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Règlement, procédure et droits du Parlement

Motion tendant à autoriser le comité à étudier le rôle des sénateurs non affiliés--Ajournement du débat

21 mai 2024


L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) [ + ]

Conformément au préavis donné le 1er mai 2024, propose :

Que le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement soit autorisé à examiner, afin d’en faire rapport, le rôle des sénateurs non affiliés, y compris les mécanismes visant à faciliter leur pleine contribution et participation à un Sénat modernisé;

Que le comité soumette son rapport final au plus tard le 19 décembre 2024.

L’honorable Frances Lankin [ + ]

Honorables sénateurs, je suis heureuse d’avoir l’occasion de dire quelques mots sur la motion. La présidente intérimaire vient de la lire, mais je tiens à la répéter afin que nous comprenions bien le libellé. Je ferai valoir que sa portée est très étroite. J’espère que le Sénat collectivement — l’ensemble des groupes et des caucus — sera d’avis qu’il serait judicieux de renvoyer rapidement cette motion au comité. Nous pourrons alors commencer à nous attaquer à ce que je considère comme des injustices flagrantes de longue date en ce qui concerne les droits et les privilèges des sénateurs qui choisissent de siéger comme des non affiliés, sans faire partie d’un des groupes indépendants ou du caucus de l’opposition.

Le libellé de la motion est le suivant :

Que le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement soit autorisé à examiner, afin d’en faire rapport, le rôle des sénateurs non affiliés, y compris...

J’en viens à la partie importante sur laquelle je veux insister.

... les mécanismes visant à faciliter leur pleine contribution et participation à un Sénat modernisé [...]

La motion ajoute que le comité devrait soumettre son rapport final au Sénat au plus tard le 19 décembre prochain. Nous savons tous que, selon les procédures établies, si un comité n’a pas terminé ses travaux, il peut demander au Sénat de lui donner plus de temps. Le Sénat doit alors décider si cette prolongation sera accordée. Compte tenu du temps où le Sénat siège et ne siège pas, cela nous donne une marge de manœuvre d’environ six mois.

Si je tenais à lancer cette discussion aujourd’hui, c’est entre autres parce que j’ai consacré une bonne partie des plus de huit années que j’ai passées ici à réfléchir au Règlement et à la modernisation. J’ai siégé aux comités concernés, par intermittence, pendant un certain temps. Dans les débats et les discussions en comité et dans cette enceinte, j’ai souvent entendu parler des droits des sénateurs individuels et de la nécessité de veiller à ce que le majoritarisme ne bafoue pas les droits des sénateurs individuels. Pourtant, c’est exactement ce que nous faisons de manière récurrente lorsqu’un sénateur choisit de ne pas s’associer à la façon dont nous avons décidé collectivement de nous organiser nous-mêmes, la majorité d’entre nous étant membres d’un groupe de sénateurs indépendants, du caucus de l’opposition ou du bureau du représentant du gouvernement pour mener, surveiller et gérer les délibérations du Sénat sur les projets de loi du gouvernement.

J’ai souvent entendu, parfois dans des situations où je ne comprends pas la pertinence de l’argument dans le contexte de l’opposition à la modernisation et à des modifications du Règlement, que cela bafouera en quelque sorte les droits des sénateurs individuels. Pourtant, sans le moindre doute, c’est ce que font bon nombre des procédures et certains articles du Règlement : ils bafouent les droits des sénateurs individuels.

J’ai quelques exemples. À mon arrivée au Sénat, je me souviens qu’un certain sénateur d’en face, qui était président du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration à l’époque — et il a depuis déclaré publiquement qu’il a eu tort d’agir comme il l’a fait, ce qui signifie que je ne le critique pas et que je ne fais que me souvenir —, en a passé une petite vite au comité avec de nouveaux sénateurs naïfs, non formés et non renseignés sur la façon dont les choses se déroulent ici. Au lieu de choisir de qualifier ces sénateurs individuels d’« indépendants », il a décidé de tous les qualifier de « non affiliés ». C’était intéressant à l’époque, car je ne comprenais pas très bien ce que cela signifiait par rapport au Règlement et à son application. Je pensais qu’en tant que sénatrice, j’avais droit à tous les droits et privilèges.

J’ai rapidement découvert que je n’avais pas le droit de siéger à un comité tant que je ne faisais pas partie d’un groupe — et il n’y avait qu’un duopole à ce moment-là, jusqu’à ce que nous établissions le Groupe des sénateurs indépendants. Si on examine le Règlement et les procédures, on pourrait penser que j’en avais le droit, mais je ne disposais d’aucun mécanisme pour exercer ce droit, puisque nous sommes organisés davantage en fonction des procédures que du Règlement, et nous avons privilégié le processus par lequel les groupes proposent des noms.

Un autre élément était aussi très intéressant. J’étais de ceux qui réclamaient l’instauration d’un principe de proportionnalité et qui se battaient très fort afin qu’il y ait en quelque sorte un lien entre le nombre de sièges à un comité et la provenance des sénateurs. J’y crois profondément, mais nous avons constaté très rapidement que, si nous ne faisions pas partie d’un groupe, le principe de proportionnalité ne s’appliquait pas à nous et, en tant que sénateurs non affiliés, nous ne pouvions pas siéger à un comité.

