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Projet de loi sur le renforcement de la protection de l’environnement pour un Canada en santé

Rejet de la motion d'amendement

22 juin 2022


L’honorable David Richards [ - ]

Par conséquent, honorables sénateurs, je propose l’amendement suivant :

Que le projet de loi S-5, tel que modifié, ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu’il soit modifié à nouveau à la page 28 (dans sa version modifiée par décision du Sénat le 21 juin 2022), en renumérotant le projet de loi au besoin, par adjonction, avant le nouvel article 39.1, de ce qui suit :

« 39.01 (1) Le paragraphe 106(1) de la même loi est remplacé par ce qui suit :

106 (1) Il est interdit de fabriquer ou d’importer un organisme vivant non inscrit sur la liste intérieure sans avoir fourni au ministre les renseignements réglementaires — accompagnés des droits réglementaires — au plus tard à la date réglementaire et tant que le délai d’évaluation prévu à l’article 108 n’est pas expiré. Si l’organisme vivant est un animal qui a un équivalent sauvage, les renseignements fournis montrent qu’il existe un besoin démontrable pour l’organisme vivant et que celui-ci n’est pas effectivement ou potentiellement toxique.

(2) Le paragraphe 106(4) de la même loi est remplacé par ce qui suit :

(4) En ce qui touche un organisme vivant non inscrit sur la liste intérieure mais pour lequel le ministre publie dans la Gazette du Canada un avis l’assujettissant au présent paragraphe, il est interdit de l’utiliser dans le cadre d’une nouvelle activité prévue par l’avis sans avoir fourni au ministre, au plus tard à la date réglementaire ou à celle que le ministre précise, les renseignements réglementaires — accompagnés des droits réglementaires — et tant que le délai d’évaluation prévu à l’article 108 ou précisé par le ministre n’est pas expiré. Si l’organisme vivant est un animal qui a un équivalent sauvage, les renseignements fournis montrent qu’il existe un besoin démontrable pour la nouvelle activité liée à l’organisme vivant et que celle-ci ne le rend pas effectivement ou potentiellement toxique.

(3) L’article 106 de la même loi est modifié par adjonction, après le paragraphe (8), de ce qui suit :

(8.1) Malgré le paragraphe (8), si l’organisme vivant a un équivalent sauvage, le ministre publie un avis de la demande d’exemption et donne aux membres du public des occasions de participer à l’évaluation. ».

L’honorable Dennis Glen Patterson [ - ]

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour appuyer l’amendement du sénateur Richards.

Pendant l’étude du projet de loi, j’ai été frappé par l’histoire d’une espèce de saumon de l’Atlantique génétiquement modifiée qui avait été relâchée dans la nature sans que les gens en soient vraiment informés. Mark Butler, conseiller principal à Nature Canada, a mentionné « [l]e risque pour le saumon sauvage et les conséquences pour les droits des peuples autochtones » qu’une telle espèce pourrait représenter.

Selon l’amendement proposé, tant qu’un promoteur n’aurait pas démontré qu’un organisme vivant qui a un équivalent sauvage peut être utilisé de manière sécuritaire, il serait interdit de le développer, de le fabriquer, de l’importer ou de l’utiliser. Dans un but de clarté, chers collègues, j’attire votre attention sur le terme « qui a un équivalent sauvage ». Dans ce cas-ci, nous parlons d’un poisson, mais il pourrait s’agir de homards, de lapins ou d’autres animaux plus gros, et non d’organismes microscopiques tels que des souches bactériennes.

Il convient de noter que des recommandations semblables ont été formulées à l’égard de substances chimiques extrêmement préoccupantes afin que les promoteurs aient à fournir des preuves solides de l’existence d’un besoin. Cela aussi est conforme au principe de la prudence, que j’ai déjà mentionné et qui est énoncé à l’alinéa 2(1)a) de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement. Le promoteur devrait aussi avoir à démontrer que le nouvel organisme vivant est nécessaire.

