LE POINT SUR LEUROPE :
LES IMPLICATIONS DUNE INTÉGRATION ACCRUE DE LEUROPE POUR LE CANADA
Le comité sénatorial permanent des affaires étrangères
Président : Lhonorable John B. Stewart
Vice-présidente : Lhonorable Raynell Andreychuk.
Novembre 1998
MEMBRES DU COMITÉ
Lhonorable John B. Stewart, président
Lhonorable Raynell Andreychuk, vice-présidente
et
Les honorables sénateurs :
Norman Atkins Consiglio Di Nino
Roch Bolduc Jerahmiel Grafstein
* Bernard Boudreau, c.p. (ou Dan Hays) Derek Lewis
Pat Carney, c.p. Rose-Marie Losier-Cool
Eymard G. Corbin * John Lynch-Staunton (ou Noel Kinsella)
Pierre De Bané, c.p. Peter Stollery
* Membres d'office
Les honorables sénateurs Andreychuk, Bacon, Bolduc, Bryden, Carney, c.p., Chalifoux, Cook, Corbin, De Bané, c.p., Di Nino, Doody, Ferretti Barth, Forrestall, Grafstein, Graham, c.p. (ou Carstairs), Grimard, Johnstone, Kenny, Losier-Cool, Lynch-Staunton (ou Kinsella), MacDonald, Milne, Oliver, Prudhomme, c.p., Robertson, Robichaud, c.p. (St-Louis-de-Kent), Roche, Stewart, Stollery, et Whelan, c.p. étaient membres du Comité ou ont participé à ses travaux sur cette étude durant la première Session de la trente-sixième Législature.
Personnel de la Bibliothèque du Parlement, Direction de la
recherche :
M. Peter Berg, Attaché de recherche
Nota : M. Serge Pelletier était le greffier du Comité pendant la première Session de la trente-sixième Législature jusquau mois de janvier 1999.
Le greffier du Comité
Line Gravel
ORDRE DE RENVOI
Extrait des Journaux du Sénat, du jeudi 14 octobre 1999 :
L'honorable sénateur Stewart propose, appuyé par l'honorable sénateur Adams,
Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères soit autorisé à étudier et à faire rapport sur les conséquences pour le Canada de lémergence de lUnion monétaire européenne et sur dautres sujets connexes en matière de commerce et dinvestissement;
Que les mémoires reçus et les témoignages entendus sur la question par le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères durant la première session de la trente-sixième législature soient déférés au Comité;
Que le Comité présente son rapport final au plus tard le 15 décembre 1999; et que le Comité conserve les pouvoirs nécessaires à la diffusion des résultats de son étude contenu dans son rapport final et ce jusquau 24 décembre 1999; et
Que le Comité soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer son rapport auprès du greffier du Sénat, si le Sénat ne siège pas, et que ledit rapport soit réputé avoir été déposé au Sénat.
La motion, mise aux voix, est adoptée.
Le greffier du Sénat
Paul Bélisle
LES PRINCIPALES PRÉOCCUPATIONS ENTOURANT L'UEM
A. Contexte
B. Retombées
attendues de l'UEM
1. Avantages
microéconomiques
2.
Stabilité monétaire et budgétaire accrue
3. Rôle
international accru de l'euro
4.
Tremplin des réformes économiques européennes
C.
L'UEM - Préoccupations et enjeux
1.
L'UEM est-elle « zone monétaire optimale »?
2.
L'indépendance de la Banque centrale européenne
3. Le mandat
principal de la BCE
4.
Risque accrue dingérence dans les taux de change et le commerce
5.
Incidence sur le secteur financier de l'Europe
6. L'absence du
Royaume-Uni
D. Des répercussions de l'UEM au Canada
A. La
réforme des politiques de l'UE
B. La
réforme des institutions de l'UE
C.
L'élargissement de l'UE
RESSERRER LES LIENS ÉCONOMIQUES TRANSATLANTIQUES
A.
Les relations actuelles en matière de commerce et d'investissement
B.
Améliorer les liens commerciaux transatlantiques
C.
Les relations Canada-UE en matière de pêche
ANNEXE A : CHRONOLOGIE DES RELATIONS ÉCONOMIQUES CANADA-UE
ANNEXE B : TÉMOINS
Depuis dix ans, le Comité sénatorial permanent a passé beaucoup de temps à étudier la situation économique internationale. En juillet 1996, nous avons publié un rapport intitulé « Lintégration européenne : son importance pour le Canada ». Ensuite, nous avons porté notre attention plus à lest et avons déposé, en décembre 1998, le rapport intitulé « La crise en Asie : répercussions sur la région, le Canada et le monde ». En 1999, nous avons eu deux ordres de renvoi, lun portant sur les opérations de maintien de la paix et lautre sur lévolution de la situation économique en Europe. Le rapport que vous avez entre les mains est laboutissement du second. Comme le révèle son titre, il constitue une mise à jour de létude que nous avions réalisée en 1995-1996.
Le présent rapport porte entre autres sur les deux sujets suivants : la réalisation de lunion monétaire dans lUnion européenne et les chances de conclusion dun accord commercial général entre le Canada et lUnion européenne.
Nous sommes redevables aux nombreuses personnes qui ont généreusement répondu à notre appel, à Ottawa et en Europe. Leur opinion et leurs analyses nous ont permis de mieux saisir limportance de ce qui se passe en Europe pour les Canadiens.
