La Loi sur la santé et la sécurité dans la zone extracôtière
Projet de loi modificatif--Deuxième lecture--Ajournement du débat
3 décembre 2020
Propose que le projet de loi S-3, Loi modifiant la Loi sur la santé et la sécurité dans la zone extracôtière, soit lu pour la deuxième fois.
— Honorables sénateurs, je suis heureux de prendre la parole à titre de parrain au Sénat du projet de loi S-3, Loi modifiant la Loi sur la santé et la sécurité dans la zone extracôtière.
Chers collègues, le projet de loi porte sur deux aspects fondamentaux de l’industrie pétrolière extracôtière du Canada : la grande importance de ce secteur et de ses travailleurs pour l’économie canadienne, particulièrement dans ma province, Terre-Neuve-et-Labrador, ainsi que dans les autres provinces de l’Atlantique, de même que l’importance primordiale de la sécurité dans l’extraction de nos ressources dans les eaux glaciales de l’Atlantique Nord. Les gouvernements et les organismes de réglementation doivent continuer de faire tout en leur pouvoir pour protéger la santé et la sécurité de nos travailleurs extracôtiers.
Chers collègues, permettez-moi de prendre un instant pour rendre hommage à un Canadien remarquable qui a joué un rôle de premier plan dans la création du régime de santé et sécurité de calibre mondial découlant de ce processus législatif.
L’honorable Robert Wells, c.r., décédé il y a quelques semaines, a mené une vie extraordinaire. C’était un véritable gentleman. Boursier Rhodes diplômé d’Oxford, il a consacré toute sa vie au service de sa bien-aimée province, Terre-Neuve-et-Labrador, ainsi que de son pays. Robert Wells a été procureur de la Couronne, président national de l’Association du Barreau canadien et, pendant 22 ans, juge de la Cour suprême de Terre-Neuve-et-Labrador.
Le juge Wells tirait une grande fierté de sa famille, dont un des membres siège au sein de cette institution. Je sais que je parle pour tous les sénateurs en exprimant nos sincères condoléances à notre cher collègue, le sénateur David Wells.
Je rends hommage au regretté Robert Wells pour l’influence considérable qu’il a exercée sur la façon dont nous assurons aujourd’hui la sécurité de nos travailleurs extracôtiers. Il s’agit d’un récit qui débute par une tragédie. Le 12 mars 2009, un hélicoptère Cougar, le vol 491, qui transportait des travailleurs de St. John’s vers une plateforme de forage pétrolier extracôtier, s’est écrasé dans l’Atlantique Nord. Des 18 personnes à son bord, une seule a survécu.
Lorsque cette nouvelle dévastatrice s’est répandue, elle a déclenché des souvenirs douloureux d’une catastrophe en mer de plus grande ampleur dans ma province, le naufrage de l’Ocean Ranger en 1982, qui a fait 84 morts. Je tiens à prendre un moment pour rendre hommage aux victimes et aux familles qui ont été touchées par ces tragédies.
Après la tragédie de 2009, l’Office Canada-Terre-Neuve des hydrocarbures extracôtiers a créé la Commission d’enquête sur la sécurité des hélicoptères extracôtiers, chargée d’enquêter sur l’incident et de formuler des recommandations en matière de sécurité. Le juge Wells a été chargé de diriger l’enquête. Il a réalisé un travail extraordinaire.
La grande majorité de ses recommandations ont été intégrées au projet de loi C-5, Loi sur la santé et la sécurité dans la zone extracôtière, qui est au cœur du débat d’aujourd’hui. Grâce à la diligence du gouvernement conservateur et du parrain du projet de loi C-5 au Sénat — il s’agissait à l’époque du sénateur David Wells —, ce projet de loi a été adopté en 2014.
La Loi sur la santé et la sécurité dans la zone extracôtière a modifié les deux lois de mise en œuvre et a établi un nouveau régime de santé et de sécurité au travail dans les zones extracôtières de l’Atlantique canadien. Le régime a pour objet la prévention des accidents et des maladies liés à l’occupation d’un emploi dans le secteur de l’exploitation pétrolière extracôtière. La loi a précisé les rôles et les responsabilités en matière de santé et de sécurité du gouvernement du Canada, des deux gouvernements provinciaux et des deux organismes chargés de réglementer la prospection sous-marine et l’exploitation extracôtière, soit l’Office Canada-Terre-Neuve des hydrocarbures extracôtiers et l’Office Canada-Nouvelle-Écosse des hydrocarbures extracôtiers.
La loi a également défini en détail les tâches précises auxquelles on s’attend de la part de toutes les parties concernées : les exploitants, les employeurs, les superviseurs, les employés, les entrepreneurs et les titulaires d’intérêts.
Elle a accordé de vastes pouvoirs aux agents des offices des hydrocarbures extracôtiers dans le but d’accroître la sécurité. Elle a également établi un nouveau mécanisme d’appel pour les cas les plus graves. Dans certains cas particuliers, ce mécanisme permettrait au ministre provincial de nommer un agent spécial pour aider à résoudre un cas litigieux. La loi a donné des pouvoirs d’exécution modernes aux nouveaux agents de santé et de sécurité au travail et aux agents responsables de la sécurité des opérations existants.
Bien que la Loi sur la santé et la sécurité dans la zone extracôtière ait une large portée, elle contribue grandement à protéger la santé et la sécurité des travailleurs extracôtiers.
