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Projet de loi sur la prestation canadienne pour les personnes handicapées

Projet de loi modificatif--Deuxième lecture--Ajournement du débat

9 février 2023


L’honorable Brent Cotter [ + ]

Propose que le projet de loi C-22, Loi visant à réduire la pauvreté et à renforcer la sécurité financière des personnes handicapées par l’établissement de la prestation canadienne pour les personnes handicapées et apportant une modification corrélative à la Loi de l’impôt sur le revenu, soit lu pour la deuxième fois.

 — Honorables sénateurs, en octobre dernier, à l’approche de l’Action de grâces, j’étais en voiture, et il y avait une tribune téléphonique à la radio de Saskatoon. On demandait aux auditeurs d’appeler pour dire ce dont ils étaient reconnaissants. Une des auditrices a affirmé en ondes :

Je suis reconnaissante d’avoir ce qu’il faut pour vivre. Je pourrais peut-être vouloir plus, mais j’ai ce qu’il me faut pour vivre une vie épanouie. J’en suis reconnaissante. J’ai ce qu’il me faut.

J’ai garé ma voiture sur le bord de la route et j’ai réfléchi à la beauté de ce que cette femme venait de dire.

La plupart d’entre nous avons ce qu’il nous faut, du point de vue financier à tout le moins. Je ne connais pas la situation de chacun d’entre vous, chers collègues, mais je pense bien que nous avons tous ce dont nous avons besoin. C’est mon cas et j’en suis reconnaissant.

Cependant, de nombreuses personnes dans notre merveilleux pays prospère n’ont pas ce dont elles ont besoin. Aujourd’hui, alors que nous entamons l’étude de ce projet de loi, j’espère que vous aurez en tête le groupe de la population canadienne — les personnes handicapées — qui, de façon disproportionnée, n’a pas tout ce dont il a besoin et que vous penserez à tout ce que ce projet de loi pourrait faire pour corriger la situation.

Je prends la parole aujourd’hui pour appuyer le projet de loi C-22, Loi sur la prestation canadienne pour les personnes handicapées. C’est le début d’un parcours très spécial pour le Sénat et pour nous tous ici présents. Alors que nous nous efforçons de bâtir une société inclusive au Canada, l’engagement à apporter un soutien financier concret aux personnes handicapées en est un pilier essentiel. C’est l’engagement d’une génération.

Dans le dessin humoristique de Gary Larson que je préfère — vous vous en doutiez, j’en suis certain —, on voit une cour de récréation où se trouve une glissoire pour enfants. En haut de la glissoire se trouve un petit garçon qui s’apprête à glisser. En bas se trouvent deux araignées qui ont tissé une toile au bout. Alors que le petit garçon s’apprête à glisser, l’une des araignées dit à l’autre : « Si ça marche, on va manger comme des reines. »

Certes, ce projet de loi ne permettra pas aux personnes handicapées de manger comme des rois, mais je pense que depuis une génération, ou peut-être même depuis quelques années, l’espoir des personnes handicapées qu’une initiative comme celle-ci soit proposée avait probablement autant de chances de se concrétiser que celui de ces deux araignées.

Mon intervention d’aujourd’hui se divise en cinq parties. Premièrement, je parlerai du projet de loi C-22, qui constitue un élément essentiel pour véritablement améliorer la vie des personnes handicapées au Canada. Deuxièmement, j’expliquerai brièvement comment la prestation canadienne pour les personnes handicapées réduira la pauvreté chez les personnes en situation de handicap qui sont en âge de travailler. Troisièmement, je me pencherai brièvement sur le contenu du projet de loi, notamment sur ses objectifs, l’échéancier et les mesures de reddition de comptes qui y sont prévues pour garantir que le gouvernement respecte notre engagement collectif. Quatrièmement, je parlerai un peu du niveau d’appui que suscite le projet de loi et, cinquièmement, je présenterai des conclusions quelque peu personnelles.

Premièrement, la prestation canadienne pour les personnes handicapées proposée constitue un pilier, voire la pierre angulaire, du Plan d’action pour l’inclusion des personnes en situation de handicap du Canada. Ce plan d’action est une feuille de route pour créer un Canada plus inclusif. Il repose sur quatre piliers : l’emploi, pour prendre des mesures visant à éliminer les obstacles qui existent depuis longtemps sur le marché du travail et dans les lieux de travail; des communautés accessibles et inclusives, pour s’attaquer aux obstacles qui empêchent les personnes handicapées de pleinement participer à la vie de leur collectivité; une approche moderne à l’égard des personnes en situation de handicap, pour s’attaquer aux difficultés que rencontrent les personnes handicapées, entre autres pour accéder aux prestations et aux programmes fédéraux; et enfin, la sécurité financière, pour réduire la pauvreté et améliorer la sécurité financière de centaines de milliers de personnes en situation de handicap.

Cette approche globale — à quatre piliers, pour ainsi dire — vise à s’attaquer à ce que beaucoup décrient depuis si longtemps, à savoir la marginalisation des personnes handicapées. Beaucoup en ont parlé avec éloquence. La célèbre actrice Emma Thompson a déclaré sans ambages : « Être handicapé ne devrait pas signifier être inadmissible à tous les aspects de la vie. »

Un degré élémentaire de sécurité financière n’est pas la réponse à toutes les difficultés d’accès et d’inclusion, mais sans cette sécurité, la capacité de satisfaire aux besoins de première nécessité et la possibilité de connaître une vie épanouie sont diminuées de beaucoup.

Je suis sûr que nous sommes tous d’accord pour dire qu’aucun Canadien handicapé ne devrait vivre dans la pauvreté. Les valeurs qui ont incité les gouvernements passés de toutes les allégeances à réduire la pauvreté et à créer des prestations pour les aînés et les enfants sont les mêmes que celles qui ont servi pour créer le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd’hui. Je parle d’égalité, d’équité et d’inclusion. Ce sont des valeurs canadiennes qui nous guident et nous définissent en tant que pays et qui font ressortir le meilleur de nous-mêmes. Ces valeurs ont guidé le gouvernement du Canada dans la création de prestations pour les aînés et les enfants, et elles nous guident aujourd’hui dans la création de la prestation canadienne pour les personnes handicapées, qui vise à réduire la pauvreté chez les Canadiens handicapés à faible revenu et en âge de travailler.

