Projet de loi de Jane Goodall
Projet de loi modificatif--Deuxième lecture--Ajournement du débat
24 mars 2022
Propose que le projet de loi S-241, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur la protection d’espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international et interprovincial (grands singes, éléphants et certains autres animaux), soit lu pour la deuxième fois.
— Honorables sénateurs, du territoire visé par le Traité no 4 et des terres ancestrales des Métis, c’est avec humilité que je prends la parole en tant que parrain de la « loi Jane Goodall ». J’ai assumé cette responsabilité avec la bénédiction de Mme Jane Goodall et de l’honorable Murray Sinclair. Ils avaient présenté ensemble une version antérieure de cette mesure sur la protection des animaux à la fin de 2020. Comme vous le savez, ce projet de loi vise à protéger les animaux sauvages en captivité et à s’attaquer au commerce international non viable d’espèces sauvages.
Je remercie Mme Goodall et le sénateur Sinclair de leurs conseils et de leur soutien dans la préparation de cette nouvelle édition du projet de loi au cours de la dernière année. Nous sommes très reconnaissants de l’importante contribution d’une solide et nouvelle coalition qui appuie ce projet de loi. On retrouve parmi ses partisans les principaux zoos du pays : le zoo de Toronto, le zoo de Calgary, le zoo de Granby, le parc et zoo Assiniboine, à Winnipeg, et le Biodôme de Montréal.
D’importants organismes de défense des droits des animaux comptent aussi parmi les partisans de ce projet de loi : l’Institut Jane Goodall du Canada, Humane Canada, Animal Justice, Protection mondiale des animaux, Humane Society International/Canada et Zoocheck Canada. Les contributions les plus intéressantes de cette coalition sont sans doute de nouvelles protections juridiques pour les grands félins, les ours, les loups, les hyènes, les phoques, les lions de mer, les morses, certains primates et les reptiles dangereux comme les crocodiles, les alligators, les pythons géants et les serpents venimeux qui vivent en captivité. En tout, ce projet de loi interdit aux petits zoos privés de posséder plus de 800 espèces sauvages en captivité.
Pour mettre les choses en contexte, plus de 4 000 grands félins sont détenus par des particuliers au Canada. On signale de mauvaises conditions, des problèmes de sécurité et un manque de surveillance. Pour vous donner une idée du nombre d’animaux sauvages en captivité, il existe entre 100 et 150 attractions fauniques au Canada. Les animaux qui s’y trouvent pourraient être protégés aux termes de cette loi. Par ailleurs, des particuliers seraient propriétaires d’environ 1,5 million d’animaux exotiques partout au pays.
Tout comme le projet de loi initial, le projet de loi S-241 mettrait progressivement fin à la tenue en captivité d’éléphants au Canada. Le Zoo de Granby a annoncé qu’il cesserait progressivement de maintenir des éléphants en captivité. Je félicite Paul Gosselin, le PDG du Zoo de Granby, de son leadership à cet égard. Il y a actuellement plus de 20 éléphants en captivité, à quatre endroits au Canada.
La Loi de Jane Goodall appuie la poursuite des mesures de conservation des grands singes du Canada et des programmes de science aux zoos de Toronto, de Calgary et de Granby, sous réserve de certaines conditions.
Tout comme le projet de loi initial, en vertu de la « disposition de Noé », le Cabinet fédéral peut étendre la protection de la loi à d’autres animaux sauvages, en tenant compte de facteurs liés à leur bien-être en captivité. Le projet de loi accorde également un statut légal restreint aux espèces visées, ce qui permettra l’émission d’ordonnances selon les intérêts supérieurs des animaux, notamment concernant leur réintégration dans leur habitat naturel, et établit des sanctions pécuniaires concernant la reproduction illégale de ces animaux ou leur utilisation à des fins de divertissement ou comme moyen de transport, ce qui inclut les tours d’éléphant.
Je suis reconnaissant que cette coalition hors pair de porte‑paroles des animaux appuie le projet de loi S-241, la Loi de Jane Goodall. Dans quelques minutes, je vous ferai part de leurs messages. J’espère que d’autres organismes canadiens examineront de près ce projet de loi positif fondée sur des données probantes et qu’ils lui accorderont eux aussi leur soutien.
Nous proposons un vaste ensemble de mesures qui tiennent compte avant tout des animaux. Un travail d’équipe fait avec conviction peut faire pencher la balance en faveur de l’adoption de la Loi de Jane Goodall pendant la législature actuelle. Comme certains le diront, les animaux ne peuvent pas se permettre d’attendre. Si nous travaillons rapidement ensemble, le Sénat et, surtout, le Canada peuvent donner l’exemple en cette période charnière pour le bien-être des animaux et la conservation de la faune. Mme Goodall et bien d’autres comptent sur nous.
Comme l’ancien sénateur Sinclair l’a indiqué, la Loi de Jane Goodall fait fond sur l’excellent travail que le Sénat a déjà réalisé dans les dernières années afin de protéger les animaux. Parmi ces réalisations, mentionnons les mesures législatives proposées par l’ancien sénateur Willie Moore à l’égard des baleines et des dauphins, le projet de loi du sénateur MacDonald sur l’interdiction visant les nageoires de requin, les efforts exceptionnels du sénateur Harder pour faire adopter ces deux politiques, le projet de loi de l’ancienne sénatrice Carolyn Stewart Olsen visant à interdire les essais de cosmétiques sur des animaux, dont les mesures font maintenant l’objet d’engagements électoraux de la part des ministériels et de l’opposition, le parrainage, par la sénatrice Boyer, du projet de loi C-84, visant à combattre la cruauté envers les animaux, ainsi que le parrainage, par la sénatrice Bovey et le sénateur Christmas, de projets de loi d’initiative ministérielle visant à protéger les habitats aquatiques.