En outre, j’attire l’attention des sénateurs sur la partie 3 de l’amendement, qui vise à garantir un niveau accru de transparence et de responsabilité en ce qui concerne les décisions prises par le gouvernement en vertu de cette loi par rapport aux organismes génétiquement modifiés ayant une contrepartie sauvage. Cette approbation a eu lieu en catimini.

Certains groupes de l’industrie ont fait valoir que cela met en péril les renseignements commerciaux confidentiels des promoteurs actuels et futurs. Cependant, il y a plusieurs protections dans les règlements régissant la Loi canadienne sur la protection de l’environnement qui protégeraient ces renseignements, y compris les pouvoirs qui existent aux termes du paragraphe 313(1) qui précise :

Quiconque fournit des renseignements au ministre sous le régime de la présente loi, ou à la commission de révision relativement à un avis d’opposition déposé aux termes de la présente partie, peut en même temps demander que les renseignements fournis soient considérés comme confidentiels.

Comme l’a dit le sénateur Richards, cette approche est basée sur l’exemple d’une entreprise appelée AquaBounty, qui exploite une ferme terrestre à l’Île-du-Prince-Édouard. En ce moment même, elle élève du saumon génétiquement modifié et le vend sans que ce soit indiqué sur l’étiquette. Dans ce cas, rien n’exige que le saumon génétiquement modifié soit clairement étiqueté, de sorte que les citoyens inquiets doivent creuser pour trouver des informations sur les risques que la consommation de ce saumon pose pour la santé.

Karen Wristen, de la Living Oceans Society, nous a raconté l’histoire d’AquaBounty. En tant qu’avocate dans le milieu des ONG, elle n’aurait pas dû être prise au dépourvu par l’introduction d’une nouvelle espèce de saumon dans les eaux canadiennes, mais Mme Wristen a raconté ceci au comité :

Puisque le public canadien ne disposait d’aucune information sur l’évaluation des risques en cours ou sur la demande présentée par Aquabounty, Living Oceans et l’Ecology Action Centre ont demandé que la décision autorisant la fabrication et l’exportation de SAA fasse l’objet d’un contrôle judiciaire. Il faudra plus d’un an pour que le gouvernement produise son rapport de décision et plus longtemps encore avant que nous puissions enfin consulter l’évaluation des risques.

Honorables sénateurs, j’ai été gêné d’entendre parler des détails de cette poursuite judiciaire et je crois que nous avons l’occasion, avec cet amendement, de faire en sorte que les décisions du gouvernement et tous les renseignements pertinents soient rendus publics rapidement et de façon transparente. Certains d’entre vous savent peut-être que j’ai présenté cet amendement au comité. Il a été adopté la première fois que nous avons fait l’étude article par article, puis il a été rejeté lorsque nous avons dû recommencer en raison d’un détail d’ordre technique. Le sénateur Kutcher a alors dit au comité :

J’ai aussi appris qu’Environnement et Changement climatique Canada et Santé Canada avaient entrepris un examen exhaustif du Règlement sur les renseignements concernant les substances nouvelles (organismes), qui fait partie de la réglementation mettant en œuvre la partie 6 de la LCPE. Cela veut dire qu’ils vont examiner de près des modifications à la réglementation, dans le cadre de l’examen, et qu’il est donc prématuré de proposer des modifications à cette partie de la loi, avant que les consultations et les initiatives subséquentes de modernisation de la réglementation n’aboutissent.

Faites-nous confiance et attendez. Même si un examen du Règlement sur les renseignements concernant les substances nouvelles (organismes) et des propositions de changements sont les bienvenus, la réglementation ne suffit pas. Il faut modifier la loi pour garantir dès maintenant la protection des consommateurs canadiens. Nous avons l’occasion de le faire avec cet amendement.

L’Assemblée des Premières Nations, le Congrès des peuples autochtones, la Fédération du saumon atlantique — qui ignorait complètement l’existence de cette nouvelle espèce avant d’en entendre parler dans la poursuite en justice dont j’ai parlé —, la Living Oceans Society et Bob Chamberlain, un leader autochtone de la Colombie-Britannique, ont tous appuyé cet amendement dans leurs témoignages et leurs mémoires au comité. À leur avis, l’amendement garantit que le public pourra en apprendre davantage et participer au processus d’autorisation des activités liées aux organismes génétiquement modifiés qui ont un homologue sauvage.

