La Loi sur les pêches
Projet de loi modificatif--Message des Communes--Motion d’adoption des amendements des Communes et de renonciation aux amendements du Sénat--Débat
18 juin 2019
Propose :
Que, relativement au projet de loi C-68, Loi modifiant la Loi sur les pêches et d’autres lois en conséquence, le Sénat :
a)agrée les amendements apportés par la Chambre des communes à ses amendements;
b)n’insiste pas sur ses amendements auxquels la Chambre des communes n’a pas acquiescé;
Qu’un message soit transmis à la Chambre des communes pour l’en informer.
—Honorables sénateurs, je suis ravi d’intervenir aujourd’hui au sujet du message que nous avons reçu de l’autre endroit à propos du projet de loi C-68. Cette mesure législative d’initiative ministérielle rétablira les mesures de protection du poisson et de son habitat, tout en incorporant des mesures de protection modernes dans la Loi sur les pêches.
Comme bon nombre d’entre vous le savent déjà, cette mesure rétablira également l’interdiction de détruire le poisson par un autre moyen que la pêche et de faire des travaux qui entraîneraient la détérioration, la destruction ou la perturbation de l’habitat du poisson.
En ce qui concerne le message que nous avons reçu, je précise que le gouvernement a accepté la majorité des amendements proposés par le Sénat, qui se chiffraient à plus de 30. En outre, le gouvernement rejette respectueusement trois amendements et en modifie un. Lorsqu’il a envoyé ce message, le ministre Wilkinson m’a demandé de remercier encore une fois les sénateurs de leur excellent travail sur ce projet de loi, particulièrement son parrain, le sénateur Christmas. Le ministre m’a également demandé de féliciter les sénateurs d’avoir inclus dans cette version du projet de loi des politiques du Sénat et d’avoir tenu compte des préoccupations exprimées au Sénat.
Pour ce qui est des détails du message, le premier amendement rejeté par l’autre endroit est celui que la sénatrice Poirier a apporté à la définition d’« habitat du poisson ». Le gouvernement estime que l’amendement proposé par la sénatrice Poirier risquerait de restreindre le champ d’application des dispositions relatives à la protection du poisson et de son habitat et, partant, de nuire à l’objectif principal du projet de loi, qui consiste à accroître les mesures de protection.
Les deux autres amendements qui sont rejetés concernent la création de réserves d’habitats par des tiers. Ces amendements avaient été présentés par le sénateur Wells. En fait, c’est la Fédération canadienne de la nature qui les a proposés en premier. Elle nous a écrit depuis pour nous indiquer qu’elle est désormais favorable à leur suppression, car la mise en œuvre de cette politique ne pourrait se faire sans la tenue de vastes consultations.
Enfin, le gouvernement du Canada a légèrement modifié un des trois amendements du sénateur Christmas afin que le texte soit cohérent avec le reste du projet de loi.
J’aimerais aussi parler brièvement des amendements que le gouvernement a acceptés, car j’en ai parlé plus longuement aux étapes de la deuxième et de la troisième lectures. Les amendements provenant du projet de loi S-203, sur la mise en captivité des baleines et des dauphins, demeurent dans le projet de loi, tout comme ceux qui sont tirés du projet de loi S-238, sur l’enlèvement et l’importation des nageoires de requin. Le gouvernement sait que les Canadiens des quatre coins du pays étaient favorables à ces amendements, car ils permettent de mieux protéger la vie marine. Je remercie encore une fois l’ex-sénateur Moore ainsi que les sénateurs Sinclair et MacDonald. Leur vision et leur détermination ont grandement contribué à faire progresser ces politiques de premier plan.
Comme promis, l’article 2.2 — qui portait sur le débit d’eau — ne figure plus dans le projet de loi C-68, et la définition de l’habitat du poisson, jugée trop vague, a elle aussi été supprimée, à la suite d’un amendement que j’avais présenté au comité. Selon ce qu’on peut lire dans le message, les amendements que j’ai proposés au comité au sujet des projets désignés, comme je m’y étais engagé à l’étape de la deuxième lecture et comme j’en avais parlé à l’étape de la troisième lecture, ont eux aussi été retenus. Honorables sénateurs, ce projet de loi est extrêmement important, et quel que soit l’endroit où ils habitent, les Canadiens veulent tous que nous l’adoptions afin que les mesures de protection du poisson et de son habitat soient rétablies. Je demande donc à tous mes collègues d’appuyer la motion d’adoption du message de l’autre endroit. Je vous remercie.
Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui à propos du message qui nous a été transmis par l’autre endroit au sujet du projet de loi C-68, Loi modifiant la Loi sur les pêches et d’autres lois en conséquence.
Mes collègues se souviendront, d’après les discours prononcés dans cette enceinte à l’étape de la troisième lecture, que le Sénat a apporté plusieurs changements utiles au projet de loi C-68. J’aimerais, encore une fois, me concentrer sur les amendements liés aux réserves d’habitats que nous avons apportés, et ce, avec l’appui de tous les caucus et les groupes.
Les amendements apportés au projet de loi C-68, au comité et dans cette enceinte, avaient pour but de permettre à des tiers de créer des réserves d’habitats, d’instaurer un système de paiements de compensation et de veiller à ce que les avantages liés aux réserves d’habitats restent à l’échelle locale relativement au lieu de l’exploitation de l’ouvrage ou de l’entreprise ou de l’exercice de l’activité.
