Projet de loi concernant des mesures supplémentaires liées à la COVID-19
Troisième lecture
27 juillet 2020
Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?
Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5b) du Règlement, je propose que le projet de loi soit lu pour la troisième fois maintenant.
Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?
Des voix : D’accord.
Honorables sénateurs, j’interviens à l’étape de la troisième lecture à titre de marraine du projet de loi C-20, Loi concernant des mesures supplémentaires liées à la COVID-19. Le projet de loi C-20 prévoit de bonifier la Subvention salariale d’urgence du Canada, de fournir des aides supplémentaires aux Canadiens souffrant de handicaps, de suspendre temporairement certains délais et d’en suspendre ou prolonger d’autres en vertu de lois et règlements fédéraux à cause de l’instabilité créée par la pandémie.
Le gouvernement souhaite, à la faveur de cette mesure législative et des règlements qui en découleront, fournir une aide financière supplémentaire aux employeurs pendant que l’économie redémarre en toute sécurité. Il propose aussi de verser aux Canadiens handicapés un paiement unique pour les aider à mieux faire face aux difficultés additionnelles liées à la COVID-19. Enfin, la partie 3 vise à faire en sorte que les particuliers, les entreprises, les gouvernements et les autres parties concernées ne ratent pas les nombreux délais fixés dans les lois fédérales, car ils pourraient en subir d’importantes conséquences financières et ne pas pouvoir exercer leurs droits.
Honorables sénateurs, la pandémie de COVID-19 constitue l’un des plus grands défis auxquels nous ferons face de notre vivant. Selon les prévisions, la COVID-19 aura provoqué la contraction la plus importante et la plus soudaine de l’économie mondiale depuis la Grande Dépression. Les chaînes d’approvisionnement mondiales ont été perturbées, le commerce a ralenti et une grande partie de l’activité économique a été interrompue. Comme partout ailleurs dans le monde, des millions de Canadiens ont perdu leur emploi, alors que les entreprises ont été confrontées à un niveau d’incertitude sans précédent.
Depuis le mois de mars, le gouvernement du Canada ainsi que les gouvernements provinciaux, territoriaux et municipaux ont pris des mesures sans précédent pour aider les Canadiens et leurs familles en ces temps extrêmement difficiles. Le Plan d’intervention économique du Canada pour répondre à la COVID-19 visait à stabiliser l’économie et à mettre en place des mesures de soutien exceptionnelles de grande ampleur rapidement. Ces mesures sont importantes à la fois à court terme pour éviter une baisse plus forte de l’activité économique que ce qu’on aurait pu observer et à long terme pour éviter des coûts sociaux et économiques prolongés en raison de la lenteur de la réembauche et de la baisse de la consommation. Même si des particuliers et des entreprises sont passés entre les mailles du filet, le programme d’intervention d’urgence vise à aider le plus de personnes possible et il continue d’aider ceux qui ont été le plus durement touchés par la pandémie, comme le propose le projet de loi C-20.
La Subvention salariale d’urgence du Canada est l’une des pièces maîtresses du Plan d’intervention économique du Canada pour répondre à la COVID-19. En protégeant le lien entre les travailleurs et leur employeur, ce programme aide les entreprises, les organismes sans but lucratif et les organismes de bienfaisance enregistrés à être en mesure de se rétablir rapidement tandis que l’économie du pays se remet en marche en douceur.
Les employeurs de toutes les tailles sont admissibles à ce soutien. Depuis sa création, la Subvention salariale d’urgence du Canada a permis de soutenir environ 3 millions d’emplois, et ce nombre continue à croître. Des milliers de familles canadiennes bénéficient d’une sécurité financière grâce à ce soutien. Ainsi, les propriétaires d’entreprise qui travaillent fort pour innover et surmonter les défis que leur pose la COVID-19 sont rassurés, sachant qu’ils peuvent se prévaloir de la subvention salariale.
Tout au long de l’évolution de cette crise, le gouvernement a fait preuve de souplesse afin d’apporter des ajustements aux programmes d’aide. En mai dernier, le gouvernement a annoncé qu’il prolongeait la subvention salariale de 12 semaines, soit jusqu’au 29 août 2020.
Le gouvernement a mené des consultations auprès des Canadiens, notamment auprès de représentants d’entreprises et de syndicats, quant aux améliorations qu’ils jugeaient opportun d’apporter à la subvention salariale d’urgence afin de favoriser la croissance économique et d’aider le plus grand nombre de Canadiens à retourner sur le marché du travail.
Pendant le processus de consultation, des organismes sans but lucratif et des organismes de bienfaisance ont déclaré que la subvention salariale leur était essentielle pour garder leurs employés et réintégrer ceux qui avaient été mis à pied.
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales a entendu des propos semblables pendant son étude de la réponse du gouvernement à la COVID-19, comme on peut le constater dans son récent rapport provisoire intitulé COVID-19 : Du soutien en temps de crise. Selon ce rapport, les entreprises sont préoccupées par le fait que, en ce moment, elles doivent subir une baisse de revenus d’au moins 30 % pour être admissibles à la subvention salariale, ce qui constitue un obstacle pour de nombreuses entreprises, en particulier celles dont les activités sont saisonnières et qui font le gros de leur chiffre d’affaires en période estivale.
Les consultations menées par le gouvernement ont également révélé que les critères d’admissibilité actuels nuisent à la croissance de l’économie canadienne et créent des inégalités. Dans son rapport, le Comité sénatorial des finances nationales recommande que le gouvernement envisage l’adoption d’un seuil d’admissibilité progressif, ou variable, pour la subvention salariale et qu’il prolonge cette dernière pour les secteurs particulièrement touchés.
Le projet de loi dont nous sommes saisis inclut de telles dispositions, et je suis convaincue qu’elles contribueront à assurer un meilleur soutien aux entreprises et aux employeurs.
J’aimerais profiter de l’occasion pour remercier le sénateur Mockler et les membres du comité pour la diligence dont ils ont fait preuve dans le cadre de ce rapport.
Des consultations ont révélé que le critère actuel de baisse des revenus de 30 % est trop strict. Elles ont montré que bien des entreprises peinent encore à composer avec la pandémie, même si elles ont connu une baisse de revenu inférieure à ce pourcentage. De toute évidence, la reprise se fera graduellement. Les employeurs consultés ont aussi dit craindre que prolonger la subvention salariale de 12 semaines, c’est-à-dire jusqu’à la fin du mois d’août, ne soit pas suffisant pour aider les entreprises à rouvrir leurs portes de la manière la plus sûre et la plus responsable possible.
Dans l’ensemble, les intervenants ont proposé des modifications qui visaient à assurer le traitement équitable des entreprises afin d’éviter que certains secteurs de l’économie canadienne soient touchés de manière disproportionnée et qu’ils reçoivent un traitement injuste en raison de leurs circonstances particulières.
Le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd’hui tient compte des commentaires importants recueillis lors des consultations récentes qu’a tenues le gouvernement avec des chefs d’entreprise et des représentants syndicaux. Ces consultations portaient sur la façon dont ce programme peut répondre le mieux possible aux besoins des employeurs et des employés au moment de la reprise de l’activité économique. En appuyant la reprise de l’activité économique à la suite de la crise, le projet de loi permettra d’aider un plus grand nombre d’employeurs et de travailleurs à se remettre sur pied.
Le projet de loi C-20 prévoit notamment les modifications suivantes. Premièrement, le projet de loi permet de prolonger la subvention salariale d’urgence jusqu’au 19 décembre 2020, y compris la refonte des détails du programme jusqu’au 21 novembre 2020. Deuxièmement, à compter du 5 juillet 2020, le projet de loi offrirait effectivement une subvention en deux parties : une subvention de base s’adressant aux employeurs admissibles qui connaissent une baisse de leurs revenus et une subvention complémentaire pour les employeurs les plus durement touchés par la crise de la COVID-19.
Le taux maximum de la subvention de base serait applicable aux employeurs qui connaissent une baisse de leurs revenus de 50 % ou plus. Le taux de la subvention diminuerait progressivement dans le cas des employeurs qui subissent une baisse de revenus de 49 % à 0 %. Ainsi, la subvention salariale d’urgence ne se limiterait plus aux seuls employeurs admissibles qui ont subi une baisse de revenus de 30 % ou plus.
Pour la première fois, tout employeur admissible qui aurait connu une baisse de revenus pourra obtenir un soutien, de façon à ce qu’un plus large éventail d’employeurs soit admissible à la subvention salariale, ce qui permettra de protéger davantage de travailleurs et davantage d’emplois.
Par ailleurs, la nouvelle subvention complémentaire fournira aux employeurs les plus durement touchés une aide supplémentaire proportionnelle à leurs besoins. Elle serait versée aux employeurs dont les revenus ont chuté en moyenne de plus de 50 % au cours des trois mois précédents. Cette subvention complémentaire serait particulièrement utile aux employés et aux travailleurs des secteurs où la reprise se fait plus lentement, tels que les secteurs de la restauration et de l’hôtellerie. Le taux de la subvention complémentaire pourrait atteindre 25 %. Il serait déterminé en fonction de la baisse moyenne des revenus d’un employeur admissible au cours des trois mois précédents.
Le taux de la subvention de base et celui de la subvention complémentaire sont calculés d’après un salaire hebdomadaire de base de 1 129 $ par employé. La nouvelle conception plus flexible et proportionnelle de la Subvention salariale d’urgence du Canada permettrait aux employeurs canadiens d’obtenir le soutien dont ils ont besoin. Les entreprises les plus durement touchées obtiendraient le montant le plus important, pour un maximum de 85 % de la rémunération admissible en juillet et en août. La réduction graduelle de l’aide accordée aux entreprises qui se remettent sur pied assurera à ces dernières un taux prévisible de soutien, à mesure que leurs activités reprennent.
En outre, une règle a été ajoutée afin de garantir aux employeurs que, jusqu’au 29 août, ils auront accès à un taux de subvention salariale égal ou supérieur à celui offert dans le cadre de la structure originelle de la subvention salariale. Cela signifie que, pour les mois de juillet et d’août, un employeur admissible qui a vu ses revenus diminuer de 30 % ou plus bénéficiera d’un taux de subvention salariale d’au moins 75 %.
Afin d’aider les entreprises à s’y retrouver dans tous ces changements plutôt complexes, en particulier les petites entreprises qui ont des ressources et des capacités limitées, l’Agence du revenu du Canada publiera tous les renseignements pertinents en ligne pour aider les employeurs à comprendre comment ils peuvent tirer profit des changements. De plus, le centre d’appels qui aide présentement les entreprises concernant la subvention salariale continuera ses activités et il aidera les entreprises au sujet des changements proposés. L’Agence du revenu du Canada travaille également à la mise en place d’un calculateur en ligne afin de faciliter la tâche aux PME.
La proposition de refonte permettra au programme de subvention de continuer à répondre aux besoins immédiats des employeurs et des travailleurs ainsi que de mettre ces derniers en bonne posture en vue d’une reprise vigoureuse alors que l’économie reprend graduellement son erre d’aller.
Je voudrais maintenant parler de la partie 2 de ce projet de loi, laquelle prévoit des mesures de soutien supplémentaires pour les Canadiens qui vivent avec un handicap.
Selon l’Enquête canadienne sur l’incapacité de 2017, 22 % des Canadiens âgés de plus de 15 ans déclarent avoir un handicap. Ce taux augmente avec l’âge, et se situe à 37,8 % chez les Canadiens de plus de 65 ans, et à 47,4 % chez ceux de plus de 75 ans.
Nous savons que, parmi les Canadiens en âge de travailler et qui vivent avec des incapacités, plus de 1,5 million, soit 41 %, sont au chômage ou entièrement exclus du marché du travail. Ce taux passe à plus de 60 % dans le cas des personnes gravement handicapées.
Le gouvernement est déterminé à soutenir les personnes qui ont un handicap, conformément aux principes et aux objectifs de la Convention relative aux droits des personnes handicapées des Nations unies et de la Loi canadienne sur l’accessibilité, qui a reçu la sanction royale le 21 juin 2019 et est entrée en vigueur le 11 juillet de la même année.
Est-ce que la sénatrice accepterait de répondre à une question?
Avec plaisir.
Madame la sénatrice, nous savons à quel point la protection des renseignements personnels est un enjeu de plus en plus important dans notre pays. Les Canadiens et les Canadiennes s’inquiéteront des mesures de protection de la vie privée qui sont prévues dans un contexte où leurs renseignements personnels seront partagés d’un ministère à un autre en vertu de ce projet de loi.
Ma question est la suivante. Que fera Emploi et Développement social Canada avec les renseignements personnels et les renseignements des contribuables qu’elle aura recueillis auprès de l’Agence du revenu du Canada et du ministère des Anciens Combattants, une fois que ce paiement aura été versé? Pouvez-vous nous confirmer que la ministre a envoyé l’avis nécessaire au Commissariat à la protection de la vie privée sur son intention d’acquérir des renseignements personnels et des renseignements sur les contribuables?
Je vous remercie pour ces deux questions. En ce qui a trait à l’accès aux informations personnelles, l’article 6 de la Loi sur la protection des renseignements personnels encadre l’utilisation, la conservation et le retrait de celles-ci. Ces informations sont conservées pour une période de deux ans à des fins administratives. En vertu de cette même loi, les personnes dont l’information personnelle a été utilisée ont accès à cette information pendant une période de deux ans. Elles peuvent donc demander aux différents ministères qui ont utilisé ou reçu des informations personnelles ce qu’ils ont fait avec ces informations.
Pour ce qui est de la deuxième partie de votre question, la ministre Qualtrough a envoyé en juin un premier avis à la commissaire à la protection de la vie privée voulant que des demandes soient présentées en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels. En plus du projet de loi que nous étudions actuellement, une directive du Conseil du Trésor donne aussi de l’information sur l’élargissement de l’utilisation des informations et sur les différents groupes qui seront affectés par la protection des renseignements personnels. Encore une fois, la règle de deux ans reste en vigueur pour ce qui est de la conservation et du retrait de ces informations.
Est-ce que la sénatrice Moncion accepterait de répondre à d’autres questions?
Avec plaisir.
Merci, madame la sénatrice. Depuis le début de la pandémie, des dizaines et des dizaines d’entrepreneurs et de Canadiens ont partagé avec moi leur inquiétude et m’ont parlé des défis auxquels ils font face en ce qui a trait à la Subvention salariale d’urgence du Canada. Plusieurs se sont plaints du fait que le programme est complexe, trop restrictif et difficile à comprendre.
Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur l’approche du gouvernement en ce qui a trait aux employés qui sont en congé forcé ou qui ont été temporairement mis à pied?
Je vous remercie de la question. Les efforts du gouvernement en vue d’aider les personnes en congé forcé comprenaient tout ce qui a trait à l’aide salariale aux employeurs, pour faire en sorte que la relation employeur/employé soit préservée.
Parmi les objectifs du projet de loi C-20, il y a les subventions salariales de base et celles qui viennent s’y ajouter en guise de mise à niveau. Ces subventions permettent aux employeurs de maintenir la relation employeur/employé et aux employés de retourner rapidement au travail. L’autre objectif est de diminuer le plus possible les mises à pied et de soutenir les personnes qui devraient être mises en quarantaine pour une période de 14 jours, alors que l’employeur n’a pas accès à des fonds. Le projet de loi vise à préserver la relation employeur/employé pour permettre aux employeurs de réembaucher leurs employés, et aux employés de revenir au travail. Il y a des incitatifs tant du côté de l’employeur que de l’employé.
Je me demandais pourquoi ceux-ci sont traités différemment et sont sujets à une structure de taux distincts. Je vous remercie de cette précision. Tout cela me semblait ajouter une couche de complexité à un système déjà déroutant, mais je comprends mieux maintenant.
La deuxième partie de ma question porte sur la subvention de base et la subvention complémentaire. Je crois comprendre que la subvention complémentaire est une nouvelle particularité qui aidera les employeurs qui ont le plus souffert du ralentissement économique.
Comme je l’ai déjà dit, le gouvernement devait se montrer plus habile et plus souple dans son approche. Notre Comité des finances a également déploré le fait qu’une entreprise n’était admissible à aucune aide juste parce que ses revenus avaient baissé à un niveau inférieur de 1 % au seuil fixé. J’apprécie donc les changements apportés par le projet de loi C-20.
Je me demande si vous pourriez nous expliquer pourquoi le gouvernement a décidé d’avoir deux subventions et d’introduire la nouvelle subvention complémentaire. Pourriez-vous nous donner un exemple simple dans lequel une entreprise serait admissible à la subvention complémentaire?
Merci pour votre question. Concernant la première partie de votre question, je dirai que l’idée est de chercher à réduire au minimum les effets financiers de la COVID-19 sur les employeurs.
Concernant les deux volets de la subvention, le premier volet vise à aider les employeurs qui ont été touchés et le second, la complémentaire, vise à aider les employeurs qui ont été plus touchés que ceux du premier groupe.
Par exemple, un employeur pouvait réembaucher une partie de son personnel et recevoir — à partir du moment où la pandémie a commencé et où la première subvention salariale a été versée par le gouvernement — 75 % des salaires complétés pour les employés qui restaient. Les employés mis à pied avaient accès aux programmes d’urgence.
Les secteurs durement touchés — le secteur hôtelier et le tourisme par exemple — ont été plus touchés parce qu’ils n’ont pas été en mesure de se relancer ou ils ont été très touchés à cause de l’absence de touristes et du confinement.
Le gouvernement cherche à aider les entreprises à reprendre progressivement leurs activités; il subventionne leur redémarrage. Pour ce faire, il détermine de combien le revenu a baissé aux mois d’avril et de juin par rapport à la même période en 2019. La baisse que les employeurs ont encaissée de 2019 à 2020 sert de base pour le calcul de la subvention qu’ils recevront. Pour les périodes cinq et six, c’est-à-dire juillet et août, s’il est établi qu’une entreprise a subi une baisse de 60 % de son revenu, elle obtiendra la subvention en plus d’avoir droit aux 25 % supplémentaires si elle a été plus touchée. L’entreprise pourrait recevoir une subvention de 85 %, c’est-à-dire le montant de base et le montant compensatoire.
Je ne sais pas trop si vous vouliez des chiffres précis. Je peux toutefois vous dire que le gouvernement, dans le but d’aider les entreprises, a publié de l’information sur le site Web. On y trouve aussi des calculatrices. En entrant les chiffres de cette année et de l’an passé, le calcul se fait automatiquement. On peut savoir le montant de la subvention qu’on recevra.
Merci de ces précisions. De toute évidence, vous semblez convaincue qu’un plus grand nombre d’entreprises pourront bénéficier des mesures du projet de loi C-20 et obtenir de l’aide et que cela contribuera à la reprise économique. Est-ce exact?
Je vous remercie pour cette autre question. Oui, c’est exact. Le gouvernement a décidé qu’il n’y aurait pas de seuil qui ferait en sorte que des entreprises seraient pénalisées parce que leurs pertes n’étaient pas assez élevées. Elles ont suffisamment été pénalisées. Le gouvernement affirme qu’il travaillera avec toutes les entreprises pour les aider à reprendre leurs activités. Le montant de l’aide sera modulé selon la baisse du revenu.
J’allais réserver mes critiques pour le discours que je vais prononcer sous peu lors du débat, mais les questions du sénateur Loffreda m’ont rappelé certaines choses que j’ai entendues, et j’ai quelques questions pour la marraine du projet de loi.
Je vous remercie pour votre discours très complet. Je suis consciente des efforts qui ont été déployés pour le préparer en tant que marraine. Je suis heureuse d’être la porte-parole de l’opposition concernant ce projet de loi et non la marraine, car la première partie est très complexe.
Je pense aux entreprises qui sont désavantagées parce que leurs propriétaires ne maîtrisent peut-être pas aussi bien l’anglais. Ce sont peut-être d’excellents hommes et femmes d’affaires, mais l’information est difficile à déchiffrer, même pour nous, sans parler de ceux qui essaient de réussir au Canada. Au cours de la crise liée à la COVID-19, nous avons entrepris de traduire les différents programmes en coréen afin que les gens d’affaires puissent comprendre ce à quoi ils ont droit.
Sénatrice, vous avez mentionné que le ministère va publier de l’information. On y trouve une calculatrice. Cependant, je me demande si vous êtes confiante et si nous pouvons être sûrs que cette information très complexe aidera les entreprises, même celles qui ne parlent pas aussi bien anglais. Y aura-t-il un effort supplémentaire ? C’est assez complexe, à mon avis.
Je vous remercie de votre question. L’information est effectivement complexe et la langue peut représenter un obstacle. Le gouvernement et l’Agence du revenu du Canada essaient d’aider le plus de personnes possible. En ce qui concerne les personnes d’origine coréenne qui ne comprennent pas nécessairement bien l’anglais, je ne peux rien affirmer avec certitude. Il y a probablement des personnes dans l’agence et dans leur communauté qui peuvent les aider. Voilà le premier aspect.
Le deuxième aspect est le suivant : lorsqu’on se penche sur les chiffres, c’est-à-dire les ventes ou les recettes, le processus à suivre semble effectivement compliqué; cependant, une fois que les ventes sont comptabilisées et que les sommes calculées sont inscrites dans une feuille de calcul Excel, il n’est pas si difficile. Si on compare trois mois en 2020 à trois mois en 2019 et qu’on fait le calcul nécessaire, on peut obtenir très rapidement un montant approximatif en disant simplement 100 000 $ plutôt que 70 000 $ ou 30 000 $. Le processus semble compliqué pour les personnes qui ne le comprennent pas nécessairement, mais on pourrait dire la même chose du processus de production des déclarations de revenus. Il semble très compliqué, mais lorsqu’on utilise une feuille de calcul Excel ou les programmes qui sont fournis, il devient plus facile.
En ce qui concerne les grandes entreprises, elles ont accès à leurs cabinets comptables. Ces cabinets feront beaucoup de travail, car c’est à ce moment-là qu’ils demanderont la subvention salariale. Les renseignements seront donc fournis. Je comprends que la préparation de ces chiffres entrainera des coûts pour les entreprises et les commerces, mais cela fait aussi partie de la pandémie, qui est un événement imprévu qui a touché la vie de tout le monde.
J’ai une autre question.
Accepteriez-vous de répondre à une autre question, sénatrice Moncion?
Oui, avec plaisir.
Je suis persuadée que les comptables seront tenus très occupés à aider les entreprises. J’espère que certaines des petites entreprises pourront se permettre de tels services.
Vous avez parlé à plusieurs reprises des industries du tourisme et de l’hôtellerie, et j’en suis heureuse. Certains entrepreneurs de la Colombie-Britannique m’ont signalé à quel point ils ont été touchés par la pandémie. Je m’inquiète de ce qui leur arrivera à mesure que ces programmes prendront fin, étant donné que, actuellement, les subventions du gouvernement sont essentielles pour eux. Jusqu’à ce que les frontières rouvrent, ces gens n’arriveront pas à ramener leur entreprise au même niveau qu’avant malgré tous les efforts qu’ils déploient.
Étant donné que nous avons examiné le projet de loi, croyez-vous que nous devons nous concentrer — que ce soit le Comité des finances, vous ou moi — sur les mesures supplémentaires que nous devons adopter pour les industries du tourisme et de l’hôtellerie?
Je vous remercie encore une fois de votre question.
Selon moi, le gouvernement est au courant de la situation. Il ajustera le processus décisionnel à mesure que la COVID-19 évolue. Nous verrons ce qui arrivera au cours des prochains mois. Pour l’instant, nous visons le 30 décembre. Au-delà de cette date, nous verrons ce que le gouvernement fait pour s’ajuster.
Idéalement, la vie pourra reprendre un cours un peu plus normal, les entreprises pourront reprendre leurs activités, les affaires reprendront, la COVID-19 aura cessé de se répandre et nous n’aurons pas à nous confiner de nouveau. Cela serait très malheureux pour les Canadiens, les entreprises et tout le monde. Je crois que nous en avons eu assez du confinement.
Plusieurs entrepreneurs et entreprises m’ont posé la question suivante.
C’est une crise qui n’arrive qu’une fois tous les 100 ans, mais beaucoup d’entreprises et d’entrepreneurs m’ont posé la question, et le projet de loi C-20 est le bienvenu.
