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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 44e Législature
Volume 153, Numéro 198

Le mardi 7 mai 2024
L’honorable Raymonde Gagné, Présidente


LE SÉNAT

Le mardi 7 mai 2024

La séance est ouverte à 14 heures, la Présidente étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

La greffière du Sénat

La nomination de Shaila Anwar

Son Honneur la Présidente : J’ai l’honneur d’informer le Sénat qu’une commission sous le grand sceau a été confiée à Shaila Anwar, la nommant greffière du Sénat et greffière des Parlements.

(Un greffier au Bureau donne lecture de la commission.)

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, en mon nom et au nom de mes collègues du bureau du représentant du gouvernement, j’aimerais souhaiter la bienvenue à Shaila Anwar en tant que nouvelle greffière du Sénat et greffière des Parlements.

[Français]

Mme Anwar n’est pas étrangère à la Chambre rouge. Elle y a occupé pendant plus de 15 ans des fonctions allant de greffière à la procédure à greffière principale. Elle est également une experte parlementaire très respectée.

[Traduction]

Les sénateurs qui sont ici depuis bien plus longtemps que moi et qui ont siégé à des comités dont elle était la greffière m’ont dit qu’ils savaient tout de suite qu’ils étaient entre de bonnes mains. Mme Anwar était toujours bien préparée et elle s’informait à l’avance au sujet des témoins et des besoins de tous les membres des comités. Ceux qui ont travaillé avec elle, qu’il s’agisse des préposés aux comités ou des interprètes, ont admiré son professionnalisme et son souci réel pour le bien-être de ceux qui travaillaient avec et pour elle.

[Français]

La nomination de Mme Anwar comme greffière du Sénat et greffière des Parlements est l’aboutissement des fonctions de plus en plus importantes qu’elle a occupées depuis qu’elle a joint le Sénat en 2007. Son expérience des procédures et des pratiques, sa maîtrise des deux langues officielles, son professionnalisme et sa patience nous seront très utiles.

[Traduction]

En tant que greffière du Sénat, elle gérera les activités quotidiennes du Sénat et elle soutiendra tous les aspects du processus législatif, de l’assermentation des nouveaux sénateurs à la prestation de conseils à Son Honneur sur la procédure parlementaire et l’interprétation du Règlement du Sénat.

Nous avons la chance d’accueillir une personne qui convient parfaitement à ce poste pour de nombreuses raisons, dont la moindre n’est pas sa connaissance de la Chambre rouge et l’affection sincère qu’elle lui porte.

Bienvenue, Mme Anwar. Nous avons tous hâte de travailler avec vous.

Des voix : Bravo!

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, mes collègues conservateurs et moi-même voudrions également souhaiter la bienvenue à Shaila Anwar et la féliciter officiellement pour sa nomination à titre de 17e greffier du Sénat et greffier des Parlements.

(1410)

Bien qu’il s’agisse de son premier jour de séance au Sénat dans ses nouvelles fonctions, Shaila — comme on l’a déjà dit — n’est pas inconnue au Sénat, pas plus qu’elle n’est inconnue pour qui que ce soit dans cette enceinte. Tout d’abord, elle s’est jointe à la famille du Sénat en tant que greffière à la procédure il y a 17 ans — c’est-à-dire avant la plupart d’entre nous, à l’exception peut-être de quatre sénateurs. Son éthique de travail et son dévouement ont été rapidement reconnus, et petit à petit — peut-être devrais-je plutôt dire heure après heure de dur labeur —, elle a gravi les échelons jusqu’à la fonction qu’elle occupe aujourd’hui.

Shaila dit souvent que sa formation professionnelle et son éthique de travail remontent à l’époque où elle travaillait au restaurant de sa famille. Cette expérience l’a obligée à faire preuve de créativité, lui a appris à ne pas avoir peur de faire de longues heures de travail et lui a donné l’occasion, dès son plus jeune âge, d’effectuer plusieurs tâches à la fois et de reconnaître intuitivement les priorités. Ses parents ont tout lieu d’être fiers et je suis heureux de constater qu’ils sont présents ici aujourd’hui. Nous devons beaucoup de gratitude aux parents de Shaila qui ont élevé une fille vraiment formidable.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Plett : Deuxièmement, Shaila est bien connue de tous au Sénat car elle s’est efforcée de tisser des liens étroits avec bon nombre d’entre nous. En fait, nous sommes sûrement nombreux à la considérer comme une amie très proche. Les sénateurs, les employés et le personnel de l’Administration peuvent compter sur Shaila pour obtenir des conseils sur la manière de travailler au Sénat. Chers collègues, cela en dit long sur la personne qui sera maintenant à la tête de l’Administration du Sénat.

Shaila, je suis heureux que votre réputation, votre dévouement et votre travail assidu au fil des ans aient été reconnus à leur juste valeur.

La semaine dernière, certains d’entre nous ont décidé en toute connaissance de cause que le greffier sortant devrait être ici au moins jusqu’après minuit. Aujourd’hui, je vous promets, Shaila, que certains d’entre nous feront leur possible pour que vous restiez également ici jusque tard dans la nuit ou jusqu’aux petites heures du matin.

Shaila, en mon nom et au nom de l’opposition officielle, je vous souhaite du succès dans vos nouvelles fonctions. Vous allez réussir.

Merci.

Des voix : Bravo!

[Français]

L’honorable Raymonde Saint-Germain : C’est un privilège pour moi de saluer aujourd’hui la nomination de la plus haute responsable administrative de notre institution, la greffière du Sénat et greffière des Parlements, Mme Anwar.

C’est une nomination au mérite. Mme Anwar a franchi tous les échelons au sein du Sénat depuis 2007, quand elle a entrepris sa carrière en tant que greffière à la procédure. En 2016, elle a été promue greffière principale adjointe des comités sénatoriaux et, en 2021, elle a obtenu le poste de greffière principale à la Direction des comités du Sénat.

Tout au long de cette carrière, elle a montré tout son mérite par sa compétence, sa connaissance des règles et des procédures, son intime connaissance de cette institution et sa compréhension de sa culture et de son fonctionnement.

Maintenant qu’elle est à la barre de notre institution, dans une structure où nous nous efforçons également de nous adapter aux contextes contemporains, elle sera notre unique greffière; cette fine connaissance et cette expertise lui seront vraiment utiles pour continuer de nous conseiller, notamment sur le plan procédural, mais aussi de superviser toutes les exigences administratives auxquelles fait face notre institution.

De plus, et je tiens à le souligner, ce n’est pas la moindre de ses qualités qui font qu’elle mérite d’occuper cette fonction, car son impartialité est extrêmement importante pour la confiance que nous devons tous avoir en notre greffière. Il faut faire preuve d’une grande subtilité au sein de notre institution. Je sais qu’elle saura faire la part des choses entre son impartialité envers le Sénat du Canada et les sénateurs et sa partialité autorisée à l’endroit des Sénateurs d’Ottawa. Elle a assisté à tous les matchs des séries éliminatoires depuis 2020. Pour son sens des nuances, je lui fais confiance.

[Traduction]

Tous les membres du Groupe des sénateurs indépendants se joignent à moi pour partager la fierté de sa famille — son père, Feroze; sa mère, Masuda; et son frère, Tariq — à l’occasion de cette nomination plus que bien méritée.

Félicitations, Shaila!

L’honorable Scott Tannas : Honorables sénateurs, nous avons enfin une nouvelle greffière nommée pour un mandat complet que nous accueillons avec plaisir, comme une bouffée d’air frais. Pendant de nombreuses années, le Sénat a eu une série de greffiers qui ont occupé le poste à titre intérimaire — ce n’est plus le cas. Bien que ces personnes soient très compétentes et aient accompli un excellent travail, c’est une bonne chose pour les sénateurs et l’Administration du Sénat que le poste d’agente administrative principale soit pourvu de manière permanente.

Le Groupe des sénateurs canadiens souhaite la bienvenue à Shaila Anwar, nommée 17e greffière du Sénat. Comme elle s’intéresse aux affaires parlementaires depuis sa jeunesse, il n’est pas difficile de croire qu’elle était destinée à travailler dans cette enceinte. Son arrivée ici s’est faite dans la précipitation. Lorsqu’elle a été contactée pour devenir greffière de procédure, on lui a demandé de commencer dès la semaine suivante parce que le Sénat avait besoin d’un greffier pour une réunion immédiate du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles — un baptême du feu dans le contexte du Sénat. Shaila s’est montrée à la hauteur de la tâche, a gravi les échelons de l’Administration du Sénat et a su faire face à des conjonctures difficiles.

Si on veut savoir ce qui se passe ou si on a besoin de quelque chose, on appelle Shaila. Le Sénat est un milieu de travail unique et il importe d’attirer des gens de talent. Il importe également, sinon plus, de cultiver et de promouvoir ce talent de l’interne.

Certains diront peut-être que le poste de greffière au Sénat est le sommet de la carrière de Shaila, mais ceux qui la connaissent aussi bien que moi croient qu’il s’agit seulement d’un tremplin pour son autre ambition, celle qui consiste à gérer un jour les autres Sénateurs d’Ottawa.

En mon nom et au nom de mes collègues du Groupe des sénateurs canadiens, je vous félicite Shaila. Bonne chance.

Des voix : Bravo!

L’honorable Pierre J. Dalphond : Honorables sénateurs, au nom du Groupe progressiste du Sénat, je suis heureux de me joindre aux autres leaders pour féliciter Mme Shaila Anwar de sa nomination au poste de greffière du Sénat et greffière des Parlements.

[Français]

Elle occupera une fonction très importante et dans la nouvelle structure qui est mise en place, la fonction la plus importante de notre administration.

[Traduction]

Je ne crois pas qu’il nous faudra beaucoup de temps pour nous adapter au changement au Bureau, et je suis heureux que nous puissions continuer à être bien servis lorsque nous demanderons des conseils sur les trois P : la procédure, la pratique et la politique.

[Français]

Vous occuperez donc la plus haute fonction de notre administration, où vous avez montré au fil des ans des habiletés considérables, de grandes connaissances et une grande disponibilité.

Je me souviens d’avoir discuté avec vous un jeudi soir, bien après 22 heures, alors que je croyais que j’étais le dernier dans l’édifice, d’un point qui avait trait à l’administration. Vous étiez toujours là, près du salon de lecture, et vous avez dit : « Sénateur Dalphond, il y a tel point dont on n’a pas parlé au Comité de la régie interne dernièrement. » J’avoue que votre dévouement au travail me dépasse.

[Traduction]

J’espère seulement que nous ne vous décevrons pas autant que les autres sénateurs. Nous pourrions peut-être envisager d’ajouter un banc des punitions au Sénat. Après tout, nous voyons beaucoup de patinage ici, et parfois des jeux nuls.

Sérieusement, vous vous êtes imposée comme une experte de tout ce qui touche le Sénat, et je suis ravi que vous puissiez continuer à nous faire profiter de votre sagesse dans le cadre de ce nouveau rôle important.

[Français]

Au nom des membres du Groupe progressiste du Sénat, je vous félicite encore une fois. Nous sommes ravis de continuer de travailler avec vous. Merci.

(1420)

[Traduction]

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de membres de la famille de Mme Anwar, y compris sa mère, Masuda, son père, Feroze, et son frère, Tariq. Ils sont accompagnés de quelques amis, y compris Heather Lank, bibliothécaire parlementaire, et Cathy Piccinin, ancienne greffière adjointe au Bureau de la procédure et des travaux de la Chambre.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!


DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Postes Canada—Les services offerts aux collectivités rurales

L’honorable Pamela Wallin : Honorables sénateurs, dans un village, le bureau de poste est un endroit où l’on s’informe de l’actualité locale ou des potins les plus récents, où l’on consulte les avis de décès pour en aviser la famille, où l’on envoie un colis surprise à un petit-enfant ou où l’on passe prendre cette carte de fête des Mères tant attendue.

Il s’agit à la fois d’un lieu de rassemblement et d’un panneau d’affichage communautaire. Autrement dit, c’est l’équivalent de Facebook pour les personnes qui n’ont pas de téléphone intelligent. Compte tenu de la hausse des coûts, les préoccupations des collectivités rurales pour l’avenir s’accentuent alors que le gouvernement fédéral envisage une fois de plus de réduire les services et de fermer des bureaux de poste.

Postes Canada vient d’enregistrer des pertes de 748 millions de dollars, ce qui est supérieur aux pertes de 548 millions de dollars déclarées l’an dernier. En fait, la société n’a réalisé aucun profit depuis 2017. Évidemment, une nouvelle hausse des tarifs est prévue. Il en coûtera 99 ¢ pour envoyer une lettre ailleurs au pays et près de 3 $ pour en envoyer une à l’étranger.

Postes Canada dit que le volume de courrier traité a diminué de 50 %, mais que le nombre d’adresses servies a augmenté de 3 millions. Nous savons tous que le monde évolue et que de telles pertes ne sont manifestement pas viables. Toutefois, on parle ici d’un service essentiel pour les Canadiens qui vivent en milieu rural, où les services Internet sont médiocres et où tout est à une distance considérable. On ne peut faire subir un autre coup dur à ces Canadiens.

Plus de 50 % des collectivités n’ont déjà aucune forme de comptoir postal. Je dois faire 25 minutes de route en voiture pour aller chercher mon courrier. Nous avons vu des bureaux de poste convertis en franchises ou être remplacés par de grosses boîtes aux lettres communautaires au bord de la route, dont les intempéries limitent souvent l’accès.

En 1994, Ottawa a imposé un moratoire sur les fermetures de bureaux de poste ruraux face au tollé soulevé par les Canadiens en réponse à la fermeture de plus de 1 700 bureaux de poste.

L’année dernière, j’ai posé une question concernant de nouvelles enquêtes menées par Postes Canada au sujet de la fermeture de bureaux de poste ruraux et les efforts de la société pour tenter de redéfinir le terme « rural » de façon à pouvoir contourner les règles. J’ai fait part de préoccupations similaires lorsque notre journal local, le Wadena News, a fermé ses portes. Ottawa a pratiquement cessé d’acheter des publicités dans les petits journaux et, par conséquent, de nombreuses collectivités ont perdu la possibilité de s’exprimer.

Il faut donc un engagement du gouvernement; il s’agit de décisions qui sont prises par le Cabinet. Il faut une modernisation, mais cela ne passe pas nécessairement par des fermetures, des suppressions d’emplois et l’élimination de services.

Je vous en prie, ne convertissez pas nos bureaux de poste en logements pour tenter de répondre aux problèmes créés par une politique d’immigration malavisée, d’imposer votre vision urbanocentriste au reste du monde ou de financer les échecs d’une société d’État aux dépens des Canadiens des régions rurales.

Des voix : Bravo!

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Levi Gitlin, qui a 10 ans et qui est venu aujourd’hui accompagné de ses parents. Ils sont les invités de l’honorable sénateur Arnot.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Santé des enfants Canada

L’honorable Rosemary Moodie : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour saluer la délégation de Santé des enfants Canada et des Directeurs de pédiatrie du Canada, dont les membres sont sur la Colline du Parlement cette semaine pour réclamer des changements transformateurs afin d’améliorer les résultats en matière de santé des enfants au Canada.

En ma qualité de présidente du Caucus multipartite sur la santé des enfants, je suis consciente qu’il est urgent d’aller au-delà des solutions de fortune pour résoudre la crise dans le domaine de la santé physique et mentale des enfants et des jeunes. Il est temps que nous élevions la santé et le bien-être des enfants au rang de priorité nationale. Les solutions de bric et de broc à courte vue mises en œuvre sans uniformité d’une province à l’autre se révèlent insuffisantes. Nous devons prendre des mesures décisives et collectives.

Le nouveau rapport de Santé des enfants Canada, intitulé Au-delà des solutions de fortune : fournir des soins de santé dignes des enfants, présente des mesures que le Canada peut prendre pour améliorer de manière mesurable et équitable les résultats en matière de santé pour tous les enfants au Canada.

En clair, chers collègues, le statu quo n’est pas une option. Notre approche traditionnellement fragmentée et compartimentée pour répondre aux besoins complexes des enfants, des jeunes et des familles dans le domaine de la santé et dans le domaine social est un renoncement à notre devoir à l’égard de nos enfants, de leurs fournisseurs de soins de santé et — franchement — de l’avenir de notre pays.

Engageons-nous à travailler ensemble à la mise en œuvre de solutions globales et durables réellement transformatrices pour l’avenir des jeunes, des enfants ainsi que de leur famille et, au fond, pour notre avenir collectif. Je vous remercie.

Des voix : Bravo!

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de scientifiques du programme La science rencontre le Parlement. Ils sont les invités des honorables sénateurs Galvez, Seidman, Kutcher et Mégie.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

[Français]

La science rencontre le Parlement

L’honorable Rosa Galvez : Chers collègues, chaque mois de mai, nous accueillons au Parlement des scientifiques de partout au pays dans le cadre du programme La science rencontre le Parlement. Ce programme est une initiative conjointe entre le Centre d’études sur la politique scientifique canadienne et le bureau de la conseillère scientifique en chef, la Dre Mona Nemer, qui vise à renforcer les liens entre les communautés scientifiques et politiques du Canada, à favoriser un dialogue bilatéral et à promouvoir la compréhension mutuelle.

[Traduction]

Au nom des quatre sénateurs co-champions de l’événement — les sénateurs Kutcher, Seidman, Mégie et moi-même —, je tiens à remercier les scientifiques qui ont pris le temps de venir à Ottawa et de rencontrer les décideurs pour transmettre leurs connaissances et leur expérience du monde scientifique et universitaire. Ces échanges sont cruciaux pour l’élaboration de politiques plus efficaces.

Le monde devient de plus en plus complexe et il évolue rapidement, et les politiques que nous adoptons ici au Parlement doivent en tenir compte. L’intelligence artificielle, par exemple, se développe de manière exponentielle, et elle représente à la fois une grande opportunité et un risque pour la société.

Malgré les progrès considérables réalisés dans la prévention des maladies et la mise au point de vaccins, nos systèmes de santé sont mis à rude épreuve. Les changements climatiques ont complètement bouleversé notre relation avec la planète ainsi que notre façon de vivre et de travailler.

Ces questions importantes de notre époque ont toutes été recensées, étudiées et comprises par les scientifiques du monde entier. Les scientifiques, complétés par les connaissances traditionnelles pour une approche plus holistique de la science occidentale, sont également ceux qui peuvent offrir des solutions et des pistes pour un avenir meilleur.

[Français]

Il est de notre responsabilité de veiller à ce que nos décisions politiques s’appuient sur les meilleurs faits et preuves scientifiques disponibles. Cela nécessite une formation continue et un engagement auprès d’experts dans différents domaines. Nous devons être proactifs et rechercher des occasions de nous informer sur les questions importantes qui touchent les Canadiennes et les Canadiens et de nous tenir au courant des derniers développements en matière de science et de technologie.

En entreprenant nos tâches parlementaires, nous devons reconnaître nos biais politiques et tenter d’adopter une approche objective fondée sur les faits.

[Traduction]

Honorables sénateurs, je vous encourage à toujours être en quête de savoir et de science, dans votre propre intérêt et dans celui de tous les Canadiens.

Joignez-vous à nous à la réception La science rencontre le Parlement aujourd’hui, de 16 h 30 à 19 heures — cela dépendra de notre vote et de notre débat —, au Centre Shaw. Vous aurez l’occasion de rencontrer d’incroyables scientifiques canadiens tout en enrichissant vos connaissances.

Merci. Meegwetch.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune d’élèves et de professeurs de l’école élémentaire Kerrisdale de Vancouver, en Colombie-Britannique. Ils sont les invités de l’honorable sénatrice McBean.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

[Français]

La campagne Moose Hide

L’honorable Michèle Audette : [Note de la rédaction : La sénatrice Audette s’exprime en innu-aimun.]

Je remercie le beau peuple anishinabe de nous accueillir encore une fois aujourd’hui.

Chers collègues, je prends la parole aujourd’hui pour vous parler d’une belle campagne que vous connaissez tous et toutes, la campagne Moose Hide, représentée par le morceau d’orignal que nous portons fièrement. La semaine dernière, je vous ai donné des statistiques sur la violence à laquelle font face les femmes, les filles et les personnes autochtones. Nous représentons seulement 5 % de la population canadienne et malheureusement, 24 % d’entre nous sont victimes d’homicides. C’est un fléau que l’on voit partout.

(1430)

Un père et sa fille, lors d’une chasse à l’orignal, ont lancé la campagne Moose Hide en 2011. Il s’agit de la famille Lacerte. Cette belle organisation est dirigée par des hommes autochtones et elle s’adresse à toute la société canadienne — pas juste à nous, mais à tout le monde. C’est un mouvement populaire auquel mon fils, mon conjoint et plein d’autres hommes collaborent. Les femmes sont aussi invitées à faire partie de cette belle initiative dans laquelle tout le monde devrait s’investir, bien sûr. Elle a donné quatre millions d’épinglettes l’an dernier et j’ai appris qu’elle en était déjà à cinq millions cette année. Félicitations à toute l’équipe Moose Hide!

La campagne Moose Hide donne lieu à des cérémonies, des événements et de l’éducation. Le but est surtout de prévenir la violence et de promouvoir la non-violence. Vous avez entendu parler la semaine dernière d’une alerte « robe rouge ». L’alerte « robe rouge » est comme une alerte AMBER, mais pour les femmes et les filles autochtones qui disparaissent. Elle inclut d’autres initiatives communautaires pour lutter contre la violence à laquelle elles font face.

L’archevêque Desmond Tutu a dit ceci un jour :

Il arrive un moment où nous devons cesser de simplement retirer les gens de la rivière. Nous devons aller en amont et découvrir pourquoi ils tombent.

En comprenant les causes profondes de la violence, ces personnes auront la possibilité d’être aidées et pourront aider à créer le changement. C’est quelque chose que je veux, et j’espère que nous le voulons tous et toutes. Le budget faisait mention de la campagne Moose Hide, mais sans indiquer de montant qui lui serait alloué. Je vous encourage donc à la soutenir.

Il faut aller plus loin. Les gouvernements ont une responsabilité, mais les citoyens aussi.

Aujourd’hui, je vois que les choses changent et je suis témoin de ces changements. Je vois une femme qui a été nommée à la présidence du Sénat. Je vois aussi une femme qui a été nommée greffière du Sénat. Pour moi, c’est de la douceur et de la guérison.

Tshinashkumitnau.

[Traduction]

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune d’Ellen Zweibel et Judy Broadbent. Elles sont les invitées de l’honorable sénatrice Omidvar.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Le décès de Peter Showler, C.M. 

L’honorable Ratna Omidvar : Honorables sénateurs, je prends la parole pour rendre hommage à Peter Showler et à ses nombreuses contributions à notre pays.

Peter était professeur de droit, activiste, enseignant, auteur, scénariste, producteur de films en herbe, entraîneur et mentor. Comme vous pouvez le constater, il avait de multiples talents et c’était un grand homme. Il était également l’une des rares personnes à comprendre les subtilités, les complexités et les nombreux tenants et aboutissants du droit des réfugiés.

L’application de la loi aux réfugiés a toujours été au cœur de sa passion. Il a travaillé inlassablement pour que la loi soit appliquée de manière équitable, juste et cohérente. Pour ce faire, il a cherché activement des occasions d’œuvrer tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du système. Il a notamment été président de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada, il a enseigné le droit à l’Université d’Ottawa, il a travaillé pour le Haut‑Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés pendant des missions de formation en Afrique et au Mexique, il a codirigé la Clinique juridique communautaire d’Ottawa et il a cofondé l’Association canadienne des avocats et avocates en droit des réfugiés, dont les membres sont souvent appelés à témoigner devant nos comités. De plus, il s’est débrouillé pour trouver le temps de présider le comité des écrivains en danger de PEN Canada. Sous sa direction, PEN Canada est devenu un partenaire de confiance du programme gouvernemental pour les défenseurs des droits de la personne, qui a réussi à faire venir au Canada de nombreux défenseurs afghans des droits de la personne.

Peter saisissait mieux que quiconque le potentiel que recèlent les récits. Il travaillait sur des scénarios, des émissions de télévision et des romans qui mettaient en scène l’expérience des réfugiés parce qu’il comprenait à quel point les récits personnels peuvent être éloquents et comment ils peuvent changer les cœurs et les esprits.

J’ai rencontré Peter par l’intermédiaire de ma collègue Judy Broadbent — il y a environ 25 ans, je crois — alors qu’elle était présidente de Maytree. Il m’a appris à faire les liens entre l’expérience vécue par les réfugiés et les changements politiques et législatifs. Il a été mon guide et mon mentor à bien des égards. Il a gracieusement accepté d’écrire le dernier chapitre de mon livre, Flight and Freedom, dans lequel il dit que la générosité est une récompense en soi.

Il n’est pas exagéré de dire qu’il m’a enseigné presque tout ce que je sais sur le droit des réfugiés et que je lui dois toute forme de sagesse que je peux apporter au Sénat.

Il y a quelques années, Peter a développé un cancer. En 2023, il a été décoré de l’Ordre du Canada par la gouverneure générale Mary Simon lors d’une cérémonie privée. Il est décédé peu de temps après en ayant recours à l’aide médicale à mourir.

J’aurais bien voulu lui rendre hommage pendant qu’il était encore parmi nous, mais cela a été impossible. Dans une dernière note à PEN Canada, il a dit ce qui suit :

Je suis chanceux [...] Je quitte ce monde avec plus que ma part de bonté humaine et j’en suis reconnaissant.

En fait, Peter, c’est plutôt nous qui devrions être reconnaissants. Je vous remercie ainsi que votre conjointe, Ellen Zweibel, de nous avoir fait bénéficier de votre sagesse, de votre passion et de votre sens de l’humour. Puissiez-vous reposer en paix.

[Français]

La Semaine de la santé mentale

L’honorable Tony Loffreda : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui à l’occasion de la Semaine de la santé mentale. Cette année, l’Association canadienne pour la santé mentale nous rappelle l’importance de la gentillesse et le pouvoir d’apaisement de la compassion.

[Traduction]

Nous avons tous la capacité d’être compatissants et nous savons que cela peut influencer considérablement une situation. La compassion nous permet de nous rapprocher les uns des autres, d’établir un lien de confiance, de renforcer les relations et de cultiver un sentiment d’appartenance.

Une récente étude de l’Association canadienne pour la santé mentale confirme ce que nous savions déjà sur la nature généreuse et compatissante des Canadiens : 76 % d’entre eux affirment que lorsqu’ils voient une personne en difficulté, ils se sentent tenus de l’aider. Cependant, plus de la moitié d’entre eux admettent qu’ils se sentent dépassés par les problèmes et qu’ils ne savent pas trop par où commencer.

Chers collègues, à titre de gestionnaires, nous devons toujours favoriser une culture du travail sécuritaire et compatissante au sein de nos équipes et dans l’ensemble de la communauté du Sénat. L’équipe de Santé, sécurité et mieux-être au travail du Sénat nous encourage à établir une communication ouverte afin que le personnel se sente à l’aise d’exprimer ses opinions, ses préoccupations et ses émotions sans craindre d’être jugé. Dans l’environnement de travail rapide et intense de la Colline, nous oublions parfois de prendre des nouvelles de notre personnel. J’invite tous les sénateurs et les gestionnaires à prendre contact avec leurs employés afin de savoir comment ils vont vraiment. Parler ouvertement de ses problèmes et de ses angoisses peut s’avérer difficile et accablant. Je sais que nous voulons tous que notre personnel s’épanouisse, mais il doit se sentir soutenu, valorisé et, c’est peut-être le plus important, écouté et compris. Il est particulièrement important de soutenir les jeunes Canadiens, qui sont confrontés à des niveaux élevés de stress et à des problèmes de santé mentale.

C’est pourquoi je me réjouis que le gouvernement ait annoncé récemment la création d’un fonds de 500 millions de dollars pour la santé mentale des jeunes.

De nombreux jeunes employés de la Colline ont choisi la politique parce qu’ils se passionnent pour le Canada. Il est essentiel que la santé mentale et le bien-être soient au cœur du milieu de travail que nous leur offrons. Les longues heures de travail et l’imprévisibilité des séances font du Sénat un lieu de travail unique. Les employés du Sénat sont la crème de la crème, mais il est important qu’ils aient un bon équilibre entre leur vie professionnelle et leur vie privée et qu’ils puissent se détendre le soir et la fin de semaine. Cette responsabilité nous incombe.

Honorables sénateurs, pour réduire les sentiments de stress, d’anxiété et de dépression, il nous incombe de faire tous les efforts possibles pour que notre lieu de travail favorise et protège le bien‑être mental de nos employés. L’empathie, la compassion et la compréhension devraient toujours être les principes qui nous guident.

Merci. Meegwetch.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Theresa Pauly et Jessica Wong. Elles sont les invitées de l’honorable sénatrice Deacon (Ontario).

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!


[Français]

AFFAIRES COURANTES

Projet de loi sur la stratégie nationale relative au racisme environnemental et à la justice environnementale

Présentation du septième rapport du Comité de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles

L’honorable Paul J. Massicotte, président du Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles, présente le rapport suivant :

Le mardi 7 mai 2024

Le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles a l’honneur de présenter son

SEPTIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-226, Loi concernant l’élaboration d’une stratégie nationale visant à évaluer et prévenir le racisme environnemental ainsi qu’à s’y attaquer et à faire progresser la justice environnementale, a, conformément à l’ordre de renvoi du 26 octobre 2023, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.

Respectueusement soumis,

Le président,

PAUL J. MASSICOTTE

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion de la sénatrice McCallum, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

(1440)

[Traduction]

La Loi sur les télécommunications

Projet de loi modificatif—Présentation du huitième rapport du Comité des transports et des communications

L’honorable Leo Housakos, président du Comité sénatorial permanent des transports et des communications, présente le rapport suivant :

Le mardi 7 mai 2024

Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications a l’honneur de présenter son

HUITIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-288, Loi modifiant la Loi sur les télécommunications (renseignements transparents et exacts sur les services à large bande), a, conformément à l’ordre de renvoi du 11 avril 2024, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.

Respectueusement soumis,

Le président,

LEO HOUSAKOS

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Martin, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

L’avenir de CBC/Radio-Canada

Préavis d’interpellation

L’honorable Andrew Cardozo : Honorables sénateurs, je donne préavis que, après-demain :

J’attirerai l’attention du Sénat sur l’avenir de CBC/Radio-Canada.


[Traduction]

PÉRIODE DES QUESTIONS

Les affaires mondiales

L’ingérence étrangère

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Monsieur le leader, l’an dernier, à peu près à la même époque, le premier ministre nous a dit qu’une étude secrète du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement était le meilleur moyen d’enquêter sur ce qu’il savait au sujet de l’ingérence de Pékin dans notre démocratie. Il a créé un poste de rapporteur spécial pour retarder la tenue d’une enquête publique et s’est servi de la bonne réputation d’un homme comme bouclier. Cette farce a donné lieu à un rapport qui n’était rien d’autre qu’une opération de camouflage. Sénateur Gold, je ne suis pas le seul à le dire. C’est le Globe and Mail qui le dit.

Selon le rapport initial de la juge Hogue, le premier ministre lui a dit que le retrait de son candidat dans Don Valley-Nord lors des élections de 2019 aurait des conséquences électorales directes, car le Parti libéral s’attendait à remporter cette circonscription. Il le savait et n’a pas agi pour des raisons partisanes. N’est-ce pas exact, sénateur Gold? Il ne vaut pas la démocratie canadienne, n’est-ce pas?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je réponds à votre question par la négative, monsieur le sénateur. Néanmoins, je vous remercie de la soulever.

La protection de notre sécurité nationale contre l’ingérence étrangère doit être une priorité non partisane. Je pense que le rapport provisoire de la juge Hogue a braqué les projecteurs sur certains enjeux. En effet, elle a souligné que l’ampleur de l’ingérence étrangère — même s’il n’y a peut-être pas eu de répercussions sur les résultats des élections précédentes — a eu une incidence négative sur la confiance du public dans l’intégrité de notre système. C’est quelque chose qui nous préoccupe tous et qui doit le faire.

Nous attendons avec impatience la poursuite de ses travaux sur ces enjeux et nous avons hâte de prendre connaissance des recommandations et de l’analyse plus approfondie qui seront présentées dans son rapport final.

Le sénateur Plett : Eh bien, nous sommes tout à fait d’accord que cela devrait être une question non partisane. La juge Hogue a déclaré qu’il y a de solides indicateurs montrant une ingérence de Pékin dans l’élection générale de 2021 en vue de nuire à l’ancien député conservateur Kenny Chiu. Elle a dit qu’il se peut que cette ingérence ait eu des répercussions sur le résultat dans cette circonscription. On sait que M. Chiu a été défait et qu’un candidat libéral a été élu. L’an dernier, le prétendu rapporteur du premier ministre avait écarté tous ces soupçons du revers de la main.

Qui a dit la vérité aux Canadiens, la juge Hogue ou le rapporteur?

Le sénateur Gold : Sénateur, je vous l’ai déjà dit, je n’approuve pas votre façon de qualifier un éminent Canadien qui a fait de son mieux pour servir le Canada.

Il n’en demeure pas moins que le rapport provisoire confirme ce que nous savions déjà et ce dont votre ancien chef, M. O’Toole, avait parlé abondamment au Parlement, ce qui est tout à son crédit. Encore une fois, la présentation de ce rapport est la bienvenue. Nous attendons avec intérêt le rapport final.

L’honorable Leo Housakos : Sénateur Gold, il n’en demeure pas moins que mon projet de loi pour la création d’un registre des agents étrangers est inscrit au Feuilleton depuis février 2022. Il est identique au projet de loi qui a été présenté au cours de la législature précédente par l’ancien député Kenny Chiu. C’est un projet de loi simple que votre gouvernement a laissé languir pendant de nombreuses années. Le sénateur Richards est la seule personne qui a pris la parole à ce sujet. Apparemment, il n’intéresse pas du tout les sénateurs nommés par M. Trudeau, pas plus qu’il n’intéressait le gouvernement Trudeau.

Maintenant, en espérant détourner l’attention des conclusions de la juge Hogue, selon lesquelles votre gouvernement n’a rien fait pour lutter contre l’ingérence étrangère lorsqu’elle avantageait le Parti libéral, vous avez soudainement décidé d’aller de l’avant avec le registre en incluant cette proposition dans votre projet de loi alambiqué.

Sénateur Gold, mon projet de loi visant à créer un registre est très simple. Vous auriez pu le mettre à l’étude. Vous auriez pu le présenter comme un projet de loi du gouvernement lorsque M. Chiu a perdu son siège en raison de l’ingérence de la part de Pékin.

Pourquoi a-t-il fallu autant de temps pour faire le nécessaire afin d’ajouter cette pièce du casse-tête?

Le sénateur Gold : Je vous remercie de la question et de votre travail soutenu dans ce dossier.

Comme je l’ai mentionné à plusieurs reprises dans cette enceinte, le gouvernement envisageait sérieusement la création d’un registre des agents étrangers, et il présente aujourd’hui un projet de loi à cet effet.

La responsabilité du registre visant la transparence en matière d’influence étrangère relèvera d’un commissaire indépendant qui fera la promotion de la transparence auprès des acteurs qui défendent les intérêts d’un commettant étranger, notamment un État étranger ou une entreprise d’État étrangère, et qui exigera que ceux qui n’agissent pas de manière transparente rendent des comptes à ce sujet.

Conformément à ce cadre, les personnes ou les entités qui concluent un accord avec un commettant étranger et exercent des activités visant à influencer un gouvernement ou un processus politique au Canada seraient tenues d’enregistrer publiquement ces activités.

Cette mesure législative est le fruit de consultations et de contributions diverses et elle témoigne du jugement éclairé du gouvernement.

Le sénateur Housakos : Sénateur Gold, cela fait plus de cinq ans. Un projet de loi sur la création d’un registre a été présenté à la Chambre des communes et au Sénat, notre assemblée, mais vous l’avez ignoré.

Sénateur Gold, la juge Hogue a révélé que Justin Trudeau lui a déclaré qu’il n’a rien fait concernant l’ingérence de Pékin dans la circonscription de Han Dong parce qu’il ne voulait pas perdre cette circonscription. C’est ce que le premier ministre a dit. Il a admis avoir fait passer ses propres intérêts électoraux avant les intérêts des Canadiens. Sénateur Gold, pourquoi Justin Trudeau a-t-il fait passer ses intérêts politiques et sa soif de rester au pouvoir avant notre sécurité nationale et l’intégrité de nos élections?

(1450)

Le sénateur Gold : Ce n’est pas une description exacte de ce qui est arrivé. J’admire votre capacité à lire dans les pensées et à prêter des intentions. Le gouvernement a présenté un projet de loi sérieux qui établira un juste équilibre entre la protection de notre sécurité nationale et nos valeurs constitutionnelles. Il le fera d’une manière constitutionnelle, sans invoquer la disposition de dérogation.

L’emploi et le développement social

La prestation canadienne pour les personnes handicapées

L’honorable Kim Pate : Sénateur Gold, les personnes handicapées continuent de nous dire que la prestation canadienne pour les personnes handicapées, qui ne s’élève qu’à 200 $ par mois et qui ne bénéficie qu’à certaines d’entre elles, est nettement insuffisante.

La semaine dernière, le cabinet de la ministre de la Diversité, de l’Inclusion et des Personnes en situation de handicap a insisté sur le fait que ce niveau de financement était nécessaire pour fournir les prestations d’une manière « fiscalement responsable ».

En même temps, selon des recherches récentes menées au Québec, l’évitement fiscal à l’étranger par les plus grandes entreprises canadiennes est à la hausse. En 10 ans, 59 sociétés ont transféré environ 120 milliards de dollars de profits au Luxembourg seulement, ce qui se traduit par une perte de milliards de dollars de recettes publiques par an.

Quelles mesures le gouvernement prend-il, premièrement, pour faire en sorte que les plus riches paient leur juste part; deuxièmement, pour financer de manière adéquate la prestation canadienne pour les personnes handicapées; et, troisièmement, pour veiller à ce que la responsabilité financière ne soit pas exercée au détriment de ceux qui sont le plus dans le besoin?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question. Comme je l’ai dit à maintes reprises, je comprends et le gouvernement comprend la déception de l’ensemble des personnes handicapées et de ceux qui soutiennent à juste titre l’élargissement des prestations annoncée dans le budget.

En ce qui concerne votre question sur l’évitement fiscal à l’étranger, l’observation des règles fiscales est extrêmement importante pour les Canadiens. Les impôts ne servent pas seulement à financer les services et les programmes gouvernementaux, mais ils contribuent également au développement économique du Canada par la voie d’investissements dans les infrastructures et l’emploi. Les investissements continus du gouvernement lui permettent de collaborer avec des partenaires nationaux et internationaux, mais aussi de se doter d’avancées technologiques et de sources de données grâce auxquelles l’Agence du revenu du Canada progresse dans ses efforts pour que chacun paie l’impôt qu’il doit.

Le gouvernement reste déterminé à soutenir les Canadiens d’une manière bienveillante et responsable.

La sénatrice Pate : Merci, sénateur Gold. Pourriez-vous demander au gouvernement de présenter les mesures concrètes qu’il compte prendre pour remédier à l’insuffisance de la Prestation canadienne pour les personnes handicapées et à l’absence de mesures pour lutter contre l’évitement fiscal à l’étranger des plus riches et des plus privilégiés de notre pays?

Le sénateur Gold : Je ne manquerai pas de poser ces questions à la ministre. Merci, madame la sénatrice.

La santé

La santé mentale

L’honorable Iris G. Petten : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat. Cette semaine, nous soulignons la Semaine de la santé mentale au Canada. Pour citer la section de Terre-Neuve-et-Labrador d’Inclusion Canada: « La compassion ne se résume pas à être gentil avec les autres; il faut aussi faire preuve de gentillesse envers nous-mêmes. »

Le thème de cette année est le « pouvoir d’apaisement de la compassion ». Sénateur Gold, comment le gouvernement contribue-t-il à sensibiliser la population et à faire tomber les préjugés qui sont encore trop courants lorsqu’il est question de santé mentale au Canada?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question et d’avoir souligné l’importance de soutenir les initiatives en matière de santé mentale et de sensibiliser les gens à l’importance des problèmes de santé mentale.

Comme vous le savez, le gouvernement a beaucoup investi dans les services de soutien en santé mentale pour les Canadiens. Par exemple, le Fonds d’innovation pour la promotion de la santé mentale fournit un financement national pour appuyer la prestation de programmes novateurs et communautaires de promotion de la santé mentale destinés aux tout-petits, aux enfants, aux adolescents, aux jeunes adultes et aux fournisseurs de soins aux enfants et aux adolescents. Ce financement contribue à acquérir de nouvelles connaissances sur les politiques et les programmes qui fonctionnent, les personnes pour lesquelles ils fonctionnent et le contexte dans lequel ils fonctionnent. L’objectif consiste à assurer l’équité en matière de santé, à établir des facteurs de protection, à réduire les facteurs de risque auprès des personnes et des collectivités et, bien sûr, à s’attaquer fondamentalement aux déterminants sous-jacents de la santé au sein de la population.

La sénatrice Petten : Sénateur Gold, en février, la CBC a publié un article qui indique que les troubles de l’alimentation sont une maladie mentale grave dont plus de 20 000 personnes à Terre‑Neuve-et-Labrador sont actuellement atteintes. C’est ce qu’affirme Darcie Valois, doctorante en quatrième année d’études en psychologie clinique à l’Université Memorial. Comment le gouvernement fédéral collabore-t-il avec des provinces comme la mienne sur ce problème grave et répandu?

Le sénateur Gold : Merci. Il s’agit d’un problème grave qui nuit à la santé et au bien-être d’un trop grand nombre de Canadiens, et ce nombre ne cesse de croître. C’est pourquoi le budget de 2024 propose de fournir un demi-milliard de dollars sur cinq ans, à partir de cette année, pour la création d’un nouveau fonds pour la santé mentale des jeunes qui aidera les jeunes Canadiens à accéder aux soins de santé mentale dont ils ont besoin, et qui aidera les organismes communautaires axés sur la santé à fournir davantage de soins et d’informations sur ces soins.

L’environnement et le changement climatique

La taxe sur le carbone

L’honorable David Richards : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement.

