DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS — Les excuses papales
7 avril 2022
Honorables sénateurs, je remercie le Groupe des sénateurs canadiens de m’avoir accordé du temps pour prendre la parole aujourd’hui.
Quand j’étais dans un pensionnat autochtone, j’ai commencé à avoir du scepticisme à l’égard de ce Dieu catholique dont les religieuses et les prêtres parlaient. Comment ce Dieu juste et bon pouvait-il me considérer comme une sauvage quand il m’a créée? Quand je suis allée à la confesse à l’âge de 12 ans, le prêtre m’a demandé si je laissais les garçons me faire des mauvaises choses. Je suis rarement retournée à l’église après cet événement et je ne suis jamais retournée à la confesse. C’était inconcevable pour moi de me confesser à un autre pécheur.
Au cours des décennies qui ont suivi, je ne pensais pas avoir besoin d’entendre des excuses. Cependant, quand j’ai écouté les paroles du pape vendredi dernier, j’ai été étonnée d’éclater en sanglots. Contre toute attente, je me suis sentie apaisée et soulagée. Par cette reconnaissance des préjudices du passé, les gens peuvent finalement accepter que des événements bouleversants et dévastateurs nous aient été infligés par les représentants de l’Église. Nous sommes libérés du fardeau d’essayer de convaincre les autres de ce que nous avons subi.
Est-ce que j’ai pardonné à l’Église? Non, pas encore, et je suis à l’aise avec cela. Il m’a fallu 62 ans pour pardonner à la religieuse qui m’a infligé un profond traumatisme avec sa violence au pensionnat. Grâce à une cérémonie de guérison à laquelle j’ai participé il y a deux mois, j’ai finalement été capable de lâcher prise sur cette énergie de violence qui s’était incrustée en moi pendant la majeure partie de ma vie. Je crois que cela explique pourquoi j’ai été capable d’accueillir les excuses officielles présentées par le pape comme je l’ai fait.
Maintenant, moi-même et d’autres anciens élèves avons besoin de réfléchir aux excuses papales, loin de ceux qui les analysent du point de vue de la pensée coloniale. En parlant avec de nombreux anciens élèves, j’ai découvert que nous percevons tous différemment l’incidence des excuses présentées. Dans nos discussions, nous nous demandons si elles étaient nécessaires et si elles sont acceptées. Malgré notre expérience commune, nous avons chacun notre propre interprétation de la situation et en avons gardé des séquelles persistantes distinctes.
Dans ma vie, j’ai été un objet de haine simplement en raison de préjugés contre les Cris. Ces mêmes préjugés existent toujours au Canada aujourd’hui. Cependant, je me fais l’écho de la gardienne du savoir intergénérationnel cri Deborah Young, qui dit ceci :
Malgré toutes les atrocités et le génocide qu’a connus notre peuple et auxquels il a survécu, mon cœur reste rempli d’amour et d’espoir, car si je perds l’amour ou l’espoir, il n’y aura plus rien.
Kinanâskomitin. Merci.