Pourquoi n’a-t-on pas pensé dès le début, comme l’a recommandé le Comité des finances, à établir des critères plus variables, plus progressifs, plus souples? Nous avons traversé quelques mois de la crise. Il y a eu de nombreuses complications. Beaucoup d’entreprises ignoraient si elles étaient admissibles ou non à recevoir l’aide financière. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi on y pense seulement maintenant et pas lors du processus initial? Pourtant, nous avons demandé dans cette enceinte — je l’ai moi-même demandé — pourquoi le gouvernement ne prenait pas des mesures souples et adaptées aux entreprises afin que le plus grand nombre possible d’entreprises puisse accéder à l’aide.
Merci de votre question. Si vous me le permettez, je vous répondrai en français.
Lorsque le gouvernement a mis en œuvre les premières mesures, c’était afin d’aider les Canadiens dans l’immédiat. Je crois que le gouvernement a surveillé l’évolution de la situation pour déterminer quels seraient les groupes les plus touchés par la pandémie et le confinement. Je crois également que le gouvernement a tenté d’évaluer ce qui allait se produire afin de prévoir les meilleures mesures possible pour la suite des choses.
Nous devions étudier ce projet de loi en juin. Il s’agissait du projet de loi C-17. Or, il n’a pas été présenté en juin, donc nous l’étudions en juillet.
Le gouvernement a prévu une adaptation progressive en fonction des éléments de la COVID-19 qu’il n’a pu anticiper dans leur entièreté. Il s’agit davantage d’une progression que d’un oubli. Il faut voir à quel point et de quelle façon les Canadiens et les entreprises canadiennes ont été touchés.
Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi C-20, Loi concernant des mesures supplémentaires liées à la COVID-19.
J’aimerais d’abord saisir l’occasion pour souligner la force, la résilience et la profonde bienveillance dont font preuve les Canadiens d’un bout à l’autre de notre grande nation, et ce, malgré que les derniers mois ont apporté leur lot de défis et de coups durs. À tous nos travailleurs de la santé et de première ligne — médecins, infirmières, ambulanciers, policiers et pompiers —, je dis merci de votre courage et de vos efforts continus pour veiller à la sécurité des Canadiens. À tous les voisins, les bénévoles et les bons samaritains qui se portent volontaires pour aider autrui et prendre soin les uns des autres : nous reconnaissons votre contribution et nous vous remercions de nous rappeler à quel point les Canadiens ont du cœur.
J’espère que tous mes honorables collègues et tous les membres de notre personnel et de la grande communauté du Sénat resteront en sécurité et en santé pour que nous puissions accomplir notre travail au meilleur de nos capacités pour assurer le bien-être de notre famille et aider notre pays à passer au travers de cette période difficile.
Je passe maintenant au projet de loi C-20. Voilà une autre série de dispositions législatives qui ont été présentées dans le cadre de la réponse du gouvernement à la pandémie mondiale et au bouleversement économique qui en découle. Malheureusement, tout comme d’autres mesures législatives sur lesquelles le Sénat s’est penché en lien avec la pandémie, ce projet de loi s’ajoute à la longue liste des projets de loi présentés dans le but de corriger les lacunes des précédents.
À mon avis, il s’agit encore d’un projet de loi qui ne tient pas suffisamment compte du point de vue des entreprises canadiennes et qui complique inutilement des programmes déjà très complexes et difficiles à comprendre. Que le projet de loi soit destiné encore une fois à corriger des erreurs commises dans d’autres projets de loi du gouvernement est, bien franchement, inacceptable.
Des erreurs ont été commises à répétition dans les projets de loi. Aujourd’hui, ce ne devrait plus être le cas, pourtant les erreurs sont encore là. Plutôt que de corriger les problèmes comme ils sont censés le faire, les projets de loi semblent tout simplement en créer de nouveaux, bien qu’ils puissent en résoudre certains aspects.
Avant d’aborder ma critique du projet de loi actuel, il serait peut-être utile de passer brièvement en revue son contenu. La partie 1 du projet de loi modifie la Loi de l’impôt sur le revenu pour changer les critères d’admissibilité à la Subvention salariale d’urgence du Canada. À ce sujet, le projet de loi contient des mesures qui sont sensiblement les mêmes que celles du projet de loi C-17, que le gouvernement a laissé tomber le mois dernier. Le gouvernement propose d’offrir une grande souplesse aux employeurs dans le calcul de la rémunération de base de leurs employés. Grâce au projet de loi, la rémunération de base sera dorénavant calculée en utilisant soit la période du 1er mars au 31 mars 2019, soit la période du 1er janvier au 15 mars 2020.
Il y aura aussi plus de souplesse pour les situations dans lesquelles deux sociétés ont fusionné, l’une d’entre elles étant intégrée à l’autre. Elles pourront utiliser leurs revenus combinés pour démontrer qu’ils ont baissé de 30 %, le critère à satisfaire pour être admissible à la subvention salariale. Par ailleurs, d’autres modifications empêcheront les fiducies dont le revenu est exonéré d’impôt de demander la Subvention salariale d’urgence du Canada, et permettront les situations où une entreprise a fait appel à un fournisseur de services de la paie.
La partie 2 du projet de loi modifie, dans plusieurs lois, des éléments concernant la communication de renseignements en vue du versement d’un paiement unique aux personnes handicapées. Il s’agit d’un paiement non imposable qui n’aura pas à être déclaré et qui pourra atteindre 600 $. Il sera versé à environ 1,7 million de personnes admissibles qui détiennent un certificat valide pour le crédit d’impôt pour personnes handicapées et qui reçoivent actuellement des prestations d’invalidité versées par le Régime de pensions du Canada ou le Régime de rentes du Québec, ou qui sont bénéficiaires de l’une des mesures de soutien pour les personnes handicapées qu’offre Anciens Combattants Canada. Ce paiement unique est le bienvenu, mais il aurait dû être en place dès le mois dernier. En effet, les partis d’opposition étaient tous prêts à régler dès juin les paiements destinés aux Canadiens handicapés, mais cela ne s’est pas fait, et le gouvernement a laissé traîner le projet de loi C-17. Résultat : les personnes qui ont besoin de cet argent n’y ont pas eu accès pendant cinq semaines, sans raison.
À la partie 3 du projet de loi, le gouvernement propose en outre de suspendre certains délais concernant les instances civiles devant les cours et de suspendre ou de prolonger certains délais réglementaires. Dans la version précédente, soit dans le projet de loi C-17, l’opposition officielle appuyait les dispositions qui auraient permis d’aider les Canadiens dans le besoin. S’il n’avait pas tenté en même temps de restreindre la surveillance exercée par les parlementaires sur ces mesures et sur bien d’autres, le gouvernement aurait pu en profiter pour les faire adopter le mois dernier. À ce moment-là, l’opposition réclamait que le Parlement soit rappelé afin que l’on puisse recommencer à étudier comme il se doit les mesures législatives proposées par le gouvernement.
À mes yeux, c’est plus nécessaire que jamais étant donné l’ampleur des dépenses que le Parlement est appelé à approuver et la manière cavalière dont le gouvernement a administré ces mêmes dépenses. Selon nous, nous aurions très bien pu trouver des moyens pour que l’étude des projets de loi reprenne de manière efficace et sans mettre la vie de qui que ce soit en danger, mais le gouvernement a refusé net. Si vous voulez mon avis, c’est lui le pire.
Voilà pourquoi nous sommes saisis, cinq semaines plus tard, du projet de loi C-20. Force est d’admettre que, même si nous avions pu adopter le projet de loi C-17 il y a un mois, nous serions quand même ici aujourd’hui, car le projet de loi C-20 contient une série de nouvelles dispositions visant, comme nous en avons désormais l’habitude, à corriger les lacunes et les erreurs du texte précédent.
Selon ces nouvelles dispositions du projet de loi C-20, la Subvention salariale d’urgence du Canada serait prolongée jusqu’au 21 novembre, et on pourrait la prolonger par voie réglementaire jusqu’au 31 décembre. En réponse aux vives critiques exprimées par des entreprises au sujet de la subvention, notamment en ce qui a trait à sa complexité et à ses lacunes, le gouvernement a apporté d’autres changements qui, loin de simplifier le programme, semblent plutôt le complexifier davantage.
Selon les dispositions à l’étude, la Subvention salariale d’urgence du Canada sera maintenant divisée en plusieurs parties. Premièrement, il y aura la subvention pour les travailleurs mis à pied provisoirement. Selon le gouvernement, cette composante sera « ajustée » en fonction des paiements de la PCU ou de l’assurance-emploi à la fin du mois d’août. Ensuite, selon une autre composante de la Subvention salariale d’urgence du Canada, une subvention de base sera offerte aux travailleurs actifs admissibles ayant perdu moins de 50 % de leurs revenus. Il y aura de surcroît une subvention complémentaire pour les employeurs ayant perdu en moyenne plus de 50 % de leurs revenus pendant trois mois.
À la Chambre des communes, l’opposition officielle a décrit ces changements comme étant « d’une complexité labyrinthique ». Je souscris entièrement à cette description, car il semble que l’on propose d’établir cinq périodes de subvention différentes ainsi que diverses catégories de prestations pour la période du 5 juillet au 21 novembre.
Ensuite, les trois scénarios que je viens de présenter s’appliqueront aux diverses périodes de prestation. Si l’on examine les nombreux scénarios possibles, une entreprise pourrait devoir faire appel à des comptables et à des conseillers pour s’y retrouver. Les véritables gagnants dans tout cela seront les comptables, et les entreprises devront assumer des coûts indirects supplémentaires pour se payer leurs services.
Je sais que certaines entreprises se réjouissent que cette nouvelle formule, quoique complexe, remédie à tout le moins à une partie des problèmes liés à la façon dont la Subvention salariale d’urgence du Canada était précédemment structurée. En effet, initialement, les employeurs devaient composer avec l’élimination soudaine de toute forme de soutien dès qu’ils franchissaient le seuil de perte de revenus de 30 %. La mesure présentée corrige peut-être en partie les lacunes du concept original, mais bien peu soutiendraient qu’elle simplifie les choses; au contraire, elle les complique.
Tant d’entreprises de ma province, la Colombie-Britannique, sont déjà aux prises avec un stress financier, émotionnel et psychologique accru depuis cinq mois. D’ailleurs, la ministre provinciale, Carole James, a déclaré que les pertes d’emploi ces derniers mois se « concentrent » surtout dans les secteurs de la vente en gros, du détail, de l’hébergement, de l’alimentation et de la construction, ajoutant que la province affiche son taux de chômage le plus élevé depuis 1987.
Selon un scénario économique publié par la province et tenant compte des pertes de revenu et des mesures d’aide mises en place, la Colombie-Britannique pourrait connaître, à elle seule, un déficit de 12,5 milliards de dollars.
Les entreprises investissent déjà dans l’équipement de protection individuelle et d’autre matériel spécial, en plus d’apporter des modifications aux politiques de leurs points de vente en fonction des règles de sécurité publique imposées par les municipalités, des règles qui sont nécessaires, mais dispendieuses et pénibles à appliquer. Dans tous les secteurs, pratiquement toutes les entreprises en exploitation enregistrent une baisse de revenus et une hausse des coûts d’exploitation.
Les cabinets dentaires, par exemple, recevaient initialement une cinquantaine de patients par jour. Maintenant, ils peuvent seulement en recevoir une dizaine. Or, ils doivent beaucoup investir dans de l’équipement de protection individuelle pour assurer la sécurité de tous.
À cause de la complexité de la nouvelle subvention salariale proposée, ces cabinets devront assumer des coûts indirects supplémentaires pour tenter de s’y retrouver dans les diverses catégories de subventions qui compliqueront encore plus le régime fiscal. Les entreprises et les associations ont réclamé au gouvernement de modifier la Subvention salariale d’urgence du Canada pour qu’elle soit plus accessible aux entreprises et non pour qu’elle soit plus difficile à comprendre.
Il y a encore des propriétaires de petites entreprises en démarrage en Colombie-Britannique qui me disent ne pas avoir pu bénéficier d’une aide fédérale pour leur nouvelle entreprise parce qu’ils ne répondaient pas aux critères d’admissibilité et qui ne seront pas davantage admissibles à la nouvelle subvention salariale.
À mon avis, cette situation est en partie attribuable au fait que le gouvernement n’a pas écouté attentivement les suggestions des entrepreneurs sur le terrain, ceux qui doivent composer avec les défis quotidiens que supposent la possession et l’exploitation d’une entreprise, pour réduire au minimum la complexité du processus et maximiser les incitatifs au travail.
Le gouvernement est plutôt resté à l’écart en laissant aux fonctionnaires le soin de concevoir des programmes qui ne tiennent pas suffisamment compte des défis et des contraintes que connaissent les entreprises à l’heure actuelle. En raison de ces lacunes, le gouvernement a dû s’adresser constamment au Parlement pour corriger ou ajuster ses programmes. Malheureusement, étant donné la feuille de route du gouvernement, je m’attends à ce que cela continue.
En effet, le même scénario s’annonce pour la Prestation canadienne d’urgence. Il appert maintenant que la prestation, bien que nécessaire pour appuyer les Canadiens en début de pandémie, dissuade les gens de retourner au travail.
Un sondage publié la semaine dernière par la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante révèle que les petites entreprises ont beaucoup de mal à réembaucher des employés ou à en trouver de nouveaux pour rouvrir leurs portes. Seulement le tiers des entreprises indiquent que leur effectif est à un niveau normal et un quart d’entre elles ont du mal à trouver les effectifs nécessaires pour mener leurs activités. Parmi les répondants qui refusent de retourner travailler, pas moins de 62 % disent qu’ils préfèrent continuer à toucher la Prestation canadienne d’urgence.
Le porte-parole de l’opposition officielle pour le projet de loi a indiqué que selon la structure actuelle de la Prestation canadienne d’urgence, les travailleurs qui gagnent 999 $ peuvent continuer à recevoir la prestation de 2 000 $. Or, s’ils gagnent 1 001 $, ils n’y sont plus admissibles. Il a souligné, à juste titre, que personne ne choisirait de gagner 1 001 $ au risque de perdre 2 000 $. Cela se traduit par une augmentation de 200 % du taux d’imposition pour les personnes qui sont actuellement parmi les plus vulnérables au pays.
En plus de ce problème structurel de la PCU, le gouvernement ne nous dit pas en termes clairs ce qui arrivera une fois que la prestation arrivera à échéance. Il est toutefois de plus en plus évident que le programme est mal géré. La semaine dernière, on a déposé à la Chambre des communes des documents selon lesquels plus de 221 000 Canadiens ont obtenu des paiements en double de la PCU. D’autres études nous ont avertis qu’il y aurait de sérieux éléments dissuasifs et des possibilités de fraude. Allan Lanthier, un ancien conseiller du ministère des Finances et de l’Agence du revenu du Canada, a récemment souligné dans une chronique du Financial Post qu’environ 5 millions de personnes ont perdu leur emploi depuis le début de la pandémie, mais que la PCU est versée à 7,8 millions de Canadiens.
Il peut y avoir diverses raisons à cela, mais nous savons que les paiements en trop et les paiements inappropriés font certainement partie du problème. D’ailleurs, le gouvernement a indiqué très tôt que les demandes seraient examinées d’une manière tout à fait superficielle. Il ne faut pas s’en étonner.
On parle d’un gouvernement qui s’est très peu soucié de la gestion des finances depuis son arrivée au pouvoir. D’ailleurs, qui ne se souvient pas que, pendant la campagne de 2015, le premier ministre avait affirmé prévoir de petits déficits seulement pendant trois ans. Pourtant, avant même l’avènement de la pandémie, le gouvernement avait ajouté environ 100 milliards de dollars à la dette et avait comme par hasard oublié sa promesse d’équilibrer le budget.
Depuis mars, le gouvernement a accumulé près d’un tiers de billion de dollars en dette supplémentaire. Une partie de cet endettement était assurément justifiée, mais en dépensant sans compter pendant les beaux jours, le gouvernement a rendu le Canada plus vulnérable face à la crise actuelle.
Je crois qu’il est également assez évident que le gouvernement se soucie très peu des détails lorsqu’il dépense. De plus en plus, on constate que l’attention aux détails n’est certainement pas une des forces du ministre des Finances.
Le ministre affirme ne pas se souvenir des dizaines de milliers de dollars en frais de voyage versés à sa famille et à lui par un organisme à qui il a fait un don de 100 000 $ et à qui le gouvernement a par la suite accordé des millions de dollars des contribuables.
Peut-être que le ministre des Finances n’est pas du genre à s’attarder aux détails, mais quelqu’un au gouvernement devrait commencer à le faire, parce que c’est l’avenir des Canadiens qu’on dilapide en ce moment.
Plus tôt ce mois-ci, le président et chef de la direction de la Chambre de commerce du Canada, Perrin Beatty, a déclaré que le déficit prévu d’au moins 343 milliards de dollars pour cette année donnerait au Canada un ratio dette-PIB de 49,1 %. Il a dit que c’est « une somme qui minera la capacité fiscale du Canada pendant des décennies. »
Il a ajouté :
Notre dette nationale nette s’élève aujourd’hui à 768 milliards de dollars, et atteindra 1 000 milliards de dollars cette année. En incluant la dette des provinces et des municipalités, la situation se révèle encore plus précaire. Comme le gouvernement fédéral est de facto le filet de sécurité pour ces dettes, le Canada sera soumis à un examen beaucoup plus minutieux de la part des investisseurs, étant donné notre capacité réduite à gérer nos affaires fiscales. Nous ne pouvons tout simplement pas nous permettre de revenir au programme politique d’avant la crise de la COVID-19.
Le Canada a besoin d’un plan clair pour rétablir la croissance du secteur privé [...]. Nous avons besoin d’un plan budgétaire à plus long terme et d’orientations prospectives de la part du gouvernement.
Malheureusement, les Canadiens attendent toujours un plan budgétaire à long terme. Le gouvernement au pouvoir se contente d’essayer de régler les problèmes en injectant toujours plus d’argent sans surveillance adéquate ni suivi. C’est pourquoi il faut que le Parlement revienne à l’automne pour assurer la surveillance qui s’impose.
Cela m’encourage de voir que les sénateurs reconnaissent de plus en plus le problème. Dans son dernier rapport, le Comité sénatorial des finances nationales dit ceci :
Le comité s’inquiète du fait que le gouvernement n’ait pas prévu des modalités assez précises pour les Canadiens qui resteront sans emploi ou qui ne pourront pas trouver un travail à temps plein, et pour les entreprises qui veulent reprendre leurs activités. Le gouvernement fédéral doit continuer de soutenir les Canadiens et de leur donner l’assurance de pouvoir reprendre le travail en toute sécurité. Pour ce faire, il doit clarifier de quelle façon il aidera ceux qui seront toujours sans emploi lorsque la Prestation canadienne d’urgence prendra fin ainsi que prévoir des prestations dégressives fondées sur le revenu, par opposition à un seuil absolu.
Je suis tout à fait d’accord avec les sénateurs, quelle que soit leur allégeance politique, qui en sont arrivés à cette conclusion. Je tiens à souligner le leadership et le travail du président du comité, le sénateur Percy Mockler; du vice-président, le sénateur Éric Forest, et du troisième membre du comité directeur, le sénateur David Richards. Je félicite aussi les membres du comité, la greffière, les analystes et le personnel de soutien. J’ai eu le plaisir de siéger au comité à titre de membre d’office, et je suis consciente des nombreuses heures qui ont été consacrées aux réunions et à la rédaction du rapport provisoire.
Félicitations, sénateurs. Félicitations au Comité des finances.
Pour les sénateurs qui ont déclaré leur ferme engagement en faveur d’un large filet de sécurité sociale, cela pourrait devenir de plus en plus difficile à maintenir sans un retour à la responsabilité financière. Il est de plus en plus évident que les Canadiens eux-mêmes arrivent à des conclusions similaires, et il incombe au gouvernement de commencer à les écouter. Il peut probablement commencer par embaucher un nouveau ministre des Finances — un ministre qui se préoccupe de la santé budgétaire du pays et qui est attentif aux détails. Ce serait un bon début.
N’empêche qu’il faut en faire beaucoup plus. Je doute de plus en plus que le gouvernement actuel soit à la hauteur. Le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd’hui, bien que certaines de ses dispositions soient bien accueillies, est en fait une répétition de ce qu’on a déjà vu. Si nous voulons une véritable reprise économique dans ce pays, nous aurons besoin d’un gouvernement qui travaille en étroite collaboration avec les entreprises canadiennes pour rétablir notre santé financière et économique.
C’est ce qui manque dans ce projet de loi, et les Canadiens et les entreprises qui travaillent dur et qui ferment leurs portes lorsque leur gouvernement et les autorités sanitaires les obligent à le faire sont ceux qui ont souffert et qui paieront pour les erreurs du gouvernement pendant des années, voire des décennies, tout comme leurs enfants et leurs petits-enfants. Je vous remercie.
« Ce n’est pas la fin. Ce n’est même pas le commencement de la fin. Mais, c’est peut-être la fin du commencement. »
C’est avec ces paroles que M. Churchill a rallié son peuple en novembre 1942, après la défaite du général Rommel à El Alamein, et elles ont marqué un tournant dans la guerre. De toute évidence, l’analogie est imparfaite. Je crois toutefois qu’elle nous donne l’occasion, après six mois de lutte contre le coronavirus, de faire le point sur le commencement de la pandémie.
Six mois presque jour pour jour après que le premier cas ait été signalé au Canada, plus de 100 000 Canadiens ont été infectés et 9 000 sont morts, dont 80 % dans des établissements de soins de longue durée. À l’échelle mondiale, plus de 15 millions de personnes ont été infectées et ce nombre ne cesse d’augmenter. Je suis optimiste parce que je crois que nous avons découvert, au cours des six derniers mois, quelques-unes des mesures clés essentielles pour au moins maîtriser la contagion. Je pense qu’il y en a huit.
Premièrement, nous devons nous fier aux données scientifiques et nous adapter avec souplesse et agilité à l’évolution du consensus scientifique et à la situation. Certains sénateurs ont suggéré aujourd’hui que le gouvernement aurait dû être au courant des changements survenus au cours des six derniers mois et aurait dû prendre un certain nombre d’initiatives plus tôt, y compris celles qui figurent dans ce projet de loi. Je suis d’un avis différent. J’estime qu’un gouvernement qui prend des mesures précoces et réagit rapidement à l’évolution des circonstances est mieux à même d’écouter ses citoyens. Ce sont les trois mots d’ordre : science, agilité et souplesse.
Deuxièmement, nous savions qu’il fallait maintenir la courbe dans les limites de la capacité des unités de soins intensifs. Lorsque nous avons débattu de ces mesures pour la première fois il y a quelques mois, la courbe dépassait la capacité et il y avait une réelle menace quant à la capacité de nos systèmes de soins de santé de traiter les malades. Il fallait maintenir la courbe dans les limites de la capacité des unités de soins intensifs.
Troisièmement, nous savons que l’avenir sera de plus en plus axé sur les tests et le traçage des contacts. Le renforcement de notre capacité de dépistage et de traçage est essentiel pour composer avec la courbe.
Quatrièmement, parlons d’équipement de protection individuelle et de masques. Nous devons veiller à assurer une réserve d’équipement de protection individuelle dans l’éventualité d’une seconde vague.
Cinquièmement, il y a la distanciation sociale, qui pose problème pour beaucoup d’entre nous. La science a démontré que la distanciation sociale, le port du masque, le dépistage et la prudence de la part de la population sont essentiels à ce que la propagation demeure gérable.
Sixièmement, il y a les déplacements et les frontières. Il ne faudrait se rendre à l’étranger que pour des voyages essentiels jusqu’à ce que nous ayons confiance dans la façon dont on gère la contagion à l’extérieur de nos frontières. Même au Canada, malgré des protestations, certains gouvernements interdisent toujours les déplacements intraprovinciaux. La prudence nous a aidés ces six derniers mois, et force est d’admettre qu’il faudra probablement maintenir cette approche.