Je sais également que le sénateur Dalphond veut renforcer le projet de loi S-5 pour mettre fin aux essais de produits chimiques sur des animaux d’ici 2035, ce qui remplirait un autre engagement électoral. Vous avez mon appui, Pierre.
Maintenant que j’ai rappelé aux sénateurs en quoi consiste le cadre législatif proposé dans le projet de loi, je vais expliquer les trois principaux changements qui se trouvent dans cette nouvelle version. Je remercie sincèrement les conseillers et le Bureau du légiste du Sénat du travail exceptionnel qu’ils ont réalisé afin d’établir les objectifs stratégiques de la Loi de Jane Goodall.
Les trois principaux changements à cette mesure législative sont les suivants : un cadre législatif pour les organismes animaliers qui répondent à cinq critères transparents et accessibles; de nouvelles protections pour des centaines d’espèces mentionnées plus tôt, avec des mises à jour des politiques sur les éléphants et les grands singes; et plus d’efforts pour remédier au commerce mondial insoutenable des espèces sauvages.
Avant de rentrer plus dans les détails, je voudrais parler des valeurs. Cette loi permet de marier la science occidentale et les connaissances autochtones sur la nature. Ces connaissances nous montrent qu’il est urgent d’agir pour protéger les espèces sauvages, car beaucoup font l’objet de cruauté et sont menacées d’extinction aujourd’hui même. J’ose espérer que de nombreux sénateurs reconnaîtront l’urgence et la gravité de la situation, et qu’ils appuieront cette initiative.
Fondée sur des données scientifiques, la Loi de Jane Goodall permettrait de créer les protections les plus strictes du monde pour les espèces sauvages en captivité, en renforçant les lois visant à protéger les baleines et les dauphins et en améliorant les efforts de conservation.
La société commence à prendre conscience de l’authentique nature des animaux, grâce aux recherches scientifiques comme celles de Mme Goodall sur les chimpanzés, ou encore grâce aux incroyables documentaires réalisés par sir David Attenborough et d’autres personnes. Il est parfaitement clair que la science, l’empathie et la justice doivent nous amener à faire des modifications législatives pour beaucoup d’autres espèces sauvages. Avec ce projet de loi, les lois canadiennes devront respecter les besoins et caractéristiques biologiques et écologiques de ces animaux, et protéger leur vie sur notre planète.
Sénateurs, c’est tout un honneur pour moi de vous transmettre un message de la personne qui a inspiré le nom de ce projet de loi, Jane Goodall, dame commandeur de l’Ordre de l’Empire britannique, conservationniste de renommée mondiale, fondatrice de l’Institut Jane Goodall et messagère de la paix des Nations unies.
Aujourd’hui, c’est un jour important pour les animaux. Un si grand nombre d’entre eux ont désespérément besoin de notre aide et la Loi de Jane Goodall prévoit des mesures de protection et de soutien pour les animaux en captivité. C’est un pas de géant pour les animaux, les gens et l’environnement. Je suis honorée de prêter mon nom à cette mesure législative de calibre mondial qui jouit de l’appui d’une formidable coalition composée du gouvernement, de conservationnistes, de groupes de défense des animaux et de zoos accrédités. Ensemble, nous serons la voix de ces animaux qui ne peuvent pas se faire entendre et nous mettrons fin à cet horrible fléau qu’est le trafic d’espèces sauvages.
La Loi de Jane Goodall prend appui sur la science et les valeurs des peuples autochtones. Dans le préambule du projet de loi, on retrouve l’expression « toutes mes relations », qui désigne, pour les Autochtones, l’idée selon laquelle toutes les formes de la Création sont interdépendantes et en relation les unes avec les autres. La Commission de vérité et réconciliation du Canada appelle les humains à se réconcilier avec la planète, en rétablissant la réciprocité et le respect mutuel. On peut lire ce qui suit dans son rapport : « Les lois micmaques et les autres lois autochtones insistent sur le fait que les humains doivent parcourir les étapes de la vie en conversant et en négociant avec toutes les créatures. »
Ces dernières années, au Sénat, la représentation autochtone a renforcé les lois sur la protection des animaux et de l’environnement. Nous avons entendu des discours percutants de la part de sénateurs autochtones, qui ont guidé le Sénat vers le respect de la nature et qui l’ont inspiré à agir à titre de conseil des aînés du Canada. La Loi de Jane Goodall vise à poursuivre les progrès.
L’auteur du projet de loi, notre ancien collègue et le président de la Commission de vérité et réconciliation, l’honorable Murray Sinclair, aimerait partager sa vision de la Loi de Jane Goodall.
Le projet de loi favorisera la réconciliation avec le monde naturel. Lorsqu’on traite bien les animaux, on resserre les liens qui nous unissent à toute la création et on agit à la fois dans le respect de soi et le respect mutuel. Je suis honoré que le sénateur Klyne parraine le projet de loi. C’est une façon inspirante de poursuivre les efforts légendaires de Mme Goodall pour aider les animaux.
Honorables sénateurs, comme l’a souligné notre ancien collègue, les mesures du projet de loi respectent pleinement les pratiques et les métiers liés à la cueillette durable des Autochtones. Les peuples autochtones ont entretenu des relations de gratitude et d’intendance avec les animaux depuis des temps immémoriaux. Pour communiquer et souligner notre respect pour les droits inhérents des Autochtones, le projet de loi contient une disposition qui confirme qu’il ne porte pas atteinte à l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.
Avant d’étudier les trois grandes modifications qu’apporte le projet de loi, examinons la manière dont la Loi de Jane Goodall fonctionnerait. À l’instar des lois visant les cétacés et les dauphins, le projet de loi S-241 légifère à l’intérieur du champ de compétence fédéral sur des questions de cruauté envers les animaux et de commerce international et interprovincial de ces derniers. Le projet de loi interdit l’acquisition et l’élevage des espèces visées, et exige des licences délivrées par Environnement et Changement climatique Canada pour pouvoir poursuivre ces activités, ainsi que des licences de transport pour traverser les frontières nationales et provinciales.
