Délibérations du comité sénatorial permanent
des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie
Fascicule 21 - Témoignages du 2 décembre 1998
OTTAWA, le mercredi 2 décembre 1998
Le comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie auquel a été renvoyé le projet de loi C-20, loi modifiant la Loi constituant en personne morale l'Office épiscopal catholique romain du Mackenzie, se réunit aujourd'hui à 15 h 40 pour en étudier la teneur.
Le sénateur Lowell Murray (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: Honorables sénateurs, nous examinons aujourd'hui le projet de loi S-20 qui a été parrainé par le sénateur Taylor, qui je crois, en a hérité de notre regretté collègue le sénateur Walter Twinn. Il y a déjà un bon moment que le projet de loi S-20 a franchi l'étape de la deuxième lecture au Sénat. C'est en 19913 que le Parlement a adopté cette loi constituant en personne morale que ce projet de loi tente de modifier. Elle n'a jamais été modifiée depuis.
Nous accueillons aujourd'hui comme témoin, M. Bernard Lavallée, le conseiller juridique de l'Office épiscopal catholique romain du Mackenzie.
[Français]
Il est né le 1er janvier 1939, à West Block en Alberta, à une trentaine de kilomètres au nord d'Edmonton. Il a fait ses études à l'Université d'Ottawa. Il a reçu son baccalauréat en 1959.
[Traduction]
Il a obtenu en 1963 un baccalauréat en droit de l'Université de l'Alberta.
[Français]
Il a exercé sa profession d'avocat là-bas depuis 1964.
[Traduction]
Il est, je le répète, conseiller de la Reine. Il a été directeur de l'Association canadienne-française de l'Alberta, de la Junior Chamber of commerce d'Edmonton ainsi que de la radio CHFA d'Edmonton. Il est associé principal dans un cabinet de droit.
S'il est ici, c'est parce que nous n'adoptons pas de projet de loi d'intérêt privé de ce genre sans entendre le requérant ou l'avocat qui le représente. Nos règles exigent plus particulièrement qu'il justifie le préambule du projet de loi S-20, c'est-à-dire qu'il présente des faits justifiant l'adoption de ce projet de loi.
Laissez-moi vous dire également qu'aucun autre témoin n'a communiqué avec le légiste pour demander de comparaître en vue de s'opposer à ce projet de loi.
Cela dit, monsieur Lavallée, je vous donne la parole.
M. Bernard Lavallée, c.r., conseiller juridique du Diocèse de Mackenzie pour l'Office épiscopal catholique romain du Mackenzie: Merci, monsieur le président. Laissez-moi vous dire tout d'abord, honorables sénateurs, que j'atteste, comme témoin, que les déclarations faites dans la motion qui a été présentée au comité sont conformes aux faits.
Cette mesure législative vous est soumise parce que la loi de 1913 limitait les pouvoirs de placement de l'Office épiscopal catholique romain du Mackenzie. En voici un exemple:
Le paragraphe 4(2) de la loi dispose que:
La valeur annuelle des biens immeubles possédés... par la corporation ou en fidéicommis pour elle ne doit pas dépasser cinquante mille dollars.
Mesdames et messieurs, dans le bilan que j'ai sous les yeux et que je peux produire comme pièce à l'appui, la valeur des biens immeubles possédés par l'Office est supérieure à 3 551 000 $. Ce chiffre figure dans les états financiers qui indiquent pour ainsi dire la fraction non amortie du coût des biens immeubles possédés. Il va sans dire que leur valeur est beaucoup plus grande.
Aux fins d'assurance, par exemple, ces biens immeubles possédés valent environ 14 millions de dollars. Ce n'est pas avant avril 1996 que l'évêque Denis Croteau a pris conscience des limites imposées aux avoirs du diocèse. Un nouveau comptable est revenu à la case départ, à savoir la loi habilitante portant création de cet office, et a remarqué les restrictions imposées aux pouvoirs de placement, à savoir que la valeur annuelle des placements immobiliers ne devait pas dépasser 50 000 $.
Peu après cette découverte, on nous a confié le mandat de prendre les mesures nécessaires pour demander au Sénat, et finalement la Chambre des communes, de lever cette restriction imposée aux pouvoirs de placement de l'office et c'est une des choses que nous demandons aujourd'hui.