Ces amendements avaient l’appui, entre autres, de Premières Nations, de groupes représentant l’industrie, de groupes d’action écologique, de défenseurs des milieux humides, d’entreprises du secteur privé, d’organismes des gouvernements provinciaux, d’organismes de protection de la nature et de municipalités.
En réalité, les seuls arguments que j’ai entendus contre le rétablissement et la conservation d’habitats par des tiers provenaient de représentants du ministère des Pêches et des Océans. C’est pourquoi je suis déçu de voir que le gouvernement a éliminé les trois amendements proposés par le Sénat sur les réserves d’habitats. En prenant cette décision, il exclut les intervenants de première ligne du travail utile qu’ils font pour protéger et préserver notre environnement.
J’aimerais parler des observations que le sénateur Harder a formulées au sujet de la Fédération canadienne de la faune. Cet organisme a été le premier à venir à mon bureau pour tenter de me convaincre d’intégrer les dispositions sur les réserves d’habitats établies par des tiers aux amendements apportés à ce projet de loi. J’ai accepté de le faire. La fédération m’a présenté ses arguments, et j’ai trouvé qu’ils étaient judicieux. Je n’accepte pas de faire des choses simplement parce qu’on me le demande, mais je les prends en considération. J’ai été très surpris lorsque le directeur général de la Fédération canadienne de la faune a envoyé une lettre au président du comité, le sénateur Manning, pour lui faire savoir qu’il n’appuyait plus les amendements en question. J’aimerais lire des extraits du courriel que M. Rick Bates m’a envoyé à ce moment-là :
Sénateur Wells, je tiens à vous remercier de vos efforts pour faire adopter des amendements au projet de loi C-68 en comité. Au cours des derniers jours, nous avons eu beaucoup d’échanges avec le personnel du cabinet du ministre et une conversation avec le ministre. Il a indiqué que le gouvernement n’adoptera pas le projet de loi dans sa version amendée et que si nos amendements sont adoptés au Sénat, ils seront débattus à la Chambre. Durant ce débat, le gouvernement devra critiquer les réserves d’habitats établies par des tiers à un point tel qu’il est peu probable qu’on les envisage de nouveau sous l’actuel gouvernement.
Eh bien, monsieur Bates, je peux vous assurer que c’est vrai. Puis, il a ajouté ce qui suit :
Je crains aussi que cette situation ait une incidence sur d’autres initiatives que nous réalisons actuellement de concert avec le ministère des Pêches et des Océans.
Chers collègues, j’ai travaillé quelque temps au ministère des Pêches et des Océans en tant que conseiller politique principal. J’ai souvent entendu dire que ce n’est pas le ministre qui dirige ce ministère, mais plutôt l’inverse. Il semble que dans le dossier qui nous occupe, ce soit encore le cas.
Il a ajouté :
Si la Fédération canadienne de la faune revient sur sa décision d’appuyer ces amendements, nous pourrons au moins continuer d’exercer des pressions en faveur de l’établissement de réserves d’habitats par des tiers.
J’aimerais dire à M. Bates qu’il n’y a pas meilleure façon d’introduire les dispositions sur les réserves d’habitats établies par des tiers dans la loi que le projet de loi C-68. Bien entendu, il s’agit à présent d’une occasion manquée.
Mes collègues se souviendront également que lors de mon discours à l’étape de la deuxième lecture — si je ne m’abuse —, j’ai dit que la Loi sur les pêches n’avait pas été modifiée depuis 1867. Il n’est pas facile de modifier cette loi. Si M. Bates croit qu’on peut y apporter des modifications rapidement, il risque de bientôt changer d’avis.
Il a dit :
Si la Fédération canadienne de la faune revient sur sa décision d’appuyer ces amendements, nous pourrons au moins continuer d’exercer des pressions en faveur de l’établissement de réserves d’habitats par des tiers.
Pour ma part, j’en doute.
Le comité des pêches et des océans a accepté de se pencher sur l’établissement de réserves d’habitats par des tiers, et nous avons encore du travail à faire en ce qui concerne la monétisation des crédits à l’extérieur des sites.
Chers collègues, la semaine dernière, j’ai comparu devant le Comité des pêches et des océans de la Chambre des communes. Il y avait deux autres témoins à cette réunion. Ni l’un ni l’autre n’était en faveur de l’élimination des amendements au projet de loi C-68. Au contraire, l’un d’eux les appuyait sans réserve. Je vais en parler dans un moment.
M. Bates a indiqué avoir envoyé une note à la greffière du Comité sénatorial des pêches, ce qu’il a fait. Il dit ceci :
Il est difficile pour moi de prendre cette mesure, mais, vu la pression exercée par le personnel du ministère des Pêches et des Océans, ce n’était peut-être pas si difficile que cela.
Le gouvernement prétend que la création de réserves d’habitats par des tiers va au-delà de l’objectif du projet de loi. Chers collègues, il faut déterminer si un tiers devrait être autorisé à établir des réserves d’habitats. À l’heure actuelle, des réserves d’habitats peuvent être établies, mais la question est de savoir si un tiers devrait être en mesure de le faire. Nous nous trouvons dans une situation où une entreprise forestière ou minière qui exerce une activité pouvant avoir un effet néfaste sur l’environnement doit maintenant prendre des mesures d’atténuation. Chers collègues, cela a évidemment toujours été une exigence. Cependant, il s’agit d’un travail supplémentaire que les groupes de défense des terres humides, les Premières Nations et les groupes communautaires pourraient faire dans d’autres parties de la zone de service.
