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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

La santé des Canadiens – Le rôle du gouvernement fédéral

Rapport intérimaire

Volume un : Le chemin parcouru


CHAPITRE QUATRE

Tendances des dépenses de soins de santé

Le présent chapitre a pour but de présenter un examen factuel détaillé des tendances actuelles et passées des dépenses de soins de santé au Canada. Le chapitre est divisé en six sections. La première section décrit les tendances historiques des dépenses totales de soins de santé. La section 2 aborde les tendances des dépenses des secteurs public et privé. La section 3 présente de façon détaillée les tendances par catégorie de dépenses. La section 4 donne une brève comparaison entre les dépenses du Canada et les dépenses internationales en matière de soins de santé. La section 5 aborde les dépenses des provinces dans ce secteur et la section 6 résume les facteurs influant sur les coûts des soins de santé. Le chapitre est fondé sur les données de l’Institut canadien d’information sur la santé (ICIS) et de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).(52)

Les données sur les dépenses de soins de santé présentées par l’ICIS et l’OCDE comprennent les éléments suivants : hôpitaux, autres établissements (notamment les établissements de soins pour bénéficiaires internes), médecins, autres professionnels de la santé (chiropraticiens, physiothérapeutes, opticiens, etc.), médicaments (prescrits ou non), immobilisations, santé publique (incluant la promotion de la santé et la prévention des maladies), recherche médicale et fournitures et appareils médicaux personnels. Cette définition est conforme à la définition générale des soins de santé présentée par le Comité dans l’introduction du présent rapport.

Comme nous le constaterons dans les sections suivantes, il existe différentes façons de mesurer les dépenses de soins de santé au Canada. L’interprétation du niveau des dépenses de santé et de leurs tendances est fonction de la façon dont nous mesurons les dépenses.

[…] nous dépensons moins que nous ne le croyons, bien moins que la portion des fonds publics que consacrent la plupart des autres pays aux soins de santé. Je vous dirai également que la quote-part du gouvernement fédéral dans les dépenses au titre des soins de santé est bien supérieure à ce que les provinces veulent bien nous faire croire.

Raisa Deber, professeure,
University of Toronto (8:3).

 

4.1 Tendances globales – de 1975 à 2000

Le graphique 4.1 décrit l’évolution de l’ensemble des dépenses de soins de santé au Canada au cours des 25 dernières années. Exprimées en dollars courants (trait gras), elles ont augmenté d'une façon soutenue, passant de 12,2 milliards de dollars en 1975 à 95,1  milliards en 2000. La croissance des dépenses de soins de santé en termes nominaux a affiché des taux à deux chiffres dans les années 70 et au début des années 80, mais a diminué considérablement vers des taux à un chiffre à la fin des années 80 et durant les années 90(53). Abby Hoffman, de Santé Canada, a mentionné ceci au Comité :

Il faut interpréter avec prudence la portée et l'importance de ce ralentissement étant donné que les chiffres peuvent être trompeurs. Il faut tenir compte du niveau d'inflation beaucoup plus élevé qui existait dans les années 70 et au début des années 80 par rapport à la fin des années 80 et aux années 90, ainsi que du niveau actuel qui est très bas.(54)

Le trait fin du graphique 4.1 représente les dépenses de santé totales corrigées en fonction de l’inflation et converties en dollars constants de 1992(55). Même après correction de l’incidence de l’inflation, ce qui permet de mesurer les taux de croissance réelle, les dépenses de soins de santé ont augmenté sans arrêt entre 1975 et le début des années 90. Toutefois, les taux de croissance réels durant la période de 1975 à 2000 étaient beaucoup plus bas, variant entre moins de 1 % et 5 %.(56)

Selon l’ICIS, la progression soutenue que connaissent depuis quatre ans les dépenses en soins de santé tient essentiellement aux nouveaux investissements des gouvernements à ce chapitre.

GRAPHIQUE 4.1

GRAPHIQUE 4.2

 

Certains témoins qui ont parlé devant le Comité ont dit qu’afin d’interpréter adéquatement les tendances des dépenses de soins de santé, les données devraient également être corrigées en fonction de la taille de la population. Les dépenses de soins de santé par habitant figurent au graphique 4.2.

Le trait fin, qui représente les dépenses par habitant corrigées en fonction de l’inflation et de la taille de la population, indique que les dépenses de soins de santé au Canada ont augmenté entre 1975 et le début des années 90. Toutefois, les dépenses réelles par habitant ont légèrement diminué entre 1992 et 1996. Cette tendance s’est inversée en 1997, et le taux de croissance annuel réel des dépenses par habitant devrait s'établir en moyenne à 3,6 % entre 1997 et 2000.

GRAPHIQUE 4.3

 

Une autre façon de mesurer les montants affectés à la santé au Canada consiste à exprimer les dépenses de soins de santé en pourcentage du produit intérieur brut (PIB). Cet indicateur, appelé « ratio des soins de santé au PIB»(57), indique dans quelle mesure le Canada consacre des ressources productives aux soins de santé. En 1975 (voir graphique 4.3), les dépenses de soins de santé au Canada constituaient 7,0 % du PIB. Le pourcentage a augmenté durant la majeure partie des années 70 et 80, pour atteindre le sommet de 10 % en 1992. Puis, le ratio des soins de santé au PIB a diminué continuellement entre 1992 et 1996, pour atteindre 9,0 %. La dernière prévision de l’ICIS indique que cette tendance s’est inversée : la part du PIB consacrée aux soins de santé a grimpé jusqu’à 9,3 % en 1998, niveau auquel elle est demeurée en 1999 et en 2000.

 

4.2 Dépenses du secteur public et dépenses du secteur privé

Bien que le secteur public soit la principale source de financement des soins de santé au Canada, ce n’était pas le cas il y a quarante ans, lorsque le secteur privé assumait plus de la moitié des dépenses de soins de santé(58). Le graphique 4.4 présente des renseignements sur les sources de financement des soins de santé au Canada. En 1960, le financement du secteur privé représentait plus de 57 % des dépenses de soins de santé totales. Au cours de la décennie suivante, avec l'avènement des régimes universels d’assurance-santé dans les provinces, les taux de croissance des dépenses de soins de santé assumées par le secteur public ont augmenté beaucoup plus que ceux du financement privé. En conséquence, la part du secteur privé a chuté. En 1975, la part du secteur public avait atteint plus de 76 %, alors que celle du secteur privé s’établissait à 24 %.

Entre 1975 et 1985, les parts du secteur privé et du secteur public sont demeurées relativement stables. Puis les gouvernements ont commencé à rationaliser le financement des hôpitaux et des services de médecins et ont mis en œuvre des mesures visant à accroître l'efficience du système de soins de santé. Ces mesures ont entraîné une stabilisation des dépenses gouvernementales. Au même moment, la part du secteur privé a commencé à augmenter et, en 1997, elle a atteint 30 %, son plus haut niveau enregistré depuis 1970. Elle a légèrement reculé ces dernières années, pour se fixer à 29 % en 2000. Cette année-là, la part du secteur public a représenté 71 % de l’ensemble des dépenses en soins de santé.

