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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 44e Législature
Volume 153, Numéro 245

Le mercredi 4 décembre 2024
L’honorable Raymonde Gagné, Présidente


LE SÉNAT

Le mercredi 4 décembre 2024

La séance est ouverte à 14 heures, la Présidente étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Maxene Prevost Shephard

L’honorable Wanda Thomas Bernard : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de prendre la parole devant vous aujourd’hui pour souligner deux principes du Kwanza : kujichagulia, qui signifie « autodétermination », et ujima, qui signifie « travail collectif et responsabilité ». J’aimerais vous en parler en vous racontant l’histoire inspirante de Maxene Prevost Shephard.

Maxene est née à Newport Station, en Nouvelle-Écosse, le 20 février 1931. Elle était l’une des 12 enfants de George et Stella Prevost. Elle a épousé Edward Shephard à un jeune âge. Ils ont déménagé à Truro, puis à Montréal. Ils ont eu trois enfants : Kevin, Glenn et Melodi. Comme la plupart des femmes néo-écossaises d’origine africaine de son époque, son histoire aurait dû se résumer à cela : être épouse, mère et grand-mère, mais ce ne fut pas le cas de Maxene. Poussée par la kujichagulia, elle a développé son potentiel au-delà de ces rôles traditionnels.

En 1974, en tant qu’apprenante adulte, Maxene a obtenu un diplôme d’éducation familiale du Collège Marie-Victorin, à Montréal. Pendant son stage, elle a travaillé avec Diane Jacobs, fondatrice de l’association des travailleurs sociaux de race noire du Canada. Même si cette association n’existe plus, cette expérience a inspiré l’engagement de Maxene à l’égard de l’ujima — le travail collectif et la responsabilité.

En 1979, Maxene est rentrée en Nouvelle-Écosse avec sa famille, investie d’une mission. Cette mission consistait à fonder une association de travailleurs sociaux de race noire en Nouvelle-Écosse.

C’est dans ce cadre que je l’ai rencontrée pour la première fois. Elle était une visionnaire, une guide, une pionnière qui m’a inspirée, moi et beaucoup d’autres. Lorsqu’elle m’a fait part de sa vision pour le groupe, j’ai été captivée. J’ai pu recruter deux autres femmes, Frances Mills-Clements et Althea Tolliver, et toutes les quatre, quatre Néo-Écossaises d’origine africaine soucieuses de leur communauté, dotées d’une conscience sociale et astucieuses sur le plan politique, nous avons travaillé ensemble pour changer la manière dont les services sociaux étaient fournis aux Néo-Écossais noirs.

L’engagement de Maxene envers l’ujima a jeté les bases de changements systémiques en Nouvelle-Écosse et au-delà. Si je suis qui je suis et où je suis, c’est en grande partie grâce à son mentorat, à ses encouragements et à son inspiration. Quarante-cinq ans plus tard, il existe, partout au Canada, des groupes relevant de l’association des travailleurs sociaux noirs qui poursuivent son legs de travail collectif et de responsabilité.

Chers collègues, remercions Maxene Prevost Shephard d’avoir planté une graine qui continue de croître.

Asante.

Vivre avec le diabète de type 1

L’honorable David M. Wells : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour attirer l’attention sur un problème de santé urgent et souvent mal compris : le diabète de type 1. Cette maladie auto-immune touche plus de 300 000 Canadiens et le nombre de personnes qui en sont atteintes augmente à un rythme alarmant de 4,4 % par an. Contrairement à la croyance populaire, le diabète de type 1 n’est pas exclusivement une maladie infantile, 71 % des personnes atteintes reçoivent leur diagnostic à l’âge adulte.

Le diabète de type 1 survient lorsque le système immunitaire d’une personne attaque par erreur les cellules bêta qui produisent de l’insuline dans le pancréas. Cela signifie que les personnes atteintes de diabète de type 1 doivent recourir à l’insulinothérapie pour survivre. Toutefois, soyons clairs : l’insuline n’est pas un remède, mais seulement un moyen de gérer le taux de sucre dans le sang. Il s’agit d’une lutte quotidienne qui exige une vigilance constante, ce qui représente parfois plus de 300 décisions par jour concernant l’alimentation, l’activité et les doses d’insuline, simplement pour maintenir une stabilité.

Les répercussions de cette maladie s’étendent bien au-delà de la personne concernée. Les familles qui comptent une personne atteinte du diabète de type 1 sont 15 fois plus susceptibles de voir un autre de leurs membres recevoir le même diagnostic, ce qui en fait une bataille non seulement personnelle, mais aussi familiale. Plus de 108 000 enfants développent le diabète de type 1 dans le monde chaque année, un chiffre qui souligne le besoin pressant de sensibilisation et d’action.

Le diabète de type 1 ne fait pas de discrimination. Tout le monde est à risque et la reconnaissance des symptômes, dont la perte de poids inexpliquée, la soif extrême et les mictions fréquentes, peut sauver des vies. Il est essentiel que les Canadiens sachent qu’un dépistage précoce fait souvent la différence entre la vie et la mort.

Malgré les progrès de la médecine, vivre avec cette maladie demeure extrêmement difficile. L’espérance de vie des personnes atteintes de diabète de type 1 est, en moyenne, inférieure de 10 à 12 ans. Beaucoup de gens ont l’impression de mener chaque jour un combat sans relâche non seulement contre la maladie, mais aussi afin d’obtenir du financement pour la recherche et de meilleurs traitements.

Des organismes comme Percée DT1, anciennement connue sous le nom de Fondation de la recherche sur le diabète juvénile, mènent la charge pour obtenir un meilleur appui, informer davantage les gens et, espérons-le, trouver un remède. Leur travail nous rappelle qu’il est possible de réaliser des progrès quand on accorde la priorité à la défense d’une cause, à l’éducation et aux investissements dans la recherche médicale.

Chers collègues, récemment, j’ai eu l’honneur de rencontrer des représentants de Percée DT1 qui faisaient partie d’une délégation dirigée par Maya Martinovic, une jeune femme de Terre-Neuve-et-Labrador atteinte de diabète de type 1. C’est son courage et sa détermination qui m’ont incité à faire cette déclaration aujourd’hui.

Honorables sénateurs, il ne s’agit pas seulement de statistiques, mais de vies, de familles et d’avenirs. Alors que nous continuons d’élaborer des politiques de santé, veillons à ce que les Canadiens atteints de diabète de type 1 disposent des ressources et du soutien dont ils ont besoin et puissent espérer. Ensemble, nous pouvons bâtir un monde où cette maladie ne réduit plus l’espérance de vie et ne cause plus la mort.

Merci, chers collègues.

[Français]

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune des boursiers de 2024 de la Fondation des médecins canado-haïtiens. Ils sont accompagnés de Daniel Michel et de Charlotte Lopy Paoli. Ils sont les invités des honorables sénatrices Mégie et Youance.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Les boursiers de la Fondation des médecins canado-haïtiens

L’honorable Marie-Françoise Mégie : Honorables sénateurs, c’est avec une grande fierté que je rends hommage au groupe des jeunes boursiers de 2024 de la Fondation des médecins canado‑haïtiens.

Cette bourse récompense la persévérance scolaire et sportive en s’appuyant sur une des devises de Pierre de Coubertin, père idéaliste des Jeux olympiques modernes : « Un esprit sain dans un corps sain. »

Ils pratiquent assidûment et intensivement plusieurs sports. Certains d’entre eux ont même participé aux Jeux du Québec et leur équipe a remporté des médailles. Ils ont des ambitions : devenir professionnel de la santé, travailler dans le domaine du cinéma, de l’écriture, de l’aérospatiale, du football professionnel, de l’intelligence artificielle et j’en passe.

S’ils continuent à faire preuve de cette volonté et de cette détermination pour la réalisation de leurs rêves personnels et professionnels et s’ils sont bien accompagnés, ils atteindront leurs objectifs.

(1410)

Chers parents, soyez vraiment fiers de vos jeunes! Continuez votre excellent travail en vous investissant dans leur parcours vers la réussite. Quant à vous, Djoulie, Gérard Emmanuel, Marie Laetitia, Mary Rosina, Ruth et Tristan, nous sommes fiers de vous. Le samedi 16 novembre dernier, la sénatrice Youance et moi étions présentes lorsque notre communauté vous a manifesté son soutien lors du gala-bénéfice de la fondation.

Maintenant, honorables sénateurs, je vous invite à les applaudir pour les encourager à persévérer. Merci et félicitations à tous!

[Traduction]

Les femmes dans les forces armées

L’honorable Gwen Boniface : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui, de concert avec la sénatrice Rebecca Patterson, pour saluer les femmes qui servent, ont servi et continuent de servir dans le but de préserver la paix, l’ordre et la démocratie au Canada et dans le monde entier. Malheureusement, la place des femmes dans ces domaines est remise en question. J’ai assisté récemment au Forum d’Halifax sur la sécurité internationale, où un panéliste a dit ce qui suit :

Je pense qu’il est illusoire de ne pas admettre que les femmes combattantes créent des situations uniques auxquelles il faut faire face, mais je crois qu’on ne sait pas encore comment procéder.

Le panéliste faisait référence à l’opposition à la présence des femmes dans les unités de combat, les qualifiant de « distraction ». Il convient de souligner que la cheffe d’état-major de la défense du Canada, ainsi qu’au moins 25 officières supérieures étrangères, étaient présentes.

Les femmes jouent un rôle crucial dans les forces armées depuis plus de 100 ans. Aujourd’hui, les femmes des Forces armées canadiennes travaillent dans toutes les sphères, ce qui leur donne plus que jamais un rôle de premier plan dans la défense des valeurs qui nous sont chères, soit la démocratie, le respect des droits de la personne, et la dignité individuelle.

Les femmes travaillent de plus en plus de façons différentes afin de préserver l’ordre international fondé sur des règles. Depuis la Seconde Guerre mondiale, le monde n’a jamais été confronté à autant de menaces à la paix qu’aujourd’hui. La guerre d’agression illégale de la Russie en Ukraine ne concerne pas seulement l’Ukraine, mais l’ensemble de l’ordre fondé sur des règles. Comme nous l’avons vu, l’agression de la Russie ne se vit pas seulement sur le champ de bataille conventionnel, elle se fait sentir partout, y compris ici, chez nous.

Par conséquent, le service ne peut plus être défini par la proximité d’un champ de bataille conventionnel. Nous devons donc réfléchir à tous les outils et à toutes les ressources qui nous permettent de prendre le dessus sur nos adversaires, et non à ceux fondés sur une idée de la guerre datant de l’ère industrielle.

Dans le domaine de la sécurité moderne, nos politiques, nos stratégies et nos plans ne sont efficaces que si les gens à la table et sur le front sont compétents. Nous devons adopter une approche intersectionnelle et tirer parti de toute la diversité de notre grand pays. Lorsque nous adoptons une approche plus large et plus inclusive en matière de sécurité, le débat change. Il s’agit de savoir comment ajouter de la valeur et maximiser notre avantage concurrentiel dans un contexte de sécurité mondiale en évolution rapide.

Je vous laisse sur les pensées de la cheffe d’état-major de la défense du Canada, la première femme à commander une armée au sein du G7 et du G20, et qui compte 39 ans de service au Canada, y compris au sein des forces combattantes, la générale Jennie Carignan. Elle a dit :

« [...] Je ne peux pas croire qu’en 2024 nous devions toujours justifier la contribution des femmes à la défense [...] de leur pays [...] C’est cette lutte qui détourne l’attention, et non les femmes elles-mêmes. »

Merci.

[Français]

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Julie Roy, directrice générale et cheffe de la direction de Téléfilm Canada, et de Monica Flores, vice-présidente des affaires gouvernementales et des communications de Téléfilm Canada. Elles sont les invitées de l’honorable sénatrice Gerba.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

[Traduction]

Le décès de l’honorable Noël A. Kinsella

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de prendre la parole aujourd’hui pour rendre hommage à un ancien collègue qui est décédé en décembre l’an dernier, l’honorable Noël Kinsella, le 42e Président du Sénat du Canada.

S’il est vrai qu’il serait long de faire la liste des réalisations professionnelles et des réussites universitaires de sa vie, ces faits ne témoignent pas à eux seuls de sa personnalité chaleureuse et de sa bienveillance, de ses conseils judicieux, de son humour et de son bon caractère. En raison de ces qualités et de bien autres encore, tous ceux qui l’ont connu s’ennuient de lui.

