Délibérations du comité sénatorial permanent
des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie
Fascicule 34 - Témoignages du 2 juin 1999
OTTAWA, le mercredi 2 juin 1999
Le comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, auquel a été renvoyé le projet de loi C-66, Loi modifiant la Loi nationale sur l'habitation et la Loi sur la Société canadienne d'hypothèques et de logement et une autre loi en conséquence, se réunit aujourd'hui à 17 h 35 pour étudier le projet de loi.
Le sénateur Lowell Murray (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: Nous reprenons notre étude du projet de loi C-66. Vous vous rappellerez qu'hier matin nous avons entendu le témoignage du ministre des Travaux publics, M. Gagliano, du président et d'autres représentants de la Société canadienne d'hypothèques et de logement et de fonctionnaires du ministère des Finances. Ce soir, nous accueillons de nombreux témoins du secteur privé qui ont demandé à se faire entendre.
Nous avons prévu une heure pour chacun d'entre eux, ce qui ne signifie pas nécessairement qu'ils sont obligés de prendre toute l'heure au complet. En tout cas, ils ne devraient pas consacrer une heure à leur déclaration d'ouverture, car il est préférable que les sénateurs aient la possibilité de dialoguer avec les témoins. Je désire rassurer ceux-ci en leur signalant que ce qu'ils auront oublié de dire pourra être mis de l'avant au cours de la période de questions.
Nous accueillons d'abord des représentants de la compagnie d'assurance hypothèque GE Capital. Je crois que vous avez une brève déclaration à nous faire dont des exemplaires ont été distribués. Vous avez la parole.
M. Peter Vukanovich, président, GE Capital Assurance Hypothèque: Monsieur le président, c'est un plaisir pour moi d'être ici aujourd'hui. Vous l'avez dit vous-même, nous avons déjà envoyé un énoncé de notre point de vue concernant le projet de loi, assorti d'amendements spécifiques, que vous avez reçu. Je serai donc bref.
Laissez-moi d'abord préciser que la société GE Capital Assurance hypothèque, connue également sous le sigle de GEMICO, est le concurrent privé de la SCHL dans le domaine de l'assurance hypothèque.
Nous sommes fiers d'avoir introduit certains avantages innovateurs dans plusieurs secteurs depuis notre arrivée sur le marché en 1985, notamment des réductions importantes du délai d'approbation des demandes, 40 p. 100 des demandes étant aujourd'hui approuvées en quelques minutes; la transférabilité de l'assurance hypothèque, ce qui permet d'accorder des primes réduites aux acheteurs d'une deuxième maison qui ont besoin d'assurance; des partenariats avec les fournisseurs de services pour l'habitation tels que les inspecteurs en immeuble, les courtiers en immeuble et les constructeurs d'habitations; des systèmes électroniques de traitement des demandes pour plus de 50 p. 100 des demandes; et des systèmes de gestion du risque qui combinent la technologie et les évaluations. Dès 1998, nous offrions tous ces services aux prêteurs hypothécaires et aux consommateurs à l'échelle du Canada.
Lorsque nous avons acheté la franchise d'assurance la Ghypothèque de la CAHC en 1995, l'achat incluait un accord de cession de créance auprès du gouvernement du Canada garantissant à hauteur de 90 p. 100 le passif de GEMICO relatif aux polices, advenant sa faillite. En contrepartie de cette garantie, GEMICO verse des frais annuels au gouvernement et contribue à un fonds de fiducie créé afin de protéger les détenteurs de police. À titre d'assureur autorisé régi par le Bureau du surintendant des institutions financières, nous devons répondre à des critères très stricts en matière de besoins en capital et nous soumettre régulièrement à des examens financiers et opérationnels.
Il est vrai que notre part du marché s'établit maintenant à 12 p. 100 environ du marché de l'assurance hypothèque total au Canada, et que le reste -- 88 p. 100 -- va à la SCHL. Toutefois, notre succès est menacé par deux problèmes de base dont j'aimerais vous entretenir aujourd'hui. Il s'agit d'abord de la garantie gouvernementale, qui est de 90 p. 100 pour GE et de 100 p. 100 pour la SCHL, puisqu'il s'agit d'une société d'État. Le deuxième obstacle, ce sont les vastes pouvoirs qu'accorde à la SCHL ce projet de loi-ci, pouvoirs qui menacent de déséquilibrer encore plus les règles du jeu en faveur de la SCHL.
Revenons à la garantie. La garantie de 100 p. 100 offerte à la SCHL par rapport à la nôtre, qui est de 90 p. 100 seulement, désavantage l'assureur privé que nous sommes. Au titre des règles de la Banque des règlements internationaux, les bailleurs de fonds n'ont pas besoin de capital de réserve lorsque leur prêt est assuré auprès de la SCHL, alors qu'ils doivent garder 400 $ de capital à raison de chaque tranche de 100 000 $ d'hypothèques assurées auprès de l'assureur privé. La différence de ce que cela coûte en capital a eu pour conséquence que plusieurs prêteurs nous ont fait savoir qu'à l'avenir ils seraient obligés de limiter leurs achats d'assurance hypothèque auprès de GE, en dépit de l'excellent service que nous leur offrons. Tout cela, c'est évidemment à cause des coûts supplémentaires qu'ils doivent assumer.
Nous recommandons au gouvernement de consentir la même garantie aux deux assureurs, public et privé. En principe, cela pourrait être possible soit en réduisant la garantie de la SCHL à 90 p. 100, soit en garantissant à 100 p. 100 les prêts de GE en modifiant l'accord de garantie gouvernementale conclu auprès du ministère des Finances. Nous préférerions, pour notre part, que le ministère des Finances augmente à 100 p. 100 la garantie gouvernementale consentie à GEMICO, pour que l'assurance ne coûte pas plus cher aux prêteurs ou aux acheteurs.
Je rappelle au comité que le gouvernement prétend que ce projet de loi-ci vise explicitement à commercialiser l'assurance hypothèque et à égaliser les règles du jeu. À la demande du ministre, M. Peterson, nous discutons actuellement avec les fonctionnaires du ministère des Finances des options possibles permettant une garantie gouvernementale complète pour notre société. Nous avons en effet proposé deux options en vertu desquelles le gouvernement serait indemnisé pleinement aux taux commerciaux. Il incombe donc au comité de modifier le projet de loi pour inclure la même garantie pour les deux assureurs, afin que les règles du jeu soient les mêmes pour tous.
Pour ce qui est des pouvoirs conférés à la SCHL par le projet de loi, nous ne nous opposons pas à la marge de manoeuvre supplémentaire accordée à la SCHL en vue de lui permettre de fonctionner pleinement sur le marché. Toutefois, nous avons comme source d'inquiétude les pouvoirs supplémentaires qui donneraient à la SCHL une longueur d'avance sur nous du simple fait que nous sommes un assureur autorisé sous la tutelle du BSIF et du fait que nous ne savons pas comment les pouvoirs prévus par le projet de loi se traduiraient dans la réalité. Les pouvoirs supplémentaires qui seraient conférés à la SCHL pourraient, par exemple, lui permettre d'agir comme intermédiaire financier dans le financement des prêts à l'habitation et lui donneraient des pouvoirs dans le secteur de l'assurance qui dépassent de loin la simple assurance hypothèque, ce qui permettrait à la SCHL d'offrir, par exemple, de l'assurance-maison et de l'assurance-créance en cas de décès, deux formes d'assurance qui sont actuellement offertes par le secteur privé.
Ces pouvoirs supplémentaires ne se justifient pas, à notre avis, et n'ont rien à voir avec les activités de la SCHL dans le domaine du logement social; elles touchent plutôt l'assurance hypothèque, domaine dans lequel la SCHL concurrence directement le secteur privé. Il faudrait donc modifier ces dispositions du projet de loi, comme nous vous l'avons suggéré par écrit.
En conclusion, nous n'avons rien contre le maintien du Fonds d'assurance hypothécaire de la SCHL, car nous reconnaissons le rôle essentiel que joue cette dernière dans le logement social. Je rappellerais aux honorables sénateurs que l'assurance hypothèque est bien distincte du logement social. Nous croyons également que le Fonds d'assurance hypothécaire de la SCHL doit continuer à être exploité sur une base commerciale et doit continuer à adhérer aux mêmes règles du jeu que les autres, afin d'offrir un système efficace, à plusieurs options et au moindre coût possible, aux acheteurs de maisons.
Nous croyons avoir compris que la commercialisation du Fonds d'assurance hypothécaire aurait pour conséquence qu'aucune assurance ne répondant pas aux critères de la viabilité commerciale ne serait plus désormais souscrite. Autrement dit, tout élément sortant de ce cadre, par exemple un programme destiné à atteindre un objectif de politique économique ou sociale, sera tarifé et payé par le gouvernement. Dans certains cas, il pourrait être raisonnable pour le gouvernement de demander aux assureurs publics et privés de soumissionner en vue de certains types de transactions non commerciales. Ce serait une solution.
Les Canadiens profitent déjà pleinement de la concurrence qui se fait sur le marché de l'assurance hypothèque. En égalisant encore plus les règles du jeu, ils en profiteront encore plus. Nous encourageons donc les sénateurs à examiner comment les modifications apportées par le projet de loi C-66, conjointement avec nos recommandations, influeront sur la concurrence d'aujourd'hui et de demain.
Le sénateur Doody: D'après vous, comment explique-t-on la différence de garantie de 100 p. 100 pour la SCHL et de 90 p. 100 pour GE? Nous avons posé la question hier, et le représentant du ministère des Finances nous a répondu que cela correspondait à ce qui avait été prévu par l'ancienne Compagnie d'assurance d'hypothèques du Canada, dont vous-mêmes avez acheté les actifs, et qui, par conséquent, existe encore. Le témoin d'hier n'a pas pu, ou n'a pas voulu, en dire plus.
Le ministre a répondu que la différence venait peut-être du fait que GEMICO hésiterait à assumer certains risques, contrairement à la société d'État. Il a donné comme exemple possible les régions septentrionales du Canada, et j'imagine que ce qu'il disait pourrait s'appliquer aux régions rurales du Canada.
GEMICO est-elle disposée à accepter le même niveau de risque que la Société canadienne d'hypothèques et de logement, et ce, dans tout le Canada? Vous est-il déjà arrivé de refuser certains risques parce que vous vous sentiez vulnérables et que vous préfériez que la société d'État les assume à votre place? J'essaie de justifier l'existence d'une société d'État dans le domaine de l'assurance, et hier je n'ai pas pu aller plus loin.
M. Vukanovich: Nous acceptons des demandes de toutes les régions du Canada.
Ce n'est pas ce qui se passait lorsque nous avons démarré en 1995, mais la compagnie a changé d'attitude à cet égard.
De plus, maintenant que l'on modifie la donne en vue de rendre la SCHL plus commerciale, il y aurait d'autres façons -- dont on pourra discuter -- qui nous permettraient à notre tour de nous lancer dans des programmes à saveur sociale ou économique. On pourrait, par exemple, demander à la SCHL et à nous-mêmes de soumissionner tous deux. Tout cela est possible.
Le sénateur Doody: La façon dont se mènent aujourd'hui les affaires est sans doute très différente de ce qu'elle était lorsque vous avez lancé l'entreprise. Les systèmes électroniques vous permettraient d'être présents dans tout le Canada, beaucoup plus qu'il y a 10 ou 15 ans. Rien ne vous empêche plus, matériellement parlant, de faire des affaires dans toutes les régions du Canada. Vos ressources devraient vous permettre de vous déplacer là où sont les affaires, n'est-ce pas?
M. Vukanovich: En effet.
M. Michael Davies, vice-président et chef du contentieux, GE Capital Assurance Hypothèque: Je pourrais peut-être répondre à votre première question sur l'historique de la garantie de 90 p. 100. En effet, j'étais là à l'époque où GE Capital Assurance Hypothèque a acheté les actifs de la CAHC.
Vous avez raison de dire que la garantie de 90 p. 100 existait à l'époque de la CAHC. Lorsque nous avons acheté cette dernière, nous avons aussi acheté la garantie. Son transfert à GE Capital Assurance Hypothèque avait été négocié.
Mais comme le signalait M. Vukanovich, deux choses se sont produites depuis. Dans le cours de nos opérations, nous nous sommes rendu compte que cela constituait un obstacle majeur pour les banques qui voulaient faire affaire avec GE Capital Assurance Hypothèque, en raison des réserves de capital nécessaires. En raison de la différence de garantie qui s'applique à nous, il semble que les banques ne soient pas toujours disposés à faire des affaires avec nous. C'est un obstacle majeur.
L'autre chose qui a changé est la suivante: le projet de loi C-66 propose d'accorder des pouvoirs supplémentaires et plus vastes à la SCHL, ce qui nous désavantagera encore plus. Si la garantie n'est pas la même pour nous deux, qu'elle soit fixée à 90 ou à 100 p. 100, cela nous empêchera d'être pleinement compétitifs, les règles du jeu n'étant pas les mêmes pour les deux.
M. Robert Weese, vice-président, Relations gouvernementales et extérieures, GE Capital Assurance Hypothèque: Puis-je ajouter quelque chose à la réponse qu'a faite M. Vukanovich à votre deuxième question? Depuis 1998, GE a prospéré et a introduit dans ses opérations la technologie qui lui permet désormais d'accepter des demandes de la part de bailleurs de fonds de tout le Canada. Les petites localités éloignées posent à la SCHL comme à nous-mêmes des défis particuliers pour ce qui est des risques associés à l'achat d'une maison et aux prêts hypothécaires. Au fur et à mesure que la SCHL commercialisera ses opérations du Fonds d'assurance hypothécaire, elle en viendra bien à appliquer présumément les mêmes critères que nous dans l'évaluation des risques, avant d'accepter des demandes qui lui parviendront de prêteurs et d'acheteurs de tout le Canada.
Nous disons que si pour des raisons de politique économique ou sociale le gouvernement veut que le Fonds d'assurance hypothécaire fonctionne selon un modèle non commercial, de façon à prendre des risques qui ne sont pas commercialement viables, il devrait déterminer des programmes en ce sens, qui pourraient être offerts par nous ou par la SCHL, en établir le prix et le payer. Il pourrait peut-être aussi nous inviter à soumissionner pour des programmes de ce genre qui dépassent le mandat commercial que la SCHL est maintenant censée avoir relativement au Fonds d'assurance hypothécaire.
Le sénateur Doody: Il a été question de droits se chiffrant aux alentours de 190 ou 200 millions de dollars. Pourriez-vous me dire d'où vient cet argent et où il va? Pourriez-vous aussi me dire si vous ou la SCHL, ou les deux, avez à payer des droits?
M. Vukanovich: Je préférerais que ce soit M. Mayers qui vous explique ce qu'il en est.
M. Philip Mayers, vice-président, Développement commercial et titrisation, GE Capital Assurance Hypothèque: À l'heure actuelle, aux termes de l'entente que nous avons relativement à la garantie du gouvernement canadien, nous sommes tenus de verser au gouvernement des droits en compensation du risque inhérent à la garantie qu'il nous donne. Outre ces droits, nous sommes aussi tenus de verser de l'argent dans un fonds en fiducie auquel le gouvernement est partie. Les fonds en question sont mis en réserve et serviraient en cas de faillite de notre compagnie d'assurance hypothécaire à payer les demandes d'indemnisation. Le gouvernement paierait tout montant en sus jusqu'à concurrence de 90 p. 100 du montant assuré initial.
