Solutions sismiques : comment l’édifice du Centre sera prêt à résister aux séismes
En février 2019, le Sénat a déménagé à l’édifice du Sénat du Canada, une ancienne gare construite en 1912. Le Sénat occupera cet emplacement temporaire pendant que l’édifice du Centre — l’emplacement permanent du Sénat — fait l’objet de travaux de réhabilitation. Les systèmes mécaniques, électriques et thermiques de l’édifice du Centre seront mis à niveau et l’édifice centenaire sera mis aux normes actuelles en matière d’incendie, d’accessibilité, de sécurité et de protection sismique.
Bien que l’édifice du Centre soit fermé pour les travaux de réhabilitation, les Canadiens peuvent continuer d’admirer l’architecture en effectuant la visite virtuelle du Sénat.
Au cours de l’après-midi du 23 juin 2010, les résidents de la capitale nationale se sont fait brutalement rappeler qu’ils vivent dans une zone sismique active.
Le séisme de magnitude 5 — dont l’épicentre se trouvait à 60 km au nord de Val-des-Bois (Québec) — a été le plus fort jamais enregistré à Ottawa. Des employés de bureau affolés se sont précipités dans les rues; de vieilles cheminées se sont effondrées et des murs de brique se sont fissurés. Le séisme a mis en évidence le fait que les édifices patrimoniaux d’Ottawa, y compris l’édifice du Centre de la Colline du Parlement, sont vulnérables aux tremblements de terre.
La mise aux normes sismiques de l’édifice du Centre est l’un des premiers points à l’ordre des travaux du projet de réhabilitation de l’édifice du Centre, le plus grand projet de restauration du patrimoine que le pays ait connu.
Ouvert en 1920, l’édifice du Centre était une version plus vaste et plus solide de l’édifice qui l’a précédé, construit à l’époque de la Confédération et détruit par un incendie en 1916. Le nouvel édifice incorporait des composantes technologiques de pointe, comme des murs porteurs en maçonnerie composite et des renforts de structure en acier.
« C’est un édifice très solidement bâti », affirme Andrew Wisniowski, directeur de la conception et des approbations pour le projet de réhabilitation de l’édifice du Centre à Services publics et Approvisionnement Canada.
« Il est aussi très rigide. Un immeuble rigide n’a pas la capacité d’encaisser de fortes pressions latérales lorsque le sol sur lequel il repose fait des mouvements de va-et-vient. »
Services publics et Approvisionnement Canada (SPAC), qui est responsable du projet, avait deux options pour la protection sismique de l’édifice : l’approche classique — le renforcement des murs, des planchers et des fondations en étayant la maçonnerie et en y ajoutant des renforts d’acier — et l’isolation à la base, qui consiste à réduire au minimum le transfert d’énergie sismique à l’édifice.
Les isolateurs à la base agissent comme des amortisseurs géants. L’édifice repose sur des centaines de piliers, chacun surmonté d’un disque souple. Le disque, formé de composantes d’acier, de plomb et de caoutchouc, se courbe et se déforme sous l’effet des secousses sismiques, ce qui a pour effet de séparer l’édifice du sol sur lequel il repose. Pendant que le sol qui l’entoure tremble violemment, l’édifice oscille doucement.
« On dépose en fait l’édifice sur une série de disques en caoutchouc », précise M. Wisniowski. « Lorsque le sol bouge, les disques absorbent les secousses et empêchent la structure d’être secouée latéralement. »
L’isolation à la base est la dernière et la plus techniquement complexe des options en la matière, mais elle offre des avantages indéniables. Il s’agit de la technique qui offre les meilleurs résultats en cas de tremblement de terre; l’édifice reste intact, à part les dommages superficiels. De plus, l’installation est plus rapide et coûte moins cher — les économies pouvant atteindre 200 millions de dollars dans le cas de l’édifice du Centre — et le caractère patrimonial de l’édifice est beaucoup mieux préservé.