J’aimerais aussi remercier le sénateur Richards de son dévouement à l’égard du saumon de l’Atlantique emblématique, et j’invite fortement tous les honorables sénateurs à adopter l’amendement. Merci.

L’honorable Pat Duncan [ - ]

Sénateur Patterson, accepteriez-vous de répondre à une question?

Le sénateur Patterson [ - ]

Oui.

La sénatrice Duncan [ - ]

Merci, sénateur Patterson. Cette question pourrait aussi s’adresser au sénateur Kutcher. Vous avez beaucoup parlé du saumon de l’Atlantique. A-t-on discuté des effets de la proposition d’amendement sur le saumon du Pacifique, et avez-vous des exemples de la situation que vous décrivez sur la côte Ouest?

Le sénateur Patterson [ - ]

Je ne connais pas les effets de ces modifications génétiques sur d’autres espèces au Canada. À ma connaissance, il s’agit là de la première et de la seule espèce dont on nous a parlé au comité.

En ce qui concerne le sénateur Kutcher, nous avons entendu un témoin. Malheureusement, nous n’avons pas eu le temps d’en entendre d’autres, mais cette proposition d’amendement permet essentiellement de s’assurer que, si une espèce sauvage subit encore ce genre de modification génétique, le public pourra s’attendre à plus de transparence que dans le cas d’AquaBounty. Merci.

La sénatrice Duncan [ - ]

J’ai écouté vos observations sur cette proposition d’amendement, et vous avez fait allusion aux consultations et aux efforts qui sont menés actuellement par les responsables de la protection de l’environnement et par Santé Canada. Ces entités pourraient-elles travailler avec les intervenants qui se penchent sur la situation du saumon de la Colombie-Britannique? Se pourrait-il que ces intervenants aient plus d’information et travaillent avec les pisciculteurs, par exemple, tant sur la côte Ouest que sur la côte Est? Se pourrait-il que les consultations supplémentaires qu’ils proposent soient nécessaires avant que nous adoptions de tels amendements?

Le sénateur Patterson [ - ]

Je vous remercie de la question, qui suggère que des groupes intéressés, comme la Living Oceans Society et la Fédération du saumon atlantique, si je comprends bien, pourraient collaborer avec Environnement et Changement climatique Canada et Santé Canada, qui ont entamé un examen du Règlement sur les renseignements concernant les substances nouvelles (organismes), ou des dispositions de nouvelle activité significative, comme on les appelle.

Ces organisations, Ecology Action et Nature Canada ont dû recourir aux tribunaux pour obtenir l’information sur l’évaluation des risques qui avait été faite par le ministère. Elles n’entretiennent pas de bonnes relations avec le ministère chargé de revoir cette réglementation. Elles ont dû faire appel aux tribunaux pour savoir à quoi s’en tenir, et cela a duré un an. Je ne crois pas que nous devrions attendre le ministère ni compter sur lui pour examiner cette question en temps et lieu. Il a fallu attendre une vingtaine d’années avant que ces modifications soient proposées. Les gouvernements n’agissent pas rapidement.

Pendant ce temps, je crois que le potentiel est énorme pour que se produise une explosion d’autres modifications génétiques pouvant menacer d’autres espèces. Je ne crois donc pas que la coopération soit possible ici. Il n’y en a certainement pas eu dans le passé. Merci.

L’honorable René Cormier [ - ]

Je dois dire tout d’abord que j’apprécie votre argumentaire. J’appuie les préoccupations du sénateur Richards dans ce domaine considérant l’impact du saumon de l’Atlantique pour notre région, tant sur le plan environnemental que sur les plans du tourisme et de l’alimentation. L’enjeu est très important et les OGM sont source de grande préoccupation.

