tout sauf négligeables. On estime en effet à 8 millions le nombre de Canadiens qui souffrent de maladies oculaires qui pourraient les rendre aveugles, soit 20 % de la population.
Selon un rapport de l’Institut national canadien pour les aveugles, le coût de la perte de vision au Canada s’élève à environ 33 milliards de dollars par année.
On estime que 75 % des cas de perte de vision auraient pu être évités, sauf que les Canadiens ne passent pas d’examens de la vue comme ils le devraient. Selon les lignes directrices, nous devrions subir un examen de la vue tous les ans; toutefois, les assurances provinciales et privées, le cas échéant, couvrent souvent un examen tous les deux ans seulement. Il s’ensuit inévitablement qu’un tiers des adultes canadiens ne reçoivent pas de soins oculaires parce qu’ils n’en ont pas les moyens. Il vaut mieux prévenir que guérir — cela va de soi — mais, au Canada, on n’en fait pas assez en matière de prévention.
L’accès aux soins oculaires diffère d’une province à l’autre, mais si nous admettons qu’il s’agit non seulement d’un problème pour tous les Canadiens, mais bien d’un problème grave, il est alors nécessaire de mettre au point une stratégie nationale. Nous devons convaincre les gouvernements provinciaux et fédéral de travailler de concert à l’amélioration des soins de santé oculaire dans notre pays. C’est l’objet du projet de loi, à savoir la coopération, la planification et la coordination.
Je voudrais lire un bref extrait du site web du Conseil canadien des aveugles :
Le projet de loi C-284 a fait du chemin, mais il reste encore beaucoup à faire. L’adoption imminente de ce projet de loi […]
— le conseil est plutôt optimiste —
[…] promet une meilleure qualité de vie pour beaucoup et signifie un engagement envers l’égalité et l’accessibilité dans les services de soins oculaires. Les efforts de collaboration avec des organisations visionnaires soulignent l’appel collectif à l’équité. Essentiellement, le projet de loi C-284 n’est pas seulement une mesure législative; il s’agit d’une étape cruciale vers un système de soins oculaires plus inclusif et plus efficace pour tous les Canadiens.
(1810)
Honorables sénateurs, voilà pourquoi j’appuie le projet de loi C-284, Loi prévoyant l’élaboration d’une stratégie nationale sur les soins oculaires. Merci.
[Français]
L’honorable Marie-Françoise Mégie : Honorables sénateurs et sénatrices, je prends la parole aujourd’hui pour appuyer le projet de loi C-284. Cette initiative parlementaire est parrainée par notre collègue le sénateur Ravalia; je l’en remercie. Ce projet de loi vise à établir une stratégie nationale sur les soins oculaires.
Le 25 octobre 2023, l’autre endroit a adopté ce projet de loi à l’unanimité. Le sénateur Ravalia a souligné à grands traits l’importance d’une telle mesure législative pour la santé de notre population, et il nous a aussi prévenus des coûts économiques importants pour notre société si nous n’agissons pas maintenant.
Dans sa campagne de sensibilisation, l’Association des optométristes du Québec prévient les parents qu’environ un enfant d’âge scolaire sur quatre souffre de problèmes visuels. C’est pourquoi elle a publié un slogan très pertinent que j’aime bien : La santé oculaire, c’est important d’y voir.
De plus, on estimait en 2019 que la perte de vision peut engendrer un fardeau économique de l’ordre de 32,9 milliards de dollars au Canada. L’impact humain est aussi non négligeable. En effet, 8 millions de personnes au Canada sont à risque de perdre la vue.
Selon le manuel médical Merck, la dégénérescence maculaire liée à l’âge est la première cause de perte de vision irréversible chez les personnes âgées. Il est important de garder en tête qu’une diminution de la vision perturbe les activités normales de la vie quotidienne, accélère la perte d’autonomie et contribue négativement au vieillissement.
Le projet de loi C-284 offre une occasion unique de répondre à des besoins grandissants et de transformer positivement la santé visuelle de millions de Canadiens.
En 2020, Statistique Canada rapportait que la proportion de la population qui déclarait avoir une bonne vision sans correction était d’environ 75 % chez les jeunes des deux sexes âgés de 12 à 19 ans, et cette proportion était considérablement plus faible chez les personnes âgées de 45 à 49 ans. Elle atteignait près de 25 % chez les personnes âgées de 55 ans ou plus.
Le vieillissement de la population accroît sans conteste la nécessité de recourir aux professionnels de la santé des yeux. Bien voir tout au long de sa vie est un gage du maintien de l’autonomie et d’une bonne santé générale.
La Société canadienne d’ophtalmologie a sondé les Canadiens pour comprendre leur niveau de connaissance des principales maladies oculaires. Plus de la moitié d’entre eux, soit environ 62 %, connaissent les cataractes et, pourtant, seulement un quart des Canadiens savent que les cataractes constituent la principale cause de cécité au pays. Lorsqu’il est question de la dégénérescence maculaire liée à l’âge, la proportion chute à 39 %. Il faut noter que cette maladie constitue la deuxième cause de cécité et qu’elle touche près de 2 millions de Canadiens. Quant au glaucome, à la rétinopathie diabétique et au syndrome de l’œil sec, la proportion tombe sous les 26 % et se situe à environ 22 %.
Ces chiffres portant sur la connaissance des maladies oculaires montrent bien qu’il faut sensibiliser les Canadiens à la prévention de ces maladies.
Malgré leur grande importance, les soins oculaires ne reçoivent souvent pas l’attention et les ressources nécessaires. Il est temps que le Canada adopte une approche proactive en matière de santé visuelle, et le projet de loi C-284 représente un premier pas important dans cette direction.
