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La Loi sur les aliments et drogues

Projet de loi modificatif--Deuxième lecture--Ajournement du débat

3 juin 2025


L’honorable Patrick Brazeau [ - ]

Propose que le projet de loi S-202, Loi modifiant la Loi sur les aliments et drogues (étiquette de mise en garde sur les boissons alcooliques), soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, pour ceux qui le connaissent, notre ancien collègue le sénateur Baker avait l’habitude de dire « je serai bref », mais je vais effectivement être bref.

Nous sommes saisis du projet de loi S-202, qui rendrait obligatoire l’apposition d’une étiquette de mise en garde contre le risque de cancer sur les boissons alcooliques. Les données scientifiques le prouvent depuis longtemps : la consommation d’alcool est un facteur à l’origine de sept types de cancers mortels, notamment le cancer du côlon chez les hommes et le cancer du sein chez les femmes.

Dans son incarnation précédente, cette mesure législative était le projet de loi S-254. Pour les nouveaux sénateurs, mais peut-être aussi pour les sénateurs qui étaient déjà là lors de la dernière législature, rappelons que le projet de loi S-254, c’est-à-dire le projet de loi S-202 dont nous sommes saisis, en était à l’étape de l’étude en comité. Tout juste avant Noël, il avait été convenu que le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie allait l’étudier en février. Malheureusement, comme pour bien d’autres questions et projets de loi, le Parlement a été prorogé et le projet de loi est mort au Feuilleton. Voilà pourquoi il doit être présenté de nouveau.

J’espérais que le projet de loi serait directement renvoyé au comité, puisque c’est ce qui avait déjà été convenu et que la mesure législative en était déjà à cette étape. Je me suis adressé aux dirigeants de tous les partis, mais il n’a pas été possible de s’entendre pour qu’elle soit directement renvoyée au comité. Compte tenu des données probantes, j’espère toutefois qu’elle le sera très bientôt.

Je vais faire quelques observations supplémentaires. Je vous invite à consulter le discours que j’ai prononcé le 1er juin 2023 à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi S-254, car il s’applique entièrement au projet de loi S-202 à l’étude aujourd’hui.

Malgré la prorogation du Parlement, mon bureau a organisé un symposium en ligne à l’occasion de la Journée mondiale contre le cancer. De nombreux experts canadiens et étrangers sont venus y discuter de cancer, d’alcool et d’étiquetage.

Le symposium a réuni notamment Erin Hobin, Catherine Paradis, le Dr Robert Cushman, et Sheila Gilheany, qui vient d’Irlande, un pays qui devrait avoir des étiquettes de mise en garde sur ses produits alcoolisés à compter de l’an prochain, quoique le lobby de l’alcool exerce de fortes pressions pour empêcher que ces étiquettes se retrouvent sur les tablettes. Nous avons également pu compter sur la participation de Kathy Unsworth, de Nancy Poole, d’Adam Sherk, du Dr Tim Naimi, du Dr Tim Stockwell et du Dr Fawaad Iqbal, qui ont chacun fait une présentation dans le cadre du symposium.

En résumé, cette mesure aurait certainement dû être prise depuis longtemps. Quatre-vingts pour cent des Canadiens consomment de l’alcool, mais seulement quelque 25 % sont conscients de la corrélation entre la consommation d’alcool et sept cancers mortels.

En tant qu’ancien consommateur d’alcool, j’ai déjà compté dans les 75 % des Canadiens qui ignorent le rapport de causalité qui existe entre la consommation d’alcool et ces sept cancers. J’ai mené mon propre combat contre le cancer du côlon il y a plusieurs années. Le traitement me donnait l’impression qu’on me tuait par en dedans, donc, j’ai décidé de l’abandonner. J’ai capitulé. Puis, en 2020, j’ai décidé d’arrêter de consommer de l’alcool, et le 29 mars 2025, tandis que le Parlement était prorogé, j’ai célébré ma cinquième année de sobriété.

Le sénateur Brazeau [ - ]

C’est pourquoi je suis particulièrement fier de présenter le projet de loi et le prochain projet de loi, dont je parlerai bientôt, encore une fois très brièvement. Toutefois, il n’est pas question de ma fierté personnelle ou de ce que moi ou d’autres avons vécu. Il est question de fournir des informations vitales et nécessaires en matière de santé à tous les Canadiens, comme nous l’avons fait pour le tabac.

Nous savons qu’il faut apposer des étiquettes d’avertissement sur les risques de cancer sur les produits du tabac. Nous savons qu’il faut apposer des étiquettes d’avertissement sur les risques de cancer sur les produits du cannabis. Le gouvernement du Canada n’a même pas eu à demander aux entreprises de cannabis d’en apposer sur leurs produits : elles l’ont fait de leur plein gré.

