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La Loi sur le droit d'auteur

Projet de loi modificatif--Deuxième lecture--Ajournement du débat

6 février 2024


Propose que le projet de loi C-244, Loi modifiant la Loi sur le droit d’auteur (diagnostic, entretien et réparation), soit lu pour la deuxième fois.

 — Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui à titre de parrain d’un projet de loi d’initiative parlementaire, le projet de loi C-244, Loi modifiant la Loi sur le droit d’auteur concernant (diagnostic, entretien et réparation). Il nous est présenté après avoir reçu l’appui unanime de la Chambre des communes, ce qui est plutôt rare de nos jours.

Le projet de loi joue un rôle important en permettant la mise en œuvre de cadres sur le droit de réparer par les administrations fédérale, provinciales et territoriales au Canada.

Le fait d’accorder aux Canadiens le droit de réparer leurs produits renforce les droits des consommateurs. Cela réduit leurs dépenses, contribue à accroître la concurrence et réduit les dommages causés à l’environnement. Plus précisément, le projet de loi C-244 modifie la Loi sur le droit d’auteur pour permettre à une personne de contourner une mesure technique de protection, ou MTP — je ne connaissais pas cette expression moi non plus avant aujourd’hui, alors tenez bon —, mais strictement à des fins de diagnostic, d’entretien et de réparation d’un produit.

Une mesure technique de protection est aussi connue sous le nom de verrou numérique parce qu’elle empêche, par exemple, un technicien en réparation d’accéder au code du logiciel, ce qui l’empêche de réparer un produit.

J’espère qu’à la fin de mon discours, vous comprendrez pourquoi ce projet de loi d’initiative parlementaire a reçu l’appui unanime de la Chambre des communes.

Avant de parler de la teneur du projet de loi et de ses répercussions réglementaires, je tiens à faire le point sur le droit de réparer en général et du fait qu’il vise à aider les Canadiens et les petites entreprises des quatre coins du pays. Je parlerai ensuite du projet de loi et je dirai pourquoi il est essentiel pour faire avancer le dossier du droit de réparer.

Enfin, je conclurai en comparant ce projet de loi à une autre mesure législative inscrite au Feuilleton, le projet de loi C-294.

Qu’est-ce que le droit de réparer et pourquoi est-il important? Je vais commencer par un exemple personnel.

En 2019, nous avons acheté un lave-vaisselle. Nous pensions bien faire en achetant le modèle le moins cher d’une marque soi‑disant respectée, mais nous n’avons pas acheté la garantie prolongée et ce fut une erreur. Le lave-vaisselle est tombé en panne deux ans plus tard. Je vis dans la même région qu’un réparateur très réputé, qui m’a écouté poliment décrire ce que je pensais être le problème, et ce, gratuitement. Lorsque j’ai eu terminé, il m’a posé quelques questions, puis il m’a dit : « Eh bien, c’est la pompe. C’est la première pièce qui brise sur ce modèle. Si vous voulez, je peux aller faire un diagnostic en personne et vous facturer 150 $ plus la TVH pour vous donner la même réponse que je vous donne maintenant. »

Il a ajouté ceci : « Si vous choisissez de le réparer, cela vous coûtera environ 600 $ avec les pièces, le service et la TVH. Pour le même prix, vous pouvez acheter un tout nouveau lave-vaisselle, mais, cette fois-ci, prenez la garantie prolongée. » Puis, il a dit : « Lorsqu’il brisera, appelez-moi. » Il m’a dit qu’il pourra réparer l’appareil sans frais.

Il ne se réjouit pas du fait que les appareils, peu importe leur prix, soient si mal conçus et que les pièces coûteuses des fabricants représentent environ la moitié de ses ventes. Il n’en tire aucune satisfaction. Néanmoins, il a trouvé le moyen de faire savoir à ses clients que ce n’est pas lui qui les escroque. Plus important encore, il est scandaleux qu’il puisse prédire avec assurance que le nouvel appareil cessera presque certainement fonctionner d’ici cinq ans.

Nous avons suivi son conseil. Nous avons acheté un nouveau lave-vaisselle et pris la garantie prolongée. Puis, nous avons mis au chemin celui dont la pompe était brisée pour qu’il soit emporté au site d’enfouissement. Il va sans dire que je n’étais pas content.

L’obsolescence programmée est la stratégie qui vise à concevoir les produits de manière à en limiter intentionnellement la durée de vie. Les groupes de protection des droits des consommateurs s’insurgent contre les cas les plus flagrants — ils arrivent même parfois à gagner leur cause —, mais ils ont besoin de l’aide des législateurs. Dans de nombreux pays, le travail est bien amorcé et le rapport de force, qui privilégiait les grands fabricants mondiaux, commence enfin à favoriser les consommateurs.

Quand notre lave-vaisselle a brisé, je n’ai pas pu m’empêcher de repenser à mes parents, qui avaient acheté une série d’appareils en 1972. La plupart d’entre vous devineront de quelle couleur ils étaient — eh oui, ils étaient vert avocat, une teinte très à la mode à l’époque.

Malgré leur couleur, ces appareils ont été utilisés continuellement par quatre ménages différents avec un minimum de réparations, jusqu’à ce qu’on les mette finalement au rencart en 2007. Ils ont donc servi de manière fiable pendant 35 ans, ce qui n’était tout de même pas assez long pour que le vert avocat redevienne à la mode.