On peut difficilement parler de la protection et de la promotion des droits de la personne au Canada au cours des 60 dernières années sans souligner le travail de M. Kinsella. Je n’ai pas assez de temps pour énumérer toutes les contributions qu’il a apportées à cet égard, alors je n’en soulignerai que quelques-unes. Il fut président de la Fondation canadienne des droits de la personne, président fondateur de la Commission des droits de la personne du Nouveau-Brunswick et membre de la délégation du Nouveau-Brunswick lors des négociations qui ont mené au rapatriement de la Constitution et à l’adoption de la Charte des droits et libertés.

Après sa nomination au Sénat en 1990, sur la recommandation de l’ancien premier ministre Brian Mulroney, le sénateur Kinsella a siégé à titre de whip, de leader adjoint et de leader de l’opposition dans le caucus conservateur. Le 8 février 2006, l’ancien premier ministre Stephen Harper a nommé le sénateur Kinsella au poste de Président du Sénat. Il deviendrait éventuellement le Président du Sénat ayant occupé cette fonction le plus longtemps dans l’histoire du Canada, ainsi que l’un des plus importants, dont le travail et les décisions guident encore nos délibérations à ce jour.

Le Président Kinsella abordait son rôle avec un esprit ouvert et juste. Il traitait toujours avec respect ses collègues sénateurs et les règles qui régissent le lieu dans lequel nous avons la chance de travailler. En tant que Président, il a fait preuve de beaucoup de courtoisie et de sang-froid pendant les périodes difficiles qu’a connues le Sénat, et il avait toujours à l’esprit qu’il fallait préserver le décorum pendant les débats, une tâche qui n’est pas toujours facile.

Dans l’exercice de ses fonctions diplomatiques, qui constituent une facette importante du rôle du Président, il a été un représentant digne et respecté du Parlement canadien. Fidèle à son opposition de longue date à la retraite obligatoire, un point de vue que je partage maintenant, le Président Kinsella a quitté le Sénat deux jours avant son 75e anniversaire de naissance en novembre 2014. En reconnaissance des services publics exceptionnels qu’il a rendus aux Canadiens, le premier ministre Harper l’a nommé au Conseil privé.

Le Président Kinsella a puisé dans sa profonde foi catholique tout au long de sa vie publique et privée. J’espère que cette foi aidera sa famille à composer avec l’immense perte qu’elle vit. Au nom de tous ses amis du caucus conservateur, et en fait de tout le Sénat, je tiens à lui transmettre mes sincères condoléances. Que la lumière perpétuelle brille sur lui et qu’il repose en paix.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune du chef Brad Benoit et du vice-chef Frank Benoit, de la Première Nation de Miawpukek. Ils sont les invités de l’honorable sénatrice White.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

[Français]

La Journée internationale des personnes handicapées

L’honorable Chantal Petitclerc : Honorables sénatrices et sénateurs, on a souligné hier la Journée internationale des personnes handicapées.

[Traduction]

Cette semaine, Équipe Canada, nos athlètes olympiques et paralympiques, sont à la Colline du Parlement pour la première fois depuis leur retour de Paris. Les Jeux paralympiques de Paris de 2024 sont les premiers jeux où nos médaillés ont reçu une rétribution pour avoir remporté une médaille, à l’instar des athlètes olympiques. Pour atteindre cet objectif, il a fallu un travail de longue haleine. Je suis ravie pour eux et fière de pouvoir dire qu’au Canada, une médaille est une médaille, peu importe l’habileté ou la limitation fonctionnelle que l’on peut avoir.

[Français]

Voici quelques chiffres pour les Jeux de Paris : l’équipe paralympique canadienne a obtenu 29 médailles, soit 10 d’or, 9 d’argent et 10 de bronze. Ces 10 médailles d’or ont permis d’égaler le nombre de médailles d’or obtenues à Pékin. Nos 29 médailles ont permis d’égaler le nombre de médailles récoltées à Rio, ce qui réaffirme que nous sommes l’une des grandes nations des Jeux paralympiques.

Les athlètes canadiens en natation ont notamment gagné 13 des 29 médailles à Paris.

[Traduction]

Les Jeux de Paris de 2024 ont été suivis par les Canadiens plus que tous les autres auparavant. Plus de 11 millions de Canadiens ont suivi la couverture des Jeux diffusée à CBC/Radio-Canada. Une hausse de 153 % du nombre d’heures de contenu consommé sur les plateformes numériques a été enregistrée par rapport aux Jeux de Tokyo de 2020. Les Canadiens ont regardé en moyenne 1,2 million d’heures de couverture par jour, démontrant un intérêt national extraordinaire et croissant pour le parasport.

(1420)

Chers collègues, la Journée internationale des personnes handicapées est beaucoup plus qu’une journée de reconnaissance. C’est aussi, comme il se doit, une journée d’action.

Alors que nous saluons les exploits de nos champions paralympiques à l’approche de la période des Fêtes, rappelons qu’il y a encore trop de Canadiens handicapés qui vivent dans la pauvreté parce que l’on n’en fait pas assez. Il faut souligner les réussites des personnes handicapées tout en continuant de nous battre pour elles et de nous attaquer ensemble au problème.

Merci. Meegwetch.


AFFAIRES COURANTES

L’ajournement

Préavis de motion

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, lorsque le Sénat s’ajournera après l’adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu’au mardi 10 décembre 2024, à 14 heures.

[Français]

L’Assemblée parlementaire de la Francophonie

La Conférence mondiale des femmes parlementaires, tenue les 26 et 27 juin 2024—Dépôt du rapport

L’honorable Éric Forest : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie concernant la Conférence mondiale des femmes parlementaires, tenue à Doha, au Qatar, les 26 et 27 juin 2024.

La session de l’Assemblée régionale Amérique, tenue du 7 au 9 août 2024—Dépôt du rapport

L’honorable Éric Forest : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie concernant la 39e session de l’Assemblée régionale Amérique, tenue à Toronto, en Ontario, au Canada, du 7 au 9 août 2024.

La réunion du Bureau, la session annuelle et la dixième édition du Parlement francophone des jeunes de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie, tenues du 4 au 9 juillet 2024—Dépôt du rapport

L’honorable Éric Forest : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie concernant la réunion du Bureau, la 49e session annuelle et la 10e édition du Parlement francophone des jeunes de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie, tenues à Montréal, au Québec, au Canada, du 4 au 9 juillet 2024.

L’Association législative Canada-Chine

La réunion bilatérale, tenue du 24 au 29 mars 2024—Dépôt du rapport

L’honorable Paul J. Massicotte : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de l’Association législative Canada-Chine concernant la 24e réunion bilatérale, tenue à Pékin et à Shanghai, en République populaire de Chine, du 24 au 29 mars 2024.

[Traduction]

Audit et surveillance

Préavis de motion concernant la composition du comité

L’honorable Raymonde Saint-Germain : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, nonobstant toute disposition du Règlement ou tout ordre antérieur, l’honorable sénatrice Dasko prenne la place de l’honorable sénateur Yussuff à titre d’un des membres du Comité permanent de l’audit et de la surveillance.

L’honorable Nancy J. Hartling, O.N.-B.

Préavis d’interpellation

L’honorable Bernadette Clement : Honorables sénateurs, je donne préavis que, après-demain :

J’attirerai l’attention du Sénat sur la carrière de l’honorable Nancy Hartling.

L’honorable Brent Cotter, c.r.

Préavis d’interpellation

L’honorable Bernadette Clement : Honorables sénateurs, je donne préavis que, après-demain :

J’attirerai l’attention du Sénat sur la carrière de l’honorable Brent Cotter.


PÉRIODE DES QUESTIONS

Les services publics et l’approvisionnement

Le processus d’acquisition

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Monsieur le leader, la vérificatrice générale du Canada a confirmé toutes les préoccupations que la sénatrice Martin et moi-même avons soulevées auprès de vous au sujet des contrats à fournisseur unique que le gouvernement incompétent a accordés aux consultants de la société Accenture pour gérer le programme de prêts du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes.

Au départ, monsieur le leader, le gouvernement a déclaré que ces contrats avaient coûté 61 millions de dollars aux contribuables. En mai 2023, une réponse différée déposée au Sénat a révélé qu’Accenture avait reçu 208 millions de dollars.

Une voix : Wow.

Le sénateur Plett : Lundi, la vérificatrice générale a confirmé que la valeur des 19 contrats s’élevait en fait à plus de 313 millions de dollars.

Le sénateur Housakos : Incroyable.

La sénatrice Batters : Cinq fois.

Le sénateur Plett : Accenture a décidé de la portée et du prix de ses contrats. Il n’y a eu aucune surveillance, monsieur le leader.

Pourquoi le gouvernement néo-démocrate—libéral n’a-t-il aucun respect pour les contribuables, et qui sera congédié pour cela, monsieur le leader?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Comme je l’ai dit — et je le répète —, le programme dont vous parlez et pour lequel les contrats ont été octroyés a permis à 900 000 entreprises de survivre tout au long de la pandémie et de continuer de payer leurs employés, ce qui a permis par le fait même de maintenir des familles à flot.

L’information qui a été révélée est très préoccupante. Comme je l’ai dit récemment dans une autre réponse, je crois que ce contrat a été octroyé par Exportation et développement Canada, qui mène ses activités indépendamment du gouvernement.

Les préoccupations de la ministre à ce sujet ont été soulevées directement auprès de la présidente d’Exportation et développement Canada.

Le sénateur Plett : On ne parle pas du tout de préoccupations, mais d’incompétence.

Monsieur le leader, vous avez dit hier à la sénatrice Martin que le gouvernement apprécie le travail de la vérificatrice générale. Pourtant, il a le culot — tout comme vous — de rejeter certaines de ses recommandations visant à protéger les contribuables.

Cela n’en vaut pas le coût, monsieur le leader. Comment expliquez-vous cela, monsieur le leader? Ce fiasco n’est-il pas une autre raison pour laquelle le gouvernement néo-démocrate—libéral doit partir?

Le sénateur Gold : La réponse est non. La vérificatrice générale a un travail important à faire qui consiste à évaluer le rendement des programmes en fonction des politiques officielles qui les sous-tendent.

Le gouvernement a un travail important à faire qui consiste à adapter ses programmes selon l’évolution des besoins. Ce sont 900 000 entreprises, leurs employés et leurs familles qui ont été sauvés.

En ce qui concerne les questions soulevées par la vérificatrice générale, elles ont été soulevées par la ministre des Finances auprès de la présidente d’Exportation et développement Canada.

Les affaires mondiales

Les relations canado-israéliennes

L’honorable Leo Housakos : Sénateur Gold, la décision de Justin Trudeau et de Mélanie Joly de voter en faveur de la motion des Nations unies d’hier condamnant Israël représente une rupture honteuse avec la position traditionnelle de notre nation, qui s’est tenue aux côtés de notre allié démocratique contre le parti pris implacable des Nations unies. Ce vote renie les valeurs du Canada, nous range du côté des pires bafoueurs des droits de la personne et légitime un système onusien corrompu qui se moque de la justice et de l’équité depuis des décennies.

Pire encore, l’ambassadeur Bob Rae a défendu ce vote de manière risible en affirmant que le Canada préconise une solution à deux États tout en participant à un processus bidon qui ne fait qu’enhardir ceux qui cherchent à délégitimer Israël. Ses propos ne parviennent pas à masquer l’hypocrisie qui consiste à soutenir une motion qui cible le seul État juif du monde sans même mentionner le Hamas.

Sénateur Gold, êtes-vous à l’aise avec ce vote et avec le message qu’il envoie à notre allié Israël, à la communauté juive du Canada et aux Canadiens qui accordent de l’importance à la politique étrangère?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Sénateur Housakos, je vous remercie de votre question. Comme vous le savez, les votes du Canada aux Nations unies ont toujours été un sujet sur lequel la communauté juive et la communauté pro-israélienne du Canada ont porté une attention considérable, et ce à juste titre.

La position du Canada à l’égard du conflit au Moyen-Orient ne change pas. Le Canada croit toujours à l’importance de deux États pour deux peuples ainsi qu’au droit des citoyens d’Israël de vivre en paix et en sécurité avec leurs voisins et au droit des Palestiniens d’avoir leur propre patrie.

En tant qu’ami et allié d’Israël, comme l’ont fait d’autres de ses alliés, le gouvernement a également fait part de ses préoccupations à l’égard de certaines des mesures qui ont été prises. Le vote aux Nations unies reflète la position constante du Canada...

(1430)

Le sénateur Housakos : La seule constante dans l’approche du gouvernement des neuf dernières années, sénateur Gold, c’est de se ranger du côté d’une bande de tyrans et de dictateurs au lieu du côté d’Israël, un allié. Il fut un temps où le Canada était fièrement solidaire d’Israël et s’opposait à ces inepties. À l’époque, nous avons dénoncé ce que sont les Nations unies : une institution partiale et défaillante où des dictatures prônent les droits de la personne.