Sénateur Gold, le meilleur ami de mon fils a 32 ans. Au cours des dernières années, il s’est créé un petit empire de trois camions de service, qu’il utilise pour vendre des fruits et des légumes frais, du lait, des œufs, du fromage et de la crème glacée à de petits épiciers indépendants le long des routes dans le Sud du Nouveau‑Brunswick. Toutefois, le prix du diésel a augmenté tellement fortement que remplir les camions de carburant lui coûte près de 3 000 $ par semaine. En outre, à cause de mesures inflationnistes, le prix des fruits et des légumes frais a également augmenté, de sorte que de nombreux épiciers ne pouvaient pas se permettre d’acheter ce qu’il voulait vendre. De plus, l’assurance de ses chauffeurs et de ses camions a atteint un coût prohibitif.

Au fil du temps, il a dû mettre à pied un chauffeur, puis deux, et il a fini par vendre des camions. Ainsi, comme il ne lui reste qu’un seul camion, son petit empire de fruits et de légumes s’est effondré, et il a dû déclarer faillite, alors qu’il a une femme, deux enfants et une nouvelle maison.

Sénateur Gold, il est question de compassion. Comment le gouvernement, dont les membres de rendent en Écosse et à Dubaï pour rencontrer des princes et des présidents, qui parcourent eux‑mêmes le monde, qui se flattent les uns les autres avec des solutions théoriques lors de splendides réunions, qui ont une hiérarchie gouvernementale qui, à bien des égards, n’a jamais su ce que c’était que de composer avec ce genre de moyens de subsistance...

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Tout d’abord, sénateur Richards, je suis vraiment désolé d’entendre parler de cette situation difficile et de la faillite qu’elle a entraînée. Les Canadiens doivent toujours composer avec les problèmes que posent les entreprises qu’ils dirigent et avec le coût de la vie. Notre gouvernement a soutenu et continuera de soutenir les Canadiens. Il continuera à faire de son mieux pour gérer l’économie de manière responsable. S’il est vrai que l’inflation a ralenti, que l’emploi est en hausse et que le Canada se porte aussi bien, voire mieux, que ses partenaires du G7, il n’en reste pas moins que les Canadiens doivent relever des défis, et le gouvernement fera tout en son pouvoir pour les aider sur tous les plans.

Le sénateur Richards : Pour revenir à ce cas, je signale que cet homme et sa famille ont effectué leur premier voyage en avion l’année dernière avec mon fils et sa famille pour assister à un match de baseball. Ils font partie des Canadiens que nous avons juré de protéger. Comment pouvons-nous dire que nous les protégeons alors que tant de nouvelles taxes et charges les pénalisent si lourdement?

Le sénateur Gold : Le gouvernement estime, sénateur, que les mesures qu’il a prises, qu’il s’agisse d’augmenter le taux de contribution sur les gains en capital ou de prévoir des investissements continus pour permettre à notre économie de s’ajuster aux tendances mondiales, notamment en matière de capital et de technologie, sont des mesures responsables pour la famille de votre fils, pour sa génération et pour les générations à venir.

Le patrimoine canadien

Le Centre du patrimoine de la GRC

L’honorable Marty Klyne : Sénateur Gold, j’ai été heureux de constater que le budget de 2024 comprend un investissement de 3,2 millions de dollars au cours des deux prochaines années pour le Centre du patrimoine de la GRC. Cet investissement sera géré par l’agence de développement régional PrairiesCan, et c’est un pas important dans la bonne direction pour favoriser l’apprentissage de l’histoire de notre force policière nationale, promouvoir certains aspects de la réconciliation et soutenir le développement économique des Prairies.

Toutefois, même si cette mesure aidera à couvrir les dépenses de fonctionnement du Centre du patrimoine de la GRC au cours des deux prochaines années, cela ne fera pas avancer considérablement le projet d’en faire un musée national canadien, un processus lancé en 2019 dans le cadre d’un engagement inclus dans la lettre de mandat du ministre du Patrimoine canadien de l’époque.

Je rappelle au Sénat que cela faisait partie des engagements électoraux du Parti conservateur et du Parti libéral en 2015.

(1500)

Pouvez-vous nous dire quelles sont les prochaines mesures auxquelles nous pouvons nous attendre — peut-être dans le cadre de l’énoncé économique de l’automne — pour que le gouvernement du Canada respecte son engagement en vue de créer officiellement un musée national de la GRC?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question et de souligner qu’il est important pour nous tous et pour l’ensemble des Canadiens de comprendre notre histoire et le rôle que la GRC a joué et continue de jouer dans la vie quotidienne de notre pays.

Vous comprendrez bien sûr que je ne suis pas en mesure de m’avancer au sujet de ce qui pourrait se trouver dans l’énoncé économique de l’automne ou dans toute autre mesure qui n’a pas encore été déposée ou rendue publique, mais je vais certainement porter vos préoccupations légitimes à l’attention de la ministre à la première occasion.

Le sénateur Klyne : Une fois ce musée national créé, un investissement annuel de 7 millions de dollars fournirait une partie de l’argent nécessaire au fonctionnement du Centre du patrimoine de la GRC. Compte tenu de sa taille et de son rayonnement, cela ne représente qu’une fraction du financement de nombreux autres musées nationaux. En tant que musée national, le Centre du patrimoine de la GRC continuerait de présenter des récits portant sur le devoir, la bravoure et le service, de même que des histoires difficiles concernant les injustices commises à l’encontre des peuples autochtones et d’autres aspects difficiles de notre histoire.

Le gouvernement convient-il que la présentation de cette histoire selon divers points de vue et dans un lieu de dialogue, de réflexion et de réconciliation représente un investissement dans l’identité et l’avenir de notre fédération?

Le sénateur Gold : Je peux vous répondre sans hésitation, sénateur Klyne, que le gouvernement convient tout à fait de l’importance de permettre aux Canadiens des générations actuelles et futures ainsi qu’aux personnes qui viennent au Canada dans l’espoir d’une vie meilleure de mieux connaître notre histoire et les valeurs incarnées par nos institutions.

La sécurité publique

L’aide humanitaire

L’honorable Salma Ataullahjan : Ma question s’adresse au leader du gouvernement. Sénateur Gold, le projet de loi C-41 — qui modifiait le Code criminel afin de permettre aux organismes d’aide humanitaire de fournir des aliments, des abris et des soins de santé pour sauver des vies dans les zones géographiques contrôlées par des groupes terroristes — a reçu la sanction royale le 20 juin 2023. Beaucoup de gens entretenaient l’espoir que les Afghans allaient enfin recevoir de l’aide humanitaire du Canada.

Dans mon discours à titre de porte-parole du projet de loi C-41 au Sénat, j’ai soulevé un grand nombre de préoccupations au sujet de la mise en œuvre de cette mesure législative. J’en avais d’ailleurs fait part au ministre lors de sa comparution devant le Comité des droits de la personne. Récemment, des organismes humanitaires ont rapporté des délais exceptionnellement longs et des obstacles bureaucratiques.

Sénateur Gold, nos alliés, en l’occurrence les États-Unis, l’Australie, l’Union européenne et le Royaume-Uni, ont instauré à leurs propres lois sur le terrorisme des exceptions qui étaient déjà toutes en vigueur en février 2022. Pendant ce temps, nous avons récemment appris que l’exemption générale prévue pour les travailleurs humanitaires dans les lois canadiennes relatives au financement du terrorisme n’est pas suffisante. Quand le processus de délivrance de permis pour les travailleurs du développement sera-t-il en place?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de vos efforts soutenus dans ce dossier, madame la sénatrice. C’est un enjeu important.

En ce qui concerne la mesure législative à laquelle vous faites référence, le gouvernement a agi dans le but d’ouvrir la voie à des acteurs étrangers responsables pour qu’ils puissent fournir l’aide humanitaire, et ce, même s’ils travaillent dans des circonstances difficiles. Je ne suis pas en mesure de me prononcer sur les détails du processus d’approvisionnement, mais je vais certainement porter votre préoccupation à l’attention du ministre.

La sénatrice Ataullahjan : Sénateur Gold, l’exemption générale ne touche que l’aide humanitaire et non le travail de développement. Comme votre gouvernement n’a pas défini clairement ce qu’est le « travail de développement », les organismes d’aide doivent déterminer eux-mêmes s’ils peuvent continuer leur travail sans risquer d’être poursuivis.

Monsieur le leader, pourquoi votre gouvernement n’utilise-t-il pas les définitions depuis longtemps adoptées par Affaires mondiales Canada ou par les Nations unies pour désigner le « travail de développement » afin d’accélérer le processus?

Le sénateur Gold : Je vous remercie de la question. Je ne veux pas émettre d’hypothèses sur les raisons, car je ne les connais pas en détail. Je dirai toutefois qu’à ma connaissance, l’accent a été mis sur la crise humanitaire qui, malheureusement, touche trop de gens dans ces régions. Cela n’est peut-être que le début d’une réponse partielle. Merci.

[Français]

Le patrimoine canadien

Les langues officielles

L’honorable Claude Carignan : Monsieur le leader, dans le quotidien La Presse d’aujourd’hui, on pouvait lire qu’un député libéral aurait intimidé et insulté des témoins lors de leur comparution devant le Comité permanent des langues officielles.

La réunion du comité portait sur le financement des institutions postsecondaires anglophones au Québec et francophones au Canada. Le député libéral a insulté deux témoins qui militaient en faveur de la protection du français au Québec, en qualifiant leurs propos d’extrémistes et en les traitant de noms d’une bassesse telle que je ne les répéterai pas ici.

Le gouvernement n’est-il pas gêné que l’un de ses représentants tienne de tels propos et se comporte de façon aussi honteuse? Qu’attend le gouvernement pour condamner ce député?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question. Chaque témoin qui comparaît devant un comité du Sénat ou de l’autre endroit a le droit d’être traité avec respect. Bien que je ne sois pas au courant de tous les détails que vous avez mentionnés, je souligne l’importance de montrer le respect approprié à ceux et celles qui comparaissent devant nos comités.

Le sénateur Carignan : Votre gouvernement a-t-il l’intention de s’excuser pour les propos carrément inappropriés de ce député?

Le sénateur Gold : Je ne suis pas en mesure de répondre à cet aspect de votre question, mais je répète qu’il est inacceptable de traiter une personne de façon irrespectueuse devant les comités, ici au Parlement.

[Traduction]

L’emploi et le développement social

Le financement des établissements d’enseignement

L’honorable Paula Simons : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement.

L’année dernière, l’université de l’Alberta a reçu plus de 215 millions de dollars en crédits de recherche fédéraux, ce qui a donné lieu à près de 1 800 accords de financement individuels. Je précise que 87 % de ces fonds provenaient de subventions de recherche ayant fait l’objet d’un examen indépendant par des pairs experts. Cependant, Danielle Smith, la première ministre de l’Alberta, a récemment présenté le projet de loi 18, qui exigerait que tous les établissements d’enseignement postsecondaire albertains obtiennent l’accord préalable de la province avant de conclure, de renouveler ou de prolonger tout accord de recherche fédéral, afin de garantir que toute recherche financée par le gouvernement fédéral soit conforme aux priorités de l’Alberta, qu’elles soient d’ordre politique ou idéologique.

Pouvez-vous me dire quelles mesures le gouvernement fédéral pourrait prendre pour défendre l’indépendance des programmes nationaux de financement universitaire évalués par les pairs au Canada?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question. Le projet de loi dont vous parlez est effectivement fort préoccupant et inquiétant. En tant qu’ancien universitaire, je sais, pour avoir moi-même bénéficié de financement pour la recherche, à quel point il est important de préserver l’intégrité des organismes de financement ainsi que la liberté du milieu universitaire d’entreprendre les travaux de recherche qu’elle juge pertinents.

Cela dit, le gouvernement fait confiance à ses organismes de financement. Le Conseil de recherches en sciences humaines et le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada sont tous deux très clairs :

Les organismes fédéraux de financement de la recherche examinent le mérite des demandes de financement dans le cadre d’un processus externe indépendant qui adhère aux pratiques exemplaires reconnues à l’échelle internationale comme étant le moyen le plus juste, le plus transparent et le plus efficace d’octroyer des fonds publics à la recherche.

Ces organismes continueront d’agir dans ce même esprit approprié.

La justice

Les ordonnances de sursis

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Monsieur le leader, le mois dernier à Victoria, en Colombie‑Britannique, on a arrêté un individu et on l’a accusé d’avoir tenté de voler un véhicule occupé. On l’a relâché plus tard dans la journée. Le lendemain, on l’a arrêté pour avoir volé la voiture d’une femme, percuté deux voitures et tenté de voler un autre véhicule. On l’a relâché le lendemain. Plus tard dans la nuit, pour la troisième journée consécutive, on l’a arrêté pour introduction par effraction et tentative de vol d’une autre voiture. Dans un communiqué de presse, le service de police de Victoria a déclaré qu’on avait libéré cette personne à cause de la loi C-75.

Monsieur le leader, le gouvernement Trudeau comprend-il que son projet de loi C-75 et sa politique de capture et de remise en liberté a rendu le Canada moins sécuritaire?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci pour votre question. Le Code criminel est une loi fédérale, mais l’administration de la justice est une responsabilité provinciale. Les décisions prises par les tribunaux en matière de mise en liberté sous condition relèvent de l’administration de la justice et de l’indépendance des tribunaux.

(1510)

La position du gouvernement est que les mesures qu’il a mises en place pour arriver à un équilibre entre la protection des Canadiens — la principale responsabilité qui incombe au gouvernement — et le respect des droits constitutionnels des personnes qui sont arrêtées ou accusées parce qu’elles auraient commis une infraction criminelle sont appropriées et respectent la Charte.

La sénatrice Martin : Le premier ministre lui-même a admis que le projet de loi C-75 est un échec lorsqu’il a déclaré, lors du sommet qu’il a organisé le 8 février, que son gouvernement songeait à renforcer les peines encourues par toute personne participant à un vol de voiture. Trois mois plus tard, aucune mesure n’a été prise.

Monsieur le leader, quand le gouvernement Trudeau mettra-t-il fin à la détention à domicile des voleurs de voitures récidivistes afin qu’ils se retrouvent en prison plutôt qu’en liberté sous caution?

Le sénateur Plett : Bonne question.

Le sénateur Gold : Le gouvernement continuera à se concentrer sur des solutions fondées sur des données probantes et sur des recherches pour lutter contre la criminalité. Il continuera à tirer les leçons des mesures qui n’ont pas fonctionné, au pays et à l’étranger — aussi attrayantes soient-elles dans les slogans —, et qui ne font rien pour protéger les Canadiens ou pour rendre les rues du pays plus sûres. Le gouvernement s’est engagé à faire ce qu’il faut, dans le respect de la Charte, pour assurer la sécurité des Canadiens.

Les affaires mondiales

L’ingérence étrangère

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Monsieur le leader, l’année dernière à la même époque, je vous ai parlé du fait que le gouvernement Trudeau avait omis d’informer le député conservateur Michael Chong que lui et sa famille avaient été pris pour cible par le régime communiste de Pékin. Je vous ai demandé si d’autres parlementaires avaient également été pris pour cible. Comme d’habitude, je n’ai pas reçu de réponse.

La semaine dernière, nous avons appris que 18 parlementaires, dont une de nos propres collègues, ont vu leurs comptes de messagerie pris pour cible par des pirates informatiques liés à la République populaire de Chine. Cela s’est produit en 2021. Nous avons également appris que le FBI a mis en garde le gouvernement Trudeau à ce sujet en 2022.

Monsieur le leader, pourquoi votre gouvernement a-t-il omis pendant deux ans — deux ans — de dire aux parlementaires qu’ils avaient été pris pour cible?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie pour votre question. Ces questions et bien d’autres ont été soulevées et sont traitées par la juge Hogue dans le cadre de son enquête et elles continueront de faire l’objet d’une analyse et d’une discussion. Nous attendons avec impatience le rapport de la juge Hogue.

Le sénateur Plett : La juge Hogue n’est ni le premier ministre ni le leader du gouvernement au Sénat. Pourquoi ne répondez-vous pas aux questions?

Le gouvernement Trudeau n’en vaut pas le coût pour la démocratie. Informer les parlementaires qu’ils étaient pris pour cible est son travail, monsieur le leader. Il ne l’a pas fait. Monsieur le leader, pouvez-vous garantir à tous les honorables sénateurs qu’aucune puissance étrangère n’a accès à leurs courriels, ou cette responsabilité incombe-t-elle également à la juge Hogue?

Le sénateur Gold : Eh bien, je vous remercie de la confiance que vous avez en ma capacité d’être, à la fois, le représentant ou le leader du gouvernement et un membre du Centre de la sécurité des télécommunications, du Service canadien du renseignement de sécurité et du gouvernement. Malheureusement, mon rôle est plus limité.

L’ingérence étrangère est une question sérieuse. Le gouvernement s’y attaque sérieusement. Nous continuons à tirer les leçons de l’enquête et nous sommes heureux d’apprendre les mesures que nous devons prendre pour améliorer encore notre travail.

La santé

La décriminalisation de la drogue

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Monsieur le leader, cela fait maintenant 11 jours que le gouvernement de la Colombie-Britannique a demandé au gouvernement Trudeau une aide urgente pour mettre fin à la consommation illégale de drogues dures dans les espaces publics tels que les hôpitaux, les parcs et les transports en commun. Mercredi dernier, la ministre Saks a affirmé qu’elle attendait davantage d’informations de la part du gouvernement provincial avant d’accorder une exemption au programme radical de décriminalisation de la drogue du gouvernement Trudeau. Cependant, le ministère de la Santé mentale et des Dépendances de la Colombie-Britannique a déclaré aux médias qu’il avait reçu la demande d’information et qu’il avait fourni des données supplémentaires le jour même.

Monsieur le leader, qu’est-ce qui prend autant de temps? Quand agirez-vous?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question, car le gouvernement a agi. Je viens d’apprendre que le gouvernement fédéral a approuvé la demande de la Colombie-Britannique de recriminaliser la consommation de drogues illicites dans les lieux publics. Il a pris le temps nécessaire pour l’évaluer et en discuter à l’interne, et il a maintenant agi.

Les adultes seront toujours autorisés à transporter de petites quantités de drogues illicites et à les consommer en privé, mais ils pourront être arrêtés s’ils les consomment en public. Voilà la réponse à votre question.

La sénatrice Martin : Je vous remercie de votre réponse, mais je continue de croire que le gouvernement a trop tardé à agir et que cette politique sur les drogues a causé des ravages en Colombie-Britannique. J’espère que le gouvernement examinera attentivement ce qui s’est passé dans cette province et veillera à ce que cela ne se reproduise pas dans d’autres endroits comme Toronto.

Le sénateur Gold : Le gouvernement actuel apprend des expériences passées. À cet égard, le premier ministre a annoncé, il y a quelques jours, qu’il continuera de collaborer avec les instances compétentes, soit les provinces et les territoires, et qu’il prendrait en considération toutes les demandes de modification de ces lois qu’elles pourraient faire.

Agriculture et forêts

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

Consentement ayant été accordé de passer aux motions, article no 192 :

L’honorable Robert Black, conformément au préavis donné le 2 mai 2024, propose :

Que le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts soit autorisé à se réunir le mardi 7 mai 2024, à 18 h 30, même si le Sénat siège à ce moment-là et que l’application de l’article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Transports et communications

Budget et autorisation d’embaucher du personnel et de se déplacer—L’étude de l’incidence des changements climatiques sur les infrastructures essentielles dans les secteurs des transports et des communications—Adoption du septième rapport du comité

Consentement ayant été accordé de passer aux autres affaires, rapports de comités, autres, article no 65 :

Le Sénat passe à l’étude du septième rapport du Comité sénatorial permanent des transports et des communications (Budget—étude sur l’incidence des changements climatiques sur les infrastructures essentielles dans les secteurs des transports et des communications —autorisation de se déplacer), présenté au Sénat le 11 avril 2024.

L’honorable Leo Housakos propose que le rapport soit adopté.

 — Merci, honorables sénateurs. Mon intervention porte sur une question de base. Le comité a présenté une demande pour deux déplacements afin, essentiellement, de visiter le port d’Hamilton et le port de Montréal. Ces déplacements doivent avoir lieu le 14 juin, à Montréal, et le 31 mai, au port d’Hamilton. Le comité a suivi le processus de diligence raisonnable auprès du Comité de la régie interne afin de faire approuver son budget. Je veux simplement présenter le rapport et proposer son adoption. Merci.

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)


ORDRE DU JOUR

Les travaux du Sénat

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, conformément à l’article 4-13(3) du Règlement, j’informe le Sénat que, lorsque nous passerons aux affaires du gouvernement, le Sénat abordera les travaux dans l’ordre suivant : l’étude de la motion no 169, suivie de l’étude de la motion no 165, suivie de tous les autres articles dans l’ordre où ils figurent au Feuilleton.

Règlement, procédure et droits du Parlement

Fixation de délai—Adoption de la motion

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat), conformément au préavis donné le 2 mai 2024, propose :

Que, conformément à l’article 7-2 du Règlement, pas plus de six heures de délibérations additionnelles soient attribuées à l’étude de la motion no 165 sous la rubrique Affaires du gouvernement.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, nous sommes vraiment pressés de faire adopter cette motion, n’est-ce pas? Il n’a pas la moindre chose à dire au sujet de sa propre motion. Il impose la fixation de délai et il n’a aucun commentaire à faire au sujet de sa propre motion de fixation de délai. Voilà ce que le Sénat est devenu. Ce n’est plus une institution démocratique. C’est une institution dirigée par...

La sénatrice Batters : Incroyable.

Le sénateur Plett : ... une poignée d’individus qui disent simplement : « Nous sommes ici maintenant. Nous y sommes parvenus, alors que tout le monde fasse place, nous allons maintenant gérer cette institution à notre façon. »

(1520)

C’est reparti, chers collègues. Le sénateur Gold utilise une fois de plus l’outil que le sénateur Furey lui a donné juste avant de partir : la capacité de recourir au pouvoir de la majorité au gouvernement pour clore un débat démocratique. C’est la troisième fois que l’impatience du sénateur Gold mène à l’utilisation de cette massue pour clore le débat.

Chers collègues, vous noterez que le sénateur Harder s’est retrouvé devant la même opposition et qu’il n’a pas utilisé la fixation de délai une seule fois pendant tout le temps où il a été leader du gouvernement. J’étais soit chef de l’opposition, soit whip de l’opposition à l’époque; nous étions donc les mêmes sénateurs de ce côté-ci. Nous sommes parvenus à gérer toutes les mesures législatives controversées. Même le projet de loi anti-pipelines a franchi toutes les étapes sans fixation de délai. Je suppose que certaines personnes négocient mieux que d’autres. Je dis ça comme ça.

Le sénateur Gold a déclaré qu’il ne pouvait pas parvenir à un consensus avec l’opposition parce que c’est ce qu’il doit dire, ce qui est encore une fois totalement faux. J’ai dit au sénateur Gold que nous avions quatre amendements très légitimes à présenter. Chers collègues, nous n’avons fait absolument aucune obstruction.

Les amendements visaient à ce que les modifications s’appliquent uniquement à la présente session parlementaire. L’un des amendements visait à conserver la plage horaire de 18 heures à 20 heures pour la suspension du soir. L’un des amendements était le même que celui que le sénateur Quinn a déjà proposé. Nous avions un quatrième amendement à proposer — j’aurais dû l’écrire. Il était court et légitime. Nous n’avons fait absolument aucune obstruction. Allons-y. Débattons de ces amendements et mettons-les aux voix pour qu’ils soient adoptés ou rejetés.

L’article 7 du Règlement porte sur la fixation de délai. Permettez‑moi de souligner une fois de plus des synonymes qui ont été utilisés au fil des ans, chers collègues, par nos collègues libéraux qui étaient alors dans l’opposition. Je parle de mes collègues libéraux qui croyaient en la démocratie et qui ne pensaient pas que 48 sénateurs indépendants devaient diriger le Sénat. Ils croyaient que cette institution devait être gérée de manière démocratique.

Je pense que cela pourrait aider les sénateurs nommés par Trudeau, qui n’étaient pas présents à l’époque, à comprendre ce qu’est réellement la fixation de délai. Ce que le sénateur Gold et le gouvernement Trudeau cherchent à accomplir a été décrit comme une tentative, laissez-moi vous le lire : d’imposer la fixation de délai, d’imposer une limite de temps, d’invoquer la clôture, d’écourter le débat, de limiter le débat le plus possible, de couper court au débat, de mettre fin au débat au Parlement, de faire adopter la motion no 165 à toute vitesse et d’interrompre le débat, de contourner la procédure établie, d’éviter un examen minutieux, de faire taire nos voix sur les questions les plus cruciales qui touchent les Canadiens, et d’imposer son programme sans écouter ni le Parlement ni les Canadiens.

Ce que fait le sénateur Gold a été qualifié, par moi-même et par d’autres, de mesure antidémocratique, de guillotine imposée par le gouvernement au Sénat, d’utilisation du pouvoir pour obtenir plus de pouvoir, de bâillonnement du Parlement, de bâillonnement du Parlement et, de ce fait, du peuple canadien, d’atteinte au Parlement et de mesure qui prive le Parlement de son droit — de notre devoir — d’examiner sérieusement ce à quoi on propose de donner force de loi au Canada.

Avec la motion du sénateur Gold, on affaiblit le Parlement et l’examen par le Sénat d’importantes mesures législatives gouvernementales est radicalement tronqué. C’est ce que des sénateurs libéraux ont dit au sujet de la fixation de délai il y a environ 10 ou 12 ans. Certains de ces sénateurs sont actuellement présents dans cette Chambre. C’est ce que vous ou vos collègues avez dit à l’époque. Je ne pointerai personne du doigt. Permettez-moi de les regarder et de siffler.

Permettez-moi de citer le sénateur Cowan, ancien leader de l’opposition, lorsqu’il parlait de la fixation de délai :

[...] il s’agit de couper court au débat pour empêcher chacun de nous de poser des questions sur le projet de loi très important et compliqué dont nous sommes saisis, de nous empêcher d’examiner de trop près les plans que le gouvernement propose pour notre pays.

Or, notre travail consiste justement à faire un examen minutieux des mesures proposées. C’est ce que les Canadiens attendent de nous et c’est ce [pour quoi] nous avons été invités à siéger au Sénat et ce [pour quoi] nous sommes payés.

Ce sont les paroles de Jim Cowan.

Chers collègues, le sénateur Gold met fin au débat après que deux sénateurs — deux sénateurs — de l’opposition se sont exprimés. Cela doit être une sorte de record pour le Parlement. Deux sénateurs se sont exprimés, et il affirme que cela constitue un débat complet et sain et qu’il faut y mettre fin.

Le sénateur Housakos : Trop de démocratie.

Le sénateur Plett : Le sénateur Gold met fin au débat avant que l’opposition ne puisse déposer un seul amendement. Rien. « Je ne veux pas entendre ce que vous avez à dire. Disparaissez. C’est moi qui dirige cet endroit maintenant. »

Si le fait d’avoir deux intervenants et aucun amendement est considéré par le gouvernement Trudeau comme de l’obstruction, alors, chers collègues, nous en aurons beaucoup avant les prochaines élections. Si Justin Trudeau et Marc Gold veulent mettre un terme au débat avec la fixation de délai après deux intervenants, ils devront le faire régulièrement. Permettez-moi d’avertir le Sénat sans plus tarder. C’est ce que ce Sénat non partisan est devenu : non partisan. C’est le Sénat le plus partisan depuis ma nomination en 2009.

La sénatrice Batters : Aucun doute là-dessus.

Le sénateur Plett : Il s’agit de loin du Sénat le plus partisan depuis 2009 car, sous les gouvernements conservateurs et libéraux précédents, le recours à la fixation de délai était une réaction à l’obstruction de l’opposition.

Permettez-moi de citer à nouveau mon ami Jim Cowan. Jim Cowan me manque. J’espère que Jim Cowan nous regarde.

[...] Il ne fait aucun doute que le recours à ce type de motion soit parfois justifié, par exemple lorsque des manœuvres dilatoires font délibérément traîner le débat en longueur [...]

Je suis tout à fait d’accord. Je vais continuer à citer d’anciens sénateurs libéraux. Peut-être que leurs paroles éclaireront les sénateurs également nommés par un premier ministre libéral. Voici ce qu’a dit la sénatrice Joan Fraser :

À l’occasion, il peut être nécessaire d’avoir recours à une motion d’attribution de temps, bien qu’il s’agisse d’une mesure draconienne. Cela peut être nécessaire, par exemple, lorsque, à l’égard d’une mesure législative importante, [...]

 — comme c’est le cas de cette motion —

[…] l’opposition fait de l’obstruction pure et simple.

L’autre raison habituellement invoquée pour imposer la guillotine à l’égard d’un débat, c’est l’urgence d’adopter un projet de loi. Je suis sûr que nous sommes tous d’accord pour dire que des limites devraient être fixées pour nos débats quand il y a urgence d’agir, mais on nous sert constamment cette excuse. En fait, par l’entremise du sénateur Gold, le gouvernement nous dit que « cette mesure doit être adoptée sans tarder et le temps presse » deux mois avant que nous recevions le projet de loi de l’autre endroit. Tout est toujours urgent aux yeux du sénateur Gold.

(1530)

Si des législateurs sont appelés à adopter un projet de loi pour mettre fin à une grève dans un hôpital où la vie des patients est en jeu, il est facile de comprendre la nécessité de fixer des paramètres pour la durée du débat. Toutefois, si le sénateur Gold veut imposer la guillotine, ce n’est certainement pas pour mettre fin à l’obstruction, parce qu’il n’y a aucune obstruction, chers collègues.

Si le sénateur Gold veut recourir à la clôture, ce n’est pas parce que la question est urgente. En effet, modifier le Règlement du Sénat afin de donner plus de temps de parole à certains sénateurs est loin d’être une question urgente.

Le sénateur Gold a dit que les choses traînent en longueur. Le Sénat fonctionne bien, et maintenant, tout à coup, du jour au lendemain, il y a péril en la demeure parce que nous approchons d’une semaine de relâche, et que si nous n’adoptons pas cette mesure — si la sénatrice Saint-Germain n’a pas le droit de disposer d’un temps de parole illimité — avant notre retour, le 20 mai, rien n’ira plus au Sénat. On dit que si nous continuons d’avoir des pauses-repas de 18 heures à 20 heures à notre retour le 20, ce sera horrible pour nous. Alors, adoptons ce projet de loi à toute vapeur de sorte qu’à notre retour, nous puissions sortir d’ici à 19 heures le soir.

Soyez attentifs — parce que je le serai — au nombre de sénateurs présents dans cette enceinte lorsque nous commencerons à faire nos pauses à 19 heures au lieu de 18 heures, car c’est là la raison ultime pour laquelle nous faisons cela : c’est pour que des sénateurs puissent rentrer chez eux plus tôt. Ils ne veulent pas être ici. Ils n’ont pas été nommés pour être ici. C’est pourquoi ils veulent des séances hybrides — parce qu’ils ne veulent pas être ici. Ils veulent être dans leur salon. Soyez attentifs. Faites le calcul. Je vais le faire.

Il ne s’agit pas d’un abus de pouvoir de notre part. Cet abus de pouvoir de la part du sénateur Gold sert deux objectifs.

D’abord, il répond aux sollicitations de tous les sénateurs qui disent ouvertement qu’ils en ont assez de l’opposition au Sénat. Voilà, c’est dit. Il n’y a que dans le Canada de Justin Trudeau que l’on peut voir des parlementaires appeler ouvertement à l’élimination des voix dissidentes au Parlement. C’est tout simplement révoltant. Je sais que beaucoup d’entre vous sont fatigués de nous entendre et surtout fatigués que je dispose d’un temps illimité, mais le fait de donner ce privilège à quelqu’un d’autre ne m’empêchera pas d’avoir le mien. Croyez-moi, sénatrice Lankin, je suis certain que vous allez inventer une autre motion d’ici peu pour m’empêcher de parler aussi longtemps que je le souhaite.

Les conservateurs dénoncent le gouvernement. Ce n’est pas bien. Même si Justin Trudeau ne dispose que d’une petite minorité de partisans au Canada, il peut compter sur une large majorité dans cette enceinte.

Je suis désolé s’il vous est difficile d’entendre l’opinion de 80 % des Canadiens qui n’aiment pas Justin Trudeau, mais nous n’arrêterons pas. Je vous invite à bien réfléchir à ce qu’est un débat démocratique. La fixation de délai n’a pas été créée pour qu’une majorité de sénateurs y aient recours lorsqu’ils n’aiment pas ce qu’ils entendent. L’utilisation de ce mécanisme par le sénateur Gold dans le débat sur la motion no 165 pervertit le principe de la fixation de délai.

Dans mon discours de la semaine dernière, j’ai parlé du fait que le temps est important pour l’opposition. Il permet à l’opposition d’alerter le public sur un problème. Clore le débat prématurément permet au gouvernement de faire sa sale besogne avant que quiconque s’en rende compte.

Je soutiens, chers collègues, qu’en ayant recours à la fixation de délai dans le cas de la motion no 165 on cherche à clore le débat prématurément. Ce n’est pas un hasard si le sénateur Gold a présenté la motion après que le Globe and Mail a publié un article selon lequel les libéraux préparent le Sénat en vue de l’élection de Pierre Poilièvre. Le Cabinet du premier ministre s’est rendu compte que les gens commençaient à prêter attention aux préparatifs des libéraux et il a ordonné au sénateur Gold de balayer rapidement l’affaire sous le tapis.

C’est soit cela, soit un projet de loi d’initiative parlementaire — l’un ou l’autre. Faites votre choix. Voilà pourquoi l’utilisation de la fixation de délai par le gouvernement est si scandaleuse. Chacun d’entre vous, chers collègues, devrait s’y opposer. Même si vous n’aimez pas les conservateurs, il ne s’agit pas d’eux ici. Il s’agit de vous donner le droit de vous exprimer, tout comme nous.

Que vous soyez d’accord ou non avec la motion no 165, vous devriez soutenir le droit de tous les sénateurs à se faire entendre. Vous devriez accepter que des amendements soient présentés, mais cette motion supprime ce droit. Elle fait taire toutes les voix avant même qu’elles ne soient entendues.

Depuis 2016, on nous répète sans cesse que les sénateurs de Trudeau sont indépendants. Ils votent 96 % du temps dans le même sens que le gouvernement, mais ils sont indépendants. Ils parrainent des projets de loi du gouvernement, mais ils sont indépendants.

Chers collègues, vous aurez à nouveau l’occasion ce soir de montrer votre indépendance. J’espère que vous ferez un choix judicieux. Merci.

L’honorable Denise Batters : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui contre le recours du gouvernement Trudeau à la fixation de délai pour la motion no 165, une motion omnibus qui vise à modifier le Règlement du Sénat en profondeur dans le but d’anéantir l’opposition conservatrice.

Tout d’abord, je suis étonnée de constater que le sénateur Gold, qui est le leader du gouvernement au Sénat, n’a même pas prononcé de discours, après quoi, nous aurions pu lui a posé des questions. C’est tout simplement incroyable.

Il est malheureux que nous nous retrouvions de nouveau dans cette situation, honorables collègues. Il y a trois ans, lorsque j’ai pris la parole au sujet des modifications à la Loi sur le Parlement du Canada proposées dans le projet de loi S-4, j’ai prédit que les sénateurs « indépendants » de M. Trudeau n’allaient pas se contenter de changer leurs titres et de hausser les salaires de leurs leaders, et que le gouvernement allait poursuivre sa longue quête pour anéantir l’opposition.

Le sénateur Gold, en tant que leader du gouvernement au Sénat, a tenté de nous faire croire que les plus haut placés dans le gouvernement Trudeau n’avaient rien à voir avec l’élaboration et la planification de la motion. Or, en réponse à une question que j’ai posée la semaine dernière pendant la période des questions au Sénat, le sénateur Gold a admis que son bureau a demandé et obtenu du gouvernement Trudeau le mandat de présenter cette motion draconienne. Il m’a dit cela une heure avant de donner préavis de cette motion de fixation de délai. De toute évidence, le gouvernement était au courant de cette motion de clôture et a donné sa bénédiction au leader du gouvernement au Sénat pour couper court au débat sur une motion visant à éliminer l’opposition au Sénat.

Avoir recours à une fixation de délai à ce stade-ci — après que le débat a à peine commencé sur cette motion d’une très grande portée — montre à quel point le gouvernement Trudeau a peur d’un contexte où les règles du jeu sont équitables. Les libéraux craignent de perdre les prochaines élections. Comme ils n’arrivent pas à faire adopter les modifications au Règlement du Sénat pour obtenir ce qu’ils veulent, ils ont décidé de les faire adopter à toute vitesse sous la forme d’une motion. Au moins, lorsque le gouvernement fixe un délai pour le débat sur un projet de loi, les sénateurs peuvent prendre la parole à plusieurs étapes — la deuxième lecture, l’étude du comité, l’étape du rapport et la troisième lecture. Avec la motion no 165, il n’y a qu’une étape : la motion principale et les amendements. Le gouvernement coupe court au débat avant même que nous ayons fini de discuter pleinement du premier amendement. Le recours à une motion de fixation de délai maintenant signifie que les sénateurs ne pourront présenter aucun autre amendement à cette énorme série de modifications au Règlement.

Il y a quelques jours, au sujet de la motion, la sénatrice Saint‑Germain a dit ce qui suit :

Il n’y a jamais eu autant d’amendements aux projets de loi du gouvernement que dans le nouveau Sénat actuel. N’est-ce pas la preuve que les sénateurs indépendants des trois groupes indépendants tiennent le gouvernement responsable et améliorent les projets de loi dans l’intérêt des Canadiens?

On entend souvent les sénateurs indépendants nommés par Trudeau expliquer qu’il est possible de mesurer l’efficacité du nouveau Sénat indépendant par le nombre d’amendements que le Sénat adopte au sujet des mesures législatives. Ce n’est toutefois qu’un mythe. La plupart des amendements proposés par les sénateurs indépendants de Trudeau proviennent du gouvernement Trudeau. Comme il n’y a pas de caucus du gouvernement, le gouvernement les transmet au Sénat par l’entremise du sénateur indépendant qui parraine la mesure législative. Bon nombre de ces amendements sont présentés tard dans le processus législatif, généralement à l’étape de l’étude article par article d’un comité sénatorial. En fait, beaucoup de ces amendements visent à corriger des erreurs techniques dans le projet de loi qui auraient pu être évitées au moyen d’une rédaction soignée et d’un examen minutieux en premier lieu.

Selon la logique de la sénatrice Saint-Germain, le fait que le gouvernement coupe maintenant court au débat sans permettre d’autres amendements démontre que le gouvernement Trudeau se dérobe à ses responsabilités et qu’il tente d’empêcher les sénateurs de renforcer le Règlement du Sénat.

(1540)

Nous n’avons eu que neuf heures et demie de débat sur cette motion jusqu’à présent. Seulement 11 des 96 sénateurs ont pris la parole, dont seulement deux sénateurs de l’opposition conservatrice. Le sénateur Quinn, qui a été nommé par Trudeau, a présenté un amendement très sensé visant à limiter les délais pour les questions écrites et les réponses différées. Il n’a pas présenté cet amendement pour perdre du temps, et nous avons à peine eu le temps d’en débattre.

En imposant la fixation de délai, le gouvernement empêche la proposition d’autres amendements, même pour corriger des erreurs dans le libellé de la motion no 165. Or, les erreurs sont nombreuses dans cette motion omnibus. Prenons, par exemple, la disposition qui propose de faire du leader de chacun des groupes du Sénat un membre d’office de tous les comités. Si nous ajoutons les leaders des cinq groupes à la composition actuelle des comités, les membres de tous les groupes seront frustrés parce qu’ils auront encore moins de temps pour interroger les témoins. Le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement étudie l’efficacité des comités depuis des mois. Le changement proposé diluera encore davantage le pouvoir des sénateurs de l’opposition au sein de tous les comités.

Encore plus de sénateurs nommés par Justin Trudeau monopoliseraient la grande majorité du temps de parole au sein des comités, ce qui plaira peut-être au gouvernement Trudeau, mais qui n’est certainement pas dans l’intérêt de la démocratie.

Ensuite, la redéfinition du rôle du représentant du gouvernement au Sénat pour que les successeurs du sénateur Gold soient non affiliés pose problème. Cela empêcherait automatiquement quiconque a fait du bénévolat pendant une campagne électorale, a déjà fait un don à un parti politique ou a déjà posé une affiche électorale sur son terrain d’être nommé « représentant du gouvernement » au Sénat. Il serait impossible d’avoir une affiliation politique — un droit conféré à tous les Canadiens — et d’être le représentant du gouvernement au Sénat du Canada, une institution politique. C’est farfelu.

En outre, on imposerait cette restriction au représentant du gouvernement au Sénat, mais pas au coordonnateur législatif du représentant du gouvernement au Sénat. Pourquoi?

Cependant, l’erreur la plus grave dans cette motion demeure la modification par le gouvernement des règles qui encadrent la fixation de délai. Selon les règles proposées, l’opposition pourrait n’avoir que 20 minutes sur les 2 heures et demie allouées pour un débat sur la fixation de délai. Cela représente une réduction par rapport au temps qui nous est accordé selon les règles actuelles. Il est inadmissible que le gouvernement cherche à réduire la capacité de l’opposition à s’opposer à la clôture d’un débat au Sénat. C’est un jour sombre pour la démocratie, chers collègues.

On a entendu un certain nombre de déclarations trompeuses au cours du débat sur cette motion, et il est important de rectifier les faits avant de voter sur une si grande refonte du Règlement du Sénat. La sénatrice Saint-Germain qualifie notre Règlement actuel de « tyrannie de la minorité » et affirme que « [n]ous refusons des privilèges à la majorité des sénateurs et des groupes au profit d’un petit nombre de sénateurs et de groupes ».

Ce qu’elle a dit est paradoxal, sachant que l’une des principales raisons d’être du Sénat est de protéger les droits des minorités. L’un des principaux moyens d’y parvenir consiste à mener un débat législatif approfondi dans cette enceinte, ce à quoi le gouvernement tente précisément de mettre un terme en invoquant la fixation de délai.

Par ailleurs, l’actuel Règlement du Sénat est structuré de manière à protéger les droits et les points de vue de la minorité. Sur le plan de la procédure, l’ensemble du Sénat peut être paralysé par le refus d’un sénateur non affilié et indépendant de consentir à quelque chose; il s’agit en fait d’une caractéristique de notre système sénatorial, et non d’un défaut. Cela garantit que tous les sénateurs sont égaux et que, dans l’intérêt des populations minoritaires du Canada en général, la majorité ne peut pas écraser les points de vue de la minorité.