Chers collègues, si une pratique exemplaire internationale qui jouit d’un vaste appui de la part des intervenants, comme la création de réserves d’habitats par des tiers, et qui s’est révélée pouvoir améliorer les retombées économiques et écologiques est incompatible avec l’objectif du projet de loi, il faut se poser la question suivante : quel est l’objectif du projet de loi?
L’objectif du projet de loi ne devrait-il pas être d’élaborer la meilleure solution possible pour protéger l’environnement et appuyer l’industrie?
Malheureusement, il semble que l’objectif du gouvernement soit d’accepter une demi-solution inefficace qui est, bien franchement, limitative et à courte vue. La création de réserves d’habitats par des tiers est le présent et l’avenir de la conservation du poisson et de son habitat.
Nous parlons du projet de loi C-68, qui porte sur le poisson et son habitat, mais la protection des terres humides aide aussi les oiseaux et les autres animaux.
Avec le projet de loi C-68, le Canada avait l’occasion de continuer à suivre la tendance mondiale, mais, maintenant, le Canada accusera encore un retard.
Comme je l’ai dit la semaine dernière lors de mon témoignage devant le Comité permanent des pêches et des océans de la Chambre des communes, la Loi sur les pêches est l’une des plus anciennes mesures législatives du Canada : elle est entrée en vigueur immédiatement après la Confédération. Lorsqu’on modifie cette loi, le processus est long, comme nous l’avons constaté avec le projet de loi C-68. Selon moi, nous reconnaissons et comprenons tous qu’il est complexe d’établir un régime efficace de création de réserves d’habitats par des tiers au Canada. Toutefois, cette complexité n’est pas de nature législative. Elle est de nature réglementaire.
Les amendements au projet de loi C-68 concernant la création de réserves d’habitats par des tiers et les paiements compensatoires étaient des amendements habilitants. Ils ne seraient entrés en vigueur que par proclamation du Cabinet, et non au moment de la sanction royale.
Le ministère des Pêches et des Océans et tout organisme concerné auraient eu amplement le temps de tenir de vastes consultations et de mettre en place un régime de réglementation solide. Comme Marian Weber, l’une des témoins dont j’ai parlé qui est professeure adjointe à l’Université de l’Alberta, l’a dit devant le comité de la Chambre :
La mise en place de compensations par des tiers est un élément essentiel de la réussite d’un programme de compensation. Ne pas intégrer cet aspect dans le projet de loi C-68 pourrait entraver le développement de l’infrastructure administrative nécessaire à la mise en place d’un programme de compensation crédible et efficace pendant plusieurs années.
Chers collègues, comme c’est souvent le cas, les détails se trouvent dans les règlements. Nous comprenons que la mise en œuvre d’un cadre de création de réserves d’habitats par des tiers comporte des complexités, mais ce n’est pas parce qu’il est complexe de faire quelque chose qu’on ne devrait pas le faire. Nous adoptons tout le temps des lois complexes.
Le président de l’Ontario Waterpower Association, Paul Norris, a déclaré ceci devant le comité :
L’Ontario Waterpower Association reconnaît pleinement l’important travail lié aux règlements et aux politiques, qui est nécessaire à la mise en place de réserves d’habitats par des tiers et, à notre avis, les efforts en valent la peine.
Honorables sénateurs, rappelez-vous que j’ai dit que le cadre n’entrerait pas en vigueur à la sanction royale. Il entrerait en vigueur à la discrétion du Cabinet, et ce pourrait être, de toute évidence, un nouveau Cabinet après que le travail préparatoire aura été fait.
Le fait est, honorables collègues, qu’il ne s’agit pas d’un nouveau système. Il s’agit d’un système qui est utilisé efficacement par de nombreux pays dans le monde.
Comme l’a fait remarquer David Poulton, directeur de Poulton Environmental Strategies, au Comité des pêches et des océans de la Chambre des communes, il est assez simple d’adopter des lois en Australie, aux États-Unis et ailleurs. Les systèmes de réserves d’habitats actuels sont conçus au moyen de règlements, ce qui comprend de vastes consultations, notamment auprès des collectivités, des groupes environnementaux et des Premières Nations.
Honorables collègues, malgré mon témoignage devant le Comité des pêches et des océans de la Chambre des communes et celui des autres témoins, le gouvernement n’était pas disposé à reconsidérer sa position au sujet de l’établissement de réserves d’habitats par des tiers et du régime de paiements compensatoires correspondant. Les demandes des Premières Nations, des groupes environnementaux et des collectivités ne l’ont pas non plus convaincu.
Chers collègues, lorsque j’ai répondu aux questions posées au comité de la Chambre, tous les députés qui siégeaient lorsque j’ai donné mes réponses et lorsque MM. Poulton et Weber ont donné les leurs ont hoché de la tête. Ils reconnaissaient que c’était une bonne idée.
De la même façon, le gouvernement n’était pas disposé à reconsidérer l’amendement du Sénat visant à garder les avantages des réserves d’habitats soit « aussi proches que possible », soit « dans la même province » en tant que travail, entreprise ou activité. Cet amendement aurait conservé le caractère local des avantages associés aux réserves d’habitats dans un système régi par les promoteurs ou par des tiers.
Au lieu de cela, le gouvernement a choisi de laisser ouverte la possibilité qu’un projet forestier ou minier, implanté par exemple à proximité de St. John’s, à Terre-Neuve-et-Labrador, puisse être compensé par une réserve d’habitat créée par un promoteur à Victoria. Vous voyez à quel point ce n’est pas logique. Chers collègues, c’est carrément injuste et contraire aux pratiques équitables et au bon sens.
