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Projet de loi sur la stratégie nationale relative au racisme environnemental et à la justice environnementale

Troisième lecture--Suite du débat

11 juin 2024


Honorables sénateurs, je prends la parole pour vous faire part des observations de la sénatrice Galvez au sujet du projet de loi C-226, Loi concernant l’élaboration d’une stratégie nationale visant à évaluer et prévenir le racisme environnemental ainsi qu’à s’y attaquer et à faire progresser la justice environnementale. Voici ce qu’elle a écrit :

J’entends vous convaincre de voter à l’unanimité en faveur du projet de loi, comme nous l’avons fait en comité.

Le projet de loi C-226 a pour objectif « [...] d’élaborer une stratégie nationale visant à promouvoir les initiatives, dans l’ensemble du Canada, pour s’attaquer aux préjudices causés par le racisme environnemental ». Le racisme environnemental est un problème majeur qui touche des groupes méritant l’équité et qui a des répercussions sur les populations autochtones, noires et racialisées ainsi que les personnes à faible revenu. Il cause une myriade de préjudices propres à chaque communauté qui en souffre. Ce projet de loi est un élément indispensable de ce qui doit constituer l’échafaudage législatif fondamental du Canada, de manière à remédier aux injustices environnementales et à garantir l’accès à un environnement sain et sûr pour tous les Canadiens.

Au cours de l’étude du projet de loi en comité, nous avons entendu des témoignages d’Autochtones, chacun ayant sa propre expérience vécue du racisme environnemental. Leurs paroles font la lumière sur leurs vérités et mettent en évidence le triste héritage du Canada et la perpétuation du racisme environnemental. Nous ne pouvons plus rester les bras croisés alors que ces groupes, à travers le pays, continuent de subir les méfaits des injustices environnementales.

Le chef Chris Plain, de la Première Nation Aamjiwnaang, a parlé des répercussions sur sa communauté :

Au cours des 100 dernières années, les terres et les eaux d’Aamjiwnaang ont été appauvries par la surexploitation. Toutes les facettes de l’environnement d’Aamjiwnaang sont polluées, notamment l’air, le sol et l’eau. Les experts qualifient les terres traditionnelles d’Aamjiwnaang de surchargées ou saturées, ce qui signifie que cette zone a atteint un état qui ne peut plus supporter la moindre pollution. D’ailleurs, il est probable que les terres traditionnelles d’Aamjiwnaang soient parvenues à cet état il y a déjà de nombreuses années.

Mme Ingrid Waldron, directrice du projet ENRICH, qui traite de la nocivité environnementale, des inégalités raciales et de la santé communautaire, a expliqué au comité pourquoi ces situations se perpétuent :

Le racisme environnemental ne se manifeste pas en vase clos par rapport aux autres iniquités structurelles qui touchent les communautés autochtones et racisées. Au contraire, ces inégalités structurelles sont un terreau fertile permettant au racisme environnemental de s’enraciner et de se perpétuer au fil des générations. Parmi ces injustices structurelles, notons les politiques et les actions qui, au sein de nos structures sociales et de nos institutions, conduisent au sous-emploi et au chômage, à l’insécurité financière et à la pauvreté, à l’excès de zèle policier et au profilage racial, aux mauvais résultats scolaires, à l’insécurité alimentaire, à l’insécurité du logement, à des infrastructures publiques déficientes, y compris un manque d’espaces verts, de sentiers et de trottoirs, et à un mauvais état de santé. Si nous voulons parvenir à une justice environnementale pour les communautés racisées, il est donc important de s’attaquer à ces inégalités qui agissent en tandem au sein de nos structures sociales pour alimenter le racisme environnemental.

Le racisme environnemental est un héritage du colonialisme qui persiste en tant que pilier de nos valeurs sociétales et de notre économie de gaspillage capitaliste. L’idée que certaines communautés méritent moins de bénéficier d’un environnement sain indique — de façon concrète — qu’on accorde moins de valeur ou moins d’importance aux membres de ces communautés. Une telle idée est contraire à l’éthique, voire criminelle. Nous devons expurger ces notions de nos valeurs sociétales et emprunter humblement le chemin de la réconciliation, en permettant aux communautés touchées par les injustices environnementales de montrer la voie.

Des lois canadiennes importantes destinées à protéger l’environnement et à garantir un environnement sain à tous les Canadiens, c’est-à-dire la Loi sur l’évaluation d’impact et la version modernisée de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement, n’exigent pas d’examen holistique des projets et des aménagements, et permettent au contraire le cloisonnement des questions environnementales. Notre paradigme occidental actuel et nos systèmes juridiques coloniaux nous permettent de traiter les différentes industries de manière différente, et nous permettent également de traiter diverses questions environnementales de manière différente. Ce cloisonnement ne tient pas compte des effets environnementaux, sanitaires et sociaux cumulés des divers projets et aménagements.