Il est révélateur que le gouvernement Trudeau n’ait pas mentionné une seule fois les droits des sénateurs non affiliés dans les huit pages de changements au Règlement qu’il a proposés. On restreint les droits des sénateurs non affiliés en accordant à davantage de groupes un statut spécial alors qu’ils n’ont pas de rôle parlementaire à remplir. Encore une fois, cette mesure est contraire au rôle prévu des sénateurs, qui sont censés être indépendants en raison de leur nomination à vie et égaux au sein du Sénat.

Le fait que l’unanimité ne constitue pas un consensus est une autre déclaration trompeuse que j’ai entendue à quelques reprises au cours du débat sur la motion. Honorables sénateurs, soyons sérieux : nous savons tous ce que signifie le terme « consensus », et c’est en se fondant sur ce principe que le Sénat a toujours fonctionné, à juste titre. L’opposition existe en tant qu’entité fondamentale ayant une fonction parlementaire définie au Sénat canadien depuis 1867. On peut tenter de prétendre que l’accord de l’opposition n’est pas nécessaire pour obtenir le consensus, mais cela ne veut pas dire que c’est vrai. En réalité, en invoquant la fixation de délai pour cette motion et en ne permettant pas de débat sur d’autres amendements, le gouvernement modifie unilatéralement le Règlement du Sénat pour satisfaire les ambitions purement politiques d’un seul homme : Justin Trudeau.

En vertu de ces modifications au Règlement, la sénatrice Saint‑Germain, la leader du plus grand groupe de sénateurs « indépendants », aurait un temps de parole illimité au sujet des mesures législatives, mais elle n’utiliserait pas son temps de parole pour « faire de l’obstruction », comme les conservateurs. Elle utiliserait seulement son temps de parole illimité pour « avoir suffisamment de temps [...] pour essayer d’améliorer et d’amender — un projet de loi — considéré comme non démocratique ». Concrètement, cela signifie faire de l’obstruction.

Il est évident que le gouvernement Trudeau n’a pas réfléchi sérieusement aux conséquences de la vaste portée des changements qu’il veut apporter au Règlement du Sénat. Dans les faits, cette motion entraînerait des problèmes de taille. Par exemple, vu le nombre élevé de personnes impliquées, il sera impossible de s’entendre sur des tâches de routine d’ordre procédural. Suivant ces modifications au Règlement, cinq groupes de sénateurs devront s’entendre sur des questions importantes comme la durée de la sonnerie lors des votes et l’horaire des réunions les jours où le Sénat est ajourné. Si vous croyez que la situation est complexe maintenant, ces modifications créeraient le chaos. Qu’adviendrait-il en cas d’impossibilité de parvenir à une entente? Nous aurions droit à une série de sonneries d’une heure.

En outre, cette motion énonce des modifications visant à limiter à cinq le nombre de groupes de sénateurs. Autrement dit, si des sénateurs souhaitaient se réunir pour former un sixième groupe, ce serait le seul groupe de sénateurs à ne pas avoir les mêmes droits que les cinq autres groupes — un groupe sans pouvoir. Je serais portée à croire que de nombreux sénateurs seraient mal à l’aise avec cette situation.

Chers collègues, je vous demande de bien réfléchir aux conséquences de la proposition du gouvernement par l’entremise de cette motion ainsi qu’à l’effet que celle-ci aura sur les activités quotidiennes et l’avenir à long terme du Sénat du Canada. Si vous vous considérez comme indépendant, vous avez l’occasion de le prouver, ici et maintenant. Vous n’avez pas à voter pour mettre fin au débat sur cette motion. Les questions en jeu sont les raisons pour lesquelles le Sénat existe : la représentation des points de vue minoritaires, la démocratie et un examen minutieux. Elles sont importantes. Votre vote l’est aussi.

J’espère que vous vous joindrez à moi pour voter contre la fixation de délai. Merci.

[Français]

L’honorable Claude Carignan : Il y a quelques éléments particulièrement choquants dans cette décision du leader du gouvernement de recourir à la fixation de délai, mais également de procéder lui-même à cet avis aux changements apportés au Règlement.

Je vous rappelle que le Règlement du Sénat a toujours été modifié par consensus, par décision ou par rapport de comité, notamment le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement. Je dis « notamment », parce que c’est arrivé dans l’histoire que la Chambre ait chargé le Président de la Chambre, pendant les pauses, de revoir le Règlement. Le Président est arrivé avec des propositions de modifications au Règlement qu’il a soumises à la Chambre. Ce rapport du Président a été soumis au Comité du Règlement et adopté au Sénat.

C’est pour cela que, par tradition, cela a été inscrit au Règlement du Sénat à l’article 12-7(2), où l’on dit ce qui suit :

le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement, qui est chargé :

a) de soumettre au Sénat, de sa propre initiative, des propositions visant la modification du Règlement,

b) d’examiner toute question de privilège dont le Sénat le saisit,

c) d’examiner les ordres et pratiques du Sénat et les privilèges parlementaires;

Ce n’est pas un hasard que ce soit le Sénat ou le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement qui soit responsable de faire cela. C’est notamment à cause du principe de l’indépendance de la Chambre.

Évidemment, quand on parle d’une Chambre qui doit être indépendante du gouvernement, de l’exécutif, de la Chambre des communes, celle-ci doit pouvoir fixer ses propres règles de gouvernance dans l’étude des projets de loi. Le gouvernement ne peut pas s’ingérer dans le fonctionnement du Sénat et ne peut évidemment pas commencer à ajuster les règles comme bon lui semble pour qu’elle lui soit favorable ou qu’on interfère avec son indépendance.

C’est donc la première partie qui me dérange : le fait que ce soit le leader du gouvernement qui propose cette modification au Règlement. C’est comme si on avait un match de hockey entre les Maple Leafs et les Canadiens, et que c’était le coach des Canadiens qui fixait les règles du match contre les Maple Leafs. J’ai l’impression que les gens pourraient y voir un problème. C’est ce qui arrive à l’heure actuelle.

Deuxièmement, il y a la question de la fixation de délai. Je lisais les articles de La procédure du Sénat en pratique traitant de la question de la fixation de délai. Lorsqu’on lit l’introduction sur les moyens d’accélérer les débats ou d’accélérer les décisions qui doivent être prises, à la page 106, on mentionne ce qui suit :

Il arrive néanmoins que le débat se prolonge sur plusieurs séances, ce qui ne veut pas dire qu’il durera tant et aussi longtemps qu’un sénateur est prêt à en proposer l’ajournement.

(1550)

C’est donc la philosophie et la base même de l’utilisation de la fixation de délai. Le débat s’est étiré ou s’est prolongé sur plusieurs séances, et non pas sur une seule, comme l’indique la motion du sénateur Gold.

Le fait que, après une seule séance, le leader du gouvernement donne un préavis de fixation de délai est un précédent particulier. C’est conforme à la lettre, c’est conforme au Règlement, mais pas à l’esprit du Règlement ni à la façon dont fonctionne le Sénat.

Une autre chose est particulière : on l’a vu, le leader s’est fait tirer l’oreille pour dire qu’il représentait le gouvernement. C’est tout aussi particulier. Évidemment, on doit déterminer ce qui est une affaire du gouvernement et ce qui ne l’est pas. Le leader du gouvernement a beaucoup de discrétion pour déterminer s’il s’agit d’une affaire du gouvernement, mais une fois qu’il a fait son lit, il ne peut pas dire qu’il ne représente pas le gouvernement. Il agit manifestement comme leader du gouvernement.

C’est également un aspect particulier, parce que cette hésitation vient du fait que seul le leader du gouvernement peut utiliser une motion de fixation de délai pour les affaires du gouvernement. Lorsque le leader du gouvernement nous dit que le changement du Règlement est une affaire du gouvernement, cela va complètement à l’encontre de toute l’idéologie du discours que ce gouvernement a maintenu pour indiquer que le Sénat devait être indépendant. De toute évidence, encore une fois, on a un gouvernement qui dit quelque chose et fait autre chose.

C’est tellement vrai que, dans les décisions rendues sur une fixation de délai sur les affaires du gouvernement, encore une fois dans La procédure du Sénat en pratique, à la page 107, on fait état de cette notion. On mentionne ce qui suit :

La fixation de délais consiste à établir une limite à la période pouvant être consacrée au débat sur une affaire du gouvernement. Elle sert principalement à circonscrire le temps alloué pour l’étude des projets de loi du gouvernement. Cependant, elle peut aussi être appliquée à des motions et à d’autres éléments des affaires du gouvernement. Seul le gouvernement peut proposer de fixer un délai, et seulement pour ses propres affaires.

À la note 193, on cite une décision du Président qui dit ce qui suit :

[...] [l]e fait d’autoriser un processus qui pourrait engendrer l’application des pouvoirs de fixation de délai du gouvernement à des affaires autres que des affaires du gouvernement ne respecte pas le Règlement et nos pratiques actuelles.

Cependant, qu’est-ce qui est une affaire du gouvernement et qu’est-ce qui ne l’est pas? Au moment de rendre leurs décisions, les Présidents sont arrivés à la conclusion que dès qu’un gouvernement dit que c’est son affaire et qu’il le présente comme étant son avis, c’est une affaire du gouvernement. L’hésitation du leader et le fait que l’on discute du Règlement du Sénat, même si tout cela est techniquement conforme au Règlement, vont complètement à l’encontre de la philosophie du Règlement et des pratiques passées. Je crois que cela crée un dangereux précédent.

Je ne sais pas combien de personnes ici seront présentes dans six ou sept ans, au moment où l’on pourra rediscuter de ce précédent et où un futur leader du gouvernement décidera de l’utiliser, mais il serait bon de le noter dans nos archives. Je peux vous garantir que si la vie me le permet, je serai ici et je vais le rappeler à ceux qui voteront en faveur de cette motion de fixation de délai.

Merci.

[Traduction]

L’honorable Rose-May Poirier : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet de la motion de fixation de délai présentée par le sénateur Gold pour mettre fin au débat sur la motion no 165. Pendant la fin de semaine, après les multiples interventions sur la motion no 165, en y réfléchissant, j’ai éprouvé un sentiment de malaise. Depuis que je fais de la politique, il y a eu des moments où j’ai dû faire une pause, m’asseoir et réfléchir sérieusement à ce que nous faisions ici, et évaluer les conséquences de nos choix, mais aussi les conséquences imprévues qui pourraient survenir. Quelques questions me viennent à l’esprit.

Quelles pourraient être les conséquences inattendues non seulement de la motion, mais aussi du procédé utilisé par le gouvernement? Quel genre de précédent créons-nous? Sommes‑nous en train de nuire ou d’améliorer le discours dans cette enceinte, non seulement aujourd’hui, mais pour les années à venir? Servons-nous mieux les Canadiens et le système démocratique?

Je ne suis pas la seule à m’interroger. Au cours de la fin de semaine, beaucoup de gens de ma collectivité ont demandé ce qui se passait au Sénat, ce que le gouvernement manigançait et l’objectif qu’il poursuivait avec ces changements. Très franchement, lorsque je leur ai dit que le gouvernement avait l’intention de mettre fin au débat sur la motion en ayant recours à la fixation de délai, ils ont été choqués, mais surtout déçus et inquiets.

Il est assez difficile de répondre à la première question, chers collègues, parce que le gouvernement écourte le débat. Comment peut-on évaluer les conséquences, y compris les conséquences non désirées, de la motion no 165? Quel mal y a-t-il à prendre un mois de plus pour l’étudier plus en profondeur? Pourquoi ne pas confier l’étude de la motion au Comité du Règlement, pour qu’il en fasse rapport à la Chambre? Il existe bien d’autres moyens que le gouvernement aurait pu utiliser au lieu de recourir à une motion de fixation de délai, qui revient à utiliser une masse pour tuer une mouche.

Pour ce qui est de la deuxième question, je signale que l’on pourrait créer un précédent selon lequel un parti au pouvoir se sert d’une motion de fixation de délai pour imposer la manière dont il veut rendre des comptes au Sénat. Est-ce que le Sénat souhaite ouvrir cette porte, en permettant au représentant du gouvernement au Sénat d’imposer la manière dont le gouvernement rend des comptes? Le Sénat, la Chambre de second examen objectif, est en train d’étudier une motion qui vise à étouffer le débat sur la modification du Règlement. Il ne suffit pas à Justin Trudeau d’avoir nommé 80 sénateurs dans cette Chambre; il lui faut aussi faire taire la voix des conservateurs.

Rappelons que, lors des dernières élections, près de 6 millions de Canadiens ont voté pour le Parti conservateur, élisant 119 députés conservateurs. Que vous le vouliez ou non, nous avons un lien direct avec l’électorat des élections fédérales de 2021, et nous sommes leur voix au Sénat. C’est un fait. Ainsi, en tant que sénatrice conservatrice, je représente deux voix : une voix pour les habitants de ma province natale, le Nouveau-Brunswick, et une voix pour les Canadians de l’ensemble du pays qui ont voté pour les conservateurs lors des dernières élections. Avec la motion no 165, nous diluons la voix de près de 6 millions de Canadiens qui ont exprimé leur vote dans le dernier scrutin.

En ce qui concerne la troisième question, sur les débats tenus au Sénat, je ne vois pas en quoi nous améliorons les débats du Sénat. Durant toute ma carrière au sein de la législature provinciale et au Sénat, je n’ai jamais vu les règles qui régissent les débats dans l’une ou l’autre des deux enceintes constituer une barrière ou un obstacle. Nous ajoutons plus de variables, plus d’imprévisibilité et, d’une certaine manière, un processus plus hostile au gouvernement qui a reçu un mandat du peuple. Notre objectif est-il de commencer à remettre en cause la volonté des élus?

La quatrième question, et la plus importante, à mon avis, vise à déterminer si nous servons mieux les Canadiens et notre démocratie. Même si la motion no 165 a été présentée comme étant plus démocratique, pourquoi a-t-il fallu si longtemps au gouvernement libéral pour enfin appuyer la démocratie, alors que nous sommes à moins de 18 mois des prochaines élections? Pourquoi ne pas l’avoir fait il y a trois ans au nom de la démocratie et de l’équité pour tous les groupes de sénateurs, comme il le prétend?

(1600)

À mon avis, le moment choisi confirme que le gouvernement consulte les mêmes sondages que nous, à savoir que la chute du gouvernement libéral actuel est proche. En guise de cadeau d’adieu, le gouvernement libéral veut compliquer la vie du futur gouvernement conservateur en imposant ces règles.

Ayant fait de la politique pendant 25 ans, j’ai appris que le moment choisi est essentiel, ce qui m’amène à ma conclusion sur la raison pour laquelle le gouvernement est si désireux d’imposer sa volonté à cette Chambre.

En 2014, Justin Trudeau a décidé de mettre à pied tous les sénateurs libéraux pour se protéger du scandale des dépenses au Sénat. Il a présenté cette décision comme une tentative de réforme, mais il s’agissait en réalité d’une manœuvre politique visant à mettre de la distance entre lui et le Sénat.

La motion no 165 est la dernière étape de la réforme libérale du Sénat. Il est ahurissant, chers collègues, mais aussi tout à fait à propos, que le dernier élément de la réforme du Sénat du gouvernement libéral soit imposé au moyen d’une fixation de délai.

Tout comme le débat d’aujourd’hui sur la motion no 165, il s’agit davantage d’une motivation politique visant à empêcher le prochain gouvernement conservateur de remplir le mandat qui lui a été confié par l’électorat. S’il y a une constante chez Justin Trudeau et le gouvernement libéral depuis 2015, c’est bien la notion de « politique en tout temps », ce qui s’applique certainement aujourd’hui à la motion no 165 et à l’utilisation de la fixation de délai.

Chers collègues, si le gouvernement a la prérogative de recourir à la fixation de délai lorsqu’il le juge nécessaire dans le cadre de l’étude d’un projet de loi, employer un tel moyen à l’égard d’une motion du gouvernement pour imposer des modifications au Règlement du Sénat est à mon avis une mauvaise utilisation de cet outil. Il serait difficile de me convaincre que la fixation de délai a été mise à notre disposition pour qu’on puisse imposer des changements au Règlement aussi importants que ceux proposés dans la motion no 165.

Pourquoi le gouvernement croit-il devoir recourir à la fixation de délai pour faire adopter une motion qui est largement appuyée par les sénateurs, exception faite de ceux de l’opposition officielle? Nous sommes 13, chers collègues, mais le gouvernement veut quand même faire adopter la motion no 165 à toute allure. Qu’est-ce qui presse?

À mon avis, ce que nous voyons ici aujourd’hui, c’est l’échec de la réforme du Sénat par Justin Trudeau. Avant 2015, des sénateurs qui représentaient le gouvernement siégeaient dans chaque comité, et il y avait des présidents et des vice-présidents provenant du gouvernement et de l’opposition. Au Comité du Règlement, il pourrait y avoir un dialogue entre le gouvernement et l’opposition sur les modifications à apporter au Règlement.

Aujourd’hui, il n’y a plus de dialogue entre le gouvernement et l’opposition. Nous savons tous qui est l’opposition : les conservateurs au Sénat. Peut-on dire qui représente le gouvernement? Est-ce que ce sont les trois sénateurs du bureau du représentant du gouvernement? Qu’en est-il du Groupe des sénateurs indépendants, du Groupe progressiste du Sénat ou du Groupe des sénateurs canadiens? Nous ne le savons pas. Comment peut-il y avoir un dialogue constructif entre le gouvernement et l’opposition lorsque leurs représentants ne se croisent que dans l’enceinte du Sénat?

Chaque groupe ici a probablement une opinion sur ce que le Règlement devrait être, sans parler des sous-groupes qui ont un avis probablement différent sur la question. Par conséquent, le gouvernement libéral a décidé de présenter une motion qui donne quelque chose à tout le monde, sauf à l’opposition.

Depuis 1999, j’ai eu l’occasion de siéger de l’autre côté de l’allée, sur les banquettes du gouvernement, pendant cinq ans au Sénat et huit ans à l’assemblée provinciale. Comme beaucoup de mes collègues le savent, j’ai rarement, pour ne pas dire jamais, participé aux jeux politiques qui opposent les partis. Cela ne m’a pas empêchée d’exiger des comptes auprès du gouvernement ou de défendre des politiques dans deux institutions. Cependant, je ne suis pas à l’aise avec ce que le gouvernement tente de faire et qu’il réussira probablement à faire.

À la lumière de ce que j’ai entendu la semaine dernière et de ce que j’ai vu ces derniers mois et ces dernières années, je ne peux pas rester silencieuse, car c’est l’objectif de la motion : faire taire la voix des conservateurs au Sénat en diluant notre statut par rapport aux autres partis. La pente vient de devenir plus glissante, chers collègues. Si je ne peux rien faire pour l’arrêter, comme me l’ont demandé mes concitoyens, je peux au moins faire part de mes inquiétudes. Ai-je raison ou tort? L’avenir nous le dira. Cependant, je veux encourager tous mes collègues à réfléchir attentivement à la voie dans laquelle nous nous engageons. Merci.

L’honorable Leo Housakos : Honorables sénateurs, je veux aussi donner mon opinion au sujet des motions nos 169 et 165. Comme la sénatrice Poirier, je ne crois pas que le fait de donner mon opinion changera quoi que ce soit au résultat final, mais je pense qu’il est important de consigner mon opinion au compte rendu. De cette façon, il n’y aura aucune ambiguïté dans 5, 10 ou 12 ans.

Ce qui importe vraiment n’est pas le risque pour la démocratie ou pour les rôles de l’opposition ou du gouvernement. L’enjeu existentiel ici est de savoir quel type d’institution sera le Sénat du Canada dans une semaine, dans un mois ou dans un an.

Le Sénat a des défis à relever depuis quelque 157 ans. Ces défis se présentent parce que les sénateurs ne sont pas élus. Contrairement aux députés, nous ne représentons pas la volonté démocratique de la population. Or, nous jouissons assurément des privilèges qui découlent de la volonté exprimée lors des élections.

Ces défis existent, mais ce n’est pas parce que la composition du Sénat n’est pas représentative du résultat des dernières élections. Ce qui est impératif et ce qui s’est passé historiquement, c’est que tous les sénateurs ont compris que leur façon de se comporter dans les limites de la démocratie canadienne était fondamentale pour asseoir la crédibilité de cette institution.

La démocratie a deux volets : les élections générales et le Parlement. Bien entendu, les résultats des élections générales déterminent qui gouverne, moyennant l’appui récolté au Parlement. Toutefois, dans l’intervalle entre les élections, la démocratie s’exerce au Parlement, c’est-à-dire à la Chambre des communes et au Sénat. Il est important que les voix minoritaires exercent un rôle important au Parlement entre les élections. Quand je dis « voix minoritaires », et quand on parle des voix minoritaires au Sénat, habituellement, cela désigne ceux qui perdent les élections. Ces voix doivent se faire entendre au Parlement entre les élections pour exiger des comptes du gouvernement et influencer ses décisions.

Personne ne veut enlever son mandat ou son droit de gouverner au gouvernement. Nous ne l’avons certainement pas fait en 2015, lorsque le gouvernement Trudeau a remporté les élections, ni aux deux élections générales subséquentes. Conformément à sa plateforme électorale, il a imposé à cette institution le mode de fonctionnement qui faisait son affaire. Nous reconnaissions qu’il y avait une limite à ce à quoi nous pouvions nous opposer, même si nous détenions la majorité au lendemain des élections.

Il faut comprendre que, depuis le début du mandat de ce gouvernement, cette institution reflète de moins en moins les résultats des élections générales et la volonté du public, alors que la Chambre des communes, au contraire, les reflète de plus en plus.

Il est également impératif de comprendre que, à la fin d’un gouvernement — et tous les gouvernements ont une date d’expiration au Canada, c’est ce qu’on appelle la démocratie —, cette institution devient beaucoup trop puissante pour son propre bien. Nous en avons l’exemple aujourd’hui, où 80 des 105 sénateurs ont été nommés par un premier ministre qui est sur le point de partir. Il n’est pas nécessaire d’être un génie pour comprendre. Si vous suivez le processus politique démocratique depuis assez longtemps, vous savez que, si le public ne se débarrasse pas du premier ministre, c’est le Parti libéral qui le fera.

Pourtant, cette institution représente de manière disproportionnée ce dirigeant, ce qui a toujours été son problème. C’était le problème à la fin des gouvernements Harper, Chrétien et Mulroney. Je ne peux pas remonter plus loin, car j’ai un certain âge. Lorsqu’il atteint ce moment historique, chaque groupe majoritaire de cette institution comprend ses limites. Il comprend que le pouvoir est important, que le pouvoir corrompt et que le pouvoir absolu corrompt absolument.

Chers collègues, il est incroyable à mes yeux que huit ans et demi après le début d’une période au cours de laquelle le gouvernement Trudeau a remporté trois élections successives... Les libéraux ont présenté leur programme, qui a été appuyé à la Chambre des communes après le premier mandat d’un gouvernement minoritaire. Il y a eu deux élections qui ont donné aux libéraux un gouvernement minoritaire, et leur programme est passé ici comme une lettre à la poste. Il est passé par cette institution sans rencontrer le moindre obstacle. Nous avons essayé de tenir des débats vigoureux, parfois avec succès, parfois sans succès. Nous savons tous que, les fois où nous avons réussi à avoir des débats vigoureux, c’est parce que la petite opposition au Sénat a fait des pieds et des mains pour que nous tenions ces débats vigoureux. Sans aucun doute, des sénateurs nommés par Justin Trudeau y ont participé. Je ne veux pas minimiser ce fait important.

(1610)

Il est incroyable que, après huit années et demie pendant lesquelles le gouvernement n’a eu aucune difficulté à faire passer son programme dans cette enceinte, tout à coup, les libéraux pensent qu’il est impératif et essentiel d’aider cette institution en changeant le Règlement et les procédures de cette Chambre indépendante et démocratique. La seule chose ou plutôt les deux choses qui font l’indépendance des sénateurs par rapport au premier ministre qui les nomme, quel qu’il soit, sont leur mandat — le premier ministre ne peut pas les congédier, même s’ils lui disent qu’il fait un travail lamentable ou qu’ils votent contre ses projets de loi — et leur complète indépendance pour ce qui est du Règlement, des procédures et de leurs droits en tant que parlementaires.

Dans les 157 années d’histoire du Sénat, jamais une motion n’a été présentée par un représentant du gouvernement ou un leader, appelez-le comme vous voulez, en vue de modifier les règles et les procédures de cette institution. Jamais, en 157 ans, un gouvernement faible n’a eu besoin d’un mécanisme de fixation de délai pour approuver la violation et le piétinement de chacun de vos droits et privilèges; cela ne s’est jamais fait dans l’histoire de cette institution. Pourquoi en a-t-on soudainement besoin? Vous devriez vous poser ces questions. Pourquoi, dans ce nouveau Sénat indépendant, les leaders des groupes sont-ils à l’origine du débat le plus vigoureux sur ces modifications de la règle de procédure? Auparavant, nous n’en avions que deux; aujourd’hui, nous en avons trois ou quatre. Dans quelques années, il y en aura peut-être 15. Qui sait? Bien entendu, tout cela a pour but d’améliorer le débat.

Je dirai ceci : la fixation de délai est un outil légitime dont dispose le gouvernement parce que c’est son droit de gouverner, mais il ne devrait jamais l’imposer pour apporter des modifications aux règles et aux procédures dans l’une ou l’autre des deux Chambres. Soit dit en passant, ce genre de manœuvre ne serait jamais tentée à la Chambre des communes; il y aurait une émeute, même chez les partenaires de coalition du gouvernement, les néo‑démocrates.

Cependant, je suis déchiré au sujet de la motion no 169, car je suis ici depuis assez longtemps. J’ai siégé au gouvernement et dans l’opposition. Soit dit en passant, dans notre système démocratique parlementaire britannique, il y a un gouvernement et une opposition. Je me souviens lorsque je siégeais du côté du gouvernement et que nous étions 65 ou 70. Il y avait 30 sénateurs du côté de l’opposition, et ils étaient agaçants. Les sénateurs Cordy, Massicotte et Cowan — est-ce que vous en vous souvenez, sénateur Tannas? Ils étaient agaçants. Si vous croyez que nous le sommes, regardez ces vieux débats. Or, en temps voulu, je me suis rendu compte que c’est ce qu’une opposition est censée faire. C’est ce qu’on appelle la démocratie : être agaçants, avoir des débats vigoureux et rendre la vie aussi difficile que possible au gouvernement.

Lorsqu’ils présentent des motions en accordant les mêmes droits, privilèges et outils dans la boîte à outils à un autre caucus plus nombreux que celui de l’opposition dont les membres croient qu’ils devraient bénéficier des mêmes droits parce qu’ils forment un groupe plus nombreux au Sénat même s’ils ont été nommés par le gouvernement, cela n’a aucun sens. C’est un argument déconcertant. On permet en fait à un groupe plus nombreux d’étouffer et de noyer les quelques voix de l’opposition qui restent. Si ces voix se sont faites si rares en ces murs, c’est uniquement à cause de la nature de l’institution. Malheureusement, il ne s’agit pas d’une assemblée élue. Si ce l’était, il y aurait beaucoup plus de conservateurs assis de ce côté-ci depuis les deux dernières élections. Nous devons être conscients de cette réalité et la respecter, peu importe à quel endroit on se trouve dans le spectre politique.

Je ne reproche rien à mes collègues indépendants, car vous respectez la volonté du gouvernement. C’est une motion du gouvernement. Il utilise la fixation de délai pour la faire adopter au lieu de respecter une tradition vieille de 157 ans, qui consiste à en débattre et à en discuter au Comité du Règlement. Nous ne parviendrons peut-être pas à un consensus. Dans l’enceinte du Sénat, la majorité a le droit de changer les règles et les procédures. C’est ainsi que les choses fonctionnent. Nous avons tous le droit de faire cela.

Examinons-la article par article et voyons quel en seront les répercussions. Soyons assez intelligents pour réaliser que dans six ou huit ans, ceux d’entre vous qui se trouveront dans cette Chambre seront peut-être assis de ce côté-ci, sous un gouvernement Poilievre qui entrera dans sa huitième année et aura nommé 60 ou 70 sénateurs. Pensez à une motion en particulier, où il y a une dizaine de représentants du gouvernement parce que celui en place a établi ce précédent. Notre institution est régie par la Constitution et les précédents non écrits que nous établissons au fil des ans. Nous sommes en train d’en établir un. Le gouvernement peut apporter des modifications unilatérales au Règlement. Il peut recourir à la fixation de délai pour les adopter et dans cette enceinte, nous n’avons pas besoin de consensus. Si vous avez une majorité de sénateurs nommés, ils adopteront tout ce qu’ils veulent.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Je suis désolée, votre temps de parole est écoulé.

L’honorable Salma Ataullahjan : Honorables sénateurs, j’interviens aujourd’hui au sujet de la motion de fixation de délai. Qu’est-ce qui me pousse à prendre la parole? J’aimerais vous faire part d’une histoire personnelle qui nous renseigne sur l’importance d’une saine démocratie.

À l’époque où ma fille Shaanzeh était en quatrième année, notre député fédéral a lancé un concours et invité les élèves à rédiger un texte sur la démocratie. Shaanzeh a remporté ce concours. Le prix était un voyage à Ottawa, le siège de la démocratie canadienne, où l’on assisterait à des débats. Vous devez vous demander sur quel sujet Shaanzeh a écrit pour remporter le concours.

Eh bien, mon père, qui était sénateur, venait d’être emprisonné. En effet, la loi martiale était en vigueur et tous les sénateurs et députés du gouvernement avaient été sortis de chez eux et emprisonnés pendant la nuit. Shaanzeh ne m’avait jamais posé de questions là-dessus. Je ne m’étais pas rendue compte de l’effet que l’incident avait eu sur elle jusqu’à ce qu’elle rédige cette composition.

Qu’a-t-elle écrit? Elle a écrit: « J’ai beaucoup de chance de vivre au Canada, où je peux m’exprimer librement sur n’importe quoi, sans risquer la prison. » Je savais de quoi elle parlait, mais ses camarades de classe ont répondu: « Mon Dieu, Shaanzeh, ton grand-père est en prison? Qu’a-t-il fait? Qui a-t-il tué? » En effet, ceux d’entre nous qui vivent au Canada et les enfants qui sont nés et ont grandi ici sont conscients que l’on ne se fait pas emprisonner pour avoir exprimé son opinion ou avoir pris part à un débat.

Lorsqu’elle est venue à Ottawa, je l’ai accompagnée. Je ne me doutais pas que, bien des années plus tard, je travaillerais ici. Je suis tellement choyée.

Je crois qu’il est important de ne pas écourter hâtivement ce débat, car cela pourrait avoir des effets persistants sur nos institutions démocratiques. J’ai de la difficulté avec la fixation de délai dans cette enceinte, car je crois que nous ne devrions jamais limiter la capacité des parlementaires à s’exprimer. Nous sommes avant tout la Chambre de second examen objectif, où il y a beaucoup de débats. Ces débats font partie de notre mandat, et nous avons le grand privilège de pouvoir nous exprimer librement.

Je suis arrivée au Canada en 1980, et je suis fière de dire que je suis ici chez moi. Au fil des ans, j’ai vu à quel point il est facile pour les démocraties de dérailler. Je crois que nous sommes chanceux de siéger à la Chambre rouge et de prendre le temps de débattre en profondeur des questions importantes qui auront souvent une incidence sur notre travail, mais aussi, en fin de compte, sur la vie des Canadiens.

Même ma fille, alors qu’elle n’avait que 9 ans, comprenait l’importance non seulement d’exprimer ses préoccupations, mais aussi d’écouter les idées des autres. Une démocratie demande du travail. Il faut rester vigilant, écouter les autres et faire preuve d’empathie.

Honorables sénateurs, je vous exhorte à vous rappeler que la motion no 169 doit transcender les lignes de parti et que nous devons penser au bien-être de notre démocratie pour les générations à venir. Merci.

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Honorables sénateurs, je vais participer au débat au sujet de l’amendement et de la motion principale si la motion no 169 visant à fixer un délai à ce débat est adoptée. Comme il est tard dans le débat sur la motion de fixation de délai, je réalise maintenant que le temps dont je dispose pour présenter toutes mes préoccupations sera limité. Je souligne une préoccupation dans mon discours sur la motion principale, mais à cause de la motion de fixation de délai, qui ne nous accorde que six heures, notre leader, qui dispose d’un temps de parole illimité, pourrait prendre une bonne partie de ce temps, ce qui ne me laissera que 15 minutes...

Le sénateur Plett : Cinq et demie.

La sénatrice Martin : Je parle du débat de six heures, sénateur.

(1620)

Cette fixation de délai vise réellement à limiter le débat et la discussion qui doit se poursuivre au sujet de cette motion à la portée très large.

Le Feuilleton, qui est notre plumitif, est très volumineux. Il comporte deux rubriques : « Affaires du gouvernement » et « Autres affaires ». Si cette motion à la portée très large qui propose des changements au Règlement était inscrite à titre de motion régulière sous la rubrique « Autres affaires », nous aurions suffisamment de temps pour en débattre et examiner les détails plus attentivement. Nous pourrions peut-être même la renvoyer au Comité du Règlement, comme il se doit.

Certains d’entre vous diront que ce dossier a été étudié par divers comités, y compris le Comité du Règlement. Toutefois, tout au long de ma carrière de sénatrice, j’ai appris à quel point il est important que les rapports du Comité du Règlement fassent l’objet d’un consentement unanime quand ils reviennent au Sénat, parce que ce ne sont pas tous les sénateurs qui siègent à ce comité. Certains sénateurs font partie de l’opposition tandis que d’autres sont indépendants. Tous les sénateurs peuvent participer aux débats lors des réunions du comité. En ce qui concerne le vote sur le rapport, toutefois, il faut obtenir le consentement unanime et l’aval de toutes les personnes présentes. Les modifications proposées dans les rapports peuvent ensuite être examinées dans cette enceinte et mises aux voix et, espérons-le, obtenir un consentement unanime parce que le Règlement touche tout le monde.

Certains propos tenus par mes collègues m’inquiètent. Je tiens à exprimer officiellement mes préoccupations à ceux d’entre vous qui se demandent encore s’ils vont appuyer cette motion de fixation de délai. Nous faisons appel à vous et nous vous disons qu’il nous faut plus de temps. Il s’agit d’une motion qui vise à modifier en profondeur de nombreuses dispositions de notre Règlement, et même la modification d’une seule disposition nécessiterait un débat en bonne et due forme. Comme je l’ai dit, à mon avis, cette motion devrait être renvoyée au Comité du Règlement.

Le sénateur Carignan a déjà expliqué la situation en citant une partie des précédents à ce chapitre. Le gouvernement a des moyens à sa disposition. C’est pour cela qu’il s’agit d’une motion du gouvernement. Je suis au courant, car j’ai déjà fait partie du gouvernement. Je pense que je suis probablement la personne qui a présenté le plus de motions de fixation de délai, mais c’était toujours pour des projets de loi, et non pour des motions. Le gouvernement a divers moyens à sa disposition, comme la réorganisation des affaires du gouvernement afin de donner la priorité à ce qu’il veut mettre à l’étude en premier. Puis, il y a le recours à la fixation de délai. Je suis favorable à ce qu’on l’utilise pour les débats sur des projets de loi lorsque le gouvernement doit faire avancer son programme. Cet outil sert à cela. Toutefois, au cours de ma carrière dans cette enceinte, que ce soit au gouvernement ou dans l’opposition, je n’ai jamais vu une motion du gouvernement visant à modifier non seulement une disposition, mais de nombreuses dispositions du Règlement, et pouvant avoir des conséquences prévisibles et imprévisibles pour les années à venir, jusqu’à ce qu’on apporte de nouveaux changements, peut-être au moyen d’une autre motion du gouvernement. J’espère que nous n’allons pas établir un précédent, car c’est ce qu’on s’apprête à faire en ce moment.

Le sénateur Plett : On créera un précédent.

La sénatrice Martin : C’est ce qui m’inquiète beaucoup et me rend très mal à l’aise, comme l’a exprimé clairement la sénatrice Poirier. Cette situation me dérange également.

Lors d’un débat précédent, j’ai parlé d’une simple modification du Règlement qui, selon nous, aurait facilité la vie non seulement du gouvernement, mais aussi de l’opposition, en ce qui concerne le changement de la composition des comités. Il s’agissait d’une substitution, et non d’un changement complet, pour que, lorsqu’un sénateur en remplace un autre à une réunion de comité, il devienne membre du comité pour la durée de la réunion. Cela figure sur le site Web. Les sénateurs remplaçants auraient eu les mêmes responsabilités et les mêmes droits que les sénateurs qu’ils remplacent à une réunion de comité. Nous pensions qu’une substitution rapide serait plus facile à réaliser et plus efficace. J’ai proposé ce changement au Comité du Règlement, et il a été adopté à l’unanimité. Par contre, quand le rapport est arrivé au Sénat, comme je l’ai expliqué, un sénateur s’est fortement opposé à ce changement. Il a souligné l’importance pour les sénateurs d’être présents lors des délibérations des comités et d’avoir le plein droit d’y être, même s’ils ne sont pas des remplaçants, mais bien des membres à part entière à cette réunion de comité. Je me suis dit que c’était un point important.

Je me souviens que les greffiers me regardaient d’un air entendu, car ces changements de règles doivent être examinés avec soin en tenant compte de leurs conséquences et de la manière dont ils nuisent ou contribuent à ce que nous essayons de faire au Sénat. J’ai appris ma leçon en tant que leader adjointe du gouvernement à propos d’une simple modification du Règlement et du fait que s’il y a de l’opposition, c’est qu’il peut y avoir une bonne raison. En effet, il est d’autant plus important que les membres de l’opposition ou les sénateurs indépendants et non affiliés approuvent cette modification du Règlement, car elle aura une incidence sur eux.

Comme l’a fait remarquer la sénatrice Batters, le fait que les droits des sénateurs non affiliés soient réduits s’avère très préoccupant. Cette situation devrait préoccuper chacun d’entre nous, car elle pourrait concerner l’un d’entre nous à un moment ou à un autre. Nous devons penser à ce qu’il en est lorsque l’inverse se produit.

Je m’exprime aujourd’hui dans l’opposition, mais je comprends la frustration que beaucoup d’entre vous peuvent ressentir face aux efforts que vous avez déployés pour essayer de modifier certaines règles. J’espère néanmoins que vous pouvez également constater qu’en tant que Sénat, nous avons fait quelques aménagements remarquables ou des changements ponctuels. Par exemple, grâce à l’expression « avec le consentement du Sénat », nous permettons à de nombreuses choses de se produire, et, grâce aux ordres sessionnels, de nombreuses choses peuvent entrer en vigueur.

Nous avons été une opposition à la fois dure et embêtante. Cependant, lorsque nous étions au gouvernement, l’opposition libérale a été d’une grande efficacité. J’ai beaucoup appris d’elle. J’étais consciente du rôle que ces sénateurs devaient jouer dans l’opposition et du rôle que nous devions assumer au gouvernement. Je suis consciente de l’efficacité des moyens dont le gouvernement dispose.

À cause de cette motion de fixation de délai qui limite le débat, j’ai l’impression que je n’aurai que deux autres occasions de prendre la parole, au sujet de l’amendement et de la motion principale, alors que je pourrais faire une multitude de discours sur chacune de mes préoccupations au sujet du Règlement; certains de ces problèmes ont été portés à mon attention dans le cadre du débat d’aujourd’hui.

Concrètement, cette motion de fixation de délai permettra au gouvernement de modifier le Règlement en s’appuyant sur une position de pouvoir parce qu’il a la possibilité de limiter le débat. C’est un abus de pouvoir de recourir à cet outil pour quelque chose d’aussi important que les règles qui s’appliqueront à l’ensemble du Sénat. Chacun d’entre nous sera touché — que nous formions le gouvernement ou l’opposition, que nous soyons affiliés à un groupe ou non affiliés. Honorables sénateurs, je vous exhorte tous à réfléchir à ce que nous nous apprêtons à faire en limitant le débat et en permettant au gouvernement de recourir à cet outil pour une motion qu’il a présentée afin de modifier de nombreuses règles, et non pas une seule. Il s’agit de règles qui limiteront les pouvoirs et les droits de certains sénateurs ici. Je vous incite à saisir l’occasion de ne pas appuyer cette motion de fixation de délai. Nous pouvons rejeter cette motion et reprendre le débat. C’est ce que je vous demande à tous. Je vous prie d’examiner attentivement les répercussions et les conséquences imprévues de ce que nous sommes sur le point de faire avec cette motion. Merci.

Le sénateur Plett : Bravo!

L’honorable Jim Quinn : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour discuter de la nécessité de proposer la fixation de délai à ce moment précis du débat concernant le Règlement du Sénat. Il est ironique que le seul amendement que les sénateurs puissent apporter à la motion visant à modifier le Règlement soit le mien, puisque l’adoption d’une motion de fixation de délai à ce moment-ci empêchera la proposition de tout autre amendement.

Ce matin, par pure coïncidence, le Comité du Règlement a entendu le sous-greffier, Procédure, de la Chambre des communes et le directeur des opérations, Affaires parlementaires, du Bureau du Conseil privé, concernant les réponses différées et les réponses aux questions écrites — le sujet même de l’amendement que j’ai proposé.

Étant donné que les sénateurs ont un horaire chargé, qu’il y a parfois des conflits d’horaire entre les réunions des divers comités et qu’il est peu probable que tous aient eu le temps de consulter la transcription de la réunion de ce matin, j’aimerais porter les questions suivantes à votre attention.

Lorsque nous lui avons demandé si le gouvernement est tenu de fournir une réponse complète ou directe aux questions écrites, le sous-greffier, Procédure, de la Chambre des communes a déclaré :

Les décisions de la présidence sont plutôt unanimes à savoir que le Président de la Chambre des communes n’a pas le pouvoir de juger de la qualité, de l’exhaustivité ou de l’exactitude des réponses fournies.

(1630)

En outre, le greffier a ajouté :

Il est même possible pour le gouvernement de répondre : « Nous ne sommes pas en mesure de répondre. » C’est vu comme une réponse.

Le Bureau du Conseil privé a également indiqué qu’il employait un langage restrictif lorsqu’il n’est pas en mesure de répondre complètement à une question.