Le projet de loi maintient les populations actuelles, tous les animaux restant sur place. Le gouvernement fédéral ou le gouvernement provincial compétent peut accorder un permis pour une nouvelle mise en captivité, notamment pour la reproduction ou l’intérêt supérieur des animaux en ce qui concerne le bien-être individuel et la conservation, ou pour la recherche scientifique non dommageable.
On prévoit un double pouvoir de délivrance de permis, dans certains contextes, parce que l’on reconnaît que le sujet des animaux captifs non domestiques relève d’une compétence fédérale et provinciale partagée, en ce qui concerne la cruauté envers les animaux et les droits de propriété et civils. Le préambule du projet de loi fait état de cette dualité constitutionnelle. Le Canada dispose de ce cadre au moins depuis 1892, lorsque le Parlement a adopté les articles du Code criminel portant sur la cruauté envers les animaux. Aujourd’hui, le projet de loi S-241 adopte la même approche juridictionnelle en matière de délivrance de permis que les lois sur les baleines et les dauphins.
En outre, la Loi de Jane Goodall interdit l’utilisation des espèces concernées dans les spectacles de divertissement ainsi que les promenades à dos d’éléphant, à moins qu’elles ne soient autorisées par un gouvernement provincial. Cela s’applique aux lions de mer et aux morses de Marineland à Niagara Falls et aux éléphants de l’African Lion Safari près d’Hamilton. Le gouvernement fédéral ne serait pas en mesure d’accorder de tels permis afin de décourager l’autorisation de ces activités.
Sénateurs, avant d’explorer les changements et les mises à jour, je suis ravie de vous citer les paroles de partisans de la Loi de Jane Goodall, une forte coalition qui comprend les principaux zoos et organisations de défense des animaux du Canada.
Les zoos de Toronto, de Calgary, de Granby et du parc Assiniboine de même que le Biodôme de Montréal ont exprimé leur appui envers la Loi de Jane Goodall. Ils ont aussi fourni leur expertise sur les nouvelles mesures de protection pour les grands félins et d’autres espèces, ainsi que sur d’autres éléments du projet de loi.
Ces cinq zoos canadiens sont membres de l’Association of Zoos and Aquariums, ou AZA, l’organisme d’accréditation ayant les normes les plus élevées dans le domaine en Amérique. Ces grands zoos accueillent une très grande partie des visites annuelles de jardins zoologiques au Canada. Par exemple, avant la pandémie, le zoo de Calgary avait près de 100 000 membres et près de 1,5 million de visiteurs par année, et ces chiffres sont en plein rebond. Le Zoo de Granby avait 42 000 membres et 830 000 visiteurs par année. Avant la pandémie, le zoo de Toronto accueillait 1,3 million de visiteurs chaque année. Au sortir de la pandémie, ce zoo a un nombre record d’adhésions, soit plus de 37 000, ce qui représente plus de 100 000 personnes.
Honorables sénateurs, le PDG du zoo de Toronto, Dolf DeJong, a affirmé ceci:
Nos zoos ont une longue tradition de soutien des efforts de conservation de la faune au Canada et partout dans le monde. Notre engagement envers le bien-être des animaux, la conservation, la science et les programmes d’éducation est vital à la survie de nombreuses espèces. [...] Le zoo de Toronto est fier de soutenir la Loi de Jane Goodall, car elle représente une étape essentielle pour la protection des animaux sauvages.
Le Dr Clément Lanthier, PDG de l’institut Wilder et du zoo de Calgary et président de l’Association mondiale des zoos et des aquariums a dit:
Chaque jour dans les principaux zoos du Canada, des équipes remarquables de spécialistes dévoués veillent à ce que les animaux que nous aimons obtiennent des soins exceptionnels. La Loi de Jane Goodall assurera le bien-être d’innombrables animaux en captivité partout au Canada.
Au sein de notre coalition, je suis heureux d’indiquer que six grandes organisations canadiennes de défense des animaux appuient ce projet de loi. Ces organisations ont également apporté leur expertise au projet de loi, notamment pour la protection de nouvelles espèces, la réintégration dans des réserves d’animaux vivant dans des conditions inadéquates et le commerce international d’espèces sauvages.
L’Institut Jane Goodall du Canada constitue l’équipe canadienne de Mme Goodall. Cette équipe se sert de la conservation communautaire pour inciter les gens à agir à l’égard de la biodiversité, des changements climatiques, des inégalités environnementales au Canada et de l’habitat des chimpanzés en Afrique. Nous remercions chaleureusement cette équipe, qui a défendu la vision de Jane Goodall pour ce projet de loi.
Barbara Cartwright est la PDG de Humane Canada, la fédération nationale des SPCA et des sociétés de protection des animaux. Elle a joué un rôle clé dans la présentation de la Loi de Jane Goodall. Elle a dit ceci :
La Loi de Jane Goodall constitue une évolution majeure pour le bien-être animal au Canada. La protection des animaux sauvages ou vivant en captivité indique un virage inédit du Parlement vers une vision intégrée à l’égard des animaux, des humains et de l’environnement.
Camille Labchuck est avocate et directrice générale d’Animal Justice, la seule organisation nationale de défense des droits des animaux au Canada. Selon elle :
La Loi de Jane Goodall est un progrès encourageant vers l’amélioration de la législation obsolète sur la protection des animaux au Canada [...] Animal Justice est ravi de constater que le projet de loi conférerait aux animaux un statut légal bien défini devant les tribunaux. Cette mesure révolutionnaire permettrait de s’assurer que le système judiciaire priorise leur bien-être.
