La vérificatrice générale
Réception de Karen Hogan en comité plénier
15 mai 2020
Honorables sénateurs, le Sénat s’est formé en comité plénier afin de recevoir Karen Hogan relativement à sa nomination à titre de vérificatrice générale du Canada.
Honorables sénateurs, durant un comité plénier, les sénateurs s’adressent à la présidente, mais ne sont pas obligés de se lever. Conformément au Règlement, le temps de parole est de 10 minutes — questions et réponses y comprises. Cependant, tel qu’ordonné plus tôt aujourd’hui, si un sénateur n’utilise pas tout son temps de parole, il peut céder le temps qu’il lui reste à un autre sénateur. J’invite maintenant la témoin à entrer.
(Conformément à l’ordre adopté par le Sénat, Karen Hogan prend place dans la salle du Sénat.)
J’ai le plaisir de vous accueillir au Sénat. Je vous invite à faire vos observations préliminaires d’au plus cinq minutes.
Merci, madame la présidente. Bonjour à vous tous.
C’est un grand honneur pour moi d’être ici aujourd’hui et de penser qu’on pourrait me donner la possibilité de servir mes concitoyens canadiens en tant que vérificatrice générale du Canada. À mon avis, le rôle du vérificateur général est essentiel pour assurer la reddition de comptes, qui est l’un des fondements de notre système de gouvernement démocratique.
Le titulaire de ce poste fournit au Parlement et aux trois assemblées territoriales des renseignements indépendants, objectifs et crédibles, et il donne des assurances concernant la gestion des fonds publics. Autrement dit, les sénateurs et les élus peuvent compter sur lui pour leur fournir des renseignements indépendants sur la façon dont les organismes gèrent les programmes pour les Canadiens.
La relation entre le vérificateur général et les institutions parlementaires est fondée sur la confiance. L’éthique, l’intégrité et l’indépendance sont le point d’ancrage de mes valeurs personnelles, en plus d’être au cœur du travail du vérificateur général. Si je suis nommée vérificatrice générale, je m’efforcerai de servir le Parlement dans toute la mesure de mes capacités.
Je suis née à Montréal et j’y ai commencé ma carrière. Je suis comptable professionnelle agréée depuis plus de 25 ans. Ma carrière a été partagée presque également entre le secteur privé et le secteur public. Je travaille au Bureau du vérificateur général depuis 14 ans. J’ai été attirée au bureau par les personnes qui le dirigent, celles qui y travaillent, et le travail qu’ils accomplissent. Je tiens à souligner la contribution des vérificateurs généraux passés et celle de l’actuel vérificateur général par intérim, Sylvain Ricard.
Je crois fermement à l’importance de cette institution et à l’utilité de son travail. Ce travail touche presque tous les volets des programmes, des dépenses et des services gouvernementaux et, par conséquent, la plupart — voire la totalité — des groupes, petits et grands, qui composent notre merveilleux pays.
Dans le passé, le Bureau du vérificateur général a mis l’accent sur des enjeux nationaux et régionaux revêtant de l’importance pour les parlementaires et les Canadiens, que ce soit sur le plan économique, environnemental ou social. Certaines questions sont si complexes qu’elles font l’objet de maintes vérifications. Je pense notamment aux questions autochtones et aux changements climatiques.
Si je suis nommée vérificatrice générale, je me concentrerai sur des questions d’intérêt national, telles que les investissements du gouvernement dans les infrastructures et les dépenses liées à la COVID-19. Je me concentrerai aussi sur les questions de portée régionale, comme les pêches et le secteur pétrolier et gazier.
Puisque je reconnais le rôle unique du Sénat consistant à donner aux groupes sous-représentés la possibilité de se faire entendre, je choisirais d’effectuer des vérifications visant essentiellement à soutenir le travail de tous les parlementaires.
J’ai dirigé des audits de performance à l’échelle du gouvernement pendant plusieurs années avant de passer surtout au côté financier. Pendant près de sept ans, j’ai été responsable de l’audit des états financiers consolidés du gouvernement du Canada, qui est le plus vaste des audits financiers du pays. À ce titre, j’ai collaboré de près avec les hauts dirigeants de sociétés d’État et de ministères pour régler des problèmes d’audit délicats et complexes.
Comme j’ai pu vivre l’audit du point de vue du vérificateur et de celui de la personne chargée de préparer les états financiers, je crois que j’étais particulièrement bien placée pour comprendre les défis de ces organisations. Même si nous n’avons pas toujours été d’accord — notamment en ce qui concerne l’approche du gouvernement pour estimer ses passifs à long terme —, j’estime que mon analyse était juste et rigoureuse. Après plusieurs années de discussions avec les hauts dirigeants, des changements ont été apportés qui, selon moi, améliorent la transparence et la reddition de comptes en lien avec les obligations relatives aux pensions.
J’ai été inspirée par les personnes qui travaillent au bureau, et je continue de l’être. Ce sont des personnes attentionnées, ingénieuses, compétentes, hautement intelligentes et professionnelles, toujours soucieuses de respecter des normes élevées tout en contribuant à un gouvernement bien géré et responsable.
Ce fut pour moi un privilège de travailler avec ces personnes et d’avoir contribué à déterminer l’orientation stratégique du bureau et à amener un changement organisationnel. Ce serait pour moi un honneur plus grand encore d’avoir l’occasion de poursuivre ce travail et d’orienter l’amélioration continue de l’organisation.
Si je suis nommée vérificatrice générale, je dirigerai le bureau avec compréhension et bienveillance, en apportant une attention particulière au bien-être des employés tout en les encourageant à concrétiser la vision et la mission du bureau. Je mettrai également l’accent sur la modernisation de nos façons de travailler pour que nous puissions suivre les importants changements dans le domaine de l’audit et dans le contexte gouvernemental.
Pour terminer, je tiens à souligner les efforts des nombreux travailleurs et travailleuses de première ligne et à les remercier de leur dévouement envers les Canadiens durant cette crise mondiale. Je veux aussi souligner le dévouement soutenu des fonctionnaires qui soutiennent le pays en cette période difficile.
Voilà qui conclut mon allocution préliminaire, madame la présidente.
Je serai heureuse de répondre aux questions des honorables sénateurs et sénatrices.
Merci, madame Hogan.
Bienvenue au Sénat du Canada, madame Hogan.
Ma première question concerne le processus entourant votre nomination. Pourriez-vous nous résumer le processus par lequel vous êtes passée avant de vous retrouver devant nous aujourd’hui? Quand et de quelle façon avez-vous postulé? Quels tests et entrevues avez-vous passés, et qui a mené ces entrevues?
J’ai postulé par l’intermédiaire du site Web du Bureau du Conseil privé. Je savais évidemment que le poste devait être pourvu, car je travaillais au bureau. J’ai postulé au moyen du site Web au mois de janvier.
J’ai été invitée à passer une entrevue le 19 février. Le comité de l’entrevue était composé de six personnes. À la suite de l’entrevue, quelques jours plus tard, j’ai été invitée à passer des tests psychométriques. De temps en temps, un représentant du Bureau du Conseil privé m’appelait pour m’expliquer où on en était rendu dans le processus. Nous avons confirmé au début de mars que je m’intéressais toujours au poste. Quelques semaines plus tard, à cause de la pandémie de COVID-19, on m’a informée que le processus était suspendu puisqu’il était important que le Parlement soit impliqué. Par la suite, j’ai reçu un appel du ministre vers le 29 avril qui m’a informée que j’étais la candidate nommée au poste de vérificatrice générale.
C’est bien.
Ma question suivante porte sur l’utilisation judicieuse de l’argent des contribuables. En tant que vérificatrice, vous savez que votre obligation principale est d’assurer aux contribuables canadiens un bon rendement sur investissement. On pourrait dire que c’est aussi l’objectif final de la surveillance exercée par le Parlement.
À votre avis, quel serait un bon rendement sur investissement dans le cas d’un audit? Si, par exemple, on consacrait 26 millions de dollars ou 27 millions de dollars à l’audit d’un ministère ou d’un organisme, est-ce qu’un rendement de 150 000 $ serait considéré comme suffisant?
Le retour sur investissement est une mesure qui est souvent utilisée pour déterminer si une société a réalisé ou non un investissement judicieux.
Toutefois, les avantages qui peuvent découler d’une vérification, c’est-à-dire le résultat du temps qu’on prend pour procéder sérieusement à un examen en profondeur, ne se manifestent pas simplement sous la forme d’un retour sur l’investissement calculé avec des montants d’argent. À mon avis, une preuve de reddition de comptes et de transparence n’a pas de prix. Chaque fois que nous pouvons améliorer la reddition de comptes et la transparence, nous devrions tout mettre en œuvre pour y arriver.
