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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 45e Législature
Volume 154, Numéro 42

Le jeudi 4 décembre 2025
L’honorable Raymonde Gagné, Présidente


LE SÉNAT

Le jeudi 4 décembre 2025

La séance est ouverte à 13 h 30, la Présidente étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

Les travaux du Sénat

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat, je demande :

Que, nonobstant toute disposition du Règlement ou tout ordre antérieur, pour la séance d’aujourd’hui, les déclarations des sénateurs soient prolongées d’au plus six minutes.

Son Honneur la Présidente : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.


[Français]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

L’École Polytechnique de Montréal

La commémoration de la tragédie

L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je prends la parole à un moment où notre conscience collective est mise à l’épreuve, alors que nous approchons de la Journée nationale de commémoration et d’action contre la violence faite aux femmes.

Chaque année, ce moment nous ramène à une blessure qui ne s’est jamais refermée. Le 6 décembre, nous nous souviendrons des 14 jeunes femmes de l’École Polytechnique de Montréal qui ont été arrachées à la vie simplement parce qu’elles étaient des femmes.

Trente-six ans plus tard, leur absence se fait encore douloureusement sentir dans leur famille, dans leur collectivité et dans l’ensemble de notre pays.

Elles avaient des rêves, des aspirations, des vies à bâtir. Leur mémoire nous interpelle et nous pose cette question : qu’avons-nous fait pour qu’une telle tragédie ne se reproduise jamais?

[Traduction]

Cet anniversaire douloureux s’inscrit dans un vaste mouvement. À partir du 25 novembre, les Canadiens et les gens du monde entier participent aux 16 jours d’activisme contre la violence fondée sur le sexe, qui culminent le 10 décembre à l’occasion de la Journée des droits de l’homme. Il est temps de dénoncer les formes d’indifférence, de déclarer publiquement notre soutien aux femmes et aux filles et de refuser de laisser la peur dicter leur vie.

La réalité est brutale et urgente. Toutes les 48 heures, une femme ou une fille est tuée dans un acte de violence fondée sur le sexe au Canada. C’est plus qu’une simple statistique. Chaque perte de vie est amplifiée par le chagrin des membres de la famille, des amis et des proches qui se retrouvent à combler un vide insensé. Nous éprouvons également une profonde compassion pour les survivants de la violence et leur courage incommensurable. Nous leur offrons une promesse sincère fondée sur la vérité, la justice et un engagement ferme à bâtir un monde où tout le monde est en sécurité.

[Français]

Cette semaine, une table ornée de roses et de rubans blancs a été installée à l’entrée du Sénat pour honorer ces vies perdues et les vies brisées par la violence. Réalisée en collaboration avec Femmes et Égalité des genres Canada, cette initiative donne un visage à notre engagement et invite à la réflexion.

Honorables sénateurs, je vous invite à porter le ruban blanc comme signe de notre volonté sincère de travailler ensemble sans relâche pour qu’un jour, aucune femme ni aucune fille ne vive dans la peur.

Parce que certaines vérités trouvent leur expression la plus juste dans les mots des poètes, permettez-moi de faire entendre les mots de la regrettée Élaine Audet, qui a prêté sa voix à la douleur, mais aussi à la résistance et à l’espérance :

Décembre va au bout de son sang

Avec l’encre répandue de nos mots.

Quatorze noms contre la haine et l’oubli

Avivent à jamais le désir de vivre libres

Ensemble, honorons les disparues, soutenons les survivantes et faisons en sorte, ensemble, que cesse la violence.

L’honorable Leo Housakos (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour ajouter ma voix au souvenir de Geneviève Bergeron, Hélène Colgan, Nathalie Croteau, Barbara Daigneault, Anne-Marie Edward, Maud Haviernick, Barbara Klucznik-Widajewicz, Maryse Laganière, Maryse Leclair, Anne-Marie Lemay, Sonia Pelletier, Michèle Richard, Annie St-Arneault et Annie Turcotte.

Pour ceux d’entre nous qui ont grandi à Montréal, il est impossible d’oublier le choc qui a traversé notre ville lorsque nous avons appris que ces 14 jeunes femmes avaient été assassinées à l’École Polytechnique de Montréal, simplement parce qu’elles étaient des femmes. Elles étaient des filles, des sœurs, des amies, des camarades de classe, des collègues, mais aussi des ingénieures, des chercheuses, des bâtisseuses et des innovatrices.

Elles représentaient des pages encore à écrire dans l’histoire et l’avenir du Canada. C’est là que l’on comprend vraiment l’ampleur de ce qui a été perdu ce jour-là : les projets qu’elles auraient menés, les découvertes qu’elles auraient faites, l’inspiration qu’elles auraient offerte à toute une génération. Quelle tragédie. C’est tout ce potentiel, toute cette lumière qui n’a jamais pu se réaliser, détruite par la violence et la misogynie.

[Traduction]

Honorables sénateurs, cette tragédie, loin d’être un souvenir silencieux, résonne encore aujourd’hui, car elle a frappé au cœur même de ce que signifie la liberté au Canada, c’est-à-dire la conviction que chaque personne, peu importe son genre ou son origine, doit être libre d’apprendre, de s’épanouir et de contribuer à la société sans crainte ni restrictions.

Chaque année, en décembre, la Journée nationale d’activités de commémoration et d’action en matière de violence contre les femmes nous rappelle que ces libertés ne sont pas autosuffisantes. Elles dépendent de notre vigilance collective et de notre volonté d’affronter les menaces qui pèsent non seulement sur les gens, mais aussi sur les principes qui maintiennent l’unité du pays.

Ces 14 femmes seront éternellement sous notre responsabilité et elles nous poussent à protéger nos libertés avec une détermination renouvelée, à renforcer la culture de respect qui définit notre grand pays, le Canada, et à veiller à ce que les lieux d’apprentissage demeurent des sanctuaires de possibilités pour tous les Canadiens. Que leur souvenir soit éternel.

Des voix : Bravo!

[Français]

L’honorable Suze Youance : Honorables sénateurs, c’est le cœur gros que je souligne le 36e anniversaire du féminicide à l’École Polytechnique de Montréal au nom du Groupe des sénateurs indépendants.

Le 6 décembre 1989, j’étais étudiante en ingénierie. Sur la chaîne nationale d’Haïti, on rediffusait en boucle l’émission de Radio‑Canada couvrant la tuerie à l’École Polytechnique.

C’est un souvenir extrêmement bouleversant, non seulement pour le Québec et pour notre pays, mais aussi bien au-delà de nos frontières.

Le 6 décembre 1989, 14 étudiantes en génie ont été assassinées simplement parce qu’elles étaient des femmes. Treize personnes ont également été blessées.

Cette violence misogyne a laissé de profondes cicatrices dans de nombreuses familles et dans la mémoire collective et a déclenché une prise de conscience sur les violences faites aux femmes. Cet événement a aussi donné lieu à de nombreuses actions pour changer les choses et ne jamais baisser les bras face aux violences visant les femmes.

Malgré cette tragédie, mes collègues étudiantes ont poursuivi leurs études pour celles qui n’ont pas pu le faire, tout comme moi.

(1340)

Aujourd’hui, je me souviens de la décision que j’ai prise de poursuivre mes études en génie en 1989. C’est donc notre rôle, mon rôle, d’en parler, de nous souvenir et d’en partager les leçons.

Depuis 2014, la bourse de l’Ordre de la rose blanche constitue un symbole fort des activités de commémoration du féminicide. Ces bourses sont remises aux étudiantes canadiennes en génie. Le 1er décembre dernier, pour la première fois, ce sont 14 femmes qui ont reçu la prestigieuse bourse de 50 000 $.

Enfin, pour une deuxième année consécutive à Montréal, un 15e faisceau sera illuminé ce samedi soir sur le Mont-Royal en mémoire de toutes les femmes victimes de féminicide depuis tant d’années. C’est l’éclairage particulier qui servira à souligner le thème de la commémoration de cette année.

Comme l’a souligné hier la sénatrice Oudar, nous devons toujours rester vigilants.

Honorables sénateurs, portons le ruban blanc en solidarité avec toutes les filles et les femmes pour que cesse la violence.

Merci.

[Traduction]

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Honorables sénateurs, j’aimerais souligner la Journée nationale de commémoration et d’action contre la violence faite aux femmes, qui aura lieu le 6 décembre 2025. Cette journée vise à honorer la mémoire des 14 femmes qui ont perdu la vie lors du massacre de l’École polytechnique et de toutes les Canadiennes qui ont péri à la suite d’un acte de violence.

En ce jour solennel, nous nous souvenons des jeunes femmes dont l’avenir a été volé et dont la famille et l’entourage ont été marqués à jamais par cet acte de haine incompréhensible. Les répercussions de leur disparition continuent de se faire sentir encore aujourd’hui. Le choc et la peine causés par cette tragédie ont profondément bouleversé l’ensemble des Canadiens, ils ont laissé une marque indélébile dans notre conscience collective et ils nous rappellent sans cesse les conséquences dévastatrices de la violence.

C’est en tant que femme et en tant que mère que je prends aujourd’hui la parole pour leur rendre hommage et souligner la force, la résilience et la contribution inestimable des femmes à nos familles, à nos lieux de travail et à la société.

Prenons conscience du profond sentiment de perte et des répercussions durables de la violence fondée sur le sexe et rappelons-nous que nous avons la responsabilité collective d’agir concrètement, que ce soit en nous renseignant, en informant les autres, en offrant compassion et soutien aux survivantes, en remettant en question les attitudes et les comportements toxiques où qu’ils se manifestent ou en cherchant inlassablement à bâtir une société où les femmes et les jeunes filles pourront vivre à l’abri de la violence, de la discrimination et de la peur.

Honorables sénateurs, rendons hommage aux femmes à qui la tragédie du 6 décembre a coûté la vie et engageons-nous aussi à protéger les femmes et les jeunes filles, à améliorer leur sort, à militer pour elles et à faire en sorte que leurs droits, leur voix et leur sécurité ne soient jamais tenus pour acquis.

Ensemble, nous pouvons créer un Canada plus juste et plus sûr pour tous et toutes.

Des voix : Bravo!

[Français]

Minute de silence

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous demanderais de bien vouloir vous lever pour observer une minute de silence à la mémoire des victimes de la tragédie qui est survenue à l’École Polytechnique de Montréal et en l’honneur de la Journée nationale de commémoration et d’action contre la violence faite aux femmes le 6 décembre.

(Les honorables sénateurs observent une minute de silence.)

Le Groupe des sénateurs indépendants

L’honorable Raymonde Saint-Germain : Honorables sénateurs, cette déclaration que je m’apprête à faire sera ma dernière à titre de leader du Groupe des sénateurs indépendants, le GSI. Ce fut pour moi un privilège absolu de représenter et de servir ce groupe à ce titre au cours des huit dernières années.

[Traduction]

La semaine prochaine, le Groupe des sénateurs indépendants tiendra des élections pour lesquelles il y a de solides candidats très compétents. Quelle qu’en soit l’issue, je suis persuadée que notre groupe sera en de bonnes mains et qu’il continuera de servir les Canadiens avec intégrité et intelligence au Sénat. Notre groupe, auquel je suis fière d’appartenir, pourra compter sur mon entière collaboration à titre de membre.

[Français]

Je profite de cette occasion pour remercier tous les membres du GSI, mais particulièrement mes fantastiques et dévoués collègues de l’équipe de facilitation ainsi que la compétente équipe du secrétariat du GSI. Je remercie la sénatrice Clement, le sénateur Arnot et la sénatrice Petitclerc de leur solide contribution, de leur collégialité et de leur soutien. Je remercie également mes anciens collègues, soit le sénateur Dean pour sa confiance, la sénatrice Duncan pour son dévouement ainsi que les anciens sénateurs Omidvar et Gold pour leur contribution au leadership de ce groupe.

[Traduction]

Je remercie tout particulièrement notre ancien coordonnateur, le sénateur Woo, aux côtés de qui j’ai eu le plaisir de travailler pendant quatre ans et à qui revient le grand mérite d’avoir ouvert la voie à ses successeurs.

Je tiens aussi à remercier mes collègues de la cuvée 2025 des leaders, c’est-à-dire le sénateur Moreau, le sénateur Housakos, le sénateur Tannas et le sénateur Francis. Ce fut un grand plaisir de travailler en étroite collaboration et en toute collégialité avec vous. Nous avons tous l’objectif commun de nous acquitter du rôle qui incombe à notre institution dans l’intérêt supérieur des Canadiens.

Depuis qu’on m’a confié les fonctions de leader, en 2017, j’ai l’honneur de contribuer au renouvellement du Sénat afin qu’il soit plus en phase avec son rôle constitutionnel. Les assises actuelles sont solides, et les outils nécessaires pour ce faire ont été fermement intégrés aux lois et aux règlements.

Je quitte mes fonctions avec beaucoup de gratitude et de confiance et un immense respect pour cette institution et tous ses membres.

Tout le temps où j’ai été leader, j’ai essayé de favoriser une culture axée sur la préparation rigoureuse, sur des travaux législatifs fondés sur des données probantes et sur le respect du rôle constitutionnel du Sénat. Si je peux laisser une marque, j’espère que ce sera l’approfondissement de cette culture, qui est fondée sur l’expertise, sur la collégialité et sur un grand sens des responsabilités à l’égard des Canadiens et de notre institution.

Je vous remercie de m’avoir laissée dire quelques mots et je me réjouis à l’idée de continuer à travailler avec vous tous, alors que je vais peut-être avoir un peu plus de latitude et de temps.

[Français]

Je vous offre mes meilleurs vœux à l’occasion des Fêtes.

[Traduction]

Profitez bien du long congé, soyez prudents sur les routes et à l’année prochaine. Merci, meegwetch.

Des voix : Bravo!

Visiteur à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de la Cheffe Tabatha Bernard, de la Première Nation de Lennox Island. Elle est l’invitée de l’honorable sénateur Francis.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Bill Riley

L’honorable Tony Ince : Honorables sénateurs, je souhaite aujourd’hui rendre hommage à une légende du hockey, à un pionnier, à un Canadien modèle et à une véritable source d’inspiration, Bill Riley. M. Riley a été le troisième Noir à jouer dans la Ligue nationale de hockey et le premier à occuper un poste permanent, ce qui a pu donner espoir aux autres joueurs noirs, comme Tony McKegney et Ray Neufeld. M. Riley était un joueur robuste qui défendait ses coéquipiers. Il a joué 139 matches avec les Capitals de Washington et les Jets de Winnipeg. Né à Amherst, en Nouvelle-Écosse, et issu d’un milieu modeste, M. Riley n’a jamais oublié ses racines. Pour lui, il est important de ne pas ménager ses efforts, et il a consacré sa vie à offrir aux jeunes des possibilités qu’ils n’auraient jamais pu avoir autrement.

(1350)

Son mantra est aussi simple que puissant : « Suis tes rêves et enlève le mot “impossible” de ton vocabulaire. » M. Riley a passé la majeure partie de sa carrière à Moncton, où il a aidé les Hawks du Nouveau-Brunswick à remporter la coupe Calder de l’American Hockey League en 1982 — une des nombreuses choses qu’il a faites pour le hockey et pour sa région.

Je me suis rendu à Moncton il y a quelques semaines pour assister l’intronisation de M. Riley au Temple de la renommée des sports de la ville. Dans la salle, j’ai entendu de nombreuses histoires qui illustraient à merveille le caractère de ce grand homme. Je vous en raconte une.

M. Riley possédait une école de hockey à Riverview, au Nouveau-Brunswick. Tandis que les autres écoles exigeaient des droits d’inscription de 200 ou de 300 $, M. Riley, lui, ne demandait que 40 $. Dans son esprit, il n’était pas là pour faire de l’argent. Il était là pour qu’un maximum de jeunes aient la chance de goûter au hockey.

Pourtant, même une somme aussi modeste pouvait parfois être au-dessus des moyens de certains. C’était le cas de Frankie. Comme le raconte M. Riley, Frankie était un petit garçon élevé par une mère seule. Ils sont venus le voir tous les deux pour lui demander si Frankie pouvait fréquenter son école de hockey, même s’ils n’en avaient pas les moyens. M. Riley a renoncé aux droits d’inscription et il a dit à Frankie qu’il était accepté. Tout ce qu’il avait à faire, c’était de se présenter et de jouer de son mieux. L’année suivante, la même chose s’est produite. La mère de Frankie n’avait pas les moyens de payer. Cette fois-ci, M. Riley lui a dit :

Madame, vous pouvez venir chaque année. Tout ce que vous avez à faire, c’est de venir chercher le chandail de Frankie. Il est accepté à vie.

C’est ainsi que l’on peut décrire Bill Riley : une légende pour beaucoup et une force inébranlable au service du bien dans le sport qui rassemble les Canadiens. Puissions-nous tous suivre son exemple en matière de détermination et d’empathie et avoir la même conviction que chacun peut réaliser ses rêves si on lui en donne la chance.

Merci. Meegwetch. Mahalo. Choukrane.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune d’Ernie Daniels, président et chef de la direction, et de membres de l’Autorité financière des Premières Nations. Ils sont les invités de l’honorable sénatrice White.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

L’Autorité financière des Premières Nations

L’honorable Judy A. White : Honorables sénateurs, cette semaine a lieu l’Assemblée extraordinaire annuelle des Chefs, ici à Ottawa. Cet événement de premier plan est une occasion de rencontrer les représentants des gouvernements des Premières Nations et de mettre à l’avant-scène les peuples autochtones du pays, mais aussi leurs politiques ainsi que les organismes qui défendent leurs droits.

Pour l’occasion, j’ai le privilège de souligner aujourd’hui l’excellent travail de l’Autorité financière des Premières Nations. L’autorité financière est un organisme à but non lucratif qui est entièrement détenu et administré par les gouvernements des Premières Nations et dont la vision est de « bâtir des communautés sécuritaires, saines et prospères — par les Premières Nations, pour les Premières Nations ».

Depuis 2005, elle offre des produits d’investissement, des conseils sur la planification des immobilisations et l’accès à des prêts à long terme aux gouvernements des Premières Nations de partout au pays. Les fonds offerts par l’autorité ont permis de bâtir des infrastructures essentielles, de stimuler le développement socioéconomique, de réaliser des projets énergétiques indépendants, de construire des logements sociaux et j’en passe. Ces investissements ont contribué à la croissance économique des communautés autochtones des quatre coins du pays.

En date de septembre, l’Autorité financière des Premières Nations avait généré des retombées économiques de 96,6 millions de dollars et entraîné la création de plus ou moins 396 emplois dans les communautés mi’kmaqs et innues de la province d’où je viens, Terre-Neuve-et-Labrador.