Cela dit, la question que je vous pose est toute simple. Je crois que c’est une préoccupation tout à fait légitime, mais ce projet de loi est-il le bon projet de loi et le bon véhicule pour traiter de cette question? Je pose la question, étant donné qu’il s’agit d’un projet de loi qui porte sur les substances chimiques et que, comme l’a dit le sénateur Kutcher, nous avons affaire à des OGM, à des organismes.

Le sénateur Patterson [ - ]

Je vous remercie de votre question, sénateur Cormier. Je sais que vous venez d’une région qui chérit le saumon de l’Atlantique.

Il ne fait aucun doute que cet amendement s’inscrit dans la portée du projet de loi. Le projet de loi porte sur les substances, y compris les substances vivantes qui pourraient représenter un danger pour la santé humaine. C’est donc le bon véhicule pour traiter de cette question. Comme le sénateur Kutcher l’a dit, le ministère passera en revue les règlements : le même ministère s’en occupera en plus d’être responsable de l’application de ce projet de loi. C’est donc le projet de loi approprié pour le faire.

La question est la suivante : attendons-nous que le gouvernement présente ses règlements? Faisons-nous confiance à un ministère qui semble avoir permis en secret, du moins sans avoir consulté ou avisé la population, l’introduction de ces espèces modifiées génétiquement dans une ferme piscicole de l’Île-du-Prince-Édouard, laquelle produit et vend maintenant, sans étiquettes particulières, ce poisson génétiquement modifié?

Agissons maintenant plutôt que d’attendre que le gouvernement prenne des mesures dans ce dossier. Merci.

Son Honneur le Président [ - ]

Sénateur Patterson, quelques sénateurs voudraient aussi vous poser des questions, mais votre temps de parole est écoulé. Demandez-vous cinq minutes supplémentaires pour répondre aux questions?

Le sénateur Patterson [ - ]

Non.

L’honorable Fabian Manning [ - ]

Honorables sénateurs, mon intention était de poser des questions, mais, comme le sénateur Patterson n’en prend pas plus, je me contenterai de faire quelques commentaires.

Je suis très préoccupé par certaines des discussions qui ont eu lieu ici ce soir. J’ai plusieurs préoccupations, et je veux en aborder quelques-unes.

Si j’ai bien suivi ce qui a été dit, il y a une entreprise à l’Île‑du‑Prince‑Édouard — que je ne connaissais pas, pour être honnête avec vous — qui fabrique un produit alimentaire dans notre pays et qui le vend sans aucune étiquette. Je vais vous croire sur parole.

Cela me préoccupe grandement. Normalement, l’Agence canadienne d’inspection des aliments supervise la production et la vente de produits, ainsi que les permis octroyés aux entreprises et aux distributeurs pour qu’ils puissent vendre leurs produits. Il est évident que tout produit alimentaire dans ce pays doit être vendu avec un étiquetage approprié. Je veux dire que si on achète un muffin dans un magasin, il y a forcément une étiquette sur laquelle figurent les ingrédients, les inspections et toute autre information requise.

Je suis aussi très préoccupé, parce que je n’étais pas au courant de cette histoire d’une espèce de saumon génétiquement modifié relâchée dans la nature sans que personne ne le sache, selon ce qu’a dit plus tôt le sénateur Patterson. C’est très préoccupant pour la simple raison que personne n’était au courant. C’est l’une des choses qui me préoccupent, qu’une espèce soit relâchée dans la nature, et que cette espèce de saumon génétiquement modifié puisse interagir ensuite avec le saumon sauvage de l’Atlantique ou n’importe quelle espèce avec laquelle il entrerait en contact.

À mon avis, il s’agit là de très graves préoccupations sur lesquelles nous devons nous pencher très sérieusement.

J’ai pris des notes quand le sénateur Patterson a mentionné que Mark Butler, conseiller principal de Nature Canada, a parlé des risques pour le saumon sauvage et des répercussions qu’une telle espèce pourrait avoir sur les droits des peuples autochtones. Encore une fois, il s’agit d’un autre enjeu grave qui est soulevé. Notre Comité des pêches est en train de terminer une étude sur les droits de pêche des Autochtones. Cette espèce de saumon génétiquement modifiée nuit non seulement aux droits des Autochtones, mais aussi aux droits des Canadiens, car il s’agit d’une ingérence dans la transformation de tout produit océanique à des fins alimentaires.