Aux termes du projet de loi C-66, la SCHL serait dorénavant tenue de verser des droits en compensation de la garantie explicite à 100 p. 100 de ses obligations accordée par le gouvernement. La SCHL n'étant pas un assureur agréé, elle n'est pas tenue d'avoir le même niveau de capital que GE. Le projet de loi ne donne pas tous les détails pour le calcul des droits. Il semble toutefois, d'après le plan d'entreprise, que les droits soient destinés à compenser le gouvernement pour le capital que la société serait tenue de garder en réserve si elle était un assureur agréé et à le compenser aussi pour la garantie à 100 p. 100 qu'il accorde à la SCHL.
Nous avons fait le calcul des droits à partir du montant en capital que nous devons garder en réserve. Il semble que le montant de 197 millions de dollars sur cinq ans soit une grossière sous-estimation par rapport à ce qu'il en coûte à l'assureur hypothécaire privé pour le capital qu'il doit garder en réserve et au taux de rendement raisonnable qu'il doit maintenir pour soutenir la concurrence avec les autres institutions financières canadiennes.
Le sénateur Doody: La SCHL serait-elle tenue de payer des droits à partir de la même formule qui sert à déterminer ce que vous devez payer?
M. Mayers: La formule est semblable, mais le montant des frais sous-estime, à notre avis, le coût pour l'assureur privé.
Le sénateur Doody: Le gouvernement ou la SCHL ont-ils fixé le montant à partir d'une formule ou de critères bien précis, ou s'agit-il d'un montant qui n'a rien à voir avec la réalité?
M. Mayers: Je ne peux pas répondre à la question. D'après le plan d'entreprise, il semble qu'il y ait une formule, mais les détails n'y sont pas divulgués et ne sont pas publics à notre connaissance.
Le sénateur Doody: Dites-vous que la SCHL devrait être tenue de payer un montant plus important ou qu'il faudrait éliminer complètement les droits, ou encore qu'il faudrait établir un fonds distinct ou une agence externe pour s'occuper de cela au besoin?
M. Mayers: Nous sommes pour l'imposition de certains droits, car ces droits visent à assurer des règles du jeu équitables pour ce qui est du coût du capital que doit maintenir l'assureur privé. Nous sommes toutefois d'avis que, si la SCHL doit exercer son activité selon un modèle commercial, le rendement que tire le gouvernement de cette activité devrait être semblable au rendement que tirent d'autres institutions financières canadiennes de leurs activités commerciales. C'est là un élément essentiel de la transformation de la SCHL en société commerciale. Nous croyons, par conséquent, que, parce que les droits ne reflètent pas le coût véritable, la SCHL pourrait être tentée de se comporter comme une entreprise non commerciale. La SCHL doit naturellement fixer ses prix et ses primes de manière à s'assurer un revenu suffisant pour payer les droits exigés.
Le sénateur Doody: Y aurait-il effectivement un transfert en espèces, ou s'agirait-il simplement d'une inscription au grand livre du gouffre du Trésor public?
M. Mayers: Encore là, d'après ce que j'ai pu tirer du plan d'entreprise, il semble que le montant sera pris sur le Fonds d'assurance hypothécaire de la SCHL et versé au receveur général.
Le sénateur Doody: Le montant irait donc au Trésor public. En l'absence d'information contraire, je suppose que c'est là qu'il irait.
M. Mayers: Je crois bien que oui.
[Français]
Le sénateur Gill: Mon collègue a posé une question sur l'histoire des risques. Si j'ai bien compris, vous avez demandé à peu près l'équivalent de 100 p. 100 à la Société canadienne d'hypothèque et de logement concernant les risques. Ma question concerne les autochtones. Dans les audiences précédentes, la Banque de Montréal a mentionné qu'elle est prête à aller dans les communautés indiennes et à organiser du financement pour l'habitation. Est-ce que vous êtes prêt, si en fait vous voulez avoir une garantie équivalente à celle de la Société canadienne d'hypothèque et de logement, à aller dans les communautés indiennes un peu partout au pays selon les demandes du Parlement? En fait la SCHL se plie aux demandes gouvernementales. Si vous obtenez 100 p. 100, la même chose que la Société, est-ce que vous êtes prêt à prendre les mêmes risques dans les réserves indiennes et ailleurs au pays, partout où on vous demande de le faire?
[Traduction]
M. Vukanovich: Chaque demande est évaluée selon ses mérites, y compris le risque qu'elle comporte. Peu importe d'où vient la demande, il y a une certaine méthode à suivre pour calculer le risque et le produit à tirer du prêt. Le produit est à peu près toujours le même, puisque les primes sont prescrites. Les demandes sont donc évaluées selon les critères relatifs au risque qu'elles présentent.
[Français]
Le sénateur Gill: Qu'est-ce que qui nous garantit que vous allez le faire puisque vous êtes une compagnie privée? Vous n'êtes pas réglementée comme la SCHL peut l'être. Est-ce qu'on a des garanties que vous allez le faire?
[Traduction]
M. Vukanovich: Je ne vois absolument aucun inconvénient à discuter de ce que la garantie à 100 p. 100 entraînerait comme obligation, si c'est la décision qui est prise. Il pourrait être stipulé comme condition qu'il nous faudrait modifier la façon dont nous évaluons les demandes, et cela pourrait faire partie de la discussion.
[Français]
Le sénateur Gill: Avec une modification à un projet de loi où on changerait le montant à 100 p. 100, qu'est-ce que qui nous garantit que vous allez continuer à suivre ce que vous dites et que vous êtes prêt à aller dans les communautés partout au Canada? Si on vous accorde 100 p. 100 comme à la Société ou si on accepte un amendement au projet de loi, qu'est-ce que qui nous dit que vous allez le faire?
[Traduction]
M. Vukanovich: Quelle garantie avez-vous relativement à la garantie? D'après le libellé actuel, et je suppose que le libellé demeurerait le même, la garantie peut être retirée. Si, pour quelque raison que ce soit, vous étiez d'avis que nous ne respections pas nos obligations et nos engagements, la garantie pourrait être retirée.
La garantie est là pour encourager la concurrence.
M. Weese: Le ministre et les représentants de la société nous ont dit que la SCHL exploite son Fonds d'assurance hypothécaire selon le modèle commercial. C'est justement ce que vise le projet de loi à l'étude. La SCHL évaluera les demandes d'assurance hypothécaire exactement comme nous le faisons, et elle appliquera les mêmes critères pour évaluer les risques qu'elles présentent. Il ne devrait pas y avoir de différence entre la façon dont la SCHL et GE reçoivent et évaluent les demandes d'assurance hypothécaire.
S'il y a des régions où le gouvernement estime, pour des raisons de politique économique ou sociale, qu'il est important d'offrir un certain produit d'assurance hypothécaire qui ne répond pas au critère de la viabilité commerciale, que le critère soit appliqué par la SCHL ou par GE, il devrait élaborer un programme exprès à cette fin, il devrait en établir le prix et payer la part qui dépasserait le coût de l'exploitation d'une entreprise d'assurance hypothécaire selon le modèle commercial.
Le sénateur Butts: Je crois savoir que vous proposez cinq amendements au projet de loi C-66. Pourriez-vous me décrire la situation dans laquelle vous vous trouveriez si aucun de ces amendements n'était retenu? Deuxièmement, pourriez-vous les mettre par ordre d'importance et me dire quels seraient ceux auxquels vous tiendriez absolument si vous ne réussissiez à en obtenir qu'un ou deux?
M. Vukanovich: Notre situation serait celle d'un compétiteur privé considérablement affaibli. Tout dépend de la façon dont la SCHL choisira d'exercer les nouveaux pouvoirs qui lui seront conférés. Hier, la SCHL a parlé de ces pouvoirs comme d'un «vaste éventail d'outils». Ils n'étaient pas très bien définis; les précisions devaient venir plus tard. Ce ne sont peut-être pas les mots exacts qu'a utilisés la SCHL, mais je crois que c'est ce qu'on retrouverait au compte rendu. C'est la façon dont elle utilisera ces outils qui est d'importance primordiale pour nous. Ce serait la première question pour nous.
Pour ce qui est de mettre les cinq amendements en ordre d'importance, ce serait le niveau de la garantie qui viendrait en premier. Nous avons demandé que le projet de loi soit amendé en ce sens. Nous sommes préoccupés par le fait que la garantie ne s'étend pas aux nouveaux produits qui seront offerts à moins que la SCHL n'offre des produits semblables. Il pourrait y avoir un avantage considérable pour les consommateurs à ce que la garantie s'applique aux nouveaux produits, car ce serait pour nous une incitation à offrir plus rapidement de nouveaux produits. Il y aurait aussi un avantage pour les prêteurs sur le plan du coût.
Pour ce qui est de la garantie de titre hypothécaire, la situation est assez complexe. Je dirais dès le départ que la SCHL a le monopole de ce type de garantie. Le projet de loi C-66 donne à penser que les hypothèques assurées par GE pourront être admises dans le Programme de garantie des titres hypothécaires. Il ne précise toutefois pas à quel coût ni à quel prix. Il faudrait absolument savoir ce qu'il en est pour déterminer si les règles du jeu seront dorénavant équitables pour nous ou si on ne fait que nous y inclure sans qu'il soit avantageux pour qui que ce soit de faire appel à nous, encore une fois à cause du prix.
Je dirais que ce sont là les trois questions prioritaires pour nous. J'inviterais M. Mayers à vous dire s'il y a des éléments dans ce que j'ai dit avec lesquels il n'est pas d'accord ou s'il aurait d'autres éléments à ajouter.
M. Mayers: L'autre question qu'il convient de mentionner est celle des nouveaux pouvoirs qu'aura la SCHL aux termes du projet de loi et qui lui permettront d'émettre des titres sur le marché et de profiter de la cote triple A du gouvernement canadien pour emprunter. Elle pourra alors acheter des hypothèques à des prêteurs, mais uniquement celles qu'elle assure elle-même. Le financement des hypothèques au Canada pourrait s'en trouver complètement transformé, et le gouvernement pourrait également devoir emprunter plus d'argent.
Il est difficile de comprendre pourquoi on a voulu donner ce pouvoir à la SCHL, étant donné l'efficience du marché hypothécaire canadien. C'est là une autre question qu'il vaudrait la peine d'étudier. Nous recommandons que l'article soit supprimé.
Le sénateur Butts: Vous dites vous-même que tous ces pouvoirs sont nouveaux; aussi tout cela n'est que conjecture finalement, n'est-ce pas?
M. Vukanovich: La garantie à 100 p. 100 du gouvernement est très claire. Le fait que nous ne puissions pas offrir de produits qui bénéficient de la garantie si la SCHL n'offre pas les mêmes produits est clair aussi. Le rôle de la SCHL comme intermédiaire financier est un sujet de conjecture. Le programme de garantie des titres hypothécaires ne l'est pas.
Le sénateur Butts: Je ne faisais que reprendre ce que vous avez dit au sujet du fait que les pouvoirs étaient nouveaux.
M. Vukanovich: Ils le sont en partie.
Le sénateur Butts: Vous avez prospéré sous le régime de la loi existante, n'est-ce pas?
M. Vukanovich: Nous avons prospéré jusqu'à maintenant, mais il faut comprendre que les frais de montage pour les hypothèques font l'objet d'une concurrence très vive. Nos clients nous disent sans ambages que tout accroissement des frais que nous leur demandons, par rapport à ceux que demande la SCHL, aura un effet inhibiteur important quand il s'agira de traiter avec nous à l'avenir.
M. Weese: La souplesse accrue que permettra le fonds d'assurance hypothécaire créé par le projet de loi, auquel nous ne voyons aucun inconvénient, et les pouvoirs supplémentaires qu'aura la SCHL dans le domaine de l'assurance hypothécaire accroîtront la disparité qui existe depuis toujours entre nous à cause du niveau de garantie différent. À mon avis, le problème fondamental tient au niveau de la garantie. Il faut corriger cette situation pour que nous ayons un marché de l'assurance hypothécaire plus compétitif.
Tout le monde est d'accord pour dire que la concurrence sur ce marché a eu des effets positifs.
La concurrence a contribué à accroître l'efficience, à accélérer les délais de traitement, à abaisser les coûts et à susciter l'offre de nouveaux produits destinés aux acheteurs de logement. Tout le monde souhaite que le marché de l'assurance hypothécaire soit compétitif.
Nous avons présentement 12 p. 100 du marché, alors que la SCHL en a 88 p. 100. Les prêteurs, qui sont nos clients, nous disent que nous n'avons aucune chance de dépasser cette proportion de 12 p. 100 à cause des frais supplémentaires que nous leur occasionnons. Il sera impossible à notre avis de faire en sorte que le marché soit compétitif si on ne règle pas à tout le moins ce problème fondamental qui tient au niveau de la garantie.
Le sénateur LeBreton: Hier, quand nous avons rencontré le ministre responsable de la SCHL à notre comité, il m'a semblé -- et je ne veux pas par là manquer de respect envers le ministre -- qu'on n'arrivait pas à avoir des réponses claires, le ministre s'étant contenté de dire que la SCHL était soumise à peu près au même régime réglementaire que les assureurs de prêts hypothécaires privés. Je lui ai demandé ce qu'il entendait par là; il m'a répondu que, pour sa part, il ne voyait aucun inconvénient à ce qu'on uniformise les règles du jeu et à ce que la garantie soit fixée à 100 p. 100 pour les deux. Puis les fonctionnaires du ministère des Finances ont invoqué le fait que GE Capital avait repris le fonds de commerce de la CAHC en 1991 et que c'est ce qui avait été prévu dans l'entente de janvier 1995, il y a de cela quatre ans; c'était 90 p. 100 à ce moment-là, et c'est pour cette raison que c'est 90 p. 100 maintenant. Ils n'ont pas pu donner de réponse plus précise, si ce n'est que de dire que c'est pour cette raison que le niveau est fixé à 90 p. 100.
Je me demande si vous ou les représentants de l'Association des banquiers canadiens ou encore les intervenants du milieu financier, avez demandé au ministère des Finances d'expliquer pourquoi il y a cet écart, si le ministre responsable de la SCHL ne voit aucun inconvénient à ce qu'on uniformise le niveau de la garantie. Leur avez-vous demandé s'ils sont disposés à changer cela?
M. Weese: Comme on l'a dit tout à l'heure, quand nous sommes arrivés sur le marché en faisant l'acquisition de l'ancienne CAHC, nous avons négocié la cession de la garantie existante. Je ne suis pas sûr si, à vrai dire, nous avons jamais compris pourquoi la garantie était fixée à 90 p. 100, alors que la SCHL, en sa qualité de société d'État, avait automatiquement droit à une garantie de 100 p. 100 du gouvernement. Je ne suis pas sûr que quelqu'un nous ait jamais donné de raisons pour expliquer cela, et, à l'époque, notre principal souci était de nous assurer que la garantie nous soit cédée. Si nous n'avions pas eu de garantie, nous n'aurions pas pu exercer notre activité sur le marché et, au regard de la façon dont la SCHL était alors constituée et dont elle exerçait son activité avec les pouvoirs dont elle disposait à l'époque, nous pensions pouvoir nous bâtir une clientèle avec une garantie à 90 p. 100.