Honorables sénateurs, je suis déçu par la décision du gouvernement d’annuler ces amendements raisonnables et largement appuyés.
Si c’était l’occasion idéale de s’attacher à une bonne idée, j’espère que nous pourrons revisiter la question à l’occasion d’une prochaine législature et avant que le Canada ne prenne trop de retard.
Pour conclure, je tiens à remercier à nouveau la sénatrice Griffin et le sénateur Christmas pour le leadership dont ils ont fait preuve sur ces questions et je tiens à remercier tous les sénateurs d’avoir accepté les amendements sur les réserves d’habitats adoptées par le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans.
Lorsqu’un futur gouvernement proposera un régime solide de création de réserves d’habitats par un tiers et qui aboutira à des résultats écologiques et économiques optimaux pour la région, nous pourrons tous nous rappeler avec fierté de la position avant-gardiste du Sénat et de sa volonté de remettre en question des demi-mesures alors que des solutions complètes étaient disponibles.
Merci, chers collègues. Je me réjouis à la perspective de réétudier cette question dans une prochaine législature.
J’ai une question pour le sénateur Wells s’il le veut bien.
Certainement.
Merci, sénateur Wells. Je comprends parfaitement que vos amendements et aussi l’un des miens, comme l’a mentionné le sénateur Harder, n’ont pas été acceptés à la Chambre des communes. Je voulais simplement que vous m’aidiez à comprendre.
L’association minière de la Saskatchewan, Cameco et de nombreux groupes nous ont recommandé de le mentionner publiquement ici et de présenter l’amendement.
Question que cela figure dans le compte rendu, lorsque nous parlons d’eau où vivent des poissons et de la définition d’habitat du poisson, pouvez-vous nous expliquer quels seront les résultats du rejet de l’amendement pour les associations minières et pour les agriculteurs de tout le pays?
Je vous remercie, sénatrice Poirier. Il n’était pas directement question, dans les amendements concernant la réserve d’habitats, des eaux où vivent des poissons. Cela dit, je trouve très préoccupant de savoir que, selon l’amendement qui permettait un débit d’eau dans les champs d’agriculture à certains moments de l’année, ces eaux seraient considérées comme un habitat du poisson. S’il fallait considérer comme une réserve d’habitats les débits d’eau qui se produisent rarement et de façon fortuite, cela représenterait des complications importantes pour les agriculteurs des Prairies et d’autres régions.
Sénatrice Poirier, j’aimerais revenir à la partie de votre question qui porte sur les autres groupes ayant présenté leur point de vue. Je sais que Serge Buy, PDG de l’Association canadienne des traversiers, appuyait fermement les amendements concernant l’établissement de réserves d’habitats par des tiers. Il a dit : « Nous sommes une association de traversiers. Nous sommes promoteurs, certes, mais nous ne sommes pas experts en restauration d’habitats ni en atténuation des risques. »
L’association était tout à fait prête à participer à l’atténuation des risques, à la restauration et à un système d’établissement de réserves d’habitats par des tiers en autant qu’elle puisse avoir l’appui d’un groupe des Premières Nations expert en réaménagement écologique. Des groupes comme les fédérations du saumon seraient aussi intéressés. Je sais qu’à Terre-Neuve-et-Labrador, deux ou trois fédérations du saumon se joindraient à ce système avec plaisir. Ce système intéresserait aussi des groupes communautaires et des groupes dédiés aux terres humides et à l’environnement. Par ailleurs, l’organisme Canards illimités aimerait beaucoup participer à une telle entreprise. Malheureusement, chers collègues, cet organisme est exclu des travaux de protection et d’assainissement de l’environnement.
Si ma mémoire est bonne, des préoccupations ont été soulevées au comité à propos des habitats dans certains débits d’eau, plus précisément ceux situés dans des exploitations agricoles et dans des mares-réservoirs servant à nourrir les animaux. Est-ce que vous vous rappelez si l’un des témoins nous a dit avoir déjà trouvé des poissons dans ce genre de mare-abreuvoir?
Oui. Des agriculteurs nous ont raconté que, de temps à autre, très rarement, des poissons habitent dans des petites zones inondées temporaires situées dans des endroits où ils mènent leurs activités agricoles.
Bien sûr, tous les Canadiens savent que, à certaines périodes de l’année, il y a d’importantes inondations dans des lieux où les poissons n’habitent pas normalement, ce qui entraîne l’apparition de zones d’eau temporaires. La présence de ces zones d’eau empiète sur les activités normales des agriculteurs, mais pas nécessairement sur le réseau hydrographique ou le plan d’eau courant. Cela inquiète grandement les agriculteurs.
Sénatrice Griffin, souhaitez-vous poser une question?
Oui.
Sénateur Wells, votre temps de parole est écoulé. Demandez-vous cinq minutes de plus?
Je demande cinq minutes de plus.
Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?
Merci, Votre Honneur.
Ma question porte sur la création de réserves d’habitats par des tiers. Comme vous, j’estimais que l’idée était excellente et je l’ai appuyée.
Les notes que vous avez lues sont assez intéressantes. Avez-vous plus de détails sur ce qu’on a voulu dire en indiquant que le fait d’exercer des pressions pourrait avoir une incidence sur d’autres activités ou initiatives que la Fédération canadienne de la faune menait avec le ministère des Pêches et des Océans?