À l’instar de l’Institut Jane Goodall du Canada, Protection mondiale des animaux Canada est un chef de file dans le domaine du commerce mondial des animaux sauvages. Les représentants de cet organisme nous fourniront une aide précieuse lors de la formulation de recommandations et de modifications réglementaires sur le sujet. Voici les propos de Melissa Matlow, leur directrice de campagne :
Ce projet de loi historique fera du Canada un chef de file mondial de la protection de la faune et du bien-être des animaux. Il est urgent de prendre des mesures à l’égard du commerce non durable des animaux, afin de prévenir la cruauté, l’extinction et d’autres pandémies.
La Humane Society International/Canada, ou la section canadienne de la société internationale de protection des animaux, possède une expertise sur le commerce mondial des animaux sauvages, notamment sur l’ivoire d’éléphant et la relocalisation des animaux dans des sanctuaires. Je cite la directrice générale, Rebecca Aldworth :
La section canadienne de la société internationale de protection des animaux a vu les souffrances et les conditions déplorables dans lesquelles vivent les animaux dans les zoos non gérés par des professionnels. L’organisme a retiré des centaines d’animaux de ce genre d’installations. Nous appuyons totalement ce projet de loi sans précédent, qui aiderait à prévenir la cruauté et la négligence, comme le veulent les Canadiens soucieux du bien-être des animaux sauvages en captivité.
Zoocheck est un autre organisme de défense des animaux. Il surveille les conditions des animaux sauvages qui vivent en captivité au Canada et leur nombre, en plus de militer pour leur protection. Depuis 1988, Zoocheck défend cette cause sans relâche. Rob Laidlaw, un biologiste et le fondateur de Zoocheck, a fourni à notre coalition des données qui ont orienté les nouvelles mesures de protection de ce projet de loi. M. Laidlaw est responsable de l’inclusion de dizaines d’espèces. Il a dit ce qui suit :
Zoocheck est très heureux de soutenir la Loi de Jane Goodall. Cette mesure législative réfléchie, proactive et longtemps attendue fera du Canada une société plus bienveillante pour les animaux et plus sécuritaire pour les Canadiens en réduisant le nombre d’animaux dangereux qui sont gardés par des personnes non qualifiées.
Chers collègues, ce projet de loi reconnaît et poursuit l’excellent travail de ces extraordinaires organismes de défense des animaux. Je les remercie infiniment de leur contribution et de leur soutien. Si le Sénat adopte le projet de loi S-241, j’ai bon espoir que la Chambre des communes appuiera fortement la Loi de Jane Goodall.
En effet, pendant la campagne électorale de 2021, le Parti libéral, le Parti conservateur et le NPD ont promis de lutter contre le trafic d’espèces sauvages, ce qui laisse présager un solide consensus à l’autre endroit.
De plus, la lettre de mandat de l’honorable Steven Guilbeault, ministre de l’Environnement et du Changement climatique, reprend les promesses électorales du gouvernement de présenter un projet de loi pour protéger les animaux en captivité et de mettre fin au commerce de l’ivoire de l’éléphant et de la corne de rhinocéros au Canada. Je remercie le ministre de ses bons mots à la suite de la présentation du projet de loi mardi dernier. Je me réjouis à la perspective de collaborer avec le gouvernement, l’équipe du représentant du gouvernement au Sénat et, en fait, avec tous les parlementaires.
Le parrain de la Loi de Jane Goodall à la Chambre des communes, le député Nathaniel Erskine-Smith, est du même avis :
La Loi de Jane Goodall renforce les lois canadiennes sur la protection des animaux et permet au gouvernement de remplir son mandat de protéger les animaux en captivité. Les Canadiens de tous les horizons politiques se soucient du bien‑être des animaux, et j’espère que ce projet de loi sera appuyé par les députés de tous les partis.
Honorables sénateurs, je vais maintenant parler plus en détail des trois principaux changements qui se trouvent dans le projet de loi S-241. Premièrement, le projet de loi de Jane Goodall propose un nouveau cadre législatif pour les organismes animaliers, y compris les zoos, les aquariums et les sanctuaires, qui sera administré par Environnement et Changement climatique Canada.
Les organismes animaliers visés par le projet de loi devront continuer de se plier à des normes transparentes et accessibles, les quatre premières étant fondées sur les normes de l’Association of Zoos and Aquariums, ou AZA. Des experts-conseils de groupes de défense des animaux ont confirmé que l’AZA applique les normes les plus rigoureuses en Amérique en matière d’accréditation des zoos et des aquariums. Elle n’a d’ailleurs accordé que sept accréditations au Canada.
Le projet de loi comprend cinq critères pour les organismes de défense des animaux. Premièrement, les soins prodigués aux animaux doivent être conformes aux normes professionnelles reconnues les plus élevées et aux pratiques exemplaires. Le projet de loi permet au ministre d’examiner ce critère en se fondant sur les normes nord-américaines et européennes ainsi que sur d’autres normes.
Deuxièmement, il faut offrir des protections pour que les employés et d’autres intervenants puissent, après avoir suivi les étapes prévues au sein de l’organisation, divulguer confidentiellement au ministre, sans crainte de représailles, tout problème relatif au bien-être des animaux.
Troisièmement, il faut s’abstenir de toute activité qui dénature ou dégrade des animaux non domestiques vivant en captivité, notamment en les donnant en spectacle à des fins de divertissement et en leur faisant faire des tours comme dans un cirque, ou en les utilisant dans le cadre d’une production télévisuelle ou cinématographique. Un organisme animalier peut donner des démonstrations pédagogiques, sous forme notamment de séances d’observation ou d’interactions supervisées, qui renseignent le public sur le comportement naturel d’un animal ou les pratiques nécessaires pour lui prodiguer des soins.