L’autorité a réussi à récolter plus de 4 milliards de dollars de financement pour divers projets, ce qui représente des retombées économiques dépassant les 8,5 millions de dollars pour le Canada, et à créer au-delà de 39 000 emplois. Le tout en finançant des projets de développement économique favorisant la prospérité à long terme des communautés.

L’un des principaux vecteurs de ce succès est M. Ernie Daniels, qui est président-directeur général de l’Autorité financière des Premières Nations. M. Daniels a grandi aux Territoires du Nord‑Ouest et il est membre de la Première Nation de Salt River.

Sous sa gouverne, l’Autorité financière a permis à sept communautés mi’kmaq d’acquérir 50 % de la participation en capital dans Clearwater Seafoods, la plus grande entreprise de produits de la mer d’Amérique du Nord. C’est vraiment ce que l’on peut qualifier d’accomplissement économique transformationnel pour les Autochtones.

Monsieur Daniels, les décennies que vous avez consacrées aux organismes des Premières Nations ont permis de rendre plus fortes les communautés des quatre coins du pays et elles ont permis d’instaurer de façon inédite une nouvelle norme mondiale en matière de développement économique piloté par des Autochtones.

Je vous félicite, de même que l’Autorité financière des Premières Nations et tout particulièrement René Jeddore, ami et concitoyen de Terre-Neuve-et-Labrador, pour vos idées visionnaires, pour le leadership dont vous avez fait preuve et pour vos contributions porteuses de changement qui améliorent la qualité de vie des Autochtones au Canada.

Wela’ lin. Merci.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Kailee Deacon, fille de la sénatrice M. Deacon, et de Cameron Chell, président-directeur général de Business Instincts Group.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

[Français]

Le décès de Rolande Faucher

L’honorable Lucie Moncion : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour souligner la contribution et rendre hommage à une grande dame de la francophonie ontarienne, Mme Rolande Faucher, décédée le 15 novembre dernier à l’âge de 84 ans.

Née à Ottawa en 1941, Rolande Faucher se distingue dès le début de sa carrière par un engagement constant vis-à-vis de l’avancement et de la vitalité de la francophonie ontarienne. Après un passage à Kapuskasing, dans le Nord de l’Ontario, elle s’installe à Orléans et poursuit son œuvre dans le monde communautaire.

Le Mouvement d’implication francophone d’Orléans, ou MIFO, porte indissociablement l’empreinte de Rolande Faucher. À titre de présidente, elle professionnalise la structure, dirige la première planification stratégique et contribue à l’édification du bâtiment du MIFO, qui deviendra un jalon de la vie culturelle francophone à Orléans dès son ouverture en 1985.

De 1988 à 1990, elle préside l’Association canadienne-française de l’Ontario. Femme visionnaire et d’action, elle contribue à renforcer l’influence politique et communautaire de l’organisme pendant une période cruciale pour les droits linguistiques de la province.

En 1993, elle occupe la présidence du Conseil de l’éducation et de la formation franco-ontarienne. Elle agit aussi comme conseillère pour le ministre de l’Éducation sur les enjeux touchant l’ensemble du continuum scolaire. Par ailleurs, elle sera parmi les premières à plaider en faveur du « par et pour » dans l’enseignement postsecondaire en militant en faveur du projet visant à établir une université francophone autonome en Ontario.

Ses multiples contributions témoignent de son engagement et de sa générosité envers sa communauté à travers les années. Elle a contribué notamment aux travaux du Comité consultatif sur les affaires francophones de l’Ontario, du Comité mixte permanent des langues officielles, du Centre de recherche sur les francophonies canadiennes (CRCCF) de l’Université d’Ottawa et de La Nouvelle Scène, puis elle a fait un passage remarqué au sein du conseil d’administration de l’Hôpital Montfort, à l’époque de la notoire contestation judiciaire.

Autrice de plusieurs rapports importants sur l’accès aux services de santé en français, elle a signé la biographie intitulée Jean-Robert Gauthier : « Convaincre... sans révolution et sans haine », œuvre pour laquelle elle a reçu le Prix Champlain en 2009. Au cours de sa carrière, elle a reçu plusieurs autres prix, dont l’Ordre du Mérite de l’Association des juristes d’expression française de l’Ontario (AJEFO), le prix Albert-Régimbald, le grade de chevalier de l’Ordre de la Pléiade et le prix du CRCCF. En 2014, elle est devenue membre honoraire du Réseau des services de santé en français de l’Est de l’Ontario.

En bâtissant, structurant et consolidant les institutions sur lesquelles s’appuie la francophonie ontarienne aujourd’hui, Rolande Faucher a veillé à pérenniser son œuvre pour que les générations futures puissent se construire un avenir à partir de solides acquis. Les organismes qu’elle a façonnés, les espaces culturels qu’elle a amplifiés et les réseaux qu’elle a tissés sont autant de traces durables de son passage parmi nous.

Grâce à elle, des générations de Franco-Ontariennes et Franco‑Ontariens pourront continuer de faire vibrer notre langue dans toutes les sphères de la vie collective et de nourrir à leur tour une communauté forte, vivante et confiante en son avenir.

Reposez en paix, chère Rolande.

Merci.

Des voix : Bravo!


(1400)

AFFAIRES COURANTES

Régie interne, budgets et administration

Présentation du deuxième rapport du comité

L’honorable Lucie Moncion : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le deuxième rapport du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration, qui porte sur les modifications au Règlement administratif du Sénat.

(Le texte du rapport figure aux Journaux du Sénat d’aujourd’hui, p. 531.)

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion de la sénatrice Moncion, l’étude du rapport est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

[Traduction]

Affaires juridiques et constitutionnelles

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à étudier la nécessité de moderniser et de clarifier le Code criminel du Canada et la Loi réglementant certaines drogues et autres substances

L’honorable David M. Arnot : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit autorisé à examiner, afin d’en faire rapport, la nécessité de moderniser et de clarifier le Code criminel du Canada et la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, y compris à mener une évaluation des lacunes structurelles existantes dans la législation et des options en vue d’un examen exhaustif;

Que le comité soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer des rapports sur cette étude auprès de la greffière du Sénat si le Sénat ne siège pas à ce moment là, et que lesdits rapports soient réputés avoir été déposés au Sénat;

Que le comité soumette son rapport final au Sénat au plus tard le 31 décembre 2028, et qu’il conserve tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions dans les 180 jours suivant le dépôt du rapport final.

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à étudier l’état actuel des délais dans le système de justice pénale

L’honorable David M. Arnot : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit autorisé à examiner, afin d’en faire rapport, l’état actuel des délais dans le système de justice pénale canadien dans la foulée de son rapport final déposé en juin 2017, intitulé Justice différée, justice refusée : L’urgence de réduire les longs délais dans le système de justice pénale au Canada, y compris à examiner les progrès accomplis dans la mise en œuvre des recommandations formulées dans le rapport;

Que les documents reçus, les témoignages entendus et les travaux accomplis par le comité sur ce sujet au cours de la première session de la quarante-deuxième législature soient renvoyés au comité;

Que le comité soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer ses rapports sur cette étude auprès de la greffière du Sénat si le Sénat ne siège pas à ce moment-là, et que lesdits rapports soient réputés avoir été déposés au Sénat;

Que le comité soumette son rapport final au Sénat au plus tard le 31 décembre 2028, et qu’il conserve tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions dans les 180 jours suivant le dépôt du rapport final.

Droits de la personne

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à étudier l’impact de l’intelligence artificielle sur les droits de la personne et la sécurité économique

L’honorable Paulette Senior : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent des droits de la personne soit autorisé à examiner, afin d’en faire rapport, l’impact de l’intelligence artificielle sur les droits de la personne et la sécurité économique au Canada, en particulier en ce qui concerne les groupes vulnérables et le droit international de la personne en matière de travail;

Que le comité soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer des rapports sur cette étude auprès de la greffière du Sénat si le Sénat ne siège pas à ce moment-là et que lesdits rapports soient réputés avoir été déposés au Sénat;

Que le comité soumette son rapport final au Sénat au plus tard le 31 décembre 2026 et qu’il conserve tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions dans les 180 jours suivant le dépôt du rapport final.

[Français]

Peuples autochtones

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à étudier les questions relatives à l’obligation de consulter et d’accommoder les peuples autochtones

L’honorable Michèle Audette : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, conformément à l’article 12-7(15), soit autorisé à examiner, afin d’en faire rapport, les questions relatives à l’obligation de consulter et d’accommoder les peuples autochtones, laquelle découle de l’honneur de la Couronne provenant de l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982, en mettant l’accent sur :

a) les besoins des nations autochtones, en particulier ceux des Premières Nations, des Inuit et des Métis qui cherchent à rendre l’obligation de consulter plus adaptée aux besoins de leurs communautés;

b) l’identification de pratiques prometteuses et des moyens de développer des relations de travail constructives;

c) l’étude de normes visant à améliorer les politiques et les pratiques fédérales;

Que le comité soumette son rapport final au Sénat au plus tard le 15 décembre 2027 et qu’il conserve tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions dans les 180 jours suivant le dépôt du rapport final;

Que le comité soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer des rapports sur cette étude auprès de la greffière du Sénat si le Sénat ne siège pas à ce moment-là et que lesdits rapports soient réputés avoir été déposés au Sénat.

(1410)

[Traduction]

Le rôle essentiel de l’activité physique et du sport

Préavis d’interpellation

L’honorable Marty Deacon : Honorables sénateurs, je donne préavis que, après-demain :

J’attirerai l’attention du Sénat sur le rôle essentiel que jouent l’activité physique et le sport dans notre bien-être et celui de nos communautés ainsi que dans la trame de l’expérience canadienne.


PÉRIODE DES QUESTIONS

Les finances

Le coût des aliments

L’honorable Salma Ataullahjan : Monsieur le leader du gouvernement, selon le Rapport sur la faim 2025 de l’organisme Feed Ontario, le tiers des utilisateurs des banques alimentaires de l’Ontario ont moins de 18 ans et le tiers des enfants souffrent d’insécurité alimentaire, et ce, malgré les programmes fédéraux actuels, comme l’Allocation canadienne pour enfants. Les enfants représentent toujours 29 % des personnes qui doivent avoir recours aux banques alimentaires.

Compte tenu de ces chiffres, comment le gouvernement arrive‑t‑il à justifier son approche actuelle pour lutter contre la pauvreté chez les enfants? Quels changements mesurables le gouvernement va-t-il apporter, précisément, pour que moins d’enfants aient besoin des banques alimentaires l’an prochain?

L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : Le gouvernement fait tout en son pouvoir pour faire baisser les prix et offrir de nouveaux débouchés aux Canadiens. L’inflation alimentaire est liée aux chaînes d’approvisionnement mondiales et elle est vulnérable aux chocs climatiques et aux pressions de change.

Le budget de 2025 investit directement dans la résilience alimentaire des Canadiens, en plus d’accroître les capacités de transformation du Canada, de renforcer les chaînes d’approvisionnement et d’aider les producteurs à composer avec la fluctuation du prix des intrants.

Le gouvernement rend le Programme national d’alimentation scolaire permanent parce que le meilleur moyen d’alléger la pression que subissent les familles demeure de baisser leurs dépenses quotidiennes. Quand près de 400 000 enfants peuvent compter sur un repas sain, le soulagement pour les parents est aussi réel que mesurable. Le budget de 2025 répond à votre question.

La sénatrice Ataullahjan : Sénateur Moreau, plus de 1 million d’Ontariens ont fait appel aux banques alimentaires l’année dernière, pour un nombre record de 8,7 millions de visites. Une part grandissante des personnes qui fréquentent les banques alimentaires ont un emploi, ce qui montre bien que cela suffit de moins en moins à éviter l’insécurité alimentaire.

Quels échecs systémiques le gouvernement reconnaît-il dans le filet social fédéral, et pourquoi a-t-il laissé ces failles dans le filet social prendre de l’ampleur au point où le fait d’avoir un emploi ne suffit plus aux Canadiens pour les protéger contre la faim?

Le sénateur Moreau : Il s’agit d’une question importante. Je répète que le budget de 2025 fait fond sur les mesures que le nouveau gouvernement du Canada a déjà prises pour rendre la vie plus abordable sans nuire aux programmes essentiels sur lesquels comptent des millions de Canadiens, de la garde des enfants aux soins dentaires en passant par l’assurance-médicaments. Hélas, les conservateurs de l’autre endroit ont voté contre le budget.

L’innovation, les sciences et le développement économique

L’industrie sidérurgique

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Monsieur le leader du gouvernement, cette semaine, Algoma Steel a annoncé le licenciement de 1 000 travailleurs, soit le tiers de ses effectifs. Ce sont 1 000 familles qui perdent ainsi leur gagne-pain alors que le prix de l’épicerie et de l’essence continue de grimper. Seulement en Ontario, les banques alimentaires ont reçu le nombre record de 8,7 millions de visites l’an dernier, c’est-à-dire 24 000 visites par jour.

Pourtant, quand l’opposition a demandé des réponses, lundi, la ministre de l’Industrie, Mélanie Joly, nous a simplement dit d’arrêter de nous plaindre.

Sénateur Moreau, quand le gouvernement fera-t-il passer les Canadiens en premier? Quand allégera-t-il le fardeau des familles qui ont du mal à se nourrir et à avoir un emploi stable, et pas seulement dans l’industrie sidérurgique, mais dans l’ensemble de l’économie?

L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : Sénatrice, je ne veux pas minimiser ce que vivent les personnes qui perdent leur emploi ni les difficultés économiques que doivent affronter de nombreux Canadiens. Le gouvernement est bien au fait de la situation. Voilà pourquoi il a inclus des mesures vigoureuses dans le budget de 2025.

Malheureusement, vous restez là à toujours répéter la même chose. Nous nous soucions des Canadiens, surtout de ceux qui perdent leur emploi. Le problème, c’est que dès que le gouvernement propose des mesures pour remédier à la situation, vos collègues de la Chambre des communes s’y opposent.

C’est plutôt curieux de vous entendre réclamer des mesures alors qu’à l’autre endroit, votre parti vote contre les mesures susceptibles d’aider les Canadiens.

La sénatrice Martin : Monsieur le leader, vous dites vous soucier de la situation, mais le premier ministre multiplie les voyages pour faire des séances photo, à un point tel que la distance qu’il a parcourue équivaut à un tour du monde tous les 44 jours. Les Canadiens ne voient aucun accord, aucune protection et aucune garantie pour ces travailleurs et leur famille.

Quand le premier ministre mettra-t-il fin à sa tournée touristique et commencera-t-il à prendre des mesures concrètes pour protéger les emplois dans le secteur canadien de l’acier?

Le sénateur Moreau : Quand le premier ministre voyage partout dans le monde, c’est pour diversifier les marchés de l’économie canadienne, pour créer des emplois ici et pour conclure des accords avec tous les pays du monde. Il cherche à ouvrir de nouveaux marchés et de nouvelles portes à l’industrie canadienne afin de créer des emplois ici, chez nous. C’est pourquoi il voyage partout dans le monde. Votre chef devrait faire de même.

L’environnement et le changement climatique

Les cibles du Canada en matière de réduction des émissions

L’honorable Mary Coyle : Sénateur Moreau, le mois dernier, le premier ministre Carney a répondu ainsi à une question de la cheffe du Parti vert, Mme May : « Je peux confirmer à la Chambre que nous allons respecter nos engagements pris à Paris en matière de lutte contre les changements climatiques [...] »

Lors d’un récent échange avec le député Patrick Bonin, la ministre Dabrusin a déclaré que le gouvernement restait fidèle à ses objectifs de réduction des émissions pour 2030. On parle d’une réduction de 40 à 45 % par rapport aux niveaux de 2005.

Le député Steven Guilbeault prévient qu’avec les reculs observés ces derniers mois, il est impossible d’imaginer comment nous pourrons atteindre nos objectifs pour 2030.

Le directeur parlementaire du budget estime que le Canada ratera son objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour 2030 avec un écart de 49 à 102 mégatonnes.

Sénateur Moreau, quelle garantie pouvez-vous nous donner que le Canada atteindra ses objectifs de réduction des émissions pour 2030? Quand verrons-nous le nouveau plan pour y parvenir?

L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : Pour ce qui est de la dernière partie de votre question, on me dit que le gouvernement publiera bientôt sa stratégie de compétitivité climatique.

L’intention du Canada demeure d’atteindre les cibles de l’Accord de Paris ainsi que la carboneutralité d’ici 2050 en misant sur des mesures climatiques ambitieuses tout en continuant de bâtir l’économie de demain. Or, le gouvernement fédéral peut seulement atteindre ses cibles climatiques s’il fait partie d’un mouvement concerté. Pour atteindre la carboneutralité et demeurer concurrentiel, il faut que chaque province favorise l’innovation et la lutte contre les changements climatiques.

Le gouvernement est conscient qu’une bonne politique climatique est une bonne politique économique. Le Canada entend favoriser le type d’investissements à long terme qui lui permettra de restructurer son économie, de préparer ses entreprises industrielles à la transition mondiale vers la carboneutralité et de créer et maintenir de bons emplois ici, au Canada.

Le gouvernement investit dans les maisons écologiques de même que dans l’électricité et les technologies vertes, ce qui permettra au Canada de demeurer concurrentiel et de se développer de manière durable pendant des dizaines d’années, en espérant en plus atteindre la cible fixée pour 2030.

La sénatrice Coyle : Merci, sénateur Moreau. Nous attendrons ce plan avec impatience.

Dernièrement, pendant que j’assistais à la COP 30, l’ex-ministre Guilbeault m’a assurée que le gouvernement entend accélérer la réalisation de ses engagements en matière de biodiversité et mobiliser les investissements nécessaires pour protéger la nature, pour le bien de la population, de la planète et des générations à venir. Il m’a laissé entendre qu’un plan portant sur la nature serait rendu public au début de décembre. Sénateur Moreau, quand ce plan sera-t-il publié et que contiendra-t-il?

Le sénateur Moreau : Comme vous le savez, je ne peux m’avancer sur le moment où ce plan sera rendu public. Cela dit, vous avez soulevé la question de la place de la nature dans le budget de 2025 tout à l’heure.

J’ai omis de dire que le budget fait mention du Corridor essentiel de conservation du Nord-Ouest, qui a été soumis à l’étude du Bureau des grands projets et qui prévoit une aire de conservation dont la superficie est égale à celle de la Grèce. Je me suis dit que vous voudriez le savoir.

Les affaires mondiales

Les sanctions contre la Russie

L’honorable Stan Kutcher : Sénateur Moreau, en octobre 2025, la Fondation du Comité pour la liberté à Hong Kong et le Centre Raoul Wallenberg pour les droits de la personne ont publié un rapport dans lequel ils affirment que des composantes à usage double produites par un certain nombre d’entreprises canadiennes — nos entreprises à nous — ont été retrouvées dans des armes russes ayant servi à attaquer les Ukrainiens.