En réponse à la deuxième question, je dirais que nous avons eu des discussions avec les fonctionnaires du ministère des Finances, à la demande expresse du ministre Peterson, afin d'essayer de trouver un moyen d'avoir accès à la garantie de 100 p. 100 sans pour autant accroître ni le coût ni le risque pour le gouvernement. Je crois pouvoir dire que nous faisons des progrès; nous n'avons toutefois pas encore obtenu que la garantie soit portée à 100 p. 100, et il serait utile que votre comité envoie un message d'appui afin d'encourager les fonctionnaires du ministère des Finances et nous-mêmes à continuer à travailler à la recherche d'une solution au problème.
Le président: Vous demandez que nous fassions plus que d'envoyer un message, cependant.
M. Weese: Oui.
Le président: Vous nous demandez d'intervenir dans les discussions et de leur forcer la main.
M. Weese: Exactement. Merci.
Le président: Nous enverrons un message.
Le sénateur LeBreton: Les fonctionnaires du ministère des Finances nous ont indiqué que rien n'avait changé. J'ai dit, pour ma part, que quelque chose avait changé, puisque nous sommes saisis du projet de loi C-66. Je me demande simplement pourquoi, étant donné que le Parlement est saisi d'un projet de loi comme celui-là, ils n'ont pas commencé par s'attaquer à cette question. Je ne m'attends manifestement pas à une réponse de votre part.
Nous avons parlé de règles du jeu équitables, mais vous avez évoqué les difficultés accrues qui résultaient des nouveaux pouvoirs plus vastes de la SCHL. Pouvez-vous nous donner un exemple pour nous aider à comprendre votre situation? Vous avez parlé de pouvoirs élargis qui donnent un avantage accru à la SCHL. Est-ce de cela que vous vouliez parler? J'ai cru comprendre d'après votre témoignage que vous parliez des autres pouvoirs conférés à la SCHL par le projet de loi, et pas seulement de cela.
M. Vukanovich: Cela nous ramène à ce dont nous parlions avec le sénateur Butts. Hier, la SCHL a parlé de ces pouvoirs comme étant un vaste éventail d'outils qu'elle serait libre d'exercer ou de ne pas exercer. Pourquoi alors avoir donné à la SCHL des pouvoirs aussi vastes sans les avoir définis? Si elle décide de faire certaines des choses dont nous avons parlé, comme jouer un rôle d'intermédiaire financier ou se lancer dans l'assurance-habitation, elle pourrait devenir un guichet unique pour nos clients, ce qui nous mettrait manifestement dans une situation où nous ne pourrions pas soutenir la concurrence. Le BSIF ne nous permet pas de faire cela. Notre permis ne nous permet pas non plus de le faire. Quiconque n'a pas une garantie complète du gouvernement ne peut pas faire cela. Aussi, si elle décidait de se lancer dans ces secteurs, elle aurait un énorme avantage sur le plan de la concurrence.
Le sénateur LeBreton: Je veux revenir sur une question que vous a posée le sénateur Gill. Hier, le ministre a aussi parlé de l'écart comme étant dû au fait que vous êtes une entreprise du secteur privé qui doit rendre des comptes à un conseil d'administration du secteur privé, alors que la SCHL est une société d'État qui est plutôt axée sur l'intérêt public. Si toutefois j'ai bien compris la réponse que vous avez faite au sénateur Gill, sur le plan de l'assurance hypothécaire et sur le plan de l'accessibilité et du taux d'autorisation des demandes d'assurance hypothécaire, il n'y a aucune différence. Le fait que vous soyez une entreprise privée ne veut pas dire que tel projet d'habitation dans le Nord serait défavorisé parce que vous êtes sur le marché ou que la SCHL n'y est pas ou que vous y êtes tous deux. Ai-je bien compris?
M. Vukanovich: Lorsque la SCHL parle de commercialiser ses services à l'avenir, il me semble qu'elle va examiner les demandes de la même façon que n'importe qui au secteur privé. Ses employés examineront les demandes comme nous les examinons et évalueront les risques. Si un gouvernement a un programme précis à subventionner -- je ne suis pas sûr que ce soit le bon terme -- ou à encourager ou favoriser, il devra payer pour cela.
Le sénateur LeBreton: Il devra aller au-delà des limites prévues ici.
M. Vukanovich: Oui.
Le président: Une garantie à 100 p. 100 suffirait, vous ne trouvez pas?
Le sénateur LeBreton: Je crois que les témoins disent qu'il faudrait aller au-delà.
M. Vukanovich: Cela va très loin, sénatrice, effectivement.
Le sénateur LeBreton: Bien sûr, GE Capital est une très grande société. Tout le monde pense que c'est une des plus grandes sociétés du monde. Décrivez-nous GE Capital Canada. S'agit-il d'une entreprise canadienne indépendante? Combien d'employés avez-vous au Canada et où y êtes-vous basés?
M. Vukanovich: Notre société, GE Capital Assurance Hypothèque, est basée à Mississauga, en Ontario. Nous avons 10 bureaux répartis dans diverses villes au Canada. Nous avons une personne à Victoria, ainsi que des bureaux de Vancouver à Halifax. Nous avons une centaine d'employés actuellement, après la croissance que nous avons connue ces deux dernières années. GE Capital est un réseau très complexe de sociétés. Au Canada, je crois savoir que GE Capital compte environ 4 000 employés, qui sont tous Canadiens. GE Capital a une présence considérable au Canada et se divise en 16 ou 17 entreprises, chacune indépendante.
Le sénateur LeBreton: Je vous pose la question parce qu'il y a toujours, au Canada, des gens qui semblent croire que seules les sociétés d'État sont canadiennes, alors que les autres ne le sont pas.
M. Vukanovich: Nous sommes Canadiens.
[Français]
Le sénateur Ferretti Barth: Au comité de la Chambre des communes, vous avez dit que contrairement à la Société canadienne d'hypothèque et de logement, vous ne faites pas de prêt pour le logement locatif. Pourquoi?
[Traduction]
M. Mayers: Actuellement, nous nous occupons principalement d'assurer les propriétés occupées par leurs propriétaires. Nous n'assurons pas encore les immeubles de rapport, bien que nous ayons l'intention de commencer à examiner cela.
Comme le reconnaît la SCHL dans son plus récent plan d'entreprise, le taux de prime facturé pour les immeubles de rapport était impossible d'entrer dans ce secteur sans subir des pertes importantes. Dans son plan d'entreprise le plus récent, la SCHL note qu'elle a maintenant augmenté ses taux de prime, pour les faire passer au niveau commercial. Par conséquent, notre entreprise peut maintenant envisager de s'intéresser à ce marché.
[Français]
Le sénateur Ferretti Barth: Si vous voulez le faire, vous serez obligé de modifier votre permis. La SCHL n'a pas le permis pour le faire. Le sénateur Gill vous a demandé s'il y a dans les territoires éloignés du développement d'habitation locative? Vous ne pouvez donner votre support hypothécaire parce que vous n'avez pas le permis. Vous n'avez pas pensé de changer votre permis?
[Traduction]
M. Vukanovich: Pour obtenir ces types de nouveaux produits, nous devons actualiser notre permis. Il faudrait que nous présentions une demande aux responsables de la réglementation.
[Français]
Le sénateur Ferretti Barth: Depuis combien d'années êtes-vous sur le marché des hypothèques?
[Traduction]
M. Vukanovich: Au Canada, nous avons acheté la franchise d'assurance hypothécaire de la CAHC en 1995. Nous en sommes maintenant à notre quatrième année de fonctionnement.
[Français]
Le sénateur Ferretti Barth: Vous n'avez pas modifié votre permis. Est-ce que vous avez l'impression que les prêts pour le logement locatif n'est pas un secteur d'activités très rentables pour votre compagnie? En quatre ans, vous avez travaillé dans ce secteur. Vous allez faire des profits peut-être si vous modifiez votre permis. Jusqu'à maintenant, vous ne l'avez pas fait. Cela veut dire qu'une partie de notre société n'est pas couverte par votre société d'hypothèque locative.
[Traduction]
M. Vukanovich: Comme l'a dit M. Mayers, les modifications récentes au taux de prime intervenues le 1er janvier 1999 permettent maintenant, au plan économique, de s'intéresser à ce marché.
[Français]
Le sénateur Ferretti Barth: Savez-vous aussi que la SCHL canadienne est obligée de couvrir tous les secteurs de notre société? Elle est obligée de faire des changements. Le projet de loi C-66 est à cet effet. Est-ce que vous êtes prêt à changer votre licence? Vous avez de la compétition maintenant. Le gouvernement et la Société canadienne d'hypothèque et de logement a 100 p. 100 de responsabilité. Vous avez 90 p. 100, c'est juste. La différence de 10 p. 100 va combler ce que vous ne pouvez pas faire. Il y a des services peut-être supérieurs aux vôtres, plus complets, plus approfondis pour la population.
[Traduction]
M. Vukanovich: Vous confondez peut-être le marché locatif et le marché résidentiel de base. Nous leur livrons concurrence pour le marché résidentiel des habitations occupées par le propriétaire, et non pour le marché des appartements. Comme je l'ai dit plus tôt, la garantie porte sur le fait d'être concurrentiels dans le segment où nous livrons concurrence. Nous pourrons nous intéresser au logement locatif si notre demande de modification de permis est agréée.
Le sénateur Ferretti Barth: Ne faites-vous pas cela maintenant?
M. Vukanovich: Nous ne l'avions pas sérieusement envisagé parce que ce n'était pas du tout lucratif. Ce n'est qu'en janvier 1999 qu'il est devenu plus raisonnable de s'intéresser à ce type d'affaires. Je le précise encore une fois, il s'agit d'un secteur assez compliqué.
[Français]
Le sénateur Gill: Je suis un peu les discussions depuis que le projet de loi a été adopté à la Chambre des communes. Votre compagnie a indiqué que le marché progressait continuellement. En 1997, il avait progressé de 5 p. 100. -- j'utilise vos chiffres -- 8 p. 100 en 1998 et vos projections pour 1999 étaient de 15 p. 100 d'augmentation. J'imagine que ce sont à peu près vos chiffres. J'essaie de citer les chiffres que vous avez donnés.
M. Vukanovich: C'est exact.
[Traduction]
Le sénateur Gill: Vous avez dit que les discussions en cours avec le ministère des Finances ne se déroulent pas trop mal.
M. Vukanovich: Oui, mais la rondelle n'est pas encore dans le filet.
Le sénateur Gill: Mais les discussions se déroulent bien. Vous avez demandé d'être placés sur un pied d'égalité avec la SCHL. Si ce comité-ci est prêt à recommander certaines modifications, serez-vous prêts à accepter toutes les obligations et les responsabilités de la SCHL et à poursuivre vos discussions avec le ministère des Finances?
M. Vukanovich: Absolument.
Le sénateur Gill: Si ces discussions se déroulent bien, pourquoi ne pas les poursuivre?
M. Vukanovich: Nous avons l'intention de le faire.
Le sénateur Gill: Plutôt que de nous demander de modifier le projet de loi C-66, seriez-vous prêts à poursuivre les discussions?
M. Mayers: Une des prémisses qui sous-tendent le projet de loi C-66, c'est l'intention du gouvernement d'uniformiser les règles du jeu. Ce dont nous discutons est une partie si importante de cette uniformisation des règles du jeu que nous avons pensé que cela devrait être porté à l'attention des divers comités qui étudient le projet de loi. Si la garantie gouvernementale n'est pas de même niveau, les règles du jeu ne seront pas les mêmes, car les prêteurs actuels ont, lorsqu'ils traitent avec GE, des frais qu'ils n'ont pas lorsqu'ils traitent avec la SCHL. Du fait de l'intention avouée du gouvernement d'uniformiser les règles du jeu et de commercialiser les opérations du Fonds d'assurance hypothécaire de la SCHL, nous avons jugé approprié que cette question soit examinée par les divers comités.
Le président: Monsieur Vukanovich, vous avez dit que la garantie de 90 p. 100 figure dans un accord avec le gouvernement, et, si je comprends bien, vous avez hérité de cet accord, qui a été conclu avec vos prédécesseurs.
Dans le cadre de cet accord, vous payez un droit annuel au gouvernement et vous cotisez à un fonds fiduciaire établi pour protéger les souscripteurs de polices d'assurance. Y a-t-il, dans cet accord, autre chose que nous devrions examiner? Est-ce là tout l'accord?
M. Mayers: L'autre élément clé, c'est que l'accord continue d'exister seulement tant que la SCHL continue d'être une société d'État. Si la garantie de la SCHL est réduite, notre garantie est réduite d'autant.
Le président: Autrement dit, si la SCHL était privatisée, il n'y aurait de garantie ni pour elle ni pour vous; est-ce exact?
M. Mayers: La garantie porte uniquement sur les produits d'assurance hypothécaire qui sont offerts par la SCHL. Si nous proposions un nouveau produit, autre que ceux qu'offre actuellement la SCHL, il ne bénéficierait pas de la garantie gouvernementale.
Le président: Peut-on négocier l'ajout de produits supplémentaires? D'après les dispositions actuelles, vous ne le pouvez pas.
M. Mayers: C'est exact.
Le président: Vous n'auriez pas besoin d'avoir un accord indéterminé relativement à la garantie, n'est-ce pas?
M. Mayers: Si l'accord prévoit que le ministère des Finances peut envisager d'étendre la garantie à des produits qui ne sont pas offerts par la SCHL, au cas par cas, cela nous conviendrait.
Le président: D'après votre témoignage, vous seriez certainement favorables à un accord qui, pour ce qui est de la garantie, vous mettrait sur un pied d'égalité avec la SCHL, et qui vous imposerait d'autres exigences quant à votre manière de fonctionner, aux lieux de fonctionnement, à la disponibilité des services, et cetera.
Le sénateur Doody: Monsieur le président, si cette mesure législative est adoptée dans sa forme actuelle, les nouveaux pouvoirs non précisés qui seraient accordés à la SCHL ne seraient pas tous automatiquement accordés à ses concurrents. Loin d'uniformiser les règles du jeu, cette mesure causerait un déséquilibre bien plus grand qu'à l'heure actuelle. Tous les nouveaux secteurs d'affaires ouverts à la SCHL seront automatiquement fermés à la seule société qui leur fasse concurrence. Cela revient à édicter des règles du jeu qui favorisent la société d'État plutôt que de respecter le principe énoncé par les parrains du projet de loi. Cela a un effet nuisible. De deux choses l'une: soit le principe de l'uniformisation des règles du jeu n'est pas sérieux, soit cette disposition s'est retrouvée dans le projet de loi par inadvertance.