Si j’étais nommée vérificatrice générale, je voudrais faire en sorte que les recommandations formulées dans le cadre de toutes nos vérifications, qu’il s’agisse de vérifications financières ou de rendement, visent à améliorer les résultats et à garantir que le gouvernement continue de rendre des comptes et d’être transparent.
Je pense que c’est très bien, mais ne croyez-vous pas que l’argent compte? Ultimement, l’argent n’est pas illimité. S’il l’était, il n’y aurait évidemment pas de problème.
Absolument. Il faut trouver le juste équilibre pour à la fois prendre le temps voulu et obtenir de bons résultats.
Bien franchement, une fois qu’on a commencé une vérification, il est important d’aller au fond des choses. Tout bon vérificateur vous dira que si on lui dit quelque chose, il ne peut pas en faire fi et il en tiendra compte lorsqu’il pèsera le pour et le contre et formulera des recommandations.
Voici ma troisième question, madame Hogan. Plus tôt cette semaine, Sylvain Ricard, vérificateur général par intérim, a témoigné devant le Comité des finances de la Chambre des communes, où il a indiqué que le Bureau du vérificateur général ne pourra pas effectuer de vérifications de rendement cette année en raison du refus du gouvernement actuel de lui assurer un financement adéquat.
Le vérificateur général effectue normalement environ 27 audits chaque année. Des contraintes budgétaires avaient déjà fait passer le nombre d’audits à 14 par année, et, maintenant, le vérificateur général par intérim affirme qu’il n’y en aura aucun cette année. Essentiellement, le vérificateur général a le mandat prescrit par la loi de réaliser des vérifications de rendement, mais il n’a pas d’argent pour le faire, ce qui nous ramène à mon point, bien sûr, selon lequel il vous faut un incitatif pour avancer, sinon vous ne pouvez pas faire de vérification.
Pouvez-vous nous dire comment vous prévoyez régler ce problème? Quel est le rôle du Bureau du vérificateur général si le gouvernement ne vous accorde pas de fonds pour effectuer vos travaux cette année?
Je crois fermement qu’il est très important que le Bureau du vérificateur général soit bien financé et doté de ressources suffisantes. Ce bureau joue un rôle clé dans le mécanisme de reddition de compte des institutions démocratiques du pays.
Lorsque M. Ricard a comparu devant un comité au début de la semaine, il a évoqué la nécessité de retarder les vérifications. Il a également mentionné — et je vous le rappelle — que nous avons trois chapitres qui sont prêts à être déposés en mars. Malheureusement, nous n’avons pas pu le faire. Il y a donc des documents qui seraient prêts à être présentés au Parlement.
Au cours de l’année à venir, les efforts se concentreront sur l’investissement au Canada et sur la COVID-19. Il y aura quelques vérifications. Si je deviens vérificatrice générale, ce seront mes deux grandes priorités. Je m’engage à faire de mon mieux pour transmettre rapidement de l’information au Parlement au sujet de ces deux initiatives.
Bien sûr, nous ignorons combien de temps les programmes liés à la COVID seront en place et, inévitablement et invariablement, les vérifications auront lieu à la fin des programmes.
Si on considère le problème actuel de financement auquel le Bureau du vérificateur général est confronté, est-ce qu’une situation de ce genre s’est déjà produite par le passé?
À ma connaissance, ce n’est pas le cas. Je travaille pour le Bureau du vérificateur général depuis 14 ans et je ne me souviens d’aucune situation semblable.
En ce qui concerne la question du financement, je pense qu’il est important de poursuivre nos discussions et je suis prête à en parler avec les membres du Bureau du Conseil privé et du gouvernement afin d’obtenir ces fonds. Le financement à court terme est important, mais ce qui est encore plus important, à mon avis, c’est de mettre en place pour notre bureau un mécanisme indépendant de financement prévisible et à long terme. Je pense aussi que ce mécanisme devra bien sûr prévoir un rôle pour le Parlement afin que nous rendions des comptes sur ce que nous dépensons.
M. Ricard a aussi dit ceci au Comité des finances de la Chambre des communes :
Vu la nature et l’étendue des travaux que nous estimons devoir réaliser pour les audits du plan « Investir dans le Canada » et de la réponse à la COVID-19, et vu nos ressources qui sont limitées, nous avons dû revoir le calendrier des travaux d’audit de performance actuels et futurs et de présentation des rapports connexes.
Pouvez-vous expliquer l’incidence de ces retards sur la capacité de votre bureau d’assurer la responsabilité financière, ce qui est évidemment votre priorité absolue au sein du gouvernement du Canada? À quel point ces retards entravent-ils votre bureau dans l’exécution de son mandat?
À court terme, et probablement à moyen terme, bien sûr, notre bureau se concentrera sur les vérifications relatives à la COVID-19 et au plan Investir dans le Canada.
Les vérifications que nous comptions initialement faire à l’automne, je crois, sont reportées indéfiniment pour le moment, car nous avons jugé très important de concentrer nos ressources sur ces deux vérifications particulièrement importantes pour le Parlement et pour les Canadiens.
Évidemment, le fait de ne pas pouvoir travailler davantage nuit à la capacité du bureau de s’acquitter de son mandat d’aider le Parlement à demander des comptes au gouvernement. Nous ferons donc de notre mieux pour que nous puissions continuer d’avoir accès à ce financement, et c’est une responsabilité que je prendrai très au sérieux si je suis nommée à ce poste.
L’opposition officielle est votre alliée dans cette enceinte et dans l’autre endroit; nous convenons que la reddition des comptes et la transparence sont importantes, peu importe le gouvernement au pouvoir.
Quand la Chambre des communes a demandé au vérificateur général de vérifier les dépenses occasionnées par la pandémie de la COVID-19, elle a aussi demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin que le Bureau du vérificateur général ait suffisamment de ressources pour effectuer cette vérification ainsi que les vérifications relatives aux infrastructures et aux mandats spéciaux. La vérification du programme d’infrastructure de 187 milliards de dollars doit être terminée avant le 29 janvier 2021. Les vérifications des mandats spéciaux et des programmes liées à la COVID-19 sont prévues pour le 1er juin.
Vu le refus du gouvernement actuel de financer...
Sénateur Housakos, je suis désolée, votre temps est écoulé.
Bienvenue, madame Hogan. Je vous adresse des questions qui préoccupent aussi la sénatrice Renée Dupuis, du Québec, avec qui je me suis concertée.
Comme vous l’avez dit, vous postulez pour une fonction d’agente du Parlement. C’est une fonction extrêmement importante. Ma première question portera donc sur votre compréhension du contexte parlementaire. Quelle est l’autorité du Sénat en en ce qui a trait à sa propre gouvernance et à l’exercice de son privilège parlementaire?
Le Sénat est responsable de sa propre gouvernance et de la surveillance de toutes ses dépenses. Notre bureau peut faire des vérifications seulement si le Sénat l’invite à le faire. Je serai toujours très heureuse de vous aider à améliorer la surveillance de vos dépenses et votre reddition de comptes.
Merci. Je vais vous en donner l’occasion immédiatement avec la deuxième question que la sénatrice Dupuis et moi vous posons, qui porte sur le suivi de vos recommandations à la suite du rapport que le vérificateur général a publié en 2015 sur les dépenses du Sénat entre le 1er avril 2011 et le 31 mars 2013. Vous aviez constaté des problèmes et des lacunes significatives quant à la surveillance, à la reddition de comptes et à la transparence.
Ma question comporte deux volets. Dans un premier temps, êtes-vous au courant des mesures de redressement que le Sénat a prises depuis pour améliorer sa gouvernance? Deuxièmement, une de vos recommandations portait sur la création de ce que le vérificateur général a appelé un organisme externe indépendant qui procéderait à l’audit et à la vérification du Sénat. Est-ce que vous êtes d’avis, à la lumière des suivis que le Sénat a apportés par suite du rapport de 2015, qu’un comité d’audit et de vérification composé de sénateurs et de membres externes, qui siégerait principalement en public, serait mieux adapté au contexte qu’un organisme totalement externe, tel qu’il a été proposé, si l’on tient compte du privilège parlementaire?
Je vous remercie de cette précision. Je n’étais pas du tout impliquée dans l’audit du Sénat. En me préparant pour ma comparution d’aujourd’hui, j’ai pris le temps de lire le rapport et j’ai noté que le Sénat a commencé à faire des changements à la suite de nos recommandations. En ce qui a trait au comité indépendant, en tant que vérificateur externe pour qui l’indépendance est un aspect très important, oui, pour qu’un audit soit objectif, je crois que des membres indépendants permettraient à n’importe quelle organisation de faire une bonne surveillance et d’assurer l’objectivité et l’indépendance du processus décisionnel.