Les conservateurs se trouveront toujours du bon côté de l’histoire, comme nous l’avons fait sous la direction du premier ministre Harper et comme nous le ferons encore sous la direction du futur premier ministre Poilievre. N’est-ce pas une autre raison de déclencher des élections, sénateur Gold, afin que le Canada puisse élire un gouvernement qui a un sens moral et qui nous ramènera...

Son Honneur la Présidente : Le sénateur Gold a la parole.

Le sénateur Gold : Sénateur Housakos, comme vous le savez, je suis conscient des répercussions de chaque déclaration et de chaque vote. Je fais partie de cette communauté. Je le comprends très bien. Cela dit, il reste que le Canada demeure un allié solide d’Israël. Malgré les tentatives de faire d’Israël un sujet de discorde, le gouvernement actuel maintiendra cette position.

L’environnement et le changement climatique

Les cibles du Canada en matière de réduction des émissions

L’honorable Mary Coyle : Sénateur Gold, les signataires de l’Accord de Paris, dont le Canada, sont tenus de présenter d’ici février 2025 leur nouvelle contribution prévue déterminée au niveau national, qui établira leur cible de réduction des émissions d’ici 2035. Selon le cadre de responsabilisation du Canada en matière de changements climatiques, le Canada était censé avoir fixé sa cible pour 2035 au plus tard le 1er décembre 2024.

À la COP 29, à Bakou, j’ai rencontré deux membres du Groupe consultatif pour la carboneutralité du Canada, Catherine Abreu et Simon Donner. Les rapports de septembre du groupe avertissent que le Canada, s’il continue sur sa lancée actuelle, n’atteindra pas la cible de réduction des émissions de 40 à 45 % d’ici 2030. Le groupe recommande également que le Canada fixe sa nouvelle contribution prévue déterminée au niveau national pour 2035 à 50 à 55 % sous les niveaux de 2005.

Sénateur Gold, le gouvernement suivra-t-il l’avis du Groupe consultatif pour la carboneutralité et fixera-t-il la cible de réduction des émissions d’ici 2035 à 50 à 55 %? Le fera-t-il bientôt? L’échéance du 1er décembre, qui était celle du Canada, est déjà passée.

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie pour votre question, sénatrice, et pour vos efforts soutenus dans ce dossier.

Bien que je ne sois pas en mesure de spéculer sur les futurs engagements possibles, le gouvernement prend des mesures énergiques pour lutter contre les changements climatiques grâce à une série de politiques et de mesures. Permettez-moi de souligner, chers collègues, que, en 2015, selon les projections, les émissions du Canada allaient augmenter de 8 % par rapport aux niveaux de 2005 d’ici 2030, mais, depuis lors, grâce à une série de politiques et de programmes de la part du gouvernement actuel, l’Institut climatique du Canada estime maintenant que les émissions du Canada ont diminué de 8 % par rapport aux niveaux de 2005.

Cela dit, il reste encore beaucoup de travail à faire, chers collègues. Nous ne pouvons pas prendre le risque de recommencer à polluer librement au détriment de l’environnement en supprimant à peu près toutes les mesures qui réduisent effectivement la pollution et qui, en même temps, bâtissent une économie solide et durable.

La sénatrice Coyle : Je trouve que 8 %, c’est assez loin de notre objectif pour 2030.

Sénateur Gold, les rapports du Groupe consultatif pour la carboneutralité recommandent des mesures clés, comme la finalisation du plafond des émissions provenant du secteur pétrogazier, le Règlement sur l’électricité propre, une surveillance plus stricte de la tarification industrielle du carbone et l’adoption d’un budget national du carbone pour remédier aux lacunes du Canada dans la réalisation de ses objectifs en matière d’émissions. Pour respecter ses engagements, le Canada doit agir promptement.

Quelles mesures le gouvernement prend-il pour donner suite à ces recommandations et aider le Canada à atteindre ses objectifs de carboneutralité?

Le sénateur Gold : Merci. Le gouvernement a publié son rapport d’étape 2023. Il s’agit du premier rapport d’étape sur le Plan de réduction des émissions pour 2030. Il recense les stratégies à suivre pour atteindre nos objectifs de carboneutralité pour 2030 d’ici 2050. Le rapport fait également le point sur les progrès accomplis dans la réalisation des objectifs de réduction des émissions décrits dans le Plan de réduction des émissions pour 2030, y compris une mise à jour, mesure par mesure, de l’état d’avancement de la mise en œuvre. Un autre rapport sera publié en 2025, puis en 2027.

Les finances

Le Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes

L’honorable Tony Loffreda : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat.

Lundi, la vérificatrice générale du Canada a publié un rapport au sujet du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes. Nous sommes conscients que cette mesure a offert un soutien essentiel aux propriétaires d’entreprise pendant la pandémie et en sommes reconnaissants. À mon avis, cette bouée de sauvetage financière cruciale a permis à de nombreuses entreprises de traverser la crise et l’incertitude entourant la COVID-19.

Que fait le gouvernement pour récupérer les 17 % des prêts qui n’ont toujours pas été remboursés? Quelle est sa stratégie pour percevoir les 3,5 milliards de dollars estimés dont les bénéficiaires étaient inadmissibles? Comme en fait état la vérificatrice générale, Exportation et développement Canada a administré le programme et versé, au total, pour 49,1 milliards de dollars de prêts.

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie pour votre question, sénateur, ainsi que d’avoir souligné l’importance de ce programme qui, comme je l’ai dit, a aidé près de 900 000 petites entreprises à survivre et à conserver leurs effectifs. En fin de compte, si le gouvernement n’était pas intervenu rapidement, les coûts auraient été dévastateurs pour les Canadiens, les petites entreprises et l’économie.

Pour répondre plus précisément à votre question, je comprends qu’Exportation et développement Canada collabore avec Finances Canada pour déterminer les mesures appropriées à prendre post-financement. Cela comprend l’examen des recours possibles pour récupérer dans le volet des dépenses non reportables ce qu’il en coûterait pour exonérer les bénéficiaires inadmissibles du remboursement de leur prêt ainsi que des implications juridiques.

Le sénateur Loffreda : Merci. Je suis heureux d’apprendre que l’on déploie des efforts en ce sens.

La vérificatrice générale a constaté « que la prévision des coûts, la gestion du rendement et d’autres éléments importants étaient absents des plans d’Exportation et développement Canada pour le recouvrement des prêts en souffrance ». Que fait Exportation et développement Canada, en partenariat avec l’Agence du revenu du Canada, pour s’assurer que ses efforts de recouvrement fonctionnent et que nous optimisons nos ressources? Comme l’a recommandé la vérificatrice générale, Exportation et développement Canada devrait mettre à jour les estimations et les prévisions concernant les prêts en souffrance à recouvrer afin de fournir à l’Agence du revenu du Canada des informations précises pour sa planification et l’affectation de ses ressources.

Le sénateur Gold : Je vous remercie de votre question. Je crois comprendre qu’Exportation et développement Canada a accepté les recommandations de la vérificatrice générale. En outre, cet organisme collaborera avec l’Agence du revenu du Canada et le ministère des Finances Canada pour mettre en place des indicateurs de rendement clés pour les activités de recouvrement pour les prêts en souffrance et les prêts cédés. De plus, l’Agence du revenu du Canada réévaluera ses plans de recouvrement afin d’y inclure des indicateurs de rendement clés propres à la résolution rapide des dossiers.

Finances nationales

Les travaux du comité

L’honorable Scott Tannas : Ma question s’adresse au président du Comité des finances nationales, le sénateur Carignan.

À ce jour, je crois savoir que le comité a tenu trois réunions sur la pratique consistant à inclure des questions non financières dans les projets de loi d’exécution du budget. Il s’agit d’une étude que le Sénat a commandée au Comité des finances en raison de certains problèmes bien connus de nous tous, à savoir la tendance des gouvernements à inclure de plus en plus d’éléments non financiers dans les documents budgétaires.

L’ordre de renvoi relatif à l’étude expire le 31 décembre 2024. Envisagez-vous de présenter une motion pour le prolonger? Si oui, quelle serait la nouvelle date?

[Français]

L’honorable Claude Carignan : Je vous remercie pour la question, monsieur le sénateur Tannas.

Nous avons commencé à étudier votre motion, qui est extrêmement intéressante. Nous avons eu la chance d’entendre différents témoins, notamment l’ancien greffier du Sénat et des représentants de l’Australie, dont une sénatrice australienne qui est présidente du comité des finances. Ils ont tout un processus pour étudier ce type de projet de loi et c’est très intéressant.

Cela demandera plus de temps et il faudra probablement entendre plus de témoins. Il y a des pistes de réflexion intéressantes. Je vais demander au comité directeur du Comité sénatorial permanent des finances nationales de proposer une motion afin de prolonger le délai de cette étude. Nous allons en discuter, mais étant donné que le programme du Comité sénatorial permanent des finances nationales est très chargé, cela ne se fera probablement pas avant juin 2025.

[Traduction]

Le sénateur Tannas : Merci beaucoup, sénateur Carignan.

Prévoyez-vous, quelle que soit la prolongation, que nous pourrions être en mesure d’obtenir un rapport du comité à temps pour — en supposant que nous en obtenions un jour — un projet de loi d’exécution du budget qui viendrait, vraisemblablement, au printemps?

[Français]

Le sénateur Carignan : Je ne sais pas. Il est assez difficile de connaître les intentions du gouvernement en ce qui concerne les finances; nous n’avons toujours pas eu d’énoncé économique de l’automne et nous sommes presque rendus à Noël. Je ne sais pas quel genre de projet de loi ce sera.

Cependant, nous avons actuellement une méthode intéressante permettant de faire une étude préalable en dispersant différents aspects parmi les comités, ce qui aide beaucoup le Comité sénatorial permanent des finances nationales.

[Traduction]

Le Bureau du Conseil privé

La fonction publique fédérale

L’honorable Wanda Thomas Bernard : Sénateur Gold, le mois dernier, Rachel Zellars a publié une étude sur les cadres noirs dans la fonction publique fédérale qui a révélé des détails troublants sur le racisme anti-Noirs dans la fonction publique.

(1440)

Les cadres noirs travaillant dans la fonction publique déclarent souffrir d’anxiété, de dépression, d’idées suicidaires, d’attaques de panique et de stress post-traumatique. Cela se traduit par des problèmes de santé physique et des répercussions négatives sur les relations personnelles. Sénateur Gold, que compte faire le gouvernement pour remédier au problème des droits de la personne que constitue le racisme anti-Noirs dans la fonction publique?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de la question. Je vous remercie de nous rappeler que, malgré tous les efforts déployés et toutes les lois adoptées, des problèmes systémiques sont profondément ancrés dans les milieux de travail et ailleurs. Dire qu’il est inacceptable que des personnes qui sont prêtes à servir le pays — ou, à vrai dire, à travailler dans n’importe quel milieu — subissent de la discrimination et du racisme au point où elles souffrent des troubles que vous avez décrits est un peu court, sans parler du fait que ce n’est pas vraiment une réponse à la question.

Je ne suis pas au courant des mesures précises prévues pour donner suite au rapport et remédier à la situation que vous avez décrite, mais je vais certainement me renseigner auprès des ministres concernés, dans l’espoir d’être instruit des mesures qui peuvent être prises à court terme et au-delà.

La sénatrice Bernard : Sénateur Gold, nous avons entendu parler du recul des mesures favorisant la diversité, l’équité et l’inclusion à l’échelle du pays en raison d’une forme d’opposition aux politiques « woke ». Comment le gouvernement s’attaque-t-il à cette situation?

Le sénateur Gold : Le gouvernement a toujours pensé que la véritable force de nos institutions et de notre pays — comme l’un de nos collègues en a parlé dans son discours inaugural dernièrement — est la diversité. Ce n’est pas seulement une question de justice et d’équité — même si ce l’est bel et bien —, mais aussi de résilience de nos collectivités et de notre pays. Le gouvernement continue de croire en ces valeurs et continuera à en faire la promotion et à les intégrer dans ses politiques.

Les finances

Les Comptes publics

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Monsieur le leader, notre collègue la sénatrice Ross vous a demandé à plusieurs reprises cet automne quand les comptes publics de 2024 seront déposés. Une note publiée récemment par des économistes de la Banque Nationale du Canada dit ceci :

[...] les déficits de l’exercice précédent sont généralement confirmés en octobre, mais cette annonce a été retardée cette année. Techniquement, les autorités fédérales ont jusqu’à la fin de l’année pour publier les chiffres, mais ce retard peut nous amener à penser qu’il ne s’agit pas d’une bonne nouvelle.