GRAPHIQUE 4.4

GRAPHIQUE 4.5

 

Encore une fois, il est utile d’examiner les tendances lorsque les dépenses sont corrigées en fonction de l’inflation et de la taille de la population. Le graphique 4.5 montre que les dépenses du secteur public par habitant, exprimées en dollars constants, ont augmenté continuellement de 1975 à 1992. Entre 1992 et 1996, les dépenses de soins de santé par habitant assumées par le secteur public ont diminué en termes réels. Autrement dit, la croissance des dépenses publiques en soins de santé n’a suivi ni la croissance économique ni la croissance démographique. Cette tendance à la baisse s’est inversée en 1997 et, en 1998, les dépenses publiques de soins de santé par habitant, en dollars constants, ont retrouvé leur sommet de 1992. Elles ont affiché une progression en termes réels de 4,4 % en 1999 et de 4,8 % en 2000 :

Si on rajuste les dépenses en fonction de l'inflation en général et de l'augmentation de la population, le ralentissement des dépenses publiques et même leur baisse au milieu des années 90 apparaît plus clairement. Autrement dit, le milieu des années 90 est certainement une période où les dépenses publiques au chapitre de la santé n'ont pas suivi le même rythme que le taux d'inflation, même s'il a été faible, ou que la croissance démographique. Toutefois, lorsque ces dépenses ont augmenté à la fin des années 90, elles ont regagné le sommet atteint au début des années 90 sur le plan des dépenses réelles par habitant, même si l'on tient compte de la croissance démographique et de l'augmentation générale des prix.(59)

 

4.3 Catégories de dépenses

En 2000, le Canada a dépensé 30,2 milliards de dollars pour les soins hospitaliers. Les soins hospitaliers constituent la plus importante catégorie de dépenses de soins de santé, représentant 31,8 % du total de ces dépenses en 2000. La part du total des dépenses de soins de santé affectées aux hôpitaux a suivi une courbe descendante au cours des 25 dernières années, partant d’un sommet de 45,0 %, atteint en 1976 (voir graphique 4.6).

Les dépenses en services de médecins ont totalisé près de 12,8 milliards de dollars en 2000, soit 13,5 % du total des dépenses de soins de santé. Entre 1975 et 1985, la part des dépenses totales de soins de santé consacrée aux services de médecins est demeurée relativement constante. Elle a diminué légèrement entre 1985 et 2000.

GRAPHIQUE 4.6

 

Depuis 1997, les dépenses affectées aux médicaments constituent la deuxième catégorie de dépenses de soins de santé en importance, dépassant les dépenses liées aux services de médecins. La part des dépenses totales de soins de santé affectée aux médicaments a augmenté continuellement au cours des 25 dernières années, passant de 8,8 % en 1975 à 9,5 % en 1985, à 13,4 % en 1995, puis à 15,5 % en 2000.

La répartition des dépenses publiques par catégorie va de 100 % pour la santé publique à 10 % pour les professionnels de la santé autres que les médecins (voir graphique 4.7). Plus de 70 % des dépenses dans toutes les catégories, sauf les médicaments et les autres professionnels, sont payées par l’État. Le secteur public assume 91 % environ des dépenses totales au chapitre des hôpitaux et un peu moins de 99 % des dépenses totales au titre des services de médecins. Les dépenses de soins de santé du secteur privé au Canada touchent surtout les médicaments, les services dentaires, les soins de la vue et les soins à domicile, c’est-à-dire des services qui, pour la plupart, ne sont pas visés par la Loi canadienne sur la santé.

GRAPHIQUE 4.7

 

4.4 Comparaisons internationales

Les comparaisons internationales constituent une autre façon d’évaluer notre système de soins de santé. En fait, elles sont essentielles pour mieux comprendre le volume des dépenses et les facteurs qui ont entraîné leur augmentation, en vue de déterminer la taille optimale du secteur des soins de santé. Différents indicateurs des dépenses de soins de santé peuvent être utilisés pour comparer les pays. Comme la professeure Deber l’a souligné durant son exposé devant le Comité, il est important de définir précisément ce qui est mesuré par chaque indicateur, car le rang du Canada change selon l’indicateur utilisé pour mesurer les dépenses de soins de santé.

Trois types d’indicateurs sont utilisés couramment pour comparer le niveau des dépenses de soins de santé dans les différents pays. Le plus connu est le ratio des dépenses de soins de santé au PIB, qui mesure la part de l’économie d’un pays consacrée aux soins de santé.

Comme le montre le tableau 4.1, en 1998, le Canada se classait quatrième (9,5 %) parmi les pays de l’OCDE, après les États-Unis (13,6 %), l’Allemagne (10,6 %) et la Suisse (10,4 %), quant au ratio des dépenses totales de soins de santé au PIB. La Turquie vient au dernier rang. Le Japon, quant à lui, avec une proportion relativement faible (7,2 %), se classe 18e. En moyenne, les pays de l’OCDE ont consacré 7,9 % de leur PIB aux soins de santé. Cet indicateur révèle que le Canada a consacré, toutes proportions gardées, plus d’argent aux soins de santé que la moyenne pour l’OCDE en 1998 et qu’il se trouve parmi les pays qui dépensent le plus dans ce domaine.

Les « dépenses nominales par habitant » constituent un autre indicateur international courant; cet indicateur convertit les devises nationales en une devise commune (habituellement le dollar américain) et les divise par la population. Cet indicateur est par conséquent corrigé en fonction de la taille de la population. La troisième colonne du tableau 4.1 indique que les dépenses de soins de santé du Canada en 1998 s’élevaient à 1 828 dollars américains par habitant. Selon cette mesure, le Canada tombe au 14rang, loin derrière les États-Unis (4 178 dollars, en 1re place), la Suisse (3 834 dollars, en 2e place), la Norvège (2 836 dollars, en 3e place) et l’Allemagne (2 769 $, en 4place). Les dépenses de soins de santé du Canada étaient comparables à celles de la Suède, des Pays-Bas et de la Finlande. En comparaison, le Japon s’est classé au 9e rang, avec 2 283 dollars américains par habitant. Selon cet indicateur, le Canada se situe dans la moyenne de l’OCDE et ne fait pas partie des pays qui ont dépensé le plus en soins de santé. Les résultats du Japon sont moins reluisants : alors qu’il occupait le 18rang pour ce qui est des dépenses de soins de santé exprimées en pourcentage du PIB (parmi les niveaux de dépenses les moins élevés), il se hisse au 9e rang pour ce qui est des dépenses en dollars américains par habitant (parmi les niveaux de dépenses les plus élevés).