Le gouvernement du Canada sait-il que des produits canadiens sous le coup de sanctions semblent prendre le chemin de Hong Kong, qui, comme chacun sait, est une plaque tournante mondiale de contournement des sanctions, et qu’a-t-il fait, le cas échéant, pour remédier à la situation?

L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : Je suis absolument convaincu que le gouvernement connaît ce rapport. Je vais néanmoins en glisser un mot à la ministre.

Pour répondre à votre question, sénateur, je n’ai entendu dire nulle part que le Canada entendait désigner Hong Kong comme un territoire à haut risque, comme il l’a fait pour la Russie, l’Iran et la Corée du Nord, comme vous l’avez vous-même souligné. Je ne suis pas certain que Hong Kong ait sa place sur cette liste.

(1420)

Cela dit, je tiens à vous assurer que le Canada continuera de travailler en étroite collaboration avec ses alliés pour soutenir l’Ukraine. Pas plus tard qu’hier, le gouvernement a annoncé l’achat d’équipements militaires essentiels figurant sur la liste des besoins priorisés de l’Ukraine établie par l’OTAN en partenariat avec d’autres alliés de l’OTAN.

Le sénateur Kutcher : Merci beaucoup.

Je tiens à souligner que mes amis du Parlement ukrainien en sont très reconnaissants.

Le Canada accuse un retard par rapport à ses alliés en ce qui concerne la désignation d’entreprises et de personnes qui ont recours à des réseaux de contournement des sanctions pour acheminer des éléments militaires utiles à la Russie. Ce retard est dû, en partie, à notre processus interne — long et complexe — relatif à ce genre de désignation. Le Canada ne pourrait-il pas élaborer une politique d’adoption automatique des sanctions contre la Russie déjà imposées par l’Union européenne et d’autres alliés?

Le sénateur Moreau : D’après ce que je comprends, à l’heure actuelle, les sanctions peuvent être imposées en vertu de trois lois : la Loi sur les mesures économiques spéciales, la Loi sur la justice pour les victimes de dirigeants étrangers corrompus et la Loi sur les Nations Unies. Ces lois prescrivent les exigences juridiques concernant l’imposition de sanctions.

Les anciens combattants

L’accès aux prestations

L’honorable Rebecca Patterson : Sénateur Moreau, hier, le Bureau de l’ombudsman des vétérans a publié un rapport sur le processus de révision interne d’Anciens Combattants Canada pour les demandes de prestations. Cet examen visait à déterminer si le processus de révision répond aux normes élémentaires d’équité. L’examen de l’ombudsman a révélé que, trop souvent, les anciens combattants reçoivent des réponses qui ne sont pas claires quand leurs demandes de prestations sont rejetées, ce qui rend plus difficile toute contestation. Le rapport soulève ce qu’il qualifie d’ « injustice systémique » et critique Anciens Combattants Canada pour sa manière de traiter les demandes des anciens combattants et de leur communiquer ses décisions.

Le gouvernement s’engagera-t-il à donner suite aux recommandations formulées par l’ombudsman dans ce rapport, en particulier celle qui vise à améliorer la qualité des lettres de décision afin que les anciens combattants dont la demande a été rejetée puissent obtenir des explications précises et détaillées sur la décision rendue?

L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci pour votre question.

Je suis au courant du rapport et je ferai part de ces recommandations à la ministre.

Le budget prévoit des sommes importantes pour aider les anciens combattants, plus particulièrement en ce qui a trait aux soins de longue durée, aux économies provenant d’Anciens Combattants Canada et aux pensions d’invalidité. Toutefois, j’admets que vous soulevez une question très sensible. Je sais que vous vous souciez autant que moi du bien-être des anciens combattants. Merci d’avoir soulevé cette question. Je ferai le suivi nécessaire auprès de la ministre.

La sénatrice Patterson : Je vous remercie.

Je peux affirmer sans me tromper que les anciens combattants font peu confiance à Anciens Combattants Canada. Dans le cadre de l’examen, on a entre autres recommandé que le ministre soit autorisé à entreprendre des examens en vertu du Règlement sur les soins de santé pour anciens combattants. Sénateur Moreau, nous savons qu’il faut attendre longtemps pour avoir les réponses aux recommandations. Quand Anciens Combattants Canada répondra‑t‑il à ces recommandations afin que les anciens combattants puissent au moins commencer à faire confiance à cet organisme essentiel?

Le sénateur Moreau : Sénatrice, je vous remercie sincèrement pour cette question.

Je soulèverai cette question très importante auprès de la ministre. Je vous reviendrai avec une réponse aussitôt que possible.

[Français]

La sécurité publique

Le contrôle des armes à feu

L’honorable Julie Miville-Dechêne : Sénateur Moreau, samedi soir, le 6 décembre, le ciel de Montréal s’illuminera pour commémorer les 14 victimes du féminicide de Polytechnique. À l’approche de ce moment solennel, PolySeSouvient déplore qu’il n’y ait toujours pas d’interdiction complète des armes d’assaut, y compris la carabine SKS, un modèle russe d’arme militaire semi‑automatique plus approprié sur un champ de bataille que pour des chasseurs. Pourquoi ne pas l’inclure dans le programme de rachat qui vient de se mettre en branle après des années de retard, sachant que 11 femmes ont été assassinées au Canada par leur conjoint avec une arme à feu depuis deux ans?

L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie pour la question, sénatrice Miville‑Dechêne.

Je pense que la personne la plus crédible pour répondre à la question directement est une survivante de Polytechnique, Nathalie Provost. La question concernant la carabine SKS est particulièrement complexe, donc je vais la citer :

Il est nécessaire que la question soit résolue avant la fin du programme de rachat, parce que c’est un trou dans le programme. Le ministre a annoncé qu’il s’y pencherait activement et il y a des solutions. Il faut se rappeler le caractère tout particulier du modèle SKS qui est encore utilisé pour la chasse par les gens des Premières Nations qui ont un droit historique à la chasse et à l’utilisation de cette arme à feu. Pour vraiment interdire et sortir, il faut qu’il y ait un programme qui touche le SKS et à l’heure actuelle, la question est toujours à l’étude.

La sénatrice Miville-Dechêne : Donc, j’espère que l’on va trouver une solution.

Cependant, ce n’est pas tout. Le gouvernement fédéral vient de repousser pour une 12e fois l’entrée en vigueur de son règlement sur le marquage des armes à feu. Cela devait se produire en 2006, mais cela n’arrivera pas avant 2027.

Ce marquage permettrait d’identifier la provenance des armes à feu fabriquées et surtout importées au Canada, ce qui serait utile sur les lieux d’un crime ou en cas de vol.

Le sénateur Moreau : Encore une fois, la présence de Mme Provost comme secrétaire d’État me rend assez confiant; je crois qu’un suivi sera fait, non seulement sur la question du modèle SKS, mais aussi sur la question de la publication des règlements.

Selon mes informations, bien que ce soit publié dans la Gazette du Canada, l’entrée en vigueur des règlements est reportée pour laisser aux entreprises, qui sont nombreuses, davantage de temps pour se préparer et compléter le processus de consultation.

Encore une fois, je pense que le dossier est suivi avec beaucoup d’intérêt à l’autre endroit.

[Traduction]

Les finances

Les ancrages budgétaires

L’honorable Leo Housakos (leader de l’opposition) : Monsieur le leader du gouvernement, la décennie perdue sous les libéraux a été marquée par des déficits records, une dette record, un effondrement des investissements étrangers — ainsi que des investissements canadiens, d’ailleurs —, une crise du coût de la vie et, bien sûr, un dollar canadien qui flotte aux niveaux les plus bas qu’on ait vus depuis des années.

Ajoutons que selon le directeur parlementaire du budget, le gouvernement libéral de Carney a complètement abandonné tout ancrage budgétaire, et ce, sans avertissement, sans débat et sans aucun respect pour le rôle du Parlement, qui consiste à demander des comptes au gouvernement. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est le directeur parlementaire du budget.

Pourquoi le directeur parlementaire du budget affirme-t-il que le gouvernement n’a pas d’ancrage budgétaire? Pourquoi parle-t-il, à propos du gouvernement, d’une l’absence de reddition de comptes et de transparence envers le Parlement?

L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : Le gouvernement répond chaque jour de manière transparente aux questions posées pendant la période des questions. Je pense aussi que vos collègues de l’autre endroit s’efforcent de poser des questions sur le budget et de demander des comptes au gouvernement. À ma connaissance, le gouvernement répond comme il se doit à toutes ces questions.

Pour ce qui est des ancrages budgétaires, ils sont en deux parties : nous voulons réduire les dépenses et augmenter les investissements. Nous allons donc surveiller le ratio de la dette par rapport au PIB.

Le sénateur Housakos : Nous pouvons vous remettre un bulletin sur vos réponses aux questions, sénateur Moreau.

Le directeur parlementaire du budget est d’avis que toute modification apportée aux cibles ou ancrages budgétaires de longue date devrait être autorisée par la Chambre des communes. Le fait que votre gouvernement ait agi ainsi sans débat parlementaire témoigne du mépris du premier ministre pour le Parlement. Nous savons que lui et le Parti libéral ont très peu de respect pour cette institution, mais n’ont-ils pas au moins un peu de respect pour l’autre endroit, qui ne peut taxer la population sans qu’elle soit représentée?

Le sénateur Moreau : Sénateur Housakos, je n’accepte pas du tout la prémisse de votre question. Je le répète — parce que c’est agréable à dire —, l’inflation est à la baisse, le chômage est à la baisse et les salaires sont à la hausse. La popularité du chef de l’opposition diminue et celle du premier ministre augmente. Selon moi, les choses vont bien au Canada.

Les services publics et l’approvisionnement

L’édifice Arthur-Meighen

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Monsieur le leader du gouvernement, dans le quartier Midtown de Toronto se trouve l’édifice Arthur-Meighen, nommé en 1957 en l’honneur d’un ancien premier ministre progressiste-conservateur. Cependant, après d’importants travaux de rénovation achevés en 2024, les Canadiens ont remarqué, grâce à l’historien J.D.M. Stewart, spécialiste des premiers ministres, qu’il manquait quelque chose : le nom d’Arthur Meighen ne figure plus sur la façade de l’édifice. Le gouvernement a retiré son nom de la façade, et il prétend maintenant que sa mémoire est préservée sur une plaque cachée quelque part à l’intérieur de l’édifice.

Monsieur le leader, le gouvernement libéral précédent avait l’habitude d’effacer notre histoire. Pouvez-vous indiquer aux Canadiens si le nouveau gouvernement libéral a l’intention de poursuivre cette tendance? Pourquoi efface-t-il la commémoration publique d’un ancien premier ministre du Canada?

L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : C’est une excellente question. Je ne pense pas que le gouvernement ait l’intention d’effacer notre histoire, bien au contraire. En effet, le roi a rendu visite au Sénat lors de l’ouverture de notre législature.

(1430)

Je pense que cela a très bien montré que le Canada est toujours attaché à son histoire et que le gouvernement la respecte.

En ce qui concerne l’édifice et la plaque, je n’ai pas d’information sur ce cas précis. Je vais me renseigner et voir s’il y a lieu de remettre la plaque à l’extérieur, à l’avant de l’édifice. Pour l’instant, je ne sais pas où se trouve la plaque. Si j’ai bien compris votre question, elle devrait se trouver à l’intérieur de l’édifice. Dès que je saurai où se trouve la plaque, je vous donnerai plus d’information là-dessus.

La sénatrice Martin : Je vous remercie de vous pencher sur la question, sénateur Moreau, car les Canadiens ne devraient pas avoir à organiser une chasse au trésor pour savoir où on a caché des renseignements sur leur histoire.

Pouvez-vous me confirmer que le gouvernement s’engagera à afficher de nouveau le nom d’Arthur Meighen à l’avant de l’édifice et à préserver — au lieu de cacher — le patrimoine du Canada dans nos institutions publiques?

Le sénateur Moreau : Je m’engage à me renseigner sur l’endroit où se trouve la plaque dont vous parlez. Je vous reviendrai avec une réponse dès que je saurai exactement de quoi on parle.

Les finances

Le droit à la vie privée

L’honorable Paula Simons : Honorables sénateurs, ma question s’adresse au représentant du gouvernement. Alors que certains Canadiens comptent les jours jusqu’à Hanouka et d’autres jusqu’à Noël, nous, au Sénat, comptons les jours jusqu’à l’arrivée du projet de loi C-4.

L’une des mesures prévues par le projet de loi C-4 consiste à exempter les partis politiques fédéraux des dispositions relatives à la protection de la vie privée, en particulier celles prévues par la législation de la Colombie-Britannique, qui, entre autres, consistent à accorder aux citoyens un droit d’accès, c’est-à-dire le droit de savoir quels renseignements une organisation a recueillis à leur sujet. Or, le projet de loi C-4 élimine toute notion de droit d’accès. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi le gouvernement a choisi cette stratégie?

L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : Comme vous le savez, le projet de loi C-4 est toujours à l’autre endroit. Il sera présenté au Sénat, et nous aurons amplement l’occasion de l’étudier et de répondre à ce genre de question.

Le projet de loi C-4 étant actuellement en discussion, nous devrions attendre qu’il soit présenté au Sénat dans sa forme définitive avant d’étudier et de débattre la question.

La sénatrice Simons : Merci beaucoup. En tant que membre du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, je me réjouis à l’idée de pouvoir discuter de cette partie du projet de loi C-4 au sein de notre comité.

Je ne peux toutefois m’empêcher de remarquer qu’il s’agit là d’une tendance du gouvernement actuel. En effet, pensons aux projets de loi C-2, C-8, C-12 et C-4 qu’il a présentés jusqu’à présent : ils ont tous été critiqués pour avoir porté atteinte aux droits à la vie privée des Canadiens. À une époque où ces droits sont déjà menacés par tant d’acteurs du secteur privé, le gouvernement va-t-il intervenir pour protéger les droits à la vie privée de tous les Canadiens?

Le sénateur Moreau : Le gouvernement du Canada a bien l’intention de protéger la vie privée des citoyens. Comme je l’ai mentionné précédemment, nous serons bientôt saisis du projet de loi C-4, et j’ai toute confiance dans les membres du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles pour poser de bonnes questions, les questions appropriées, et nous fournir l’information et les indications dont nous avons besoin concernant cette mesure législative.

La sécurité publique

La législation sur les armes à feu

L’honorable Donna Dasko : Honorables sénateurs, ma question s’adresse au sénateur Moreau.

Je la pose pour souligner les 16 jours d’activisme contre la violence fondée sur le sexe.

En décembre 2023, le Parlement a adopté le projet de loi C-21, avec une mesure de protection claire : toute personne visée par une ordonnance de protection dans un contexte de violence familiale serait inadmissible à un permis d’armes à feu tant que cette ordonnance est en vigueur. On se souviendra que, selon une enquête nationale menée en 2023, 96 % des Canadiens appuient cette mesure.

Deux ans plus tard, les organismes de femmes, dont l’Association nationale Femmes et Droit, signalent que cette disposition n’est toujours pas en vigueur et que le règlement proposé l’affaiblirait encore en limitant sa portée essentiellement aux ordonnances de protection en matière civile et en n’appliquant qu’aux condamnations futures certaines interdictions importantes liées aux permis.

Sénateur, pouvez-vous expliquer pourquoi, à ce jour, le gouvernement n’a pas mis en œuvre cette mesure de protection? Quand le gouvernement s’engagera-t-il à respecter un échéancier strict d’entrée en vigueur de ces dispositions de la loi issue du projet de loi C-21?

L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie pour cette importante question. Le projet de loi C-21 s’inscrit dans le plan global du gouvernement du Canada en vue de renforcer le contrôle des armes à feu au Canada et de protéger les Canadiens de la violence liée aux armes à feu. Je crois savoir que la plupart des mesures prévues dans le projet de loi C-21 ont maintenant été mises en œuvre.

Pour répondre à votre question, on m’a informé que les démarches en vue de mettre en œuvre la mesure imposant la révocation des permis d’arme à feu et le rejet des demandes de tels permis pour les personnes visées par une ordonnance de protection sont amorcées. Je n’ai pas de date précise à vous donner, mais ce travail s’inscrit dans le Plan prospectif de la réglementation 2024-2026. Je serais ravi de demander à mon bureau de vous faire parvenir ce plan dès que nous le recevrons.

La sénatrice Dasko : Merci. Au cours de ces deux années, au moins 11 femmes et filles ont été tuées par leur partenaire intime à l’aide d’une arme à feu au Canada. Les armes à feu et la violence familiale constituent une combinaison mortelle. Pourquoi le gouvernement propose-t-il de restreindre la portée de la loi alors que, si je ne m’abuse, cela va à l’encontre de l’intention du Parlement? Merci.

Le sénateur Moreau : Pour répondre à votre question, sénatrice, je n’ai connaissance d’aucune intention de limiter la portée de la loi qui a été adoptée. Je soulèverai certainement cette question auprès du ministre et je vous transmettrai toute information que je recevrai. Cela dit, je n’ai aucune information indiquant que le gouvernement ait l’intention de restreindre la portée de la loi.

Le Bureau du Conseil privé

Le Bureau des grands projets

L’honorable Jim Quinn : Sénateur Moreau, dans le cadre de l’examen de la Loi visant à bâtir le Canada, la désignation « projet d’intérêt national » s’applique-t-elle uniquement au projet comme tel ou s’applique-t-elle également aux infrastructures qui permettent d’acheminer les ressources issues du projet vers le marché? Par exemple, l’amélioration des éléments de la chaîne d’approvisionnement d’une mine, comme les corridors ferroviaires ou les corridors de service vers les ports, peut-elle être considérée comme un projet d’intérêt national?

L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : Je crois comprendre que le Bureau des grands projets vérifie si un grand projet crée des emplois et a des effets positifs sur l’économie. Ce sont les principaux critères utilisés pour classer un projet comme projet d’intérêt national. C’est ce que j’ai compris.

Le sénateur Quinn : Dans le cadre de la Loi visant à bâtir le Canada, comment le Bureau des grands projets peut-il faire progresser les projets d’intérêt national en rationalisant les processus d’examen fédéraux de l’intérêt national si on n’a pas défini ce que veut dire « intérêt national »?

Le sénateur Moreau : La notion d’« intérêt national » est très vaste. Je ne pense pas qu’il soit judicieux d’en donner une définition précise, car une définition trop restrictive de cette expression risquerait d’exclure certains projets en cours d’évaluation. Je pense qu’il est préférable de voir cette notion de la façon la plus large possible.