Monsieur le leader, les suppositions de ces économistes sont-elles justes? Le gouvernement néo-démocrate-libéral a-t-il dépassé son propre garde-fou budgétaire, à savoir un déficit de 40 milliards de dollars, comme le pense le directeur parlementaire du budget?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je ne suis pas en mesure de commenter les spéculations dont vous parlez. Comme je l’ai dit par le passé, sénatrice, et je regrette que ma réponse ne vous plaise pas, je ne dispose pas d’informations sur la date de dépôt des rapports. Soyez assurée que les sénateurs seront parmi les premiers à savoir quand j’aurai l’occasion de fournir les informations que je ne possède pas pour l’instant.

La sénatrice Martin : Je comprends que vous n’ayez pas la réponse exacte, mais à titre de rappel, en 2019, votre gouvernement a publié sa mise à jour économique et financière de l’automne le 16 décembre, soit quatre jours après l’ajournement du Sénat pour le congé de Noël et trois jours après l’ajournement de la Chambre. Monsieur le leader, votre gouvernement s’engage-t-il à publier la mise à jour économique de cette année pendant que le Parlement siège?

Le sénateur Gold : Madame la sénatrice Martin, vous connaissez très bien, tout comme moi, les enjeux qui empêchent la Chambre des communes de traiter d’autres choses que les journées de l’opposition, les motions de censure et les débats sur les questions de privilège. Je ne suis pas en mesure de prendre et je ne prendrais pas des engagements au nom du gouvernement lorsque je ne dispose pas des renseignements sous-jacents pour le faire.

[Français]

L’immigration, les réfugiés et la citoyenneté

Les niveaux d’immigration

L’honorable Claude Carignan : Monsieur le leader, on apprend aujourd’hui qu’à Montréal, les personnes immigrantes à statut précaire composent désormais plus de la moitié de la clientèle de certains organismes pour les jeunes sans-abri. Ces jeunes ont été attirés par les fausses promesses de Justin Trudeau selon lesquelles ils auraient facilement et rapidement accès à un emploi et à un logement au Canada. Cependant, ils sont sans emploi, sans-abri et sans ressources. Au 30 septembre dernier, il y avait 249 857 demandes d’asile non traitées, alors qu’il y en avait moins de 10 000 quand Justin Trudeau est arrivé au pouvoir. Notre système d’immigration est brisé et cela provoque de la misère humaine. Quel est le plan du gouvernement pour traiter ces 250 000 demandes?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Premièrement, la situation des sans-abri et de ceux et celles qui sont venus ici en cherchant asile, mais qui se retrouvent sans emploi et sans logement, est tragique et déplorable. Cependant, dire que c’est le premier ministre qui les a invités et leur a promis un emploi est exagéré. Le ministre de l’Immigration a annoncé une série de changements et de redressements par rapport à nos cibles d’immigration pour faire en sorte que notre système puisse mieux fonctionner. Finalement, j’ajoute avec tout le respect que je vous dois qu’il est important cette fois-ci que les Canadiens et les leaders du Canada ne soient pas des vecteurs de fausses informations qui circulent dans les médias, ici et chez notre voisin du Sud.

Le sénateur Carignan : Monsieur leader, le 28 janvier 2017, le premier ministre Trudeau a dit ce qui suit :

[Traduction]

À ceux qui fuient la persécution, la terreur et la guerre, sachez que le Canada vous accueillera [...]

[Français]

Il les a invités et leur a dit : « Venez chez nous, on vous accueillera. » Or, on ne leur donne ni emploi ni logement. Il y a 500 000 personnes qui habitent illégalement au Canada. Plus de 5 millions ont un visa temporaire qui ne peut pas être renouvelé. J’ai déjà posé la question et je n’ai pas eu de réponse, mais je la repose : comment votre gouvernement va-t-il faire pour procéder à l’expulsion de ces millions de personnes? Allez-vous admettre que notre frontière est devenue une passoire?

Le sénateur Gold : Franchement, cela me choque. Il est vrai qu’on a des défis et des problèmes, mais le Canada doit toujours rester un endroit qui est ouvert à ceux et celles qui ont besoin de quitter la tyrannie et les menaces. Malheureusement, on ne peut pas tous les accueillir. On fait de notre mieux. Je ne suis pas d’accord pour dire qu’on va fermer la porte à ceux et celles qui sont —

Son Honneur la Présidente : Merci, sénateur Gold.

[Traduction]

Les finances

Les mesures fiscales temporaires

L’honorable Paula Simons : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat. À cette époque de l’année, je me lance à la recherche de mon hanoukkia. Je sais que je l’ai rangée en janvier dernier, mais que je n’arrive pas à la trouver. J’ai remarqué que le congé de TPS crée une exemption pour les arbres de Noël, mais pas pour les hannoukiot ou les ménorahs, les chandelles de Hanouka ou les candélabres qu’on utilise pendant le Kwanzaa. Je me demande donc pourquoi, en 2024, dans un pays aussi multiculturel que le nôtre, on a décidé de ne privilégier que les accessoires de la fête chrétienne, et pas ceux des autres fêtes célébrées durant cette période de l’année.

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question. Je vous encourage à la poser au comité, car il étudie le projet de loi sur cette mesure. En effet, des décisions ont été prises et des choix ont été faits.

En ce qui concerne les hannoukiot, si vous me permettez cette observation, d’habitude, on ne les achète pas chaque année. Dans notre famille, nous avons les mêmes depuis de nombreuses générations.

L’exemple que vous donnez à propos des choix faits dans le cadre de ce projet de loi pourrait s’appliquer à de nombreux autres produits. Il n’en reste pas moins qu’il fallait faire des choix. Je vous encourage à poser vos questions à la ministre, qui comparaîtra au comité aujourd’hui, ou à d’autres fonctionnaires au besoin. Je vous remercie de votre question.

(1450)

La sénatrice Simons : En effet, si je pouvais trouver ma hanoukkia, je n’aurais pas besoin d’en acheter une nouvelle, mais ne peut-on pas en dire autant d’un sapin de Noël artificiel?

Cela m’amène à ma prochaine question. J’adore les livres et je suis ravie qu’ils soient exemptés de TPS. Tous les gens qui figurent sur ma liste de cadeaux peuvent avoir l’assurance que je vais attendre au 15 décembre avant d’acheter leurs livres. Toutefois, je remarque avec intérêt que l’exemption de taxe s’applique uniquement aux livres physiques que l’on peut tenir dans ses mains. Elle ne s’applique pas aux livres électroniques, aux livres audio qu’on achète...

Son Honneur la Présidente : Merci, sénatrice Simons.

Le sénateur Gold : En effet, le congé de TPS ne s’applique pas à tout. On offre un choix aux gens et il leur appartient de prendre leurs propres décisions en conséquence. Cela dit, l’exemption s’applique à un éventail suffisamment large de produits pour aider les personnes moins privilégiées que vous et moi ou n’importe qui dans cette salle. J’espère qu’elles en profiteront pleinement et que cela leur procurera un répit pendant la période des Fêtes.

L’emploi et le développement social

La prestation canadienne pour les personnes handicapées

L’honorable Andrew Cardozo : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement. J’aimerais faire fond sur une précédente déclaration de la sénatrice Petitclerc au sujet des formidables paralympiens qui sont en ville aujourd’hui à l’occasion de la Journée internationale des personnes handicapées.

J’aimerais revenir sur un sujet que j’ai déjà abordé, tout comme bien d’autres sénateurs. Il s’agit de la prestation canadienne pour les personnes handicapées. Savez-vous si le gouvernement va augmenter la maigre somme promise et donner une date d’entrée en vigueur?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question. Merci également d’avoir souligné la présence de nos merveilleux athlètes sur la Colline aujourd’hui. J’étais malheureusement occupé et je n’ai pas pu rencontrer certains d’entre eux comme plusieurs d’entre vous l’ont fait, je l’espère, plus tôt aujourd’hui.

Je n’ai reçu aucune mise à jour au sujet de la prestation pour les personnes handicapées. Comme je l’ai dit, cela fait un certain temps déjà, mais je répète que le gouvernement comprend la déception de bien des gens à l’intérieur et à l’extérieur de la communauté des personnes handicapées. Les montants prévus dans le cadre de cette première mesure historique ne sont pas à la hauteur des attentes des gens. Le gouvernement continue de croire qu’il s’agit d’un programme important et il est impatient de travailler avec les personnes handicapées afin d’en faire plus et d’améliorer les choses. Pour l’instant, je n’ai aucune information au sujet de mesures à venir.

Le sénateur Cardozo : Merci. Soit dit en passant, l’événement a été extraordinaire. C’était fantastique de voir les sénatrices McBean et Petitclerc profiter de la présence de leurs collègues olympiens et célébrer leurs exploits.

Je voudrais poser une question sur les chèques de 250 $ dont le gouvernement parle. Si cette mesure est adoptée, le gouvernement va-t-il prendre les personnes handicapées en considération pour ces chèques, étant donné que les difficultés liées au coût de la vie sont amplifiées pour les personnes handicapées?

Le sénateur Gold : Merci. Comme nous le savons tous, chers collègues, la proposition du gouvernement a fait l’objet de critiques et de recommandations de la part de différents milieux qui souhaitent un élargissement de l’offre. Le gouvernement tient compte de tous ces éléments importants. C’est la raison pour laquelle la partie relative à la TPS a été séparée afin que les Canadiens puissent en bénéficier pendant que l’on travaille sur la question des chèques.

La sécurité publique

Le programme de rachat d’armes à feu

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Monsieur le leader, votre gouvernement m’a déjà révélé que ce qu’il appelle le programme de rachat d’armes à feu a coûté jusqu’à maintenant 67,2 millions de dollars alors que le programme n’existe pas encore.

Selon une réponse à l’une de mes questions écrites obtenue vendredi, le montant versé à des consultants dans le cadre de ce programme bidon s’élève maintenant à 13,3 millions de dollars, ce qui représente une augmentation de 1,8 million de dollars par rapport au montant indiqué dans la réponse précédente que j’ai reçue. Cela signifie, sénateur Gold, que le nouveau total est maintenant de 69 millions de dollars. Par ailleurs, la réponse ne fournissait pas les détails sur ces contrats que j’avais demandés.

Selon la réponse que j’ai reçue en août, la GRC avait dépensé 2,3 millions de dollars pour des consultants, mais la réponse de vendredi dit qu’elle n’a dépensé que 756 000 $. Comment est-ce possible, monsieur le leader? Qu’est-ce que votre gouvernement a à cacher?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Le gouvernement n’a rien à cacher, sénateur Plett. Dans ce dossier complexe, le gouvernement tente de respecter les droits des propriétaires légitimes d’armes à feu tout en essayant de protéger les Canadiens contre le fléau de la violence armée de plusieurs façons. Le programme de rachat est un élément important, mais pas le seul, des efforts du gouvernement pour remédier à cette situation.

Je n’ai pas besoin de rappeler aux sénateurs qui sont ceux qui se sont farouchement opposés à tout projet de loi sur le contrôle des armes à feu dans le passé. Je ne vais pas faire de la politique avec vous à ce sujet. Je vais simplement rappeler à la Chambre et aux Canadiens que le gouvernement est déterminé à adopter des mesures législatives rigoureuses et sérieuses en matière de contrôle des armes à feu et qu’il continuera de le faire.

Le sénateur Plett : Vous faites un meilleur perroquet que le premier ministre.

Les propriétaires d’armes à feu dûment formés et détenant un permis ont compris ce qui se passe, sénateur Gold, même si ce n’est pas votre cas. Ils sont pris pour cible. Pourtant, les gangs inondent les rues d’armes illégales passées clandestinement à la frontière, sénateur Gold. Des émeutiers antisémites brûlent des voitures à Montréal. Pourtant, les néo-démocrates—libéraux et vous, sénateur Gold, pensez que les propriétaires d’armes à feu respectueux des lois sont le problème. Ça suffit. Quand aurons-nous les élections dont les Canadiens ont besoin pour rétablir le gros bon sens?

La sénatrice Martin : Bravo!

Le sénateur Gold : Sénateur Plett, j’essaie de me concentrer sur les enjeux et non les individus. Le fait est que le gouvernement s’attaque sérieusement aux problèmes aux frontières. Son rôle n’est pas de répéter des théories du complot ou de fausses informations selon lesquelles rien ne va plus au pays et aux frontières. C’est tout simplement faux et ce n’est pas responsable, surtout de la part d’un parti qui aspire à diriger notre grand pays.

Le sénateur Plett : Il le dirigera.


ORDRE DU JOUR

Les travaux du Sénat

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, conformément à l’article 4-12(3) du Règlement, j’informe le Sénat que, lorsque nous passerons aux affaires du gouvernement, le Sénat abordera les travaux dans l’ordre suivant : l’étude du douzième rapport du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants, suivie de tous les autres articles dans l’ordre où ils figurent au Feuilleton.