Je me souviens que le Groupe des sénateurs indépendants a tenté de régler le problème. Nous avons mis en place un processus où les sénateurs soumettaient leur candidature — et il y a encore un processus semblable en place —, mais ils donnaient leur premier choix de comité, puis leur deuxième choix et ainsi de suite. Ils n’allaient pas nécessairement obtenir un siège au comité de leur choix, mais ils allaient en obtenir un quelque part. Nous avons ouvert les comités aux sénateurs non affiliés et en avons invité quelques-uns. Je me souviens qu’à l’époque, la sénatrice Bellemare s’était jointe au bureau du représentant du gouvernement. Rien n’interdisait aux sénateurs du bureau du représentant du gouvernement de siéger à des comités, mais, quand le principe de proportionnalité a été appliqué, ces sénateurs ont eux aussi été écartés du processus.

Il n’y avait pas d’interdiction à cette époque, et la sénatrice Bellemare est venue et a participé tandis que nous inscrivions nos noms sur des papillons adhésifs que nous collions sur des tableaux, et tout ça. Nous nous sommes efforcés de faire des compromis. Nous avions l’impression que c’était la responsabilité du Groupe des sénateurs indépendants — et il y en a maintenant deux de plus, alors je ne parle pas uniquement de celui-là; c’était simplement la situation à l’époque — et nous avons tous réclamé une répartition proportionnelle.

Pour un sénateur non affilié, le seul moyen de faire partie d’un comité — ce qui devrait être un droit absolu —, compte tenu de la procédure, consiste à quémander un siège aux dirigeants de chacun des autres groupes, ce qui comprend un caucus et trois groupes. Lorsque cela répond aux besoins de ces groupes parce qu’ils ne peuvent occuper un siège et que les chiffres sont en baisse, ils accordent un siège, mais selon ce que je comprends, c’est toujours — et d’autres vont en parler — à la condition que ce siège continue d’appartenir à ce groupe. C’est en raison de la proportionnalité.

Comment s’attaquer à la proportionnalité tout en la respectant? Je pense qu’il s’agit d’un principe fondamental, mais comment assurer des sièges aux non affiliés? Je n’ai pas la réponse à cette question, mais il faut en trouver une. En toute conscience, nous ne pouvons continuer ainsi.

J’aimerais dire rapidement qu’il y a d’autres enjeux, comme la capacité de savoir exactement ce qu’il y a dans les notes du greffier. Pour le public qui nous écoute, lorsque je suis arrivée ici, les notes du greffier servaient à déterminer ce sur quoi nous allions travailler cette journée-là. Nous nous tenons mutuellement au courant des sénateurs qui prendront la parole. L’accès aux notes n’est ni libre ni transparent pour les sénateurs non affiliés. Des personnes ont essayé de s’adapter en exprimant leurs points de vue ou en manifestant leur volonté d’intervenir, mais qu’en est-il du droit d’être pris en considération au même titre que tous les autres membres d’un groupe organisé ou d’un caucus pour poser une question pendant la période des questions ou faire une déclaration?

Lorsque je siégeais à l’Assemblée législative de l’Ontario, le Président avait l’entière responsabilité de gérer l’ordre d’intervention. Nous proposions des noms, mais si un député indépendant demandait la parole — ce qui arrivait de temps à autre, habituellement quand quelqu’un avait été expulsé d’un caucus —, le Président avait le droit de la lui accorder. Il essayait de trouver un équilibre entre le nombre de questions posées et la possibilité d’en poser. Encore une fois, c’est une question de procédure, mais il faut examiner la situation et la comprendre. Comment peut-on faire en sorte que le droit de faire son travail, de représenter sa région et de faire valoir les intérêts de groupes reconnus par la Charte, de groupes en quête d’équité, de groupes régionaux et ainsi de suite soit respecté, de façon à ce que chaque sénateur ait le droit de défendre les principes en cause et de soulever les questions qui s’imposent?

Qu’en est-il du « marchandage » — un mot qui a souvent une connotation péjorative dans le monde des affaires et auquel je donne moi aussi un sens semblable — qui entoure les projets de loi d’initiative parlementaire provenant de la Chambre des communes ou les projets de loi d’intérêt public du Sénat, qui sont essentiellement des projets de loi d’initiative parlementaire? Comment un sénateur non affilié peut-il faire en sorte que le Sénat se penche sur son projet de loi quand les intérêts des divers groupes sont au cœur du marchandage sur la priorité des dossiers et la recherche d’une égalité? À titre d’exemple, depuis combien de temps la sénatrice McPhedran a-t-elle présenté son projet de loi sur l’âge de voter? Elle pourra probablement nous le dire. Elle pourra aussi nous dire depuis quand elle a présenté son projet de loi sur les accords de non-divulgation, un enjeu qui pique grandement ma curiosité et dont j’ai hâte que nous débattions. Comment soumettre ces mesures à l’examen du Sénat?

Bien sûr, faire partie d’un groupe ne garantit rien. Je pense à la sénatrice Pate, qui s’assoit directement derrière moi et dont le projet de loi est resté à l’étape du rapport pendant combien de temps déjà? Je pense qu’il a fallu huit ou neuf mois avant que le Sénat finisse par s’en occuper. Ce projet de loi a été longtemps exclu des opérations de marchandage en raison d’objections au sein d’un groupe.

