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Projet de loi de crédits no 2 pour 2024-2025

Deuxième lecture

19 juin 2024


L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) [ - ]

Propose que le projet de loi C-74, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l’administration publique fédérale pendant l’exercice se terminant le 31 mars 2025, soit lu pour la deuxième fois.

 — Honorables sénateurs, avant de commencer, je tiens à dire à toutes les personnes bispirituelles, gaies, lesbiennes, de genre fluide ou trans du Canada, ainsi qu’à toutes les drag queens sur YouTube qui m’ont appris comment mettre du fond de teint ou qui ont fait du surjeu en direct, que je vous vois, que je vous aime et que je suis avec vous. Bonne célébration de la fierté!

Elles sont très douées avec le fond de teint. Je recommande vivement leurs vidéos.

Honorables sénateurs, je prends la parole brièvement à titre de marraine du projet de loi C-74, Loi de crédits no 2 pour 2024-2025. Avec ce projet de loi, le gouvernement achève sa demande d’approbation par le Parlement des dépenses prévues dans le Budget principal des dépenses pour l’exercice en cours.

Les sénateurs se rappelleront qu’en mars, nous avons approuvé pour 74 milliards de dollars de crédits provisoires. Comme d’habitude, au moyen de cette mesure, le Parlement a octroyé aux ministères et aux agences fédéraux les ressources dont ils avaient besoin pour entamer l’exercice financier, tout en nous donnant le temps d’étudier le budget des dépenses dans son intégralité. Voilà à quoi le Comité sénatorial des finances a consacré une bonne partie du printemps, et je le remercie vivement de son travail.

Le gouvernement demande maintenant au Sénat d’approuver le reste du Budget principal des dépenses de 2024-2025. Par égard pour les personnes qui nous regardent à la maison même s’il est 21 heures et pour quiconque a besoin qu’on lui rafraîchisse la mémoire à propos du processus des crédits, je rappelle que le budget constitue la feuille de route économique du gouvernement. C’est un document important, certes, mais ce n’est qu’un recueil d’intentions. En soi, il n’autorise rien du tout. Le gouvernement doit donc soumettre une estimation des dépenses qu’il projette à l’approbation du Parlement sous la forme de divers projets de loi de crédits, comme celui dont nous sommes saisis.

On prépare habituellement le Budget principal des dépenses — ce sur quoi porte le projet de loi C-74 — avant la présentation du budget en tant que tel. Par conséquent, il exclut généralement les nouveaux éléments annoncés dans le budget, qui figureront plutôt dans l’un des budgets supplémentaires des dépenses, de même que toute autre dépense qui n’avait pas pu être budgétisée à temps pour le Budget principal des dépenses ou dont, pour une raison quelconque, le montant doit être révisé. Nous étudierons d’ailleurs incessamment le premier train de mesures budgétaires supplémentaires du présent exercice : le projet de loi C-75.

Pour l’instant, j’en viens au contenu du projet de loi C-74, c’est‑à-dire le Budget principal des dépenses de 2024-2025. Celui‑ci prévoit des dépenses budgétaires totales de 449,2 milliards de dollars. Cette somme est composée en grande partie de dépenses législatives, donc de dépenses qui ont déjà été approuvées dans des lois antérieures, dont 81,1 milliards de dollars pour les prestations aux aînés, 52,1 milliards de dollars pour le Transfert canadien en matière de santé, 46,5 milliards de dollars pour les frais de la dette publique, 25,3 milliards de dollars pour la péréquation, 16,9 milliards de dollars pour le Transfert social canadien et 11,4 milliards de dollars pour la Remise canadienne sur le carbone. Outre les dépenses législatives, il y a les dépenses votées : ce sont les dépenses votées qui requièrent notre approbation. Elles s’élèvent à 191,6 milliards de dollars.

Comme je l’ai mentionné, nous avons déjà approuvé 74 milliards de dollars en mars, ce qui constituait une sorte d’avance. Par conséquent, le projet de loi C-74 porte sur les 117,6 milliards de dollars de dépenses qu’il reste à approuver.