Lorsque je me suis entretenue avec M. Bates, de la Fédération canadienne de la faune, il était évident que le partenariat serait mis en péril.
J’ai deux questions pour vous. La première : avez-vous parlé à M. Bates et obtenu la même information? La deuxième : pendant toutes les années où vous avez travaillé au ministère des Pêches et des Océans, vous êtes-vous déjà trouvé face à une situation de ce genre, un cas où une ONG ou un partenariat était menacé de cette façon?
Non seulement j’ai travaillé de nombreuses années au ministère des Pêches et des Océans, mais je suis aussi actif au sein de l’industrie des pêches depuis les années 1970. J’ai déjà été témoin de coercition. Je cite le courriel de M. Bates, car cela pourrait être utile.
[...] si nos amendements sont adoptés au Sénat, ils seront débattus à la Chambre. Durant ce débat, le gouvernement devra critiquer les réserves d’habitats établies par des tiers à un tel point qu’il est peu probable qu’on les envisage de nouveau sous l’actuel gouvernement [...]
Il semble qu’ils soient d’accord avec les réserves d’habitats établies par des tiers. Ils ne veulent pas les critiquer, mais, que ce soit le cabinet du ministre ou les fonctionnaires du ministère des Pêches et des Océans qui s’y opposent, ils veulent simplement s’en débarrasser en douce.
Au comité, nous avons appris qu’il n’y avait que des fonctionnaires du ministère des Pêches et des Océans dans la salle, et ils ont dit: « Nous n’avons jamais fait cela auparavant. Cela exige beaucoup de travail. »
Pour répondre à votre question, le courriel indique ceci :
Je crains aussi que cette situation ait une incidence sur d’autres initiatives que nous réalisons actuellement avec le ministère des Pêches et des Océans.
Selon moi, sénatrice Griffin, il y a là une menace implicite. Si c’est le cas, je trouve très inquiétant que des fonctionnaires du ministère menacent ouvertement ou implicitement la Fédération canadienne de la faune et que cela pousse le gouvernement à abandonner ce qui est de toute évidence une bonne idée appuyée par de nombreux groupes.
C’est le seul échange que j’ai eu avec M. Bates, à la suite de son exposé détaillé et positif sur l’établissement de réserves d’habitats par des tiers, qui m’a convaincu d’appuyer cette cause, d’élaborer des amendements et de les proposer, avec succès, au comité et au Sénat. Je suis très préoccupé du sort de ces amendements et du fait que la décision ne soit pas fondée sur le mérite.
Le sénateur Wells accepterait-il de répondre à une question?
Oui, si j’ai le temps.
Vous avez deux minutes.
Sénateur Wells, pour quelles raisons croyez-vous que le gouvernement a rejeté ces amendements concernant l’établissement de réserves d’habitats par des tiers? Est-ce simplement parce que c’était trop compliqué pour le gouvernement? N’a-t-il pas pris en considération les difficultés financières et les coûts pour l’industrie, plus particulièrement au Canada atlantique? Pouvez-vous expliquer quelles seraient les conséquences directes pour le Canada atlantique?
Merci de votre question, sénateur Housakos. Je ne peux émettre aucune hypothèse sur ce qui a motivé cette décision. Je peux seulement parler de ce que les fonctionnaires du ministère des Pêches et des Océans ont dit lors d’une rencontre récente pendant laquelle nous avons discuté de l’établissement de réserves d’habitats par des tiers. Ils ont dit qu’ils n’avaient jamais fait cela auparavant. Or, comme je l’ai dit pendant mon intervention, on le fait déjà ailleurs dans le monde. L’idée n’est pas nouvelle. C’est une méthode connue et éprouvée qui fait partie des pratiques exemplaires adoptées ailleurs.
Pour ce qui est de votre question à propos des conséquences pour le Canada atlantique, les effets se feront naturellement ressentir partout au pays. Cependant, au Canada atlantique et dans les petites collectivités rurales, où les possibilités sont limitées, les groupes communautaires et les groupes qui se soucient de l’environnement et qui veulent participer à un système d’établissement de réserves d’habitats par des tiers n’auront plus cette possibilité. Ce sera fait par des sociétés minières et forestières qui n’ont aucune expérience dans le domaine.
Honorables sénateurs, je prends la parole au sujet du message de l’autre endroit relatif au projet de loi C-68.
Le projet de loi C-68, Loi modifiant la Loi sur les pêches et d’autres lois en conséquence, est une mesure législative importante. Pour commencer, je tiens à remercier une fois de plus le comité de tout le travail qu’il a fait à l’égard de ce projet de loi, ainsi que de tout le temps et de tous les efforts qu’il y a consacrés.
Comme d’autres l’ont indiqué, la Loi sur les pêches est l’une des premières mesures législatives que le Canada a adoptées il y a près de 150 ans. De nombreuses discussions ont eu lieu au fil des ans dans le but d’y apporter des modifications et de l’améliorer à mesure que les temps changeaient. Comme nous le savons tous, ce qui était en place il y a 150 ans ne l’est plus nécessairement aujourd’hui, les pêches ont évolué et la manière dont les lois sont utilisées est bien différente. Les amendements proposés par le Sénat étaient une excellente tentative d’améliorer le projet de loi et en auront valu la peine, pour la plupart.
Dans le cadre de l’étude article par article du projet de loi C-68, le Comité permanent des pêches et des océans a examiné 50 amendements et en a adopté 35. La plupart des amendements adoptés ont été présentés par le gouvernement lui-même. Lorsque le Sénat a renvoyé le projet de loi à la Chambre des communes, il a proposé 15 amendements.