Ce qui déclenche le renvoi au comité, c’est le fait de dépasser le délai pour la production d’une réponse; le contenu de la réponse n’a aucune importance. Aux termes de la motion no 165, la règle serait de faire un renvoi au Comité du Règlement lorsqu’une réponse ou une explication de l’absence de réponse n’est pas donnée dans le délai prévu. Je voulais clarifier ce point, parce que, hier, lorsqu’on m’a posé la question, je n’ai pas bien expliqué que, concrètement, l’amendement que je propose ne changera pas le fait qu’une réponse inadéquate n’entraîne pas un renvoi au Comité du Règlement. Je voulais que ce soir clair.

Mon amendement supprime simplement un doublon inutile et une lacune de la procédure qui donnerait au gouvernement la possibilité de ne même pas tenter de répondre à une question en expliquant pourquoi une réponse n’a pas été fournie. À la Chambre des communes, toutes les questions reçoivent une réponse dans un délai de 45 jours. Il devrait en être de même au Sénat. En fait, ce matin, lorsqu’on a demandé si on pouvait adopter ce délai pour le processus des questions au Sénat proposé dans l’amendement, on a répondu que c’est possible. Par conséquent, je ne comprends pas pourquoi nous voterions en faveur de la motion de fixation de délai avant que le compte rendu des délibérations du comité soit officiellement publié pour vous donner le temps de réfléchir.

Chers collègues, ce débat sur les délais de réponse — 60 jours par rapport à 45 jours — a pour but d’assurer l’égalité de tous les parlementaires. Si nous conservons le délai de 60 jours, la Chambre des communes sera avantagée en raison de son délai plus strict. Le Bureau du Conseil privé a affirmé ceci :

[…] En l’absence de délai, il y a toujours un risque que, lorsqu’il y en a un à la Chambre des communes, on accorde la priorité à ces questions, étant donné leur nombre […]

Enfin, le Bureau du Conseil privé a dit ce qui suit :

En ce qui concerne les réponses du Sénat, lorsque nous affectons les questions, nous indiquons dans notre formulaire d’affectation qu’il faut y répondre dans un délai raisonnable. Nous interprétons cela comme étant aussi proche que possible de ce que nous utilisons à la Chambre des communes.

Je termine mes observations en soulignant que, dans le cadre d’une demande d’accès à l’information ou de renseignements personnels sur la méthode employée par le gouvernement pour établir l’ordre de priorité des questions écrites du Sénat, le document a révélé que, s’agissant des questions du Sénat, les délais sont souples s’il y a d’autres urgences.

Honorables sénateurs, je pense que nous devons changer cette culture. Cette motion est un petit pas dans cette direction, puisqu’elle permettrait que, en tant que parlementaires, nous ayons un Règlement comparable à celui de l’autre endroit. Je crains que, en tant que parlementaires et en tant que sénateurs, nous ne soyons pas pris au sérieux à cause de notre propre inaction par rapport à l’adoption de mesures progressives, comme celle que je propose, qui n’enlève rien du tout aux modifications du Règlement. Ces mesures, en fait, nous mettent sur la voie de l’obtention d’une plus grande reconnaissance en tant que parlementaires.

Je vous remercie de m’avoir écouté.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : Non.

Des voix : Oui.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur la Présidente intérimaire : À mon avis, les oui l’emportent.

Et deux honorables sénateurs s’étant levés :

Son Honneur la Présidente intérimaire : Convoquez les sénateurs pour un vote à 17 h 33.

(1730)

La motion, mise aux voix, est adoptée :

POUR
Les honorables sénateurs

Al Zaibak LaBoucane-Benson
Arnot Lankin
Aucoin Loffreda
Audette MacAdam
Boniface Massicotte
Burey McBean
Busson McCallum
Cardozo McNair
Clement Mégie
Cordy Miville-Dechêne
Cotter Moncion
Coyle Moodie
Dalphond Omidvar
Dasko Osler
Deacon (Nouvelle-Écosse) Oudar
Deacon (Ontario) Petitclerc
Dean Petten
Downe Ravalia
Forest Ringuette
Francis Robinson
Gerba Ross
Gold Saint-Germain
Greene Sorensen
Greenwood Tannas
Harder Varone
Jaffer Verner
Kingston White
Klyne Woo
Kutcher Yussuff—58

CONTRE
Les honorables sénateurs

Ataullahjan Pate
Batters Patterson
Black Plett
Brazeau Poirier
Carignan Quinn
Housakos Richards
MacDonald Seidman
Marshall Smith
Martin Wallin
Oh Wells—20

ABSTENTION
L’honorable sénatrice

Galvez—1

(1740)

Motion tendant à modifier le Règlement du Sénat—Rejet de la motion d’amendement

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Gold, c.p., appuyée par l’honorable sénatrice LaBoucane-Benson,

Que le Règlement du Sénat soit modifié :

1.par substitution, aux mots « leader du gouvernement », des mots « leader ou représentant du gouvernement » dans les articles 2-4(2), 3-6(2), 4-3(1), 4-8(1)a), 5-7m), 6-5(1)b), 12-5a), 12-23(2) et (3), et 14-1(2);

2.aux articles 3-3(1) et (2), 4-2(8)b), et 7-4(2), par substitution, aux mots « 18 heures », des mots « 19 heures » dans les notes marginales, s’il y a lieu, et le texte des articles;

3.à l’article 4-2(2), par substitution, au chiffre 15, du chiffre 18 dans la note marginale et le texte de l’article;

4.à l’article 4-2(8)a), par substitution, aux mots « Si un whip ou le représentant désigné d’un groupe parlementaire reconnu », des mots « Si un whip, un agent de liaison ou le représentant désigné d’un parti reconnu ou d’un groupe parlementaire reconnu »;

5.par :

a)substitution, aux articles 4-9 et 4-10, de ce qui suit :

« Réponses différées et questions écrites

Réponses différées à des questions orales

4-9. (1) Lorsqu’il répond à une question orale pendant la période des questions, un sénateur peut indiquer qu’une réponse différée sera fournie par écrit conformément aux dispositions du présent article.

Questions écrites

4-9. (2) Sous réserve du paragraphe (5), un sénateur peut soumettre au gouvernement une question écrite ayant trait aux affaires publiques en l’envoyant par écrit au greffier dans l’un des cas suivants :

a) une réponse écrite est demandée;

b) la question vise à obtenir des renseignements d’ordre statistique ou peu faciles à rassembler.

Publication des questions écrites

4-9. (3) Sur réception d’une question écrite, le greffier la fait publier au Feuilleton et Feuilleton des préavis le jour de séance suivant et ensuite le premier jour de séance de chaque semaine jusqu’à la première des éventualités suivantes :

a) une réponse est déposée;

b) une explication écrite de la raison pour laquelle une réponse n’a pas été fournie est déposée;

c) la question est retirée;

d) l’expiration du délai de 60 jours prévu dans le présent article pour une réponse ou une explication.

Retrait d’une question écrite

4-9. (4) Le sénateur qui a soumis une question écrite peut la retirer par la suite en écrivant au greffier, qui fera inclure une note à cet effet au Feuilleton et Feuilleton des préavis la prochaine fois que la question y aurait été publiée.

Nombre maximal de questions écrites

4-9. (5) Un sénateur ne peut soumettre une question écrite s’il en a déjà quatre publiées au Feuilleton et Feuilleton des préavis en vertu des dispositions du paragraphe (3).

Réponse dans les 60 jours

4-9. (6) Dans les 60 jours suivant la date à laquelle le leader ou représentant du gouvernement, ou un sénateur-ministre, indique qu’une réponse différée sera fournie à une question orale conformément au présent article, ou la date à laquelle une question écrite figure pour la première fois au Feuilleton et Feuilleton des préavis, le leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement, dépose soit la réponse du gouvernement à la question, soit une explication écrite justifiant l’absence de réponse.

Dépôt

4-9. (7) Une réponse ou une explication à fournir en vertu du présent article peut être déposée soit pendant les réponses différées, qui sont appelées à la fin de la période des questions, soit auprès du greffier. Une copie de tout document ainsi déposé est remise au sénateur qui a posé la question, et la réponse différée à une question orale est imprimée dans les Débats du Sénat de la date à laquelle le dépôt est inscrit aux Journaux du Sénat.

Absence de réponse ou d’explication

4-9. (8) Si le gouvernement n’a déposé ni réponse ni explication justifiant l’absence de réponse dans le délai de 60 jours prévu au présent article, l’absence de réponse est renvoyée d’office au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement pour examen et rapport, ce renvoi étant inscrit aux Journaux du Sénat dès que possible. »;

b)la mise à jour des désignations numériques des articles 4-11 à 4-16 actuels à celles des articles 4-10 à 4-15;

6.à l’article 4-13(3) actuel, par substitution, aux mots « est déterminé par le leader ou le leader adjoint du gouvernement », des mots « est déterminé par le leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement »;

7.par substitution, à l’article 6-3(1), de ce qui suit :

« Temps de parole

6-3. (1) Sauf disposition contraire, le temps de parole dans un débat est :

Certains leaders et facilitateurs

a) illimité dans le cas du leader ou représentant du gouvernement, du leader de l’opposition, et du leader ou facilitateur du parti reconnu ou du groupe parlementaire reconnu qui compte le plus grand nombre de membres, à l’exception, s’il y a lieu, des partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus auxquels appartiennent soit le leader ou représentant du gouvernement, soit le leader de l’opposition;

Autres leaders et facilitateurs

b) limité à 45 minutes dans le cas des leaders et facilitateurs autres que ceux prévus à l’alinéa a);

Parrain d’un projet de loi

c) limité à 45 minutes aux étapes des deuxième et troisième lectures dans le cas du parrain du projet de loi, sauf si celui-ci est l’un des sénateurs prévus à l’alinéa a);

Porte-parole d’un projet de loi

d) limité à 45 minutes aux étapes des deuxième et troisième lectures dans le cas du porte-parole du projet de loi, sauf si celui-ci est l’un des sénateurs prévus à l’alinéa a);

Sénateurs désignés

e) limité à 45 minutes aux étapes des deuxième et troisième lectures dans le cas d’un autre sénateur, désigné séparément par le leader ou facilitateur de chaque parti reconnu ou groupe parlementaire reconnu, à l’exception de ceux auxquels appartiennent le parrain et porte-parole;

Autres orateurs

f) limité à 15 minutes dans le cas de tout autre orateur. »;

8.par substitution, aux articles 7-1(1) et (2), de ce qui suit :

« Accord pour fixer un délai

7-1. (1) Le leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement peut, à tout moment pendant une séance, annoncer qu’il est arrivé à un accord avec les représentants des partis reconnus et des groupes parlementaires reconnus pour attribuer un nombre déterminé de jours ou d’heures pour terminer le débat :

a) soit sur un projet de loi du gouvernement à une ou plusieurs étapes, y compris l’examen en comité;

b) soit sur une autre affaire du gouvernement devant le Sénat ou en comité.

Motion de fixation du délai convenu

7-1. (2) Dès cette annonce, le leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement peut, sans préavis, présenter une motion de fixation du délai convenu. »;

9.par substitution, aux articles 7-2(1) et (2), de ce qui suit :

« Aucun accord pour fixer un délai

7-2. (1) Le leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement peut, à tout moment pendant une séance, annoncer qu’il n’a pu arriver à un accord avec les représentants des partis reconnus et des groupes parlementaires reconnus pour fixer un délai pour terminer le débat précédemment ajourné :

a) soit sur un projet de loi du gouvernement à une étape, y compris l’examen en comité;

b) soit sur une autre affaire du gouvernement.

Préavis d’une motion de fixation de délai

7-2. (2) Dès cette annonce, le leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement peut donner préavis d’une motion de fixation d’un nombre déterminé de jours ou d’heures pour terminer le débat ajourné, y compris l’examen d’un projet de loi en comité. »;

10. par substitution, à l’article 7-3(1)f), de ce qui suit :

« f) le temps de parole de chaque sénateur est limité à 10 minutes, à l’exception du leader ou représentant du gouvernement, du leader de l’opposition, et du leader ou facilitateur de tout autre parti reconnu ou groupe parlementaire reconnu, qui disposent chacun de 20 minutes; »

11.à l’article 7-3(2), par suppression des mots « à 18 heures » et des mots « à 20 heures »;

12.à l’article 7-4(5)d), par substitution, aux mots « le whip du gouvernement », des mots « le whip ou agent de liaison du gouvernement »;

13.par substitution, aux articles 9-5(1) à (3), de ce qui suit :

« (1) Le Président demande au whip ou agent de liaison du gouvernement, au whip de l’opposition, et aux whips ou agents de liaison des trois partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus qui comptent le plus grand nombre de membres, à l’exception, s’il y a lieu, des partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus auxquels appartiennent soit le whip ou agent de liaison du gouvernement, soit le whip de l’opposition, s’ils se sont mis d’accord sur la durée de la sonnerie. En cas d’absence d’un whip ou agent de liaison, son leader ou facilitateur peut désigner un sénateur qui agira pour ces fins.

(2) La durée convenue ne doit pas excéder 60 minutes.

(3) Avec le consentement du Sénat, cet accord sur la durée de la sonnerie vaut ordre de faire entendre la sonnerie pendant la durée convenue. »;

14.par substitution, à l’article 9-10(1), de ce qui suit :

« Report d’un vote par appel nominal

9-10. (1) Sous réserve du paragraphe (5) et sauf autre disposition contraire, le whip ou agent de liaison du gouvernement, le whip de l’opposition, ou le whip ou agent de liaison de l’un des trois partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus qui comptent le plus grand nombre de membres, à l’exception, s’il y a lieu, des partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus auxquels appartiennent soit le whip ou agent de liaison du gouvernement, soit le whip de l’opposition, peut faire reporter le vote par appel nominal sur une motion sujette à débat. »;

15.par substitution, à l’article 9-10(4), de ce qui suit :

« Vote reporté au vendredi

9-10. (4) Sauf disposition contraire, si ce vote est reporté au vendredi :

a) le whip ou agent de liaison du gouvernement peut, pendant une séance, le faire reporter de nouveau au jour de séance suivant à 17 h 30 si le vote porte sur un article des affaires du gouvernement;

b) le whip ou agent de liaison du gouvernement, le whip de l’opposition, ou le whip ou agent de liaison de l’un des trois partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus qui comptent le plus grand nombre de membres, à l’exception, s’il y a lieu, des partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus auxquels appartiennent soit le whip ou agent de liaison du gouvernement, soit le whip de l’opposition, peut, pendant une séance, le faire reporter de nouveau au jour de séance suivant à 17 h 30 si le vote porte sur un article des autres affaires. »;

16.par substitution, à l’article 10-11(2)a), de ce qui suit :

« a) soit par le leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement, à tout moment pendant une séance; »;

17.par

a)substitution, à l’article 12-3(3), de ce qui suit :

« Membres d’office

12-3. (3) En plus du nombre de membres prévu aux paragraphes (1) et (2), et sous réserve des dispositions du paragraphe (4), le leader ou représentant du gouvernement, le leader de l’opposition, et les leaders ou facilitateurs des trois partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus qui comptent le plus grand nombre de membres, à l’exception, s’il y a lieu, des partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus auxquels appartiennent soit le leader ou représentant du gouvernement, soit le leader de l’opposition, sont membres d’office de tous les comités sauf le Comité permanent sur l’éthique et les conflits d’intérêts des sénateurs, le Comité permanent de l’audit et de la surveillance et les comités mixtes. À ce titre, en cas d’absence, le leader ou représentant du gouvernement est suppléé par le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement, le leader de l’opposition est suppléé par le leader adjoint de l’opposition, et le leader ou facilitateur de tout autre parti reconnu ou groupe parlementaire reconnu est suppléé par son leader adjoint ou facilitateur adjoint.

Droit de vote des membres d’office

12-3. (4) Parmi les sénateurs qui sont membres d’office des comités conformément au paragraphe (3), seuls le leader ou représentant du gouvernement, et le leader de l’opposition, ou, en cas d’absence de l’un ou de l’autre de ces sénateurs, le sénateur qui le supplée, bénéficient du droit de vote. »;

b)la mise à jour de la désignation numérique de l’article 12-3(4) actuel à celle de l’article 12-3(5);

18.par substitution, à l’article 12-8(2) du Règlement, de ce qui suit :

« Proposition de frais de service

12-8. (2) Dès le dépôt d’une proposition de frais de service par le leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement, celle-ci est renvoyée d’office au comité permanent ou spécial désigné par lui après consultation avec le leader ou le leader adjoint de l’opposition, et le leader ou facilitateur de tout autre parti reconnu ou groupe parlementaire reconnu, ou le délégué d’un tel leader ou facilitateur. »

19.par substitution, à l’article 12-18(2) du Règlement, de ce qui suit :

« Séances de comité en période d’ajournement du Sénat

12-18. (2) Sous réserve du paragraphe (3) et sauf autre disposition contraire, un comité du Sénat peut se réunir :

a) pendant une période d’ajournement du Sénat qui dure plus d’un jour mais moins d’une semaine, à condition que ses membres en soient avertis la veille de l’ajournement du Sénat;

b) un lundi où le Sénat ne siège pas qui précède un mardi au cours duquel une séance est prévue;

c) pendant d’autres périodes au cours desquelles le Sénat est ajourné et qui ne sont pas couvertes par les dispositions ci-dessus, à condition que le comité soit convoqué :

(i) soit par résolution du Sénat,

(ii) soit avec l’accord, en réponse à la demande du président et du vice-président, de la majorité des sénateurs suivants, ou de leurs délégués : le leader ou représentant du gouvernement, le leader de l’opposition, et les leaders ou facilitateurs des trois partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus qui comptent le plus grand nombre de membres, à l’exception, s’il y a lieu, des partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus auxquels appartiennent soit le leader ou représentant du gouvernement, soit le leader de l’opposition. »;

20.par substitution, à l’article 12-26(1), de ce qui suit :

« Nomination du comité

12-26. (1) Dès que les circonstances le permettent au début de chaque session, le leader ou représentant du gouvernement présente une motion, appuyée par le leader de l’opposition et le leader ou facilitateur du parti reconnu ou du groupe parlementaire reconnu qui compte le plus grand nombre de membres, à l’exception, s’il y a lieu, des partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus auxquels appartiennent soit le leader ou représentant du gouvernement, soit le leader de l’opposition, portant nomination des membres du Comité permanent sur l’éthique et les conflits d’intérêts des sénateurs; la procédure de nomination reste la même pour modifier la composition du comité au cours d’une session. Toute motion de nomination est adoptée d’office. »;

21.à l’article 14-1(1), par substitution, aux mots « leader ou le leader adjoint du gouvernement », des mots « leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement »;

22.à l’article 16-1(8), par substitution, aux mots « leader ou le leader adjoint du gouvernement », des mots « leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement », aux deux endroits où ils apparaissent;

23.à l’Annexe I :

a)à la définition des « Affaires du gouvernement », par substitution, aux mots « leader ou le leader adjoint du gouvernement », des mots « leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement »;

b)par substitution, à la définition de « Leader adjoint du gouvernement », de ce qui suit :

« Leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement

Sénateur qui agit en tant que second pour le leader ou représentant du gouvernement et qui est normalement responsable de la gestion des affaires du gouvernement dans la salle du Sénat. Le leader adjoint ou coordonnateur législatif est également normalement responsable de négocier avec l’opposition et les autres partis reconnus et groupes parlementaires reconnus l’ordre des travaux en général. En l’absence du leader adjoint ou coordonnateur législatif, le leader ou représentant du gouvernement peut désigner un autre sénateur pour assurer l’intérim. Le titre complet est « Leader adjoint du gouvernement au Sénat » ou « Coordonnateur législatif du représentant du gouvernement au Sénat ». (Deputy Leader or Legislative Deputy of the Government) »;

c)par substitution, à la définition actuelle de « Leader du gouvernement », de ce qui suit :

« Leader ou représentant du gouvernement

Sénateur qui agit à titre de chef des sénateurs membres du parti du gouvernement, ou qui est nommé par le gouvernement pour le représenter au Sénat sans être affilié à un parti du gouvernement. Selon l’usage actuel, le leader ou représentant du gouvernement prête normalement serment à titre de membre du Conseil privé du Roi pour le Canada et il peut être membre du Cabinet. Le titre complet est « Leader du gouvernement au Sénat » ou « Représentant du gouvernement au Sénat ». (Leader or Representative of the Government) »;

d)dans la définition de « Parrain d’un projet de loi », par substitution, aux mots « le parrain est normalement un membre du gouvernement qui », des mots « le parrain est désigné par le leader ou représentant du gouvernement et »;

e)dans la définition de « Porte-parole d’un projet de loi », par substitution, aux mots « leader ou le leader adjoint du gouvernement », des mots « leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement »;

f)par substitution, à la définition de « Procédure ordinaire pour déterminer la durée de la sonnerie », de ce qui suit :

« Procédure ordinaire pour déterminer la durée de la sonnerie

Le Président demande au whip ou agent de liaison du gouvernement, au whip de l’opposition, et aux whips ou agents de liaison des trois partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus qui comptent le plus grand nombre de membres, à l’exception, s’il y a lieu, des partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus auxquels appartiennent soit le whip ou agent de liaison du gouvernement, soit le whip de l’opposition, s’ils s’entendent sur la durée de la sonnerie, qui ne peut excéder 60 minutes. Avec le consentement du Sénat, cette entente constitue l’ordre de faire retentir la sonnerie pour la période convenue, mais en l’absence d’entente ou de consentement, la sonnerie retentit pendant 60 minutes. Dans certains cas prévus au Règlement, la procédure n’est pas suivie et la sonnerie retentit pendant une plus courte période. (Ordinary procedure for determining duration of bells) »;

g)dans la définition de « Projet de loi d’intérêt public », sous « Projet de loi », par substitution, aux mots « (présenté par un ministre ou introduit en son nom) ou d’initiative parlementaire (présenté par un sénateur qui n’est pas ministre) » des mots « (présenté par un ministre, au nom d’un ministre, ou par le ou au nom du leader ou représentant du gouvernement si celui-ci n’est pas ministre) ou d’initiative parlementaire (c’est-à-dire qu’il n’est pas du gouvernement) »;

h)par substitution, à la définition de « Sénateur-ministre », de ce qui suit :

« Sénateur-ministre

Sénateur assermenté au Cabinet. Le leader ou représentant du gouvernement est normalement assermenté en tant que membre du Conseil privé du Roi pour le Canada et peut être membre du Cabinet. (Senator who is a minister) »;

i)à la définition de « Suspension du soir » par substitution, aux mots « entre 18 heures et 20 heures », des mots « entre 19 heures et 20 heures »;

j)par substitution, à la définition de « Whip du gouvernement », de ce qui suit :

« Whip ou agent de liaison du gouvernement

Sénateur responsable de veiller à la présence au Sénat d’un nombre suffisant de sénateurs du parti du gouvernement pour assurer le quorum et la tenue des votes et à qui le leader ou représentant du gouvernement délègue habituellement la responsabilité de gérer la désignation des suppléants pour remplacer les sénateurs du gouvernement qui siègent à des comités au besoin. Le whip ou agent de liaison du gouvernement peut être responsable de la sensibilisation en ce qui concerne les affaires du gouvernement au Sénat. (Government Whip or Liaison) »;

k)par adjonction, selon l’ordre alphabétique, des nouvelles définitions suivantes :

(i) « Agent de liaison du gouvernement

Voir « Whip ou agent de liaison du gouvernement » (Government Liaison) »;

(ii) « Coordonnateur législatif du gouvernement

Voir « Leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement ». (Legislative Deputy of the Government) »;

(iii) « Leader adjoint ou facilitateur adjoint

Le sénateur qui agit en tant que second pour le leader ou facilitateur d’un parti reconnu ou d’un groupe parlementaire reconnu autre que, le cas échéant, les partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus dont est membre soit le leader ou représentant du gouvernement, soit le leader de l’opposition. (Deputy Leader or Deputy Facilitator) »;

(iv) « Leader du gouvernement

Voir « Leader ou représentant du gouvernement » (Leader of the Government or Government Leader) »;

(v) « Représentant du gouvernement

Voir « Leader ou représentant du gouvernement » (Government Representative or Representative of the Government) »;

Que tous les renvois et les listes d’exceptions dans le Règlement soient mis à jour pour tenir compte de ces modifications, mais restent autrement inchangés;

Que, en ce qui concerne les amendements aux articles 4-9 et 4-10 actuels, énoncés au point 5 ci-dessus :

1.le nouvel article 4-9(5) ne s’applique pas à toute question écrite soumise avant l’adoption de la présente motion, de manière que seules les questions écrites soumises après l’adoption de la présente motion soient comptées comme si elles étaient sujettes à cette disposition;

2.les dispositions des nouveaux articles du Règlement prennent effet dès l’adoption de la présente motion en ce qui concerne les questions soulevées à partir de ce moment-là, sous-réserve du point 3 ci-dessous;

3.les dispositions des nouveaux articles du Règlement concernant le délai de 60 jours pour répondre aux questions écrites, le dépôt, et l’absence d’une réponse ou d’une explication prennent effet, par rapport aux questions écrites soumises avant l’adoption de la présente motion, à la date qui tombe six mois après l’adoption de la présente motion comme s’il s’agissait de la date où les questions eussent été soumises, à condition que si la session en cours prend fin avant la fin de cette période de six mois, ces dispositions des nouveaux articles prennent effet le dernier jour de la session en cours;

Que, dans les 30 jours que le Sénat siège après l’adoption de cette motion, le Comité permanent de l’éthique et des conflits d’intérêts des sénateurs présente un rapport au Sénat proposant des modifications au Code régissant l’éthique et les conflits d’intérêts des sénateurs pour tenir compte des amendements à l’article 12-26(1) du Règlement énoncés au point 20 ci-dessus.

Et sur la motion d’amendement de l’honorable sénateur Quinn, appuyée par l’honorable sénateur Smith,

Que la motion ne soit pas maintenant adoptée, mais qu’elle soit modifiée :

1.par substitution, aux nouveaux articles 4-9(3)b) à d) proposés, de ce qui suit :

« b) la question est retirée;

c) l’expiration du délai de 45 jours prévu dans le présent article pour une réponse. »;

2.au nouvel article 4-9(6) proposé, par substitution :

a)au chiffre 60, du chiffre 45, partout où il apparaît, y compris dans la note marginale;

b)aux mots « soit la réponse du gouvernement à la question, soit une explication écrite justifiant l’absence de réponse », des mots « la réponse du gouvernement à la question »;

3.à l’article 4-9(8) proposé, par substitution, aux mots « déposé ni réponse ni explication justifiant l’absence de réponse dans le délai de 60 jours prévu au présent article », des mots « pas déposé sa réponse dans le délai de 45 jours prévu au présent article »;

4.au point 3 du paragraphe qui commence avec les mots « Que, en ce qui concerne les amendements aux articles 4-9 et 4-10 actuels » par substitution, aux mots « les dispositions des nouveaux articles du Règlement concernant le délai de 60 jours pour répondre aux questions écrites, le dépôt, et l’absence d’une réponse ou d’une explication prennent effet », des mots « les dispositions des nouveaux articles du Règlement concernant le délai de 45 jours pour répondre aux questions écrites, le dépôt, et l’absence d’une réponse prennent effet ».

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, comme l’a dit notre leader adjointe, je dois limiter ce discours à moins de six heures parce que c’est la limite qui nous a été imposée; donc, attachez vos ceintures et préparez‑vous à rester ici un certain temps.

Chers collègues, le vote que nous venons de tenir ne porte pas sur quelque chose qui va aider le gouvernement à ce stade. Il ne s’agit pas d’un projet de loi que nous adoptons et qui fera la différence pour les Canadiens.

Honorables sénateurs, mon microphone est allumé. Une fois que je me serai échauffé, croyez-moi, vous pourrez m’entendre même si vous éteignez mon microphone. Il me faut juste un peu de temps pour m’échauffer. En général, cela ne prend pas de temps quand je vois la démocratie être usurpée aussi gravement que je viens de le voir il y a une minute.

Comme le sénateur Housakos l’a dit à plusieurs reprises, le sénateur Gold a décidé qu’il voulait être le premier leader en 157 ans, le premier leader du gouvernement au Sénat, à utiliser une motion du gouvernement pour écraser l’opposition et faire adopter à toute vapeur des modifications au Règlement du Sénat du Canada. Voilà qui fera désormais partie de son legs. Nous allons tous devoir décider ce qui fera partie de notre legs, et je ne serai peut-être pas plus fier du mien que le sera selon moi le sénateur Gold du sien à la suite de cette motion.

L’histoire montrera que le sénateur Gold a refusé que le Comité du Règlement étudie les modifications qu’il aurait dû étudier pour ensuite les présenter au Sénat. Chers collègues, soyez certains que son legs sera encore plus entaché : il a eu recours à une motion de fixation de délai de sorte à forcer l’adoption de ces changements après seulement quelques heures de débat où, comme je l’ai dit plus tôt, seulement deux sénateurs de l’opposition ont pris la parole.

Dans cette enceinte, je suis reconnu pour être parfois un peu dur envers le sénateur Gold pendant la période des questions et dans certains de mes discours. Je l’ai d’ailleurs été plus tôt aujourd’hui. Je sais que le sénateur Gold est un brave homme; c’est un homme bon. Toutefois, pour une raison que je ne comprends pas, il a accepté et a décidé d’agir comme intimidateur au nom de Justin Trudeau — un rôle que plusieurs sénateurs ont refusé, soit dit en passant.

Il y a certaines choses que je ne comprends pas. Je ne veux pas nommer des gens et les humilier, même si je le fais à l’occasion. Je n’ai pas d’objection à faire une telle chose au gouvernement, mais beaucoup de choses ont été dites au Sénat ces derniers jours qui ne permettent tout simplement pas de dresser un tableau complet de la situation. J’ai vu des sénateurs qui ont tenté d’améliorer les choses en modifiant le Règlement et en réformant le Sénat bien avant l’arrivée du soi-disant Sénat indépendant de Justin Trudeau. Notre bon ami et collègue le sénateur Greene faisait partie du Comité sur la modernisation. L’ancien sénateur Tom McInnis était président de ce comité, et le sénateur Greene, qui a été nommé par un premier ministre conservateur, faisait partie de l’équipe conservatrice de l’époque. Ils ont présenté des suggestions raisonnables.

Le sénateur Tannas a tenté d’une manière ou d’une autre d’apporter certains de ces changements. Il aime dire qu’il a été élu par quelque 300 000 Albertains. Eh bien, le sénateur Tannas a été nommé de la même manière que chacun d’entre nous, soit sur la recommandation du premier ministre. Toutefois, quand il s’est présenté à des élections, il a promis aux Albertains qu’il se présentait en tant que conservateur. Le sénateur Tannas continuera à dire qu’il est, à bien des égards, un conservateur, et pourtant, il vote pour les budgets libéraux et pour la fixation de délai. Je peux comprendre que, au bout du compte, les sénateurs Greene et Tannas ainsi que d’autres sénateurs votent pour la motion parce qu’ils y croient. Je le comprends.

Par contre, le fait qu’ils se lèvent et votent pour imposer la clôture, c’est au cœur même de ce qu’ils avaient contesté lorsqu’ils faisaient partie du Comité sur la modernisation. Ils étaient indignés que le Parti conservateur soit sévère et ne laisse pas les choses se dérouler à la vitesse qu’ils le souhaitaient. Aujourd’hui, ils votent en faveur d’une motion de clôture sur laquelle deux membres de l’opposition ont eu l’occasion de s’exprimer. Pour une raison quelconque, ils disent que c’est cela la modernisation, que c’est cela le processus démocratique.

Je suis désolé, chers collègues, mais ce n’est pas vrai.

La semaine dernière, nous avions une question pour la sénatrice Saint-Germain à propos de l’implication de la sénatrice Lankin dans ce processus, et on lui a demandé si la sénatrice Lankin faisait partie du Groupe des sénateurs indépendants. « Non, elle n’en fait pas partie. Elle n’est pas membre du Groupe des sénateurs indépendants. » Et j’ai dit : « Eh bien, la sénatrice Lankin n’a-t-elle pas publié un communiqué de presse qui disait : “Je quitte le Groupe des sénateurs indépendants pour faire ceci, et quand j’aurai terminé, je retournerai dans le même groupe sénatorial”? »

La réponse à ma question, que j’ai posée à la sénatrice Saint-Germain, c’est que la sénatrice Lankin ne fait pas partie du Groupe des sénateurs indépendants. Je suis donc très curieux de savoir dans combien de temps elle en fera de nouveau partie.

Il s’agit d’un effort concerté pour tuer le Parti conservateur du Canada au Sénat. Reconnaissons au moins cela. Telle est l’intention de cette motion, et telle est l’intention du vote draconien que nous venons de tenir. Pourquoi, chers collègues, ne pourrions-nous pas...

Écoutez, il y a six heures de débat qui s’en viennent. Je ne les prendrai certainement pas en entier. Je ne prendrai pas plus de 30 minutes, alors il nous restera 5 heures et demie. Sénatrice Lankin et les autres sénateurs, si vous voulez participer au débat, n’hésitez pas à le faire. Le sénateur Gold, qui a maintenant quelque chose à dire, n’avait même pas quelque chose à dire sur sa propre motion. Il a maintenant toutes sortes de choses à dire quand il ne parle pas au reste d’entre nous.

Je vais passer à autre chose, sénateur, quand je serai prêt. Je dispose de cinq heures et demie, alors ne me tentez pas.

(1750)

Je me permets de revenir sur ce point. Je suis curieux de savoir quand la sénatrice Lankin fera partie du deuxième caucus du gouvernement que nous essayons de former — au moins, appelons un chat un chat. Admettons ce que nous faisons. Lorsqu’on vote pour un budget libéral, il faut accepter le fait qu’on est au moins à moitié libéral. On ne peut pas voter pour des budgets libéraux tout en prétendant être conservateur, croire en la responsabilité financière et être contre le gaspillage flagrant de l’argent public. Cela ne marche pas, sénatrice Lankin.

Le leader du gouvernement au Sénat jouit de ce qui est, je crois, la plus importante majorité de l’histoire du Sénat. Quatre-vingt-un sénateurs ont été nommés par un seul premier ministre. Nous avons — sommes-nous 12 ou 13?

La sénatrice Martin : Treize.

Le sénateur Plett : Merci. Notre nombre diminue si rapidement que je n’arrive plus à le suivre. Nous sommes à un mois d’être 12. Nous allons néanmoins continuer à mener notre noble combat. Je pense que nous en faisons plus que ce à quoi on pourrait s’attendre, et nous continuerons de le faire. Voilà ce qui frustre tant d’autres sénateurs. « Comment pouvez-vous, vous qui êtes un groupe de 13, nous empêcher de faire avancer les choses? Comment osez-vous? Vous n’êtes que 13 sénateurs. Vous parlez au nom de 7 millions de personnes, mais vous n’êtes que 13. Comment osez-vous nous empêcher de faire avancer les projets de loi à la vitesse que nous désirons? » Voilà ce dont il s’agit.

Ce qui est triste, c’est que cela ne nous arrêtera pas. Je veux m’adresser à tous les Canadiens qui nous regardent et qui nous écoutent. Croyez-moi, ils commencent à nous regarder et à nous écouter. Je n’ai pas besoin de me vanter, mais j’ai fait un discours il n’y a pas si longtemps sur les scandales de ce gouvernement inepte au cours des 15 dernières années, et ce discours a été visionné 750 000 fois, chers collègues. Les gens de notre pays se sentent concernés. Ils m’envoient des courriels. « Merci, sénateur, de parler en notre nom parce que l’autre camp ne le fait pas. » Les gens se sentent concernés, et ils sont attentifs.

Si vous pensez que cela va nous arrêter, détrompez-vous. Même la création d’un autre caucus du gouvernement — ce que vous faites, de toute évidence — ne nous empêchera pas de faire notre travail. Cela compliquera peut-être un peu la tâche à Pierre Poilievre, qui aura probablement la plus grande majorité de l’histoire du pays à l’autre endroit, dans un an ou un an et demi. Le fait de devoir composer avec deux caucus de l’opposition au Sénat lui causera quelques difficultés. J’en suis conscient. Je n’arrive vraiment pas à comprendre pourquoi les groupes du sénateur Dalphond et du sénateur Tannas — n’importe lequel des membres de ces groupes — seraient en faveur de cette motion, parce qu’ils n’en retirent rien. On n’enlève rien à l’opposition. La sénatrice Saint-Germain et son groupe de plus de 40 sénateurs obtiennent quelques avantages, mais ce n’est pas le cas du Groupe progressiste du Sénat ni du Groupe des sénateurs canadiens.

Heureusement, quelques membres du Groupe des sénateurs canadiens en sont conscients et disent : « Qu’en est-il de notre groupe? Pourquoi sommes-nous traités de cette façon? » Ce n’est pas ce que dit le leader. Leur propre leader est en faveur. Je n’arrive pas à le comprendre.

Devoir composer avec l’opposition n’est jamais une joie pour les gouvernements. C’est plutôt commun. Pour la plupart des gouvernements, l’opposition est un peu une épine dans le pied. Les gouvernements libéraux y sont particulièrement allergiques parce qu’ils croient essentiellement que gouverner est un droit qui leur revient.

Habituellement, quand un gouvernement libéral est renvoyé dans l’opposition ou que les libéraux perdent un vote, dès le lendemain, ils disent : « Les Canadiens ont fait une erreur hier, et si nous pouvions refaire le vote aujourd’hui — ils se sont probablement rendu compte pendant la nuit qu’ils ont fait une erreur —, s’ils avaient la possibilité de revenir sur cette décision, ils le feraient. » Le sénateur Downe le sait bien. Il connaît les hautes sphères du Parti libéral et il le sait.

Les conservateurs ont une mentalité un peu différente. Quand les électeurs nous renvoient dans l’opposition — et nous avons perdu plus d’élections que nous en avons gagnées —, nous passons les quatre années suivantes, ou les deux années suivantes à essayer de regagner la confiance de la population, parce que nous croyons que, pour gouverner, il faut avoir la confiance de la population.

Le gouvernement libéral n’est pas de cet avis, et c’est donc le monde à l’envers à l’autre endroit en ce moment, et depuis longtemps. Jagmeet Singh est le leader de facto et il maintient ce gouvernement terriblement inepte en vie suffisamment longtemps pour que le sénateur Gold puisse essayer de tuer l’opposition au Sénat. Quand les libéraux seront renvoyés dans l’opposition aux prochaines élections, il leur restera au moins cette Chambre sur laquelle ils pourront compter.

Le sénateur Carignan et moi avons discuté de ce dossier dans l’ascenseur. Même si j’ai plus de cheveux que lui — je ne sais pas ce qui s’est passé —, le sénateur Carignan est beaucoup plus jeune que moi et sera ici encore quelques années. Il m’a promis que dans quatre ou cinq ans, il vous rappellera mes propos, car je ne serai pas ici pour le faire, sans doute au grand bonheur de ceux d’entre vous qui seront toujours ici.

La motion no 165 est un autre exemple du mépris complet du premier ministre à l’égard du Parlement et de quiconque ne pense pas comme lui.

Le sénateur Gold a lui-même admis, en réponse à une question de la sénatrice Batters la semaine dernière, que cette motion a été approuvée par le Cabinet du premier ministre. J’ai donc l’impression qu’il fait simplement ce que son patron au sein du Cabinet du premier ministre veut qu’il fasse. Il fait son travail, aussi déplaisant que cela doive être. Je comprends cela. J’ai déjà été dans cette position. J’ai également dû faire des choses qui me déplaisaient à l’occasion, et c’est ce que fait le sénateur Gold.

Nous savons que le sénateur Gold à la période des questions est mécontent lorsque nous lui posons des questions qu’il n’apprécie pas parce que nous ne sommes pas tout à fait à la hauteur de la mentalité libérale et qu’il nous dit : « Comment osez-vous nous poser ces questions et nous mettre au pied du mur? » Il montre ainsi son dédain et son mécontentement. Je ne pense pas que ce soit par rapport à moi, personnellement, mais ce l’est certainement par rapport à mon parti et à mon chef. Il y a au moins une chose que nous avons en commun : nous avons à peu près la même estime pour nos chefs respectifs. Je pense que ma frustration est un peu plus grande que celle du sénateur Gold.

L’honorable Ratna Omidvar : J’ai une question ou un recours au Règlement.

Le sénateur Plett : S’agit-il d’une question ou d’un recours au Règlement?

La sénatrice Omidvar : J’invoque le Règlement.

Le Feuilleton indique que nous ne débattons pas actuellement de la motion no 165. Nous débattons de l’amendement proposé par le sénateur Quinn. Je donne une grande latitude au sénateur Plett, comme nous le faisons tous d’ailleurs, mais je ne l’ai pas entendu parler de l’amendement. Au lieu de cela, il ressasse les arguments que nous avons entendus jeudi dernier sur la motion, comme il s’est déjà prononcé sur la motion principale.

Votre Honneur, je vous demande si c’est permis par le Règlement.

Son Honneur la Présidente : Sénateurs, nous laissons généralement aux sénateurs de la latitude pour en venir au sujet débattu. Je laisserai donc le sénateur Plett poursuivre le débat sur la motion d’amendement.

Le sénateur Plett : Merci, Votre Honneur.

(1800)

Je suis un peu étonné que nous ne soyons plus censés débattre de la question dont le Sénat est saisi, et nous perdons du temps.

J’ai complètement perdu le fil de mes notes d’allocution. J’aime bien me servir de mes notes, mais je ne sais plus où j’en étais. Je vais essayer de m’y retrouver.

Ce que j’ai trouvé quelque peu déconcertant, la semaine dernière, c’est l’enthousiasme dont ont fait preuve les sénateurs de Trudeau pour s’en prendre à l’opposition. C’était un peu choquant. C’est une chose que d’obéir aux ordres du gouvernement lorsqu’on est un sénateur du gouvernement, je le comprends. C’est une chose de ne pas aimer un adversaire politique; c’est également compréhensible, mais c’en est une autre de venir ici et d’applaudir quelqu’un qui passe les 15 minutes qui lui sont allouées à parler d’un Sénat à parti unique — d’un Parlement à parti unique. Je trouve cela étrange. C’est ce que nous sommes en train de vivre. Cette personne a presque été ovationnée par les sénateurs lorsqu’elle a déclaré que nous ne devrions pas avoir d’opposition, ni même avoir le droit de nous appeler l’opposition. Voilà, en substance, où nous en sommes rendus.

