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Le Canada ne doit pas être complice du trafic d’organes, un commerce prédateur : sénatrice Ataullahjan

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Après la condamnation de cinq hommes pour leur implication dans un réseau international de trafic d’organes, au Kosovo, en 2013, le procureur avait lancé un avertissement sévère au gouvernement canadien : interdire l’achat d’organes à l’étranger.

Sept ans plus tard, il n’y a toujours pas de loi, au Canada, pour mettre fin à cette pratique intolérable.

Le phénomène du trafic d’organes dure depuis des années, et les Canadiens y participent en toute connaissance de cause. Certains paient des milliers de dollars pour se rendre à l’étranger afin d’y recevoir une greffe dont ils ont grandement besoin, souvent sans même savoir d’où viennent les organes.

Lors du procès qui s’est tenu au Kosovo, on a appris qu’à l’été 2008, un Canadien avait payé 105 000 $ à une femme en Russie pour un rein vendu sur le marché noir. Il faisait partie de la vingtaine de personnes qui avaient reçu une greffe dans une clinique privée de Pristina, la capitale kosovare. Cette transplantation a précipité sa mort, qui est survenue peu après qu’il eut témoigné au procès, a déclaré le procureur canadien Jonathan Ratel.

C’est maintenant la troisième fois que je dépose un projet de loi destiné à rendre illégal, pour les Canadiens, l’achat d’organes sans consentement éclairé. Le projet de loi S-204 vise à mettre un terme au tourisme pour une transplantation, dont le public ignore en grande partie les conséquences.

Ce projet de loi a également pour objectif de renforcer la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés en interdisant l’entrée au Canada de toute personne qui s’est livrée à des activités liées au trafic d’organes humains.

Des enquêtes menées par des journalistes et des anthropologues médicaux ont permis de dresser un sombre portrait de ce trafic. Des patients de pays riches comme le Canada, qui languissent sur des listes de personnes en attente d’un organe, finissent par aller à l’étranger pour obtenir des organes de donneurs victimes. Bien souvent, ces donneurs vivent dans la pauvreté; certains ont été trompés ou contraints de passer sous le bistouri en échange d’une fraction de la somme d’argent que le receveur aura versée aux trafiquants.

Dans les cas extrêmes, les donneurs victimes sont kidnappés et leurs organes sont prélevés sans leur consentement. Pensez au cas de cet homme (en anglais seulement), en Inde, qui s’est réveillé un jour dans une maison qu’il ne connaissait pas, hébété, devant un homme portant un masque chirurgical et des gants de latex. Lorsqu’il a demandé ce qu’il lui était arrivé, l’étranger lui a répondu sans ménagement : « On vient de vous enlever un rein. »

Lors du procès qui s’est tenu au Kosovo, plus de 100 personnes ont comparu pour témoigner sur le réseau de ce trafic d’organes, dont les receveurs étaient originaires du Canada, d’Israël, de Pologne, des États-Unis et d’Allemagne. Des donneurs victimes ont expliqué au tribunal qu’on leur avait promis plus de 12 000 $ pour leurs organes, mais beaucoup ont dit ne jamais avoir été payés, et au moins deux ont déclaré être rentrés chez eux « sans argent et un rein en moins ».

Le procureur a qualifié le trafic d’organes de forme cruelle d’exploitation des pauvres.

On estime qu’en Chine, 150 personnes sont tuées pour leurs organes chaque jour. Le cas le plus horrible dont j’ai entendu parler dans ce pays est celui d’un garçon de six ans retrouvé seul dans un champ en train d’appeler à l’aide après qu’on lui eut arraché les yeux. On a retrouvé les yeux de l’enfant non loin de là; les cornées avaient été prélevées, vraisemblablement par des trafiquants d’organes, pour être vendues ensuite sur le marché noir.

Avec le trafic de drogues et de diamants ainsi que la traite des personnes, le trafic d’organes représente un commerce illégal de plusieurs milliards de dollars, dont les profits sont estimés (en anglais seulement) à plus de 1,2 milliard de dollars par an. Est-ce un commerce que nous voulons que les Canadiens encouragent?

En 2015, plus d’une dizaine de pays de l'Union européenne ont convenu d’adopter des lois pour s’attaquer à ce commerce en pleine expansion. Il est temps que le Canada se joigne à cette lutte mondiale.

Mon projet de loi ne vise pas à empêcher les Canadiens de se rendre à l’étranger pour y recevoir une greffe d’organe par des moyens légitimes et légaux. Je suis consciente des difficultés que peuvent éprouver des Canadiens qui doivent attendre des mois, voire des années, avant de recevoir un organe; nous devons d’ailleurs nous attaquer aussi à ce problème.

Mais nous ne pouvons plus permettre que des Canadiens s’engagent dans des transactions douteuses aux dépens de personnes vulnérables.

La sénatrice Salma Ataullahjan représente l’Ontario au Sénat.