TABLEAU 4.1

Dépenses de soins de santé dans les pays de l’OCDE, 1998

Pays

Dépenses en %
du PIB

Rang

Dépenses par habitant en $ américains

Rang

Dépenses par habitant en
$ PPA

Rang

Allemagne

10,6

2

2 769

4

2 424

3

Australie

8,5

9

1 691

17

2 036

12

Autriche

8,2

15

2 164

11

1 968

13

Belgique

8,8

6

2 169

10

2 081

9

Canada

9,5

4

1 828

14

2 312

5

Corée

5,0

27

351

25

730

25

Danemark

8,3

12

2 736

5

2 133

7

Espagne

7,1

20

1 044

21

1 218

22

États-Unis

13,6

1

4 178

1

4 178

1

Finlande

6,9

21

1 724

15

1 502

17

France

9,5

5

2 333

8

2 055

11

Grèce

8,3

13

957

22

1 167

23

Hongrie

6,8

22

319

26

705

26

Irlande

6,4

24

1 436

19

1 436

19

Islande

8,3

14

2 468

7

2 103

8

Italie

8,4

10

1 720

16

1 783

15

Japon

7,6

18

2 283

9

1 822

14

Luxembourg

5,9

26

2 473*

6*

2 215

6

Mexique

4,7*

28*

202*

28*

356*

28*

Norvège

8,6

8

2 836

3

2 330

4

Nouvelle-Zélande

8,1

16

1 127

20

1 424

20

Pays-Bas

8,6

7

2 143

13

2 070

10

Pologne

6,4

25

263

27

496

27

Portugal

7,8

17

859

23

1 237

21

République tchèque

7,2

19

393

24

930

24

Royaume-Uni

6,7

23

1 607

18

1 461

18

Suède

8,4

11

2 146

12

1 746

16

Suisse

10,4

3

3 834

2

2 794

2

Turquie

4,0*

29*

122*

29*

255*

29*

Moyenne OCDE

7,9

-

1 730

-

1 689

-

*Données de 1997.
Source: Éco-santé OCDE 2000.

 

Un indicateur plus perfectionné utilise la parité des pouvoirs d’achat (PPA) par habitant; il est calculé en comparant les prix de produits identiques dans différents pays et en divisant par la population(60). La conversion en PPA élimine la disparité des prix entre les pays. Selon cet indicateur, le Canada demeure parmi les premiers pays, soit 5e (2 312 dollars par habitant), après les États-Unis (4 178 dollars), la Suisse (2 794 dollars), l’Allemagne (2 424 dollars) et la Norvège (2 330 dollars). Le Japon se classe 14e, au milieu de tous les pays de l’OCDE (avec 1 822 dollars).

Sans égard à la mesure utilisée, ce sont les États-Unis qui ont manifestement dépensé le plus en soins de santé en 1998, suivis de l’Allemagne et de la Suisse. Même si les dépenses du Canada étaient élevées, elles étaient proportionnelles à celles de plusieurs autres pays.

Le tableau 4.2 présente les rangs au sein de l’OCDE pour ce qui est des dépenses de soins de santé faites par le secteur public. En 1998, dans presque tous les pays, l’essentiel des dépenses de soins de santé étaient effectuées par le secteur public. Au Canada, 69,6 % des dépenses totales de soins de santé étaient assumés par l’État, pourcentage inférieur à la moyenne des pays de l’OCDE (73,6 %). Les États-Unis et la Corée étaient les deux seuls pays de l’OCDE où les dépenses de soins de santé du secteur privé étaient supérieures à celle du secteur public, qui assumait environ 45 % des dépenses totales. À l’opposé, au Luxembourg, le secteur public assumait près de 92,3 % des dépenses de soins de santé totales. Comparé aux autres pays de l’OCDE, le Canada occupait le 9e rang pour ce qui est dépenses de soins de santé exprimées en pourcentage du PIB. Fait intéressant, le niveau de dépenses de soins de santé publiques du Canada, exprimé en pourcentage du PIB, se situait près de celui des États-Unis.

Certains des pays ont-ils affiché des tendances similaires quant aux dépenses de soins de santé au cours des quatre dernières décennies? Le graphique 4.8 décrit l’évolution des dépenses de soins de santé, exprimées en pourcentage du PIB, dans certains pays de l’OCDE, de 1960 à 1998. On peut voir que le Royaume-Uni a constamment consacré une part moindre de son PIB aux soins de santé que le Canada ou les États-Unis. Les tendances du ratio des soins de santé au PIB au Canada et aux États-Unis sont demeurées pratiquement identiques jusque vers 1971, quand le Canada a établi un régime d’assurance-santé universel, contrairement aux États-Unis.

TABLEAU 4.2

Dépenses de soins de santé par le secteur public dans les pays de l’OCDE, 1998

Pays

Part publique des dépenses totales de soins de santé (%)

Rang

Dépenses publiques de soins de santé

en % du PIB

Rang

Allemagne

74,6

16

7,9

2

Australie

69,5

22

5,9

15

Autriche

70,5

19

5,8

16

Belgique

89,7

3

7,9

1

Canada

69,6

21

6,6

9

Corée

45,8

28

2,3

29

Danemark

81,9

8

6,8

8

Espagne

76,9

11

5,4

20

États-Unis

44,7

29

6,1

12

Finlande

76,3

14

5,3

21

France

76,4

13

7,2

4

Grèce

56,8

27

4,7

25

Hongrie

76,5

12

5,2

22

Irlande

75,8

15

4,8

24

Islande

84,3

4

7,0

6

Italie

67,3

23

5,6

17

Japon

78,3

9

6,0

13

Luxembourg

92,3

1

5,4

19

Mexique

60,0*

26*

2,8*

28*

Norvège

83,1

7

7,1

5

Nouvelle-Zélande

77,1

10

6,2

11

Pays-Bas

70,4

20

6,0

14

Pologne

65,4

25

4,2

26

Portugal

66,9

24

5,2

23

République tchèque

91,9

2

6,6

10

Royaume-Uni

83,7

6

5,6

18

Suède

83,8

5

7,0

7

Suisse

73,4

17

7,7

3

Turquie

72,8*

18*

2,9*

27*

Moyenne OCDE

73,6

-

5,8

-

*Données de 1997.
Source : Éco-santé OCDE 2000.

Le ratio des dépenses de soins de santé au PIB au Canada est demeuré relativement stable durant les années 70. Puis il a atteint le sommet de 10,2 % en 1992, en 2e place après les États-Unis. Bon nombre d’observateurs ont soutenu que le système de soins de santé canadien était maintenant un des plus coûteux parmi les pays de l'OCDE. Ce résultat a été largement discuté et interprété comme un indice que le modèle canadien était fondamentalement inflationniste. Comme au Canada, la plupart des pays de l’OCDE ont connu une croissance de leurs dépenses de soins de santé, exprimées en pourcentage du PIB, durant la majeure partie de la période de 1975 à 1990. Des augmentations ont également eu lieu au début des années 90, durant les périodes de faible croissance du PIB et de récession, et ont été suivies par une stabilisation ou de légères baisses du ratio. Toutefois, le Canada est le seul pays à avoir affiché une baisse sur cinq ans (de 1992 à 1997).

