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Affaires juridiques et constitutionnelles

Motion tendant à autoriser le comité à étudier certaines questions liées à l'ancienne ministre de la Justice et procureure générale du Canada et à inviter des témoins--Suite du débat

2 mai 2019


Honorables sénateurs, je pense que cela a déjà été proposé.

L’honorable Pierrette Ringuette [ + ]

Honorables sénateurs, j’invoque le Règlement. La pratique habituelle de cette assemblée veut que, lorsqu’un sénateur demande l’ajournement — comme celui demandé plus tôt cette semaine sur cette motion —, le sénateur qui prend la parole, s’il n’est pas celui qui demande l’ajournement, dise : « À la fin de mon discours, j’ajournerai le débat au nom de », dans ce cas-ci, la sénatrice Ringuette.

J’invoque le Règlement parce que j’aimerais que le sénateur Plett procède conformément à notre pratique. C’est l’objet de mon recours au Règlement.

Son Honneur la Présidente suppléante [ + ]

Voulez-vous répondre, sénateur Plett?

Premièrement, j’ai dit « honorables collègues ». Cette expression n’indiquait aucunement ce que j’avais l’intention de faire ou non. Je ne comprends pas très bien ce qui a inspiré le recours au Règlement. Je n’ai même pas eu le temps de dire autre chose qu’« honorables collègues ». Votre recours au Règlement porte-t-il sur cette expression?

Votre Honneur, je souhaite intervenir dans ce débat. Je crois que d’autres sénateurs souhaitent aussi le faire. À la suite de nos discours, nous avons l’intention de refuser l’ajournement du débat. Je ne sais pas sur quoi portera le recours au Règlement.

Son Honneur la Présidente suppléante [ + ]

Sénateur Plett, la sénatrice Ringuette avait commencé à prononcer un discours et l’ajournement était à son nom pour le reste de son temps de parole. S’il n’y a pas consentement pour que le débat soit ajourné à son nom, elle perdra son temps de parole.

Vous avez le droit d’intervenir. Consentirez-vous à ce que la sénatrice Ringuette puisse utiliser le temps de parole qu’il lui reste, sénateur Plett?

Je ne suis pas certain d’avoir bien compris ce que vous avez dit parce que, comme je le disais plus tôt, j’ai un problème d’ouïe et le microphone fonctionnait encore mal. Je ne sais pas trop quoi faire.

C’est ma motion. Je veux pouvoir en parler. Nous voulons qu’elle soit mise aux voix aujourd’hui. J’estime que nous avons le droit de réclamer quand bon nous semble qu’une motion soit mise aux voix. Je n’ai aucune objection à dire quand j’ai terminé. La sénatrice Ringuette peut demander de nouveau l’ajournement, et il se peut que nous refusions. Si c’est ce qu’exige la procédure, cela me convient tout à fait.

La sénatrice Ringuette [ + ]

Je suis contente d’avoir pris les devants, alors. On voit tout de suite que le sénateur Plett n’a pas l’intention de respecter le fait que j’ai demandé l’ajournement du débat sur cette motion cette semaine.

À vrai dire, la motion du sénateur Plett date du 2 avril, il y a exactement un mois. Je me suis montrée courtoise et je m’attendais à ce que le sénateur Plett parle de sa motion pendant le mois qui vient de s’écouler. Il n’en a rien fait, alors j’ai demandé cette semaine que le débat soit ajourné à mon nom parce que j’ai commencé à faire des recherches et que j’ai l’intention de prendre la parole, comme j’en ai la prérogative.

Je ne sais pas si la sénatrice Ringuette voulait que je prenne la parole le Vendredi saint ou un autre jour pendant les deux dernières semaines où le Sénat faisait relâche. C’est un peu fort de café de sa part de parler d’un mois, alors que l’on n’a pas siégé pendant deux semaines de ce mois.

Je suis à votre disposition, madame la Présidente. Vous devez me dire ce que je peux faire. Je ne le demanderai pas à la sénatrice Ringuette. Vous devez me le dire. Je veux prendre la parole. C’est ma motion. Je pense que j’ai présenté la motion. La sénatrice Ringuette a demandé l’ajournement du débat sur la motion. Elle peut continuer d’essayer de faire ajourner le débat lorsque j’aurai fini, mais nous voulons demander le vote aujourd’hui.