Projet de loi concernant la cybersécurité, modifiant la Loi sur les télécommunications et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois

Projet de loi modificatif—Adoption du douzième rapport du Comité de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants

Le Sénat passe à l’étude du douzième rapport du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants (projet de loi C-26, Loi concernant la cybersécurité, modifiant la Loi sur les télécommunications et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois, avec un amendement et des observations), présenté au Sénat le 3 décembre 2024.

L’honorable Hassan Yussuff propose que le rapport soit adopté.

 — Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui à titre de président du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants pour expliquer l’amendement adopté le 2 décembre par le comité lors de l’étude article par article.

Chers collègues, le projet de loi C-26, Loi concernant la cybersécurité, modifiant la Loi sur les télécommunications et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois, a été présenté au Sénat le 19 juin 2024 et renvoyé au comité le 23 octobre.

Je tiens à remercier les honorables sénateurs de leur travail et les témoins d’avoir pris le temps de comparaître devant le comité.

Nous avons tenu quatre réunions sur le projet de loi C-26 et entendu 31 témoins, y compris le commissaire à la protection de la vie privée, le commissaire au renseignement, des représentants d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada et de Sécurité publique Canada, et des organisations de la société civile. Le comité était prêt à procéder à l’étude article par article de ce projet de loi lundi dernier, le 25 novembre, lorsque le parrain du projet de loi, le sénateur McNair, nous a informés d’erreurs de rédaction technique pouvant avoir de graves conséquences sur l’incidence du projet de loi. Bref, un lien entre le projet de loi C-26 et le projet de loi C-70, qui a reçu la sanction royale en juin, a causé un problème après que le Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes ait retiré l’article 10 du projet de loi C-26. La suppression de cet article a modifié la numérotation des articles restants. Par exemple, l’article 11 est devenu l’article 10. Ainsi, le projet de loi C-70 a abrogé par inadvertance les mauvais articles du projet de loi C-26.

(1500)

Notre comité a décidé de reporter d’une semaine l’étude article par article pour examiner le meilleur moyen de régler ce problème.

Dès lors, la sénatrice LaBoucane-Benson a présenté lundi un amendement de forme au nom du gouvernement pour régler le problème en corrigeant les numéros d’article mentionnés dans le projet de loi C-70 pour que les articles du projet de loi C-26 qui sont abrogés soient les bons. Le comité a adopté l’amendement avec dissidence.

Je vous remercie, chers collègues, pour votre attention.

L’honorable Denise Batters : Sénateur Yussuff, vous avez présenté brièvement l’amendement majeur du gouvernement apporté à ce projet de loi à la séance du comité. Pouvez-vous donner un peu plus de détails à son sujet? Il s’agissait du projet de loi C-70, comme vous l’avez dit, qui est le projet de loi sur l’ingérence étrangère. En raison de sa teneur, les parties qui remplaçaient des composantes du projet de loi C-26 auraient abrogé les articles 12 et 14 du projet de loi C-26. Est-ce que cela n’aurait pas abrogé la majeure partie — les dispositions les plus fondamentales — du projet de loi C-26, en particulier l’article 12?

Le sénateur Yussuff : Tout d’abord, je vous remercie de votre question. Oui, je pense que la description que vous faites de ce qui s’est passé est tout à fait exacte. L’erreur n’a pas été décelée avant que le projet de loi ne soit déposé au Sénat.

Je tiens à remercier le sénateur McNair de l’avoir portée à l’attention du comité avant que nous ne commencions notre étude article par article. Il était approprié que notre comité suspende ses travaux afin d’entendre les explications du gouvernement sur la façon dont il entend corriger le projet de loi pour s’assurer qu’il est conforme à ce qui a déjà été adopté dans le cadre du projet de loi C-70.

L’amendement proposé par le gouvernement, fondé sur l’avis technique que nous avons reçu au comité, nous a convaincus que ce projet de loi fera ce pour quoi il a été conçu. Il garantit que cette mesure législative respectera les obligations de protection du système de cybersécurité canadien, mais fournira également au gouvernement de nouveaux outils qu’il pourra utiliser pour s’assurer que nous pouvons faire face aux menaces à la sécurité nationale qui ont été lancées contre notre pays par des acteurs étrangers. Plus important encore, nous disposons désormais de tous les outils juridiques nécessaires pour garantir qu’une fois que ce projet de loi aura été adopté par le Parlement et qu’il aura reçu la sanction royale, les changements nécessaires devront être présentés par le gouvernement. Nous espérons pouvoir adopter ce projet de loi dans les meilleurs délais.

En ce qui concerne le point que soulève la sénatrice, nous devons veiller, à l’avenir, à ce que les projets de loi envoyés au Sénat soient soumis à un contrôle approprié. Les vérifications nécessaires doivent être faites pour garantir que le Sénat n’adopte pas par inadvertance des projets de loi comportant des lacunes, ce qui pourrait poser de sérieux problèmes puisque nous avons la responsabilité de procéder à un second examen objectif et d’adopter des mesures législatives libres d’erreurs.

Ajoutons que les fonctionnaires présents ont pris note de l’erreur et ont assuré au comité qu’ils tireraient les leçons de cette expérience. Nous espérons qu’ils ont informé la Chambre, comme ils ont informé le Sénat, de l’importance du travail que nous accomplissons. Quand nous constatons que quelque chose cloche, comme dans le cas en question, nous faisons le nécessaire pour corriger le problème.

Cela dit, j’espère que quand nous avons conscience d’un problème, nous pouvons prendre les mesures nécessaires pour y remédier. Je ne crois pas qu’il faille blâmer qui que ce soit pour l’erreur qui s’est produite. Il s’agissait d’un oubli, et il a été détecté à temps, ce qui nous a permis de faire notre travail de manière appropriée. Malheureusement, ce projet de loi devra être renvoyé à la Chambre pour qu’elle puisse s’assurer qu’il est conforme à d’autres textes législatifs adoptés récemment.

La sénatrice Batters : Pour que ce soit clair pour nos collègues ici, étant donné qu’il s’agissait d’une longue étude sur un projet de loi compliqué où nous avons entendu de nombreux témoins, et que l’examen article par article a ensuite été interrompu, les dispositions du projet de loi C-70 sont celles que nous avons étudiées en juin de manière assez rapide et qui, parce que ce projet de loi a été adopté avant le projet de loi C-26, auraient eu pour effet d’abroger la grande majorité du projet de loi C-26, un projet de loi de 90 pages sur la cybersécurité. Quand notre comité a eu l’occasion d’entendre les fonctionnaires sur ce qu’ils feraient pour que cela ne se reproduise plus jamais, sénateur Yussuff, j’ai été un peu interloquée quand les fonctionnaires ont parlé à plusieurs reprises de « cas unique », disant essentiellement que nous ne devrions pas nous inquiéter.

Quelles assurances pensez-vous qu’ils aient données à notre comité qu’une telle erreur ne se reproduirait pas? Il y a une limite à ce que le Sénat peut faire, et nous devons nous fier aux fonctionnaires qui préparent de longs documents compliqués pour éviter de graves erreurs comme celle-ci.

Le sénateur Yussuff : Tout d’abord, je dirais qu’ils ont été suffisamment embarrassés pour reconnaître qu’ils doivent faire mieux. De même, si nous avions eu le projet de loi C-26 d’abord et le projet de loi C-70 ensuite, l’erreur aurait pu être décelée.

Bien entendu, les projets de loi ont été présentés dans le mauvais ordre et, malheureusement, nous avons adopté le projet de loi C-70 avant d’étudier le projet de loi C-26.

Comme beaucoup d’entre nous, et comme être humain, je considère que l’erreur est humaine. Je ne crois absolument pas que les fonctionnaires n’ont pas pris la chose au sérieux. Je pense au contraire qu’ils l’ont prise au sérieux. D’ailleurs, les sénateurs ont pu les interroger.

Quoi qu’il en soit, pour quiconque travaille dans une administration, une erreur de cette envergure est gênante.

Je suis certain qu’ils savent que nous sommes vigilants. De surcroît, ils ont été obligés d’expliquer leur erreur. Certes, lorsque le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants examinera à nouveau le projet de loi et que les fonctionnaires témoigneront, nous pourrions commencer par leur poser la question suivante : « Y a-t-il des erreurs dans ce projet de loi dont nous devrions être au courant? » Cela les obligera peut-être à le lire attentivement avant l’examen article par article.

Chers collègues, lorsque cette erreur a été portée à notre attention, nous avons fait ce qu’il fallait, et cela indique au gouvernement qu’il doit être un peu plus prudent dans la révision des versions définitives des projets de loi qu’il nous soumet. De même, au Sénat, il est de notre responsabilité de veiller à ce que les projets de loi que nous adoptons soient conformes aux autres lois que nous avons déjà adoptées.

L’honorable Flordeliz (Gigi) Osler : Sénateur Yussuff, j’aimerais en savoir davantage sur les observations jointes au rapport qui indiquent qu’il est urgent d’améliorer la cybersécurité des systèmes de santé et les données sur la santé. Pouvez-vous dire au Sénat ce qu’on a dit au comité au sujet de ce besoin pressant?

Le sénateur Yussuff : À ce sujet, les membres du comité savent que le gouvernement fédéral exerce une surveillance sur certains des aspects relevant de Santé Canada. Anciens Combattants Canada, ainsi que le ministère de la Défense nationale et ses employés relèvent du gouvernement fédéral.

Le sénateur Kutcher a indiqué que c’est le gouvernement fédéral qui a rédigé ces observations, que le comité a appuyées. Nous reconnaissons que le gouvernement fédéral devrait prendre sa place dans la gestion des données de santé à l’échelle du pays parce que les travailleurs sous réglementation fédérale ainsi que certains groupes de travailleurs relèvent de sa responsabilité. Bien sûr, il est nécessaire de collaborer avec les provinces, car ce sont elles qui surveillent les données à l’échelon provincial. Nous constatons de plus en plus que des terroristes ou des acteurs étrangers piratent des bases de données provinciales partout au pays et nous devons faire mieux.

L’adoption du présent projet de loi, ainsi que du projet de loi C-70, permettrait de mieux protéger le Canada. Toutefois, j’espère que l’on est conscient que ceux qui gèrent les données de santé au pays doivent collaborer entre eux et avec le gouvernement fédéral pour que ces données soient adéquatement protégées partout au Canada. Chaque fois qu’il s’agit d’une compétence partagée, il faut que ces personnes soient soumises à des normes plus strictes. Plus important encore, il faut appliquer rigoureusement cette mesure législative afin que les Canadiens aient l’assurance que nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour protéger leurs données.

(1510)

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Une voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée avec dissidence, et le rapport, tel que modifié, est adopté.)

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi modifié pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur McNair, la troisième lecture du projet de loi modifié est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

Projet de loi sur la Commission d’examen des erreurs du système judiciaire (Loi de David et Joyce Milgaard)

Projet de loi modificatif—Troisième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Arnot, appuyée par l’honorable sénatrice Clement, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-40, Loi modifiant le Code criminel et d’autres lois en conséquence et abrogeant un règlement (examen des erreurs judiciaires).

L’honorable Wanda Thomas Bernard : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de prendre la parole sur le territoire non cédé du peuple algonquin-anishinabe pour appuyer le projet de loi C-40, Loi modifiant le Code criminel et d’autres lois en conséquence et abrogeant un règlement (examen des erreurs judiciaires).

Je tiens à remercier mon collègue, le sénateur Arnot, un autre défenseur des droits de la personne, d’avoir parrainé ce projet de loi. Comme l’a déclaré le sénateur Arnot, les personnes condamnées à tort sont des victimes du système de justice pénale. Je tiens également à remercier tous mes collègues qui ont contribué à cet important débat.

Hier, la sénatrice Pate a souligné que les femmes autochtones ayant été condamnées à tort au Canada étaient surreprésentées. Elle a également souligné que l’adoption de ce projet de loi représente la première étape d’un processus visant à rendre le système de justice plus équitable.

Aujourd’hui, je souhaite contribuer au débat en attirant votre attention sur trois affaires dans ma province, la Nouvelle-Écosse, qui illustrent également la nécessité d’avoir un accès et un processus plus équitables. Deux de ces affaires font ressortir la nécessité de l’équité raciale, et toutes les trois montrent qu’il faut exercer une surveillance indépendante pour prévenir les échecs systémiques comme ceux de ce type-là.