GRAPHIQUE 4.8

 

4.5 La santé constitue une priorité dans les provinces

Durant son témoignage, Raisa Deber a affirmé que les soins de santé constituaient une priorité pour les gouvernements provinciaux et que les dépenses de l’éducation et de l’aide sociale ont été réduites de façon drastique dans les provinces. Le graphique 4.9 décrit les dépenses des gouvernements provinciaux pour les soins de santé, l’éducation et les services sociaux, exprimées en pourcentage des dépenses de programmes totales. Alors que les gouvernements provinciaux ont augmenté la proportion des dépenses publiques consacrées aux soins de santé et à l’aide sociale, les dépenses d’éducation ont diminué régulièrement. Dans son rapport Performance and Potential 2000-2001, le Conference Board a décélé des tendances analogues : au cours des trois dernières années, 62 % de la hausse des dépenses des gouvernements provinciaux ont été consacrés aux soins de santé, 25 % à l’éducation, 3 % aux services sociaux, 5 % aux intérêts sur la dette et 5 % aux dépenses générales.(61)

GRAPHIQUE 4.9

 

4.6 Commentaires du Comité

Nous espérons que ce chapitre contribuera à une meilleure compréhension des tendances actuelles et passées des dépenses de soins de santé, de la relation entre les dépenses de soins de santé du secteur public et du secteur privé et de la situation du Canada par rapport aux autres pays. Toutefois, l’information sur les dépenses de soins de santé comporte encore des lacunes. Dans un rapport récent, l’ICIS a indiqué ce qu’on ignore au sujet des dépenses de soins de santé au Canada :

  • La façon dont la variation des dépenses de soins de santé influe sur la santé de la population;
  • Les différences régionales au sein des provinces, en matière de dépenses de soins de santé;
  • Les coûts liés au traitement de maladies spécifiques;
  • Les coûts liés à la réadaptation, à la promotion de la santé et à d’autres services communautaires;
  • Le montant que les Canadiens dépensent pour les médecines complémentaires et parallèles (p. ex., la massothérapie, l’homéothérapie, les produits à base de plantes et les autres remèdes semblables).(62)

En outre, d'autres questions difficiles demeurent sans réponse. Par exemple, quelle proportion de son PIB le Canada devrait-il consacrer aux soins de santé? Quel serait un niveau adéquat de dépenses de soins de santé financées par l’État? Quel rôle devrait jouer le gouvernement fédéral sur le plan de la santé et, plus précisément, combien d’argent devrait-il destiner aux soins? Quels facteurs pourraient expliquer la disparité des coûts de soins de santé entre les pays de l’OCDE? Peut-on tirer des leçons importantes de l’analyse de l’expérience internationale en vue d’une politique gouvernementale future au Canada? Ces questions et d’autres seront débattues lorsque le Comité examinera une série d’options concernant l’avenir du système de soins de santé canadien dans la phase quatre de son étude.


CHAPITRE CINQ

L'état de santé et le concept de santé de la population

es Canadiens accordent beaucoup d’intérêt à la santé. Leur état de santé personnel, la santé des membres de leur famille et celle de leurs amis leur importent. Une bonne santé permet aux gens de mener une vie productive et satisfaisante. Pour le Canada dans son ensemble, un niveau élevé de santé contribue à une plus grande prospérité et une stabilité sociale générale. En conséquence, le niveau de santé global dont jouissent les Canadiens constitue un indicateur important de la réussite de notre société et de notre qualité de vie.

5.1 L'état de santé des Canadiens

Il existe divers indicateurs de l’état de santé. L’espérance de vie, par exemple, est une mesure largement utilisée et internationalement reconnue pour décrire la qualité de la santé d’une population. Elle correspond à la durée de vie moyenne prévue pour une personne d'un âge donné compte tenu des taux de mortalité en cours.

Depuis plusieurs décennies le bilan de santé des Canadiens ne cesse de s’améliorer, à un point tel que nous dépassons maintenant tous les autres pays. Nous somme le deuxième pays au monde du point de vue de l’espérance de vie, juste après le Japon, et je m’attends à ce que nous passions au premier rang sous peu. Nous augmentons notre espérance de vie à un rythme encore plus rapide que le Japon, pays qui connaît en outre certaines difficultés.

Dr. John S. Millar, v.-p., Recherche et analyse, ICIS (14:33).

Au cours du siècle dernier, l’espérance de vie s’est accrue de façon constante (voir graphique 5.1). En se fondant sur les taux de mortalité actuels, on peut calculer qu’une petite fille née au Canada en 1996 peut espérer vivre en moyenne jusqu’à l’âge de 81 ans, tandis qu’un petit garçon atteindra l’âge de 76 ans. Il s’agit d’un nouveau sommet pour le Canada. Quel que soit leur âge, les femmes ont une espérance de vie supérieure à celle des hommes. Toutefois, depuis le début des années 80, l’écart quant à l’espérance de vie à la naissance entre les hommes et les femmes s’est rétréci.

GRAPHIQUE 5.1

 

L’espérance de vie mesure uniquement les années. On met au point actuellement des indicateurs connexes qui permettent de savoir si la personne était, pendant ces années de vie, en bonne santé. Il y a, par exemple, l’espérance de vie sans incapacité, qui mesure les années de vie vécues à divers degrés d'autonomie. Ainsi, un enfant (garçon ou fille) né en 1991 pourrait espérer vivre en moyenne 69 ans – soit près de 90 % de sa longévité totale – sans avoir à faire face à des problèmes de santé invalidants. L’information tirée d’autres indicateurs, tels que l’espérance de vie pondérée par la qualité de l’existence et l’espérance de vie en bonne santé, n’est pas complète et il n'existe pas de tendances à long terme.

Il reste que les données sur l’espérance de vie et d'autres indicateurs connexes n’évoluent pas très rapidement; aussi est-il peu probable qu’il y ait des changements sensibles d’une année à l'autre. Par exemple, de 1986 à 1991, l’espérance de vie sans incapacité a augmenté de 1,2 an chez les hommes et de 0,6 an chez les femmes.

Le taux comparatif de mortalité (TCM) est un autre indicateur utile de l’état de santé. C'est une mesure du taux de mortalité qui est rajustée pour tenir compte de la répartition de la population selon l’âge. Le graphique 5.2 décrit l’évolution du TCM chez les hommes et les femmes sur une période d’environ 47 ans. On peut noter que le TCM pour les deux sexes s’est continuellement amélioré pendant cette période. Plus précisément, il est passé de 1 375 décès pour 100 000 hommes en 1950 à 848 décès en 1987, et de 1 089 décès pour 100 000 femmes en 1950 à 524 en 1987.

GRAPHIQUE 5.2

 

Un autre indicateur reconnu internationalement s'appelle « années potentielles de vie perdues » (ou APVP). Il mesure les années de vie perdues lorsqu’une personne meurt avant un âge donné, disons 75 ans. Une personne qui décède, par exemple, à l’âge de 25 ans a perdu 50 années de sa vie. L’indicateur APVP aide à identifier les causes des décès qui surviennent chez les personnes appartenant à des groupes d’âge plus jeunes et qui, en théorie, pourraient être prévenus ou retardés.