Il se peut que cette restriction ait été raisonnable et pertinente en 1913. Depuis lors, toutefois, l'office a investi judicieusement et a reçu de nombreux appuis de divers bienfaiteurs. Par exemple, d'après les états financiers de l'année dernière, le budget de fonctionnement du diocèse atteint presque 1,5 million de dollars dont 800 000 $ proviennent des placements. Sur les 700 000 qui restent, entre 150 000 et 200 000 sont versés par l'Église catholique. En dépit de ce budget de fonctionnement -- dont les fonds sont consacrés uniquement aux autochtones, qu'il s'agisse d'éducation, d'écoles, d'hôpitaux, d'églises et de missions -- le diocèse a essuyé l'an dernier une perte de 200 000 $, sans compter leurs investissements et leurs propriétés.
L'office exerce ses activités dans le Nord, en Saskatchewan et dans une petite partie de l'Alberta. Au Nord, l'office couvre un territoire dont la superficie est supérieure à celle de la province de Québec. Personne ne peut s'imaginer les distances qu'il faut parcourir dans le Nord et les dépenses qu'il faut engager pour se rendre aux diverses missions et églises, de Tuktoyaktuk à Yellowknife, pour s'acquitter des obligations du ministère auprès des populations autochtones conformément à la mission qui a été confiée à cet office épiscopal.
Il est bien sûr évident qu'il exerce son ministère presque exclusivement auprès de gens dont les revenus sont très modestes et qu'il compte sur l'aide extérieure qui est malheureusement devenue limitée étant donné les ressources réduites dont disposent le gouvernement et l'Église catholique.
On me dit que tout juste à l'extérieur de Yellowknife, dans un endroit appelé Trappers Lake, se trouve une installation qui vaut plus d'un million de dollars. Ce n'est là qu'un exemple qui justifie notre présence ici aujourd'hui. Nous ne voulons pas contrevenir à la loi.
J'ai demandé à mon conseiller en investissement de la firme CIBC Wood Gundy ce que valent aujourd'hui ces 50 000 $ de 1913. Selon lui, par rapport à l'indice des prix à la consommation, indice que l'on a commencé à calculer m'a-t-on dit en 1914, on parle de 5 057 500 en dollars d'aujourd'hui. On me dit aussi qu'il s'agit là du facteur le plus bas utilisé au Canada pour évaluer la croissance. Si nous devions évaluer cette somme par rapport aux bons du Trésor, les 50 000 $ pourraient bien valoir des centaines de fois plus qu'en 1913. Si on utilisait l'indice boursier, cette somme pourrait être encore plus élevée. Tout cela pour dire que 50 000 $ en dollars de 1913, comme vous pouvez le constater, ne suffit absolument pas pour exploiter 38 paroisses et missions dans le Nord, une région dont la superficie équivaut à celle du Québec.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Lavallée. Vous nous avez été très utile.
Honorables sénateurs, y a-t-il des questions?
[Français]
Le sénateur Lavoie-Roux: Historiquement, il fallait que la création des diocèses soit autorisée par le gouvernement du Canada. Est-ce qu'il y en a d'autres qui sont soumis à cette même réalité? Quand j'ai constaté cela, j'ai été très étonnée. Je ne savais pas que le gouvernement fédéral approuvait la création de diocèse catholique au Canada.
M. Lavallée: La création du diocèse relève de l'autorité ecclésiastique. Quand ce projet de loi a été adopté en 1913, cette corporation était un vicariat. La loi de 1913 a perpétué l'autorité d'un évêque. La loi dit :
[Traduction]
L'article 13 de la loi dit, en partie, qu'à n'importe quel moment où le vicariat, ou n'importe quelle partie de celui-ci, est érigé en diocèse -- et cela s'est fait en mars 1968. Cependant, pour répondre à votre question, c'est l'autorité ecclésiastique qui a érigé ce vicariat en diocèse et non le Parlement du Canada.
[Français]
Le sénateur Lavoie-Roux: Est-ce qu'il y a d'autres endroits au Canada qui se trouvent dans une situation analogue à la vôtre?
M. Lavallée: Il y a quelques années, l'Anglican Church of Canada avait un problème un peu semblable dans ses pouvoirs d'investissement. Dans ce cas, la loi de 1936, qui a incorporé le Bishop of the Arctic of the Anglican Church a limité l'investissement à certaines fiducies de la Grande-Bretagne. Il y a eu un amendement un peu semblable au nôtre qui a été fait et qui a accordé un pouvoir d'investissement beaucoup plus général et non pas limité aux «bonds» de Grande-Bretagne. Il y a des précédents.
Le président: Notre légiste parlementaire me rappelle que l'archevêque d'Ottawa est incorporé par le gouvernement fédéral.
Le sénateur Lavoie-Roux: C'est ridicule.
Le président: Non, ce n'est pas ridicule. Il faut qu'il soit conforme aux lois.