Parmi les plus importantes dépenses budgétaires votées dans le Budget principal des dépenses, il y a 28,8 milliards de dollars pour le ministère de la Défense nationale, notamment pour du soutien à l’Ukraine, pour l’opération Reassurance renouvelée et bonifiée, c’est-à-dire la mission de l’OTAN que les Forces armées canadiennes mènent en Lettonie, et, enfin, pour le Projet d’aéronef multimissions canadien, un projet d’acquisition de nouveaux avions à long rayon d’action pour les forces armées. Il y a 20,9 milliards de dollars pour Services aux Autochtones Canada, notamment pour les règlements judiciaires, ainsi que des programmes pour les communautés autochtones, comme le travail en cours pour améliorer et stabiliser l’accès à l’eau potable, et la réforme du programme des Services à l’enfance et à la famille des Premières Nations. Il y a 8,4 milliards de dollars pour Santé Canada, notamment pour répondre aux priorités, y compris les accords bilatéraux avec les provinces et les territoires, l’amélioration des soins de longue durée, et l’élargissement du Régime canadien de soins dentaires, qui, au bout du compte, devrait aider environ 9 millions de Canadiens. Il y a 5,6 milliards de dollars pour la Société canadienne d’hypothèques et de logement, notamment pour la construction de nouveaux logements abordables, la rénovation de logements abordables existants et le renforcement des capacités dans le secteur du logement communautaire.

Ce ne sont là que quelques exemples. Ensemble, ces investissements proposés dans le Budget principal des dépenses permettront au gouvernement de fournir toute une gamme de programmes et de services aux Canadiens et d’aider d’autres pouvoirs publics, des organismes et des particuliers au moyen de paiements de transfert.

De plus amples renseignements au sujet de ce que chaque ministère et organisme entend faire avec l’argent se trouvent dans les plans ministériels, qui ont été déposés le même jour que le Budget principal des dépenses et qui sont accessibles sur le site Web du Conseil du Trésor.

Les plans ministériels donnent un aperçu triennal du mandat, des engagements et des priorités d’une organisation. Ils servent de référence pour le suivi et la présentation des résultats en fin d’exercice dans le cadre des rapports sur les résultats ministériels, et ils permettent aux parlementaires et aux Canadiens de suivre les progrès réalisés par le gouvernement et de lui demander des comptes.

Le Budget principal des dépenses et les plans ministériels comprennent également des informations sur l’initiative « Recentrer les dépenses gouvernementales », qui a été annoncée pour la première fois dans le budget de 2023. Dans le cadre de cette initiative, les ministres ont été chargés de soumettre des propositions visant à réduire les doubles emplois, à obtenir un meilleur rapport qualité-prix et à mieux aligner les dépenses sur les priorités du gouvernement. Cet exercice a permis de réorienter 10,5 milliards de dollars des budgets ministériels pour les trois prochains exercices vers des priorités telles que la santé et le logement. Cette somme s’ajoute aux 500 millions de dollars annoncés dans le Budget supplémentaire des dépenses (B) de 2023-2024 déposé l’automne dernier. Le gouvernement est donc sur la bonne voie pour atteindre son objectif de recentrage de 15,8 milliards de dollars sur cinq ans et de 4,8 milliards de dollars chaque année par la suite.

En bref, ce projet de loi de crédits et le Budget principal des dépenses donnent un aperçu important de la façon dont les fonds publics seront utilisés. Ils montrent que le gouvernement répond aux besoins immédiats et qu’il fait des investissements qui profiteront aux Canadiens à long terme. En même temps, le Budget principal des dépenses montre de quelle manière le gouvernement renforce la prudence et la responsabilité financières.

Je prie tous les sénateurs d’appuyer le projet de loi C-74. Merci. Hiy hiy.

L’honorable Denise Batters [ - ]

Sénatrice LaBoucane-Benson, vous avez parlé brièvement d’un montant de 10,5 milliards de dollars sur les trois prochaines années et vous avez dit qu’il était « recentré ». Habituellement, le gouvernement parle d’économies pour les contribuables. On parle ici de recentrage. Pouvez-vous nous donner quelques exemples? Puisqu’il s’agit de 10,5 milliards de dollars, je suis curieuse de savoir ce que cela représente réellement et si vous pouvez nous donner quelques exemples des principaux éléments de cette initiative.