Le président: Messieurs, je vous remercie beaucoup de votre témoignage de ce soir. Nous passons maintenant à la Fédération de l'habitation coopérative du Canada. Certains d'entre nous ont profité de l'occasion hier pour poser des questions au ministre, lorsqu'il a comparu devant nous, sur certaines des remarques faites par cet organisme lors de sa comparution devant le comité de la Chambre des communes. M. Hunter est conseiller juridique de la fédération.
M. Laird Hunter, avocat général, Fédération de l'habitation coopérative du Canada: J'ai deux observations à faire, sénateur. Tout d'abord, il y a eu une erreur. Je suis avocat général de la Fédération de l'habitation coopérative du Canada, et non pas directeur. Mon client est désolé de n'avoir pas pu dépêcher ici des agents de la fédération. Ils sont à leur assemblée annuelle, et j'ai été délégué ici pour les représenter. Deuxièmement, je voudrais vous présenter mes excuses. Nous n'avons pas eu assez de temps pour traduire mon exposé en français, et j'en suis désolé.
Le sénateur Murray a eu la bonté de me fournir la transcription du témoignage que vous avez entendu le 1er juin. J'ai eu la possibilité de l'examiner à la hâte, et je changerai donc certaines choses dans la déclaration que j'ai fait distribuer.
Essentiellement, mon client a une préoccupation d'ordre très général qu'il a exprimée à deux niveaux particuliers, soit auprès de la société et auprès du comité de la Chambre des communes. Cette préoccupation générale a été exprimée au cours des témoignages que vous venez d'entendre. Ce thème a été repris par beaucoup de témoins devant le comité de l'industrie et lors des exposés faits au Parlement.
L'objectif principal du projet de loi C-66 est de commercialiser la SCHL. De façon générale, la FHCC et ses membres n'éprouvent pas d'inquiétude à l'idée que la SCHL s'engage dans une gamme d'activités visant à offrir aux Canadiens et aux marchés étrangers diverses possibilités et divers biens et services à des prix conformes à ceux du marché. Toutefois, ce qui les préoccupe, c'est l'autre colonne du bilan, celle des activités non axées sur les conditions du marché.
Dans son témoignage devant le Comité de l'industrie, le ministre a repris une observation faite dans le résumé. Il a demandé si les pressions exercées sur la SCHL pour répondre aux réclamations légitimes d'un marché de plus en plus concurrentiel supplanteraient la capacité et l'intérêt d'élaborer des politiques sur l'habitation concernant les citoyens dont les besoins et les revenus sont tels que le marché ne peut subvenir à leurs besoins.
Le 25 mars dernier, on a demandé au ministre, lors de son témoignage devant le comité de l'industrie, si le cadre d'imputabilité de cette mesure législative prévoit une situation où le rôle du gouvernement quant à l'établissement des politiques est presque entièrement supprimé. En fait, c'est la SCHL qui établit la politique gouvernementale. En réponse, le ministre a noté que les instruments traditionnels d'imputabilité étaient présents. Il a terminé en disant qu'en général cette mesure législative visait à assurer que la société puisse répondre aux exigences des consommateurs et du secteur financier.
La fédération et ses membres ne s'opposent pas à cela. Ce qui les préoccupe, c'est la capacité de la société et du gouvernement de prendre en compte les besoins des personnes qui sont incapables de répondre aux exigences du marché. Mon client entretient depuis longtemps avec la SCHL une relation qui, si elle a été parfois un peu cahoteuse, a toujours permis aux deux parties, selon nous, d'offrir divers types d'habitations coopératives qui abritent maintenant un nombre important de Canadiens dans des collectivités à revenu mixte.
La principale préoccupation, c'est que la poussée à la commercialisation contraigne la société à s'autofinancer et que cela nuise à sa capacité et même, si vous le permettez, à son intérêt à offrir une gamme d'options aux personnes incapables de respecter les conditions du marché.
Deux des préoccupations qui ont été exprimées par la FHCC en diverses circonstances se retrouvent également dans le résumé. Elles portent sur les très vastes pouvoirs accordés à la SCHL, lui permettant de déroger à des exigences législatives historiques en ce qui a trait à certaines initiatives.
En lisant rapidement la transcription de la séance d'hier, j'ai noté que M. Stewart a observé, à juste titre, qu'une des préoccupations de la FHCC tient au fait que les multiples détails dont il a fait état ont été supprimés. Cela est parfaitement vrai.
Les programmes qui ont été établis au fil des ans ont été des programmes prévus par la loi, en fonction des politiques gouvernementales fédérales. Dans le contexte d'une commercialisation naissante des opérations d'une société d'État, on s'éloigne des mécanismes publics et législatifs pour recourir à des mécanismes contractuels conformes à ceux d'une entreprise commerciale.
Pour les gens qui n'ont aucun pouvoir sur le marché, cette situation est cause d'inquiétude. J'ai été content d'apprendre, par les témoignages de M. le ministre Gagliano et de M. Stewart, qu'ils pensent que la conséquence imprévue à l'origine des préoccupations à mon client ne se réalisera pas.
Les honorables sénateurs qui ont eu l'occasion d'examiner le mémoire présenté au comité de la Chambre des communes savent qu'on a mentionné non seulement les dispositions contractuelles mais aussi les situations où interviennent des dispositions non contractuelles, telles que celles du logement social. Qu'est-ce qui empêcherait un gouvernement provincial de vendre les habitations de logement social?
Ce qui préoccupe la FHCC, c'est la tendance, en dépit des exigences en matière de justification et de contraintes budgétaires, d'oublier, d'écarter et de marginaliser les instruments et les intérêts qui, depuis longtemps, rehaussent le prestige de la SCHL en ce qui a trait à l'obtention de logements à prix abordable au Canada.
Je termine là-dessus. Les détails de ces diverses préoccupations sont exprimés dans le mémoire qui a été distribué et, comme l'a noté le sénateur Murray, dans le témoignage présenté par mon client devant le comité de la Chambre des communes.
Le président: Vous posez là-dedans trois questions, comme vous l'avez fait devant le comité de la Chambre des communes. Hier, nous avons essayé de poser ces questions au ministre et à ses adjoints. Tout d'abord, le projet de loi C-66 empêchera-t-il le gouvernement fédéral d'agir maintenant ou à l'avenir pour répondre aux besoins en logement des Canadiens? Êtes-vous rassuré par les réponses que nous a données le ministre hier?
M. Hunter: Je suis rassuré du fait qu'il n'y ait aucune intention en ce sens, monsieur le sénateur. Comme je l'ai dit, la préoccupation tient à la tendance qui se manifeste. Si l'on examine le nouvel article 28.1 et l'article 38 du projet de loi, on constate qu'on y donne à la Société la possibilité de déroger aux exigences législatives actuelles.
Le président: C'était votre deuxième question: Cela vise-t-il à permettre aux provinces de modifier les exigences législatives actuelles -- vous dites «rétroactivement»...
M. Hunter: Nous voulions dire «en rétrospective». C'est dans le contexte de dispositions contractuelles renégociées qui, historiquement, auraient été assujetties à un cadre législatif.
Le président: Êtes-vous rassuré?
M. Hunter: Pas complètement. Je voudrais examiner cela avec mon client. Je trouve rassurant que ce ne soit pas l'intention.
Le président: Le comité peut-il proposer un remède sous forme de modifications au projet de loi? Nous proposez-vous un amendement?
M. Hunter: Non. Franchement, nous nous sommes nous- mêmes interrogés sur ce qui pourrait constituer une modification appropriée. Nous n'avons pas réussi à en trouver une.
Le président: Très bien. Vous demandez pourquoi le projet de loi permet à la SCHL de déroger aux dispositions actuelles de la Loi nationale sur l'habitation pour les programmes existants et d'autoriser une province à en faire autant. Nous avons reçu des explications à ce sujet. Êtes-vous satisfait de ces explications?
M. Hunter: J'aimerais mieux avoir une explication détaillée sur les assurances fournies. J'ai lu très rapidement dans la documentation d'hier qu'elles figurent dans les accords et que les accords sur le logement social qui existent déjà doivent être agréés par les parties. Tout cela est vrai, mais, dans bien des cas, au niveau fédéral par exemple, nous nous rappelons des situations antérieures où la SCHL a apporté des corrections et où il y a eu de légères dérogations à des accords de fonctionnement, toujours dans le contexte d'initiatives de programmes en cours. Il n'y a rien qui nous assure qu'une province voudra maintenir tel ou tel programme en particulier. C'est là ce qui préoccupe mon client.
Le président: À la page 9 de votre mémoire, vous signalez que les membres de la Fédération croient fermement que les premiers accords de logement social transférant de la SCHL à la province les ressources existantes du gouvernement fédéral en matière de logements à prix abordable n'ont pas adéquatement protégé les accords de fonctionnement conclus entre vos membres et la SCHL contre toutes modifications souhaitées par la province.
Le ministre s'est dit d'accord avec nous et a insisté pour qu'il y ait une nouvelle clause dans le cinquième accord signé avec la Nouvelle-Écosse. De ce fait, les quatre premiers accords donnent une protection beaucoup plus faible que ceux qui les ont suivis.
M. Hunter: C'est exact. Dans le contexte des pouvoirs prévus en vertu de ce projet de loi, le ministre nous a assurés du changement apporté dans cet accord et nous en sommes reconnaissants. Cependant, nous craignons qu'au cours des années à venir, lorsque différentes parties se réuniront autour de la table et exposeront leurs situations respectives, les vastes pouvoirs prévus par ce projet de loi ne pourront être exercés avec le respect et la tolérance auxquels nous en sommes venus à nous attendre.
Le président: En ce qui concerne les autres provinces, vous vous interrogez sur ce qui adviendra des accords de mise en oeuvre de tierces parties dans ces provinces dans le contexte du projet de loi C-66. S'agit-il d'une question de pure forme ou connaissez-vous la réponse?
M. Hunter: Nous ne connaissons pas la réponse. Cependant, la déclaration faite par le ministre hier nous rassure à cet égard.
Le sénateur Butts: Je suis désolée de ne pas avoir eu le temps de lire l'exposé qui a été présenté, mais je ne manquerai pas de le faire. Ai-je raison de dire que vous ne vous plaignez pas des dispositions que renferme le projet de loi C-66 mais plutôt de ce qui ne s'y trouve pas?
M. Hunter: C'est assez juste, oui.
Le sénateur Butts: Le projet de loi n'a rien à voir avec le projet de transférer le logement social ou coopératif aux provinces, n'est-ce pas?
M. Hunter: C'est exact.
Le sénateur Butts: Pouvez-vous me dire combien de provinces participent à ce programme? Est-ce qu'il s'agissait d'un programme facultatif pour toutes les provinces? Au moins une province m'a indiqué qu'elle ne s'en était pas mêlée.
M. Hunter: D'après ce que je crois comprendre, madame le sénateur, comme l'indique le témoignage d'hier, c'est qu'il existait un accord global au début des négociations prévoyant ce que l'on a appelé la dévolution du logement social aux provinces. Des accords en matière de logement social ont été signés avec cinq et maintenant sept provinces. Dans le cadre de ce processus, des représentations ont été faites auprès du gouvernement.
Le ministre a indiqué hier dans son témoignage qu'en raison de la nature du logement coopératif, il tenait à conclure un accord permettant, pour les provinces qui n'ont pas signé d'accord, d'élaborer une méthode concertée de s'occuper du logement coopératif. Je crois comprendre que les décisions se déroulent sans que le logement coopératif fasse partie de ces accords.
Le sénateur Butts: La SCHL dirige-t-elle ce projet, ou les provinces ont-elles leur mot à dire?
M. Hunter: Je crois comprendre que les discussions se déroulent entre le gouvernement fédéral et les provinces.
Le sénateur Butts: Serait-il contraire à vos principes de m'indiquer les provinces qui n'y participent pas?
M. Hunter: À ma connaissance, l'Ontario, le Québec, la Colombie-Britannique et l'Alberta ne participaient pas à l'accord.
Le sénateur Butts: Ces quatre provinces représentent la majorité de la population du Canada. Cela ne correspond pas vraiment aux renseignements qu'on m'a fournis. Plus précisément, quelle est la position de l'Île-du-Prince-Édouard à cet égard?
M. Hunter: Personnellement, je l'ignore. Je crois que la province a signé.
Le sénateur Butts: Je ne veux pas vous mettre sur la sellette.
Le sénateur LeBreton: Les lettres que nous avons reçues hier indiquent le nom des provinces suivantes: la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, le Manitoba et les Territoires du Nord-Ouest, Terre-Neuve et Labrador.
Le président: Ce sont les provinces qui appuient le projet de loi.
Le sénateur LeBreton: Après avoir pris connaissance de ces lettres, le sénateur Cohen a posé la question à M. Rochon. Il a indiqué que les négociations avec neuf provinces avaient été terminées.
M. Hunter: Comme M. Stewart vient de me le dire, un accord a été signé avec sept provinces. Des discussions sont en cours avec toutes les provinces, mais je n'ai pas de détails à ce sujet.
Le président: Quoi qu'il en soit, le gouvernement fédéral ne s'occupe plus du logement social, n'est-ce pas?
M. Hunter: Pour l'instant.
Le sénateur Butts: En effet. Toujours à ce sujet, pourriez-vous me dire s'il y a eu des problèmes avec une province quelconque concernant le contrat que votre client avait conclu avec le groupe du logement coopératif?
M. Hunter: Il y a eu certaines difficultés en Saskatchewan avec le modèle de financement proposé, et d'après les témoignages entendus hier, je crois que 60 p. 100 du groupe a signé et 40 p. 100 ne l'a pas fait ou c'était peut-être 70 p. 100 et 30 p. 100; je n'arrive pas à me souvenir des chiffres exacts. Le temps nous dira si les préoccupations de la Fédération de l'habitation coopérative concernant le risque que le modèle de financement nuise à la capacité de la coopérative d'exister en tant que coopérative sont fondées.
Le sénateur Butts: J'ai reçu beaucoup de plaintes de personnes qui craignent que leur province ne respecte pas le contrat qu'elle avait conclu avec la SCHL, et c'est ce que je veux dire.
M. Hunter: C'est la crainte de notre fédération et les questions qu'elle se pose à cet égard. À cette époque de changement, comment peut-on être certain point que, dans le cadre de ce projet de loi axé sur des considérations commerciales, les relations surtout positives avec la SCHL se poursuivront avec les provinces?
Le sénateur Butts: Pouvez-vous me dire si les provinces qui ont pris la relève ont mis sur pied de nouveaux projets d'habitation coopérative?
M. Hunter: Il y a eu un programme de ce genre en Colombie-Britannique avant ce processus, mais la réponse est non.
Le sénateur Butts: Est-ce que cela pourra en fait marquer la fin de l'habitation coopérative?
