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DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS — L'extrémisme antimusulman

8 juin 2021


Honorables sénateurs, il est difficile de trouver les mots pour exprimer la douleur et le chagrin collectifs que ressentent les musulmans du Canada qui pleurent une autre perte dans la communauté. Il s’agit du deuxième meurtre collectif contre des musulmans et de la troisième attaque islamophobe ayant entraîné la mort. La famille Afzaal de London a été assassinée — une grand-mère, une mère, un père et un enfant adolescent — simplement parce qu’ils étaient musulmans et qu’ils étaient allés se promener. Un garçon de 9 ans est hospitalisé dans un état grave, désormais orphelin, sa famille entière lui ayant été volée sur fond de haine.

Ma famille a suivi en silence les nouvelles horribles de cet acte terroriste prémédité, tout en apprenant les détails d’une famille musulmane pakistanaise semblable à la nôtre, qui faisait sa promenade du soir. Salman Afzaal était un médecin, réputé pour sa générosité et sa gentillesse; Madiha Salman, ingénieure civile originaire de ma ville natale, Peshawar, devait défendre sa thèse de doctorat dans quelques jours. Des amis les décrivaient comme « les meilleures personnes de la communauté ».

Il s’agit d’une agression épouvantable, mais qui n’a malheureusement rien d’étonnant. Ce n’est pas la première fois que je parle de la montée de l’islamophobie et ce ne sera pas la dernière, je le crains. En tant que leaders du gouvernement, nous dénonçons régulièrement l’islamophobie, mais cela ne suffit pas. Il faut poser des gestes concrets. Selon CBC News, 250 groupes de suprémacistes blancs sont actuellement actifs au Canada. Que faisons-nous pour les démanteler? Que faisons-nous pour combattre la radicalisation et l’extrémisme des suprémacistes blancs?

Par ailleurs, nous devons combattre l’islamophobie avant qu’elle se transforme en violence physique. Ce sont les discours islamophobes qui sèment les germes de ces gestes haineux. Je dois dire, à mon grand regret, que j’ai vu beaucoup de Canadiens et de journalistes, et même certains de mes collègues, tenir des propos qui donnent une impression négative des musulmans, par exemple lorsqu’ils emploient l’expression « État islamique » pour décrire n’importe quel pays à majorité musulmane que nous dénonçons, qu’ils choisissent de se concentrer sur la religion d’un agresseur lorsqu’il est musulman, ou qu’ils utilisent des termes comme « islamisme ». Les mots ont de l’importance; ils ont des conséquences.

J’exhorte mes collègues à tendre la main aux communautés musulmanes de leur région et à collaborer avec elles afin d’agir dès maintenant. Je vous encourage à penser aux changements qu’il faut apporter pour mettre un terme aux propos haineux sur le Web et combattre les idéologies extrémistes haineuses. Notre voix a de l’importance. Il est temps d’exprimer, avec un engagement inconditionnel, que tous les Canadiens ont le droit de vivre une vie exempte de discrimination et sont libres de le faire, et de poser des gestes concrets pour contribuer à régler ce problème.

Ma communauté vit un grand deuil à l’heure actuelle, et ce deuil la force aussi à confronter sa peur de ne pas être en sécurité. J’ai reçu une multitude d’appels de musulmans vivant au Canada et à l’étranger, qui me disent : « Le Canada a toujours été perçu comme un pays où nous pouvions vivre en sécurité. Que s’est-il passé? » C’est une question qui me donne du fil à retordre, et je mets mes collègues au défi d’y répondre : dites-moi, que s’est-il passé? Merci.

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