Cela, sénatrice Omidvar, concerne parfaitement l’amendement, la motion et la fixation de délai... Tout cela en fait partie.

Un sénateur a dit : « Vous n’avez pas le droit de vous appeler l’opposition. Qui a décidé que vous étiez l’opposition? ». Je répondrais que c’est l’électorat qui l’a fait lorsque nous avons perdu les élections. Si nous les avions remportées, nous aurions formé le gouvernement.

Cet incident m’a fait douter de la profondeur du sens démocratique de certains de mes collègues. J’espère que c’est simplement parce que les sénateurs étaient très fatigués à la fin de la journée. Ce fut une très longue journée, et nous en sommes au début d’une autre.

J’espère qu’à 10 minutes ou à 4 minutes de minuit, quelqu’un n’insistera pas sur une sonnerie d’une heure, parce que cela dépasse un peu les bornes d’avoir une sonnerie d’une heure lorsqu’il ne reste que 4 minutes à la séance. Néanmoins, c’est ce qui s’est produit jeudi. Certains d’entre nous n’ont pas beaucoup dormi avant de prendre l’avion.

J’espère que ce n’est pas un signe de ce que l’année prochaine nous réserve, alors que certains collègues continuent de se laisser emporter par la force de leur majorité au Sénat.

Surtout, j’espère que ce n’est pas un signe que le programme conservateur du gros bon sens de Pierre Poilievre sera accueilli ici avec agressivité et rancœur après les prochaines élections. Ne vous méprenez pas : il y aura un gouvernement majoritaire de Pierre Poilievre après les prochaines élections.

Vendredi dernier, le Globe and Mail a publié un commentaire de Konrad Yakabuski sur la motion no 165. Il ne s’agit pas du Parti conservateur, mais d’un journaliste du Globe and Mail, qui a dit ceci :

Après tout, rien n’empêche la future opposition libérale à la Chambre des communes de se tourner vers les sénateurs nommés par M. Trudeau pour entraver la capacité d’un gouvernement conservateur à faire adopter des mesures législatives au Parlement. La tentation sera forte. En outre, les changements au Règlement proposés par M. Gold permettront aux membres du Groupe des sénateurs indépendants et du Groupe progressiste du Sénat de retarder beaucoup facilement l’adoption des projets de loi d’initiative ministérielle.

J’ose espérer qu’il ne s’agirait que du Groupe des sénateurs indépendants et du Groupe progressiste du Sénat, et non du Groupe des sénateurs canadiens également. Le journaliste a laissé ce groupe de côté pour une raison quelconque. Il croit autant que moi que vous entendrez raison.

C’est exactement ce que nous disons à propos du plan du sénateur Gold. Je tiens à indiquer à certains sénateurs qui m’ont accusé de souscrire à des théories du complot au sujet des véritables objectifs de la motion no 165 que le Globe and Mail souscrit aussi à ces soi-disant théories du complot. Encore une fois, j’espère vraiment que j’ai tort et que les sénateurs de Trudeau accepteront le verdict des électeurs canadiens à l’égard de leur chef et des libéraux. J’espère que le Sénat respectera la volonté des élus après les prochaines élections. Je suivrai la situation de près.

Les sénateurs de Trudeau vont-ils continuer à voter avec le gouvernement 96 % du temps après les prochaines élections, quand il y aura un gouvernement conservateur? Je vais tenir le compte, c’est garanti.

Comme l’a dit M. Yakabuski en terminant sa chronique : « Le véritable test du Sénat “indépendant” de Justin Trudeau est peut‑être encore à venir. »

En terminant, permettez-moi de répéter les réserves que j’ai à l’égard de la motion no 165 et du processus choisi par le sénateur Gold.

Premièrement, il n’aurait pas dû utiliser une motion du gouvernement pour modifier le Règlement. Il a rompu nos traditions et il a ouvert la porte aux futurs chefs de gouvernement qui, forts d’une majorité, voudraient faire de même. Ce sera l’héritage du sénateur Gold et l’héritage de Justin Trudeau.

Le recours par le sénateur Gold aux dispositions du Règlement relatives à la fixation de délai après seulement quelques heures de débat sur une question aussi peu urgente que des modifications au Règlement du Sénat est une perversion du concept de la fixation de délai. Le sénateur Gold est en train de créer un mauvais précédent qui fera partie de son héritage et de celui de Justin Trudeau.

Chers collègues, vous aurez beau dire autant comme autant que les conservateurs ne veulent pas que le projet de loi du gouvernement soit adopté — et vous auriez raison, car nous avons été nommés ici dans un but précis, comme vous tous —, sauf qu’il s’agit d’un processus démocratique, et vous empêchez la démocratie de suivre son cours. Vous nous empêchez de faire notre travail en nous bâillonnant et en nous disant : « Vous n’en avez pas le droit. Vous n’êtes que 13, et nous sommes 96 », ou peu importe le nombre, « et vous n’avez pas le droit d’empêcher cela d’aller de l’avant. »

Les changements proposés auraient dû être étudiés par le Comité du Règlement. Au Sénat, la tradition veut que les modifications au Règlement soient adoptées par consensus. J’ai cité certains sénateurs libéraux aujourd’hui. Permettez-moi d’en citer un autre : David Smith. David Smith était un grand libéral et une personne merveilleuse. Nous avions tant de choses en commun, à l’exception de nos alliances politiques. Il a agi à titre de président de campagne pour de nombreux gouvernements libéraux. Lors de la réunion du Comité du Règlement du 3 juin 2014, le sénateur David Smith a déclaré :

Le sénateur Martin a soulevé de bons arguments, et je suis même d’accord avec certains d’entre eux. Ceci dit, n’oublions pas la culture de ce comité, ainsi que la culture du Comité du règlement, qui veut qu’on ne modifie pas le règlement à moins d’avoir consensus des deux côtés. Et consensus n’est pas unanimité. Je ne crois pas qu’une seule personne devrait pouvoir interjeter son veto, mais il faudrait qu’il y ait au moins un consensus du côté du gouvernement comme de l’opposition. Tant qu’il n’y a pas consensus, il faut continuer à discuter, car, si l’on force les choses, on déclenche des effets indésirables, ou pires.

La sénatrice Martin : Voilà de sages paroles.

Le sénateur Plett : De sages paroles où il réprimandait ma leader adjointe.

Voici ce que la sénatrice Cools — une autre sage sénatrice qui a travaillé pendant des années comme sénatrice indépendante et non affiliée, qui avait tout un bagage dont nous faire bénéficier et qui l’a fait — a dit lors de la réunion du 10 juin 2014 du même Comité du Règlement.

(1810)

La sénatrice Cools a dit ceci :

Ce qui est clair dans l’histoire du Sénat, c’est que les changements du Règlement n’ont jamais été imposés par quelques-uns aux autres. Il y a de grandes traditions qui sont oubliées depuis longtemps parce qu’il y a eu tant de changements dans la composition de cette institution. Toutefois, il a toujours été entendu que si certains ont de fortes convictions à propos d’une chose, un débat s’engage au Sénat pour connaître l’opinion des sénateurs. Au terme de ce débat, il arrive qu’un comité reçoive un ordre de renvoi.

Au cours de cette même réunion, la sénatrice Fraser...

Une voix : Toutes des personnes nommées par Trudeau.

Le sénateur Plett : Une personne nommée par Trudeau, oui; vous avez raison. C’était le sage Trudeau — le Trudeau adulte.

Au cours de la même réunion, la sénatrice Fraser a ajouté ceci :

Je crois qu’il est absolument essentiel que la structure de base qui régit notre fonctionnement soit pour le moins considérée par les deux bords comme vivable sinon satisfaisante. En effet, nous serons tous encore là pendant quelque temps, certains plus longtemps que d’autres. Nous devons garder à l’esprit le fait que le Règlement dont nous parlons ne s’appliquera pas seulement dans la situation actuelle où le gouvernement est en majorité. Il s’appliquera aussi quand la situation aura changé.

L’opposition conservatrice, chers collègues, n’a pas inventé cette notion selon laquelle les modifications du Règlement doivent faire consensus. Le fait que certains sénateurs tentent maintenant de réécrire l’histoire du Sénat pour soutenir leur argument n’a aucune importance. C’est la procédure établie depuis la Confédération. Le gouvernement Trudeau a aussi décidé de changer cet aspect du Sénat.

De ce côté-ci, nous ne pouvons que prendre des notes et faire en sorte de nous en souvenir pour le moment où nous formerons de nouveau la majorité.

Justin Trudeau avait tout à fait le droit de faire 81 nominations. Beaucoup d’entre vous m’ont dit exactement ce que Justin Trudeau leur avait demandé de faire lorsqu’il leur a annoncé qu’il allait les recommander au gouverneur général du Canada en vue d’une nomination au Sénat. Je n’ai entendu aucun sénateur ici présent me dire que Justin Trudeau leur avait demandé de modifier le Règlement du Sénat.

Il vous l’a peut-être demandé. Je ne pense pas que ce soit le cas, mais c’est à cela que vous vous employez en ce moment. Vous êtes en train de changer le Règlement du Sénat, et il est en soi acceptable que vous vouliez le faire. Il est également normal que vous soyez frustrés par le fait que nous sachions comment utiliser les règles.

Ce qui n’est pas acceptable, chers collègues, c’est de faire passer cela de force après — eh bien, nous avons peut-être déjà eu quatre ou cinq heures de débat jusqu’à présent, mais le préavis de motion a été présenté après les interventions de deux sénateurs conservateurs. Aujourd’hui, après une heure et demie ou deux heures de débat, pendant lesquelles seulement quelques conservateurs ont pris la parole, vous avez voté avec une écrasante majorité pour bafouer la démocratie. Il est acceptable de croire que la motion à l’étude, la motion no 165, devrait être adoptée. Je ne l’appuie pas, mais nous pouvons avoir des divergences d’opinions.

Vous êtes en train de créer un État à parti unique, et nous avons des collègues qui soutiennent le gouvernement sur la fixation d’un délai. Je ne parle pas de la motion principale, mais de la motion de fixation d’un délai. « Nous ne voulons pas vous entendre. »

Le sénateur Gold dit qu’il ne veut pas de vote sur l’idée que les changements s’appliquent seulement à la session actuelle du Parlement — que ce soit un ordre sessionnel. Le sénateur Gold ne veut même pas que vous votiez sur la question de notre pause de deux heures pour le souper. Le sénateur Gold ne veut pas que vous débattiez comme il se doit sur un amendement qui propose que le gouvernement ait 45 jours plutôt que 60 jours pour répondre à nos questions. Le sénateur Gold ne veut même pas que vous débattiez de ces questions toutes simples.

Chers collègues, lorsque vous rentrerez chez vous cette semaine, posez-vous au moins cette question : « En adoptant ces changements avec autant d’empressement, dans les quelques jours dont nous disposions, avons-nous amélioré la vie d’un seul Canadien, y compris la mienne, ou aurait-il été adéquat d’adopter cette mesure à la fin du mois de mai ou au début du mois de juin? » Posez-vous la question. Qu’est-ce que cela aurait-il changé?

Nous avons demandé des amendements bien simples. J’ai dit au sénateur Gold : « Donnez-nous quatre amendements, et nous ne ferons pas d’obstruction. »

Il m’a répondu : « Non, je ne veux pas vous entendre. »

Eh bien, ce qu’il dit en réalité, c’est que nous pouvons présenter nos quatre amendements, à condition de le faire en une seule journée, et qu’il faudra ensuite avancer rapidement, car il ira de l’avant avec sa motion. Ensuite, il appelle cela de la démocratie.

J’aimerais à tout le moins vous mettre au défi de vous demander, au cours de la semaine suivante, ce que vous avez fait pour améliorer le sort du pays. Certains pourront se dire : « Oh, j’ai empêché les conservateurs d’imposer leur volonté en nous obligeant à prendre une pause de deux heures pour le souper, parce que M. Trudeau m’a dit qu’une heure, de 19 heures à 20 heures, c’est suffisant, et que deux heures, de 18 heures à 20 heures, c’est inacceptable. J’ai sûrement sauvé le Canada. » Vous pouvez hocher la tête tant que vous le voudrez. Ce qu’il dit en réalité, c’est qu’il ne veut pas me laisser proposer l’amendement que je souhaite présenter.

Je n’ai pas demandé au sénateur Gold qu’on attende jusqu’en septembre pour adopter la motion. Je n’ai pas demandé à la sénatrice Lankin d’attendre jusqu’en septembre pour qu’on l’adopte.

Croyez-moi, je me montre très prudent.

Une voix : Trop prudent.

Le sénateur Plett : Un examen approfondi au comité nous aurait permis de rédiger avec soin les nouvelles règles et de débattre de possibles amendements. Malheureusement, avec le processus imposé par le sénateur Gold et maintenant la fixation d’un délai, nous ne pourrons pas débattre d’amendements. J’ai déjà mentionné les amendements, mais, comme on a pris la peine de les écrire pour moi, je le fais à nouveau. Après tout, j’ai amplement de temps.

Maintenir la suspension du soir telle qu’elle est ou, du moins, permettre aux whips de demander une prolongation de la pause pour la tenue de réunions de caucus.

Nous utilisons vraiment les réunions de caucus. Elles sont loin d’être frivoles. Si vous aviez des caucus, vous les utiliseriez aussi. Le prochain amendement se lit comme suit :

Modifier la durée du débat sur une motion de fixation de délai pour permettre à plus de voix dissidentes de se faire entendre.

Cela me semble raisonnable. Voici un autre amendement :

Ne pas prendre en compte les membres d’office sans droit de vote dans le calcul du quorum pour les réunions de comité.

C’est, encore une fois, un point de la motion qui va évidemment trop loin. Le prochain amendement se lit comme suit :

Préciser que les réunions de comité le lundi ne peuvent pas se tenir un jour férié et que seuls les comités qui siègent régulièrement le lundi peuvent le faire et uniquement pendant leur créneau habituel.

Comme je l’ai dit, je pense qu’il aurait été plus prudent que ces changements fassent partie d’un ordre sessionnel afin de pouvoir les mettre à l’épreuve d’abord. S’ils fonctionnent bien la première année et demie, nous pourrions les conserver. Croyez-moi, vous aurez toujours la majorité dans cette enceinte le lendemain de la victoire électorale de Pierre Poilievre, et vous pourriez mettre toutes ces mesures en place immédiatement après. Une telle approche aurait été plus respectueuse du fait que nous sommes à un an ou un an et demi, peut-être, de la fin de cette législature.

Enfin, comme je l’ai dit dans mon discours et comme l’a souligné le Globe and Mail, ces changements sont conçus pour aider les sénateurs de Trudeau à contrecarrer la volonté des électeurs canadiens après les prochaines élections.

C’est inacceptable, chers collègues, et c’est très dangereux pour l’avenir de cette auguste assemblée.

(1820)

Je prédis que les libéraux perdront les prochaines élections. Ils les perdront. La volonté des Canadiens est déjà claire et le sera de plus en plus au cours de l’année ou de l’année et demie à venir. Nous ne pouvons pas avoir un Sénat qui agit comme une Chambre habilitée à prendre un vote de confiance, mais qui s’oppose à la volonté des Canadiens.

Je ne me fais aucune illusion sur le résultat du vote sur la motion no 165. Nous savons ce qu’il sera depuis le début. Cependant, nous voulions faire valoir nos points de vue, mais vous nous avez privés de cette possibilité. Vous nous en avez privés, et vous en avez privé les Canadiens. Ne l’oubliez pas. Ce n’est pas uniquement Don Plett et sa cabale de 12 comparses qui en paient le prix. Ce sont aussi les Canadiens. C’est ce que vous avez fait, et c’est honteux.

Une voix : Il ne s’agit pas d’une cabale.

Le sénateur Plett : Un groupe, un caucus.

Une voix : Nous sommes un caucus.

Le sénateur Plett : Permettez-moi de vous dire ceci : Le sénateur Manning est venu me voir lundi dernier. Il faut que je vous le raconte. Il est venu me voir vers minuit. Il m’a dit : « Don, j’ai une bonne nouvelle et j’ai une mauvaise nouvelle. » Je lui ai dit : « Quelle est la mauvaise nouvelle, Fabian? » Il a dit : « Don, nous n’avons que cinq sénateurs au Sénat. » Alors, j’ai dit : « Quelle est la bonne nouvelle, Fabian? » Il a dit : « La moitié de notre caucus est au Sénat. »

Il y avait un panneau dans mon village, Landmark, sur la route à l’entrée du village — et il n’y avait que 500 personnes qui vivaient dans le village. Mon grand-père d’un côté de la famille vivait à une extrémité de Landmark, et mon arrière-grand-père vivait à l’autre bout de Landmark. Ils ont fondé la communauté, et ses deux parties se sont rejointes. Maintenant, il s’agit d’un village de taille moyenne. Mon père est ensuite devenu l’un des supposés fondateurs, et il y avait un panneau à chaque extrémité du village : « Our town is small, but our spirit is great. », ce qui veut dire « Notre ville est petite, mais notre esprit est formidable. » C’est ce que je ressens à l’égard de mes amis ici, au Sénat.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Plett : Notre groupe est petit, mais notre esprit est formidable. J’espère simplement que quelques sénateurs de Trudeau trouveront le courage, pour faire valoir leur point de vue, de voter contre cette motion.

J’espère surtout que, à tout le moins, l’ensemble des sénateurs aux vues conservatrices — ou les grands démocrates — trouveront le courage de voter contre cette...

Une voix : Appuyez l’amendement.

Le sénateur Plett : ... d’appuyer l’amendement et de voter contre la motion finale. Je suis désolé, je suis un peu mêlé à cause de la vitesse d’exécution qu’on nous impose. Je dois m’assurer de faire le bon discours. Comme vous l’avez souligné plus tôt, sénatrice Martin, j’ai trois occasions pour prendre la parole. Je dois savoir à quel discours je suis rendu. Je crois que je n’aurai pas d’autre occasion et que, une fois que je me serai rassis, je ne pourrai pas ravoir la parole avant les deux votes.

Une voix : Encore, encore!

Le sénateur Plett : Malgré tout, chers collègues, permettez-moi de faire une prédiction. Cela ne fonctionnera pas à long terme pour vous.

Une voix : On verra.

Le sénateur Plett : Non, cela ne fonctionnera pas. Cela va fonctionner pour la prochaine année et demie, voire les deux prochaines années et demie. Toutefois, lorsque notre excellent chef conservateur axé sur le gros bon sens, Pierre Poilievre, remportera les prochaines élections, ce sera lui qui gouvernera et il modifiera le Règlement. Il abrogera certaines des lois absurdes dont le Sénat a contribué à l’adoption.

Chers collègues, j’espère qu’à tout le moins, vous aurez alors le courage de respecter la volonté démocratique de la Chambre d’abroger l’épouvantable loi issue du projet de loi C-21. Je l’espère sincèrement. Je vois des sénateurs hocher la tête. J’espère que ce n’est pas parce que vous cognez des clous, mais bien parce que vous êtes d’accord avec moi. Car je vérifierai. Je serai occasionnellement à la tribune, que vous le vouliez ou non. On jugera peut-être que j’enfreins le Règlement depuis la tribune.

Chers collègues, je vais m’arrêter ici. Je vous remercie de votre attention. J’espère sincèrement que nous appuierons cet amendement fondé sur le gros bon sens — je vais m’en tenir à cela — présenté par le sénateur Quinn. C’est un amendement udicieux. Nous devons l’adopter. Puis, nous devons malheureusement trouver un moyen de rejeter le reste de la motion, car d’autres amendements s’imposent.

Merci, chers collègues.

L’honorable Denise Batters : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet de l’amendement du sénateur Quinn aux modifications proposées au Règlement concernant les questions écrites et les réponses en suspens dans la motion du gouvernement no 165. Je tenais à faire une mise au point sur certains des débats que nous avons entendus jusqu’à présent à propos de cet amendement. Plus précisément, je me dois d’aborder certaines des erreurs contenues dans les observations de la sénatrice Saint‑Germain à ce sujet.

La semaine dernière, après son discours, j’ai pris la parole pour lui demander des précisions, et elle a refusé de répondre à ma question. C’est regrettable, étant donné qu’au Sénat, la tradition veut depuis longtemps qu’on accepte les questions des autres sénateurs après avoir fait son discours. Le Sénat est une institution politique, et les échanges qui s’y déroulent sont conçus pour remettre en question les arguments sur les mesures législatives afin qu’on puisse parvenir à la meilleure version possible pour tous les Canadiens.

Par contre, une tendance s’est développée au sein des nouveaux sénateurs indépendants du premier ministre Trudeau : une intolérance au débat. Nous sommes loin de l’époque des anciens sénateurs Serge Joyal et George Baker. La sénatrice Coyle veut que le débat prenne fin peu de temps après avoir commencé. Le sénateur Woo qualifie de « fastidieux » le fait d’avoir à écouter des discours sur cette vaste refonte du Règlement du Sénat. La sénatrice Saint-Germain a même rejeté du revers de la main l’amendement très raisonnable du sénateur Quinn sur les questions écrites, le qualifiant de « distraction » par rapport à la motion principale. La démocratie n’est pas une distraction, chers collègues. Si vous estimez que le débat dans cette assemblée parlementaire est une perte de temps, alors ce travail n’est peut-être pas pour vous.

Rappelons qu’aux termes des modifications du Règlement du Sénat proposées dans cette motion, la leader du Groupe des sénateurs indépendants disposera d’un temps de parole illimité pour s’exprimer et répondre aux questions. La journée de jeudi dernier laissait-elle présager de la manière dont elle utilisera ce temps de parole, c’est-à-dire en refusant de répondre aux questions de ses collègues au Sénat? Au moins, le sénateur Gold reconnaît qu’il a la responsabilité de tenter de répondre aux questions, même si ses réponses ne sont pas toujours satisfaisantes — enfin, sauf aujourd’hui. Comment cela se fait-il? Parce qu’en tant que leader du gouvernement au Sénat, il a un rôle et une raison d’être dans les rouages parlementaires du système de Westminster, contrairement au troisième groupe au Sénat.

Lorsque la leader du Groupe des sénateurs indépendants a refusé de répondre à ma question sur l’amendement du sénateur Quinn, elle a dit : « J’estime que mon discours était complet et je n’accepterai pas de répondre à des questions. » Pourtant, il y avait plusieurs erreurs dans le discours de la sénatrice Saint-Germain, qui, je pense, pourraient laisser une impression erronée aux sénateurs, en particulier aux nouveaux sénateurs qui cherchent à être bien informés avant de voter. Par conséquent, permettez-moi de rectifier le compte rendu concernant cet amendement afin que les sénateurs puissent avoir une vision plus large des questions en jeu et comprendre pleinement ce sur quoi ils vont voter.

Tout d’abord, contrairement au commentaire de la sénatrice Saint-Germain, l’amendement du sénateur Quinn n’est pas une distraction. Son amendement est raisonnable, précis et réfléchi. Il n’a pas proposé cet amendement à la volée pour retarder le débat ou le vote sur cette question. Le sénateur Quinn a proposé l’idée d’exiger du gouvernement qu’il réponde aux questions des sénateurs dans un délai de 45 jours il y a un an. Il l’a proposée au Comité du Règlement, dont le mandat, je vous l’apprends en grande primeur, sénateur Gold, est d’étudier les propositions visant à modifier le Règlement. Cependant, la sénatrice Saint-Germain a rejeté le travail que le sénateur Quinn a fait par le passé dans ce dossier en disant que « le monde n’a pas commencé à tourner quand vous avez présenté vos arguments au comité ». Ça alors.

De plus, l’allusion de la sénatrice Saint-Germain au sujet de ma position sur la suppression de la capacité du gouvernement à fournir des excuses a brouillé les pistes. Je ne partage certainement pas la position de la sénatrice Saint-Germain dans ce dossier. Je critiquais le fait que le gouvernement Trudeau se donne le pouvoir d’éviter de rendre des comptes en fournissant une excuse comme réponse à une question écrite.

Le gouvernement ne peut pas éviter de répondre aux questions sous prétexte qu’il reçoit des questions écrites de la Chambre des communes ou des demandes d’accès à l’information. Il a quand même l’obligation de répondre dans un délai donné. Je ne vois pas pourquoi le Sénat devrait accepter moins. Pour cette raison, j’appuie l’amendement du sénateur Quinn dans sa forme actuelle. Donner au gouvernement la capacité d’invoquer des prétextes ne renforce pas la reddition de comptes. C’est un argument bizarre à faire valoir, surtout ici, à la Chambre de second examen objectif.

La sénatrice Saint-Germain a décrit la motion no 165 comme constituant « [...] un énorme progrès par rapport à la situation actuelle [...] », c’est-à-dire en imposant une limite de temps aux réponses du gouvernement aux réponses écrites et différées du Sénat. Elle a dit : « [...] on ne devrait pas se disputer pour un amendement aussi malavisé », comme celui du sénateur Quinn. La sénatrice Saint-Germain nous dit essentiellement de nous satisfaire de la bienveillance divine du gouvernement Trudeau, de prendre les miettes qu’il nous lance et d’être reconnaissants. Non, merci.

Avec la motion no 165, le gouvernement Trudeau traite le Sénat comme un parent pauvre. Le Sénat est censé être une Chambre égale et complémentaire à la Chambre des communes, et nous avons tous le droit d’obtenir des réponses.

(1830)

Honorables sénateurs, je suis certaine que vous êtes au courant des longs délais du gouvernement pour répondre à nos questions écrites et différées. Pas plus tard que la semaine dernière, la sénatrice LaBoucane-Benson a finalement obtenu plusieurs réponses à des questions de novembre 2021. Le gouvernement Trudeau est tellement bienveillant qu’il lui a fallu deux ans et demi avant de répondre. Or, même quand il répond enfin à nos questions écrites et différées, bon nombre de ses réponses sont de piètre qualité.

En septembre 2022, j’ai posé une question pendant la période des questions au sujet de l’horrible tuerie qui a touché la nation crie de James Smith, des meurtres qui avaient été perpétrés durant ce mois, dans le Nord de la Saskatchewan. J’ai reçu la réponse du gouvernement Trudeau cinq mois plus tard. Cette réponse avait déjà été divulguée publiquement par la GRC dans une conférence de presse, quatre mois auparavant, alors pourquoi le gouvernement a-t-il mis autant de temps à me fournir l’information que je demandais?

Récemment, j’ai obtenu une réponse différée de la part du gouvernement 14 mois après ma demande initiale. Ma question portait sur le nombre d’employés de l’Agence du revenu du Canada qui ont été congédiés parce qu’ils avaient reçu la Prestation canadienne d’urgence de manière inappropriée. Là encore, la réponse que j’ai reçue avait déjà été rendue publique quatre mois plus tôt, dans un article publié dans les médias. De plus, cette réponse contenait un chiffre qui n’était plus exact. Un deuxième article paru il y a quelques mois citait de l’information fournie par le gouvernement, et ce nombre était plus élevé. Pourtant, la réponse du sénateur Gold à mon intention comportait le nombre précédent et inexact de congédiements. C’est vraiment ridicule.

D’autres sénateurs ont vécu des expériences semblables. Il y a deux ans et demi, le sénateur Housakos a posé des questions au sénateur Gold au sujet du processus de nomination au Sénat. La semaine dernière, le gouvernement a renvoyé au sénateur Housakos une réponse consistant en une phrase qui ne répondait toujours pas à ses questions et qui, essentiellement, ne voulait rien dire.

Je tiens à corriger quelques erreurs dans la réponse de la sénatrice Saint-Germain à cet amendement. Premièrement, je tiens à lui assurer, ainsi qu’aux autres sénateurs, que le sénateur Gold n’est pas la seule personne à s’évertuer à répondre aux questions écrites et aux réponses différées. Il dispose d’un budget de bureau de 1,5 million de dollars et de nombreux d’employés.

Deuxièmement, les réponses aux questions — comme le Comité du Règlement se l’est fait dire aujourd’hui — sont en fait coordonnées par le Bureau du Conseil privé après avoir été préparées par les ministères ou les organismes gouvernementaux pertinents, puis approuvées et publiées par les ministres appropriés. Ensuite, le bureau du sénateur Gold relaie l’information au sénateur qui a posé la question à l’origine.

N’ayez crainte, sénatrice Saint-Germain. Le sénateur Gold a l’ensemble du gouvernement Trudeau à sa disposition. C’est une chose grave que le gouvernement Trudeau n’accorde pas au sénateur Gold et au Sénat le respect qu’ils méritent, mais c’est une autre histoire. Voilà pourquoi il faut souvent des mois, parfois même des années, avant d’obtenir des réponses aux questions posées par les sénateurs.

Il existe une solution simple pour réduire la charge de travail du sénateur Gold : le gouvernement Trudeau devrait en priorité renseigner le sénateur Gold de manière appropriée, comme un ministre de la Couronne, afin qu’il puisse plus facilement et directement répondre aux questions pendant la période des questions du Sénat. Cela nous permettrait de réduire le nombre de questions en attente d’une réponse. Pendant le mandat du premier ministre Harper, lorsque les sénateurs LeBreton et Carignan étaient leaders du gouvernement au Sénat, ils apportaient d’énormes cahiers d’information au Sénat tous les jours pour la période des questions parce qu’ils savaient qu’ils devaient répondre au nom du gouvernement. Il en était ainsi même si le leader du gouvernement au Sénat, le sénateur Carignan, ne faisait pas partie du Cabinet. Il était membre assermenté du Conseil privé — à l’instar du sénateur Gold — et on s’attendait à ce qu’il réponde aux questions des autres sénateurs au nom du gouvernement. Les informations contenues dans ces cahiers d’information provenaient de son bureau, qui assurait la coordination avec le gouvernement sur les questions clés du jour.

Les seules fois où le sénateur Gold semble donner des réponses complètes pendant la période des questions, c’est lorsque des sénateurs indépendants posent des questions et l’informent à l’avance de leur contenu. Il sort alors une feuille de 8,5 pouces sur 14 pouces pour lire la réponse qu’on lui a préparée. Le Règlement du Sénat n’exige pas que le leader du gouvernement soit averti du contenu des questions, et il ne devrait pas l’être. La période des questions est censée se dérouler sans préavis, sur demande. Le sénateur Gold devrait être suffisamment bien informé pour pouvoir répondre à presque toutes les questions sur le parquet du Sénat.

La sénatrice Saint-Germain est d’avis que le gouvernement avait besoin d’un délai plus long, soit 60 jours par rapport aux 45 jours de la Chambre des communes, en raison de la perspective plus globale des questions posées au Sénat. Elle dit que l’amendement du sénateur Quinn visant à réduire le délai de réponse de 60 à 45 jours « [...] ne tient pas compte de la nature et de la complexité des questions souvent posées au gouvernement par les sénateurs. »

C’est loin d’être le cas. La sénatrice Saint-Germain devrait peut-être passer un peu de temps à étudier les questions écrites qui sont soumises à la Chambre des communes. Je peux lui assurer que les questions posées par les députés sont tout aussi complexes que celles posées par les sénateurs. Franchement, il est erroné de laisser entendre le contraire, pour ne pas dire condescendant.

La sénatrice Saint-Germain a qualifié le processus pour répondre aux questions écrites et différées dans la motion no 165 de « [...] plus rigoureux et plus clair que celui de la Chambre des communes. » Encore une fois, je me demande si elle a examiné le processus de la Chambre des communes. Les questions sans réponse à la Chambre des communes sont renvoyées au comité permanent concerné, qui peut convoquer des témoins à leur sujet, y compris le secrétaire parlementaire ou des fonctionnaires. Quand les députés n’obtiennent pas de réponse adéquate à la période des questions, ils peuvent demander la parole dans le cadre du débat d’ajournement. Je peux vous dire que je participerais souvent au débat d’ajournement si nous avions un tel débat au Sénat. Le débat d’ajournement donne aux députés l’occasion de faire pression sur le gouvernement au sujet de leurs questions à la Chambre des communes et de continuer à demander publiquement des comptes au gouvernement.

Comparez cela au processus proposé pour le Sénat dans la motion no 165. La sénatrice Saint-Germain parle d’une « sanction », mais il n’en est rien dans les faits. Aux termes de cette motion, si une question reste sans réponse après le délai prévu, elle est renvoyée au Comité du Règlement. Pourquoi? Qu’est-ce que le comité fera? Ses travaux n’auront rien à voir avec l’obtention d’une réponse à la question. Le Comité du Règlement se penchera-t-il sur des questions d’ingérence étrangère, sur le coût des dernières vacances luxueuses du premier ministre ou sur l’octroi de contrats lucratifs à des amis du pouvoir? Bien sûr que non. Ce n’est qu’un exemple de plus de l’utilisation par le gouvernement du Comité sénatorial du Règlement comme un endroit pour se débarrasser de ses divers échecs.

De façon semblable, le sénateur Gold veut maintenant que le Comité du Règlement étudie le rôle des sénateurs non affiliés parce que le gouvernement n’a pas répondu à leurs préoccupations dans cette motion. Le gouvernement Trudeau n’a même pas utilisé les mots « sénateurs non affiliés » une seule fois dans les huit pages de propositions de modifications majeures au Règlement.

La sénatrice Saint-Germain a dit que le renvoi de questions écrites restées sans réponse au Comité du Règlement relèverait d’une « question de privilège ». C’est complètement faux. La motion no 165 ne fait aucune référence à une question de privilège. Il faudrait que ce soit expressément énoncé, mais la motion ne dit que ce qui suit :

[...] l’absence de réponse est renvoyée d’office au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement pour examen et rapport [...]

Lorsqu’une question de privilège est étudiée au Comité du Règlement en vertu du Règlement du Sénat, elle a préséance sur toutes les autres questions dont le comité est saisi. La motion no 165 ne stipule certainement pas qu’il s’agirait de questions de privilège. Même si elle le faisait, cela serait totalement inapplicable parce que le Comité du Règlement ne ferait rien d’autre que de s’occuper des questions sans réponse pour lesquelles il ne peut rien faire. C’est ridicule.

Honorables sénateurs, si nous entendons modifier en profondeur le Règlement du Sénat du Canada, nous avons l’obligation de nous informer sur le Règlement actuel et sur la raison d’être de ses dispositions. Nous ne devrions pas nous débarrasser du Règlement simplement parce que nous sommes impatients de le changer. Si nous ne procédons pas avec une grande prudence, il y aura d’importantes conséquences imprévues. Si certains de ces changements peuvent vous sembler être une excellente idée, sachez que, un jour — un jour qui n’est peut-être pas si loin —, vous vous retrouverez dans le camp opposé. Les changements que vous préconisez aujourd’hui vous sembleront-ils encore justes une fois que vous aurez changé de camp?

Il est raisonnable de fixer une limite au temps dont dispose le gouvernement pour répondre aux questions des sénateurs. Il est regrettable que le gouvernement Trudeau ait choisi de transformer cette proposition en une motion omnibus contenant des mesures destinées à neutraliser et à démanteler l’opposition au Sénat.

L’amendement du sénateur Quinn est une proposition réfléchie et sensée pour assurer une meilleure reddition de comptes dans le processus que le gouvernement propose à l’égard des questions en suspens. Il réduirait le nombre de jours dont le gouvernement disposerait pour répondre en le faisant passer de 60 à 45, comme à la Chambre des communes. Il éliminerait une échappatoire qui permet au gouvernement de trouver des prétextes pour éviter de rendre des comptes.

Les sénateurs méritent d’obtenir des réponses du gouvernement au nom des Canadiens et qu’on les lui fournisse avec le même respect dont on fait preuve envers les députés de la Chambre des communes. Pour ces raisons, j’espère que vous vous joindrez à moi et que vous voterez pour l’amendement du sénateur Quinn. Merci.

[Français]

L’honorable Claude Carignan : Honorables sénateurs, je serai bref.

J’ai lu avec attention la motion no 165 présentée par le sénateur Gold. Même si j’en ai beaucoup à dire sur l’intention de cette motion, qu’elle soit manifeste ou en sourdine, je limiterai mes propos à un aspect problématique de la motion.

Normalement, nous aurions pu effectuer correctement notre travail et faire un amendement à la motion afin de corriger cette lacune. Cependant, nous voilà privés de cette possibilité de corriger ces modifications en bloc au Règlement du Sénat, en raison de cette motion de fixation de délai du gouvernement qui nous muselle.

Si je souhaite vous exposer l’amendement sensé et fort raisonnable que j’aurais voulu présenter, c’est pour vous montrer que la motion no 165, en plus d’être complètement illégitime, comporte une faiblesse évidente que nous serons forcés d’adopter avec cette lacune, notamment. Je dis « notamment », car il y en a d’autres. Comme le leader du gouvernement, qui est mandaté par Justin Trudeau, a décidé de limiter notre temps de parole, la possibilité de faire des amendements à sa motion est nulle. Le leader a le monopole de la vérité.

(1840)

J’attire votre attention sur la disposition 17 de la motion no 165, qui vient modifier l’article de notre Règlement qui traite des comités du Sénat. L’article 12-3(3) établit ceci :

[...] le leader du gouvernement et le leader de l’opposition sont membres d’office de tous les comités sauf le Comité permanent sur l’éthique et les conflits d’intérêts des sénateurs, le Comité permanent de l’audit et de la surveillance et les comités mixtes; à ce titre, ils sont suppléés par les leaders adjoints.

À titre de membres d’office des comités, le leader du gouvernement et le leader de l’opposition ont également le droit de vote.

Or, la disposition 17 de la motion no 165 aurait pour effet que les leaders ou facilitateurs des autres groupes parlementaires reconnus au Sénat qui ont le plus grand nombre de membres y siègent également comme membres d’office, mais sans droit de vote. L’intention derrière cet aspect de l’amendement, qui est de ne pas donner le droit de vote aux trois autres leaders, vise à ne pas déséquilibrer les votes aux comités. Toutefois, il n’est nullement question dans cet amendement du quorum nécessaire pour que les comités puissent siéger. Conformément à la disposition 17 dans sa forme actuelle, les leaders des cinq groupes pourraient être pris en compte dans l’établissement du quorum, qui est de quatre membres, conformément à l’article 12-6(1) de notre Règlement.

Afin d’illustrer la défaillance de cet amendement, prenons une situation hypothétique. Un comité permanent est convoqué pour faire l’étude article par article d’un projet de loi du gouvernement, mais seul le leader du gouvernement, qui a le droit de vote, se présente, ainsi que les leaders du Groupe des sénateurs canadiens, du Groupe progressiste du Sénat et du Groupe des sénateurs indépendants, tous trois n’ayant pas le droit de vote. Aucun autre membre du comité permanent ne se présente. Le quorum de quatre serait néanmoins atteint et tous les votes seraient d’un à zéro. Cela n’a pas de sens.

Mon exemple est évidemment un exemple extrême, mais il illustre bien l’inconséquence de la disposition 17 si on ne tient pas compte, dans sa formulation actuelle, du quorum des comités et de la participation des nouveaux membres d’office qu’il prévoit. Pour corriger ce problème évident, j’aurais proposé de modifier le nouvel article 12-3(4) du Règlement du Sénat qui est proposé dans la motion de la façon suivante. Premièrement, j’aurais ajouté les mots « et quorum » à la note marginale de ce nouvel article, afin que cette note se lise ainsi : « Droit de vote des membres d’office et quorum ». Deuxièmement, dans le texte de l’article 12-3(4), j’aurais remplacé les mots « le sénateur qui le supplée, bénéficient du droit de vote » par les mots « le sénateur qui le supplée : a) bénéficient du droit de vote; b) sont pris en compte aux fins de déterminer si le quorum est atteint ». Troisièmement, j’aurais ajouté un renvoi au nouvel article 12-3(4) dans la liste d’exceptions qui suit l’article 12-6(1).

Chers collègues, essentiellement, cet amendement serait venu établir que les cinq leaders ou facilitateurs des groupes parlementaires reconnus sont dorénavant des membres d’office des comités permanents, excluant les trois comités nommés précédemment, mais que seuls le leader du gouvernement et le leader de l’opposition ont le droit de vote, comme il est d’usage actuellement, et qu’ils sont les seuls, en plus des membres réguliers des comités, à être pris en compte dans l’établissement du quorum. Toutefois, honorables sénateurs, je ne peux pas le faire. Ce changement de « gros bon sens », je ne peux même pas le proposer. Le Sénat ne peut même pas l’étudier, parce que le leader du gouvernement a décidé qu’il était le maître du jeu, appuyé en cela par les sénateurs qui se disent indépendants et qui ont abdiqué leur responsabilité d’étudier le Règlement et ses amendements. C’est triste, chers collègues, mais c’est la situation actuelle. J’en suis désolé, mais nous devrons vivre avec.

Merci.

[Traduction]

Son Honneur la Présidente : À titre de rappel, nous débattons de la motion d’amendement de l’honorable sénateur Quinn.

L’honorable Leo Housakos : Honorables sénateurs, voici la deuxième partie des observations que j’ai faites dans la première partie, qui visent essentiellement à rappeler à tout le monde que la démocratie s’exerce seulement dans le cadre de nos fonctions de parlementaires et qu’il existe une distinction importante entre les fonctions parlementaires et le gouvernement.

Les sénateurs sont convoqués ici non seulement pour exercer leur mandat, leurs privilèges et leurs avantages ainsi que pour appuyer le gouvernement, mais aussi pour contester ce dernier. Nous avons été nommés en vertu de la Constitution pour remplir notre rôle, qui consiste à représenter les intérêts de nos régions.

Il est impératif de comprendre les répercussions de la motion dont nous sommes saisis. Tout à l’heure, dans mon intervention, j’ai dit que j’étais déchiré. Bien que je sois du côté de l’opposition au Sénat, je trouve ces règles odieuses parce que le gouvernement les a imposées unilatéralement à cette institution. Pour la première fois dans l’histoire de la Confédération, on a recours à des outils aussi draconiens que la fixation de délai pour faire adopter des changements au Règlement, à nos procédures et aux droits du Parlement, soit les droits les plus fondamentaux que nous ayons.

Honorables collègues, je souligne au passage que je suis favorable à certains de ces changements. Si j’étais assis de l’autre côté, sur les banquettes du gouvernement, comme je me suis trouvé à l’être pendant les sept années qui ont suivi ma nomination au Sénat, je crois qu’à l’instar de certains de mes collègues qui sont de ce côté-ci, mais qui pourraient se retrouver de l’autre côté dans quelques mois, j’accueillerais favorablement ces changements. Cependant, bon nombre de ceux d’entre vous qui seront encore ici dans deux, quatre ou six ans regretteront ce jour où ils ont fait sortir le génie de sa lampe. On ne pourra plus l’y faire rentrer. Dans notre système parlementaire, quand on crée un précédent, les gouvernements en profitent pleinement. C’est ce que j’ai constaté pendant mes 40 années en politique.