L’immigration, les réfugiés et la citoyenneté

Le système d’immigration

L’honorable Leo Housakos (leader de l’opposition) : Monsieur le leader du gouvernement, nous devrions tous nous alarmer d’apprendre l’existence d’un xième fiasco dans le système d’immigration du pays. Un non-citoyen âgé de 47 ans qui a plaidé coupable à des infractions d’ordre sexuel contre une mineure a obtenu qu’on interrompe le traitement de son dossier le temps qu’il évalue si son plaidoyer de culpabilité ne risque pas de nuire à son statut d’immigration.

On parle ici d’un homme, monsieur le leader, qui a agressé une mineure à répétition, même pendant qu’il était en liberté sous caution. Comment le gouvernement peut-il défendre un système où le statut d’immigration d’un délinquant violent semble avoir plus de poids que la sécurité et la dignité des victimes canadiennes?

L’honorable Pierre Moreau (représentant du gouvernement au Sénat) : Je ne connais rien du dossier dont vous parlez, sénateur Housakos. Je poserai la question au ministère, mais je peux vous dire que le gouvernement tient à ce que le processus d’immigration demeure extrêmement rigoureux et qu’il fasse en sorte que les Canadiens ne sentent pas que les procédures d’immigration mettent leur sécurité en danger.

Maintenant, pour ce qui est du cas dont vous parlez, si vous voulez bien me donner plus de détails, je vous reviendrai avec une réponse.

Le sénateur Housakos : Ce sera avec plaisir parce que je n’ai jamais rien vu d’aussi dégoûtant de toute ma vie. Ce n’est pas un cas isolé. Cette semaine, les représentants de l’Agence des services frontaliers du Canada ont déclaré que, parmi les quelque 33 000 personnes faisant l’objet d’une mesure de renvoi qui se sont tout simplement évaporées quelque part au pays, plus de 700 criminels étrangers demeurent en liberté au Canada. Je n’invente rien.

(1440)

Monsieur le leader, il ne s’agit pas de l’application de la loi, mais bien de l’abandon de nos obligations et de nos devoirs. Il s’agit essentiellement d’un gouvernement qui se dérobe à son devoir le plus fondamental envers les Canadiens.

Le sénateur Moreau : Sénateur, je ne suis évidemment pas d’accord avec votre conclusion. L’Agence des services frontaliers du Canada est un organisme indépendant en accord avec l’idée que le gouvernement souhaite que les Canadiens se sentent en sécurité au pays.

Si vous disposez de renseignements concernant ce cas précis, je ne ferai aucun commentaire tant que je ne les aurai pas reçus, puis je vous reviendrai avec une réponse précise.


ORDRE DU JOUR

Les travaux du Sénat

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, conformément à l’ordre adopté le 4 juin 2025, je souhaite aviser le Sénat que la période des questions avec l’honorable Patty Hajdu, c.p., députée, ministre de l’Emploi et des Familles et ministre responsable de l’Agence fédérale de développement économique pour le Nord de l’Ontario, aura lieu le mardi 9 décembre 2025, à 16 heures.

La Loi sur les Indiens

Projet de loi modificatif—Troisième lecture

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Audette, appuyée par l’honorable sénateur Francis, tendant à la troisième lecture du projet de loi S-2, Loi modifiant la Loi sur les Indiens (nouveaux droits à l’inscription), tel que modifié.

L’honorable Paul (PJ) Prosper : Honorables sénateurs, je prends aujourd’hui la parole au sujet du projet de loi S-2, Loi modifiant la Loi sur les Indiens (nouveaux droits à l’inscription), pour ce que j’espère sincèrement être la dernière fois.

Mardi, le Sénat a dû répondre à une question cruciale : fait-il assez confiance au travail accompli par le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones pour adopter son rapport, avec propositions d’amendements, rapport qui, je vous le rappelle, a été appuyé à 10 contre 1 par les membres du comité?

En prévision de ce vote important, mes collaborateurs et moi avons discuté avec les Grands Chefs, les Chefs, les conseillers, les jeunes, les organismes et les personnalités influentes qui étaient à Ottawa à l’occasion de l’Assemblée extraordinaire des Chefs de l’Assemblée des Premières Nations. Même si nous savions qu’une trentaine ou une quarantaine d’entre eux étaient intéressés, ce sont plutôt 100 personnes qui sont venues nous faire part de leur témoignage.

De très nombreuses personnes m’ont ensuite confié à quel point elles étaient fières de savoir qu’un des leurs avait pris la parole en leur nom dans cette auguste enceinte. Toute la journée, je me suis fait aborder par des Chefs et des participants que je n’avais jamais rencontrés auparavant et qui me faisaient part des mêmes sentiments.

Même si je suis conscient que cette façon de faire portait atteinte au protocole, j’ai trouvé que c’était un moment magnifique parce que les Premières Nations ont parcouru beaucoup de chemin entre le moment où elles étaient incapables de voter à celui où elles sont représentées dans les deux Chambres du Parlement. Il fut un temps où les parlementaires adoptaient des lois destinées à nous éradiquer; aujourd’hui, ils se portent plutôt à la défense de nos droits inhérents.

Pour une Chambre dont l’existence est sans cesse menacée, notre débat à l’étape du rapport a prouvé à ceux qui étaient présents dans la salle et à ceux qui écoutaient chez eux que le Sénat est un élément essentiel de notre démocratie. Il a été gratifiant d’entendre à maintes reprises des variations sur le thème suivant :

Je ne savais pas vraiment ce que faisait le Sénat. J’ai été très impressionné par la façon dont vous nous avez défendus et je suis très fier de vous.

Je tenais à ce que tous les sénateurs entendent ces mots, dans l’espoir que vous ressentiez de la fierté à l’égard de notre travail et de notre participation à un débat aussi important et historique.

Attardons-nous un peu sur ces mots, « un débat important et historique ». Je suis reconnaissant du soutien que m’ont accordé les détenteurs de droits dans tout le pays, mais je suis également conscient de la grande responsabilité que me confèrent leur confiance et leur foi. Je suis conscient du fait que, chaque fois que je prends la parole dans un comité, chaque fois que je prends la parole au Sénat et chaque fois que j’entreprends une initiative, je dois veiller à respecter les valeurs et les enseignements de mes ancêtres et à promouvoir des changements qui profiteront aux sept prochaines générations du peuple l’nu dans ce pays.

À plusieurs reprises au cours du processus, j’ai vécu des moments qui m’ont semblé presque surréalistes. Même dans mes rêves les plus fous, je n’aurais jamais pu m’imaginer que, en tant que membre d’un comité sénatorial, je lirais une modification visant à abroger le paragraphe 6(2) de la Loi sur les Indiens. Je me souviens m’être dit : « Suis-je vraiment en train de faire ça? »

Je n’aurais jamais cru pouvoir compter parmi mes amis des guerrières comme Sharon McIvor, Pam Palmater, Mary Eberts, Shelagh Day, Jeannette Corbiere Lavell, Dawn Lavell-Harvard, la Cheffe Marilyn Slett, Cora McGuire-Cyrette, Zoë Craig-Sparrow et Rachel Singleton-Polster, avec qui j’ai eu l’immense honneur de travailler. Hier encore, je participais à un groupe de discussion à l’Assemblée des Premières Nations avec Sharon McIvor, et elle a reçu une ovation debout dès qu’on lui a demandé de monter à la tribune. C’est dire à quel point sa contribution à la lutte pour l’égalité et l’inclusion a été importante.

Maintenant, les sénateurs sont appelés à écrire leur propre chapitre dans cette histoire de lutte contre la discrimination inscrite dans la Loi sur les Indiens, histoire qui remonte à plusieurs décennies.

Les modifications visant à éliminer l’exclusion après la deuxième génération et la date limite de 1985, et à rétablir la règle du parent unique n’ont jamais été une option pour moi. J’ai toujours estimé qu’elles faisaient partie de ma responsabilité d’écouter mes aînés et ma communauté.

La règle de l’exclusion après la deuxième génération a été imposée unilatéralement par le Canada en 1985 dans le cadre du projet de loi C-31 comme moyen d’éliminer ce qu’on appelait le « problème indien ». Cette règle signifiait que nous finirions par être assimilés à la société canadienne, car les législateurs de l’époque savaient que nous ne pourrions pas survivre si nous étions obligés de nous marier entre nous uniquement pour préserver notre statut.

Par le libellé de ce projet de loi, le Canada a également créé une réalité absurde, où les frères et sœurs de mêmes parents peuvent avoir des statuts différents, et donc des droits différents en ce qui concerne la transmission du statut — ce qui signifie que des grands‑parents pourraient dorénavant avoir un mélange de petits‑enfants inscrits et non inscrits. Certains petits-enfants pourraient accéder à des programmes, à des services de santé et à de l’aide pour les études, et ce, en conformité avec la responsabilité légale et fiduciaire du gouvernement envers les Premières Nations ainsi qu’avec ses responsabilités en vertu des traités. En revanche, d’autres petits-enfants n’auraient pas accès à ces avantages.

Le retour à une règle permettant la transmission du statut par un seul parent ferait en sorte que les femmes victimes d’inceste ou de viol, ou dont le conjoint refuse de signer les papiers visant à reconnaître ses enfants comme moyen d’abuser d’elles ou d’exercer un pouvoir sur elles, n’auraient pas à aller voir leurs Chefs, les larmes aux yeux, pour les supplier de signer les documents en tant que père afin que leurs enfants puissent avoir un statut.

Il ne s’agit pas de situations théoriques. Il s’agit d’expériences réelles vécues par les Premières Nations partout au pays. J’ai entendu d’innombrables témoignages de personnes provenant des quatre coins de notre pays. Les décisions que nous rendons dans cette Chambre auront des répercussions au fil du temps et elles entraîneront des changements bénéfiques à long terme.

(1450)

Certains allégueront qu’une vague sans précédent de faux Autochtones se manifestera et que des personnes ayant un parent autochtone éloigné ayant vécu il y a 100 ans seront soudainement inscrites. C’est tout simplement faux. L’exclusion après la deuxième génération est une disposition qui date de 1985. Cela signifie que les personnes visées par le paragraphe 6(2) sont âgées de 40 ans ou moins. Il faut garder à l’esprit qu’il s’agit de reconnaître légalement le statut de leurs enfants et, dans certains cas, de leurs petits-enfants. Nous parlons d’enfants qui sont des descendants en ligne directe.

Selon les données de Statistique Canada, ces modifications toucheraient environ 300 000 personnes au cours des 40 prochaines années. Cela représente environ 7 000 personnes par an, réparties dans 634 bandes.

D’autres opposants à ces modifications évoqueront les implications financières. Dans les faits, le financement des communautés autochtones est déterminé en fonction du nombre d’habitants. Plus les délais s’étireront avant de reconnaître le statut de ces enfants, plus les communautés autochtones devront piger dans leurs revenus autonomes pour soutenir ces membres de leur communauté, alors que ces revenus sont normalement destinés à réduire la dépendance des communautés autochtones aux transferts gouvernementaux.

D’autres encore dénonceront la dilution des lignées. Quelques minorités se sont exprimées sur la nécessité d’imposer une sorte de limite. Ce n’est pas un enseignement autochtone avec lequel j’ai été élevé. Les autres nations qui en sont convaincues sont certainement en mesure de définir leur propre code en vertu de l’article 10 de la Loi sur les Indiens. Beaucoup l’ont fait.

De même, il convient de noter que le statut n’affecte pas la capacité d’une nation à déterminer l’appartenance. L’admissibilité à l’appartenance à une bande peut être adaptée en vertu de l’article 10. L’appartenance peut être déterminée dans un accord officiel d’autonomie gouvernementale. Le statut est la relation juridique entre un Indien au sens de la Loi sur les Indiens et la Couronne. Il n’est pas facile de se dégager de cette relation. Il faudra des décennies, voire des générations, avant que les Premières Nations puissent se libérer véritablement de la Loi sur les Indiens. C’est dire à quel point cette politique coloniale, patriarcale et raciste est profondément ancrée dans la vie des Premières Nations.

Lors de l’étude article par article de ce projet de loi et tout au long de l’étape du rapport, j’ai été ravi d’entendre le sénateur Moreau parler de l’engagement du gouvernement à mener une véritable consultation significative. J’espère sincèrement que cet engagement sera respecté uniformément dans toutes les initiatives à venir du gouvernement, car je n’ai pas vu de consultations être menées avant la réduction du financement associé au principe de Jordan ni lorsque le gouvernement a annoncé être prêt à considérer la construction d’un pipeline qui nécessiterait une exemption partielle de l’interdiction des pétroliers au large des côtes de la Colombie-Britannique, une mesure largement dénoncée par les Premières Nations de cette province.

Sénateurs, nous avons entendu les représentants de 28 des 75 nations, communautés et organismes prenant part au processus collaboratif au sein du comité. Ils ont clairement indiqué qu’ils avaient été contraints par le Canada de se lancer dans un nouveau processus, alors qu’ils souhaitaient en fait ne plus discuter de cette question et passer à l’action dès maintenant.

La Grande Cheffe Kyra Wilson, de l’Assemblée des chefs du Manitoba, qui représente 6 des 75 participants au processus collaboratif, a déclaré :

Je suis ici pour parler de la question qui menace la survie de nos nations, à savoir l’utilisation par le Canada du paragraphe 6(2) de la Loi sur les Indiens comme politique de génocide prévu par la loi.

Je sais que nous sommes ici pour parler du projet de loi S-2 et de la façon dont il vise à corriger certaines de ces injustices et traite de l’émancipation, mais il ne s’attaque pas au préjudice plus profond qui est enchâssé dans la loi. À l’heure actuelle, ce que nous voyons, c’est que le Canada continue de décider qui sont nos gens. Pour moi, c’est un problème. Je sais que bon nombre de nos Premières Nations considèrent aussi cela comme problématique.

Voici ce qu’a dit Marilyn Slett, Cheffe élue du Conseil tribal Heiltsuk et secrétaire-trésorière de l’Union of British Columbia Indian Chiefs, qui représente 21 des 75 participants au processus collaboratif :

En ce qui concerne la disposition relative à l’exclusion après la deuxième génération, notre position n’a pas bougé : elle doit être supprimée de la Loi sur les Indiens, et nous devons revenir à la règle du parent unique en vigueur avant 1985. Elle doit s’appliquer uniformément aux hommes et aux femmes afin d’éviter l’extinction légiférée. La suppression de la disposition sur l’exclusion après la deuxième génération bénéficie de l’appui de militants, du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes des Nations unies, ou CEDAW, et elle est explicitement réclamée par les Premières Nations dans leurs résolutions.

Au cours d’une conférence de presse sur le projet de loi S-2, le Grand Chef Norman Sylliboy du Grand Conseil des Mi’kmaqs a dit ceci :

Nous voulons que le Canada mette immédiatement fin à la discrimination envers les Mi’kmaqs dans la Loi sur les Indiens. Le Canada continue de retarder la fin de cette discrimination.

En vertu de la Constitution du Canada et de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, le Santé Mawio’mi a le droit de déterminer qui est Mi’kmaq.

En adoptant la Loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones en 2021, le Canada s’est engagé à rendre la Loi sur les Indiens conforme à la Déclaration.

Le Santé Mawio’mi soutient pleinement les amendements proposés par le sénateur Prosper visant à mettre en œuvre nos droits constitutionnels et nos droits de la personne fondamentaux.

Honorables sénateurs, notre comité a entendu à maintes reprises qu’il était temps d’agir.

Je veux faire part aux sénateurs de quelques observations concernant la chronologie qui proviennent du site Web du gouvernement sur le processus de collaboration.

Tout d’abord, la chronologie qui a mené au processus de collaboration montre que nous discutons de la fin de l’exclusion après la deuxième génération depuis sept ans, sous trois ministres différents. Nous savons que la ministre Gull-Masty a seulement relancé le processus de collaboration en septembre 2025. Cela s’ajoute à tout le travail qui a été accompli au cours des 40 dernières années.

Le site Web précise ensuite que les activités et les événements liés au processus de consultation comprendront du temps pour l’évaluation de la viabilité et de l’impact juridique d’une solution proposée par un groupe d’experts. Pam Palmater, qui fait partie de ce groupe, m’a informé que celui-ci n’avait pas encore été formé.

Nous savons aussi que le 28 octobre 2025, lors de la période des questions au Sénat, la ministre Gull-Masty a refusé de préciser un échéancier pour la fin de ces consultations. Elle a dit :

Je ne donnerai pas d’échéancier pour une raison bien précise. Je ne presserai pas les communautés avec lesquelles je travaille pour trouver une solution qui respecte l’échéancier d’un organisme extérieur. Il faut respecter les partenaires avec qui nous menons des consultations. Il faut leur donner la latitude dont ils ont besoin pour faire ce travail. Je sais et je sens que le Sénat est vraiment pressé de s’attaquer à cette question, et je partage ce sentiment d’urgence.

(1500)

Chers collègues, tout comme les autres sénateurs favorables à ces amendements, je n’ai jamais remis en question la sincérité du désir exprimé par le ministre Gull-Masty de mettre fin à l’exclusion après la deuxième génération, mais je suis obligé de tenir compte de certaines réalités.

La première, c’est que le gouvernement est minoritaire. Nous avons sûrement tous le souvenir de l’atmosphère tendue qui régnait sur la Colline du Parlement, alors qu’on se demandait si le budget allait être adopté à l’issue d’un vote de confiance à l’autre endroit. Nous avons évité de justesse la tenue d’élections en hiver. Qu’adviendra-t-il des enfants touchés par l’exclusion si le gouvernement tombe avant la fin des consultations? Qu’arrivera-t-il aux enfants si le gouvernement n’arrive pas à faire adopter un projet de loi distinct à temps? Avec ces amendements, qui prévoient un délai d’un an avant l’entrée en vigueur, nous offrirons un filet de sécurité en cette période incertaine et imprévisible.

Lorsque le projet de loi C-38, le prédécesseur du projet de loi S-2, est mort au Feuilleton au cours de la dernière législature, nous ne pouvions pas prévoir que la vice-première ministre et ministre des Finances de l’époque allait démissionner de son poste et déclencher ainsi une suite d’événements qui allaient mener à la démission du premier ministre de l’époque, à une course à la direction du Parti libéral, à la dissolution du Parlement et à des élections au printemps. Avec un gouvernement minoritaire, nous ne pouvons rien tenir pour acquis.

Un autre scénario serait celui où la ministre serait en mesure de déposer un projet de loi distinct qui ouvrirait aux Premières Nations la voie vers la citoyenneté véritable et l’autodétermination. Je me suis adressé au Bureau du légiste et conseiller parlementaire, où l’on m’a assuré que des dispositions de coordination pourraient être rédigées pour tenir compte de ces amendements s’ils étaient adoptés.