Nous naurions pas pu mener à bien notre tâche en Europe sans la précieuse collaboration, dans chacun des pays où nous nous sommes rendus, de lambassadeur du Canada et dun personnel informé et obligeant.
Sur la base des travaux qui avaient été réalisés pour nous en 1995-1996 lors de notre précédente étude des répercussions éventuelles de la situation dans lUnion européenne sur le Canada, nous savions pouvoir compter sur la Direction générale de la recherche de la Bibliothèque du Parlement. Par sa compétence et sa diligence, M. Peter Berg nous a montré que notre confiance était justifiée. Mme Line Gravel, notre greffier, sest acquittée avec une grande compétence de la gestion des opérations administratives, budgétaires et logistiques. Avec son collègue, M. Till Heyde, elle nous a grandement facilité la tâche. À toutes ces personnes, nous tenons à exprimer notre gratitude.
Le président
John B. Stewart
Il y a longtemps que le Comité sintéresse à lévolution de lEurope. Dès 1973, il faisait paraître un document intitulé Les relations du Canada avec la Communauté européenne qui allait être suivi, en 1996, dun rapport approfondi sur lintégration de lEurope et ses implications pour notre pays. Malheureusement, beaucoup des problèmes qui y sont évoqués ne se sont pas réglés avec le temps; cest le cas notamment de la Politique agricole commune (PAC), qui continue de susciter la controverse.
Les étapes récemment franchies, entre autres la mise en place de lUnion économique et monétaire (UEM) et la concrétisation de lAgenda 2000, nous ont poussés à nous pencher une nouvelle fois sur la question de lintégration européenne. Après avoir tenu des audiences au Canada, nous avons entrepris, parallèlement à notre étude sur le rôle du Canada dans lOTAN, une mission denquête sur les problèmes économiques de lEurope. En juin de cette année, nous nous sommes rendus à Londres, Bonn, Paris et Bruxelles pour obtenir des renseignements de première main sur les nouvelles directions prises par lEurope et les conséquences de ce changement à la fois pour lEurope et pour le Canada.
De la masse dinformations quil a recueillies, le Comité a dégagé quelques constatations essentielles. Premièrement, lopération à vaste échelle que constitue lUEM est avant tout destinée à préparer une intégration politique plus poussée, dont les assises économiques ne sont pas encore jetées. À lévidence, les architectes de lUEM ont prévu que ladoption dune monnaie unique déboucherait, à long terme, sur la création dune union politique. On considérait que les avantages économiques de lentreprise seraient en quelque sorte un complément de lunion politique. Nous prenons note des bienfaits attendus de lunion monétaire et des inquiétudes qui y sont associées et, ce faisant, nous nous demandons si le projet économique qui la sous-tend sera une réussite.
Deuxièmement, on a souligné maintes et maintes fois la nécessité de réformes économiques en Europe. Seront-elles réalisées, avec ou sans lUEM? On trouvera dans le rapport présent quelques commentaires sur lutilité de ces réformes.
Troisièmement, il est apparu clairement au cours des audiences que lUEM nest pas une « zone monétaire optimale ». Les États membres en sont à des niveaux différents de développement économique, ils possèdent des structures économiques diverses, et leurs cycles conjoncturels ne sont pas tous synchronisés. Ils pourraient donc avoir besoin de politiques monétaires assez différentes, plutôt que dune politique à « taille unique » comme celle qui est en place. Dautres aspects clés méritent dêtre améliorés dans lunion monétaire : la souplesse du marché du travail, la mobilité de la main-duvre, etc. Il faudrait aussi une autorité financière centrale habilitée à aider les régions aux prises avec des crises économiques graves. Enfin, laide financière fournie par les gouvernements aux particuliers et aux régions touchés par ces crises est limitée par le Pacte de stabilité et de croissance qui continue de guider la politique budgétaire des membres de lUEM.
Quatrièmement, lévolution de la situation monétaire en Europe a déjà déclenché un débat au Canada sur la possibilité dententes monétaires nord-américaines. Pour le Canada, cette éventualité est peut-être la conséquence la plus importante de lUEM, mais nous avons conclu que lEurope et lAmérique du Nord présentaient des caractéristiques trop différentes pour que lUEM puisse nous servir de modèle, bien quon puisse en tirer certaines leçons. Nous y reviendrons.
Cinquièmement, lUnion européenne (UE) a engagé un processus de réforme de ses institutions et de ses politiques. Ces changements sont nécessaires pour que lUE puisse sélargir, pour accroître la confiance de la population européenne dans ses institutions, pour rendre plus démocratique la formulation des politiques de lUE et (le plus important aux yeux du Canada) pour satisfaire lappétit de changement de la communauté internationale (qui souhaite, par exemple, une réduction des subventions versées aux termes de la PAC). De nombreux témoins ont souligné limportance de leffort de réforme de lUE.
Sixièmement, il semble que le principal axe commercial du Canada continue de se déplacer de lEurope vers les États-Unis, le Mexique et dautres parties des Amériques. Le rapport analyse lopportunité de renverser la vapeur et de revitaliser le lien économique transatlantique.
Enfin, il importe de souligner que les avancées de lEurope sur sa trajectoire économique et politique doivent saccomplir dune manière qui tienne compte des aspirations économiques des pays non européens. À lévidence, une « forteresse Europe » ne servirait les intérêts de personne.