Permettez-moi d’avancer une hypothèse qui me semble tout à fait probable. Aux prochaines élections, on élira un premier ministre qui, deux, quatre ou six ans plus tard, aura nommé de 70 à 80 nouveaux sénateurs. Je souligne au passage que c’est possible. J’étais là à l’époque où un certain Stephen Harper a nommé 70 ou 75 sénateurs, et depuis ce temps, Justin Trudeau en a nommé plus de 80. Il est fort probable que le prochain premier ministre en fasse autant.

Prenez un scénario où il y aurait une dizaine de représentants du gouvernement, un caucus gouvernemental conservateur de 12 sénateurs, non pas 3, mais 12, parce qu’ils voudraient avoir un plus grand caucus. Deux nouveaux groupes pourraient naître au cours des prochaines législatures. L’un d’eux pourrait être le « Groupe des conservateurs indépendants », le GCI, et l’autre, le « Groupe des tories indépendants », le GTI. Ils auraient leurs propres agents politiques. Ils revendiqueraient leur statut au sein de cette nouvelle institution indépendante. Le GCI compterait 38 ou 39 sénateurs, tandis que le GTI en compterait, lui, 36 ou 37. Il y aurait donc ici un total de 75 à 80 sénateurs élus par Pierre Poilievre qui estimeraient pouvoir agir en toute légitimité étant donné qu’il y aurait des précédents. Ils seraient majoritaires au Sénat, et cela leur donnerait l’impression d’être en droit de changer les règles, les procédures et les droits du Parlement pour les adapter à la forme et à la taille de leurs groupes et à ce qu’ils considèrent comme juste.

D’ailleurs, nombre de ces changements n’auraient pas à être effectués parce que vous les apportez maintenant dans le cadre de la motion no 165. L’argument du nouveau leader du Groupe des conservateurs indépendants serait : « Puisque nous sommes le plus grand groupe après le gouvernement, nous devrions avoir un temps de parole illimité. Nous devrions aussi être représentés d’office au sein des comités. »

Le GTI dirait : « Attendez un instant. Ce qui vaut pour les uns vaut aussi pour les autres. Nous méritons la même chose. D’ailleurs, nous méritons les mêmes crédits budgétaires et de financement que les autres groupes, comme le Groupe des sénateurs indépendants. »

Les revendications du GTI seraient légitimes. Qui donc pourrait prétendre le contraire? La situation serait merveilleuse. Il y aurait trois groupes — un groupe au pouvoir et deux autres groupes qui formeraient la majorité au Sénat —, et le GTI dirait : « Nous réclamons le droit de prendre la parole à propos de ce qui est important pour nous. »

Pour l’essentiel, on aurait trois groupes qui parleraient au nom du gouvernement. Voyez-vous le problème? Vous ne le voyez pas aujourd’hui, mais je vous garantis que vous le verrez dans quelques années. Je siégerai de ce côté-là, j’utiliserai vos arguments et je rirai bien.

Permettez-moi de vous dire que, quand je suis arrivé au Sénat, j’ai appris au contact de géants du Parlement comme Serge Joyal, Jim Cowan et David Smith. Même quand j’étais Président, nommé par décret, on me répétait sans cesse : « Monsieur le Président, vous ne serez jugé que sur la façon dont vous traitez la minorité dans cette enceinte. » La majorité a les outils, les votes, les droits et les privilèges. Elle finit toujours par faire ce qu’elle veut, sauf que la démocratie ne fonctionne que lorsque les voix minoritaires sont traitées avec respect. Dès que le gouvernement cesse de traiter les groupes minoritaires et les représentants de minorités avec respect, la démocratie meurt, et aucun article du Règlement ne peut la sauver, car la démocratie a pour prémisse que le gouvernement respecte les principes. Lorsque l’on modifie unilatéralement le règlement qui régit une institution simplement parce qu’on a la majorité pour le faire, cette institution court à sa perte. Voilà la réalité, chers collègues. C’est indéniable.

(1850)

Honorables sénateurs, pour l’amour de la démocratie, je vous exhorte à réfléchir aux conséquences que pourrait avoir, dans quelques années, le fait de donner à un futur gouvernement ces outils qui lui permettront d’écraser les voix minoritaires et de mettre une sourdine sur leur porte-voix. Vous ne voudriez pas que vos enfants ou vos petits-enfants vous demandent : « Où diable étais-tu lorsque cela s’est produit? » ni avoir pour seule réponse : « J’ai simplement acquiescé à la demande du gouvernement. » Je l’ai déjà dit, je comprends la situation. Nous l’avons tous vécue. Nous restons toujours loyaux envers celui qui nous a nommés.

La démocratie ne peut que mieux se porter lorsque vous avez le courage de résister et de dire au gouvernement, quel qu’il soit, même si c’est celui qui vous a nommé au Sénat : « Il y a une limite, monsieur le premier ministre ou monsieur le leader du gouvernement, que nous ne vous laisserons pas dépasser. Il y a d’autres limites que vous pouvez dépasser. Il y a d’autres lois qui ne m’ont pas emballé, mais on m’a rappelé que ma principale tâche ici est de veiller à appuyer le gouvernement. »

Nous savons tous que le gouvernement a conduit le Canada à la faillite au cours des huit dernières années; pourtant, vous avez été obligés de voter en faveur de projets de loi de crédits et de projets de loi budgétaires qui étaient, comme vous le saviez en votre for intérieur, une catastrophe. Pourtant, vous l’avez quand même fait, parce que vous ne voulez pas remettre en question la volonté de la Chambre élue démocratiquement. Toutefois, nous ne sommes pas une Chambre de confiance; nous sommes une Chambre de principes. Nous sommes une Chambre où nous pouvons nous faire entendre et être pris en compte, au nom de notre région, de nos concitoyens ou des divers groupes que nous représentons, tels que les francophones, les anglophones et tous les autres groupes, si chacun d’entre nous se sent interpellé et fortement concerné lorsque le gouvernement va trop loin. Je trouve malheureux de constater que nous avons adopté une motion draconienne afin d’imposer des changements de règles et de procédures sans la moindre protestation dans cette enceinte, ce qui ne semble inquiéter personne.

Le sénateur Quinn, qui est toujours modéré et raisonnable, propose un amendement qui demande essentiellement aux sénateurs de préserver nos droits et privilèges par rapport à l’autre endroit, rien de plus, rien de moins. Examinons de nouveau quels sont nos privilèges au Sénat. La sénatrice Batters y a fait allusion. Nous avons les mêmes droits et privilèges que les députés. La différence, c’est que nous ne sommes pas élus et que le Sénat n’est pas une chambre de confiance. Pourquoi diable accepterions-nous des changements qui réduiraient notre rôle? Même si la modification semble mineure — 60 jours au lieu de 45 —, pourquoi une question posée par un député serait-elle plus importante ou plus pressante que celle posée par un sénateur représentant l’Alberta, le Québec ou un autre endroit? En fait, en tant que Chambre haute, nous devrions même exiger du gouvernement qu’il fournisse des réponses dans un délai de 30 jours. Voilà ce que nous devrions faire. Nous ne devrions pas laisser le gouvernement s’en tirer à bon compte lorsqu’il s’agit de ce genre de choses.

Il est déjà assez déplorable que nous ayons accepté la volonté de l’électorat en 2015. Soit dit en passant, aucun d’entre vous ne peut s’attribuer le mérite de ce nouveau Sénat indépendant. Lorsque les livres d’histoire seront écrits au Canada, pas un seul d’entre vous ne dira qu’il s’est présenté à Ottawa après sa nomination en 2015 et qu’il a décidé d’être indépendant. La décision a été prise avant même les élections de 2015, lorsque Justin Trudeau a unilatéralement expulsé des membres de son caucus, et nous en connaissons les raisons. En fin de compte, il a inclus cette mesure dans son programme électoral par opportunisme politique et, en se fondant sur ces élections, il a imposé à cette institution les changements déconcertants que nous avons vus au cours des huit dernières années et demie.

Nous les avons acceptées en principe parce que — encore une fois — c’était la volonté de l’électorat. Cependant, Justin Trudeau n’a jamais dit dans son programme qu’il allait mettre son nez dans l’institution à un point tel qu’il allait modifier son Règlement et ses procédures de façon unilatérale en utilisant son leader du gouvernement, une motion du gouvernement et la clôture pour cette motion. Chers collègues, il s’agit d’un précédent avec lequel nous devrons vivre pendant de nombreuses années, car je vous garantis que les gouvernements futurs l’utiliseront. Pourquoi ne le feraient-ils pas? Je serai le premier à défendre son utilisation par le futur gouvernement parce que je vois de nombreux sénateurs dans cette institution me dire que c’est plus que correct.

Ce scénario hypothétique que je vous soumets, chers collègues, ne manquera pas de se réaliser, je vous l’assure. Je ne suis ni un clairvoyant, ni Nostradamus, mais je suis en politique depuis assez longtemps pour savoir que lorsqu’on met un outil sur la table, un politicien va s’en servir, en particulier lorsqu’il est au Cabinet du premier ministre. Justin Trudeau avait l’habitude de parler des vertus de l’opposition lorsqu’il était dans l’opposition. Il ne vante plus ces vertus et, en huit ans et demi, pas une fois il n’a déclaré qu’il fallait accorder davantage de pouvoirs au Sénat ou à la Chambre des communes. Bien au contraire.

L’autre élément qui doit être souligné, mes chers amis, c’est que nous avons passé des heures et des heures avec un gouvernement obsédé par l’idée de changer le Règlement parce qu’il veut limiter à tout prix la voix de l’opposition et les critiques. Il veut faire en sorte qu’au bout du compte — car c’est toujours une question de relations publiques —, dès qu’on dit quelque chose de mal au sujet du gouvernement — vous savez ce que c’est —, on fait preuve de partisanerie. C’est un code qui signifie « il ne faut pas critiquer le gouvernement ». Comme je l’ai dit, c’est notre rôle. Lorsque nous sommes convoqués ici, notre travail consiste à critiquer le gouvernement et ses politiques — ni plus, ni moins.

Tout à coup, sénateur Gold, il semble qu’au cours de la semaine dernière, ou des deux dernières semaines, la principale préoccupation de votre gouvernement ait été le fait que les changements au Règlement et aux procédures du Sénat sont plus importants que nos déficits historiques, notre dette historique, un coût de la vie historique et une génération de Canadiens qui en sont réduits à vivre dans le sous-sol de leurs parents parce qu’ils n’ont pas les moyens d’acheter une maison. La criminalité monte en flèche. C’est la réalité. Pour la première fois, en tant que Canadiens, chaque sou perçu dans le cadre de la TPS sert à payer les intérêts de la dette du pays. À l’heure actuelle, le Canada consacre plus d’argent aux intérêts de la dette qu’aux paiements de transfert en santé, mais il n’y a pas de quoi s’inquiéter. Six millions de Canadiens n’ont pas de médecin, mais ce dont nous devons débattre, c’est de l’amendement du sénateur Quinn à la motion no 165, parce que c’est crucial, n’est-ce pas, sénateur Plett?

Les Canadiens de tout le pays ne veulent pas que le Sénat et tous ses sénateurs se penchent sur d’autres problèmes éventuels, mais ils veulent que nous examinions le Règlement et les procédures concernant la pause du repas et que nous envisagions la possibilité de donner un temps de parole illimité à un groupe nommé par Trudeau et à son leader pour qu’ils puissent nous parler de l’excellent travail qu’accomplissent le premier ministre et son gouvernement. Tous les problèmes que je viens de signaler sont le fruit de mon imagination et de celle de 40 millions de Canadiens. C’est ce que le gouvernement actuel juge être le plus important, et ce sur quoi les Canadiens demandent aux parlementaires de se concentrer.

En bref, chers collègues, je tiens à vous dire que je suis tout à fait d’accord avec l’amendement du sénateur Quinn. D’ailleurs, tous les sénateurs devraient l’appuyer, car c’est la première fois que nous avons un sénateur véritablement indépendant qui demande au gouvernement de cesser de museler et de neutraliser la Chambre haute. Comme si ce n’était pas déjà suffisant de nous avoir demandé de venir à Ottawa pour prendre la parole au nom de nos régions respectives, ils nous ont aussi chassés hors du caucus national au pouvoir. Les sénateurs ne peuvent pas participer aux réunions hebdomadaires du caucus, car le gouvernement ne veut pas entendre les sénateurs parler de leurs régions ni savoir ce qui s’y passe. La réalité, c’est que si les sénateurs pouvaient faire partie du caucus national et se lever chaque mercredi matin pour aller dire au premier ministre ce qu’ils entendent de leurs amis, voisins et concitoyens, les sénateurs finiraient par lui dire : « Eh l’ami, change tes façons de faire et fais-le rapidement. »

Les membres du caucus national ne veulent pas entendre ce que vous avez à dire, alors ils vous ont neutralisé en vous expulsant du caucus. Ils vous ont dit que vous êtes indépendants, ce qui signifie essentiellement : « Ne critiquez pas le gouvernement. » Voilà qu’on vous dit maintenant que vous êtes aussi des parlementaires de seconde classe par rapport aux députés de l’autre endroit. Leur importance est considérablement plus élevée que la vôtre.

Chers collègues, pour toutes ces raisons, j’appuie l’amendement du sénateur Quinn et je demande à quiconque ayant un tant soit peu de gros bon sens d’en faire de même. Merci beaucoup.

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Honorables sénateurs, j’interviens pour la deuxième fois aujourd’hui au sujet de l’amendement proposé par le sénateur Quinn à la motion no 165.

Je suis d’avis que l’amendement proposé par le sénateur Quinn est important pour le Sénat et pour tous les Canadiens.

En tant que parlementaires, nous sommes la voix des concitoyens, des organisations, des parties prenantes et des Canadiens de partout au pays. Dans les deux Chambres du Parlement, nous prenons la parole à la période des questions pour poser au leader du gouvernement des questions sur des sujets qui intéressent les Canadiens.

En tant que leader adjointe de l’opposition officielle, j’ai posé des questions au leader du gouvernement à maintes occasions. En tant que fière sénatrice de la Colombie-Britannique, j’ai posé de nombreuses questions sur des sujets qui touchent la Colombie‑Britannique. Comme beaucoup de parlementaires, je suis devenue, dans cette enceinte, la défenseure et la porte-parole de nombreuses organisations, notamment de certaines qui défendent les anciens combattants de la guerre de Corée, la communauté des personnes sourdes et aveugles et les petites entreprises, pour n’en nommer que quelques-unes. Il m’est arrivé de poser des questions pour soutenir ces organisations, défendre leurs droits et demander au gouvernement de rendre des comptes aux Canadiens qui gagnent durement leur vie. Souvent, le leader ne répond pas directement à ces questions au moment où elles sont posées. Nous attendons alors que les réponses viennent sous forme de réponses différées. Les réponses aux questions concernant les anciens combattants, la crise du logement, la dangereuse décriminalisation de la drogue, les services de santé et d’autres questions importantes qui touchent directement les Canadiens méritent des réponses rapides.

(1900)

Chers collègues, si l’objectif de la période des questions a parfois été remis en question et si cette pratique est considérée comme acquise, n’oublions pas le rôle essentiel que jouent les questions orales et écrites dans notre système parlementaire et dans notre démocratie. La période des questions est un moyen important de demander des comptes au gouvernement et d’obtenir plus d’informations sur certains sujets. Les questions écrites peuvent être particulièrement utiles pour obtenir des réponses plus détaillées sur les données, les statistiques, le financement, etc.

Alors que le gouvernement prétend qu’il veut être ouvert et transparent, le bureau de l’accès à l’information et de la protection des renseignements personnels est tout sauf ouvert. Il est englué dans une culture du retard lorsque les Canadiens et les parlementaires veulent de l’information cruciale sur les dépenses du gouvernement. Pendant la période des questions, que ce soit ici ou à l’autre endroit, le gouvernement préfère lire des notes préparées au lieu de donner des réponses claires et précises. Pour ce qui est des questions écrites, il est assez remarquable que la première question soumise au cours de la présente législature, le 23 novembre 2021, soit toujours inscrite au Feuilleton, sans réponse. De tels retards indiquent que le système est clairement défaillant — on ne parle pas de jours, de semaines ou de mois, mais bien d’années.

Dans ce contexte, les questions écrites sont utiles et importantes pour les sénateurs. L’amendement du sénateur Quinn permettrait de mieux harmoniser notre pratique avec celle de la Chambre des communes. Pourquoi les questions que nous posons devraient-elles être soumises à un délai de 60 jours au lieu des 45 jours qui s’appliquent à la Chambre des communes?

Le sénateur Housakos : Ou deux ans.

La sénatrice Martin : Oui, ou deux ans. Il n’est pas logique d’avoir deux séries de règles pour les questions écrites au sein d’un même Parlement.

D’autres sénateurs ont fait référence à la limite de 45 jours de la Chambre des communes. Le sénateur Plett a dit :

[...] je ne vois pas pourquoi le gouvernement devrait avoir plus de temps pour répondre à nos questions qu’à celles de nos collègues de la Chambre des communes, les députés.

Je parle de députés, et non de parlementaires, parce que je suis d’accord avec le sénateur Quinn. Nous sommes tous des parlementaires. Je ne vois pas en quoi le fait de laisser le gouvernement ne pas répondre à nos questions en déposant simplement un document disant qu’il ne peut pas le faire est utile.

Le sénateur Quinn a dit :

Je tiens à dire tout d’abord que les députés et les sénateurs sont, en fait, des parlementaires. Nous devrions être traités sur un pied d’égalité en ce qui concerne les réponses à des questions écrites et les réponses différées. Quand une question valable ne reçoit pas une réponse satisfaisante, il y a un mécanisme à l’autre endroit connu sous le nom de débat d’ajournement [...]

Chers collègues, j’ai eu l’honneur de servir en tant que leader adjointe du gouvernement et leader adjointe de l’opposition. Je suis fière d’avoir occupé ces fonctions. Je respecte profondément le Sénat en tant qu’institution et l’importance de préserver le système de Westminster et le Règlement du Sénat. La motion originale du sénateur Gold propose d’ajouter un délai pour les réponses du gouvernement aux questions écrites, mais la raison pour laquelle il a choisi de ne pas l’aligner sur la pratique de la Chambre des communes est déconcertante. Cela démontre en outre que le Sénat ne peut pas mettre cette motion aux voix maintenant. Un débat et une consultation supplémentaires sont nécessaires, non seulement sur ce point, mais aussi sur d’autres points de cette motion dont la portée est très large.

Pourtant, le présent débat est limité par la fixation de délai.

Tout le monde le sait, l’opposition conservatrice au Sénat est contre la motion no 165 dans son intégralité. Pourquoi le gouvernement craint-il autant les consultations et les débats? Il a choisi la fixation de délai et il impose la mise aux voix en quelques jours, de façon à limiter le débat et à forcer l’adoption de la motion.

Même si j’appuie l’amendement à la motion no 165 proposé par le sénateur Quinn, je n’appuie pas la motion no 165 dans son intégralité. Merci.

Le sénateur Plett : Bravo!

Son Honneur la Présidente : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

Son Honneur la Présidente : Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur la Présidente : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur la Présidente : À mon avis, les non l’emportent.

Et deux honorables sénateurs s’étant levés :

Son Honneur la Présidente : Je vois deux sénateurs se lever.

Y a-t-il entente sur la durée de la sonnerie? Une heure? Le vote aura lieu à 20 h 5. Convoquez les sénateurs.

(2000)

La motion d’amendement de l’honorable sénateur Quinn, mise aux voix, est rejetée :

POUR
Les honorables sénateurs

Ataullahjan Osler
Aucoin Patterson
Batters Plett
Black Poirier
Carignan Quinn
Deacon (Nouvelle-Écosse) Ravalia
Downe Richards
Greene Robinson
Housakos Ross
MacDonald Seidman
Marshall Smith
Martin Verner
McCallum Wallin
Oh Wells—28

CONTRE
Les honorables sénateurs

Arnot LaBoucane-Benson
Audette Lankin
Boniface Loffreda
Burey MacAdam
Busson McBean
Clement McNair
Cordy Mégie
Cotter Miville-Dechêne
Coyle Moncion
Dalphond Moodie
Dasko Omidvar
Deacon (Ontario) Oudar
Dean Pate
Forest Petitclerc
Francis Petten
Galvez Ringuette
Gerba Saint-Germain
Gold Simons
Greenwood Sorensen
Harder Tannas
Jaffer Varone
Kingston White
Klyne Woo
Kutcher Yussuff—48

ABSTENTION
L’honorable sénateur

Al Zaibak—1

(2010)

Motion tendant à modifier le Règlement du Sénat—Report du vote

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Gold, c.p., appuyée par l’honorable sénatrice LaBoucane-Benson,

Que le Règlement du Sénat soit modifié :

1.par substitution, aux mots « leader du gouvernement », des mots « leader ou représentant du gouvernement » dans les articles 2-4(2), 3-6(2), 4-3(1), 4-8(1)a), 5-7m), 6-5(1)b), 12-5a), 12-23(2) et (3), et 14-1(2);

2.aux articles 3-3(1) et (2), 4-2(8)b), et 7-4(2), par substitution, aux mots « 18 heures », des mots « 19 heures » dans les notes marginales, s’il y a lieu, et le texte des articles;

3.à l’article 4-2(2), par substitution, au chiffre 15, du chiffre 18 dans la note marginale et le texte de l’article;

4.à l’article 4-2(8)a), par substitution, aux mots « Si un whip ou le représentant désigné d’un groupe parlementaire reconnu », des mots « Si un whip, un agent de liaison ou le représentant désigné d’un parti reconnu ou d’un groupe parlementaire reconnu »;

5.par :

a)substitution, aux articles 4-9 et 4-10, de ce qui suit :

« Réponses différées et questions écrites

Réponses différées à des questions orales

4-9. (1) Lorsqu’il répond à une question orale pendant la période des questions, un sénateur peut indiquer qu’une réponse différée sera fournie par écrit conformément aux dispositions du présent article.

Questions écrites

4-9. (2) Sous réserve du paragraphe (5), un sénateur peut soumettre au gouvernement une question écrite ayant trait aux affaires publiques en l’envoyant par écrit au greffier dans l’un des cas suivants :

a) une réponse écrite est demandée;

b) la question vise à obtenir des renseignements d’ordre statistique ou peu faciles à rassembler.

Publication des questions écrites

4-9. (3) Sur réception d’une question écrite, le greffier la fait publier au Feuilleton et Feuilleton des préavis le jour de séance suivant et ensuite le premier jour de séance de chaque semaine jusqu’à la première des éventualités suivantes :

a) une réponse est déposée;

b) une explication écrite de la raison pour laquelle une réponse n’a pas été fournie est déposée;

c) la question est retirée;

d) l’expiration du délai de 60 jours prévu dans le présent article pour une réponse ou une explication.

Retrait d’une question écrite

4-9. (4) Le sénateur qui a soumis une question écrite peut la retirer par la suite en écrivant au greffier, qui fera inclure une note à cet effet au Feuilleton et Feuilleton des préavis la prochaine fois que la question y aurait été publiée.

Nombre maximal de questions écrites

4-9. (5) Un sénateur ne peut soumettre une question écrite s’il en a déjà quatre publiées au Feuilleton et Feuilleton des préavis en vertu des dispositions du paragraphe (3).

Réponse dans les 60 jours

4-9. (6) Dans les 60 jours suivant la date à laquelle le leader ou représentant du gouvernement, ou un sénateur-ministre, indique qu’une réponse différée sera fournie à une question orale conformément au présent article, ou la date à laquelle une question écrite figure pour la première fois au Feuilleton et Feuilleton des préavis, le leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement, dépose soit la réponse du gouvernement à la question, soit une explication écrite justifiant l’absence de réponse.

Dépôt

4-9. (7) Une réponse ou une explication à fournir en vertu du présent article peut être déposée soit pendant les réponses différées, qui sont appelées à la fin de la période des questions, soit auprès du greffier. Une copie de tout document ainsi déposé est remise au sénateur qui a posé la question, et la réponse différée à une question orale est imprimée dans les Débats du Sénat de la date à laquelle le dépôt est inscrit aux Journaux du Sénat.

Absence de réponse ou d’explication

4-9. (8) Si le gouvernement n’a déposé ni réponse ni explication justifiant l’absence de réponse dans le délai de 60 jours prévu au présent article, l’absence de réponse est renvoyée d’office au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement pour examen et rapport, ce renvoi étant inscrit aux Journaux du Sénat dès que possible. »;

b)la mise à jour des désignations numériques des articles 4-11 à 4-16 actuels à celles des articles 4-10 à 4-15;

6.à l’article 4-13(3) actuel, par substitution, aux mots « est déterminé par le leader ou le leader adjoint du gouvernement », des mots « est déterminé par le leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement »;

7.par substitution, à l’article 6-3(1), de ce qui suit :

« Temps de parole

6-3. (1) Sauf disposition contraire, le temps de parole dans un débat est :

Certains leaders et facilitateurs

a) illimité dans le cas du leader ou représentant du gouvernement, du leader de l’opposition, et du leader ou facilitateur du parti reconnu ou du groupe parlementaire reconnu qui compte le plus grand nombre de membres, à l’exception, s’il y a lieu, des partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus auxquels appartiennent soit le leader ou représentant du gouvernement, soit le leader de l’opposition;

Autres leaders et facilitateurs

b) limité à 45 minutes dans le cas des leaders et facilitateurs autres que ceux prévus à l’alinéa a);

Parrain d’un projet de loi

c) limité à 45 minutes aux étapes des deuxième et troisième lectures dans le cas du parrain du projet de loi, sauf si celui-ci est l’un des sénateurs prévus à l’alinéa a);

Porte-parole d’un projet de loi

d) limité à 45 minutes aux étapes des deuxième et troisième lectures dans le cas du porte-parole du projet de loi, sauf si celui-ci est l’un des sénateurs prévus à l’alinéa a);

Sénateurs désignés

e) limité à 45 minutes aux étapes des deuxième et troisième lectures dans le cas d’un autre sénateur, désigné séparément par le leader ou facilitateur de chaque parti reconnu ou groupe parlementaire reconnu, à l’exception de ceux auxquels appartiennent le parrain et porte-parole;

Autres orateurs

f) limité à 15 minutes dans le cas de tout autre orateur. »;

8.par substitution, aux articles 7-1(1) et (2), de ce qui suit :

« Accord pour fixer un délai

7-1. (1) Le leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement peut, à tout moment pendant une séance, annoncer qu’il est arrivé à un accord avec les représentants des partis reconnus et des groupes parlementaires reconnus pour attribuer un nombre déterminé de jours ou d’heures pour terminer le débat :

a) soit sur un projet de loi du gouvernement à une ou plusieurs étapes, y compris l’examen en comité;

b) soit sur une autre affaire du gouvernement devant le Sénat ou en comité.

Motion de fixation du délai convenu

7-1. (2) Dès cette annonce, le leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement peut, sans préavis, présenter une motion de fixation du délai convenu. »;

9.par substitution, aux articles 7-2(1) et (2), de ce qui suit :

« Aucun accord pour fixer un délai

7-2. (1) Le leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement peut, à tout moment pendant une séance, annoncer qu’il n’a pu arriver à un accord avec les représentants des partis reconnus et des groupes parlementaires reconnus pour fixer un délai pour terminer le débat précédemment ajourné :

a) soit sur un projet de loi du gouvernement à une étape, y compris l’examen en comité;

b) soit sur une autre affaire du gouvernement.

Préavis d’une motion de fixation de délai

7-2. (2) Dès cette annonce, le leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement peut donner préavis d’une motion de fixation d’un nombre déterminé de jours ou d’heures pour terminer le débat ajourné, y compris l’examen d’un projet de loi en comité. »;

10. par substitution, à l’article 7-3(1)f), de ce qui suit :

« f) le temps de parole de chaque sénateur est limité à 10 minutes, à l’exception du leader ou représentant du gouvernement, du leader de l’opposition, et du leader ou facilitateur de tout autre parti reconnu ou groupe parlementaire reconnu, qui disposent chacun de 20 minutes; »

11.à l’article 7-3(2), par suppression des mots « à 18 heures » et des mots « à 20 heures »;

12.à l’article 7-4(5)d), par substitution, aux mots « le whip du gouvernement », des mots « le whip ou agent de liaison du gouvernement »;

13.par substitution, aux articles 9-5(1) à (3), de ce qui suit :

« (1) Le Président demande au whip ou agent de liaison du gouvernement, au whip de l’opposition, et aux whips ou agents de liaison des trois partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus qui comptent le plus grand nombre de membres, à l’exception, s’il y a lieu, des partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus auxquels appartiennent soit le whip ou agent de liaison du gouvernement, soit le whip de l’opposition, s’ils se sont mis d’accord sur la durée de la sonnerie. En cas d’absence d’un whip ou agent de liaison, son leader ou facilitateur peut désigner un sénateur qui agira pour ces fins.

(2) La durée convenue ne doit pas excéder 60 minutes.

(3) Avec le consentement du Sénat, cet accord sur la durée de la sonnerie vaut ordre de faire entendre la sonnerie pendant la durée convenue. »;

14.par substitution, à l’article 9-10(1), de ce qui suit :

« Report d’un vote par appel nominal

9-10. (1) Sous réserve du paragraphe (5) et sauf autre disposition contraire, le whip ou agent de liaison du gouvernement, le whip de l’opposition, ou le whip ou agent de liaison de l’un des trois partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus qui comptent le plus grand nombre de membres, à l’exception, s’il y a lieu, des partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus auxquels appartiennent soit le whip ou agent de liaison du gouvernement, soit le whip de l’opposition, peut faire reporter le vote par appel nominal sur une motion sujette à débat. »;

15.par substitution, à l’article 9-10(4), de ce qui suit :

« Vote reporté au vendredi

9-10. (4) Sauf disposition contraire, si ce vote est reporté au vendredi :

a) le whip ou agent de liaison du gouvernement peut, pendant une séance, le faire reporter de nouveau au jour de séance suivant à 17 h 30 si le vote porte sur un article des affaires du gouvernement;

b) le whip ou agent de liaison du gouvernement, le whip de l’opposition, ou le whip ou agent de liaison de l’un des trois partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus qui comptent le plus grand nombre de membres, à l’exception, s’il y a lieu, des partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus auxquels appartiennent soit le whip ou agent de liaison du gouvernement, soit le whip de l’opposition, peut, pendant une séance, le faire reporter de nouveau au jour de séance suivant à 17 h 30 si le vote porte sur un article des autres affaires. »;

16.par substitution, à l’article 10-11(2)a), de ce qui suit :

« a) soit par le leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement, à tout moment pendant une séance; »;

17.par

a)substitution, à l’article 12-3(3), de ce qui suit :

« Membres d’office

12-3. (3) En plus du nombre de membres prévu aux paragraphes (1) et (2), et sous réserve des dispositions du paragraphe (4), le leader ou représentant du gouvernement, le leader de l’opposition, et les leaders ou facilitateurs des trois partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus qui comptent le plus grand nombre de membres, à l’exception, s’il y a lieu, des partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus auxquels appartiennent soit le leader ou représentant du gouvernement, soit le leader de l’opposition, sont membres d’office de tous les comités sauf le Comité permanent sur l’éthique et les conflits d’intérêts des sénateurs, le Comité permanent de l’audit et de la surveillance et les comités mixtes. À ce titre, en cas d’absence, le leader ou représentant du gouvernement est suppléé par le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement, le leader de l’opposition est suppléé par le leader adjoint de l’opposition, et le leader ou facilitateur de tout autre parti reconnu ou groupe parlementaire reconnu est suppléé par son leader adjoint ou facilitateur adjoint.

Droit de vote des membres d’office

12-3. (4) Parmi les sénateurs qui sont membres d’office des comités conformément au paragraphe (3), seuls le leader ou représentant du gouvernement, et le leader de l’opposition, ou, en cas d’absence de l’un ou de l’autre de ces sénateurs, le sénateur qui le supplée, bénéficient du droit de vote. »;

b)la mise à jour de la désignation numérique de l’article 12-3(4) actuel à celle de l’article 12-3(5);

18.par substitution, à l’article 12-8(2) du Règlement, de ce qui suit :

« Proposition de frais de service

12-8. (2) Dès le dépôt d’une proposition de frais de service par le leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement, celle-ci est renvoyée d’office au comité permanent ou spécial désigné par lui après consultation avec le leader ou le leader adjoint de l’opposition, et le leader ou facilitateur de tout autre parti reconnu ou groupe parlementaire reconnu, ou le délégué d’un tel leader ou facilitateur. »

19.par substitution, à l’article 12-18(2) du Règlement, de ce qui suit :

« Séances de comité en période d’ajournement du Sénat

12-18. (2) Sous réserve du paragraphe (3) et sauf autre disposition contraire, un comité du Sénat peut se réunir :

a) pendant une période d’ajournement du Sénat qui dure plus d’un jour mais moins d’une semaine, à condition que ses membres en soient avertis la veille de l’ajournement du Sénat;

b) un lundi où le Sénat ne siège pas qui précède un mardi au cours duquel une séance est prévue;

c) pendant d’autres périodes au cours desquelles le Sénat est ajourné et qui ne sont pas couvertes par les dispositions ci-dessus, à condition que le comité soit convoqué :

(i) soit par résolution du Sénat,

(ii) soit avec l’accord, en réponse à la demande du président et du vice-président, de la majorité des sénateurs suivants, ou de leurs délégués : le leader ou représentant du gouvernement, le leader de l’opposition, et les leaders ou facilitateurs des trois partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus qui comptent le plus grand nombre de membres, à l’exception, s’il y a lieu, des partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus auxquels appartiennent soit le leader ou représentant du gouvernement, soit le leader de l’opposition. »;

20.par substitution, à l’article 12-26(1), de ce qui suit :

« Nomination du comité

12-26. (1) Dès que les circonstances le permettent au début de chaque session, le leader ou représentant du gouvernement présente une motion, appuyée par le leader de l’opposition et le leader ou facilitateur du parti reconnu ou du groupe parlementaire reconnu qui compte le plus grand nombre de membres, à l’exception, s’il y a lieu, des partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus auxquels appartiennent soit le leader ou représentant du gouvernement, soit le leader de l’opposition, portant nomination des membres du Comité permanent sur l’éthique et les conflits d’intérêts des sénateurs; la procédure de nomination reste la même pour modifier la composition du comité au cours d’une session. Toute motion de nomination est adoptée d’office. »;

21.à l’article 14-1(1), par substitution, aux mots « leader ou le leader adjoint du gouvernement », des mots « leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement »;

22.à l’article 16-1(8), par substitution, aux mots « leader ou le leader adjoint du gouvernement », des mots « leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement », aux deux endroits où ils apparaissent;

23.à l’Annexe I :

a)à la définition des « Affaires du gouvernement », par substitution, aux mots « leader ou le leader adjoint du gouvernement », des mots « leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement »;

b)par substitution, à la définition de « Leader adjoint du gouvernement », de ce qui suit :

« Leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement

Sénateur qui agit en tant que second pour le leader ou représentant du gouvernement et qui est normalement responsable de la gestion des affaires du gouvernement dans la salle du Sénat. Le leader adjoint ou coordonnateur législatif est également normalement responsable de négocier avec l’opposition et les autres partis reconnus et groupes parlementaires reconnus l’ordre des travaux en général. En l’absence du leader adjoint ou coordonnateur législatif, le leader ou représentant du gouvernement peut désigner un autre sénateur pour assurer l’intérim. Le titre complet est « Leader adjoint du gouvernement au Sénat » ou « Coordonnateur législatif du représentant du gouvernement au Sénat ». (Deputy Leader or Legislative Deputy of the Government) »;

c)par substitution, à la définition actuelle de « Leader du gouvernement », de ce qui suit :

« Leader ou représentant du gouvernement

Sénateur qui agit à titre de chef des sénateurs membres du parti du gouvernement, ou qui est nommé par le gouvernement pour le représenter au Sénat sans être affilié à un parti du gouvernement. Selon l’usage actuel, le leader ou représentant du gouvernement prête normalement serment à titre de membre du Conseil privé du Roi pour le Canada et il peut être membre du Cabinet. Le titre complet est « Leader du gouvernement au Sénat » ou « Représentant du gouvernement au Sénat ». (Leader or Representative of the Government) »;

d)dans la définition de « Parrain d’un projet de loi », par substitution, aux mots « le parrain est normalement un membre du gouvernement qui », des mots « le parrain est désigné par le leader ou représentant du gouvernement et »;

e)dans la définition de « Porte-parole d’un projet de loi », par substitution, aux mots « leader ou le leader adjoint du gouvernement », des mots « leader ou représentant du gouvernement, ou le leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement »;

f)par substitution, à la définition de « Procédure ordinaire pour déterminer la durée de la sonnerie », de ce qui suit :

« Procédure ordinaire pour déterminer la durée de la sonnerie

Le Président demande au whip ou agent de liaison du gouvernement, au whip de l’opposition, et aux whips ou agents de liaison des trois partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus qui comptent le plus grand nombre de membres, à l’exception, s’il y a lieu, des partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus auxquels appartiennent soit le whip ou agent de liaison du gouvernement, soit le whip de l’opposition, s’ils s’entendent sur la durée de la sonnerie, qui ne peut excéder 60 minutes. Avec le consentement du Sénat, cette entente constitue l’ordre de faire retentir la sonnerie pour la période convenue, mais en l’absence d’entente ou de consentement, la sonnerie retentit pendant 60 minutes. Dans certains cas prévus au Règlement, la procédure n’est pas suivie et la sonnerie retentit pendant une plus courte période. (Ordinary procedure for determining duration of bells) »;

g)dans la définition de « Projet de loi d’intérêt public », sous « Projet de loi », par substitution, aux mots « (présenté par un ministre ou introduit en son nom) ou d’initiative parlementaire (présenté par un sénateur qui n’est pas ministre) » des mots « (présenté par un ministre, au nom d’un ministre, ou par le ou au nom du leader ou représentant du gouvernement si celui-ci n’est pas ministre) ou d’initiative parlementaire (c’est-à-dire qu’il n’est pas du gouvernement) »;

h)par substitution, à la définition de « Sénateur-ministre », de ce qui suit :

« Sénateur-ministre

Sénateur assermenté au Cabinet. Le leader ou représentant du gouvernement est normalement assermenté en tant que membre du Conseil privé du Roi pour le Canada et peut être membre du Cabinet. (Senator who is a minister) »;

i)à la définition de « Suspension du soir » par substitution, aux mots « entre 18 heures et 20 heures », des mots « entre 19 heures et 20 heures »;

j)par substitution, à la définition de « Whip du gouvernement », de ce qui suit :

« Whip ou agent de liaison du gouvernement

Sénateur responsable de veiller à la présence au Sénat d’un nombre suffisant de sénateurs du parti du gouvernement pour assurer le quorum et la tenue des votes et à qui le leader ou représentant du gouvernement délègue habituellement la responsabilité de gérer la désignation des suppléants pour remplacer les sénateurs du gouvernement qui siègent à des comités au besoin. Le whip ou agent de liaison du gouvernement peut être responsable de la sensibilisation en ce qui concerne les affaires du gouvernement au Sénat. (Government Whip or Liaison) »;

k)par adjonction, selon l’ordre alphabétique, des nouvelles définitions suivantes :

(i) « Agent de liaison du gouvernement

Voir « Whip ou agent de liaison du gouvernement » (Government Liaison) »;

(ii) « Coordonnateur législatif du gouvernement

Voir « Leader adjoint ou coordonnateur législatif du gouvernement ». (Legislative Deputy of the Government) »;

(iii) « Leader adjoint ou facilitateur adjoint

Le sénateur qui agit en tant que second pour le leader ou facilitateur d’un parti reconnu ou d’un groupe parlementaire reconnu autre que, le cas échéant, les partis reconnus ou groupes parlementaires reconnus dont est membre soit le leader ou représentant du gouvernement, soit le leader de l’opposition. (Deputy Leader or Deputy Facilitator) »;

(iv) « Leader du gouvernement

Voir « Leader ou représentant du gouvernement » (Leader of the Government or Government Leader) »;

(v) « Représentant du gouvernement

Voir « Leader ou représentant du gouvernement » (Government Representative or Representative of the Government) »;

Que tous les renvois et les listes d’exceptions dans le Règlement soient mis à jour pour tenir compte de ces modifications, mais restent autrement inchangés;

Que, en ce qui concerne les amendements aux articles 4-9 et 4-10 actuels, énoncés au point 5 ci-dessus :

1.le nouvel article 4-9(5) ne s’applique pas à toute question écrite soumise avant l’adoption de la présente motion, de manière que seules les questions écrites soumises après l’adoption de la présente motion soient comptées comme si elles étaient sujettes à cette disposition;

2.les dispositions des nouveaux articles du Règlement prennent effet dès l’adoption de la présente motion en ce qui concerne les questions soulevées à partir de ce moment-là, sous-réserve du point 3 ci-dessous;

3.les dispositions des nouveaux articles du Règlement concernant le délai de 60 jours pour répondre aux questions écrites, le dépôt, et l’absence d’une réponse ou d’une explication prennent effet, par rapport aux questions écrites soumises avant l’adoption de la présente motion, à la date qui tombe six mois après l’adoption de la présente motion comme s’il s’agissait de la date où les questions eussent été soumises, à condition que si la session en cours prend fin avant la fin de cette période de six mois, ces dispositions des nouveaux articles prennent effet le dernier jour de la session en cours;

Que, dans les 30 jours que le Sénat siège après l’adoption de cette motion, le Comité permanent de l’éthique et des conflits d’intérêts des sénateurs présente un rapport au Sénat proposant des modifications au Code régissant l’éthique et les conflits d’intérêts des sénateurs pour tenir compte des amendements à l’article 12-26(1) du Règlement énoncés au point 20 ci-dessus.

L’honorable Scott Tannas : Honorables sénateurs, d’abord, j’aimerais remercier le sénateur Quinn d’avoir défendu son amendement jusqu’au bout. Je m’y suis opposé.

