Aller au contenu

La décision de la Cour suprême ne devrait pas signifier la fin des consultations avec les Autochtones : sénatrice McCallum

Nous vivons à une époque où l’adaptation culturelle est une pierre angulaire de notre société multiculturelle. C’est là un résultat nécessaire et naturel du multiculturalisme et, en théorie, c’est un concept qui doit valoir pour toutes les cultures établies au Canada.

Pourtant, une lutte très publique existe au sujet de la culture originale au Canada, soit celle des peuples autochtones. Cette lutte se livre entre la reconnaissance et la tolérance des droits autochtones, d’une part, et, d’autre part, l’interprétation erronée ou le rejet pur et simple de ces droits.

Tandis que cet état de choses persiste, nous devons nous demander quels sont les éléments clés de notre compréhension des différences culturelles et nos réactions face à elles.

Les droits des peuples autochtones et leurs droits issus des traités sont protégés par l’article 35 de la Constitution. Beaucoup voient là une trousse d’outils complète qui accorde aux peuples autochtones le droit d’adopter leurs propres lois et de gérer leurs propres affaires.

En dépit de cet article primordial de notre Constitution, la véritable autodétermination et l’autonomie gouvernementale des Autochtones continuent à leur échapper à cause d’un manque de reconnaissance des différences culturelles. Cela est renforcé par une histoire de colonisation au cours de laquelle la loi a toujours servi à cantonner les peuples autochtones dans un état qui les défavorise.

Le système actuel – que ce soit sur les plans politique, juridique ou social – continue à définir la vie, l’état de santé et l’autodétermination des peuples autochtones. Les décisions prises, dont la portée est limitée, le sont par ceux qui bénéficient d’une position de pouvoir et elles sont dictées à ceux dont les droits et les besoins sont tolérés, mais rarement embrassés.

La question concernant la reconnaissance des droits peut être perçue le plus clairement si l’on regarde la récente décision de la Cour suprême du Canada rendue aux dépens de la Première Nation crie Mikisew en Alberta. Cette décision a marqué une étape troublante dans la lutte continue pour l’obtention de la reconnaissance et du respect pour les peuples autochtones, mais il ne faut absolument pas y voir la fin des consultations.

La décision judiciaire a précisé qu’il n’existe aucune obligation constitutionnelle de consulter les Autochtones avant l’adoption d’une loi, mais j’ai bon espoir que les parlementaires continueront d’agir de bonne foi de manière que cette décision ne perturbe pas l’application régulière de la loi lorsqu’il s’agira de faire en sorte que les préoccupations des peuples et des communautés autochtones soient entendues et intégrées dans le processus de rédaction des lois fédérales pertinentes.

Les décisions juridiques telles que celle-ci ne sont pas nécessairement inscrites dans le système de justice. Cependant, la justice est nécessaire quand nous regardons les déséquilibres que la société a créés par le biais de la violence structurelle, laquelle est ensuite confirmée par l’intermédiaire des décisions judiciaires.

Cette décision, en particulier, favorise la violence structurelle en réduisant davantage au silence les voix autochtones sur des enjeux qui les touchent directement. Par suite de cette décision, les peuples autochtones risquent de devoir continuer à compter sur le système judiciaire canadien pour obtenir justice, et à le faire encore plus, sans doute.

Les peuples et les communautés autochtones pourront continuer de recourir à ce système pour faire modifier les lois qui influent sur leurs droits, mais ce sera loin d’être l’outil idéal. Cette réalité attise encore plus les flammes du conflit opposant le Canada à la population autochtone, au lieu de favoriser la formulation d’une solution durable avantageuse pour les deux parties et fondée sur la collaboration qui favoriserait une participation active aux consultations.

Bien que cette décision soit largement perçue comme un retour en arrière, les juges de la Cour suprême ont bel et bien précisé que le gouvernement demeure tenu d’honorer la Couronne quand il rédige des lois. Dans cette précision réside l’importance de la moralité, de l’éthique et du devoir qui servira de freins et de contrepoids quand le gouvernement rédigera des lois qui toucheront les peuples autochtones.

À un moment où la réconciliation cesse d’être uniquement un mot abstrait pour devenir un objectif concret, il incombe aux Canadiens de continuer à agir d’une façon qui soutient les principes moraux et l’éthique. Cela vaut aussi pour les décideurs et les parlementaires qui doivent veiller à continuer de remplir leurs obligations envers la population autochtone au Canada. Cette obligation ne repose pas uniquement sur l’article 35 de la Constitution, mais elle constitue aussi un élément intégrant de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, que le Canada appuie sans réserve.

Cette décision de la Cour suprême désavantage les peuples autochtones. Les parlementaires doivent agir de façon responsable pour faire en sorte que cela n’aggrave pas la division et les conflits sociaux

Ils peuvent le faire en accomplissant leurs travaux, y compris la rédaction des lois, en se souciant toujours de la réconciliation au premier chef.

 

La sénatrice Mary Jane McCallum est une Autochtone d’ascendance crie. Elle représente le Manitoba au Sénat.

Cet article a été publié le 24 octobre 2018 dans le journal The Hill Times (en anglais seulement).

