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PÉRIODE DES QUESTIONS — Le cabinet du premier ministre

SNC-Lavalin

21 mars 2019


Honorables sénateurs, je tiens à remercier le leader de mon parti de me donner l’occasion de prendre sa place à la période des questions aujourd’hui.

Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Monsieur le sénateur Harder, depuis que le scandale SNC-Lavalin a éclaté au grand jour, soit après la rétrogradation et la démission de Jody Wilson-Raybould, le premier ministre prétend que ses interventions et celles de son personnel étaient nécessaires parce que 9 000 emplois étaient en jeu et que c’était sa responsabilité de les protéger.

Hier, nous avons appris que ce n’était pas vrai. Dans une entrevue accordée à La Presse Canadienne, le PDG de SNC-Lavalin a déclaré qu’il n’avait jamais tenté d’obtenir un accord de réparation pour éviter un procès criminel en disant que 9 000 emplois étaient en péril. Il a dit ceci :

Cette rumeur voulant qu’ils perdront leur emploi est fausse...

Je le répète. C’est faux.

Certains pensent que dire une fausseté, c’est mentir.

De plus, monsieur le sénateur Harder, en septembre dernier, le greffier du Bureau du Conseil privé, M. Wernick, a menacé Mme Wilson-Raybould en la prévenant que SNC-Lavalin déménagerait probablement...

Son Honneur la Présidente intérimaire [ - ]

Un peu de calme, chers collègues. Écoutons le sénateur et laissons-le finir. Merci.

Je vous remercie, Votre Honneur.

De plus, monsieur le sénateur Harder, en septembre dernier, le greffier du Bureau du Conseil privé, M. Wernick, a menacé Mme Wilson-Raybould en la prévenant que SNC-Lavalin déménagerait probablement à Londres si elle n’obtenait pas d’accord de suspension des poursuites.

Nous venons pourtant d’apprendre de la bouche du PDG de SNC-Lavalin que cela n’a jamais été une possibilité. Il a indiqué à la Presse Canadienne que la société n’avait jamais eu l’intention de déménager son siège social à Londres. Jamais.

Sénateur Harder, vous conviendrez, j’espère, que les Canadiens doivent connaître la vérité, parce que c’est de plus en plus évident que ce n’est pas le premier ministre qui la leur dira...

Son Honneur la Présidente intérimaire [ - ]

Veuillez poser votre question.

« Allez-vous » indique généralement le début d’une question.

Allez-vous aujourd’hui ajouter votre voix à celle des nombreux autres qui demandent au premier ministre de lever le secret professionnel et le secret des délibérations du Cabinet afin que Jody Wilson-Raybould et Jane Philpott puissent parler librement et que les Canadiens sachent la vérité?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) [ - ]

Non.

Sénateur Harder, un nombre sans cesse grandissant de personnes courageuses, comme Jody Wilson-Raybould et Jane Philpott, doivent payer le prix fort pour défendre l’indépendance de l’appareil judiciaire et l’intégrité du Parlement. Leur décision leur a coûté cher, mais elles ont acquis le respect des Canadiens de partout au pays.

Sénateur Harder, pourriez-vous, ne serait-ce qu’un instant, mettre de côté vos réponses toutes faites — qui se limitent à oui et non — et être transparent? Croyez-vous, comme bon nombre de Canadiens, que nous assistons à un vaste exercice de dissimulation — dans ce cas, une réponse par oui ou non pourrait convenir — et vous engagez-vous à faire tout ce qui est en votre pouvoir pour que la vérité éclate au grand jour, oui ou non?

Le sénateur Harder [ - ]

Je remercie le sénateur de sa question rédigée d’avance. Je vais répondre, même si mes notes ne m’aideront pas.

L’actuel gouvernement a pris une mesure sans précédent, c’est-à-dire un décret, pour permettre à la ministre de la Justice et procureure générale de témoigner devant le comité permanent. Je crois que cela ne s’était pas produit depuis 50 ans. Ce précédent témoigne de l’engagement du gouvernement à faire entendre les personnes concernées dans le cadre de la procédure parlementaire de l’autre endroit. L’honorable sénateur n’est pas sans savoir qu’il y a eu d’autres témoins du gouvernement, soit d’actuels et d’anciens fonctionnaires.

Le sénateur sait aussi que le premier ministre, se montrant ouvert à un examen convenable de l’affaire, a demandé au commissaire à l’éthique de l’autre endroit de mener une enquête et que cette enquête est en cours.

Par ailleurs, le premier ministre a nommé conseillère spéciale une ancienne vice-première ministre, ministre de la Justice et procureure générale, pour qu’elle fournisse des conseils sur les questions concernant l’appareil gouvernemental que soulève cette affaire et la nature des relations entre, d’une part, les membres et le personnel du Cabinet et, d’autre part, le procureur général et son personnel.