Son Honneur la Présidente suppléante [ + ]

Vous avez certainement le droit de parler, sénateur Plett, et à la conclusion de votre discours, la sénatrice Ringuette aura le droit de demander que le débat soit ajourné à son nom.

L’honorable Leo Housakos (leader adjoint suppléant de l’opposition) [ + ]

Vous avez tout à fait raison, madame la Présidente, mais nous avons aussi le droit de demander le vote dès maintenant et nous le demandons.

La sénatrice Ringuette [ + ]

Si le sénateur Plett n’est pas prêt à intervenir, je le suis.

Son Honneur la Présidente suppléante [ + ]

J’ai donné la parole au sénateur Plett.

La sénatrice Ringuette [ + ]

S’ils demandent le vote, cela veut dire que le sénateur Plett ne veut pas intervenir. Je veux prendre la parole au sujet de cette motion et j’exerce mon droit d’intervenir immédiatement.

Son Honneur la Présidente suppléante [ + ]

Honorables sénateurs, j’avais donné la parole au sénateur Plett.

La sénatrice Ringuette [ + ]

Mais leur leader a demandé le vote.

Son Honneur la Présidente suppléante [ + ]

Leur leader, si je comprends bien, a indiqué qu’ils pouvaient demander le vote.

La sénatrice Ringuette [ + ]

Non, il s’est levé et a demandé le vote.

Son Honneur la Présidente suppléante [ + ]

J’ai donné la parole au sénateur Plett. Je donnerai ensuite la parole à la sénatrice Ringuette.

Je voudrais être certain de bien comprendre, madame la Présidente. Donc, vous m’avez donné la parole. La sénatrice Ringuette pourra ensuite prendre la parole ou essayer de faire ajourner le débat et tout autre sénateur qui désire prendre la parole pourra aussi le faire aujourd’hui. C’est bien cela?

Son Honneur la Présidente suppléante [ + ]

Sénateur Plett, vous avez le droit de prendre la parole, ensuite la sénatrice Ringuette peut demander le consentement afin de prendre la parole après vous.

Merci. Je vais reprendre depuis le début.

Sénateurs, j’interviens aujourd’hui pour parler de la motion dont nous sommes saisis et qui propose que le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit autorisé à examiner, afin d’en faire rapport, les allégations graves et troublantes voulant que des personnes au sein du cabinet du premier ministre aient tenté de faire pression sur l’ancienne ministre de la Justice et procureure générale du Canada, l’honorable Jody Wilson-Raybould, C.P., députée, et d’entraver son indépendance, pouvant ainsi porter atteinte à l’intégrité de l’administration de la justice.

Sénateurs, je pense que cette motion est probablement la question la plus importante à avoir été présentée au Sénat depuis le début de la présente législature. En fait, c’est peut-être l’une des motions les plus importantes à avoir été examinées dans l’histoire du Sénat.

C’est une déclaration audacieuse, mais je vous encourage à mettre la politique de côté pendant un instant — ceux d’entre vous qui croient que tout ce que nous faisons dans cette enceinte relève de la partisanerie. Je vous invite à examiner les circonstances qui m’ont incité à proposer cette motion au Sénat.

Deux ministres ont démissionné pour une question de principe fondamentale. En même temps, elles ont formulé des allégations très graves contre leur propre gouvernement en disant qu’il s’était ingéré dans l’administration de la justice. Chers collègues, c’est du jamais vu.

Je suis conscient qu’un certain temps s’est écoulé depuis le moment où ces événements étaient frais dans les médias et dans notre mémoire, mais je vous exhorte à ne pas laisser cela vous inciter à minimiser à tort l’importance des événements qui sont survenus et qui n’ont toujours pas été réglés.

Lorsqu’elle a comparu devant le Comité de la justice de la Chambre des communes, l’honorable Jody Wilson-Raybould a clairement déclaré :

[...] j’ai été soumise aux démarches incessantes et soutenues de nombreuses personnes au sein du gouvernement qui ont tenté de s’ingérer politiquement dans l’exercice de mon pouvoir discrétionnaire de procureure [...]

Mme Wilson-Raybould a témoigné que l’ingérence s’est poursuivie pendant plusieurs mois et que l’ancien secrétaire principal du premier ministre lui aurait dit en décembre 2018 :

[...] il n’y a pas de solution ici qui n’implique pas une certaine ingérence.