La sénatrice LaBoucane-Benson [ - ]

Volontiers. L’initiative Recentrer les dépenses gouvernementales ne consiste pas à supprimer des services ou des programmes sur lesquels comptent les Canadiens. Il s’agit d’appliquer un processus systématique et minutieux pour voir à ce que les fonds publics soient concentrés sur de grandes priorités comme les soins de santé, le logement et la création d’une économie propre au Canada. L’objectif de cet exercice est de trouver des domaines où il y a des chevauchements, une faible optimisation des ressources ou de meilleures façons d’aligner les dépenses publiques sur les priorités, par exemple en réduisant les dépenses liées aux services professionnels, aux déplacements et aux activités.

Je peux d’ores et déjà vous donner un exemple. Pour respecter cet engagement, le ministère des Pêches et des Océans et la Garde côtière canadienne prévoient les réductions des dépenses suivantes : 85,4 millions de dollars en 2024-2025, 105 millions de dollars en 2025-2026, et 135,3 millions de dollars en 2026-2027 et par la suite.

Le ministère des Pêches et des Océans réalisera ces réductions en prenant les mesures suivantes : réduire les déplacements et les services professionnels grâce à une planification efficace et à l’utilisation du modèle de travail hybride; tirer parti des gains d’efficacité dans la gestion interne et les fonctions d’habilitation, y compris l’utilisation de la technologie virtuelle, de la transformation numérique et de la rationalisation des activités de gestion des biens immobiliers et de la flotte de véhicules. C’est un bon exemple de la manière dont on procède.

La sénatrice Batters [ - ]

En faisant un calcul rapide, j’arrive à moins de 300 millions de dollars sur les 10,5 milliards de dollars. Dois-je comprendre qu’il y a des exemples semblables au sein de tous ces ministères? Quelles sont les étapes principales visant à recentrer les dépenses si, comme vous le disiez, il ne s’agit pas de faire des économies ni de réduire les services, par exemple? Quelles sont les principales étapes?

La sénatrice LaBoucane-Benson [ - ]

Sénatrice Batters, je m’attendais à cette question de votre part en particulier.

J’ai deux autres exemples. Parlons du ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire. En agriculture, on prévoit recentrer 17 millions de dollars la première année, puis 26 millions de dollars et, enfin, 39 millions de dollars en 2026-2027 et les années suivantes. Les sommes sont donc cumulatives au fil des ans.

Pour le ministère de la Défense nationale, on prévoit recentrer 810 millions de dollars en 2024, puis 851 millions de dollars en 2025-2026. En 2026-2027 et par la suite, on parle de 907 millions de dollars. Vous pouvez voir que de nombreux ministères apportent des changements. Je pense que le ministère de la Défense nationale pourrait être l’un des plus grands contributeurs parce qu’on parle de réductions de plus de 800 millions de dollars et de 900 millions de dollars. J’espère que je réponds à la question.

La sénatrice Batters [ - ]

Cela aide un peu, même si, en ce qui concerne la défense, nous avons entendu de nombreux reportages sur des soldats canadiens qui vivent dans des conditions de logement épouvantables, et on sait que l’armée a vraiment du mal à recruter, notamment. Bien entendu, nous entendons constamment parler du manque d’équipement adéquat.

Que signifie le recentrage de 810 millions de dollars pour la défense au cours de cette année?

La sénatrice LaBoucane-Benson [ - ]

Merci de votre question. Voici ce que j’ai ici, par exemple : la mesure d’économie no 1 concerne les déplacements; il s’agit de réduire les dépenses de déplacements de plus de 58 millions de dollars en 2024-2025 et par la suite. La mesure no 2 concerne les services professionnels; il s’agit de réduire les dépenses en services professionnels de 200 millions de dollars en 2024-2025 et par la suite. La mesure no 3 concerne le fonds général de fonctionnement; il s’agit de réduire les dépenses de 354 millions de dollars en 2024-2025 et de 264 millions de dollars en 2025-2026. La mesure no 4 concerne le cadre financier; il s’agit de réduire les dépenses pour les initiatives qui n’ont pas encore été lancées et qui sont prévues dans le cadre financier.

Il ne s’agit pas de logement. On cherche à réaliser des économies administratives à l’interne et, d’après les renseignements dont je dispose, il ne semble pas qu’on diminue les fonds destinés au travail, au logement et au bien-être de nos militaires.

Merci, sénatrice LaBoucane-Benson, pour vos remarques.