De nos jours, la piètre qualité et l’obsolescence programmée sont devenues la norme. Ces façons de faire ont du sens, du point de vue égoïste des entreprises. Pourquoi un fabricant choisirait-il de faire une vente tous les 35 ans quand il pourrait en faire une tous les 5 ans ou même plus souvent? Pourquoi donnerait-il à d’autres intervenants le pouvoir d’entretenir et de réparer son produit sans s’assurer qu’une grande partie des coûts de réparation lui revienne grâce à des frais d’obtention de licence, à des outils spécialisés et à des composantes coûteuses?

Si vous aimez les balados, je vous recommande What On Earth de Laura Lynch, particulièrement l’épisode du 1er novembre 2023, où elle parle de tous nos machins cassés. Elle donne d’innombrables exemples de produits qui semblent être conçus pour être rapidement dépassés. Si l’on tient compte de l’énergie, des efforts et des coûts environnementaux liés à l’extraction et au raffinage de matières premières, à la conception et à la fabrication d’un produit, puis à son transport à travers le monde, il n’est pas du tout viable ni acceptable que nos maisons soient une simple halte pour ce produit qui vient de l’autre bout du monde pour finir dans la décharge locale.

On brûle de l’argent et du carbone pour des produits de moins en performants parce que, même si ce n’est pas visible, ils sont conçus pour devenir facilement obsolètes. Par exemple, lorsque l’aimant nécessaire pour assurer l’étanchéité de la porte d’un réfrigérateur coûteux n’est pas conçu pour être remplacé, un réfrigérateur par ailleurs excellent est envoyé à la décharge. Lorsqu’une batterie spécialisée est collée dans un appareil, rendant impossible son remplacement par une batterie standard, cet appareil finit lui aussi à la décharge. Soudainement, quel que soit le prix, un trop grand nombre de nos produits de consommation deviennent des déchets.

J’ai été ravi qu’on dise dans l’émission What On Earth diffusée par la CBC que le projet de loi C-244 contribuerait grandement à accroître la fiabilité et à prolonger la durée de vie des produits de consommation. L’animatrice de l’émission a indiqué que presque tous les produits d’aujourd’hui sont des produits intelligents parce qu’ils sont contrôlés par une forme de puce informatique. Cette puce est dotée d’un contenu logiciel. Conformément aux dispositions de la loi actuelle sur le droit d’auteur, les fabricants se servent de mesures techniques de protection — ou verrous numériques — pour empêcher des tiers d’accéder au code de leur logiciel, même si c’est pour diagnostiquer et réparer le produit.

Permettez-moi encore une fois de donner un autre exemple personnel. J’en ai plein à ce sujet. L’hiver dernier, le voyant moteur s’est allumé sur le tableau de bord de notre voiture. J’ai téléphoné au garage de ma collectivité rurale de la Nouvelle-Écosse. Le mécanicien a dit qu’il ne pouvait pas me garantir qu’il allait pouvoir accéder pleinement au système informatique de la voiture. Il m’a donc recommandé de m’adresser au concessionnaire. J’ai téléphoné au concessionnaire, j’ai pris rendez-vous et j’ai fait le trajet d’une heure en voiture jusqu’à Halifax. Une fois arrivé, j’ai attendu pendant une heure et j’ai dû payer 100 $. Pourquoi? C’est parce que le couvercle du réservoir à essence n’était pas complètement fermé, ce qui a été détecté par le capteur du réservoir d’essence, et c’est pour cela que le témoin s’est allumé. Il va sans dire que j’étais extrêmement mécontent lorsque j’ai refait le trajet d’une heure pour rentrer chez moi.

Je venais de gaspiller plus de trois heures ainsi que 100 $ parce que le fabricant du véhicule empêche les gens d’accéder pleinement au logiciel de la voiture qui sert au diagnostic, à l’entretien, à la réparation ou, dans ce cas-ci, simplement à indiquer qu’il faut resserrer d’un demi-tour le couvercle du réservoir.

Les fabricants de l’industrie automobile diront qu’il y a une entente avec l’industrie de la réparation sur le marché secondaire, la Norme canadienne visant les renseignements sur l’entretien des véhicules automobiles, une entente volontaire qui, en principe, autorise :

[...] les fabricants d’automobiles à communiquer des renseignements sur l’entretien et la réparation à l’industrie du marché secondaire de l’automobile qui sont équivalents à l’information dont disposent les concessionnaires autorisés.

Cela donne l’impression d’accorder le droit de réparer sans avoir à modifier la Loi sur le droit d’auteur. Toutefois, l’entente relative à la Norme canadienne visant les renseignements sur l’entretien des véhicules automobiles n’a pas été mise à jour depuis 2009, elle ne comporte aucun mécanisme d’application, et il n’est pas obligatoire de la respecter.

Aujourd’hui, contrairement à 2009, une voiture utilise des logiciels pour à peu près tout et n’importe quoi, ce qui signifie qu’une mesure technique de protection peut légalement bloquer quelque chose d’aussi simple que la réparation d’un feu arrière. L’accord n’est donc plus adapté.

Chers collègues, pendant la majeure partie du siècle dernier, la musique a été distribuée sous la forme d’un produit physique ou tangible, comme un disque, une cassette ou un CD. Toutefois, la distribution numérique devenant de plus en plus courante, la Loi sur le droit d’auteur a été modifiée afin de protéger les droits des créateurs, en particulier les auteurs-compositeurs et les musiciens. On peut considérer qu’il s’agit là d’une extension naturelle des lois sur le droit d’auteur en vigueur pour les biens matériels tels que les livres et les œuvres d’art.