Dans le contexte du privilège parlementaire, est-ce que vous croyez qu’une formule qui serait mieux adaptée au Sénat pourrait être un comité formé de sénateurs et de membres externes, dans le contexte d’un comité qui siège principalement en public? Est-ce qu’une adaptation de ce genre vous semblerait pertinente pour le Sénat, qui est l’une des deux Chambres du Parlement?
En tenant compte de la responsabilité du Sénat et de sa propre gouvernance, je ne peux pas avoir un point de vue sur ce que vous croyez être la meilleure décision, mais je vous encourage à améliorer la reddition de comptes et la surveillance. De plus, à titre de vérificateur externe, je crois que l’indépendance est essentielle pour la reddition de comptes.
Je vous remercie.
Bienvenue au Sénat. Félicitations pour votre nomination au poste de vérificatrice générale du Canada.
Vous possédez une expérience impressionnante de professionnelle et de cadre dans les secteurs privé et public. Je suis très heureuse de voir qu’une personne de votre calibre a soumis sa candidature à ce poste extrêmement important et exigeant, surtout en cette période difficile et sans précédent pour notre pays.
J’ai deux questions à vous poser cet après-midi. Quand l’ancien vérificateur général, M. Ferguson, est venu au Sénat en 2011, la sénatrice Nancy Ruth lui a posé une question concernant la vérification des réalisations du gouvernement pour ce qui est de l’analyse comparative entre les sexes. Comme vous le savez, le gouvernement actuel s’est engagé à se servir de l’analyse comparative entre les sexes plus, une méthode d’analyse qui, vous le savez bien, est employée pour évaluer l’effet des politiques, des programmes et des mesures sur divers groupes de femmes, d’hommes et de personnes non binaires en tenant compte de l’intersectionnalité de multiples facteurs liés à l’identité.
Pourriez-vous nous dire si vous êtes au courant de ce qu’a réalisé le gouvernement du Canada pour respecter cet engagement? Que feriez-vous pour que davantage de progrès puissent être accomplis?
Malheureusement, je ne connais pas très bien le rendement du gouvernement à cet égard. Je n’ai fait partie d’aucune des équipes de notre bureau chargées d’étudier cette question.
Une partie du rôle du vérificateur général consiste à vérifier que le gouvernement suit les politiques qu’il établit et honore les engagements qu’il prend.
Pour mieux répondre à votre question, il me faudrait examiner ce que fait le gouvernement. Si nous décidons de revenir sur cette question, c’est manifestement l’angle d’approche que nous adopterions pour vérifier que le gouvernement respecte ses engagements.
Merci beaucoup. Nous serions ravis d’en entendre davantage plus tard à ce sujet.
Ma deuxième question, pour faire suite aux questions du sénateur Housakos, porte sur le fonctionnement dans un environnement à ressources limitées. Comme nous le savons tous, en raison de la pandémie de COVID-19, les dépenses du gouvernement ont pris beaucoup d’ampleur pour offrir une aide d’urgence aux Canadiens.
Nous savons — et il a été mentionné déjà ici aujourd’hui — que les ressources de votre bureau étaient déjà limitées avant la pandémie. Ce problème risque de s’aggraver prochainement; qui sait? Vous vous dites prête à solliciter les fonds dont vous aurez besoin. Étant donné que les ressources risquent d’être encore plus limitées, quelles mesures créatives prendriez-vous pour vous acquitter néanmoins de vos fonctions et fournir au Parlement les renseignements dont nous avons besoin pour surveiller les dépenses du gouvernement et les résultats des programmes qu’il offre, surtout après cette période de grandes dépenses pour des mesures d’urgence?
Vous avez raison de dire qu’avant la pandémie de la COVID-19, nous étions déjà aux prises avec une pénurie de ressources et des problèmes de capacité en raison de l’augmentation des dépenses gouvernementales et de la création de sociétés d’État. Nous n’avons pas reçu de financement supplémentaire pour cette charge de travail additionnelle. Grâce à la COVID-19, nous savons maintenant qu’il faut consacrer davantage de ressources à la création d’un produit qui renforcera la capacité des parlementaires à obliger le gouvernement à rendre compte des dépenses qu’il a engagées pendant la pandémie.
J’ai déjà commencé à penser à des solutions créatives pour remédier à ce problème et je continuerai de travailler avec mon équipe pour en trouver d’autres. Par exemple, nous pourrions trouver une façon de communiquer l’information plus rapidement au Parlement ce qui, nous l’espérons, encouragera le gouvernement à prendre des mesures sans tarder. Nous pourrions aussi remplacer la méthode de vérification traditionnelle, qui s’effectue après coup, par des vérifications en temps réel. De cette façon, l’information pourrait être diffusée plus rapidement, ce qui nous permettrait d’apporter sur-le-champ des changements visant à améliorer les programmes pour les Canadiens.
Merci beaucoup.
Tout d’abord, je tiens à vous féliciter. Il est agréable d’entendre une future vérificatrice générale bilingue. Pouvez-vous nous expliquer comment vous voyez votre rôle en relation avec la politique? Vous êtes un agent du Parlement. Est-ce que le politique devrait avoir un impact sur vos décisions et vos recommandations? L’impact politique de vos recommandations doit-il être pris en compte?
Je suis contente d’être bilingue. Je dois remercier mes parents de m’avoir fait ce cadeau, soit l’apprentissage du français, quand j’étais jeune. Je vous remercie. Notre bureau, comme vous l’avez mentionné, est un agent du Parlement. Deux des principales caractéristiques du Bureau du vérificateur général sont l’indépendance et l’objectivité.
On ne fait donc pas de commentaires sur la politique ou sur les décisions du gouvernement, mais on doit vérifier que le gouvernement suit ses propres politiques. Si je deviens vérificatrice générale, ce sera très important pour moi de rester honnête, de respecter mes valeurs en ce qui a trait à l’intégrité et d’examiner tout enjeu avec objectivité.
Votre travail est d’enquêter et de vérifier si l’argent des Canadiens est bien dépensé. Nous avons, cette année, dépensé plus d’argent que jamais dans toute l’histoire du pays. Le directeur du budget parle d’un montant de 172 milliards environ. Par où allez-vous commencer?
Comme vous l’avez mentionné, la pandémie de COVID-19 entraîne beaucoup de dépenses. Une fois que nous avons reçu la recommandation de faire l’audit, nous avons commencé à nous organiser. Nous nous trouvons encore dans ce processus-là.
Pour moi, la première étape serait de m’assurer que je connais toute l’étendue des dépenses, pour être capable ensuite de communiquer avec les sous-ministres pour savoir ce qui les préoccupe, de parler avec les parlementaires pour m’assurer qu’on peut commencer à vérifier les secteurs les plus importants ou les secteurs où l’on pourrait avoir plus rapidement un plus grand impact.
Selon moi, la vérification qui fera suite à la COVID-19 durera plus d’un an. On n’a pas encore décidé s’il y aura plusieurs rapports ou un seul gros rapport. Toutes ces décisions doivent encore être prises, mais on va essayer de diviser tout cela en blocs qui seront plus faciles à gérer et à vérifier pour nous, plus faciles à comprendre pour les Canadiens et qui permettront de mieux travailler avec les parlementaires.
En répondant à la question du sénateur Housakos tout à l’heure, sur l’analyse coût-bénéfice, vous avez dit qu’il n’y avait pas vraiment de coût-bénéfice, qu’il n’y avait pas nécessairement de petites dépenses et que vous alliez examiner les différents éléments pour vous assurer que ce sont de bonnes pratiques. Cependant, vous venez de dire que vous alliez examiner ce qui a plus d’impact du point de vue financier. N’y voyez-vous pas une contradiction?
Je suis désolée, je ne me suis peut-être pas bien exprimée. Je voulais plutôt dire : ce qui a le plus d’impact pour les Canadiens. Évidemment, parfois, c’est là où il y a le plus d’argent qui est dépensé; parfois, c’est un programme ou un service essentiel aux Canadiens. Je voudrais m’assurer qu’on trouve un bon équilibre entre les dollars dépensés et l’impact de ces dépenses effectuées pour améliorer la vie des Canadiens.
Normalement, lorsque vous faites votre vérification, vous vous assurez que les dépenses sont faites en fonction des directives, des politiques et des paramètres qui sont mis en place. Comment ferez-vous votre vérification ou vos analyses si la directive est d’envoyer de l’argent de toute manière et que la fraude n’est pas grave?
Dans la planification de tout audit, comme vérificateur, on doit considérer la fraude ou le risque de fraude et on doit s’assurer que, si le risque est élevé, on doit suivre davantage les procédures.