J’ai été plutôt surpris que les 10 amendements du sénateur Harder soient acceptés par la Chambre des communes. Nous ne nous attendions pas à ce que l’ensemble des amendements du sénateur Harder soient acceptés à l’autre endroit. J’imagine qu’il y entretient quelques excellents contacts. Tous les amendements qu’il propose à la plupart des projets de loi sont en général acceptés. Je le remercie des 10 amendements qu’il a présentés pour le projet de loi C-68 et je le félicite d’avoir obtenu ces modifications.
Le sénateur Harder a notamment présenté des amendements au projet de loi S-238, Loi interdisant l’importation et l’exportation de nageoires de requin, et au projet de loi S-203, Loi visant à mettre fin à la captivité des baleines et des dauphins. Les amendements du sénateur Christmas à propos de la reconnaissance des droits des peuples autochtones, qui sont confirmés par l’article 35 de la Loi constitutionnelle, ont également été acceptés. Je tiens à remercier le sénateur Christmas de son apport exceptionnel, comme toujours, au comité.
L’autre endroit a également accepté l’amendement de la sénatrice Poirier à propos du débit d’eau en amont d’une installation, qui consistait à supprimer les mots « en amont et ». Cela dit, honorables sénateurs, l’amendement de la sénatrice Poirier qui supprimait les mots « Les eaux où vit le poisson » de la définition d’habitat a malheureusement été rejeté par l’autre endroit.
Le Comité permanent des pêches et des océans a entendu des témoins dire que l’inclusion des « eaux où vit le poisson » dans la définition d’habitat pourrait faire en sorte que des endroits qui ne sont pas essentiels au processus du cycle de vie des pêches deviennent assujettis à la loi.
Selon les intervenants que nous avons entendus, comme l’association minière de la Saskatchewan, l’ajout proposé de l’expression « eaux où vit le poisson » à la définition d’habitat élargit grandement et inutilement la portée de la loi. Les témoins ont dit au comité que, comme dans le cas de l’expression « débit d’eau », cet ajout mettrait davantage en péril des années de jurisprudence et de pratiques et ajouterait inutilement au fardeau administratif, opérationnel et financier de l’industrie, des municipalités et du ministère des Pêches et des Océans.
Des intervenants, dont Cameco et l’Association minière de la Saskatchewan, ont recommandé que le projet de loi C-68 soit amendé au paragraphe 1(5) afin de retirer l’ajout de l’expression « eaux où vit le poisson » dans la définition d’habitat. Plus précisément, Cameco a suggéré ceci au Sénat :
Amender le paragraphe 1(5) du projet de loi C-68 afin d’y supprimer l’ajout de l’expression « les eaux où vit le poisson » de la définition d’« habitat » et de conserver la définition actuelle figurant au paragraphe 2(1) de la Loi.
Le mémoire présenté au comité par Cameco ajoute ceci :
[...] Ainsi, seront considérées comme des habitats les zones ne contenant de l’eau que pendant une courte période de temps.
À titre d’exemple, tout ouvrage ou entreprise exploité, ou toute activité exercée dans une zone ne contenant de l’eau que pendant quelques jours toutes les quelques années pourrait être visé par les exigences de la Loi. Le poisson peut certes fréquenter une telle zone pendant une courte période de temps une fois tous les cinq ans, mais cet habitat n’est pas essentiel aux processus liés au cycle de vie.
La Canadian Cattlemen’s Association a aussi dit que c’était un point qui la préoccupait. Cet amendement a été accepté par le comité permanent des pêches et des océans et adopté ici. C’est dommage que le gouvernement ait choisi de ne pas accepter cet amendement, qui simplifierait le processus de réglementation de l’industrie tout en protégeant l’environnement. Je crois que d’autres personnes ont abordé ce sujet-là aujourd’hui.
Le sénateur Wells a parlé de l’amendement sur la création de réserves d’habitats par des tiers, aussi rejeté par la Chambre des communes. Le sénateur Wells a présenté l’amendement sur la création de réserves d’habitats par des tiers et l’a bien défendu au comité, qui l’a adopté. Cet amendement a été renvoyé au Sénat, qui l’a adopté. Le comité, comme le Sénat, a appuyé l’amendement. Celui-ci a été transmis à la Chambre, qui l’a rejeté.
Avant cet amendement, seuls les promoteurs pouvaient compenser les effets néfastes sur le poisson et l’habitat du poisson. Avec cet amendement, des tiers importants, comme des groupes écologistes et des groupes autochtones, auraient pu compenser les effets néfastes. Je ne vais pas répéter ce qu’a expliqué le sénateur Wells il y a un instant à propos de la possibilité de compenser la création de réserves d’habitats.
Je pense que l’amendement avait beaucoup de bon sens, parce qu’il permettait aux intervenants qui connaissent bien la conservation et qui se spécialisent dans ce domaine d’être à l’avant-plan de la restauration de l’habitat. En fin de compte, cela apporterait une protection supplémentaire de la biodiversité. Il s’agit de l’un des trois amendements portant sur la proposition de régime de réserve d’habitats, acceptés par le comité et appuyés, notamment, par les sénateurs Christmas et Griffin. Je les remercie de leur soutien à l’égard de cet amendement.
Le deuxième amendement portant sur cette question concerne les paiements compensatoires, qui permettraient au ministère des Pêches et des Océans de percevoir un paiement tenant lieu de compensation en remplacement d’une réserve d’habitats.