Je souligne avec une certaine fierté, en tant que Canadien, que le projet de loi dont nous sommes saisis qui engage le gouvernement à créer une prestation significative pour les personnes handicapées a été adopté à l’unanimité à l’autre endroit.

Un des aspects merveilleux du Canada, c’est que même si nous avons des divergences d’opinions, parfois très fortes, au sujet de la façon de gouverner notre pays et selon quels principes, il est fréquent que nous fassions front commun afin de venir en aide à nos concitoyens les plus vulnérables. C’est le cas en ce moment.

Honorables sénateurs, un autre aspect remarquable de cette prestation est qu’elle est sans précédent. Si j’ai bien compris, le Canada sera le premier pays à instaurer un supplément de revenu significatif pour les Canadiens handicapés en âge de travailler.

Deuxièmement, je vais parler brièvement des conditions de vie des personnes handicapées, conditions qui sont la raison d’être du projet de loi C-22. Les Canadiens handicapés en âge de travailler comptent parmi les plus vulnérables de nos concitoyens. Vingt-trois pour cent d’entre eux vivent dans la pauvreté et, dans certains cas, dans une pauvreté extrême. C’est plus que le double du taux de pauvreté chez les personnes de ce groupe d’âge. Le taux de pauvreté grimpe à 31 % parmi les personnes gravement handicapées. C’est franchement incroyable et, je crois que vous en conviendrez, inacceptable dans un pays comme le nôtre. De plus, ces chiffres datent d’avant la pandémie de COVID, qui a exacerbé les vulnérabilités financières de tant de Canadiens. Selon un sondage mené par Statistique Canada l’an dernier, les deux tiers des répondants handicapés ont déclaré avoir de la difficulté à joindre les deux bouts, et les autres ont dit que leurs revenus avaient diminué à cause de la pandémie.

De manière générale, avec l’entrée en vigueur de ce projet de loi, nous allons réduire considérablement le nombre de Canadiens en âge de travailler qui vivent dans la pauvreté.

La troisième partie de mon discours porte sur le projet de loi lui‑même. Ce dernier établira le processus qui encadrera la conception et la mise en œuvre de la prestation canadienne pour les personnes handicapées. La mesure législative proposée fournira un cadre juridique pour la prestation et donnera au gouverneur en conseil le pouvoir de concrétiser la formule de la prestation au moyen de la réglementation. Même si le tout s’est déroulé rapidement, le projet de loi a fait l’objet d’un examen approfondi par les représentants de la communauté des personnes handicapées et — je prends une grande inspiration — le Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées de la Chambre des communes. C’est un long titre, mais ce comité est mieux connu sous l’acronyme HUMA.

En gardant à l’esprit que « rien de ce qui nous concerne ne doit se faire sans nous », la communauté des personnes handicapées a présenté une vaste série de conseils et de commentaires à l’intention de la ministre, du ministère et des membres du comité. Le comité a tenu six réunions sur le projet de loi, entendu 36 témoins et reçu 153 mémoires.

J’ai pris connaissance de tous les témoignages lors des réunions et je peux affirmer que les discussions étaient animées et constructives. Cela démontre l’engagement indéniable de tous les partis pour mener à bien ce projet de loi.

Cet examen a permis d’apporter neuf amendements, qui ont tous contribué à renforcer le projet de loi selon moi. Tous ces amendements ont été adoptés à l’autre endroit lorsque le projet de loi C-22 a été adopté à l’unanimité. Je tiens à mentionner les thèmes clés du projet de loi et à souligner certains des amendements proposés comme j’aime à le faire.

Premièrement, le projet de loi comprend un engagement important à répondre aux besoins financiers des personnes handicapées. J’aimerais lire trois des dix paragraphes du préambule :

[Attendu] que les personnes handicapées en âge de travailler sont plus susceptibles de vivre dans la pauvreté que les personnes en âge de travailler qui ne sont pas handicapées, et ce, en raison de l’exclusion économique et sociale;

que les personnes handicapées sont souvent confrontées à des obstacles à l’emploi, notamment à des facteurs de dissuasion au travail comme la perte de revenus et d’autres avantages découlant de l’obtention d’un emploi; [...]

que le Canada aspire à devenir un chef de file mondial en matière d’élimination de la pauvreté et que, à cette fin, le Parlement a édicté la Loi sur la réduction de la pauvreté [...]

Cela donne une idée de l’objet du projet de loi. Ensuite, le projet de loi s’articule principalement autour de l’article 11, qui permet au ministre de prendre des règlements pour mettre en œuvre la prestation. Il faut admettre que les détails sont limités. Le projet de loi établit les principaux aspects que les règlements doivent prendre en considération. Cela concerne notamment : les critères d’admissibilité à la prestation; les conditions selon lesquelles la prestation sera versée; le montant de la prestation; l’exigence que la prestation soit indexée au taux d’inflation — une disposition mise en place grâce à un amendement adopté à l’unanimité au Comité des ressources humaines de la Chambre des communes —; l’élaboration d’un processus de demande exempt d’obstacles; l’annulation ou la modification d’une décision; tout appel.

Un deuxième amendement adopté à l’autre endroit qui fait partie du projet de loi dont nous sommes saisis concerne plus particulièrement le caractère adéquat de la prestation. Cet amendement a ajouté l’article 11(1.1) au projet de loi. La disposition se lit maintenant comme suit :

Le gouverneur en conseil, dans tout règlement pris en vertu de l’alinéa (1)c) concernant le montant de la prestation, tient compte du seuil officiel de la pauvreté au sens de l’article 2 de la Loi sur la réduction de la pauvreté.

La mesure législative aurait pu être plus prescriptive et détaillée sur certaines de ces questions, mais il y a des avantages à faire ce travail par la voie de règlements. Elle offre une plus grande souplesse et elle contribue à la capacité de verser plus rapidement les prestations pour les personnes handicapées aux bénéficiaires.

Deux autres aspects de cette question m’interpellent et, je l’espère, vous interpellent également.