L’ancienne procureure générale a aussi déclaré dans son témoignage que lorsque le greffier du Conseil privé a continué d’exercer des pressions lors d’une conversation subséquente, elle lui a clairement dit :

[...] nous nous aventurions en terrain dangereux. J’ai également émis un avertissement sévère, soit qu’en tant que procureure générale, je ne pouvais pas agir de telle façon de mon côté tandis que la poursuite agirait de telle autre façon. Cela n’aurait pas été objectif et il n’y aurait pas eu d’indépendance.

Lors de sa conversation avec le greffier, elle lui a dit ceci :

Cela revient à violer le principe constitutionnel de l’indépendance judiciaire.

On ne saurait trop insister sur l’importance de cette situation. Tous les sénateurs doivent réfléchir sérieusement au témoignage de l’ancienne procureure générale.

Jamais un ancien procureur général ou un ancien ministre n’avait fait de telles allégations contre son propre gouvernement. Jamais.

Comme vous le savez, depuis ce témoignage, une autre ministre a démissionné du Cabinet, soit l’honorable Jane Philpott. Depuis sa démission, Mme Philpott a déclaré ceci :

J’ai démissionné parce que je ne pouvais plus rester solidaire avec le Cabinet sur la question de la gestion du dossier SNC-Lavalin. Je considère qu’il y avait des preuves qu’on avait tenté de s’ingérer politiquement dans le fonctionnement du système judiciaire, relativement à une procédure susceptible de conduire à un procès criminel que certains qualifient de poursuite la plus importante et la plus grave de l’histoire moderne du Canada concernant des actes de corruption reprochés à une entreprise.

C’est Mme Philpott qui l’a dit, pas moi. Mme Philpott, ancienne ministre, a aussi déclaré ceci :

Il y a beaucoup plus à dire dans cette histoire.

Honorables sénateurs, à mon avis, ces témoignages devraient suffire à eux seuls pour que le Sénat soit convaincu de la nécessité d’adopter la motion dont nous sommes saisis. Je ne vois pas comment nous pourrions faire autrement et demeurer un organe législatif crédible.

Nous avons entendu des sénateurs d’en face déclarer ouvertement que, pour des raisons partisanes, des sénateurs de ce côté-ci de la Chambre tentent d’exploiter cette question ou des questions dont nous sommes saisis relativement au projet de loi C-71. En fait, nous ne faisons que répondre aux allégations faites par d’anciennes ministres de premier plan du gouvernement actuel.

Ces mêmes sénateurs prétendraient-ils que Mme Wilson-Raybould et Mme Philpott font preuve de partisanerie en faisant leurs allégations? Qu’on le veuille ou non, une seule organisation au Canada s’oppose à la tenue d’une enquête complète sur cette affaire, et cette organisation, honorables sénateurs, c’est le Parti libéral du Canada.

Si les sénateurs d’en face votent contre la motion dont nous sommes saisis, ce sont eux qui, à mon avis, feront preuve de partisanerie flagrante pour le compte du gouvernement actuel.

Permettez-moi de vous citer un extrait d’un éditorial paru dans un journal canadien :

Les libéraux qui siègent au Comité de la justice de la Chambre des communes ne rendent pas service aux Canadiens et à leur propre gouvernement en ne permettant pas à Jody Wilson-Raybould de raconter toute son histoire.

Elle veut pouvoir s’exprimer, et il ne fait aucun doute qu’elle devrait être entendue. Essayer de l’en empêcher ou même de retarder son témoignage dans l’espoir que tout le monde s’en désintéresse est à la fois inacceptable et contreproductif.

Honorables sénateurs, cet éditorial est tiré du Toronto Star. Vous conviendrez comme moi que le Toronto Star n’est pas tout à fait un journal conservateur. Il s’agit d’une affaire qui préoccupe les Canadiens d’un peu partout au pays, peu importe leur allégeance politique. Examinons la citation suivante :

[Nous sommes préoccupés] par les allégations récentes d’interférences dans le cadre des poursuites engagées contre SNC-Lavalin, qui font l’objet d’une procédure devant le Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes. Le groupe canadien d’ingénierie et de construction fait l’objet de poursuites judiciaires pour des faits présumés de corruption d’agents de l’État libyen en vue d’obtenir un contrat de 58 millions de dollars canadiens pour la remise en état d’un réseau d’adduction d’eau.