Honorables sénateurs, j’interviens à titre de porte-parole pour le projet de loi C-74, le deuxième projet de loi de crédits pour l’exercice 2024-2025. Ce projet de loi est fondé sur le Budget principal des dépenses, qui a été déposé par la présidente du Conseil du Trésor le 29 février dernier. Le budget principal prévoit des dépenses de 192 milliards de dollars qui doivent être approuvées par le Parlement. Sur ces 192 milliards, 74 milliards ont déjà été approuvés par le projet de loi C-68 en mars dernier. Par conséquent, ce projet de loi de crédits — le projet de loi C-74 — demande le reste des 192 milliards de dollars, soit environ 118 milliards de dollars.

Outre les 192 milliards de dollars qui doivent être approuvés par le Parlement dans le cadre de projets de loi de crédits, le gouvernement a déjà le pouvoir, en vertu d’autres lois, de dépenser 259 milliards de dollars supplémentaires.

Ces deux montants — les 192 milliards de dollars par l’entremise de projets de loi de crédits et les 259 milliards de dollars en dépenses législatives — totalisent 451 milliards de dollars, et c’est cette somme qui est détaillée dans le Budget principal des dépenses.

L’année dernière, le Budget principal des dépenses prévoyait des dépenses de 433 milliards de dollars, soit 18 milliards de dollars de moins que le montant inclus dans le budget principal de cette année. Toutefois, il est prématuré de comparer le budget principal de cette année à celui de l’année dernière, car les nouvelles dépenses seront approuvées dans des documents budgétaires ultérieurs, notamment le budget, l’énoncé économique de l’automne et d’autres projets de loi de crédits.

Alors que le Budget principal des dépenses de l’année dernière indiquait des dépenses de 433 milliards de dollars, les dépenses réelles devraient s’élever à 497 milliards de dollars pour l’exercice qui vient de se terminer. Cela représente 64 milliards de dollars supplémentaires.

Toutefois, le gouvernement n’a pas encore déposé ses états financiers pour l’année dernière, de sorte que même ces 497 milliards de dollars peuvent encore changer.

La situation est semblable pour cette année. Alors que le Budget principal des dépenses de cette année indique des dépenses de 450 milliards de dollars, le budget présenté en avril estime que les dépenses cette année s’élèveront à 534 milliards de dollars. Cela représente une augmentation de 85 milliards de dollars, soit 20 % de plus.

Nous n’en sommes qu’au troisième mois de l’exercice. Il y aura donc des dépenses supplémentaires dans d’autres mesures législatives, notamment les projets de loi de crédits et l’énoncé économique de l’automne.

Chers collègues, le Canada franchit cette année trois jalons peu enviables : les dépenses seront supérieures à 500 milliards de dollars, le coût du service de la dette sera supérieur à 50 milliards de dollars et le gouvernement aura l’autorisation de porter la dette à plus de 2 billions de dollars.

Le ministère des Finances demande 145 millions de dollars. Indépendamment de ce montant, il a déjà l’autorisation de dépenser 143 milliards de dollars, un montant qui a été approuvé dans le cadre de mesures législatives autres que ce projet de loi de crédits.

Parmi les organismes inclus dans le Budget principal des dépenses, le ministère des Finances est celui qui a déclaré les dépenses les plus élevées jusqu’à présent cette année, ainsi que l’augmentation la plus forte par rapport aux dépenses prévues dans le Budget principal des dépenses de l’année dernière, soit 11 %.

Les 143 milliards de dollars de financement prévu par la loi comprennent 52 milliards de dollars pour le Transfert canadien en matière de santé, autorisé par la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces, et 42 milliards de dollars pour les intérêts sur la dette non échue, autorisés par la Loi sur la gestion des finances publiques.

La Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces autorise également le ministère des Finances à verser 25 milliards de dollars au titre de la péréquation, 17 milliards de dollars au titre du Transfert canadien en matière de programmes sociaux et 5,1 milliards de dollars au titre du financement des territoires.

Les 52 milliards de dollars du Transfert canadien en matière de santé représentent le montant total qui devrait être versé au cours de l’année aux provinces et aux territoires. Il a augmenté par rapport aux 49,4 milliards de dollars de l’année dernière et aux 47,1 milliards de dollars de l’année précédente, soit 2022-2023. Le gouvernement a présenté ces informations dans son document budgétaire.

Les 42 milliards de dollars d’intérêts sur la dette non échue, qui figurent dans le budget principal des dépenses, ne représentent qu’une partie des charges de la dette publique du gouvernement, qui devraient augmenter pour atteindre 54 milliards de dollars cette année, comparativement à 47 milliards de dollars l’année dernière et 35 milliards de dollars l’année précédente.