Pour la COVID-19, ce à quoi je m’attends, c’est que le gouvernement a réagi vite et, dans n’importe quelle organisation, lorsqu’on réagit vite, il y a un risque d’erreur. En tant que vérificatrice, je m’attends à ce que les ministères suivent des procédures pour identifier les erreurs et, après avoir adopté une bonne démarche pour traiter les erreurs, les ministères pourront récupérer l’argent à l’aide d’un mécanisme quelconque.
Je pense à la lettre que le secrétaire du Conseil du Trésor a envoyée aux ministères au début de la crise de la COVID-19 en disant qu’il était important de rendre service aux Canadiens, mais qu’il était aussi important de bien documenter les décisions pour assurer la reddition de comptes. On commencerait donc là, pour s’assurer que les décisions ont été bien prises et bien documentées et pour s’assurer que la surveillance a été bien effectuée également.
Avec le télétravail, autant pour celui qui fait l’objet d’un audit que pour l’auditeur, comment comptez-vous commencer vos vérifications avec ces contraintes de distance? Cela amène certaines limites par rapport à la vérification et au travail.
On travaille à distance depuis huit à neuf semaines. Selon ma propre expérience, il faut un peu plus de temps à la personne faisant l’objet d’un audit et à l’auditeur pour obtenir de l’information. On fait beaucoup confiance à la technologie. Il faut être créatif pour être certain d’avoir la bonne documentation, il faut avoir de la patience et reconnaître que les personnes qui subissent un audit ont aussi de la difficulté à nous fournir de l’information. Donc, cela n’est pas impossible de faire une vérification à distance; c’est juste un peu plus compliqué et cela prend plus de temps.
Vous avez beaucoup parlé de documentation et du fait qu’il faut bien documenter. Mis à part la directive du Conseil du Trésor sur l’obligation de documenter, on n’en fait pas mention dans la loi. Je me rappelle que, lorsqu’on a étudié la Loi sur l’accès à l’information, j’avais proposé un amendement sur l’obligation de documenter. Est-ce que le fait que le gouvernement ne soit pas obligé de documenter les motifs pour lesquels il prend une décision vous pose problème lorsque vous faites des audits?
On s’attend à ce que les justifications des décisions qui sont prises soient documentées d’une quelconque façon, absolument. Si cela n’est pas documenté, il est très difficile de démontrer que les décisions ont été prises en bonne et due forme. Donc oui, je m’attendrais à cela si j’étais vérificatrice.
Très bien, merci.
Bienvenue au Sénat, madame Hogan. Je crois que vous êtes Montréalaise de naissance, alors je suis content d’accueillir une autre personne originaire de Montréal ici, à Ottawa, dans un poste important.
Ma première question est la suivante : est-ce que le Bureau du vérificateur général a l’intention d’adapter les principes d’audit pour tenir compte de l’aide d’urgence, comme la Prestation canadienne d’urgence, la Prestation canadienne d’urgence pour les étudiants, et cetera? Tous ces programmes ont été conçus pour aider les Canadiens rapidement, avec le moins de formalités possible. On a même dit, d’après une note de service interne qu’on a vue dans les médias hier, que les fonctionnaires avaient reçu l’instruction de ne pas faire trop faire de vérifications. Lors de vos vérifications, allez-vous adapter vos principes de vérification à la situation opérationnelle de la pandémie, ou est-ce que les principes habituels vont s’appliquer?
Comme je viens de le mentionner, lorsqu’une organisation prend une décision avec rapidité, il y a toujours un risque d’erreur. Oui, on va s’adapter au fait que les processus habituels ont probablement été modifiés pour tenir compte de la distance, par exemple que des approbations ont probablement été données par voie électronique au lieu de la manière habituelle.
Il faut tout de même avoir la preuve que les ministères ont bien décidé de dépenser prudemment et qu’ils se sont conformés à des politiques qui aident à la bonne gestion des fonds publics.
Le premier ministre disait lui-même hier qu’il y avait probablement 200 000 prestataires de la Prestation canadienne d’urgence dont l’admissibilité était douteuse. Je comprends qu’on parle de 400 millions de dollars au cours du premier mois du programme. Est-ce que le montant en jeu justifierait une vérification plus poussée?
Il est très difficile de dire si ce montant justifie une vérification plus poussée. Toutes les dépenses liées à la pandémie justifient une vérification plus poussée. Dès que nous serons à l’affût d’une possibilité de fraude, il faudra faire enquête. Donc, nous nous attendrons à ce que les ministères aient des processus ou des mécanismes en place afin de repérer les erreurs, de faire des suivis, de s’ajuster et, au besoin, de collecter les fonds qui ont été versés par erreur.
Ma prochaine question concerne le fait que vous travaillez pour le Bureau du vérificateur général depuis environ 14 ans maintenant. J’aimerais vous poser une question typique d’entrevue. Qu’avez-vous appris au cours de ces 14 années? Que devrions-nous améliorer?
Quelles sont les leçons apprises au sujet de notre bureau et du gouvernement?
Oui, au sujet de votre bureau et du gouvernement.
Notre bureau compte de nombreuses personnes passionnées d’un professionnalisme exceptionnel qui cherchent toujours à se dépasser afin qu’on puisse faire mieux. C’est probablement la plus grande leçon que j’ai apprise depuis que j’y travaille : toujours se questionner sur nos pratiques afin de nous améliorer, d’obtenir de meilleurs résultats et une plus grande valeur ajoutée pour le Parlement et pour les Canadiens. C’est probablement la chose la plus importante que j’ai apprise et celle que je respecte le plus au sein de notre organisation. Je crois que cette leçon peut aussi s’appliquer au gouvernement. Nous devrions tous chercher à améliorer notre travail et à faire du Canada un meilleur pays.
Merci beaucoup d’être ici aujourd’hui. Comme vous pouvez le constater, les sénateurs ont des expériences variées en matière de vérifications au Canada et sur la scène internationale, de recours à des vérificateurs, de surveillance et d’élaboration de principes communs.
En parcourant votre impressionnant curriculum vitæ, j’ai vu que vous avez participé à des essais à l’échelle du gouvernement et à des vérifications du rendement du système de paie Phénix. Nous savons ce qui s’est passé avec le système Phénix et la misère qu’il a fait subir à des milliers de fonctionnaires canadiens. D’ailleurs, le Comité sénatorial des finances nationales s’est rendu sur la rue Victoria à Miramichi pour discuter directement avec les employés, et cela lui a permis d’avoir un excellent portrait de la situation. Considérant l’expérience que votre parcours vous a permis d’acquérir, notamment en ce qui a trait au système Phénix, j’aimerais savoir quels enseignements vous tirez des ratés de ce système et de la vérification dont il a fait l’objet. Que feriez-vous pour mettre ces enseignements en pratique?
Comme je l’ai mentionné dans ma déclaration liminaire, j’ai été responsable de la vérification des états financiers consolidés du gouvernement du Canada pendant environ sept ans. Près de trois de ces vérifications portaient sur des tests approfondis et détaillés relatifs à Phénix. Je sais que la majeure partie de mon équipe de vérification s’est en fait rendue à Miramichi. Je tiens à dire qu’il est extrêmement important de payer les gens en temps voulu et selon les montants exacts. C’est vrai pour tout paiement effectué par le gouvernement, qu’il s’agisse de la Sécurité de la vieillesse, de l’assurance-emploi ou de la paie. Tous les montants que le gouvernement paie doivent être versés à temps et correctement.
Ce que j’ai appris de toutes ces expériences, c’est que les grands projets informatiques sont toujours plus complexes et difficiles que ce que l’on peut imaginer, et qu’il est extrêmement important de les planifier correctement et de veiller à ce qu’il y ait une bonne supervision et une bonne reddition de comptes. J’ai toujours cru fermement qu’il fallait dire les choses telles qu’elles sont et veiller à fournir des informations précises et complètes aux décideurs, et je crois que ce sont des éléments que nous avons indéniablement considérés comme devant être améliorés.
Si je suis nommée vérificatrice générale, j’aimerais que nos services soient associés plus tôt aux projets informatiques majeurs que le gouvernement planifie d’entreprendre. Nous savons que de nombreux projets sont en cours et que tout système de bonne gouvernance devrait comporter une forme de contrôle indépendant, qu’il s’agisse de notre bureau ou d’une autre structure au sein des ministères qui s’occupent de grands projets informatiques.
Je vous félicite pour votre nomination, c’est un plaisir de vous compter parmi nous aujourd’hui.