Toutefois, les mesures techniques de protection sont devenues envahissantes et constituent la manifestation d’un glissement. Elles empêchent désormais les consommateurs d’accéder aux traces numériques qu’ils créent lors de l’utilisation des produits ou de les contrôler, et les techniciens tiers de fournir des services d’entretien et de réparation au propriétaire légitime du produit.

De toute évidence, certains fabricants, avec l’aide de leurs habiles avocats — ces avocats terriblement habiles — ont cherché à décourager le droit de réparer, trop d’entre eux privilégiant des intérêts commerciaux à court terme. Pour une raison ou une autre, la Loi sur le droit d’auteur est de plus en plus utilisée pour bloquer le rôle des prestataires de services de réparation indépendants en les menaçant de sanctions pour violation du droit d’auteur ou en menaçant le consommateur d’annuler sa garantie. Cela a pour effet de réduire la concurrence sur le marché au détriment des consommateurs.

Permettez-moi de récapituler : jusqu’à présent, nous avons examiné le droit de réparer en général et la manière dont l’utilisation non prévue des lois sur le droit d’auteur limite la concurrence et accroît le consumérisme au détriment de la qualité par rapport à la quantité, ce qui porte préjudice à nos portefeuilles et à l’environnement.

J’espère que vous comprendrez pourquoi le projet de loi C-244 est un point de départ essentiel pour garantir l’accès des consommateurs à des services de réparation compétitifs et abordables ainsi qu’à un marché secondaire.

L’absence du droit de réparer a des répercussions sur les agriculteurs, les mécaniciens, les techniciens, les travailleurs de la construction, les ateliers de réparation d’appareils électroniques, les artisans et les propriétaires de toutes sortes de petites entreprises, et pas seulement sur les consommateurs. Dans ce contexte, il n’est pas étonnant que le projet de loi C-244 ait été approuvé à l’unanimité par la Chambre des communes à l’étape de la troisième lecture, après sept réunions de comité au cours desquelles les députés ont entendu près de 30 témoins de l’industrie et du gouvernement de même que des experts.

En outre, ce projet de loi correspond à l’annonce faite dans le budget de 2023 selon laquelle le gouvernement travaillerait à la mise en œuvre d’un droit de réparer, dans le but de présenter un cadre ciblé pour les appareils électroménagers et électroniques cette année, en 2024.

Le gouvernement s’est également engagé, dans le budget de 2023, à lancer des consultations, notamment sur le droit de réparer et l’interopérabilité du matériel agricole, et à travailler en étroite collaboration avec les provinces et les territoires pour faire avancer la mise en œuvre.

Le projet de loi C-244 contribue à la réalisation d’une priorité du gouvernement et, par conséquent, il bénéficie du soutien du gouvernement et du ministère de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique, ainsi que de tous les autres partis à la Chambre des communes.

À mon avis, s’il a obtenu autant de soutien à la Chambre, c’est avant tout parce que le projet de loi C-244 n’est pas axé sur une industrie en particulier. Les projets de loi précédents tentaient d’utiliser une approche centrée sur une industrie, mais n’ont obtenu qu’un succès limité. Par exemple, le projet de loi C-273, présenté en 2009, visait à instaurer un droit de réparer obligatoire pour les véhicules à moteur uniquement. Le projet de loi C-273 a échoué à la Chambre.

Un projet de loi similaire, le projet de loi C-231, a été présenté au Parlement par le même parrain, le député Brian Masse. Son projet de loi porte sur des amendements à la Loi sur la concurrence, qui — comme nous venons de l’entendre — ont été intégrés dans les annonces faites dans l’Énoncé économique de l’automne. Il considère que son projet de loi et les amendements à la Loi sur la concurrence sont complémentaires au projet de loi C-244.

Le projet de loi C-244 a obtenu l’appui unanime de la Chambre parce qu’il a évité l’éventuelle litanie d’exceptions, qui auraient pu aller à l’encontre de l’objectif général du projet de loi.

Concentrons-nous sur le projet de loi C-244 et ses implications. Le projet de loi C-244 apporte des modifications à la Loi sur le droit d’auteur, qui, comme vous le savez, est une importante loi‑cadre du marché d’application générale qui est conçue pour encourager et protéger la créativité et l’innovation culturelles et économiques.

Nous avons expliqué pourquoi des modifications sont nécessaires : elles visent spécifiquement à autoriser une personne à contourner les verrous numériques codés dans le logiciel d’un produit, pourvu que ce soit dans le seul but d’effectuer tout diagnostic, tout entretien ou toute réparation sur un produit dans lequel le logiciel est intégré.

Ces modifications autoriseront aussi la fabrication, l’importation, la distribution, la vente, la location et la fourniture légales de technologies, de dispositifs et de composants s’ils servent aux diagnostics, entretiens et réparations sur les produits. De nombreux membres du personnel d’entretien doivent utiliser des connexions logicielles précises et de petits ordinateurs pour se connecter aux produits afin d’en assurer l’entretien. De nos jours, beaucoup d’outils individuels sont nécessaires pour assurer l’entretien des produits.