La première affaire est un cas flagrant de racisme dans le système de justice. En 2013, Randy Riley, un Afro-Néo-Écossais de 19 ans, a été arrêté après qu’un livreur de pizza, Chad Smith, a été abattu en 2010. Randy Riley a été incarcéré pendant sept ans et huit mois. Son inculpation initiale reposait sur le témoignage d’un témoin qui s’est rétracté après le premier procès et avant le deuxième, à la suite d’une « crise de conscience » du témoin.

Le cas de ce jeune Noir originaire de la communauté afro-néo-écossaise historique de Cherry Brook met en évidence les effets du racisme anti-Noirs sur les accusations qui ont été portées contre lui, mais aussi sur sa vie, dont une grande partie a été passée en prison. En raison du racisme anti-Noirs, ce jeune Afro-Néo-Écossais n’a pas obtenu un procès équitable.

Randy Riley a pu exprimer cette réalité avec ses propres mots. Il a lu l’extrait suivant lors de la détermination de sa peine :

Je veux aussi que la famille de la victime sache que je ne leur fais pas porter le fardeau de cette erreur judiciaire; elle est attribuable à la cour, car je ne crois pas avoir été reconnu coupable hors de tout doute raisonnable.

De plus, je ne crois pas que le verdict tient compte de la preuve qui a été présentée contre moi. Il me semble que — bien que je croie, comme tout le monde dans cette cour — personne ne voulait que cette affaire soit fondée sur la race, mais inévitablement, c’est ce qui est arrivé. Et quand il est question de race, on a souvent tendance à détourner le regard. Le gros problème dont personne ne veut parler, c’est la race.

Beaucoup de gens connaissent la deuxième affaire que je vais porter à votre attention. Il s’agit de l’affaire Donald Marshall fils, un Mi’kmaw qui a passé 11 ans en prison après avoir été condamné à tort pour le meurtre de Sandy Seale à Sydney, en Nouvelle-Écosse. M. Marshall n’avait que 17 ans lorsqu’il a été reconnu coupable de ce meurtre et condamné à l’emprisonnement à perpétuité, malgré l’absence de preuves physiques le liant au meurtre.

De plus, il y a des preuves d’intimidation et de faux témoignages de la part des policiers. Même ses avocats — je dis bien ses avocats — doutaient de son plaidoyer et n’ont pas vérifié son récit de l’événement. Cette affaire démontre la nature hostile aux Autochtones et colonialiste des préjugés qui règnent dans de nombreuses sphères du système de justice. Même les avocats de la défense, qui devaient présenter des preuves pour le défendre, n’arrivaient pas à croire qu’il était innocent.

Pour reprendre les propos de Donald Marshall fils : « Ce n’est pas moi le coupable, c’est le système. » Cela nous rappelle, chers collègues, que ces affaires ne sont pas des incidents isolés, mais des échecs caractéristiques de l’ensemble du système judiciaire. L’enquête sur la condamnation injustifiée de M. Marshall a également mis en lumière le fait que la race de la victime, qui était un jeune homme afro-néo-écossais, a également contribué à cette erreur judiciaire. L’affaire Marshall a toutefois servi de catalyseur pour la création de l’Indigenous Blacks and Mi’kmaq Initiative de l’Université Dalhousie, qui vise à remédier à la sous-représentation systémique des voix noires et autochtones dans le domaine du droit.

Je crois que les récits que nous avons entendus dans les divers débats de cette chambre peuvent aussi être des catalyseurs de changement au moyen du projet de loi C-40. En modernisant le processus d’examen, le projet de loi peut servir de rempart contre certains préjugés raciaux, comme dans les cas de Randy Riley et de Donald Marshall fils, pour offrir une plus grande équité raciale dans le processus de justice.

La troisième affaire sur laquelle je souhaite attirer votre attention est celle de M. Glen Assoun. M. Assoun a passé 17 ans en prison pour le meurtre de son ancienne petite amie, Brenda Way. M. Assoun semblait un coupable tout désigné parce qu’il avait un passé complexe, qu’il avait été négligé pendant son enfance, qu’il avait seulement une 6e année et qu’il avait depuis longtemps des problèmes d’alcoolisme et de violence. La situation de M. Assoun illustre clairement comment des Canadiens à la fois pauvres et toxicomanes peuvent être condamnés à tort et tomber dans des failles du système judiciaire en raison de leur situation personnelle.

Honorables collègues, j’appuie le projet de loi C-40 parce que je crois qu’il est possible d’avoir un système de justice qui respecte les principes de responsabilité et d’équité. Je suis favorable à la modernisation du processus d’examen des erreurs judiciaires et à la création d’un organisme d’examen indépendant afin de prévenir les préjugés qui font partie intégrante de notre système judiciaire. Les erreurs judiciaires ont un coût; ce coût, c’est leurs conséquences néfastes sur la vie des personnes condamnées à tort, de leur famille et de leur communauté.

Je vous encourage vivement, chers collègues, à appuyer ce projet de loi afin de prévenir de futures erreurs judiciaires, de renforcer la confiance du public et de soutenir des victimes comme M. Riley, M. Marshall et M. Assoun.

Merci, asante.

L’honorable Denise Batters : La sénatrice Bernard accepterait-elle de répondre à une question?

La sénatrice Bernard : Bien sûr.

La sénatrice Batters : Je vous remercie de votre discours.

Au cours de sa comparution devant le Comité des affaires juridiques, le ministre de la Justice a mentionné à plusieurs reprises la surreprésentation des Autochtones et des Noirs parmi les personnes condamnées à tort. Je veux citer deux déclarations qu’il a faites.

Il a dit :

Ce à quoi je m’attendrais de la part de cette commission, c’est que si nous voulons donner un sens au fait que nous avons besoin de commissaires, ces derniers doivent refléter la diversité du Canada, en portant une attention particulière aux groupes surreprésentés comme les Noirs et les Autochtones au pays [...]

Il a ajouté :

Ce que nous essayons maintenant de faire avec ce projet de loi, c’est de contribuer à l’avancement de la lutte contre le racisme systémique et anti-noir et de la lutte contre le racisme envers les Autochtones, à vrai dire, et de faire progresser la réconciliation. Ce projet de loi représente une façon directe d’y arriver.

(1520)

Sénatrice Bernard, vous êtes sans doute au courant que dans le rapport du juge LaForme sur le sujet, on recommande qu’il y ait au moins un commissaire autochtone et un commissaire noir. Toutefois, le projet de loi C-40 exige seulement que le ministre « [tienne] compte » de la situation, sans offrir aucune garantie concrète à cet égard.

Compte tenu du fait que le gouvernement Trudeau a mis beaucoup de temps à rédiger le projet de loi après la publication du rapport LaForme, que pensez-vous du fait qu’il n’ait pas prévu de dispositions dans le projet de loi C-40 pour garantir concrètement la nomination d’un commissaire autochtone et d’un commissaire noir?

La sénatrice Bernard : Je vous remercie de votre question, sénatrice Batters.

Premièrement, je trouve qu’une recommandation qui préciserait « un Noir et un Autochtone » pourrait être perçue comme une sorte de geste symbolique. Je préférerais que, lorsque la commission sera créée, une attention particulière soit accordée à plus d’une personne; je souhaite que la représentation au sein de cette commission comprenne plus d’une personne d’ascendance africaine et plus d’une personne autochtone.

La sénatrice Batters : C’est bien vu, mais que pensez-vous de la possibilité d’écrire « au moins un », ou quelque chose du genre? La commission comptera entre quatre et huit commissaires — nous verrons combien il y en aura réellement — mais, actuellement, il est possible qu’il n’y ait aucune représentation.

La sénatrice Bernard : Encore une fois, je pense que la formulation « au moins un » reviendrait également à un geste symbolique, et je l’éviterais aussi.

Vous avez raison. Il est possible qu’aucun des commissaires ne représente ces communautés. Je considère qu’il est de notre devoir et de notre responsabilité de demander des comptes au gouvernement, de sorte qu’on posera continuellement des questions à ce sujet lorsqu’on prendra connaissance des nominations.

Je propose d’organiser des consultations dans le cadre du processus menant à la nomination des commissaires.

L’honorable Bernadette Clement : La sénatrice Bernard accepterait-elle de répondre à une question?

La sénatrice Bernard : Oui.

La sénatrice Clement : Sénatrice Bernard, vous qui avez joué pour moi le rôle de marraine au Sénat, je vous remercie de votre discours. Je vous remercie de nous avoir parlé de trois affaires percutantes.

Nous avons entendu de très bons discours au sujet du projet de loi C-40. Le Comité des affaires juridiques a entendu des témoignages convaincants et pertinents. Toutefois, je ne pense pas qu’il a été suffisamment question de ce dont vous avez parlé aujourd’hui, soit du racisme systémique anti-Noirs — pensons même à vos interventions à la période des questions aujourd’hui.

Nous disposons maintenant de la Stratégie canadienne en matière de justice pour les personnes noires, qui compte 114 recommandations pour justement s’attaquer à certains des problèmes que vous avez soulignés en lien avec le racisme systémique anti-Noirs. La stratégie a été établie en juin.

Avez-vous des idées sur ce que le gouvernement fédéral — peu importe le parti qui le forme — devrait faire avec une stratégie en matière de justice pour les personnes noires qui cible le racisme systémique anti-Noirs?

La sénatrice Bernard : Je vous remercie de la question. C’était un honneur d’être votre marraine.

En tant que Néo-Écossaise, je dois dire que l’idée d’une telle stratégie nationale a découlé d’une stratégie de la Nouvelle-Écosse pour établir une justice raciale au sein du système de justice. L’existence d’une stratégie est louable. Je m’attends à ce que des mesures soient prises dans le cadre de cette stratégie. Établir une stratégie n’est que le premier pas. Cette étape permet de sensibiliser la population, de faire plus d’analyses et d’agir, mais il ne faut pas oublier un quatrième aspect, c’est-à-dire la reddition de comptes. La stratégie devrait tous nous obliger à rendre des comptes à l’échelle du pays.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

Projet de loi modifiant le Code criminel et la Loi sur la protection d’espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international et interprovincial

Trente et unième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles—Ajournement du débat

Le Sénat passe à l’étude du trente et unième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles (projet de loi S-15, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur la protection d’espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international et interprovincial, avec des amendements et des observations), présenté au Sénat le 3 décembre 2024.

L’honorable Brent Cotter propose que le rapport soit adopté.

 — Honorables sénateurs, il s’agit du deuxième rapport portant sur le projet de loi S-15, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur la protection d’espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international et interprovincial. Le projet de loi a été étudié par le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles d’avril à juin 2024. Il a été renvoyé au Sénat en juin 2024 par la sénatrice Jaffer, alors présidente du comité. En tant que projet de loi d’initiative ministérielle parrainé par le sénateur Klyne, il a fait l’objet d’amendements importants au cours de l’étude en comité et a été renvoyé avec des observations.

Le 3 octobre, le sénateur Plett, porte-parole pour le projet de loi, a soulevé un recours au Règlement concernant la recevabilité de certains amendements proposés par le comité. Le 10 octobre 2024, la Présidente a jugé que certains éléments du rapport dépassaient la portée du projet de loi. Elle a renvoyé le projet de loi au comité pour qu’il réévalue et supprime les dispositions contestées.

En raison des nombreux « tentacules », si je peux les appeler ainsi, de la « disposition de Noé », qui est irrecevable, il a fallu procéder à une opération, une tâche qui, comme vous pouvez l’imaginer, est très dangereuse à confier à des avocats. Heureusement, l’équipe de la Bibliothèque du Parlement, notre greffière et le légiste nous ont apporté une aide précieuse dans l’exercice de cette fonction.

La réévaluation a eu lieu le 27 novembre 2024. Dans le cadre de ce processus, le comité a revu à la fois le projet de loi et son rapport initial, supprimant plusieurs amendements substantiels et peaufinant le préambule.

L’opération exigeait la suppression de la « disposition de Noé », disposition qui aurait permis au gouverneur en conseil d’ordonner qu’un « animal désigné », c’est-à-dire d’autres espèces d’animaux non domestiques vivant en captivité, telles que les grands félins et d’autres peut-être, soit aussi couvert par les protections et les interdictions prévues dans le projet de loi S-15 pour les éléphants et les grands singes. Car, à l’origine, le projet de loi visait à protéger les éléphants et les grands singes et à interdire leur captivité.

Par conséquent, la définition et les mentions d’« animal désigné » ont également été éliminées. La suppression de ces dispositions rétablit la portée initiale du projet de loi, de sorte qu’il vise précisément à protéger les éléphants et les grands singes.

Les autres rajustements dignes de mention comprennent l’annulation de l’expansion proposée de l’exception relative aux soins vétérinaires à l’article 1 du projet de loi pour revenir à la formulation initiale ainsi que la suppression de la mention de « sécurité publique » qui avait été ajoutée dans le préambule, de manière à remettre l’accent sur le risque de cruauté envers les éléphants et les grands singes, comme c’était initialement.