Premièrement, le projet de loi engage le ministre à mettre en place un processus rapide et très inclusif qui permettra à la communauté des personnes handicapées de participer à l’élaboration des règlements d’application de la prestation. Il s’agit d’un autre amendement apporté au projet de loi dans l’esprit du « rien ne doit se faire sans nous ». La ministre s’engage à ce que la communauté des personnes handicapées participe à chaque étape de l’élaboration des politiques et des programmes relatifs à la prestation.

Ensuite, si cet engagement repose sur un élément de confiance, il y a aussi un fort climat de confiance dans ce dossier. D’ailleurs, la ministre Qualtrough peut s’attribuer une grande partie du mérite, et j’espère que cette réussite sera respectée par nous tous. Un indicateur de ce fort climat de confiance est que la grande majorité des intervenants de la communauté des personnes handicapées — j’ai compté — sont à l’aise avec la structure du projet de loi dont nous sommes saisis et appuient sans réserve son adoption dans sa version actuelle.

Un troisième aspect du projet de loi touche à l’échéancier. Pour les personnes handicapées, les délais nécessaires pour la mise en œuvre et le versement des prestations sont d’une importance cruciale. C’est compréhensible. Chaque mois qui passe laisse des centaines de milliers de Canadiens dans la pauvreté. Trop de temps s’est déjà écoulé, et j’espère que, pour cette seule raison, vous jugerez utile d’étudier le projet de loi dans les meilleurs délais.

Le Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées de la Chambre des communes a bien compris le message. Permettez-moi de répéter quelques extraits des témoignages qu’il a entendus. Voici ce qu’a dit Rabia Khedr, du mouvement Le handicap sans pauvreté :

[S]i nous attendons que ce processus législatif détermine tous les détails d’une prestation parfaite, son arrivée sera trop tard [...]

Voici ce qu’a dit Krista Carr, vice-présidente à la direction d’Inclusion Canada, un groupe désigné de dirigeants de la communauté des personnes handicapées à qui on a confié la tâche de travailler sur le pilier de la sécurité financière du Plan d’action pour l’inclusion des personnes en situation de handicap du Canada.

Mon dernier appel aux membres de ce comité est le suivant: si vous voulez vraiment exercer une influence historique sur la vie des personnes handicapées dans ce pays, et je sais que vous le voulez tous, vous ferez tout ce qui est en votre pouvoir pour que ce projet de loi soit adopté le plus rapidement possible afin que […] cette prestation soit mise à la disposition des personnes qui en ont désespérément besoin.

Dans ma propre province, Inclusion Saskatchewan a exprimé son appui au projet de loi dans des termes semblables.

Compte tenu de l’urgence de la situation, et pour demander des comptes au ministère, on a amendé le projet de loi pour qu’il exige la présentation d’une série de rapports et l’établissement d’échéances. Il y a quatre éléments clés. Premièrement, le projet de loi entre en vigueur au plus tard au premier anniversaire de sa sanction. Deuxièmement, dans les six mois suivant la date d’entrée en vigueur du projet de loi, il faut déposer au Parlement un rapport sur l’engagement d’établir un dialogue avec la communauté des personnes handicapées concernant l’élaboration des règlements. Troisièmement, il faut présenter aux deux Chambres du Parlement un rapport un an après l’entrée en vigueur de la mesure législative. Quatrièmement, il faut entreprendre des examens parlementaires après le premier anniversaire de la date d’entrée en vigueur du présent article, après le troisième anniversaire de cette date et après chaque cinquième anniversaire par la suite.

Ces dispositions permettront au Parlement de superviser la mise en œuvre du projet de loi afin de déterminer s’il atteint bien son objectif et de changer de cap si nécessaire.

Je voudrais parler brièvement d’un autre aspect important de la prestation d’invalidité — un aspect qui présentera à la fois des défis et de grandes possibilités.

Comme beaucoup d’entre vous le savent, les provinces et les territoires offrent actuellement une gamme de prestations aux personnes handicapées. L’objectif de la prestation d’invalidité est de s’appuyer sur les prestations existantes pour améliorer la vie de ces personnes de façon significative. Pour cette raison, il sera essentiel que le gouvernement fédéral travaille avec les provinces et les territoires — on m’a dit que ce travail est déjà en cours — pour s’assurer qu’ils maintiennent leurs engagements envers les personnes handicapées. En d’autres termes, la prestation d’invalidité du Canada n’entraînera pas le recouvrement d’autres prestations existantes.

En effet, grâce à cette coopération, j’ai bon espoir que des mesures de soutien bien intégrées permettront d’améliorer la vie des bénéficiaires. Pour une plus grande transparence, les accords avec les provinces et les territoires doivent être rendus publics, comme l’a demandé le comité dans un autre amendement. Dans cette optique, j’ai indiqué à la ministre qu’en plus de parrainer le projet de loi, je serais prêt à contribuer autant que possible au dialogue avec les provinces et les territoires afin d’obtenir des résultats optimaux dans le meilleur esprit de coopération possible entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux.

Appuie-t-on la prestation? La réponse est que pratiquement tout le monde l’appuie. Premièrement, les Canadiens, en général, appuient fortement la création d’une prestation canadienne pour les personnes handicapées. Selon un sondage d’Angus Reid réalisé en 2021, près de 9 Canadiens sur 10 l’appuient.

De plus, dans une lettre ouverte à l’intention du premier ministre, 200 éminents Canadiens, y compris d’anciens parlementaires, ont exprimé leur appui. Plus d’une cinquantaine de sénateurs ont manifesté leur appui par écrit. Des universitaires, des dirigeants d’entreprises et de syndicat, des économistes, des professionnels de la santé et des défenseurs de l’intérêt des personnes handicapées ont tous communiqué le même message. Comme je l’ai dit, l’autre endroit a adopté le projet de loi à l’unanimité à l’étape de la troisième lecture.

Nous étudierons le projet de loi comme il se doit dans cette enceinte et au comité, mais le jugement collectif et unanime des représentants élus par les Canadiens mérite tout particulièrement, selon moi, d’être pris en compte.