La tendance à long terme des APVP liées aux principales causes de décès est illustrée au graphique 5.3. En 1997, on a dénombré plus d’un million d’APVP, toutes causes confondues, les grandes responsables étant le cancer, les accidents et les maladies cardio-vasculaires. Comme le graphique l’indique, le cancer demeure la principale cause des APVP depuis 1984 et est la seule cause importante en constante progression. Les APVP dues à des accidents ont considérablement diminué depuis 1979. De même, au cours des deux dernières décennies, on observe une baisse des APVP attribuables aux maladies cardio-vasculaires, aux maladies respiratoires et aux accidents cérébrovasculaires. Ces résultats laissent supposer que le Canada a réussi à réduire la mortalité précoce au cours des trente dernières années.

GRAPHIQUE 5.3

 

La mortalité infantile est souvent utilisée comme un indicateur de base du développement social et économique. Le taux de mortalité infantile – bébés qui meurent au cours de la première année de leur vie – a sensiblement diminué au Canada au cours des 20 dernières années (voir graphique 5.4). En 1997, le taux de mortalité infantile était d’environ 6 décès pou 1 000 naissances, contre 15 pour 1 000 naissances en 1974.

Dans l’ensemble, l’état de santé des Canadiens s’est amélioré continuellement au cours des dernières décennies. Les Canadiens vivent plus longtemps, avec moins de limitations fonctionnelles à un âge avancé. Moins de bébés meurent pendant la première année de leur vie, et le nombre de décès prématurés dus aux principales causes, à l’exception du cancer, continue de fléchir. Au regard de l’état de santé, quelle place occupe le Canada par rapport aux autres pays?

GRAPHIQUE 5.4

 

5.2 Comment le Canada se compare-t-il aux autres pays?

En 1998, l’espérance de vie à la naissance pour les Canadiens était de 79 ans. Le Canada se classait deuxième au chapitre de l’espérance de vie, juste derrière le Japon (80 ans), parmi les 25 pays affichant la plus longue espérance de vie (voir graphique 5.5). À titre de comparaison, les États-Unis occupaient la dernière position, à égalité avec le Luxembourg.

GRAPHIQUE 5.5

 

En ce qui concerne les taux comparatifs de mortalité, en 1996, le Canada arrivait au 4e rang parmi 20 pays de l’OCDE (voir graphique 5.6). Le Japon occupait la 1re place, suivi de la France et de la Suède . À titre de comparaison, l’Allemagne était au 10e rang, le Royaume-Uni au 11e et les États-Unis au 13e .

Par comparaison avec cinq autres pays industrialisés pour lesquels les données étaient connues, le Canada occupait, en ce qui a trait aux APVP pour 100 000 habitants, la 2e place pour les hommes et la 3e pour les femmes (voir graphique 5.7).

Comme au Canada, les taux de mortalité infantile ont chuté dans les autres pays industrialisés au cours des dernières décennies (voir graphique 5.8). En 1960, les taux variaient de 22 décès pour 1 000 naissances au Royaume-Uni à 44 décès pour 1 000 naissances en Italie. En 1996, les taux avaient chuté à 4 au Japon et à 7 aux États-Unis. Le taux de mortalité infantile au Canada est bien supérieur à celui du Japon, qui affiche le taux le plus faible au monde.

GRAPHIQUE 5.6

GRAPHIQUE 5.7

GRAPHIQUE 5.8

 

Dans l’ensemble, selon de multiples indicateurs de santé, les Canadiens jouissent d’un niveau de santé qui compte parmi les plus élevés au monde. Le Canada se classe deuxième au chapitre de l’espérance de vie, juste derrière le Japon. Les taux de mortalité des Canadiens figurent parmi les plus faibles des pays de l’OCDE, juste derrière ceux de la France, de la Suède et de l’Australie. Des pays industrialisés, le Canada affiche le deuxième taux de mortalité prématurée parmi les plus bas. Bien que le taux de mortalité infantile du Canada demeure supérieur à celui du Japon, il est bien inférieur à celui des États-Unis.

5.3 Dépenses de santé et état de santé

Étonnamment, peut-être, il n’existe pas de lien certain entre les dépenses de soins de santé d’un pays et l’état de santé de sa population (voir graphique 5.9). Par exemple, les Japonais jouissent de l’espérance de vie la plus longue; néanmoins, le Japon se classe à l’avant-dernier rang quant au ratio au PIB des dépenses de soins de santé. À l'opposé, les États-Unis arrivent en première place quant au ratio des dépenses de soins de santé-PIB, mais leur espérance de vie compte parmi les plus faibles et leur taux de mortalité infantile, parmi les plus élevés. Par ailleurs, la Suède et l’Italie présentent des niveaux de dépenses de soins de santé similaires, mais l’espérance de vie de leur population respective diffère. En outre, le Canada consacre moins d’argent à ses services de santé que les États-Unis, mais l'état de santé général des Canadiens est bien meilleur.

GRAPHIQUE 5.9

 

Il ressort que les dépenses qu’un pays affecte aux soins de santé n’ont pas nécessairement pour effet d’améliorer l’état de santé de sa population. En d’autres termes, l’état de santé d’une population dépend de nombreux facteurs, et les soins de santé n'en sont qu’un.

 

5.4 Le concept de santé de la population

Il est clair que l’état du système de soins influe sur notre santé. Des services tels que la vaccination des enfants, les médicaments visant à réduire l’hypertension de même que la chirurgie cardiaque améliorent la santé et contribuent au bien-être. Toutefois, un bon système de soins de santé ne représente qu’un seul des nombreux facteurs qui aident à maintenir la population en santé. Le graphique 5.10 reproduit une figure préparée par l’Institut canadien de recherches avancées, que l’on peut consulter sur le site Web de Santé Canada. Selon l’information présentée dans cette figure, seulement 25 % de la santé d’une population dépendent du système de soins de santé; les 75 % restants sont attribuables à des facteurs tels que le patrimoine biologique et génétique, l’environnement physique et les conditions socio-économiques.

GRAPHIQUE 5.10

 

L’expression « santé de la population » sert à décrire la multiplicité et la gamme des facteurs qui influent sur la santé. L’expression « déterminants de la santé » est l’étiquette générale qu'on donne aux multiples facteurs qui, croit-on maintenant, contribuent à maintenir en santé la population. Même si on ne s’entend pas sur un ensemble définitif de déterminants de la santé ni sur leur importance relative, on est parvenu à un certain consensus au cours de la dernière décennie. La liste des déterminants de la santé présentée au tableau 5.1 a été fournie par Santé Canada. Il faut souligner que l’approche axée sur la santé de la population n’atténue pas les effets du système de soins de santé, elle ne fait qu'ajouter d’autres facteurs ou déterminants de la santé et tenir compte de l’interaction entre ces déterminants.