Je tiens également à souligner que la transition vers la citoyenneté prend du temps. L’expérience de Jeannette Corbiere Lavell nous apprend que les travaux sur le code de citoyenneté de la Nation des Anishinabes ont débuté en 2008. Après consultation de la communauté, il a été adopté par la nation en 2011. Cependant, ce n’est que récemment que la nation a disposé des capacités et des fonds nécessaires pour mettre en œuvre son code de citoyenneté. Tout cela a donc pris 17 ans.

Honorables sénateurs, qu’adviendra-t-il des enfants qui sont demeurés sans statut au cours de ces 17 années? C’est toute une génération qui reste dans l’attente, toute une génération qui ne peut pas bénéficier des programmes et des services réservés aux Indiens inscrits. Dans ce cas-ci, ces amendements constituent une mesure provisoire visant à faire en sorte qu’aucun enfant des Premières Nations ne soit laissé pour compte.

Dans la lettre de la ministre dont le sénateur Moreau a fait part, la ministre parle de trouver un consensus, mais il n’y a jamais eu d’exigence de consensus unanime sur un projet de loi touchant les Premières Nations auparavant. Le sénateur Moreau a également souligné le souhait de la ministre de voir ces solutions venir de la communauté. Or, je dirais que nous avons entendu et constaté le soutien de la communauté à ces amendements.

À titre de rappel, l’Assemblée des Premières Nations de la Colombie-Britannique, qui représente 204 Premières Nations de la province, a adopté une résolution en faveur de ces amendements. Les 13 Chefs de la Nouvelle-Écosse les appuient eux aussi, tout comme les 15 Premières Nations du Nouveau-Brunswick. L’Assemblée des chefs du Manitoba, les Manitoba Keewatinowi Okimakanak et l’Organisation des chefs du Sud sont également favorables à ces amendements. Enfin, la Nation des Anishinabes, qui représente 39 Premières Nations, et la nation nishnawbe-aski, qui représente 49 Premières Nations de l’Ontario, ont publié des déclarations d’appui.

J’ai rencontré les représentants de la Fédération des nations autochtones souveraines, et ils sont en faveur de ces amendements, tout comme les nations du Traité no 6, du Traité no 7 et du Traité no 8.

La Grande Cheffe Alatini du Conseil des Premières Nations du Yukon, qui représente 9 des 14 Premières Nations du Yukon, a décrit le paragraphe 6(2) comme « une extinction légiférée à retardement ».

Le Chef national des Dénés, George Mackenzie, qui représente 30 communautés, nous a dit ceci :

Mais si vous êtes le descendant d’une personne ayant eu le statut par le passé, que ce soit vos parents ou vos grands‑parents, cela doit être respecté. Qui peut dire que vous n’êtes plus Indien? Vous êtes né Indien et vous mourrez Indien. Il est essentiel que cela soit bien compris.

Pour ceux qui tiennent le compte, plus de 360 Premières Nations sur 634 ont expressément soutenu ces amendements. Sénateurs, c’est la solution que souhaite la communauté.

Chers collègues, pour ma part, je n’ai pas l’intention de développer un syndrome du canal carpien à force de manier un tampon en caoutchouc.

Dawn Lavell-Harvard, directrice de la Maison d’apprentissage des Premiers Peuples de l’Université Trent et ancienne présidente de l’Association des femmes autochtones du Canada, a expliqué ceci :

En 1985, avec la création de la catégorie découlant du paragraphe 6(2), le gouvernement a instauré une situation juridique qui cause un préjudice irréparable à nos jeunes. Nous savons qu’il est essentiel pour la santé mentale d’avoir un sentiment d’appartenance. Toutefois, nous voyons chaque jour des jeunes des Premières Nations en situation de crise, qui ont le sentiment de ne pas appartenir à leur Première Nation, de ne pas avoir le droit d’y être, de ne pas être de vrais Indiens, d’être inférieurs aux autres membres de la communauté parce qu’ils ont le statut qui découle du paragraphe 6(2).

Nous ne pouvons pas laisser nos enfants continuer de souffrir, isolés à cause de leur absence de statut.

Il y a de nombreuses années, à la Faculté de droit, j’ai étudié la notion de préjudice irréparable en ce qui a trait aux personnes qui demandent une injonction. Dans sa forme élémentaire, il s’agit d’un préjudice qui ne peut être réparé au moyen d’un dédommagement monétaire, qui ne peut être quantifié et auquel il est impossible de remédier.

Au cours des deux derniers jours, j’ai parlé à de nombreux rassemblements à l’Assemblée extraordinaire des Chefs. Beaucoup de gens m’ont parlé du projet de loi S-2 et des répercussions que les dispositions de la Loi sur les Indiens relatives à l’inscription ont eues dans leur vie. Certains ont parlé d’un préjudice irréparable associé à la séparation et à l’isolement.

Hier soir, j’ai eu le plaisir inattendu de m’entretenir de nouveau avec Sharon McIvor, une véritable matriarche dans tous les sens du terme. Elle m’a confié que parfois, des gens venaient la voir et, après s’être brièvement présentés, lui disaient : « Je suis l’un des vôtres. »

Ces histoires parlent des liens familiaux, de l’identité et de l’appartenance. Elles traitent du droit de tomber amoureux, d’avoir des enfants et de laisser un legs aux générations futures. Il ne s’agit pas seulement d’un droit légal, mais d’un droit de la personne fondamental.

(1510)

Chers collègues, si vous me le permettez, je vous invite à faire une pause, à vous détendre, à fermer les yeux et à imaginer que, dans un avenir pas trop lointain, au cours de votre journée, un parfait inconnu s’approche de vous. Il se présente et vous dit : « Je suis l’un des vôtres. »

Honorables sénateurs, je vous invite à voter en faveur de ce projet de loi et à le renvoyer à l’autre endroit où j’espère que nos homologues élus écouteront la volonté de la majorité de leurs citoyens des Premières Nations et accepteront ce projet de loi tel qu’il a été amendé. Wela’lioq. Merci.

L’honorable David M. Arnot : Honorables sénateurs, je prends la parole parce que le Sénat se trouve à la croisée des chemins, non pas à cause de ce que nous avons fait hier, mais plutôt à cause de ce que, selon moi, nous serons appelés à faire demain.

Hier, nous nous trouvions également à la croisée des chemins, et nous avons répondu à la première des trois questions qui, bien qu’elles ne figurent pas dans le plumitif, encadrent ce débat et continueront de le faire. Voici les trois questions :

Premièrement, les règles de procédure devraient-elles primer sur la nécessité de répondre à l’injustice structurelle?

Deuxièmement, devons-nous rester silencieux face aux mécanismes juridiques colonialistes qui continuent de priver les peuples autochtones de leurs droits, simplement parce qu’ils sont ancrés dans la loi?

Troisièmement, en tant que Chambre chargée de protéger les droits des minorités, devons-nous refuser d’agir, même symboliquement, lorsque la loi elle-même est injuste?

Les règles de procédure doivent-elles l’emporter sur la nécessité de lutter contre les injustices structurelles? Le Sénat a répondu par un « non » catégorique. En appuyant le projet de loi S-2 tel que modifié, nous affirmerons notre rôle suprême, qui est de témoigner des injustices et d’en dénoncer les répercussions persistantes. En adoptant le rapport sur le projet de loi S-2, le Sénat a affirmé que les principes de justice, d’équité et de vérité doivent prévaloir, même lorsque les règles disent « pas encore ».

Nous avons peut-être répondu à la première question, mais notre travail est loin d’être terminé. J’espère que la version amendée du projet de loi va être renvoyée à l’autre endroit. Les députés ont le droit de l’adopter ou de le rejeter. Tout semble annoncer un rejet. Nous devons nous préparer, nous et les Premières Nations, à cette issue probable. Les espoirs que nous avons suscités pourraient donc être bientôt anéantis.

Honorables sénateurs, ne désavouons pas ce que nous avons fait. Misons plutôt sur ce travail. Ce qui s’est produit ces derniers jours est précisément ce pour quoi le Sénat a été créé. Nous avons témoigné de l’injustice. Nous avons parlé avec courage. Nous avons fait passer les intérêts des prochaines générations avant les considérations du jour. C’était le Sénat à son meilleur.

Une bonne part de ce que nous avons fait hier découle directement de la nouvelle indépendance du Sénat. La majeure partie du Sénat actuel est non partisane. Si le Sénat avait été partisan, je ne crois pas que nous aurions réussi à accomplir ce qui a été fait hier. C’est cette indépendance qui nous a permis d’agir, avec rigueur morale et intégrité procédurale, pour faire tomber une injustice structurelle. Les sénateurs ont énoncé la vérité et se sont portés à sa défense.

Les propos du sénateur Prosper et de la sénatrice White étaient très réfléchis. Bien qu’ils aient soulevé des aspects différents, leurs points de vue allaient dans la même direction, soit l’urgence d’éliminer l’exclusion après la deuxième génération et de réparer les dommages causés par cette règle.

La sénatrice Audette a déclaré ceci :

[P]our chaque décision rendue ayant trait à la Loi sur les Indiens et à ce qui touche les statuts, l’émancipation ou la discrimination entre les hommes et les femmes en vertu des paragraphes 6(1) et 6(2), que ce soit de façon timide ou frappante, comme Parlement, nous avons dit : « On peut faire plus. » Nous essayons de faire comprendre que nous avons cette responsabilité.

La sénatrice McCallum, elle, a dit ceci :

Nous devons montrer aux Canadiens que nous défendons la justice et l’égalité pour tous. En adoptant ce rapport et en agréant le projet de loi S-2 amendé, nous enverrions un message fort aux Premières Nations, et notamment aux femmes et aux enfants des Premières Nations, leur indiquant qu’ils méritent l’égalité, qu’ils ont leur place dans leur propre pays et qu’ils contribuent à « bâtir un Canada fort ».

Le sénateur Housakos a déclaré ceci :

[E]n fin de compte, le gouvernement, à l’autre endroit, fera ce qu’il veut. Il a ce droit. Il a été élu. Mais pour aider le gouvernement et l’autre endroit à trouver une meilleure solution, nous avons le droit de signaler des problèmes, d’attirer leur attention sur certaines choses et de leur faire part d’éléments, parmi les voix et les régions du pays, qu’ils ont peut-être négligés.

Honorables sénateurs, la Loi sur les Indiens est souvent décrite comme une bête, un instrument de colonialisme législatif qui résiste à toute tentative de démantèlement. Pourtant, hier, le Sénat lui a enlevé un peu de son mordant. Ce faisant, il a répondu à la deuxième et à la troisième questions qui se posaient à nous.

Devrions-nous rester silencieux face aux mécanismes coloniaux qui continuent de nier leurs droits aux Autochtones simplement parce qu’ils sont inscrits dans la loi? Devrions-nous, en tant que Chambre chargée de protéger les droits des minorités, refuser d’agir, même symboliquement, lorsque la loi elle-même est injuste? Notre réponse doit demeurer un « non » catégorique.

Chers collègues, nous avons répondu clairement à la première question. Reconnaissons maintenant la réalité de notre situation. Il a été clairement indiqué que l’amendement adopté par le Sénat était considéré comme irrecevable par le gouvernement. Il est très probable que l’autre endroit rejettera l’amendement. Si tel est le cas, cela n’effacera pas la vérité que nous avons exprimée, mais cela signifiera que les témoins qui ont comparu devant le Comité des peuples autochtones et dont les témoignages ont ému bon nombre d’entre nous ne bénéficieront pas de mesures réparatoires grâce à ce projet de loi — du moins pas pour l’instant.

La bonne nouvelle, c’est que notre travail en tant que Chambre n’est pas terminé. En fait, il ne fait que commencer. Le Sénat a fait valoir, sur le plan moral, juridique et parlementaire, que la règle d’exclusion après la deuxième génération est une blessure coloniale et que la loi peut être modifiée pour refléter la justice.

Si l’autre endroit n’est pas d’accord, cela ne met pas fin à notre responsabilité; cela ne fait que la renforcer. Nous avons désormais le devoir d’examiner ce que le Sénat peut faire d’autre par l’intermédiaire de ses comités, de ses interpellations, de ses études et de son autorité procédurale pour que les espoirs suscités ne soient pas définitivement anéantis.

Je vais adapter un vieil adage : « Si une porte se ferme à l’autre endroit, ouvrons-en une autre ici. »

Honorables sénateurs, nous devons montrer aux Premières Nations qu’un Sénat nommé peut utiliser tous ses pouvoirs constitutionnels pour demander des comptes au gouvernement. Le vote au Sénat est notre outil le plus visible, mais ce n’est pas le seul. Nous pouvons lancer une étude en comité, comme le permettent notre Règlement, la Constitution et nos pouvoirs de sénateurs. Nous pouvons collaborer avec les comités, et je crois que les comités et les sénateurs de toutes les allégeances peuvent collaborer entre eux pour enquêter sur les effets à long terme de l’exclusion après la deuxième génération. Nous pouvons demander des comptes au gouvernement pour ses 40 années de manquement à ses obligations fiduciaires.

Je vais être clair : pendant quatre décennies, les gouvernements canadiens successifs n’ont pas agi dans l’intérêt des peuples autochtones. Ils ont agi dans l’intérêt du Trésor fédéral. L’exclusion après la deuxième génération n’est pas une simple politique. Il s’agit à mon avis d’un manquement continu à l’honneur de la Couronne et à son obligation fiduciaire. C’est une violation aux droits conférés par traité, aux droits des Autochtones. C’est une violation des droits de la personne. C’est incontestable.

(1520)

La manière dont le Canada traite les peuples autochtones est une honte nationale. Il s’agit d’une tache sur notre réputation internationale, et c’est profondément contraire aux valeurs démocratiques si chères aux Canadiens. La règle de l’exclusion après la deuxième génération est un mécanisme qui perpétue la honte en inscrivant la discrimination directement dans la loi.

La Cour suprême du Canada a conclu que l’honneur de la Couronne est en jeu du moment où elle interagit avec les peuples autochtones. Cet honneur commande la bonne foi, un traitement équitable, la tenue de consultations et la protection des droits autochtones et des droits conférés par traité. C’est non négociable.

D’autres sénateurs avant moi ont dénoncé la situation. Le temps est venu d’agir.

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones a entendu toutes sortes de vérités convaincantes, précises, factuelles et crédibles. Selon moi, cet amendement était tout simplement logique, en plus de s’appuyer sur l’empathie et un terrible vécu.

Les Canadiens ne veulent pas d’un Sénat qui agit sur le coup de la partisanerie ou de l’émotion. Ils veulent que ses décisions soient justes, qu’elles reposent sur des principes et qu’elles respectent la primauté du droit. Or, le droit commande l’équité procédurale, l’intégrité morale et l’équité.

La loi ne balise pas seulement le fonctionnement, elle touche aussi au contenu. Quand la loi cause des préjudices, nous, parlementaires, avons le pouvoir et le devoir de la corriger.

Le gouvernement fédéral croit à la réconciliation. Pas plus tard qu’hier, il a annoncé son intention de régler une fois pour toutes les problèmes qui se rapportent à la protection des enfants autochtones. Il s’agit d’un engagement important qui montre que, lorsque la volonté politique est là, les lois et les politiques peuvent être transfigurées.

Je crois le gouvernement du Canada lorsqu’il promet de régler le plus tôt possible le dossier de l’exclusion après la deuxième génération, au paragraphe 6(2). Nous devons toutefois faire en sorte que cette confiance s’accompagne de reddition de comptes. Le Sénat doit absolument obliger le gouvernement à tenir parole.

Comme je l’ai dit tout à l’heure, je crois que le Sénat est actuellement à la croisée des chemins.

Aujourd’hui, il faut voir au-delà du vote. Il faut reconnaître que notre défi consiste désormais à éviter que le Sénat donne lieu à de belles paroles bien senties suivies d’un recul législatif.

Nous ne pouvons pas nous contenter de dire que notre travail est fait et passer à autre chose. Nous trahirions ainsi tout ce qui a été fait pour les gens que nous prétendons vouloir aider.

Nous nous devons d’agir. Je crois que les sénateurs devront répondre à cet appel pour s’attaquer de nouveau à la règle de l’exclusion après la deuxième génération.

À cette fin, nous devons utiliser tous les outils à notre disposition : les comités, les études, les questions parlementaires, les rapports indépendants, les témoins autochtones et le courage institutionnel.

Permettez-moi de sortir des sentiers battus. Je pense que cette question pourrait nécessiter une collaboration unique entre le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, peut-être le Comité sénatorial permanent des droits de la personne et peut-être le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Il se pourrait qu’un mandat intercomités soit requis.

Hier, nous avons dit nos vérités. Aujourd’hui, nous devons les incarner.

Nous devons montrer aux Premières Nations que le Sénat du Canada n’est pas seulement une Chambre de beaux discours, mais aussi une Chambre qui a de la détermination.

Que ce soit là notre héritage : non pas celui d’une assemblée qui a observé et attendu, mais celui d’une assemblée qui est intervenue et a réagi.

Nous n’avons pas fini d’entendre parler de la règle d’exclusion de la deuxième génération. Le sujet sera soulevé de nouveau. Ce sera bientôt. Quand cela se produira, ne nous laissons pas prendre au dépourvu.

Soyons prêts, ensemble et en faveur de la justice.

J’appuie l’adoption du projet de loi. Merci. Kinanâskomitinawow.

Des voix : Bravo!

Son Honneur la Présidente : Sénatrice Batters?

L’honorable Denise Batters : Le sénateur Arnot accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Arnot : Oui.

La sénatrice Batters : Merci beaucoup d’avoir souligné la grande qualité du débat que nous avons eu ces derniers temps sur ce projet de loi. Je suis d’accord pour dire que le niveau du débat a été excellent. J’ai été très heureuse de le constater, car j’ai l’impression que c’est ce que le Sénat devrait toujours offrir.

C’était un moment très spécial, qui s’est ajouté à d’autres que nous avons vécus, par exemple, le débat sur la légalisation de la marijuana et le débat sur l’aide au suicide — le premier —, alors que les conservateurs, dans l’opposition, étaient beaucoup plus nombreux et, en fait, probablement majoritaires. Nous avons tenu des débats de grande qualité, et je suis heureuse que celui-ci en soit un autre.

Vous avez parlé des différents outils que le Sénat peut utiliser si, effectivement, le gouvernement rejette cet amendement après que nous l’avons adopté et renvoyé à la Chambre des communes. Il y a un autre outil que je vous demande d’examiner : la possibilité pour le Sénat d’insister sur son amendement auprès de la Chambre des communes. Qu’en pensez-vous?

Le sénateur Arnot : Je n’ai rien à dire à ce sujet, mais, sénatrice Batters, vous avez toujours d’excellentes idées. Je pense que nous devrions tous y réfléchir.

Des voix : Bravo!

L’honorable Mary Jane McCallum : Honorables sénateurs, je prends la parole à l’étape de la troisième lecture du projet de loi S-2, Loi modifiant la Loi sur les Indiens (nouveaux droits à l’inscription), tel que modifié.

