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DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS — La crise en Afghanistan

25 novembre 2021


Honorables sénateurs, durant ma tendre jeunesse au Pakistan, peu de choses me réjouissaient autant qu’un voyage à Kaboul. J’ai de bons souvenirs des étés passés en Afghanistan, où les gens sont généreux, les paysages à couper le souffle et la nourriture incomparable.

Les femmes avaient une présence très visible dans toutes les sphères de la société et il était courant de voir des femmes chefs d’entreprise. Je ne me suis jamais attendue à ce que la région connaisse une telle dévastation et à ce que les yeux du monde entier soient tournés vers elle.

Parce que j’adore cette région du monde et que je m’en préoccupe, j’ai proposé, en tant que nouvelle sénatrice, en 2010, que l’on étudie le rôle joué par le gouvernement canadien pour promouvoir les droits des femmes après la fin des opérations de combat en Afghanistan. Le comité a recommandé des moyens concrets que pourrait prendre le Canada pour faire de l’avancement des droits des femmes un élément fondamental de son approche en Afghanistan après 2011.

Depuis trois mois, je reçois des courriels désespérés de la part d’Afghans qui tentent de fuir Kaboul et de Canadiens inquiets au sujet d’êtres chers. Le Groupe d’amitié parlementaire Canada-Afghanistan a été très actif depuis janvier 2021.

À la dernière rencontre des femmes parlementaires en juin, le désespoir était palpable et on a imploré notre aide. Ceux qui sont toujours en Afghanistan font face à des difficultés économiques, au manque de services essentiels, à la faim et à la menace de la violence.

Selon les estimations des Nations unies, près de la moitié de la population du pays, soit 23 millions de personnes, souffre de famine, et 3,2 millions d’enfants de moins de 5 ans devraient souffrir de malnutrition aiguë d’ici la fin de l’année.

Le ministère de la Condition féminine a déjà été remplacé par le ministère de la Promotion de la vertu et de la Prévention du vice, qui est reconnu pour battre des femmes en public. Des groupes humanitaires craignent que 97 % de la population du pays tombent sous le seuil de la pauvreté dans les prochains mois.

Je suis également préoccupée par la menace qui pèse sur des milliers d’années d’histoire, de culture et de musique. Selon des reportages, dans les vieux quartiers de Kaboul, des instruments de musique sont désassemblés, et des voix qui chantaient la beauté majestueuse de l’Afghanistan, de ses montagnes, de ses rivières et de ses vallées sont réduites au silence.

J’ai été particulièrement émue par l’histoire d’un ustad, ou maître, qui a enterré son rebab, un instrument à cordes. Pour moi, enterrer un rebab est un geste significatif. La musique de cet instrument touche le cœur de tous les habitants de cette région. Pour moi, c’est comme enterrer le cœur et l’âme de l’Afghanistan.

Ce que je crains, c’est que les médias passent à autre chose et que l’Afghanistan tombe de nouveau dans l’oubli. La situation fait déjà moins souvent les manchettes. Les femmes commencent déjà à disparaître de la place qu’elles s’étaient taillée. Elles deviennent déjà invisibles. Dans combien de temps cessera-t-on complètement de publier des reportages sur leur triste sort et deviendront-elles invisibles à nos yeux également?

Merci, et comme je dis en pachto : manana.

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