Projet de loi concernant l'élaboration d'un cadre national sur le revenu de base garanti suffisant
Deuxième lecture
18 avril 2023
Honorables sénateurs, je prends la parole pour participer au débat à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi S-233, Loi concernant l’élaboration d’un cadre national sur le revenu de base garanti suffisant, parrainé par notre collègue la sénatrice Pate.
Ce projet de loi ordonne au ministre des Finances d’élaborer un cadre national afin de mettre en œuvre un programme de revenu de base garanti dans l’ensemble du Canada pour toute personne âgée de plus de 17 ans, y compris les travailleurs temporaires, les résidents permanents et les demandeurs d’asile.
Avant de poursuivre, je tiens à féliciter la sénatrice Pate du travail qu’elle a accompli en se faisant la championne de tant d’initiatives visant à améliorer la vie des personnes démunies au Canada. Cette démarche nous permet de réfléchir à des choses qui, parfois, ne sont pas au premier plan de nos préoccupations. En grandissant dans une petite ville du Cap-Breton, j’ai vu beaucoup de personnes marginalisées, ayant accès à des débouchés limités. Sur le plan financier, la plupart des personnes vivaient dans un monde que l’on pourrait qualifier de classe moyenne inférieure. C’était assurément le cas de ma famille, même si, avec 10 enfants et une famille élargie, maman et papa avaient probablement un peu plus de bouches à nourrir que la plupart des gens.
J’ai également été témoin de la vraie pauvreté, bien que les raisons de celle-ci, comme beaucoup d’autres choses, soient souvent le résultat de circonstances plus nuancées que certains pourraient être portés à croire. Il existe aussi beaucoup de zones grises. Je ne sais pas si la pauvreté est pire aujourd’hui qu’il y a 50 ans, mais je sais que ce ne devrait pas être le cas compte tenu de la quantité d’argent et de ressources qui est consacrée aujourd’hui aux personnes et aux communautés par rapport à il y a 50 ans. Je ne partage peut-être pas toujours les opinions de la sénatrice Pate concernant les solutions à apporter à certains problèmes, mais les efforts inlassables qu’elle déploie dans ces dossiers difficiles enrichissent le discours du Sénat et je tiens à la saluer pour cela.
Le concept d’un revenu de base n’est pas nouveau. On peut dire qu’il remonte à 1516 avec la publication de L’utopie de Thomas More. M. More était un homme sage et un conservateur brillant et influent qui avait des principes. Bien entendu, en raison de ses principes, il a plus tard été emprisonné dans la Tour de Londres par Henri VIII, reconnu coupable de trahison et décapité. Apparemment, le choix d’adhérer à ses principes peut comporter certains risques. Considéré comme un martyr pour sa foi, il a été canonisé en 1935 et, en l’an 2000, le pape Jean-Paul II l’a déclaré saint patron des hommes d’État et des politiciens. Le pauvre homme n’a pas de répit. Imaginez que vous ayez cette responsabilité et ce fardeau dans l’au-delà.
À l’ère moderne, on a accordé une attention considérable au concept d’un revenu annuel garanti lorsqu’il a été défendu par le lauréat du prix Nobel et économiste du libre marché Milton Friedman. Ce dernier a fait valoir qu’un revenu universel de base serait une méthode moins paternaliste et plus efficace pour offrir une assistance sociale que des programmes administrés par des bureaucraties. En gros, il proposait d’envoyer un chèque à tout le monde, en fonction du revenu du ménage et d’un seuil d’imposition négatif, et de permettre à la personne de se servir de l’assistance sociale comme elle l’entendait. Aucun examen des ressources, aucun besoin de contrôleurs. Je trouve cette idée très attrayante.
Robert Stanfield a discuté de cette question et l’a étudiée lorsqu’il était le chef des conservateurs fédéraux. De plus, notre ancien collègue Hugh Segal défend de façon éloquente et persistante l’idée d’un revenu garanti. Il est réjouissant de voir la sénatrice Pate embrasser ce qui a toujours été un concept associé à la pensée conservatrice, et j’encourage d’autres personnes à suivre son exemple.