Les Canadiens handicapés eux-mêmes ont fait savoir clairement que ce pilier — le pilier de la sécurité financière — constitue leur besoin le plus urgent et le plus prioritaire. Ce message qu’on me dit être unanime a été transmis de diverses façons : un sondage en ligne auquel 8 500 personnes ont répondu; des tables rondes avec la communauté des personnes handicapées et des experts; des consultations menées par des Autochtones dans le cadre d’un volet de consultation distinct; ainsi qu’une pétition électronique signée par près de 18 000 personnes qui a été déposée à l’autre endroit.

Cela n’est pas vraiment surprenant si on pense aux statistiques mentionnées plus tôt. Derrière ces chiffres, ce sont toutes les personnes handicapées qui doivent multiplier les efforts pour arriver en raison de leur situation très compliquée. Il existe de nombreuses dépenses quotidiennes entraînées par un handicap en ce qui concerne le logement, les frais médicaux et les mesures de soutien, des dépenses que les autres membres de la société n’ont pas à engager. Évidemment, il n’y a pas que l’argent. La pauvreté a aussi un effet dévastateur sur la santé mentale. Le désespoir, la fatigue et la colère — c’est le tourbillon émotionnel que ressent en général une personne handicapée qui ne voit pas de moyen de se sortir de la pauvreté.

Enfin, pour ne pas m’étendre trop longtemps sur le sujet — j’ai dit la même chose lors d’un discours récemment et quelqu’un a crié : « Il est un peu tard pour cela! » Je pense qu’on pourrait me dire la même aujourd’hui.

De nombreux parlementaires à l’autre endroit ont travaillé fort pour que ce projet de loi nous soit renvoyé; je pense notamment aux députés Bonita Zarrillo et Mike Morrice. Je tiens à reconnaître le travail et les efforts de la ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et de l’Inclusion des personnes handicapées, qui nous a amenés à la porte des buts. Comme la ministre Qualtrough l’a affirmé à l’autre endroit :

L’objectif ultime est d’améliorer la vie de centaines de milliers de personnes handicapées. L’Inclusion des personnes handicapées : c’est le Canada qui nous représente. Nous devrions tout faire pour que ce soit la réalité au Canada.

Pour conclure, j’aimerais prendre un moment pour donner un visage humain à mes propos. J’aimerais que vous réfléchissiez à quelqu’un que vous connaissez. Nous connaissons tous quelqu’un — un ami, une connaissance, un membre de notre famille — qui a un handicap. Réfléchissez aux difficultés auxquelles cette personne est confrontée et les défis qu’elle doit surmonter, souvent avec votre amour et votre soutien. Réfléchissez à la force et à la persévérance dont elle doit faire preuve ne serait-ce que pour survivre dans un monde peu accueillant. Ma fille Kelly et ses amis me viennent à l’esprit et je les considère comme des héros à cet égard.

Quelqu’un a dit un jour, avec sagesse, je pense, que les choses que nous ne parvenons pas à changer finissent parfois par nous faire changer pour le mieux. C’est le cas de ma fille Kelly et d’un grand nombre de ses amis. J’en suis reconnaissant, et je sais que c’est le cas d’un grand nombre d’entre vous dans les relations que vous avez.

Dans ma famille, nous avons beaucoup de chance. Ma fille n’aura pas besoin de cette prestation pour s’en sortir dans la vie. Cependant, elle défend avec ardeur notre travail au Sénat aujourd’hui et dans les jours à venir. Je ne voudrais pas qu’il en soit autrement, et je ne la changerais pour rien au monde. Un jour, quelqu’un a dit : « Je ne te changerais pour rien au monde, mais je changerais le monde pour toi. »

Nous avons une occasion tangible de le faire, de changer le monde pour des centaines de milliers de nos concitoyens qui ont vraiment besoin de nous. Quelle belle occasion. Quel honneur.

Sur ce, chers collègues, je vous demande respectueusement d’examiner et d’adopter rapidement le projet de loi. Merci.

L’honorable Patricia Bovey [ + ]

Sénateur, accepteriez-vous de répondre à une question?

Le sénateur Cotter [ + ]

Avec plaisir, sénatrice Bovey.

La sénatrice Bovey [ + ]

Je vous remercie de parrainer le projet de loi. Je pense qu’il est très important. Vous et moi avons déjà parlé de certains des problèmes auxquels nos collègues canadiens sont confrontés.

Vous avez dit que les accords fédéraux-provinciaux seront conclus de manière à ce qu’il n’y ait pas de récupération. Je me demande si vous pouvez le confirmer, en fonction de vos discussions avec la ministre. Comme vous le savez, je travaille à mon bureau avec une jeune personne qui a un contrat de travail, et le gouvernement du Manitoba prévoyait récupérer deux tiers de son revenu. Nous avons réussi à prolonger son contrat, alors le gouvernement n’a récupéré qu’un tiers de son revenu. Je crains que ce que nous lui payons soit loin de correspondre à un salaire de subsistance.

Dans la mesure du possible, j’aimerais vraiment que vous nous en disiez davantage sur la façon dont on s’y prendrait pour qu’il n’y ait plus de récupération, afin que les fonds fédéraux améliorent vraiment la situation financière des personnes handicapées.

Le sénateur Cotter [ + ]

Je vous remercie de votre question, sénatrice Bovey. Je sais que beaucoup de sénateurs, dont vous faites partie, et de nombreux députés fournissent une aide individuelle à des personnes handicapées afin d’atténuer leur vulnérabilité et de les aider à améliorer leur situation.

Selon les messages que j’entends de la part de la ministre et de son cabinet, on semble avoir plus ou moins adopté comme principe qu’il ne doit pas y avoir de récupération. Comme vous le savez, une bonne partie du soutien destiné aux personnes handicapées est gérée par les provinces. Les paiements dont nous parlons maintenant seront versés directement aux personnes relevant de la compétence fédérale.

Il existe des différences entre les régimes provinciaux. La situation que vous décrivez pourrait se produire dans certaines provinces, mais être impossible dans d’autres provinces, où d’autres défis pourraient toutefois se présenter. Le fait de recevoir de l’argent entraîne malheureusement des mesures de modération et des conséquences.

Je crois qu’il faudra probablement que chaque province et territoire négocie séparément avec le fédéral pour atteindre l’objectif, qui est essentiellement d’éviter toute récupération et de voir à ce que cette prestation généreuse, qui représentera une somme considérable, ne se solde pas par une perte pour les personnes qui la recevront.

