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Projet de loi corrective de 2023

Adoption du vingt-quatrième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles

18 juin 2024


L’honorable Mobina S. B. Jaffer [ + ]

Propose que le rapport soit adopté.

 — Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui en tant que présidente du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles pour parler de deux amendements proposés dans le vingt-quatrième rapport du comité, sur le projet de loi S-17, Loi visant à corriger des anomalies, contradictions, archaïsmes ou erreurs relevées dans les lois et règlements du Canada et à y apporter d’autres modifications mineures et non controversables ainsi qu’à abroger certaines dispositions ayant cessé d’avoir effet.

Le projet de loi S-17, Loi corrective 2023, a été étudié en comité le 12 juin 2024, conformément à l’ordre de renvoi du 30 mai 2024.

Ce projet de loi s’inscrit dans le cadre du programme de correction des lois, qui vise à corriger les anomalies, les incohérences, la terminologie désuète ou les erreurs qui se sont glissées dans les lois fédérales.

Depuis la création du programme, en 1975, 12 lois correctives ont été adoptées, dont la plus récente en 2017. Le projet de loi S-17 est la 13e loi corrective.

Pour rappel, le programme prévoit un processus accéléré pour faciliter l’adoption de modifications mineures et non controversées.

Honorables sénateurs, un comité de chacune des Chambres étudie les propositions avant qu’un projet de loi soit présenté. Les propositions pour la loi corrective de 2023 ont été étudiées par le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles en octobre dernier et le comité a déposé son 25e rapport le 12 décembre 2023 dans lequel il recommandait la correction, la suppression ou le retrait de certaines propositions. Le Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes a également étudié la proposition et fait des recommandations similaires en février de cette année. Le projet de loi S-17 a été présenté au Sénat le 19 mars 2024 et il reflète les recommandations qui découlent des études sur la proposition de loi corrective.

Le projet de loi originel visait à modifier 58 lois fédérales et 3 règlements connexes. Le comité sénatorial a tenu une réunion et reçu des fonctionnaires du ministère de la Justice dans le cadre de son étude sur le projet de loi S-17. Sur la recommandation des fonctionnaires, le comité a abrogé les articles 137 et 158 du projet de loi, qui modifiaient respectivement la Loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre et la Loi sur l’évaluation d’impact. Des modifications à ces dispositions ont également été inscrites dans le projet de loi C-69, Loi no 1 d’exécution du budget de 2024, présenté après le projet de loi S-17.

Au cours de leur témoignage, les fonctionnaires du ministère de la Justice ont indiqué que, depuis la présentation du projet de loi S-17, la Loi sur l’évaluation d’impact fait également l’objet d’un processus de modification distinct, par l’entremise de l’actuel projet de loi C-69, Loi no 1 d’exécution du budget de 2024, en réponse à une récente décision de la Cour suprême du Canada. Les dispositions du projet de loi C-69 modifieraient substantiellement l’article 69 de la Loi sur l’évaluation d’impact.

Le projet de loi C-69 modifie également la Loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre. En conséquence, le ministère de la Justice du Canada a recommandé que les articles 137 et 158 du projet de loi S-17 soient éliminés. Ainsi, le comité était convaincu qu’il était justifié de retirer ces articles du projet de loi S-17 afin d’éviter de possibles incohérences ou des modifications qui ne concordent pas avec les dispositions du projet de loi C-69.

Votre comité a adopté ce rapport avec ces deux amendements à l’unanimité.

Merci.

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui à l’étape du rapport sur le projet de loi S-17, dont le titre abrégé est Loi corrective de 2023.

Lors de son intervention à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi S-17 le 21 mars dernier, le sénateur Cotter a affirmé ceci :

Je dois dire, chers collègues, qu’il ne s’agit pas du projet de loi le plus passionnant que nous aurons à examiner dans cette enceinte.

Le sénateur Cotter avait bien raison, alors je serai bref.

Pour ma part, lors de mon intervention à l’étape de la deuxième lecture, j’ai insisté pour que le projet de loi S-17 soit étudié en comité malgré son caractère très particulier. En effet, ce projet de loi se distingue des autres projets de loi réguliers du gouvernement, en ce sens que le ministre de la Justice doit, dans le cas d’un projet de loi correctif, présenter un avant-projet de loi au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles et au Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes pour que ceux-ci l’étudient. Ces comités ont donc étudié les mesures qui sont aujourd’hui contenues dans le projet de loi S-17 avant que celui-ci soit déposé le 19 mars dernier. Au total, ces deux comités n’ont eu que trois séances pour étudier ce projet de loi, qui comporte 165 articles et vient modifier 58 lois et 3 règlements connexes, ce qui représente tout de même un projet de loi costaud.