Le projet de loi C-284 propose l’établissement d’une stratégie nationale de soins oculaires qui aborderait plusieurs aspects fondamentaux de la santé visuelle. Tout d’abord, il mettrait en place des programmes de dépistage réguliers pour détecter précocement les problèmes oculaires et prévenir les complications graves et coûteuses à long terme.
La stratégie nationale proposée favoriserait l’accès à des soins oculaires de qualité pour tous les Canadiens, quel que soit leur lieu de résidence ou leur statut socioéconomique.
Trop souvent, les populations marginalisées ou défavorisées ont un accès limité à des services de santé oculaire, ce qui aggrave les inégalités en matière de santé.
En adoptant le projet de loi C-284, nous nous engageons à garantir que chaque citoyen puisse avoir accès à des soins oculaires adéquats, contribuant ainsi à une société plus juste, équitable et inclusive.
En outre, la mise en œuvre de cette stratégie nationale renforcerait la recherche et l’innovation dans le domaine de la santé oculaire. En investissant dans la recherche sur les maladies oculaires et les nouvelles technologies, nous pourrions développer des traitements plus efficaces et améliorer les résultats pour les patients atteints de troubles visuels.
De plus, le projet de loi C-284 encouragerait l’éducation et la sensibilisation du public sur l’importance des soins oculaires et les mesures préventives à prendre pour maintenir une bonne santé visuelle. En informant et en éduquant la population, nous pouvons encourager des comportements sains et réduire le nombre de personnes souffrant de problèmes oculaires évitables.
Chers collègues, en soutenant le projet de loi C-284, nous nous engageons à améliorer la qualité de vie de millions de Canadiens en leur offrant un accès équitable à des soins oculaires de qualité. Nous envoyons un message fort selon lequel la santé visuelle est une priorité nationale et chaque citoyen mérite de vivre dans un pays où sa santé est prise au sérieux.
En conclusion, je souhaite que nous puissions faire progresser ce projet de loi afin de soutenir la volonté unanime exprimée sans partisanerie en vue d’établir une stratégie nationale de soins oculaires au Canada. En agissant ensemble, nous pouvons faire une réelle différence dans la qualité de vie de nos concitoyens et contribuer à bâtir un avenir plus sain et prometteur pour tous.
Je vous remercie.
(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)
L’étude sur les nouvelles questions liées à son mandat
Quatrième rapport du Comité de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles—Suite du débat
Le Sénat passe à l’étude du quatrième rapport (provisoire) du Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles, intitulé L’hydrogène : une option viable pour un Canada carboneutre en 2050 ?, présenté au Sénat le 9 mai 2023.
L’honorable Paul J. Massicotte propose que le rapport soit adopté.
— Honorables sénateurs, je propose que le rapport, qui inclut une demande de réponse du gouvernement, soit adopté.
(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)
[Traduction]
Bibliothèque du Parlement
Adoption du premier rapport du comité mixte
L’ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Ravalia, appuyée par l’honorable sénatrice Busson, tendant à l’adoption du premier rapport du Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement, intitulé Mandat et quorum du comité, présenté au Sénat le 20 juin 2023.
Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?
Des voix : D’accord.
(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)
L’étude sur le service extérieur canadien et d’autres éléments de l’appareil de politique étrangère au sein d’Affaires mondiales Canada
Douzième rapport du Comité des affaires étrangères et du commerce international et demande de réponse du gouvernement—Suite du débat
L’ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Boehm, appuyée par l’honorable sénateur Forest,
Que le douzième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international, intitulé Plus qu’une vocation : le Canada doit se doter d’un service extérieur adapté au XXIe siècle, déposé auprès du greffier du Sénat le mercredi 6 décembre 2023, soit adopté et que, conformément à l’article 12-23(1) du Règlement, le Sénat demande une réponse complète et détaillée du gouvernement, le ministre des Affaires étrangères étant désigné ministre chargé de répondre à ce rapport.
L’honorable Peter Harder : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet du rapport du Comité sénatorial des affaires étrangères et du commerce international, intitulé Plus qu’une vocation : le Canada doit se doter d’un service extérieur adapté au XXIe siècle. Je ne répéterai pas ce que nos collègues et les membres du comité ont dit jusqu’à présent. Ils ont judicieusement présenté le contenu du rapport.
(1820)
Ce dont je veux parler, c’est du contexte.
Je crois depuis longtemps que c’est dans les études que le Sénat montre vraiment sa valeur unique. Les sénateurs sont capables de cerner les problèmes qui touchent les Canadiens et la communauté internationale, puis de les transformer en occasions et en recommandations applicables d’un point de vue canadien. En outre, comme ils bénéficient de la mémoire institutionnelle, les sénateurs sont capables de tenir compte, d’un gouvernement à l’autre, de ce qui a fonctionné et de ce qui n’a pas fonctionné.
Nous avons vu des études et des rapports révolutionnaires au cours des dernières années, comme le rapport Kirby sur la santé mentale, qui est toujours cité, le rapport Nolin sur le cannabis ou le rapport du Comité sénatorial spécial sur l’Arctique publié lors de la 42e législature.
Je dirais, de façon quelque peu partiale, que le rapport du Comité des affaires étrangères se classe dans la même catégorie que ceux que je viens de mentionner en raison de sa rigueur et de son excellence.
Chers collègues, le sujet du rapport n’est pas sexy, mais son contenu est d’une importance inestimable pour les fonctionnaires qui travaillent à l’édifice Lester B. Pearson et, plus important encore, pour le réseau mondial, qui comprend des centaines de missions.