Le 11 mai 2020, le National Post a rapporté qu’une note de service interne émise par Emploi et Développement social Canada demandait aux employés du ministère de ne pas interrompre les paiements ni de déclencher d’enquêtes pour abus potentiel en lien avec l’allocation de la Prestation canadienne d’urgence. Je suis préoccupé — et je vous ai entendu parler d’effectuer des vérifications par rapport aux prestations accordées en raison de la COVID-19 — par le fait que, ces dernières années, il y a eu des problèmes concernant le montant du financement dont dispose le Bureau du vérificateur général pour mener les vérifications que vous avez déjà planifiées, et qui sont prévues pour les trois à sept prochaines années. Le gouvernement fédéral s’est-il engagé à financer de futures vérifications liées à la COVID-19, car je pense que ces vérifications risquent de dépasser largement le budget dont vous disposez présentement?
Comme je le disais tout à l’heure, le Bureau réclame depuis des années — depuis 2017 pour être exacte — que son budget soit augmenté de manière permanente. Nous avons reçu de l’argent en 2018 et nous avons renouvelé notre demande dans le plus récent budget, qui n’a pas encore été présenté.
Le financement à court terme est extrêmement important, mais nous avons aussi besoin de financement prévisible à long terme. Nous ne devrions jamais avoir à compter sur les ministères qui font l’objet d’une vérification pour assurer notre avenir financier. Personnellement, je m’engage — si je suis nommée — à tout faire pour que le Bureau du vérificateur général soit une source d’excellence et qu’il soit mieux financé. Cela dit, je continuerai aussi à faire des démarches pour qu’un mécanisme indépendant de financement à long terme soit créé afin que notre organisation puisse bien s’acquitter de son mandat.
J’aimerais revenir sur les vérifications portant directement sur la COVID-19. Je sais que vous vous êtes engagée personnellement devant nous à en faire et je crois comprendre que le gouvernement s’y est engagé lui aussi. Dans les discussions qu’il a eues avec le Bureau du vérificateur général depuis trois mois, le gouvernement a-t-il promis du financement pour les différentes initiatives qu’il a annoncées ou pour la vérification de tous ces programmes?
Pas à ma connaissance, non.
Bonjour, madame Hogan. Je profite, moi aussi, de l’occasion pour vous féliciter. Comme vous l’avez mentionné, il y a déjà presque 15 ans que vous travaillez au Bureau du vérificateur général du Canada. Vous arrivez en pleine crise de la COVID-19, et j’ai la certitude que vous trouverez l’occasion de faire des vérifications, dont on attendra vos conclusions avec impatience.
Sans vouloir m’imposer, je pense que les Canadiens seraient heureux d’apprendre pourquoi le Canada s’est retrouvé sans les inventaires de masques nécessaires pour faire face à une crise sanitaire, ou encore, de savoir comment nous allons gérer les milliards de dollars qui sont versés pour aider les citoyens et les entreprises.
Compte tenu de votre longue expérience, quelle évaluation faites-vous de l’impact de vos rapports, dans d’autres domaines que dans les médias? Est-ce que les correctifs sont à la hauteur de vos attentes? Trouvez-vous qu’on vous écoute bien lorsque vous présentez vos rapports?
Nos rapports ont un impact et ils obtiennent du succès uniquement si le Parlement les étudie et si les ministères sont fidèles à leurs engagements. La meilleure façon pour le Parlement de soutenir notre bureau est d’étudier nos rapports et de faire un suivi auprès des ministères.
De notre côté, j’aimerais que nous continuions à faire des suivis auprès des ministères sur une base un peu plus régulière pour nous assurer qu’ils ont bien respecté leurs engagements.
Merci beaucoup, madame.
Bienvenue au Sénat, madame Hogan. Je vous félicite de votre nomination comme vérificatrice générale.
Je tiens à souligner que la nomination à ce poste est d’une durée de 10 ans, soit un bon bout de temps. Au fil des années, il y a eu divers vérificateurs généraux. Les priorités ont été adaptées et modifiées à diverses reprises en fonction des circonstances changeantes, mais aussi des personnalités des titulaires du poste. Je me rappelle de J. J. Macdonell, le premier vérificateur général que j’ai connu il y a bien des années. Ce dernier avait convaincu le gouvernement de l’époque qu’il fallait aller au-delà de la vérification de la conformité financière pour procéder à ce qu’il appelait des vérifications de l’optimisation des ressources. À l’époque, on a modifié le mandat du vérificateur général pour y inclure la réalisation de vérifications de l’optimisation des ressources. M. Macdonell avait affirmé ceci : « Je ne crois pas que ces vérifications devraient représenter plus de 10 % de notre budget. »
Bien sûr, une quarantaine d’années plus tard, j’ai vu dans une vérification que ce pourcentage était passé à 78 %. Je ne sais pas à combien il s’élève aujourd’hui. Là où je veux en venir, c’est que les vérifications de l’optimisation des ressources ont modifié considérablement les priorités du vérificateur général, de même que les limites financières ou les problèmes de ressources.
Certaines personnes abordent particulièrement bien ce sujet. Je pense en particulier à Donald Savoie, qui est probablement le plus grand spécialiste canadien en administration et en gestion publiques. Dans un de ses ouvrages, parlant d’optimisation des ressources, il dit :
[...] les médias et les partis de l’opposition ne vont pas s’aventurer à remettre en question le travail du BVG, car ce n’est pas dans leur intérêt de le faire. Il est préférable de continuer de consacrer des fonds publics à des mesures qui ne servent pas à grand-chose d’autre qu’alimenter le jeu des accusations par la remise en question du travail du BVG.
Dans un autre ouvrage, il dit : « Les agents du Parlement sont différents des comités parlementaires. » À bien des égards, le vérificateur général compte parmi les principaux agents du Parlement.
M. Savoie ajoute :
[...] ils travaillent à partir d’Ottawa et sont à même de se concentrer exclusivement sur leur mandat sans égard à toute considération politique. De plus, ils n’ont pas à craindre que des organismes de surveillance mettent en doute la qualité de leur travail. Sharon Sutherland estime que le rôle du vérificateur général, par exemple, a complètement changé lorsque les comités parlementaires sont devenus des « intervenants » et des « clients » au lieu d’être la source du rôle et du pouvoir du Bureau du vérificateur général.
Elle demande : qui surveille l’organisme de contrôle?
Je ne m’attends pas à ce que vous souscriviez aux critiques faites à votre bureau, mais j’aimerais vous entendre au sujet de la croissance exponentielle, au cours de cette période, des processus de vérification de l’optimisation des ressources. Êtes-vous prête au moins à vous engager à effectuer un examen indépendant de vos processus de vérification de l’optimisation des ressources afin de déterminer le juste équilibre entre la vérification de conformité financière et la vérification de l’optimisation des ressources? La question est simple.
Voici ma réponse. Dans le contexte actuel, la vérification de l’optimisation des ressources, comme vous l’appelez, ou vérification de rendement, n’occupe pas une grande partie de notre budget, car c’est une démarche discrétionnaire. Beaucoup de nos efforts, de nos ressources et de nos vérificateurs se consacrent au travail que nous devons effectuer selon la loi, à savoir la vérification des comptes et les examens spéciaux des sociétés d’État.
Vous m’avez parlé de nous soumettre à un examen en me demandant si je m’engagerais à ce que ce soit le cas. Tout à fait. Comme notre bureau fait déjà l’objet de vérifications de la part d’un cabinet externe, nos états financiers sont donc vérifiés. Habituellement, une fois par mandat d’un vérificateur général, le bureau appelle d’autres bureaux de vérification supérieurs dans le monde à venir auditer tous nos processus, ce qui inclut nos processus de vérification de l’optimisation des ressources.
J’ai assisté à l’évaluation par les pairs de Sheila Fraser, puis à celle de Michael Ferguson, et si j’étais nommée vérificatrice générale, je m’arrangerais pour me soumettre à une évaluation par les pairs avant la fin de mon mandat.
Je vous remercie d’être avec nous. J’aimerais particulièrement remercier le Bureau du vérificateur général pour les vérifications que vous avez effectuées à l’égard de Service correctionnel Canada au fil des ans. C’est un travail crucial.
Lorsque les sénateurs ont étudié le projet de loi C-83, l’an dernier, nous avons tenté de remédier à de graves préoccupations concernant le manque de surveillance à l’égard de Service correctionnel Canada, qui est notamment attribuable à la difficulté d’obtenir des renseignements exacts au sujet de ce qui se passe dans les pénitenciers fédéraux du Canada, car c’est Service correctionnel Canada qui contrôle ce qui s’y passe, ce qui est documenté et qui a accès à l’information dans les prisons et à propos de celles-ci.