Je vais maintenant résumer les amendements qui demeurent dans le rapport du comité.

Le préambule de la version initiale du projet de loi S-15 disait que le Parlement reconnaît que l’opinion publique sur la captivité de certaines espèces animales non domestiques a évolué. Le comité a amendé le préambule pour en supprimer cette déclaration. À l’origine, le préambule disait également que le Parlement :

[...] est d’avis que la science établit que certains animaux, notamment les éléphants et les grands singes, ne doivent pas vivre en captivité en raison de la cruauté que cela représente [...]

Le comité a supprimé cette mention de la « science » et a remplacé « cruauté » par « risque de cruauté ».

Le comité a également modifié la partie du préambule qui, à l’origine, disait que le Parlement reconnaît que la captivité des éléphants et des grands singes « est justifiée dans certaines circonstances », de manière à dire plutôt dire qu’il reconnaît que leur captivité « peut » être justifiée.

Un autre article se rapporte au fait de donner ces animaux en spectacle ou de les utiliser comme moyen de transport. Le comité a amendé l’article 1 pour préciser que l’utilisation d’un éléphant, d’un grand singe ou d’un animal désigné comme moyen de transport — nous avons dû supprimer la référence aux « animaux désignés », comme je l’ai déjà mentionné —, notamment en ce qui concerne les éléphants, constituerait une infraction criminelle. Le projet de loi interdit déjà de les donner en spectacle. Cet amendement vise à interdire explicitement les promenades à dos d’éléphant au Canada.

(1530)

Maintenant, en ce qui concerne les programmes de recherche scientifique à des fins de conservation — il s’agit des articles 1 et 5 du projet de loi —, le projet de loi initial énonçait des exceptions autorisant la possession, la reproduction et la fécondation pour permettre la reproduction naturelle d’espèces visées par la loi, notamment quand le bien-être de l’animal est en jeu dans le cadre d’un programme de recherche scientifique ou de conservation. Comme il y avait des craintes que le libellé actuel de « recherche scientifique » soit trop large, le comité — je regarde la marraine de cet amendement — a amendé l’article 1 pour préciser que le « programme de recherche scientifique » doit être mené à des fins de conservation, en soulignant le lien entre la recherche et l’amélioration de la viabilité à long terme de l’espèce à l’état sauvage.

Une modification corrélative a été apportée à la Loi sur la protection d’espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international et interprovincial — un très long libellé pour décrire en quoi cette loi consiste, mais je pense que vous avez compris. Cette loi régit le processus administratif de délivrance de permis lié à la possession, à l’importation ou à l’exportation d’animaux.

J’en arrive à la définition d’un grand singe. Le comité a modifié la définition initiale de « grand singe » afin de préciser et d’énumérer expressément les espèces qui sont visées par cette définition, et je me tourne maintenant vers la marraine de cet amendement, la sénatrice Batters. La nouvelle définition précise qu’un grand singe désigne tout singe du genre Gorilla, Pan ou Pongo, ce qui comprend le gorille, le bonobo, le chimpanzé et l’orang-outan. J’arrive à la fin.

L’article 1 du projet de loi porte sur les ordonnances des tribunaux rendues dans l’intérêt de l’animal. Les infractions créées dans le projet de loi S-15 sont punissables sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire et sont passibles d’une amende maximale de 200 000 $. Outre les dispositions du Code criminel relatives à la confiscation et à la détermination de la peine, le comité a modifié l’article 1 — je crois qu’il s’agissait de l’amendement de la sénatrice Simons — afin d’autoriser expressément les tribunaux à ordonner au délinquant de prendre, à ses frais, certaines mesures dans l’intérêt de l’animal à l’égard duquel l’infraction a été commise ou d’autres animaux dont le délinquant a la possession et qui appartiennent à la même espèce ou à une espèce étroitement apparentée. Ces mesures pourraient inclure ce qui suit : modifier les conditions physiques ou sociales de la captivité, reloger l’animal dans un autre établissement ou sanctuaire, ou abandonner le droit de propriété sur l’animal et confier celui-ci à l’autorité responsable du bien-être des animaux.

La disposition concernant l’entrée en vigueur — l’article 11 — a également été amendée. Je crois que c’était une proposition du sénateur Plett. L’amendement du comité visait à repousser d’un an la date d’entrée en vigueur après la sanction royale. Ce report permettra à l’industrie d’adapter ses pratiques et ses installations de façon à être conforme au nouveau régime pénal et réglementaire relatif aux éléphants et aux grands singes gardés en captivité.

En conclusion, chers collègues, de l’avis des membres du comité, le rapport présenté aujourd’hui s’aligne sur l’objectif principal du projet de loi S-15 — renforcer la protection des éléphants et des grands singes en captivité — tout en précisant ses dispositions par souci de clarté et de faisabilité. De l’avis du comité, le rapport est aussi entièrement conforme à la décision de la présidence sur le rappel au Règlement du sénateur Plett.

Je tiens à remercier mes collègues du comité pour leur travail diligent et collaboratif en réponse à la décision de la présidence et j’attends avec impatience que mes collègues poursuivent l’examen de la question au cours du débat. Je vous remercie.

Des voix : Bravo!

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

[Français]

Projet de loi sur la responsabilité et le registre des agents d’influence étrangers

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Housakos, appuyée par l’honorable sénateur Wells (Terre-Neuve-et-Labrador), tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-237, Loi établissant le registre des agents d’influence étrangers et modifiant le Code criminel.

L’honorable Bernadette Clement : Honorables sénateurs, je constate que cet article en est à son 15e jour et je ne suis pas prête à intervenir. Par conséquent, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 4-14(3) du Règlement, je propose l’ajournement du débat pour le temps de parole qu’il me reste.

Son Honneur la Présidente : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(Le débat est ajourné.)

(1540)

[Traduction]

La Loi sur la Gendarmerie royale du Canada

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice McCallum, appuyée par l’honorable sénatrice White, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-271, Loi modifiant la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada.

L’honorable Marilou McPhedran : Honorables sénateurs, je tiens à souligner que le Parlement du Canada est situé sur les territoires non cédés des Premières Nations algonquines et anishnabeg.

Il y a quelque temps, la sénatrice McCallum a présenté le projet de loi S-271, Loi modifiant la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, et le projet de loi S-272, Loi modifiant la Loi sur le directeur des poursuites pénales, qui lui est connexe. J’invite tous les sénateurs à relire ses discours, qui fournissent une analyse exhaustive et une justification solide de l’adoption de ce projet de loi que, après avoir consulté des experts des Premières Nations, j’ai le plaisir d’appuyer.

La Constitution du Canada reconnaît la souveraineté inhérente des peuples autochtones. Pourtant, après plus de 140 ans, la plupart des Premières Nations sont assujetties à la Loi sur les Indiens, à moins qu’elles n’aient réussi à négocier un régime d’autonomie gouvernementale viable. La Loi sur les Indiens établit une forme limitée d’administration locale, sans prendre en compte les circonstances particulières de chacune des communautés. En revanche, les Premières Nations autonomes peuvent élaborer leurs propres lois et leurs propres politiques, en plus de disposer d’un pouvoir de décision dans un vaste éventail de domaines, notamment à l’égard de questions internes ou faisant partie intégrante de la culture et des traditions de leur communauté.

Ce projet de loi et son pendant, le projet de loi S-272, visent à résoudre un dilemme juridique relatif à l’applicabilité, ou à la perception d’inapplicabilité, des lois créées par les Premières Nations autonomes qui ne relèvent pas de la Loi sur les Indiens. Le projet de loi S-271 traite des questions de maintien de l’ordre et d’application des lois des Premières Nations, et le projet de loi S-272 traite des poursuites pénales liées à ces lois.

Honorables collègues, supposons qu’un gouvernement au pays mette en place des mesures législatives pour se rendre compte par la suite que les forces policières ne les appliquent pas et qu’elles ne donnent pas lieu à des accusations et à des poursuites devant les tribunaux. Selon vous, combien de temps cette situation durerait-elle? Des décennies? Sûrement pas.

Le grand chef Garrison Settee, de Manitoba Keewatinowi Okimakanak Inc., a déclaré ce qui suit devant un comité parlementaire de l’autre endroit :

Les règlements administratifs pris par les Premières Nations [...] ne sont pas mis en application par les autorités policières et n’ont pas fait l’objet de poursuites au Manitoba depuis 25 ans.

Ce projet de loi propose deux modifications simples, mais efficaces, à la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada. Premièrement, il ajoute le terme « texte législatif de première nation » aux définitions. Il ne s’agit pas d’un nouveau terme. Ce terme est déjà défini dans la loi, plus précisément dans la Loi sur l’Accord-cadre relatif à la gestion des terres de premières nations, qui la définit ainsi :

Loi ou autre texte de nature législative adopté par une première nation, conformément à l’accord-cadre et à son code foncier.

Deuxièmement, il modifie la Loi sur la GRC pour définir ainsi les fonctions des agents de la paix de la GRC, à l’article 18 :

Sous réserve des ordres du commissaire, les membres qui ont qualité d’agent de la paix sont tenus :

a) de remplir toutes les fonctions des agents de la paix en ce qui concerne le maintien de la paix, la prévention du crime et des infractions aux lois fédérales et à celles en vigueur dans la province où ils peuvent être employés, ainsi que l’arrestation des criminels, des contrevenants et des autres personnes pouvant être légalement mises sous garde [...]

La modification de l’article 18 proposée dans le projet de loi ajoute les « textes législatifs de premières nations » à la liste des lois fédérales et provinciales que la GRC a le pouvoir et l’obligation d’appliquer. Par conséquent, le texte modifié se lirait comme suit :

[...] la prévention du crime et des infractions aux lois fédérales, à celles en vigueur dans la province où ils peuvent être employés et aux textes législatifs de premières nations [...]

Chers collègues, l’application de la loi par les Premières Nations sur leurs terres est essentielle à l’autodétermination et l’autonomie gouvernementale. Au cours des dernières décennies, le Canada a adopté des lois visant à remédier aux lacunes structurelles de la Loi sur les Indiens, à abroger ses dispositions désuètes, à moderniser les relations entre le gouvernement et les Autochtones et à reconnaître et à renforcer l’autonomie des Premières Nations et leur autonomie gouvernementale. Voici trois exemples.

Premièrement, l’Accord-cadre relatif à la gestion des terres des Premières Nations est un accord de gouvernement à gouvernement qui a été élaboré et dirigé par les Premières Nations, et qui a été signé par 13 Premières Nations et le Canada le 12 février 1996. Il visait à créer de nouveaux pouvoirs législatifs améliorés pour favoriser l’autodétermination des Premières Nations, principalement en remplaçant 44 articles de la Loi sur les Indiens par des lois des Premières Nations au moyen d’un code foncier élaboré et approuvé par la communauté. Au départ, ce code faisait partie du projet de loi C-49, la Loi sur la gestion des terres des premières nations de 1999, qui a été remplacée par la Loi sur l’Accord-cadre relatif à la gestion des terres de premières nations de 2022, qui est plus complète.

L’accord-cadre a élargi l’éventail des pouvoirs autonomes que les Premières Nations peuvent exercer : ces pouvoirs n’étaient plus laissés à la discrétion du gouverneur en conseil ou du ministre. Une fois signataire de l’accord-cadre, une Première Nation est habilitée à créer un code foncier qui décrit comment les membres de la communauté collaboreront à l’élaboration de lois et de politiques visant à gouverner et à gérer les terres et les ressources de leur réserve.

En novembre 2024, 213 Premières Nations avaient signé cet accord-cadre, et 122 d’entre elles avaient adopté leur propre code foncier.

Deuxièmement, le projet de loi C-428, la Loi de 2014 sur la modification et le remplacement de la Loi sur les Indiens, a éliminé la condition préalable de surveillance du ministre en ce qui concerne la présentation, l’entrée en vigueur et l’abrogation de règlements administratifs. Autrement dit, le projet de loi visait à accorder aux Premières Nations l’autonomie et la responsabilité à l’égard de l’élaboration, de l’adoption et de l’entrée en vigueur de règlements administratifs, ainsi que de la gouvernance quotidienne de leurs communautés.

Malheureusement, malgré l’intention du Parlement de renforcer les pouvoirs législatifs associés à l’autodétermination des Premières Nations, les projets de loi C-49 et C-428 ont créé des régimes législatifs des Premières Nations qui sont « en suspens » : les lois en question ne sont pas appliquées par la GRC et le Service des poursuites pénales du Canada n’engage pas de poursuites.