Comme on l’a dit, quatre décennies se sont écoulées depuis que la Commission McDougall a formulé ses recommandations. Une mise à jour s’imposait donc depuis longtemps. Pourtant, notre comité a quand même pris les devants. Nous avons reçu notre ordre de renvoi et avons commencé notre étude avant que la ministre des Affaires étrangères, l’honorable Mélanie Joly, n’annonce son étude intitulée « L’avenir de la diplomatie », à Affaires mondiales Canada.
Non seulement nous étions en avance sur la ministre pour ce qui est de son étude interne, mais nous avons achevé et déposé notre rapport auprès du greffier en décembre dernier. À ce moment-là, le Comité des affaires étrangères et du développement international de l’autre endroit n’avait tenu que sa première réunion sur une étude très semblable. En fait, ce comité a invité le sénateur Boehm à témoigner dans le cadre de son étude parce que nous avions déjà terminé la nôtre — imaginez!
Le moment est venu pour nous de passer à l’action en adoptant ce rapport.
L’adoption d’un rapport n’est pas une mince tâche. Il faut déployer beaucoup d’efforts pour élaborer des recommandations sur lesquelles la majorité des sénateurs peuvent s’entendre à la lumière des témoignages factuels des témoins et des questions pertinentes des sénateurs.
L’adoption d’un rapport signifie que l’ensemble du Sénat oblige le gouvernement à examiner attentivement le rapport en ce qui concerne l’élaboration de politiques publiques et l’identification des enjeux et des solutions en matière de politiques publiques. Nos travaux ont un certain mérite, indépendant des tendances partisanes que l’on trouve à la Chambre, et ils résistent aux examens minutieux et au passage du temps.
C’est pourquoi nous demandons à la ministre des Affaires étrangères de soumettre une réponse détaillée et complète à ce rapport. Le représentant du gouvernement au Sénat doit déposer la réponse dans les 150 jours civils suivant l’adoption du rapport, de sorte que plus vite nous adoptons le rapport, plus vite nous recevrons une réponse.
Compte de son propre audit interne d’Affaires mondiales, je m’attends à ce que la ministre offre volontiers une réponse. Il pourrait y avoir une coordination entre les deux documents, et je pense que cela a déjà été entamé.
Qui plus est, la ministre pourra répondre officiellement au rapport avant les élections de 2025. Si nous adoptons le rapport cette semaine ou ce soir, nous obtiendrons une réponse officielle au plus tard à la fin du mois d’août, ce qui donnera aux sénateurs tout le temps nécessaire pour répondre à tout ce que le gouvernement pourrait dire.
Puisqu’il aide le public à comprendre la position du gouvernement sur des questions politiques, il s’agit d’un outil utile à la gouvernance démocratique. Il décrit les intentions du gouvernement et aide à mieux comprendre l’équilibre délicat de la gouvernance.
Bien que les enjeux relatifs aux relations étrangères n’attirent pas les votes de manière générale, une réponse officielle est néanmoins nécessaire pour bien informer ceux qui exercent le pouvoir, y compris les personnes dans cette enceinte. Cela nous permet de poser des questions difficiles pour demander des comptes au gouvernement — par exemple des questions aux ministres au sein des comités, et oui, même à ce cirque qu’est la période des questions.
Toutefois, nous devons également envisager cette réponse avec un peu de prévoyance. À l’heure actuelle, le contexte politique ne permet pas de croire que les coffres seront accessibles pour une augmentation des dépenses, surtout dans le contexte des affaires étrangères. Certes, il y a une volonté de gérer les finances de manière responsable et prudente. Cela entre en conflit avec les demandes qui mettent à l’épreuve cette responsabilité budgétaire.
Pensons, par exemple, à la directive du Conseil du Trésor qui demande aux ministères de réduire leurs dépenses de milliards de dollars. Parallèlement, nous apprenons aussi dans les médias que le Canada subit régulièrement des pressions pour atteindre la cible de 2 % du PIB afin de respecter son engagement au sein de l’OTAN. Cet argent doit venir de quelque part.
Si je soulève la question du seuil de 2 % du PIB comme contribution à l’OTAN, ce n’est pas parce que je crois qu’il vaut la peine de le respecter, ou qu’il s’agit d’un bon paramètre. C’est plutôt parce qu’il y a certains signes qui donnent à penser que l’une des façons d’atteindre la cible de 2 % serait de réduire les contributions du Canada à l’aide étrangère.
Chers collègues, ce n’est pas qu’une vision à court terme, c’est une vision absurde. Selon un document de l’OTAN, « Les dépenses de défense des pays de l’OTAN (2014-2023) », la contribution du Canada représente 1,38 % de son PIB, ce qui le place au vingt‑cinquième rang au sein de l’OTAN. En dollars, cela représente plus de 39 milliards de dollars, soit la septième place au sein de l’OTAN. Afin d’atteindre la cible de 2 % du PIB, le Canada devrait consacrer environ 20 milliards de dollars de plus, ce qui nous placerait seulement au cinquième rang, si rien d’autre ne changeait.
En comparaison, dans le budget fédéral de 2023, les dépenses canadiennes en matière d’aide étrangère s’élevaient à 6,9 milliards de dollars, soit environ 0,24 % du PIB. Chers collègues, simplement pour atteindre l’objectif de l’OTAN et apaiser les détracteurs, nous devrions allouer environ trois fois la totalité de notre budget de 2023 pour l’aide étrangère aux dépenses de défense.
On utilise également une autre mesure pour évaluer la contribution du Canada à l’aide publique au développement. Cette mesure est peut-être moins connue que l’objectif de 2 % fixé par l’OTAN, mais elle est également importante et a été élaborée au milieu du 20e siècle par un grand Canadien. Le rapport Pearson de 1972, comme on l’appelle communément, proposait que l’aide publique au développement atteigne 0,7 % du revenu national brut, un indicateur similaire, mais différent du PIB. La sénatrice Bellemare ou la sénatrice Clement saurait sans doute expliquer mieux que moi la différence entre ces deux indicateurs.