La Banque du Canada a récemment réduit son taux directeur d’un quart de point de pourcentage. On ne sait pas encore quel sera l’impact sur les charges de la dette publique estimées à 54 milliards de dollars pour cette année.

Il convient de noter que le coût total des quatre programmes que j’ai mentionnés comme étant autorisés par la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces pour cette année est indiqué dans le budget principal des dépenses et qu’il n’a augmenté que de façon marginale par rapport à l’année dernière.

Cependant, les 42 milliards d’intérêts sur la dette non échue ne représentent qu’une partie des coûts du service de la dette du gouvernement, qui s’élèvent à 54 milliards de dollars et qui, comparés à ceux de l’année dernière, reflètent une augmentation de 15 %.

Le ministère de la Défense nationale demande 28,8 milliards de dollars dans ce projet de loi, contre 24,8 milliards de dollars l’année dernière. Le ministère est déjà habilité, par la voie d’autres textes législatifs, à dépenser 1,8 milliard de dollars.

Bien que le financement du ministère de la Défense nationale ait augmenté au cours des dernières années, celui qui est prévu dans le Budget principal des dépenses est important, en ce sens qu’il représente une augmentation de 15 %.

L’une des difficultés éprouvées par le ministère dans le passé a été d’utiliser les fonds approuvés, y compris ceux destinés à l’acquisition d’immobilisations telles que des avions, des navires, des munitions et d’autres projets. La politique de défense adoptée par le gouvernement en 2017 a établi un plan de dépenses en immobilisations de 164 milliards de dollars sur 20 ans : de 2017 à 2037 pour les projets d’immobilisations. Ce plan de 164 milliards de dollars a ensuite été porté à 215 milliards de dollars.

Cependant, dans un rapport publié plus tôt cette année, le directeur parlementaire du budget a indiqué qu’entre 2017 et 2023, il y avait un déficit cumulé de près de 12 milliards de dollars entre ce que le ministère a réellement dépensé et ce qui était initialement prévu dans la politique de défense du gouvernement de 2017.

Selon la nouvelle politique de défense du gouvernement, publiée en avril de cette année, le gouvernement dépensera 73 milliards de dollars supplémentaires pour des projets d’immobilisations d’ici 2044.

La nouvelle politique de défense prévoit également que les dépenses en matière de défense s’élèveront à 1,76 % du PIB en 2029-2030, alors que l’objectif stratégique de l’OTAN consiste à consacrer au moins 2 % du PIB aux dépenses pour la défense.

Étant donné les difficultés qu’a eues le ministère dans le passé à faire approuver le financement prévu par la politique de défense de 2017, la difficulté à dépenser les fonds fournis et les échéances ratées en raison de retards, il est difficile de déterminer si le ministère sera en mesure d’atteindre ses nouveaux objectifs. L’engagement du gouvernement à réduire les dépenses ministérielles dans certains domaines pourrait également avoir une incidence sur la capacité du ministère à atteindre ses objectifs.

Les 30 milliards de dollars prévus pour le ministère dans le Budget principal des dépenses comprennent un financement de 7,2 milliards de dollars pour plusieurs grands projets, dont le plus important est le projet de 1,3 milliard de dollars pour des navires de combat de surface canadiens. Ce projet, qui prévoit la livraison de 15 navires à la Marine royale canadienne, est considéré comme le plus grand projet de construction navale au Canada depuis la Seconde Guerre mondiale.

Selon la nouvelle politique de défense, la construction de ces nouveaux navires commencera cette année. Ce projet a suscité beaucoup d’attention et son coût a fait l’objet de plusieurs rapports du directeur parlementaire du budget.

Le financement de 7,2 milliards de dollars comprend également 553 millions de dollars pour les navires de soutien interarmées, 250 millions de dollars pour les 88 nouveaux avions de chasse F-35, ainsi que 240 millions de dollars pour les navires de patrouille extracôtiers et de l’Arctique.

Chers collègues, vous vous souviendrez peut-être que le Budget supplémentaire des dépenses (C) de mars comprenait 590 millions de dollars pour le projet d’aéronef multimissions canadien et 509 millions de dollars pour le projet d’avion stratégique de transport et de ravitaillement en vol.