M. Hunter: Sauf quelques exceptions au Québec, il n'y a eu aucun projet important au cours des dernières années.
[Français]
Le sénateur Gill: Monsieur Hunter, une bonne partie de la population est favorable aux coopératives d'habitation. Hier, le ministre nous a assurés que le projet de loi C-66 ne compromettait d'aucune façon les coopératives d'habitation. Au début, vous avez mentionné les articles 28 et 38. Est-ce que vous pourriez donner d'une façon précise ce qui vous fait penser que vous pouvez douter de la parole du ministre ou des contrats que vous avez signés avec le gouvernement fédéral? Ces contrats ne doivent-ils pas être respectés de la même façon lorsque le fédéral les transfère aux provinces? Lorsque vous parliez de ces articles au début, qu'est-ce qui vous fait douter du respect des ententes avec les coopératives d'habitation?
[Traduction]
M. Hunter: Je tiens tout d'abord à dire que je ne mets pas en doute la parole du ministre. Ce dont je parlais au début c'était des tendances. Le nouvel article 28.1 proposé, qui se trouve à l'article 34 du projet de loi, autorise la Société à coopérer avec une province, entre autres, pour l'exercice de certaines de ces pouvoirs et de conclure des ententes avec une partie pour que cette dernière puisse exercer certains des droits et certains des attributions et obligations de la Société. Puis, l'article 38 du projet de loi, c'est-à-dire les dispositions transitoires, prévoit que les dispositions qui sont modifiées ou abrogées continueront de s'appliquer à l'égard des ententes conclues avant la modification ou l'abrogation de ces dispositions, sauf dans la mesure où la Société canadienne d'hypothèque et de logement renonce à leur application.
La préoccupation que notre fédération a exprimée concerne les modalités techniques rattachées à certaines des conditions du marché. Il pourra être nécessaire de rééquilibrer les accords en fonction de nouvelles circonstances. Une province est alors en mesure de dire qu'elle ne souhaite pas le faire. La Société peut alors dire: «Comme il y a dérogation aux accords proprement dits, nous vous permettrons de déroger au cadre législatif qui existait pour mettre le programme d'habitation coopérative sur pied, et d'abord que vous observiez les principes énoncés dans les accords sur le logement social, vous pouvez utiliser ces fonds dans le cadre de l'accord global.»
Nous n'insinuons pas qu'il y a délit d'action, nous indiquons simplement que la protection prévue par la loi qui existait auparavant n'existe plus et que la Société peut y renoncer selon les impératifs des transactions entre les gouvernements.
[Français]
Le sénateur Gill: Il y a un contrat signé entre la Société canadienne d'hypothèque et de logement et les coopératives. La Société décide de négocier avec les provinces et de signer une entente avec elles. J'imagine qu'à ce moment, le fédéral exige que ses engagements déjà pris avec ces organisations soient respectés par la province. C'est une entente entre les coopératives et le fédéral. Il reste une entente entre le gouvernement provincial et les coopératives. Comment un gouvernement peut-il ne pas respecter une entente sans aller en cour ou sans que les coopératives puissent aller en cour?
[Traduction]
M. Hunter: Je ne voulais pas dire que le gouvernement serait forcément celui qui déroge au contrat. Souvent, dans le cadre des accords de logement social, les circonstances changent, et, comme M. Stewart et le ministre le savent bien, il existe tout un éventail d'arrangements qui doivent être pris pour gérer ces nouvelles circonstances. Jusqu'ici, dans le cas de nouvelles circonstances, les liens avec la SCHL ont consisté à modifier l'accord de mise en oeuvre du programme pour respecter et maintenir les principes de l'habitation coopérative -- l'exigence voulant que cela se fasse par l'intermédiaire d'une coopérative d'habitation et que cette coopérative soit à but non lucratif; certaines exigences voulant que le loyer soit établi en fonction du revenu; certaines exigences concernant le contrôle démocratique -- tout cela pour poursuivre le programme.
Lorsque le marché change et qu'il y a des pertes causées par le taux d'inoccupation -- il ne faut pas oublier que nous partons du principe qu'il s'agit de l'inefficacité du marché à assurer un logement à ceux qui autrement ne pourraient pas se le permettre -- les coopératives se trouvent alors à vouloir renégocier leur arrangement en raison des nouvelles circonstances. Ici encore, sans insinuer une volonté de mal faire, cela permet à la Société, pas maintenant mais plus tard, de dire simplement: «Non, il y a dérogation à l'accord; vous pouvez l'administrer quand même. S'il faut pour cela mettre fin à ce projet en particulier et utiliser les fonds en fonction des principes de l'accord que nous avons signé, vous pouvez le faire.» C'est ainsi que le client interprète cette série de dispositions.
[Français]
Le sénateur Gill: J'imagine que si la possibilité existe actuellement avec la SCHL, elle n'existe ni plus ni moins avec un transfert aux provinces. Vous mentionnez la possibilité que le contrat soit renégocié. Elle n'existe ni moins ni plus, j'imagine.
[Traduction]
M. Hunter: Elle existe, mais elle existe dans le contexte de ce que M. Stewart a décrit hier comme des couches et des couches de détails et une tradition de politiques publiques en matière de logement social au niveau fédéral qui n'existe pas au niveau provincial.
Le président: Dans certaines provinces.
M. Hunter: Oui, dans certaines provinces. Ce qui nous inquiète, c'est la tendance.
Le sénateur LeBreton: Le sénateur Butts a posé la question que je voulais poser. Elle a dit que ce n'est pas nécessairement ce qui se trouve dans le projet de loi qui la préoccupe mais ce qui ne s'y trouve pas. Vous avez dit que vous étiez rassuré que telle n'est pas l'intention du projet de loi.
Comment remédiez-vous à cette situation? Dans cette circonstance en particulier, un ministre ou un gouvernement peut garantir que telle n'est pas l'intention, mais si cela n'est pas énoncé de façon précise, comment pouvez-vous être sûr que ces garanties seront exécutées?
M. Hunter: Nous avons examiné tout un éventail de possibilités, mais aucune d'entre elles n'est concluante. Une possibilité qui a été soumise à notre attention consistait à prévoir que certaines des dispositions en matière de logement social figurent dans un article habilitant particulier qui serait traité par voie de règlement. Ainsi, on établirait publiquement l'existence d'un mécanisme de contrôle différent des exigences commerciales auxquelles sont astreintes l'assurance hypothécaire et toutes les autres questions dont traite ce projet de loi. Cela pourrait être l'une des façons de maintenir ce genre d'arrangement.
Le président: Monsieur Hunter, une grande partie des discussions que nous avons eues plus tôt ce soir avec les représentants de GE Capital assurance hypothèque, et certaines discussions avec le ministre et ses collaborateurs ont mis l'accent sur l'activité de la SCHL dans le secteur de l'assurance hypothécaire. Avez-vous des observations à faire sur cet aspect des activités de la SCHL?
M. Hunter: Non.
Le président: Avez-vous des observations à faire sur la proposition de GE Capital assurance hypothèque, l'unique concurrent de la SCHL dans ce domaine, selon laquelle ils devraient avoir droit à la même garantie gouvernementale dont bénéficie la SCHL?
M. Hunter: Mon client ne m'a pas communiqué ses opinions à ce sujet. Dans le cas des programmes susceptibles d'être élaborés soit au niveau fédéral, soit conjointement avec les provinces ou d'autres intervenants, et prévus en vertu de cette loi, ce qui le préoccupe en ce qui concerne l'assurance hypothécaire, c'est que la nature commerciale de l'assurance hypothécaire ne soit pas un obstacle à l'exécution de ces programmes.
Le président: Comment pourrait-elle l'être?
M. Hunter: Je crois comprendre, d'après les témoignages que j'ai entendus ici, que la prime serait établie à un niveau de risque qui pourrait laisser entendre qu'il ne faudrait pas conclure ce genre d'arrangement. Cela en soi serait considéré comme un coût important. D'après ce que je crois comprendre, les arrangements actuels en matière de logement social sont en partie tarifés et en partie considérés comme des garanties de l'État.
Le président: Je vous remercie beaucoup, monsieur Hunter.
Nos témoins suivants sont les représentants de l'Association canadienne des constructeurs d'habitations.
M. John Kenward, administrateur en chef des opérations, Association canadienne des constructeurs d'habitations: Nous aimerions profiter de cette occasion pour vous dire l'importance que nous accordons à la Société canadienne d'hypothèques et de logement et au rôle indispensable que cette société joue à notre avis dans le système de logement national du Canada.
Le fait que le Canada ait le meilleur système de logement au monde et que nous produisions les meilleures habitations au monde est attribuable en grande partie, à notre avis, au travail de la SCHL. Nous estimons que le Canada peut se compter chanceux d'avoir une société d'État dont le mandat est d'appuyer les producteurs et les consommateurs d'habitations au Canada. Le travail de la SCHL porte sur de nombreux secteurs importants, dont l'analyse économique et de marchés, des initiatives de recherche de toutes sortes, la diffusion de l'information tant aux membres de notre industrie qu'aux consommateurs, les programmes d'aide au logement et, plus récemment, le développement de l'exportation d'habitations.
En tant que société d'État, la SCHL mène à bien l'engagement pris par le gouvernement fédéral d'appuyer et d'encourager des améliorations au niveau de l'abordabilité, de la qualité et du choix du logement, ainsi que d'aider ceux qui ont besoin de logement. À cet égard, l'Association canadienne des constructeurs d'habitations appuient la SCHL sans réserve.
L'importance de la présence fédérale dans le domaine du logement n'a pas diminué et nous sommes heureux de constater que le gouvernement fédéral continue de reconnaître l'importance du rôle de la SCHL dans le système national de logement du Canada. Ce rôle a été contesté de temps à autre et nous sommes très heureux que le gouvernement continue d'en reconnaître l'importance.
En ce qui concerne l'assurance hypothécaire, nous estimons qu'il est important d'avoir une instance publique d'assurance hypothécaire. Nous appuyons les modifications législatives qui amélioreront la capacité de la SCHL d'administrer ses activités d'assurance hypothécaire de façon concurrentielle, novatrice, sensible au marché et financièrement responsable. Nous estimons qu'un milieu concurrentiel dans le secteur de l'assurance hypothécaire ne peut qu'améliorer le système national de logement du Canada et profiter aux consommateurs.
Par conséquent, comme nous l'avons fait devant le comité de la Chambre des communes, nous voulons obtenir la confirmation que les modifications apportées à la loi fédérale créeront des règles du jeu équitables entre les activités d'assurance hypothécaire de la SCHL et celles de la société privée d'assurance hypothèque, GE Capital assurance hypothèque. Une concurrence équitable permettra d'atteindre l'objectif d'intérêt général consistant à offrir aux Canadiens les avantages de prix concurrentiels, de produits nouveaux et novateurs, du choix, et un service de qualité.
Selon nous, l'objectif des modifications législatives devrait être d'appuyer et d'encourager un marché concurrentiel et novateur de l'assurance hypothécaire au Canada. Nous avons la grande chance d'avoir un programme efficace d'assurance hypothécaire à la SCHL et une société privée d'assurance hypothécaire d'une grande réputation, à savoir GE Capital assurance hypothèque. Nous estimons qu'une loi qui leur assure des règles du jeu équitables produira des résultats bénéfiques pour tous. Les consommateurs seront gagnants; l'industrie sera gagnante; l'intérêt public et les contribuables canadiens seront gagnants; et les deux sociétés d'assurance seront aussi gagnantes.
Notre association ne prétend pas être une spécialiste du secteur de l'assurance hypothécaire. Dans une certaine mesure, nous tenons pour acquis l'existence d'un secteur sain de l'assurance hypothécaire. L'existence d'une instance publique d'assurance hypothécaire continue à apporter un élément clé de stabilité dans notre système national de logement et dans nos marchés de l'habitation de toutes les régions du Canada. Elle constitue également un élément clé d'intégration des politiques et objectifs du Canada en matière de logement et d'aide au logement.
L'existence d'une société d'assurance hypothécaire privée consolide notre système de logement et offre aux Canadiens les avantages de la concurrence. Nous aimerions qu'elle devienne plus solide. Nous aimerions que la SCHL et GE continuent de pouvoir contribuer à améliorer et consolider encore davantage l'environnement pour les acheteurs de maisons. Même si elles sont rivales, leur possibilité de croissance dépend des changements qui seront apportés à la loi actuelle. Ces deux assureurs peuvent contribuer de façon importante à l'évolution du secteur de l'assurance hypothécaire au Canada et du système de logement du Canada. Ils dépendent tous deux également de la solidité de l'industrie de la construction d'habitations et, de notre côté, nous dépendons de la solidité du système national de logement, auquel ils contribuent tous deux.
Cela étant dit, l'objectif est de trouver une formule qui permettra une concurrence loyale entre une société d'État capable de respecter ses obligations en matière d'intérêt public et une société privée d'assurance hypothécaire capable de satisfaire à ses obligations envers ses actionnaires.
Les éléments de cette formule comprennent, tout d'abord, la garantie du gouvernement du Canada, dont vous avez discuté à fond, concernant le passif relatif aux polices en cas de faillite. En ce qui concerne la société GE, elle est de 90 p. 100. En ce qui concerne la SCHL, elle est de 100 p. 100. Le deuxième élément est les besoins en capitaux. Dans le cas de la société GE, elle est obligée de répondre aux besoins en capitaux. Dans le cas de la SCHL, on s'attend à ce qu'elle verse des paiements au gouvernement fédéral. Le troisième élément est lié aux deux autres. C'est la capacité des deux assureurs d'exercer une concurrence loyale lors de l'introduction sur le marché de produits novateurs de manière à s'assurer d'être des participants de premier plan sur le marché.
Dans ce contexte, il est important de reconnaître le soutien de GE pour le rôle crucial de la SCHL dans le domaine du logement au Canada. Il faut aussi reconnaître que la SCHL est favorable à la concurrence dans le secteur de l'assurance hypothécaire qu'offre GE.
Au nombre des autres facteurs de cette équation qui ont une incidence sur la concurrence, il y a, comme on l'a déjà dit, un marché extrêmement sensible au prix parmi les prêteurs hypothécaires; la nécessité de permettre aux deux assureurs hypothécaires d'offrir d'autres types d'assurance, si possible; des lignes directrices communes en matière de surveillance et une concurrence loyale sur le marché hypothécaire secondaire, et cetera. Il y a évidemment d'autres préoccupations telles que la couverture partout au pays et la possibilité de participer à des partenariats publics-privés.
Il est évident que tous ces facteurs et éléments ont une incidence l'un sur l'autre. Enfin, le défi consiste à les regrouper dans une formule qui permet de donner à tous des chances égales et équitables pour que les assureurs hypothécaires public et privé puissent contribuer au développement du meilleur système de logement au monde.
C'est ainsi que nous voyons la question, sénateur. Nous voudrions que l'on nous confirme que les modifications à la loi assureront des conditions justes et équitables et que nous pourrons continuer de compter sur la présence bénéfique de l'assureur hypothécaire public et des activités de GE Capital.
Le sénateur Doody: Monsieur Kenward, vous avez dit que vous étiez tout à fait favorable à un assureur hypothécaire public. Pourriez-vous préciser votre pensée? Qu'est-ce que vous offre un tel assureur qu'un assureur privé ne peut vous offrir?