Septièmement, et c’est très important, il faut maintenir des liquidités dans l’économie, et ce projet de loi y contribue. Il répond aux variations et aux adaptations de l’économie dans la foulée des mesures mises en œuvre il y a quelques mois. La présence de liquidités dans l’économie a été extrêmement avantageuse pour le Canada et a permis à l’économie canadienne de réagir efficacement au moment de la phase de reprise des activités.
Ce qui m’amène au huitième point : il nous faut une reprise graduelle et stratégique en ce qui concerne l’équipement de protection individuelle, la distanciation, des tests de dépistage appropriés, etc.
Tous ces points exigent beaucoup de nous tous. Il n’y va pas de la seule responsabilité du gouvernement. Cette responsabilité incombe certes aux gouvernements, mais, surtout, aux citoyens.
Les honorables sénateurs savent que, lorsque je me rends au Sénat, je passe devant l’Église Unie de Manotick, qui a toujours une jolie phrase qui me fait réfléchir. Celle d’aujourd’hui était : « La patience aussi est une forme d’action. » Nous devons rappeler aux Canadiens que la patience à l’égard des mesures prises, que ce soit les masques, la distanciation physique, l’ajustement des cadres juridiques et la réponse à l’évolution du virus, est une forme d’action et que nous devons être patients. Le relâchement de la vigilance dans le contexte de la COVID est le plus grand danger alors que le système médical semble avoir trouvé un certain équilibre.
Cela m’amène à ce dont je voulais vraiment parler aujourd’hui. C’est au sujet de six priorités urgentes que je souhaiterais que le gouvernement prenne en considération dans cette phase. Il se trouve que je crois au plan proposé par David Dodge dans un document qu’il a publié, où il dit qu’en 2020, c’est le temps de reprendre les activités économiques, qu’en 2021, ce sera le temps du rétablissement, et que les années suivantes serviront à reconstruire l’économie. Les mots que j’ai repris au début de mon intervention sont ceux que Churchill a prononcés en 1942. Il restait trois ans à la guerre, et la guerre, comme on le sait, n’est pas exactement propice au rétablissement. C’est en ayant à l’esprit que nous ne sommes pas sortis du bois que je propose six priorités urgentes.
La première est, bien sûr, que nous devrions rouvrir. La réouverture devrait toutefois se faire de façon stratégique et réfléchie, et sans précipitation. Si nous allons trop vite et que nous devons battre en retraite, nous devons le faire rapidement aussi. Dans ma province, l’Ontario, je pense que la réouverture des bars est intervenue beaucoup trop rapidement; 60 % des cas d’infection les plus récents concernent des jeunes. Lorsque nous avons commencé ce débat il y a six mois, cela ne semblait pas être une préoccupation, c’était la population des plus de 60 ans qui nous inquiétait. Nous devons tirer les leçons de ce qui s’est passé au Royaume-Uni, en Australie — et je ne mentionnerai même pas les États-Unis — où le virus est réapparu parce qu’il y a eu une ouverture trop rapide plutôt qu’une ouverture stratégique et sectorielle. Soyez stratégique dans la réouverture.
Deuxièmement, nous devons nous concentrer sur les garderies. Cela ne concerne pas seulement le gouvernement du Canada, mais aussi les gouvernements provinciaux et régionaux, ainsi que les administrations municipales. La garde d’enfants est un défi à la fois à court et à long terme. À court terme, nous ne pouvons pas avoir une réouverture sans que ceux que nous voulons voir revenir au travail aient la garantie que les services de garde d’enfants nécessaires seront disponibles. En particulier si l’éducation reprend et que l’ouverture des écoles ne correspond pas à nos attentes en matière de réintégration dans la vie active. Je crains que des femmes abandonnent le marché du travail si nous n’avons pas dans un avenir rapproché des services de garde d’enfants adéquats, dont nous avons un besoin urgent. La pandémie nous a appris que nous avons en fait besoin d’une solution à long terme au Canada. Ce n’est pas une chose que le gouvernement fédéral peut faire seul, mais c’est une question pour laquelle il doit faire preuve de leadership en coopération avec d’autres administrations afin de s’assurer que la résilience et la capacité de faire partie de la population active ne soient pas minées par l’absence de services de garde d’enfants.
Troisièmement, je tiens à attirer votre attention sur le sort des étudiants étrangers. Le 1er mai, alors que nous discutions d’un autre projet de loi, je vous ai parlé des lacunes touchant les mesures de soutien qui leur sont destinées. L’éducation des étudiants étrangers en sol canadien est une industrie valant 21,6 milliards de dollars — et encore, ce sont les données de 2016, alors le véritable chiffre doit être encore plus élevé — et représentant environ 170 000 emplois directs. C’est plus, économiquement parlant, que le secteur des pièces d’automobile, de la foresterie ou de l’aviation. C’est loin d’être négligeable. À la fin mars, on comptait 565 000 étudiants étrangers au Canada. Or, selon ce que me disent les experts, à peu près 80 % d’entre eux sont demeurés au Canada en raison des restrictions les empêchant de voyager, et la moitié de ceux qui sont encore ici seront dans une position plus ou moins difficile quand ils retourneront sur les bancs d’école cet automne. Les besoins de ces quelque 300 000 étudiants doivent être pris en compte rapidement — nous sommes presque en août, après tout —, et nous devons nous rappeler que, si les étudiants étrangers sont incapables de suivre leurs cours, c’est la santé financière même des collèges et des universités qui les accueillent qui est en jeu, sans parler des pertes pour l’économie en général. J’encourage donc le gouvernement à accorder aux étudiants étrangers une place au haut de sa liste des priorités sans tarder.
Troisièmement, il y a le vaccin, autant son invention que son acquisition. Certaines personnes ont parlé de l’importance d’un vaccin. Nous savons que d’ici à ce qu’un vaccin soit mis au point et que son efficacité ait été éprouvée, nous devrons nous plier à des mesures restrictives tout au long de notre phase de réouverture et de redressement. J’invite le gouvernement non seulement à accorder un soutien à l’invention d’un vaccin, soutien qui est déjà considérable, mais aussi à donner l’assurance aux Canadiens que ce vaccin sera disponible en quantité suffisante ici pour qu’ils sachent qu’ils ne seront pas désavantagés au fur et à mesure que la phase de redressement progressera après la pandémie.
Cinquièmement, nous devons continuer d’accorder une grande importance aux enjeux internationaux de la COVID. La question du vaccin ne devrait pas être un prétexte pour alimenter un nationalisme de mauvais aloi, peu importe ce que certains se plaisent à trompéter. J’ai été ravi de constater que le premier ministre avait apposé son nom aux côtés de ceux d’autres leaders mondiaux dans un récent article publié dans le Wall Street Journal au sujet de la coopération entourant les travaux sur la COVID à l’échelle internationale. Cependant, j’encourage les pays membres du G7 et les autres entités internationales qui ont une responsabilité en matière de coopération mondiale à en faire davantage à cet égard. De notre côté, nous devons aussi être mieux informés, car même si nous avons un vaccin et que le Canada rouvre son économie, l’humanité demeurera vulnérable à l’échelle planétaire.
Sixièmement, enfin, j’aimerais revenir à un Parlement plus normal. Le Comité des finances a abordé ce sujet, qui a fait l’objet de tractations politiques — chose étrange au Parlement. Je suis d’avis qu’un modèle hybride est la seule manière de revenir rapidement à un Parlement plus normal. J’exhorte les sénateurs à mettre la politique de côté afin de doter le Sénat des moyens techniques nécessaires pour ce faire cet automne.
Pourquoi est-ce important? Il importe que l’institution nationale qu’est le Parlement reprenne ses activités tandis que nous encourageons le secteur privé à faire de même. Il faut aussi nous pencher sur les politiques publiques autres que celles liées à la COVID-19 et aux mesures connexes. D’autres projets de loi sont prêts à être débattus et remis en question. Nous devrions encourager le gouvernement à revenir à un Parlement plus normal — les choses ne reviendront pas tout à fait à la normale en l’absence d’un vaccin efficace — pour que nous vérifiions la confiance des institutions parlementaires envers les mesures prises par le gouvernement.
Je veux conclure en remerciant la sénatrice Moncion d’avoir marrainé le projet de loi, qui assouplit et améliore les programmes que nous avons déjà adoptés. Je vous demande d’appuyer le projet de loi lors du vote à l’étape de la troisième lecture. Merci.
Le sénateur Harder accepterait-il de répondre à une question?
J’ai l’habitude de répondre à vos questions.
Merci, sénateur Harder.
Au moins, dans votre conclusion, vous avez demandé qu’on appuie le projet de loi. C’est la seule observation dans votre discours qui avait quoi que ce soit à voir avec le projet de loi. Néanmoins, je vais poser ma question en fonction de vos observations.
Sénateur Harder, comment se fait-il que, quand on s’oppose au format hybride, on soit taxé de mener des tractations politiques, mais que bien sûr, quand on le réclame, ce ne soit pas le cas? Je ne comprends pas trop pourquoi, quand une personne n’est pas d’accord avec une autre, on dit immédiatement qu’elle mène des tractations politiques.
Je remercie l’honorable sénateur de sa question. C’est ce que je dis.
Je m’explique : la solution hybride est la seule qui permet de respecter les exigences de santé publique des deux Chambres. Si nous voulons que les Chambres fonctionnent de façon plus normale, nous devons nous entendre sur le soutien technique nécessaire pour faire fonctionner le système hybride.
Si vous soutenez que nous devons absolument revenir à des séances semblables à celles d’avant la COVID-19 dans les deux Chambres, c’est impossible — pas sans qu’il y ait des problèmes de santé publique, monsieur le sénateur. De plus, je dirais que...
Sénateur Harder, j’aimerais informer les honorables sénateurs que votre temps est écoulé. Si vous voulez cinq minutes de plus, vous pouvez demander le consentement du Sénat.
Cela suffit pour moi, à moins que d’autres sénateurs aient des questions à poser.
Honorables sénatrices et sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour appuyer le projet de loi C-20, Loi concernant des mesures supplémentaires liées à la COVID-19.
Mon intervention aujourd’hui porte sur la partie 2 du projet de loi, laquelle vise à offrir aux personnes qui vivent en situation de handicap un paiement unique allant jusqu’à 600 $ par l’entremise d’Emploi et Développement social Canada.
Premièrement, je tiens à remercier la ministre Carla Qualtrough de son travail des derniers mois pour faire en sorte que cette mesure se réalise. Cependant, même si ma gratitude est sincère, je ne peux pas m’empêcher de penser qu’il est grand temps et de me demander si cette mesure est suffisante. Je me joins aux nombreuses personnes et aux nombreux organismes de la communauté des personnes handicapées qui partagent une appréciation du travail de la ministre Qualtrough, mais aussi de graves préoccupations quant au fait que même si les personnes handicapées ont été touchées de manière disproportionnée par la COVID-19, les mesures d’aide financière dont elles ont tellement besoin sont vraiment insuffisantes et arrivent trop tard, et elles semblent n’avoir été adoptées qu’après coup.
Il faut dire qu’il y avait un défi, celui de s’assurer que toutes les personnes en situation de handicap allaient pouvoir accéder à cette aide financière de manière efficace et juste. Administrer cet appui uniquement au moyen du crédit d’impôt pour personnes handicapées (CIPH) pouvait sembler logique, mais, en raison des lacunes de ce programme, plusieurs personnes handicapées n’auraient pas répondu aux critères. Tous s’entendent pour dire que le CIPH doit être réformé, ce que recommande aussi le Comité consultatif Personnes handicapées mis sur pied par la ministre du Revenu national, Diane Lebouthillier. Je sais que le gouvernement y travaille, mais, d’ici là, que faire?
Le gouvernement a choisi de verser ce paiement aux titulaires du certificat pour le crédit d’impôt pour personnes handicapées, aux personnes qui reçoivent des prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada et du Régime de rentes du Québec ainsi qu’aux bénéficiaires des mesures de soutien offertes aux personnes handicapées par le ministère des Anciens Combattants. Si on tient compte du fait que les gens disposeront de 60 jours pour demander le certificat pour le crédit d’impôt pour personnes handicapées, une fois que le projet de loi aura reçu la sanction royale, on estime que ce paiement unique pourrait aider 1,7 million de Canadiens handicapés. En raison des lacunes qui persistent, bien des gens craignent qu’un trop grand nombre de personnes handicapées ne soient laissées pour compte, notamment les familles vivant avec une personne atteinte d’un trouble du spectre de l’autisme. Le gouvernement doit veiller à prévenir une telle situation.
Pour les personnes handicapées, les difficultés financières sont nombreuses. Il faut payer l’équipement de protection individuelle, les services de soutien offerts par des préposés et les coûts associés à une utilisation accrue des taxis ou de services comme la livraison de l’épicerie, pour ne citer que quelques exemples. Pour de nombreuses personnes, le paiement unique pourrait bien s’avérer insuffisant. Pensons-y : la PCU s’élève à 500 $ par semaine. Un résidant d’Ottawa, par exemple, peut recevoir 1 169 $ par mois au titre du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées. Ainsi, même avec ce paiement unique, on peut vraiment avoir du mal à subvenir à ses besoins.
N’oublions pas qu’il y a 6,2 millions de personnes qui vivent avec un handicap au Canada. De ce nombre, 49 % reçoivent de l’aide pour leurs activités quotidiennes et 40 % de ceux qui ont l’âge de travailler sont sans emploi. De plus, 42 % sont âgés d’au moins 70 ans, ce qui les rend encore plus vulnérables.
Cependant, derrière les chiffres, il y a le vécu de Canadiens qui, pendant cette crise sans précédent, doivent surmonter des obstacles considérables. Une personne vivant avec une déficience visuelle m’a dit : « Maintenant qu’on ne peut plus rien toucher, je me sens plus aveugle que jamais. » Cette personne a ajouté avec humour : « Comment diable puis-je enseigner la distanciation sociale à mon chien? »
Une personne à mobilité très limitée qui utilise un fauteuil roulant m’a demandé : « Comment composer avec la livraison sans contact quand on est incapable de prendre quelque chose par terre? »
Une dame malentendante m’a raconté ceci : « Je suis bien d’accord pour que les couvre-visages soient obligatoires à l’intérieur des lieux publics, mais je ne peux plus lire sur les lèvres. » Au Québec, Rosalie Taillefer-Simard, une jeune femme qui vit avec la surdité, s’est vu refuser l’accès à un commerce parce que son masque avait une fenêtre transparente.
Hier encore, moi qui appuie sans réserve le prolongement des terrasses sur les trottoirs, je me suis retrouvée face à une nouvelle terrasse, où il n’y avait pas assez d’espace pour passer ni de rampe temporaire pour faire le tour.
Ces conséquences sont toutefois mineures en comparaison avec celles subies par les personnes qui, pour de nombreuses raisons, ont perdu leur autonomie parce qu’elles n’obtiennent plus de services de soutien à domicile. J’ai entendu des histoires horribles de gens qui sont confinés à la maison, qui sont incapables de cuisiner et de s’habiller et qui, soudainement, n’obtiennent plus de soutien, ou très peu de soutien, parce que leur préposé applique les directives de distanciation physique, a démissionné, a choisi de ne plus travailler pour obtenir la Prestation canadienne d’urgence ou a décidé de travailler dans un établissement de soins de longue durée lorsque, par exemple, on a augmenté les salaires au Québec. Je n’entrerai pas dans les détails pour respecter l’intégrité de ces gens, mais ce genre de situation ne devrait jamais se produire au Canada.
Votre Honneur, je suis consciente que je m’éloigne peut-être du débat sur le projet de loi sur lequel nous sommes sur le point de nous prononcer, mais en tant que Canadienne handicapée, j’estime qu’il est de mon devoir de dénoncer ces injustices. Il y a à peine un an, le projet de loi C-81, la Loi canadienne sur l’accessibilité, a reçu la sanction royale après avoir été adopté à l’unanimité par tous les partis représentés à la Chambre des communes et au Sénat. Nous voici en plein cœur d’une pandémie, et des Canadiens sont rendus vulnérables à cause du manque de services, de planification et de détermination du gouvernement. Le temps est peut-être venu de passer de la parole aux actes.
La situation nous concerne tous, et c’est ensemble que nous nous en sortirons, en prenant soin de n’oublier personne. C’est pourquoi je demande au gouvernement fédéral, aux gouvernements provinciaux, aux municipalités, aux entreprises, aux organisations et à chacun d’entre nous de s’entraider, et de veiller à ce que les plans et les investissements qui nous permettront de nous adapter à la nouvelle normalité et de rebâtir le pays tiennent toujours compte des 6,2 millions de Canadiens handicapés. Ainsi, personne ne sera laissé pour compte. Merci.
Honorables sénateurs, étant donné la marge de manœuvre très restreinte dont nous disposons pour assurer une surveillance parlementaire appropriée, j’aimerais profiter du débat sur le projet de loi C-20 pour réfléchir aux événements majeurs qui ont contribué à la mauvaise gestion flagrante de la réponse à la crise sanitaire mondiale de COVID-19 par le gouvernement, ainsi que la négligence et l’imprudence absolue dont il a fait preuve dans ce dossier.
À mesure que nous découvrons des exemples de plus en plus accablants et troublants de la mauvaise gestion de la pandémie et de la crise économique qu’elle a provoquée et que nous creusons plus loin, nous nous rendons compte avec inquiétude que beaucoup trop de questions demeurent sans réponse.
Le centre national de renseignement médical de l’armée américaine avait signalé l’existence du nouveau coronavirus dès le mois de novembre. Ses analystes avaient averti les autorités américaines et leurs alliés qu’il s’agirait d’un « événement cataclysmique ». Compte tenu de l’importance vitale de cette annonce, pourquoi rien n’a-t-il été fait pour contrer de manière proactive la menace qui pesait?
En mai 2019, on a démantelé le Réseau mondial d’information en santé publique, le système d’alerte rapide du gouvernement qui avait joué un rôle déterminant dans la détection des premiers signes du virus H1N1, du syndrome respiratoire du Moyen-Orient et du virus Ebola, et qui avait même aidé les autres pays à se préparer. On avait tout simplement retiré de leurs fonctions de surveillance internationales les analystes, dont la priorité était de recueillir de l’information et de déceler les premiers signes d’une pandémie. Pourquoi a-t-on essentiellement abandonné ce système d’alerte crucial, nous laissant ainsi complètement vulnérables et mal préparés à faire face à la COVID-19?
Le 17 janvier, l’unité du renseignement médical a informé le ministre de la Défense au sujet de la crise de la COVID-19. Or, le Groupe d’intervention en cas d’incident du gouvernement ne s’est réuni que 10 jours plus tard pour discuter d’une épidémie qui allait faire des ravages dans le monde et coûter la vie à près de 650 000 personnes, dont 9 000 Canadiens.
Pourquoi attendre 10 longs jours? Quel autre dossier pouvait bien être plus important que de se préparer sans délai à cet « événement cataclysmique »?
Dans un article de la CBC publié le 22 juillet, Wesley Wark, un des plus grands experts en matière de renseignement de sécurité au Canada et professeur d’université, affirme que ce délai montre que « très peu de signaux d’alarme ont retenti ou été entendus au sein du gouvernement ». Il a ajouté :
Le Canada, pour des raisons inconnues, a raté l’occasion d’effectuer une évaluation adéquate des risques, de profiter d’une détection précoce et d’amorcer la planification des mesures d’intervention.
Alors que nos alliés ont sonné l’alarme en novembre et que les Forces armées canadiennes ont fait de même en janvier, l’Agence de la santé publique a suivi les instructions de l’Organisation mondiale de la santé, un organisme qui a la réputation d’être corrompu, d’être incompétent et de répandre la propagande communiste chinoise. Le gouvernement a fait fi de la mine de renseignements offerts par nos alliés comme la Corée du Sud et Taïwan, des États voisins de la Chine qui ont mérité l’admiration du monde entier pour leur gestion rapide et efficace du virus. Pourquoi notre gouvernement a-t-il effectivement cédé le pouvoir décisionnel sur notre gestion de la crise de santé publique à l’OMS au lieu d’écouter notre unité du renseignement militaire et nos alliés?
Après avoir été informé de la gravité du risque pour la santé publique posé par la COVID-19, pourquoi le gouvernement n’a-t-il pas modifié son message aux Canadiens pour refléter fidèlement le véritable danger?
Pourquoi le gouvernement n’a-t-il pas choisi de fermer les frontières ou de restreindre les vols plus tôt, c’est-à-dire dès qu’il est devenu évident que le virus représentait une menace considérable pour les Canadiens, malgré ce qu’en disaient la ministre de la Santé et l’administratrice en chef de la santé publique du Canada? Le gouvernement Trudeau tentait-il de préserver son image afin de gagner des appuis dans l’espoir d’obtenir un siège au sein du Conseil de sécurité des Nations unies aux dépens de la vie de Canadiens? Tentait-il de sauver l’industrie du transport aérien, les grandes sociétés et ses riches amis au détriment de notre santé et de notre sécurité?
Ce n’est que lorsque les provinces et les maires ont menacé d’intervenir que le gouvernement a décidé d’agir.
Selon un article publié par la CBC le 10 avril, même aussi tard que le 10 mars :
[...] une note d’information préparée par les fonctionnaires à l’intention de la ministre de la Santé Patty Hajdu en prévision de la période des questions disait que, avec seulement 12 cas signalés dans tout le Canada à ce moment-là (même si les statistiques rendues publiques avaient déjà dépassé ce nombre), « le risque de propagation du virus au Canada demeure faible ».
Toujours selon le même article, la note disait également que le système de santé publique était « [...] bien équipé pour contenir les cas provenant de l’étranger, et ainsi limiter la propagation au Canada ».
Cependant, trois jours plus tard, le gouvernement fédéral a décidé de confiner tout le pays. Comment la ministre de la Santé peut-elle être aussi déconnectée de la réalité?
Comme l’a confirmé le Comité sénatorial des affaires sociales dans son plus récent rapport : « [...] la Réserve nationale stratégique d’urgence (RNSU) n’a pas été bien gérée au fil des ans et [...] elle ne contenait pas des quantités suffisantes et adéquates de fournitures pour distribution à l’échelle du pays. »
Comme tous les Canadiens, j’aimerais comprendre pourquoi et savoir ce qu’on fait pour corriger la situation.
Le rapport comprend aussi de nombreuses observations concernant le fait que le système de santé canadien a été complètement pris par surprise par la pandémie. Comment est-il possible que le système de santé d’un pays du G7 comme le nôtre soit ainsi complètement pris au dépourvu? N’avons-nous rien appris du SRAS?
Le constat du comité selon lequel nous ne sommes pas prêts pour une deuxième vague est encore plus troublant. Six mois après le début de la pandémie, c’est-à-dire la moitié de l’année, nous ne sommes toujours pas prêts pour une deuxième vague? Pourquoi le gouvernement Trudeau n’a-t-il pas fait preuve de plus de leadership? Serait-ce parce que les marches de Rideau Cottage ne recèlent aucune solution simple?
Au début de la crise, nous avons expédié 16 tonnes d’équipement de protection individuelle à la Chine communiste. Pourquoi le gouvernement a-t-il permis à la Chine d’accumuler de l’équipement de protection individuelle depuis tout le Canada au lieu de se préparer à la pandémie et de reconstituer notre réserve nationale? Bien sûr, la Chine a délibérément minimisé la gravité de la menace posée par le virus, ce qui lui a permis de continuer à accumuler de l’équipement de protection individuelle depuis le monde entier. Pourquoi le gouvernement du Canada s’est-il laissé prendre à ce piège?
Puisque le gouvernement a fait don d’une quantité substantielle d’équipement de protection individuelle à la Chine, sa dépendance ultérieure au régime communiste en tant que fournisseur unique au moment d’acquérir ce type d’équipement pour remédier à une pénurie nationale flagrante, un équipement indispensable qui, dans de nombreux cas, s’avère défectueux, rend la situation d’autant plus absurde.