Le quatrième critère consiste à faire l’acquisition d’animaux sauvages d’une manière qui n’est pas préjudiciable aux populations de l’espèce dans son habitat ou d’une manière qui contribue à la survie ou au rétablissement de l’espèce. Par exemple, il serait acceptable de prendre en captivité des animaux dans le but de sauver l’espèce, comme cela a été fait pour le condor de Californie.
Le cinquième critère consiste à respecter les autres normes et pratiques exemplaires prévues par le ministre à la suite de consultations menées auprès d’experts et fondées sur les meilleures données disponibles en matière de recherche scientifique, de médecine vétérinaire, de soins aux animaux ou de bien-être animal. Ce cinquième critère est important, puisqu’il établit un processus de consultation et de prise de décisions fondées sur les données probantes pour toute amélioration éventuelle nécessaire afin de servir et de protéger les intérêts individuels et collectifs des animaux.
Le scientifique spécialisé en bien-être animal Jake Veasey a fourni des conseils utiles concernant le nouveau projet de loi. M. Veasey a réalisé et publié des études évaluées par les pairs au sujet de l’Animal Welfare Priority Identification System, ou AWPIS. Ce système vise à établir, pour les espèces en captivité, des programmes de gestion d’habitats axés sur les données qui priorisent en réalité leurs besoins psychologiques et permettent d’optimiser le bien-être animal. Ce processus établit des données sur le patrimoine évolutionniste et les caractéristiques de motivation de chaque espèce en se servant de la rétroaction d’experts du secteur de la gestion des animaux en captivité et de l’extérieur de celui-ci.
Le système de M. Veasey révèle notamment que la garde en captivité de carnivores dont l’aire de répartition est étendue, comme les tigres et les ours polaires, n’est pas forcément problématique parce qu’elle limite les distances de marche de ces animaux. En effet, de nombreux animaux marchent autant dans les zoos qu’à l’état sauvage. Le problème, c’est que la captivité prive ce mouvement de tout sens. M. Veasey suggère que la meilleure solution serait de redonner un sens à ce mouvement, en permettant aux animaux en captivité de choisir comment et quand agir pour obtenir des récompenses.
Il espère utiliser cette approche pour créer un refuge d’ours polaires au Canada afin de s’occuper des ours polaires ayant eu des interactions conflictuelles avec des humains et afin d’examiner comment nous pouvons les aider à s’adapter au réchauffement de l’Arctique.
Une fois qu’ils seront désignés comme tels par la Loi de Jane Goodall, les organismes animaliers admissibles pourront poursuivre leurs programmes de soins animaliers, de conservation, de science animale et de sensibilisation du public pour la plupart des espèces protégées en vertu de cette loi, à certaines conditions. Les sept zoos et aquariums canadiens de l’AZA seront les premiers à obtenir ce statut en étant désignés ainsi dans le projet de loi. En plus des cinq zoos que j’ai mentionnés, ces organismes incluent l’aquarium de Vancouver et l’aquarium Ripley du Canada, à Toronto. Ces désignations donnent du poids à l’accréditation de l’AZA, aux consultations avec les groupes de protection des animaux sur les différentes accréditations, et à l’estime que Mme Goodall manifeste envers les organismes détenant ce titre.
De la façon dont le cadre du projet de loi est conçu, certains membres de l’Association des zoos et aquariums du Canada, l’AZAC, pourront obtenir ce statut, en plus d’autres organismes, comme les sanctuaires. Il faudra certainement que certains zoos et sanctuaires évoluent ou s’améliorent et le Parlement pourra étudier tout développement qui pourrait survenir avant l’adoption du projet de loi.
De nombreux jardins zoologiques au Canada n’obtiendront peut‑être pas le statut prévu dans le projet de loi, du moins à court terme, parce que le projet de loi a pour objectif prioritaire de protéger les animaux. Ces organismes ou des particuliers pourront demander une licence pour garder de nouveaux animaux en captivité d’espèces précises et pourront continuer de faire l’acquisition d’animaux d’espèces qui ne font pas partie des espèces initialement désignées.
Le but, sénateurs, est d’atteindre le plus rapidement nos objectifs de façon positive et progressiste. Le statut d’« organisme animalier » conféré par la Loi de Jane Goodall pourrait devenir le standard ultime au Canada, un statut consigné dans la loi pour la protection des animaux sauvages. D’autres pays le remarqueront et pourraient décider de suivre les traces du Canada.
Une des priorités de Mme Goodall est de permettre aux meilleurs zoos, aquariums et sanctuaires de prospérer dans le cadre de la loi, et ce projet de loi le permettra. La planète est de moins en moins hospitalière pour les animaux et ces organismes ont un rôle important à jouer pour sauver les animaux des conditions inadéquates et de l’extinction.
En 2019, le zoo de Toronto a aidé à relocaliser des animaux saisis dans un zoo improvisé au Québec. L’été dernier, le zoo de Toronto était prêt à accueillir temporairement des lions et des tigres appartenant à des particuliers à Maynooth, en Ontario, suivant le dépôt par la province d’accusations de maltraitance animale contre les propriétaires. De nombreux employés se sont portés volontaires pour s’installer dans la région pendant une période prolongée pour s’occuper des animaux. Malheureusement, la loi, telle qu’elle est en vigueur, permettait la relocalisation privée et sans surveillance de ces animaux.
Fait intéressant, le zoo de Toronto s’est doté d’un plan directeur visant à créer un refuge de préservation des espèces au cours des prochaines années, pour accueillir des animaux en difficulté provenant de partout au Canada.
Les principaux zoos du Canada jouent également un rôle essentiel en matière de conservation de la faune et de recherche. Dans le monde entier, la reproduction en captivité a joué un rôle déterminant dans plus de la moitié des cas où l’extinction de certaines espèces d’oiseaux et de mammifères a été évitée.
