Le projet de loi C-83 doit être adopté d’ici l’ajournement estival des travaux du Parlement: Sénateur Marty Klyne
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Dans le contexte de notre système carcéral, il est possible que les Canadiens qui ne connaissent pas l’isolement préventif le confondent avec l’isolement cellulaire. Essentiellement, l’isolement préventif s’applique lorsqu’un délinquant est séparé de la population carcérale générale pour des raisons de sécurité.
L’isolement peut être jugé nécessaire pour protéger certains délinquants, notamment les anciens policiers, les délinquants sexuels et les informateurs. Cette pratique peut également être adoptée lorsque la présence de délinquants au sein de la population carcérale générale est susceptible de nuire à une enquête criminelle ou lorsqu’il est nécessaire de les empêcher de s’associer à d’autres prisonniers. Il peut aussi être requis lorsque le comportement violent ou perturbateur de certains délinquants présente un risque pour eux-mêmes, un autre détenu ou un membre du personnel.
Il n’est pas difficile de comprendre pourquoi l’isolement préoccupe ceux qui sont confrontés à sa triste réalité. Lorsqu’un délinquant est en isolement, cela signifie qu’il est confiné à une zone d’isolement et qu’il passe au moins 22 heures par jour dans sa cellule et que, lorsqu’il est autorisé à en sortir, ce temps est limité à un maximum de deux heures par jour; le délinquant n’a aucun contact humain réel et ne bénéficie d’aucun programme ou soin de santé, sauf en cas de nécessité absolue, ce qui peut avoir comme effet de nuire à sa réhabilitation et constituer un non-respect de ses droits constitutionnels.
Les tribunaux ont récemment conclu que la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (LSCMLC) ne va pas assez loin pour protéger les droits des Canadiens emprisonnés. Dans une décision historique rendue en 2018, la Cour suprême de la Colombie-Britannique a conclu que le recours à l’isolement dans les prisons fédérales violait les droits des détenus garantis par la Charte, puisqu’il augmentait le risque d’automutilation et de suicide et que, au lieu de préparer les détenus à la réintégration dans la population carcérale générale, l’isolement préventif avait l’effet contraire.
En mars 2019, deux causes entendues en Ontario ont fait écho à ces observations, ajoutant que l’isolement était trop souvent utilisé comme moyen de séparer les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale de la population générale sans avoir l’intention de les aider dans leur réhabilitation.
Il faut trouver une solution de rechange à l’isolement préventif, et la LSCMLC doit faire l’objet d’importantes modifications. C’est la raison d’être du projet de loi C-83, Loi modifiant la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous caution et une autre loi.
Le projet de loi C-83 vise à éliminer le recours à l’isolement préventif en mettant sur pied des unités d’intervention structurée (UIS), afin d’accueillir et de réhabiliter les délinquants qui ne peuvent pas être gérés en toute sécurité dans la population carcérale générale.
Les détenus dans les UIS se verront offrir la possibilité de passer au moins quatre heures par jour en dehors de leur cellule, soit le double de ce à quoi ils ont droit à l’heure actuelle. Au lieu de n’avoir aucun contact significatif, les détenus auront la possibilité d’avoir, au moins deux heures par jour, des « contacts humains » avec, entre autres, des aînés, des aumôniers, des conseillers, des membres de leur famille, des amis ou des détenus compatibles. Selon les changements proposés, les délinquants n’auront pas à passer une seule journée sans avoir d’interaction sociale significative. De plus, ils recevront la visite quotidienne d’un professionnel de la santé agréé et auront accès à des défenseurs des droits des patients qui veilleront à leur réhabilitation et qui s’assureront que des soins de santé mentale leur sont prodigués et que d’autres interventions productives soient effectuées. L’objectif du projet de loi est de veiller à ce que les programmes soient adaptés aux besoins uniques des délinquants. Cela signifie qu’il faut d’abord s’attaquer aux causes qui ont mené à leur séparation afin qu’ils puissent retourner dans la population carcérale générale en toute sécurité et le plus rapidement possible.
Les délais pour apporter les changements approchent à grands pas. La Cour d’appel de la Colombie‑Britannique affirme que, bien que le recours à l’isolement doive être éliminé, il serait dangereux de mettre fin à cette pratique sans qu’une meilleure solution de rechange soit en place. Autrement dit, le projet de loi C-83 doit être adopté d’ici l’ajournement estival des travaux du Parlement. Sinon, nous risquons soit que le Service correctionnel du Canada ne soit plus en mesure de recourir à l’isolement, soit que les tribunaux continuent de retarder l’effet de leurs décisions, perpétuant ainsi un système d’isolement. Aucun de ces choix ne devrait être acceptable aux yeux des Canadiens.
Pour citer Fyodor Dostoevsky, un journaliste et philosophe russe qui a beaucoup réfléchi aux questions de la criminalité et du châtiment, « on peut mesurer le degré de civilisation d’une société en visitant ses prisons ».
Je crois que le projet de loi C-83 va bien au-delà des Règles Nelson Mandela des Nations Unies en ce qui concerne le traitement des prisonniers, car il a comme objectif de résoudre les problèmes inhérents qui figurent dans la LSCMLC ainsi que de répondre directement aux préoccupations qui ressortent des décisions en suspens des tribunaux. C’est la raison pour laquelle je parraine le projet de loi C-83 au Sénat.
Le sénateur Marty Klyne représente la Saskatchewan au Sénat.