Le dernier rapport que vous avez publié concernant le respect en milieu de travail à Service correctionnel Canada reflète le danger qu’une telle culture représente pour les droits protégés par la Charte et les droits de la personne des détenus ainsi que ceux des personnes qui travaillent dans les prisons. Selon ce rapport, les deux tiers des employés de Service correctionnel Canada ont exprimé de graves préoccupations à l’égard de la culture organisationnelle, notamment en ce qui a trait à la responsabilisation individuelle. Près de la moitié d’entre eux ont affirmé s’attendre à ce que quiconque porte plainte pour harcèlement, discrimination ou violence en milieu de travail fasse l’objet de représailles.
Si les gestionnaires et le personnel se traitent ainsi les uns les autres, on ne peut qu’imaginer à quel point la situation doit être horrible pour les prisonniers.
J’aimerais que vous parliez de l’approche que vous adopteriez pour les futures vérifications de Service correctionnel Canada, en particulier, mais aussi d’autres organismes gouvernementaux qui présentent un grave risque d’asymétrie de l’information et des difficultés redditionnelles connexes. Que proposeriez-vous pour remédier à de tels déséquilibres de pouvoir?
Chaque organisation a une culture qui lui est propre. Chaque culture présente des points positifs et des avantages, et il incombe aux dirigeants de créer un milieu sûr, qui permet aux employés d’offrir le meilleur d’eux-mêmes au travail. J’en suis profondément convaincue, et il s’agit d’un élément du style de leadership que j’apporte à notre organisation. Je pense d’ailleurs que tous les dirigeants devraient faire preuve d’une telle attitude au sein de leur organisation.
Comme je l’ai mentionné plus tôt, si l’organisation ne consigne pas les motifs justifiant ses décisions, il est évidemment difficile de déterminer si elle agit en tenant dûment compte de la situation financière, de l’efficience et du milieu en question. L’objectif de la vérification d’optimisation des ressources consiste à s’assurer non seulement que les mécanismes appropriés sont en place, mais aussi qu’il existe des façons de mesurer les extrants et les résultats.
Dans des situations de ce genre, je mettrais l’accent sur les résultats. Le cas échéant, nos recommandations ne viseraient pas à alourdir les processus, mais plutôt à améliorer les résultats, les avantages et les programmes.
J’ai une autre brève question. Dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé de vos préoccupations concernant les peuples autochtones du Canada et de votre engagement à promouvoir leurs intérêts. Malgré les dispositions du Code criminel et de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, ainsi que les appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation et les appels à la justice découlant de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées pour remédier à l’inégalité systémique et réduire le nombre d’Autochtones en prison, nous savons que cela ne s’est pas fait. En fait, en ce moment même, 30 % des prisonniers fédéraux sont des Autochtones, et 42 % des femmes qui purgent une peine fédérale sont des Autochtones.
Je suis curieuse de savoir comment vous procéderiez pour vérifier cela, sachant que votre bureau s’est penché sur certains aspects de cette question dans le passé. Comment effectueriez-vous la vérification en ce qui a trait aux inégalités flagrantes qui existent et à la décision d’affecter des ressources d’une manière qui ne respecte pas certains articles du Code criminel et de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition qui ont été mis en place précisément pour réduire le nombre de prisonniers autochtones?
Comme vous l’avez mentionné et comme je l’ai indiqué aussi dans ma déclaration préliminaire, notre organisation et le Bureau du vérificateur général du Canada continuent d’accorder énormément d’attention aux populations autochtones. C’était une priorité pour Mme Fraser, ainsi que pour M. Ferguson. En fait, il a déclaré que le manque d’action était un « échec incompréhensible ».
Si j’étais nommée et que je dirigeais des audits sur d’autres questions autochtones, je commencerais par examiner les engagements qui ont déjà été pris et à faire en sorte que des actions soient entreprises. J’encouragerais le Parlement à veiller à ce que les organisations aient des comptes à rendre sur la réalisation de ces engagements.
Puisque j’ai déjà eu à jouer des rôles de chacun des côtés d’un audit, je suis à même de savoir à quel point il est important pour un vérificateur externe de bien comprendre l’organisation, et je connais les difficultés liées à la concrétisation de son mandat. Étant donné que je n’ai pas mené un grand nombre d’audits sur les questions autochtones, je commencerais pas m’assurer de bien comprendre les inquiétudes et les pressions, pour ensuite me concentrer sur la proposition de recommandations qui amélioreraient la situation. Je veillerais à ce que les ministères aient des comptes à rendre sur leurs engagements à améliorer les choses.
Merci. Je vous offre mes meilleurs vœux de succès.
Merci d’être parmi nous ce soir et félicitations pour votre nomination.
Malgré le peu de temps que nous avons passé avec vous, je vois que vous comprenez les deux dimensions du poste que nous espérons que vous occuperez bientôt, soit le volet professionnel du rôle de vérificateur général et son rôle de PDG, c’est-à-dire le volet leadership. Selon vos réponses, vous comprenez manifestement ces deux aspects.
Je souhaite aborder très rapidement la dimension leadership. Vous avez parlé des valeurs. Vous avez mentionné certaines priorités. Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet? Ayant travaillé au sein de cette organisation pendant 14 ans, quelles sont les choses que vous aimeriez aborder, changer et améliorer? Particulièrement, je souhaiterais connaître vos plans en ce qui a trait aux valeurs clés et aux priorités en matière de ressources humaines.
J’ai fait partie de l’équipe de gestion et de la direction du bureau tout au long des 14 années que j’y ai passées — plus récemment, j’ai siégé au conseil de direction. Notre organisation est très chanceuse d’avoir un conseil de direction très actif qui se soucie beaucoup des employés. Veiller à la réussite des gens avec qui je travaille est le véritable point d’ancrage de mon leadership. Favoriser la croissance personnelle de tous les membres de l’organisation serait tout à fait un de mes objectifs, car leur croissance se traduit par de meilleures vérifications qui, elles, se traduisent par un meilleur rendement pour le Canada.
En ce qui a trait aux défis que j’aimerais relever sans tarder, j’aimerais bien que nous poursuivions sur la voie que nous avons empruntée pour moderniser notre façon de travailler — non seulement les processus, mais aussi notre façon d’aborder les vérifications, de suivre le rythme des changements dans le domaine de la vérification. Nous devons investir dans des outils informatiques qui nous permettront de mieux traiter de grandes quantités de données et de régler le problème des technologies perturbatrices qui existent, pour éviter qu’elles nous empêchent de mener des vérifications efficaces, peu importe qu’il s’agisse de vérifications financières ou de rendement.
J’aimerais aussi examiner sérieusement — je sais qu’on a déjà commencé — comment nous nous y prenons pour communiquer de l’information et produire des rapports. Un rapport technique détaillé convient aux experts en la matière, mais il y a beaucoup d’autres gens qui s’intéressent à notre travail, pour qui il serait utile de le présenter différemment. Je veux vraiment explorer les manières de joindre plus de Canadiens et de faire en sorte que notre travail ait une plus grande incidence.
Merci.
Merci, madame Hogan, et bienvenue au Sénat.
La Chambre des communes a demandé que le Bureau du vérificateur général entreprenne trois vérifications spéciales, soit une vérification du programme d’infrastructure de 187 milliards de dollars, une vérification des mandats spéciaux et une vérification du plan d’intervention économique pour répondre à la COVID-19. Comme nous le savons, le gouvernement dépense des montants records pour lutter contre la COVID-19 et continuera probablement de le faire pendant un certain temps.
Comme le budget du Bureau du vérificateur général est insuffisant pour des circonstances normales, et compte tenu de l’ampleur du plan d’intervention économique pour répondre à la COVID-19, est-il possible que le niveau de financement existant soit insuffisant pour la réalisation d’une ou de plusieurs de ces vérifications?
Comme vous l’avez indiqué, on nous a demandé de faire trois vérifications spéciales. Je crois comprendre qu’aucun mandat particulier n’a été attribué pour le moment. Notre organisation a concentré ses efforts sur la vérification de rendement à l’égard du plan Investir dans le Canada et de la COVID-19.
Comme je l’ai souligné plus tôt, pour que ces deux vérifications importantes reçoivent l’attention qu’elles méritent et soient menées adéquatement, nous avons dû reporter d’autres activités. Il est donc vrai que les difficultés qui touchent nos ressources ont une incidence sur notre capacité de faire un travail considérable et exhaustif pour aider le Parlement à s’acquitter de sa responsabilité de demander des comptes au gouvernement.
Lorsqu’il a témoigné devant le Comité des finances de la Chambre des communes, M. Ricard a dit que le Bureau du vérificateur général avait commencé à analyser les aspects du programme liés aux dépenses, notamment en ce qui concerne les liquidités, l’aide aux particuliers et aux entreprises, la santé et la sécurité. Il a également précisé que le Bureau du vérificateur général se penche sur les mesures d’urgence et les préparatifs en vue de futures éclosions de COVID-19 ou d’autres pandémies.