L’institut Wilder et le zoo de Calgary forment le secrétariat mondial du Groupe de spécialistes de la translocation de la Commission pour la sauvegarde des espèces de l’Union internationale pour la conservation de la nature, une instance mondiale qui fait autorité sur l’état du monde naturel et qui compte plus de 1 400 organisations membres, ainsi que des experts dans plus de 40 pays. Cette instance émet des consignes pour la réintroduction et le déplacement d’animaux afin de rétablir les populations sauvages.
Le zoo de Calgary dirige également des programmes de conservation et de recherche sur des espèces canadiennes menacées d’extinction ou y contribue. Parmi ces espèces figurent le putois d’Amérique, la grue blanche, la chevêche des terriers, le tétras des armoises, le porte-queue demi-lune, la grenouille léopard et la marmotte de l’île de Vancouver.
Le zoo de Toronto dirige des études et aide à rétablir les populations canadiennes de bison des bois, de la pie-grièche migratrice de l’Est, de la tortue mouchetée et du crotale. Le zoo de Toronto possède aussi l’un des rares laboratoires spécialisés en physiologie de la reproduction en Amérique du Nord, une biobanque qui préserve la faune en congelant les éléments de reproduction.
Il est bon de souligner que les cinq zoos canadiens que j’ai nommés participent tous à des plans de gestion de la survie des espèces dans le cadre de l’Associations of zoos and aquariums. Ces plans ont pour but de protéger les spécimens captifs d’espèces en voie de disparition qui sont génétiquement aptes à la reproduction afin de les protéger de l’extinction.
En établissant un statut légal pour les organismes animaliers crédibles, ce projet de loi apporterait des avantages aux animaux et inspirerait confiance aux visiteurs en ce qui concerne la qualité des soins animaliers, la sécurité, la conservation, la science et l’éducation. De plus, le cadre prévu dans la Loi de Jane Goodall pour les organismes animaliers admissibles établirait un partenariat gagnant-gagnant pour les animaux et les professionnels en soins animaliers.
La coalition qui a proposé ce projet de loi a dirigé les efforts pour établir de nouvelles mesures de protections juridiques pour plus de 800 espèces, que l’on appelle « animaux désignés » dans le projet de loi. En ce qui concerne l’application de la loi, il sera possible d’ajouter ou de supprimer les espèces au moyen d’un décret du Cabinet fédéral, en vertu de la « disposition de Noé ». Au moment d’établir la liste de priorité des espèces, en fonction des inquiétudes sur les plans du bien-être et de la sécurité, la rétroaction de zoos et d’ONG a été inestimable, tout comme les précieux conseils de la Mme Lori Marino, une neuroscientifique animalière qui a prouvé que les dauphins ont une conscience de soi. De plus, elle est responsable du projet de sanctuaire de baleines en Nouvelle-Écosse.
Les premières espèces désignées sous le régime de la Loi de Jane Goodall sont surtout les gros prédateurs à vaste répartition, certains primates, et des reptiles dangereux. Notamment, la désignation de certaines espèces entrera en vigueur jusqu’à six mois après la sanction du projet de loi pour permettre aux propriétaires de gérer les dynamiques sociales et les enjeux de reproduction des animaux. Les espèces interdites suivantes feront l’objet d’une exigence de licence.
Tout d’abord, puisque c’est l’année du Tigre, il y a les grands félins : près de 40 zoos gardent des grands félins en captivité au Canada, et les estimations du nombre d’animaux gardés par des propriétaires privés vont de 3 600 à plus de 7 000. Bien entendu, il est difficile d’avoir des données fiables.
En 2009, la Colombie-Britannique a interdit la possession privée de grands félins après une attaque ayant causé un décès. En Ontario, on sait que les lois sont permissives, car il n’est pas nécessaire d’avoir une licence pour la possession, l’élevage et le commerce de grands félins. L’an dernier, un couple ontarien a été en mesure de relocaliser ses grands félins sans supervision gouvernementale après que ses lions eurent creusé un trou sous leur clôture pour ensuite dévorer un tigre. Le projet de loi interdit toutes les espèces de grands félins, dont les lions et les tigres, ainsi que plusieurs espèces de félins de taille moyenne, comme les lynx.
Viennent ensuite les ours. Plus de 25 zoos canadiens gardent des ours en captivité, et le projet de loi interdit cette pratique pour toutes les espèces actuellement gardées au Canada, dont les grizzlis et les ours polaires.
Le projet de loi interdit également des loups et d’autres gros canins sauvages, comme les chiens-loups, les coyotes, les chacals et les chiens viverrins ou chiens martres, qui posent un risque d’espèce envahissante. Plus de 30 zoos canadiens gardent des loups, qui forment une espèce très intelligente, sociale et extrêmement mobile. De plus, le projet de loi interdit les hyènes, un autre prédateur supérieur gardé à seulement trois endroits au Canada, comme nous le supposons.
La Loi de Jane Goodall interdit la captivité de tous les phoques, lions de mer et morses, sauf sous obtention d’une licence. On retrouve de telles espèces à neuf endroits au Canada. Notons que l’épisode « The Last Walrus » de l’émission The Nature of Things, diffusé à CBC en 2021, soutient que la captivité de certains morses au Canada pourrait offrir un certain mérite scientifique pour aider des populations sauvages.
Cependant, on sait que Marineland garde des phoques à l’intérieur sur de longues périodes et se sert de lions de mer et de morses pour des spectacles de divertissement. La Loi de Jane Goodall tient compte des deux morses de Marineland, Smooshi et son rejeton Koyuk, comme en a parlé la réalisatrice Nathalie Bibeau.
Une photo préoccupante publiée sur les médias sociaux à la fin de 2021 montre Koyuk semblant présenter des lésions cutanées. S’il est adopté, le projet de loi interdira de se servir de Koyuk et de sa mère dans des numéros de cirque et il imposera une supervision gouvernementale pour leur réintégration éventuelle.