Avant de commencer, je tiens à informer le Sénat que, avec l’aide de Jackie et de Jeffrey, du caucus conservateur, j’ai rencontré le conseiller en éthique, qui a conclu que je n’étais pas en situation de conflit d’intérêts. Il m’a notamment posé la question suivante : « Avez-vous un intérêt personnel dans cette affaire? » J’ai répondu :

Non. Ce sont des droits que les Premières Nations ont toujours eus, et la Loi sur les Indiens, qui est raciste et discriminatoire, les en a privées. Ce que nous faisons, c’est leur rendre ces droits.

Le conseiller en éthique a répondu : « D’accord. »

Des voix : Bravo!

La sénatrice McCallum : Avant d’aborder le sujet dont nous sommes saisis, je tiens à rendre hommage à nos ancêtres qui sont avec nous aujourd’hui. Je salue leur dévouement, leur persévérance et leur ténacité à nous ouvrir la voie, celle sur laquelle vous avancez aujourd’hui, celle sur laquelle nous avançons tous. S’ils l’ont fait, c’est pour que nous ne soyons pas dans la même situation qu’eux. Nous sommes aujourd’hui la septième génération; nous sommes aussi des ancêtres vivants. Cela signifie que nous avons le devoir d’ouvrir la voie pour les générations qui se tournent vers nous et nous demandent : « Que faites-vous pour rendre ce monde meilleur pour moi? »

Je tiens à remercier l’auteure d’une lettre qui nous a été envoyée. Merci à Amylie. Elle nous regarde. Je remercie tout spécialement ses parents de m’avoir autorisée à lire cette lettre destinée aux sénateurs. Je cite:

Je m’appelle Amylie Sioui, j’ai 11 ans et je suis en 4e année. Je suis la fille de Sabryna Sioui, ma maman wendat. J’aimerais ne pas devoir écrire cette lettre. Je devrais être avec mes amis en train de m’amuser. En fait, je n’ai vraiment pas envie de l’écrire parce que chaque fois que je pense aux mots que je souhaite utiliser, j’ai de la colère en moi qui monte et je sens comme une drôle de sensation dans mon ventre. J’ai demandé à ma maman pourquoi je ressentais ces sensations désagréables dans mon ventre. Elle m’a dit : « Amylie, c’est ce qui arrive quand on est anxieuse. Ça s’appelle de l’anxiété ».

Ce jour-là, j’ai appris ce qu’était l’anxiété. Pourtant, même si je ne connaissais pas le mot, ce n’était pas un sentiment nouveau pour moi. En fait, au cours des dernières années, je l’ai ressenti plusieurs fois ce sentiment. Je disais toujours que j’étais « stressée », mais c’est bien plus profond que ça. Voyez-vous, j’ai 11 ans et je suis fatiguée. Fatiguée d’être anxieuse. Alors j’ai décidé de vous raconter une partie de mon histoire comme enfant wendate sans statut. L’histoire d’une enfant qui veut appartenir à quelque chose qui est si proche et si loin en même temps. Mon histoire! Celle dans laquelle je me sens rejetée par ma propre communauté et ceux qui font les règles qui m’empêchent d’être qui je suis.

(1530)

Chaque jour, je me lève chez moi, à Wendake. Je vis là avec ma mère! Pas à Québec, à Wendake. C’est la seule chose que je connais, Wendake. C’est ma maison. Ensuite, je quitte notre maison et je me rends à l’école primaire Wahta’, ça veut dire érable en langue wendat. Je ne l’ai pas dit encore, mais j’apprends le wendat à l’école. J’adore ça parce que je trouve que ça sonne vraiment bien et en plus je suis bonne.

Quand on a des cours de langue, j’ai l’impression que je fais un petit voyage dans le temps parce que mes ancêtres parlaient cette langue. Je dis « mes ancêtres » parce que c’est ça que ma mère m’a appris. Elle est wendat et tous ceux de ma famille qui sont venus avant elle étaient aussi wendat. En tout cas au moins une personne à chaque génération. Ça remonte tellement loin, que ma mère ne pouvait même plus m’aider.

Mais voyez-vous, quand je serai grande et que j’aurai peut-être un enfant, et peut-être lui aussi après, je ne serai jamais l’ancêtre wendat de quelqu’un. Même si je sais qu’au fond de moi que je suis wendat, je sais aussi que ma communauté ne me reconnaît pas et que le gouvernement a une loi qui elle aussi ne me reconnait pas.

Je ne devrais pas m’intéresser à ça ou connaître ça, surtout que j’ai juste 11 ans, mais j’ai fait des recherches avec ma mère. J’avais trop de questions, trop de colère et de frustration chaque fois qu’on m’a dit que je ne pouvais pas participer à une activité. Normalement, à 11 ans, je devrais me lever le matin et avoir comme seule préoccupation d’aller à l’école de ma communauté et espérer avoir la chance de participer aux super activités qui sont organisées au cours de l’année.

Je ne devrais pas me forcer à trouver des mots que je n’utilise pas d’habitude pour essayer de décrire ma tristesse dans une lettre adressée à des adultes travaillant dans une autre ville.

Parce que de la tristesse et des larmes, j’en ai versé beaucoup dans les deux dernières années. Il y a eu la fois où je n’ai pas pu participer au camps Tourilli. C’est un camp d’été qui nous permet d’aller en forêt pendant plusieurs jours et de faire pleins d’activités liées à la culture wendat. Mais je ne pouvais pas y aller parce que je n’ai pas de numéro de bande. La majorité de ma classe y allait parce qu’ils sont des Wendat statués. Il y a eu aussi la fois du concours d’écriture d’un témoignage sur nos ancêtres pour le musée de la communauté. On devait écrire un texte sur un ancêtre de notre choix et ce qu’il représentait pour nous, et les meilleurs textes choisis allaient être exposés au musée. On pouvait même gagner un certificat cadeau si notre texte était choisi.

J’avais mis beaucoup d’effort dans mon texte. J’avais choisi Marguerite Vincent Lawinonkie, une des plus grandes femmes wendat ayant existé. Quand j’ai su que j’avais été choisie, j’étais tellement contente. Le problème c’est qu’il y avait un peu trop de textes choisis. Et bien pour arriver à un nombre plus petit, les enseignants ont décidé de retirer les textes de tous les enfants non statués. Pas parce qu’ils étaient moins bons. Parce que je n’étais pas une Wendat avec une carte ! J’ai tellement pleuré quand je suis revenu à la maison.

J’ai même dit à ma mère que je ne voulais pas retourner à l’école cette fois-là. Quand je suis revenu en classe, nous avons même reparlé de cet événement parce que mes amies ont demandé pourquoi mon texte n’avait pas été gardé. Mon enseignante a alors dit devant tout le monde que c’était parce que je n’étais pas wendat. Tous les enfants de ma classe ont ri pendant quelques secondes à peine, mais pour moi j’ai eu l’impression que ça ne se terminerait jamais. J’ai réagi de la seule manière que je connaissais dans ces situations-là : le silence! De toute façon, personne ne comprendrait vraiment.

Il y a eu un troisième événement aussi. Celui du hockey. J’ai la chance de pouvoir jouer au hockey à l’école et j’adore ça. Chaque année, Wendake organise un tournoi de hockey mineure qu’on appel, pour les jeunes de mon âge et de plusieurs autres catégories. Pleins de mes amies y participent. J’ai voulu m’inscrire en me disant que comme on habite à Wendake, ça devrait fonctionner. Alors ma maman a appelé les loisirs de Wendake. On lui a dit que malheureusement je ne pouvais pas participer parce qu’encore une fois je n’avais pas de numéro de bande. J’ai dû regarder, avec plusieurs jeunes dans ma situation, nos amis jouer au hockey avec plaisir contre des équipes d’autres communautés. Sans nous! Parce que nous ne sommes pas des Wendat pour notre communauté. Je suis là, mais je n’appartiens à rien.

Une personne qui m’a aidé dans ma lettre m’a dit : « tu es invisible ». C’est drôle parce que j’ai compris tout de suite ce qu’elle voulait dire. Je suis invisible pour ma communauté. Peu importe ce que je vais faire, ça ne sera jamais assez. Je vais toujours être celle qui veut être Wendat, sans jamais l’être vraiment.

Pourquoi je n’ai pas la même chance que mes amies? J’ai l’impression qu’à l’intérieur de moi on m’a volé quelque chose et que je ne pourrai jamais le retrouver. En plus, je fais tout ce que je peux pour qu’on m’accepte. J’ai même pris des cours de smoke dance. Mais à quoi ça me sert? De toute façon ils vont sûrement me refuser si je veux danser au pow wow.

J’ai juste 11 ans, alors je ne connais pas bien toutes ces choses au sujet des statuts et des lois. Mais je sais toutefois une chose, si j’avais un statut je ne me sentirais pas comme ça aujourd’hui. Pourquoi ma maman ne peut pas me le donner? Quelle est la différence entre ma maman et d’autres mamans de mes amies? Les règles doivent changer et je souhaite que maman puisse me transmettre son statut. SVP, arrêtez l’exclusion après la 2e génération. Je suis fatiguée de me sentir mal. Fatiguée d’avoir peur d’être rejetée. J’aimerais un jour être l’ancêtre wendate de quelqu’un.

Tiawenhk inenh!

Nous examinons une loi qui tente de tuer l’enfant dans l’Indien. C’est ce qui se passe aujourd’hui et c’est ce qui m’est arrivé dans un pensionnat en 1957. Nous en sommes toujours là. Merci, Amylie. Tu es là.

Des voix : Bravo!

La sénatrice McCallum : Mon peuple savait où était sa place. Maintenant, comparez la situation de cette petite avec la mienne.

La place de mon peuple était sur la terre — l’aski. L’aski, c’est l’endroit où nos cultures, nos communautés et les etinewak — le peuple — s’enracinaient et se définissaient. Au lieu de s’enraciner dans un lieu particulier comme nous le faisons dans les villes et les villages, ces gens parcouraient l’aski pour suivre la nourriture, en adaptant leur mode de vie à l’environnement et aux saisons, ainsi qu’à l’endroit où ils vivaient au quotidien.

Chaque espace géographique dans lequel nous nous installions était imprégné de sens. Tous les environnements étaient considérés comme des lieux vivants et des endroits idéaux pour vivre. Nous les avons laissés pratiquement intacts, jusqu’à ce que le Northern Store commence à offrir des articles non dégradables. Ces lieux naturels n’ont pas été créés par nous, les humains, et ils ont été façonnés par d’autres êtres que les humains. Nos proches — les oiseaux, les animaux, les insectes, les poissons et l’écosystème — occupaient l’aski, et ils ont contribué de façon essentielle et constante au développement et à l’évolution de notre culture. En fait, la terre était déjà occupée, mais les nouveaux arrivants ne le voyaient pas ainsi. Ils voyaient plutôt des terres inhabitées qu’ils voulaient posséder.

L’aski est importante pour moi. Cette terre me donne la vie. On ne peut pas l’attacher ni ériger des frontières pour la posséder. En tant que groupes culturels, les Premières Nations se sont définies et ont défini leur gouvernance et leurs codes d’éthique en fonction des lieux où elles vivaient sur le territoire depuis des temps immémoriaux. Nous portons cette notion dans notre mémoire collective — libres de vivre sur le territoire tout en apprenant, enfants, en observant nos parents perpétuer les traditions et démontrer les aptitudes à la vie quotidienne qui allaient nous permettre de devenir indépendants, mais aussi interdépendants, afin d’occuper la place qui nous revient et d’honorer notre objectif en ce monde terrestre. La croissance n’était pas seulement physique et mentale, mais aussi intellectuelle et spirituelle. C’est ainsi que j’en suis venue à me connaître et à me comprendre. J’ai pu exercer ma créativité et ma curiosité. Rien ne se compare à la vie dans la nature.

(1540)

Je pensais alors que j’étais spéciale, que j’étais capable de faire des choses, de penser, d’imaginer, de rire et de courir, que j’étais une bonne observatrice, que je pouvais reproduire les gestes de mes parents — et j’y arrivais —, que j’étais quelqu’un parce que je comprenais que je comptais comme personne. Je me suis fait confiance au fil de ma croissance. Il y avait quelque chose en moi, quelque chose qui venait du Créateur, quelque chose qui n’était ni masculin ni féminin, ni vieux ni jeune. C’était le sentiment inhérent et inébranlable de valoir quelque chose.

J’étais habitée de l’histoire de mon peuple, des récits de piégeage de mes ancêtres, qui ont vécu leur vie dans la vaste étendue à leur propre rythme et à leur manière. C’est ça, l’aski.

J’appuie la version amendée du projet de loi S-2 et je vous demande à tous de vous tenir aux côtés des Premières Nations — plus particulièrement des femmes et des enfants des Premières Nations — et de voter pour l’adoption de la version amendée du projet de loi S-2.

Les sénateurs ont reçu un cadeau très précieux. Les nombreux témoins des Premières Nations qui ont comparu leur ont confié leurs histoires, leurs enseignements, leur savoir-faire, leur vécu et leurs vulnérabilités. Ils leur ont aussi donné leur confiance, dans l’espoir que leur voix soit entendue et que leurs souffrances soient comprises pour que nous nous engagions à prendre immédiatement des mesures pour défendre leurs droits fondamentaux.

La confiance qu’ils nous donnent ne doit pas être prise à la légère. En tant que sénateurs, nous sommes la voix de ceux qui sont exclus depuis beaucoup trop longtemps. Ce n’est pas tout le monde qui a la chance de recevoir un présent comme celui-ci, et ce don transforme pour toujours les êtres humains que nous sommes.

Le Canada doit être reconnaissant aux femmes des Premières Nations, et à leurs descendants, qui ont donné des dizaines d’années de leur vie pour défendre les droits fondamentaux, garantis par la Charte, qui sont si chers aux Canadiens.

Le combat des Premières Nations pour l’égalité protège le droit à l’égalité de tous les Canadiens.

Nous devons aussi remercier Mary Two-Axe Earley. Cette femme mohawk de Kahnawà:ke a consacré plus d’une vingtaine d’années de sa vie à se battre contre la discrimination sexuelle qui se trouve dans la Loi sur les Indiens. Elle a persévéré malgré la farouche résistance de sa propre nation, des Chefs des Premières Nations et du gouvernement fédéral. Elle a dit une chose qui est devenue célèbre, à savoir que les chiens avaient davantage le droit qu’elle d’être enterrés dans la réserve.

Sa passion et son engagement envers la protection des droits à l’égalité des femmes des Premières Nations étaient inébranlables et ont contribué à unir les femmes des Premières Nations partout au Canada. Non seulement a-t-elle été à l’origine d’Equal Rights for Indian Women, une nouvelle organisation militante, à la fin des années 1960, mais elle s’est également impliquée activement dans le mouvement canadien pour les droits des femmes. Elle a livré un témoignage poignant devant la Commission royale d’enquête sur la situation de la femme au Canada. Les recommandations de la commission en 1970 comprenaient un appel à l’action pour le Canada : « Il faudrait adopter des lois permettant d’abroger l’article de la [Loi sur les Indiens] qui fait des distinctions injustes à l’égard des Indiennes. » C’était en 1970, avant la Charte des droits et libertés.

Merci à Jeanette Corbiere Lavell et Yvonne Bedard. Jeanette est une femme anishinabek originaire de Wiikwemikoong, et Yvonne Bedard était une femme onondaga originaire des Six Nations. Leurs recours judiciaires contre le Canada pour discrimination sexuelle persistante dans la Loi sur les Indiens ont été portés jusqu’à la Cour suprême du Canada. Leur combat concernait la Charte canadienne des droits et libertés, et, bien qu’elles aient perdu leur procès, elles ont gagné le cœur des femmes des Premières Nations de tout le Canada, qui se sont unies pour défendre l’égalité.

Jeanette a été confrontée à des menaces de violence et à l’opposition virulente des Chefs des Premières Nations, mais elle a poursuivi son combat et est devenue présidente de l’Association des femmes autochtones du Canada.

Je remercie l’ancienne sénatrice Sandra Lovelace-Nicholas. Mme Lovelace-Nicholas est originaire de la Première Nation de Tobique et a contesté la discrimination permanente fondée sur le sexe devant le Comité des droits de l’homme des Nations unies, qui a statué en sa faveur. Les Nations unies ont estimé que la Loi sur les Indiens empêchait l’ancienne sénatrice de profiter de sa culture au sein de sa communauté. Grâce à cette affaire et au combat de l’ancienne sénatrice, la Loi sur les Indiens a été modifiée en 1985 afin de remédier à une partie de la discrimination fondée sur le sexe. Mme Lovelace-Nicholas a également dû faire face à l’opposition organisée des Chefs des Premières Nations et du gouvernement, mais elle n’a jamais cessé de se battre.

Lorsqu’elle a été nommée au Sénat, elle s’est jointe au Comité des peuples autochtones et elle a contribué à faire adopter des amendements essentiels au projet de loi S-3.

Je remercie Sharon McIvor. Mme McIvor est issue de la bande indienne de Lower Nicola, en Colombie-Britannique. Elle a contesté la discrimination fondée sur le sexe dans la Loi sur les Indiens après 1985 et elle a gagné son procès. En conséquence, le Canada a modifié la loi en 2010. Mme McIvor est immédiatement devenue la grand-mère de milliers de nouveaux Indiens inscrits.

Comme le Canada a refusé de remédier à toutes les formes de discrimination fondée sur le sexe en 2010, Mme McIvor a porté son affaire devant le Comité des droits de l’homme des Nations unies, qui a statué en sa faveur. Le Comité des droits de l’homme a demandé au Canada d’inscrire toutes les personnes se trouvant dans la même situation que Mme McIvor et ses descendants, de remédier à toute discrimination persistante au sein des communautés des Premières Nations résultant de la discrimination prévue dans la Loi sur les Indiens, de prendre des mesures pour prévenir toute discrimination à l’avenir et de lui verser une réparation complète. Le Canada n’a toujours pas donné suite à cette décision.

Merci à Stéphane Descheneaux, ainsi qu’à Susan et Tammy Yantha. Stéphane, Susan et Tammy sont des Abénakis de la nation d’Odanak. Ils ont contesté la discrimination fondée sur le sexe dans la Loi sur les Indiens, qui entraînait un traitement différentiel des cousins et des frères et sœurs nés hors mariage selon qu’ils descendaient de la lignée matrilinéaire ou patrilinéaire. Ils ont obtenu gain de cause, ce qui a donné lieu aux modifications prévues dans le projet de loi S-3 en 2017. La juge Masse, de la Cour supérieure du Québec, a demandé au Canada de remplir son obligation législative d’apporter des modifications supplémentaires pour lutter contre d’autres formes de discrimination afin de garantir la conformité de la Loi sur les Indiens avec la Charte.