Nous vivons à une époque où l’adaptation culturelle est une pierre angulaire de notre société multiculturelle. C’est là un résultat nécessaire et naturel du multiculturalisme et, en théorie, c’est un concept qui doit valoir pour toutes les cultures établies au Canada.

Pourtant, une lutte très publique existe au sujet de la culture originale au Canada, soit celle des peuples autochtones. Cette lutte se livre entre la reconnaissance et la tolérance des droits autochtones, d’une part, et, d’autre part, l’interprétation erronée ou le rejet pur et simple de ces droits.

Tandis que cet état de choses persiste, nous devons nous demander quels sont les éléments clés de notre compréhension des différences culturelles et nos réactions face à elles.

Les droits des peuples autochtones et leurs droits issus des traités sont protégés par l’article 35 de la Constitution. Beaucoup voient là une trousse d’outils complète qui accorde aux peuples autochtones le droit d’adopter leurs propres lois et de gérer leurs propres affaires.

En dépit de cet article primordial de notre Constitution, la véritable autodétermination et l’autonomie gouvernementale des Autochtones continuent à leur échapper à cause d’un manque de reconnaissance des différences culturelles. Cela est renforcé par une histoire de colonisation au cours de laquelle la loi a toujours servi à cantonner les peuples autochtones dans un état qui les défavorise.

Le système actuel – que ce soit sur les plans politique, juridique ou social – continue à définir la vie, l’état de santé et l’autodétermination des peuples autochtones. Les décisions prises, dont la portée est limitée, le sont par ceux qui bénéficient d’une position de pouvoir et elles sont dictées à ceux dont les droits et les besoins sont tolérés, mais rarement embrassés.

La question concernant la reconnaissance des droits peut être perçue le plus clairement si l’on regarde la récente décision de la Cour suprême du Canada rendue aux dépens de la Première Nation crie Mikisew en Alberta. Cette décision a marqué une étape troublante dans la lutte continue pour l’obtention de la reconnaissance et du respect pour les peuples autochtones, mais il ne faut absolument pas y voir la fin des consultations.

La décision judiciaire a précisé qu’il n’existe aucune obligation constitutionnelle de consulter les Autochtones avant l’adoption d’une loi, mais j’ai bon espoir que les parlementaires continueront d’agir de bonne foi de manière que cette décision ne perturbe pas l’application régulière de la loi lorsqu’il s’agira de faire en sorte que les préoccupations des peuples et des communautés autochtones soient entendues et intégrées dans le processus de rédaction des lois fédérales pertinentes.

Les décisions juridiques telles que celle-ci ne sont pas nécessairement inscrites dans le système de justice. Cependant, la justice est nécessaire quand nous regardons les déséquilibres que la société a créés par le biais de la violence structurelle, laquelle est ensuite confirmée par l’intermédiaire des décisions judiciaires.

Cette décision, en particulier, favorise la violence structurelle en réduisant davantage au silence les voix autochtones sur des enjeux qui les touchent directement. Par suite de cette décision, les peuples autochtones risquent de devoir continuer à compter sur le système judiciaire canadien pour obtenir justice, et à le faire encore plus, sans doute.

Les peuples et les communautés autochtones pourront continuer de recourir à ce système pour faire modifier les lois qui influent sur leurs droits, mais ce sera loin d’être l’outil idéal. Cette réalité attise encore plus les flammes du conflit opposant le Canada à la population autochtone, au lieu de favoriser la formulation d’une solution durable avantageuse pour les deux parties et fondée sur la collaboration qui favoriserait une participation active aux consultations.

Bien que cette décision soit largement perçue comme un retour en arrière, les juges de la Cour suprême ont bel et bien précisé que le gouvernement demeure tenu d’honorer la Couronne quand il rédige des lois. Dans cette précision réside l’importance de la moralité, de l’éthique et du devoir qui servira de freins et de contrepoids quand le gouvernement rédigera des lois qui toucheront les peuples autochtones.

À un moment où la réconciliation cesse d’être uniquement un mot abstrait pour devenir un objectif concret, il incombe aux Canadiens de continuer à agir d’une façon qui soutient les principes moraux et l’éthique. Cela vaut aussi pour les décideurs et les parlementaires qui doivent veiller à continuer de remplir leurs obligations envers la population autochtone au Canada. Cette obligation ne repose pas uniquement sur l’article 35 de la Constitution, mais elle constitue aussi un élément intégrant de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, que le Canada appuie sans réserve.

Cette décision de la Cour suprême désavantage les peuples autochtones. Les parlementaires doivent agir de façon responsable pour faire en sorte que cela n’aggrave pas la division et les conflits sociaux

Ils peuvent le faire en accomplissant leurs travaux, y compris la rédaction des lois, en se souciant toujours de la réconciliation au premier chef.

 

La sénatrice Mary Jane McCallum est une Autochtone d’ascendance crie. Elle représente le Manitoba au Sénat.

Cet article a été publié le 24 octobre 2018 dans le journal The Hill Times (en anglais seulement).

Étiquettes

Encore plus sur SenCA+

Haut de page