Le troisième amendement, qui porte sur la création de réserves d’habitats par des tiers, établit que, en principe, les avantages liés à une réserve devraient être le plus près possible de l’endroit où l’exercice de l’activité se trouve et, si cela n’est pas réalisable, ils devraient au moins demeurer dans la même province.
L’amendement du sénateur Wells sur les réserves d’habitats établies par des tiers permet d’atteindre l’équilibre nécessaire entre la protection des populations locales de poissons et les intérêts de l’industrie, et il accorde une marge de manœuvre au ministre. L’amendement avait été présenté au sénateur Wells par la Fédération canadienne de la faune. Je suis moi aussi quelque peu déçu de constater que, en fin de compte, la Fédération canadienne de la faune a retiré son appui aux amendements alors que beaucoup de travail et d’efforts ont été consacrés aux réunions avec la fédération pour élaborer les amendements à présenter au comité, et que le sénateur Wells et d’autres sénateurs ont déployé tant d’efforts pour expliquer les amendements au comité et pour obtenir l’appui du comité et du Sénat.
Nous savons tous que, pour presque tous les projets de loi à l’étude au Sénat, nous rencontrons divers groupes d’intérêts et personnes intéressés. Après avoir pris en considération leurs préoccupations, nous décidons d’appuyer ou non leurs efforts et ce qu’ils nous demandent de faire par rapport au projet de loi. Par la suite, nous proposons des amendements à étudier en comité afin de répondre à leurs préoccupations. Dans le cas qui nous occupe, le comité a pris très au sérieux la proposition concernant l’établissement de réserves d’habitats par des tiers et toutes les autres préoccupations soulevées par les intervenants, mais tout cela semble maintenant avoir été balayé du revers de la main.
Je suis préoccupé par le processus et son fonctionnement. Le temps et les efforts consacrés par le sénateur Wells et le comité à l’étude des amendements et l’appui des différentes organisations aux amendements à ce moment-là nous amènent certainement à nous interroger sur le processus.
Honorables sénateurs, je crois que le gouvernement aurait dû accepter les amendements du Sénat sur les réserves d’habitats par des tiers. Je pense qu’ils auraient grandement renforcé la nouvelle Loi sur les pêches et donné aux gens de l’industrie l’occasion de participer aux futurs processus.
À mon avis et de l’avis de nombreuses personnes, le Comité permanent des pêches et des océans a fait un travail réfléchi et diligent sur ce projet de loi. Il a consacré beaucoup de temps au projet de loi. Nous avons entendu de nombreux témoins d’un bout à l’autre du pays, des gens qui interviennent directement dans l’industrie des pêches. Comme vous l’avez mentionné, les associations minières et les associations de capitaines nous ont parlé de la Loi sur les pêches. Certaines personnes se demandent peut-être pourquoi les associations de capitaines communiquent avec nous lorsque nous étudions la Loi sur les pêches. En réalité, certaines parties du projet de loi ont eu des répercussions importantes sur les agriculteurs et les mineurs au pays. La Loi sur les pêches s’applique à beaucoup d’autres industries dont les Canadiens tirent leur subsistance, et nous avons pris l’occasion d’entendre ces organismes très au sérieux.
Je suis heureux que certains sénateurs aient joui d’un appui modeste, mais je croyais que nous avions présenté des amendements au projet de loi qui étaient solides et qui auraient beaucoup amélioré ce dernier. Je suis donc un peu déçu à cet égard.
J’aimerais conclure en disant que je crois que le comité a fait de l’excellent travail dans le cadre de ce projet de loi. Nous avons été très patients pendant la comparution des témoins d’un bout à l’autre du pays. Je tiens à remercier le sénateur Gold de sa collaboration en tant que vice-président du comité. Nous avons collaboré à l’étude de ce projet de loi et d’autres projets de loi comme le projet de loi C-55 et d’autres sur lesquels nous avons travaillé au cours de la dernière année.
Je tiens à remercier tous les témoins qui se sont prononcés sur le projet de loi et qui ont présenté leurs arguments en vue d’apporter des améliorations à celui-ci et de nous proposer des amendements. Comme je l’ai dit dans mes observations préliminaires, il y avait beaucoup de choses à dire. Cette loi existe depuis 150 ans. Nous n’avons pas souvent l’occasion de présenter des recommandations et d’apporter des modifications à la Loi sur les pêches. C’était une excellente occasion de le faire. Il ne fait aucun doute que nous avons fait de grands pas dans la bonne direction, mais je pense que nous n’avons pas réussi à certains égards.
Je remercie le personnel et tous ceux qui ont participé à l’étude du projet de loi C-68. J’espère que nous aurons l’occasion d’apporter des améliorations à un projet de loi très important et, à mon avis, à une industrie très, très importante au Canada, soit les pêches. J’espère que nous aurons l’occasion d’apporter d’autres améliorations au fil du temps. Merci, Votre Honneur.
Je me demande si le sénateur Manning accepterait de répondre à une question.
Oui.
Vous avez dit que les parties prenantes, dont Cameco et l’association minière de la Saskatchewan, avaient recommandé que le projet de loi C-68 soit amendé. On en a déjà beaucoup parlé; il s’agissait de retirer la phrase « eaux où vit le poisson » de la définition d’habitat. En effet, l’ajout de cette phrase dans la définition fait en sorte que des endroits qui ne sont pas essentiels au cycle de vie des poissons sont couverts par la loi.