Je me suis porté volontaire pour être le porte-parole pour ce projet de loi lorsqu’il a été présenté. J’ai toujours été intrigué par l’idée d’un revenu garanti, d’autant plus que nous vivons aujourd’hui dans un véritable État-providence. Si nous dépensons chaque année des millions de dollars pour divers programmes d’aide, et s’il s’avère que le revenu de base garanti reviendrait en fait moins cher à financer et à mettre en œuvre, pourquoi ne pas l’envisager?
Il est important de rappeler que les premiers modèles de revenu de base prévoyaient en contrepartie, parallèlement à l’instauration du revenu de base garanti, l’élimination des bureaucraties et des programmes redondants qui fournissent les prestations sociales actuelles. Malheureusement, les défenseurs de la plupart des modèles contemporains de programmes de revenu de base ne semblent pas disposés à suggérer des coupes dans nos vastes et coûteux programmes d’aide sociale, ce qui, à mon avis, remet en cause la simplicité et l’égalitarisme du concept et compromet sa bonne application. Le revenu de base garanti ne saurait être un énième programme d’aide sociale. Il doit en fait les remplacer.
Comme vous le savez, nos bureaux ont reçu un nombre sans précédent de courriels sur ce projet de loi. Certains messages étaient erronés ou fondés sur de mauvaises informations, mais bon nombre d’entre eux soulevaient des préoccupations légitimes et judicieuses sur le projet de loi, les répercussions qu’il aurait sur les auteurs de ces messages, ainsi que sur les prestations dont ces gens dépendent et pour lesquelles ils ont versé des cotisations pendant une bonne partie de leur vie. Je pense que leurs inquiétudes découlent, en grande partie, du fait que le projet de loi fournit peu de détails. Toutefois, les détails qu’il contient soulèvent des préoccupations et constituent le talon d’Achille du projet de loi. Après avoir ordonné au ministre des Finances d’élaborer un cadre sur le revenu de base garanti, le projet de loi fixe, de façon arbitraire, des critères d’âge et des critères généraux d’admissibilité. Si nous envisageons sérieusement d’établir un revenu de base garanti, nous ne pouvons pas imposer les règles de base de manière dogmatique. C’est une chose d’offrir un programme aux citoyens, mais c’en est une toute autre d’en élargir automatiquement l’accès aux travailleurs temporaires et aux non-citoyens. Je suis certain que la plupart des gens auraient de nombreuses préoccupations légitimes au sujet de l’admissibilité de non-citoyens à un tel programme, plus particulièrement ceux qui entrent illégalement au Canada.
Il est inconcevable pour moi que des gens touchent un revenu annuel dès l’âge de 17 ans. Je pense que cela aurait un effet très négatif sur les jeunes. Je crois que cela nuirait à l’ambition et à la motivation personnelles dont ont besoin toutes les personnes, surtout les jeunes, pour prospérer et avancer dans la vie.
Le Réseau canadien pour le revenu garanti, une organisation résolument de gauche sur les questions sociales, a des modèles de revenu de base garanti qui estiment le coût annuel de 187 milliards à 637 milliards de dollars. Pour mettre ces chiffres en perspective, en 2021-2022, le total des recettes provenant de l’impôt sur le revenu des particuliers au Canada était de 189 milliards de dollars, et le budget fédéral était de 394 milliards de dollars. Aujourd’hui, un seul exercice plus tard, la situation financière du Canada s’est détériorée de façon marquée et inquiétante. Cependant, en dépit de la situation financière précaire du pays, passons en revue les conclusions d’une analyse éclairée sur la capacité du Canada à envisager et à mettre en œuvre un programme de revenu garanti.