Malheureusement, ce n’est pas tout. Le gouvernement, qui semble avoir horreur de tout ce qui pourrait ressembler à du discernement ou à du bon sens, continue de faire des affaires avec une dictature malgré les importantes interdictions dont font l’objet les exportations canadiennes, malgré les menaces graves qui pèsent sur notre sécurité nationale, malgré l’enlèvement des deux Michael, les nombreux autres Canadiens détenus arbitrairement en otage à l’étranger et ceux qui sont victimes de harcèlement et d’intimidation sur notre propre territoire. Malgré tout cela, le gouvernement ne voit pas d’inconvénient à collaborer avec une société chinoise et avec le service de recherche de l’armée chinoise pour mettre au point un vaccin — un vaccin qui devait faire l’objet d’un essai sur des humains au Canada, mais qui est retenu par le régime communiste — ou à attribuer à une entreprise d’État chinoise qui nous est hostile un contrat de services de sécurité pour l’installation d’infrastructures délicates du point de vue de la sécurité dans nos ambassades, nos consulats et nos hauts-commissariats, au mépris total de la menace bien réelle que cela fait peser sur la sécurité nationale et la cybersécurité du pays.
Les échecs colossaux de la politique du gouvernement sont également flagrants lorsqu’on examine la conception et la mise en œuvre des programmes de relance économique. Par exemple, pourquoi le gouvernement refuse-t-il d’assouplir la PCU et pourquoi ce programme a-t-il été si mal géré? Alors que 442 millions de dollars en fonds publics ont été gaspillés en doubles paiements erronés de la PCU, de nombreux Canadiens continuent d’être laissés pour compte. Étant donné qu’une subvention de 75 % n’attire même pas le nombre d’entreprises prévu par le gouvernement, qui a été à l’origine de l’idée révolutionnaire d’instaurer une subvention salariale de 10 %? Pourquoi créer un programme que les entreprises ne peuvent même pas utiliser?
La Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant est la proverbiale cerise sur le gâteau dans cette série de fiascos du gouvernement. Qui a conçu ce programme? Croyait-on vraiment qu’il était préférable de payer des étudiants pour faire du bénévolat plutôt que de les faire travailler?
Ce n’est pas tout. Il semble que deux mois ne soient pas un délai suffisant pour déterminer s’il y avait d’autres organismes de bienfaisance admissibles qui pouvaient administrer le programme. Qui a décidé qu’il était raisonnable de payer près de 43 millions de dollars en frais à un organisme pour gérer plus de 900 millions de dollars de subventions? Qui a décidé de pousser l’audace jusqu’à accorder plus de 900 millions de dollars, même s’il était clair qu’il serait impossible de distribuer le nombre nécessaire de subventions de 5 000 $ pour dépenser cette somme énorme?
Il est encore plus alarmant de constater que le meilleur et, comme par hasard, le seul candidat pour ce versement de près de 1 milliard de dollars n’était même pas un organisme sans but lucratif, mais une société immobilière sans actifs réels et une société de portefeuille qui fait partie d’un groupe qui n’honorait pas ses engagements bancaires et qui entretenait des liens étroits avec les deux hommes les plus puissants du pays : le premier ministre et le ministre des Finances. Un autre manquement flagrant à l’éthique par le premier ministre Trudeau et M. Morneau témoigne de leur arrogance sans borne et de leur ignorance totale des difficultés des Canadiens ordinaires.
M. Morneau a balayé du revers de la main une accusation qui entraînerait l’exclusion assurée d’un simple député, en disant que c’était « une erreur », qu’il « aurait dû se récuser du processus décisionnel », qu’il « n’était pas au courant » des 41 000 $ en frais de voyage impayés pour des vacances somptueuses pour sa famille qui sont apparemment apparus de nulle part. Il a également été très pratique pour lui de « ne pas savoir » que sa propre fille travaillait pour l’organisme en question. Il a en plus l’audace de déclarer son intention de « continuer à travailler dans l’intérêt des Canadiens ». Le fait qu’il pense pouvoir simplement faire un chèque de 41 000 $ — plus que le revenu annuel du Canadien moyen — et s’en sortir avec seulement une tape sur les doigts est une gifle pour les Canadiens.
Avec deux scandales d’infractions aux règles d’éthique derrière la cravate, et un troisième qui lui pend au bout du nez, étant le premier et le seul premier ministre dans toute l’histoire de notre pays à avoir violé une loi fédérale, on peut affirmer sans se tromper que le premier ministre Trudeau et son administration ont atteint des sommets inégalés en matière de dépravation morale, d’hypocrisie, de corruption et de copinage. Les Canadiens méritent mieux. Ils méritent un gouvernement responsable et fonctionnel au service de leurs intérêts, pas les intérêts personnels du premier ministre, de ses ministres et de ses amis fortunés.
Si le gouvernement avait bien fait son travail et agi dans l’intérêt des Canadiens quand les premiers signaux d’alarme sont apparus en novembre dernier, ou même en janvier de cette année, en suivant l’exemple des pays qui avaient mis en place des mesures rapides et rigoureuses pour répondre à la pandémie, comme Taïwan, Singapour, la Corée du Sud, la Nouvelle-Zélande et l’Australie, nous ne serions vraisemblablement pas dans ce chaos. Notre économie n’aurait pas été mise en suspens. Notre Parlement, nos écoles et nos restaurants n’auraient pas été fermés. Nos entreprises n’auraient pas fait faillite. Les Canadiens qui ont mis fin à leur jour seraient encore parmi nous. Notre déficit n’aurait pas augmenté exponentiellement jusqu’à 343 milliards de dollars. Notre dette n’aurait pas atteint la somme renversante de 1 billion de dollars et 3 millions de Canadiens n’auraient pas perdu leur emploi. Cette pandémie a tué 9 000 de nos concitoyens, détruit la vie de centaines de milliers d’autres, en plus de dévaster notre économie.
Malheureusement, le gouvernement Trudeau semble se préoccuper davantage de son image de marque que de contenu. Au lieu d’élaborer un meilleur système de soins de santé et de meilleures mesures politiques et financières pour réagir à la pandémie, le premier ministre s’est préoccupé davantage de plaire à des dictateurs afin d’obtenir un siège au Conseil de sécurité de l’ONU et de promouvoir sa marque personnelle pour sa campagne de réélection pendant son émission matinale quotidienne devant les marches de son chalet.
Honorables sénateurs, il s’agit du même homme qui, en 2011, avait réclamé la démission de la ministre de la Coopération internationale Bev Oda à la suite d’allégations qui incluaient des dépenses exorbitantes des deniers publics. L’inconduite de Bev Oda est loin d’être aussi importante que la liste grandissante et bien connue des scandales du premier ministre. Voici donc la question : quand le premier ministre va-t-il démissionner? Ou pense-t-il que la loi ne s’applique pas à lui?
Le gouvernement se moque des Canadiens et les laisse payer le prix de sa mauvaise gestion flagrante…
Sénateur Ngo, votre temps de parole est écoulé. Si vous avez besoin de plus de temps, vous pouvez demander le consentement du Sénat.
Je demande une minute de plus.
Honorables sénateurs, le consentement est-il accordé pour une minute supplémentaire?
Merci.
Le gouvernement se moque des Canadiens et les laisse payer le prix de sa mauvaise gestion flagrante, de sa négligence, de son imprudence absolue et de sa culture du « tout m’est dû ».
Honorables collègues, j’ai pour devise de ne pas écouter ce que dit Justin Trudeau, mais d’examiner plutôt ce qu’il fait. Les actes sont plus éloquents que les mots. Nous aurons du pain sur la planche quand nous reviendrons en septembre. Je veux des réponses à mes questions et je veux que le gouvernement rende des comptes. C’est aussi ce que désirent les Canadiens. Merci.
Le sénateur Ngo accepterait-il de répondre à une question?
Votre Honneur, mon temps de parole est-il écoulé?
Vous disposez de quelques secondes si vous voulez répondre à une question.
Merci, monsieur le Président.
Sénateur Ngo, nous sommes à l’étape de la troisième lecture du projet de loi C-20, mais vous n’avez pas beaucoup parlé du projet de loi en question. L’appuyez-vous ou non?
Je vous remercie de votre question. Je voulais parler du pétrin dans lequel nous nous trouvons à cause de la pandémie parce que c’est la raison pour laquelle le gouvernement a présenté le projet de loi C-20, ainsi que le projet de loi C-17. Vous m’avez demandé si j’appuie le projet de loi C-20. Vous aurez ma réponse après le vote à l’étape de la troisième lecture.
Revenons maintenant au projet de loi C-20.
Honorables sénateurs, bien que je soutienne ce projet de loi, j’ai de sérieuses réserves à propos de la partie consacrée au paiement pour les personnes handicapées. C’est au bout d’un chemin long et tortueux qu’on versera aux personnes handicapées du Canada le paiement qui leur est dû en ces temps étranges et incertains.
À propos de temps, honorables sénateurs, il a fallu beaucoup de temps, trop en fait, avant que ce projet de loi important n’arrive au Sénat. La politique sème souvent des embûches dans la vie des gens. Je tiens à faire écho aux sentiments exprimés par la sénatrice Petitclerc à propos des enjeux dont nous discutons aujourd’hui. Dix-huit semaines après avoir débattu de la Prestation canadienne d’urgence et l’avoir adoptée, nous sommes ici pour débattre des mesures de soutien d’urgence supplémentaires prévues par le projet de loi C-20; 18 semaines ont passé, et les Canadiens handicapés attendent toujours du soutien.
D’après Statistique Canada, alors qu’auparavant une personne sur cinq avait un handicap, cette proportion est maintenant d’une personne sur quatre. Cette communauté est en crise : les personnes handicapées se sentent oubliées et ont l’impression qu’on fait peu de cas de leurs préoccupations et de leurs difficultés.
Dans les faits, leurs besoins ne sont absolument pas pris en compte. Ce projet de loi les aidera peut-être à payer les factures, mais à mes yeux, il ne va pas assez loin. Les coûts continuent d’augmenter, et les personnes handicapées sont encore plus durement touchées que les autres. Je parle ici des dépenses supplémentaires qu’elles doivent assumer pour embaucher des aides personnels, pour acheter de l’équipement de protection individuelle, des fournitures médicales et des médicaments, pour se rendre là où on vend ces produits, pour prendre le taxi plus souvent ou pour se faire livrer l’épicerie et les médicaments, sans parler des effets de la solitude et de l’isolement extrêmes et de l’interruption des services.
Honorables sénateurs, rappelons-nous également que le racisme systémique a des effets démultiplicateurs et que les personnes racialisées doivent toujours surmonter des obstacles supplémentaires pour se prévaloir des différents programmes, y compris l’actuelle subvention salariale. Alors imaginez ce qu’il en est pour les personnes handicapées racialisées.
Le projet de loi C-20 va dans la bonne direction, mais il ne nous fait faire qu’un pas en avant; les personnes handicapées sont encore loin d’avoir accès à toutes les mesures de soutien d’urgence dont elles ont besoin.
Après avoir consulté le Groupe consultatif sur la COVID-19 en matière des personnes en situation de handicap, la ministre Qualtrough a remanié certaines des mesures prévues dans le projet de loi C-20 afin que les personnes qui touchent des prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada, du Régime de rentes du Québec ou du ministère des Anciens Combattants aient elles aussi droit à de l’argent. C’est une excellente nouvelle, car ce n’est plus 1,2, mais 1,7 million de Canadiens qui seront admissibles.
Le projet de loi C-20 tient compte du fait que le coût de la vie est plus élevé pour les personnes handicapées et prévoit des mécanismes visant, selon moi, à inclure de nombreux oubliés, c’est-à-dire ceux qui n’ont pas droit au paiement unique aux personnes handicapées parce que leur demande de participation au programme de crédit d’impôt pour personnes handicapées n’a pas été approuvée. Si vous ne faites pas partie du programme de crédit d’impôt pour personnes handicapées, mieux vaut ne pas présenter de demande.
Le projet de loi C-20 donne l’occasion de corriger enfin les choses, en modifiant les critères d’admissibilité au crédit d’impôt pour personnes handicapées afin de prévoir une période de 60 jours durant laquelle une personne admissible au crédit d’impôt pour personnes handicapées peut faire une demande, même si elle ne le reçoit pas encore. Je presse donc les ministres Qualtrough et Lebouthillier de collaborer et d’approuver les demandes de crédit d’impôt qui ont été refusées, surtout parce qu’il s’agit du seul mécanisme de prestation prévu dans le projet de loi.
Depuis des années, le milieu de l’autisme lutte pour que le crédit d’impôt pour personnes handicapées soit équitable. Le mois dernier, lorsque le projet de loi C-17 a été présenté, l’Alliance canadienne des troubles du spectre autistique, ou ACTSA, a réclamé de nouveau une refonte complète du crédit d’impôt pour personnes handicapées. Rebekah Kintzinger, qui siège au conseil d’administration de l’ACTSA et défend la cause de l’autisme, qui est aussi la sienne, explique les difficultés causées par l’utilisation du crédit d’impôt pour personnes handicapées pour la mise en œuvre du programme.
« En raison du langage employé dans la documentation et les formulaires sur le crédit d’impôt pour personnes handicapées, il est extrêmement difficile pour les personnes autistes de demander ce crédit. Beaucoup de personnes auparavant admissibles se voient refuser un renouvellement, ce qui entraîne un long processus d’appels où il faut recourir à des médecins auxquels la personne handicapée n’a peut-être plus accès. »
Cela demande tout simplement beaucoup de temps et de paperasse.
Bien que le crédit d’impôt pour personnes handicapées demeure un mécanisme de prestation mal adapté à ce programme, en accordant 60 jours supplémentaires pour présenter une demande, ce projet de loi offre enfin une possibilité — aussi limitée soit-elle — de faire les choses comme il faut et d’inclure les personnes qui se battent pour l’admissibilité au crédit d’impôt pour personnes handicapées depuis bien avant la pandémie de COVID-19.
J’ai déjà indiqué au Sénat que le Groupe consultatif sur la COVID-19 en matière de personnes en situation de handicap ne comprend aucun représentant des personnes autistes. C’est tout simplement inacceptable, honorables sénateurs. Une personne autiste devrait jouir des mêmes droits que les autres personnes vivant avec un handicap.
Si la ministre avait accepté la recommandation de l’Alliance canadienne des troubles du spectre autistique d’inclure Rebekah dans le groupe consultatif, à la suite de sa comparution devant le comité plénier, le 1er mai, l’aide d’urgence proposée dans le projet de loi C-20 aurait pu mieux refléter les besoins des personnes autistes. À ce moment-là, la ministre avait accueilli favorablement la proposition d’inclure un représentant des personnes autistes dans le groupe consultatif. Encore une fois, je l’exhorte à améliorer la composition du comité en y incluant un représentant des personnes autistes.
Il n’est pas trop tard. Il n’est jamais trop tard pour bien faire. Il en va du respect des droits de la personne au Canada.
Un thème se dégage de tous les dossiers problématiques que j’ai énumérés : le refus des gouvernements et des fournisseurs de services de reconnaître les besoins propres aux personnes handicapées et d’y répondre. Trop souvent, les recommandations ou les politiques sont présentées sans tenir compte des répercussions possibles pour les personnes handicapées. Dans bien des cas, les gouvernements et les fournisseurs de services n’ont pas établi un juste équilibre entre la nécessité de prévenir la propagation de la COVID-19 et le droit des personnes handicapées d’avoir un accès égal aux services de santé, à l’éducation et à l’information.
Récemment, les sénateurs ont participé à une conférence téléphonique avec le secrétaire parlementaire et des fonctionnaires pour parler de l’argent qui est versé à ceux qui en ont besoin. J’ai posé des questions sans obtenir de réponses. Qui a établi le montant de 600 $? Quelle analyse a été effectuée pour déterminer que les personnes handicapées méritaient toutes un paiement unique de 600 $? Les bénéficiaires de la PCU reçoivent 2 000 $ par mois. Que peut-on payer avec 600 $ si on vit dans une petite localité ou une grande ville au Canada? Je serais curieux de le savoir. J’aimerais qu’un jour quelqu’un puisse répondre à cette question : qui est arrivé à 600 $? C’est une aide de 600 $, mais elle est insuffisante. On peut toujours faire valoir que c’est n’est jamais assez, mais c’est un montant qui paraît ridiculement faible.
Je suis également tenté à ce stade, parce que je suis très déçu, de présenter un amendement. Je ne le ferai pas parce que je viens de regarder la sénatrice Moncion, et elle a failli s’évanouir. Mais si je le faisais, qu’est-ce qui se passerait? Ce ne serait pas juste pour les millions d’autres personnes handicapées. Pourquoi? Parce que la mesure législative retournerait à la Chambre avec un amendement, y serait débattue puis reviendrait ici. Ce serait une sorte de ping-pong politique. C’est faire de la politique en jouant avec la vie des gens, encore une fois.
Je suis extrêmement contrarié par cela. Il me reste moins d’un an dans cette enceinte et je veux continuer à me battre pendant les 12 prochains mois pour les droits des personnes handicapées. Nous semblons voir cela comme si nous faisions quelque chose de spécial pour ceux qui sont en fauteuil roulant ou qui sont autistes. Cela n’a rien à voir avec le fait d’être spécial. Il s’agit de droits de la personne. Un Canadien sur quatre est concerné. C’est aussi simple que cela. En vieillissant, croyez-moi, certains d’entre nous verront peut-être cela d’une manière très personnelle. C’est une chose à laquelle nous devons vraiment prêter attention.
En terminant, l’ARCH Disability Law Centre ajoute que ces droits sont protégés par la Charte et les lois provinciales et fédérales sur les droits de la personne. Ils constituent des valeurs fondamentales de la société canadienne et ne doivent pas être oubliés, surtout en cas d’urgence et de pandémie.
Nous avons entamé les débats sur les mesures législatives d’urgence au mois de mars. Nous sommes maintenant rendus en plein cœur de l’été, mais les personnes handicapées sont toujours laissées pour compte.
Le projet de loi sera adopté — c’est une bonne chose — et il allégera le fardeau de certaines personnes. Je me réjouis à la perspective de débattre de la façon d’affecter des ressources aux personnes handicapées afin qu’elles ne soient pas contraintes de vivre dans la pauvreté.
Comme je l’ai dit au début de mon intervention, ce projet de loi aurait dû être adopté il y a des mois. Il aurait fallu en faire une priorité. Nous voici maintenant au milieu de l’été, et nous obtenons finalement l’autorisation d’aller de l’avant avec une mesure qui aurait dû être approuvée dès le départ.
Au bout du compte, les faits sont là : un Canadien sur quatre vit avec un handicap, mais nous traitons ces concitoyens comme des personnes sans importance. C’est inacceptable. Merci.
Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi C-20, une autre mesure d’urgence en vue de composer avec les répercussions de la crise de la COVID-19. Le projet de loi C-20 prolonge la Subvention salariale d’urgence du Canada, prévoit le versement d’un paiement ponctuel aux Canadiens handicapés et reporte diverses échéances du gouvernement.
Bien que j’appuie en principe le projet de loi, j’aimerais d’abord insister sur la nécessité d’observer une procédure de planification efficace des mesures d’urgence si nous souhaitons limiter autant que possible les pertes humaines et économiques et ressortir plus forts et grandis de cette crise. Un plan efficace renvoie à un cercle vertueux de mesures : la prévention, qui consiste à réduire le risque que certaines situations se produisent; la préparation, c’est-à-dire se préparer à mettre des mesures en pratique en coordonnant le tout pour atténuer les conséquences; l’intervention, qui doit s’opérer conformément aux priorités stratégiques; et le rétablissement ou le redressement, c’est-à-dire remettre en place et améliorer les pratiques passées.
Ailleurs dans le monde, les plans n’étaient pas parfaits, mais certains se sont certes révélés plus efficaces que d’autres.
Malheureusement, si l’on fait l’examen rétrospectif de notre intervention d’urgence, on constate que la prévention a beaucoup laissé à désirer. Nous n’étions pas préparés, et nous n’avons toujours pas de plan de rétablissement. Le secteur de la santé publique était mal préparé et, en général, les entreprises ne possédaient pas de plan d’urgence. Le temps presse. Nous devrions être en train de planifier la relance et d’améliorer la prévention, le moyen le plus efficace pour économiser temps et argent. Chers collègues, à l’échelle mondiale, il faut faire beaucoup mieux.
Face à cette crise mondiale, chacun doit se demander s’il assume ses responsabilités, et c’est particulièrement le cas des politiciens. Nous vivons une période historique et les générations futures parleront de la façon dont nous avons réagi.
Le 14 juillet le Comité sénatorial des finances nationales a publié un rapport provisoire sur la réponse économique à la pandémie de COVID-19. Le rapport concernait la première phase de la réponse d’urgence et il a révélé que, malgré les efforts substantiels déployés, l’insécurité et des risques potentiels subsistent; certains groupes de Canadiens ne sont toujours pas protégés par les filets de sécurité; le gouvernement doit améliorer la transparence concernant les décisions et les mesures qu’il prend; certains groupes ont été touchés de façon injuste par la crise; les entreprises risquent de vivre une débâcle économique encore pire. Le projet de loi C-20 vise à atténuer ces problèmes.
Les pays d’Europe et d’Asie ont été frappés par la COVID-19 avant nous. Ils sont maintenant passé aux plans de relance. La plupart de ces pays voient la pandémie telle qu’elle est, soit une crise qui offre l’occasion de mieux rebâtir. Une analyse et une grande réflexion avaient déjà lieu avant le début de la crise et elles se poursuivent. Ainsi, de nombreux pays présentent des plans de relance verts, équitables, intelligents et durables comme le recommandent les grands organismes internationaux, dont l’OCDE, la Banque mondiale, le Fonds monétaire international, le Forum économique mondial, l’Agence internationale de l’énergie et les Nations unies. Le Canada est membre de tous des organismes. Les grands investisseurs, comme BlackRock, et les banques centrales nationales appuient l’approche du « mieux reconstruire », mais ils vont plus loin et affirment même que cette approche permettra de prévenir des crises dans l’avenir.
Il n’est donc pas surprenant que quatre sondages menés tout récemment par Abacus Data, Pollara Strategic, Ipsos et McAllister ont conclu qu’une majorité de Canadiens sont en faveur et appuient une relance verte, propre et juste ni que la majorité des soumissions écrites qui ont été reçues au Comité des finances nationales appuient une telle relance. Le rapport du comité conclut ceci :
Le gouvernement doit aussi commencer à établir un plan en vue de rebâtir l’économie. À l’automne, le comité poursuivra son étude et examinera les moyens d’édifier une économie plus intelligente, équitable et durable.
Par ailleurs, un extrait du portrait économique et budgétaire du 8 juillet indique ce qui suit :
C’est l’occasion pour le Canada de mieux se reconstruire grâce à des investissements dans une relance vigoureuse, inclusive et verte, qui met en avant de nouvelles possibilités pour les travailleurs de toutes les régions du pays. Si l’on se tourne vers l’avenir, on constate que le gouvernement ne doit pas seulement penser aux prochains mois, mais aussi aux années et aux décennies à venir.
Les situations d’urgence du passé nous ont montré qu’une grande partie du travail exige l’adoption de mesures extraordinaires en temps opportun. Les derniers mois ont eu une importance cruciale, mais le Sénat n’a siégé qu’à quelques reprises et avec un nombre limité de sénateurs. C’est une déception pour les Canadiens qui s’attendent à ce que le gouvernement et le Parlement assurent le fonctionnement de la démocratie en temps de crise également. Abordant ce sujet, la recommandation 16 du rapport du Comité des finances nationales se lit comme suit :
Que les procédures habituelles d’approbation des dépenses du gouvernement par le Parlement soient rétablies afin d’exercer une surveillance appropriée des dépenses du gouvernement.
Je suis personnellement très préoccupée par le manque de transparence concernant Exportation et développement Canada et le Compte du Canada. J’ai soulevé la question auprès du ministre Morneau pendant la séance du Sénat, dans le cadre des travaux du comité et dans de la correspondance depuis l’adoption du projet de loi C-13 en mars dernier. Nous faisons état de ces préoccupations dans notre rapport :
Dans la mesure où le gouvernement a fourni peu de détails, le comité craint que la représentation qu’il donne de la dette fédérale ne comprenne pas celle des sociétés d’État et du Compte du Canada, ce qui pourrait constituer un risque pour les contribuables.
Le comité poursuit en disant :
Le mandat d’Exportation et développement Canada a par exemple été élargi afin qu’il puisse offrir des prêts non plus aux seules entreprises exportatrices, mais à toutes les entreprises du pays, et le ministre des Finances a obtenu le pouvoir d’établir les plafonds du capital et des passifs de la société, y compris le plafond des passifs du Compte du Canada, jusqu’au 30 septembre. Pour l’instant, la somme qu’il pouvait prêter est passée de 45 à 90 milliards de dollars.