Quelqu’un vous a-t-il dit pourquoi le gouvernement voulait rejeter cet amendement?
Non, jusqu’à aujourd’hui le sénateur Harder avait mentionné dans ses discours certaines des préoccupations soulevées par rapport au processus de consultation à mettre en place. Les membres du comité n’ont pas été mis au courant à ce moment-là. En fait, plusieurs fonctionnaires du ministère ont comparu devant le comité à l’étape des amendements. Plusieurs des amendements proposés par nous-mêmes et d’autres ont été présentés. À maintes reprises, le sénateur Gold a demandé aux fonctionnaires ce qu’ils pensaient de l’amendement dont nous étions saisis. Nous avions toujours une opinion franche de leur part, que nous soyons ou non d’accord avec elle. Rien ne laissait entendre qu’il y avait des réserves à l’étape du comité.
En fait, la plupart d’entre nous au comité avaient le sentiment qu’il s’agissait de solides amendements qui créeraient des circonstances favorables pour les réserves d’habitats et les eaux où vit le poisson, et qui permettraient de rassurer les gens. À ce moment-là, aucun fonctionnaire n’avait manifesté de préoccupation particulière. Je pense que c’est après coup, lorsque nous avons terminé les travaux au Sénat et que nous avons renvoyé les amendements à la Chambre pour examen, que ces préoccupations ont été soulevées. Nous n’en avions eu aucune indication auparavant.
J’ai une autre question à vous poser, sénateur Manning. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce que vous avez entendu de la part des groupements agricoles au comité? Étaient-ils plutôt contents de ce qui s’était passé? Il me semble que le gouvernement a encore beaucoup de pain sur la planche pour satisfaire aux besoins des agriculteurs des provinces des Prairies, ainsi que des autres régions du Canada. Avez-vous entendu des témoignages de groupements agricoles? Sont-ils satisfaits de ce qui nous a été présenté?
Merci, sénateur. En ce qui a trait à l’agriculture, je sais que celle-ci est répandue partout au pays, notamment dans l’Ouest. Croyez-le ou non, il y a aussi des exploitations agricoles à Terre-Neuve-et-Labrador. Elles ne sont peut-être pas aussi grandes et aussi productives que celles de l’Ouest canadien ou du centre du Canada, mais nous avons tout de même des agriculteurs à Terre-Neuve. Les gens n’y sont pas tous des pêcheurs. Tout ce que je veux dire, c’est que les préoccupations sont bien réelles, pour la simple raison que souvent, les agriculteurs doivent créer des réservoirs d’eau sur leurs terres.
Je suis désolé, sénateur Manning, mais votre temps de parole est écoulé. Demandez-vous cinq minutes de plus? Je sais qu’il y a au moins une autre question pour vous.
Pourquoi pas?
Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?
Oui, cinq minutes.
Avant d’être interrompu, je disais que, le problème, c’est que plusieurs agriculteurs doivent créer des plans d’eau sur leurs terres. Lorsqu’il y a des périodes de sécheresse, comme c’est le cas actuellement dans certaines régions du pays, les agriculteurs doivent trouver d’autres sources d’eau et créer leurs propres sources. Ces plans d’eau peuvent durer, selon le cas, quelques semaines, quelques mois ou un an.
La préoccupation qui a été soulevée, notamment pendant le processus en cours, c’est que si un poisson aboutit dans un plan d’eau créé par un agriculteur, ce plan d’eau sera assujetti à la loi, ce qui posera problème. Des agriculteurs nous ont fait part de leurs inquiétudes à propos de cet aspect de la mesure législative. Ils veulent avoir une certaine protection quant à la façon de composer avec les eaux présentes sur leurs terres qui nécessiteraient la création d’un habitat. Comme vous le savez, Votre Honneur, les poissons nagent. Je ne sais toutefois pas avec certitude s’ils nagent d’une ferme à l’autre. Il leur faudrait de l’eau pour le faire, j’imagine. Personne ne peut nager dans l’air, à ma connaissance. Bref, il faudrait trouver une façon de répondre aux préoccupations des agriculteurs et de toutes les industries, y compris le secteur minier et l’industrie de la pêche.
À mon avis, le projet de loi C-68 tient compte d’un grand nombre de préoccupations provenant de nombreuses industries au pays, mais il ne tient pas compte de tout. J’espère simplement qu’un jour je vais être en mesure d’envoyer des amendements à la Chambre des communes et qu’ils recevront, à la Chambre, le même accueil que reçoivent les amendements du sénateur Harder, à l’heure actuelle. Je pense que ce serait un grand pas en avant, et ce, non seulement pour l’industrie de la pêche, mais aussi pour l’industrie minière, l’industrie agricole et toutes les industries d’ici. Je pense que nous pourrions faire avancer tous les projets de loi qui nous sont soumis. À l’heure actuelle, ils n’acceptent pas nos amendements. Nous comprenons parfaitement le processus. Cela fait plus de 25 ans que je fais de la politique. Sans doute, mes cheveux gris commencent à paraître, mais, Votre Honneur, je crois que nous faisons de notre mieux.
Il vous reste deux minutes, sénateur Manning.
Il est maintenant 18 heures. Conformément à l’article 3-3(1) du Règlement, je dois quitter le fauteuil et suspendre la séance jusqu’à 20 heures, à moins que nous consentions à ne pas tenir compte de l’heure. Est-ce d’accord, honorables sénateurs?
J’ai entendu un « non ». La séance est suspendue jusqu’à 20 heures.