M. Kenward: Il y a des années que nous défendons cette position. Cela fait partie de notre histoire dans le secteur du logement au Canada. Le rôle de la SCHL, qui repose sur l'assurance hypothécaire, a toujours représenté une certaine stabilité dans ce secteur. Nous apprécions donc beaucoup depuis des décennies le fait qu'il existe un assureur hypothécaire public. À bien des égards, cela a favorisé la croissance du secteur du logement.
La deuxième raison, et nous y réfléchissons en tant que secteur parce que cela nous touche quotidiennement, c'est que nous considérons les activités de la SCHL comme étant extrêmement intégrées et non pas compartimentalisées. Les relations entre l'assurance hypothécaire, les recherches qu'elle effectue, les analyses de marché sont très importantes et nous en sommes arrivés à conclure que c'est grâce à cette intégration et à l'effet d'entraînement qu'a la Société depuis plus de 50 ans que nous avons au Canada le secteur de logement que nous avons. Très franchement, du point de vue purement égoïste, c'est la raison pour laquelle notre industrie s'est développée et pour laquelle nous réussissons relativement bien.
Le sénateur Doody: Je partage votre enthousiasme pour le rôle de la SCHL dans le secteur du logement social et du logement public en général. Elle a certainement assuré un service très précieux. Je ne comprends pas pourquoi elle donne plus de stabilité dans le secteur de l'assurance hypothécaire qu'un assureur privé mais j'ai l'impression que nous avons des avis différents à ce sujet.
M. Kenward: La différence entre les deux, c'est que dans le cas de la SCHL, il s'agira toujours d'une institution qui a l'obligation de servir le public. D'une façon ou d'une autre, cela la rendra toujours différente dans son action.
Je ne voudrais faire dire à GE ce qu'elle n'a pas dit mais comme je l'ai indiqué dans ma déclaration, GE insiste beaucoup sur ce rôle et a d'autre part dit qu'elle pouvait avoir un rôle également très important et complémentaire. Je pense qu'il y a des possibilités de participer à certaines choses avec la SCHL dans ce domaine. Cela devrait être encouragé.
Le sénateur Doody: J'ai remarqué votre enthousiasme pour l'adoption de règles équitables pour l'assureur privé et l'assureur public. Estimez-vous que les amendements présentés ou suggérés par GE Capital assurance hypothèque aideraient à égaliser les chances ou estimez-vous que ce projet de loi, comme tel, avec son libellé actuel, suffirait à atteindre cet objectif?
M. Kenward: J'ai écouté attentivement ce qu'a dit GE. J'ai remarqué que nous nous dirigions rapidement vers un domaine où les changements qu'elle propose doivent être examinés à la lumière d'autres aspects de nos opérations. Par exemple, elle fait un lien clair entre la garantie à 100 p. 100 et le fait qu'elle serait prête à examiner ses propres critères d'entreprise en fonction de l'évaluation des risques, et cetera, dans d'autres régions du pays.
Il me semble que les idées évoluent. Ce n'est pas aussi simple qu'une garantie à 100 p. 100. C'est comme GE qui dirait: «Si nous avons cela, nous pourrons faire ceci et cela ainsi que cette autre chose».
Je pense que l'ensemble évolue. Je n'essaie pas d'éviter la question mais, comme je le disais, tous ces éléments sont liés, tous ont des ramifications qui jouent les unes sur les autres et chacun comporte des paramètres que GE serait prête à discuter. Après ça, on pourrait parvenir à une formule satisfaisante. Pour le moment, je l'écouterais sérieusement.
Le sénateur Doody: Si je comprends bien ce que vous dites, l'aspect des règles du jeu équitables, que tout le monde semble souhaiter, n'est pas un objectif atteignable dans ce projet de loi mais pourrait être atteint par le biais d'autres négociations. Est-ce que j'interprète bien ce que vous dites ou pourrions-nous suggérer certains amendements qui amélioreraient le projet de loi?
M. Kenward: J'admets que je ne suis pas expert en la matière. Néanmoins, il pourrait être très utile de laisser la porte ouverte au projet de loi. Comme je suis expert ni en assurance hypothécaire ni en rédaction de loi, je suppose que GE voudrait que le projet de loi n'empêche pas la poursuite d'autres négociations.
Je comprends très bien cela. Elle ne voudrait pas se trouver les mains liées.
Le sénateur Doody: C'est très compréhensible.
Le sénateur Butts: Le sénateur Doody a abordé beaucoup de mes questions mais je vais essayer d'aller un peu plus loin.
Êtes-vous en train de nous dire que le projet de loi C-66 vous satisfait? Vous n'avez pas proposé d'amendements spécifiques.
M. Kenward: Non. Ce que nous voudrions, c'est la confirmation que le projet de loi créera des règles du jeu équitables pour les assureurs hypothécaires, public et privé et, dans la mesure où il est possible d'optimiser leurs possibilités de contribuer au secteur du logement canadien, en tant qu'industrie et consommateurs, nous voudrions être certains que c'est ce qui en résultera.
Je ne suis pas sûr d'avoir répondu à votre question.
Le sénateur Butts: De façon un peu détournée, si. Vous dites que vous aimeriez qu'il y ait 100 p. 100 des deux côtés.
M. Kenward: Absolument.
Le sénateur Butts: Je suis néophyte en la matière et je veux simplement m'assurer que je vous comprends bien. Vous semblez donc appuyer le projet de loi C-66 avec au moins un amendement?
M. Kenward: Nous approuvons tout ce qui permettra à ce projet de loi d'aboutir à des règles du jeu équitables et qui nous apportera 100 p. 100 de l'avantage que GE et la SCHL peuvent donner au secteur du logement. Tout ce qu'on pourra changer dans ce projet de loi qui nous donnera 100 p. 100 à cet égard sera très bien reçu de notre part.
Le sénateur Butts: Parfait, nous sommes tous sur la même longueur d'ondes.
M. Kenward: Je crois que oui, en effet.
Le sénateur Butts: Étant donné que vous êtes fournisseurs, constructeurs, et cetera, approuvez-vous que ce projet de loi porte sur le logement social, et cetera -- autrement dit, sur les questions abordées dans l'exposé que vous avez entendu juste avant de comparaître?
M. Kenward: Je ne voudrais certainement pas débattre avec la Fédération de l'habitation coopérative du Canada ni, d'ailleurs, avec l'Association canadienne d'habitation et de rénovation urbaine. Toutefois, ce que je crois, c'est que ce qui se passe ici, c'est un transfert de responsabilité administrative et de pouvoir de gestion en ce qui concerne le logement social de l'administration fédérale à l'administration provinciale. Je n'ai pas encore entendu dire que le gouvernement fédéral ait abandonné son intérêt, son pouvoir ou son droit de décision d'investir à l'avenir dans le logement social.
Quant à l'engagement du gouvernement fédéral face au logement social, aux coopératives de logement, et cetera, il appartiendra aux gouvernements de demain ou à celui d'aujourd'hui de décider quoi faire. Je ne pense pas que le gouvernement se soit détaché de ce champ de responsabilité.
Le fait que le gouvernement soutienne le programme de remise en état des logements par l'intermédiaire de la SCHL, ce qui entraîne des dépenses, me fait croire qu'il n'a pas abandonné cette responsabilité. Le fait qu'il appuie le programme Abordabilité et choix toujours, initiative de réforme de la réglementation qui comprend l'ACCH, la Fédération des municipalités canadiennes et l'Association canadienne d'habitation et de rénovation urbaine, semble indiquer qu'il continue de s'intéresser à l'abordabilité et au choix en matière de logement. Le fait qu'il appuie aussi l'initiative Solutions maison, là encore avec les trois mêmes partenaires et le Centre du partenariat de la SCHL, et où je crois GE a également un intérêt en ce qui concerne les possibilités de financement de projets pour certains groupes, semble indiquer que, d'une façon ou d'une autre, le gouvernement reste bien convaincu qu'il a un rôle à jouer ici. Nous sommes tout à fait d'accord. Nous croyons certainement que la présence fédérale est très importante à cet égard dans le secteur du logement.
Le sénateur Butts: Toutefois, n'y a-t-il pas de relation entre votre association et les groupes de logements sociaux ou de coopératives de logement?
M. Kenward: Pour ces programmes, nous travaillons en étroite collaboration et nous nous consultons mutuellement. Nous échangeons des points de vue. Parfois, il y a des tensions entre nous. Toutefois, l'ACCH a toujours dit que dans une société civile, on doit pouvoir s'attendre à ce que le gouvernement aide ceux qui ont besoin de logements. Nous préférons croire que nous vivons dans une société civile.
Le sénateur LeBreton: D'après ce que je vous entends dire, vous êtes tout à fait favorable à la SCHL et aux quatre piliers qu'elle défend pour le logement au Canada: santé, financement, logement assisté et recherche, et aussi, bien sûr, l'élément exportation. Toutefois, sur la question précise de l'assurance hypothécaire, vous préconisez des règles du jeu équitables -- autrement dit, la garantie de 100 p. 100.
D'autres témoignages nous ont révélé que GE a 12 p. 100 du marché alors que la SCHL en a 88 p. 100. Aussi, il y a beaucoup à faire pour l'un des concurrents s'il veut rattraper l'autre. Nous dites-vous que des règles du jeu égales pour la concurrence entre la section assurance hypothécaire de la SCHL et un concurrent du secteur privé ne peuvent qu'aider votre secteur?
Pourquoi cela devrait-il être inclus dans la loi? Pourquoi est-ce que la différence entre 100 p. 100 et 90 p. 100 n'a-t-elle pas été éliminée? Pourquoi le ministère des Finances n'essaie-il pas de s'occuper de cela?
M. Kenward: Avant de répondre à votre question, je dois également mentionner que nous appuyons sans réserve GE dans cette entreprise. Quant à votre question, je ne puis répondre que ce que l'on vous a déjà dit: lorsque GE est arrivée au Canada, elle a accepté la garantie de 90 p. 100. Je ne sais pas s'il y a une autre raison plus profonde.
Ce que je trouve intéressant dans les discussions que j'ai entendues c'est que si GE avait une garantie de 100 p. 100, cela élargirait l'éventail d'éléments dont elle pourrait discuter quant à la façon dont elle mène ses affaires, quant au genre de produits qu'elle met sur le marché, et cetera. Si on lit entre les lignes, elle aurait même dit à un moment qu'elle appuierait implicitement la mise en oeuvre de lignes d'action visant les problèmes socio-économiques du pays. Elle voudrait simplement avoir la possibilité de soumissionner. J'ai l'impression d'après ce que j'entendais qu'elle aimerait être en mesure d'offrir des produits qui lui permettraient de répondre aux besoins du marché qui ne sont pas autrement satisfaits.
Le 100 p. 100 semble correspondre à un besoin clé auquel il faut répondre. Par ailleurs, j'hésite à m'ériger en expert étant donné que tous ces éléments sont interreliés, comme je l'ai déjà signalé.
Le sénateur LeBreton: Le projet de loi C-66 est d'une envergure considérable et il est accueilli favorablement dans une large mesure. Je ne comprends pourquoi il n'y aurait pas d'amendements ou pourquoi nous nous laissons entraver par les difficultés liées à un seul service d'exploitation de la SCHL et cette société du secteur privé. Les deux entités évoluent sur le même marché dans ce secteur.
Je ne comprends pas pourquoi elle n'accepterait pas les mêmes règles. La concurrence est certainement une bonne chose et l'Association canadienne des constructeurs d'habitations ne pourrait qu'en profiter. Si les gens n'étaient pas satisfaits du produit d'un fournisseur, ils pourraient aller chercher ailleurs.
M. Kenward: Pour notre part, nous souhaiterions bien connaître les conséquences de tout amendement. Nous ne voudrions pas qu'un amendement vienne amoindrir l'efficacité de la mesure. Autrement dit, nous sommes convaincus de l'importance de cette mesure législative aussi bien pour le public que pour les assureurs privés.
Elle est très certainement nécessaire pour la SCHL, et l'assureur privé GE nous a déclaré être favorable aux changements qui concernent la SCHL. Ces changements lui donnent par ailleurs l'occasion de jouer un rôle plus important dans le domaine du logement au Canada. Quelle que soit la décision prise ici, il est certain que quelque chose doit être fait.
Le sénateur LeBreton: Cela est d'autant plus vrai que le ministre responsable du logement nous a dit hier que la mesure ne posait aucun problème pour lui. Il s'en est remis au ministère des Finances. Voilà qui semble assez clair pour un non-initié. La difficulté ne doit pas être trop considérable, étant donné que le ministre s'est déclaré favorable.
M. Kenward: Il sera donc peut-être facile de faire un amendement.
[Français]
Le sénateur Ferretti Barth: Les modifications proposées dans le projet de loi C-66 serviront à promouvoir les produits et les services canadiens à l'étranger. L'exportation de nos connaissances techniques dans le domaine de la construction va-t-elle promouvoir ou créer des emplois?
[Traduction]
M. Kenward: Je pourrais facilement me lancer dans une envolée au sujet des exportations. L'ACCH est très convaincue depuis de nombreuses années que notre potentiel d'exportation est très considérable puisque nous avons le meilleur système de logement au monde et que nous sommes les meilleurs constructeurs de logement au monde. Nous sommes très heureux de constater que le gouvernement actuel adopte le même point de vue. Pour la SCHL, je le répète, il s'agit là d'un rôle extrêmement important.
En tant que tel, le système intégré dont j'ai parlé est un produit exportable tout comme l'est le mode de fonctionnement de notre système. Nous sommes en mesure de transférer notre système, notre façon de fonctionner en matière d'hypothèque, d'assurance hypothécaire, de garantie, et cetera, dans d'autres pays. Nous pouvons transférer la technologie.
[Français]
Le sénateur Ferretti Barth: Notre expertise canadienne dans la construction de maisons.
[Traduction]
M. Kenward: Oui, tout à fait.
[Français]
Le sénateur Ferretti-Barth: Ce projet de loi va vraiment promouvoir notre visibilité à l'étranger. Nous utiliserons nos techniques de construction et nos matériaux. Ce sera bon pour les Canadiens. Si on nous demande de vendre nos techniques de construction à l'étranger, ce sont nos techniciens qui s'y rendront. Ils prendront de l'expérience dans ces pays et en revenant au Canada, ils auront une bonne connaissance du marché du travail qu'ils pourront mettre à la disposition de la relève.
[Traduction]
M. Kenward: Je suis tout à fait d'accord avec vous. À l'heure actuelle, dans notre secteur, nous nous inquiétons des pénuries de personnes qualifiées; au même moment, il y aurait des milliers de travailleurs canadiens qualifiés au Japon. Vous avez tout à fait raison. Les possibilités d'emploi sont très considérables. Notre défi consiste à collaborer avec le gouvernement pour que les jeunes soient sensibilisés aux possibilités de carrière qui existent pour eux dans le secteur.
[Français]
Le sénateur Ferretti Barth: Lorsqu'il y a eu un tremblement de terre dans le nord de l'Italie, beaucoup de gens sont devenus sans-abri. Des Canadiens se sont rendus sur place et ont construit les maisons en l'espace de moins d'une semaine.
Ces maisons ont été construites il y a 20 ans, elles y sont toujours et les Italiens les ont embellies. On dit que ces maisons sont vraiment bien construites. Le nord de l'Italie est une région froide et humide.