Il s’agit aussi d’une technologie éprouvée. La technique de l’isolation à la base a été mise au point en Nouvelle‑Zélande; ses édifices parlementaires (en anglais seulement) ont été parmi les premiers à incorporer cette technologie, lors de leur rénovation au début des années 1990.
Plus de 9 000 édifices au Japon — pays qui a subi certains des séismes les plus dévastateurs — sont protégés par cette technologie.
L’hôtel de ville de San Francisco (en anglais seulement), construit en 1915 et rénové à la fin des années 1990, a introduit la technologie en Amérique du Nord.
« La décision n’a pas été très difficile; vu les économies, le temps gagné et le bilan en matière de rendement, le choix de l’isolation à la base a fait consensus », avoue le sénateur Don Plett, président du Sous‑comité sénatorial sur la Vision et le Plan à long terme, qui participe à la supervision des travaux de réhabilitation de l’édifice du Centre.
Un jour, l’édifice du Centre sera en équilibre sur un système de suspension multicouche perfectionné.
« L’édifice reposera sur un solide grillage structurel fait d’acier et de béton armé », explique M. Wisniowski. « Et ce grillage reposera sur environ 560 de ces disques reliés aux fondations. »
Évidemment, si l’édifice bouge, il doit avoir l’espace nécessaire pour le faire, d’où le « fossé ».
Des équipes creuseront autour de l’édifice une tranchée qui offrira l’espace requis pour permettre à l’immeuble de bouger. Le fossé est conçu pour permettre jusqu’à 20 cm de mouvement dans toutes les directions. Une fois terminé, le fossé sera couvert de terre. L’aménagement paysager le cachera presque entièrement.
« Les services publics comme l’eau, le gaz, les eaux usées et l’électricité passeront par le fossé à l’aide de raccords flexibles », selon M. Wisniowski. « Par exemple, sur un barbecue, un tuyau flexible relie la bombonne de propane au brûleur. C’est un peu la même chose ici, à plus grande échelle. »
Une flotte d’excavatrices creuse la Colline du Parlement pour dégager les fondations de l’édifice du Centre, y compris une partie des fondations originales de l’édifice du Centre et de sa Tour Victoria, vielles de 153 ans.
Sa fondation d’origine a si bien résisté au temps que SPAC a décidé de la réparer et de l’incorporer aux nouvelles fondations.
Les deux élégants porches de l’édifice du Centre — celui du Sénat du côté est et celui de la Chambre des communes du côté ouest — seront à l’intérieur du périmètre formé par le fossé de protection sismique. Ils ont été complètement démontés avant les travaux d’excavation.
Le porche du Sénat — élégant portique en grès décoré du « S » du Sénat et de têtes de hiboux sculptées — a été retiré entre juillet et octobre. Chaque pierre a été recensée, numérotée et emballée, avant d’être entreposée.
« Lorsque les travaux de protection sismique seront terminés, l’apparence sera exactement la même, pour chaque pierre », soutient M. Wisniowski.
« Lorsque les plans des travaux de protection sismique auront été approuvés, nous sélectionnerons un fabricant qui produira les unités d’isolation à la base. Ce sera un concours mondial », ajoute M. Wisniowski. « Seules quatre ou cinq entreprises dans le monde effectuent ce genre de travaux. »
Le travail pour démonter les systèmes mécaniques, creuser jusqu’au socle rocheux, chevaler la fondation de l’édifice du Centre et installer le système d’isolation à la base pendra encore au moins quatre ans.
« Ce sera un long processus », avoue M. Wisniowski. « On ne peut pas simplement détacher l’édifice et le soulever. Il doit rester tout à fait stable pendant tout le processus. Des équipes multiples travailleront simultanément dans différentes parties de l’édifice et leur travail sera coordonné pour arriver à un ensemble uniforme à la fin. »
« Ce sera une organisation très complexe d’activités. »