Je n’ai pas d’autres détails à vous donner, si ce n’est qu’il existe un certain engagement de la part de la ministre fédérale à éviter une récupération. J’appuie cet objectif et, comme je l’ai déjà dit, si je peux aider la ministre et les dirigeants provinciaux à résoudre ce casse-tête, je le ferai avec plaisir. Ce sera une réussite, je crois.

J’espère que cela se fera rapidement. L’adoption du projet de loi par le Sénat enclencherait officiellement le processus.

Merci.

Son Honneur la Présidente intérimaire [ + ]

Sénateur Cotter, il y a trois autres sénateurs qui souhaitent poser des questions. Acceptez‑vous d’y répondre?

Le sénateur Cotter [ + ]

Volontiers, oui.

L’honorable Pat Duncan [ + ]

Merci, sénateur Cotter, de parrainer le projet de loi. Je salue l’intention qui l’anime — vous l’avez expliquée avec tant d’éloquence — et je respecte entièrement nos collègues de l’autre endroit.

Comme vous avez mentionné dans votre discours que vous avez examiné tous les documents, les témoignages, etc., en plus d’avoir lu attentivement le projet de loi, je vous pose la question suivante : quelle est la place des commissions des accidents du travail, qui sont indépendantes du gouvernement, dans les consultations du fédéral avec les provinces et les territoires?

Je pense au cas d’un demandeur de longue date qui aurait, disons, un diagnostic de troubles de stress post-traumatique et à qui la Commission des accidents du travail dirait : « Non, vous êtes apte au travail. Vous y retournez, ou c’est terminé; vous avez atteint la limite. », malgré le fait qu’un médecin considérerait toujours que cette personne a un handicap.

Est-ce que ce serait utile dans ce genre de cas? Y aurait-il récupération dans ce genre de cas? Quelle est la place du processus de consultation?

Le sénateur Cotter [ + ]

Je ne suis pas très au fait des détails du lien avec les indemnités pour accident du travail, mais je sais qu’il y a eu des consultations et un dialogue avec — permettez-moi de l’appeler ainsi — l’industrie de l’assurance. Lorsqu’on considère les indemnités pour accident du travail comme une forme d’assurance à laquelle les travailleurs et les employeurs cotisent, il faut aussi essayer de comprendre l’intersection entre les deux. La ministre et son cabinet m’ont dit qu’ils avaient repéré le problème et qu’ils s’efforçaient de faire en sorte que les gens ne soient pas lésés par la prestation qu’ils obtiendraient, de sorte que les autres prestations auxquelles ils ont légitimement droit ne soient pas compromises.

Je vais approfondir la question des indemnités pour accident du travail, car je pense que c’est un très bon élément.

La sénatrice Duncan [ + ]

Merci.

L’honorable Éric Forest [ + ]

Mes premiers mots seront pour vous remercier du fond du cœur d’accepter de parrainer ce projet de loi, qui est si important et qui interpelle nos valeurs de solidarité et d’équité.

Mon inquiétude est un peu en périphérie du projet de loi, parce qu’il y a encore beaucoup d’éléments à définir, notamment des conditions d’admission et ce qui va entourer cette admission. En effet, le diable est souvent dans les détails, et j’espère qu’on sera en mesure de livrer ces informations complémentaires rapidement.

En vous écoutant, effectivement, on se rend compte qu’il y a des personnes handicapées qui, dans leur situation, profitent beaucoup du soutien et de l’amour de leur entourage — et vous en êtes un exemple vivant. Cependant, on sait qu’au Canada, il y a plus de 10 % des contribuables qui ne produisent même pas de déclaration de revenus. Parmi ces 10 %, il y a plusieurs personnes qui sont isolées et handicapées. Ce sont les gens les plus fragiles de notre société.

Cela ne fait pas nécessairement partie de l’essentiel du projet de loi, mais je suis très préoccupé de savoir si l’on sera en mesure de mettre en place certains outils pour être capables d’identifier ces gens. On ne peut pas les atteindre actuellement, car on ne les connaît pas. De plus, ils sont perdus dans les limbes administratifs parce qu’ils ne produisent pas de déclaration de revenus. Pourtant, ce sont les gens les plus fragiles de notre société aujourd’hui.

Le sénateur Cotter [ + ]

Merci, sénateur Forest. C’est une question très légitime et importante.

Une disposition du projet de loi prévoit, aux fins de l’application et de l’exécution de la mesure législative, l’accès aux renseignements sur l’impôt sur le revenu, de sorte que les personnes qui obtiennent des crédits d’impôt, par exemple, pourront être identifiées. Vous avez raison de dire qu’il existe un grand nombre de personnes tout à fait déconnectées du gouvernement de toutes sortes de façons, principalement en raison de leur situation de pauvreté et de leur handicap. Je pense que le projet de loi — s’il n’échoue pas — ne concrétisera pas ses objectifs si l’on ne va pas au-devant de ces personnes.

Ce qui s’est passé avec ce projet de loi et avec les discussions qui durent depuis trop longtemps, à vrai dire, ces dernières années, c’est que les regroupements de personnes handicapées, tant nationaux que provinciaux et locaux, se sont investis dans ce projet de loi de façon incroyable. J’espère qu’avec l’appui du gouvernement, il y a peut-être un moyen d’aller au-devant de ces personnes pour qu’elles soient au courant du projet de loi. Le projet de loi comprend notamment un engagement à ce que la présentation des demandes et tout ce qui l’entoure soient sans obstacle pour les personnes handicapées. J’espère donc que cela pourra se faire grâce à ce genre de démarche.

En me fondant sur ma propre expérience, puisque j’ai travaillé un peu avec Inclusion Saskatchewan dans les dernières années, je dirais que ces intervenants font un excellent travail lorsqu’il s’agit de cerner les besoins, même si je n’irais pas jusqu’à dire qu’ils connaissent toutes les familles de la Saskatchewan qui comptent une personne handicapée. Sur le terrain, je crois que les gens appuient sans réserve ce projet de loi même en sachant que tout ne va pas se dérouler parfaitement. Je crois cependant qu’il sera beaucoup plus efficace que ne pourraient le croire les parlementaires à Ottawa.