Cet objectif est toujours utilisé par des organisations telles que l’Organisation de coopération et de développement économiques, l’OCDE, pour suivre les contributions des pays membres en aide publique au développement, mais il est basé sur un pourcentage du revenu national brut. En 2022, l’aide publique au développement du Canada en pourcentage du revenu national brut était de 0,37 %, soit environ la moitié de l’objectif de 0,7 %, et cela lui vaut le dix‑huitième rang parmi tous les membres du Comité d’aide au développement de l’OCDE. Toutefois, comme dans le cas de l’objectif de dépenses de l’OTAN, le Canada se hisse à la sixième place si l’on considère uniquement les chiffres en dollars.
Chers collègues, c’est dans ce contexte que le gouvernement devra prendre en compte notre rapport, ainsi que d’autres contributions financières que je n’ai pas mentionnées. Le thème qui ressort, c’est que nous n’investissons tout simplement pas assez — ou pas assez intelligemment — dans les affaires étrangères en général. C’est un thème qui persiste depuis un certain temps, et la suspension du recrutement au sein du ministère des Affaires étrangères n’a fait qu’exacerber les problèmes que nous constatons aujourd’hui au sein du service extérieur.
Le Canada n’est pas une superpuissance, mais bien une puissance moyenne. Quoi qu’en disent ceux qui prétendent que rien ne va plus au Canada, nous sommes toujours une puissance respectée. Aujourd’hui plus que jamais, il est nécessaire de revoir tous les aspects de la présence du Canada sur la scène internationale et, au besoin, d’y investir.
Comme l’a dit le sénateur Boehm :
Le monde d’aujourd’hui est de plus en plus instable et violent, ce qui a des conséquences sur nos relations commerciales, nos chaînes d’approvisionnement, notre souveraineté et notre influence dans le monde.
Comme l’indique un article paru le 22 février dans The Economist : « La Russie devient plus dangereuse, les États-Unis sont moins fiables et l’Europe n’est toujours pas préparée. » La présence du Canada dans le monde doit s’adapter à ces réalités en constante évolution. Je crains que le Canada se retrouve isolé, comme l’explique Kim Nossal, distingué professeur de l’Université Queen’s, dans son livre Canada Alone.
Pour revenir au rapport Plus qu’une vocation : le Canada doit se doter d’un service extérieur adapté au XXIe siècle, soulignons que l’expérience et l’expertise diplomatiques sont inestimables. Les agents du service extérieur du Canada comptent parmi les meilleurs au monde et ils méritent notre soutien afin de poursuivre l’important travail de diplomatie qu’ils doivent accomplir face aux menaces et à l’incertitude dans notre communauté mondiale.
Les recommandations sont éloquentes : recrutement, formation, connaissances en matière de développement, de commerce et de linguistique, et possibilité pour les fonctionnaires d’utiliser leurs compétences au sein du service extérieur dans le cadre de détachements ou d’échanges. Toutes ces recommandations profiteraient au Canada dans son rôle de puissance moyenne, afin qu’il puisse continuer à se démarquer.
(1830)
Honorables collègues, seul le pouvoir exécutif — dans une fédération, c’est la responsabilité exclusive du gouvernement fédéral — peut, au nom de la Couronne, gérer les affaires étrangères en vertu d’un pouvoir qui lui a été conféré lorsque le Royaume-Uni a adopté le Statut de Westminster, en 1931. On appelle cela également la prérogative royale, ce qui, dans le contexte des affaires étrangères, a été comparé par la Cour suprême du Canada à une « responsabilité constitutionnelle ».
Selon le paragraphe 39 de l’arrêt rendu dans l’affaire Canada (Premier ministre) c. Khadr, on peut en effet interpréter la responsabilité constitutionnelle comme étant :
[...] la responsabilité [...] de l’exécutif de prendre des décisions concernant les affaires étrangères dans le contexte de circonstances complexes et en fluctuation constante, en tenant compte des intérêts nationaux plus larges du Canada.
Honorable collègues, il s’agit là d’un autre aspect dont la ministre Joly devra tenir compte lorsqu’elle évaluera les recommandations de notre rapport. Nous savons que les circonstances sont complexes, qu’elles sont en constante évolution. Compte tenu de cela, et étant donné que les pouvoirs relatifs aux affaires étrangères relèvent exclusivement de l’exécutif fédéral, la ministre devrait en faire une grande priorité, car seuls le Cabinet et elle peuvent assumer cette responsabilité constitutionnelle.
Cela dit, honorables collègues, je demande à ce que nous nous efforcions d’adopter ce rapport dès ce soir — je crois comprendre qu’il y a entente à cet égard — afin que nous puissions recevoir une réponse officielle de la part de la ministre le plus tôt possible. Merci.
[Français]
L’honorable René Cormier : Premièrement, j’aimerais féliciter le comité de ce rapport essentiel, formidable et fondamental pour l’avenir du service extérieur du gouvernement du Canada. J’ai lu le rapport avec attention, notamment la recommandation no 6, qui dit ce qui suit :
Dans les dossiers de politique étrangère qui font intervenir de multiples ministères et organismes fédéraux, le gouvernement du Canada devrait indiquer clairement le rôle de chacun, y compris le ministère ou l’organisme qui doit assurer la coordination ou la responsabilité à l’égard des politiques. Le gouvernement du Canada devrait aussi déterminer le rôle que les missions du Canada à l’étranger peuvent jouer dans le traitement des dossiers clés de politique étrangère et de politiques relatives au commerce et au développement international.