Lorsqu'il sera temps de reconstruire les maisons du Kosovo, les Canadiens seront appelés à le faire. Ce sera bien pour votre association.
[Traduction]
M. Kenward: Je suis d'accord. Je me bornerai à dire que nous encourageons la SCHL à jouer son rôle. Elle s'adapte aussi rapidement qu'elle le peut à son mandat en matière d'exportation et nous constatons déjà des progrès importants. Cependant, les possibilités sont vastes.
[Français]
Le sénateur Ferretti Barth: Comment se font les prêts hypothécaires à l'étranger? La banque fait-elle appel au gouvernement canadien? Est-ce que suite à l'obtention de l'hypothèque, la banque étrangère donne l'argent à la compagnie de construction ou vice versa? Comment s'effectue la transaction?
[Traduction]
M. Kenward: À l'heure actuelle, nous estimons que notre expérience et nos connaissances nous permettent d'exporter des services d'assurance hypothécaire. M. Johnston souhaite peut-être en dire davantage.
M. Donald Johnston, directeur principal, Technologie et politique, Association canadienne des constructeurs d'habitations: Nos activités à l'étranger prennent souvent la forme de coparticipations dans le cadre desquelles nos membres entrent en rapport avec des constructeurs du pays d'accueil. Les aspects financiers sont souvent réglés dans le même cadre, soit celui de la coparticipation.
[Français]
Le sénateur Gill: Si j'en juge par votre exposé, votre association semble relativement satisfaite du projet de loi C-66 dans sa forme actuelle. J'aimerais préciser certaines choses, entre autres, la garantie de la SCHL et celle de la GE.
Dites-vous que le statu quo convient aux constructeurs et qu'il pourrait être avantageux que les garanties soient les mêmes pour la Société et pour la GE? Il faudrait qu'une entente soit négociée et que les risques soient également partagés. Une entente a été signée il y a quelques années avec la GE et cela a bien fonctionné.
Si je comprends bien, vous souhaitez que la négociation se fasse de la même façon. Il faut changer les règles du jeu au niveau de la garantie et des risques. GE est une compagnie privée et la SCHL est une compagnie de la Couronne. Les deux n'assument évidemment pas les mêmes risques et responsabilités. L'une est contrôlée par le Parlement, l'autre l'est par ses actionnaires.
Si on fournit une garantie semblable, on devra avoir les mêmes exigences tant pour les risques que pour les services rendus aux Canadiens. Ai-je bien compris?
[Traduction]
M. Kenward: Encore ici, sans vouloir parler à la place de GE, j'ai cru comprendre que cette société considère que cet aspect fait partie du processus de discussion. Autrement dit, si GE obtient la même garantie, les responsables de cette société comprennent fort bien qu'ils devront discuter des risques et des autres aspects qui accompagnent cette garantie. Si c'est ce qu'il faut faire pour en arriver à des règles équitables et égales pour tous, alors nous sommes d'accord.
La possibilité contraire, celle d'un assureur hypothécaire privé affaibli au Canada, ne nous intéresse guère. Personne n'y trouverait son compte. Nous souhaitons donc que la question soit étudiée avec soin pour que l'on aboutisse dans toute la mesure du possible à une situation où les règles seront les mêmes pour tous. À ce que nous avons compris, la porte est ouverte, du fait que les représentants de GE sont favorables à la garantie à 100 p. 100 et sont disposés à discuter des moyens d'y arriver en fonction de leur évaluation des risques et des exigences. C'est tout au moins ce que j'ai compris. Comme je l'ai déjà dit, je ne souhaite pas parler au nom de GE sur cette question, mais il m'a semblé que les discussions progressaient.
Nous ne souhaitons un monopole ni du secteur public, ni du secteur privé au Canada et nous ne voulons pas non plus qu'un assureur soit affaibli par rapport à l'autre. Comme l'a dit quelqu'un plus tôt, nous voulons du 100 p. 100 sur toute la ligne.
[Français]
Le sénateur Gill: L'Association des constructeurs est un joueur important au pays vis-à-vis l'habitation. Je comprends que vous ne voulez pas parler au nom de la GE. Quelle est la perception de votre association vis-à-vis ce point en particulier? C'est très clair, c'est votre point de vue. Le projet de loi C-66 apporte-t-il beaucoup d'améliorations? Si j'ai bien compris, vous dites que c'est un beau projet de loi. Alors faut-il procéder et permettre ensuite à la GE de continuer ses négociations avec le ministère des Finances?
[Traduction]
M. Kenward: Il ne m'est pas facile de répondre, pour la simple et bonne raison que, chez GE, on s'inquiète du fait que toute négligence risque d'affaiblir sérieusement l'assureur hypothécaire du secteur privé. Par conséquent, l'ACCH est d'avis qu'il faut bien tenir compte de cet aspect et être à l'écoute des intéressés. Voyons si l'évolution des discussions ne débouche pas sur une formule qui pourrait mieux fonctionner que celle qui est maintenant à l'étude. Je dois reconnaître que, malheureusement, je ne suis pas en mesure de fournir un avis d'expert sur le contenu d'une telle formule.
Le président: Je vous remercie beaucoup, messieurs Kenward et Johnston, de nous avoir fait part si généreusement de l'information dont vous disposez. Nous vous en sommes reconnaissants.
Sénateurs, avant de présenter notre témoin suivant, j'aimerais aborder une question d'ordre administratif tout à fait distincte. Comme vous le savez, le Sous-comité des affaires des anciens combattants a élu récemment un nouveau président, le sénateur Balfour. Comme vous le savez également, le sous-comité a terminé récemment une étude sur les soins de santé visant les anciens combattants. Puisque cette étude est terminée, le sous-comité souhaite un renouvellement de son mandat général visant les affaires des anciens combattants.
Or, lundi soir, le Sénat a adopté une motion autorisant notre comité, soit le comité principal, à entreprendre une étude des questions ayant trait aux personnes qui relèvent de la compétence du ministère des Anciens combattants et notamment de la disponibilité et la qualité de l'ensemble des avantages qui visent les personnes ainsi que des normes qui s'y appliquent. Pour l'essentiel, il s'agit du renouvellement du mandat général confié à notre comité d'étudier les questions touchant les anciens combattants. La prochaine étape consiste pour le comité à adopter une motion de transfert de l'ordre de renvoi à notre sous-comité.
La présidence accueillera une motion portant que l'ordre de renvoi adopté par le Sénat le 31 mai 1999 soit confié au Sous-comité des affaires des anciens combattants.
Le sénateur LeBreton: Je le propose.
Le président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Le président: La motion est adoptée.
Cette question étant réglée, nous sommes heureux d'accueillir Mme Ann Rheault, directrice des Services bancaires aux Autochtones de la Banque de Montréal. Elle a également comparu devant le comité de la Chambre des communes qui a étudié cette question. Elle est en mesure de nous éclairer, tout comme elle l'a fait pour le comité de la Chambre, au sujet d'un aspect particulier et important de l'activité de la Société canadienne d'hypothèques et de logement.
Mme Ann M. Rheault, directrice, Services bancaires aux autochtones, Banque de Montréal: Je vous remercie, sénateurs, du temps que vous m'accordez ce soir. Je travaille dans le domaine des services bancaires aux autochtones pour le compte de la Banque de Montréal depuis plus de cinq ans. Je fais affaire exclusivement avec des groupes autochtones, principalement des personnes qui font partie des Premières nations, des gouvernements des Premières nations, des représentants des Premières nations en matière d'habitation et des conseils tribaux des Premières nations. J'entretiens certains rapports avec la collectivité des Métis, notamment en Alberta, et je traite de certaines affaires dans la région de l'Arctique de l'Ouest. L'un de mes collègues est responsable de l'Arctique de l'Est.
Ordinairement, c'est la SCHL qui est le partenaire des Premières nations en matière d'hypothèque dans les territoires des Premières nations, et je mets le mot «hypothèque» entre guillemets parce que le contexte réglementaire qui prévaut dans ces territoires est tout à fait particulier.
Le territoire, ou la réserve, comme on l'appelle, d'une Première nation est visé par la Loi sur les Indiens. Selon cette loi, le territoire ne peut être hypothéqué, ni par la Première nation, ni par des particuliers. Ainsi, au fil des années, l'accès au capital ou aux emprunts pour financer le logement sur les réserves ne s'est fait que par deux véhicules qui sont des programmes importants exécutés par le ministère des Affaires indiennes et la SCHL. Il s'agit de modalités de financement prévues aux termes de l'article 95 et de l'article 10 de la Loi nationale sur l'habitation.
Selon les articles 95 et 10 de la LNH, il n'est pas vraiment question d'hypothèque. La garantie d'emprunt dont peut bénéficier un prêteur comme moi est donnée par le ministère des Affaires indiennes et, concrètement, la SCHL agit à titre d'agent du ministère des Affaires indiennes et de chargé de projet. Pour son travail, la SCHL reçoit des frais de dossier. Elle assure la surveillance du programme depuis la date de demande initiale, de manière à assurer la conformité aux normes de construction et également pour veiller à la gérance de projet, étant donné qu'à l'heure actuelle, le financement n'est affecté qu'à de nouvelles constructions.
Dans la plupart des cas, les logements construits sur les réserves aux termes de l'article 95 sont des logements sociaux. Il s'agit de logements subventionnés et, généralement, de logements multiples. Le financement selon l'article 95 est la principale source de financement de la construction d'unités résidentielles sur les réserves.
L'article 10 de la Loi nationale sur l'habitation vise un programme de prêts pour le logement non subventionné. Le prêt est généralement accordé à un particulier, mais il l'est parfois à la Première nation ou à la bande indienne. Dans ces cas, le membre de la bande est l'emprunteur et le prêt est garanti par une garantie du conseil de bande et du ministère des Affaires indiennes et, dans ce cas également, la SCHL émet une garantie d'assurance. Mais, dans ce cas également, la SCHL agit à titre d'agent de la Première nation.
Jusqu'à il y a quatre ans environ, le financement hypothécaire sur les réserves relevait exclusivement de ces deux programmes, qui n'étaient pas, en réalité, des programmes d'emprunts hypothécaires. Les deux dispositions sont maintenues dans la Loi nationale sur l'habitation. Bien entendu, la SCHL pouvait également se prévaloir du PAREL, dont il a été question plus tôt, un programme auquel on a beaucoup recours également sur les réserves.
Dans le rapport de la CRPA et dans le rapport final du groupe de travail sur le financement autochtone, publié en septembre 1997, on a fait état du très grand besoin d'une augmentation du capital de financement du logement des Premières nations.
Sur le territoire des Premières nations, les taux de croissance de la population sont supérieurs de trois points de pourcentage environ à ceux du Canada. Il y a toujours pénurie de logements. Il va falloir beaucoup d'initiatives et d'ingéniosité pour répondre aux besoins des Premières nations.
Les clients ont demandé à la Banque de Montréal d'être innovatrice et de concevoir des programmes de prêt au logement autonomes ou complémentaires par rapport aux programmes gouvernementaux actuels mis en oeuvre par les Affaires indiennes et la SCHL. Je suis sûr que les autres banques à charte ont reçu également ce genre de demande. Dans la brochure que je vous ai distribuée, vous trouverez certains exemples de ce que nous avons produit.
Nous avons des programmes de prêt au logement qui ne sont pas dotés de ce qu'on appelle dans notre métier une garantie ministérielle. Nous obtenons à contrat ces garanties auprès du gouvernement de la Première nation. Nous consentons des prêts aux emprunteurs de la réserve qui répondent aux critères et cette garantie nous sert de cautionnement.
Nous avons sept programmes dont le total des capitaux dépasse les 25 millions de dollars. Nous essayons encore de faire davantage. C'est très important pour nous et nos clients. C'est l'un des éléments importants de notre travail.
D'autres clients des Premières nations qui n'ont peut-être pas le crédit nécessaire pour emprunter des sommes importantes ou pour assumer un passif de plusieurs millions de dollars ont également défini pour nous un autre besoin. Dans certains cas, certains de leurs membres ne peuvent répondre aux critères qui s'appliquent à la taille des prêts que nous consentons. On nous a demandé de sortir des sentiers battus dans ce dossier.
L'une des solutions, pour nous, est de permettre à la SCHL de collaborer avec nous dans cette créativité. Nous avons toujours entretenu un bon partenariat. Dans mon domaine, la SCHL fait de l'excellent travail. Je vais vous donner un exemple de ce que nous préconisons. Dans le cas d'une Première nation qui ne possède pas un portefeuille de prêts comme ceux que nous offrons, la SCHL pourrait s'engager à assurer un prêt qui ne sera jamais hypothéqué. D'après la réglementation qui s'applique actuellement aux réserves -- et je ne crois pas que cela va changer --, les Indiens et les bandes indiennes ne peuvent entre elles avoir d'hypothèques sur des biens immobiliers. Les prêteurs, dont je suis, doivent trouver des moyens différents de garantir les prêts qu'ils consentent, généralement sur une période de 25 ans.
Nous collaborons beaucoup avec la SCHL. Nous collaborons à ses programmes de formation et au financement innovateur. Nous appuyons fortement les modifications proposées à ce projet de loi car elles permettront à la SCHL d'offrir à mes clients certains programmes innovateurs dans le marché où je travaille.
[Français]
Le sénateur Gill: J'aimerais transmettre mes félicitations à la Banque de Montréal. Depuis plusieurs années, je suis impliqué dans le monde autochtone. Il n'était pas toujours clair pour les institutions financières ou autres de s'impliquer dans les communautés autochtones. La Banque de Montréal est l'une de premières institutions qui l'a fait et qui a essayé de trouver des solutions au problème que nous connaissons.
J'imagine que vous avez regardé un peu la situation. Vous avez constaté qu'il y avait un besoin croissant de construire des habitations dans les communautés autochtones. Est-ce que vous avez fait une étude qui permettrait de cerner les besoins dans les communautés au pays ou dans certaines provinces? Qu'est-ce que cela impliquerait comme montant d'argent?
[Traduction]
Mme Rheault: Il y a cinq ans environ, lorsque nous avons inauguré une succursale dans le territoire d'une Première nation, le premier client qui s'est présenté à la Banque de Montréal nous a dit: «Nous vous avons invités à vous établir sur notre territoire, mais vous devez apprendre comment nous fonctionnons et pour cela vous devez entre autres être innovateurs, surtout dans le domaine du logement». Nous avons fait à ce moment-là un certain nombre d'études, mais je me fierais plutôt maintenant aux études réalisées par l'Assemblée des premières nations qui dispose actuellement d'un groupe de travail. J'ai rencontré ce groupe de travail en Alberta, il y a deux semaines. Son comité du logement est en train de réaliser une étude à jour.
Le nombre des nouveaux logements que réclament les Premières nations sur leurs territoires est de près de 200 000. C'est un nombre exceptionnel de logements. Le budget du ministère des Affaires indiennes et du Nord permet la construction d'un nombre considérable de logements. Il s'agit d'une grande population qui connaît une croissance extraordinairement rapide. Il y a eu une explosion démographique dans les communautés autochtones des réserves. Le nombre des très jeunes personnes qui commencent à avoir besoin d'un logement a connu une croissance rapide. Ce n'est pas inhabituelle.