Durant la pandémie, l’Institut Fraser a publié un rapport intitulé How Much Could a Guaranteed Annual Income Cost qui examine les coûts de quatre variantes de modèles de revenu de base. La première variante utilise la PCU comme base de référence, c’est-à-dire l’aide d’urgence du gouvernement liée à la pandémie, qui s’élève à 2 000 $ par mois pour les personnes admissibles. Vous vous souvenez peut-être que de nombreux partisans des programmes de revenu de base ont demandé que le Canada conserve la PCU et l’applique en tant que revenu de base universel. L’Institut Fraser a calculé qu’offrir à chaque Canadien en âge de travailler un revenu annuel de base inconditionnel de 24 000 $ par année représenterait un coût net total de 464 milliards de dollars, ce qui augmenterait les dépenses liées aux programmes fédéraux de plus de 132 %. Il va sans dire que cette variante est tout simplement insoutenable. Le rapport a également conclu que, même si un revenu de base universel comme celui-ci apporterait un soutien financier important et qu’il aurait moins d’effets négatifs sur l’incitation au travail que d’autres modèles, il a non seulement un coût faramineux, mais il fournit également de l’aide à des Canadiens qui n’en ont pas vraiment besoin.
L’Institut Fraser a également réalisé des estimations pour des modèles qui prévoient la récupération par le gouvernement de certains transferts lorsque le revenu net d’une personne dépasse un certain seuil. Le rapport note que si un taux de réduction plus élevé peut réduire les coûts globaux d’un programme de revenu garanti, il décourage les bénéficiaires de travailler parce qu’ils conservent une part moins importante de leurs revenus lorsqu’ils atteignent le seuil.
Le rapport indique :
[U]n taux de réduction élevé se trouve à frapper les Canadiens d’un plus fort taux d’imposition marginal dès qu’ils atteignent le seuil minimal de revenu, car il réduit la récompense associée au fait de gagner plus de revenus. On appelle ce concept le « piège de l’aide sociale », car cela décourage les bénéficiaires de renoncer à l’aide sociale.
Le rapport décrit les intérêts concurrentiels à considérer lors de la conception des modèles de revenu garanti. Il faut comprendre que le modèle de revenu de base garanti repose sur trois éléments clés : le transfert de fonds, le taux de réduction et le seuil de revenu. Il faut tenir compte de trois facteurs concurrentiels qui se rapportent à trois intérêts concurrentiels, c’est-à-dire qu’il faut à la fois prévoir des transferts suffisamment importants pour réduire la pauvreté, réduire au minimum les coûts et éviter de décourager le travail. Selon le rapport, « [...] il est impossible d’atteindre les trois objectifs à la fois ».
Plus loin, le rapport dit ceci :
[...] il y a des tensions inhérentes aux régimes de revenu garanti que les promoteurs de ces régimes doivent prendre en considération. Ces tensions se rapportent essentiellement au compromis qu’il faut inévitablement trouver lorsqu’il s’agit de réduire les coûts par l’élimination draconienne des paiements à mesure que le revenu augmente tout en évitant de décourager le travail de façon importante [...] D’autres mesures que le revenu de base garanti pourraient s’avérer plus efficaces pour réduire la pauvreté et devraient être étudiées plus en détail.
Dans un article de l’Institut Fraser intitulé « The expensive truth about a universal basic income », on parle des effets négatifs que les programmes de revenu garanti pourraient avoir sur la participation au marché du travail en raison des recouvrements qui inciteraient les Canadiens à réduire leurs heures de travail. L’article dit ceci :
[...] réduire la rémunération d’une personne qui travaille un plus grand nombre d’heures l’encourage à travailler moins — il s’agit d’un effet pervers qui peut déboucher sur les problèmes liés à l’aide sociale dont beaucoup de Canadiens ont fait les frais dans les années 1980 et au début des années 1990.
J’aimerais également attirer votre attention sur un récent rapport rédigé par Brian Lee Crowley, directeur général de l’Institut Macdonald-Laurier, et par Sean Speer, agrégé supérieur à la Munk School, intitulé A Work and Opportunity Agenda for Canada, et qui traite du travail et des possibilités qui s’offrent au Canada. En réaction au débat public de plus en plus vif sur les modèles de revenu de base garanti, les auteurs de ce rapport ont cherché à déterminer si les versements inconditionnels en espèces, bien qu’ils partent d’une bonne intention, ont en fait plus d’inconvénients que d’avantages. Les auteurs ont constaté que de tels programmes, qui se traduisent par une augmentation des impôts et des dépenses publiques, sont non seulement préjudiciables à l’économie, mais qu’ils répondent également mal aux besoins des personnes à qui ils sont censés venir en aide.