Comme vous le savez, je suis de près les questions relatives au lien entre l’énergie, l’environnement et l’économie. Des organismes de la société civile ont souligné publiquement que, de 2012 à 2017, EDC a fourni 12 fois plus de soutien financier en prêts, assurances et garanties au secteur pétrolier et gazier qu’à une catégorie de technologies propres mal définie. Plus tôt cette année, EDC a approuvé un prêt pouvant atteindre 500 millions de dollars pour le gazoduc Coastal GasLink, en Colombie-Britannique, malgré l’opposition des chefs héréditaires des cinq clans de la nation des Wet’suwet’en, ce qui a déclenché un mouvement national de protestation.
Outre la transparence et la reddition de comptes, nous devons nous préoccuper de l’inefficacité d’une aide financière qui ne générera pas de revenus ni d’emplois durables, mais qui augmentera plutôt le nombre d’actifs inutilisables et nuira à notre capacité de rembourser notre dette grandissante. La reprise doit respecter des principes d’efficacité et contribuer à la résilience et à la préparation sociales, environnementales et économiques, et faire le maximum pour prévenir ou atténuer les crises futures.
Une reprise durable signifie que les gens non seulement se sentent en sécurité, heureux et en santé, mais qu’ils le sont vraiment. Dans son rapport provisoire, le comité des finances nationales tient compte des critiques voulant que le PIB soit un « faible indicateur du bien-être réel ». Voici ce qu’a déclaré M. Poloz, l’ancien gouverneur de la Banque du Canada :
Le PIB est une ancienne mesure traditionnelle de l’économie. Il ne tient pas compte de bon nombre de facteurs qui sont importants pour de nombreuses personnes.
J’espère que, comme d’autres pays, le Canada utilisera de meilleurs indicateurs qui tiendront compte du bien-être réel des Canadiens en matière d’emploi valorisant, de salaire, de qualité de l’environnement et de répartition de la richesse.
À cet égard, même si le projet de loi C-20 prévoit un paiement unique pour les personnes handicapées, des craintes subsistent quant au fait que certaines d’entre elles ne rempliront peut-être pas les critères d’admissibilité. Le Comité des finances nationales a fait écho aux appels des acteurs de la société civile et des experts en demandant au gouvernement du Canada qu’il « envisage de façon exhaustive, juste et prioritaire l’instauration d’un revenu de base garanti ».
Alors que nous réfléchissons à la manière de mieux reconstruire, beaucoup sont paralysés par la question de savoir comment financer un tel parcours de transformation. Le Forum économique mondial a appelé à une grande refonte du capitalisme.
Je propose quelques points de vue pour une réflexion plus approfondie, en espérant que le Comité des finances nationales les examinera de plus près cet automne.
Dans un récent rapport, l’organisation Canadiens pour une fiscalité équitable souligne qu’en 2019, les entreprises canadiennes ont placé un montant record de 381 milliards de dollars dans les 12 principaux paradis fiscaux, soit six fois plus qu’en 1999. En d’autres termes, les recettes fiscales des entreprises perdues au profit des paradis fiscaux auraient pu contribuer à éponger le déficit sans précédent que le Canada enregistre pour aider les Canadiens à surmonter à cette pandémie.
Et si nous financions la relance d’une part en remédiant aux lacunes de notre système fiscal qui permettent l’évitement fiscal abusif et, d’autre part, en cessant de soutenir les sociétés qui ont recours aux paradis fiscaux?
Chers collègues, le Canada promet depuis 10 ans d’abolir les subventions inefficaces aux combustibles fossiles, mais le bilan est particulièrement médiocre à cet égard. Et si cet argent était plutôt investi dans des technologies propres et des stratégies de transition et d’économie circulaire?
À maintes reprises, dans ma profession d’ingénieur, j’ai vu les conséquences désastreuses d’une mauvaise planification et de décisions hâtives visant à réaliser des bénéfices à court terme au profit de secteurs très puissants et au détriment de l’intérêt public à long terme. Il y a sept ans ce mois-ci, j’ai été témoin de l’incendie qui a coûté la vie à 53 personnes à Lac-Mégantic et qui a ravagé le centre-ville et la rivière Chaudière. Pourquoi? Parce qu’il fallait acheminer des ressources étrangères très rapidement à des marchés étrangers, et ce, au détriment de la sécurité. Nos infrastructures, devenues une simple voie de transit pour des matières dangereuses, étaient mal entretenues par les utilisateurs et ont été détruites par la tragédie. La plupart des travaux de reconstruction ont été réalisés aux frais de l’État. Est-ce une approche efficace pour faire des affaires et bâtir une économie durable?
C’est d’abord et avant tout pour défendre le droit des jeunes générations à un avenir plus sûr, plus sain et plus prospère que je suis devenue sénatrice. En tant que grand-mère de deux petits garçons, mon engagement à l’égard de la protection n’a jamais été aussi fort.
Je me reconnais dans des mouvements émergents de résistance face aux changements climatiques, comme Mères au front, et dans d’autres mouvements qui se forment chez les médecins, les enseignants et les scientifiques en faveur de la planète, et qui répondent à l’instinct maternel ou à l’instinct de survie pour ceux qui viendront après nous. Voilà un instinct tout à fait naturel qui se déploie chez tous les mammifères, y compris les humains, et qui semble bien nécessaire pour préserver la vie sur Terre.
Chers collègues, il est temps de prendre notre courage à deux mains et de bâtir un monde meilleur pour demain. Je sais que cela peut nous sembler impossible et parfois désespérant, mais l’espoir émerge de l’action.
Je vous remercie beaucoup.
Honorables sénateurs, je prends la parole au sujet du projet de loi C-20, Loi concernant des mesures supplémentaires liées à la COVID-19.
Honorables sénateurs, le projet de loi C-20 comprend trois parties. La partie 1 révise les critères d’admissibilité à la Subvention salariale d’urgence du Canada. La partie 2 prévoit le versement d’un paiement aux personnes handicapées pour des raisons liées à la COVID-19. La partie 3 prévoit des modifications législatives pour combler le besoin de souplesse en ce qui a trait à certains délais et autres périodes qui sont difficiles ou impossibles à respecter en raison de la COVID-19.
Mes observations portent sur la partie 1 du projet de loi, qui concerne la Subvention salariale d’urgence du Canada. Le projet de loi apporte trois changements au programme. Primo, il modifie la Loi de l’impôt sur le revenu afin de réviser les critères d’admissibilité à la Subvention salariale d’urgence du Canada. Secundo, il prolonge également le programme de subvention salariale jusqu’au 21 novembre 2020, ce qui est assorti d’une possibilité de prolongation par règlement jusqu’au 31 décembre 2020. Tertio, il modifie le calcul de la subvention salariale pour la cinquième période d’admissibilité ainsi que celles qui suivent.
Honorables sénateurs, comme vous le savez, le Comité des finances a tenu des audiences au printemps et au début de l’été sur la réponse du gouvernement à la pandémie de COVID-19 et ses effets économiques. Notre rapport a été publié au début du mois.
Au cours des audiences, de nombreux témoins ont indiqué qu’ils étaient reconnaissants du soutien du gouvernement, mais ils ont également dit que de nombreuses entreprises et personnes dans le besoin ne sont pas admissibles à l’aide offerte par les programmes actuels liés à la COVID-19. Le programme de la Subvention salariale d’urgence du Canada, qui est l’objet du projet de loi, est l’un d’entre eux. Cependant, il y a d’autres programmes liés à la COVID-19 qui devraient être adaptés et j’aimerais les commenter brièvement avant de parler de celui de la subvention salariale.
Comme je l’ai déjà dit dans cette enceinte, lorsque nous étudions les projets de loi au Comité des finances, nous regardons ce qui est inclus, mais nous pensons aussi à ce qui ne l’est pas. Je m’attendais à voir quelques changements à l’Aide d’urgence du Canada pour le loyer commercial. Ce programme a été annoncé en avril dernier avec comme objectif de réduire de 75 % le loyer des petites entreprises locatrices pour les mois d’avril, mai et juin. Le programme a ensuite été prolongé jusqu’en juillet.
Les prêts-subventions de la Société canadienne d’hypothèques et de logement couvriraient 50 % des versements de loyer, le propriétaire en couvrirait 25 % et l’entreprise paierait les 25 % restants. À l’origine, le gouvernement a estimé que le programme coûterait 3 milliards de dollars. Cependant, en date du 17 juillet dernier, 42 000 entreprises employant 304 000 personnes avaient reçu une aide de 367 millions de dollars, bien en deçà des 3 milliards de dollars prévus pour le programme.
La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante avait ceci à dire à propos du l’Aide d’urgence du Canada pour le loyer commercial, et je cite : « Ce programme, bien que rempli de bonnes intentions, est un véritable fouillis. Il ne permet pas d’acheminer de l’aide ou de l’argent aux propriétaires d’entreprise qui en ont besoin. »
La fédération précise que les propriétaires d’immeubles sont dépassés par la quantité d’information financière demandée, la complexité des formulaires et les problèmes techniques du portail de demande. Elle souhaite aussi que le critère d’admissibilité exigeant une baisse de revenus d’au moins 70 % soit allégé. L’organisme considère que ce seuil est trop élevé.
En somme, la fédération a déclaré que le programme est trop compliqué, trop dépendant des propriétaires d’immeubles pour son administration, et que le seuil tout-ou-rien de 70 % pour la baisse des revenus admissible exclut de nombreuses entreprises qui ont cruellement besoin d’aide.
Le Comité des finances, dans son rapport sur la COVID-19 qui a été publié plus tôt ce mois-ci, a entendu des témoignages sur des préoccupations similaires et recommandé que le gouvernement envisage de modifier le programme pour le rendre plus accessible aux entreprises qui éprouvent des difficultés financières. Par conséquent, j’estime que le projet de loi C-20 est une occasion ratée. Le programme d’Aide d’urgence du Canada pour le loyer commercial aurait dû être modifié dans ce projet de loi.
Le projet de loi C-20 modifie la Subvention salariale d’urgence du Canada, mais beaucoup de personnes demandent aussi la modification de la Prestation canadienne d’urgence. Celle-ci fournit aux bénéficiaires un montant fixe de 2 000 $ par mois, ou de 500 $ par semaine, du 15 mars au 3 octobre. Elle permet aux bénéficiaires de gagner jusqu’à 1 000 $ par mois pendant qu’ils touchent leurs prestations.
La semaine dernière, le ministère des Finances a publié le neuvième rapport sur les mesures d’urgence du Canada contre la COVID-19. Selon ce rapport, en date du 16 juillet, 60 milliards de dollars en prestations ont été payés à un peu plus de 8 millions de bénéficiaires. Pendant les audiences du Comité des finances en mai et en juin, certains témoins ont dit qu’il faudrait songer à apporter des changements à la Prestation canadienne d’urgence. Beaucoup de gens disent qu’il faudrait l’ajuster et que le gouvernement devrait informer les Canadiens concernant l’avenir de cette mesure. Prendra-t-elle fin le 3 octobre ou sera-t-elle prolongée? Les critères d’admissibilité vont-ils changer? Beaucoup de personnes ont dit que la limite mensuelle de 1 000 $ pour les autres gains devrait être modifiée pour que les prestations diminuent graduellement au lieu de prendre fin lorsque les autres gains de la personne atteignent 1 000 $ par mois.
En outre, certaines provinces préviennent que la Prestation canadienne d’urgence pourrait entraver la reprise économique en dissuadant les gens de travailler. En effet, 27 % des entrepreneurs ayant répondu au sondage mené plus tôt ce mois-ci par la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante ont indiqué que, lorsqu’ils avaient rappelé au travail leurs employés, certains d’entre eux avaient refusé de revenir. Parmi ces employés, 62 % ont dit qu’ils préféraient continuer de recevoir la Prestation canadienne d’urgence.
Durant les audiences du Comité des finances, on a souvent posé des questions sur la transition des employés de la Prestation canadienne d’urgence au programme de subvention salariale. À mon avis, on aurait dû se servir du projet de loi C-20 pour moduler la Prestation canadienne d’urgence et fournir quelques renseignements aux Canadiens sur l’avenir de cette initiative.
Je passe maintenant au programme de subvention salariale, dont il est question à la partie 1 du projet de loi C-20. Au départ, ce programme avait été mis en place pour une période de 12 semaines allant du 12 mars au 6 juin; il offrait une subvention salariale de 75 % aux entreprises admissibles. Aux fins de l’administration du programme et du calcul de la subvention, chaque groupe de quatre semaines est considéré comme une période. Les douze premières semaines regroupaient donc les périodes un, deux et trois. Le 15 mai, le gouvernement a annoncé que le programme serait prolongé pour 12 autres semaines, du 7 juin au 29 août. Ces 12 semaines sont aussi divisées en périodes de quatre semaines chacune, soit les périodes quatre, cinq et six. Les critères d’admissibilité étaient les mêmes pour les périodes un, deux, trois et quatre, donc jusqu’au 4 juillet. Les entreprises qui avaient vu leurs revenus chuter de 15 % à la période un et de 30 % aux périodes deux, trois et quatre recevaient une subvention correspondant à 75 % du salaire des employés jusqu’à concurrence de 847 $ par employé par semaine. Pour calculer combien le gouvernement verserait pour chaque employé, on a supposé un salaire de base de 1 129 $ par semaine. C’est un chiffre important, qu’il faut garder à l’esprit quand on fait les calculs.
Cependant, les entreprises ont déclaré au gouvernement que le programme de subvention salariale soutiendrait davantage les entreprises si les critères étaient modifiés. Elles ont dit que le critère de baisse des revenus de 30 % avait un effet brutal. Si vous aviez une baisse de 30 % de vos revenus, vous aviez droit à la subvention; vous étiez couverts. Si par contre vos revenus diminuaient de 29 %, vous n’aviez pas droit à la subvention; vous étiez exclu. Pour elles, c’est du tout ou rien. De nombreuses entreprises ont proposé une subvention progressive. La subvention salariale diminuerait progressivement au fur et à mesure de l’augmentation des revenus. Cela correspondait bien aux témoignages entendus par le Comité des finances lors de ses audiences sur les programmes mis en place pour réagir à la crise de la COVID-19. En mettant en place le programme de subvention salariale, le gouvernement a d’abord estimé que celui-ci coûterait 71 milliards de dollars. Cependant, au 29 juin, l’Agence du revenu du Canada n’avait versé que 18 milliards de dollars sur les 71 milliards alloués. Le coût estimé du programme est maintenant de 83,6 milliards de dollars, comme l’a annoncé le 17 juillet le ministre des Finances. Je suppose que ce nouveau chiffre reflète les nouveaux critères prévus dans le projet de loi.
Le projet de loi C-20 présente les formules révisées — et je dis bien les, car le projet de loi en prévoit un certain nombre pour le programme de subvention salariale. Lorsque j’ai pris connaissance du projet de loi et que j’ai vu toutes les formules qui y figuraient, j’ai dû interrompre ma lecture. Lorsque le sénateur Gold a envoyé les informations de base sur le projet de loi C-20, il nous a fourni un lien vers le site Web du ministère des Finances, qui contient des informations plus détaillées sur les calculs du programme et nous aide à comprendre les chiffres.
À compter du 5 juillet, c’est-à-dire pour les périodes 5 et subséquentes, les employeurs dont la perte de revenus est de moins de 30 % seront admissibles à la subvention salariale. La nouvelle formule de calcul s’appliquera aux périodes 5, 6, 7, 8 et 9, qui s’échelonnent du 5 juillet au 21 novembre. Dans les faits, une formule différente sera employée pour chaque période de 4 semaines, de sorte que le montant de la subvention diminue avec le temps. Voici un exemple : pour une perte de revenus de 50 % ou plus, la subvention hebdomadaire maximale par employée est de 677 $ pour les périodes 5 et 6, de 565 $ pour la période 7, de 452 $ pour la période 8 et de 226 $ pour la période 9. Si la perte de revenus baisse sous la barre des 50 %, la subvention est calculée différemment. Pour les périodes 5 et 6, elle équivaut alors à 1,2 fois la perte essuyée multipliée par le salaire de base, qui est de 1 129 $. Pour les périodes subséquentes, seul le facteur de multiplication diminue. Pour la période 7, il est de 1 fois le salaire de base — 1 129 $ —, pour la période 8, de 0,8 fois le salaire de base, et pour la période 9, de 0,4 fois le salaire de base.
Ces formules servent à calculer la subvention de base. Il y a d’autres formules pour calculer le taux de subvention complémentaire destiné aux employeurs les plus durement touchés et qui ont enregistré une perte de revenus de 55 %, 60 %, 65 %, 70 % et plus. De plus, il y a une règle d’exonération selon laquelle, aux périodes 5 et 6, les employeurs qui auraient été en meilleure posture avec la formule des périodes 1 à 4 sont admissibles à un taux de subvention de 75 % s’ils ont enregistré une perte de revenus de 30 % ou plus.
Je vous présente toutes ces informations sur le calcul de la subvention de base, la subvention complémentaire et la règle d’exonération afin de montrer la complexité du programme.
Dan Kelly, président de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante, a déclaré lors d’un entretien accordé à Bloomberg que le programme est positif, dans la mesure où il appuie plus d’employeurs et plus d’entreprises, mais il a ajouté : « Il s’agit d’un programme très, très embrouillé. » Il a insisté en disant « très, très embrouillé ». Les calculs demandent beaucoup d’efforts. « Ce n’est pas une tâche facile. » C’est ce que j’ai constaté au cours des quatre derniers jours.
Dans le rapport qu’il a présenté ce mois-ci sur la COVID-19, le Comité sénatorial des finances recommande au gouvernement d’envisager l’adoption d’un seuil d’admissibilité progressif, ou variable, pour la Subvention salariale d’urgence du Canada, et de prolonger cette dernière pour les secteurs particulièrement touchés. C’est ce que le projet de loi tente de faire, mais c’est compliqué. Je pense qu’il aidera les entreprises parce qu’il étend l’accès au soutien financier à plus d’employeurs. Je peux cependant vous dire que si le secteur de la comptabilité souffre en raison de la pandémie, ce programme lui sera d’une grande assistance, car les comptables devront non seulement calculer le montant de la subvention, mais ils devront aussi aider les propriétaires d’entreprises à obtenir toutes les informations dont ils auront besoin pour calculer la subvention.
Cela dit, je m’attends à ce que de plus amples changements soient apportés au programme, et il en va de même pour d’autres programmes, comme la Prestation canadienne d’urgence et l’Aide d’urgence du Canada pour le loyer commercial.
Honorables sénateurs, c’est ce qui conclut mon intervention. Merci beaucoup.
Honorables sénateurs, je me joins à mes collègues pour participer au débat de cet après-midi sur le projet de loi C-20. Je remercie ma collègue la sénatrice Moncion de son exposé et de ses excellentes réponses aux questions qui ont été posées au Sénat aujourd’hui.
J’appuie ce projet de loi ainsi que la décision d’offrir un paiement unique aux personnes handicapées pour des raisons liées à la COVID-19. J’estime également que les modifications à certaines lois visant à assouplir les échéances en raison de la pandémie sont nécessaires.
De plus, le projet de loi C-20 comprend des modifications majeures à la Subvention salariale d’urgence du Canada, programme qui devait d’abord s’étendre du mois de mars au mois de juin et qui offrait une subvention salariale de 75 % à certains employeurs. Selon les modifications à cette subvention qui sont à l’étude aujourd’hui, on éliminerait le seuil qui avait été établi pour les pertes de revenu, on adapterait la subvention en fonction des pertes de revenu réelles, on prolongerait le programme jusqu’en décembre 2020, et on augmenterait les prestations pour les entreprises durement touchées.
Selon ce projet de loi, on éliminerait le seuil de 30 % au chapitre des pertes de revenu donnant droit à la subvention, et on mettrait en place un mécanisme progressif pour calculer la subvention salariale en fonction du pourcentage des pertes de revenu. Évidemment, c’est une approche très logique, et je me demande pourquoi ce mécanisme n’a pas été inclus dans le programme dès le début. Il me semble très logique de procéder ainsi, et il est quelque peu étonnant qu’on ait attendu aussi longtemps avant d’apporter ce changement. Quoi qu’il en soit, le changement est maintenant proposé.
Le programme révisé prévoit également une reprise progressive des activités économiques : comme on s’attend à ce que les revenus augmentent, les montants de la subvention diminueront au fil du temps.
Passons à la deuxième modification incluse dans cette mesure législative. Le programme sera prolongé jusqu’en décembre 2020, soit quatre mois complets supplémentaires par rapport à la fin initialement prévue en août. Mettre fin trop tôt à la subvention pourrait très bien annuler toutes les retombées des investissements que le gouvernement fédéral a faits dans l’économie jusqu’à maintenant. La durée prolongée du programme et sa suppression graduelle devraient réduire les pressions financières subies par les entreprises alors que les montants reçus diminueront peu à peu.
Enfin, la mesure législative inclut un pourcentage compensatoire pour les entreprises qui sont les plus touchées par la pandémie. Les entreprises qui ont enregistré une forte baisse de revenu auront droit à une subvention salariale supplémentaire égale à un pourcentage des pertes subies. Ces entités les plus durement touchées par le confinement pourront recevoir une subvention de 85 % à court terme, un montant total qui sera réduit peu à peu, selon l’augmentation des revenus et la fin graduelle du programme jusqu’en décembre 2020.
Sénateurs, j’ai fait toute ma carrière dans le secteur privé. Je comprends ce que c’est que de vivre dans l’incertitude. Quand on dirige une entreprise, on peut avoir des revenus importants un jour et être quand même en faillite dans les 12 mois suivants, ou on peut avoir des revenus moyens un jour et se retrouver en faillite six mois plus tard. Voilà ce que c’est que de gérer une entreprise et de fonctionner dans un environnement concurrentiel. C’est particulièrement vrai pour les petites et moyennes entreprises.
Cependant, je dois aussi reconnaître que, durant ma carrière à la barre d’une entreprise privée, je n’ai jamais rien vécu de comparable à ce que vivent les entrepreneurs aujourd’hui. Le travail de toute une vie peut disparaître en quelques semaines ou quelques mois sans qu’ils n’y soient pour quoi que ce soit.
C’est pourquoi nous devons soutenir nos entreprises pour qu’elles continuent à fonctionner, pour qu’elles gardent leurs employés sur leurs listes de paie et pour qu’elles se maintiennent à flot. Leur sentiment de vulnérabilité restera, dans cet environnement instable, mais au moins les emplois et les entreprises seront sauvés.
Le coût substantiel de ce programme, qui donne à réfléchir — près de 84 milliards de dollars —, nous rappelle l’ampleur des pertes. N’oublions pas non plus que 5,5 millions de travailleurs canadiens ont été touchés par la pandémie entre février et avril. Trois millions d’emplois ont été perdus et 2,5 millions de Canadiens ont vu leurs heures de travail être réduites.
Alors même que nous aidons les Canadiens et commençons à rebâtir, les faits nous rappellent constamment que la pandémie est une crise tant économique que sanitaire.
J’aimerais maintenant exprimer quelques réflexions à l’égard de cette crise sanitaire. Depuis cinq mois, les Canadiens ont su se débrouiller pour traverser le pire de la pandémie. Les gens pratiquent la distanciation physique. Ils ont renoncé à voir parents et amis, ont retiré leurs enfants de l’école et de la garderie, ont abandonné leur lieu de travail pour travailler de la maison, et j’en passe.
Le gouvernement fédéral fournit un soutien financier massif et les provinces relèvent le défi de gérer les soins de santé, l’éducation et la main-d’œuvre en temps de crise.
Nous avons beaucoup appris. Dans son étude de la réponse fédérale à la COVID-19, le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, dont je suis membre, a appris que les aînés, les travailleurs de la santé, les travailleurs essentiels de première ligne et les personnes ayant des problèmes de santé mentale sont particulièrement vulnérables depuis le début de la pandémie.