Le projet de loi C-226 nous obligera à jeter un regard intersectionnel et holistique sur les effets des lois et des politiques environnementales au Canada et il nous aidera à voir le lien entre ce projet de loi et des lois comme la Loi sur l’évaluation d’impact et la Loi canadienne sur la protection de l’environnement.

Les effets dommageables du racisme environnemental sur la santé physique et mentale comprennent, entre autres, des troubles endocriniens, neurodégénératifs et mentaux, des maladies auto-immunes, des cancers, des troubles neurodéveloppementaux et musculaires dus à l’exposition à des toxines rejetées dans l’environnement, ainsi que des cas de leucémie infantile, des maladies cardiovasculaires, des effets neurologiques, des malformations congénitales et des maladies respiratoires graves liées à la fracturation hydraulique. En outre, les effets sur la santé mentale et physique associés à une rupture du lien avec l’environnement, y compris l’insécurité alimentaire, et les effets sur l’identité culturelle résultant de la dégradation et de la dévastation de l’environnement se font durement ressentir, en particulier chez les communautés autochtones.

Dans son témoignage, Ingrid Waldron a dit ceci à propos du projet de loi :

Le projet de loi C-226 se démarque par sa portée assez large pour englober les expériences partagées des communautés autochtones, des communautés noires et des autres groupes marginalisés qui ont été victimes de racisme environnemental. En même temps, le projet de loi C-226 est suffisamment ciblé pour répondre à la nécessité d’examiner les intersections entre la race, le statut socioéconomique, le risque environnemental et la santé.

Je suis d’accord avec les universitaires, y compris Mme Waldron, les avocats, les professionnels de la santé et les nombreux dirigeants de communautés autochtones qui ont tous réclamé l’adoption rapide du projet de loi C-226 sans amendement.

Au Canada, les politiques de justice environnementale n’ont que trop tardé. Aux États-Unis, le mouvement pour la justice environnementale a pris naissance au début des années 1980, il y a environ 40 ans, lorsque des quartiers à prédominance noire ont commencé à exprimer leurs préoccupations concernant les projets d’infrastructures toxiques entourant leurs communautés. Au milieu des années 1990, le gouvernement fédéral des États-Unis a commencé à s’attaquer aux questions de justice environnementale à l’aide d’un décret qui établit des bureaux de justice environnementale au sein des agences fédérales, comme l’Agence de la protection de l’environnement des États-Unis et le département de la Justice des États-Unis. Le Canada n’a pas encore reconnu comme il se doit le racisme environnemental et ses conséquences, et le pays accuse un retard de 30 ans par rapport à son voisin du Sud pour régler des questions de justice environnementale.

Chers collègues, nous avons aujourd’hui l’occasion d’entreprendre notre propre cheminement en matière de justice environnementale aux côtés des personnes les plus touchées par le racisme environnemental. Nous ne devons ni hésiter ni tarder. Les gens que nous représentons comptent sur nous pour faire ce qui est juste.

L’adoption du projet de loi C-226 représente une lueur d’espoir pour toutes les communautés auxquelles on a laissé un héritage d’injustices environnementales et pour tous ceux qui cherchent aujourd’hui à se libérer du racisme environnemental. Cependant, il est inacceptable d’attendre que le ministre dépose un rapport dans deux ans. Le gouvernement du Canada et l’industrie doivent prendre des mesures immédiates et faire progresser de bonne foi la justice environnementale au moyen de consultations communautaires sérieuses, afin d’instaurer une certaine équité au sein des communautés qui sont touchées par les industries polluantes ou qui cherchent activement à se protéger contre de nouvelles injustices environnementales.

Les répercussions environnementales, économiques et sociales du racisme environnemental sur les communautés autochtones, notamment la perte de la culture et de la langue et la détérioration de la santé, sont profondes. Lutter contre le racisme environnemental est un aspect essentiel de la réconciliation avec les peuples autochtones. Parallèlement, le projet de loi C-226 offrirait une protection contre le racisme environnemental pour les Noirs, les personnes racisées et les communautés à faible revenu, qui subissent aussi de graves torts à cause des injustices environnementales. En temps voulu, le projet de loi C-226 apporterait des avantages à toutes les collectivités canadiennes parce qu’elles seraient mieux protégées elles aussi.

Je vous invite tous à appuyer le projet de loi C-226 et à l’adopter sans tarder.

Merci. Meegwetch.

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