Ce n’est pas ainsi que nous devrions travailler. Les projets de loi méritent d’être examinés et, s’ils ne sont pas bons, le comité devrait en rejeter l’examen. Il existe un processus pour cela. Cependant, l’issue de ce processus ne doit dépendre ni du marchandage, ni de ses amis, ni des sénateurs avec qui l’on s’entend ou qui partagent notre façon de penser. Il s’agit d’un processus qui doit respecter les droits individuels des sénateurs dans la présentation des projets de loi. Il y a beaucoup de choses qui, je l’espère, seront discutées en comité, mais je pense que c’est là qu’elles doivent être discutées.

Je ne continuerai pas à parler de cette question parce que ce n’est pas ma voix qui doit être entendue, mais celle des sénateurs non affiliés et de ceux, en particulier, qui détiennent ce statut depuis longtemps, qui ont acquis de l’expérience et qui sont en mesure d’éclairer le Sénat. Je sais, d’après les discussions que j’ai eues avec la sénatrice Bellemare et les membres du comité, que si cette motion est adoptée, ces sénateurs seront invités à venir témoigner devant le comité. C’est là que le dialogue doit avoir lieu.

Les groupes indépendants qui se sont battus pour la proportionnalité doivent trouver un moyen de conserver la proportionnalité, mais peut-être pas tous les sièges qu’ils détiennent au sein de chaque comité. Comment définir un processus et un droit pour les sénateurs indépendants? Nous entendrons peut-être des suggestions à ce sujet. Si ce n’est pas le cas, je pense que les débats parfois riches qui se déroulent au Comité du Règlement pourraient apporter des réponses.

Nous sommes saisis d’une motion qui nous donne l’occasion d’entamer une discussion qui s’inscrit dans le prolongement de certaines délibérations passées. Quels sont les droits et les privilèges de tous les sénateurs indépendants? Comment devrions‑nous nous organiser compte tenu des choix que nous avons faits jusqu’à présent? J’ai des suggestions pour l’avenir à cet égard, mais ce sera pour un autre débat. Comment s’organiser sans nier les droits inhérents des sénateurs non affiliés et les principes fondamentaux d’une participation entière?

Il y a un hic dans le processus. C’est comme un changement de culture. Le Sénat évolue — très lentement, devrais-je ajouter, ce qui convient à certains tout en suscitant l’impatience chez d’autres — pour devenir une institution différente, modernisée, où la manière d’interagir se teinte de sensibilités nouvelles. Le moment est venu d’assurer qu’au fur et à mesure que nous avançons, nous reconnaissons, comprenons, faisons valoir et respectons pleinement les droits et les privilèges de tous les sénateurs, qu’ils fassent partie d’un groupe ou d’un caucus ou qu’ils siègent en tant que sénateurs non affiliés.

Sur ce, puisque je sais qu’au moins trois sénateurs non affiliés ont l’intention de prendre la parole, je vous demande d’écouter et de réfléchir. Je sais qu’on a demandé aux différents groupes de s’informer mutuellement des personnes qui ont l’intention de s’exprimer. Je demande aux gens d’écouter les sénateurs non affiliés et d’adopter cette motion à l’unanimité aussi rapidement que possible afin de la renvoyer au comité pour que le vrai travail, le dialogue et, je l’espère, les progrès puissent commencer.

Je vous remercie de m’avoir accordé votre temps. Je l’apprécie, chers collègues.

Son Honneur la Présidente [ + ]

Sénatrice Lankin, accepteriez-vous de répondre à une question?

La sénatrice Lankin [ + ]

Oui.

L’honorable Denise Batters [ + ]

Sénatrice Lankin, le groupe du gouvernement et vous avez rédigé une motion omnibus de huit pages qui visait à modifier le Règlement. Pourquoi les sénateurs non affiliés n’y étaient-ils pas mentionnés? Je présume que vous avez consulté dans une certaine mesure les leaders ou la direction des autres groupes. Avez-vous consulté des sénateurs non affiliés dans le cadre de ce processus? Si non, pourquoi?

La sénatrice Lankin [ + ]

C’est une bonne question : si non, pourquoi? En réalité, je l’ai fait. J’apprécie beaucoup votre approche, sénatrice Batters, comme nous avons échangé à quelques reprises sur le Règlement. Nous avons siégé ensemble au comité directeur, et je comprends tout à fait où vous voulez en venir.

Oui, j’ai consulté les groupes. J’ai cherché à savoir s’il y avait un consensus sur ce qui pouvait être accompli. Plus précisément, j’ai demandé à tous les leaders s’ils voulaient que je rencontre leur groupe. On m’a dit dans quels cas une telle rencontre était souhaitée et quand elle ne l’était pas, parfois parce qu’elle n’était pas nécessaire. On ne m’a jamais invitée, si je peux m’exprimer ainsi.

Son Honneur la Présidente [ + ]

Sénatrice Lankin, le temps alloué au débat est écoulé.

L’honorable Marilou McPhedran [ + ]

Honorables sénateurs, je suis heureuse d’avoir recouvré la santé après une troisième attaque de COVID, qui m’a empêchée de participer à certains débats importants tenus récemment au Sénat. Je suis reconnaissante envers la sénatrice Lankin de m’avoir prévenue que cette motion serait présentée aujourd’hui, et je remercie la sénatrice Bellemare de m’avoir invitée à discuter de ce qui, d’après mon expérience, est une discrimination bien ancrée à l’égard des sénateurs non affiliés, qui a été exacerbée par les règles adoptées durant mon absence.

