DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS — Les établissements d'enseignements sûrs
23 novembre 2023
Honorables sénateurs, je suis reconnaissante qu’on m’ait donné l’occasion, à la dernière minute, d’intervenir aujourd’hui au sujet d’une question que je souhaitais aborder depuis un moment déjà.
J’aimerais revenir à juin dernier. Peu de temps après que le Sénat a fait relâche pour l’été, les étudiants qui assistaient à un cours en études des genres au pavillon Hagey, au campus de l’Université de Waterloo, ont été victimes d’une attaque planifiée et ciblée.
L’accusé, un jeune diplômé de l’Université de Waterloo, a poignardé et blessé trois personnes, qui ont dû être envoyées à l’hôpital pour être soignées. Heureusement, toutes les victimes se sont rétablies sur le plan physique. Cette attaque a violemment ébranlé la communauté universitaire, particulièrement les membres de la communauté LGBTQ2+ qui célébraient activement le Mois de la fierté.
Dans les jours qui ont suivi le drame, il a été confirmé qu’il s’agissait d’un geste haineux lié à l’expression et à l’identité de genre. Approximativement 40 étudiants se trouvaient dans la salle lorsque les victimes, une professeure associée de 38 ans de Kitchener et deux étudiants, respectivement de 19 et 20 ans, ont été poignardées.
J’ai eu l’occasion de converser avec des étudiants réunis à des tables de pique-nique placées en cercle au pavillon Hagey deux jours après le drame. J’ai écouté les étudiants exprimer, de façon très éloquente, leur peine, leur stupeur et leur colère.
Universités Canada, une association qui représente des universités à l’échelle du Canada, a condamné cette violence. Voici un extrait de son communiqué :
[...] il est d’autant plus inquiétant de constater que cet acte motivé par la haine ciblait l’expression et l’identité de genre de même que les personnes marginalisées de la collectivité.
Voici ce qu’a déclaré Aimée Morrison, professeure associée au département d’anglais de l’Université de Waterloo :
Ces agressions m’ont fendu le cœur et m’ont terrifiée. Elles ont eu lieu dans un édifice où je travaille tous les jours. J’enseigne dans cette salle de classe. Je donne moi-même des cours semblables. Nous sommes tous moins en sécurité à cause de ce qui s’est passé.
Les semaines suivantes, cet événement a fait réagir et suscité beaucoup de réflexions et de discussions. Les établissements d’enseignement postsecondaire doivent demeurer des lieux de discussion ouverts et protéger les groupes marginalisés qui se retrouvent au cœur d’enjeux et de débats polarisants.
Comme on le sait, la liberté d’explorer les différences et de remettre en question les idées traditionnelles est l’un des fondements mêmes des universités et des collèges. Toutefois, une chose est certaine au Canada : la liberté d’expression ne donne pas le droit d’être violent ou d’inciter à la violence.
Bien qu’il soit encore très rare, l’horrible événement qui s’est produit à Waterloo nous apprend que les nouvelles idées, les discussions franches et les débats peuvent engendrer de la violence, surtout lorsqu’ils se combinent aux débats politiques récents sur les droits des jeunes LGBTQ2+ dans les écoles. Les universités et les collèges agissent en étant conscients que ces jeunes font de plus en plus souvent l’objet d’agressions au Canada dans divers contextes.
Chers collègues, je vous invite à réfléchir à ce qui s’est produit. Les opinions que nous exprimons ont souvent des conséquences imprévues sur la vie concrète de certaines personnes. Nous devons faire en sorte que tous les établissements d’enseignement — ainsi que le Sénat — soient des lieux d’éducation sûrs, accueillants et inclusifs.