Contrairement à l’approche traditionnelle des soins de santé, centrée sur l’individu malade, les stratégies axées sur la santé de la population visent à améliorer la santé d’une population entière par des approches préventives généralisées qui tiennent compte des déterminants de la santé. Ces approches ont pour but de prévenir les problèmes de santé avant qu’ils ne se répercutent sur le système de soins de santé.

Chaque fois que l’on voit une personne qui reçoit des soins – je mets l’accent ici sur les soins primaires en particulier – il est essentiel de tenir compte du milieu d’où provient cette personne : c’est-à-dire les influences sociales, économiques, physiques et environnementales qui influent sur la vie de cette personne.

Robert McMurtry,
chaire G.D.W. Cameron,
Santé Canada (8:24)

Le concept de santé de la population n’est pas nouveau. En 1974(63), le ministre fédéral de la Santé de l'époque, l'honorable Marc Lalonde, a publié un document de travail intitulé Nouvelles perspectives de la santé des Canadiens. On soutient dans ce document que la bonne santé n’est pas uniquement le résultat de soins médicaux. Par exemple, on avance que les changements dans les habitudes de vie ou dans les environnements sociaux et physiques amélioreraient probablement plus l’état de santé des Canadiens que si l’on consacrait davantage d’argent à la prestation de soins de santé. Le rapport définit quatre principaux déterminants de la santé : la biologie humaine, l’environnement, les habitudes de vie et l’organisation des soins de santé.(64)

Le rapport qu’a publié Jake Epp en 1986, alors qu’il était ministre fédéral de la Santé, intitulé La santé pour tous : plan d'ensemble pour la promotion de la santé, a jeté un nouvel éclairage dans le domaine de la santé de la population en mettant l’accent sur les grands facteurs sociaux, économiques et environnementaux qui influent sur la santé.(65)

 

TABLEAU 5.1

PRINCIPAUX DÉTERMINANTS DE LA SANTÉ

PRINCIPAUX DÉTERMINANTS

POSTULATS

Revenu et situation sociale

La santé s’améliore en proportion du revenu et de l’ascension dans la hiérarchie sociale.

Un revenu élevé détermine des conditions de vie telles que l’accès à un logement sécuritaire et la capacité d’acheter des aliments sains en quantité suffisante. Les sociétés prospères et dont les richesses sont équitablement partagées ont les populations les plus saines.

Réseaux de soutien social

Le soutien offert par la famille, les amis et la collectivité est lié à une meilleure santé.

L’importance que l’on accorde à l’adoption de mesures efficaces à l’égard du stress et au soutien de la famille et des amis permet d’établir des relations d’affection et de solidarité qui aident à prévenir les problèmes de santé.

Éducation

Plus le niveau d’instruction de la personne est élevé, plus elle jouit d’une meilleure santé.

L’éducation augmente les chances d’une personne d’assurer sa sécurité sur le plan financier et d’avoir une sécurité d’emploi, et permet un plus grand contrôle sur les circonstances de la vie – quelques-uns des déterminants clés de la santé.

Emploi et conditions de travail

Le chômage, le sous-emploi et le travail stressant sont associés à une mauvaise santé.

Les personnes qui exercent davantage de contrôle sur leurs conditions de travail et qui sont moins exposées au stress lié à l’emploi jouissent d’une meilleure santé et souvent vivent plus longtemps que celles qui exercent un emploi et des activités plus stressants ou risqués.

Environnement sociaux

L’ensemble des valeurs et des normes en vigueur dans une société influe de diverses façons sur les pratiques sanitaires des individus et de l’ensemble de la population. En outre, la stabilité sociale, la reconnaissance de la diversité, la sécurité, de saines relations de travail et la cohésion de la famille et de la communauté forment un ensemble de conditions sociales favorables qui réduisent ou permettent d’éviter un grand nombre des risques pour la santé. Des études ont montré qu’un faible soutien affectif et une faible participation à la société sont associés à la mortalité attribuable à toute cause.

Environnements physiques

Les aspects physiques de l’environnement naturel (comme la qualité de l’air et de l’eau) ont une profonde influence sur la santé. Les éléments présents dans l’environnement créé par l’humain, tels que le logement, la sécurité en milieu de travail, l’aménagement de la collectivité et du réseau routier, exercent également une profonde influence.

Habitudes de vie et compétences d’adaptation personnelles

Les environnements sociaux qui encouragent et appuient les bonnes décisions en matière de santé et les modes de vie sains, de même que les connaissances, les intentions, les attitudes et les habiletés d’adaptation qui favorisent l’adoption de comportements sains, sont des déterminants clés de la santé.

Les recherches portant sur les maladies du cœur et les problèmes touchant les enfants défavorisés indiquent que les processus biochimiques et physiologiques relient l’expérience socio-économique individuelle aux conditions vasculaires et à d’autres problèmes de santé.

Développement sain de l’enfance

L’effet des expériences prénatales et des expériences vécues dans la petite enfance sur l’état de santé ultérieur, le bien-être, les habiletés à l’adaptation et les compétences est considérable.

Les enfants nés dans des familles à faible revenu ont plus de chances que ceux qui sont nés dans des familles à revenu élevé de souffrir d’une insuffisance pondérale, de manger des aliments moins nutritifs et d’avoir plus de difficultés à l’école.

Patrimoine biologique et génétique

L’ensemble des caractères biologiques et organiques de base du corps humain est un déterminant fondamental de la santé.

Le patrimoine génétique prédispose la personne à toute une gamme de réactions qui ont une incidence sur l’état de santé. Même si les facteurs socio-économiques et environnementaux sont des déterminants importants de la santé en général, dans certaines circonstances, le patrimoine génétique prédispose certaines personnes à des maladies particulières ou à des problèmes de santé.

Services de santé

Les services de santé, surtout ceux qui visent à maintenir et à promouvoir la santé ou à prévenir la maladie, contribuent à l’état de santé de la population.

Sexes

Le mot sexe fait ici référence à toute la gamme des rôles déterminés par la société, de traits de personnalité, d’attitudes, de comportements, de valeurs ainsi que de l’influence et du pouvoir relatifs que la société attribue aux deux sexes en les différenciant.

Les normes associées aux « sexes » influent sur les pratiques et les priorités du système de soins de santé. Un grand nombre de problèmes de santé sont fonction de la situation sociale ou des rôles des deux sexes. Les femmes par exemple sont plus vulnérables à l’agression sexuelle ou à la violence physique dirigée contre elles en tant que telles; elles sont aussi plus susceptibles de faire partie des familles à faible revenu, d’être monoparentales et d’être exposées à des risques et à des menaces pour la santé sexospécifiques (comme les accidents, les MTS, le suicide, le tabagisme, l’abus de substances psychoactives, les médicaments d’ordonnance, l’inactivité physique).