Le rapport donne un aperçu de plusieurs aspects importants des modèles de revenu de base, notamment l’abordabilité, l’efficacité intergouvernementale et administrative et la désincitation au travail, pour ne citer que ceux-ci. En ce qui concerne l’abordabilité des modèles de revenu de base et après avoir effectué les calculs nécessaires, le rapport en parvient à la conclusion suivante :
Ces coûts impliqueraient nécessairement une augmentation significative des impôts, une réduction à grande échelle des dépenses, le financement par le déficit, ou une combinaison de ces trois éléments.
Plus loin, on peut lire :
Le réel effet pervers du versement d’un revenu de base à toute la population serait d’empêcher le gouvernement de verser des prestations ciblées plus généreuses directement aux personnes dans le besoin comme les Canadiens handicapés. Donner moins aux personnes réellement dans le besoin pour donner plus aux personnes en âge de travailler et en bonne santé est loin d’être une mesure empreinte de compassion. Il s’agit d’une utilisation indéfendable des précieux fonds publics.
Je suis d’accord.
Le rapport conclut également que les programmes de revenu de base auraient un effet négatif sur la participation au marché du travail au Canada.
Le bon sens nous dit que verser de gros paiements sans condition aux gens ne peut que rendre le travail moins attrayant et gratifiant, en particulier parce que les bénéficiaires n’auraient à travailler que pour combler l’écart entre leur revenu de base et le salaire qu’ils veulent gagner.
Comme la situation actuelle n’a pas permis d’enrayer la pauvreté et que les programmes de revenus de base ne constituent pas une solution viable, quelle est la solution? Le rapport de l’Institut Macdonald-Laurier propose un programme axé sur l’élargissement des perspectives professionnelles et la multiplication des débouchés pour tous les Canadiens en s’inspirant de la décennie rédemptrice du Canada, comme les auteurs l’appellent, celle des années 1990. Ils expliquent que le Canada a connu une croissance extraordinaire dans les années 1990, incluant un recul de la pauvreté, parce qu’il a laissé de côté la taxation et la redistribution de l’argent au profit de la rigueur financière, de la déréglementation, de l’investissement et de la croissance.
En outre, la viabilité d’un tel programme de revenu de base garanti a également été mise en question. Je m’en voudrais de ne pas attirer notre attention sur la contribution de notre économiste attitrée. La sénatrice Bellemare est en effet titulaire d’un doctorat en économie et elle se spécialise dans la macroéconomie. Elle a une longue expérience et un curriculum vitæ impressionnant dans son domaine d’expertise.
Si je puis me le permettre, j’aimerais citer un extrait du discours du sénateur Bellemare sur le projet de loi :
Pour financer un tel programme, les gouvernements devront revoir l’impôt sur le revenu. Or, les modifications fiscales nécessaires pour financer un tel programme nuiront à la participation au marché du travail, pas parce que les gens sont paresseux, mais tout simplement parce qu’ils sont rationnels. En somme, le nombre de personnes soutenues par ce programme augmentera au-delà du nombre de personnes qu’on voulait aider à l’origine. Or, moins d’heures travaillées et imposées, cela signifie moins de revenus pour le gouvernement. Bref, le financement du revenu de base garanti est insoutenable.
Fournir de l’argent aux Canadiens pour qu’ils ne travaillent pas, sans les inciter à travailler ou presque, soulève toute une série de problèmes, dont le moindre n’est pas la mise en place d’un système non viable qui a des effets négatifs sur la participation au marché du travail, ce qui se traduit par moins d’heures travaillées, moins de revenus, moins d’impôts sur le revenu et moins de recettes pour financer ce qui était censé être une initiative de lutte contre la pauvreté.