Cet article a été publié le 6 mai 2019 dans le journal The Hill Times (en anglais seulement).
Dans le contexte de notre système carcéral, il est possible que les Canadiens qui ne connaissent pas l’isolement préventif le confondent avec l’isolement cellulaire. Essentiellement, l’isolement préventif s’applique lorsqu’un délinquant est séparé de la population carcérale générale pour des raisons de sécurité.
L’isolement peut être jugé nécessaire pour protéger certains délinquants, notamment les anciens policiers, les délinquants sexuels et les informateurs. Cette pratique peut également être adoptée lorsque la présence de délinquants au sein de la population carcérale générale est susceptible de nuire à une enquête criminelle ou lorsqu’il est nécessaire de les empêcher de s’associer à d’autres prisonniers. Il peut aussi être requis lorsque le comportement violent ou perturbateur de certains délinquants présente un risque pour eux-mêmes, un autre détenu ou un membre du personnel.
Il n’est pas difficile de comprendre pourquoi l’isolement préoccupe ceux qui sont confrontés à sa triste réalité. Lorsqu’un délinquant est en isolement, cela signifie qu’il est confiné à une zone d’isolement et qu’il passe au moins 22 heures par jour dans sa cellule et que, lorsqu’il est autorisé à en sortir, ce temps est limité à un maximum de deux heures par jour; le délinquant n’a aucun contact humain réel et ne bénéficie d’aucun programme ou soin de santé, sauf en cas de nécessité absolue, ce qui peut avoir comme effet de nuire à sa réhabilitation et constituer un non-respect de ses droits constitutionnels.
Les tribunaux ont récemment conclu que la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (LSCMLC) ne va pas assez loin pour protéger les droits des Canadiens emprisonnés. Dans une décision historique rendue en 2018, la Cour suprême de la Colombie-Britannique a conclu que le recours à l’isolement dans les prisons fédérales violait les droits des détenus garantis par la Charte, puisqu’il augmentait le risque d’automutilation et de suicide et que, au lieu de préparer les détenus à la réintégration dans la population carcérale générale, l’isolement préventif avait l’effet contraire.
En mars 2019, deux causes entendues en Ontario ont fait écho à ces observations, ajoutant que l’isolement était trop souvent utilisé comme moyen de séparer les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale de la population générale sans avoir l’intention de les aider dans leur réhabilitation.
Il faut trouver une solution de rechange à l’isolement préventif, et la LSCMLC doit faire l’objet d’importantes modifications. C’est la raison d’être du projet de loi C-83, Loi modifiant la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous caution et une autre loi.
Le projet de loi C-83 vise à éliminer le recours à l’isolement préventif en mettant sur pied des unités d’intervention structurée (UIS), afin d’accueillir et de réhabiliter les délinquants qui ne peuvent pas être gérés en toute sécurité dans la population carcérale générale.
Les détenus dans les UIS se verront offrir la possibilité de passer au moins quatre heures par jour en dehors de leur cellule, soit le double de ce à quoi ils ont droit à l’heure actuelle. Au lieu de n’avoir aucun contact significatif, les détenus auront la possibilité d’avoir, au moins deux heures par jour, des « contacts humains » avec, entre autres, des aînés, des aumôniers, des conseillers, des membres de leur famille, des amis ou des détenus compatibles. Selon les changements proposés, les délinquants n’auront pas à passer une seule journée sans avoir d’interaction sociale significative. De plus, ils recevront la visite quotidienne d’un professionnel de la santé agréé et auront accès à des défenseurs des droits des patients qui veilleront à leur réhabilitation et qui s’assureront que des soins de santé mentale leur sont prodigués et que d’autres interventions productives soient effectuées. L’objectif du projet de loi est de veiller à ce que les programmes soient adaptés aux besoins uniques des délinquants. Cela signifie qu’il faut d’abord s’attaquer aux causes qui ont mené à leur séparation afin qu’ils puissent retourner dans la population carcérale générale en toute sécurité et le plus rapidement possible.
Les délais pour apporter les changements approchent à grands pas. La Cour d’appel de la Colombie‑Britannique affirme que, bien que le recours à l’isolement doive être éliminé, il serait dangereux de mettre fin à cette pratique sans qu’une meilleure solution de rechange soit en place. Autrement dit, le projet de loi C-83 doit être adopté d’ici l’ajournement estival des travaux du Parlement. Sinon, nous risquons soit que le Service correctionnel du Canada ne soit plus en mesure de recourir à l’isolement, soit que les tribunaux continuent de retarder l’effet de leurs décisions, perpétuant ainsi un système d’isolement. Aucun de ces choix ne devrait être acceptable aux yeux des Canadiens.
Pour citer Fyodor Dostoevsky, un journaliste et philosophe russe qui a beaucoup réfléchi aux questions de la criminalité et du châtiment, « on peut mesurer le degré de civilisation d’une société en visitant ses prisons ».
Je crois que le projet de loi C-83 va bien au-delà des Règles Nelson Mandela des Nations Unies en ce qui concerne le traitement des prisonniers, car il a comme objectif de résoudre les problèmes inhérents qui figurent dans la LSCMLC ainsi que de répondre directement aux préoccupations qui ressortent des décisions en suspens des tribunaux. C’est la raison pour laquelle je parraine le projet de loi C-83 au Sénat.
Le sénateur Marty Klyne représente la Saskatchewan au Sénat.
Cet article a été publié le 6 mai 2019 dans le journal The Hill Times (en anglais seulement).