En tant que modification de la loi d’application générale, le projet de loi n’est pas conçu pour répondre à des préoccupations sectorielles, ni pour traiter des questions de sécurité, de cybersécurité ou d’environnement. De par leur conception, les changements proposés dans le projet de loi C-244 sont neutres et ne porteront pas atteinte au principe ou à l’efficacité de la Loi sur le droit d’auteur.

Détail important, ce projet de loi n’a pas préséance sur la réglementation actuelle visant certaines catégories de produits. Cette réglementation reste inchangée, qu’elle vise la sécurité, la conception, l’environnement ou autre chose.

C’est pourquoi il est préférable que ce soit les régimes législatifs et réglementaires existants qui gèrent les préoccupations des parties intéressées et les exceptions proposées, car ils sont spécialement conçus pour réglementer ces catégories de produits, comme c’est le cas actuellement pour les instruments médicaux et les véhicules.

Je songe par exemple aux instruments médicaux réglementés par Santé Canada. Il existe depuis longtemps une lacune dans la réglementation au sujet des ateliers de réparation indépendants non certifiés. Le projet de loi C-244 a dévoilé l’existence de diverses lacunes réglementaires, mais plus particulièrement celle-ci, qui requiert une prise de mesures de la part de Santé Canada. Pour être clair, ce projet de loi n’a aucune incidence sur les mesures de protection réglementaires en vigueur, mais tout porte à croire qu’il obligera les responsables de ces mesures à constamment les renforcer.

Certains intervenants ont soulevé des préoccupations liées au piratage informatique. Il est important de noter que le projet de loi C-244 n’autorise le contournement des mesures techniques de protection que pour accéder légalement au contenu. Le piratage demeure illégal. Plus précisément, le projet de loi C-244 n’autorise pas la copie ou le partage de contenu protégé par le droit d’auteur si cet accès enfreint la Loi sur le droit d’auteur. Cette mesure se trouve au paragraphe 2(3) du projet de loi.

Il s’agit d’une préoccupation soulevée par les fabricants de jeux vidéo, qui sont exposés aux risques pour l’intégrité, la sécurité et la confidentialité qui existent sur leur marché.

En 2017, la Cour fédérale du Canada a accordé à Nintendo 12,76 millions de dollars de dommages-intérêts pour violation du droit d’auteur en vertu de la Loi sur le droit d’auteur, ce qui montre l’applicabilité de la loi. Je tiens à souligner que les changements proposés dans le projet de loi C-244 ne nuisent pas à l’applicabilité de la Loi sur le droit d’auteur, mais on craint un alourdissement du fardeau de la preuve et, par conséquent, une augmentation des frais juridiques, ce qui pourrait valoir la peine d’être examiné au cours de l’étude du projet de loi.

Dans le cadre de l’étude menée par le comité de l’industrie et de la technologie de la Chambre des communes, d’autres amendements ont été apportés à l’article 2 du projet de loi afin de renforcer davantage les dispositions relatives au droit de réparer et d’assurer la conformité avec l’Accord Canada—États-Unis—Mexique. Je parlerai de deux de ces amendements corrélatifs apportés à la version initiale du projet de loi C-244.

D’abord, un amendement a été apporté pour garantir que le contournement d’une mesure technique de protection pour respecter le droit à la réparation s’appliquerait à une prestation ou à un enregistrement sonore dont l’accès est contrôlé par la mesure technique de protection. Je ne sais pas combien d’entre vous ont un lave-vaisselle, un micro-ondes ou une machine à laver qui émet des sons ou des mélodies. Vous serez peut-être intéressés de savoir que si une pièce de l’appareil qui est connectée à ce son, comme un bouton, se brise il faudra la faire réparer parce qu’elle est protégée par une mesure technique de protection. À mon avis, le seul objectif est qu’il soit plus difficile d’obtenir une réparation à prix abordable.

Cet amendement permet aux consommateurs et aux techniciens en réparation de contourner un son protégé par le droit d’auteur pour réparer la pièce de la machine qui est brisée. Je ne pense pas qu’aucun d’entre nous ne considère ce son comme un plus, mais c’est l’un des exemples qui montrent comment les mesures techniques de protection sont utilisées au détriment des consommateurs.

Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais j’ai été étonné à la seule idée des circonvolutions juridiques qui ont lieu : une loi devant protéger les chanteurs et les compositeurs sert maintenant à protéger les fabricants et à leur assurer de meilleurs revenus. Quelle pratique anticoncurrentielle.

Un autre amendement adopté par le Comité permanent de l’industrie et de la technologie garantit que le projet de loi C-244 est conforme à l’Accord Canada—États-Unis—Mexique et tient compte du risque que l’exemption pour réparation qui s’applique à l’interdiction de contournement des dispositifs de protection cause d’autres différends commerciaux en vertu de l’accord. En effet, celui-ci ne permet pas l’adoption de nouvelles exemptions pour la fabrication de technologies destinées à contourner une mesure technique de protection.

En d’autres termes, si le projet de loi permet à quiconque d’avoir accès à un service permettant de contourner une mesure technique de protection à des fins d’entretien ou de réparation, il ne permet pas de fabriquer un dispositif spécifiquement conçu pour contourner une mesure technique de protection, même à des fins de réparation. Des représentants d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada ont confirmé que cet amendement serait conforme au cadre fédéral américain en matière de propriété intellectuelle en ce qui concerne le droit de réparer, ce qui permettrait au projet de loi C-244 d’être conforme à l’Accord Canada—États-Unis—Mexique.