L’honorable Percy E. Downe [ + ]

Je vous remercie de votre discours, monsieur le sénateur. Comme vous, j’appuie le projet de loi. Je crois qu’il est grandement nécessaire.

Cependant, je suis toujours préoccupé lorsqu’un projet de loi est adopté à l’unanimité à la Chambre des communes. Malheureusement, je me fonde sur des années d’expérience pendant lesquelles j’ai été témoin de ce que j’appellerais la tendance de la Chambre à s’emballer. C’est ce que nous avons vu récemment avec le projet de loi sur les pensions. Pendant des années, la Chambre des communes a refusé d’appuyer ces mesures, puis, soudainement, elle les ont été appuyées à l’unanimité.

Comme vous le savez, notre travail n’est pas de retarder l’étude des projets de loi, mais de nous assurer que les dispositions sont foncièrement bonnes sur le plan de la mise en œuvre. J’ai parlé de la Charte des anciens combattants, une mesure qui était à l’étude lorsque j’ai été nommé au Sénat. La Chambre des communes a consacré en tout deux minutes et demie à l’étude du projet de loi avant de nous l’envoyer. Nous l’avons renvoyé au ministère des Finances, mais pas au Sous-comité des anciens combattants. Qui ne voudrait pas aider les hommes et les femmes qui servent notre pays? Nous avons adopté ces mesures pour ensuite nous faire dire par le directeur parlementaire du budget, des années plus tard, que les anciens combattants se trouvaient à recevoir des millions de dollars de moins que si rien n’avait changé.

Pour faire suite à la question posée récemment, je signale que le Supplément de revenu garanti constitue un excellent exemple de programme valable, mais dont la mise en œuvre a exigé des années de mise au point de la part de bon nombre d’entre nous. Pour recevoir cette prestation, il fallait produire une déclaration de revenus, mais les contribuables qui n’avaient pas d’impôt à payer étaient exemptés de cette obligation. Ainsi, dans la province où je réside, des centaines d’aînés à faible revenu qui refusaient de payer 50 $ à un intermédiaire pour préparer leur déclaration de revenus faute d’être en mesure de le faire eux-mêmes, ne recevaient pas cette prestation à laquelle ils avaient pourtant droit.

Conviendrez-vous avec moi que, même si de nombreuses personnes affirment qu’il n’est pas nécessaire de s’attarder à cette question, il est très important que le comité sénatorial fasse le travail que les comités de la Chambre des communes omettent souvent de faire, et qu’il s’assure que le nouveau programme soit irréprochable — sans failles —, avant que le projet de loi soit adopté?

Le sénateur Cotter [ + ]

Je suis tout à fait d’accord avec vous, sénateur Downe. Le défi consiste à mettre tout cela en place de manière organisée.

Cependant, dans ce contexte, le projet de loi propose de le faire par voie de règlement, de sorte que nous obtiendrons très peu de contrôle parlementaire sur le processus. Le processus devrait être le plus transparent possible, mais je pense qu’il sera établi par voie de règlement.

Voici ma dernière observation : le résultat est tel que nous pouvons être confiants et satisfaits — et c’est notre travail — que le projet de loi inclut les bons indicateurs. Je pense qu’ils sont plutôt bons. Vous en trouverez certains qui pourraient être meilleurs. Cependant, le projet de loi vise consciemment à être un cadre. Pour être franc, cela accorde un grand degré de confiance au ministère et aux fonctionnaires pour le mettre en place. Je suis prêt à leur faire considérablement confiance.

L’engagement d’assurer la participation de la communauté des personnes handicapées à chaque étape du processus est une bonne mesure supplémentaire.

L’honorable Pierre J. Dalphond [ + ]

Merci, monsieur le sénateur Cotter, pour ce discours fort intéressant.

J’ai lu attentivement le projet de loi en prévision de votre discours. Vous avez dit un mot qui m’a frappé. Vous avez dit que c’était un cadre visant à arriver à quelque chose. J’ai aussi noté que l’entrée en vigueur de la loi est prévue 12 mois maximum après l’adoption du projet de loi. J’ai remarqué que le gouvernement doit faire rapport des consultations six mois après l’entrée en vigueur de la loi et que le gouvernement doit déposer dans les deux Chambres un rapport sur la réglementation proposée dans l’année suivant l’entrée en vigueur de la loi. On parle peut-être déjà de deux ans.

Dans le cadre des réunions d’information que vous avez eues avec le ministère, a-t-il été question d’un échéancier réaliste pour voir les premiers chèques ou les premières prestations se rendre aux bénéficiaires? C’est que je soupçonne que, d’ici deux ans, il pourrait y avoir des élections.

Le sénateur Cotter [ + ]

Si je peux me permettre, sénateur Dalphond, la possibilité de telles élections n’a pas vraiment d’importance, car le cadre sera en place et le ministère va poursuivre la mise en œuvre du programme. Je déteste les analogies avec le golf, mais j’ai un handicap de 30 en matière de prédiction d’élections, alors je suis heureux que cette question soit réglée.

Selon ce que j’entends à titre officieux, car personne n’est prêt à s’engager de façon formelle, c’est qu’on espère qu’il sera possible d’entreprendre les négociations et de mettre la réglementation en place dans 12 mois. Une fois cette étape franchie, je crois que la distribution des prestations pourra commencer.

Selon le libellé actuel du projet de loi, il y aura un processus de demande, ce qui signifie que les gens devront présenter une demande. Par contre, on parle d’une période de 12 mois et j’espère bien que c’est exact et que ce sera le délai maximal.

Le sénateur Downe a raison : nous avons un travail important à faire, et nous devons le faire le plus rapidement possible, car, à mon avis, chaque mois qui passe retarde d’un mois la mise en œuvre, ce qui signifie que des dizaines de milliers de Canadiens resteront dans la pauvreté un mois de plus. C’est vraiment important pour eux que nous fassions de notre mieux.