En sa qualité d’État partie à la Convention sur la lutte contre la corruption d’agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales, le Canada s’est engagé à se conformer pleinement aux dispositions de la Convention, qui consacre l’indépendance des poursuites dans les affaires de corruption transnationale en vertu de son article 5.

D’où vient cette citation? Elle est tirée d’un communiqué de presse du Groupe de travail de l’OCDE sur la corruption. Soit dit en passant, dans le même communiqué de presse, le Groupe de travail de l’OCDE louange le gouvernement pour avoir confié au Comité de la justice de la Chambre des communes une enquête sur l’affaire.

Le problème, c’est que, quelques jours après cette déclaration de l’OCDE, le gouvernement a mis un terme à l’enquête du Comité de la justice, comme il vient de le faire avec le Comité d’éthique de la Chambre des communes, qui tentait de lancer une enquête semblable.

Je ne peux qu’espérer que les sénateurs d’en face ne suivent pas l’exemple du Parti libéral en mettant un terme à une enquête par le Sénat. Jusqu’à maintenant, le Canada a toujours joui d’une excellente réputation sur la scène internationale en ce qui concerne le respect de la primauté du droit et de l’administration de la justice.

Toutefois, les mesures que le gouvernement a prises pour étouffer une enquête complète sur cette affaire n’ont pas amélioré sa réputation. En fait, c’est exactement le contraire.

Honorables sénateurs, certaines personnes dans cette enceinte prétendent qu’il revient à l’autre endroit d’enquêter sur cette question. Je ne suis pas d’accord. En fait, l’histoire contredit cette affirmation.

En 1961, le gouvernement Diefenbaker présente un projet de loi visant à congédier James Coyne, qui est le père d’Andrew Coyne, du poste de gouverneur de la Banque du Canada. Le gouvernement utilise ensuite sa majorité à la Chambre des communes afin d’empêcher M. Coyne de témoigner devant un comité pour se défendre, tout en adoptant à toute vapeur le projet de loi.

Lorsque le projet de loi est renvoyé au Sénat, le Comité des banques invite James Coyne à témoigner. Il accepte pour présenter sa version des faits. Après avoir écouté son témoignage, le Comité sénatorial des banques lui donne raison. Dans son rapport, il recommande l’abandon du projet de loi visant à l’expulser de son poste de gouverneur. Le jour de la publication du rapport qui l’exonère, James Coyne démissionne. Le projet de loi devient caduc.

Cet incident a, par la suite, été surnommé « l’affaire Coyne ». C’est un bel exemple d’une occasion où le Sénat a permis à un très haut fonctionnaire de donner sa version des faits lorsque le gouvernement avait exploité sa majorité à la Chambre des communes pour tenter de le réduire au silence. Il s’agit là d’un précédent dont nous ne devons pas faire fi ni atténuer la grande importance. Il a un lien direct avec la motion dont nous sommes saisis aujourd’hui.

Honorables sénateurs, nous sommes à un grand tournant : soit les sénateurs décident d’appuyer la motion à l’étude, soit ils laissent le Sénat être réduit au silence.

Par le passé, j’ai entendu le sénateur Harder affirmer que l’un des principaux rôles de cette assemblée était d’agir comme une soupape de sécurité pour protéger les Canadiens contre la tyrannie de la majorité. Ses paroles étaient-elles vides de sens ou sincères? Nous le découvrirons bientôt quand les sénateurs voteront enfin sur la motion à l’étude. J’espère que tous les sénateurs appuieront la motion, car c’est ce qui s’impose.

L’honorable Pierre J. Dalphond [ + ]

L’honorable sénateur acceptera-t-il de répondre à une question? Merci. Accepterez-vous plutôt la motion présentée par le sénateur Pratte, qui poursuit le même objectif, mais dans un contexte différent, plutôt que de renvoyer l’affaire au Comité de la justice? Sinon, pourquoi?

Honorables sénateurs, le sénateur Pratte a présenté une motion après que j’ai présenté la mienne, donc, si elles se ressemblent à ce point, peut-être le sénateur Pratte n’aurait-il pas dû présenter la sienne, mais plutôt accepter la mienne. Je pense que je peux relancer la question.