Enfin, je tiens à positionner brièvement le projet de loi C-244 par rapport à un projet de loi connexe inscrit au Feuilleton du Sénat, à savoir le projet de loi C-294, parrainé par le sénateur Housakos.

Il est clair que le droit de réparer vise à permettre au consommateur canadien de se défendre. C’est quelque chose que soutiennent tous les partis, et un nombre croissant de Canadiens est favorable à l’adoption de mesures législatives sur le droit de réparer. En effet, un projet de loi qui accompagne le projet de loi C-244 est actuellement inscrit au Feuilleton. Il s’agit du projet de loi C-294, Loi modifiant la Loi sur le droit d’auteur (interopérabilité), qui a également été adopté à l’unanimité par la Chambre et qui vise un objectif complémentaire, que je me ferai un plaisir d’aborder dans la foulée de l’intervention d’un collègue à ce sujet.

Il existe déjà certains cas bien précis où le fait de contourner une mesure technique de protection ne constitue pas une violation du droit d’auteur, notamment lorsque c’est à des fins d’interopérabilité des logiciels, de recherche sur le chiffrement, de sécurité des réseaux et de déverrouillage de dispositifs sans fil. Le projet de loi C-294 élargirait cette exemption pour permettre à une personne, dans certaines circonstances, de contourner une mesure technique de protection afin de rendre un programme d’ordinateur ou un dispositif dans lequel il est intégré interopérable avec un autre programme d’ordinateur, dispositif ou composant. Cela va tout à fait dans le sens du principe du droit de réparer des consommateurs, et c’est particulièrement important en ce qui concerne le matériel agricole.

Les deux mesures législatives sont également essentielles au concept d’économie circulaire, qui prend en considération l’ensemble de la chaîne de valeur d’un produit et vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre et les autres déchets trop nombreux au moyen de la réparation, de la réutilisation et du recyclage.

Ces projets de loi s’inscrivent dans le cadre d’un effort mondial beaucoup plus vaste. L’Europe a commencé à légiférer dans ce domaine en élaborant des directives dans les années 2010, et ses États membres ont créé des cadres sur le droit de réparer. Le Royaume-Uni a présenté une mesure législative sur le droit à la réparation qui est entrée en vigueur en juillet 2021. Actuellement, 18 États américains ont adopté leurs propres mesures législatives sur le droit de réparer.

Certaines provinces en font autant. Le Québec, par exemple, a adopté le mois dernier le projet de loi no 29, Loi protégeant les consommateurs contre l’obsolescence programmée et favorisant la durabilité, la réparabilité et l’entretien des biens. Le projet de loi no 29 va plus loin au sujet du droit des consommateurs à réparer en interdisant l’obsolescence programmée et en veillant à ce que les commerçants et les fabricants, tenus à la garantie de disponibilité, rendent disponibles aux consommateurs les pièces nécessaires à l’entretien ou à la réparation des biens. C’est une première dans le genre sur le continent.

Avant de conclure, chers collègues, j’ai un aveu à vous faire. J’ai des gènes écossais très dominants. Ma famille juge parfois qu’il s’agit d’un défaut génétique. Je dois admettre que je déteste jeter quoi que ce soit. Les restes constituent mon repas préféré. J’éprouve une grande joie à réparer plutôt qu’à remplacer. J’ai réparé mon casque suppresseur de bruit avec du ruban électrique. Les pantoufles que je porte à la maison ont 20 ans, mais je les considère comme neuves. J’ai acheté certaines des cravates que je porte au Sénat dans les années 1980.

Pour être clair, je préfère qu’on me qualifie de frugal plutôt que de pingre et je remercie mes parents, qui ont grandi pendant la Grande Dépression, pour ce trait de caractère. Je le juge très important, et il devrait être valorisé en cette période de crise du coût de la vie qui rend la vie si terriblement difficile à tant de Canadiens.

Le projet de loi C-244 répond aux exigences du moment. Il contribuera à réduire le coût de la vie pour les Canadiens en rendant plus facile et plus abordable la réparation d’articles essentiels. Il favorisera la concurrence et la productivité dans l’économie canadienne en permettant de faire plus avec moins. Il limitera le fléau des articles réparables envoyés aux sites d’enfouissement et le tort et le gaspillage qui y sont associés. Plus important encore, il fera en sorte qu’il soit moins profitable pour les entreprises d’importer des produits bas de gamme au Canada et de simplement vendre des pièces de rechange trop cher ou, pire encore, de limiter la possibilité de réparer leurs produits.

Je préfère de loin voir des produits de meilleure qualité qui utilisent des pièces de rechange et des pièces du marché secondaire normalisées, maximisant ainsi la quantité d’argent que nous gardons dans notre économie et permettant aux Canadiens — peu importe où ils vivent — de réparer leurs produits à un prix abordable de façon à obtenir de nombreuses années d’utilisation continue et fiable, même si ces produits et appareils commencent à prendre de l’âge.

Le projet de loi C-244 est un exemple important de la nécessité urgente de moderniser notre législation et notre réglementation pour répondre à l’accélération des changements dans l’économie numérique. Un trop grand nombre de nos lois et règlements, conçus dans un but spécifique, sont devenus obsolètes et sont maintenant nuisibles et ont des effets négatifs imprévus. Nous devons faire preuve de plus d’intelligence dans notre façon de concevoir les lois afin qu’elles soient à l’épreuve du temps ou qu’elles offrent un mécanisme agile permettant de s’adapter aux changements technologiques.