Culture

Certaines personnes et certains groupes peuvent faire face à des risques additionnels pour leur santé à cause d’un milieu socio-économique déterminé dans une large mesure par des valeurs culturelles dominantes contribuant à perpétuer certaines conditions comme la marginalisation, la stigmatisation, la perte ou la dévaluation de la langue et de la culture, et le manque d’accès à des soins et à des services de santé adaptés à la culture du patient.

Source : Santé Canada, Pour une compréhension commune : Une clarification des concepts clés de la santé de la population, document de travail, décembre 1996, p. 15-16; Comité consultatif fédéral-provincial-territorial sur la santé de la population, Stratégies d’amélioration de la santé de la population : Investir dans la santé des Canadiens, Ottawa, 1994, p. 2-3.

Le rapport Epp voyait la promotion de la santé comme un complément au système de soins de santé et comme un moyen de réduire les inégalités sur le plan de la santé entre les divers groupes socio-économiques; de prévenir la fréquence des blessures, les maladies, les conditions chroniques et les handicaps qui en résultent; et d’améliorer la capacité des gens à faire face aux maladies chroniques, aux handicaps et aux problèmes de santé mentale.

En 1989, l’Institut canadien de recherches avancées a soutenu que les déterminants individuels de la santé n’agissent pas isolément. Plutôt, c’est l’interaction complexe entre les divers déterminants qui peut avoir un effet beaucoup plus important sur la santé. Ces interactions peuvent aider à expliquer pourquoi certains groupes de Canadiens sont en meilleure santé que d’autres, en dépit du fait que tous les Canadiens ont un accès égal aux services de santé.

Cette perception nouvelle qui influe sur nos croyances en matière de santé tient au fait que, de plus en plus, nous comprenons que l’environnement dans lequel la personne vit et travaille pendant sa vie a des répercussions importantes sur la santé physique et mentale.

Dr J. Fraser Mustard,
mémoire présenté au Comité, 22 mars 2000, p 7.

En 1994, l’approche axée sur la santé de la population a été officiellement entérinée par les ministres de la Santé des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux dans un rapport intitulé Stratégies d’amélioration de la santé de la population : Investir dans la santé des Canadiens(66). Ce rapport a résumé ce que l’on connaissait à l’époque des déterminants de la santé au sens large et défini le cadre qui sert de guide à l’élaboration des politiques et des stratégies centrées sur l’amélioration de la santé de la population.

En 1997, le Forum national sur la santé a fait avancer la réflexion sur la question des déterminants de la santé. Ses participants ont souligné l’importance de travailler non seulement avec les ministères de la Santé, mais aussi avec différents secteurs, afin d’agir sur les déterminants de la santé. Ils ont proposé la mise sur pied d’un « Institut de la santé de la population » afin d’améliorer le processus décisionnel dans le domaine de la santé en donnant et en favorisant un point de vue axé sur la santé de la population dans la recherche et l’élaboration des politiques en matière de santé.

En réponse à la recommandation du Forum, le gouvernement fédéral a lancé en 1999 l’Initiative sur la santé de la population canadienne (ISPC). Établie sous l'égide de l’ICIS, l’initiative a pour but de réunir les chercheurs et les analystes du pays. Elle s’appuie sur les bases de données existantes et vise à créer une infrastructure statistique qui formera l’assise de la recherche sur la santé de la population. Grâce à ce projet, on pourra regrouper et analyser des données, établir des normes et des définitions pour ces dernières, diffuser des rapports publics sur l’état de santé général de la population et sur le rendement du système de soins de santé, et disposer d'un organisme-ressource pour l’élaboration et l’évaluation des politiques gouvernementales. Le premier conseil d'administration de l’ISPC a été annoncé le 3 février 2000. On procède actuellement à la mise au point d’un programme de recherche ainsi que de stratégies relatives à la diffusion et à la communication de l’information.

Encore une fois en 1999, le Comité consultatif fédéral-provincial-territorial sur la santé de la population a publié un rapport intitulé L’action intersectorielle… Pour une population en santé, qui soutient l’idée que l’amélioration de la santé, du bien-être et de la qualité de vie de la population requiert la participation de nombreux secteurs.(67) Selon ce rapport, l’action intersectorielle – la collaboration au sein des organisations et des secteurs, et aussi entre eux – fait appel à la participation du public et des gouvernements, du secteur bénévole, du secteur privé, des entreprises, des spécialistes et des consommateurs dans les domaines de la santé, de la justice, de l’éducation, des services sociaux, de la finance, de l’agriculture, de l’environnement, etc.

Après la publication du deuxième rapport sur la santé de la population canadienne (septembre 2000), tous les ministres de la Santé, fédéral, provinciaux et territoriaux, ont convenu des priorités d’action suivantes à l’égard des conditions sous-jacentes de la bonne ou de la mauvaise santé des Canadiens :

  • renouveler et réorienter le secteur de la santé;
  • investir dans la santé et le bien-être de groupes clés de la population;
  • améliorer la santé en réduisant les inégalités d’alphabétisation, d’instruction et de revenu.

 

5.5 Qu'est-ce qui fait que les Canadiens sont en bonne ou en mauvaise santé?

L'état de santé des Canadiens n’est pas uniforme. Notre système de soins de santé universel a donné un accès équitable aux services assurés, mais pas nécessairement une bonne santé pour tous. De multiples indicateurs montrent des écarts entre les riches et les pauvres qui ne peuvent s’expliquer uniquement par un accès inégal aux services de santé. Les disparités dans l’état de santé sont fonction de l’emplacement géographique, des facteurs démographiques, des conditions socio-économiques, des différences entre les sexes, etc.

Ce bon résultat général sur la santé des Canadiens ne doit cependant pas cacher certains éléments troublants, étant donné que ce ne sont certainement pas tous les Canadiens qui bénéficient de cette bonne santé. Les autochtones, en particulier, ont une espérance de vie qui est de cinq, sept ou 12 années inférieure, selon le critère utilisé. De toute façon, les gens des régions du Nord, des zones rurales et des zones urbaines à faibles revenus ont une espérance de vie remarquablement plus faible que les Canadiens plus prospères. Il y a donc des problèmes.

Dr. John S. Millar,
v.-p., Recherche et analyse, ICIS, 14:33.