C’est drôle. Le sénateur Plett est le seul leader au Sénat qui finit toujours par avoir raison au sein de son groupe. Toutefois, j’ai présenté mes arguments parce que j’y croyais. Je croyais que le seul moyen pour nous de voter sur cette question précise serait que l’initiative vienne du gouvernement. Il y aurait toujours quelques motions comme celle du sénateur Woo et la mienne qui traînent au Feuilleton. Il y aurait un rapport du Comité du Règlement qui demeurerait un article inactif au Feuilleton.

La première réunion sur la réforme du Sénat a eu lieu à la suite du sondage effectué par les sénateurs Massicotte et Greene il y a neuf ans. Un certain nombre de libéraux et de conservateurs étaient présents. Les libéraux étaient légèrement plus nombreux, mais c’était correct. Nous nous sommes réunis en octobre, le mois où ont eu lieu les élections, et avons tenu une discussion d’un jour et demi qui m’a semblé formidable sur ce qu’il fallait faire pour réformer le Sénat.

Cette rencontre reposait sur de nombreuses informations, notamment le renvoi à la Cour suprême portant sur nombre de souhaits du premier ministre Harper au sujet de la réforme du Sénat, qui ont essentiellement été réduits à néant, et sur l’impression de plus en plus répandue chez les libéraux et les conservateurs que le modèle traditionnel était indéfendable. La population avait indiqué très clairement ce qu’elle pensait du fonctionnement du Sénat et elle avait souligné que nous étions complaisants de croire que ce que nous faisions était très bien.

Ce n’était pas très bien. Nous étions nombreux à savoir que ce n’était pas très bien. C’est ce qui a mené aux premier et deuxième rapports du Comité sur la modernisation. Les tentatives visant à changer les règles ont fait l’objet d’obstruction à chaque occasion.

La motion apporte un certain degré — bien que modeste — d’équité et de reconnaissance de la réalité du Sénat tel qu’il est composé aujourd’hui.

Comme vous le savez, les changements au Règlement prévus dans la motion no 165 ont été proposés et étudiés pendant des années. Je suis la preuve vivante que c’est bel et bien le cas.

La motion n’enlève rien à l’opposition, qu’il s’agisse de ses outils ou de ceux du gouvernement. Elle ne fait qu’uniformiser les règles du jeu dans une réalité qui compte plusieurs groupes : partisans, indépendants, non partisans, peu importe le nom qu’on leur donne. Je pense aux nombreux groupes au Sénat au-delà des libéraux et des conservateurs.

J’abhorre la fixation de délai, mais en l’occurrence, j’ai cru qu’il s’agissait de la seule solution possible après neuf ans de discussions et que nous allions aller de l’avant et établir un ensemble de règles reflétant la réalité telle qu’elle est aujourd’hui et telle qu’elle sera pendant de nombreuses années encore.

On n’a presque pas eu recours à la fixation de délai pendant l’ère Trudeau, et le mérite revient à l’opposition. Il revient aussi au sénateur Harder, et ensuite au sénateur Gold. Même pendant les années de majorité, lorsque c’est l’opposition qui était majoritaire au Sénat, il y a eu des négociations de bonne foi et tous les projets de loi du gouvernement ont été adoptés. Ils n’ont peut-être pas tous été adoptés aussi rapidement que le gouvernement l’aurait souhaité, mais ils ont été adoptés. Nous les avons examinés avec attention. Nous les avons examinés comme il le fallait.

J’aimerais prendre un instant pour parler de l’opposition. On m’a déjà dit, et je crois que c’est vrai, que la pire des journées dans le gouvernement reste de loin supérieure à la meilleure des journées dans l’opposition. C’est un travail difficile. C’est un travail nécessaire et important dans cette Chambre. Je pense que c’est une erreur de prétendre que nous pourrions nous entendre, être efficaces et respecter les souhaits des Canadiens sans une opposition fonctionnelle qui arriverait ici tous les matins en essayant de trouver des moyens de critiquer les mesures que le gouvernement veut nous faire accepter.

Lorsque je suis arrivé ici en 2013, j’ai vu l’opposition précédente vers la fin de son mandat. Elle y était depuis à peu près aussi longtemps que l’opposition actuelle. Les sénateurs qui en faisaient partie étaient découragés. Ils étaient hostiles. Ils faisaient de l’obstruction. Ils en avaient assez de faire ce travail, mais ils étaient unis dans l’espoir d’un avenir de plus en plus prometteur. Je reconnais ces mêmes qualités chez nos collègues ici.

Lorsque je suis arrivé ici, les sénateurs de l’opposition libérale, malgré tout cela, faisaient leur travail. Ils le faisaient avec dignité et passion et ils servaient bien le Sénat et les Canadiens. Je tiens à témoigner maintenant tout mon respect pour mes collègues. Ils font exactement ce qu’ils doivent faire et de la façon dont ils doivent le faire. Je n’aime pas toujours cela, mais je ne voudrais absolument pas être dans une situation où je n’entendrais pas de critiques. Quand on se lève, qu’on se bat et qu’on perd tous les jours pendant sept ans, on gagne peut-être le droit de critiquer.

(2020)

Je reviens à la motion.

Les conservateurs allèguent que cette motion nuirait à l’opposition et aiderait le gouvernement, sauf qu’ils nous ont avisés qu’elle allait aider le gouvernement et nuire à l’opposition lorsqu’ils se retrouveront de l’autre côté de l’allée. Très bien.

Selon un argument qui circule en ce moment, la motion est un complot visant à créer une opposition à plusieurs volets afin d’empêcher qu’on abroge des lois. Voici ce que j’ai lu aujourd’hui dans un courriel de collecte de fonds en provenance de l’Alberta : Cela va commencer quand le gouvernement Poilievre voudra rejeter le projet de loi C-69; ce stratagème sera alors dévoilé, puis nous allons tous travailler avec diligence pour empêcher le rejet du projet de loi C-69.

J’ai bien plus confiance au Sénat, aux gens ici, que cela. Je pense que la plupart d’entre nous ici partagent ce même sentiment. Je crois que nous allons continuer de remplir notre mandat.

Certaines données probantes jouent en notre faveur. Tous les projets de loi du gouvernement ont été examinés ici sans être rejetés. Seulement deux motions de clôture ont été utilisées. Nous avons maintenant la troisième motion de clôture des neuf dernières années, et c’est au sujet d’une motion. Toutefois, nous avons aussi proposé des amendements pour 25 % de tous les projets de loi du gouvernement qui nous ont été soumis.

Comment se comparent les 10 dernières années à celles qui ont précédé 2015 et le soi-disant Sénat indépendant?

De 2005 à 2015, 7 % des projets de loi du gouvernement ont été amendés et on a imposé la clôture 28 fois, dont six fois sur des motions. La sénatrice Martin a indiqué qu’il n’y avait pas eu de motion. En fait, il y a eu six motions de clôture sur des motions.

Je suis d’accord avec ce que le sénateur Plett a cité d’un article paru dans le Globe and Mail, à savoir que le véritable test du Sénat indépendant est encore à venir. Je suis d’accord. Par contre, avec un mélange de groupes partisans et de groupes indépendants non partisans — appelez-les comme vous voudrez —, ce qui ne se limite pas aux seuls groupes du gouvernement et de l’opposition, je pense que nous continuerons à être efficaces, à servir les Canadiens et à respecter le mandat que la majorité des Canadiens auront donné à la Chambre dûment élue.

Compte tenu de l’efficacité dont nous avons fait preuve jusqu’à présent et de l’efficacité dont, je crois, nous ferons preuve dans le futur, je suis persuadé que nous continuerons à servir les Canadiens même si c’est un gouvernement d’une allégeance différente qui nous envoie des mesures législatives.

Alors, adoptons cette motion et passons à autre chose. Merci.

Des voix : Bravo!

L’honorable Chantal Petitclerc : Honorables sénateurs, je veux intervenir brièvement dans le cadre de l’important débat en cours.

Le moment est venu de procéder aux modifications proposées, qui sont nécessaires. Ce que nous avons devant nous est l’aboutissement des idées, des réflexions et des efforts considérables qui ont été déployés au cours des dernières années. Je parcours l’assemblée des yeux, remplie de gratitude pour le travail des sénateurs Greene, Massicotte, Sinclair, Dalphond, Tannas et Woo.

[Français]

Je remercie également la sénatrice Bellemare, qui préside le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement, et tous les membres de ce comité, qui, en sept réunions et pendant neuf heures, ont étudié et nous ont présenté, dans leur cinquième rapport, plusieurs des changements sur l’équité entre les groupes que le sénateur Gold a inclus dans la motion no 165.

Je tiens aussi à reconnaître l’engagement du sénateur Gold à faire refléter dans notre Règlement la transition en cours d’une Chambre bipolaire à une Chambre multipolaire. Nous étudions maintenant cette proposition qui est, en fait, la somme de notre travail collectif, étendu sur plusieurs années.

[Traduction]

La motion va-t-elle assez loin? Assez loin pour le moment, selon moi. Fondamentalement, je reste d’accord sur l’essentiel de la motion.

Nous avons entendu un certain nombre d’arguments jusqu’à présent et, comme beaucoup d’entre vous, chers collègues, j’y ai réfléchi pour me préparer à la séance de ce soir. On nous a dit que c’était trop rapide, qu’on l’imposait aux sénateurs et que c’est sans précédent. Ce n’est pas le cas. On a affirmé que la motion empêcherait l’opposition de faire son travail. Ce n’est pas le cas. On a déclaré qu’elle trahit les traditions du système de Westminster. Ce n’est pas le cas.

[Français]

Nous voici donc devant cette motion, que j’appuie.

Ce n’est pas la première fois que nous apportons des changements à notre Règlement ni la dernière.

[Traduction]

En prévision du présent discours, on m’a fait prendre connaissance de nombreux débats qui ont précédé l’adoption de modifications substantielles au Règlement. Les modifications apportées au Règlement du Sénat en 1991 ont attiré mon attention et je crois qu’elles mettent en perspective la question qui nous occupe.

[Français]

Je ne reviendrai pas longuement sur les propos éloquents du sénateur Dalphond, qui nous a rappelé effectivement que les changements substantiels de 1991 ont non seulement fait l’objet d’un vote de 40 voix pour et 30 voix contre, mais aussi que le rapport du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement qui a été adopté n’a pas été unanime. Il faut se rappeler qu’il avait été rédigé en l’absence des sénateurs libéraux, qui avaient boycotté tous les travaux du comité sur ces amendements.

[Traduction]

Chers collègues, si vous prenez le temps de lire les Débats du Sénat du 11 au 18 juin 1991, je pense que vous constaterez, vous aussi, qu’ils illustrent clairement à quel point le processus de 1991 est loin d’être comparable au travail qui a précédé la présentation de la motion dont nous sommes saisis, qui est la somme de plusieurs interventions et initiatives. Il a fallu procéder étape par étape pour en arriver là où nous sommes.

Bien sûr, nous pouvons aspirer à un consensus, mais — soyons honnêtes — c’est rarement possible au sein d’un groupe de cette taille et de cette nature. Ce que nous voyons dans le rapport du Comité du Règlement, c’est une forte majorité qui appuie les changements qui nous sont présentés, et c’est cela qui compte. En outre, certains collègues du Comité du Règlement ont choisi de travailler par consensus, seulement pour se rendre compte à la fin de l’étude que ce n’était peut-être pas la meilleure solution.

Permettez-moi de revenir sur les propos suivants tenus par la sénatrice Ringuette le 7 février 2023 :

Je suis vraiment déçue. En rétrospective, je n’aurais pas accepté de fonctionner par consensus.

[Le comité] avait le mandat de faire progresser l’équité entre les partis et les groupes. Nous n’avons pas atteint cet objectif [...] Si nous ne nous étions pas engagés au consensus, nous l’aurions atteint. Certains collègues doivent garder ce fait à l’esprit.

Je suis d’avis qu’au moment d’entamer leur important travail concernant les sénateurs non affiliés, les honorables membres du Comité du Règlement devraient prendre le temps d’exprimer clairement ce qu’ils veulent, et ce qu’ils entendent par consensus. Certes, la définition doit correspondre à plus qu’une simple majorité, mais pas à l’unanimité.

[Français]

Nous avons aussi entendu dans cette Chambre que l’équité entre les partis et les groupes reconnus risque de diluer l’opposition partisane et, par conséquent, de l’empêcher de jouer pleinement son rôle. Cette affirmation ne m’a pas convaincue.

Il est clair pour moi que cette motion ne limiterait pas l’opposition partisane à faire ce qu’elle fait déjà d’ailleurs très bien ou voudrait faire à l’avenir.

Le 10 avril 2019, au moment de son intervention sur le treizième rapport du Comité sénatorial spécial sur la modernisation du Sénat, le sénateur Greene, à qui nous devons rendre hommage pour sa persévérance à faire bouger les lignes, a tenu ces propos qui justifiaient parfaitement la pertinence de cette motion sur l’équité, et je le cite :

[Traduction]

L’afflux de sénateurs non affiliés montre que l’opposition peut venir de n’importe où. Jadis, nous étions une Chambre bipolaire. Aujourd’hui, nous sommes une Chambre multipolaire. Le résultat est que le Sénat est devenu plus pertinent. Nous apportons plus d’amendements aux projets de loi, et les appels à l’abolition du Sénat se sont estompés. Cela dit, il nous faut un ensemble de règles qui reconnaît notre nature multipolaire et qui encourage l’opposition provenant de n’importe quelle banquette à l’égard de tout projet de loi.

(2030)

[Français]

Bien sûr, être sénateur ou être sénatrice, c’est aussi demander des comptes au gouvernement, le talonner, examiner ses décisions et remettre ses actions en question. Cela fait partie de nos responsabilités et je considère que plusieurs d’entre nous, dans tous les coins de cette Chambre, exercent ce privilège avec un grand sens des responsabilités.

[Traduction]

Comme nous le savons, le Sénat est un compromis historique qui n’a pas été conçu par les Pères de la Confédération pour être une réplique de la Chambre des communes, lieu par excellence de la compétition partisane. En raison de sa répartition originelle et du mode de sélection sans élection de ses membres, le Sénat n’a pas été conçu à l’origine pour être un environnement partisan. La Cour suprême a souligné ce principe dans sa décision de 2014 sur la réforme du Sénat.

Dans un discours prononcé lors des débats sur la Confédération de la Province unie du Canada en 1865, Sir John A. Macdonald, alors membre de l’Assemblée législative et procureur général du Canada-Ouest, a dit à propos de l’avenir du Sénat que :

La Chambre haute serait inutile si elle n’exerçait pas, quand elle le juge bon, le droit de s’opposer, de modifier ou de retarder un projet de loi de la Chambre basse.

[Français]

Chacun d’entre nous, à sa manière, avec son style et conformément à ses objectifs, partage cette même compréhension des raisons qui justifient notre présence ici. Plusieurs observateurs s’entendent d’ailleurs pour dire de plus en plus souvent que nous nous acquittons très bien de ces responsabilités.

[Traduction]

Il y a quelques semaines, Nelson Wiseman, professeur émérite de sciences politiques à l’Université de Toronto, a déclaré à CTV News que :

[...] le Sénat ne s’est jamais montré aussi utile [...] au cours des 90 ou 100 dernières années, et c’est parce que les sénateurs agissent de manière plus indépendante.

[Français]

Chers collègues, je respecte l’objectif de cette motion, qui est de ne rien enlever à l’opposition. Je dirai cependant que j’étais personnellement très à l’aise avec les propositions des sénateurs Woo et Tannas, qui consistaient notamment à accorder un même temps de parole de 45 minutes à tous les leaders et facilitateurs. Or, on nous propose autre chose. J’ai pris note des arguments soutenant cette proposition et je m’en accommode. Je m’interroge aussi quelque peu sur le choix d’accorder le statut de membres d’office aux autres leaders et facilitateurs sans droit de vote. Cela pourrait mener à des situations où un leader ou un facilitateur ou une facilitatrice déposerait une motion, mais ne pourrait pas voter sur sa propre motion. Il me semble qu’il y a là un manque de cohérence. Je m’en accommode aussi dans l’esprit de cette motion qui, comme on l’a vu et comme on l’a démontré, n’enlève rien à l’opposition.

[Traduction]

Cela m’amène à mon dernier point, à savoir si le principe d’équité recherché par la plupart des sénateurs compromettrait notre engagement envers le système parlementaire de Westminster.

Le 12e rapport du Comité sénatorial spécial sur la modernisation du Sénat, qui porte sur ce sujet, apporte bien des éclaircissements sur le caractère diversifié et très souple du système de Westminster. Selon le professeur Philippe Lagassé, qui est décrit dans le rapport comme un spécialiste de la démocratie parlementaire, le système de Westminster n’est pas un système fixe et immuable, mais plutôt un ensemble de principes : « Vous avez la liberté de renoncer à cela si vous le voulez tout en ayant un système de Westminster. »

Le professeur David Docherty est encore plus précis lorsqu’il dit :

[on] n’a pas reconnu la souplesse ni l’adaptabilité du système parlementaire de Westminster. À plus petite échelle, nous avons deux gouvernements inspirés du modèle de Westminster au Canada dans deux des territoires, et ils n’ont pas de partis. Les gens sont élus comme indépendants et ils votent pour ceux qui feront partie du Cabinet, et cela semble bien fonctionner.

L’exemple du Nunavut et des Territoires du Nord-Ouest mentionné par le professeur Docherty montre que le mode de confrontation lié au système de Westminster n’est pas toujours partisan.

Honorables collègues, je suis ici depuis huit ans et demi et, pendant cette période, je ne suis certainement pas devenue une experte du système de Westminster, et je ne prétendrai pas en être une. Cependant, j’ai assez lu et entendu pour me rendre compte de certaines choses. En ce qui concerne le système de Westminster, trois personnes qui ont le même niveau d’expertise, de compétence et de connaissances peuvent arriver à trois conclusions différentes, toutes avec le même niveau de confiance. Mon humble conclusion? Il y a plusieurs modèles dans le système de Westminster. Il est souple, évolutif et multidimensionnel.

[Français]

Il y a également lieu de noter qu’il n’a pas toujours existé de symétrie ou de concordance entre l’opposition officielle de Sa Majesté et l’opposition au Sénat. Le Bloc québécois et le NPD, qui n’ont jamais eu de sénateurs, ont déjà occupé ce rôle d’opposition officielle à la Chambre des communes. Dans une décision rendue le 21 février 2001, le Président Hays a déclaré que notre système parlementaire a continué de fonctionner même si le Sénat avait une opposition différente de l’opposition officielle à la Chambre des communes, parce que ce sont des organes indépendants et autonomes exerçant des rôles complémentaires.

Avant de conclure, permettez-moi de soulever un dernier point. D’autres l’ont dit et je suis d’accord : c’est un fait indiscutable que tous les sénateurs dans cette Chambre ne sont pas traités de la même manière. Il nous faudra, à ce titre, continuer d’œuvrer pour assurer une plus grande équité envers nos collègues non affiliés, car c’est également cela, un Sénat indépendant. Choisir d’appartenir à un groupe, ou pas, ne devrait pas limiter la capacité d’un sénateur à exercer ses responsabilités.

[Traduction]

Par souci d’équité, nous, les sénateurs qui n’avons pas de programme politique à proposer ou à promouvoir dans cette enceinte, sommes en droit d’exiger plus d’espace et d’outils pour nous acquitter correctement de nos responsabilités.

Seul l’avenir nous dira s’il est possible de parvenir à un Sénat totalement non partisan, mais, pour l’instant, ce qui est en notre pouvoir, c’est de travailler en vue d’une cohabitation équitable entre ceux qui appartiennent fièrement à un parti politique, comme c’est leur droit, ceux qui choisissent de représenter le gouvernement en place, et ceux d’entre nous qui n’ont aucune affiliation politique, car ils sont non partisans. C’est ce qu’on nous demande de faire en votant sur cette motion — rien de plus, rien de moins. Merci. Meegwetch.

L’honorable Colin Deacon : Honorables sénateurs, j’ai écouté le débat sur la motion no 165, et certaines affirmations qui ont été faites concernant les modifications au Règlement du Sénat qui sont proposées me laissent vraiment perplexe. Permettez-moi de m’attarder sur trois questions que je me pose.

Premièrement, est-il raisonnable de prétendre que ces modifications au Règlement sont « imposées » avec « précipitation » et « contrainte » alors qu’on en discute depuis près de neuf ans? Je cite la vice-présidente du Comité du Règlement, la sénatrice Batters :

[Ces] modifications au Règlement [...] avaient déjà fait l’objet d’une tentative d’adoption forcée [...]

Aujourd’hui, 18 mois plus tard, le gouvernement Trudeau présente une motion omnibus draconienne au Sénat.

Chers collègues, nous sommes la Chambre du second examen objectif. Par conséquent, les choses avancent généralement très lentement ici, mais les discussions et les débats sur ces modifications au Règlement durent depuis près de neuf ans. Je pense que nous avons enfin atteint le point où nous pouvons arrêter le « second examen objectif » de ces modifications, puis prendre une décision. Comme le dirait Yogi Berra : « Quand tu arrives à l’embranchement d’une route, prends-la. »

(2040)

J’étais membre du Groupe des sénateurs indépendants quand on m’a demandé de me joindre au Comité du Règlement. Je n’ai tenu qu’une seule réunion. Je félicite sincèrement mes collègues qui siègent à ce comité. Au cours de la réunion de deux heures à laquelle j’ai assisté, les membres ont surtout cherché à déterminer si le greffier devrait lire chaque article au Feuilleton lors de chaque séance du Sénat. Les personnes en faveur de ce changement ont fait remarquer que la réunion préparatoire a lieu chaque jour quelques heures avant la séance, et que si personne au Sénat ne veut prendre la parole — ce qui est généralement le cas pour 90 % des articles —, pourquoi faudrait-il lire tous les articles?

Pour la poignée de personnes qui regardent peut-être cette discussion chez elles, notre « réunion préparatoire » porte simplement sur l’ordre du jour. Pour être clair, chaque fois que nous nous réunissons dans cette enceinte, on propose la tenue d’un débat sur tous les articles, et ce, même si aucun sénateur n’a l’intention de prendre la parole.

Examinons les résultats de ce changement prétendument radical. Si tous les articles à l’ordre du jour ne sont pas lus à chaque séance, un sénateur qui souhaite intervenir sur un article qui ne figure pas sur le plumitif n’aurait qu’à se lever à la fin du débat sur l’article précédent et à demander à Son Honneur s’il peut prendre la parole pour débattre de l’article de son choix. Pourtant, changer cette tradition désuète a été jugé très inapproprié, voire contraire à notre privilège parlementaire. Par conséquent, cette pratique, qui diminue la productivité, subsistera même quand les modifications proposées au Règlement seront mises en œuvre.

Ainsi, honorables sénateurs, vous pouvez être sûrs que le mot « reporté » continuera d’être répété à d’innombrables reprises à chaque séance uniquement pour que les choses ne changent pas trop vite au Sénat.

Pour en revenir à mon point, non, je ne pense pas que ces modifications soient « imposées » avec « précipitation » et « contrainte » au Sénat. Les modifications qui reflètent la nouvelle réalité du Sénat sont discutées depuis près de neuf ans.

Ensuite, ces modifications au Règlement créées par le Sénat et proposées depuis longtemps nous sont-elles imposées par le premier ministre Trudeau? Je vais citer le sénateur Plett, qui a déclaré ceci la semaine dernière : « Justin Trudeau veut ces changements et ce que Justin Trudeau veut, ses sénateurs doivent l’obtenir. »

L’affirmation du sénateur Plett est contraire au fait que le travail qui a mené à l’élaboration finale des modifications proposées au Règlement a commencé à la fin de 2015 avec la création du Comité sénatorial spécial sur la modernisation du Sénat, comme on nous l’a rappelé plus tôt.

Ce comité était dominé par une majorité de membres nommés par le premier ministre conservateur Stephen Harper. Il s’agissait notamment du sénateur Greene, qui était président du comité, ainsi que des sénateurs Brazeau, Frum, McInnis, Maltais, Mockler, Stewart Olsen, Verner et Wells.

Le sénateur Greene a déposé avec enthousiasme le rapport final du comité le 10 avril 2019, soit il y a plus de quatre ans. Je ne sais pas combien d’entre vous se souviennent avoir été ici, mais il a fait un excellent travail. La modernisation du Règlement du Sénat a ensuite été attribuée au Comité du Règlement. C’était il y a quatre ans. Il est absurde de laisser entendre que c’est le premier ministre Trudeau qui impose au Sénat ces modifications à son Règlement alors que la modernisation du Règlement du Sénat est en fait l’idée d’un Sénat dominé par les conservateurs et que le travail a été réalisé par un comité dominé par les conservateurs.

Par conséquent, outre le travail du Comité sur la modernisation du Sénat dominé par les conservateurs, voici les faits concernant les modifications proposées au Règlement : elles font l’objet d’un examen au Comité sénatorial permanent du Règlement depuis plus de cinq ans; elles ont été déposées au Sénat à deux reprises, d’abord par un sénateur nommé par le premier ministre Trudeau, puis par un sénateur nommé par l’ancien premier ministre Harper; et elles sont maintenant appuyées par le représentant du gouvernement au Sénat.

Ma troisième et dernière question est embêtante : pourquoi le caucus conservateur s’oppose-t-il avec autant d’ardeur aux modifications proposées? Comme le sénateur Plett l’a précisé la semaine dernière, les conservateurs ont actuellement 21 points d’avance sur les libéraux dans les sondages.

Le sénateur Plett : Vingt-deux points.

Le sénateur C. Deacon : Je suis désolé — 22 points. Je suis en retard. Il est difficile de suivre le rythme.

Ces mêmes sondages indiquent que le premier ministre a perdu la faveur de la grande majorité des Canadiens. Il semble donc que le sénateur Plett ait tout à fait raison de croire que les conservateurs formeront le prochain gouvernement.

En même temps, on prétend également que ces modifications au Règlement diluent le pouvoir de l’opposition de faire son travail légitime, qui consiste simplement à retarder la mise en œuvre des projets de loi du gouvernement. Cependant, la possibilité de s’opposer au Sénat demeure inchangée, comme on a pu le constater jeudi dernier. Il y a eu six motions d’ajournement du Sénat, chacune ayant une sonnerie d’une heure. La première motion d’ajournement a été proposée avant 16 heures et la dernière à 23 h 57, trois minutes avant l’ajournement du Sénat, de sorte que le Sénat a ajourné après 1 heure du matin. De plus, il y a eu une pause-repas de deux heures. Il y a donc eu huit heures de protestations de la part de l’opposition jeudi dernier. C’était une version sénatoriale d’une occupation.

J’ai des gènes écossais dominants, comme je l’ai déjà mentionné, et je déteste le gaspillage. Le sénateur Plett se dit également très souvent préoccupé par le gaspillage. Donc, le gaspillage de huit heures de temps au Sénat est frustrant, surtout que nous avons des projets de loi d’initiative parlementaire importants et attendus depuis longtemps qui requièrent notre attention — comme le projet de loi C-280, qui vise à soutenir les producteurs de fruits et légumes, et le projet de loi C-244, qui concerne le droit de réparer, entre autres.

Étant donné tous les efforts déployés par le sénateur Plett pour essayer de nous convaincre que ces changements au Règlement vont en quelque sorte gêner l’opposition à l’heure où un gouvernement conservateur est potentiellement sur le point d’être élu, il est possible que d’aucuns dramatisent. Ces changements affaibliront peut-être le pouvoir de l’opposition, mais compte tenu de la position des conservateurs dans les sondages, ces changements seront bientôt à leur avantage, comme le sénateur Housakos l’a souligné fort éloquemment.

Sénateur Plett, vous avez peut-être commis une petite erreur stratégique au cours des deux dernières années, car vous nous avez obligés à assister à de nombreuses séances de formation mémorables et extrêmement longues sur les tactiques dilatoires. Je pense que certains sénateurs y ont prêté attention. Beau travail!

En conclusion, je sais que l’on prétend souvent que les sénateurs nommés par Justin Trudeau reçoivent des appels téléphoniques du premier ministre. Je dois admettre que, à l’instar d’autres sénateurs ici, j’ai reçu un appel téléphonique du premier ministre. Cela ne s’est toutefois produit qu’une seule fois, en juin 2018, et ce fut mémorable parce qu’il m’a appelé pour me proposer une nomination au Sénat. Au cours de cet appel, il a formulé une demande très claire et précise, celle de « mettre au défi le gouvernement ». J’essaie de le faire de manière respectueuse et collégiale. D’autres sénateurs ont peut-être reçu d’autres demandes ou appels téléphoniques, mais pas moi.

Je considère que mon rôle n’est pas seulement de m’opposer aux projets de loi et aux motions du gouvernement et d’en retarder l’adoption, mais aussi de trouver des façons de les améliorer. Je crois que le Sénat devrait agir de façon indépendante, mais sans forcément s’opposer aux mesures législatives proposées par un gouvernement dûment élu. Notre travail consiste à nous pencher sur tous les problèmes qui n’ont peut-être pas été envisagés auparavant et, lorsque c’est nécessaire, à proposer des amendements pour améliorer les mesures législatives présentées par le gouvernement.

Le sénateur Tannas a déjà dit que notre rôle au Sénat ne se limite pas à jouer un rôle secondaire par rapport à la Chambre des communes. Voilà qui résume ma vision du Sénat, honorables collègues.

J’espère que ces modifications au Règlement contribueront à maintenir une certaine indépendance au Sénat. Par conséquent, il me tarde de pouvoir voter en faveur de ces modifications dont nous avons discuté pendant de nombreuses années. Merci, honorables collègues.

L’honorable Donna Dasko : Honorables sénateurs, j’interviens aujourd’hui pour parler très brièvement en appui à la motion no 165, qui constitue à mes yeux un pas extrêmement positif vers le Sénat indépendant que les Canadiens ont clairement indiqué vouloir et soutenir.

Premièrement, je tiens à remercier tout particulièrement le sénateur Gold d’avoir présenté cette initiative et de l’avoir fait avancer. En vérité, j’ai été présente ici tous les jours et j’ai vu les réactions et les réponses. J’ai remarqué comment on s’adressait à vous, et parfois je ne sais pas comment vous faites, mais je vous suis très reconnaissante d’avoir fait avancer les choses.

Comme nous l’ont dit les sénateurs Gold, Saint-Germain, Woo, Dalphond et Tannas, entre autres, on travaille à cette initiative depuis très longtemps. On nous a rappelé les 13 rapports du Comité sur la modernisation, les motions présentées par des sénateurs et, éventuellement, le travail du Comité du Règlement qui s’est efforcé d’apporter des modifications au Règlement.

Comme l’a fait remarquer la sénatrice Saint-Germain, depuis 2016, il y a eu 147 réunions entre le Comité sur la modernisation du Sénat et le Comité du Règlement, et elles comprenaient toutes des éléments de la motion d’aujourd’hui. Comme le sénateur Deacon vient tout juste de le dire, rien n’est plus faux que de prétendre que les modifications au Règlement qui sont intégrées dans la motion dont nous sommes saisis aujourd’hui sont en quelque sorte un effort ultime ou précipité pour imposer des modifications.

La motion d’aujourd’hui découle également du cadre législatif que les deux Chambres ont adopté en 2022 pour apporter des modifications à la Loi sur le Parlement du Canada. L’objectif est tout simplement de rendre le Sénat plus équitable en tenant compte des changements dans sa composition. Les sénateurs indépendants, qui forment la majorité, ne sont pas des participants de second ordre dans cette enceinte.

Des voix : Bravo!

La sénatrice Dasko : Merci, honorables collègues. Cette motion comprend des modifications au Règlement qui tiennent compte de cette réalité.

(2050)

Mon objectif aujourd’hui est de parler brièvement de l’évolution du Sénat et de la façon dont les Canadiens perçoivent la Chambre haute.

Au cours de mes 35 ans de carrière dans le domaine de l’opinion publique, j’ai eu l’occasion de consulter les Canadiens sur les nombreuses propositions visant à réformer le Sénat. En 1987, l’accord du lac Meech incluait une courte liste de dispositions, dont une aurait donné aux provinces la possibilité de soumettre des noms au premier ministre pour pourvoir les postes au Sénat. Cet accord a été enterré en 1990.

En 1992, l’accord de Charlottetown, dans sa longue liste de dispositions, prévoyait notamment des articles visant à mettre en place un Sénat « triple E » : un Sénat du Canada qui serait élu, égal et efficace. Cet accord est mort dans la foulée d’un référendum national qui a échoué cette année-là.

En 2011, l’ancien premier ministre Stephen Harper a présenté un projet de loi qui prévoyait un mandat limité pour les sénateurs et des propositions visant à permettre aux provinces d’organiser des élections sénatoriales. Cette réforme est également devenue lettre morte lorsque la Cour suprême du Canada a statué, relativement au renvoi de 2014, que de tels changements nécessiteraient des modifications constitutionnelles. M. Harper savait alors, comme nous le savons encore aujourd’hui, à quel point il est difficile de modifier la Constitution.

En fait, un sondage Environics de 2022 montre que seulement 35 % des Canadiens seraient prêts à rouvrir la Constitution dans le but d’apporter des changements au Sénat. Chers collègues, il nous faudrait un soutien public beaucoup plus important que cela pour que le pays s’engage à nouveau dans cette voie.

De mon vivant, la seule grande réforme du Sénat qui a véritablement abouti parmi tous ces efforts a été l’initiative du premier ministre Trudeau visant à créer un Sénat indépendant.

Je veux maintenant faire quelques observations sur l’opinion publique. Depuis 2019, je sonde périodiquement l’opinion publique sur le Sénat du Canada, et il est juste de dire que nous avons encore des défis à relever dans la façon dont le public perçoit notre institution. La mauvaise nouvelle, c’est que les Canadiens ont toujours, à une faible majorité, une opinion négative du Sénat, mais la bonne nouvelle, c’est que ces perceptions négatives ont considérablement diminué par rapport aux jours sombres du début de 2016, lorsque les scandales du Sénat dominaient encore les perceptions du public. Les opinions positives sont également en hausse.

Les Canadiens voient tout particulièrement d’un bon œil le Sénat indépendant. Dans une large mesure, on approuve le nouveau processus de nomination des sénateurs en place depuis 2016. La grande majorité des Canadiens pensent que c’est une bonne chose — un bon changement — que les nouveaux sénateurs siègent en tant qu’indépendants et ne soient pas actifs au sein d’un parti politique. Une vaste majorité pense qu’il est bon que le processus de candidature soit maintenant ouvert et que les candidatures au Sénat soient examinées par un comité indépendant. Tous ces éléments sont considérés comme des améliorations au Sénat.

Surtout, le public souhaite que les futurs gouvernements continuent à mettre en place un Sénat indépendant. La grande majorité des Canadiens veulent que les futurs gouvernements maintiennent les changements apportés au processus de nomination. Presque personne ne souhaite revenir aux anciennes méthodes de nomination des sénateurs.

Ces derniers jours, nous avons appris que M. Poilievre, le chef du Parti conservateur du Canada, s’est fait remarquer la semaine dernière en raison de ses observations à la Chambre des communes ainsi que de ses déclarations au sujet de la disposition de dérogation. Quelque chose d’autre a attiré mon attention : un article qu’il a publié dans le National Post il y a quelques jours à peine, le 3 mai. Dans cet article, M. Poilievre décrit l’approche qui sera la sienne en matière de politique publique. Il exhorte les chefs d’entreprise — en fait, il exhorte tous les Canadiens qui veulent des changements stratégiques — à faire ce qui suit :

Si vous avez une proposition stratégique, ne m’en parlez pas. Convainquez les Canadiens que c’est bon pour eux. Communiquez-en les avantages directement aux travailleurs, aux consommateurs et aux retraités.

Je le remercie pour sa déclaration catégorique selon laquelle, s’il forme le gouvernement, l’opinion des Canadiens sera comme il se doit le facteur déterminant de la politique publique.

De toute évidence, c’est particulièrement important en ce qui concerne la question dont nous sommes saisis, c’est-à-dire le nouveau Sénat. Les Canadiens nous disent clairement que la transition vers un Sénat indépendant, où les sénateurs ne sont pas actifs au sein d’un parti politique et où ils ne siègent pas dans un caucus partisan, est positive pour le Canada. Ils nous disent que les futurs gouvernements doivent continuer à apporter des changements dans ce sens et qu’il ne faut pas revenir à l’ancien mode de nomination des sénateurs.

Chers collègues, en terminant, il nous reste encore du travail à faire. Nous devons continuer à accroître la sensibilisation au rôle particulier du Sénat en matière de gouvernance. De plus, nous devons sensibiliser la population à la transition vers l’indépendance et la non-partisanerie. Quand la population est mieux conscientisée à l’indépendance du Sénat, sa perception devient plus positive. Les modifications proposées dans la motion no 165 constituent une étape importante et même cruciale vers la reconnaissance de l’indépendance du Sénat. Je voterai « oui ».

Merci.

L’honorable John M. McNair : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour parler de la motion no 165, comme l’ont fait un bon nombre d’autres sénateurs ce soir.

Bien que je sois relativement nouveau ici, je constate que rien n’avance particulièrement vite et que c’est parfois mieux ainsi. C’est particulièrement vrai lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre des réformes majeures au sein de cette institution. Le changement prend du temps. Il faut du temps pour la réflexion, la consultation et la négociation.

Comme nous l’avons entendu, cette série de modifications est le résultat de huit années de travail, presque neuf, sur la réforme de cette Chambre. Le représentant du gouvernement au Sénat nous a fait l’historique de tout ce qui a été fait. Il y a eu 13 rapports produits par le Comité spécial sénatorial sur la modernisation du Sénat et d’innombrables études au Comité permanent du Règlement, des procédures et des droits du Parlement, sans compter les efforts individuels de divers sénateurs.

Ici, je souligne en particulier le travail des sénateurs Tannas, Woo, Greene et Massicotte. Je félicite ces sénateurs pour leur collaboration et, n’ayons pas peur des mots, leur persévérance. Ces efforts collectifs ont été déployés face à une forte opposition de la part de détracteurs qui aimeraient voir le Sénat se scléroser.

Ce que je veux dire, c’est que cette motion n’est pas sortie de nulle part. La motion no 165 ne nous a pas été présentée par surprise. Elle est le résultat d’années de mûre réflexion et de travail assidu.

Dans le Renvoi relatif à la réforme du Sénat, la Cour suprême du Canada a affirmé clairement que tout changement à la structure du Sénat nécessite l’appui de sept provinces représentant 50 % de la population. Nous savons tous à quoi cela a mené, alors le premier ministre Trudeau s’est servi des moyens à sa disposition pour essayer de rendre le Sénat plus indépendant et moins partisan.

Le changement doit venir de l’intérieur, et si nous n’appuyons ces changements, rien ne nous empêche de revenir au duopole partisan, comme l’a souligné le sénateur Woo.

Dans un éditorial publié le 1er mai dans le Hill Times et intitulé « Le Sénat ne devrait pas faire obstacle à sa propre évolution », on parle du débat qui est en cours ici :

Bien qu’une lecture stricte des affiliations politiques des premiers ministres canadiens au cours de l’histoire puisse donner l’impression du contraire, les citoyens de ce pays ne sont pas vraiment divisés en deux camps politiques irréconciliables.

C’est ce qui rend la crise de croissance actuelle du Sénat aussi fascinante qu’exaspérante.

Dans l’éditorial en question, on ajoute :

La motion no 165, proposée par le sénateur Marc Gold, compte plus de 3 700 mots et comprend un train de changements dont le plus litigieux, pour certains, consiste à étendre les pouvoirs bipartites de la Chambre aux autres groupes reconnus.

Les sénateurs conservateurs, qui jouissent toujours du titre d’opposition au Sénat bien qu’ils constituent le quatrième groupe en importance, ont qualifié la motion de M. Gold de « draconienne » et d’« unilatérale » et accusé le sénateur de vouloir « la faire adopter de force », bien qu’elle soit basée sur des modifications réclamées de longue date par divers sénateurs.

(2100)

Le Sénat n’est pas parfait, mais il est composé de personnes qui ont l’intérêt supérieur du Canada à cœur. On ne devrait pas éclipser cela en s’accrochant à des règles et à des structures qui ne reflètent plus ce que le pays a de mieux à offrir.

Le Sénat de demain sera peut-être différent du Sénat actuel, mais adopter un cadre pour éliminer des structures partisanes sans que la situation au Sénat dégénère comme sur l’île de Sa Majesté des mouches me semble une solution tout à fait acceptable pour la société canadienne. Les sénateurs, qui sont censés être des leaders, devraient y être favorables.

Honorables sénateurs, la plupart des Canadiens n’ont pas l’habitude de suivre nos travaux de près. Comme nous l’avons vu à maintes reprises, lorsque le Sénat fait les manchettes, c’est rarement pour quelque chose de positif. Je crois que la plupart des Canadiens veulent simplement que les sénateurs agissent dans l’intérêt supérieur de la population canadienne, quelles que soient leurs allégeances politiques. Il est vrai que les sénateurs sont nommés, mais ils ne doivent jamais oublier de faire preuve de respect envers les provinces et les territoires qu’ils sont censés servir et représenter. Nous devons faire de notre mieux en leur nom.

J’estime que la motion no 165 est un pas dans la bonne direction qui s’inscrit dans un processus de réforme visant à refléter un Sénat en constante évolution, et je vais appuyer son adoption. Merci. Meegwetch.

L’honorable Mary Jane McCallum : Honorables sénateurs, au cours du débat sur la motion no 165, certains ont parlé des problèmes et de la consternation que cette motion ferait naître. Mon discours portera sur ce que le Sénat et être sénatrice signifient pour moi et pour les innombrables autres comme moi. De plus, je parlerai de l’importance de la capacité de soutenir une véritable modernisation en profondeur pour réaliser notre vision d’égalité.

Je tiens à prendre le temps de remercier le premier ministre Trudeau de m’avoir donné la possibilité de devenir sénatrice. Il s’agit d’une occasion unique pour des personnes comme moi — des personnes qui ont été racisées toute leur vie —, de pouvoir enfin franchir les portes de la Chambre rouge. Comme je n’avais aucune affiliation politique, et comme c’était auparavant et depuis toujours le seul moyen d’accéder à cette enceinte, je suis pleinement consciente du caractère solennel de ce privilège.