Chers collègues, si j’ai insisté pour que le projet de loi S-17 soit étudié en comité, c’est que je crois sincèrement que jamais le Sénat ne doit se soustraire à son obligation et à son devoir de pousser un peu plus loin sa réflexion et son analyse des projets de loi et de procéder à un second examen objectif. D’ailleurs, sans l’étude du projet de loi S-17 en comité et sans son adoption rapide à l’étape de la troisième lecture, les deux amendements dont a fait état la sénatrice Jaffer n’auraient probablement pas été déposés et adoptés, ce qui aurait, aux dires de la vice-présidente du comité, la sénatrice Batters, posé problème. Je la cite :

Si nous ne l’avions pas étudié ici, ce projet de loi aurait peut‑être déjà reçu la sanction royale et nous aurions […] des conséquences imprévues avec la loi d’exécution du budget.

Dans mon discours du 30 mai dernier à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi S-17, j’ai soulevé des préoccupations très spécifiques et techniques par rapport à ce projet de loi, et notre étude en comité m’a permis d’approfondir ces questions et d’avoir des réponses.

Je me questionnais notamment sur l’article 141 du projet de loi, qui propose de modifier le paragraphe 48(3) de la Loi sur les produits antiparasitaires pour remplacer l’expression « dwelling house », en français « maison d’habitation », par « dwelling-place », soit « local d’habitation » en français. Or, un document des analystes de la Bibliothèque du Parlement nous signalait que le terme « dwelling-place » ne semblait pas employé dans d’autres lois en anglais pour traduire le terme « local d’habitation ». C’est le cas notamment de l’article 109 de la Loi maritime du Canada et de l’article 46.13 de la Loi sur le pilotage, qui sont deux dispositions qui ne sont pas incluses dans le projet de loi S-17, mais qui faisaient partie des comparatifs.

Je me demandais aussi quelle était la différence entre les expressions « maison d’habitation » et « local d’habitation », étant donné que le terme « maison d’habitation » est utilisé dans 23 articles du Code criminel et est même défini à l’article 2. J’ai pu comprendre que le local d’habitation était plus large dans l’interprétation que la maison d’habitation, ce qui avait pour conséquence que, dans le cadre de la Loi sur les produits antiparasitaires, la nécessité d’avoir une exception à l’inspection sans mandat plus large était utile pour protéger les droits privés d’intrusion dans la vie privée ou dans la résidence d’habitation. Il s’agit d’une question importante qui a été posée aux fonctionnaires dans le but de nous assurer que le projet de loi S-17 ne vienne pas créer de confusion.

La réponse que j’ai reçue m’a permis de comprendre le raisonnement logique du gouvernement, mais m’a aussi laissé perplexe sur certains éléments. En effet, l’intention de cet article est d’harmoniser la loi dans son propre corpus de dispositions et de faire en sorte que les termes soient utilisés partout dans la même loi, en l’occurrence sur la question du local d’habitation. C’est donc la perspective d’une étude verticale de la loi qui a été analysée en silo, sans tenir compte des termes et expressions utilisés dans les autres lois, ce qui était l’exemple du Code criminel. L’étude en silo ne me semble pas une pratique qui donne des résultats probants.

D’ailleurs, c’est cette approche analytique en silo qui explique les deux amendements adoptés par le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Comment expliquer autrement que le gouvernement, à 45 jours d’intervalle, dépose deux projets de loi qui se contredisent et s’opposent, ce qui force le gouvernement à modifier un des deux projets de loi qu’il vient tout juste de déposer? Une approche cohérente, concertée et horizontale aurait évité un tel cafouillage. À l’évidence, la main droite du gouvernement ne sait pas nécessairement ce que fait sa main gauche. C’est inquiétant, mais il en est ainsi.

Néanmoins, j’appuie le projet de rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles ainsi que le projet de loi qui sera adopté à l’étape de la troisième lecture. Je vous invite donc, chers collègues, à l’appuyer également. Merci.

Son Honneur la Présidente [ + ]

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

Son Honneur la Présidente [ + ]

Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi modifié pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Cotter, la troisième lecture du projet de loi modifié est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

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