J’ai relu récemment le rapport du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international sur la diplomatie culturelle. J’y vois de grandes affinités sur le plan de l’identification des problèmes et des objectifs.
Sénateur Harder, croyez-vous que, dans l’étude que le gouvernement fera de ce rapport, il devrait y intégrer aussi des éléments qui appartiennent au rapport si important que votre comité a produit sur la diplomatie culturelle?
[Traduction]
Le sénateur Harder : Merci beaucoup de cette question. Permettez-moi de dire d’emblée que j’ai beaucoup apprécié le rapport précédent sur la diplomatie culturelle et que je félicite le comité pour son travail. Lorsque j’étais sous-ministre des Affaires étrangères sous trois gouvernements, la diplomatie culturelle était un aspect important de la manière dont le Canada se projette et exerce son influence.
Ce rapport porte davantage sur la plomberie du ministère, si je puis m’exprimer ainsi. Il est toutefois certain que la diplomatie culturelle est un outil que nous devrions adopter et sur lequel le rapport s’appuie à la suite de l’étude qui a été menée par notre comité et à laquelle vous avez fait référence.
L’honorable Peter M. Boehm : Je propose l’adoption du rapport.
Son Honneur la Présidente : Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?
Des voix : Le vote!
Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?
Des voix : D’accord.
(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)
[Français]
La sanction royale
Son Honneur la Présidente informe le Sénat qu’elle a reçu la communication suivante :
RIDEAU HALL
Le 19 mars 2024
Madame la Présidente,
J’ai l’honneur de vous aviser que la très honorable Mary May Simon, gouverneure générale du Canada, a octroyé la sanction royale par déclaration écrite aux projets de loi mentionnés à l’annexe de la présente lettre le 19 mars 2024 à 18 h 04.
Veuillez agréer, Madame la Présidente, l’assurance de ma haute considération.
Secrétaire du gouverneur général,
Ken MacKillop
L’honorable
La Présidente du Sénat
Ottawa
Projets de loi ayant reçu la sanction royale le mardi 19 mars 2024 :
Loi relative à l’apprentissage et à la garde des jeunes enfants au Canada (projet de loi C-35, chapitre 2, 2024)
Loi portant mise en œuvre de l’Accord de libre-échange entre le Canada et l’Ukraine de 2023 (projet de loi C-57, chapitre 3, 2024)
[Traduction]
Le Sénat
Motion concernant un retrait possible de l’Alberta du Régime de pensions du Canada—Suite du débat
L’ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Simons, appuyée par l’honorable sénatrice Greenwood,
Que le Sénat du Canada :
1.demande à l’actuaire en chef du Bureau du surintendant des institutions financières de publier une étude actuarielle portant sur :
a)un retrait possible de l’Alberta du Régime de pensions du Canada (RPC), y compris une analyse de la viabilité du RPC après un tel retrait par l’Alberta;
b)une estimation raisonnable du coût de sortie de la part de l’Alberta dans le fonds du Régime de pensions du Canada;
c)toute autre information que l’actuaire en chef juge pertinente dans le cadre de l’étude de cette question;
2.demande au Bureau du directeur parlementaire du budget d’étudier la possibilité que l’Alberta se retire du RPC, y compris les répercussions fiscales et/ou économiques d’un tel retrait du RPC sur les Canadiens.
L’honorable Paula Simons : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet de la motion no 172, qui propose que le Sénat du Canada demande à l’actuaire en chef du Bureau du surintendant des institutions financières de publier une étude actuarielle portant sur :
a) un retrait possible de l’Alberta du Régime de pensions du Canada (RPC), y compris une analyse de la viabilité du RPC après un tel retrait par l’Alberta;
b) une estimation raisonnable du coût de sortie de la part de l’Alberta dans le fonds du Régime de pensions du Canada;
c) toute autre information que l’actuaire en chef juge pertinente dans le cadre de l’étude de cette question [...]
La motion demande également au Bureau du directeur parlementaire du budget d’étudier la possibilité que l’Alberta se retire du Régime de pensions du Canada, y compris les répercussions fiscales ou économiques d’un tel retrait du régime sur les Canadiens.
En tant que fière Albertaine et fière Canadienne, je pense que les gens de l’Alberta et les citoyens du Canada ont besoin de l’information la plus exacte, la plus indépendante et la plus impartiale possible sur les conséquences économiques d’un éventuel retrait de l’Alberta du Régime de pensions du Canada.
Il s’agit d’une question d’intérêt national, car le retrait de l’Alberta pourrait avoir de très graves conséquences sur la sécurité et la durabilité du Régime de pensions du Canada. Par ailleurs, l’Alberta est une province où des Canadiens de partout au pays viennent pour travailler et gagner un revenu ouvrant droit à pension. Des habitants de Corner Brook, Charlottetown, Toronto, Tofino, Saskatoon, Saint John, Whitehorse ou Winnipeg ont peut-être travaillé pendant une partie ou la totalité de leur carrière en Alberta et ils ont le droit de savoir ce qui arrivera à leur pension si l’Alberta se retire.
Si l’Alberta se retire du Régime de pensions du Canada, il est fort possible que les personnes qui y ont travaillé pendant une partie ou la totalité de leur vie et qui prennent leur retraite ailleurs au pays deviennent automatiquement inadmissibles au Régime de pensions du Canada. Elles recevraient des prestations du régime de pension proposé de l’Alberta, mais elles n’auraient pas la possibilité de voter dans le cadre d’un référendum qui pourrait avoir une grande incidence sur leur retraite.