L’honorable Marty Klyne [ + ]

Sénateur Cotter, je dois revenir en peu en arrière quand la pandémie de COVID-19 faisait des ravages et que de l’argent était distribué sous forme de prestations de la PCU, de suppléments à l’aide sociale et ainsi de suite. Dans certaines provinces et certains territoires, un grave problème qui a eu des conséquences tragiques est survenu quand on a exigé la récupération des revenus de l’aide sociale. J’aimerais appuyer ce projet de loi. J’aimerais qu’il serve réellement à aider financièrement les personnes admissibles et non à faire en sorte que les provinces et les territoires équilibrent leurs budgets.

On a vu auparavant que l’une des failles a été le temps écoulé avant qu’une autorité compétente, que ce soit le ministre responsable ou le premier ministre, dise aux provinces et aux territoires d’utiliser les fonds uniquement pour les personnes handicapées et qu’aucune autre fin n’était autorisée. Cet argent ne doit pas être récupéré. Il faut qu’un accord soit conclu pour que les sommes versées ne soient pas récupérées. Sinon, le gouvernement leur donnera un faux espoir. Le simple fait d’annoncer l’examen de ce projet de loi est une source d’espoir. Assurons-nous qu’il n’est pas faux.

Le sénateur Cotter [ + ]

Je vous remercie, sénateur Klyne. J’avais retiré ce qui suit de mon discours; je le reprends ici pour vous répondre, si vous le permettez.

J’ai occupé un poste de sous-ministre dans un gouvernement provincial pendant une dizaine d’années. Quand Ottawa arrive et fournit du soutien pour un programme ou une initiative, les ministères provinciaux ont naturellement tendance à chercher des façons de réaliser des économies de leur côté. Cela fait partie des attentes des ministères des Finances provinciaux. C’est un peu comme la loi de la gravité, d’une certaine façon.

Dans le cas d’un projet de loi comme celui-ci, agir ainsi serait faire preuve de mauvaise foi, si je puis m’exprimer ainsi. Cette mesure vise à aider certaines des personnes qui ont le plus besoin d’aide dans notre pays. J’appuie donc complètement le message de la ministre. Je ne connais pas toutes les petites manœuvres que les provinces ont tendance à employer, et elles ne sont pas à proprement parler illégitimes dans l’ensemble; les provinces ont des obligations financières envers leurs résidants et, à juste titre, envers nous dans les dossiers fédéraux touchant les provinces. Dans ce cas‑ci, je crois que de telles manœuvres seraient indignes et qu’il est important de les réduire au minimum et idéalement de les éliminer. Comme je pourrais peut-être contribuer à trouver des solutions, j’ai fait savoir que je suis prêt à parler avec les gens et à examiner les programmes qu’il faut voir se poursuivre à l’échelon provincial.

Je comprends tout à fait la légère inquiétude que vous exprimez.

Acceptez-vous de répondre à une autre question, sénateur Cotter?

Le sénateur Cotter [ + ]

Certainement, sénatrice Pate.

Comme vous le savez sans doute, j’ai entrepris, avec la sénatrice Petitclerc, de rédiger la lettre signée par 50 sénateurs, en grande partie parce que le gouvernement n’agissait pas comme il l’avait promis et comme il l’avait indiqué dans le budget précédent.

Je ne doute pas de la bonne foi et de l’intention de la ministre dans le dossier. J’ai d’importantes réserves, cependant. L’une des principales questions soulevées initialement par les groupes de personnes handicapées — et je crois comprendre qu’ils ont été mis à l’écart et, selon certains, poussés au silence — concerne la question du caractère adéquat. Les experts juridiques affirment également que le caractère adéquat est un point clé qui ne figure pas dans le projet de loi.

Bien qu’il y ait eu une recommandation royale sur le caractère adéquat, lorsque cette question a été soulevée à l’autre endroit, on a jugé qu’elle dépassait la portée du projet de loi. Comme le sénateur Downe et d’autres l’ont dit, cela semble un peu étrange lorsque l’objectif est de sortir les gens de la pauvreté et, comme vous l’avez indiqué, d’essayer de faire en sorte que les personnes handicapées au pays aient non seulement assez d’argent, mais qu’ils aient aussi la possibilité de prospérer.

Je me demande comment vous nous imaginez le mieux à même de soutenir ce processus étant donné tous ces problèmes, étant donné les nombreuses questions qui vous ont déjà été posées au sujet des paiements récupérés, du caractère adéquat et de l’accès. Comment envisagez-vous que nous puissions nous attaquer à ce problème particulier alors qu’il est très clair que des experts juridiques semblent convenir que notre incapacité à inclure le caractère adéquat pourrait être l’une des clés? De nombreux tribunaux ont jugé que, malheureusement, nous continuons à demander aux personnes les moins bien nanties de traîner le gouvernement devant les tribunaux pour faire appliquer ces mesures. Que pouvons-nous faire de mieux pour nous assurer que cet aspect soit inclus, étant donné les limites de notre capacité en ce qui concerne les problèmes fiscaux?

Le sénateur Cotter [ + ]

Au-delà de la confiance, dont je fais preuve abondamment à l’égard de ce projet de loi, j’accepte votre point de vue. J’aurais probablement été plus heureux si un amendement avait été apporté à l’autre endroit pour renforcer un peu plus cet aspect. Je pense qu’il sera quand même pris en compte.

En ce qui concerne le fait que le caractère adéquat dépasse la portée du projet de loi, je suis encore une fois dépassé. La sénatrice Seidman, qui est la porte-parole pour le projet de loi, et moi-même avons parlé de l’importance et de la signification de cet aspect. Je pense qu’il mérite d’être exploré. J’espère simplement que cela se fera en temps opportun et que la question de savoir s’il est nécessaire de renforcer le projet de loi dans ce sens de même que la façon de procéder seront examinées en profondeur par le comité. Je suis satisfait du projet de loi dans sa forme actuelle, mais, bien entendu, chaque sénateur peut se faire sa propre idée.

L’honorable Diane Bellemare [ + ]

Félicitations pour ce discours et pour ce projet de loi. C’est tout à votre honneur, et c’est aussi à l’honneur du gouvernement d’aller dans cette direction. Toutefois, ma question est la suivante : comment, au moyen d’un projet de loi qui fonctionnera par réglementation, les personnes handicapées auront-elles l’assurance de recevoir des revenus adéquats? En effet, le projet de loi est assez vague dans tous ses paramètres. Pourquoi donc n’avons-nous pas choisi de faire un programme à frais partagés avec les provinces, par exemple, pour nous assurer d’une livraison adéquate des prestations?