M. Lavallée: L'autorité ecclésiastique crée un vicariat ou un évêché. Une fois qu'il existe, en théorie ecclésiastique, où est le pouvoir de détenir des biens immobiliers? Où est le pouvoir de faire des contrats, où se situe la personne juridique? Le Parlement du Canada, par le biais de cette loi, leur donne une personne juridique. Cela ne touche pas l'Église catholique. Cela touche la personne juridique pour lui permettre de faire des contrats, détenir des terrains, faire des ventes, des achats, avoir des employés.
Le sénateur Lavoie-Roux: Est-ce que tous les diocèses sont dans cette position?
Le président: Au niveau provincial.
Mme Nadine S. Huggins, greffière suppléante du comité: Il y en a beaucoup. Ce n'est certainement pas un exemple rare, il y en a beaucoup qui le sont.
Le sénateur Lavoie-Roux: Historiquement, j'ignorais ces choses.
[Traduction]
Le président: Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs, pour que le comité procède maintenant à l'étude article par article du projet de loi S-20?
Des voix: D'accord.
Le président: Honorables sénateurs, l'étude du titre est-elle reportée?
Des voix: D'accord.
Le président: L'Étude du préambule est-elle reportée?
Des voix: D'accord.
Le président: Honorables sénateurs, j'ai une lettre de notre légiste m'informant qu'il faut modifier le projet de loi pour tenir compte d'une modification ecclésiastique apportée au nom anglais de l'office, un amendement qui a été porté à l'attention de l'avocat du requérant après la publication du projet de loi.
Ces trois amendements visent essentiellement à ajouter les mots «Fort Smith» au nom de l'office toutes les fois qu'il figure dans le projet de loi, de manière à le rebaptiser «Office épiscopal catholique romain de Mackenzie-Fort Smith».
Cela dit, l'article 1 est-il adopté, honorables sénateurs?
Le sénateur Mahovlich: Honorables sénateurs, je propose:
Que le projet de loi S-20 soit modifié à l'article 1, à la page 1,
a) par substitution à la ligne 27 de ce qui suit:
«1: Le titre intégral du»;
b) par substitution, aux lignes 31 et 32 de ce qui suit:
«épiscopal catholique romain de Mackenzie-Fort Smith».
Le président: Honorables sénateurs, vous avez entendu la motion. Quelqu'un a-t-il quelque chose à dire au sujet de l'amendement?
Sinon, l'article 1 est-il adopté dans sa forme modifiée?
Des voix: D'accord.
Le président: Adopté.
Honorables sénateurs, l'article 2 est-il adopté?
Le sénateur Mahovlich: Honorables sénateurs, je propose:
Que le projet de loi S-20 soit modifié à l'article 2, à la page 2,
a) par substitution à la ligne 1 de ce qui suit:
Me dispensez-vous de lire le reste?
Des voix: Oui.
Le président: Êtes-vous d'accord honorables sénateurs pour adopter ledit amendement?
Des voix: D'accord.
Le président: Honorables sénateurs, l'article 2 est-il adopté dans sa forme modifiée?
Des voix: D'accord.
Le président: Adopté.
Honorables sénateurs, l'article 3 est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: Adopté.
Honorables sénateurs, l'article 4 est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: Le préambule du projet de loi est-il adopté?
Le sénateur Mahovlich: Honorables sénateurs, je propose:
Que le préambule du projet de loi S-20 soit modifié, à la page 1, par substitution à la ligne 10 de ce qui suit:
«a été érigé en diocèse comme diocèse de Mackenzie-Fort Smith par l'autorité ecclé-».
Le président: Êtes-vous d'accord honorables sénateurs pour adopter ledit amendement?
Des voix: D'accord.
Le président: Adopté.
Le préambule est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: Adopté.
Honorables sénateurs, le titre est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: Adopté.
Monsieur Audcent, y a-t-il une raison juridique pour ne pas adopter ce projet de loi?
M. Mark Audcent, légiste et conseiller parlementaire, Sénat du Canada: Monsieur le président, il me fait plaisir de dire que le projet de loi S-20 est un bon texte législatif qui répondra à l'intention du requérant.
Le président: Merci, monsieur Audcent.
Honorables sénateurs, êtes-vous d'accord pour adopter ce projet de loi dans sa forme modifiée?
Des voix: D'accord.
Le président: Adopté.
Honorables sénateurs, m'autorisez-vous à faire rapport au Sénat du projet de loi dans sa forme modifiée?
Des voix: D'accord.
Le président: Merci, honorables sénateurs. Merci, monsieur Lavallée.
La séance est levée.