Après l’annonce d’aujourd’hui, je souhaite au sénateur David Richards la bienvenue dans notre petit coin non affilié du Sénat.

La sénatrice McPhedran [ + ]

Chers collègues, vous vous souviendrez peut-être que dans le cadre du débat sur les récentes modifications au Règlement du Sénat, j’ai posé au sénateur Plett une question sur l’égalité entre tous les sénateurs. En réponse, il m’a assuré que je suis égale, et cela m’a fait penser au grand philosophe Aristote, qui n’était pas partisan de la démocratie, et qui aurait dit : « Être égal, c’est avoir les mêmes droits; être différent, c’est être traité différemment. »

En tant que sénatrice non affiliée, je suis différente de vous, sénateur Plett, et je suis traitée différemment.

Si je me fie aux conversations que j’ai eues, il semble que de nombreux sénateurs ne réalisent pas que le système de gouvernance interne complètement clos au Sénat empêche dans les faits des sénateurs d’accéder aux droits garantis par la Charte dont ils jouissent en dehors de ce système. Je reviendrai là-dessus dans des discours ultérieurs. Néanmoins, la première fois qu’un sénateur apprend cette réalité, cela peut être un choc.

Peu de temps après que la Loi constitutionnelle de 1982, qui intègre la Charte canadienne des droits et libertés, soit devenue la loi suprême du pays, la notion aristotélicienne d’égalité formelle a été rejetée par la Cour suprême du Canada. Dans l’affaire Andrews c. Law Society of British Columbia, la cour a établi un précédent en exposant la hiérarchie sous le couvert de l’égalité comme jamais auparavant, rejetant l’ancienne théorie de l’égalité formelle — si chère au sénateur Plett et à Aristote — qui, dans les mots de Catharine A. MacKinnon, estimée professeure de droit de Yale produit bien peu de véritable égalité sociale et, en fait, protège l’inégalité.

Le débat récent sur le Règlement a mis au jour ces interprétations contrastées de l’égalité. Devant le Comité du Règlement, le sénateur Tannas a expliqué ce qui suit :

[…] la motion propose une série de modifications au Règlement du Sénat visant à procurer l’égalité à tous les groupes du Sénat. Les modifications portent principalement sur des actions qui, à ce jour, sont exclusives au gouvernement et à l’opposition et les étend aux autres groupes en leur conférant des droits égaux et en leur confiant des responsabilités égales.

Mes collègues conservateurs ont soulevé des points pertinents en relation avec leurs préoccupations et avec l’argument qu’ils ont présenté en comité selon lequel la responsabilité et la fonction de l’opposition officielle nécessitent un rôle privilégié distinct de ceux d’autres groupes.

Même si j’espère pouvoir m’adresser au Comité du Règlement si la motion est adoptée, aujourd’hui, je souhaite vous parler à vous tous, honorables collègues, de l’égalité de sénateur à sénateur plutôt que de l’égalité des groupes qui confèrent un privilège uniquement aux sénateurs membres d’un caucus, une expérience très différente pour un sénateur qui est autonome et qui n’est affilié à aucun groupe.

Après plus de sept ans dans cette enceinte, j’ai perdu le compte du nombre de sénateurs et de fonctionnaires qui ont affirmé que « tous les sénateurs sont égaux. » La réalité est bien différente. Les sénateurs non affiliés sont désavantagés par les ordres sessionnels, les décisions des leaders, l’accès réduit aux ressources et l’absence de mesures de protection réservées aux groupes. Tous ces aspects diminuent la capacité des sénateurs non affiliés à exercer les mêmes droits et privilèges que les autres sénateurs. Les changements adoptés présentés par le bureau du représentant du gouvernement au Sénat renforcent les privilèges des sénateurs affiliés à un groupe, mais ils ne font rien pour améliorer l’égalité fonctionnelle entre ces derniers et les sénateurs non affiliés.

Veuillez noter, chers collègues, que le choix de siéger sans affiliation est une décision aussi politique, mûrement réfléchie et volontaire que le choix des autres sénateurs de se joindre à un caucus. Lorsque j’ai quitté mon caucus pour siéger sans affiliation, je savais que je renonçais aux avantages évidents qui découlent de l’affiliation à un groupe. J’étais assez bien préparée pour cela. Cependant, ce pour quoi je n’étais pas préparée — et ce que je ne peux pas accepter — c’est qu’en tant que sénatrice non affiliée, on s’attend à ce que j’accepte la discrimination quotidienne et à ce que je renonce, en pratique, à ma véritable égalité en tant que personne nommée à la Chambre haute. Si certains croient sincèrement que la véritable égalité entre les sénateurs est plus que de belles paroles, je dirais qu’effectivement cette motion offre une occasion importante d’accroître la transparence, la reddition de comptes et l’équité dans cette enceinte.