Le ministère connaît également une pénurie de personnel au sein des Forces armées canadiennes. Le chef d’état-major de la Défense du Canada a récemment indiqué qu’il y a actuellement 16 500 postes vacants au sein de l’effectif autorisé combiné de la Force régulière et de la Force de réserve des Forces armées canadiennes — soit 101 000 postes —, ce qu’il explique par la combinaison de l’incapacité à attirer de nouvelles recrues et de l’incapacité à retenir les militaires instruits.

Le nombre de postes vacants est préoccupant. Bien que le ministère et le gouvernement se penchent sur la question des biens d’équipement, comme l’achat d’aéronefs et la construction de navires, ils ont tout de même besoin de personnel pour piloter et entretenir ces nouveaux aéronefs et faire fonctionner les nouveaux navires. Il est impératif que le gouvernement remédie à la pénurie de personnel.

Le ministère de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique demande 5,9 milliards de dollars dans ce projet de loi de crédits, en plus des 196 millions de dollars qui ont déjà été approuvés dans le cadre d’autres projets de loi. Près de 90 % des fonds que demande le ministère sont destinés à des subventions et à des contributions, dont près de la moitié, soit 2,4 milliards de dollars, est allouée au Fonds stratégique pour l’innovation.

Le financement accordé au ministère de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique dans le cadre du Budget principal des dépenses a plus que quadruplé au cours des neuf dernières années, passant d’un peu plus de 1 milliard de dollars en 2015-2016 à 6 milliards de dollars cette année.

En plus du Fonds stratégique pour l’innovation, il existe un certain nombre d’autres fonds au sein du ministère, notamment la Fondation canadienne pour l’innovation, le Fonds pour la large bande universelle et les Grappes d’innovation mondiales.

Le mois dernier, lors de leur témoignage devant le Comité des finances nationales, des fonctionnaires du ministère nous ont dit que ces programmes faisaient l’objet d’une vérification réalisée par les vérificateurs du ministère ainsi que par la vérificatrice générale du Canada.

Cependant, il n’y a eu qu’une seule vérification interne du Fonds stratégique pour l’innovation, et c’était en 2021. Toutefois, le Bureau du vérificateur général n’avait réalisé aucune vérification récente, jusqu’au mois dernier, quand le commissaire à l’environnement et au développement durable a publié son rapport sur le Fonds stratégique pour l’innovation.

Le Fonds stratégique pour l’innovation a été créé en 2017. Un rapport sur les répercussions du fonds publié en 2023 a indiqué que le total des subventions et des contributions versées jusqu’en 2023 s’élevait à 18,5 milliards de dollars, dont 8 milliards de dollars ont été accordés à l’Initiative Accélérateur net zéro.

Ce fonds de 8 milliards de dollars vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre et à contribuer à l’atteinte des objectifs climatiques du Canada pour 2030 et 2050 en incitant les entreprises manufacturières à réduire leurs émissions. En avril de cette année, le commissaire à l’environnement et au développement durable a publié un rapport critiquant vertement la gestion du fonds Accélérateur net zéro de 8 milliards de dollars par le gouvernement.

Le commissaire a déclaré que le ministère ne parvenait pas à inciter les industries manufacturières à fortes émissions à décarboner leurs activités dans le cadre de son initiative Accélérateur net zéro. De plus, le ministère n’a pas toujours respecté les normes internationales et gouvernementales pour estimer les réductions d’émissions et n’a pas appliqué systématiquement ses méthodes d’évaluation à l’ensemble des projets. Par conséquent, le commissaire à l’environnement et au développement durable ignorait parfois l’ampleur des réductions qui seraient réalisées grâce au financement reçu par chaque entreprise, ce qui était l’objectif principal du fonds.

Étant donné que près de 90 % des fonds du ministère sont versés sous forme de subventions ou de contributions se chiffrant en milliards de dollars, ces programmes devraient faire l’objet d’un audit rigoureux et d’une évaluation régulière afin de s’assurer qu’ils répondent aux objectifs du gouvernement.

Le directeur parlementaire du budget a témoigné devant le Comité sénatorial des finances nationales afin de discuter de son rapport sur le Budget principal des dépenses, et il a soulevé plusieurs questions. Il a évoqué l’engagement du gouvernement à recentrer et à réduire les dépenses publiques, comme annoncé dans le budget de 2023 et dans l’Énoncé économique de l’automne 2023.