En classant les morses dans les espèces désignées, je reconnais le travail acharné de Phil Demers, ancien entraîneur en chef de Marineland, pour la défense des droits des animaux. Dans son récit touchant, M. Demers relate comment les soins qu’il a prodigués à Smooshi ont amené celle-ci à le considérer comme sa mère. Devenu dénonciateur en faveur du bien-être des animaux en 2012, M. Demers s’est battu pour Smooshi et pour d’autres animaux de Marineland. Il a consacré une bonne partie de sa vie à cette cause. Je cite M. Demers :
Je rêve de retrouver Smooshi et de trouver, à elle et à Koyuk, un meilleur endroit où vivre. Je n’abandonnerai jamais.
Sénateurs, j’espère que ce rêve deviendra réalité.
Le projet de loi S-241 protège plus de 100 espèces de primates, dont des gibbons, des babouins, des galagos et certains singes. Comme les grands singes, nous sommes membres de l’ordre des mammifères, qui se caractérisent par leur intelligence et leur sociabilité. Lors de la sélection des espèces prioritaires, notre coalition a tenu compte du nombre d’individus en captivité et des préoccupations concernant le bien-être des espèces arboricoles. En nous appuyant sur des informations provenant du Conseil canadien de protection des animaux, nous nous sommes abstenus de désigner des espèces utilisées dans le cadre de recherches biomédicales au Canada.
Enfin, les nouvelles désignations prévues dans la Loi de Jane Goodall protègent les reptiles dangereux, c’est-à-dire tous les membres de la famille des crocodiles et des alligators, 12 espèces d’anacondas, de pythons et de boas constricteurs, ainsi que tous les reptiles venimeux, soit plus de 600 espèces de serpents et de lézards. Ces désignations sont établies, à juste titre, pour des motifs de sécurité publique. Les sénateurs se souviennent peut-être de cet incident tragique survenu au Nouveau-Brunswick, en 2013, lors duquel un python de près de quatre mètres s’est attaqué à deux jeunes garçons et leur a enlevé la vie.
Tel que je l’ai mentionné, la Loi de Jane Goodall mettrait progressivement fin à la tenue en captivité d’éléphants au Canada, comme cela a été le cas pour les baleines et les dauphins quand nous avons adopté des lois fédérales à cette fin. Pourquoi? C’est principalement parce que notre climat ne leur convient pas, ce qui force ces créatures énormes, intelligentes et sociales, à vaste répartition, à passer l’hiver à l’intérieur.
De surcroît, les 16 éléphants du parc African Lion Safari faisaient partie de spectacles et les visiteurs pouvaient faire une balade sur leur dos, ce qui s’est traduit par une attaque en 2019. L’Association des zoos et aquariums du Canada a interdit les tours d’éléphant l’année dernière. Également l’année dernière, CBC a rapporté qu’un zoo du Texas avait annulé une entente de 2 millions de dollars pour acheter deux éléphants du parc African Lion Safari, une entente qui aurait séparé une éléphante et sa fille, alors que les femelles demeurent généralement ensemble toute leur vie.
Je félicite Paul Gosselin, président-directeur général du Zoo de Granby, du leadership dont il fait preuve en ce qui a trait à l’élimination progressive du maintien des éléphants en captivité. Pour obtenir des détails sur les politiques concernant les éléphants, je vous invite à consulter le discours prononcé par l’ancien sénateur Sinclair le 19 novembre 2020.
Quant aux grands singes, auxquels Mme Goodall a consacré une grande partie de sa vie professionnelle, le projet de loi appuie le maintien des programmes scientifiques et des programmes de conservation des gorilles et des orangs-outangs des zoos de Toronto, de Calgary et de Granby, à certaines conditions. Des programmes interreliés de l’AZA protègent des populations génétiquement aptes à la reproduction grâce à la reproduction en captivité et favorisent la conservation sur le terrain au moyen de financement et de formation.
Depuis 2011, le zoo de Toronto a participé à 60 études universitaires sur des orangs-outans et des gorilles, y compris avec l’Université York, l’Université de Toronto et l’Université Laurentienne. Les vétérinaires du zoo de Calgary ont présenté leurs conclusions sur la santé des gorilles à des conférences vétérinaires.
La poursuite des programmes de recherche et de conservation concernant les grands singes en captivité, qui respectent des normes élevées en matière de bien-être, est importante pour Mme Goodall alors que son équipe continue de travailler avec des collectivités locales pour sauver des grands singes dans la nature. Je trouve inspirant que le nouvel habitat pour les orangs-outans du zoo de Toronto doive ouvrir cet été. Je félicite Dolf DeJong, le PDG du zoo, de son leadership.
Le troisième grand changement est le fait que le projet de loi S-241 met davantage l’accent sur l’aspect non durable du commerce international d’espèces sauvages en réclamant des mesures réglementaires dans le préambule. C’est une priorité pour Mme Goodall. L’ivoire d’éléphant, les cornes de rhinocéros, les espèces envahissantes, la prolifération d’un champignon qui éradique des populations de grenouilles et le braconnage pour vendre des vésicules biliaires d’ours au Canada font partie des sources de préoccupation.
Des rapports scientifiques récents du Programme des Nations unies pour l’environnement et de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques concluent que le commerce d’espèces sauvages est un facteur important du risque pandémique et de la perte de biodiversité.
Il s’agit d’un problème mondial et le Canada a un important rôle à jouer. La demande canadienne pour les animaux sauvages et les produits dérivés de leur vente alimente ce commerce mondial non durable. Les recherches menées par l’association canadienne Protection mondiale des animaux ont montré que plus de 1,8 million d’animaux sauvages ont été importés au Canada entre 2014 et 2019 pour des raisons très diverses, y compris comme animaux de compagnie ou pour la fabrication de produits de luxe. La plupart de ces animaux n’ont pas fait l’objet de contrôles pour vérifier les permis ou la présence d’agents pathogènes. Il est indispensable d’améliorer la collecte des données à ce sujet.