Il faut savoir que le Régime de pensions du Canada compte parmi les plus performants au monde. En date du 31 décembre 2023, il valait 590,8 milliards de dollars et son rendement annualisé net sur 10 ans était de 9,3 %, ce qui représente un bénéfice net cumulatif de 319,4 milliards de dollars au cours des 10 dernières années. Dans un récent rapport publié par le site Global Pension Transparency Benchmark, qui évalue les 1 000 principaux régimes de pension au monde, le Régime de pensions du Canada s’est classé au deuxième rang, derrière celui de la Norvège, au chapitre de la transparence globale, du coût et du rendement. En matière de gouvernance, le Régime de pensions du Canada s’est classé au premier rang mondial.
(1840)
La gouvernance du Régime de pensions du Canada est gérée conjointement par les provinces et le gouvernement fédéral. Toutefois, le fonds lui-même est administré par un conseil indépendant. Aucun premier ministre, ministre des Finances ou groupe de premiers ministres provinciaux ne peut intervenir dans ses décisions d’investissement, et il est plus difficile de changer cette structure gouvernementale que de modifier la Constitution. En effet, il faudrait le consentement des deux tiers des provinces qui représentent les deux tiers de la population canadienne.
L’Office d’investissement du Régime de pensions du Canada est un acteur international majeur, qui possède des bureaux à Londres, au Luxembourg, à Bombay, à Hong Kong, à New York, à San Francisco, à São Paulo et à Sydney. Son objectif n’est pas de réaliser les rêves politiques ou les ambitions commerciales de qui que ce soit. D’ailleurs, seuls 14 % des actifs du fonds sont investis au Canada. La stratégie consiste à placer nos œufs dans le plus grand nombre de paniers possible.
Le RPC est également entièrement transférable. Il permet aux gens de chercher du travail dans n’importe quelle province, sachant que leur pension les suivra où qu’ils déménagent. Grâce à cette sécurité, une personne qui travaille à Edmonton peut accepter du travail à Ottawa. Une personne qui vit à Glace Bay peut se rendre fréquemment à Fort McMurray en avion pour y travailler. Une personne qui vit à Grande Prairie peut prendre sa retraite à Kelowna. Cette transférabilité n’aide pas seulement les travailleurs. Elle aide les employeurs à recruter les talents dont ils ont besoin n’importe où au pays et à s’adapter rapidement aux pénuries de main-d’œuvre en période d’essor économique.
En fait, on pourrait appeler le RPC l’arme secrète de l’Alberta. Nulle province au sein de la Confédération ne tire plus d’avantages de ce régime que l’Alberta, puisqu’il permet aux entreprises de cette province de faire venir du personnel au moment et à l’endroit où elles en ont besoin. C’est peut-être la raison pour laquelle le RPC est si populaire dans l’ensemble du Canada et en Alberta. Selon les résultats d’un sondage de Bruce Anderson et spark*advocacy publié à la fin du mois dernier, 88 % des Canadiens, dont 81 % des Albertains, estiment qu’il faut maintenir le Régime de pensions du Canada à l’échelle nationale.
Dans ce cas, pourquoi l’Alberta propose-t-elle de se retirer de ce régime de pension qui fonctionne pourtant très bien et qui a une si bonne réputation?
Certains Albertains soutiennent que nous versons un montant disproportionné au régime de pension national et que nous ne recevons pas notre juste part en retour. Il est vrai que, globalement, année après année, les Albertains versent plus d’argent au Régime de pensions du Canada qu’ils n’en reçoivent. Toutefois, cela s’explique par le fait que notre province a une population jeune avec de nombreux jeunes travailleurs, un taux de participation à la population active extrêmement élevé et des salaires supérieurs à la moyenne et, bien sûr, par le fait que, bien souvent, les personnes âgées de l’Alberta partent à la retraite dans des régions plus chaudes du Canada.
La province compte tout simplement plus de travailleurs et moins de retraités, ce qui ne veut pas dire que le régime est injuste. Chaque Albertain touchera les prestations auxquelles il a droit quand il prendra sa retraite, où qu’il la prenne. La plupart des Albertains toucheront individuellement des pensions plus importantes parce qu’ils auront gagné plus de revenus ouvrant droit à pension.
Et puis, bien sûr, il y a les Albertains qui pensent que nous devrions avoir notre propre régime de retraite, propre à l’Alberta, pour qu’elle puisse l’utiliser pour diriger les investissements vers son secteur énergétique, à un moment où les entreprises d’extraction de ressources ont de plus en plus de mal à attirer des capitaux d’investissement internationaux. On peut se demander si la microgestion d’un fonds de pension pour soutenir une industrie précise en difficulté est la meilleure façon de protéger les retraites des Albertains, surtout si on la compare à la stratégie globale du Régime de pensions du Canada.
Enfin, certains Albertains veulent que nous nous retirions du Régime de pensions du Canada par principe, quels qu’en soient les coûts économiques, une sorte de geste symbolique qui exprime l’autonomie de l’Alberta. Ils estiment qu’un régime de pensions de l’Alberta est le premier pas vers la souveraineté-association, voire la séparation. Pour eux, il ne s’agit pas d’un argument économique ou logique. Il s’agit d’indépendance politique et d’identité culturelle.
Dans ce contexte, en septembre dernier, le gouvernement de l’Alberta a publié un rapport rédigé par des experts-conseils qui décrit la manière dont l’Alberta pourrait mettre en place son projet de régime de pensions autonome. Selon les conclusions du rapport, sur la base d’une lecture littérale de la loi, l’Alberta avait le droit de retirer 117 % de la valeur totale des actifs du Régime de pensions du Canada. Oui, j’ai bien dit 117 %.