Il est important d’aller de l’avant avec ce projet de loi, qui est complémentaire au projet de loi C-294, afin que nous puissions commencer à moderniser la Loi sur le droit d’auteur pour l’adapter aux réalités de l’ère numérique et de l’ère des données. La création d’un cadre fédéral grâce à ces deux projets de loi sera le fer de lance de l’action de nos provinces et territoires et apportera des avantages aux consommateurs de tout le Canada.

Je tiens seulement à mentionner que cela s’aligne en grande partie sur le travail que nous avons fait au sein du Comité des banques au printemps dernier. Il est question ici du même genre d’effort.

Pour cette raison, entre autres, le projet de loi a obtenu l’appui unanime de la Chambre. J’aimerais remercier mes collègues là-bas, surtout le député Bryan May, qui a présenté une version initiale de cette mesure législative lors de la législature précédente, en février 2021, ainsi que le député Wilson Miao, qui a parrainé le présent projet de loi à la Chambre des communes durant la législature en cours. Je tiens également à remercier les membres du Comité permanent de l’industrie et de la technologie de la Chambre des communes d’avoir accordé la priorité à l’étude de ce projet de loi et d’avoir investi le temps nécessaire pour en améliorer le contenu.

Chers collègues, la Loi sur le droit d’auteur est une loi d’intérêt général, et ce projet de loi apporte des changements importants qui permettront de créer un cadre pour le droit à la réparation aux niveaux fédéral, provincial et territorial, au profit des consommateurs et de l’environnement. Le projet de loi bénéficie d’un soutien universel, et il apportera des changements significatifs pour les Canadiens.

Merci, chers collègues.

L’honorable Diane Bellemare [ + ]

Est-ce que le sénateur Deacon accepterait de répondre à une question?

Absolument.

La sénatrice Bellemare [ + ]

L’économie de la réparation et de l’entretien est quelque chose que l’on doit nécessairement encourager dans une économie durable. Ce projet de loi touche à la réglementation, mais il n’a aucun impact financier. Est-ce que vous pensez qu’il aura un impact réel sur le plan de la croissance des services de réparation électronique, mécanique et électroménagère — ce dont nous avons tous besoin —, comparativement à des mesures plutôt fiscales, comme il en existe dans les pays scandinaves, pour encourager la réparation des articles plutôt que de les jeter? Croyez-vous que ce projet de loi pourra tout faire?

Je vous remercie de votre question, car elle est vraiment importante. C’est l’une des nombreuses choses que nous devons faire pour établir des bases. Il s’agit d’une approche qui touche à tous les secteurs de l’économie. En modifiant la Loi sur le droit d’auteur, nous rendons maintenant illégal le fait d’empêcher les ateliers de réparation indépendants de faire le travail qui est fait par les fabricants. Les fabricants ne peuvent pas utiliser les mesures techniques de protection pour empêcher la réparation de leurs produits. C’est vraiment un bon début.

Cependant, le projet de loi C-294 est un autre élément qui permet l’interopérabilité entre différents produits et différents fabricants. Il faudra déployer beaucoup d’efforts pour renverser la tendance dans une économie où toutes les activités de fabrication, d’extraction des ressources et tout le reste se déroulent, puis un produit est expédié de l’autre bout du monde, pour lequel notre maison n’est qu’un point d’arrêt. La situation actuelle est tout simplement insensée.

Ce ne sont que des mesures parmi tant d’autres. Je n’exclurais rien d’autre, mais ce que j’aime de ce projet de loi, c’est qu’il renforce la concurrence, et je crois en la concurrence. Je crois que c’est la concurrence qui nous permettra de nous améliorer. Les entreprises dont les produits sont plus chers et moins durables se porteront moins bien dans cet environnement. À mon avis, c’est très important sur le plan structurel. Pour ce qui est des autres mesures, je n’exclurais rien. J’espère que cela répond à votre question.

L’honorable David M. Wells [ + ]

Sénateur Deacon, je vous remercie de votre discours. Vous nous avez vraiment informés sur le sujet. Vous savez, je suis le porte-parole dans ce dossier au Sénat.

Qui pourrait être contre ce projet de loi? Qui pourrait être contre ce projet de loi et garder la tête haute s’il récolte autant d’appuis?

Bien des gens très attachés à leurs intérêts ne souscrivent pas à ce projet de loi. Lorsque je me suis entretenu avec eux en question à propos de cette mesure législative, j’ai été jusqu’à présent très direct. Je dis simplement que je cherche à obtenir des observations en vue d’apporter des amendements, s’il y a lieu.

Les fabricants de jeux, par exemple, estiment que ce projet de loi faciliter le piratage, ce qui pourrait rendre la tâche plus difficile pour les fabricants — comme je l’ai dit dans mon discours — lorsqu’il s’agit de faire enquête et de faire respecter la loi relativement à leurs produits protégés par le droit d’auteur. Cependant, la réalité, c’est que, si l’on commence à faire une exception, nous allons être submergés de demandes pour en accorder d’autres.