Je suis très préoccupé par certaines des choses que j’ai apprises ce soir à cet égard, Votre Honneur. À quelles évaluations des risques procède-t-on? Qui examine ce dossier? Quels ministères se penchent sur la situation?

Il est question d’alimentation. Comme nous le savons tous, il y a une pénurie mondiale de certains produits alimentaires pour diverses raisons, notamment la COVID ou les changements climatiques ou autre chose. Pour garantir la disponibilité future des aliments, nous devons nous assurer de tout faire pour veiller à ce que ces aliments soient cultivés adéquatement, qu’il s’agisse de légumes, de poissons ou d’animaux, ou quoi que ce soit d’autre, qu’ils soient transformés et étiquetés adéquatement, et qu’ils soient vendus en tenant d’abord compte de la santé de tous.

Votre Honneur, je souhaitais aborder certains éléments qui ont été soulevés. Je suis très préoccupé par une partie de la discussion de ce soir, concernant la sécurité de l’approvisionnement alimentaire. Certainement, lorsqu’on parle de saumon génériquement modifié, si tel est le cas et si cela se fait — je n’ai aucune raison de ne pas croire ce qui a été présenté ici ce soir —, une question se pose : quelle sera la prochaine étape? Qu’arrivera‑t‑il ensuite? Cette entreprise a dû demander un permis quelconque à quelqu’un, peu importe qu’il s’agisse du gouvernement provincial de l’Île-du-Prince-Édouard ou du gouvernement fédéral. Elle a dû faire une demande pour obtenir un permis afin de produire et de transformer des aliments. Quelqu’un pourrait-il m’éclairer sur ce qui arrive ici? Quoi qu’il en soit, je suis certainement convaincu que nous devons réexaminer certaines préoccupations soulevées ici ce soir. Je tenais à le dire aux fins du compte rendu.

Merci.

Honorables sénateurs, j’aimerais remercier les sénateurs Patterson, Richards et Manning d’avoir soulevé ces questions importantes.

Puisque je viens des Maritimes et que j’adore le saumon de l’Atlantique, j’appuie sincèrement l’idée que nous étudions ces questions minutieusement, de sorte que nous sachions réellement ce que nous modifions. Je crois que c’est là que le bât blesse.

Nous n’avons pas entendu l’Agence canadienne d’inspection des aliments, alors nous ne savons rien concernant l’étiquetage. Nous avons entendu quelques témoins dire certaines choses, mais nous n’avons pas consulté toutes les parties concernées. Nous n’avons pas l’information. Ou bien nous acceptons ce qui a été dit de prime abord, ou bien nous effectuons une étude complète.

Nous n’avons pas entendu le ministère des Pêches et des Océans, alors nous ne savons pas quels sont les problèmes relatifs à cela. Nous n’avons rien entendu de la part d’AquaBounty, l’entreprise que le Sénat a clouée au pilori. Si nous avons des préoccupations, nous devrions les inviter à venir témoigner. J’estime que c’est la moindre des choses. Nous n’avons pas entendu ce qu’en pensent les Autochtones. Or, c’est une question dont il est très important de discuter.

Nous n’avons pas étudié cela, et je nous exhorte à être très prudents lorsqu’il s’agit d’apporter des amendements au Sénat à l’étape de la troisième lecture concernant des questions que nous n’avons pas étudiées.

Au comité, les fonctionnaires nous ont dit qu’Environnement et Changement climatique Canada ainsi que Santé Canada ont entrepris un examen exhaustif du Règlement sur les renseignements concernant les substances nouvelles (organismes), un règlement pris en application de la partie 6 de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement. Or, on parle ici d’organismes et non de substances. Le projet de loi S-5 porte sur la gestion des substances chimiques et non la réglementation des organismes vivants. Cela dit, une étude est déjà en cours pour traiter de cette question précise.