La sénatrice Saint-Germain, grande leader du plus grand groupe du Sénat et membre du Comité du Règlement, a dit ici même que les modifications au Règlement qui ont été proposées récemment visent à « respecter le principe de l’égalité des sénateurs » et à ce que « cette Chambre n’ait pas deux classes de sénateurs », ce qui, selon elle, est un principe fondamental de la démocratie. Je souscris entièrement à son affirmation sur l’égalité entre les sénateurs comme principe fondamental de la démocratie. Cependant, je dois dire, à regret et en tout respect, que je ne suis pas d’avis que ces modifications nous empêcheront de nous retrouver avec des sénateurs de second ordre à la Chambre rouge.

En réalité, il y a déjà différentes classes de sénateurs. En principe, tous les sénateurs sont égaux selon le Règlement. Or, la façon dont les dirigeants du Sénat appliquent les règles depuis longtemps a donné lieu à des inégalités structurelles qui subsistent encore aujourd’hui. Étant donné que les modifications apportées récemment au Règlement ne permettent pas de résoudre entièrement ce problème, cela ne peut que contribuer à accentuer les inégalités. Par conséquent, je remercie la sénatrice Lankin et le bureau du représentant du gouvernement d’avoir présenté la motion à l’étude, qui porte sur les sénateurs non affiliés. J’espère que cela nous aidera à nous pencher comme il se doit sur des mesures constructives pour moderniser le Sénat, un aspect qui, de toute évidence, n’a pas été pris en considération dans les modifications apportées récemment au Règlement.

Je ne souhaite pas revenir sur ce qui a été un débat difficile — bien que nécessaire — sur les récentes modifications du Règlement. Toutefois, pour illustrer mon propos concernant l’omission habituelle des préoccupations des sénateurs non affiliés, je crois qu’il sera utile de fournir quelques exemples concrets. Je remercie la sénatrice Lankin pour ses exemples; j’ai seulement le temps d’en citer deux.

Tout d’abord, le nouveau Règlement porte la période des déclarations à 18 minutes, sur la base de la proportionnalité actuelle des groupes sénatoriaux. Cette mesure a été saluée comme allant dans le sens d’une plus grande équité et d’une plus grande égalité. Cependant, elle m’a effacée de l’équation. Elle n’aide en rien à faire progresser l’égalité entre tous les sénateurs, car elle renforce d’autant la façon dont nous, les sénateurs non affiliés, sommes effectivement exclus et obligés, pour faire entendre nos voix dans cette enceinte, de faire appel directement à une espèce de noblesse oblige de la part des leaders de groupe qui est entièrement discrétionnaire.

Cependant, l’article 4-2(3) du Règlement du Sénat stipule simplement que « Le sénateur qui fait une déclaration ne peut prendre la parole qu’une seule fois pour une durée maximale de trois minutes. » Or, le Règlement du Sénat ne dit rien sur la distribution ou l’attribution de ces 18 minutes de temps de parole. La répartition actuelle des temps de parole entre les groupes est le résultat de décisions prises par les leaders en fonction d’une notion particulière d’efficacité et de privilège de groupe, que vous ne trouverez pas dans le Règlement.

Je remarque qu’à l’autre endroit, cela fait de nombreuses années qu’on a mis en place des dispositions afin de permettre aux députés non affiliés de faire une déclaration à chaque intervalle de quelques semaines. Un tel arrangement est modeste et proportionnel et respecte le principe d’égalité. Les leaders et les caucus du Sénat sont-ils prêts à le faire? J’espère que le Comité du Règlement examinera ces propositions équitables et sensées dans le cadre de son étude à venir. En l’absence d’une telle reconnaissance et d’une telle action, il serait peut-être plus juste que les sénateurs s’abstiennent de prononcer l’homélie sur « l’égalité des sénateurs » et s’en tiennent à l’affirmation plus précise de « l’égalité des groupes de sénateurs ».

Mon deuxième exemple est l’effacement automatique des membres non affiliés parce que le nouveau règlement part du motif selon lequel « il s’agit d’un domaine où les groupes parlementaires reconnus devraient faire partie du processus ». Le bureau du représentant du gouvernement a utilisé cet argument dans les documents d’information fournis aux sénateurs. Cet argument a été répétée pour élargir les pouvoirs et les rôles des leaders des caucus dans les sections 3-3, 9-5, 9-10, 12-3 et 12-26, par exemple. On favorise ainsi l’expansion des pouvoirs des groupes sous prétexte de servir les sénateurs, mais on ne tient pas compte du fait que les sénateurs non affiliés n’ont aucune représentation dans le processus, à moins que, je le répète, les leaders ne daignent exercer leur version de noblesse oblige.

Tandis que j’examine cette motion, je repense à une déclaration du sénateur Woo, qui répondait au cinquième rapport du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement en octobre dernier :

Il y en a [...] qui nous refuseraient la possibilité d’exercer pleinement nos droits en tant que sénateurs ne faisant pas partie du gouvernement. Ils voudraient que nous soyons des sénateurs de deuxième classe, autorisés de temps à autre à s’asseoir aux premières loges, mais uniquement avec leur consentement. On a proposé les modestes changements apportés au Règlement du Sénat et à la Loi sur le Parlement du Canada à contrecœur et avec condescendance, en se disant « noblesse oblige » [...]

Le sénateur Woo parlait de l’inégalité perçue entre les groupes et les caucus du Sénat. Cependant, chacun de ses mots s’applique également à la disparité fonctionnelle entre les sénateurs non affiliés et les sénateurs affiliés.