Merci à Lynn Gehl. Mme Gehl est une Anishinabe de la Première Nation des Algonquins de Pikwàkanagàn qui a également contesté la discrimination fondée sur le sexe dans la politique canadienne sur la paternité non déclarée, qui présume que le père de l’enfant d’une mère autochtone non mariée est un non-Indien. Elle a obtenu gain de cause devant la Cour d’appel de l’Ontario et, puisque cette décision a été rendue pendant l’examen du projet de loi S-3, le Canada doit inclure des modifications qui rendront la politique sur la paternité non déclarée plus équitable pour les femmes des Premières Nations, car elle ne touche que ces dernières.

Merci à Jeremy Matson. Jeremy est membre de la nation Squamish et a contesté avec succès la discrimination persistante fondée sur le sexe dans l’inscription des Indiens auprès du Comité des Nations unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes.

Le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes a demandé au Canada d’accorder un dédommagement à Jeremy et à ses enfants, de leur conférer sans condition le statut d’Indiens inscrits, de reconnaître leur droit de transmettre ce statut à leurs descendants, de modifier la Loi sur les Indiens afin d’éliminer complètement la discrimination fondée sur le sexe, de supprimer les dates limites, telles que celle de 1985, et de garantir que les descendants des femmes des Premières Nations soient traités sur un pied d’égalité avec ceux des hommes des Premières Nations.

(1550)

Merci à Sharon, Terra, et Nicole Nicholas ainsi qu’à tous les autres plaignants.

Sharon Nicholas est membre de la nation haïda et, avec les autres plaignants, elle a contesté la discrimination fondée sur la race dans les dispositions historiques de la Loi sur les Indiens relatives à l’émancipation qui les privent du statut d’Indien et de la possibilité de transmettre ce statut à leurs descendants. Dans cette affaire, le Canada a concédé que l’impossibilité d’être inscrit et de transmettre son statut à ses enfants et à ses petits-enfants constituait une forme de discrimination fondée sur la race et violait la Charte. Le Canada a également admis que cela nuit considérablement au sentiment d’identité de ces personnes et à leur sentiment d’appartenance envers leur Première Nation, en plus de leur causer des préjudices économiques en les empêchant d’accéder aux programmes fédéraux.

En conséquence, le Canada a dû présenter un projet de loi pour remédier à cette discrimination, soit le projet de loi S-2 que nous étudions présentement. Comme dans l’affaire Descheneaux, la cour a souligné que le Canada n’est pas tenu de se limiter à traiter uniquement cette affaire et qu’il pourrait demander un sursis pour apporter des modifications.

Merci à Pam Palmater. Mme Palmater est une avocate mi’kmaq originaire de la Première Nation Eel River Bar, au Nouveau-Brunswick. Mère et grand-mère, elle travaille à ce dossier précis depuis 40 ans, depuis sa jeunesse. Mme Palmater savait qu’elle devrait mener la lutte contre le gouvernement fédéral sur toutes les tribunes, y compris dans les médias, dans le cadre d’enquêtes et de commissions, dans le cadre de ses recherches et de ses publications, dans les comités et les études parlementaires, ainsi qu’au niveau international, notamment aux Nations unies, devant les cours et les tribunaux.

Pour se préparer à ce combat, elle a travaillé avec des communautés des Premières Nations et des organismes partout au Canada, en particulier des groupes communautaires de femmes des Premières Nations, sur le statut d’Indien et l’appartenance à une bande. Elle a également obtenu quatre grades universitaires. Elle savait que, pour s’opposer au Canada, il fallait qu’elle apprenne beaucoup de choses. Son doctorat en droit a porté précisément sur cette question. Sa campagne massive de sensibilisation du public dans les médias et les médias sociaux a contribué à sensibiliser tout un pays. Son seul souhait, maintenant, c’est que ses petits-enfants n’aient pas à souffrir comme sa famille a eu à souffrir.

J’adresse mes remerciements à l’ancienne sénatrice Lillian Dyck. Mme Dyck est une Crie de la Première Nation George Gordon, en Saskatchewan. Elle défend l’égalité et la justice pour les femmes des Premières Nations depuis de nombreuses années. Elle n’a pas seulement fait progresser les droits des femmes quand elle était au Sénat, elle a également présidé le Comité des peuples autochtones pendant l’étude du projet de loi S-3, en 2017, et, avec les autres membres du comité, elle a imposé l’ajout d’amendements qui allaient au-delà de l’affaire Descheneaux.

Merci à toutes les mères, grands-mères, tantes, sœurs et filles des Premières Nations, et merci à tous les aînés, leaders, militants et jeunes hommes qui se sont joints à elles pour défendre le droit à l’égalité des femmes et des filles des Premières Nations, mettre en lumière la violence faite aux femmes, faire progresser les droits de la personne à l’échelle nationale et internationale, dénoncer la discrimination dans le système des familles d’accueil, lutter contre la discrimination dans les prisons, persévérer dans la lutte contre la traite des personnes, élever des enfants, prendre soin de parents âgés ou contribuer à leur communauté, protéger la terre, l’eau, les plantes et les animaux, et faire progresser nos droits inhérents, nos droits en tant qu’Autochtones, nos droits issus de traités et nos droits fonciers, ainsi que notre droit à l’autonomie gouvernementale. Où en seraient nos communautés sans votre passion, votre dévouement et votre persévérance? Vous traversez le champ de mines du génocide historique et continu afin que les Premières Nations et les Canadiens puissent vivre dans une société plus juste.

Je tiens à mentionner tout particulièrement l’aide précieuse que m’a apportée Pam Palmater. Elle m’a aidé à rédiger ce discours et un autre, et m’a donné de nombreux conseils.

Malgré des siècles d’oppression coloniale, de dépossession et de lois, politiques et pratiques fédérales discriminatoires, vous vous présentez devant des comités sénatoriaux comme le Comité des peuples autochtones dans l’espoir que nous vous écoutions sincèrement et que nous prenions des mesures pour protéger vos droits.

Merci à tous les témoins et aux spécialistes des Premières Nations qui ont déployé temps et efforts pour que le comité comprenne bien que le Canada a l’obligation juridique de mettre fin à la discrimination sexuelle et raciale qui entache le processus d’inscription des Indiens, mais surtout à la règle de l’exclusion après la deuxième génération, qui met fin à des lignées familiales, divise des familles et risque de mener à l’extinction des Premières Nations par la loi.

Une seule Première Nation a réclamé le rejet de l’entièreté du projet de loi S-2, qu’il soit amendé ou non. Les autres témoins, dont des organismes défendant les droits des femmes autochtones, des particuliers, des spécialistes, des aînés, des jeunes, des Premières Nations et des organismes des Premières Nations — qui représentent collectivement l’ensemble des Premières Nations du Canada —, ont tous appuyé la suppression de l’exclusion après la deuxième génération. Le Sénat doit comprendre à quel point cet élément est important. À la quasi-unanimité, les Premières Nations et les organismes entendus ont estimé que l’on doit mettre fin à la discrimination sexuelle et supprimer la règle de l’exclusion après la deuxième génération.

Je tiens en outre à remercier le Comité des peuples autochtones et tous les sénateurs d’avoir adopté le rapport. Cela signifie beaucoup.

Rappelons-nous ce qu’a déclaré la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Andrews :

La discrimination est inacceptable dans une société démocratique parce qu’elle incarne les pires effets de la dénégation de l’égalité et la discrimination consacrée par la loi est particulièrement répugnante [...] C’est une garantie contre ce mal que fournit l’art. 15.

Les mots employés sont importants. La cour a dit que c’est « une garantie ». Ce n’est ni une promesse, ni un engagement, ni des pourparlers, ni une réunion, ni un processus de consultation, ni un plan d’action à élaborer au cours des prochaines années.

Le droit à l’égalité qui est prévu à l’article 15 pour les femmes des Premières Nations est une garantie. En plus d’être prévue par la Charte, la loi suprême du Canada, cette façon d’interpréter le droit à l’égalité, à l’article 15, a aussi été confirmée à maintes reprises par la Cour suprême du Canada. Absolument rien dans la loi ne permet d’adopter une loi qui ne respecte pas la Charte.

Le Sénat ne le peut pas, et la Chambre des communes non plus. Le ministère de la Justice le sait très bien, tout comme Services aux Autochtones Canada. Le Canada ne peut pas faire valoir l’argument selon lequel les règles qui régissent l’inscription des Autochtones sont complexes, qu’il serait plus pratique, du point de vue administratif, de modifier petit à petit d’infimes parties de la loi ou que l’augmentation du nombre de personnes ayant le droit d’être inscrit pourrait coûter plus cher que les justifications juridiques visant à nier le droit à l’égalité.

Je ne suis pas avocate, alors je dois me fier aux experts en droits constitutionnels, en droits de la personne et en droits des Autochtones qui ont comparu devant nous, comme Mary Eberts et Pam Palmater. Elles ont rappelé à notre comité que la loi est très claire. Je vais vous citer une partie de la jurisprudence dont elles nous ont fait part.

Dans l’arrêt Vriend, la Cour suprême du Canada a statué que l’approche par étapes du gouvernement ne peut pas justifier une violation des droits garantis par la Charte :

À mon avis, on ne peut demander à des groupes qui sont depuis longtemps victimes de discrimination d’attendre patiemment que les gouvernements en viennent, étape par étape, à protéger leur dignité et leur droit à l’égalité.

Le texte continue comme suit :

Si on tolère que les atteintes aux droits et aux libertés de ces groupes se poursuivent pendant que les gouvernements négligent de prendre des mesures diligentes pour réaliser l’égalité, les garanties inscrites dans la Charte ne seront guère plus que des vœux pieux.

(1600)

Pourtant, le gouvernement fédéral demande aux femmes et aux enfants des Premières Nations d’attendre.

Dans la décision Schachter, la Cour suprême du Canada a expliqué que les considérations financières ne peuvent à elles seules justifier une violation de la Charte :

Notre Cour a statué à juste titre que les considérations financières ne pouvaient servir à justifier une violation dans le cadre de l’analyse fondée sur l’article premier.

Dans la décision Eldridge, la Cour suprême du Canada a rejeté l’affirmation du gouvernement selon laquelle les coûts hypothétiques constituent une atteinte minimale :

À supposer, sans trancher la question [...] que l’objectif de cette décision — limiter les dépenses au titre des soins de santé — est « urgent et réel » [...] je conclus [que la décision] n’est pas une atteinte minimale au par. 15(1).

La cour a ensuite estimé que la déférence qu’un tribunal doit accorder au gouvernement n’est pas infinie.

La Cour suprême du Canada a également rejeté l’argument du gouvernement selon lequel une modification à la loi représenterait un fardeau financier pour les petites Premières Nations en déclarant ceci dans la décision Corbiere :

[...] la possibilité que, dans l’avenir, [le gouvernement] ne mette pas à la disposition des communautés autochtones les ressources additionnelles nécessaires pour mettre en place un régime qui garantirait le respect des droits à l’égalité, ne saurait justifier la violation de droits constitutionnels dans une disposition législative relevant de son autorité.

L’autre argument invoqué par le gouvernement au sujet de l’obligation de consulter a été sérieusement examiné par le Comité des peuples autochtones et il a fait l’objet d’un débat rigoureux dans cette Chambre. Ce sujet suscite un grand nombre de discussions. Je dois le redire : c’est le gouvernement fédéral — le gouvernement libéral actuel — qui a choisi de traîner la Première Nation crie Mikisew dans un litige qui s’est rendu jusqu’à la Cour suprême du Canada. Le gouvernement s’est battu avec acharnement contre l’obligation légale de consulter avant d’adopter des mesures législatives.

Le gouvernement fédéral a gagné : la Cour suprême du Canada a statué que le gouvernement fédéral n’a aucune obligation légale de consulter lorsqu’il adopte une loi. Je ne suis pas fière que le Canada ait combattu une Première Nation sur cette question, mais le plus haut tribunal de notre pays a désormais tranché cette question.

Dans mon discours lundi, j’ai fait référence aux nombreuses enquêtes et commissions nationales sur la discrimination sexuelle et raciale dont sont victimes les femmes des Premières Nations. L’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées a conclu que le Canada était coupable d’un génocide qui perdure, car il fait preuve d’un comportement qui indique clairement une intention d’éliminer les peuples autochtones, y compris en ayant recours à des formes particulières de génocide fondé sur le sexe.

La ministre a reconnu à plusieurs reprises que l’exclusion après la deuxième génération est une pratique « très discriminatoire » et « probablement l’une des plus nuisibles ». Dans l’affaire Nicholas, le gouvernement fédéral a reconnu que l’incapacité de transmettre le statut d’Indien à ses descendants constituait une forme de discrimination fondée sur la race ou l’origine ethnique et violait l’article 15 de la Charte.

Tout le monde sait que la règle d’exclusion de la deuxième génération est inconstitutionnelle et doit être corrigée immédiatement. Voici certains des avantages tangibles et intangibles dont seront privées les Premières Nations, en particulier les femmes des Premières Nations, si nous ne votons pas en faveur du projet de loi S-2, tel que modifié :

Cette discrimination « répugnante », ce « mal », fondée sur le sexe et la race se poursuit; cela envoie le message à la société et aux Premières Nations que les femmes des Premières Nations ont moins de valeur, sont moins dignes, ne méritent pas l’égalité, ne sont pas assez importantes pour jouir des droits de la personne, sont moins autochtones et méritent moins d’avoir accès à des mesures correctives; cela perpétue les divisions au sein des familles, des familles élargies, des communautés et des nations; cela prolonge la séparation de la communauté; cela crée des obstacles à l’accès à la langue, à la culture, aux cérémonies et aux enseignements des anciens; cela dénie toute voix politique dans la gouvernance communautaire de leur Première Nation d’origine; cela dénie la cohésion sociale que créent les interactions et les relations régulières avec d’autres membres de la communauté; il se peut que les personnes concernées soient rejetées par d’autres membres de la communauté si elles n’ont pas de statut; les personnes concernées sont exclues des négociations politiques ou juridiques relatives aux revendications territoriales, aux traités ou à d’autres accords; cela peut empêcher les personnes concernées de participer aux élections et aux référendums des Premières Nations; cela constitue un obstacle à l’accès aux droits issus des traités sans harcèlement; les personnes concernées peuvent se voir refuser l’accès aux programmes et aux services fédéraux qui sont destinés aux Premières Nations et qui sont offerts dans les réserves; les personnes concernées ne pourraient pas bénéficier des mesures de soutien propres aux Premières Nations en cas de pandémie qui pourraient s’appliquer à l’avenir à d’autres endémies, épidémies ou pandémies; cela a une incidence sur leur estime de soi, leur identité et leur sentiment d’appartenance; et cela nuit à leur santé physique, mentale et émotionnelle.

Honorables sénateurs, nous devons adopter la version amendée du projet de loi S-2. Il s’agit du seul moyen dont nous disposons actuellement pour protéger les femmes et les enfants des Premières Nations. Nous sommes le seul rempart qui peut leur éviter d’attendre encore quatre ans pour obtenir justice et égalité — si jamais cela arrive. Nous devons alors être prêts à défendre fermement la Charte et le droit à l’égalité des Autochtones et de tous les Canadiens si la Chambre des communes tente de supprimer ces amendements.

Certains sénateurs disent que le projet de loi va être rejeté, mais des gens sont allés à l’autre endroit pour s’entretenir avec les différents caucus. Les appuis sont là. Je ne sais donc pas d’où vient cette rumeur.

La période de 12 mois avant l’entrée en vigueur de ces amendements est loin d’être idéale, car les femmes devront encore attendre. Il s’agit néanmoins d’un compromis acceptable permettant de protéger leurs droits dans l’éventualité où le gouvernement voudrait faire traîner les choses, voire ne rien faire du tout.

J’ai l’intention de voter pour la version amendée du projet de loi S-2, et je vous demande à tous de faire de même. Imaginez le message que nous enverrions à la Chambre des communes si nous votions à l’unanimité pour faire respecter la Charte canadienne des droits et libertés. Je vous remercie. Kinanaskomitinãwaw.

Des voix : Bravo!

Son Honneur la Présidente : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente : Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur la Présidente : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur la Présidente : À mon avis, les oui l’emportent.

Et deux honorables sénateurs s’étant levés :

Son Honneur la Présidente : Y a-t-il entente au sujet de la sonnerie?

Des voix : Quinze minutes.

Des voix : Maintenant.

Son Honneur la Présidente : Je rappelle que s’il n’y a pas d’entente, la sonnerie retentira pendant une heure. Je vais donc poser la question à nouveau : y a-t-il entente au sujet de la sonnerie? On a proposé 15 minutes. Le consentement est-il accordé?

Des voix : D’accord.

Son Honneur la Présidente : La sonnerie retentira pendant 15 minutes. Le vote aura lieu à 16 h 23.

Convoquez les sénateurs.

(1620)

La motion, mise aux voix, est adoptée et le projet de loi modifié, lu pour la troisième fois, est adopté :

POUR
Les honorables sénateurs

Adler Manning
Arnot Marshall
Ataullahjan Martin
Audette McBean
Batters McCallum
Boudreau McPhedran
Boyer Miville-Dechêne
Burey Mohamed
Busson Moncion
Cardozo Moodie
Carignan Muggli
Clement Osler
Cormier Oudar
Coyle Pate
Dalphond Patterson
Deacon (Nouvelle-Écosse) Petitclerc
Deacon (Ontario) Prosper
Dhillon Quinn
Forest Ravalia
Francis Ringuette
Galvez Ross
Gerba Saint-Germain
Gignac Senior
Hay Simons
Hébert Smith
Housakos Surette
Ince Tannas
Karetak-Lindell Wells (Alberta)
Kingston Wells (Terre-Neuve-et-Labrador)
Loffreda Youance
MacAdam Yussuff—63
MacDonald

CONTRE
Les honorables sénateurs
Aucun

ABSTENTIONS
Les honorables sénateurs

Boehm McNair
Duncan Moreau
Harder Petten
LaBoucane-Benson Pupatello—8

Des voix : Bravo!