Je ne crois pas qu’il s’agit de motions semblables. Le sénateur Pratte propose une motion visant à créer une sorte de comité indépendant. Je ne demande pas que nous créions un comité. Nous avons un comité. Le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles est bien capable d’effectuer ce travail. Je ne vois aucune raison de créer un autre comité. Avec tout le respect que je vous dois, sénateur Dalphond, je considère que ces deux motions sont très différentes.

Le sénateur Dalphond [ + ]

Oui, mais la principale différence entre ces deux motions est que, premièrement, le Comité des affaires juridiques doit étudier le projet de loi C-75, et nous devons ensuite étudier le projet de loi C-78 puis le projet de loi C-337 et vous voulez que nous entreprenions cette enquête en même temps. Le sénateur Pratte a proposé un groupe composé principalement d’indépendants qui se pencheraient sur la question.

Concernant l’efficience et l’indépendance accrue, quel est le problème? Je pense que sa proposition est de loin supérieure à la vôtre.

Sénateur Dalphond, en affirmant qu’une proposition est supérieure à l’autre, vous êtes en train de dire que les deux propositions sont complètement différentes. Dans ce cas, je suppose que nous ne sommes pas d’accord. Je pense que ma proposition est supérieure à la motion du sénateur Pratte. Nous aurons évidemment l’occasion de nous prononcer sur la mienne, et j’espère sincèrement qu’elle sera adoptée. Sinon, alors je suis sûr que nous aurons l’occasion de nous prononcer sur la motion du sénateur Pratte.

Cependant, vous nous demandez d’appuyer la création d’un autre groupe dont vous avez dit qu’il se composerait principalement de sénateurs indépendants, donc, évidemment, de membres de votre groupe. Vous êtes donc déjà en train de proposer que ce soit les membres de votre groupe qui se penchent sur ce qu’ils ont fait de mal. J’estime que ce n’est pas le comité qu’il nous faut pour étudier la question. C’est pour cela que je vais continuer de demander au Sénat d’appuyer cette motion. Évidemment, nous avons le droit de considérer la question de façon non partisane, et j’espère que c’est ce que nous ferons. Nous allons procéder de façon non partisane. Nous allons atteindre l’illumination et nous rendre compte que nous devons appuyer cette motion.

Son Honneur le Président [ + ]

Je vais d’abord donner la parole à la sénatrice Ringuette.

La sénatrice Ringuette [ + ]

L’étude de cette motion est certainement intéressante jusqu’à présent.

Son Honneur le Président [ + ]

Sénatrice Ringuette, avant que vous commenciez, je devrais peut-être préciser quelque chose. Le plumitif du Feuilleton indique que la sénatrice Ringuette avait une étoile associée à son ajournement, ce qui signifie que, pour ajourner le débat une deuxième fois, elle aurait besoin du consentement. Dans le présent cas, étant donné que la présidence a déjà reconnu le sénateur Plett, et que la sénatrice Ringuette avait une étoile, elle requiert le consentement afin de participer au débat.

Je dois dire, honorables sénateurs, que lorsqu’un article est ajourné au nom d’un sénateur, la pratique habituelle est que si un autre sénateur souhaite participer au débat, ce dernier consulte le premier et ils en arrivent normalement à une entente à cet égard. Toutefois, cela ne s’est pas fait dans ce cas, et le sénateur Plett a donc été reconnu et il a pris la parole. Pour que la sénatrice Ringuette puisse parler maintenant, elle aura besoin du consentement du Sénat. Je tiens à signaler, honorables sénateurs, qu’il serait courtois de donner à un sénateur au nom duquel un article était ajourné l’occasion de parler.

Sénatrice Ringuette, demandez-vous le consentement?

La sénatrice Ringuette [ + ]

Merci beaucoup. J’apprécie vraiment...

Le sénateur Mockler [ + ]

L’esprit de coopération.

La sénatrice Ringuette [ + ]

... l’esprit de coopération.

Honorables sénateurs, sénateur Plett, si l’on met de côté la justesse de votre proposition, des événements se sont produits qui remettent en question son utilité. Il y a de nombreuses semaines, les anciennes ministres Wilson-Raybould et Philpott ont toutes les deux déclaré publiquement qu’il n’y avait plus rien à ajouter. L’ancienne ministre Wilson-Raybould a livré un témoignage qui a duré des heures au Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes.