En tant que nouvelle vérificatrice générale, allez-vous poursuivre le travail entrepris par M. Ricard, selon sa planification, en envisageant la possibilité de présenter un rapport provisoire, ou allez-vous tenter d’analyser les choses différemment, d’examiner d’autres aspects et éléments et de mettre en place de nouvelles méthodes et mesures pour effectuer la vérification?
Comme je l’ai dit plus tôt, lorsque notre organisation a accepté d’effectuer une vérification de la réponse à la COVID-19, elle a mis sur pied un comité directeur qui est formé de nombreux membres du conseil de direction, et j’en fais partie. J’ai donc collaboré étroitement avec M. Ricard en ce qui concerne la prise des décisions et la détermination de l’ampleur de l’étude.
Je suis résolue à soumettre l’information au Parlement dès que nous le pourrons. Nous explorons en ce moment plusieurs possibilités : les types de rapports provisoires que nous pouvons faire, le nombre de rapports que nous pouvons produire et les délais potentiellement plus courts pour la publication de rapports moins volumineux. Le comité directeur n’écarte aucune option alors qu’il réfléchit à la meilleure façon de soumettre un rapport sur le sujet au Parlement afin que vous puissiez l’utiliser dans le cadre de votre travail et que les Canadiens puissent mieux saisir la situation.
J’aimerais maintenant revenir sur des propos du sénateur Dalphond au sujet de la reddition de comptes par l’Agence du revenu du Canada ou l’ARC. Il a mentionné que l’ARC a dit que même en cas de possibilité de fraude, il fallait aller de l’avant sans trop faire de vérifications.
J’aimerais savoir ce que vous en pensez sur le plan de la reddition de comptes. Si votre nomination est approuvée, comment cela influera-t-il sur les vérifications menées par le Bureau du vérificateur général concernant le traitement des demandes de prestations accordées en raison de la COVID-19 par l’Agence du revenu du Canada et Emploi et Développement social Canada, étant donné que M. Ricard a déjà commencé à consulter les fonctionnaires sur les activités des ministères et organismes chargés du déploiement du programme?
Dans le passé, notre organisme a effectué des vérifications de trop-payés. Nous en avons déjà vu dans le régime d’assurance-emploi, et nous avons recommandé au ministère de les surveiller.
Comme je l’ai mentionné plus tôt, quand les organisations prennent des décisions rapidement, elles peuvent commettre des erreurs. Nous devons nous assurer qu’elles disposent d’un mécanisme pour détecter ces erreurs et qu’elles ont une idée claire des mesures qu’elles doivent prendre pour les corriger, notamment la récupération des sommes versées par erreur.
Félicitations, madame Hogan.
Je suis l’une des trois personnes qui ont travaillé avec le vérificateur général et son personnel lorsqu’ils ont effectué la vérification du Sénat. Ce fut toute une expérience.
Je vous ai écouté attentivement. Vous avez parlé de la nécessité de communiquer l’information et de moderniser notre façon de travailler. Il semblerait, d’après ce que vous avez dit, que vous voulez transformer la culture du Bureau du vérificateur général. Peut-être que le mot « transformer » est un peu fort, alors je dirais plutôt que vous souhaitez moderniser la culture ou la rafraîchir. La technologie jouerait probablement un rôle important dans cette approche. Lorsque nous avons effectué la vérification du Sénat avec le Bureau du vérificateur général, je me demande si nous avons beaucoup eu recours à des procédés technologiques plutôt qu’à des façons de faire plus traditionnelles. Pourriez-vous me dire ce que vous aimeriez léguer comme héritage? Compte tenu de ce que je viens de dire et de ce dont vous avez parlé, que souhaitez-vous que l’on retienne de votre passage au Bureau du vérificateur général lorsque vous aurez terminé votre mandat?
Si je suis nommée, j’espère que, dans dix ans, je pourrai dire que j’ai fait honneur au Bureau du vérificateur général, mais aussi, comme vous l’avez indiqué, que j’ai su en moderniser le fonctionnement.
Le monde de la vérification connaît une transformation rapide, tout comme le pays. La pandémie en cours nous a démontré clairement que nous avons besoin de l’informatique. Nous en avons besoin si nous voulons suivre le rythme des changements dans le monde de la vérification et au sein de l’État, qui a commencé à interagir avec les Canadiens d’une façon fort différente. Il communique avec eux en ligne plutôt qu’en personne dans de nombreux cas. Oui, j’aimerais voir l’organisme évoluer et changer, mais aussi être à la hauteur de ce qu’il a su apporter, dans le passé, aux mécanismes de reddition de comptes du système parlementaire canadien.
Avez-vous des alliés au sein du gouvernement afin d’obtenir le type de financement dont vous aurez besoin? Aurez-vous le personnel et les leaders qualifiés vous permettant de mettre en œuvre ce que vous voudriez faire?
Le personnel et les leaders qualifiés? Absolument. Au sein de la haute direction, j’ai côtoyé des personnes extrêmement dévouées et passionnées. Nous avons créé la vague, comme vous le dites, pour changer la culture, et nous sommes tous dans le même bateau. Je suis très excitée d’avoir la possibilité — je l’espère — de continuer à aller de l’avant avec cet excellent groupe à mes côtés.
Au cours des années où j’ai fait l’audit des états financiers du gouvernement du Canada, j’ai tissé de bons liens avec des personnes avec qui je peux collaborer de façon constructive. Je vais continuer le dialogue avec les parties avec lesquelles MM. Ferguson et Ricard ont amorcé des discussions dans le but d’obtenir le financement et les ressources nécessaires pour poursuivre notre mandat.
Je vous souhaite bonne chance parce que vous allez probablement devoir relever de très gros défis pour obtenir le financement, autrement dit de convaincre les personnes pertinentes que tout cela vaut l’investissement.
Je suis prête à relever le défi. Merci.
Bonne chance.
Bienvenue au Sénat, madame Hogan.
Mes collègues vous ont interrogé à propos des enseignements tirés par le passé. Je voudrais me pencher sur certains cas en particulier.
En 2008, le gouvernement a mis en place un plan de sauvetage de l’industrie automobile qui a coûté des milliards de dollars aux contribuables canadiens. Ces fonds n’ont jamais été récupérés.
Le Bureau du vérificateur général, votre employeur, a conclu dans un rapport présenté en 2014 qu’il était impossible de dresser un tableau complet de l’aide fournie, des effets de cette aide sur la viabilité des entreprises, et des montants récupérés et perdus, car aucun rapport complet sur ces renseignements n’avait été soumis au Parlement.
Cette fois, COVID-19 oblige, nous allons de nouveau nous servir du compte EDC et du Compte du Canada pour injecter une bonne partie des fonds.
À la lumière de votre expérience avec le plan de sauvetage précédent, que ferez-vous de la même manière et que ferez-vous différemment pour obtenir un portrait plus exact ainsi qu’accroître la transparence et la reddition de comptes relativement au colossal plan d’aide financière mis en place dans la foulée de la COVID-19?
Je suis au courant de l’audit dont vous parlez, mais malheureusement je n’y ai pas participé. Je ne sais donc pas vraiment comment ils ont pu élaborer des critères et comment ils ont pu aborder l’audit à l’époque.
Par contre, je sais comment j’aborderais un audit aujourd’hui, c’est-à-dire que je suivrais le processus de notre bureau, qui est extrêmement rigoureux. Nous prenons le temps de comprendre ce que sont les opérations. Nous prenons le temps de planifier et de bien envisager les risques. Nous appliquons des procédures qui permettent d’y faire face.
La vision intergouvernementale que nous commençons à voir, avec le nombre de programmes gérés, présente un nouveau défi, à la fois pour le gouvernement et pour les vérificateurs. Et un nouveau défi qui n’est pas impossible, mais plutôt stimulant, à relever.
Je veillerais à ce que nous nous adressions à toutes les organisations et à tous les services concernés, afin d’avoir une image précise de la situation. Mais en fin de compte, c’est aux personnes qui gèrent ces programmes qu’il revient de documenter et d’étayer correctement les décisions qu’elles ont prises, faute de quoi il nous est très difficile de tirer des conclusions.
Ce ne sont là que les éléments fondamentaux d’un audit. Si nous nous trouvions à nouveau dans cette situation, nous ferions évidemment des recommandations pour y remédier, car notre objectif final est de renforcer la reddition de comptes et la transparence.