J’ai été encouragée par les propos percutants de certains collègues, notamment la sénatrice Batters qui s’est opposée aux récentes modifications du Règlement en partie parce qu’elles n’apportaient rien aux sénateurs non affiliés. La sénatrice Batters siège au Comité du Règlement et j’espère qu’elle y défendra les droits et privilèges des sénateurs non affiliés avec la même énergie et la même sincérité et, surtout, leur accès aux ressources nécessaires pour exercer pleinement leurs droits de sénateurs.

En conclusion, je vous demande de faire comme s’il s’agissait de vous, comme si vous aviez fait le choix délibéré et fondé sur des principes de servir sans affiliation. Demandez-vous alors quel type d’égalité vous souhaiteriez pour vous-même afin de tenir votre promesse de faire de votre mieux pour servir votre région et représenter ceux qui n’ont pas d’accès privilégié au Parlement.

En tant que sénateurs non affiliés, nous comprenons que les accords intragroupes complètent et interprètent le Règlement du Sénat de manière à en améliorer l’efficacité. Nous reconnaissons également que la proportionnalité est une réalité.

Honorables collègues, nous ne cherchons pas à obtenir des droits spéciaux, mais seulement une répartition véritablement équitable des occasions et de l’accès, afin que nous puissions remplir le serment de servir que nous avons fait. Les accords qui, délibérément ou par voie de conséquence, refusent des occasions aux sénateurs non affiliés ou, à l’inverse, limitent les occasions aux seuls membres du groupe, ne peuvent être considérés comme équitables ni comme faisant progresser l’indépendance. Il s’agit d’une égalité de forme, mais non réelle.

Le Sénat peut-il honnêtement prétendre à l’égalité entre tous les sénateurs? Est-ce le Sénat que vous souhaitez? L’adoption des nouvelles règles donne aux groupes et aux leaders des pouvoirs supplémentaires et, à bien des égards, place la nouvelle réalité des caucus multiples sur un pied d’égalité en ce qui concerne les fonctions et les responsabilités opérationnelles, mais elle laisse les sénateurs non affiliés désavantagés par rapport à leurs collègues en ce qui concerne l’accès aux services du Sénat et à l’information nécessaires au fonctionnement de leur bureau et à la préparation pour remplir leurs obligations au sein du Sénat et des comités.

Honorables sénateurs, au nom de l’équité et de l’efficacité à long terme, je vous demande d’examiner de plus près la direction que nous prenons dans cette enceinte, de vous demander si cette inégalité renforce la démocratie, et d’examiner pourquoi une Chambre perpétuellement inéquitable serait le Sénat que nous voulons aujourd’hui et pour l’avenir.

Merci. Meegwetch.

La sénatrice McPhedran accepterait-elle de répondre à une question?

Son Honneur la Présidente [ + ]

Sénateur Wells, malheureusement, le temps de parole est écoulé.

L’honorable Mary Jane McCallum [ + ]

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour participer au débat sur la motion d’initiative ministérielle no 167, qui charge le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement d’étudier, pour en faire rapport, le rôle des sénateurs non affiliés dans un Sénat modernisé.

Je vais répéter certaines choses que j’ai déjà dites, mais elles méritent d’être répétées.

Tout d’abord, soyons clairs : je ne suis pas devenue une sénatrice non affiliée uniquement par choix, mais plutôt à la suite de mon expérience au sein d’un groupe. Lorsque j’étais une sénatrice affiliée, j’ai éprouvé des problèmes que mes collègues n’ont pas rencontrés. Certaines situations, impliquant ou non un comité, ont prouvé que je ne pouvais pas rester au sein du groupe tout en étant traité de manière irrespectueuse et inéquitable.

J’ai pu me libérer de l’oppression que je subissais au sein d’un groupe, mais je subis maintenant une nouvelle forme d’oppression en tant que sénatrice non affiliée : l’oppression par omission. Il suffit d’examiner les récents changements adoptés dans la dernière série de modifications au Règlement du Sénat pour comprendre la dure bataille que notre petit collectif continue de livrer.

L’ensemble d’amendements adopté récemment n’a mentionné les sénateurs non affiliés à aucun moment. Il ne les a pas pris en compte et n’a pas servi à améliorer leur statut. Au contraire, il a servi à renforcer et à améliorer la vie de ceux qui sont déjà considérés comme les « nantis » du Sénat, c’est-à-dire ceux qui bénéficient d’un statut de groupe, avec toutes les ressources, les protections et la voix que cela leur procure. En favorisant les « nantis », le Sénat a marginalisé davantage les « démunis » et a empiré notre situation.

Je comprends que bon nombre des amendements précédents découlaient des changements apportés récemment à la Loi sur le Parlement du Canada, mais ce n’était pas le cas de tous. Je suis donc déçue qu’on n’ait pas saisi cette occasion d’améliorer la vie de tous les sénateurs — et pas seulement de ceux qui ont besoin d’équité et d’une plus grande considération — pendant que la porte était ouverte.

Honorables sénateurs, malgré l’irritation que m’a causée l’exclusion intentionnelle des sénateurs non affiliés lors de la récente série d’amendements — car c’était vraiment une occasion ratée —, je me réjouis de la rapidité avec laquelle la motion à l’étude a été présentée.