Il y a aussi de bonnes nouvelles. Une des réussites à saluer est le rôle de leadership du Canada pour obtenir un consensus mondial et faire adopter la toute première résolution sur le bien-être animal à l’ONU ce mois-ci. Je félicite le ministre Guilbeault et son équipe pour cet événement marquant.
Mon bureau collaborera avec l’Institut Jane Goodall du Canada, l’association canadienne Protection mondiale des animaux et d’autres partenaires pour mettre au point des recommandations et des amendements en ce qui concerne le commerce et le trafic illégal mondial des espèces sauvages. Soulignons par exemple que le zoo de Toronto a réalisé un travail qui lui a valu un prix avec l’organisme Échec au crime pour sensibiliser la population au trafic illégal d’espèces sauvages au Canada, en particulier concernant la chasse et le commerce des tortues et le braconnage des ours noirs, notamment pour leur vésicule biliaire. Comme l’ivoire des éléphants et les cornes de rhinocéros, les ours noirs capturés en pleine nature font partie d’un commerce mondial illégal d’espèces sauvages qui se chiffre selon les estimations autour de 23 milliards de dollars par an.
Je me réjouis de toute possibilité de collaboration avec Environnement et Changement climatique Canada et je félicite ce ministère d’avoir mené l’an dernier des consultations publiques à propos de l’ivoire des éléphants, qui mèneront, je l’espère, à une réglementation.
Honorables sénateurs, j’aimerais vous parler d’une autre modification, petite, mais importante, apportée au projet de loi. Le préambule de la Loi de Jane Goodall contient maintenant une observation concernant la dernière orque en captivité du Canada, Kiska, connue comme étant « l’orque la plus solitaire au monde ». Je veux moi aussi appuyer les efforts en vue d’aider Kiska à vivre une vie meilleure, un objectif que partageaient les anciens sénateurs Moore et Sinclair.
Kiska a été capturée en Islande en 1979 avant d’être achetée par Marineland. Ses cinq baleineaux sont décédés et elle vit seule depuis 2011. De multiples baleines seraient décédées au cours de la dernière année à Marineland et le système de traitement de l’eau du parc serait défectueux, ce qui fait l’objet d’ordonnances de la part des autorités provinciales responsables du bien-être animal.
Dans son bassin de béton, Kiska nage en cercles répétitifs dans le sens contraire des aiguilles d’une montre et adopte des comportements atypiques tels que se laisser flotter en restant immobile ou se frapper la tête contre la paroi du bassin. Sénateurs, ce n’est pas correct. Kiska ne devrait pas avoir à mourir seule, et s’il est possible de la déplacer en toute sécurité, il faut envisager cette option.
Pour cette raison, le préambule de la Loi de Jane Goodall fait remarquer que le gouvernement de l’Ontario a le pouvoir de conférer à Kiska un statut juridique. Cela permettrait à un tribunal d’ordonner, dans l’intérêt de l’animal, le déplacement de ce dernier vers le sanctuaire de baleines prévu à Port Hilford, en Nouvelle-Écosse.
De grands singes qui se trouvaient en situation préoccupante ont reçu des droits similaires en Argentine. J’espère que le gouvernement de l’Ontario trouvera le moyen de venir en aide à Kiska. J’espère aussi que Marineland voudra collaborer avec l’équipe de scientifiques du sanctuaire de baleines pour évaluer les solutions possibles pour Kiska. Les valeurs autochtones reconnaissent les liens qui nous unissent aux autres êtres vivants et nous ne devons pas tourner le dos à Kiska ou la laisser vivre une vie de misère.
Il ne faut pas oublier non plus qu’une quarantaine de bélugas et cinq dauphins à gros nez à Marineland méritent également notre attention. Dans le merveilleux pays qu’est le Canada, nous devons prendre la défense de ceux qui ne peuvent se faire entendre. C’est l’objectif de la Loi de Jane Goodall.
En terminant, honorables sénateurs, je suis reconnaissant de votre attention et je vous remercie. Je vous invite à participer à ce débat et à contribuer à l’adoption de la Loi de Jane Goodall par le Parlement. Je vais terminer en citant le discours prononcé par l’honorable Murray Sinclair au sujet du projet de loi :
Honorables sénateurs, nous vivons une période de grands défis alors que le monde naturel est en danger. Toutefois, nous vivons aussi une période sous le signe de l’espoir du fait que les valeurs sociales reflètent de plus en plus un éveil spirituel et moral. Nous pouvons encore sauver cette magnifique planète, ainsi que le savoir et les cultures autochtones, et les animaux, ces êtres sacrés et innocents qui méritent notre compassion.
En présentant ce projet de loi, Jane Goodall et moi pensons que les plus ardents défenseurs des animaux seront les jeunes, y compris par l’entremise de son organisme Roots and Shoots. Le mépris pour les animaux est un comportement acquis. Nous pourrions bien découvrir que les enfants ont une leçon à nous donner. Mes petits-enfants, bien franchement, sont emballés par ce projet de loi, et j’espère que ce sera aussi le cas des vôtres. Aux parents et aux enseignants qui sont à l’écoute partout au pays, je dirai que nous voulons entendre ce que les enfants ont à dire pour redécouvrir cette sagesse perdue au sujet des animaux.
Merci. Hiy kitatamîhin.
Sénateur Richards, je comprends que vous avez une question, mais il ne vous reste que 12 secondes.
Je vais simplement lui poser ma question et il n’aura pas à y répondre. J’allais lui demander s’il pense que tous les zoos doivent être définitivement fermés dans les prochaines années. Qu’en pense-t-il? C’était l’une de mes questions.