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) [ - ]

Ma question s’adresse au leader du gouvernement et a trait à l’ancienne présidente du Conseil du Trésor, l’honorable Jane Philpott, qui a donné sa démission plus tôt ce mois-ci. Mme Philpott a accordé une entrevue ce matin au magazine Maclean’s et a dit :

J’estime qu’il y avait des signes de tentative d’ingérence politique dans le système judiciaire, plus particulièrement dans un procès criminel décrit par certains comme étant la poursuite la plus importante et la plus grave de l’histoire moderne du Canada en ce qui a trait aux affaires de corruption commise par une société commerciale.

Elle a également dit :

Je crois que l’ancienne procureure générale a d’autres arguments à faire valoir. Je crois qu’il y a plus de sujets de préoccupations dont je ne suis pas libre de parler.

Sénateur, Mme Philpott a dit qu’il y avait beaucoup plus à dire dans cette histoire. N’est-ce pas pour cela que le gouvernement a mis fin aux travaux du Comité de la justice de la Chambre — afin d’empêcher que la vérité soit connue? Si votre réponse est non, pourriez-vous dire comment le comité peut mettre fin à son étude sans avoir obtenu l’information que d’autres membres du comité jugent importante et que les Canadiens méritent de savoir?

Le sénateur Harder [ - ]

Je remercie l’honorable sénatrice de sa question. Permettez-moi de répéter que le gouvernement du Canada a pris des mesures extraordinaires afin que l’ancienne ministre de la Justice et procureure générale puisse témoigner sur cette question pendant plus de quatre heures et demie. Comme je l’ai déjà dit à plusieurs reprises, le gouvernement a lancé d’autres processus pour offrir les forums appropriés aux personnes qui ont des préoccupations à exprimer. Ces processus sont en cours et ils devraient être respectés.

Enfin, je tiens à souligner que j’ai le plus grand respect pour les deux anciennes ministres en cause. Cela dit, le gouvernement est déterminé à faire en sorte que les Canadiens puissent tirer parti des mesures prévues dans le budget qui a été présenté plus tôt cette semaine, un sujet qui n’a pas encore été débattu au Sénat ou à l’autre endroit.

La sénatrice Martin [ - ]

Comme vous l’avez dit, l’ancienne procureure générale a bel et bien parlé pendant quatre heures. On ne peut pas prétendre que son témoignage a été bref. Je pense toutefois qu’il y a beaucoup d’autres choses à dire sur le sujet. Dans l’entrevue qu’elle a accordée, la Dre Philpott a affirmé ce qui suit : « Je crois que l’ancienne procureure générale a d’autres arguments à faire valoir. » C’est ce qui nous inquiète. Elle doit avoir la possibilité de s’exprimer.

À l’heure actuelle, on a mis fin à l’enquête du Comité de la justice. La Chambre des communes ne prévoit aucune autre plateforme. En adoptant la motion que mon collègue le leader de l’opposition a présentée, nous avons l’occasion, en tant que sénateurs, d’offrir un forum à la Dre Philpott et à l’ancienne procureure générale où elles pourraient raconter pleinement leur version des faits, en toute liberté. La Dre Philpott a aussi affirmé : « Je crois qu’en tant que politiciens, nous devons faire en sorte que les Canadiens connaissent toute la vérité. »

Sénateur Harder, êtes-vous d’accord avec la Dre Philpott pour dire que les Canadiens, que nous servons, méritent de connaître toute la vérité? Si oui, appuierez-vous une étude du Sénat sur cette question?

Le sénateur Harder [ - ]

Je remercie l’honorable sénatrice de sa question. Cela me donne l’occasion de lui rappeler que je me suis déjà exprimé sur la motion qu’elle a mentionnée, et je maintiens le point de vue que j’ai alors exprimé. Comme je l’ai dit lors de mon intervention, ce sera au Sénat du Canada de déterminer s’il souhaite tenir d’autres audiences. Il ne s’est pas encore prononcé là-dessus.

Cela dit, j’aimerais aussi rappeler que, lors de son témoignage, l’ancienne procureure générale et ministre de la Justice a dit clairement qu’elle n’a, en aucun cas, considéré qu’on allait à l’encontre de la loi, mais elle a précisé qu’il s’agissait, selon elle, de pressions indues. Elle a admis qu’aucune loi n’a été violée. Les personnes qui, selon elle, lui ont fait subir des pressions indues ont témoigné pour présenter leur point de vue.

Enfin, l’autre fait à souligner, évidemment, c’est que le premier ministre n’a jamais donné de directives à l’ancienne ministre de la Justice sur la façon de résoudre cette affaire.

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