Je crois que les concepts clés que vous avez mentionnés sont « méthodologie », « critères » et « indicateurs ». Ce sont les indicateurs qui vous permettront d’évaluer si l’aide financière a été efficace, si l’investissement a été récupéré et si le processus a été transparent.
Selon un rapport du Bureau du vérificateur général publié à son sujet en 2018, l’Agence du revenu du Canada a accordé un traitement préférentiel aux riches et aux grandes sociétés comparativement aux Canadiens ordinaires.
Le rapport indique ceci :
Pour d’autres contribuables, tels que ceux qui effectuent des opérations à l’étranger, nous avons constaté que le délai accordé pour produire l’information demandée était parfois prolongé pendant des mois ou même des années. Par exemple, les banques et les pays étrangers pouvaient prendre plusieurs mois avant de fournir des renseignements à l’Agence ou au contribuable sur les transactions effectuées par le contribuable à l’étranger.
Vous devrez collaborer avec d’autres organismes et compter sur l’efficacité du transfert d’informations.
Pouvez-vous me parler de la méthodologie, des tactiques et des indicateurs que vous comptez utiliser afin d’être en mesure d’effectuer cette tâche avec les ressources qui vous seront octroyées? Au bout du compte, vous devrez faire votre travail avec ou sans augmentation des ressources, ce qui va vous obliger à faire preuve de créativité. Que pouvez-vous nous dire à ce sujet?
Je pense que le fait d’établir de solides liens de collaboration avec les organisations que nous vérifions comptera pour beaucoup. Évidemment, comme vous l’avez mentionné, nous devons attendre que les organisations en question nous fournissent les renseignements que nous leur demandons. C’est à ce moment que nous devrons définir les critères, les délais et les étapes clés à franchir et nous entendre sur ceux-ci. Nous devrons nous demander mutuellement des comptes. Tout cela permet de mener à bien des vérifications.
Pour ce qui est de la créativité, je pense que compte tenu de nos ressources limitées, le recours à certains outils informatiques serait utile. Nous devrons également bien comprendre à quel niveau se situent les risques associés à un programme que nous voulons vérifier, afin de bien diriger nos efforts. Il ne s’agira probablement pas de vérifications aussi complètes que nous l’aurions souhaité, mais si nous sommes en mesure de cibler les aspects qui contribueront le plus à améliorer les programmes et la prestation de services, c’est ce que nous devrons faire dans les délais requis, et avec les ressources limitées dont nous disposons.
Je salue votre courage, car si vous êtes confirmée dans votre poste, vous serez la deuxième femme à l’occuper. Je vous félicite de votre audace. Merci.
Merci beaucoup, c’est un honneur.
Bienvenue, madame Hogan. Je me joins à mes collègues pour vous féliciter de votre nomination et, bien entendu, le cas échéant, vous souhaiter le meilleur des succès dans vos nouvelles fonctions.
Je profite de l’occasion aujourd’hui pour souligner l’engagement constant de mes collègues les sénateurs et du Sénat en tant qu’institution en matière d’ouverture et de reddition de comptes. Nous avons travaillé et nous continuons à travailler à l’amélioration de nos initiatives en matière de vérification interne et externe et de divulgation proactive de nos dépenses. Plus récemment, comme ma collègue la sénatrice Saint-Germain l’a mentionné, nous avons établi un comité d’audit et de surveillance qui sera composé de cinq membres, y compris de trois sénateurs et de deux membres externes indépendants et qualifiés.
Un tel comité n’existe pas à l’autre endroit, ce qui m’amène à vous poser la question suivante : en mai 2016, votre prédécesseur, Michael Ferguson, a mentionné à la CBC qu’il souhaitait obtenir un mandat pour vérifier les dépenses du Sénat de façon régulière. Compte tenu des multiples initiatives mises en œuvre au sein de notre institution, ne croyez-vous pas qu’il serait plus opportun maintenant de solliciter un tel mandat afin de vérifier les dépenses de nos collègues de l’autre endroit?
Un vérificateur est toujours heureux d’apprendre que quelqu’un veut améliorer la reddition de comptes et la surveillance. Évidemment, notre bureau se sentirait privilégié de vérifier n’importe quelle organisation qui nous inviterait à le faire, absolument.
Merci, madame, j’en prends bonne note.
Bienvenue au Sénat. En tant que comptable professionnel agréé et ancien vérificateur, je suis enchanté de pouvoir clore cette discussion. Cela me rappelle de beaux souvenirs. J’ai commencé ma carrière comme vérificateur.
Vous avez mentionné que la COVID-19 est une priorité, et vous avez parlé de la stratégie par rapport aux programmes d’audit. Pouvez-vous nous donner des exemples des autres risques ou domaines de grande préoccupation qui nécessiteraient de meilleurs moyens de surveillance, d’audit et d’atténuation des risques?
J’imagine que vous voulez dire ceux qui ne sont pas liés à la COVID-19, mais qui sont plus généraux.
Vous avez précisé que la COVID-19 est une priorité. Étant donné l’ampleur du mandat de vérification du dossier de la COVID-19 — beaucoup de ressources seront requises alors qu’il y a beaucoup d’incertitude au sujet du financement —, croyez-vous que vous avez les ressources adéquates pour ajouter des mandats? Dans quelle mesure la nature, la portée et la capacité de réalisation en temps opportun des mandats seront touchées?
À l’heure actuelle, le manque de ressources se répercute sur tous les autres secteurs de l’organisation. Je pense par exemple, comme je le disais tantôt, au fait que nous avons dû remettre à plus tard certaines vérifications de rendement que nous souhaitons faire. Nous connaissons aussi certains retards du côté financier, alors oui, le manque de ressources se fait sentir au-delà des vérifications de rendement.
Pour ce qui est des autres éléments que je juge prioritaires, je crois, à voir les leçons que tire le pays en général et la manière dont les gens dépendent d’Internet et des infrastructures technologiques, qu’il serait temps de s’intéresser de nouveau à la cybersécurité et à la connectivité Internet, surtout dans les régions éloignées du Nord.
Toutes ces choses devront néanmoins attendre, comme vous le disiez. Je suppose que la COVID-19 occupera une bonne partie de nos ressources et de mon temps pendant quelques années — si je suis nommée, évidemment. Je n’ose pas prédire pendant combien de temps parce que je crois que nous devrons scruter à la loupe tout ce qui a été fait avant la crise pour préparer le pays, pendant la crise et, surtout, après la crise, afin de voir si le gouvernement et le Canada en général ont tiré les leçons qui s’imposent et s’ils seront prêts si jamais une crise du même acabit devait frapper de nouveau.
Merci beaucoup. Voici une autre question : en général, le manque de financement a-t-il eu une incidence sur le personnel comptable ou le personnel de vérification nécessaire ou celui qui a été employé dans le passé et qui le sera à l’avenir?
De plus, les contrôles internes du gouvernement et les systèmes comptables sont-ils à jour? Le manque de financement et la capacité à procéder à une vérification dans les secteurs requis ont suscité beaucoup d’inquiétudes. S’agit-il de votre plus grand défi? Dans l’affirmative, êtes-vous satisfaite des outils dont vous disposez à l’heure actuelle?
Bien évidemment, le fait de devoir reporter une partie de nos travaux ou de ne pas pouvoir présenter certains rapports mine le moral des personnes au sein de notre organisation. Elles sont extrêmement fières du travail qu’elles font et de son utilité pour le gouvernement et les Canadiens. J’espère que la possibilité d’examiner le dossier très important qu’est celui de la COVID-19 contribuera à améliorer la situation.
En ce qui concerne les contrôles au sein du gouvernement, je m’attends à ce qu’il y ait des changements. C’est inévitable compte tenu des mesures d’éloignement que nous devons tous respecter et de la nécessité de nous adapter. Des ajustements peuvent s’imposer chaque jour ou chaque semaine, mais les contrôles doivent demeurer. Ces mécanismes sont toujours nécessaires pour garantir que les fonds sont dépensés judicieusement et que les dépenses sont autorisées comme il se doit. Ainsi, même si les contrôles sont appelés à changer, ils ne devraient pas disparaître.
Merci beaucoup.
Honorables sénateurs, le comité siège maintenant depuis 95 minutes. Conformément à l’ordre adopté par le Sénat plus tôt aujourd’hui, je suis obligée d’interrompre les délibérations afin que le comité puisse faire rapport au Sénat.
Madame Hogan, au nom de tous les sénateurs, je vous remercie de vous être jointe à nous aujourd’hui.
Des voix : Bravo!
La présidente : Honorables sénateurs, êtes-vous d’accord pour que la séance du comité soit levée et que je déclare au Sénat que la témoin a été entendue?
Des voix : D’accord.
Honorables sénateurs, le Sénat reprend sa séance.