Vous êtes nombreux à savoir que la modification du Règlement du Sénat n’est pas chose courante, que les occasions d’opérer une réelle modernisation sont limitées et que cette modernisation ne peut se faire que de façon graduelle. Or, il convient de se poser la question : si nous vantons avec fierté le renouvellement et l’amélioration du Sénat qui en feraient une institution modernisée plus représentative digne du XXIe siècle, comment pouvons-nous, en toute conscience, continuer de permettre que certains sénateurs soient traités comme des sénateurs de deuxième classe?

Honorables sénateurs, quand j’ai accepté de devenir sénatrice, c’était pour porter la voix et les solutions des membres des Premières Nations avec qui j’avais travaillé depuis 40 ans. Quand je suis arrivée au Sénat, j’ai cru que, si j’informais les sénateurs du racisme institutionnel qui existe dans les communautés et qui détermine la vie des Autochtones, vous m’aideriez à apporter les changements qui s’imposent. En continuant de m’empêcher de m’exprimer, vous continuez de réduire au silence ces voix et ces communautés et de faire fi de leurs solutions. Je suis déçue de constater une telle discrimination. Ce n’est pas l’expérience à laquelle je m’attendais en arrivant ici.

J’ai demandé à être placée ici, dans le coin supérieur. Quelqu’un m’a demandé pourquoi. J’ai répondu que c’était pour que les gens constatent à quel point je suis marginalisée par les gens qui sont censés représenter les Autochtones qui n’ont pas de voix. Pensez à cela.

Procéder à une modernisation sans égalité, c’est faire preuve de complaisance. Or, la complaisance ne favorise pas la modernisation.

J’exhorte mes collègues des quatre coins de cette Chambre à réfléchir à cette réalité et au fait que, conformément au Règlement, certains sénateurs ne bénéficient pas du droit de siéger aux comités, ce qui est sans doute l’aspect le plus crucial du travail de sénateur. On ne leur accorde pas le droit de faire des déclarations de sénateurs, qui sont un élément essentiel de notre travail pour faire connaître un dossier ou souligner des événements importants et présenter des personnes remarquables. Ces sénateurs ne jouissent pas du droit de poser des questions pendant la période des questions avec un ministre, ce qui est pourtant primordial pour que les sénateurs puissent exercer leur mandat, qui consiste à demander des comptes au gouvernement. La liste est longue.

Honorables sénateurs, nous nous retrouvons à quêter des miettes dans l’espoir qu’un des groupes ou des caucus établis nous cède un siège à un comité ou un créneau pour faire une déclaration ou poser une question.

Ce qui est permis est pire que l’iniquité. Cette manière de procéder est humiliante, dégradante et déshumanisante. Vous avez décidé de siéger en tant que membre de votre groupe ou caucus actuel, mais moi, je n’ai d’autre choix que de siéger en tant que sénatrice non affiliée. J’ai pris la décision de demeurer non affiliée à ce stade-ci. Comment a-t-on pu minimiser notre importance ou nous marginaliser encore davantage en normalisant cette façon de nous considérer comme des sénateurs de second ordre? Les traditions ne peuvent justifier de traiter les autres de façon injuste.

Honorables sénateurs, cette motion nous offre une possibilité extrêmement importante qui se fait attendre depuis longtemps. Après les modifications qui ont été apportées récemment au Règlement du Sénat afin de mieux tenir compte de la composition actuelle du Sénat, il est grand temps que nous nous penchions de près et de façon responsable sur le rôle et les fonctions des sénateurs non affiliés. J’accueille favorablement cette étude. Il me tarde de voir les recommandations et les améliorations qui pourraient en découler afin que tous les sénateurs soient traités plus équitablement. J’exhorte tous mes honorables collègues à appuyer le renvoi rapide de cette question au comité.

Kinanâskomitinâwâw. Merci.

L’honorable Patrick Brazeau [ + ]

Chers collègues, étant donné que cette motion va probablement se retrouver devant le comité, on nous a demandé de nous y présenter pour aller de l’avant. Je voudrais vous adresser quelques mots sur cette motion.

Honorables sénateurs, lorsque je suis arrivé ici il y a 15 ans, il y avait cinq sénateurs non affiliés : la sénatrice McCoy, la sénatrice Cools, le sénateur Rivest, la sénatrice Dyck, qui était une sénatrice indépendante néo-démocrate à l’époque, et le sénateur Prud’homme.

J’étais un gamin qui regardait ces sénateurs non affiliés et je me disais « pauvres eux ». Je me disais « pauvres eux », car, à l’époque, il y avait deux partis. Il y avait le Parti libéral et le Parti conservateur, et quelques sénateurs indépendants, et je me disais — en tant que jeune arrivant au Sénat — « pauvres eux », parce qu’ils n’étaient pas traités sur un pied d’égalité. Ils n’avaient pas les mêmes pouvoirs que les autres sénateurs. Ils étaient peu nombreux à être présidents ou vice-présidents. Ils étaient peu nombreux à pouvoir faire des déclarations de sénateurs ou poser des questions, et ils n’avaient pas de ressources financières parce qu’ils ne faisaient pas partie d’un groupe.