Le projet de loi porte strictement sur les avertissements sur les risques de cancer. Compte tenu de tout ce que nous savons, la question à laquelle il faut répondre — et personne n’y a encore répondu — est la suivante : comme on sait que la consommation d’alcool augmente les risques de développer sept cancers mortels, pourquoi les fabricants de boissons alcoolisées jouiraient-ils d’un passe-droit au Canada? Merci.

L’honorable Peter Harder (Son Honneur le Président suppléant)

Acceptez-vous de répondre à une question, sénateur Brazeau?

Le sénateur Brazeau [ - ]

Absolument.

L’honorable Salma Ataullahjan [ - ]

Sénateur Brazeau, pensez-vous que le Canadien moyen est au courant des cancers causés par l’alcool? Comme je ne bois pas, je n’étais certainement pas au courant. Pensez-vous que le Canadien moyen sait que cette information est disponible?

Le sénateur Brazeau [ - ]

Merci beaucoup de votre question et, en ce qui concerne le fait que vous ne consommez pas d’alcool, vous faites bien. On devrait célébrer un peu plus cette décision que l’inverse. Pour répondre à votre question, comme je l’ai dit, 80 % des Canadiens consomment de l’alcool dans ce pays, mais seulement environ 25 % — un quart — savent qu’il existe un lien entre la consommation d’alcool et le cancer. L’apposition d’étiquettes permet à tous les consommateurs d’alcool et à tous les citoyens canadiens de disposer des informations nécessaires en matière de santé.

Les fabricants d’alcool font exactement la même chose que les fabricants de tabac. Je ne réinvente pas la roue. Ils utilisent les mêmes arguments que les fabricants de tabac. C’est pourquoi il faut 20 à 25 ans pour adopter des lois comme celle-ci. J’ai présenté ce projet pour la première fois en 2023 et nous en sommes encore là. Nous n’avons pas encore terminé.

En voici un exemple parfait : le rapport Kirby sur la santé mentale produit par le Sénat. Le Sénat est connu pour ce rapport. Il s’agit là d’un exemple de dossier où nous pouvons faire preuve de leadership au Canada, car les politiciens élus veulent rester à mille lieues de ce dossier. Nous savons pourquoi ils ne veulent pas l’aborder, c’est parce que les fabricants d’alcool et leur lobby sont extrêmement puissants. Toutefois, nous pourrions prendre l’initiative et faire comprendre que nous nous soucions de la santé et du bien-être des citoyens canadiens.

Quoi qu’en disent les fabricants de produits alcoolisés et les lobbyistes, la meilleure façon de prodiguer ces renseignements, c’est de recourir à l’étiquetage. Chaque fois qu’ils ont quelque chose à dire — et chaque fois qu’ils produisent leurs propres rapports sur la santé, qu’ils ont commandités et payés —, je dis aux gens de ne pas les écouter. Leur seul intérêt, c’est la vente. Ils ne se soucient ni de la santé ni du bien-être des Canadiens.

Voici l’occasion de montrer aux Canadiens que nous nous soucions d’eux. Nous pouvons envoyer un message fort et faire avancer les choses pour opérer un changement générationnel dans ce pays.

L’honorable David M. Wells [ - ]

Sénateur Brazeau, je vous remercie d’avoir présenté de nouveau ce projet de loi. À tout le moins, il s’agit d’un débat important auquel devraient participer les Canadiens.

Il semble que le projet de loi vise à faire apposer une étiquette sur chaque bouteille. Y a-t-il une disposition ou une considération pour les établissements comme les bars et les restaurants qui ne servent pas de bouteille — ils peuvent simplement servir un verre de vin ou un verre de scotch, mais pas la bouteille de scotch —, où le consommateur ne verrait pas nécessairement l’étiquette de mise en garde?

Le sénateur Brazeau [ - ]

Je vous remercie de votre question. Oui. Dans le cas précis des bars ou des endroits qui ont un permis de vente d’alcool, il y a une disposition qui prévoit que même si dans ces endroits la mise en garde ne se trouve pas sur chaque bouteille, il doit y avoir des panneaux d’avertissement placés à la vue des consommateurs.

L’honorable Flordeliz (Gigi) Osler [ - ]

Félicitations, sénateur Brazeau. Merci de présenter un projet de loi qui permettra aux Canadiens de prendre des décisions éclairées au sujet de leur santé.

Ma question porte sur cette mesure et les risques pour la santé liés à l’alcool. Pensez-vous que les étiquettes devraient uniquement mettre en garde contre les cancers, ou croyez-vous qu’elles devraient être plus exhaustives et mentionner d’autres risques pour la santé liés à l’alcool?

Le sénateur Brazeau [ - ]

Je vous remercie de vos commentaires et de votre question.

Le projet de loi S-202 porte seulement sur l’ajout sur les produits de mises en garde concernant le cancer. Cela dit, si vous avez la patience d’attendre quelques instants, nous pourrons parler du projet de loi S-203. Il pourrait offrir une réponse plus complète quant à la voie à suivre à l’avenir. Cela concernera toutefois le projet de loi S-203. Merci.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

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