Dans son budget de 2023, le gouvernement a annoncé la réorientation des dépenses gouvernementales : 14,1 milliards de dollars sur cinq ans pour la période allant de 2023 à 2028, et 4,1 milliards de dollars par année par la suite. Dans son énoncé économique de l’automne, le gouvernement a annoncé des réductions supplémentaires de 345 millions de dollars dans le prochain exercice financier, et de 691 millions de dollars par année par la suite. Il est intéressant de noter que les plus grandes réductions sont prévues dans les années à venir, et après les élections en 2025.

La somme de 14,1 milliards de dollars annoncée dans le budget de 2023 prévoyait 500 millions de dollars l’année dernière et des réductions de 2,3 milliards de dollars cette année. À compter de l’année prochaine, l’exercice 2025-2026, les réductions passeront à 3 milliards de dollars pour 2025-2026 et à 4 milliards de dollars pour les années ultérieures. De façon similaire, les réductions annoncées dans l’énoncé économique de l’automne ne commenceront pas cette année, mais plutôt l’an prochain, au cours de l’exercice 2025-2026.

Le gouvernement a publié sur son site Web la réorientation des allocations par ministère et par organisation. Le Budget principal des dépenses indique qu’on y tient compte de la réaffectation de 2,3 milliards de dollars pour l’exercice en cours. Toutefois, ces changements ne sont pas présentés séparément ou bien en évidence dans le document du Budget principal des dépenses. Par conséquent, nous ne pouvons pas déterminer quelles dépenses ont été réaffectées.

Lors de son témoignage, le directeur parlementaire du budget a reconnu que le gouvernement s’est engagé à réorienter les dépenses. Cependant, il a dit :

[...] ce ne sont pas vraiment des réductions de dépenses; ce sont des réductions très ciblées dans certains programmes pour mieux financer certaines autres dépenses.

Il a conclu en précisant ceci : « [...] il n’y a pas de réduction de dépenses dans l’ensemble du gouvernement. »

Tout au long de son témoignage, le directeur parlementaire du budget nous a rappelé que le Budget principal des dépenses ne donne qu’une image très partielle des dépenses du gouvernement. Il a ajouté que :

[...] le Budget principal des dépenses a été rédigé bien avant que le contenu du budget ne soit connu. Quand nous calculerons l’ensemble des dépenses du Budget principal des dépenses et du Budget supplémentaire des dépenses, nous constaterons probablement que les dépenses du gouvernement augmentent à un rythme soutenu.

Il a également commenté le coût et la viabilité des prestations versées aux aînés, qui sont estimées à plus de 80 milliards de dollars cette année et qui, selon ses estimations, s’élèveront à près de 100 milliards de dollars d’ici 2029.

En réaction à l’augmentation des frais de service de la dette, le directeur parlementaire du budget s’est dit préoccupé par le ratio dette-PIB, qui détermine la capacité d’un pays à prendre en charge le coût de sa dette. Il a dit que le gouvernement s’était engagé à réduire le ratio dette-PIB. Sa préoccupation, a-t-il dit, n’est pas le niveau du ratio dette-PIB :

[...] mais plutôt la tendance des budgets successifs et des énoncés économiques de l’automne à en retarder la baisse [...] au lieu d’assurer une diminution régulière, le gouvernement semble se contenter d’un modeste déclin année après année plutôt que d’avoir une diminution en ligne droite.

Si vous regardez les documents budgétaires de cette année, vous verrez que, la première année, les chiffres augmentent un peu, puis ils diminuent un peu. Il s’agit de très légères baisses.

Il a ajouté :

On le voit dans la manière dont il utilise la marge de manœuvre générée par la croissance économique meilleure que prévu; il a tendance à la dépenser plutôt que de l’utiliser pour réduire le déficit.

Ce qui nous préoccupe à propos de l’encours de la dette, c’est que [...] s’il devait se produire des chocs économiques qui font grimper les taux d’intérêt [...] les frais de la dette augmenteraient considérablement [...]

Enfin, il a dit :

C’est la préoccupation que de nombreux acteurs ont exprimée parce que l’encours de la dette a augmenté substantiellement et que les coûts du service de la dette augmentent également beaucoup.