Cependant, les experts-conseils ont reconnu qu’un tel plan, qui consiste à retirer plus d’argent qu’il n’y en avait dans le fonds, était probablement irréaliste. En guise de compromis, ils ont proposé une lecture qui donnerait à l’Alberta le droit d’obtenir 53 % des actifs totaux du fonds, soit 334 milliards de dollars. À titre d’information, cela représente évidemment plus de la totalité des revenus du fonds au cours des dix dernières années.
En se fondant sur cette prémisse provocatrice et sur l’hypothèse que la population de l’Alberta demeurera plus jeune que la moyenne nationale, le rapport prédit que les travailleurs et les employeurs de l’Alberta cotiseront moins à un régime de pensions géré par l’Alberta qu’ils ne le font actuellement au Régime de pensions du Canada, tout en touchant des pensions plus élevées que celles des autres Canadiens lorsqu’ils prendront leur retraite. En se fondant sur ces hypothèses très précises, les consultants ont estimé qu’un régime de pensions géré par l’Alberta pourrait permettre aux hauts salariés de la province d’économiser jusqu’à 1 400 $ par année. Cependant, le rapport ne précise pas combien les salariés albertains à revenu moyen ou faible pourraient économiser. Toutefois, ces économies potentielles reposent bel et bien sur un modèle qui permettrait à l’Alberta de retirer plus de la moitié de la valeur totale du Régime de pensions du Canada au moment de son retrait.
Les Albertains se sont fait dire qu’ils auront l’occasion de voter dans le cadre d’un référendum sur la création d’un régime de pensions géré par l’Alberta. Toutefois, comment peuvent-ils prendre une décision éclairée sans savoir si cette estimation de 53 % et les projections qui en découlent sont plausibles? De plus, comment peuvent-ils, en leur âme et conscience, prendre une décision sans comprendre les répercussions de leur retrait sur leurs concitoyens canadiens?
C’est pourquoi, en décembre dernier, j’ai donné avis de cette motion, qui demande au Bureau de l’actuaire en chef de préparer un rapport visant à répondre à ces questions.
Le Bureau de l’actuaire en chef est une unité indépendante au sein du Bureau du surintendant des institutions financières. Même si l’actuaire en chef, Assia Billig, relève du surintendant, elle est la seule responsable du contenu de ses rapports et des opinions actuarielles qu’elle y formule.
Le Bureau de l’actuaire en chef a été créé pour fournir des services actuariels et autres au gouvernement du Canada ainsi qu’aux gouvernements provinciaux, qui sont des parties prenantes du Régime de pensions du Canada. Étant donné que le bureau ne fait pas partie de l’appareil gouvernemental, il est conçu pour être impartial et indépendant.
Je suis heureuse de pouvoir dire que les choses ont quelque peu progressé depuis que j’ai inscrit la motion au Feuilleton. Le mois dernier, Mme Billig, qui se trouve à être titulaire d’un doctorat en mathématiques de l’Université de l’Alberta, a mis sur pied un comité d’experts composé de cinq actuaires indépendants, qui ont été chargés d’examiner le libellé juridique et technique quelque peu litigieux de la Loi sur le Régime de pensions du Canada, puis de présenter leurs propres analyses et évaluations concernant la juste part du fonds qui devrait revenir à l’Alberta. Ce groupe de cinq personnes est censé terminer son travail au cours du printemps. L’actuaire en chef présentera ensuite son propre rapport à la fin de l’automne.
Compte tenu de ces développements, la motion dont nous sommes saisis peut maintenant sembler superflue. Or, la motion no 172 va plus loin qu’établir simplement la part qui revient à l’Alberta. Elle demande explicitement une analyse de la viabilité du RPC après le retrait de l’Alberta, en plus de confier à l’actuaire en chef le pouvoir de faire rapport de toute autre question qu’elle juge pertinente. De plus, ce dossier évolue en grande partie de manière discrète, dans les coulisses, loin des yeux du public. Vu l’importance de la question, je crois qu’il est important, voire essentiel, que nous soyons transparents et que nous rendions publics cette demande et le rapport qui en découlerait.
En tant que sénateurs, nous représentons notre province et notre région. Si le Sénat indépendant demande lui-même un tel rapport, cela n’a pas le même poids que si un gouvernement qui participe aux négociations le demande.
La motion no 172 demande en outre au directeur parlementaire du budget, un mandataire indépendant du Parlement, de préparer son propre rapport indépendant distinct concernant les possibles répercussions de l’éventuel retrait de l’Alberta du RPC sur le ministère fédéral des Finances et les finances du gouvernement en général. Cela n’est pas superflu. Je ne demande pas au directeur parlementaire du budget de produire une analyse rivale ou distincte de la part qui revient à l’Alberta. Ce travail revient comme il se doit à l’actuaire en chef, qui disposera des ensembles de données les plus complets à cette fin.
Cependant, la viabilité future du Fonds du Régime de pensions du Canada n’aurait pas seulement une incidence sur les pensionnés. Le fait de priver le fonds de plus de la moitié de ses actifs et de réduire ainsi son influence sur les marchés internationaux pourrait avoir des conséquences économiques considérables pour le pays et le gouvernement fédéral, surtout si Ottawa doit alors intervenir pour protéger les régimes de retraite des habitants des autres provinces. C’est pourquoi je pense que le directeur parlementaire du budget devrait publier son propre rapport indépendant sur cette question.
J’espère que vous vous joindrez à moi pour formuler cette demande, et ce, en temps opportun. Les Albertains ont besoin de données précises, indépendantes et objectives avant de prendre cette décision capitale, tout comme les autres Canadiens d’ailleurs.
Merci. Hiy hiy.
L’honorable Karen Sorensen : Accepteriez-vous de répondre à une question, sénatrice Simons?
La sénatrice Simons : Je serais heureuse de le faire.