D’autres intervenants, comme les constructeurs d’automobiles, affirment qu’ils font déjà ce que prévoit le projet de loi par l’entremise du Service d’informations sur les normes automobiles canadiennes, ou CASIS. Ils disent qu’ils accordent déjà l’accès. Eh bien, l’accès n’est ni obligatoire ni complet, et il n’a pas été mis à jour au cours des 15 dernières années, une période cruciale dans notre économie numérique. Par ailleurs, un certain nombre de groupes disent qu’ils ont de véritables problèmes. Nous devrions toujours entendre ceux qui ont des intérêts divergents, mais je pense qu’il sera possible de gérer leurs problèmes.

Je crois avoir mentionné un autre cas pendant mon discours, soit les instruments médicaux. Le projet de loi a mis met en évidence l’existence d’ateliers de réparation d’instruments médicaux qui ne sont ni réglementés ni autorisés, ce qui pose un défi. Il y a des réparateurs au pays. Bref, cela ne devrait pas exister. La réglementation sur la santé doit être modifiée. En fait, des changements devront être apportés à divers secteurs de l’appareil gouvernemental pour que la mesure proposée n’ait pas de conséquences imprévues.

En principe, personne n’est contre le droit de réparer. Tous cherchent à protéger leurs intérêts actuels, à juste titre. Nous pouvons trouver des façons de gérer cette réalité.

Le sénateur Wells [ + ]

Je pense aux dispositions concernant les garanties. Si une personne tente de rafistoler un objet protégé par une garantie, ce rafistolage viendra annuler la garantie. J’ai déjà eu une voiture pour laquelle je devais retourner faire faire mes changements d’huile chez le concessionnaire chaque année. Si j’étais allé ailleurs, ma garantie aurait été annulée.

Qu’en est-il des dispositions sur les réparations faites par les particuliers et de leur effet sur la garantie?

C’est une question très importante. Je dirais qu’il existe d’autres dispositions. Par exemple, si vous bricolez les systèmes antipollution d’une voiture, celle-ci ne répondra pas aux normes exigées par la loi. Il y a différentes façons de bricoler un véhicule ou une pièce d’équipement. Il faudra éventuellement modifier divers éléments.

Ceux qui fabriquent ou louent des pièces d’équipement devront modifier le contrat qu’ils concluent avec ceux à qui ils les louent afin de s’assurer qu’ils ne bricolent pas un produit. Mais c’est la même chose que dans n’importe quel autre domaine. Nous devons veiller à l’application des lois et règlements en matière de sécurité, d’environnement et d’autres domaines relevant du gouvernement.

Le problème, dans la situation actuelle, c’est que si l’on ne permet pas à quelqu’un d’autre qu’un seul groupe — celui des concessionnaires agréés — d’effectuer une réparation alors que d’autres peuvent être formés pour la réaliser de manière plus économique et être certifiés pour effectuer des réparations techniques sûres et responsables, l’absence de concurrence leur permet de fixer le prix qu’ils veulent. Cela signifie que vous devez faire votre vidange d’huile à un prix beaucoup plus élevé que si vous vous adressiez à un atelier concurrent auquel il est plus pratique de s’adresser. Dans mon cas, la commodité est importante parce qu’il me faut compter une heure dès que je dois me rendre quelque part.

Par conséquent, je dirais simplement qu’à mon avis, on pourrait régler tout cela très soigneusement et très facilement, mais nous devons mettre fin au recours à des mesures techniques de protection lorsque celles-ci nuisent aux consommateurs.

Le sénateur Wells [ + ]

J’ai seulement une dernière question, c’est promis. Accepteriez-vous d’y répondre?

Oui.

Le sénateur Wells [ + ]

Vous avez parlé de l’équipement agricole. Que peut-on faire dans ce cas? Beaucoup d’équipement agricole est loué. En ce qui concerne la location d’équipement à un agriculteur, à un cultivateur, à un éleveur ou à une entreprise de séchage de grain, pourrait-on prévoir des dispositions pour que l’équipement ne soit entretenu que par une personne autorisée par le propriétaire de l’équipement? Je n’aurais pas dû employer le mot « bricoler ». Je parle plutôt de réparation, des cas où il y a quelque chose qui ne fonctionne pas et il faut réparer. Je ne parle pas de remplacer le convertisseur catalytique ou ce genre de choses.

Ne devrait-il pas y avoir des mesures de protection pour les propriétaires d’équipement afin que les réparations soient effectuées par un réparateur agréé ou autorisé? Il peut s’agir de la même personne dans le cas d’un concessionnaire de Caterpillar, John Deere ou une autre marque.

Encore une fois, sénateur Wells, c’est un point très important. Cela changera probablement les clauses d’un contrat de location conclu avec une société de location d’équipement, qui ne vous autorise pas à effectuer une réparation autrement qu’en la confiant à un technicien autorisé. Vous devez attester que vous respecterez cette règle. Les contrats sont ainsi faits aujourd’hui. Lorsqu’une pièce d’équipement tombe en panne, il peut y avoir une mesure de protection technologique en place, mais sur d’autres éléments de l’équipement, on peut apporter des changements.

Ce qu’il faut voir, c’est que des changements doivent être également apportés relativement à d’autres types de contrats. Si une entreprise peut fournir un service technique pour l’équipement qu’elle loue à un tarif abordable par rapport à quelqu’un d’autre qui dit que ce service doit être fourni à tel tarif, l’entreprise qui propose le tarif le plus abordable prospérera. À l’heure actuelle, nous ne permettons pas à la concurrence de s’exercer de quelque manière que ce soit. Pour moi, c’est l’enjeu principal. C’est une façon de favoriser la concurrence dans divers marchés. Il suffit de parler aux agriculteurs des problèmes qu’ils ont en ce qui a trait aux composants numériques de leur équipement, au manque d’interopérabilité et à l’augmentation des coûts qui en découle, sans parler du fait qu’ils ne peuvent pas avoir recours à des pièces du marché secondaire pour remplacer efficacement celles qui sont brisées. Il est possible de faire ces réparations de façon sécuritaire, mais ce n’est tout simplement pas permis en ce moment.