Le sénateur Cotter [ + ]

Je n’ai pas de réponse complète à ce sujet, sénatrice Bellemare. Quant à la question de la négociation d’initiatives à frais partagés, elle est complexe, comme vous le savez. Je pense qu’il y a un temps pour cela. Mon expérience au sein d’un gouvernement provincial m’a appris qu’il y a des moments où le gouvernement du Canada veut agir — laissez-moi dire unilatéralement — pour faire une bonne chose, et les paiements directs sont souvent un modèle qui est adopté à cet égard. Il y a des jours dans la province où j’aurais souhaité une approche différente, mais cela semble être une réponse attrayante et plus immédiate.

Il faut s’assurer que les provinces ne profitent pas de l’initiative, parce qu’il s’agit, je ne sais pas de combien, mais de beaucoup d’argent qui ira aux personnes handicapées. Cet argent alimentera les économies provinciales, car les personnes handicapées se trouvent de façon disproportionnée dans la fourchette inférieure des revenus au Canada et qu’elles ont tendance à dépenser l’argent non pas pour des voyages à Hawaï ou à Palm Springs, mais pour payer le loyer et la nourriture, pour soutenir leur famille et pour essayer de joindre les deux bouts. Il y aura des avantages, et je pense que l’idée consiste à essayer de les obtenir rapidement. Les programmes à frais partagés auraient posé un certain défi à cet égard.

C’est aussi un peu plus compliqué parce que nous ne partons pas de zéro. Les provinces ont déjà leurs propres mesures, dont certaines sont distinctes — en fait, elles sont toutes différentes. Chaque cas de figure nécessitera de longues discussions détaillées. Ce sera déjà tout un défi.

Son Honneur la Présidente intérimaire [ + ]

Sénateur Cotter, trois sénateurs voudraient participer à un deuxième tour de questions. Demandez-vous cinq minutes de plus pour répondre à ces questions?

Le sénateur Cotter [ + ]

Je serais heureux de demander cinq minutes de plus et j’essaierai de donner des réponses plus courtes.

Son Honneur la Présidente intérimaire [ + ]

Honorables sénateurs, sommes-nous d’accord pour accorder cinq minutes de plus?

La sénatrice Bovey [ + ]

Merci, sénateur Cotter. Je serai très brève.

Dans votre discours, lorsque vous passiez en revue le projet de loi, vous avez parlé du fait qu’il y aurait des dispositions prévoyant des examens, des réexamens et des appels. S’agit-il des termes exacts? Ces processus s’appliqueraient-ils aux cas où des gens se voient refuser la prestation?

Le sénateur Cotter [ + ]

J’ai tiré ces termes du projet de loi. Les dispositions pertinentes, prévues au paragraphe 11(1), se lisent comme suit : « h) concernant l’examen ou le réexamen des décisions prises sous le régime de la présente loi; » et « i) concernant tout appel ».

On s’attend donc à la mise en place d’un modèle de réexamen, ainsi que de dispositions pour un processus d’appel.

Le sénateur Downe [ + ]

Merci, sénateur Cotter, d’accepter de répondre à tant des questions. Je pense que le fait qu’il y ait tant des questions montre à quel point les sénateurs souhaitent présenter la meilleure mesure législative possible.

En réponse à ma question plus tôt, vous avez parlé du cadre et de la réglementation. Je crois qu’il s’agit là d’éléments cruciaux, et je me demande si, comme moi, vous êtres d’avis que les sénateurs au comité seront en mesure de déterminer clairement auprès des fonctionnaires des divers ministères comment ils entendent procéder.

D’après mon expérience, plus nous obtenons de précisions de leur part, plus nous pourrons leur demander des comptes par la suite s’ils ne font pas ce qu’ils avaient dit qu’ils feraient. Comme vous, j’ai beaucoup d’espoir que cela ira de l’avant. Cependant, comme les comptables se plaisant à l’affirmer, il est préférable de faire confiance et de vérifier, et je pense que c’est un moyen de le faire. Compte tenu de votre expérience, vous seriez bien placé, je l’espère, pour poser ces questions pointues au comité. Envisagez‑vous de faire cela quand le projet de loi sera renvoyé au comité, au lieu de poser des questions génériques et générales?

Le sénateur Cotter [ + ]

Je suis d’accord avec vous, sénateur Downe. C’est un honneur pour moi d’avoir un lien significatif avec ce projet de loi, et je veux faire tout en mon pouvoir pour qu’il produise les meilleurs résultats possibles. Merci.

Le sénateur Klyne [ + ]

Je fais également confiance à la ministre, mais, encore une fois, en 2022, le gouvernement de la Saskatchewan avait décidé de récupérer les paiements effectués aux personnes handicapées. Je crois que l’histoire se répétera à moins que nous arrivions à une entente officielle avant de déployer cette mesure. Je ne veux pas retarder son déploiement, je ne veux pas ralentir le processus, mais nous devons avoir l’assurance que l’argent se rendra au bon endroit. Je ne voudrais pas que l’histoire se répète. S’il y a quoi que ce soit que je puisse faire ou dire, n’hésitez pas à m’en parler.

Le sénateur Cotter [ + ]

Je souhaite ardemment ne pas dépasser ces cinq minutes. Le sénateur Black, au Comité de l’agriculture, lève souvent la main pour nous demander d’arrêter, et j’espère ne pas en arriver là dans cette enceinte.

L’aspect positif de ce projet de loi est que ces accords doivent être négociés et rendus publics. Cette exigence figure dans un amendement au projet de loi. Nous pourrons étudier ensemble ces accords et voir s’ils sont suffisamment détaillés et solides pour atteindre les objectifs que nous visons, vous et moi. Cela se produira après l’adoption du projet de loi, mais ainsi vont les choses. Je ne pense pas que nous ayons d’autres choix, mais au moins nous pourrons voir si les attentes et les engagements de la ministre sont respectés. En ce qui concerne les engagements, celui que je prends envers vous et envers les personnes handicapées sera respecté, et nous pourrons le vérifier ou non. Merci.

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