Chers collègues, je vous encourage également à lire la lettre d’opinion de la sénatrice Bellemare à ce sujet, qui a été publiée dans le Globe and Mail et dans laquelle elle explique pourquoi le revenu de base garanti serait l’un des moyens les plus complexes sur le plan constitutionnel et les plus ruineux de lutter contre la pauvreté et les inégalités.
En 2018, la Colombie-Britannique s’est engagée à créer un groupe d’experts chargé d’étudier le concept de revenu garanti pour la province. L’étude s’est appuyée sur plus de 40 projets de recherche menés par des experts de partout au pays, et on dit qu’il s’agit d’une des études du revenu de base garanti les plus exhaustives au monde.
Le groupe a conclu dans son rapport que la transition vers un système dont le pilier principal serait un revenu de base n’est pas l’option stratégique la plus juste. Je cite un extrait du rapport :
Les besoins des membres de cette société sont trop variés pour que l’on puisse y répondre efficacement au moyen d’un simple chèque du gouvernement. Le revenu de base est une approche très coûteuse pour atteindre un objectif particulier, tel que la réduction de la pauvreté.
Le groupe d’experts de la Colombie-Britannique a également conclu que tout modèle de revenu de base viable aurait aussi pour effet de dissuader les gens de travailler et que :
[...] les avantages d’un revenu de base mis de l’avant par les partisans sont difficiles à démontrer, et les objectifs stratégiques qu’ils impliquent peuvent être atteints aussi bien, voire mieux, avec d’autres approches.
Le groupe a conclu qu’il n’était même pas dans l’intérêt de la province d’approfondir la question au moyen d’un projet pilote.
Ainsi, de nombreuses personnes ont émis de sérieuses mises en garde concernant le recours à un revenu de base garanti pour lutter contre la pauvreté. Cette idée a-t-elle un avenir?
J’ai l’impression qu’avant d’instituer un revenu de base garanti, il faudrait absolument une gestion financière plus solide et plus responsable de la part du gouvernement fédéral, peu importe son allégeance politique.
Comme l’a si bien expliqué notre collègue la sénatrice Marshall dans son excellent discours sur le projet de loi de crédits, la dette nationale du Canada a doublé pour passer de 650 milliards de dollars en 2015 à plus de 1,2 billion de dollars aujourd’hui. En moins de huit ans, le gouvernement actuel a plus alourdi notre dette nationale que tous les gouvernements précédents réunis, depuis la Confédération, alors même que notre pays a passé une bonne partie de la première moitié du XXe siècle engagé dans des guerres internationales.
Pour examiner objectivement l’idée d’un revenu de base garanti, nous devrions d’abord poser un regard critique sur ce que représente exactement une dette de 1 billion de dollars. Le groupe américain réputé Certified Financial Group a fourni une description qui mérite notre second examen objectif. À raison de 100 liasses de billets de 100 $ d’une valeur de 10 000 $ chacune, 1 million de dollars a le même volume que trois emballages de papier d’imprimerie de 8 pouces sur 11 pouces. On pourrait transporter cette somme dans un sac d’épicerie. Pour 100 millions de dollars, il suffirait d’une palette d’expédition standard, et la pile ferait 3 pieds de hauteur. Pour empiler 1 billion de dollars, par contre, il faudrait 10 palettes d’expédition.
Prenons le temps de réfléchir à ce que représente un billion de dollars. Est-ce que les gens réalisent vraiment ce que sont un billion de dollars? Un billion de dollars, c’est un million de millions de dollars ou encore un millier de milliards de dollars, faites votre choix.
À quoi est-ce que cela ressemble? Un billion de dollars placés sur des palettes occuperaient une zone équivalant à près de cinq acres. C’est cinq terrains de football remplis de palettes d’un milliard de dollars. C’est grand comme cela. Ah oui, j’oublie un détail important, les palettes sont maintenant empilées en double les unes sur les autres, alors je pense que cela équivaut plutôt à 10 terrains de football remplis de palettes d’un milliard de dollars.