Le marché et les entreprises de location ajusteront au fil du temps leurs façons de faire, mais nous devons mettre en place ce cadre pour favoriser la concurrence — et permettre au marché de s’y adapter.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) [ + ]

Tout d’abord, bien que j’étais tout à fait favorable au projet de loi pendant votre intervention, certaines questions commencent à me faire douter. Je sais que lorsque ce projet de loi sera renvoyé au comité, on répondra à bon nombre de ces questions. Toutefois, vous avez dit à plusieurs reprises que ces problèmes se régleront d’eux‑mêmes et qu’il faudra faire ceci et cela pour y remédier.

J’aimerais revenir sur la question du sénateur Wells concernant la garantie. Tout comme vous, j’en suis certain, j’ai reçu dans mon bureau des fabricants qui s’y opposaient et des agriculteurs qui y étaient favorables. Étant donné que je viens également d’une région rurale, je comprends aisément que les agriculteurs qui se trouvent à 150 kilomètres d’un concessionnaire John Deere et dont la moissonneuse-batteuse tombe en panne ne peuvent pas interrompre leurs activités.

Ma question est la suivante : si cette moissonneuse-batteuse est sous garantie, êtes-vous en train de nous dire qu’en vertu de ce projet de loi, si l’agriculteur tente de réparer un problème pris en charge par la garantie et qu’il commet une erreur, le concessionnaire devra tout de même réparer ce problème que l’agriculteur a tenté de réparer sans être qualifié pour le faire? C’est quelque chose que j’ai du mal à comprendre.

Je suis pour la concurrence et je vois bien où se situent certains des problèmes, mais je vois mal comment on pourrait contraindre les concessionnaires à dire : « Eh bien, vous avez empiré la situation, mais nous allons tout de même honorer la garantie. »

Merci, sénateur Plett. À l’évidence, je n’ai pas été clair.

Ce n’est pas cela. Une garantie serait tout de même annulée si des modifications étaient apportées par un technicien non certifié et non qualifié. Je n’ai aucun doute là-dessus. Ce qui importe, c’est que les techniciens certifiés pourraient désormais provenir d’organisations autres que le fabricant de l’équipement d’origine. C’est l’élément important qui permet à la concurrence d’émerger.

C’est l’argument avancé par les entreprises de location d’équipement lourd, et il est très important : que se passe-t-il s’ils louent un équipement pour six mois et que la personne à qui ils le louent y apporte des modifications? Ils récupèrent ensuite l’équipement et constatent qu’une modification a été apportée et qu’elle rend cet équipement moins sécuritaire ou qu’elle ne respecte pas les exigences en matière de protection de l’environnement. C’est pour cette raison qu’ils devront établir une clause de responsabilité très claire pour dire à la personne à qui ils louent l’équipement que, si elle apporte ce genre de changements, c’est elle qui en est responsable, et non l’entreprise de location.

Merci beaucoup. C’était plus clair.

L’honorable David Richards [ + ]

Acceptez-vous de répondre à une question, monsieur le sénateur?

Bien sûr, je vous en prie.

Le sénateur Richards [ + ]

Je ne sais pas grand-chose là-dessus, et il s’agit peut-être d’une question à laquelle on a déjà répondu, mais comment cela cadrera-t-il avec les fabricants américains et le monopole américain sur de nombreux produits? En effet, 80 % de nos produits, de la machinerie Massey Ferguson aux brosses à dents, viennent du sud de la frontière. Cette mesure sera peut-être accueillie favorablement au Canada et adoptée au Sénat. Je me demande simplement comment elle sera perçue à Washington.

Je vous remercie de votre question, sénateur. Tout d’abord, cette mesure législative est conforme à l’Accord Canada—États-Unis—Mexique. Il est essentiel de le préciser. Le projet de loi n’interrompt en rien notre accord commercial.

Il ouvre plutôt la porte à davantage de concurrence, ce qui est une priorité aux États-Unis et qui est en train d’en devenir une au Canada. La concurrence peut venir des États-Unis ou du Canada, mais elle desserre le verrou que les fabricants de l’équipement d’origine ont mis sur leurs produits et diminue le contrôle qu’ils exercent sur la capacité des consommateurs à entretenir ce produit au fil du temps. Le fait que les fabricants desserrent leur emprise sur les consommateurs et qu’ils commencent à autoriser des tiers à effectuer des réparations dans un environnement qualifié et concurrentiel ne peut qu’être avantageux pour les consommateurs. Les fabricants se livrent aussi une concurrence accrue pour fabriquer de meilleurs produits qui durent plus longtemps et qui sont plus facilement réparables.

Si on doit interroger des experts au comité, il faudrait leur demander si le projet de loi risque de nuire à l’Accord Canada—États-Unis—Mexique. Nous avons obtenu l’assurance d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada, et certainement des témoins qui ont comparu devant le Comité permanent de l’industrie et de la technologie de la Chambre des communes, que ce n’est pas le cas.

Merci.

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