En toute franchise, j’estime qu’il serait prématuré de proposer des modifications à cette partie de la loi avant d’effectuer ces consultations et de réaliser une étude complète, car nous devrions être pleinement informés avant d’entreprendre des démarches pour modifier la loi. Pour ces raisons, je voterais contre l’amendement.

Le sénateur Manning [ - ]

Sénateur Kutcher, accepteriez-vous, s’il vous plaît, de répondre à une question?

À une question venant de vous, sénateur Manning, absolument.

Le sénateur Manning [ - ]

J’espère que vous ne changerez pas d’avis après ma question.

Nous le savons tous et cela nous a été dit : les comités sont maîtres de leurs actions. Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet? Pourquoi n’avez-vous pas entendu le ministère des Pêches et des Océans? Pourquoi n’avez-vous pas entendu de groupes autochtones? Pourquoi n’avez-vous pas entendu l’Agence canadienne d’inspection des aliments? Pourquoi n’avez-vous pas entendu AquaBounty? Vous n’êtes peut-être pas en mesure de nous le dire, mais j’aimerais bien connaître la réponse.

Comme l’honorable sénateur pouvait s’y attendre, je n’ai pas sélectionné les témoins qui ont été convoqués devant le comité. Le problème, c’est que le comité étudiait les substances. Il étudiait une loi qui traite de la gestion des substances chimiques. Il y a d’autres parties de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement qui peuvent se rattacher à cette question qui doit être soulevée, car il s’agit d’une question qui doit être étudiée. Vous avez parfaitement raison de dire qu’il serait tout à fait inapproprié d’attendre d’un comité ou du Sénat qu’il prenne des décisions sur un sujet que le comité n’a pas étudié.

L’honorable Julie Miville-Dechêne [ - ]

Je veux confirmer rapidement les propos du sénateur Patterson selon lesquels dans l’article 6 de la loi, il est question d’organismes vivants. Ainsi, on ne peut pas dire que la question des saumons génétiquement modifiés est complètement à l’extérieur de la portée de ce projet de loi. D’ailleurs, j’irais plus loin. Il a beaucoup été question d’animaux dans l’étude de ce projet de loi, particulièrement d’animaux dont on se servait pour faire des expériences. Nous avons tenu de nombreuses discussions et apporté un grand nombre d’amendements; en tout cas, je peux affirmer que les animaux qui servent à ces expériences seront très bien protégés par le projet de loi que nous avons étudié.

Donc, si c’est le cas pour les animaux de laboratoire, je crois qu’il est très clair qu’il n’y a pas eu de transparence en ce qui a trait à la question des saumons génétiquement modifiés, qui est un dossier complexe. On le constate, étant donné ce qu’on a appris. Vous avez raison, on n’a pas passé des mois à faire une étude sur cette question, mais il en est de même pour tous les éléments du projet de loi S-5. On a étudié de façon succincte plusieurs questions extrêmement compliquées et on a essayé de les comprendre; on a lu des documents pour essayer de comprendre. Donc, vous avez raison, tout n’a pas été dit dans le cadre des travaux du comité.

Cependant, je fais partie de ceux et celles qui ont voté la première fois en faveur de cet amendement et je compte le faire une deuxième fois.

Sénatrice Miville-Dechêne, vous avez dit que nous avions étudié des animaux. Avons-nous étudié des animaux pour comprendre les répercussions des expériences liées aux substances qui ont été menées sur eux ou avons-nous simplement étudié les animaux?

La sénatrice Miville-Dechêne [ - ]

Vous avez raison, sénateur Kutcher, on a en effet étudié le cas des animaux dans le cadre de l’examen de ce projet de loi, parce qu’on ne voulait pas que des tests soient faits sur ces animaux. À mon avis, la question ici revêt tout de même une certaine importance, parce que je crois que les saumons sont aussi des êtres vivants. Dans ce cas-ci, la question des saumons qui sont génétiquement modifiés s’inscrit tout à fait dans la portée du projet de loi; cependant, de façon plus importante encore, il y a une question de transparence. Pendant l’étude de ce projet de loi, je me suis battue pour la transparence, pour savoir ce que comportent les substances et, maintenant, nous voulons savoir si ces organismes génétiquement modifiés sont toxiques ou non.