La sénatrice Sorensen : Je suis Albertaine et j’habite dans l’une des principales destinations touristiques du Canada. Il y a beaucoup de gens d’autres régions du pays qui viennent vivre et travailler en Alberta pendant la saison touristique, puis qui retournent vivre dans leur province pendant le reste de l’année.
(1850)
Si l’Alberta se retirait du Régime de pensions du Canada et créait son propre régime, quelle serait, selon vous, sa capacité à attirer des travailleurs saisonniers?
La sénatrice Simons : Je vous remercie de votre excellente question. Je dois avouer que pendant que je rédigeais mon discours, c’est plutôt aux travailleurs du secteur pétrolier et gazier que je pensais, mais vous avez tout à fait raison. Comme je l’ai dit, la formule magique de l’Alberta réside en partie dans sa capacité à attirer des travailleurs lorsqu’elle en a besoin, et ces travailleurs savent que leurs pensions sont transférables. Les employeurs savent qu’ils n’ont pas à créer un autre régime de pensions.
Je pense que c’est une question tout à fait cruciale pour les travailleurs saisonniers, afin que Banff, Jasper et d’autres parcs nationaux et sites touristiques puissent attirer des travailleurs. En fait, cela peut avoir une incidence sur les travailleurs agricoles saisonniers, y compris ceux qui viennent de l’étranger, car à l’heure actuelle, le Régime de pensions du Canada a conclu des ententes avec 70 pays étrangers, je crois, pour harmoniser les régimes de pension, et le régime de pensions de l’Alberta ne pourrait pas offrir la même chose, du moins pas au début.
L’honorable Donna Dasko : La sénatrice Simons accepterait-elle de répondre à une autre question?
La sénatrice Simons : Volontiers.
La sénatrice Dasko : Monsieur le sénateur, vous avez mentionné qu’environ 80 % des Albertains sont en faveur d’un système national pour le Régime de pensions du Canada, mais il y a aussi le chiffre de 53 % qui circule et celui des 117 % du régime qui reviendraient à l’Alberta. Y a-t-il des raisons de penser que les Albertains vont croire à la désinformation qui est présentée au moyen de ces chiffres? Ils sont tellement incroyables que personne ne pourrait les croire. Pourtant, comme nous le savons, si une chose est répétée à maintes reprises, elle risque d’être crue par le public.
Avez-vous le sentiment que les Albertains pourraient en venir à croire ce genre de chiffres, qui me semblent évidemment absurdes? Merci.
Son Honneur la Présidente : Sénatrice Simons, le temps dont vous disposiez est écoulé. Voulez-vous plus de temps pour répondre à la question?
La sénatrice Simons : J’aimerais bien demander cinq minutes de plus, mais je suis consciente que je retarde le souper des sénateurs.
Son Honneur la Présidente : Est-ce que l’on consent à ce que la sénatrice Simons réponde à la question de la sénatrice Dasko?
Des voix : D’accord.
La sénatrice Simons : Le gouvernement de l’Alberta s’est engagé dans une campagne de communication extrêmement sophistiquée pour tenter d’expliquer aux Albertains pourquoi il pense qu’un régime de retraite albertain est viable. Toutefois, il a été difficile d’obtenir des données de sondage cohérentes et, comme vous le savez, les résultats des sondages dépendent de la manière dont on pose la question.
J’ai lu aujourd’hui un article dans mon ancien journal, l’Edmonton Journal, où l’on raconte que le journal a tenté de déposer une demande d’accès à l’information pour obtenir certains documents issus des tables rondes et des journées portes ouvertes organisées par le gouvernement. Le gouvernement a refusé de divulguer ces documents en prétendant que ces séances de questions-réponses constituent des conseils au gouvernement et qu’elles doivent donc rester confidentielles.
Selon moi, si les Albertains disposaient d’informations exactes sur ce que ce régime de retraite obtiendrait réellement en matière d’actifs de départ, leur réaction serait très différente, car on leur dit qu’ils obtiendront automatiquement 53 % du fonds. C’est pourquoi je pense qu’il est absolument essentiel que nous obtenions ces informations le plus rapidement possible, afin que les Albertains puissent se faire leur propre opinion sur la base de données objectives.
(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)
Le centième anniversaire de la Loi d’exclusion des Chinois
Interpellation—Suite du débat
L’ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur l’interpellation de l’honorable sénateur Woo, attirant l’attention du Sénat sur le 100e anniversaire de la Loi d’exclusion des Chinois, sur les contributions que les Canadiens d’origine chinoise ont apportées à notre pays et sur la nécessité de combattre les formes contemporaines d’exclusion et de discrimination auxquelles sont confrontés les Canadiens d’origine asiatique.
Son Honneur la Présidente : J’informe le Sénat que, si l’honorable sénateur Woo prend la parole maintenant, son intervention aura pour effet de clore le débat sur cette interpellation.
(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)
Pêches et océans
Autorisation au comité de reporter la date du dépôt de son rapport final sur l’étude des populations de phoques et de déposer son rapport auprès du greffier pendant l’ajournement du Sénat
L’honorable Bev Busson, conformément au préavis donné le 27 février 2024, propose :
Que, nonobstant l’ordre du Sénat adopté le mardi 7 novembre 2023, la date du rapport final du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans concernant son étude sur les populations de phoques au Canada soit reportée du 31 mars 2024 au 30 juin 2024;
Que le comité soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer auprès du greffier du Sénat son rapport portant sur cette étude, si le Sénat ne siège pas à ce moment-là, et que ledit rapport soit réputé avoir été déposé au Sénat.
Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?
Des voix : D’accord.
(La motion est adoptée.)
(À 18 h 57, le Sénat s’ajourne jusqu’à 14 heures demain.)