Honorables sénateurs, l’une des difficultés intrinsèques à l’examen du Budget principal des dépenses, des budgets supplémentaires des dépenses (A), (B) et (C), ainsi que du projet de loi C-59, sur lequel nous venons de voter et qui mettra en œuvre l’énoncé économique de l’automne, et maintenant du projet de loi C-69, que nous débattons et qui mettra en œuvre le budget, c’est la tâche impossible d’assurer le suivi des dépenses du gouvernement.

Le Hill Times a récemment publié une série de trois articles de fond sur le processus budgétaire et le budget fédéral. L’énoncé économique de l’automne et le projet de loi C-59, ainsi que le budget de 2024 et le projet de loi C-69, font partie intégrante de ce processus. Le premier article de la série soutient qu’il est difficile d’assurer le suivi de l’argent dépensé.

En fait, il est impossible de faire ce suivi. Je le sais parce que j’essaie de suivre les dépenses du gouvernement depuis des années. Parmi les facteurs qui contribuent à cette situation, il y a le plan de dépenses du gouvernement, qui change tout au long de l’année, et le peu de renseignements que le gouvernement donne sur ces changements.

Le Budget principal des dépenses, qui propose le plan des dépenses du gouvernement pour chaque exercice financier, est déposé en mars, en même temps que les plans ministériels, juste avant le début du nouvel exercice financier. Avant que nous ayons fini d’examiner le Budget principal des dépenses, dont je parle maintenant, le gouvernement dépose son budget — nous en parlerons demain — qui détaille les nouvelles dépenses et un nouveau plan de dépenses. C’est là que commence le défi consistant à faire correspondre les nouvelles initiatives budgétaires avec les dépenses décrites dans les documents budgétaires ultérieurs.

Le budget est suivi du Budget supplémentaire des dépenses (A), dont je parlerai plus tard ce soir, et qui décrit les nouvelles dépenses et la mise en œuvre de certaines initiatives budgétaires, mais pas toutes. Ce dernier est suivi du Budget supplémentaire des dépenses (B), qui comprend quelques nouvelles dépenses et la mise en œuvre d’autres initiatives budgétaires, mais, encore une fois, pas toutes. Le Budget supplémentaire des dépenses (B) est suivi de l’Énoncé économique de l’automne, qui comprend un autre plan de dépenses. L’Énoncé économique de l’automne est suivi par le Budget supplémentaire des dépenses (C), qui comprend d’autres nouvelles dépenses, certaines initiatives budgétaires, mais pas toutes, et certaines initiatives de l’Énoncé économique de l’automne, mais pas toutes.

De nombreuses difficultés surgissent quand on cherche à suivre les dépenses d’un document à l’autre. L’un des défis consiste à déterminer où se trouve le financement des initiatives budgétaires. Il pourrait figurer dans le Budget supplémentaire des dépenses (A), (B) ou (C), ou peut-être pas, puisque le gouvernement peut inscrire les initiatives dans ces documents, mais ne le fait pas nécessairement. Il y a deux ans, le directeur parlementaire du budget a commencé à établir un rapprochement entre les initiatives budgétaires et le Budget supplémentaire des dépenses, mais cela demeure un défi pour les parlementaires et le directeur parlementaire du budget.

Ces problèmes sont étroitement liés à la réticence du gouvernement — ou à son refus, comme je le dis parfois — de fournir des détails sur ce qui est inclus dans certaines transactions. À titre d’exemple, une dépense de 500 millions de dollars annoncée dans l’Énoncé économique de l’automne concerne des mesures non annoncées. Aucune autre précision n’a pu être fournie. Le gouvernement affirme également que le cadre financier comprend déjà une réduction de coût de 300 millions de dollars pour les nouvelles initiatives, mais personne ne peut nous dire où cela se trouve, précisément, dans le cadre financier.

Quand il a participé à un balado du Hill Times, le directeur parlementaire du budget a résumé le processus budgétaire en ces termes : « C’est un véritable gâchis. »

Je vais m’arrêter ici, sans évoquer les défis que pose l’examen des Comptes publics du Canada, qui comprennent les états financiers vérifiés du gouvernement. Je me contenterai de dire qu’il n’est pas facile de tenter de comparer le budget et les budgets des dépenses avec les résultats financiers réels.

Voilà qui conclut mes observations au sujet du projet de loi C-74. Merci.

Son Honneur la Présidente [ - ]

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Une voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois, avec dissidence.)

Son Honneur la Présidente [ - ]

Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion de la sénatrice LaBoucane-Benson, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

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