(1630)

La justice

La Loi sur l’abrogation des lois—Motion tendant à faire opposition à l’abrogation de la loi et de dispositions d’autres lois—Ajournement du débat

L’honorable Pat Duncan, conformément au préavis donné le 3 décembre 2025, propose :

Que, conformément à l’article 3 de la Loi sur l’abrogation des lois, L.C. 2008, ch. 20, le Sénat adopte une résolution faisant opposition à l’abrogation de la loi et des dispositions des autres lois ci-après, qui ne sont pas entrées en vigueur depuis leur adoption :

1.Loi sur les relations de travail au Parlement, L.R.C. 1985, ch. 33 (2e suppl.) :

-Partie II;

2.Loi sur les contraventions, L.C. 1992, ch. 47 :

-alinéa 8(1)d), articles 9, 10 et 12 à 16, paragraphes 17(1) à (3), articles 18 et 19, paragraphe 21(1) et articles 22, 23, 25, 26, 28 à 38, 40, 41, 44 à 47, 50 à 53, 56, 57, 60 à 62, 84 (en ce qui concerne les articles suivants de l’annexe : 2.1, 2.2, 3, 4, 5, 7, 7.1, 9, 10, 11, 12, 14 et 16) et 85;

3.Loi de mise en œuvre du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires, L.C. 1998, ch. 32;

4.Loi sur l’Office d’investissement des régimes de pensions du secteur public, L.C. 1999, ch. 34 :

-articles 155, 157, 158 et 160, paragraphes 161(1) et (4) et article 168;

5.Loi sur le Yukon, L.C. 2002, ch. 7 :

-articles 70 à 75 et 77, paragraphe 117(2), articles 167, 168, 210, 211, 221, 227, 233 et 283;

6.Loi modifiant la Loi sur la pension de retraite des Forces canadiennes et d’autres lois en conséquence, L.C. 2003, ch. 26 :

-articles 4 et 5, paragraphe 13(3), article 21, paragraphes 26(1) à (3) et articles 30, 32, 34, 36 (en ce qui concerne l’article 81 de la Loi sur la pension de retraite des Forces canadiennes), 42 et 43;

7.Loi d’exécution du budget de 2009, L.C. 2009, ch. 2 :

-article 394;

-articles 401 à 404;

8.Loi sur les réseaux de cartes de paiement, L.C. 2010, ch. 12, art. 1834 :

-articles 6 et 7;

9.Loi sur la révision du système financier, L.C. 2012, ch. 5 :

-articles 54 et 56 à 59;

10.Loi visant à protéger le système d’immigration du Canada, L.C. 2012, ch. 17 :

-articles 70 à 77;

11.Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durable, L.C. 2012, ch. 19 :

-articles 459, 460, 462 et 463;

12.Loi visant à renforcer la justice militaire pour la défense du Canada, L.C. 2013, ch. 24 :

-articles 12, 13 et 46;

13.Loi no 1 sur le plan d’action économique de 2013, L.C. 2013, ch. 33 :

-paragraphe 228(2);

14.Loi sur le transfert de responsabilités aux Territoires du Nord-Ouest, L.C. 2014, ch. 2 :

-article 47;

15.Loi visant la protection des mers et ciel canadiens, L.C. 2014, ch. 29 :

-article 28, paragraphe 29(1), articles 31, 33, 35, 37 à 39, paragraphe 40(1), articles 41 à 49, paragraphes 50(2) et (5), articles 52, 53, 55 et 56;

16.Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2014, L.C. 2014, ch. 39 :

-articles 306, 308, paragraphe 309(1), article 311, paragraphe 313(2);

-articles 387 à 400;

17.Loi sur le renforcement des peines pour les prédateurs d’enfants, L.C. 2015, ch. 23 :

-article 32;

18.Loi visant la délivrance simple et sécuritaire des permis d’armes à feu, L.C. 2015, ch. 27 :

-articles 10, 15 et 35;

19.Loi sur la tolérance zéro face aux pratiques culturelles barbares, L.C. 2015, ch. 29 :

-article 2;

20.Loi sur l’aire marine nationale de conservation du lac Supérieur, L.C. 2015, ch. 38 :

-article 4.

 — Honorables sénateurs, souvenez-vous du 1er novembre, lors du septième match de la Série mondiale. L’excitation suscitée par le dernier match de la saison de baseball était palpable dans tout le pays. D’Iqaluit à Old Crow en passant par Tuktoyaktuk, de Campbell River dans l’île de Vancouver à Twillingate à Terre-Neuve, en passant par Digby en Nouvelle-Écosse, les Blue Jays étaient l’équipe favorite des Canadiens, et tout le monde retenait son souffle. C’est la même joie intense qui a emporté les partisans des Roughriders de la Saskatchewan cette année...

La sénatrice Batters : Bravo!

La sénatrice Duncan : ... tout comme les partisans des Canadiens, des Jets et des Oilers lors des séries éliminatoires. Pour ce qui est des partisans des Maple Leafs, il y a probablement des gens dans cette Chambre qui sont assez vieux pour se souvenir de la finale de 1967.

Honorables sénateurs, tout comme les Canadiens débordent de joie, d’enthousiasme et d’impatience à l’idée de regarder un match de leur équipe favorite, les sénateurs sont tout aussi impatients de se pencher sur la motion concernant la Loi sur l’abrogation des lois.

Vous vous demandez si je suis sérieuse? Oui, chers collègues, je suis sérieuse. Cette motion est attendue avec impatience chaque année pour plusieurs raisons.

Cette motion, présentée à la fin de l’année civile, avant l’ajournement pour la période des Fêtes, est examinée avec soin et avec joie par les sénateurs. Cela témoigne d’une volonté d’honorer et de poursuivre le travail de nos prédécesseurs.

À l’intention de ceux qui ne sont pas au Sénat depuis longtemps, je rappelle qu’en 2001, Tommy Banks, qui était alors un sénateur de l’Alberta, s’est fait demander par un citoyen pourquoi la Loi sur l’Institut canadien des langues patrimoniales n’était jamais entrée en vigueur. Le sénateur Banks a appris avec grand étonnement que plusieurs lois du Parlement n’étaient jamais entrées en vigueur. Il a donc présenté le projet de loi S-12, le premier d’un grand nombre de projets de loi sur l’abrogation des lois. Comme les sénateurs arrivés plus récemment peuvent le constater, il faut parfois s’y prendre à plusieurs reprises pour faire adopter un projet de loi du Sénat. Le projet de loi S-12 est devenu le projet de loi S-11, puis il y a eu d’autres tentatives, jusqu’à ce que le projet de loi S-207 reçoive enfin la sanction royale, en 2008. Ce n’est qu’en 2010 que la loi a été promulguée.

L’essence de la loi exige qu’au début de chaque année civile, le ministre de la Justice dépose au Sénat et à l’autre endroit un rapport énumérant toutes les lois ou dispositions qui ont été sanctionnées au moins neuf ans avant le 31 décembre précédant, ce qui veut dire, dans les faits, il y a 10 ans. Toutes les lois ou dispositions de lois figurant dans le rapport seront alors automatiquement abrogées le 31 décembre de cette année-là, à moins qu’elles ne soient mises en vigueur ou abrogées avant cette date. Ces lois ou dispositions de lois peuvent être maintenues en vigueur pendant une année supplémentaire si une résolution est adoptée par l’une ou l’autre Chambre du Parlement afin de reporter leur abrogation. C’est la motion dont nous sommes saisis aujourd’hui.

Nous sommes saisis de cette motion à la dernière minute, assez près du 31 décembre, car, tout au long de l’année, on a travaillé avec les fonctionnaires et les parties concernées pour assurer une proclamation, une abrogation ou un report d’abrogation appropriés.

Honorables sénateurs, je qualifie cela d’exemple du travail difficile fait par le gouvernement. Peut-être serait-il plus juste de parler de l’attention chronophage accordée à des détails souvent négligés. Dans le cas de l’abrogation de lois, il s’agit de dépoussiérer les toiles d’araignée ou, en langage moderne, de déplacer les moutons de poussière qui semblent s’accumuler sur la législation, afin de s’assurer que la loi reste adaptée à son objectif.

Accueillie chaque année avec enthousiasme par tous les sénateurs, cette motion a particulièrement attiré mon attention lorsque je suis arrivée au Sénat. Les nouveaux sénateurs se souviendront de l’avertissement qui leur a été donné à leur arrivée dans cette assemblée : « Au Sénat, vous serez constamment submergé de données. »

Occupée au Comité des finances lorsque la sénatrice Bellemare a présenté cette motion en juin 2019, à une période inhabituelle de l’année étant donné la dissolution imminente du Parlement, j’ai reconnu une référence aux dispositions législatives de l’Accord de transfert d’attributions au Yukon, un accord que j’avais aidé à négocier. J’ai posé une question, ce qui n’était pas courant à cette période de l’année, sur l’une des dernières motions faisant l’objet d’un débat. Les « constitutions » du Yukon, des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut sont des lois ordinaires du Parlement et sont souvent mentionnées dans la motion sur l’abrogation des lois.

Il convient de féliciter l’ancien sénateur du Nunavut Dennis Patterson et le Groupe des sénateurs canadiens, qui ont vraiment contribué à ce que le Sénat procède à un second examen objectif de cette motion et des lois dont l’abrogation est reportée. Grâce à leurs efforts, cette motion a été renvoyée à notre Comité des affaires juridiques et constitutionnelles pour un examen approfondi au cours des trois dernières années.

Honorables sénateurs, l’examen est vraiment détaillé et approfondi. Je tiens à adresser mes remerciements à tous les membres du comité pour leur travail cette année. Je tiens également à exprimer mes plus sincères remerciements pour ce travail, au nom de tous les sénateurs, aux fonctionnaires en particulier qui ont comparu devant le comité. De nombreux fonctionnaires sont appelés à fournir des renseignements et, ayant assisté aux réunions du comité, je peux dire que leurs réponses aux questions des sénateurs étaient mûrement réfléchies et directes, et que les sénateurs leur en sont vraiment reconnaissants.

Je vais maintenant parler brièvement des détails les plus passionnants contenus dans la motion de cette année. Je vous demande d’appuyer cette résolution avant le 31 décembre pour reporter l’abrogation d’une loi et des dispositions de 19 autres lois énumérées dans la motion.

Je demande au Sénat d’adopter une résolution faisant opposition à l’abrogation, par l’application de la Loi sur l’abrogation des lois, de cette loi et de ces dispositions, qui ne sont pas entrées en vigueur depuis leur adoption.

Le quinzième rapport annuel sur la Loi sur l’abrogation des lois a été déposé le 28 mai 2025 dans les deux Chambres du Parlement, conformément à l’article 2 de la loi. Après le dépôt du rapport, le ministère de la Justice a communiqué avec les ministères responsables de la loi et des dispositions mentionnées dans le rapport pour vérifier si leur abrogation devait être reportée.

Cette année, certaines dispositions de sept lois seront abrogées le 31 décembre en vertu de la Loi sur l’abrogation des lois, les ministres responsables n’ayant pas recommandé le report de leur abrogation.

Treize ministres ont recommandé le report de l’abrogation d’une loi complète et de dispositions de 19 autres lois dont ils sont responsables.

On peut demander un report pour diverses raisons. En voici quelques exemples : avant que les dispositions législatives entrent en vigueur ou soient abrogées, un événement externe doit se produire, comme l’entrée en vigueur d’un traité international ou la mise en place de mesures législatives par les provinces et les territoires; les mesures législatives proposées pour abroger, remplacer ou faire entrer en vigueur les dispositions qui ne sont pas en vigueur sont en train d’être mises en place; des causes en instance doivent être jugées; des approbations sont nécessaires pour faire entrer les dispositions en vigueur ou établir la réglementation; ou il faut mener à bien les travaux stratégiques ou les consultations nécessaires. Ce sont toutes des raisons pour lesquelles nous étudions ces dispositions.

L’abrogation de certaines dispositions pourrait également créer des tensions entre le gouvernement fédéral et les provinces et territoires, et avoir des répercussions sur les relations internationales du Canada.

Honorables sénateurs, avant de poursuivre, je tiens à souligner que mon bureau a transmis un document d’information à tous les sénateurs. Comme le temps qui m’est alloué pour prendre la parole est limité, ce document explique l’objectif de la Loi sur l’abrogation des lois et comprend une annexe qui énumère les mesures pour lesquelles il est recommandé de reporter l’abrogation, ainsi que les raisons de ces reports. J’espère que cela permettra aux sénateurs, qu’ils soient nouveaux ou chevronnés, de mieux comprendre le processus annuel d’abrogation des lois.

La ministre des Affaires étrangères recommande le report de l’abrogation d’une loi complète, la Loi de mise en œuvre du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires. Les fonctionnaires du ministère ont informé le comité que l’entrée en vigueur de cette loi dépend d’autres pays qui doivent encore signer l’accord ou conclure un processus de ratification. Le report ne signifie pas que le Canada traîne les pieds ni qu’il modifie sa politique. Nous attendons simplement que d’autres pays agissent.

Chacun des ministres que voici recommande le report de l’abrogation de certaines dispositions d’une loi dont il est responsable : le ministre de l’Identité et de la Culture canadiennes et ministre responsable des Langues officielles, la ministre de l’Environnement, du Changement climatique et de la Nature, la ministre de l’Emploi et des Familles, le ministre de la Justice et procureur général du Canada, la ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, la ministre des Affaires du Nord et de l’Arctique, et le ministre de la Sécurité publique.

(1640)

Honorables sénateurs, vous vous souviendrez que le Yukon, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut ont été créés par des lois du Parlement. Le point 5 de cette motion fait référence à plusieurs articles de la Loi sur le Yukon. Bon nombre de ces articles mentionnent le vérificateur général du Yukon. Cependant, le Yukon continue de faire appel au vérificateur général du Canada. Nous n’avons pas nommé notre propre vérificateur général. Utiliser les ressources et l’expertise existantes fait partie de notre appartenance à la famille canadienne. Ces articles ne sont pas appliqués et ils ne l’ont jamais été depuis que la loi a reçu la sanction royale en 2002.

Les gouvernements territoriaux s’efforcent de se doter des outils nécessaires à leur fonctionnement autonome, comme notamment au Yukon, dans le cadre des relations intergouvernementales avec les Premières Nations.

Dans certaines situations, nous ne disposons pas de tous les outils nécessaires et nous faisons appel au Canada, par exemple en ce qui concerne le poste de vérificateur général. Il est important pour le Yukon de maintenir cette relation.

Les ministres des Finances et du Revenu national et de la Défense nationale, ainsi que le président du Conseil du Trésor, ont chacun recommandé le report de l’abrogation de certaines dispositions de ces trois lois relevant de leur responsabilité.

Le ministre des Transports et leader du gouvernement à la Chambre des communes a recommandé le report de l’abrogation de certaines dispositions de quatre lois relevant de sa responsabilité.

Étant donné que les reports d’abrogation sont valables pendant un an, toute loi ou disposition dont l’abrogation est reportée cette année figurera à nouveau dans le rapport annuel de l’année prochaine, à moins que le ministre responsable ne soit convaincu que l’abrogation n’aura pas de conséquences néfastes et imprévues, qu’elle entrera en vigueur avant cette date ou qu’elle sera abrogée par l’adoption d’un autre projet de loi à cet effet.

Comme je l’ai dit, il est important que la résolution soit adoptée avant le 31 décembre 2025, sinon la loi et les dispositions des autres lois énumérées dans la motion seront automatiquement abrogées en vertu de la Loi d’abrogation des lois. Cela pourrait entraîner des incohérences ou des vides juridiques dans la législation fédérale qu’il faudrait ensuite corriger en présentant un nouveau projet de loi.

Franchir toutes les étapes du processus législatif, de l’élaboration des politiques jusqu’à la sanction royale, en passant par la rédaction des textes législatifs dans les deux langues officielles — et, dans le cas du Nunavut, également en inuktitut —, peut s’avérer problématique, en particulier si la modification législative nécessaire est urgente.

Le rapport du comité sur les mesures contenues dans cette motion, ainsi que le rapport sur les sept mesures qui seront abrogées cette année, nous garantit que nous pouvons attendre des fonctionnaires qu’ils justifient la nécessité d’un report.

Honorables sénateurs, je tiens encore une fois à remercier sincèrement les membres du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles pour leur excellent travail et pour avoir posé des questions pertinentes et directes aux fonctionnaires, qui, m’a-t-on dit, s’habituent de plus en plus à cette démarche et ont donc amélioré la qualité des réponses et des justifications fournies. Je les remercie pour leur rapport, qui contient une recommandation très importante : chaque ministère doit fournir une liste de renseignements, dans la mesure où ceux-ci sont disponibles, afin d’améliorer encore davantage cette démarche dans l’intérêt des Canadiens.

Le rapport du comité comprend également une demande très importante à l’intention d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada pour que ce ministère présente, dans un délai de six mois, un rapport d’étape sur l’étude en cours des questions liées à l’entrée en vigueur de l’article 2 de la Loi modifiant la Loi modifiant la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, la Loi sur le mariage civil, le Code criminel et d’autres lois en conséquence.

En conclusion, je vous demande d’appuyer la motion et de voter en faveur d’une résolution visant à ce que la loi et les dispositions des autres lois énumérées dans la motion ne soient pas, en vertu de la Loi sur l’abrogation des lois, abrogées le 31 décembre 2025.

De la même façon que nous attendons avec impatience la prochaine saison et les séries éliminatoires, je suis certaine que tous mes collègues ici présents aujourd’hui sont impatients de découvrir ce qu’il y aura dans la Loi sur l’abrogation des lois de l’année prochaine et le rapport du comité à ce sujet.

Je suis également consciente, Votre Honneur, de l’heure et du fait que je retarde peut-être le prochain repas des sénateurs. Merci beaucoup de votre temps et de votre attention, chers collègues. Shä̀w níthän. Mähsi’cho. Kwä`nä`schis.

(Sur la motion de la sénatrice Patterson, le débat est ajourné.)

L’ajournement

Retrait du préavis de motion concernant la séance du lundi 8 décembre 2025 et tendant à autoriser les comités à siéger en même temps que le Sénat

À l’appel des affaires du gouvernement, motions, article no 34, par l’honorable Patti LaBoucane-Benson :

Que, lorsque le Sénat s’ajournera après l’adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu’au lundi 8 décembre 2025, à 18 heures;

Que l’application de l’article 3-3(1) du Règlement soit suspendue ce jour-là;

Que, nonobstant l’article 9-10(2) du Règlement, si un vote est différé ou sera différé à ce jour-là, il ait lieu à la fin de la période des questions;

Que les comités sénatoriaux devant se réunir ce jour-là soient autorisés à siéger même si le Sénat siège, et que l’application de l’article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, conformément à l’article 5-10(2) du Règlement, je demande que le préavis de motion no 34 du gouvernement soit retiré.

(Le préavis de motion est retiré.)

Adoption de la motion

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat), conformément au préavis donné le 3 décembre 2025, propose :

Que, lorsque le Sénat s’ajournera après l’adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu’au mardi 9 décembre 2025, à 14 heures.

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

L’honorable Jim Quinn : Honorables sénateurs, étant donné que nous avons eu quelques journées bien remplies ici et à l’approche de la période des Fêtes, je propose :

Que la séance soit maintenant levée.

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

(À 16 h 47, conformément à l’ordre adopté par le Sénat plus tôt aujourd’hui, le Sénat s’ajourne jusqu’au mardi 9 décembre 2025, à 14 heures.)

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