Il y a trois semaines, j'ai assisté à une conférence sur le logement avec le groupe des services techniques en Alberta. C'est malheureux, mais il n'est pas inhabituel que 20 personnes se partagent une maison. Ce problème s'ajoute à la croissance des communautés; les gens veulent demeurer dans leur communauté et cela leur est de plus en plus possible puisqu'il y a une amélioration de la situation de l'emploi en territoire autochtone. Cela provoque le besoin de nouveaux logements.
Il existe également un besoin énorme d'argent pour la rénovation. Nous avons également des programmes pour les rénovations. En outre, il y a des programmes de la SCHL qui visent la rénovation. On n'a jamais prétendu que les sommes allouées chaque année au titre du logement dans les réserves représentaient le coût total. Dans le sud du Canada, par exemple, cette allocation annuelle par logement dans les réserves est généralement de 20 000 $ à 22 000 $. Le montant augmente plus au Nord, comme dans le programme PAREL. On ne peut pas construire une maison pour 22 000 $ où que ce soit au Canada. Et pourtant, on le fait dans le territoire des Premières nations. Ce sont évidemment des maisons qui se détériorent rapidement, qui ne sont pas achevées et qui sont donc sujettes à être abîmées par les éléments. Je suis désolée de ne pas avoir les statistiques, mais c'est un problème énorme qui effraie la plupart des gens qui doivent s'en occuper.
[Français]
Le sénateur Gill: Avec le projet de loi C-66, est-ce que vous constatez une accélération des programmes de financement pour les habitations dans les communautés? Est-ce que quelque chose va permettre de donner un coup de pouce assez important pour la construction dans les réserves?
[Traduction]
Mme Rheault: Oui, je puis définir deux besoins. Dans un territoire de Premières nations, il est assez courant que le gouvernement et les membres de la Première nation veuillent faire les choses eux-mêmes. Nos clients nous demandent constamment de les reconnaître comme des gouvernements chargés du bien-être de leurs membres et de faire des choses différentes -- c'est-à-dire de leur offrir des mesures qui n'exigent pas nécessairement la participation du ministère des Affaires indiennes ou du gouvernement fédéral. Ces programmes sont très précieux pour les Premières nations -- je ne veux pas dire le contraire --, mais les gens veulent autre chose.
La SCHL est l'un des partenaires avec lesquels nous pouvons travailler dans ce sens. En comptant sur le gouvernement de la Première nation dans nos transactions, nous établissons un climat de confiance. Les Premières nations veulent que ces transactions soient entre le gouvernement de la Première nation et la Banque de Montréal. Dans certains cas, c'est que le financement des hypothèques est à très long terme et dans d'autres, parce que la communauté est petite.
Dans bon nombre de Premières nations, il y a moins de 200 personnes dans la réserve et de très petites bandes qui n'ont pas les ressources nécessaires pour s'adresser à un prêteur comme moi et demander une marge de crédit de 41 millions de dollars ou un programme garanti. Nous aimerions que la SCHL et la Banque de Montréal puissent, de concert avec les Premières nations, créer un type de prêt particulier pour de tels membres ou mettre en place un programme qui tienne compte des voeux des gouvernements des Premières nations de travailler avec nous en partenariat. Nous devons être innovateurs et répondre aux besoins de la communauté.
Les programmes actuels sous le régime des articles 10 et 95 sont excellents et doivent être conservés. Il s'agit dans un cas d'un programme de logement social assorti d'une subvention et dans l'autre, d'un programme pour les Premières nations qui sont prêtes à accepter la participation des Affaires indiennes dans leurs transactions.
J'ai le plaisir de passer beaucoup de temps dans le territoire des Premières nations, environ 60 p. 100 de mon temps. On me demande constamment ce que nous pouvons faire de différent et d'innovateur.
Grâce aux changements que je prévois, la SCHL n'aura pas besoin d'une hypothèque pour souscrire un prêt. Elle a entre autres de bons programmes de logement dans trois territoires des Premières nations au Québec, au Manitoba et en Ontario. Elle offre des programmes de formation aux membres des Premières nations des quatre coins du pays. Elle peut faire beaucoup. Sa présence est importante et je souhaiterais qu'elle puisse continuer à être innovatrice et à offrir des choses différentes qui permettent aux gens de réaliser leurs projets.
On reconnaît qu'il faut un nombre important de logements chez les Autochtones. Les programmes du gouvernement n'offrent pas ces logements et ne pourront pas non plus le faire. Bon nombre de gens acceptent la responsabilité de répondre à leurs propres besoins en matière de logement et ne demandent que les outils qu'il leur fait. Je suis entièrement d'accord là-dessus.
[Français]
Le sénateur Gill: Je pense que vous êtes en train de tracer la voie pour la Banque Royale et les autres banques.
[Traduction]
Le sénateur LeBreton: Vous entretenez une relation très particulière avec la Société canadienne d'hypothèques et de logement. Vos transactions portent sur des propriétés dans les réserves qui appartiennent en fait au peuple des Premières nations et non aux propriétaires de la maison.
D'après votre témoignage, j'en déduis que votre relation avec la SCHL porte davantage sur l'accession à la propriété et la recherche qu'effectue la SCHL en partenariat avec les Affaires indiennes et la Banque de Montréal afin de trouver de nouvelles idées pour fournir des logements. Pourrait-on dire que le rôle de la SCHL dans tout cela est davantage du domaine de la recherche sur l'accès au logement que de celui du financement hypothécaire?
Mme Rheault: À l'heure actuelle, la SCHL travaille sur les deux tableaux. J'aimerais qu'elle puisse jouer un rôle plus actif dans le financement hypothécaire.
Le sénateur Gill a demandé ce que l'on pourrait faire de différent. Plus précisément, les terrains de la réserve appartiennent à l'État, qui les possède au profit des membres de la bande. Il s'agit en fait de terres de la Couronne qui sont gérées au moyen de registres des terres indiennes. Le gouvernement des Premières nations a évidemment largement son mot à dire, mais la Loi sur les Indiens énonce expressément que le ministre des Affaires indiennes et du Nord gère les terres pour la Couronne.
Voici un exemple de ce qui devrait être fait différemment. Même si les gouvernements des Premières nations participent activement au domaine du logement, ils ont bien d'autres priorités dans la vie et dans l'administration. Un certain nombre de Premières nations m'ont demandé pourquoi elles ne peuvent transiger avec une société de logement dans leurs territoires et pourquoi elles ne peuvent avoir de transactions distinctes, auxquelles ne participe pas le gouvernement de la Première nation.
Ce serait difficile, à cause du régime foncier. Je ne peux prendre le terrain en garantie d'une hypothèque. C'est pourquoi je compte à l'heure actuelle sur une garantie du gouvernement de la Première nation. Cela pourrait nuire à leur capacité d'effectuer d'autres transactions, même si leur bilan montre qu'il s'agit d'un passif éventuel. Tant que je fais de bons prêts, cela ne nuira pas à leur cote financière. Mais qu'en est-il si j'essaie de faire une transaction avec une société de logement? Tout d'abord, si cette société est constituée en société, elle devient non indienne et ne peut donc plus posséder non plus de terres.
Nous essayons toujours de trouver des moyens de répondre aux besoins de l'organisme avec lequel nous transigeons dans la réserve. Nous reconnaissons que nous devons tous gérer le risque -- tant le gouvernement de la Première nation que le gouvernement fédéral, par le truchement du ministère des Affaires indiennes, et tant les membres de la Première nation que nous. Nous ne pouvons agir sans tenir compte des dispositions de la Loi sur les Indiens. Nous ne pouvons prendre de mesures qui ne seraient ni valides ni applicables en cas de non-remboursement.
À l'heure actuelle, un organisme de logement avec lequel je fais affaire veut être constitué en société afin de gérer son propre passif, actuel ou éventuel. Cet organisme ne peut posséder de terres dans la réserve et ne peut donc obtenir d'hypothèque. Mais si la SCHL pouvait collaborer avec moi à l'élaboration d'un programme qui puisse assurer les hypothèques, la situation serait tout à fait différente et nous pourrions offrir aux membres des nations intéressées et capables d'obtenir ces prêts un meilleur accès au financement.
Le sénateur Butts: Votre groupe porte le titre de Services bancaires aux autochtones. Pourriez-vous me dire qui fait partie de ce groupe?
Mme Rheault: Les Services bancaires aux autochtones de la Banque de Montréal comptent cinq employés, à l'administration centrale de Toronto. Les services comptent également quatre autres employés dans les diverses régions du Canada.
Le groupe est dirigé par Ron Jamieson, notre vice-président principal des Services bancaires aux Autochtones. C'est un Mohawk des Six Nations. Je suis pour ma part directrice. Le groupe compte également un gestionnaire de l'élaboration des produits, un gestionnaire de la commercialisation et un adjoint exécutif.
Nous avons quatre gestionnaires des services bancaires aux autochtones, soit un dans chacune des quatre provinces suivantes: Colombie-Britannique, Alberta, Saskatchewan et Québec. De ces neuf membres du groupe, tous sauf deux, dont moi, sont autochtones. Nous avons environ 17 centres de service: 11 succursales dans les réserves et six autres succursales et points de service qui desservent surtout des communautés autochtones. Dans ces succursales, nous avons environ 80 employés. Environ 180 succursales au Canada effectuent une part important de leur travail dans les communautés autochtones.
Le sénateur Butts: Vous avez dit que des neufs membres, deux sont autochtones?
Mme Rheault: Il y a deux membres non autochtones. Des neuf, sept sont autochtones.
Le sénateur Butts: Dans les réserves, y a-t-il d'autres banques qui offrent des services différents du logement? Pourriez-vous me dire combien il y en a environ? Les banques sont-elles dans les réserves?
Mme Rheault: Oui, nous avons 11 banques dans les réserves, soit plus de succursales que toutes les autres banques à charte au Canada. Il y a environ 38 établissements financiers dans les réserves. Par exemple, il y a au Québec la Caisse populaire. Dans l'ouest du Canada, il existe une grande société de fiducie qui appartient entièrement aux Autochtones. Cette société est dans la réserve. La First Nations Bank constitue un partenariat entre les Premières nations de la Saskatchewan et la Banque Toronto Dominion. Cette banque compte trois ou quatre succursales dans les réserves. Il existe également un autre organisme de financement, la Société de financement des Autochtones, qui a été créée il y a environ 15 ans.
Il y a également d'autres prêteurs dans les communautés autochtones. Ceux-ci ne sont pas nécessairement situés dans les réserves, mais ils le sont à environ 20 p. 100.
Le sénateur Butts: Vous n'offrez ces services que depuis quelques années, n'est-ce pas?
Mme Rheault: La Banque de Montréal a ouvert sa première succursale dans une réserve, pour une communauté autochtone, il y a six ans.
Le sénateur Butts: Vous avez indiqué à un moment donné que la Banque de Montréal était en train d'élaborer un programme de prêts non garantis pour des emprunteurs qualifiés. Qu'est-ce qu'un emprunteur qualifié?
Mme Rheault: Il est intéressant que vous posiez cette question. J'ai dit à un de mes collègues, un jour, que j'avais trop passé de temps dans une communauté de Premières nations puisque son chef m'avait téléphoné un jour pour dire que nous devions cesser de toujours appliquer les mêmes cinq critères de crédit. Dans le domaine des prêts personnels, ces critères sont l'évaluation de la personne, de sa capacité de payer, des garanties qu'elle peut offrir, qui dans ce cas-ci constituent souvent le principal écueil, de même que l'évaluation de l'investissement, c'est-à-dire de la mise de fonds nécessaire. Quand je parle d'évaluation de la personne cela inclut sa cote de crédit, même si ce crédit appartient à une autre catégorie.
Généralement, pour les prêts personnels, il faut tenir compte de ces facteurs dans l'évaluation d'une demande pour déterminer si la personne peut, dans les meilleurs conditions, effectuer les remboursements tout en respectant tous ses autres engagements. C'est cette évaluation que l'on fait.
Le sénateur Butts: Croyez-vous qu'il y ait un risque qu'en offrant des prêts à toutes ces personnes qualifiées, elles se trouvent dans la même situation que le reste de la population -- c'est-à-dire que les pauvres s'appauvrissent et que les riches s'enrichissent?
Mme Rheault: J'ai toujours dit que pour faire un prêt, il faut un emprunteur qui en veuille. La plupart des gens, moi y compris, n'auraient pas moyen d'acheter une maison sans hypothèque. Je ne peux pas trouver de 70 000 à 150 000 $ sur une période de cinq ans, même si c'est ce que les gens des Premières nations ont essayé de faire ensemble. Lorsque nous avons entrepris nos recherches dans certains territoires, nous avons constaté que les membres des Premières nations avaient un endettement énorme constitué des prêts qu'ils avaient contractés pour se loger. Ces prêts étaient des prêts de cinq ans, car il est rare que les prêts personnels soient offerts pour une période plus longue. Le financement par hypothèque est à plus long terme. Les gens empruntaient pour payer leur logement.
Si nous nous sentons très à l'aise de négocier avec les Premières nations dans ce dossier, c'est également que le taux de non-remboursement de notre portefeuille hypothécaire au Canada et de notre propre portefeuille hypothécaire dans les communautés des Premières nations est extrêmement faible. Il n'y en a à peu près pas. Les gens paient d'abord leur hypothèque. C'est la chose la plus importante pour eux, puisque c'est le toit sur leur tête. Les gens paieront leur hypothèque bien avant leurs prêts automobile ou leur cartes de crédit.
Nous prêtons prudemment. Nous nous sommes engagés auprès des collectivités que nous servons à ne pas les mettre en danger en prêtant à tort et à travers. Nous faisons preuve d'un maximum de prudence.
Le sénateur Doody: Y a-t-il quelque chose que vous aimeriez voir modifier dans le projet de loi C-66 ou bien son contenu ou sa philosophie vous convienne? Pensez-vous qu'il sert vos intérêts, ou les intérêts de votre organisme relativement à la SCHL?
Mme Rheault: Je n'ai pas de modification à suggérer. Ce projet de loi sert tout à fait mes intérêts particuliers.
Le sénateur Gill: J'aimerais connaître le pourcentage des clients qui ne remboursent pas leurs prêts. Vous avez ces chiffres?
Mme Rheault: Je peux vous donner le coefficient des pertes sur prêt du portefeuille d'hypothèques résidentielles de la Banque de Montréal. La dernière fois que j'ai regardé, c'était environ il y a un mois, et il était de 0,01 p. 100.
Le sénateur Gill: Est-ce le meilleur?
Mme Rheault: Il est meilleur que pour tous les autres portefeuilles de prêt.
Le sénateur Gill: Je parle des réserves.
Mme Rheault: Il n'y a pas de paiements en retard dans mon portefeuille.
Le sénateur Gill: Cela va donner confiance à ceux qui veulent faire affaire avec les Indiens.
Le président: Merci, madame Rheault. C'était très utile.
La séance est levée.