Voici ce qu’ont dit le chef Robert Louie et le chef Keith Blake, du Conseil consultatif des terres des Premières Nations, lorsqu’ils ont comparu à l’autre endroit :

Quantité de Premières Nations ont connu de grands succès en gouvernant leurs terres en vertu de l’Accord-cadre, opérant un changement révolutionnaire assorti d’avancées dans la législation, de la reprise du contrôle sur leurs terres et l’environnement, de changements considérables dans les finances et la taxation, de projets économiques de plusieurs millions de dollars, et plus encore. En dépit de ces succès, il existe une frustration immense au sujet des difficultés que nous rencontrons concernant l’application des lois des Premières Nations. Il ne peut pas y avoir d’autonomie gouvernementale efficace sans application des lois.

Ils ont ensuite souligné que « l’indépendance par rapport à la Loi sur les Indiens et à son régime inadéquat est inutile si les lois des Premières Nations ne sont pas appliquées. »

Avant de passer à mon troisième exemple, je trouve important de mentionner les hommages qui ont été rendus hier au sénateur Murray Sinclair, connu sous le nom spirituel de Mazina Giizhik-iban. On a notamment souligné le rôle qu’il a joué dans l’adoption du projet de loi C-15, qui oblige le Canada à mettre en œuvre les principes de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Selon les articles 18, 19 et 20 de la déclaration, le Canada doit respecter le droit qu’ont les Premières Nations de participer à la prise de décisions conformément à leurs propres procédures, ainsi que leur droit de conserver et de développer leurs propres institutions décisionnelles.

L’article 26 de la Déclaration exige que les États :

[...] accordent reconnaissance et protection juridiques à ces terres, territoires et ressources [...] en respectant dûment les coutumes, traditions et régimes fonciers des peuples autochtones concernés.

Chers collègues, dans l’exercice de leurs responsabilités, les policiers sont quotidiennement appelés à faire preuve de discernement quant à la meilleure façon d’exécuter les fonctions qui leur ont été confiées. Chaque situation est unique. Chaque situation exige un jugement attentif sur la manière de résoudre le conflit. Lorsqu’ils envisagent de porter ou non des accusations, les policiers exercent leur pouvoir discrétionnaire pour évaluer des facteurs tels que la nature de l’infraction, la sécurité, les facteurs socio-économiques, les souhaits de la victime et les autres possibilités de désamorçage ou de résolution du conflit. Des témoins ont toutefois indiqué au comité parlementaire de l’autre endroit que la réalité sur le terrain est différente. La Nation des Tla’amins a déclaré :

(1550)

la Gendarmerie royale du Canada refuse souvent d’appliquer les lois des gouvernements autochtones signataires d’un traité ou d’un code foncier, car elle estime que ces lois s’apparentent à des « règlements municipaux ». Cette interprétation est erronée, car il s’agit de lois;

Des représentants de la Première Nation K’ómoks a raconté que la Gendarmerie royale du Canada refuse d’appliquer les lois anti‑intrusion liées au code foncier des Premières Nations :

La GRC a dit qu’elle ne pouvait pas [...] accuser [...]

 — les contrevenants —

[...] d’infraction au code foncier [...] sous prétexte que nos lois ne sont pas de « vraies lois ». La Couronne n’a pas intenté de poursuites parce qu’elle ne reconnaissait pas nos lois, ni le pouvoir que nous avions de créer ces lois [...]

Le chef Louie, au nom du Conseil consultatif des terres des Premières Nations, qui représente plus de 100 Premières Nations ayant promulgué un code foncier, résume ainsi la situation :

De nombreuses Premières Nations qui ont un code foncier se sont heurtées au refus de forces policières lorsqu’elles ont demandé de l’aide, ces forces évoquant des préoccupations au sujet de la validité des dispositions législatives sur les codes fonciers et de la responsabilité pouvant être imputée aux policiers, ou bien une incertitude quant aux parties qui prendraient en charge les poursuites si des accusations étaient portées. Il a été difficile jusqu’ici de se mettre d’accord avec des procureurs fédéraux ou provinciaux pour aborder les lois des Premières Nations au titre de l’Accord-cadre [...]

Des représentants de la Gendarmerie royale du Canada ont appuyé ses arguments lors de leur témoignage devant le comité de l’autre endroit. Le sergent d’état-major de la GRC Ryan How a indiqué :

Après 2014, nous n’avons plus été en mesure d’appliquer les règlements, et cela a provoqué une friction immédiate avec l’ensemble de la police, alors perçue comme celle qui avait soudainement cessé de le faire. C’était perçu comme notre décision.

Il ajoute ensuite :

Mon message à la Première Nation était : la GRC est avec vous. Nous vous soutenons et nous voulons que cela se produise, mais nous ne pouvons pas le faire sans qu’il y ait des poursuites.

Ces témoignages sont confirmés par les recherches et le travail de revendication des universitaires et des experts en droit autochtone. Je cite l’expert en droit autochtone Nick Sowsun :

Du point de vue d’un corps policier, lorsqu’un retrait forcé d’une réserve est demandé, le chef de police ou le commandant du détachement doit évaluer s’il veut allouer du temps et des ressources à un règlement qui n’a aucune chance d’être mis en œuvre parce qu’aucune cour territoriale ou provinciale ne le reconnaît. De nombreux corps policiers estiment que les règlements administratifs sous le régime de la Loi sur les Indiens n’ont pas la même légitimité que les règlements fédéraux, provinciaux, territoriaux ou municipaux et qu’il ne vaut pas la peine de risquer d’engager la responsabilité et d’y consacrer les ressources nécessaires pour les faire respecter.

L’application des lois fédérales et les poursuites connexes relèvent du Service des poursuites pénales du Canada. Cette autorité de poursuite nationale et indépendante pour les infractions fédérales fournit des conseils juridiques aux organismes d’application de la loi. Les représentants de ce service ont dit au comité de la Chambre qu’il n’intente de poursuites qu’à l’égard des règlements administratifs qui ont fait l’objet d’un examen officiel, mais il n’y a aucun examen ministériel obligatoire des dispositions législatives sur les codes fonciers des Premières Nations. Devinez ce qui ne fait pas l’objet d’un examen.

Le chef Keith Blake a habilement exposé ce cercle vicieux :

La plupart des administrations du pays ne reconnaissent pas ou ne poursuivent pas les infractions régies par ces lois. La plupart des communautés autochtones du pays se heurtent au refus ou à la réticence des procureurs de la Couronne provinciaux ou fédéraux, qui ne veulent pas intenter de poursuites pour des infractions régies par des lois autochtones.

Chers collègues, les forces de l’ordre et les services des poursuites sont deux entités qui sont distinctes, mais qui ont une incidence mutuelle directe et qui doivent souvent compter l’une sur l’autre pour atteindre leurs objectifs, dans une relation d’interdépendance. Cependant, au fil des générations, ce modèle n’a jamais répondu aux besoins des Premières Nations, d’où les régimes de lois « en suspens » des Premières Nations. Autrement dit, c’est un vrai gâchis.

Les causes de ce gâchis législatif et administratif sont connues. Des solutions existent. Ce qui manque, c’est la volonté politique, et c’est pour cette raison que nous sommes saisis du projet de loi S-271 et du projet de loi S-272. La Loi sur les Indiens elle-même ne précise pas si la responsabilité de poursuivre les infractions aux règlements incombe aux provinces et aux territoires, au gouvernement fédéral ou aux Premières Nations elles-mêmes. Bien souvent, en l’absence de leadership fédéral, provincial et territorial coordonné dans ce dossier, aucun gouvernement fédéral, provincial ou territorial ne choisit de respecter les lois des Premières Nations.

Chers collègues, il s’agit d’une question complexe. Les défis et les obstacles en vue d’une solution claire nécessitent un examen en bonne et due forme, ce qui est précisément la fonction des comités du Sénat. Je félicite la sénatrice McCallum pour le soutien qu’elle apporte aux Premières Nations de tout le pays qui ont du mal à protéger leur communauté. Je vous saurais gré d’envoyer le projet de loi S-271 à un comité pour une étude plus approfondie. Je vous remercie. Meegwetch.

Des voix : Bravo!

L’honorable Gwen Boniface : Accepteriez-vous de répondre à une question, sénatrice McPhedran?

La sénatrice McPhedran : Oui.

La sénatrice Boniface : Merci beaucoup. Je suggère peut-être d’inclure ceci dans cette étude, mais étiez-vous au courant qu’en Ontario — car nous sommes une province distincte et la GRC n’y joue pas ce rôle —, les Premières Nations de la nation anishinabek ont trouvé une solution pour cela et réussissent à tenir des procès dans un tribunal à Sault Ste. Marie? Êtes-vous d’accord pour dire qu’il pourrait s’agir d’un modèle intéressant à examiner? Il s’agit en fait d’une solution que les Premières Nations ont conçue elles-mêmes.

La sénatrice McPhedran : Je vous remercie beaucoup de la question et des renseignements, sénatrice Boniface. Je suis d’accord. Dans mon prochain discours, je parlerai d’une entreprise semblable au Manitoba. Merci.

(Sur la motion de la sénatrice Osler, au nom du sénateur Prosper, le débat est ajourné.)

La Loi sur le directeur des poursuites pénales

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice McCallum, appuyée par l’honorable sénatrice White, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-272, Loi modifiant la Loi sur le directeur des poursuites pénales.

L’honorable Marilou McPhedran : Honorables sénateurs, je suis très heureuse de prendre la parole pour appuyer le projet de loi S-272, Loi modifiant la Loi sur le directeur des poursuites pénales. Je rappelle à mes collègues qu’il s’agit d’une mesure législative complémentaire au projet de loi S-271, Loi modifiant la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, dont je viens de parler.

Comme ces deux projets de loi sont étroitement liés, je renvoie tous les honorables sénateurs à mon discours plus complet, car j’espère que mon intervention sera brève. Encore une fois, j’exhorte tous les sénateurs à examiner les deux discours prononcés par la sénatrice McCallum au sujet de ces projets de loi.

En 2021, le Comité des affaires autochtones et du Nord de la Chambre des communes a mené une étude approfondie sur l’application de la loi dans les réserves des Premières Nations en tant que composante essentielle de leur autonomie gouvernementale et de leur autodétermination. Pour ce faire, le comité s’est penché, premièrement, sur l’application des lois et les poursuites; deuxièmement, sur un financement ciblé pour l’application de la loi; troisièmement, sur la Loi sur la gestion des terres des premières nations; quatrièmement, sur le traitement des certificats de reconnaissance de dette des Premières Nations; cinquièmement, sur le traitement des contraventions données par les Premières Nations; sixièmement, sur les ententes d’application de la loi avec des agents de police; septièmement, sur le renforcement des capacités d’application de la loi.

Le comité a été concluant en évaluant que les Premières Nations se heurtent à des obstacles pour faire appliquer leurs lois et leurs règlements. Le rapport du comité, déposé à l’autre endroit en juin 2021, comprenait 10 recommandations à l’intention du gouvernement axées sur le besoin urgent de remédier au manque d’application des lois et des règlements des Premières Nations. Il convient de souligner que les recommandations présentées dans le rapport visaient à faire avancer ce dossier à court terme, les auteurs reconnaissant que, dans de nombreux cas, des solutions à plus long terme sont encore nécessaires.

Veuillez noter qu’au cours des dernières décennies, diverses modifications ont été apportées afin de moderniser la Loi sur les Indiens. Elles visaient toutes à accroître les pouvoirs législatifs et d’autonomie gouvernementale des Premières Nations. Je songe notamment à une mesure législative historique, le projet de loi C-49, Loi sur la gestion des terres des Premières Nations, en 1999. Il a été remplacé par la Loi sur l’Accord-cadre relatif à la gestion des terres de premières nations, plus exhaustive, en 2022.

Cet accord-cadre a élargi la gamme des pouvoirs autonomes des Premières Nations et éliminé la nécessité d’une approbation de la part du gouverneur en conseil ou du ministre. Selon l’accord-cadre, une Première Nation a l’autorité d’établir un code foncier indépendant qui décrit comment la communauté va collaborer afin d’élaborer des règlements et des politiques de gouvernance et de gestion de ses terres et de ses ressources.

Le projet de loi C-428, Loi sur la modification et le remplacement de la Loi sur les Indiens, a été une autre mesure législative clé adoptée en 2014. Cette loi a éliminé la surveillance du ministre en ce qui trait à la présentation, à l’entrée en vigueur et au rejet de règlements administratifs et a donné aux Premières Nations plus d’autonomie et de responsabilités...

Son Honneur la Présidente intérimaire : Je suis désolée, sénatrice McPhedran.

(À 16 heures, conformément à l’ordre adopté par le Sénat le 21 septembre 2022, le Sénat s’ajourne jusqu’à 14 heures demain.)

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