Cet article a été publié le 29 octobre 2020 dans le journal iPolitics (en anglais seulement).

Après la condamnation de cinq hommes pour leur implication dans un réseau international de trafic d’organes, au Kosovo, en 2013, le procureur avait lancé un avertissement sévère au gouvernement canadien : interdire l’achat d’organes à l’étranger.

Sept ans plus tard, il n’y a toujours pas de loi, au Canada, pour mettre fin à cette pratique intolérable.

Le phénomène du trafic d’organes dure depuis des années, et les Canadiens y participent en toute connaissance de cause. Certains paient des milliers de dollars pour se rendre à l’étranger afin d’y recevoir une greffe dont ils ont grandement besoin, souvent sans même savoir d’où viennent les organes.

Lors du procès qui s’est tenu au Kosovo, on a appris qu’à l’été 2008, un Canadien avait payé 105 000 $ à une femme en Russie pour un rein vendu sur le marché noir. Il faisait partie de la vingtaine de personnes qui avaient reçu une greffe dans une clinique privée de Pristina, la capitale kosovare. Cette transplantation a précipité sa mort, qui est survenue peu après qu’il eut témoigné au procès, a déclaré le procureur canadien Jonathan Ratel.

C’est maintenant la troisième fois que je dépose un projet de loi destiné à rendre illégal, pour les Canadiens, l’achat d’organes sans consentement éclairé. Le projet de loi S-204 vise à mettre un terme au tourisme pour une transplantation, dont le public ignore en grande partie les conséquences.

Ce projet de loi a également pour objectif de renforcer la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés en interdisant l’entrée au Canada de toute personne qui s’est livrée à des activités liées au trafic d’organes humains.

Des enquêtes menées par des journalistes et des anthropologues médicaux ont permis de dresser un sombre portrait de ce trafic. Des patients de pays riches comme le Canada, qui languissent sur des listes de personnes en attente d’un organe, finissent par aller à l’étranger pour obtenir des organes de donneurs victimes. Bien souvent, ces donneurs vivent dans la pauvreté; certains ont été trompés ou contraints de passer sous le bistouri en échange d’une fraction de la somme d’argent que le receveur aura versée aux trafiquants.

Dans les cas extrêmes, les donneurs victimes sont kidnappés et leurs organes sont prélevés sans leur consentement. Pensez au cas de cet homme (en anglais seulement), en Inde, qui s’est réveillé un jour dans une maison qu’il ne connaissait pas, hébété, devant un homme portant un masque chirurgical et des gants de latex. Lorsqu’il a demandé ce qu’il lui était arrivé, l’étranger lui a répondu sans ménagement : « On vient de vous enlever un rein. »

Lors du procès qui s’est tenu au Kosovo, plus de 100 personnes ont comparu pour témoigner sur le réseau de ce trafic d’organes, dont les receveurs étaient originaires du Canada, d’Israël, de Pologne, des États-Unis et d’Allemagne. Des donneurs victimes ont expliqué au tribunal qu’on leur avait promis plus de 12 000 $ pour leurs organes, mais beaucoup ont dit ne jamais avoir été payés, et au moins deux ont déclaré être rentrés chez eux « sans argent et un rein en moins ».

Le procureur a qualifié le trafic d’organes de forme cruelle d’exploitation des pauvres.

On estime qu’en Chine, 150 personnes sont tuées pour leurs organes chaque jour. Le cas le plus horrible dont j’ai entendu parler dans ce pays est celui d’un garçon de six ans retrouvé seul dans un champ en train d’appeler à l’aide après qu’on lui eut arraché les yeux. On a retrouvé les yeux de l’enfant non loin de là; les cornées avaient été prélevées, vraisemblablement par des trafiquants d’organes, pour être vendues ensuite sur le marché noir.

Avec le trafic de drogues et de diamants ainsi que la traite des personnes, le trafic d’organes représente un commerce illégal de plusieurs milliards de dollars, dont les profits sont estimés (en anglais seulement) à plus de 1,2 milliard de dollars par an. Est-ce un commerce que nous voulons que les Canadiens encouragent?

En 2015, plus d’une dizaine de pays de l'Union européenne ont convenu d’adopter des lois pour s’attaquer à ce commerce en pleine expansion. Il est temps que le Canada se joigne à cette lutte mondiale.

Mon projet de loi ne vise pas à empêcher les Canadiens de se rendre à l’étranger pour y recevoir une greffe d’organe par des moyens légitimes et légaux. Je suis consciente des difficultés que peuvent éprouver des Canadiens qui doivent attendre des mois, voire des années, avant de recevoir un organe; nous devons d’ailleurs nous attaquer aussi à ce problème.

Mais nous ne pouvons plus permettre que des Canadiens s’engagent dans des transactions douteuses aux dépens de personnes vulnérables.

La sénatrice Salma Ataullahjan représente l’Ontario au Sénat.

Cet article a été publié le 29 octobre 2020 dans le journal iPolitics (en anglais seulement).

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