À mon avis, je crois qu’il ne faut pas attendre une étude qui viendra dans un temps indéterminé. Vous le savez, cela fait 20 ans qu’on n’a pas modifié et revu cette loi. Il serait donc indiqué, par précaution, d’insérer cet amendement dans le projet de loi, parce qu’éventuellement nous recevrons les études qui auront été faites, mais cela prendra du temps, et on ne retouchera pas à la loi par la suite.

L’honorable Percy E. Downe [ - ]

Honorables sénateurs, cette entreprise est bien connue à l’Île-du-Prince-Édouard. AquaBounty est une entreprise américaine qui produit du saumon à l’Île‑du‑Prince‑Édouard. En fait, son saumon est le premier poisson génétiquement modifié à être récolté et vendu au Canada.

La plupart des renseignements mentionnés ce soir sont connus à l’Île-du-Prince-Édouard. Ils ont fait l’objet de reportages dans les médias locaux et nationaux. L’Île-du-Prince-Édouard est bien au fait de toutes les observations que le sénateur Patterson, le sénateur Richards et d’autres ont faites et comprend parfaitement celles-ci. La question en est une, à mon avis, de transparence.

Si mes collègues veulent faire une recherche sur Google, ils verront toutes les histoires et tous les reportages des médias. Il n’y a rien de secret dans cette affaire. Les représentants d’AquaBounty ont annoncé la quantité de saumon génétiquement modifié qu’ils produisent. Ils ont indiqué qu’en combinant l’usine de l’Île-du-Prince-Édouard et leurs usines américaines, ils ont produit 84 tonnes de saumon récemment. Le saumon génétiquement modifié de l’Île-du-Prince-Édouard n’a été vendu qu’au Canada. Aucun des saumons génétiquement modifiés produits aux États‑Unis n’a été vendu au Canada. Ils ont tout à fait raison de dire que l’Agence canadienne d’inspection des aliments a déclaré que le saumon d’AquaBounty a été évalué par Santé Canada et a été jugé sans danger pour les consommateurs et qu’il peut être vendu dans le pays sans étiquetage.

Le problème, bien entendu, c’est qu’ils ne veulent pas dire où le saumon est vendu. Lorsqu’on leur pose la question, ils répondent qu’il est vendu par l’entremise de distributeurs alimentaires. Mais lorsqu’on s’attable à un restaurant au Canada ou qu’on va à l’épicerie pour acheter du saumon de l’Atlantique, on aimerait peut‑être savoir s’il a été génétiquement modifié ou non. Je crois que c’est là le nœud du problème. Je crois que d’autres ont dit qu’il faudrait au gouvernement du Canada des années, voire des décennies, pour corriger un problème auquel nous pouvons nous attaquer ce soir. Je vais donc voter en faveur de l’amendement, chers collègues.

Le sénateur Richards [ - ]

Je crois qu’il est probablement excellent pour la consommation, sénateur Downe, mais il y a trois ans, nous avons introduit 2 800 saumons qui provenaient du cours supérieur de la rivière Miramichi Nord-Ouest...

Son Honneur le Président [ - ]

Sénateur Richards, si vous parlez à nouveau, cela mettra fin au débat pour de bon. Je crois comprendre que vous posiez une question au sénateur Downe. Est-ce le cas?

Le sénateur Richards [ - ]

Merci beaucoup, Votre Honneur. Je vais laisser tomber.

Son Honneur le Président [ - ]

Merci. Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Son Honneur le Président [ - ]

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Son Honneur le Président [ - ]

Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Son Honneur le Président [ - ]

Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Son Honneur le Président [ - ]

À mon avis, les non l’emportent.

Son Honneur le Président [ - ]

Je vois deux sénateurs se lever. Y a‑t‑il entente au sujet de la sonnerie?

Son Honneur le Président [ - ]

Y a-t-il consentement pour procéder au vote maintenant? Si un sénateur s’y oppose, qu’il veuille bien dire non. Le vote aura lieu maintenant.

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