En particulier, la pandémie expose au grand jour les énormes lacunes de notre secteur des soins de longue durée. Par exemple, de nombreux établissements de soins de longue durée n’ont pas la capacité voulue pour isoler les patients malades ou permettre la distanciation physique. Résultat : beaucoup de résidents sont décédés, ce qui nous indique clairement que nous devons intervenir.
Au comité, nous avons aussi appris que le Canada n’est pas bien préparé pour une deuxième vague d’infections, et qu’il faut améliorer les tests diagnostiques et la recherche des contacts, si nous voulons contenir l’augmentation des nouveaux cas. Nous avons également appris que le gouvernement fédéral aura besoin de plus de données — oui, de données plus détaillées — pour guider l’élaboration de politiques fondées sur des données probantes. Bon nombre de témoins au comité ont réclamé que le gouvernement fédéral prenne plus de mesures et qu’il fasse preuve de davantage de leadership.
C’est sans doute en réponse à ces préoccupations que le gouvernement fédéral a récemment prévu des fonds d’urgence pour les provinces dans le Cadre de relance sécuritaire, dont il a fait l’annonce le 16 juillet. D’après le peu d’information que j’ai lu dans les médias et dans un court communiqué, nous savons que 19 milliards de dollars seront versés aux provinces et aux municipalités pour accroître la capacité de dépistage du virus et de recherche des contacts, renforcer la capacité des systèmes de soins de santé, faciliter l’achat d’équipement de protection individuelle, aider les aînés et d’autres groupes vulnérables, de même que contribuer à l’offre de services de garde et d’autres activités.
Si la ministre était venue au comité plénier aujourd’hui — je dois dire que je suis vraiment déçue que nous ne nous soyons pas réunis en comité plénier aujourd’hui pour interroger la ministre et d’autres ministres —, j’aurais posé des questions au sujet du Cadre de relance sécuritaire, car il ne semble pas possible d’avoir des précisions à son sujet. J’aurais demandé si le financement promis est lié à des résultats précis dans certains secteurs et si les ententes nécessitent la collecte de données et de renseignements et leur communication entre les ministères et organismes fédéraux et provinciaux.
Le manque de données et de renseignements n’est pas un problème propre au secteur des soins de longue durée, mais il y est particulièrement criant compte tenu des nombreux appels à une action du fédéral dans ce secteur. Nous devons comprendre quels facteurs ont un effet sur les résultats, ce qui implique de recueillir des données dans l’ensemble du secteur : les niveaux de dotation, les compétences du personnel, la composition démographique et l’état de santé des résidents, la quantité de soins informels prodigués par les familles, les soins supplémentaires obtenus dans le secteur privé, les visites à l’hôpital, etc. Ces renseignements ne doivent pas rester dans les établissements, comme c’est souvent le cas aujourd’hui dans de nombreuses provinces. Ils doivent être mis en commun par les autorités sanitaires afin d’éclairer les efforts visant à comparer les soins de longue durée entre les régions, les provinces et le pays, et de faciliter l’élaboration de politiques et l’amélioration du cadre réglementaire.
Les témoins qui ont comparu devant le comité ont exhorté le gouvernement fédéral à subordonner le financement à des améliorations réelles dans des secteurs précis, sans quoi les fonds fédéraux seront facilement affectés à d’autres fins. Nous avons entendu cet argument à maintes reprises et nous devons voir à ce que cette formule soit retenue.
Ces dernières semaines, nous avons constaté une augmentation des cas de COVID, ce qui coïncide avec la réouverture de l’économie dans de nombreuses provinces.
Par ailleurs, les Canadiens sont de plus en plus préoccupés à l’égard de la COVID.
Un nouveau sondage réalisé par la société Léger Marketing révèle que les niveaux d’inquiétude et de crainte de contracter le virus, au sein du public, ont récemment augmenté; ces préoccupations sont revenues au même niveau que celui enregistré en avril.
Les Canadiens s’attendent à ce que nous ayons tiré les leçons des erreurs et des réussites des derniers mois sur le plan stratégique, que nous comprenions mieux les problèmes aujourd’hui et que nous puissions faire face à une deuxième vague, le cas échéant, avec efficacité et assurance.
J’estime que le projet de loi C-20 est une mesure judicieuse basée sur les leçons tirées et qu’elle est bien adaptée à la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui. Je vous remercie beaucoup.
J’ai de très brefs commentaires à faire à ce sujet, car nous avons eu beaucoup d’informations sur le projet de loi C-20, Loi concernant des mesures supplémentaires liées à la COVID-19.
La Subvention salariale d’urgence du Canada s’est révélée être une bouée de sauvetage vitale pour les entreprises canadiennes contraintes de cesser leurs activités en conséquence directe de la pandémie. Toutefois, la subvention initiale était assortie de critères d’admissibilité très stricts, comme l’a expliqué la sénatrice Marshall. Les sociétés, dont de nombreuses PME, devaient prouver que leurs revenus avaient diminué de plus de 30 % en raison de la pandémie. Les entreprises dont les revenus avaient diminué de 29 % ou moins étaient automatiquement jugées non admissibles par le gouvernement et perdaient la subvention salariale de 75 %.
En réponse à ma question sur les entreprises qui doivent offrir plus que la Prestation canadienne d’urgence pour faire revenir les employés, Carla Qualtrough, ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et de l’Inclusion des personnes handicapées, a déclaré en mai en comité plénier :
Nous nous attaquons à ce problème en prenant diverses mesures concrètes. À mon avis, la subvention salariale de 75 % est la plus importante, car les gens retournent travailler et cessent de recevoir la Prestation canadienne d’urgence. C’est certainement ce que nous voulons. Dans mon monde idéal, tous les travailleurs admissibles à la subvention salariale s’en prévaudraient.
Si le programme a permis d’aider des entreprises touchées, bien d’autres n’ont pu obtenir d’aide parce que leurs revenus n’avaient pas baissé de plus de 30 %. Plusieurs mois après la mise en œuvre de la Subvention salariale d’urgence du Canada, le Comité sénatorial permanent des finances nationales s’est fait dire à de nombreuses reprises que ce seuil posait problème.
Cette subvention dissuadait les entreprises dont les revenus ont diminué de moins de 30 % de garder leurs employés. Il était plus logique pour elles sur le plan financier de mettre temporairement à pied leurs employés, qui allaient demander la Prestation canadienne d’urgence, et de reprendre leurs activités lorsque les revenus reviendraient à leur niveau d’avant la pandémie. J’ai un exemple dans le domaine de la restauration. Mon fils avait deux restaurants qui marchaient très bien à Toronto. Il a dû les fermer. Tout le monde a demandé la Prestation canadienne d’urgence. Quinze de ses employés lui ont dit que s’il voulait qu’ils reviennent, il devrait les payer comptant, ce qui est plutôt intéressant.
Pour les restaurants situés dans de grands centres commerciaux comme celui où le sien se trouvait, avec 16 autres restaurants, quel sera le grand changement? Le grand changement résidera dans la distanciation sociale. Comment faire entrer 1 100 personnes dans un établissement en ne pouvant en accueillir que 300? Comment dégager des marges quand on est dans l’industrie alimentaire? Espérons que le gouvernement examinera des cas par secteur, en plus d’un plan global, pour pouvoir aider les entreprises des divers secteurs afin que certains ne s’effondrent pas complètement.
Dans son rapport sur la réaction du gouvernement à la pandémie de la COVID-19, publié le 14 juillet, le Comité des finances a indiqué que les seuils fixés pour toucher la Subvention salariale d’urgence du Canada étaient trop élevés, ce qui explique la faible participation au programme. Il a donc recommandé :
Que le gouvernement du Canada envisage l’adoption d’un seuil d’admissibilité progressif, ou variable, pour la Subvention salariale d’urgence du Canada, et que la subvention soit prolongée pour les secteurs les plus durement touchés.
Il se penchera donc sur d’autres secteurs qui auront besoin d’une aide continue.
Ce qui est vraiment intéressant — sénatrice Marshall, vous avez fait un excellent travail, mais j’ai été déconcerté dès le départ non pas par vous, mais par ce que mon personnel m’a fourni —, c’est qu’il y aura un nouveau taux de base et qu’il variera selon la baisse des revenus des entreprises. Les employeurs dont la baisse de revenus se situe entre 0 et 49 % doivent la multiplier par un facteur de 1,2 pour les périodes 5 et 6, un facteur de 1 pour la période 7, un facteur de 0,8 pour la période 8 et ainsi de suite afin de calculer le pourcentage de la subvention maximale de 1 129 $ auquel ils seraient admissibles.
Bien des petits entrepreneurs n’ont pas les capacités techniques ou l’argent nécessaires pour effectuer de tels calculs en raison de leur complexité.
Les calculs sont encore plus complexes pour les entreprises dont la baisse de revenus est supérieure à 50 %. Ces entreprises recevront 60 % du maximum de 1 129 $ par employé pour les périodes 5 et 6, 50 % pour la période 7, 40 % pour la période 8 et ainsi de suite.
Par ailleurs, selon Finances Canada :
Les employeurs qui ont connu une perte moyenne de leurs revenus sur trois mois de plus de 50 % recevraient un taux de SSUC complémentaire égal à 1,25 fois la perte moyenne des revenus qui dépasse 50 %, jusqu’à concurrence d’un taux de SSUC complémentaire maximal de 25 %, qui est atteint lors d’une perte de 70 % des revenus.
J’ai mal à la tête à force d’essayer de comprendre cette phrase.
Bien sûr, comme la sénatrice Marshall l’a dit, Dan Kelly, le président de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante, a souligné que son organisation a été inondée de milliers d’appels téléphoniques de propriétaires d’entreprises au sujet des changements proposés et a fait la déclaration suivante concernant la nouvelle Subvention salariale d’urgence du Canada : « [...] il faudra très rapidement clarifier ces nouvelles modalités, car pour le moment, elles semblent complexes. Les propriétaires de PME auront besoin d’un soutien important pour savoir s’ils pourront demander à bénéficier du programme et de combien seront les montants qu’ils percevront. »
Donc, quel que soit le sens que cela puisse avoir pour quelqu’un comme moi — et je pense que je comprends le monde des affaires —, je ne suis pas comptable, je suis responsable du marketing.
Chers collègues, en cette période où les entreprises canadiennes éprouvent des difficultés financières généralisées et où beaucoup d’entre elles sont au bord de la faillite, il est injuste de leur imposer des frais administratifs excessifs. Je crains que ces règles complexes ne créent de l’incertitude concernant l’admissibilité et n’ajoutent des coûts supplémentaires que les employeurs ne peuvent tout simplement pas absorber à l’heure actuelle.
Bien que cette modification était nécessaire en vue d’élargir le filet de sécurité pour les entreprises ayant des difficultés financières, j’invite le gouvernement à poursuivre ses efforts pour simplifier la Subvention salariale d’urgence du Canada, en consultation avec les groupes d’intervenants, ce qui, autrement dit, signifie de déterminer des catégories de secteurs commerciaux et de faire en sorte que ce programme procure les meilleurs résultats possible pour les Canadiens. Par exemple, je crois savoir que les restaurants au Canada emploient approximativement 850 000 personnes. C’est un important secteur. Si un entrepreneur pense que la distanciation sociale est un facteur qui affectera les niveaux d’activités de son entreprise, c’est bien qu’il puisse s’en remettre aux mets à emporter et essayer d’autres options, ce qui est vrai. Toutefois, pour qu’un restaurant soit rentable, vous devez avoir de hauts niveaux d’activité, surtout si vous vendez des repas, parce que les profits proviennent principalement de la vente de boissons alcoolisées. De nombreux restaurants offrent seulement de la nourriture, par exemple, sous la formule « apportez votre vin » et d’autres variantes. Donc, il y a des catégories où les possibilités sont énormes, mais d’autres catégories doivent être examinées plus attentivement si on veut conserver les emplois dans les restaurants d’un bout à l’autre du Canada.
Souhaitons-nous bonne chance. C’est un premier pas dans la bonne direction. Attendons de voir où cela nous mènera. Merci.
Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi C-20, qui comporte évidemment trois éléments importants. Le premier est le versement de paiements aux Canadiens handicapés afin de les aider pour certaines des dépenses supplémentaires liées à la crise. Je tiens à remercier les sénateurs Petitclerc et Munson de leurs interventions. C’est certainement une aide utile. Or, cela me semble très peu, mais c’est un début.
Le projet de loi offre également une certaine souplesse au gouvernement pour prolonger les délais et autres périodes qui sont prévus sous le régime des lois fédérales et permet en quelque sorte aux personnes concernées de traverser la crise sans se heurter à des délais et à des dates arbitraires.
Aujourd’hui, mes commentaires porteront sur le troisième élément, à savoir la prolongation de la Subvention salariale d’urgence du Canada et les modifications qui sont apportées à cette subvention.
Je tiens à féliciter le gouvernement du travail qu’il a fait dans le cadre du projet de loi. J’ai peine à y croire. Le fait est que nous avons de nombreuses occasions de le critiquer, mais je pense que c’est une étape importante et je félicite le gouvernement de l’avoir réalisée. Je le félicite également d’avoir non seulement mené des consultations, mais d’avoir véritablement écouté les divers organismes, les associations d’entreprises et notre propre comité sénatorial qui a entendu des témoignages, et d’avoir amélioré le programme.
Il est effectivement un peu plus compliqué de faire le calcul dans le cadre du programme prolongé, mais peut-être pas autant que certains le croient parce qu’il n’est pas nécessaire de tout comprendre. Ce qu’il faut faire, c’est déterminer les revenus qu’on a perdus. Chaque mois, on détermine un chiffre, et il faut présenter une demande tous les mois. Ainsi, on détermine les revenus qu’on a perdus, puis, quand vient le temps de faire les calculs, tout ce qu’il faut faire, c’est trouver où il faut entrer ce chiffre pour ensuite appliquer les formules.
Je crois que ce processus mettra à l’épreuve certaines personnes qui ne disposent pas de beaucoup de ressources de comptabilité au sein de leur organisation. À cet égard, il permettra aux cabinets comptable et aux entreprises de consultation en affaires de garnir leurs coffres, mais j’ai une grande confiance dans les entrepreneurs et leur capacité à compter et à calculer. Même si le programme est plus compliqué, je crois qu’il vise les bons employeurs au bon moment.
Ce sont les PME qui nous sortiront de la récession. Je tiens à rendre hommage aux entrepreneurs du pays, qui sont l’épine dorsale de l’économie. À mon avis, les entreprises solides reposent sur quatre piliers simples : les gens, la stratégie, l’exécution et les liquidités. Chacun de ces piliers est essentiel à la réussite à long terme d’une entreprise.
La pandémie et son arrivée ont entraîné des changements subits et radicaux pour les entreprises. Les gens qualifient souvent la période actuelle de « sans précédent ». Ce « sans précédent » s’applique particulièrement, selon moi, aux entrepreneurs qui se sont réveillés un bon matin pour se rendre compte que leur entreprise était complètement chamboulée. Ils devaient encore s’occuper de différentes personnes, dont leur famille, leurs employés et leurs clients. Ils se demandaient soudainement si leurs clients pourraient payer la facture qu’ils leur avaient envoyée. Il y avait beaucoup d’éléments, tout est arrivé très vite, et les entreprises ont dû réagir. Elles ont dû mettre en œuvre un plan de survie à court terme qui supposait de conserver leurs liquidités et leurs principaux employés et de repenser leur stratégie.
C’était un plan de survie, la première chose dont les entreprises devaient s’occuper, et ce, sans tarder. La plupart d’entre elles — presque toutes, en fait — n’avaient pas de plan d’urgence pour ce genre de situation.
Fait intéressant, j’ai parlé avec des cadres supérieurs et des dirigeants de certaines des plus importantes entreprises canadiennes, et ils m’ont dit que la pandémie ne figurait pas dans leur matrice d’évaluation des risques. On peut donc pardonner aux plombiers, aux vendeurs d’assurance et aux spécialistes des sondages de ne pas avoir eu de plan en prévision d’une telle situation. Les principales entreprises canadiennes elles-mêmes n’en avaient pas.
L’époque où l’on tentait de déterminer comment survivre à la situation à court terme et où l’on faisait tout ce qui était nécessaire pour y arriver — comme parler à notre propriétaire d’immeuble et à notre banque, congédier des employés, conserver les employés les plus essentiels afin d’être prêt pour la réouverture de l’économie, recommencer à faire un peu d’affaires ici et là, commercialiser de nouveaux produits ou trouver de nouvelles façons de générer des revenus — est essentiellement terminée. Ces mesures ont déjà toutes été prises et mises à exécution.
Les entreprises d’un bout à l’autre du Canada se préparent maintenant pour 2021 et au-delà. J’imagine qu’elles ont adopté de nouvelles stratégies et élaborent des plans qui en tiennent compte. Des intervenants clés se sont penchés sur la manière de permettre aux entreprises d’avoir assez d’argent pour mettre en œuvre leurs plans tout en continuant de payer leurs employés et de mettre au point leurs stratégies. Le projet de loi dont nous sommes saisis leur donne le soutien dont elles ont besoin pour garder le cap jusqu’en 2021.
J’ai entendu certains experts — dont la plupart, étonnamment, n’ont pas gagné le moindre sou dans le monde des affaires — dire à la télévision que la pandémie changera tout, que le monde dans lequel on vit sera complètement différent à partir de maintenant, que les choses ne seront plus jamais les mêmes. C’est peut-être le cas, mais j’en doute.
Cependant, je suis certain que la crise économique qui découle de cette pandémie a mis en lumière beaucoup de points faibles de l’économie canadienne, mais aussi de nombreux débouchés. Or, c’est dans un environnement où existent à la fois des points faibles et des débouchés que les entrepreneurs prospèrent. Après avoir considéré les points faibles et les débouchés, les entrepreneurs passent à l’action.
Ainsi, honorables sénateurs, je pense que les entrepreneurs canadiens de tous les âges, qui exploitent des entreprises de toutes les tailles, trouveront le moyen de prospérer et de redonner la prospérité à l’ensemble de l’économie canadienne, en 2021 et au-delà. Ce projet de loi y contribuera, et il mérite que nous l’appuyions.
Honorables sénateurs, cela ne devrait surprendre personne que je ne fasse pas écho aux observations du sénateur Tannas, qui a loué le projet de loi. Cependant, je suis heureux de prendre la parole et de participer au débat.
Je donnerai évidemment mon opinion sur le contenu du projet de loi, mais c’est aussi une bonne occasion d’évaluer les mesures prises jusqu’ici dans la lutte contre la COVID-19 et ses répercussions économiques.
Le sénateur Munson a évoqué le temps que cela a pris. Chers collègues, il y a sept semaines, le 10 juin, le gouvernement a présenté le projet de loi C-17 à la Chambre des communes. Ce projet de loi prévoyait quatre mesures : premièrement, des modifications à la Subvention salariale d’urgence du Canada; deuxièmement, l’adoption de la Loi sur les délais et autres périodes; troisièmement, l’autorisation donnée à l’Agence du revenu du Canada de partager des informations avec d’autres ministères afin de faciliter le versement du paiement unique aux personnes handicapées; quatrièmement, des modifications à la Loi sur la prestation canadienne d’urgence.
Tous ces changements étaient des étapes nécessaires pour aider les employés et les propriétaires d’entreprises canadiens à se remettre de la pandémie. Toutefois, l’opposition conservatrice a souligné à l’époque que cette mesure législative présentait de graves lacunes.
Tout d’abord, bien que le projet de loi propose quelques améliorations au programme de Subvention salariale d’urgence du Canada, il évite complètement d’autres changements qui sont absolument nécessaires. Depuis un mois, des propriétaires d’entreprises et des économistes frappent à la porte du chalet du premier ministre — ou comme certains sénateurs aiment l’appeler, son bungalow — pour essayer de lui faire comprendre que le programme présente de graves inconvénients. Au lieu d’écouter leurs conseils, il a décidé de faire quelques retouches ici et là tout en fermant les yeux sur les lacunes les plus importantes.
Le deuxième problème avec le projet de loi C-17, c’est que des centaines de milliers de personnes n’auraient pas eu droit au paiement forfaitaire qui leur était pourtant destiné.
Au pays, de nombreuses personnes handicapées qui ont un très faible revenu ou qui n’en ont pas du tout n’ont pas droit au crédit d’impôt pour personnes handicapées et ne recevront donc pas le montant prévu. C’est sans parler de celles qui touchent des prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada, du Régime de rentes du Québec ou du ministère des Anciens Combattants. Tous ces gens se seraient retrouvés les mains vides si nous avions adopté le projet de loi C-17.
Au lieu de simplement faire comme le gouvernement le lui demandait et d’approuver les yeux fermés un texte bourré de défauts, Andrew Scheer a demandé que l’on prenne quelques jours de plus pour en débattre et le corriger. Les conservateurs, on se le rappelle, ont eu l’appui du Bloc et du NPD. Le gouvernement a refusé net. Apparemment, c’était trop demander aux libéraux de venir travailler deux jours de suite. Ils ont décidé d’agir comme si le Parlement n’était rien d’autre qu’une nuisance et de gouverner seuls, même s’ils sont minoritaires.
Le lendemain, le premier ministre avait rencontré ses conseillers en communications et préparé sa réplique officielle. Il a pris la parole devant Rideau Cottage, où il a fait le discours suivant d’une voix hésitante qu’il espérait sans doute sincère :
Je veux que les personnes en situation de handicap et celles qui s’occupent d’une personne handicapée sachent ce qui suit.
On n’abandonnera pas.
On ne va pas vous laisser pour compte.
Et on va continuer de travailler pour vous apporter le soutien que vous méritez et dont vous avez besoin.
Apparemment, il n’était pas question de rester au bureau un ou deux jours de plus afin de « travailler pour vous apporter le soutien que vous méritez et dont vous avez besoin ». Il n’était pas question de collaborer avec les autres partis pour mener la tâche à bien. Il n’était pas question d’être sincère au sujet du fait que le gouvernement reprendrait ses billes et s’en irait s’il n’obtenait pas ce qu’il voulait. Or, chers collègues, c’est exactement ce qui s’est produit. Le 10 juin, le premier ministre a pris son projet de loi et s’en est allé chez lui parce qu’il n’avait pas envie de laisser le Parlement faire son travail correctement.
Aujourd’hui, chers collègues, nous sommes le 27 juillet, soit six semaines plus tard, et nous sommes enfin saisis d’un projet de loi qui apporte les changements nécessaires à la Subvention salariale d’urgence du Canada et élargit l’admissibilité au paiement de 600 $ afin d’aider plus de Canadiens handicapés.
Le 19 mai, le ministre de la Justice a écrit aux porte-parole des trois partis de l’opposition de la Chambre au sujet de la Loi sur les délais et autres périodes. Je le cite :
Il est important d’agir, à la fois pour protéger les droits des Canadiens et faire en sorte qu’ils n’aient pas à choisir entre protéger leur santé et respecter des délais rigides.
Pourquoi le gouvernement a-t-il décidé d’attendre deux mois avant de faire adopter ces changements? Mystère. Je vous rappelle que personne ne s’oppose à ces mesures. Le projet de loi C-20 est loin d’être parfait, mais c’est une amélioration par rapport au projet de loi C-17. Il laisse encore de côté environ un million de Canadiens handicapés et il va quand même permettre de verser le paiement non imposable à des personnes riches qui n’en ont pas besoin, mais, au moins, après avoir eu sept semaines pour y penser, le premier ministre s’est rendu compte qu’il y a des anciens combattants handicapés au Canada qui devraient aussi y avoir droit.
Malheureusement, par contre, parce qu’il a tergiversé si longtemps, il faudra maintenant plus de deux mois avant que ce paiement soit versé aux personnes handicapées. C’est plus de six mois après le début de la pandémie. Le gouvernement n’a pas trop parlé de ce délai, mais la preuve est bien cachée dans l’article 10 de la partie 2 du projet de loi, qui dit :
Toute somme à payer par le ministre de l’Emploi et du Développement social relativement à la mise en œuvre d’un programme prévoyant le versement d’un paiement unique aux personnes handicapées pour des raisons liées à la maladie à coronavirus 2019 (COVID-19), notamment les frais administratifs, est prélevée sur le Trésor.