J’ai eu l’occasion de venir siéger au Sénat à une époque où la discussion sur l’oppression subie par les Premières Nations n’était pas une priorité. Néanmoins, il existait toujours un besoin urgent de prendre en considération tout ce que nous, en tant que Premières Nations, avons surmonté et continuerons à accomplir au nom de la justice. Cette occasion unique m’a permis de réaliser qui j’étais en tant que citoyenne des Premières Nations de l’île de la Tortue vivant sur ma propre terre et toujours capable d’imaginer une société dans laquelle tous les citoyens sont véritablement considérés comme des égaux jouissant des mêmes droits et privilèges.

Je suis capable de maintenir cette vision non pas en raison de la politique, mais en dépit de la politique. Après tout, cette vision qui consiste à considérer les membres des Premières Nations comme des égaux jouissant des mêmes droits et privilèges que les autres Canadiens ne correspond pas à la société que John A. Macdonald voulait pour moi, pour mes ancêtres et pour mes descendants. C’est ce qui est apparu clairement lorsqu’il a déclaré qu’une personne pouvait être n’importe qui, mais pas un Indien, et qu’il a élaboré des politiques en conséquence.

Chers collègues, siéger au Sénat relevait au bout du compte de l’espoir, des rêves et de l’idéalisme. Il s’agissait de réaliser que ce qui était hors de portée ne devait pas le rester, pas plus qu’il ne le pouvait. L’importance du rôle de sénateur transcende les droits et les privilèges dont nous bénéficions. Il s’agit aussi de l’espoir que nous pouvons offrir aux autres. Je parle de l’espoir que toute l’humanité — et non seulement les citoyens partisans —, en dépit de toutes les différences et de la grande diversité qui la caractérisent, puisse envisager un avenir où chacun sera traité comme une personne ayant une valeur, un membre de la communauté de son choix et, finalement, de la seule race qui compte, la race humaine. C’est la fonction du second examen objectif dans cette auguste Chambre. C’est un idéal auquel nous devrions toujours aspirer alors que nous assumons nos fonctions sénatoriales.

Alors que les Premières Nations prospéraient sur l’île de la Tortue avant l’arrivée des Blancs, le point de vue dominant depuis plus de 150 ans est que le Canada était censé être un endroit réservé à une race ou à un groupe spécifique et très restreint de personnes, dont je ne faisais pas partie. Ces personnes étaient exclusivement les descendants des Européens de l’Ouest. Tous les autres gens — y compris les premiers peuples qui vivent sur cette terre depuis des temps immémoriaux — devaient être exclus ou, pire, assimilés. Nous étions marginalisés et considérés comme inférieurs. L’histoire du Canada est parcourue de tentatives soutenues pour nous déshumaniser. C’est aussi l’histoire de quelques privilégiés, y compris ceux qui ont toujours été autorisés à siéger dans la Chambre rouge.

Cependant, l’histoire du Canada est en train de changer, tout comme le discours au Sénat du Canada. Ces récits sont le reflet de l’histoire des Premières Nations : un récit où l’espoir l’emporte sur le désespoir et où la détermination ne faiblit pas malgré la violence historique et la menace émergente du vol d’identité et de la fraude, nos nouveaux colonisateurs d’aujourd’hui. Les Premières Nations vivent effectivement dans un état de violence perpétuelle.

Honorables sénateurs, quand je suis arrivée au Sénat, ce qui me motivait, c’était de porter les récits des personnes que je représente, parce que, en racontant à nouveau ces récits, nous ne préservons pas seulement leur mémoire, nous nous souvenons également des personnes qui ont perdu des possibilités et de celles qui se sont battues pour une façon différente d’exister, pour une existence qu’elles n’ont jamais pu mener parce que d’autres détenaient ce pouvoir.

Je mentionne particulièrement aujourd’hui les femmes et les filles autochtones disparues ou assassinées, ainsi que les hommes et les garçons autochtones disparus ou assassinés qui ont perdu la vie inutilement sans avoir eu la chance de réaliser leur but dans la vie, simplement à cause de leur race, un construit imposé par autrui. En racontant à nouveau nos récits, nous dénonçons les souches virulentes du racisme qui n’ont pas disparu. Grâce à ces récits, je me souviens de toutes les personnes qui ont souffert, mais qui n’ont jamais perdu espoir. En racontant à nouveau ces récits, nous soutenons les personnes qui n’ont jamais renoncé à se battre pour leur différence et leur égalité, pour ce qu’elles ont toujours été.

Dans notre histoire collective de partage du territoire, il existe un Canada qui, selon certains, devait être réinventé. C’est ainsi qu’est né le multiculturalisme. Toutefois, comment pouvons-nous parler de l’avenir du bon sans reconnaître le mal qui s’est produit dans ce pays? Si nous omettons de raconter notre passé de dépossession des terres et de la culture, de génocide et de racisme, nous oublions que les gens n’ont pas tous été les bienvenus dans le cheminement vers le multiculturalisme. Certaines cultures ont été bien accueillies et intégrées, tandis que les cultures des premiers peuples du Canada continuent d’être effacées et attaquées.

Pourquoi, alors, nous, les Premières Nations, continuerions-nous de participer à notre propre génocide en embrassant un multiculturalisme qui inclut tout le monde sauf nous?

Ma nomination au Sénat m’a permis de rêver à des choses que tant de mes ancêtres auraient cru impossibles — un endroit et une époque où la race n’a aucune incidence sur l’admissibilité d’une personne à devenir sénateur. Je suis donc arrivée au Sénat avec la conviction que j’étais sur un pied d’égalité avec les autres sénateurs. Alors que jadis il était interdit à mes ancêtres de pénétrer sur le terrain de la Colline du Parlement, j’ai aujourd’hui le grand privilège d’occuper un siège à la Chambre haute du Canada. Cette vérité s’accompagne d’une immense responsabilité, et c’est cette responsabilité qui me pousse à défendre l’intérêt des Premières Nations aussi ardemment.

(2110)

Dans le cadre de mon travail de sénatrice, que je dois à la modernisation constante du Sénat, je fais la démonstration claire que je ne suis pas entrée dans la Chambre rouge pour jouer le rôle d’une Indienne de service. Je suis ici pour parler au nom des personnes que je sers, et non pour être utilisée par ce système ou parler en son nom. En ce sens, je ne permettrai pas qu’on m’attribue un rôle symbolique en tant qu’Indienne ou en tant que femme.

Ainsi, chers collègues — et pour en revenir à la motion à l’étude —, je suis entrée dans cette enceinte en pensant que j’avais les mêmes droits que tous les autres sénateurs. Pourquoi, alors, devrait-on maintenant m’en donner moins que les autres parce que je siège en tant que sénatrice vraiment indépendante, vraiment non affiliée? Pourquoi me demande-t-on de débattre d’une motion et de la soutenir, alors qu’elle n’a jamais eu pour but de m’inclure en tant que membre égale de cette auguste assemblée?

Vu ce traitement de seconde classe persistant, je continue à choisir de croire que nous pouvons avoir un Sénat composé d’aînés qui ne jouent pas le jeu de la partisanerie, mais qui soutiennent vraiment un Canada qui réussira. Le Sénat en est capable. Nous, sénateurs, devons-nous continuer à vivre, en raison d’une tradition, dans la même institution stagnante qui est entrée en vigueur il y a plus de 150 ans? Ou devons-nous passer à une période d’espoir et de changement, à une vision aussi radicalement diverse que l’humanité elle-même, à une Chambre qui se veut le reflet de l’humanité dans son ensemble et qui représente un pays dont tous les habitants sont égaux et jouissent des mêmes privilèges et droits de la citoyenneté partagée — une vision que nous, sénateurs, représentons peu importe le point de vue hyperpartisan de l’autre endroit?

Honorables sénateurs, alors que nous examinons la motion dont nous sommes saisis, nous devrions considérer ce moment davantage comme le point où nous commençons à nous écarter du statu quo que comme une continuation fidèle du passé. Si nous ne le remettons pas en question, nous devenons le statu quo. Il est temps d’opter pour un nouveau départ, forts des leçons tirées des différents parcours avec lesquels nous arrivons au Sénat — une vision dans laquelle tout le monde compte, tout le monde est représenté, personne n’est laissé pour compte et nous tirons des leçons de notre histoire où une société divisée représente un pays divisé.

Chers collègues, il ne faut pas craindre la modernisation du Sénat. Elle doit être accueillie comme une suite logique de l’évolution positive qu’a connue le Canada au cours de son histoire. Le défi que nous devons relever, que ces modifications ne reflètent pas, est la nécessité d’assurer l’égalité de tous les sénateurs sans en laisser aucun pour compte, comme vos collègues non affiliés. Si le Sénat continue de représenter l’iniquité et l’inégalité, quel genre de modernisation réalisons-nous vraiment?

Kinanâskomitin. Merci.

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Honorables sénateurs, je prends de nouveau la parole au sujet de la motion no 165 du sénateur Gold tendant à modifier le Règlement du Sénat.

Tout d’abord, sénateur Tannas, je dois reconnaître mon erreur : j’ai effectivement proposé la fixation de délai pour des motions d’initiative ministérielle. Cependant, aucune de ces motions n’était des motions omnibus comprenant une série de modifications au Règlement du Sénat. Je reconnais mon erreur sur ce point.

Cette motion omnibus est composée d’un certain nombre d’éléments compliqués, et chacun d’entre eux nécessite une réflexion approfondie et un examen individuel. La motion aurait dû être examinée au comité pour que nous puissions comprendre pleinement ses conséquences, prévues et imprévues, sur notre système parlementaire. Malheureusement, le gouvernement a décidé de sauter l’étude au comité et la tenue d’un débat approfondi sur la motion et de forcer le Sénat à restreindre le débat sur cette question très importante.

Je suis certaine que, au cours des prochaines années, nous nous rendrons compte que le gouvernement et sa majorité ont manqué de vision et qu’il aurait fallu un libellé plus soigné et un examen approfondi des conséquences imprévues. C’est pour ces raisons que le Comité du Règlement existe. Ce comité n’existe pas seulement pour que les sénateurs discutent sans fin d’idées, de concepts et de notions. Il est d’abord et avant tout chargé de rédiger soigneusement le Règlement.

Comme mon temps de parole est limité, je vais me concentrer sur un élément de cette motion omnibus, soit celui qui propose de créer une nouvelle règle : le sénateur désigné, qui pourra parler pendant 45 minutes pendant les débats sur les projets de loi. En tant que sénatrice ayant eu le privilège d’agir en tant que porte-parole de l’opposition dans le cadre de plusieurs mesures législatives importantes, c’est un sujet qui me tient vraiment à cœur.

Tout d’abord, je dois dire que je suis soulagée que le leader du gouvernement n’ait pas repris le libellé des motions précédentes portant sur les changements au Règlement et qu’il n’élimine pas la fonction de porte-parole d’un projet de loi. Il s’agissait d’un coup direct contre l’opposition, mais le gouvernement a judicieusement décidé de faire marche arrière sur ce point.

Le débat sur la motion no 165 est une excellente occasion de réfléchir à l’histoire de notre institution parlementaire et de nous rappeler ses traditions distinguées de longue date. Même si elles ont évolué au fil des ans, elles demeurent fidèles à leurs origines depuis plus de 150 ans.

Depuis la Confédération, le Parlement du Canada est divisé en deux parties : le gouvernement et l’opposition. Malgré cette division, ces deux parties ont toujours été liées par un objectif commun, soit celui de travailler ensemble pour le bien commun. Les devoirs du gouvernement et de l’opposition se complètent. L’un présente de nouvelles politiques tandis que l’autre les examine attentivement et y trouve des lacunes tout en critiquant leur philosophie et leur idéologie sous-jacentes.

Dans son livre intitulé Across the Aisle: Opposition in Canadian Politics, l’auteur David E. Smith a écrit ce qui suit :

L’objectif du Parlement est de générer [...] une entente au sujet des politiques en se servant de la procédure des lectures successives, de l’examen des projets de loi par des comités et du vote dans les deux Chambres [...] Le débat parlementaire est un grand égalisateur des intérêts contradictoires et a un effet apaisant sur les émotions vives. Le produit du compromis entre tous les partis et, plus traditionnellement, la discipline à l’intérieur de chaque parti est une politique publique réputée être dans l’intérêt de la nation.

Pour comprendre la raison d’être de l’opposition officielle, il faut comprendre la nature même de notre système de gouvernance démocratique, qui fonctionne selon des principes et des pratiques historiques bien établis. En fait, l’existence d’une opposition officielle précède la Confédération. Avant l’union des provinces du Canada — l’Ontario, le Québec, la Nouvelle-Écosse et le Nouveau‑Brunswick — pour former notre pays, elles possédaient toutes leur propre système de gouvernance composé d’une assemblée législative et d’une Chambre haute. Après toutes ces années, le rôle de l’opposition officielle est demeuré le même : offrir aux Canadiens d’autres options politiques que celles proposées par le gouvernement. Il s’agit d’un rôle essentiel qui tient le gouvernement responsable et qui, fondamentalement, protège notre démocratie politique.

Le rôle de l’opposition est simple. Elle ne vise pas à empêcher le gouvernement de remplir son mandat de légiférer et de créer des politiques publiques ni d’étouffer les débats sur les grands enjeux. L’opposition officielle doit agir de manière calme et vigilante pour exiger des comptes du gouvernement.

L’un de nos plus grands parlementaires, le très honorable John Diefenbaker, a très bien résumé la situation dans un discours prononcé devant l’Empire Club of Canada en 1949. John Diefenbaker, qui n’était alors qu’un simple député d’arrière-ban de la Saskatchewan, a dit à son auditoire :

Pour que le Parlement demeure une institution viable, l’opposition loyale de Sa Majesté doit remplir ses fonctions résolument. Lorsqu’elle agit comme il se doit, la liberté est protégée. D’ailleurs, l’histoire nous prouve que la liberté s’évanouit toujours lorsqu’il n’y a plus de critique.

Certains croient qu’il n’y a pas de place pour l’opposition au Sénat. Le rôle du sénateur ne serait pas de présenter, conjointement avec ses collègues de la Chambre, une alternative cohérente au gouvernement. Ils voient le Sénat, d’abord et avant tout, comme un club de débats où les sénateurs vont parfois peaufiner les projets de loi du gouvernement pour corriger les erreurs du ministère de la Justice.

(2120)

Nous devons nous rappeler que le Sénat est un élément crucial de notre système parlementaire et qu’il n’a pas pour but de se soumettre au gouvernement, mais plutôt d’examiner les projets de loi sans crainte, de formuler des critiques au besoin, de faire contrepoids et, surtout, de donner une voix aux régions et à leurs groupes minoritaires. Et oui, les sénateurs devraient pouvoir adhérer à l’idée que le gouvernement en place devrait être remplacé.

Le bon fonctionnement du Parlement dépend non seulement du succès de la Chambre des communes, mais aussi de celui du Sénat. Après l’adoption de la motion no 165, le Sénat devra encore fonctionner. C’est pourquoi il est impératif d’examiner la motion qui nous a été présentée, en particulier l’article 7, qui propose de créer le rôle de « sénateur désigné ».

Dans le Règlement du Sénat du Canada, le terme « porte-parole d’un projet de loi » est défini comme suit :

Principal sénateur répondant au parrain d’un projet de loi. Le porte-parole est désigné soit par le leader ou le leader adjoint du gouvernement (si le parrain n’est pas membre du gouvernement), soit par le leader ou le leader adjoint de l’opposition (si le parrain est membre du gouvernement).

En plus du parrain et du porte-parole d’un projet de loi, la motion du sénateur Gold ajoute les sénateurs désignés à la liste des sénateurs qui peuvent s’exprimer pendant 45 minutes sur le projet de loi à l’étude.

À première vue, cette proposition semble simple : elle ajoute un nombre limité de sénateurs qui disposent de plus de temps pour s’exprimer sur un projet de loi. Dans notre Sénat actuel, un maximum de trois sénateurs peuvent se voir attribuer le rôle de sénateur désigné pour chaque projet de loi. Cependant, en pratique, cet ajout à notre Règlement a deux grandes conséquences.

Premièrement, la motion du sénateur Gold conserve le processus actuel de nomination du porte-parole pour un projet de loi. Dans l’annexe I du Règlement, à la définition du terme, on peut lire que :

Le porte-parole est désigné soit par le leader ou le leader adjoint du gouvernement (si le parrain n’est pas membre du gouvernement), soit par le leader ou le leader adjoint de l’opposition (si le parrain est membre du gouvernement).

Dans le Sénat actuel, plusieurs projets de loi sont parrainés par des sénateurs qui ne sont ni membres officiels du gouvernement ni membres de l’opposition.

Selon la pratique actuelle, pour les projets de loi parrainés par un sénateur qui n’est pas un conservateur, c’est le chef de l’opposition qui nomme le porte-parole. Cet élément aurait dû être précisé dans la motion, mais ce n’est pas le cas. Encore une fois, c’est quelque chose que le Comité du Règlement aurait relevé et modifié. Avec la décision du sénateur Gold de passer outre le processus du comité, l’occasion de changer la définition de « porte-parole d’un projet de loi » pour refléter la structure actuelle du Parlement a été perdue.

Maintenant qu’un délai a été fixé, je ne peux plus présenter d’amendement à cet égard. En raison de la décision de clore le débat, nous ne pouvons plus amender la motion du sénateur Gold, ce qui est une autre occasion perdue.

Le deuxième problème avec la création du rôle de sénateur désigné recoupe ce que le sénateur Quinn a demandé au sénateur Gold la semaine dernière : les sénateurs désignés seront-ils traités comme des porte-parole et assisteront-ils à une séance d’information spéciale?

Le sénateur Gold n’a pas pu répondre à cette question. La plupart des sénateurs, à l’exception de ceux qui siègent du côté de l’opposition, n’ont peut-être jamais été le porte-parole d’un projet de loi du gouvernement ou n’ont jamais assisté à une séance d’information à leur intention. Ces séances d’information sont un élément essentiel de ce dont un porte-parole a besoin pour jouer son rôle relativement à un projet de loi. Cependant, elles sont difficiles à organiser en raison de l’horaire des sénateurs, sans oublier la difficulté de réunir dans une même salle plusieurs fonctionnaires provenant parfois de différents services et, à l’occasion, de différents ministères. Imaginez le fardeau que représenterait l’organisation de trois séances d’information supplémentaires, si chaque sénateur désigné en faisait la demande pour chaque projet de loi, ce qu’il serait peut-être être en droit de faire. Soyons clairs, les séances d’information à l’intention des porte-paroles seront toujours réservées aux porte-paroles, car des questions de stratégie peuvent être rattachées aux discussions tenues lors des séances ou peuvent en découler.

Chers collègues, le changement est inévitable. Il est inutile d’y résister. En un siècle, nous avons vu les pratiques, les traditions et les coutumes parlementaires évoluer pour refléter les besoins de cette nation qui grandit et se diversifie. Toutefois, nous ne pouvons pas observer sans broncher les tentatives de modifier le cœur même du système parlementaire comme s’il suffisait d’appuyer sur un interrupteur.

Qu’en est-il du second examen objectif? Les changements proposés auraient dû être étudiés par le Comité sénatorial permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement. Je comprends ce qui s’est passé dans cette enceinte, mais que ce soit depuis cinq, neuf ans ou plus, le processus est tel qu’une motion omnibus comme celle dont nous sommes saisis — maintenant avec fixation de délai — aurait d’abord dû être soumise au Comité du Règlement afin que le libellé et les autres modifications soient soigneusement examinés. Les sénateurs auraient dû avoir la possibilité de débattre pleinement de la motion et l’amender si nécessaire.

Honorables collègues, réfléchissons une fois de plus aux paroles suivantes de l’ancien premier ministre John Diefenbaker :

[...] Le Parlement doit continuer à être le gardien de la liberté. À cette fin, il doit constamment modifier sa procédure pour répondre aux besoins changeants d’un monde moderne, mais il doit rester immuable dans son concept et sa tradition [...]

Je trouve regrettable que le sénateur Gold ait décidé de ne pas suivre nos traditions en ce qui concerne la motion du gouvernement et la procédure qu’il a choisie pour son adoption. Je vous remercie.

L’honorable Leo Housakos : Honorables sénateurs, à entendre certains de mes collègues pendant le débat de ce soir, on pourrait croire que les mots « réforme du Sénat » et « évolution et changement au Sénat » n’avaient jamais été utilisés avant que Justin Trudeau descende de la montagne, tel un Moïse, ouvre un chemin dans la mer Rouge et nous libère des chaînes de ce terrible vieux Sénat, qui était un endroit horrible et un désastre. On pourrait penser que nous n’avions jamais apporté de changements ou évolué avant l’arrivée du sénateur Harder, de la sénatrice Lankin et de tous ceux qui ont été nommés au Sénat par Justin Trudeau pour sauver cette institution d’elle-même. On pourrait croire que nous n’avions jamais entendu parler de la réforme du Sénat et qu’une telle démarche n’a rien à voir avec des gens comme Preston Manning, qui a été élu il y a de nombreuses années et qui est venu à Ottawa avec une série de propositions visant à réformer le Sénat. En fait, la réforme du Sénat est un débat qui a été lancé en 1867, quelques heures après que John A. Macdonald a nommé les premiers sénateurs.

Sénateur Tannas, je partage votre avis sur bien des aspects que vous avez soulevés aujourd’hui, mais pas sur d’autres. Vous soutenez que les modifications proposées aujourd’hui sont en quelque sorte le résultat d’un processus ardu et que nous devrions autoriser ou encourager le gouvernement à procéder au moyen d’une motion du gouvernement — alors que vous dites vous-même ne pas être emballé par cette idée — ou d’une motion de fixation de délai, même si vous avez précisé que, selon vous, ce n’est pas nécessairement l’idéal. Vous pensez qu’il était nécessaire de procéder ainsi parce que nous n’avons pas avancé assez rapidement au cours des neuf dernières années.

La vérité, c’est que, quand on analyse les choses — comme vous l’avez dit dans vos observations —, on se rend compte que le gouvernement n’a eu aucune difficulté à mener ses principales activités. Comme vous l’avez fait remarquer, à juste titre, c’est en grande partie grâce à une opposition très coopérative.

Cependant, vous avez oublié de préciser que, non seulement l’opposition s’est montrée coopérative pour faire preuve de respect envers la Chambre élue démocratiquement, mais qu’elle a aussi bien coopéré entre 2015 et 2019, alors que nous étions majoritaires au Sénat. Même dans cette situation, nous avons travaillé ensemble pour trouver un compromis afin de mener à bien certains changements que le premier ministre voulait imposer à notre institution. Vous avez participé à cela.

Je remonte à plus de 9 ou 10 ans, à un certain nombre d’années auparavant. Les changements dans cette enceinte n’ont pas commencé en 2015. Nous avons veillé à nous rendre plus responsables et plus transparents. Nous avons autorisé la télédiffusion pour que le public puisse voir le travail que nous faisons. C’est nous qui avons apporté des changements au sein du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration afin de rendre le Sénat plus responsable et plus transparent aux yeux du public. C’est nous qui avons mis en œuvre la divulgation publique des dépenses des sénateurs, et ainsi de suite.

Je ne veux pas m’étendre sur tous ces changements, mais j’aimerais parler des changements intervenus depuis 2015. Aujourd’hui, nous avons le Groupe des sénateurs canadiens, dont vous êtes le leader, et le Groupe des sénateurs indépendants parce que nous étions favorables à ces changements. J’étais président du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration lorsque nous avons alloué des budgets, en tant qu’opposition majoritaire dans cette Chambre, pour permettre à cette évolution et ces changements d’avoir lieu.

Je m’inscris en faux contre l’affirmation voulant que nous ayons été entraînés dans la réalité actuelle du Sénat à notre corps défendant. Nous n’aimions pas certains des changements. Nous avons peut-être débattu vigoureusement de certains d’entre eux, mais nous les avons certainement acceptés et avons tenté de les faire fonctionner grâce à la coopération et à la négociation.

(2130)

Je suis ici depuis assez longtemps pour me souvenir de l’époque où les sénateurs Greene et Massicotte avaient proposé des réformes, et leurs objectifs étaient très précis. Ils cherchaient à réduire la force et la présence du gouvernement au sein de cette institution et à donner plus d’autorité aux sénateurs indépendants et non affiliés, n’est-ce pas, sénateur Tannas? Ils ont réussi dans certains domaines et échoué dans d’autres parce que, vous avez raison, le processus au Sénat est très lourd. C’est ce qu’on appelle la démocratie.

Au cours des 9 dernières années et même des 15 dernières, des mesures ont été contrecarrées au Comité du Règlement — dont j’ai également pris part aux travaux —, et ce n’était pas toujours la faute d’un côté ou de l’autre. Ce n’était pas toujours les conservateurs qui avaient des divergences d’opinions avec les autres membres du comité. Très souvent, au cours des cinq ou sept dernières années, lorsqu’on n’a pas réussi à faire adopter quelque chose à ce comité, c’était à cause d’une absence de consensus même parmi les sénateurs indépendants, et pas seulement chez l’opposition conservatrice. Encore une fois, chers collègues, c’est ce qu’on appelle la démocratie. Il y a une raison pour laquelle, dans les institutions parlementaires, les règles ne changent pas très facilement : elles ont leur raison d’être. Il n’est pas très facile de modifier la Constitution. On ne peut pas juste le faire pour satisfaire aux caprices de quelqu’un.

Si le premier ministre Trudeau veut nommer des personnes qui ont des vues similaires aux siennes pour vérifier les antécédents et nommer des candidats au Sénat, grand bien lui fasse. Si d’autres premiers ministres veulent consulter leur chat mort, grand bien leur fasse.

Quoi que l’on dise dans le débat, cela ne change rien au fait que, dans la Loi sur le Parlement du Canada, la prérogative de nommer un sénateur revient au premier ministre. C’était le cas avant ce processus, c’est le cas maintenant que l’on a ce processus, et cela le restera sauf si nous trouvons un consensus pour modifier la Constitution. Si nous trouvons un consensus, faites-le. Je vous y encourage, écrivez au premier ministre et demandez-lui d’ouvrir la Constitution. À ce moment-là, nous parlerons d’une véritable réforme du Sénat.

Le sénateur Deacon a mentionné que, même dans notre plumitif, nous avons des éléments complexes, qui, à mon avis, donnent à cette Chambre son caractère unique. Ils la rendent plus démocratique que toute autre. Quand nous entendons « reporté, reporté, reporté » au point que la Présidente se lasse de le dire, cela peut sembler fastidieux et bête au grand public qui nous regarde, mais c’est le privilège suprême de chacun d’entre nous, peu importe ce que les leaders décident chaque matin pendant la réunion préparatoire.

Nous savons tous à quel point les leaders ont du pouvoir au Sénat. Lorsque les sénateurs Massicotte et Greene ont commencé à parler de réforme il y a 15 ans, c’était parce qu’ils souhaitaient réduire la puissance et l’omniprésence des leaders des deux côtés du Sénat et conférer plus de pouvoirs et de souplesse aux sénateurs indépendants et non affiliés. C’était leur objectif.

Eh bien, ce « reporté » que nous disons tous, c’est le privilège ultime que nous avons à chacune des séances. Quoi qu’en pensent les sénateurs Plett et Gold, vous avez le droit d’inscrire votre nom au plumitif et de prendre la parole sur n’importe quel item au Feuilleton. Personne ne peut vous priver de ce droit, et il ne devrait jamais vous être enlevé. Je serai ravi d’en discuter et d’en débattre avec n’importe quel membre du Comité du Règlement ou n’importe quel autre sénateur, alors n’hésitez pas à me le demander.

Est-ce frustrant ou inconvénient pour certains d’entre nous lorsque, une semaine donnée, rien au plumitif ne nous intéresse et nous préférerions rentrer chez nous? Tant pis. Vous n’avez qu’à rentrer chez vous. Je ne veux pas qu’on m’empêche de me prévaloir de mon droit de parole à l’égard de quelque item au Feuilleton que ce soit ni qu’on empêche le sénateur MacDonald d’en faire autant.

Pendant ses observations, le sénateur Deacon avait raison sur un point : au final, une fois que cette motion aura été adoptée, parce que vous êtes tous manifestement convaincus que c’est la voie à suivre, je serai un sénateur très heureux dans quelques mois, lorsque je ferai partie du gouvernement. Cette motion renforce le gouvernement. Je serai très heureux, mais je ne m’oppose pas à cette motion pour le futur moi qui sera au gouvernement. Je m’y oppose pour chacun d’entre vous, car peut-être qu’un jour, certains d’entre vous décideront qu’ils ne veulent plus être indépendants et qu’ils veulent faire partie de l’opposition ou du gouvernement. Lorsque vous prendrez cette décision et qu’on ne pourra plus remettre le dentifrice dans son tube, il sera trop tard. Vous ne pourrez pas le remettre dans le tube. Un certain nombre d’entre nous, si nous siégeons du côté du gouvernement, trouveront cela très intéressant.

Le premier ministre Harper a fait un cadeau au nouveau gouvernement Trudeau : 23 postes vacants. Bon nombre d’entre vous ont bénéficié de ce cadeau. Je peux vous dire que Justin Trudeau, avec la motion no 165, a fait un cadeau à ce côté-ci de la Chambre. Merci beaucoup. Je ne vais pas en profiter au cours des 18 prochains mois, mais je le ferai un jour, je peux vous l’assurer.

Sénatrice Petitclerc, le débat de ce soir ne porte pas sur le fait de voter pour ou contre un projet de loi du gouvernement ou d’être indépendant ou non — pas du tout. Tout le débat de ce soir porte sur l’octroi de pouvoirs à un groupe qui a été nommé par le premier ministre en poste, l’octroi des mêmes droits que ceux détenus par l’opposition officielle. Tous les évaluateurs parlementaires constitutionnels ou professeurs qui se pencheront sur la question se demanderont, perplexes, pourquoi une vaste majorité composée de sénateurs indépendants nommés par le gouvernement, par le premier ministre en exercice, exigerait les mêmes droits, privilèges et outils que ceux de l’opposition. Ils concluront tous que c’est parce qu’ils veulent affaiblir l’opposition.

Chers collègues, je vais conclure ainsi : la motion no 165 n’a rien à voir avec les discussions sur la réforme que l’institution a tenu depuis mon arrivée et avant mon arrivée. Je ne suis pas arrogant au point de croire que la réforme a commencé lorsque je suis arrivé ici. Je n’ai fait que poursuivre un processus et nous poursuivons un processus d’évolution qui a commencé il y a de nombreuses années.

Cependant, soyons clairs. Vous le savez tous au fond de votre cœur : la motion no 165 a été conçue par des gens du Cabinet du premier ministre, par des gens du bureau du leader du gouvernement. Je vais vous dire pourquoi : parce qu’il n’y a rien dans cette motion qui renforce l’indépendance, que ce soit celle des sénateurs indépendants ou de ceux de l’opposition.

Tout ce que fait cette motion, c’est maintenir les mêmes pouvoirs, droits, privilèges et moyens politiques qui ont toujours été à la disposition du gouvernement tout en affaiblissant dans une certaine mesure les pouvoirs de l’opposition, sans tenir le moindrement compte des sénateurs qui sont véritablement non affiliés; pas du tout. Les seuls à avoir tenu compte de ces sénateurs sont de ce côté-ci, car nous nous sommes battus pour leur obtenir des places au sein des comités, allant jusqu’à céder notre place pour les laisser siéger aux comités. Au cours des neuf années de grande réforme qui ont suivi l’arrivée de Moïse sur la Colline du Parlement, en 2015, je n’ai pas vu un seul sénateur non affilié obtenir plus de pouvoir qu’auparavant.

En revanche, sénateur Tannas, vous vous rappellerez peut-être que, lorsque nous étions majoritaires, nous n’allions pas de l’avant avec une proposition du gouvernement sans l’assentiment de la poignée de sénateurs non affiliés qui étaient là à l’époque. Ce sont d’ailleurs les premières personnes que le sénateur Carignan allait consulter.

Honorables sénateurs, je sais que l’adoption de cette motion est inévitable, mais je tenais à exprimer mon point de vue sur cette question. Sans être devin, je suis persuadé que nous en débattrons encore dans cinq ou six ans, et je tiens à préciser que ce sera à cause de ces changements que vous avez cru bon de mettre en place. Merci.

L’honorable Frances Lankin : Honorables sénateurs, je serai brève, et je ne ferai pas comme l’ex-sénateur Baker, qui se lançait dans de longs discours après avoir prononcé ces paroles.

Je ne veux pas m’engager dans le débat qui a eu lieu sur le fond. De nombreux sénateurs ont travaillé et réfléchi longtemps pour produire leurs discours. Nous avons entendu une grande variété de points de vue. Je ne suis pas du tout d’accord sur certaines choses que j’ai entendues et qui ne me semblent pas exactes. Nous avons entendu tout ce que nous avions à entendre et nous pouvons maintenant prendre une décision.

Ce que je veux faire, toutefois, c’est remercier tous ceux qui ont contribué à ce débat. De nombreuses personnes sont remontées dans le passé et ont remercié certains de ceux qui ont été, ces dernières années, les moteurs de la réflexion sur la réforme du Sénat. Je ne suis pas ici depuis aussi longtemps que le sénateur Housakos, alors il connaît plus de sénateurs, mais je sais que, lorsque je suis arrivée ici, beaucoup de travail était déjà en cours.

Je sais que des gens ont remercié les sénateurs Massicotte et Greene pour leurs efforts. Je souhaite faire de même. J’ai siégé au Comité de la modernisation et au Comité du Règlement, les deux premiers comités dont j’ai fait partie. J’ai apprécié le mentorat offert par le sénateur McInnis et la sénatrice Fraser pendant ces périodes. J’ai travaillé et discuté longuement avec la sénatrice Frum au sein du Comité du Règlement. Nous n’étions pas d’accord sur tout, mais le ton de nos débats était respectueux.

(2140)

Je pense que nous pouvons discuter ici de la manière de continuer à faire du Sénat une institution qui apporte une valeur ajoutée, au lieu d’une institution qui, je ne dirais pas qui reflète uniquement, mais principalement ce qui se passe à l’autre endroit.

Cela dit, je dois dire honnêtement — et j’en ai parlé à des sénateurs d’en face que je ne nommerai pas par crainte de les provoquer — qu’à mon avis, une opposition organisée, structurée et efficace a un rôle à jouer. Je pense que nous en avons besoin.

Lorsque j’entends des sénateurs dire que beaucoup de gens dans cette Chambre ne pensent pas qu’il devrait y avoir d’opposition, cela ne reflète pas les discussions que j’ai eues. Je sais qu’il y en a quelques-uns qui pensent ainsi. Ils sont minoritaires, et je ne partage pas ce point de vue. Très franchement, j’en ai plutôt assez que certaines personnes me disent tout le temps ce que je pense, ce à quoi je suis attachée ou ce que je fais, et que je suis une libérale refoulée parce que j’ai été nommée par un libéral. Pour moi, tout cela est absurde et relève de la nuisance sonore, mais je le tolère.

J’aimerais cependant que nous aspirions à tenir des discussions sur le ton que nous avons finalement atteint à la fin de nos délibérations ce soir, qui nous permet de parler de ce qui pourrait améliorer la valeur ajoutée que cette Chambre apporte aux Canadiens et de faire entendre des voix indépendantes dans une structure où il y a une représentation efficace à la fois du gouvernement et de l’opposition. Ces éléments ne doivent pas être perdus, mais nous devons les renforcer et profiter de cette occasion pour le faire.

Je crois très fermement — d’ailleurs, je présenterai peut-être une motion à cette fin — que nous devrions instaurer un processus de collaboration pour rétablir le genre d’orientation à laquelle la sénatrice McCoy — puisse-t-elle reposer en paix — a consacré tant de temps et d’efforts. J’ai beaucoup appris. Vous constaterez que, malgré les allégations de certains voulant que je ne sois qu’une marionnette contrôlée par l’autre endroit, je crois fermement que nous ne sommes pas en concurrence avec l’autre endroit, qu’il serait déplacé pour le Sénat de rejeter les projets de loi du gouvernement, à moins que, conformément au renvoi de 2014 sur la constitutionnalité d’une réforme du Sénat, ledit projet de loi ne soit pas constitutionnel, ne soit pas conforme à la Charte ou qu’il risque d’avoir des effets dévastateurs dont on n’a pas tenu compte sur certaines régions, sur les peuples autochtones, sur des groupes en situation minoritaire ou sur une minorité de genre.

J’y crois vraiment et, à mes débuts au Sénat, je regardais le caucus qui forme l’opposition actuelle, qui était alors majoritaire au Sénat, s’opposer à un budget en faisant voter seulement la moitié de ses membres. J’ai vu le sénateur Plett, qui était alors whip, compter les voix à mesure que le vote progressait et signaler à ses collègues de voter ou de s’abstenir de manière à ne pas entraîner le rejet le budget. Voilà une opposition responsable. Je pense qu’il est parfois irresponsable de tenir des discours trop creux, mais je peux m’en accommoder. J’ai fait partie de l’opposition et du gouvernement au sein d’une assemblée législative provinciale, alors je comprends comment cela fonctionne.

Je remercie de leur travail des gens comme les sénateurs Massicotte et Greene et le Comité sur la modernisation du Sénat ainsi que, avant mon arrivée, des personnes comme la sénatrice Ringuette. J’ai déjà mentionné la sénatrice McCoy et le sénateur Wallace, qui traçaient la voie, à leur façon, à la tête de caucus non partisans avant l’arrivée de bon nombre d’entre nous. Je pense qu’il y a beaucoup de gens à remercier.

Je tiens à remercier le sénateur Harder et le bureau du représentant du gouvernement, qui ont travaillé à l’élaboration de quelques idées. Je pense que l’idée d’un comité de la programmation est retombée sur les leaders, et cela fonctionne parfois, mais pas toujours. Je pense que nous pouvons envisager de structurer nos débats de manière à pouvoir tenir de bons débats réfléchis pour pouvoir avancer. Je pense qu’il y a beaucoup d’idées positives.

Je voudrais terminer en vous remerciant de m’avoir fait l’honneur de me demander de venir travailler avec vous pour une durée limitée, dans le cadre d’un détachement; je sais que les détachements n’existent pas ici, mais j’ai insisté sur ce terme pour que ce soit bien clair. Je voulais participer à cet effort, et je tiens à remercier ceux avec qui j’ai eu l’occasion de discuter — les groupes, les dirigeants et ceux qui occupent des fonctions de direction au sein des comités — afin de les consulter sur ce que pourrait être un consensus. Je suis fière d’avoir contribué à faire avancer ce consensus, mais je suis surtout honorée qu’on m’ait demandé de le faire; j’en suis vraiment reconnaissante.

Je remercie le bureau du représentant du gouvernement des efforts qu’il a déployés lorsqu’il m’a sorti d’ici. Le personnel du secrétariat et son travail ont été parfaitement exemplaires et respectueux. Je pense que les gens ne le croiront pas, mais ce travail respecte le rôle de l’opposition, ainsi que le temps requis et la nécessité de ne pas proposer des choses lors de la consultation que d’autres personnes voulaient voir incluses. Ce n’est pas le cas de tout le monde; il y a eu des désaccords. Cependant, le tout est très respectueux du rôle de l’opposition. Vous ne le croyez peut-être pas. Je vois l’air dubitatif d’une excellente personne assise au dernier rang avec qui j’ai siégé à quelques comités différents. Toutefois, je tiens à vous dire que personne ne défend cette position avec plus de vigueur que les deux membres du Sénat qui font partie du bureau du représentant du gouvernement. La sénatrice LaBoucane-Benson, qui n’a pas été mentionnée du tout, a également réalisé un travail énorme dans ce dossier.

Je remercie le sénateur Gold. Il y a eu beaucoup de procès d’intention et d’insinuations; je ne veux pas faire preuve de négativisme à ce stade. J’ai travaillé en collaboration avec un sénateur que j’ai toujours respecté, mais dont le comportement m’a inspiré un respect encore plus grand, et je tiens à l’en remercier.

Je tiens à remercier tout le monde de la qualité du débat. Je vous implore de tourner la page et de passer à la prochaine étape. Discutons sérieusement de la façon d’atteindre les objectifs de l’opposition, même quand nous n’en faisons pas partie, puisque nous y aboutissons tous. Trouvons une façon de rendre l’opposition efficace et structurée pour qu’elle puisse profiter de l’immense talent qui se trouve au Sénat. Je sais que nous voulons tous présenter des réflexions différentes et représentatives au sein d’un Sénat qui n’est pas seulement un duopole et qui permet de tenir des débats plus larges. En outre, au-delà des débats polarisés, nous voulons aussi des discours qui nous rapprochent de la pensée intégrative. Il n’est pas seulement question de compromis; il est aussi question de trouver des solutions novatrices dans l’intérêt de tous les Canadiens.

C’est un honneur de faire partie de cette institution et d’avoir travaillé sur cet ensemble de modifications. Je sais qu’il y a du ressentiment qui découle de cette motion, mais je pense que nous pouvons en faire abstraction et accomplir de l’excellent travail. Je vous exhorte à être un élément constructif de ces efforts à l’avenir. Merci beaucoup.

Son Honneur la Présidente : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : Non.

Des voix : Oui.

Son Honneur la Présidente : Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur la Présidente : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur la Présidente : À mon avis, les oui l’emportent.

Et deux honorables sénateurs s’étant levés :

Son Honneur la Présidente : Je vois deux sénateurs se lever.

Conformément à l’article 7-4(5)c) du Règlement et à l’ordre adopté le 21 septembre 2022, le vote est reporté à 16 h 15 demain, et la sonnerie retentira à compter de 16 heures.

[Français]

L’honorable Claude Carignan : Je propose l’ajournement du Sénat.

Son Honneur la Présidente : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : Non.

Des voix : Oui.

[Traduction]

Son Honneur la Présidente : Le consentement est-il accordé?

Une voix : Non.

Son Honneur la Présidente : Je vais reposer la question. Le consentement est-il accordé?

(2150)

Je suis désolée, le sénateur Carignan demande le consentement pour ajourner le Sénat. Le consentement est-il accordé?

Des voix : D’accord.

Des voix : Non.

Son Honneur la Présidente : Le consentement n’est pas accordé.

[Français]

Une greffière au Bureau : Projets de loi, troisième lecture.

L’ajournement

L’honorable Claude Carignan propose :

Que la séance soit maintenant levée.

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Une voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée avec dissidence.)

(À 21 h 52, conformément à l’ordre adopté par le Sénat plus tôt aujourd’hui, le Sénat s’ajourne jusqu’à 14 heures demain.)

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