Cela étant dit, je veux axer mon intervention sur la perception que nous sommes tous égaux dans cette enceinte. J’ai toujours dit que — et vous aussi j’en suis sûr —, peu importe le siège que nous occupons au Sénat, c’est un sacré bon siège, et il ne faut pas l’oublier. Cela dit, nous sommes tous égaux. Nous sommes tous égaux à partir du moment où nous sommes nommés jusqu’à ce que l’on décide de se joindre à un groupe. C’est à ce moment-là que tout change. La même chose se produit lorsqu’un sénateur décide de ne pas se joindre à un groupe, parce que, chers collègues, je vais vous le dire : on se sent parfois très seul. Depuis 2018, j’ai vu un sénateur après l’autre nommé dans cette enceinte — assis derrière moi — et j’espère pouvoir créer un jour le groupe non affilié, mais, malheureusement, il y a de meilleurs recruteurs que moi au Sénat. Il est très intéressant de voir les recruteurs des différents groupes essayer de convaincre ces personnes de se joindre à leur groupe. C’est un processus très intéressant.

Chers collègues, lorsqu’on décide de joindre ou non un groupe, c’est là que l’égalité prend fin. D’abord, avant de poursuivre, je tiens à remercier le sénateur Tannas; la sénatrice Saint-Germain; la sénatrice Cordy, qui dirige le Groupe des sénateurs indépendants; le bureau du représentant du gouvernement ainsi que le sénateur Plett et les conservateurs parce que j’ai l’impression que, la plupart du temps, on m’a permis de prendre la parole lorsque je l’ai demandé. Ce n’est toutefois pas toujours le cas. Parfois, comme ma collègue, j’ai dû quémander. Parfois, des nouvelles dans les médias donnent envie de faire une déclaration de sénateur, mais, malheureusement, lorsqu’on est non affilié, il faut non seulement aller voir les libéraux et les conservateurs, mais il y a maintenant cinq dirigeants de groupes, ce qui inclut le bureau du représentant du gouvernement. Le processus devient donc un peu plus difficile.

Je pense que nous devons garder tout cela à l’esprit parce qu’il n’est pas normal que des sénateurs doivent quémander pour avoir la possibilité de prendre la parole à propos de quelque chose. Parfois — je parle encore une fois en mon nom —, il faut attendre trois ou quatre semaines avant d’avoir l’occasion de faire une déclaration au Sénat ou de poser une question. Parfois, la question ou la déclaration n’est plus pertinente parce qu’un mois s’est écoulé, mais je ne m’en plains pas parce que je suis fier d’être ici et de travailler avec vous tous. À titre individuel, je n’ai pas besoin de me joindre à un groupe pour pouvoir travailler avec vous. Je suis non affilié. Je me considère comme une des personnes les plus chanceuses au Canada parce que je travaille avec des personnes exceptionnelles ici, peu importe qu’elles soient conservatrices, libérales, avec un « l » majuscule ou avec un « c » minuscule, cela n’a pas d’importance. Cependant, l’impression que nous sommes tous égaux n’est pas vraie.

Je ne me lancerai pas dans une discussion à propos de ce que nos prédécesseurs avaient en tête parce que nos prédécesseurs avaient en tête deux partis politiques et une institution partisane, à l’image de l’autre.

Voilà ce que les Pères de la Confédération avaient en tête. Cela ne veut pas dire que nous ne pouvons rien y changer. Au contraire, je crois que nous devons changer cela, parce qu’il y a 15 ans, les sénateurs non affiliés n’étaient pas sur un pied d’égalité avec les autres sénateurs. Ils ne le sont d’ailleurs pas plus aujourd’hui, en 2024. Si nous ne faisons rien aujourd’hui pour remédier au problème, je serai le premier à vous garantir que dans 10 ou 15 ans, il sera toujours là.

Nous avons le devoir collectif de déterminer si les sénateurs non affiliés méritent un traitement équitable. Selon le site Web du Sénat, il y a actuellement 11 sénateurs non affiliés. Évidemment, cela inclut les 3 membres du bureau de représentant du gouvernement au Sénat, ce qui, en soi, est un problème, car pour former un groupe, il faut au moins 9 sénateurs. Nous sommes 11, mais nous ne pouvons pas nous regrouper parce qu’il faut soustraire trois sénateurs de ces 11, si bien qu’il en reste 8. Par conséquent, les sénateurs non affiliés ne peuvent pas former de groupe pour l’instant.

Sénateur Richards, je vous remercie de vous joindre à nous. Nous sommes peut-être en voie de former notre propre groupe. Toutefois, même si nous n’y arrivons pas, la seule chose que je demande à tous les sénateurs, c’est de garder l’esprit ouvert quant au fait que nous ne sommes pas égaux. Je comprends que certaines personnes — peut-être les plus âgés d’entre nous — puissent être d’avis que pour être traité sur un pied d’égalité, il faut se joindre à un groupe.

Dans mon cas, je l’ai fait, et cela n’a pas si bien tourné. Je suis fier d’être là où je suis. Je suis fier de travailler avec vous tous. Toutefois, il faut prendre cette motion au sérieux et régler le problème. Nous sommes des adultes. Ici, il n’y a pas de place pour les enfantillages, même s’il y a parfois de petits jeux dignes de Passe-Partout. Réglons cette question une fois pour toutes. Merci.

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