Le projet de loi C-17, présenté le 10 juin, visait à verser les prestations en vertu de la Loi sur les paiements relatifs aux événements de santé publique d’intérêt national. Or, ce pouvoir de dépenser a soudainement été modifié et intégré directement dans le projet de loi C-20.
Lorsque mon bureau a demandé pourquoi ce changement était nécessaire, on m’a répondu que les demandes au titre du paiement unique aux personnes handicapées :
[...] n’auront pas fini d’être traitées d’ici l’abrogation, le 30 septembre, de la Loi sur les paiements relatifs aux événements de santé publique d’intérêt national. Par conséquent, le projet de loi C-20 contient une disposition qui autorise l’accès à des fonds du Trésor.
Chers collègues, la Loi sur les paiements relatifs aux événements de santé publique d’intérêt national devrait être automatiquement abrogée le 30 septembre, mais comme le premier ministre a décidé de rentrer chez lui au lieu de rester au bureau pour finir le travail, les demandes au titre du paiement unique aux personnes handicapées n’auront pas fini d’être traitées d’ici là.
La situation est inquiétante. Six cents dollars ne semblent peut-être pas beaucoup pour le ministre des Finances, qui a mis deux ans à se rendre compte qu’il avait 41 000 $ de plus qui traînaient dans ses poches, mais pour de nombreux Canadiens handicapés, cette prestation est essentielle. Celle-ci a été annoncée par le gouvernement le 5 juin, mais quatre mois plus tard, certaines personnes handicapées attendront toujours leur chèque.
Chers collègues, si vous avez du mal à comprendre pourquoi le gouvernement a mis sept semaines à adopter ce projet de loi alors qu’il aurait pu le faire en deux ou trois jours, vous n’êtes pas les seuls. D’une part, le premier ministre prétend travailler pour apporter aux Canadiens l’aide dont ils ont besoin et qu’ils méritent, mais, d’autre part, il a décidé de prendre un congé personnel lundi dernier plutôt que de se présenter au travail lorsque le projet de loi a été présenté. D’une part, le gouvernement veut donner aux Canadiens l’impression qu’il ne laissera personne pour compte, mais, d’autre part, il doit insérer des dispositions dans presque tous les projets de loi qui portent sur la COVID afin de permettre une mise en œuvre rétroactive de la politique parce qu’il n’arrive pas à organiser les mesures à temps.
Le gouvernement fait constamment des annonces sans avoir la moindre idée de la façon dont il réalisera ses promesses. Les particuliers et les propriétaires d’entreprise doivent se débrouiller pour comprendre ce qu’ils doivent faire afin de recevoir l’aide qui a été annoncée.
La semaine dernière, la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante a publié une déclaration au sujet des modifications à la Subvention salariale d’urgence du Canada prévues dans le projet de loi. Elle dit ceci :
[...] il faudra très rapidement clarifier ces nouvelles modalités, car pour le moment, elles semblent complexes. Les propriétaires de PME auront besoin d’un soutien important pour savoir s’ils pourront demander à bénéficier du programme et de combien seront les montants qu’ils percevront.
Le programme de subvention salariale est mal géré depuis le début.
Chers collègues, vous vous rappellerez que, au début, la subvention correspondait à 10 % du salaire d’un employé. Le 25 mars dernier, lorsque le ministre Morneau a comparu devant le comité plénier, je lui ai demandé pourquoi la subvention n’était que de 10 %. Je lui ai donné des exemples de ce qui se faisait ailleurs. J’ai parlé expressément du Danemark, où la subvention salariale correspond à 75 % du salaire d’un employé. Voici ce que le ministre Morneau a répondu, ce qui montre l’arrogance tellement typique du gouvernement :
[...] si vous regardez les mesures mises en place au Danemark, vous conclurez, je crois, que celles du Canada sont supérieures. Au Danemark, seules les entreprises dont les revenus chutent considérablement auront accès aux subventions salariales.
Il a ajouté :
Si vous faites les calculs — comme cela se fera sûrement dans les prochains jours —, vous constaterez, comme les petites entreprises, que cette mesure procure un soutien considérable aux petites entreprises.
Devinez quoi? C’est le ministre qui a fait les calculs. Il a constaté que son programme n’attirerait personne, et deux jours plus tard, il a annoncé une nouvelle subvention salariale améliorée au même taux de 75 % que le Danemark et assortie des mêmes critères de baisse des revenus. Ce fut le premier signe de l’incapacité du gouvernement libéral à élaborer et à mettre en œuvre des solutions pratiques pour les entreprises canadiennes pendant cette pandémie.
Le gouvernement libéral a attendu encore et encore avant de dévoiler la subvention salariale et de la mettre en œuvre. Les entreprises, surtout les petites, n’ont pas pu attendre que le ministre Morneau et ses fonctionnaires fassent les calculs. Elles ont mis à pied leurs employés, qui se sont tournés vers la PCU, ce qui a réduit les chances de pouvoir les réembaucher.
C’est pourquoi, si on examine les projections de coûts pour la PCU et la subvention salariale par rapport à la réalité, on constate que le gouvernement a raté la cible. Justin Trudeau et son équipe pensaient que la subvention salariale serait l’outil utilisé par les entreprises, mais en raison de leur incompétence, ils ont poussé les gens à se tourner vers la PCU. Cette situation a créé de graves distorsions sur le marché de l’emploi. Un grand nombre d’entreprises cherchent de la main-d’œuvre, mais n’arrivent pas à en trouver parce que les gens préfèrent toucher la PCU. Le gouvernement le sait. Les libéraux savent qu’ils doivent supprimer progressivement la PCU, mais ils ne savent pas comment s’y prendre. Comment inciter les gens à reprendre le travail tout en continuant de procurer un filet de sécurité à ceux qui ne peuvent vraiment pas en trouver?
Nous sommes à un mois de l’échéance, et personne ne sait à quoi s’attendre. Plusieurs, notamment des conservateurs, affirment depuis des semaines que la PCU doit être modifiée pour inciter les gens à travailler, mais le gouvernement Trudeau, avec son arrogance habituelle, refuse d’écouter cette suggestion — simplement parce que l’idée n’est pas la sienne, j’imagine.
La Prestation canadienne d’urgence était une bonne mesure d’urgence. Elle aurait dû servir simplement d’option de soutien, de filet de sécurité, mais, comme les libéraux sont incompétents, ils en ont fait la principale bouée de sauvetage, ce qui a eu pour effet de freiner la reprise économique. La subvention salariale et la PCU ne sont toutefois pas les seuls programmes que le premier ministre a annoncés devant sa résidence ou son bungalow, pour reprendre le terme que préfère la sénatrice Moncion.
Le Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes a été annoncé le 27 mars. Il y a donc quatre mois aujourd’hui que cette annonce a été faite, chers collègues. On a entendu parler d’innombrables entreprises qui n’y sont pas admissibles pour une raison ou pour une autre. De toute évidence, il a été conçu par des gens qui ne comprennent rien à la réalité des petites entreprises.
Voici ce qu’a déclaré la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante la semaine dernière :
La FCEI exhorte le gouvernement fédéral à réformer rapidement d’autres programmes importants de soutien aux entreprises, notamment à modifier les critères d’admissibilité au Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes tel qu’il a promis de le faire, et à augmenter la taille des prêts et le pourcentage qui peut être transformé en subvention directe. Il est aussi essentiel de modifier immédiatement l’Aide d’urgence du Canada pour le loyer commercial, qui ne répond tout simplement pas aux besoins des propriétaires de petites entreprises.
L’Aide d’urgence du Canada pour le loyer commercial a été annoncée le 16 avril. C’était il y a plus de 103 jours. Encore une fois, cette mesure est tellement complexe qu’aucune petite entreprise ne peut en bénéficier. C’est une mesure conçue non pas pour les petites entreprises, mais pour les grands propriétaires immobiliers et leurs créanciers. La crise économique provoquée par la COVID-19 a commencé il y a quatre mois et demi. Or, les propriétaires d’entreprises attendent toujours que le gouvernement trouve des solutions pour que ces mesures fassent ce qu’il a promis qu’elles feraient.
Le Crédit d’urgence pour les grands employeurs, ou CUGE, est fiasco de plus. Vous vous souviendrez que lors de notre dernière séance, j’ai demandé au ministre Morneau de nous dire combien d’entreprises avaient fait une demande dans le cadre du CUGE. Soit parce qu’il ne connaissait pas la réponse, soit parce qu’il ne voulait pas dire la vérité, le ministre m’a demandé d’écrire à son bureau pour obtenir la réponse, ce que j’ai fait. Or, aujourd’hui, six semaines plus tard, je n’ai toujours pas obtenu de réponse. Nous pouvons facilement nous imaginer qu’aucune demande ne sera faite dans le cadre de ce programme, car il n’est adapté à personne. Les libéraux ont-ils pris une telle mesure par incompétence ou par opportunisme, pour donner l’impression que le premier ministre et ses ministres s’activent, même si l’on sait que c’est un programme défaillant qui n’intéresse personne.
Le gouvernement actuel est passé maître dans l’art de faire des annonces grandioses, mais il est complètement incompétent lorsqu’il s’agit d’y donner suite et de répondre aux besoins des Canadiens dans les meilleurs délais. Nous avons vu de nombreux exemples de son incompétence en ce qui a trait tant aux préparatifs en vue d’une éventuelle pandémie qu’aux mesures qui ont été prises lorsque la pandémie de COVID-19 s’est déclarée.
Le Comité des affaires sociales et le Comité des finances nationales ont signalé certaines de ces lacunes dans leurs récents rapports. Je les remercie de leur excellent travail. Le Comité des affaires sociales a affirmé ceci :
[...] la Réserve nationale stratégique d’urgence (RNSU) n’a pas été bien gérée au fil des ans et [...] elle ne contenait pas des quantités suffisantes et adéquates de fournitures pour distribution à l’échelle du pays.
C’est regrettable. Le gouvernement Trudeau est au pouvoir depuis maintenant près de cinq ans, et il doit rendre des comptes sur le manque de préparation du Canada au moment où la pandémie virale s’est déclarée.
Selon ce que nous avons appris récemment, en janvier, soit deux mois avant le début de la crise au Canada, le ministre de la Défense a été informé de ce qui se passait à Wuhan, mais le gouvernement n’a pas su mesurer l’ampleur de la crise, et il s’est plutôt fié à la propagande du Parti communiste chinois. Nous avons appris que le gouvernement de la Chine avait fait des réserves d’équipement de protection individuelle dans le seul but de le revendre au prix fort par la suite. Or, le gouvernement du Canada a refusé de fermer les frontières et de faire des réserves d’équipement de protection individuelle. Il a même envoyé des stocks précieux en Chine. Sa mauvaise préparation face à la COVID-19 et son incompétence dans la gestion de la crise sanitaire ont coûté la vie à des Canadiens.
Heureusement que les soins de santé sont fournis par les provinces du pays. Ce sont elles qui ont réussi à limiter les dégâts, même si elles ont dû pousser le gouvernement Trudeau à agir. Nous pouvons remercier les premiers ministres provinciaux, de même que les travailleurs de première ligne et les fonctionnaires dévoués des provinces.
Dans son rapport sur la COVID-19, le Comité des affaires sociales indique que « le Canada n’est pas prêt à l’éventualité d’une deuxième vague de la pandémie » parce que le gouvernement a fait preuve d’une telle ineptie dans sa préparation à la première vague, sans parler de sa réponse à celle-ci, et parce qu’il est maintenant empêtré dans le plus gros scandale de corruption depuis le scandale des commandites. Les Canadiens devraient craindre cette éventuelle seconde vague. Avec cette équipe aux commandes du bateau, le Canada pourrait bien échouer sur l’île aux naufragés après la prochaine vague. J’ai récemment vu sur les médias sociaux une image montrant Pierre Elliot Trudeau et Justin Trudeau avec un avertissement que la deuxième vague est toujours pire que la première, et je suis totalement d’accord. Alors que le gouvernement libéral pilotait le navire les yeux fermés en ce qui concerne la santé, il tentait tant bien que mal d’avoir l’air de savoir dans quelle direction le diriger en matière d’économie. Cependant, comme je vous l’explique, il a été inapte à concevoir et à mettre en œuvre des mesures pour réduire l’impact économique de la pandémie et la fermeture de l’économie.
J’ai parlé longuement des programmes pour les entreprises, mais qu’en est-il des programmes pour les particuliers? Comme je l’ai dit, la PCU était une bonne mesure temporaire, une solution provisoire. Toutefois, en refusant de modifier le programme pour y inclure des incitatifs au travail, le gouvernement nuit à la reprise économique. Je comprends que le gouvernement devait agir rapidement à la mi-mars et qu’il ne pouvait pas se montrer trop pointilleux par rapport aux critères d’admissibilité à la PCU. Quatre mois plus tard, certaines questions se posent toutefois : pourquoi des étudiants qui vivent chez leurs parents et qui travaillaient quelques heures par semaine dans un magasin avant la pandémie reçoivent-ils toujours la PCU? Selon l’Institut Fraser, le programme a envoyé 11,8 milliards de dollars à des jeunes qui vivent chez leurs parents. Est-ce là une bonne politique? Sans oublier les histoires de fraude qui s’accumulent par rapport à la PCU.
Le premier ministre lui-même a dit que les cas de fraude s’élèveraient probablement à environ 1 milliard de dollars. Pourtant, les libéraux ne semblent pas s’en préoccuper. Après tout, qu’est-ce que 1 milliard de dollars lorsqu’on a le cœur à la bonne place comme nous l’avons appris avec le scandale concernant UNIS? Ce qui est encore plus inacceptable, c’est que le gouvernement a des chiffres sur l’ampleur des cas de fraude. Comme le rapportait le Journal de Montréal la semaine dernière, le gouvernement refuse de les rendre publics. Ce n’est certainement pas parce que l’ampleur de la fraude est inférieure aux prévisions du premier ministre.
Puisqu’il est question du gaspillage de millions et même de milliards de dollars, nous avons appris la semaine dernière qu’on avait accordé un congé spécial payé à plus du quart des fonctionnaires fédéraux durant la pandémie. Environ un demi-milliard de dollars a été dépensé pour que des personnes demeurent chez elles à ne pas travailler. Ne pensez-vous pas que certaines de ces personnes auraient pu être utiles ailleurs? Partout au pays, des entreprises ont été forcées de réorganiser leur mode de fonctionnement du jour au lendemain. Elles ont compris comment leurs employés peuvent faire du télétravail et comment les transférer à un autre ministère, ce qui n’est pas le cas du gouvernement fédéral. C’est trop compliqué pour le premier ministre Trudeau et son cabinet. Ils sont trop occupés à dépenser des milliards de dollars. Ils n’ont donc pas le temps de se rendre compte que les agents frontaliers, dont les services ne sont plus nécessaires depuis la fermeture des frontières, pourraient être utilisés ailleurs. Cela aurait évidemment été utile, mais c’est trop compliqué et cela n’attire pas des votes; alors, oublions cela.
La semaine dernière, le gouvernement a estimé le coût de sa réponse à la COVID-19 à plus de 325 milliards de dollars. La manière dont cette montagne de dettes va être gérée reste un mystère. Nous savons que la Banque du Canada achète une grande partie de la dette du gouvernement fédéral. Va-t-elle s’en décharger? Si oui, comment et quand? Nous l’ignorons. J’ai posé la question au ministre Morneau ici même dans cette enceinte et il n’a pas voulu répondre. Comment la situation affectera-t-elle l’inflation et les taux d’intérêt? Les Canadiens devront le deviner, car le ministre des Finances ne nous dira pas comment il compte se sortir de ce pétrin. Je suppose qu’il est trop occupé à fouiller dans les vieux reçus de voyages somptueux pour voir s’il doit en rembourser un autre. Alors que les provinces et d’autres pays ont des mises à jour financières et des budgets, le gouvernement libéral nous donne un portrait de la situation. C’est comme si on s’attendait à voir un film et qu’on nous présentait une photo Polaroïd à la place.
Honorables sénateurs, le gouvernement actuel n’a pas fait preuve d’un grand niveau de compétence depuis 2015. En dehors de la légalisation de la marijuana, il n’est pas en mesure de se prévaloir de résultats époustouflants. Pour guider le pays dans une situation comme celle de la pandémie et de ses conséquences économiques, il faut du leadership, un bon leadership. On a besoin de compétences, comme celles que nous avons vu Stephen Harper et Jim Flaherty déployer en 2008; sinon les dégâts peuvent être profonds et durables. Je crains pour notre avenir, car Justin Trudeau et son Cabinet sont tellement incompétents qu’ils commencent réellement à mettre à mal notre économie et notre système démocratique. Que vont-ils faire pour nous sortir du pétrin dans lequel nous nous trouvons? Vont-ils augmenter les impôts? S’ils le font, ils vont affaiblir encore plus notre fragile économie. Vont-ils réduire les dépenses? C’est très peu probable, car Justin Trudeau, c’est l’homme qui ne réduit pas les dépenses et laisse le budget s’équilibrer tout seul. S’il y a une chose que Justin Trudeau nous a montrée au fil des ans, c’est qu’il est totalement incapable de prendre des décisions difficiles. Justin Trudeau n’est tout simplement pas à la hauteur et ne fera pas montre du leadership nécessaire à la prise de décisions difficiles. S’il reste à la barre de l’État, les Canadiens peuvent être sûrs qu’il baissera les voiles et que nous partirons à la dérive. L’inflation augmentera, ce qui diluera le poids de notre dette nationale tout en affaiblissant notre économie et en appauvrissant tous les Canadiens.
Honorables sénateurs, la triste réalité, c’est que le gouvernement fédéral est incompétent, qu’il est déconnecté de la réalité économique et qu’il refuse de déroger à son cadre idéologique. Nous devrons nous montrer hypervigilants au cours des prochains mois afin d’exiger des comptes du gouvernement, car si d’autres mauvaises décisions sont prises maintenant, elles risquent d’avoir une incidence considérable et durable sur l’économie et les générations futures de Canadiens.
Dans son plus récent rapport, le Comité sénatorial des finances nationales a formulé d’excellentes observations, notamment les suivantes :
Le comité déplore par ailleurs l’absence de reddition de comptes et le manque de transparence à l’égard des dépenses gouvernementales. Le comité estime qu’il est temps de rétablir les procédures habituelles d’approbation des dépenses du gouvernement par le Parlement afin d’exercer une surveillance appropriée des dépenses du gouvernement.
Enfin, la population canadienne et les parlementaires doivent obtenir, à intervalles réguliers, un portrait précis de l’état des finances publiques. Le gouvernement doit publier une mise à jour économique et financière trimestrielle tant que durera la crise économique.
Il sera intéressant de voir quelle sera la réponse du gouvernement à ces recommandations. Quoi qu’il en soit, une chose est sûre : le Parlement doit reprendre ses travaux en septembre. Pas en tenant ses séances par l’entremise de vidéoconférences Zoom ni selon un modèle hybride. Nous devons trouver le moyen de nous réunir selon le mode traditionnel tout en respectant les directives de la santé publique. N’en faisons pas un enjeu politique : je suis bien d’accord.
J’ai beaucoup parlé de l’incompétence de Justin Trudeau, de Bill Morneau et du reste de l’équipe de démolition libérale. Malheureusement, honorables sénateurs, je n’ai pas tout dit. Le summum de l’incompétence dans la réaction aux effets de la pandémie, c’est le cafouillage lié à la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant. Cette bourse a été annoncée le 22 avril. Selon ce qu’affirme le gouvernement à son sujet :
[La bourse] aidera les étudiants à acquérir de l’expérience et des compétences précieuses en prêtant main-forte à leur communauté durant la pandémie de COVID-19. Dans le cadre de la nouvelle Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant, ceux qui choisiront d’aider notre pays et leur communauté recevront jusqu’à 5 000 $ pour leurs études à l’automne.
Chers collègues, nous sommes le 27 juillet. Les étudiants retourneront sur les bancs d’école dans un mois, mais le programme n’est toujours pas commencé. Pire, le gouvernement n’en a même pas encore établi le fonctionnement et il ne sait pas qui sera chargé de sa gestion. Il a fallu au gouvernement deux mois avant de faire l’annonce du lancement officiel et, en moins de trois jours, tout le château de cartes s’est écroulé.
Je ne sais pas ce qui est à la source de tous les problèmes du gouvernement — son arrogance, son incompétence ou sa corruption —, mais je commence à penser que ce serait peut-être les trois.
Regardons ce qui s’est passé avec la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant. D’après ce que nous savons, le gouvernement a commencé à chercher une façon d’aider les étudiants à surmonter financièrement la pandémie au début d’avril. Le 5 avril, le ministre des Finances a discuté de diverses idées avec le premier ministre. Deux jours plus tard, le ministère des Finances a communiqué avec l’organisme UNIS pour approfondir l’idée. Deux jours plus tard encore, le 9 avril, l’organisme UNIS a transmis une proposition spontanée de programme pour les jeunes à la ministre de la Jeunesse, Bardish Chagger, et à la ministre de la Petite entreprise, Mary Ng. Quelle coïncidence.
Une semaine plus tard, la ministre Chagger a rencontré Craig Kielburger, cofondateur d’UNIS, pour discuter de la proposition. Chose curieuse, la ministre Chagger a omis de mentionner cette rencontre quand elle a comparu devant le Comité des finances de la Chambre des communes.
Le 19 avril, Rachel Wernick, une haute fonctionnaire d’Emploi et Développement social Canada, a communiqué avec l’organisme UNIS pour discuter de différentes possibilités pour un programme de bénévolat étudiant. On ne sait pas exactement qui a poussé Mme Wernick à appeler UNIS. Elle a dit que l’organisme lui avait été mentionné par quelqu’un du ministère de M. Morneau.
Trois jours plus tard, le 22 avril, le premier ministre annonce que le gouvernement libéral va lancer le programme de la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant. La même journée, l’organisme UNIS envoie par courriel à Mme Wernick une proposition mise à jour pour une bourse qui comprend des détails du programme proposé dont elle-même n’est pas encore au courant.
Comment cela se fait-il, chers collègues? Comment l’organisme UNIS pouvait savoir à l’avance ce que le premier ministre allait annoncer sur les marches de son bungalow? Il savait à quoi ressemblerait le programme avant même le fonctionnaire qui en serait chargé. Et le gouvernement a le culot de nous dire que ce sont les fonctionnaires qui ont décidé que l’organisme UNIS en serait le bénéficiaire!
Le 5 mai, lors de la réunion du Cabinet consacrée à la COVID-19, la ministre Chagger présente une proposition qui recommande de confier l’administration du programme à l’organisme UNIS. La proposition est adoptée. Le 22 mai, le Cabinet examine et approuve le plan.
Un mois plus tard, le 25 juin, le gouvernement annonce que l’organisme UNIS recevra 19,5 millions de dollars pour gérer le programme, qui est doté d’un fonds de 912 millions de dollars. Nous apprendrons plus tard que le programme devait rapporter en fait 44 millions de dollars à l’organisme.
Manifestement, quelqu’un aurait dû profiter du mois qui s’est écoulé entre la décision et l’annonce pour faire preuve de diligence raisonnable à l’égard de l’organisme UNIS ou pour voir s’il y avait d’autres options. Mais non, personne ne l’a fait soit parce que ce sont des incompétents, soit parce qu’ils savaient que les dés étaient pipés. Il fallait que le contrat soit accordé à l’organisme UNIS, quoi qu’il arrive.
Juste après l’annonce publique, les choses ont commencé à se gâter. Le 28 juin, les conservateurs ont demandé à la vérificatrice générale Karen Hogan d’enquêter sur l’entente conclue et ont souligné qu’il s’agissait d’un contrat à fournisseur unique, sans appel d’offres, et qu’il avait été accordé à un groupe ayant des liens bien documentés avec les Trudeau.
Dans les jours qui ont suivi, la subvention accordée à l’organisme UNIS a été annulée, car le commissaire à l’éthique a annoncé deux enquêtes distinctes sur la question, et des histoires de conflits d’intérêts se sont mises à débouler tellement vite sur la place publique que les gens n’arrivaient pas à en suivre le fil.