Le projet de loi à l’étude aujourd’hui, le projet de loi S-3, a une portée limitée et un objectif simple. Lorsque la Loi sur la santé et la sécurité dans la zone extracôtière a été promulguée, en 2014, le gouvernement a mis en place de rigoureux règlements transitoires au titre des lois de mise en œuvre pendant que l’on élaborait le règlement permanent. Ces règlements transitoires doivent arriver à échéance ce 31 décembre.
Le projet de loi S-3 vise simplement à prolonger jusqu’au 31 décembre 2022 la période où les règlements transitoires demeureront en vigueur. Cela donnera au Canada, à la Nouvelle-Écosse et à Terre-Neuve-et-Labrador le temps nécessaire pour terminer l’élaboration du nouveau règlement moderne, que l’on adaptera aux conditions de travail propres aux zones extracôtières en menant des efforts de consultation et de collaboration adéquats. Le règlement permanent en cours d’élaboration remplacera les règlements transitoires par un seul règlement complet en matière de santé et de sécurité au travail.
Vous pourriez vous demander pourquoi la conception d’un règlement permanent en matière de santé et de sécurité au travail prend autant de temps. C’est que le règlement, très complexe, comprend près de 300 pages et plus de 100 normes nationales et internationales incorporées par renvoi. Il est conçu pour respecter le cadre de gestion conjointe qui s’applique aux zones extracôtières de l’Atlantique. Le règlement doit donc être examiné et approuvé par le Canada, Terre-Neuve-et-Labrador et la Nouvelle-Écosse, un processus qui peut prendre beaucoup de temps.
Il faut tenir compte d’un certain nombre de facteurs, y compris les vastes efforts de consultation et de mobilisation auprès des intervenants, les priorités concurrentes sur le plan de la formulation, et plus récemment, les nouvelles difficultés imposées par la COVID-19.
Le ministère des Ressources naturelles a établi un échéancier détaillé avec le ministère de la Justice et les partenaires provinciaux. Nous avons bon espoir que le travail restant pourra être accompli au cours des deux années additionnelles que prévoit le projet de loi. Je suis conscient que la date d’expiration, le 31 décembre 2020, approche à grands pas.
L’article 3 du projet de loi S-3 prévoit que la prolongation des règlements transitoires s’appliquera rétroactivement au 1er janvier 2021. Cela assurera la continuité des exigences réglementaires, même si le projet de loi est adopté après la date d’expiration, en plus de fournir entretemps des assurances et une certitude fort nécessaires aux travailleurs et au personnel extracôtiers.
En 2014, le secteur extracôtier du Canada atlantique était en plein essor et contribuait à la prospérité. De nos jours, plusieurs crises l’ébranlent : la récession mondiale suscitée par la pandémie, les répercussions des guerres des prix à l’échelle mondiale et les efforts en faveur de la lutte contre les changements climatiques. Ce sont là des problèmes considérables. L’industrie a eu un impact économique profond à Terre-Neuve-et-Labrador. Ma province produit le quart du pétrole brut léger classique du Canada et 8 % de tout le pétrole brut. L’industrie maintient des milliers d’emplois et, depuis 1997, a généré plus de 22 milliards de dollars en redevances pour le gouvernement provincial. On lui doit près de 30 % du PIB de la province.
L’industrie extracôtière de l’Atlantique est assujettie à des règles environnementales strictes et elle fabrique certains des produits pétroliers qui émettent le moins d’émissions au monde. Toutefois, l’exploration et l’exploitation pétrolières extracôtières sont très complexes et risquées. Les lieux de travail sont situés à plus de 500 kilomètres des côtes et de la salle d’urgence la plus proche. Il faut d’emblée exercer une extrême vigilance pour prévenir les accidents, mais il faut également être capable de répondre à toutes les urgences susceptibles de se déclarer, étant donné que les secours pourraient mettre des heures, voire des jours à arriver, selon les conditions météorologiques.
Nous pouvons manifester notre soutien à l’industrie extracôtière et à ses travailleurs en appuyant le projet de loi S-3, qui donnera aux gouvernements du Canada, de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve-et-Labrador le temps nécessaire pour gérer les complexités techniques et la quantité phénoménale de règlements liés à la Loi sur la santé et la sécurité dans la zone extracôtière. Ce délai facilitera l’achèvement officiel du nouveau régime de santé et de sécurité au travail dans la zone extracôtière de l’Atlantique du Canada, régime qui permettra de prévenir les accidents et les blessures liés à l’emploi dans l’industrie pétrolière extracôtière.
Les grands principes du régime sont notamment : les droits des employés, dont le droit de refuser un travail dangereux sans crainte de représailles; une culture qui reconnaît des responsabilités partagées en matière de santé et de sécurité en milieu de travail; des règlements applicables de façon générale aux activités pétrolières extracôtières, notamment le transport des travailleurs; et un régime réglementaire efficace fondé sur des lois provinciales et fédérales semblables ainsi qu’une cohérence entre les administrations.
Honorables sénateurs, je crois que nous pouvons tous être fiers du rôle que nous avons joué dans l’élaboration d’un cadre de santé et de sécurité au travail contraignant qui ne comporte aucune ambiguïté attribuable à d’éventuels conflits de compétences et qui accorde la priorité bien-être des travailleurs extracôtiers. J’exhorte tous les sénateurs à appuyer le projet de loi S-3. Merci. Meegwetch.