La dette du Canada s’élève à 1,2 billion de dollars et elle ne cesse de croître. Alors quand vous entendez les défenseurs du gouvernement lancer des statistiques comme le ratio revenu-dette pour nous réconforter et nous rassurer, ils détournent notre attention. Ils ferment volontairement les yeux sur la position financière précaire dans laquelle nous nous trouvons à cause de la mauvaise gestion flagrante de l’économie canadienne par le gouvernement actuel. Comme le gouvernement et la Banque du Canada ont fait imprimer trop d’argent et ont dépensé de manière irresponsable l’argent des Canadiens, nous sommes pris dans une spirale inflationniste qui entraîne des hausses marquées des taux d’intérêt. Cela ne fera qu’accroître les coûts d’emprunt de notre dette, tout comme celui de la dette personnelle de tous les Canadiens.
En raison de cette dette, le gouvernement fédéral paiera 35 milliards de dollars pour les frais de service de la dette seulement pendant l’exercice 2022-2023. C’est 29 milliards de dollars de plus que les prestations pour la garde d’enfants et 24 milliards de dollars de plus que les prestations d’assurance-emploi.
En résumé, le programme le plus coûteux du gouvernement du Canada aujourd’hui est le service de la dette.
Le directeur parlementaire du budget a informé les Canadiens que le coût du service de la dette publique atteindra 46 milliards de dollars d’ici 2027-2028, sans qu’aucun retour à l’équilibre budgétaire ne soit prévu.
Notre dette augmente de plus de 6 millions de dollars toutes les heures, soit de plus de 144 millions de dollars par jour. Quel gaspillage inutile, inacceptable et, en somme, immoral d’argent public et de possibilités. Quel terrible fardeau pour nos enfants et nos petits-enfants!
Imaginez ce que l’on pourrait faire rien que pour le logement avec 144 millions de dollars par jour. Imaginez également ce que 45 milliards de dollars par an pourraient apporter au système de santé au Canada.
D’après les témoignages que j’ai lus et la situation précaire des finances nationales, je ne peux pas, en toute conscience, appuyer un projet de loi visant à charger le gouvernement de créer un cadre de réforme complète de notre régime fiscal et de nos prestations sociales. Nous ferions mieux d’adopter une mesure législative interdisant au gouvernement actuel de faire quoi que ce soit en matière de politique financière ou monétaire.
En 2015, lorsque le gouvernement a été élu, le Canada était sorti de la pire récession qu’il avait connue depuis la Grande Dépression avec un budget équilibré et des indicateurs économiques solides. Aujourd’hui, on nous annonce un déficit sans précédent de 354 milliards de dollars en 2021, de plus de 90 milliards de dollars en 2022, et on prévoit d’importants déficits dans un avenir prévisible, sachant que si nous continuons sur cette même trajectoire budgétaire, il faudra des décennies pour équilibrer le budget.
Cependant, tout espoir n’est pas perdu. Même s’il est évident que les recettes et les dépenses annuelles du Canada ne lui permettent pas de penser à offrir un revenu de base garanti — sans parler du fait que le fardeau fiscal des particuliers et des entreprises devrait préférablement être réduit et non augmenté —, que pourrions-nous faire pour placer le Canada dans une position qui lui permettrait d’envisager de façon réaliste le versement d’un revenu annuel garanti? La solution potentielle est, évidemment, la création de richesse.
La création de richesse devrait être une obsession pour tous les pouvoirs publics au Canada, qu’ils soient au niveau municipal, territorial, tribal, provincial ou fédéral.
En près de 30 années en tant qu’entrepreneur et employeur à Cap-Breton, il y a toujours eu quelqu’un pour me dire comment et où dépenser mon argent. Cela ressemblait beaucoup à ce qui se passe à Ottawa. Par contre, les personnes qui me conseillaient sur la façon d’accroître les revenus et de créer de la richesse étaient une denrée rare.