Subséquemment, l’ex-procureure générale a soumis au comité un long mémoire ainsi qu’un enregistrement audio. À la page 19 de ce mémoire, l’ancienne ministre Wilson-Raybould déclare :

Ainsi donc, pour ma part, je ne crois pas avoir autre chose à offrir dans un processus officiel sur cette affaire.

Dans une entrevue à l’émission Power Play, l’ancienne ministre Philpott a déclaré :

[...] je crois que suffisamment de renseignements ont été rendus publics pour que les Canadiens constatent ce qui s’est passé et se fassent leur propre opinion.

Dans une autre entrevue, celle-ci accordée à Maclean’s, on a posé la question suivante à la Dre Philpott :

Avez-vous toujours le sentiment qu’il y a autre chose que les Canadiens doivent savoir?

La Dre Philpott a répondu :

[...] en ce qui a trait à mes propos précédents, il est évident que, depuis, d’autres renseignements ont été rendus publics. L’élément le plus important est probablement le document de 43 pages présenté par l’ancienne procureure générale [...]

Elle a poursuivi en disant :

Il s’agissait de renseignements importants à divulguer. Y a‑t-il d’autres choses à dire? Selon les conversations que j’ai eues, je pourrais divulguer d’autres éléments d’information, d’autres parties de l’histoire. À ce stade-ci, j’estime qu’il n’y a aucun intérêt à faire tout un plat avec ces renseignements parce que, selon moi, les Canadiens disposent désormais d’assez d’information pour déterminer ce qui s’est passé.

Il n’existe aucune dispense de la sorte devant le Comité permanent de la justice et des droits de la personne ni devant l’examen du commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique.

Au contraire, je suis surprise par l’ouverture dont les sénateurs d’en face font preuve. Après tout, la pression exercée par le cabinet du premier ministre sur le caucus conservateur du Sénat au cours de la dernière législature est bien documentée. À ce stade-ci, permettez-moi de citer du paragraphe 10-29 au paragraphe 10-38 de la décision rendue le 21 avril 2016 par la Cour de justice de l’Ontario concernant la cause R. c. Duffy :

Les courriels produits en preuve dans la présente affaire m’obligent à prendre un peu de recul et à me poser quelques questions. Ai-je vraiment eu un aperçu des rouages du cabinet du premier ministre?

Nigel Wright dictait-il vraiment la conduite de sénateurs influents comme s’il s’agissait de simples pions sur un échiquier?

Ces mêmes sénateurs influents obéissaient-ils tête baissée aux ordres de M. Wright?

Acceptaient-ils de répéter benoitement les déclarations toutes faites qu’on leur fournissait?

Nigel Wright a-t-il vraiment ordonné à un sénateur d’aller voir un des cadres du cabinet comptable bien en vue qui était chargé de superviser la vérification indépendante dont le Sénat faisait l’objet, dans le but soit de consulter son rapport — ou une partie de son rapport — avant qu’il soit remis aux autorités sénatoriales compétentes, soit d’influer d’une quelconque manière sur le contenu de ce même rapport?

La lecture de ces courriels me donne-t-elle l’impression que le sénateur Duffy n’avait d’autre que choix d’obéir s’il ne voulait pas subir des conséquences?

La réponse à toutes ces questions est : OUI, OUI, OUI, OUI, OUI et OUI!!!!!

La place du politique dans toute cette affaire et l’aura de secret qui l’entourait sans cesse ont de quoi choquer et laisser pantois.

La précision et le caractère planifié de l’exercice feraient sans doute la fierté du commandant militaire le plus strict. Cela dit, dans le contexte d’une société démocratique, les complots que ces courriels mettent au jour peuvent seulement être qualifiés d’inacceptables.

C’était un extrait d’une décision rendue par un juge. Grâce à un recul objectif, nous pourrons peut-être en apprendre davantage sur les relations de pouvoir qui existaient, pendant la dernière législature, entre les échelons supérieurs du Cabinet de l’ancien premier ministre conservateur et le caucus conservateur au Sénat, et sur les pressions constantes exercées sur le Sénat, une institution indépendante.

Peut-être le Sénat devrait-il soumettre cette question à un second examen objectif. Il ne l’a jamais fait. Après tout, ce qui vaut pour les uns vaut aussi pour les autres.

Dans la langue de Molière, on dit ceci : « Ce qui est bon pour minou est aussi bon pour pitou. »

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