Un exemplaire du document intitulé Deuxième rapport sur la santé de la population canadienne a été présenté au Comité.(68) Ce rapport détaillé fournit de l’information et des commentaires intéressants sur l’état de santé des Canadiens en utilisant l’approche axée sur la santé de la population. Il conclut notamment ce qui suit :

  • Les Canadiens à faible revenu sont plus susceptibles de mourir prématurément et de souffrir de maladies que les Canadiens à revenu élevé.
  • De grandes inégalités dans la répartition du revenu se traduisent par une augmentation des problèmes sociaux et une moins bonne santé au sein de la population dans son ensemble.
  • Les Canadiens ayant de faibles capacités de lecture et d’écriture sont plus susceptibles d’être en chômage et de vivre dans la pauvreté, d’être en mauvaise santé et de mourir prématurément que les Canadiens qui jouissent de plus grandes capacités.
  • Les Canadiens ayant un niveau de scolarité supérieur ont un meilleur accès à un environnement physique sain et sont mieux en mesure de préparer leurs enfants à l’école que les gens moins instruits. Ils ont aussi tendance à moins fumer, à être plus actifs physiquement et à avoir une alimentation plus saine.
  • Les études en neurobiologie ont confirmé que les expériences vécues de la période de la conception jusqu’à l’âge de six ans ont le plus d’incidences sur le « réseautage » et le modelage des neurones du cerveau. La stimulation positive dans les premières étapes de la vie améliore les capacités d’apprentissage, les comportements et la santé jusqu’à l’âge adulte.
  • Le vieillissement n’est pas synonyme de mauvaise santé. Une vie active et les occasions d’apprentissage tout au long de la vie peuvent être particulièrement importantes pour la conservation à un âge avancé d’un bon état de santé et des capacités cognitives.
  • Malgré une réduction des taux de mortalité infantile, l’amélioration du niveau de scolarité et une diminution de l’abus de substances psychoactives dans bon nombre des collectivités autochtones, les membres des Premières nations et les Inuits sont plus susceptibles de contracter des maladies et de mourir prématurément que la population canadienne dans son ensemble.
  • Les hommes sont plus susceptibles que les femmes de mourir prématurément des suites d’une maladie du cœur, de blessures non intentionnelles mortelles, du cancer et du suicide. Les femmes sont plus susceptibles de souffrir de dépression, d’un trop grand stress, de conditions chroniques ainsi que de blessures résultant de la violence familiale pouvant aussi entraîner la mort.
  • Les Canadiens plus âgés sont de loin plus susceptibles que les plus jeunes de souffrir de maladies physiques, mais les membres des groupes d’âge plus jeunes affichent les plus bas niveaux de bien-être psychologique.

Selon une récente étude réalisée par Statistique Canada, les conditions chroniques et les limitations d’activité sont plus fréquentes chez les personnes âgées de 45 à 64 ans ayant un niveau de scolarité et de revenu inférieur. En 1998-1999, des maladies tels l’arthrite ou le rhumatisme, l’hypertension, la cardiopathie, le diabète, la bronchite ou l’emphysème et les limitations d’activité étaient plus souvent répandues chez les personnes sans diplôme secondaire (voir graphique 5.11). Ces conditions, ainsi que l’asthme, les migraines et les céphalées, étaient également plus répandues chez les personnes à revenu faible ou moyen-inférieur que chez celles disposant d’un revenu plus élevé (voir graphique 5.12).

GRAPHIQUE 5.11

 

On constate également des écarts importants dans les taux de mortalité infantile entre les différentes catégories de revenu. Statistique Canada signale que les taux de mortalité infantile sont plus élevés en milieu urbain très défavorisé et plus faibles en milieu urbain très favorisé. Le graphique 5.13 révèle que, même si l’écart observé s’est rétréci, le taux de mortalité infantile relevé en 1996 dans les régions les plus défavorisées du Canada (6,5 pour 1 000) était encore supérieur des deux tiers à celui des régions les plus favorisées (3,9 pour 1 000). Selon Statistique Canada, si le taux pour l’ensemble du Canada avait été aussi faible que celui des régions les plus favorisées, le nombre de décès au cours de la première année de vie aurait été inférieur de 500 en 1996.(69)

GRAPHIQUE 5.12

GRAPHIQUE 5.13

 

5.6 Commentaires du Comité

Bien que de nombreux Canadiens jouissent de niveaux de santé élevés et que, à la lumière de la plupart des principaux indicateurs de santé, le Canada occupe une position bien supérieure à celle d’autres pays, il y a certainement matière à amélioration. On relève des disparités en matière de santé qui sont liées à l’âge, aux conditions socio-économiques, au sexe, etc. De nombreux témoins ont déclaré au Comité qu’il est impératif de réduire ces disparités si l'on veut améliorer l’état de santé général des Canadiens. À leur avis, la seule solution est une approche globale axée sur la santé de la population.

Les témoins ont également souligné le fait qu’il est nécessaire de mieux comprendre les liens entre l’état de santé et ses différents déterminants. Nous ignorons comment les variations des dépenses de soins de santé se répercutent sur la santé d’une population. Nous sommes peu au courant de l’incidence d'autres politiques publiques sur l’état de santé, comme un récent rapport l’a fait ressortir :

Notre compréhension des facteurs qui touchent la santé à moyen et à long terme est encore bien fragmentaire. Par exemple, on ignore l’efficacité à long terme de procédures ou d’interventions qui, parfois, se font concurrence – telles qu’un pontage et l’angioplastie percutanée transluminale. Dans le cas du cancer de la prostate, quels sont les mérites respectifs de la chimiothérapie, de la chirurgie et de la simple attente à des fins d’observation? Comment les interventions à caractère psychologique modifient-elles les résultats? Quels risques pour la santé présentent différents métiers et professions? Quels sont les effets à long terme de nombreux risques environnementaux? Dans quelle mesure, si mesure il y a, les dispositions relatives à « l’égalité d’accès » contenues dans la Loi canadienne sur la santé profitent-elles aux personnes à faible revenu ou peu scolarisées?(70)

Dans son témoignage, Sholom Glouberman a soulevé la question suivante : étant donné que les soins de santé ne sont qu’un facteur parmi tant d’autres déterminants de la santé, quel rôle les ministres de la Santé peuvent-ils ou devraient-ils jouer dans l'établissement de stratégies axées sur la santé de la population? Précisément, il a mentionné ce qui suit au Comité :

Le ministère de la Santé se trouve devant un dilemme, étant donné que les principaux facteurs qui favorisent la santé ne sont pas du domaine de la santé. Il s'agit plutôt du statut social, du contrôle sur le travail et du niveau d'instruction, des domaines sur lesquels le ministère de la Santé n'exerce aucun pouvoir. S'il en assume la responsabilité, les autres ministères risquent de le considérer comme un « impérialiste de la santé ». Comment résoudre ce genre de problèmes?(71)

Puisque de multiples facteurs déterminent l’état de santé d’une population, la collaboration et l’action intersectorielle deviennent de toute évidence nécessaires. Selon Marc Lalonde, le ministre fédéral de la Santé doit agir comme chef de file. Il faut aussi, selon lui, de nouvelles initiatives susceptibles d’améliorer la santé de la population canadienne, en particulier dans les domaines touchant la promotion de la santé et la prévention de la maladie :

Nous avons besoin d’un type d’action dont le ministre de la Santé peut être le chef de file, mais il ne peut être le seul acteur. Ce doit être une action collective du gouvernement, car dans presque tous les cas plusieurs ministères sont mis en jeu. Le coût n’est pas un problème. Un programme d’éducation publique sur l’obésité, par exemple, a un coût insignifiant comparé au budget de la santé. Ce qu’il faut, c’est la volonté de mettre en place des programmes et de les maintenir.(72)


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