Le Canada est le deuxième pays du monde en ce qui a trait à la superficie et il regorge de ressources naturelles presque illimitées : des terres rares, du bois d’œuvre, des minéraux, de l’eau douce et d’autres avantages dont la plupart des autres pays ne jouissent pas.
L’économie canadienne est plus diversifiée que jamais. Le Canada a toujours été un pays qui devait exploiter ses ressources naturelles pour maximiser son potentiel de richesse et cette réalité n’est pas appelée à changer.
De plus, aucun avantage naturel n’a créé plus de richesse au Canada au cours de ma vie que le secteur pétrolier. En fait, c’est un énorme catalyseur financier pour le Canada de l’après-guerre, depuis maintenant plus de 75 ans.
Nos ressources naturelles ont montré maintes fois leur valeur et leur importance pour notre prospérité collective. Ainsi, je trouve paradoxal que, lorsqu’on leur a demandé de se prononcer sur le projet de loi C-48 et le projet de loi C-69, les tenants les plus favorables du projet de loi S-233 ont acquiescé sans broncher au programme du gouvernement. Les niveaux de revenus et de dépenses actuels du Canada font du revenu de base garanti une initiative inconcevable. Pourtant, de nombreux sénateurs ont consciencieusement voté pour entraver la capacité de ce pays à créer de la richesse et ont soigneusement fermé les yeux sur les effets à long terme de ces mesures inappropriées qui manquaient terriblement de vision. Qu’il se produise le jour du scrutin ou dans la salle du Sénat, un vote a des conséquences.
Oui, nous aimerions tous avoir ce qu’il y a de meilleur. Je conduis une Murano de Nissan qui date de 2020 ainsi qu’une Elantra de Hyundai qui date de 2013, même si je préfèrerais honnêtement conduire une Bentley et une Maserati. Théoriquement, je le pourrais. Tout ce qu’il me faut, c’est l’argent pour me les payer. Il en va de même pour les programmes sociaux au Canada. Nous pouvons avoir tout ce que nous désirons au Canada. Il suffit d’avoir l’argent pour se le payer. Or, pour cela, il faut créer de nouvelles richesses, un objectif qui semble dépasser l’entendement du gouvernement, de ses soldats et de ces partisans.
En conclusion, nous reconnaissons tous qu’il faut lutter contre la pauvreté. Pour l’instant, concentrons-nous plutôt sur des solutions ciblées et pragmatiques, des solutions qui font valoir la formation, l’éducation et les programmes communautaires et qui en assurent la prestation. Nous devons veiller à ce que ceux qui ont besoin d’aide en obtiennent. Nous devons recommander des politiques logiques et ciblées qui favorisent le travail, qui multiplient les possibilités de travail au profit de tous les Canadiens et qui contribuent à lutter contre la pauvreté.
J’espère que nous pourrons arriver à une époque ou le Canada sera suffisamment riche pour envisager sérieusement de remplacer la structure actuelle d’État-providence par un système de revenu de base garanti. Cependant, le Canada doit d’abord mettre de l’ordre dans ses finances. Cela exigera un gouvernement conservateur puisque la coalition Singh-Trudeau a failli à son devoir envers les Canadiens sur le plan économique. Une fois qu’un nouveau gouvernement conservateur aura été élu au Canada, cela libérera le potentiel de notre pays et fera du Canada ce qu’il devrait être, à savoir le meilleur pays au monde, ainsi que le plus riche et généreux.
Et le plus libre.
Honorables sénateurs, je sais que j’exprime le point de vue de mes collègues conservateurs sur ce projet de loi parce que je sais qu’il ne bénéficie d’aucun appui de la part de notre caucus. Cependant, tous les projets de loi méritent de pouvoir être étudiés en comité. Je pense qu’une telle étude révélera les lacunes de cette mesure législative. Je suggère donc que le Sénat la renvoie au comité. Merci.
Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?
L’honorable sénatrice Pate, avec l’appui de l’honorable sénateur Dean, propose que le projet de loi soit lu pour la deuxième fois.