Le 9 juillet, l’organisme UNIS a confirmé que Margaret Trudeau avait reçu un total de 312 000 $ pour avoir pris la parole lors de 28 événements liés à UNIS entre 2016 et 2020. Alexandre Trudeau, le frère du premier ministre, a reçu 40 000 $ pour huit événements au cours de l’année scolaire 2017-2018. Sophie Grégoire Trudeau a reçu 1 400 $ pour une seule prestation en 2012. Le 4 mars, Sophie et sa belle-mère, Margaret Trudeau, ont toutes deux été les principales oratrices d’une journée de l’Europe de l’Ouest au Royaume-Uni.
Dans son site Web, l’organisme UNIS décrit Sophie comme ceci : « [...] plus qu’une ambassadrice de l’organisme UNIS, elle en est la mentore, la promotrice et la championne ».
En août dernier, le ministre des Finances, Bill Morneau, a annoncé un financement fédéral de 3 millions de dollars à l’organisme UNIS pour son programme « Nous sommes des entrepreneurs sociaux ». L’annonce a été faite le mois où sa fille a commencé à travailler pour l’organisme caritatif et un mois avant le déclenchement des élections fédérales.
Dans son témoignage devant le Comité des finances la semaine dernière, le ministre Morneau a admis que l’organisme UNIS avait payé les dépenses de 41 366 $ pour deux voyages qu’il a effectués avec sa famille. Il a également dit que sa famille avait déjà fait deux dons de 50 000 $ à l’organisme UNIS, dont un en juin de cette année. Global News a rapporté que, au total, l’organisme UNIS a reçu au moins 5,5 millions de dollars de financement du gouvernement fédéral entre 2015 et 2019.
Il ne s’agit toutefois pas des seuls liens troublants entre le gouvernement Trudeau et UNIS. Gerald Butts, le meilleur ami et ancien secrétaire principal du premier ministre qui a démissionné dans la honte, est considéré comme un partenaire et défenseur exceptionnel de l’organisme UNIS. Mélanie Joly, ministre du Développement économique et des Langues officielles, a participé à de multiples événements organisés par UNIS.
Seamus O’Regan, le ministre des Ressources naturelles du premier ministre, a travaillé avec l’organisme UNIS à titre de président honoraire d’Artbound, un organisme de bienfaisance qui recueille des fonds pour le compte d’UNIS. Katie Telford, la chef de cabinet de Justin Trudeau, est cofondatrice de l’organisme de bienfaisance Artbound que présidait le ministre O’Regan. À eux deux, ils auraient aidé à recueillir 400 000 $ pour l’organisme UNIS en 2010 et 2011.
Nous ne savons pas encore tout au sujet du scandale entourant l’organisme UNIS. Le commissaire à l’éthique, la commissaire au lobbying, la GRC et au moins deux comités de la Chambre réussiront certainement à extraire d’autres informations, même s’il est évident que les libéraux tentent désespérément de brouiller les pistes et de faire obstruction aux travaux des comités.
Au-delà des manquements évidents à l’éthique qu’on a commis dans cette affaire, tout le programme, de la façon dont il a été conçu à celle dont il a été mis en œuvre, soulève de sérieuses questions. Il soulève des questions à l’égard du Parti libéral du Canada. Est-il vrai que l’organisme UNIS lui fournit des listes de participants? Quels sont les liens qui existent entre le Parti libéral et cet organisme? L’organisme UNIS tentait-il de transformer des jeunes en fanatiques de l’image de marque de M. Trudeau et du Parti libéral, comme il l’avait promis à d’autres commanditaires?
Le programme soulève des questions au sujet de l’organisme UNIS. Quelle est sa véritable structure organisationnelle? Pourquoi a-t-on choisi sa division de l’immobilier pour administrer la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant? L’organisme UNIS est-il solvable? Est-il vrai qu’il dépense à peu près seulement 20 % de ses recettes en développement international? Où vont les 80 % qui restent? Comment avait-il l’intention de gérer les programmes qui lui avaient été confiés? Offrait-il vraiment de l’argent à d’autres organismes caritatifs et à des enseignants pour qu’ils fassent grimper les chiffres en partant à la chasse aux bénévoles? Avait-il l’intention de vendre les renseignements personnels des participants à des sociétés tierces?
À quoi s’attendait UNIS en échange des voyages de luxe qu’il a offerts au ministre des Finances et à sa famille? Quand ses représentants discutaient avec ceux du gouvernement, le faisaient-ils à titre de lobbyistes dûment inscrits? Pourquoi UNIS a-t-il versé de l’argent aux membres de la famille Trudeau pour donner des conférences, mais pas aux autres conférenciers? Pourquoi autant d’employés, de gestionnaires et de directeurs quittent-ils UNIS depuis quelques mois?
La situation soulève de sérieux doutes au sujet du ministre Morneau. Quelle est la véritable nature de sa relation avec UNIS? Que savait-il des difficultés financières de cet organisme quand il a conçu un programme que seul UNIS, à l’entendre, pouvait administrer? Comment peut-on faire confiance à un ministre des Finances qui oublie des villas en France et des voyages à 41 000 $?
La situation soulève aussi de sérieux doutes au sujet du premier ministre Trudeau. Les membres de sa famille ont-ils eu droit à des voyages gratuits de la part d’UNIS? Nous savons qu’ils ont accepté des vacances gratuites de l’Aga Khan. Que savait le premier ministre des problèmes d’UNIS? À quel point a-t-il participé personnellement à l’élaboration du programme que l’on sait?
La situation soulève enfin de sérieux doutes au sujet du gouvernement et de la fonction publique. Pourquoi le gouvernement a-t-il choisi d’allouer près de 1 milliard de dollars à ce programme au lieu de bonifier les sommes consacrées à Emplois d’été Canada? Qui a décidé qu’il valait mieux donner des bourses que des emplois aux étudiants?
Pourquoi le gouvernement a-t-il préféré recourir à un stratagème qui contourne les lois du travail, notamment les dispositions concernant le salaire minimum? Comment le gouvernement a-t-il fait ses calculs dans ce programme? On s’attendait à ce que 20 000 étudiants reçoivent une bourse. On parle donc d’un montant de 100 millions de dollars si chaque étudiant avait fait le nombre maximum d’heures de bénévolat. Même si les honoraires d’UNIS s’étaient situés entre 19 et 44 millions de dollars, il aurait quand même eu un écart de près de 800 millions de dollars.
Pourquoi le gouvernement a-t-il accepté de signer l’entente avec l’aile immobilière d’UNIS? Pourquoi ne pas faire affaire avec l’organisme de bienfaisance? Quelles mesures de diligence raisonnable ont été prises? Pourquoi le gouvernement a-t-il seulement demandé à UNIS de soumettre une offre? Comment se fait-il qu’UNIS était au courant du programme avant que ne le soit le fonctionnaire chargé de sa mise en œuvre?
Chers collègues, la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant était un programme ridicule et excessivement complexe, à moins, bien entendu, qu’il ait été conçu pour aider UNIS et non les étudiants. Qui sont les véritables stratèges dans cette affaire? Sont-ils incompétents ou animés de vils desseins? Peut-être avons nous mal lu la déclaration du premier ministre lorsqu’il a annoncé le programme de la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant. En anglais, lorsqu’il a dit « we », il voulait dire en fait « WE » en lettres majuscules : « Together, WE will get through this difficult time. »
Comme vous le savez, le 13 juillet, j’ai écrit à la présidence de convoquer le Sénat pour qu’il fasse toute la lumière sur cette affaire. Dans ma lettre, je souligne que le Sénat est le mieux placé pour le faire. Pour reprendre les paroles du premier ministre lui-même :
Si le Sénat a un rôle à jouer, c’est assurément de servir de contrepoids au pouvoir extraordinaire que détiennent le premier ministre et son cabinet [...]
Ce scandale correspond tout à fait au genre de situation où le Sénat doit intervenir et servir de contrepoids au pouvoir extraordinaire du premier ministre. Les Canadiens s’attendent à ce que nous demandions des comptes au gouvernement, particulièrement en période de crise.
Fait extrêmement décevant, je n’ai reçu ni réponse, ni accusé de réception. Il me semble que nous avons assez de compétences, ici au Sénat, pour examiner ce dossier de plus près et faire la lumière sur la conception du programme en question. Le Sénat a un rôle complémentaire à jouer par rapport à la Chambre des communes. Il pourrait sûrement faire un travail complémentaire dans ce dossier. Nous verrons si le Président est de mon avis.
Je me demande aussi, à propos d’UNIS, pourquoi le premier ministre et les ministres ne se sont jamais rendu compte qu’il pourrait être problématique de choisir UNIS pour faire ce travail. Étant donné le nombre de conflits d’intérêts autour de ce programme, il est incroyable que personne n’ait sonné l’alarme au Cabinet du premier ministre ou au Cabinet.
D’une part, c’est incroyable. D’autre part, pour quiconque s’intéresse à la performance du gouvernement, ce n’est pas surprenant. Après tout, on parle du ministre des Finances même qui a oublié de déclarer sa villa en France conformément aux règles sur l’éthique. On parle du ministre des Finances même qui a parrainé le projet de loi C-27, lequel s’est trouvé, comme par hasard, à augmenter la valeur des régimes de retraite vendus par son entreprise, Morneau Shepell. Lorsque le projet de loi a été présenté à la Chambre des communes, la valeur des actions de Morneau Shepell a bondi. Le ministre Morneau se trouvait simplement à détenir 21 millions de dollars d’actions.
On parle du premier ministre même qui a été reconnu coupable d’avoir enfreint la Loi sur les conflits d’intérêts à 10 reprises en moins de 4 ans. En 2017, l’ancienne commissaire Mary Dawson a rendu une décision sur le voyage sur l’île privée de l’Aga Khan, aux Bahamas, que M. Trudeau et sa famille avaient accepté. Tout le monde au Canada sait qu’on ne peut pas accepter des vacances sans frais d’un tiers lorsqu’on fait partie du Cabinet, tout le monde sauf les libéraux, qui semblent devoir réapprendre cette leçon de temps à autre.
Puis, en 2019, le commissaire à l’éthique, Mario Dion, a conclu que M. Trudeau avait tenté d’influencer la ministre de la Justice de l’époque, Jody Wilson-Raybould, afin qu’elle annule la décision de refuser un accord de suspension des poursuites à SNC-Lavalin.
Entre les deux incidents, Justin Trudeau a été déclaré coupable d’une violation de l’article 5 de la Loi sur les conflits d’intérêts, de quatre violations de l’article 9, d’une violation de l’article 11, de deux violations de l’article 12 et de deux violations de l’article 21. Honorables collègues, cela fait 10 violations de la Loi sur les conflits d’intérêts.
Maintenant, le premier ministre est de nouveau visé par une enquête du commissaire à l’éthique, tout comme le ministre des Finances.
N’oublions pas les autres problèmes d’éthique du premier ministre. L’affaire SNC-Lavalin allait au-delà d’une simple violation du code d’éthique. Le premier ministre a fait fi de la séparation des pouvoirs entre son bureau et celui du procureur général. Il s’est montré tellement incompétent ou corrompu qu’il a mis de côté le principe de Shawcross pour aider des amis à éviter des poursuites pénales. De plus, pour obtenir ce qu’il voulait, il est allé jusqu’à sacrifier la première Autochtone à occuper la fonction de ministre de la Justice.
Puisqu’on parle de femmes autochtones, comment peut-on oublier l’incident « Merci de votre don », qui a bien mis en évidence l’élitisme et la condescendance du premier ministre? Avant cela, il y a eu le fameux coup de coude que Justin Trudeau a donné à la députée Ruth Ellen Brosseau parce qu’il était pressé de passer au vote. Son temps était plus précieux que celui des autres, et le faux féministe qui est actuellement premier ministre n’hésite pas à écarter les femmes qui se mettent en travers de sa route.
C’est le même genre de comportement qu’avait adopté Justin Trudeau lors du tripotage de Kokanee, lorsqu’il avait touché de façon inappropriée une journaliste. Il avait ensuite affirmé que, s’il avait su qu’il s’agissait d’une journaliste d’envergure nationale, il n’aurait pas agi de la sorte. J’imagine que, pour lui, cela aurait été plus acceptable si cette femme n’avait pas été une journaliste. Tout le monde se rappelle que le premier ministre avait alors conclu qu’il s’agissait d’une leçon pour nous tous. Nous savons maintenant que « les gens vivent les choses différemment ».
En 2015, on apprenait que Justin Trudeau recevait des honoraires d’organismes de charité à titre de conférencier alors qu’il était député. C’était une première, chers collègues; un politicien élu qui exige d’être payé pour prononcer des discours. Quand il s’est fait prendre, il a dit qu’il s’excusait et il a fait un chèque. Quelques semaines plus tard, il s’est de nouveau fait prendre. Cette fois, il avait demandé à la Chambre des communes de couvrir des frais qui lui avaient déjà été remboursés par l’organisme qui l’avait engagé comme conférencier. On avait encore eu droit à la même rengaine : « Je suis désolé, voici un chèque. »
Enfin, n’oublions les trois, quatre, cinq fois, ou plus, où Justin Trudeau a arboré le « blackface », parce qu’il croyait que c’était amusant de faire semblant d’être noir. Nous ne savons pas combien de fois il l’a fait, parce que lui même ne se souvient pas du nombre de fois. Il semble que c’était une habitude pour Justin Trudeau, l’acteur, de revenir au « blackface ». Sérieusement, chers collègues, quelle personne saine d’esprit agissait de la sorte dans les années 1980? Qu’est-ce que cela nous dit sur la véritable nature de Justin Trudeau?
Le gouvernement actuel a favorisé une culture d’arrogance, d’incompétence et de corruption. Il est devenu si insensible aux manquements à l’éthique qu’il ne les repère même plus. Il aura fallu infliger aux libéraux le supplice de la question — par leur propre faute — avant qu’ils finissent par admettre qu’il y avait peut-être un problème. Maintenant qu’ils ont été découverts, ils voudraient qu’on leur pardonne et qu’on oublie ce qui s’est passé parce qu’ils bredouillent des excuses, avec une petite larme au coin de l’œil. Nous savons tous qu’ils ne regrettent rien. Ils ne sont même pas capables de bien faire semblant.
Il suffit de voir la façon dont ils ont géré le scandale concernant UNIS. La première réaction du premier ministre en réponse aux allégations de problèmes liés à la gestion du programme a été d’essayer de nous dire que l’organisme UNIS était le seul capable d’administrer le programme. C’était l’équivalent de dire que les allégations étaient fausses. C’est la même chose qu’il nous a dite à propos de l’article du Globe and Mail sur l’affaire SNC-Lavalin, et dans ce cas, toutes les allégations se sont entièrement avérées.
Le premier ministre a vraiment cru que les Canadiens allaient croire son argument justifiant l’octroi d’un contrat à fournisseur unique de près de 1 milliard de dollars, pour un programme qui est complètement absurde, à un organisme qui entretient des liens étroits avec sa famille, son Cabinet, son parti et son ministre des Finances. Rien ne justifie une telle décision, sauf peut-être que le gouvernement est si aveuglé par son outrecuidance qu’il n’est plus en mesure de reconnaître les manquements à l’éthique, même lorsqu’ils sont aussi flagrants.
C’est pour cette raison que le premier ministre et son Cabinet, qui sont au cœur du scandale UNIS, font semblant d’être surpris et présentent de tièdes excuses comme s’ils n’avaient aucune idée de ce qui se passait. On peut remarquer les expressions agacées sur leur visage lorsque l’opposition, ou même la presse libérale, leur posent des questions à ce sujet. C’est comme s’ils s’indignaient que l’on ose leur demander s’ils sont réellement blancs comme neige. Ils sont si bouffis d’arrogance qu’ils se convainquent que c’est la réalité.
Le problème qui se pose ici, chers collègues, n’est pas que le gouvernement n’était pas pleinement conscient de ses manquements, mais bien qu’il s’agit du train-train habituel des libéraux.
Je vous prie de faire preuve de patience pendant quelques minutes, le temps que je vous rafraîchisse la mémoire.
Outre les manquements à l’éthique et la conduite discutable que j’ai mentionnés, n’oublions pas ceci : lorsqu’il était président du Conseil du Trésor, Scott Brison a tenté de stopper l’approbation du marché pour la construction d’un navire de ravitaillement militaire au chantier Davie, au Québec, en réponse au lobbying de la puissante famille Irving, du Nouveau-Brunswick, propriétaire d’un chantier rival à Halifax.
Le ministre Brison a également tenté de soutenir qu’il était inutile de mettre en place un écran pour prévenir les conflits d’intérêts qui l’empêcherait de participer aux décisions du gouvernement concernant deux des familles les plus riches du Canada atlantique, même s’il avait déjà présidé l’une de leurs sociétés d’investissement et que son époux demeurait membre du conseil d’administration de l’entreprise.
Que dire de Dominic LeBlanc, qui, en dépit de ses liens avec la puissante famille Irving, a été nommé ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne? Il a fallu des semaines de consultations avec le Commissariat aux conflits d’intérêts et à l’éthique pour déterminer comment contourner ce conflit d’intérêts manifeste.
Puis, il y a eu l’aller-retour du ministre LeBlanc entre Moncton et Montréal à bord d’un avion appartenant à J.D. Irving, Limited. Semble-t-il qu’il n’y avait rien de contraire à l’éthique là-dedans. Par contre, lorsque le commissaire a l’éthique, Mario Dion, l’a jugé coupable d’une contravention à la Loi sur les conflits d’intérêts pour avoir octroyé un permis lucratif pour la pêche à la mactre de Stimpson à une entreprise liée au cousin de son épouse, cette fois, le ministre LeBlanc n’a pas pu se défiler.
Parlant de Dominic LeBlanc et de Scott Brison, nous ne connaissons toujours pas leur rôle exact dans l’affaire du vice-amiral Norman. Les libéraux ont tenté de revenir sur un contrat pour un navire de ravitaillement afin de le redonner aux Irving. Lorsqu’ils se sont fait prendre, ils ont décidé qu’ils auraient la tête du vice-amiral Norman. Le premier ministre l’a même envoyé devant les tribunaux avant que la police n’ait terminé son enquête. Scott Brison et Judy Foote ont quitté leur poste. Le vice-amiral Norman a reçu une somme d’argent et il a dû signer un accord de confidentialité. Voilà une opération de camouflage menée de main de maître.
Que dire de Seamus O’Reagan? Le gouvernement a dépensé 180 000 $ pour le défendre dans une affaire de diffamation. Le ministre des Services aux Autochtones, Marc Miller, a été réprimandé pour avoir organisé activité de financement privée à New York pour sa campagne électorale et il n’a jamais révélé la liste des donateurs.
La ministre Maryam Monsef a dû admettre qu’elle n’était, en fait, pas née en Afghanistan, comme elle l’avait soutenu et comme elle l’avait fait croire pendant des années. Il s’est avéré que le ministre Sajjan avait menti sur son rôle en Afghanistan. On a découvert que le ministre Champagne avait souscrit des prêts hypothécaires auprès de la Banque de Chine pour deux appartements à Londres. John McCallum a été renvoyé de son poste d’ambassadeur à Pékin pour des commentaires inappropriés sur les relations du Canada en Chine. Gerald Butts et Katie Telford, qui étaient à l’époque les deux principaux collaborateurs de Justin Trudeau, ont reçu 207 000 $ pour des frais de déménagement, dont ils ont accepté de rembourser une partie importante seulement après que l’histoire a fait les manchettes et enflammé l’opinion publique.
Puis, il y a eu Marwan Tabbara. Il a été autorisé à se présenter comme candidat libéral lors des élections de 2019, même si des allégations détaillées de harcèlement sexuel pesaient déjà contre lui. Après son arrestation en avril dernier, il est resté dans le caucus du parti pendant presque deux mois parce que le Cabinet du premier ministre prétendait n’être au courant de rien.
N’oublions pas Jody Wilson-Raybould, Jane Philpott et Celina Caesar-Chavannes. Si je dois vous rappeler ce qui leur est arrivé, nous avons vraiment un problème. Trois femmes fortes ont été sacrifiées parce qu’elles avaient osé tenir tête à Justin Trudeau.
Darshan Singh Kang, quant à lui, a dû quitter le caucus libéral à la suite d’accusations de harcèlement sexuel. Le député libéral Nicola Di Iorio ne s’est pas présenté au travail pendant un an après avoir annoncé sa démission. Le public a par la suite appris qu’il n’avait pas vraiment démissionné. Sommes-nous censés croire que personne au sein du gouvernement libéral n’était conscient de ce fait?
L’ancien député libéral Raj Grewal avait admis avoir accumulé des dettes de plusieurs millions de dollars en participant à des parties de blackjack au casino, ce qui l’a poussé à démissionner de son poste au sein du caucus libéral après que la situation fut révélée au grand jour dans le cadre d’une enquête de la GRC. Cependant, après avoir soudainement annoncé qu’il avait remboursé ses dettes dans les sept chiffres, il est demeuré en poste comme député indépendant jusqu’à la fin de la session parlementaire. Vous vous souviendrez sans doute que M. Grewal faisait déjà l’objet d’une enquête du commissaire à l’éthique du gouvernement fédéral à l’époque et qu’il a par la suite été reconnu coupable d’avoir violé les règles en matière de conflit d’intérêts.
Honorables sénateurs, je ne fais que commencer à présenter la liste des infractions aux règles d’éthique et aux inconduites commises par le premier ministre, les membres de son cabinet et d’autres députés de son parti. Toutefois, même si j’avais tout le temps voulu — et je l’ai —, je m’arrêterai ici parce que je pense que vous avez compris.
Le gouvernement a perdu sa boussole morale, s’il en avait une de prime abord, et il a perdu le droit moral de gouverner. Tous ces exemples, et les nombreux autres que je n’ai pas mentionnés, sont autant d’affluents du fleuve pollué dans lequel nous nageons à l’heure actuelle alors que nous tentons d’obtenir des comptes de la part d’un gouvernement qui ne semble pas comprendre ce concept. Ne soyons pas surpris que le Canada ait chuté en douzième place des pays les moins corrompus. C’est le fruit du bon travail de Justin Trudeau.
Chers collègues, il est difficile de voir une issue à ce gâchis à moins que le premier ministre et le ministre des Finances ne démissionnent. Ils ont à maintes reprises violé la confiance de la population canadienne et fait preuve d’ambivalence face aux responsabilités liées aux fonctions qu’ils exercent.
Aujourd’hui, nous joignons notre voix à celles de politiciens, de médias et de citoyens ordinaires qui réclament la démission du premier ministre et du ministre des Finances pour ouvrir la voie à un avenir meilleur pour le Canada et pour tous les Canadiens.
Nous avons un choix à faire au Sénat : allons-nous masquer les graves problèmes qui ont été constatés au sein de ce gouvernement ou allons-nous demander de la transparence, de la responsabilité et une meilleure ligne de conduite?
Comme vous le savez tous, chers collègues, le Parti conservateur du Canada est sur le point d’élire un nouveau chef. Je ne ferai aucun pronostic sur le vainqueur, mais une chose est sûre : nous allons élire un chef qui rappellera à l’ordre ce gouvernement libéral incompétent et corrompu. Nous allons élire un chef qui va unir notre parti. Nous élirons un chef qui offrira aux Canadiens une vision passionnante pour l’avenir du pays.
Chers collègues, lors de notre prochaine rencontre, nous aurons très probablement ce nouveau leader, et je peux vous garantir que le caucus conservateur du Sénat reviendra ici plus dynamisé que jamais. Nous exigerons que le gouvernement nous rende des comptes. Nous ferons entendre la voix des Canadiens qui sont plus de six millions à avoir voté pour les conservateurs lors des dernières élections. Nous ferons entendre la voix de tous ceux qui disent que le ministre Morneau et le premier ministre Trudeau doivent démissionner plutôt que de s’accrocher à leur poste.
Aujourd’hui, je ne tiendrai pas la leader adjointe du gouvernement au Sénat en haleine. Elle n’a pas à me demander comment nous voterons. Nous permettrons que ce projet de loi soit adopté à la majorité des voix, mais nous n’allons pas laisser le gouvernement s’en tirer à si bon compte. Nous croyons que le Canada se trouve à un moment critique. Il a désespérément besoin d’un véritable leadership, responsable et courageux, mais il ne l’a pas.
Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?
Des voix : D’accord.
Une voix : Avec dissidence.
(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté, avec dissidence.)